orientations et preferences a l'egard du spectacle cinematographique1

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LNT. REV. APP. PSYCHOL. (1974), VOL. 23, NO. 2 ORIENTATIONS ET PREFERENCES A L’EGARD D U S PE CT A C L E C I N E M A T 0 GRAPH I QU El MICHEL DENIS’ Universit4 & Paris X, .Nan&we P a m i les recherches portant sur le public des difftrents domaines du loisii artistique, deux grandes orientations mtthodologiques peuvent Ctre isol&. Les unes, #inspiration le plus souvent sociologique, s’efforcent de dtgager des traits majontaires au sein d’une population dtfinie par son inttrtt pour tel loisir et, dans un second temps, de relier Yapparition de ces comportements, considtrb le plus souvent indtpendamment les uns des autres, B des caracttristiques telles que I’hge, le niveau socio-culturel, etc. (voir notamment Dumazedier et Ripert, 1966). Les autres, d’inspiration plut6t psychologique, visent 2t distinguer, au sein de cette population, des sous-ensembles caracttisables par des patterns comportementaux et des configurations d‘httrCts qualitativement diffirencib, em-mCmes expri- mables, le cas tchtant, en tennes de facteurs (voir notamment Franc&, Roubertoux, et Denis, sous presse). La p r h n t e recherche se situe dans cette seconde voie. Elle a consist& i mettre en tvidence les modalit& de difftenciation et de regroupement de divers types d’orientation l’kgard d’un mCme objet : le spectacle cintmatographique. Dans au moins trois secteurs de ce domaine, des formes d’orientation multiples peuvent Ctre distingutes. Ainsi, considtrant d’abord l’aspect le plus manifeste de l’accks au cintma, on peut constater la pluralitt des sources d’tmission des messages cinimatographiques: un mCme film p u t Ctre vu dans une salle com- merciale, au cours des programmes ttltvisb, au sein d’institutions sptcialides : cint-clubs, cintmathkques, etc. Dans le premikre perspective signalte, la recherche s’appliquerait B ttablir le taw de frtquentation de ces dif€Crents types de spectacle et de le relier B des attributs sociologiques prbumb pertinents. Dans notre perspec- tive, l’investigation portant sur le taux de frtquentation de ces diverses sources a plutbt vise B ttablir, par une ttude des liaisons entre ces variables, les modalit& de regroupement de ces d8Crents types de participation au loisir cintmato- graphique. Si I’on considhe maintenant le contenu de la frtquentation cintmatographique, on peut distinguer des orientations vers dif€trentsgenres de films : westerns, films comiques, films dramatiques, etc. Notre p r o p n’a pas consist6 ici B ttablir une hitrarchie de frtquentation des dif€trents genres cinimatographiques, mais B prkciser la facon dont se regroupent en sous-ensembles qualitativement sptcifib les inttrtts pour ces divers types de films. 1. Cette recherchea ttt effectute en partie dam le cadre de 1’Equipede Recherche associk au CNRS 2. Adresse de l’auteur: Equipe de Recherche associke au CNRS no 191, 16 rue Chaptal, 75009 Paris, no 191 (Universittde Paris X, Nanterre; Centre national de la Recherche scientifique, Paris). France.

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LNT. REV. APP. PSYCHOL. (1974), VOL. 23, NO. 2

O R I E N T A T I O N S E T PREFERENCES A L’EGARD D U S PE CT A C L E C I N E MAT 0 GRAPH I QU El

MICHEL DENIS’

Universit4 & Paris X, .Nan&we

Pami les recherches portant sur le public des difftrents domaines du loisii artistique, deux grandes orientations mtthodologiques peuvent Ctre isol&. Les unes, #inspiration le plus souvent sociologique, s’efforcent de dtgager des traits majontaires au sein d’une population dtfinie par son inttrtt pour tel loisir et, dans un second temps, de relier Yapparition de ces comportements, considtrb le plus souvent indtpendamment les uns des autres, B des caracttristiques telles que I’hge, le niveau socio-culturel, etc. (voir notamment Dumazedier et Ripert, 1966). Les autres, d’inspiration plut6t psychologique, visent 2t distinguer, au sein de cette population, des sous-ensembles caracttisables par des patterns comportementaux et des configurations d‘httrCts qualitativement diffirencib, em-mCmes expri- mables, le cas tchtant, en tennes de facteurs (voir notamment Franc&, Roubertoux, et Denis, sous presse). La p rhn te recherche se situe dans cette seconde voie. Elle a consist& i mettre en tvidence les modalit& de difftenciation et de regroupement de divers types d’orientation l’kgard d’un mCme objet : le spectacle cintmatographique.

