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Mise en lumière d'un paysage. La terre incisée

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Page 1: PFE Judith Rojon 2015
Page 2: PFE Judith Rojon 2015

«Le but essentiel de la construction,

de l’architecture, est celui de

transformer un site en un lieu, de

découvrir les sens potentiels qui

sont présents dans un milieu donné

à priori.»

Christian Norberg-Schulz

Genius Loci

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JUDITH ROJON

Mise en lumière d’un paysage

Projet de f in d’étude Févr ier 2015

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I.

II.

III. Du territoire à MortmoulinVers une définition plus claire du projet

Avant-propos

Une entrée dans la matière

Situation géographiqueLe territoire : la Plaine de Versailles

Vers un premier constat

1. L’occupation du sol

2. Le choix du site

1. Ramifier les réseaux La question du programme et des usages

2. Le paysage, valeur collective pour réunir Moteur du projet

3. Appréhender et ordonner la spatialité du lieu Occupation du site

Construction d’un imaginaire : le projetIV.

1. Repère statique dans le paysage

2. Epaississement du paysage : une topographie habitée

4. Matérialités et sensations : de l’imaginaire au construit

3. Réalité structurelle, du macro au micro De la perception lointaine à la pratique intime

Un mot pour la fin

Une architecture qui part des choses qui revient aux choses

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« Lorsqu’on rencontre un lieu, son

unité a pour premier visage une

atmosphère. Chacun sait qu’un lieu

excetionnel se caractérise par une

atmosphère ineffable qui émane

de chacun de ses éléments et lui

confère une personnalité propre,

une âme. »

Christian Norberg-Schulz

L’Art du lieu

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Mortmoulin, c’est une atmosphère, une étendue. C’est un paysage en creux. C’est une invitation à la promenade, à la flânerie, au beau milieu de champs, de chemins, le long du ruisseau et des forêts séparant les espaces habités éparpillés à l’horizon. Un chemin borde le ruisseau dans tout son parcours. Les versants nord et sud des collines qui se déploient de part et d’autre de ce creux apparaîssent comme un jardin pensé et soigné par l’homme. Le paysage est en chantier, la terre enregistre nos passages et change de couleur suivant les saisons, plantée par plusieurs essences. Les matinées d’hiver, le soleil levant donne une texture rosée au paysage. Au paysage agricole poli par le travail des hommes succède la masse végétale indisctincte, l’immensité verte des collines. Quelques repères disséminés

Mortmoulin Yvelines, 78450

Entrée en matière. Une vision des choses.

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ici ou là font remarquer davantage l’ampleur de ce paysage : une ferme, le ruban gris de la route qui recouvre le relief valloné, les champs. Sur le fond du paysage se distingue une silhouette de village, Chavenay.

Au milieu, dans le creux de ce paysage, entre la route et la ville, le projet enjambe le ruisseau. Cette tache claire troue la continuité naturelle des champs et incise le paysage d’un bout à l’autre. C’est une architecture lumineuse, insolante de rigueur, une machine agricole. Arrivé à sa hauteur, le chemin qui nous accompagnait jusqu’ici se couvre d’un grand toit, constitué de plans et de lignes, découpant l’étendue du paysage, et de terrasses et patios où se fige le soleil. Passé cela, la nature à nouveau s’ordonne et se fait jardin. On se dirige alors vers le village endormi.

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Gauche : photographie de Mario Giacomelli, Paesaggio 2, 1968Droite : photographie de maquette 1/1000 - le projet dans le site

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Situation géographique

48°51’17.2’’N 1°58’02.2’’E

I.

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L’unique «poche verte» de la banlieue ouest parisienne, dans la continuité de l’axe symbolique du château de Versailles.Source : Google Maps

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La Plaine de Versailles dans les Yvelines, banlieue ouest.Source : iau-idf.fr

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Un territoire suscite mon intérêt pour le projet de fin d’étude : i l se situe dans le département des Yvelines dans l’ouest parisien, cadré précisément dans la continuité de l’axe symbolique du château de Versailles à l’est jusqu’à la vallée de la Mauldre à l’ouest (communes de Beynes, Maule). Ce territoire regroupe 24 communes sous le nom de la Plaine de Versailles.A seulement 20km de Paris, l ’originalité de ce territoire réside dans la cohabitation d’espaces hétérogènes dans leurs échelles (internationale, nationale, régionale, locale), dans leur usage (agricole, industriel, commercial, culturel), dans leur mode d’occupation du sol (grandes surfaces de terres cultivées ou zones urbaines saturées).Le territoire fonctionne donc comme la

Le territoire

La Plaine de Versailles

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juxtaposition de plusieurs «plaques» programmatiques disparates. Les grands espaces agricoles (qui constituent 60% du territoire et la seule « poche » verte de l’ouest parisien) fabriquent de grandes surfaces cultivées et dépeuplées qui alternent avec des villes intermédiaires se développant sur des registres très différents. Par exemple, la vil le touristique et culturelle de Versailles et son château mondialement connu, la vil le économique et industrielle de Poissy avec l’usine PSA, la vil le commerciale de Plaisir regroupant toutes les plus grandes chaînes de distribution (dont le siège de Ikea). Enfin, des petits bourgs de moins 2000 habitants témoins du caractère très rural et pittoresque de la région côtoient ces vastes espaces contrastés, confortant ainsi l ’ idée de la composition irrégulière du territoire.

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Carte IGN du territoire d’étude, dans le prolongement du châeau de Versailles et limité par la Seine au nord.

