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Porte ta Peine Lève ton cœur

Et Marche

Robi Chlo

19.36 667852

----------------------------INFORMATION----------------------------Couverture : Classique

[Roman (134x204)] NB Pages : 248 pages

- Tranche : 2 mm + (nb pages x 0,055mm) = 15.64 ----------------------------------------------------------------------------

Porte ta Peine, Lève ton cœur et Marche

Robi Chloé

Robi

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à Marj, Richard, Jacki et ses deux dames, Dominique, La Callas, Phillipe, Jean, Papy, Robert, Helmunt et Jack Daniel’s, M. au chien, Fred et Tristan, Tcheums, Alain, M.Tendinite, Jacques, Claude, Yolande, André, Serge, Jean-Michel et Marie-Claude, Pierre, Rafaël et son pote, Caroline et Jacqueline, Môssieur, deux Bretonnes et un Hollandais, Vincent, Cyril, Gaëlle, Romain, Ginette, Darius, Anne, Pascale, Thérèse, Pierre, Jean-Luc et Martine, Pauline, Chantal, Marie, Anne-Marie, Mme Masartic, Jim et Maïté, Pioup, Mario, Bernard et sa femme, Pauline, Marcel, Lucia, Rafaël, Laurianne et William, André et Odile, Jean-Luc, Aymeric et Lætita, Christian, Christiane, Michel, Cathy, Cora, Fritz, Christian, Jean-Gaëtan, Eric, Diane, Roger, Michel, M.Roncevalles, João, Maria, Lindsay, Roibin, Heïdi, Dawn, André, Jean-Pierre, Patrick, Hubert-Karl et Aurélie, Barbara et Sergio, Myriam, David et Victor, Israël, Fabbio et Mosquito, Catherine et sa maman, David, Pedro, Karel, Sophie, Alain

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d’Orléan, Laurent, Sam et Miia, Fred et Claude, Marcel et René, Hou Xian, Jean-Marie, Lyonnais, Antonio et Miguel, Jordì, Andrea et Dinesh, Vanessa, Gérard, Denis, Stéphane, Chris, Justine, Deux Bretons, Jackie et Bernard, Michelle, Pèlerin amoureux, Carlo, Thomas et Aude…

Matilda, Armand et Mamounette

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LE SAC À DOS POUR LE GRAND DÉPART

Sac à dos Millet, vert pomme, acheté chez Le Vieux Campeur pour une centaine d’euros.

13 kg

À portée de main, poche du dessus :

téléphone et chargeur crème solaire coquille Saint Jacques couteau suisse lunettes de soleil lampe frontale gourde 1.5L casserole pliable portefeuille contenant : crédencial1, CB, CV, CI, mutuelle

1 Crédencial : passeport du pèlerin. A chaque étape, un tampon. Preuve de son avancée.

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Dans sac à dos :

couverture de survie pantalon serviette et gant Miam Miam Dodo2 3 paires de chaussettes Damart doudou casquette brassière débardeur 4 culottes polaire duvet tente matelas

nourriture : figues, abricots, barres de céréales (deux boîtes), pain et autres trucs salés.

pharmacie contenant : savon, stick à lèvres, pansements, désinfectant, élastiques pour cheveux, protections hygiéniques, brosse à dents, dentifrice, fil et aiguille, coupe ongles, pince à épiler, pilule.

Sur moi :

écharpe débardeur pantalon chaussettes culotte veste à capuche chaussures Quechua Décathlon

2 Miam-Miam Dodo : livre où sont répertoriés les endroits pour dormir et manger (gîtes, campings, hôtels, supérettes, restaurants…)

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LE SAC À DOS POUR LA PETITE ARRIVÉE

6 Kg

À portée de main, poche du dessus : téléphone et chargeur couteau suisse gourde 1 L lunettes de Soleil lampe frontale

Dans sac à dos : pantalon serviette et gant

Damart paires de chaussettes

doudou culottes matelas

débardeur (différent des autres)

duvet

pharmacie contenant : savon, stick à lèvres, protections hygiéniques, brosse à dents, dentifrice, fil et aiguille, coupe ongles, pince à épiler, pilule.