Dans au moins trois secteurs de ce domaine, des formes d’orientation multiples peuvent Ctre distingutes. Ainsi, considtrant d’abord l’aspect le plus manifeste de l’accks au cintma, on peut constater la pluralitt des sources d’tmission des messages cinimatographiques: un mCme film p u t Ctre vu dans une salle com- merciale, au cours des programmes ttltvisb, au sein d’institutions sptcialides : cint-clubs, cintmathkques, etc. Dans le premikre perspective signalte, la recherche s’appliquerait B ttablir le taw de frtquentation de ces dif€Crents types de spectacle et de le relier B des attributs sociologiques prbumb pertinents. Dans notre perspec- tive, l’investigation portant sur le taux de frtquentation de ces diverses sources a plutbt vise B ttablir, par une ttude des liaisons entre ces variables, les modalit& de regroupement de ces d8Crents types de participation au loisir cintmato- graphique.

Si I’on considhe maintenant le contenu de la frtquentation cintmatographique, on peut distinguer des orientations vers dif€trents genres de films : westerns, films comiques, films dramatiques, etc. Notre p r o p n’a pas consist6 ici B ttablir une hitrarchie de frtquentation des dif€trents genres cinimatographiques, mais B prkciser la facon dont se regroupent en sous-ensembles qualitativement sptcifib les inttrtts pour ces divers types de films.

1. Cette recherche a ttt effectute en partie dam le cadre de 1’Equipe de Recherche associk au CNRS

2. Adresse de l’auteur: Equipe de Recherche associke au CNRS no 191, 16 rue Chaptal, 75009 Paris, no 191 (Universitt de Paris X, Nanterre; Centre national de la Recherche scientifique, Paris).

France.

90 PREFERENCES A L’EGARD DU SPECTACLE CINEMATOGRAPHIQUE

Enfin, si l’on s’inttresse aux aspects motivationnels du comportement de frt- quentation, une semblable diversification peut 2tre observte. Au cours des elitretiens prtparatoires B cette enquete, on a pu recueillir des rtponses faisant &at de motivations trks varites, depuis celles associant exclusivement le cintma B l’idte de distraction jusqu’8 celles l’associant surtout 2 des rtftrences culturelles. Notre recherche, sur ce point, a donc eu pour but de vtrifier la notion intuitive, fondte sur l’observation courante, selon laquelle il existe des types de spectateurs aux orientations et aux attitudes bien difftrencites.

Ainsi, en s’appuyant sur une ttude des regroupements de variables caracttrisant des types d’acchs varits au cintma, la prtsente investigation a vid 21 dtfinir, dans un champ particulier du loisir, l’existence des diff trents publics qui, manifestant une m2me orientation positive fondamentale B son tgard, le font ntanmoins selon des modalitts sptcifiques.

Population d’enqulte Nous avons d b l’abord renonct B travailler sur un tchantillon reprtsentatif de la population gtntrale frtquentant les salles de c inha . L’investigation a d‘ailleurs ttt limitte A un cadre gtographique assez sptcifique : la rtgion parisienne.

Afin de permettre de meilleures difftrenciations au sein des comportements ttudits, il a paru prtftrable de faire porter la recherche sur une population prtsentant un comportement cintmatographique plut6t assidu. La frkquentation de la population d’enqdte se rkpartit de la manicre suivant: frkquentation hebdomadaire (au moins une fois par semaine) : 27,1% ; frtquentation mensuelle (au moins une fois par mois, mais moins d‘une fois par semaine) : 45,2 % ; frkquentation annuelle (au moins une fois par an, mais moins d‘une fois par mois) : 24,1%; frtquentation infra-annuelle (moins d‘une fois par an): 3,6%. Cette frtquentation est suptrieure A la moyenne nationale la plus rtcemment connue au moment de l’enquete-et dont les chifFres correspondants sont respectivement 19,1%, 32,4%, 39,7% et 8,8% (Centre national de la Cintmatographie, 1965), -mais B peine suptrieure B celle de la rtgion parisienne, d‘oii est extrait 1’Cchantillon.