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Poissy

Plaisir

Les Mureaux

Saint-Germain en Laye

La Seine

Paris >

Versailles

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Densité - milieux habités

Eléments naturels structurantsForêts, fleuves, ruisseaux

Loisirs de plein airAérodromes, golfs, centres équestres

Equipements de grande échelleCentre militaire, usine, lieux touristiques, INRA

Eléments articifiels structurantsRoutes, autoroutes, chemins de fer

Centres agricolesFermes et ventes des produits à la ferme

Juxtaposition de plaques programmatiques d’échelle et d’usages hétérogènes.

Vide inhabitésEspaces agricoles cultivés

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Mortmoulin

Poissy

La Seine

Saint-Germain-en-Laye

Versailles

Plaisir

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Dans cette grande hétérogénéité, certains acteurs témoignent d’une volonté générale de mise en commun, de contact, de dialogue, pour établir un «vivre ensemble» et exprimer l’originalité et l’image de leur territoire. Elle prend forme sur plusieurs échelles.

- Échelle régionale : Regroupement des 24 communes au sein de l’association la Plaine de Versailles en 2004. Sous-regroupement de 11 communes au sein de l’intercommunalité Gally-Mauldre en 2013, les 13 communes restantes se répartissent au sein de 5 autres intercommunalités. Chacune d’entre elles est dotée d’un schéma de cohérence territorial (SCOT) qui détermine leur stratégie de développement et les actions territoriales. - Échelle locale : Ouverture des fermes locales aux habitants des communes alentours et aux professionnels de la région et de Paris (restauration, lycée et collèges); dialogue de l’Institut National de Recherche Agricole (INRA) avec les agriculteurs locaux pour les sensibiliser à la protection de la biodiversité présente sur leurs

Vers un premier constat

1. L’occupation du sol

II.

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terres agricoles afin d’établir de nouvelles pratiques adaptées; sensibilisation à la fragilité de l’environnement à travers des parcours sur l’eau (à Beynes), dans la forêt (à Marly le roi) ouverts aux scolaires et au grand public.

On s’aperçoit donc que les initiatives sont nombreuses, témoignent toutes d’une nécessité d’échanges et de dialogue et impliquent des acteurs très variés (communes, organismes, habitants, scolaires). De plus, ces initiatives touchent les mêmes thématiques : celles de l’occupation et la mise en valeurs du sol pour une identité rurale plus forte.

Cependant, malgré les tentatives foisonnantes et l’énergie qui s’en dégage, ces actions restent cloisonnées et circonscrites à leur niveau. Chaque acteur, toutes échelles confondues, pose la question de son rapport au territoire dans un discours et une action qui lui est propre, pour la résoudre immédiatement à son échelle. La juxtaposition des espaces territoriaux produit donc aussi la juxtaposition des initiatives.

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Cet éparpillement de réponses pourrait poser la question d’une éventuelle synthèse possible afin de proposer une réponse à la fragmentation de ce territoire, de reconnecter les énergies, bien présentes, mais segmentées, et d’en faire bénéficier tous les acteurs impliqués. A l’image d’une feuille, le projet a pour objectif de devenir un catalyseur d’activités et de personnes. Les habitants dans leur quotidien, les enfants, les étudiants, les agriculteurs, restaurateurs, hoteliers, entrepreneurs et les touristes de passage, seraient alors concernés par des mêmes préoccupations et convergeraient vers un même lieu d’échanges et d’interactions. Cette démarche de ramification pourrait changer non seulement notre manière d’utiliser l’espace mais aussi nos habitudes quotidiennes de vie, et aurait donc un réel impact sur les mentalités de ses occupants.

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Dans quel lieu cette volonté de stimuler les réponses locales des différents acteurs pourrait-elle se concrétiser ?

Les initiatives entreprises jusque là se localisent dans des lieux dynamiques, occupés et habités, comme les fermes, les villages, les villes. Ceux-ci sont émiettés dans un vaste paysage de terres cultivées (représentant, rappelons-le, 60% du territoire) qui constituent des « plaques vides » de présence et occupation humaine, ressenties comme une temporalité parallèle à ces espaces vécus d’où proviennent les initiatives de dialogue. Elles constituent de vastes surfaces « endormies » qui éloignent et séparent les villages, les écoles, les agriculteurs, en freinant leur contact.

Pourtant ce sont bien ces surfaces agricoles qui condensent en elles-mêmes les préoccupations des acteurs du territoire : - Non seulement la question du sol

2. Le choix du site

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(la biodiversité et richesse des ressources, l’économie agricole intense et productive, les métiers liés au sol, la protection de la nature.) - Mais aussi d’autres thèmes directement touchés par cette question comme les habitudes des occupants, les modes d’habiter, de se déplacer sur ce territoire (l’utilisation intense de la voiture, l’achat de produits directement fabriqués sur le territoire).Ces espaces «vides» représentent vont nous intéresser pour deux raisons.

1. Occupant l’espace entre les zones habitées actives (villages, fermes, villes, routes), ils se situent géographiquement au milieu des différents acteurs concernés et placent l’intervention dans un épicentre stratégique répartissant les différents acteurs à équidistance.

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2. Ils sont bordés par des axes très fréquentés qui distribuent diverses échelles. En effet, les routes départementales desservent aussi bien des grandes surfaces (Ikea), des aires de sport et de loisirs (centres équestres, aérodromes), des domaines universitaires (INRA de Grignon), des fermes locales (Maison Gaillard). Ces axes constituent une première ramification concrète des différents acteurs et permettent d’irriguer immédiatement l’espace d’intervention de flux très divers.