Sur moi : écharpe pantalon

débardeur chaussettes

culotte chaussures Queshua Décathlon

veste à capuche

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À écouter tout au long de ce livre :

France :

(a capella) Maxime Leforestier : La Fugue d’Autrefois, La Maîtresse d’École Michel Delpech : Le Chasseur, Quand j’étais chanteur Brassens : Le Gorille, Margotton, L’Orage Diane Tell : Si j’étais un Homme Starmania : La Serveuse Automate Renaud : à peu près tout le répertoire Edith Piaf : La Vie en Rose, Milord, Padam Oldelaf : Le Café, Bérénice, Le Gros Ours Ultreïa3

Espagne :

(à écouter) Eddie Vedder : Into the Wild Beatles : The Beatles 1

3 Ultréïa : expression datant du Moyen-âge, liée au pèlerinage, signifiant : Toujours plus loin, toujours plus haut.

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Ben Oncle Soul : Soulman

(a capella) Beatles : Yes-No, Submarine, Hard Days Nights Carla Bruni : Quelqu’un qui m’a dit, remix espagnol Rouget de L’Isle : La Marseillaise Starmania : La serveuse Automate Oasis : Wonderwall Gainsbourg : Je T’Aime Moi Non Plus Mécano : Hijo De La Luna Manu Chao : Me Gustas tu

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Ça fait un sacré moment que je suis rentrée.

Depuis j’essaie de vous raconter mon voyage. J’ai lu bien des fois : il n’y a qu’aux pèlerins que l’on peut parler du Chemin.

C’est triste. Mais c’est vrai. Combien de fois ai-je tenté d’en parler avec vous ?

Bien des fois. Et assez vite je me tais, car les questions que j’attends de vous ne viennent pas. J’ai tellement peur de vous emmerder avec mes histoires, mes anecdotes. Si j’entends prononcer les mots : Chemin, Compostelle, Santiago, kilomètres, sardines ou chaussettes… je m’autocensure : « Halte là ! Alerte rouge !! Tout le monde se fait chier !!! ».

De temps en temps je sais que je me rabâche. Je peux ne pas m’en empêcher. Et vous savez pourquoi ? Parce que la première chose qui m’a été confirmée sur le Chemin, c’est le partage. Je veux partager ça avec vous. Et vous savez pourquoi je veux partager ça avec vous ? Parce que je sais. Oui, oui je sais, c’est terriblement prétentieux. Parce que c’est terriblement vrai.

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Bon j’ai essayé de communiquer de façon orale mon voyage : ça n’a pas fonctionné. Personne ne m’écoute, je ne vous en veux pas. Je vous comprends.

Alors je me suis cassée le cul à faire un album photos (qui ne sont pas de moi soit dit en passant) « Il est beau ton album » Ouais merci… si je te montre ça, c’est que j’ai besoin de tout te raconter… vas-y pose une question… allez tac au tac… suis au taquet là… go ! « Ça bave pas ces stylos » Tant pis. Je vais kiffer toute seule sur mon Épopée Lactée.

Alors j’essaie d’écrire. Pour moi dans un premier temps. Je lis, au fur et à mesure à Armand. Il me booste, me dit ce qui passe ou pas… puis j’arrête.

Pauvre Armand, il subit. Je lui parle du Chemin. Dès que je prononce un des mots interdits (chaussettes, sardines…) je craque et me mets à parler. Ce qu’il doit se faire chier.

Dans un deuxième temps j’écris pour la revue de l’association des pèlerins de Rhône-Alpes, qui publie mon Ode à mes pèlerins, à mes hôtes et au Chemin. Ça ne me suffit pas. Alors je regarde mes photos, mes souvenirs et je relis mon journal. J’ai écrit cent sept pages.