On a retenu une population frhuentant les spectacles CinEmatographiques d’un centre culturel de la rtgion parisienne.’ Cet organisme p r k n t e l’avantage, par rapport B l’enquete, de ne pas &tre un cint-club, ni de fonctionner comme tel. L’accks nay est soumis B aucune contrainte telle que l’appartenance A une association. On ne peut donc en aucun cas considtrer que la population soumise B l’enqutte constitue un public de ccsptcialistes)).

La composition sociologique de l’tchantillon est donnCe en annexe I. Du point de vue socio-Cconomique et culturel, cette population est dans l’ensemble d‘un niveau plus tlevt que la population gtnQale des salles cintmatographiques. On pourrait donc faire valoir que les sujets appartenant aux catkgories sociales les moins f a v o s e s et frtquentant ce centre culturel ttmoignent probablement d‘une orientation d’inttrets trh spkcialide, qui les distingue de leur cat6gorie. I1 con- vient de p r t ck r que l’enquete s’est dtroulte lors d’une d r i e de manifestations

1. L’auteur est reconnakant il la direction du Thtitre de la Commune, P Aubervilliers, pour sa

M E T H O D E

cooptration.

MICHEL DENIS 91

qui avaient attirt un public dtbordant largement celui des habituis et qui pouvaient intQesser des publics varits (retrospective de l’oeuvre d’un grand cintaste contemporain). En outre, si la population d’enqutte comprend effective- ment un pourcentage de ((sptcialistes)) du cintma quelque peu suptrieur h celui de la population gtntrale, l’analyse des rbultats montre que le difftrenciation et le regroupement des rtponses-objectifs essentiels de cette recherche-ne sont pas empCchts de ce fait.

Au total, la population dont les questionnaires ont t t t dtpouillts et trait& compte 203 sujets.

Questionnaire Les questions explorant les difftrents aspects de l’inttrtt pour le cintma peuvent &re rassembltes sous trois rubriques, correspondant aux trois secteurs citts plus haut.

1. h4odalitks de frkquentation et recherche &information Cette premikre rubique regroup des questions permettant de situer les sujets sur des tchelles de frtquentation p u r chacune des sources envisagtes: salles commerciales, cint-clubs, Cintmathkque franc&, programmes ttltvisb. Dans l’tnonct des questions, les Mtrents comportements ttaient d&ign& de fason explicite. Une enqutte anttieure avait permis de simplifier la rtponse du sujet dans certains cas, en lui tvitant de proctder h une estimation quantita- tive trop fine de frtquentations relativement rares. Par exemple, trois rtpcinses itaient propo&es h la question ((Frtquentez-vous un cint-club ?)) : --uRtgulikre- merit)) ; -((Occasionnellement)) ; -N Jamais)). En revanche, l’estimation de la frtquentation dans les salles commerciales ttait requise de facon plus prtcise.

Nous faisons tgalement figurer sous cette rubrique plusieurs variables relatives A la recherche &informations sur le cintma : par la lecture des critiques publites dans les journaux, par celle des revues cintmatographiques (en excluant les revues consacrtes aux aspects exclusivement mondains du cintma).

Enfin, un questionnaire de connaissances cintmatographiques, issu de la prtct- dente enqutte, permettait de situer sur une tchelle en onze points le niveau de connaissances des sujets dans l’histoire du domaine considtrt.

Ces huit variables, dont la dtnomination est donnte en annexe 11, constituent donc autant d‘indices d’inttret pour dztrentes formes du loisir cinemato- graphique.

2. Prkfkrences cinkmatographiques en fonction du genre On a propod une like de onze genres cintmatographiques (voir en annexe 11), dont on avait pris la prtcaution de vtrifier qu’ils ttaient suffisamment bien sptcifits et qu’ils 6taient identifib de facon univoque par les sujets. Ainsi, au cours de la prt-enquete, ceux-ci avaient dG fournir pour chaque genre propod un ou plusieurs titres de films pouvant l’illustrer. L’analyse des rtponses avait permis de constater que les mCmes dtnominations de genres renvoyaient aux mtmes oeuvres, et inversement.