Nous nous intéressons donc à ces sites dans le sens ou ils constituent des nœuds potentiels d’intervention : des espaces où se croisent les énergies, flux, programmes. Vide de toute présence et occupation humaines, ce sont des lieux en attente qui présentent les énergies pour devenir des lieux « condensateurs », « activateurs » du territoire.

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Propagation, ramification

Katie Holten, Etc, 2005

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Chavenay

Feucherolles

Davron

Thivernal-Grignon

Plaisir

Les Clayes-sous-Bois

Villepreux

Saint-Nom-la-Bretèche

Mortmoulin

D30

Ru de Gally

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Il constitue un nœud infrastructurel car les différents axes de communication qui le bordent créent les racines du projet et constituent une première ramification concrète du site aux acteurs alentours, de la grande échelle (D30) mais également de la plus petite (entrée de la commune de Chavenay, promenade piétonne le long du Ru).Puis, il constitue un nœud programmatique, puisque isolé des villages alentours, il constitue le barycentre au milieu de 8 communes d’initiatives et de rayonnement divers (Plaisir, Chavenay, Feucherolles, Grignon, Saint-Nom la Bretèche, Davron, Villepreux, Les CLayes-sous-bois). Tous ces milieux habités se situent dans un périmètre de moins de 4 kilomètres.

Du territoire à Mortmoulin

Aujourd’hui vide de présence humaine et simple lieu de passage, Mortmoulin constitue un de ces lieux potentiels condensateur du territoire.

Vers une définition plus claire du projet

III.

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Nous souhaitons donc faire de Mortmoulin un centre de ramification des initiatives locales et un espace consacré à la réunion, la réflexion commune et l’expérimentation.

Nous souhaitons ancrer le projet dans ce site. Pour cela nous explorerons «l’usage du lieu»1. Cette expression recouvre non seulement l’utilisation des espaces dans lesquels nous allons opérer, soit le programme du projet, mais également celle du lieu en tant que totalité, soit le paysage, acteur principal du lieu et qualité intrinsèque du site. D’abord, le terme «programme» signifie pour nous des actions simples et fondamentales, comme l’arrivée, la rencontre, la réunion, mais aussi le retrait, l’isolement. Ces actions nous permettront de penser le programme architectural du projet, traduit par la suite d’une manière concrète avec des «équipements» et des surfaces. Puis, nous souhaitons étudier ces usages toujours en relation au paysage et au site dans lequel elles s’inscrivent, afin que le projet prenne corps dans son environnement.

Ces deux éléments agissent en dénominateurs communs dans la pensée du projet et nous permettront d’habiter le lieu.

1. Expression de Christian Norberg-Schulz dans son écrit L’Art du lieu.

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Maquette en argile, 1/25 000e, Mortmoulin au centre

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Feucherolles

Chavenay

Saint-Nom la Bretèche

Davron

Thivernal-Grignon Villepreux

Plaisir

Les Clayes-sous-Bois

< 2Km

< 4Km

Mortmoulin

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Feucherolles

Chavenay

Saint-Nom la Bretèche

Davron

Thivernal-Grignon Villepreux

Plaisir

Les Clayes-sous-Bois

< 2Km

< 4Km

Mortmoulin

Mise en réseau proche du projet, reconnection des lieux

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« Lors de la halte qui succède à l’arrivée, la rencontre devient séjour et réunion. Cela se produit sur la place ou au marché. «Place» est un autre terme pour lieu, quelque chose qui indique que l’on a touché au but. Sur la place, la multiplicité se rassemble et s’offre en tant que proximité et perspective, tandis que le choix devient participation. Mais pas plus que la rencontre, la réunion ne suppose d’emblée l’accord; une réunion peut être faite de contemplations et de méditations qui instaurent une certaine distance. Disons, alors, que la rencontre est une réunion de diversité.

Christian Norberg-Schulz

L’Art du lieu

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1. Ramifier les réseaux

La question des usages et du programme

Il s’agit de réunir des personnes très différentes les unes des autres sous un même toit et de leurs proposer un lieu où partager et expérimenter.

Le projet se veut à la fois protecteur de son environnement, et à la fois porteur dans l’économie de son territoire. On lui confèrera donc ce double rôle dans ses usages : celui d’entretien et gardien du paysage associé à une mission économique liée à l’acte de produire et d’échanger. Nous considèrons donc le bâtiment comme un lieu pédagogique ET comme un instrument de production. Il faut que l’on puisse voir ce que l’on y produit et qu’on comprenne pourquoi il est là. C’est cette volonté qui guidera la définition concrète du programme du projet.

Le programme se composera dans son paysage comme une promenade continue, d’un bout à l’autre et parcourant les différents usages. Il développera son parcours en trois temps :- Deux lieux démonstrateurs, pédagogiques, marquant le début et la fin du parcours du projet (A)

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1. Ramifier les réseaux

- Un espace d’expérimentation et d’échanges, au centre dans la continuité des deux premiers (B).

Les deux lieux démonstrateurs constituent des lieux potentiels d’entrées ou de sortie possible dans le projet, des points de départ dans la promenade du site.Le premier est un espace d’exposition lié à l’identité du territoire et à son environnement, Il comprendra un musée agricole et une maison de l’environnement, l’un lié au caractère rural du lieu, l’autre à son environnement fragile. Il prendra 1210 m2 de surface dans le projet. Le second lieu démonstrateur du projet

A A’B

A . Lieux démonstrateurs. Entretien du territoire

Lieux d’exposition et usine de recyclage.