Au début j’écris tout joli, droit, large, lisible. Plus on avance, plus ça s’anarchise. J’écris tout petit, tout serré et en abrégé pour que ça tienne moins de place. Ce changement note tout à fait le cheminement que je suis en train de vivre. Tous les moyens sont bons pour se sentir mieux et économiser des forces. Mon

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journal, c’est pareil : niquel, propre, sacré. Plus on avance plus on s’en fout… on arrache même les pages. La chose la plus sacrée devient banale. Tout est désacralisé, tout reprend sa place.

L’important n’est pas que j’écrive dans un cahier où il ne manque pas une page, qui soit complètement vierge et dans lequel je vais m’appliquer à faire de belles lettres rondes.

L’important c’est d’écrire. L’important ce n’est pas de marcher avec des

chaussettes assorties au pull et qui sentent la rose. L’important c’est de marcher. L’important ce n’est pas Santiago. L’important c’est le Chemin.

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Préparations

Je suis partie le 12 Mai 2011 du Puy-en-Velay. À huit heures du matin, Pop, un ami de ma promo, me pose au lieu de mon rendez-vous que nous nous sommes donné avec Marj. Nous nous sommes rencontrées sur un site Jacquaire. J’ai posé une annonce pour ne pas partir seule. Mais avant elle il y a eu d’autres appels :

– Bonjour mademoiselle. Je vous appelle pour l’annonce que vous avez posé. Je me suis dis qu’on pourrait partir tous les deux.

– Euh… oui… Vous voulez partir quand ? – Of… comme vous. – Mais vous êtes prêt ? – Oui oui. Enfin je crois. Je ne me suis jamais

renseigné sur St Jacques. Qu’est-ce qu’il faut ? – Ben… des tas de choses. Des adresses, des

chaussures de marche… – Ah bon ! Mais si on part tous les deux on fera

tout moit-moit.

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– Moit-moit ? – Ça veut dire moitié-moitié. Chez nous dans le

Nord, on dit moit-moit.

Chez nous aussi Ducon. Heureusement Marj a appelé. La veille du départ elle m’avait dit qu’elle avait fabriqué une chariotte pour ne pas porter son sac. Je la repère donc facilement le matin du rendez-vous. Nous faisons nos adieux et nous y allons. Et nous nous perdons. On râle « Y’a pas une coquille par terre !! ». Je ne sais comment nous nous retrouvons sur une départementale, nous décidons de faire demi-tour lorsqu’il n’y a plus de goudron où marcher. Nous montons. Sinon c’est pas drôle ! Nous montons et on se trompe. Alors on redescend. J’ai mal au dos alors Marj propose de poser ma tente sur sa chariotte. Je décline cette offre des plus attrayantes et je me persuade qu’il faut que je m’habitue. Quand elle me propose une seconde fois… Tout de même, sans la tente, j’ai des ailes.

C’est un monsieur qui tond une pelouse qui nous indique gentiment le Chemin. Évidemment, ça monte et nous tombons sur un joli panneau COMPOSTELLE 1600km.

Pour une première demi-heure de marche ce n’est pas une réussite. Nous arrivons, non sans mal, au plateau du Puy. C’est tout à fait comme un chemin de montagne, étroit et plein de cailloux. Fini la ville et « bonjour » Nature. Et qui dit Nature dit… PLUIE. Une demi-heure de marche, à 1600km de St Jacques

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et nous sortons déjà les ponchos. Nous sommes deux. Nous marchons ensemble.

Donc on fait des concessions. J’aide Marj à mettre une bâche bleue pour protéger son sac qui n’est pas étanche. Nous sommes au beau milieu du Chemin, à tirer les tendeurs dans tous les sens pour bien fixer la bâche à la chariotte et nos ponchos qui gênent tous nos mouvements. Chaplin n’aurait pas fait mieux.

Quand le Chemin devient caillouteux je me mets à l’arrière pour soulever la chariotte. Je ne vois plus mes pieds et je me prends tous les cailloux… les pierres pardon. Au bout d’un certain moment, je craque, je dis à Marj qu’il faut que j’avance, je la laisse tomber et me v’là partie. Et je fonce, m’en tape du paysage. Je veux du plat et plus de cailloux. Et je craque aussi quand je vois la caravane-bar sur le bord du Chemin.