Dans ce type de recherche, d‘autres auteurs font exprimer les prtftrences des sujets pour des stimulus precis et non pour de simples dtsignations de genres

92 PREFERENCES A L’EGARD DU SPECTACLE CINEMATOGRAPHIQUE

cintmatographiques. Avec l’assurance que la representation des genres cintmato- graphiques Ctait consistante dans la population d’enquzte, on a prtftrt ne pas recourir A une proctdure qui risquait de faire dCpendre la r6ponse de caractt- ristiques trop particulieres des stimulus cintmatographiques prhenth.

Les sujets n’ont pas dQ exprimer l’intensitt de leur frtquentation pour chacun des genres tnumtrts, la precision et la validitt d’une telle estimation se rCvClant gtntralement illusoires. La riponse prise ici en considtration est donc une rtponse d‘inttrct dCclar6 (ou de rejet) sur une Cchelle trichotomiste.

3. Motivations de la frkquentation et critkres de choix I1 s’agit Cvidemment des motivations dtclartes par le sujet. Cinq justifications 2 la frtquentation cinkmatographique, provenant elles aussi de la prt-enqucte, ont h s i CtC propostes, sans limitation du nombre de rtponses possibles.

Par ailleurs, le sujet devait dtsigner parmi une liste les crit2res de choix du dernier film qu’il avait vu. Quatre variables ont CtC considtrtes ici de fason indt- pendante : choix dttermint par le nom du rtalisateur du film, par ses interpretes, par son genre, par son titre (voir tgalement en annexe 11).

Le questionnaire comprenait en outre plusieurs questions destinies ?i l’identifi- cation sociologique des sujets. La rtponse B l’ensemble du questionnaire ne dipmait pas une quinzaine de minutes.

Traitement des rksultats Vingt-huit variables ont C t t prises en compte dans les prtsentes analyses, qui se subdivisent en deux Ctapes distinctes, chacune utilisant une technique spkifique.

1 . Dkfinition des liaisons entre variable? L‘estimation de l’intensitC des liaisons entre les 28 variables pnses deux deux repose sur la mCthode dite de la quantitC d’information transmise. Cette mCthode, expoke notamment par Faverge (1953) et par Bacher (1957a, 1958)’ permet d‘exprimer la liaison entre deux variables x et y par une statistique de cordlation R = H(x)-Hy(x}, OG H(x) est l’entropie de la distribution marginale des x et Hy(x) l’entropie partielle des x B y constant. Ces valeurs sont ttablies B partir d’une rtpartition des N sujets dans la table de contingence pour x et y.

La valeur de R est maximum lorsque chaque valeur de x permet de PrCdire la valeur du y correspondant. Elle est nulle lorsque les variables sont indtpen- dantes et que les probabilitb assocites aux cases du diagramme de corrtlation sont tgales aux probabilith thCoriques.

Le produit de la quantitt d’information transmise R par le nombre de sujets N et par une constante se distribue approximativement c o m e le chi carrt, avec (h- 1) (k- 1) degrb de libertt (h ttant le nombre de lignes du diagramme et k le nombre de colonnes). I1 est donc possible de tester l’intensitt des liaisons mesurtes et d’en 6tablir le seuil de signification statistique B l’aide de la table de chi cant.

Dans l’expod des rhltats, nous n’avons pas mentionnt les valeurs obtenues de R, mais le seuil auquel est tprouvte l’intensitt de la liaison entre x et y

1. Cette partie du traitement des dorm& a t t C assurke par Mlle M.-0. Lebeaw, au Service de Calcul numCrique du CNRS (Institut Blaise-Pascal).

MICHEL DENIS 93 ( p <0,05, 0,02, 0,01, ou 0,001). Quant au sens, positif ou ntgatif, de cette liaison, il est ttabli, lorsque celle-ci est significative, par comparaison case par case des effectifs observks et des effectifs thtoriques. Les quelques liaisons signifi- catives dont la fome n’ttait pas Claire et ne pouvait etre qualifite de ce point de vue (soit 25 sur un total de 154) n’ont pas Ctt prises en considtration au cours de I’ttape suivante.

TABLEAU 1

LIAISONS ENTRE LES 28 VARLABLES

94 PREFERENCES A L'EGARD DU SPECTACLE CINEMATOGRAPHIQUE

2. Difinition des regroupements de variables' Les regroupements des variables ont tt6 ttudiQ par la mtthode d'analyse en ((clusters)) dtcrite par Cattell (1944), tgalement exposbe par Bacher (1957b, chapitre 11). Le domaine des inttrets fournit d'ailleurs quelques exemples d'utilisation de cette mtthode combinte tgalement avec le calcul de l'informa- tion transmise (voir Larcebeau, 1958).