B. Lieux expérimentaux et commerciaux. Mission économique

Ateliers, laboratoires, marché

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consiste en une unité de méthanisation, soit un pôle de composte et de recyclage des déchets «verts», produisant de l’énergie, sur une surface de 6000 m2. Cette énergie pourra être redistribuée au projet sous forme de chaleur et d’électricité pour chauffer et alimenter les cuves de composte et le reste des espaces du programme. Cette usine ne doit pas être pensée juste comme une enveloppe industrielle neutre avec une façade représentative, mais un lieu de travail inscrit dans le paysage , et visitable par le public. La volonté est de placer l’espace d’exposition et l’usine tout deux au rang de «musée», ouverts au public pour que l’on puisse comprendre les moyens de productions du territoire, le fonctionnement du site, à grande et petite échelle. L’espace au centre du parcours constitue quant à lui un espace d’expérimentation et d’échange faisant du projet une machine économique. Celui-ci comprend deux halles de marché de 800 m2 chacunes, permettant l’exposition d’une treintaine de producteurs différents. Ce marché permet de réunir les dizaines de fermes locales alentours et leurs productions, ainsi que d’autres marchands comme les bouchers, fleuristes ou fromagers de la région. L’architecture de ces deux halles est pensée pour être un grand réceptacle aux échanges entre particuliers, habitants et agriculteurs, ouvert et lumineux.

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Nous souhaitons que ces deux halles puissent accueillir d’autres évènements plus ponctuels et temporaires tels que des marchés thématiques ou des évènements saisonniers. L’idée est que l’architecture serve d’arrière plan aux activités humaines, fluctuantes selon les jours, les saisons, le climat.On ajoutera à cela des ateliers de travaux manuels et de formation destinés aux habitants, leurs permettant des rencontres avec des professionnels et les sensibilisant à l’acte de produire (jardinage, bricolage, pour petits et grands). Ils représentent 800 m2 de surface dans le projet, et sont constitués d’ateliers liés à des espaces communs partagés contenant les établis, machines, outils. Ces ateliers de productions jouxtent des laboratoires de recherches destinés aux chercheurs de l’INRA. Ceux-ci emploient la même typologie que les ateliers sur 800 m2 : chaque laboratoire est couplé à un espace commun partagé contenant les outils de travail et intègrant en plus les espaces techniques nécessaires. Nous souhaitons que ces programmes cohabitent tous sous un même toit et se tournent vers l’échange et l’expérimentation. Cette partie de projet est pensée comme une grande interface continue, une place publique, où coexistent différents usages, aussi uniques et différents soient-ils.

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Ce vaste programme constitue donc une surface totale de 10 000 m2 répartie d’une manière continue sur le site. Le tout permet de créer une déambulation cyclique dans le projet, passant d’un lieu démonstrateur, au lieu de commerce, d’expérimentation etc. Il est fédéré par un lieu particulier, constituant un évènement au sein de ce programme rigoureusement réparti et pragmatique. Ce lieu particulier est le lieu partagé de la communauté; le restaurant de 345 m2, l’espace de repos de 230 m2 et l’espace de réunion et débat de 150 m2. La volonté consiste à regrouper cette communauté autour d’un noyau commun, organisé entre bâti et paysage. Il prendra pour cela la forme d’un espace centré autour d’un patio, petit vide enfermé dans un grand vide, celui du territoire. Nous souhaitons que l’ensemble des occupants convergent vers ce centre, dans leurs temps de pause et de repos, entre deux activités dans l’après-midi, dans des réunions en fin de journée, ou pour les promeneurs de

BA A’

Evènement dans le programme, le rythme change, point de convergence

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Patio central NY Time Building

Renzo Piano

passage traversant le site. Nous voyons cet espace central comme une irrégularité dans l’ensemble réglé du progamme : les espaces deviennent plus larges, peut-être plus ouverts et transparents, il n’y a plus de portes et on ne discerne plus l’intérieur de l’extérieur.

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Le projet abrite sous un grand toit ces éléments de programme. Très différents les uns des autres, chacun sollicite à son niveau et son échelle les acteurs alentours. Par exemple, l’alimentation de l’unité de méthanisation nécessite l’apport de matières premières proches, comme les déchets verts des communes, les boues des stations d’épurations, les déchets des centres équestres et les résidus agricoles des fermes. Le fonctionnement de ce programme permet de ramifier différents lieux à l’origine autonomes et isolés. Nous souhaitons que le projet fonctionne avec son propre réseau d’équipements et d’acteurs, non pas dans un esprit de concurrence mais de cohabitation. Il crée ainsi une chaîne de lieux remarquables connectés entre eux.

Ces chaînes se constituent non seulement des acteurs et du projet, mais également des espaces «vides» situés entre ces différents pôles actifs. Nous imaginons alors ces «vides», espaces naturels

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dépeuplés, comme des interfaces pour les échanges et les circulations au sein des réseaux. Ils constituent également des espaces publics potentiels, servant de transition entre un pôlet et le suivant. Par exemple, le Ru de Gally concentre le long de son lit de nombreux programmes sollicités par le projet: l’INRA, les stations d’épuration, le projet en lui même, les écoles de Chavenay, le ferme de Mezu. Les interstices entre ces pôles deviennent propices à l’aménagement d’espaces publics, d’une promenade continue le long de la rivière, qui permettrait de relier les différentes parties du projet avec un sentier pédestre. Les «vides» du territoire deviennent donc indispensables pour l’intéraction des différents programmes du territoire et du projet.