C’est un monsieur que j’ai rencontré chez Pop qui le tient. Je m’assois et j’attends Marj, qui arrive dans un état second. Le monsieur la regarde avec de grands yeux :

« Regardez-moi ça ! Vous n’arriverez pas à aller bien loin avec ça, je vous le dis. C’est la première fois que je vois ça. Refaites vôtre sac, donnez moi tout ça. Je pose le tout chez l’ami de mademoiselle et vous y récupérerez quand vous reviendrez. »

Mais Marj ne veut pas. Moi, perso, je craque complet de la chariotte. Qu’elle prenne sa décision, je ne dit rien mais n’en pense pas moins. Alors le

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monsieur s’occupe de moi, il me règle mon sac et sert toutes les ficelles. Mais on a beau tout serrer, la ceinture ne se pose pas sur mes hanches, je suis trop fine. Je prends ma polaire, je fais un gros boudin avec et me l’entortille autour des hanches. Mon sac n’appuie plus sur mes épaules, je me sens toute légère. Seule j’entre dans le village de Saint-Privat-d’Allier. Je me pose sur le premier banc venu et je jette chaussures et chaussettes aux quatre vents. Je remarque que j’ai perdu pieds et hanches en route. Voilà Marj qui arrive « Je crois que j’ai une tendinite ».

Je relis tout ce que j’ai écrit et je me dit : heureusement qu’on n’a pas de recul. Ça ne donne pas franchement envie et ça blase même un peu. Mais sur le Chemin il n’y a pas de hasard.

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Richard 106,5 km

Nous allons au camping, non loin du Chemin (détail qui sera par la suite des plus importants). L’accueil est formidable. La dame nous parle des pèlerins qu’elle voit passer, nous demande comment nous nous sentons après cette toute première étape, nous propose des couvertures pour la nuit. Il y a là Richard, un lyonnais de quarante-six ans. C’est son deuxième jour dans le camping. Il est parti sur le Chemin comme ça, comme une envie de pisser, pour changer d’air.

Depuis deux jours il lit et se balade seul dans les bois. Nous discutons tous les deux, il m’offre quelques cigarettes et nous décidons de manger ensemble. Richard veut faire du feu. Je lui rappelle qu’il a plu, le bois est certainement trempé. Mais Richard ne veut rien savoir, il veut faire du feu, ça lui rappelle des souvenirs. Et puis il a envie de pâtes. Marj propose son réchaud… rien n’y fait. Sur la table en bois vermoulu du camping, nous posons nos victuailles. Et

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je vois Richard poser une petite collection de pots en verre : pâté, sel… des assiettes, des couverts et autres boîtes. Quand je vois tout ça sur la table, je lui demande combien pèse son sac : dix-huit kg. Il me dit que sa tente est une tente deux secondes, lourde et pas pratique à porter. Il a huit tee-shirts, quatre paires de lunettes et quelques livres.

Avec Richard, on parle du pourquoi nous sommes là, de ce que l’on attend de la société, de la politique et de religion. Il m’explique qu’il a relu la Bible et qu’il a compris, que la foi était revenue. Il prêche l’amour en me proposant un pétard. Il ne comprend pas que l’Homme refuse de voir que l’amour est la réponse à tout. Richard est alcoolique. J’écris est alcoolique parce que l’on ne guérit pas de cette maladie. Il ne boit plus, mais je comprends les pétards. Je serai la seule de notre Chemin à savoir que Richard ne boit plus d’alcool. Richard est le premier alcoolique sevré que je rencontre… de ma vie.

Pendant que nous refaisons le monde, Marj a appelé son copain, elle craque de la chariotte, alors il va venir la chercher. En l’attendant elle refait son sac, puisqu’elle va le porter et je découvre que sa trousse de toilette vide, pèse l’équivalent de trois paires de chaussettes. Lorsque que son copain arrive, ils restent ensemble et ne viennent pas se joindre à nous autour du feu, à se cailler les miches. Je suis tout de même crevée, alors sous la tente à 21h. Inutile de vous dire que je ne dors pas de la nuit tant j’ai froid. Je regrette