Cette mtthode vise A determiner l'existence de ((clusters)), c'est-A-dire de noyaux regroupant des variables entre lesquelles existe une plus grande proximitt qu'il n'en existe entre les autres variables. Elle permet donc d'individualiser des g r o u p de variables A partir du r k a u de liaisons-positives et ntgatives -qu'elles prtsentent les unes par rapport aux autres. La mtthode peut 2tre utilike avec des degrts variables d 'exigence. Une proctdure rigoureuse consiste notamment, une fois fix6 un seuil acceptable de signification pour les liaisons considtrtes, A ne retenir parmi elles, au cours de cette seconde ttape, que les liaisons entre variables ayant par ailleurs un certain nombre de liaisons com- munes. On s'assure ainsi une plus grande stcuritt dans dtlimitation du noyau dont elles font partie. Dans le prtsent traitement, on a fix6 B deux le nombre minimum de variables avec lesquelles doivent 2tre likes en commun deux variables considtrtes. L'ensemble des 1 10 liaisons dtfinitivement prises en considtration est rtcapitult dans le Tableau 1.

ANALYSE DES RESULTATS

L'analyse des rtsultats comprend d'une part une Ctude des liaisons ?i l'inttrieur de chacun des trois secteurs considtrts au dtpart (modalitts de frtquentation et recherche d'information ; prtftrences cintmatographiques en fonction du genre ; motivations de la frtquentation et crit2res de choix) en vue d'y dtfinir un certain nombre de noyaux difftrencits; d'autre part une ttude des liaisons entre les noyaux des difftrents secteurs.

Etude des liaisons internes d chaque secteur

1. Modali tb de fre'quentation et recherche d'information (variables du groupe A ) La Figure 1 rtcapitule les liaisons positives entre les difftrentes variables du premier groupe. Prtcisons que dans cette figure et les suivantes, qui assurent une reprhntation graphique des donntes du Tableau 1, l'intensitt des liaisons est indiquk, non pas par la proximitt des points figurant les variables, mais par l'ipaisseur de la droite qui les relie. La disposition spatiale de l'ensemble est bien sfir arbitraire. Les variables du groupe A se scindent en deux noyaux d'intgale importance.

Le premier, ?i l'inttrieur duquel les liaisons sont particuli2rement denses, se com- pose des variables suivantes : 1 (taux de frtquentation cintmatographique gtntrale), 2 (frtquentation d'un cint-club), 5 (frtquentation de la Cintmath2que franCaise), 6 (recherche d'information par les journaux), 7 (recherche d'informa- tion par les revues de cintma), 8 (niveau de connaissances cintmatographiques).

1. M. J. Chaguiboff, collaborateur technique au CNRS, a apportt un concours efficace h cette partie du traitement .

MICHEL DENIS

n 95

A1

Liaisons significatives au seuil de liaisons positives

0,001 i++M+H+ 0-02 0,Ol -+l++-H- 0.05

FIGURE 1

LIAISONS POSITIVES ENTRE LES VARIABLES DU GROUPE A

A2

Ce noyau, que nous appelons Al , regroupe toutes les modalitb de frtquentation cintmatographique supposant une dharche sptcifique et orientte du spectateur 5 l’exttrieur de son domicile. Ces comportements sont Ctroitement associts 8 des comportements de recherche d’information sur l’objet de cette frtquentation.

Les variables 3 (possession d’un rtcepteur de ttltvkion) et 4 (assiduitt aux films ttltvisb) constituent & elles seules un petit noyau bieu is016 du prtctdent. Ce noyau, appelt A2, est compod des deux variables relatives 8 une frtquenta- tion ((8 domicile)) des oeuvres cintmatographiques. Non seulement il n’entretient aucune liaison positive avec les variables du noyau A1 , mais il se trouve en liaison ntgative avec quatre d‘entre elles (variables 1, 5, 6, et 7), comme le montre la Figure 2.