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Feucherolles

Chavenay

Saint-Nom la Bretèche

Davron

Thivernal-Grignon Villepreux

Plaisir

Les Clayes-sous-Bois

< 2Km

< 4Km

Mortmoulin

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Feucherolles

Chavenay

Saint-Nom la Bretèche

Davron

Thivernal-Grignon Villepreux

Plaisir

Les Clayes-sous-Bois

< 2Km

< 4Km

Mortmoulin

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Fermes et ventes locales

INRA et ferme expérimentale de Grignon

Réseaux direct de l’unité de méthanisation : les matières premières

Communes alentours

Centres équestres

Stations d’épuration

Fermes et vente locale

Réseaux du reste du projet - marché, laboratoires, ateliers, musée

Communes alentours

Ecoles, lycées

Chaîne de lieux du projet et d’espace naturels publics

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2. Le paysage, valeur collective pour réunir

Moteur du projet

Il s’agit avant tout d’un lieu marqué par l’étendue du paysage qui l’entoure. Le paysage agricole est l’acteur principal du site. Il se constitue de vastes champs cultivés dans lesquelles s’émiettent les villes, villages et fermes du territoire. Les routes s’y déploient tels des rubans permettant de coudre entre eux les espaces habités disséminés.

Ce paysage devient la matrice du projet, son infrastructure.

Nous considérons donc le paysage, non pas comme un horizon dans son étendue, mais dans son épaisseur. Le paysage se structure par un chevauchement de strates. Celles-ci se composent de plusieurs matérialités.

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La terre

Le matériau de base soumis aux mouvements et au climat. Elle est riche de potentiel puisqu’elle constitue le substrat à l’origine de la fertilité des sols et de la germination créant ainsi une nouvelle strate végétale qui se régénère continuellement. La terre ne compose pas une surface mais une épaisseur stratifiée, géologique, qui crée de la topographie structurant le site. Le projet se situe dans le creux d’une vallée, à la jonction de deux versants opposés, nord et sud. Ici, le relief nous accueille comme dans le creux d’une main. On y cultive du colza, de l’orge, du blé et du mais, ce qui colore le sol de textures variées.

Mario Giacomelli, Paesaggio 5, 1969

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L’eau

Le Ru de Gally entoure le site et prend la forme d’un cordon reliant Mortmoulin aux villages voisins et au reste du territoire. En effet, le Ru prend sa source dans la vallée de la Mauldre (à l’extrême ouest de la Plaine de Versailles) et achève sa course dans le jardin du château de Versailles, traversant entre temps plusieurs fermes et anciens moulins de la région. Auparavant, le moulin de la ferme exploitait son énergie, mais son potentiel n’est aujourd’hui plus perceptible. Presque invisible dans le paysage, il est désormais synonyme de risque et de contrainte en raison de ses nombreuses crues et de sa pollution.

L’eau est également présente sous forme d’un bassin de rétention situé à côté de la ferme existante. Il était utilisé pour l’alimentation du moulin, et récupère les eaux de pluies encore actuellement. Il est aujourd’hui à l’état d’abandon, isolé à l’écart de la ferme, repliée sur elle-même.

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Cette strate du paysage est cyclique, elle crée une alternance de situations selon les moments de déssèchement ou de crue. C’est cette caractéristique qui va nous intéresser.

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Les chemins et routes

Le site est entouré d’axes de circulation qui découpent les terres d’une manière plus ou moins forte. La départementale D30 borde le projet, très fréquentée tant par les habitants des villes alentours que par les transports de marchandises, reliant la région à la Normandie. C’est à ce niveau que se sépare de la D30 la route d’entrée dans la commune de Chavenay, ainsi que l’axe reliant la D30 à Grignon. Le site constitue donc une jonction entre plusieurs routes, de tailles et de fréquentations variées. Il représente une première ramification concrète entre le site et les acteurs du territoire. Des chemins, plus naturels, longent le Ru et traversent le site d’une manière plus douce, ils fusionnent avec le paysage et découpent les terres cultivées. Naturellement, le site représente une intersection d’échelles.

Vue sur la départementale 30 avec au fond, la ferme de Mortmoulin

Chemin partant de la ferme remontant le versant Sud, s’enfonçant dans les bois en direction des anciennes carrières

Chemin longeant le Ru et la ferme, reliant la départementrale à la commune de Chavenay, au fond.

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Mario Giacomelli, Paesaggio 8, 1968

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La végétation et les essences

Les arbres, de part leurs essences différentes, créent des couleurs et un paysage très particulier, mais expriment également la temporalité du site. Le changement de saisons influe directement sur leur état, créant des variations atmosphériques très sensibles dans le paysage. On recense ainsi plusieurs espèces, telles que des érables, aulnes, aubépines,sureau, frêne, laurier, saule, chêne, noisetier et peuplier.

Les cultures des terres créent elles aussi des couches de couleurs et de textures différentes, tâchant le paysage de masses sombres et brutes, ou au contraire plus lumineuses et légères.

Cette strate du paysage est changeante et cyclique comme celle de l’eau. Ces données vont influencer le projet, et vont conditionner des situations et des usages particulièrs.