Cette premiere analyse oppose donc deux grandes moladitts de participation cintmatographique, c’est-&-dire deux grands types de public. On trouve d‘une part les spectateurs trts assidus non seulement des institutions pr&ntant des oeuvres d’inttrst historique ou esthttique confirm6 (cint-clubs, Cintmatheque), mais du spectacle cintmatographique en gtntral, dans sa modalitt la plus rkpandue, puisque la variable 1 appartient & ce regroupement. On remarque que la recherche d’information par l’intermtdiaire des revues cintmatographiques est prhdictive de la participation aux organismes s#ci&s dans la diffusion des oeuvres cintmatographiques marquantes, tandis que la recherche d’infonna- tion par la presse non sptcialide ne s’y trouve pas associ&. Toutes les variables de ce noyau se trouvent en ttroite liaison avec le niveau de connaissances relatives 8 l’histoire du cintma. D’autre part, on trouve le groupe des spectateurs acctdant principalement au spectacle cintmatographique A travers les programmes ttlt-

96 PREFERENCES A L'EGARD DU SPECTACLE CINEMATOCUPHIQWE

Liaisons significatives au seuil de liaisons nCgatives

0,001 ------- 0.02 0.01 -.-.-.-.-._ 05 ............... --- - -- - - - - - -

A2

MICHEL DENIS 97

B1 B2

Liaisons significatives au seuil de liaisons positives

0,001 -H+Kt++-H+ 0.02 0.01 -H+-H-+ 0.0s

FIGURE 3

LIAISONS POSITIVES ENTRE LES VARIABLES DU GROUPE B

Les quatre premitres variables Cnumtrtes du noyau B1 correspondent toutes A l’idte qu’on peut se faire d’un cintma w%ieux)>, qui doit apporter au spec- tateur informations et connaissances, soit sur le monde rtel, par prtsentation directe de celuici (variables 15 et 17) ou A travers une fiction (variable 14), soit encore, A la limite, sur le cintma lui-mCme (variable 9).

La proximiti5 des variables 18 et 19 par rapport P ce noyau n’est tvidemment pas sans poser quelques problkmes d’interpr6tation. Par exemple, l’existence d’une liaison entre l’inttrgt pour les comtdies musicales et I’inttrCt pour les drames psychologiques peut paraitre paradoxale par rapport aux liaisons tout A fait plausibles des variables 9, 14, 15, et 17 entre elles. En fait, il convient de remarquer que les variables 18 et 19 ne sont lites au noyau citt que par l’inter- mtdiare d’un nombre limit6 de ses variables (14 et 17). En outre, elles entre- tiennent avec certaines d’entre elles des liaisons ntgatives, qui n’apparaissent pas sur la figure en raison du crittre d’exigence signal6 dans la partie mtthodologique, mais qui n’en existent pas moins de manihre significative (p <0,01), comme c’est le cas entre 18 (inter& pour les comtdies musicales) et 9 (inttrgt pour les grands classiques). Quant A la variable 19, elle est lite en fait avec toutes les variables relatives aux pr6ftrences en fonction du genre, mais le caract&-e positif de ces liaisons n’a pu Ctre dtgagt avec nettett que pour quelques-unes d’entre elles. I1 est donc fond6 de ne pas la considtrer comme appartenant effectivement au noyau B1.

Le noyau B2 peut ttre identifit sans difficult6 c o m e celui de l’tvasion. Films policiers (variable lo), films d’aventures (variable 1 l), westerns (variable 12), films d’horreur (variable 16) composent un ensemble bien sp6cifi6, dtfini par

98 PREFERENCES A L’EGARD DU SPECTACLE CINEMATOCRAPHIQUE

une certaine recherche de l’insolite et la prttminence accordte B l’action, voire ]’action violente. Le dtroulement de ces films se situe le plus souvent en marge du monde quotidien (variables 10 et 11) et contemporain (variable 12), parfois m&me dans un univers de pure fiction (variable 16). L’inttrh pour ces difftrents genres de films parait donc dttermint par un goot commun: celui d’une Evasion hors du monde reel et des problhes qu’il pse , au profit d’un univers mythique essentiellement domini par I’aventure, l’action d‘iclat et l’tmotion intense.

La variable 13 (inttrct pour les films comiques} n’appartient nettement B aucun des deux noyaux dtgagts. Une seule liaison la relie B B1, par l’inter- mtdiaire de la variable 14, avec laquelle elle n’a que deux autres liaisons com- munes. Elle entretient une autre liaison positive avec la variable 11, Cltment de B2. L‘appartenance de 13 B 32 parait beaucoup plus plausible. Mais ses relations avec ce noyau ne sont pas suffisamment marqukes pour &tre prises en compte sans quelque prudence.

L’ttude des liaisons ntgatives nous aide d’ailleurs ii trancher pour quelques- uns des probl2mes apparus jusqu’B p r k n t et B sptcifier les limites les plus certaines des noyaux dtgagis par l’analyse (Figure 4). On constate ainsi l’appari- tion d‘un rtseau serri de liaisons ntgatives opposant d‘une part les variables 9, 14, 15, et 17 (noyau B1) et d’autre part les variables 10, 11, 12, et 16 (noyau B2). L’individualitt des deux noyaux se trouve donc bien confirmie par cette analyse. On note que les variables litigieuses 13, 18, et 19 restent B l’tcart de ce rtseau de liaisons negatives. Leur exclusion de ce rtseau ne suffit certes pas pour trancher quant 8 leur statut. Elle permet au moins, par dtfaut, de dtfinir sans ambigui’tt la composition des deux principaux noyaux B partir des variables restantes.

B1 B2

Liaisons significatives au seuil de I iaisons negatives O,OO[ --- ---- 0.02 ------------ 0,01 ---.---.-.- 0,OS . . . . . . . . . . . . . . .

FIGURE 4

LIAISONS NEGATNES ENTRE LES VARIABLES DU GROUPE B

MICHEL DENIS 99

Cette analyse nous a m h e donc A sptcifier deux grandes configurations d’intkrtts en matitre de spectacle cintmatographique : les intkrets pour un c i n h a considtri comme une whose krieuse)) et les intQi3.s pour un cinkma d‘tvasion. Elle oppose ainsi diff trentes modalitb d’un acces essentiellement cognitif aux oeuvres cintmatographiques A une orientation vers le spectacle filmique surtout guidte par la recherche du divertissement.

3. Motivations de la frkquentation et critbres de choix (variables du groupe C ) Les cinq variables relatives aux motivations se ripartissent en trois sous- ensembles : variables 2 1 (motivation culture) et 23 (motivation instruction); variable 24 (motivation connaissance du cinCma) ; variables 20 (motivation dis- traction) et 22 (motivation tvasion). Les reprksentations par les sujets de leurs motivations donnent lieu am associations que Yon pouvait attendre, pour s#cifier trois types de motivation bien distincts.

Les quatre variables relatives aux criteres de choix restent quant a elles isoltes les unes des autres. Elles n’entretiennent entre elles aucune liaison positive. Seule m e liaison ntgative appara9t entre les variables 25 (crittre metteur en sc2ne) et 26 (crittre genre).

Si l’on considere ensemble les variables concernant les motivations et les crittres de choix, on voit se constituer des regroupements plus ttendus explicitant les regroupements signalb prtctdemment (voir Figure 5). D’une part, on retrouve un noyau illustrant le cinCma comme mCdiateur d’un savoir, qu’il s’agisse de connaissances d’ordre gCntral (variables 2 1 et 23) ou de connaissances sgcifiques, tlCments de base d’une culture proprement cinkmatographique (variable 24). Deux de ces trois variables, et notamment la variable 24, sont en liaison avec

c1 c2

Liaisons significatives au seuil de: Liaisons positives Liaisons nkgatives

0,001 - ------- 0,01 .- -.-.-*-.--- 0.02 0.05

------------ ............... FIGURE 5

LIAISONS POSITIVES ET LIAISONS NGGATIVES ENTRE LES VARIABLES DU GROUPE C

102 PREFERENCES A L’EGARD DU SPECTACLE CINEMATOGRAPHIQUE

graphiques conduit le sujet B prtftrer nettement certains types de films, une frt- quentation moins active, loin de l’amener B apprhcier tous les genres, oriente ntanmoins ses chok vers certaines cattgories d‘oeuvres, reprksentatives d’un cintma de divertissement. La dimension dont les @les sont respectivement A1 et A2 n’apparaft donc pas indhpendante de celle dkfinie par B1 et B2.

2. Liaisons entre noyaux A et noyaux C La Figure 7 prtsente ces liaisons. On y voit appardtre un r&eau de relations tr2s dense entre les noyaux A1 et C1. On y remarque notamment que les deux variables du noyau C1 indicatrices d’un intkrzt sphcifique pour l’art cintmatographique (variables 24 et 25) sont likes toutes deux B cinq des six variables composant le noyau A1 (2 ,5 ,6 ,7 ,8 ) . I1 apparaft B cette occasion que la connaissance du cintma (variable 24) passe A la fois par la fr6quentation des institutions pr6sentant ses oeuvres majeures (variables 2 et 5) et par la recherche dinformation auprb de la presse sp6cialSe (variables 6 et 7).