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Au-dessus des toits de la ferme

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L’architecture

La structure de l’architecture s’enchevêtre avec celles des autres strates du paysage.Le site est marqué par la présence d’une ferme, la ferme de Mortmoulin, actuellement en état de ruine très avancée. Datant du XIIIe siècle, elle possède un passé très mouvementé. A cette époque, la ferme est un haut lieu de production et possède un moulin et de nombreux jardins attenants qui la relient aux fermes alentours. Une trentaine de personnes y travaillent alors. Dans les années 1900, un incendie dévastateur efface toutes les traces de cette époque, dont le moulin. Son dernier propriétaire reconstruit, après la Seconde Guerre Mondiale, la ferme en béton armé au gré de ses besoins: un hangar pour les bêtes (100 vaches) et pour le stockage du foin, un bâtiment pour le stockage et le séchage des grains de maïs, contenant des silos. La ferme possède alors 160ha de culture. Après la guerre, la mécanisation de l’agriculture a engendré une forte réduction du nombre d’occupants et de travailleurs. Seul un agriculteur y vit aujourd’hui, occupant une infime partie

Le dos de la ferme, le hangar pour le foin.

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de la ferme. Le reste est quant à lui vide, délaissé.Cette ferme fait donc partie, avec quelques autres fermes alentours (Rennemoulin, Mezu), des premièrs lieux historiques agricoles du territoire. Le projet prend corps dans, et au-dela de cette maison-mère, qui sert de point de départ et de niveau de référence au parcours du projet. Sa réhabilitation est un enjeu important, car les corps de bâtiment qui la composent possèdent de nombreuses traces de ce passé agricole, que nous devons conserver et donner à voir et à comprendre aux visiteurs.

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Relevé de l’existant

22.10.2014 - 10H.

Vue depuis l’entrée. Au centre, l’unique locataire de la ferme, Michel.

Coupe sur l’existant 1/1000e

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Nord >Plan d’ensemble 1/2000e

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Gravure sur cuivre. Topographie.Frédéric Desgranges sur http://lateteaumilieu.com

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Topographie

Eau

Vent

Routes et cheminsLieu de jonction entre différents flux d’échelles variées

Le paysage est l’acteur majeur du site et du projet. Il se constitue d’un enchevêtrement de strates successives. Le paysage comme étendue, tant horizontale que verticale.

Zones inondables qui encercle l’espace, entre le bâti et le Ru

Vents dominants venant du Nord et inclinés nord-est et nord-ouest

Fond de vallée en creux, entouré de deux versants opposés

N

Structures du paysage

Gravure sur cuivre. Topographie.Frédéric Desgranges sur http://lateteaumilieu.com

ArchitecturesLa ferme de Mortmoulin

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Il en résulte de tout cela que la présence humaine est à la fois une pratique et une poétique : à la fois contenu dans un ensemble fonctionnel, pragmatique, réglé par un programme fixe, et à la fois en intime relation avec la nature qui l’entoure, changeante et fluctuante. Chaque expérience sera donc subjective et unique selon les contingences du climat, des saisons. Le projet et son programme devront donc nécessairement mettre en relation cette temporalité naturelle, qui participe à créer des conditions de lumière variées, avec la temporalité humaine, pour habiter le lieu.

Le site est entouré d’eau, à l’image d’une île perdue dans une immensité verte. Le projet va donc se fonder autour de cet élément, armature du projet et pour ainsi dire seul repère dans ce vaste site. L’eau nous séduit pour deux raisons. D’une part, elle donne une lisibilité et une compréhension aux passants, prenant conscience qu’ils se trouvent dans le circuit d’une rivière dans le

3. Appréhender et ordonner la spatialité du lieu

Occupation du site

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creux d’une vallée. L’eau donne donc du sens au site et nous fait comprendre notre position dans l’espace, mais également dans le temps. En effet, l’eau participe également à la fabrication d’un imaginaire autour d’un lieu qui change dans le temps, évoluant au fil des saisons, mais aussi des crues qui modifient sans cesse le paysage. Nous imaginons un lieu humide, cultivé ou marécageux. L’eau monte et recouvre la terre, laissant seulement apparaître les cheminements surélevés des piétons, ou se recule pour laisser place à des jardins et des espaces cultivés. Nous allons donc utiliser la temporalité dynamique de la rivière et souhaitons que le projet prenne l’image d’un pont traversant la rivière, ici le Ru de Gally. Le projet permet le franchissement du creux de la vallée et la ramification des deux versants opposés, nord et sud. Tout d’abord, le pont révèle l’idée symbolique du projet, celui d’un ramificateur. «Il unit le fleuve, les rives et le pays dans un mutuel voisinage. Le pont rassemble autour du fleuve la terre comme région 2».Ensuite, l’image du pont va nous intéresser dans le sens ou il nous

2. Tiré de l’écrit de Christian Norberg-Schulz, L’Art du lieu.

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permet de penser le projet comme un élément compact et unitaire, limité dans ses dimensions et donc, dans l’espace. En effet, nous souhaitons habiter une étendue mais dans le respect de celle-ci , sans gaspillage d’espace. Le projet occupe donc une surface limitée de terre pour laisser celle-ci libre, exploitable. Le projet affirme également une géométrie claire, servant de référence dans un paysage vaste et changeant. Cette forme géométrique est structurée et nous sert de contrepoint au cadre naturel du site du projet.C’était notre volonté de nous limiter et de cadrer le projet, dans une étendue qui nous est finalement peu controlable, de part ses dimensions et son environnement instable.

Le «pont habité» doit donc s’ancrer dans le sol naturel dans ses extrémités. Ces points, comme des broches attachées dans la terre, accrochent le projet dans son site et constituent les points de départ du parcours du programme, soit les deux lieux démonstrateurs du projet. La ferme existante, au nord, sera réhabilitée pour accueillir les espaces d’exposition, tandis que l’extrémité sud accueillera l’unité de méthanisation.

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Au centre, le programme davantage lié aux expérimentations et aux échange prend place, à l’image de divers espaces positionnés successivement appartenant à un même parcours. Le tout est fédéré par l’espace de la communauté, situé au niveau de la traversée du Ru, point de convergence des occupants du projet. Il prend forme, comme nous l’avons dit, dans un petit vide enfermé dans un grand vide : cet évènement rompt le parcours jusque là homogène et régulier. Nous l’imaginons ouvert et transparent, communiquant avec son extérieur immédiat, le Ru et la terre, et avec le grand paysage du site. De cet observatoire, nous souhaitons que l’usager marque une pause et prenne conscience du lieu dans lequel il se trouve. C’est pour cela que nous voyons cet espace comme un lieu tout à fait singulier, pause imposée dans un projet, a priori continu.

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Construction d’un imaginaire : le projetIV.

Il en résulte que la prise de position sur le site se veut forte et claire. Dans une immensité à priori intimidante et hostile à toute idée de développement,nous considérons plutôt cette immensité comme une étendue, source d’inspiration, de stimilation pour le projet.

3. Tiré de l’écrit de Peter Zumthor, Penser l’architecture.

«La réalité de l’architecture, c’est le concret, ce qui est devenu forme,

masse et espace, son corps.3»

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Plan masse

5 30 m

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« Pour comprendre un lieu, il ne suffit pas de rassembler des informations plus ou moins précises qui s’y sont déroulés au fil du temps.4 » Avant tout, le paysage de la vallée de Mortmoulin a une étendue propice à l’inspiration, non à une démarche empirque. Cette étendue est perçue comme une stimulation, une source d’émotion, donc de projet. Construire un bâtiment qui s’insère dans ce paysage, offrant protection aux vents, pluies et soleil, vaste et évident, était un idéal.

Le projet consiste à retranscrire cette étendue, qualité intrinsèque de ce lieu, et d’aborder l’échelle humaine de l’homme d’un bout à l’autre. Le projet se tend dans le paysage, statique. Deux incisions aux extrémités du projet l’ancre solidement dans le sol et permettent de le tirer dans le paysage,

1. Repère statique dans le paysage

4. Tiré de l’écrit de Christian Norberg-Schulz, L’Art du lieu.

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Nous souhaitons que le projet serve de repère dans cette immensité et aborde l’échelle humaine dans un lieu à priori «vide» et inhabité. En effet, pensé comme une nouvelle strate géologique superposée aux existantes, le projet permet de créer une nouvelle topographie artificielle pour redonner à lire une horizontalité dans le paysage en creux de la vallée. Nous souhaitons faire comprendre ce relief de fond de vallée à travers ce geste fort. Celui-ci doit être clair, rigoureux, car nous souhaitons que le projet serve de point de rassemblement, de focalisation : «Ainsi, les choses «expliquent» le milieu et en manifestent le caractère, devenant significatives à leur tour 5».

L’ensemble des interventions doit créer un vaste champ d’énergie dans le paysage. Mêlant architecture et paysage, elles créeent un nouveau «tout». Les différents corps de bâtiments sont conçus comme de grands receptacles, des formes architecturales creuses, crées pour capter les intensités changeantes de la lumière du jour et permettre d’en faire une expérience renouvelée d’un lieu à l’autre. Nous souhaitons que l’architecture soit ici un arrière-plan pour la vie qui passe.

5. Tiré de l’écrit de Christian Norberg-Schulz, Genius Loci

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Le projet représente une nouvelle topographie habitée, dont le niveau de référence du sol est situé dans la continuité de la ferme existante. Le but consiste à créer une promenade continue d’un bout à l’autre du projet, toujours de plein pied avec la ferme. Nous souhaitons créer non seulement un nouveau sol, artificiel et relié à la maison-mère, mais aussi un nouveau toit. Nous prendrons donc en compte plusieurs altitudes. Trois nouvelles altimétries se créent, à l’image de trois strates successives du paysage. Ces trois strates sont constituées de :- Celle du projet contenant l’ensemble du programme, en continuité avec l’ancienne ferme, que nous appelerons «la prairie intérieure» ou «Rez-de-marché»- Un «en-dessous», la strate au niveau du sol naturel; abritée par le toit du niveau supérieur. Cet en-dessous constitut le «Rez-de-Ruisseau» du projet. - Un «au-dessus», la strate supérieure, la

2. Epaississement du paysage Une topographie habitée

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terrasse du projet, «la place du marché». Ces trois ruban se déroulent d’un versant à l’autre des colines, et se connectent par de grands escaliers qui donnent à lire cette superposition d’épaisseur. Les trois étages du projet nous permettent de redécouvrir le paysage du site sous trois nouveaux angles de vision : - la vision proche, au sol, rasant les champs, le ruisseau, la terre - la vision cadré du paysage entre deux plans horizontaux. - la vision du grand paysage et du territoire, le belvédère de la terrasse.

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Plan du rez-de-ruisseau

5 20 m

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Commment penser une telle structure dans le paysage ? Cela revient pour nous à considérer comment l’édifice est ancré dans le sol et comment il s’élève vers le ciel.

Notre idéal est alors de traduire cet imaginaire concrètement. Nous voulons montrer la clarté de l’édifice, en montrant les matéraiux, tout simplement.Ce sont des éléments simples, unitaires, visibles et compréhensibles par tous : poteaux, poutres, bardage bois, menuiseries, escaliers. Le projet devient une trace blanche dans le paysage, affirmant son artificialité et dématérialisant l’architecture à la simple idée d’une substance, immatérielle, en contraste avec son paysage de couleurs et de textures. Pour autant, elle ne dénote pas car elle se fond et absorde la lumière, changeant au fil de la journée et des saisons.Cette trace semble hors d’échelle, tant par ses dimensions que par son matériau, lisse, uniforme, presque incolore à première vue lorsque la lumière est douce. A côté, la ferme existante assume son ancienneté, en pierre massive et solidement ancrée dans le sol. Elle sert de point de départ au

3. Réalité structurelle, du macro au micro De la perception lointaine à la pratique intime

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projet et de balance, nous faisant passer d’un paysage ancien et naturel, voir primitif à un autre paysage, aérien evanescent. Un rythme répétitif de poteaux s’installe d’une manière régulière dans toute la longueur du projet, presque symétrique autour du patio central. C’est pour garantir à chaque espace une équivalence d’attention, d’importance, une égalité entre chaque. Aucun espace ne prévaut sur un autre, chacun a son importance. L’irrégularité du patio quant à elle, dans sa trame structurelle, est faite pour réunir, généreusement, non pour concurrencer.

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Plan du rez-de-marché

5 20 m

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« Là ou des matériaux concrets sont assemblés et édifiés, l’architecture imaginée devient une part du monde réel.6 »

La façade se compose d’un bardage bois blanc soutenu par une structure métallique légère en croix, blanche également. Le rythme du bardage s’adapte aux espaces intérieurs, se densifiant ou, au contraire, s’espaçant pour laisser passer les vues. Il filtre l’air et la lumière, et donne une lecture unitaire au projet, comme une seule horizontale dans le paysage. Les poteaux sont métalliques blanc circulaires, et participent à l’abstraction du bâtiment dans son paysage en le faisant «flotter» au-dessus du sol. La dalle intérieure est recouverte d’une résine blanche brillante dont l’aspect évolue selon la lumière de l’extérieur. Son entretien est facile ce qui était notre souci pour le fonctionnement du marché.

6. Tiré de l’écrit de Peter Zumthor, Penser l’architecture

4. Matérialités et sensations De l’imaginaire au construit

Coupe transversale 1/500e

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Détail façade ouest 1/100e

Les promenades hautes et basses (rez-de-ruisseau et belvédère) sont quant à elles constituées de lattes de bois blanches.

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Elévation ouest

5 20 m

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Que ce soit dans l’ancienne ferme réhabilitée, dans le patio central ou dans l’usine, l’espace est ouvert, la brise s’invite à l’intérieur, les ouvertures sont larges. Pour autant on s’y sent à l’abris, contenu. Ce sont des observatoires qui captent la lumière au gré de la journée. On y lit son journal, on y apprend de nouvelles pratiques, en voyeur, en observant les autres s’activer. Parfois on se croise par hasard, parfois on se salue de loin d’un bout à l’autre d’un patio. Ces trois étapes dans le parcours sont des pauses que l’habitant marque naturellement, le paysage s’invite à l’intérieur, on ne fait rien parfois sauf contempler ce qui nous entoure, le paysage, immense.Pendant qu’on se repose au soleil près du patio, on s’active dans les ateliers, les laboratoires et dans le marché. Ce sont des petites machines plus techniques, qui fonctionnent sans cesse, prêtes à tout moment de la journée. Elles s’inprègnent des marques du temps, se patinent avec l’usure. On y accumule des choses, on se salit les mains, les espaces sont les receptacles de ce désordre animé.

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Un mot pour la fin

Une architecture qui part des choses qui revient aux choses

Ce projet a l’espoir de faire évoluer les habitudes des occupants dans leurs quotidiens, les amenant à des rencontres inattendues et des pratiques plus globales et participatives. L’espoir aussi que des personnes à priori inintéressées s’invitent naturellement dans ce parcours et découvrent les choses simples mais fondamentales qui composent le territoire qu’elles traversent.

Mon point d’arrivée est au final une architecture du banal, partant d’un élément fondamental, la terre. C’est donc pour moi une architecture qui part des choses et qui revient aux choses, essentielle et

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lisble par tous, non pas en concurrence mais en harmonie avec son paysage et ses occupants, s’effaçant presque lorsque la lumière y est douce, et la brise légère.

Le projet s’est construit avec des images ouvertes, de textures, lumières, mouvements. Allant d’images de terres cultivées brassées et illuminées, de fil tendu statique en équilibre entre deux forces qui le retienne, à l’idée de substance presque evanescente, immatérielle, figée dans le paysage. Peut-être cet imaginaire fera de Mortmoulin un lieu particulier, point de focalisation dans l’immensité presque «anonyme» de ce vaste paysage agricole.

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Des ouvrages inspirants

Autobiographie scientifique Aldo RossiEditions Parenthèses, 1988 L’Art du lieu, Architecture et paysage, permanence et mutations Christian Norberg- Schulz Editions Le Moniteur, 1996 L’art de la mémoire, le territoire et l’architecture Sebastien Marot Editions de la Villette, 2010

Genius Loci, paysage ambiance architecture Christian Norberg-SchulzPierre Mardaga éditeur,1981

Penser l’architecture Peter Zumthor Editions Birkhäuser, 2006

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