Les noyaux A2 et C2 n’entretiennent qu’une seule liaison positive ( p <0,01), reliant l’assiduitk aux films tClkvXs (variable 4) B l’importance accordhe aux interprhtes du film (variable 27). Cependant la Figure 7 ne prhente pas cette

A1

Liaisons significatives au seuil de:

Liaisons positives Liaisons negatives

0,001 -cHcHcH-H- ------- 0,01 ++I+++- -.-.-.-.-.- 0.02 0,os

---_-----_-- ............... FIGURE 7

LIAISONS POSITIVES ET LIAISONS NEGATIVES ENTRE LES VARIABLES DU GROUPE A

ET LES VARIABLES DU GROUPE C

MICHEL DENIS 103

liaison du fait que ces variables n’ont pas par ailleurs de liaisons communes avec deux autres variables.

Un tissu important de liaisons ntgatives oppose e n h les noyaux A1 et C2 d’une part, les noyaux A2 et C1 d‘autre part.

Un phtnomcne analogue B celui prtctdemment observe apparait ici : la liaison entre les noyaux A 1 et C 1 c’est-B-dire la dtpendance entre une attitude dlective B l’tgard des oeuvres cintmatographiques et une certaine conception du cintma comme mtdiateur de valeurs culturelles. SimultanCment se dessine l’opposition radicale entre cette meme attitude et un type d‘orientation B l’c5gard du cinEma A dominante ludique, reprtsentc par le noyau C2. La moindre stlectivitt en matitre de spectacles cintmatographiques (noyau A2) est quant B elle en opposition avec la conception d’un cintma culturel. En revanche, sa liaison avec la motivation ludique, bien que fort probable et fortement appuyCe par l’opposition t rks marqute qu’elle prtsente avec l’intCrCt pour la dimension culturelle du cintma, n’est que suggtrte par les rtsultats de la prbente analyse. On peut considtrer ntanmoins que les deux analyses partielles ont scindt les deux niveaux d’inttret A l’tgard du cintma (modalitts de frtquentation et motivations dtclartes) selon une dimen- sionnalitt commune, qu’on peut identifier aistment c o m e l’ouverture culturelle en matitre de loisir cintmatographique.

3. Liaisons entre noyaux B et noyaux C Ces liaisons sont prbenttes B la Figure 8. On y observe l’existence d‘un rbeau serrt de liaisons positives entre les noyaux B 1 et C1, parmi lesquelles on remarque particulicrement celles qui s’instaurent entre d’une part l’intCrCt pour les classiques du cintma (variable 9) et d’autre part la motivation B la connaissance du cintma (variable 24) ainsi que l’importance attribute au metteur en sctne (variable 25); celles qui s’ttablissent par ailleurs entre l’inttr&t pour les films documentaires (variable 15) et B sujet social (variable 17) et les motivations mettant l’accent sur l’enrichissenient culturel (variable 2 1) et sur l’apport de connaissances (variable 23). On doit encore signaler l’existence de deux liaisons qui ne manquent pas de paraitre paradoxales : celles qui relient la fois l’int6ri3 pour les comtdies musicales (variable 18) et pour les dessins animts (variable 19) B la motivation mettant l’accent sur les apports d’information assurb par le cintma (variable 23). On a dtjB not6 le cas trts particulier des variables 18 et 19 dans l’analyse portant sur les prtftrences en fonction du genre.

Les variables 10 et 11 du noyau B2 assurent 8 elles seules les liaisons positives entre ce noyau et le noyau C2. Le goiit pour les films d’aventures (variable 11) rattache donc explicitement B la recherche de la distraction (variable 20) et B un besoin d’tvasion (variable 22). On ne s’ttonne pas par ailleurs de trouver l’inttret pour les films comiques (variable 13) en liaison positive avec ces deux variables, ce qui rapproche nettement cette variable 13 du noyau B2, avec lequel elle apparaissait like (voir l’analyse des prtftrences en fonction du genre). Enfin, les spectateurs recherchant un cintma d’tvasion (variables 10 et 11) paraissent tgale- ment accorder une grande importance aux interprctes de ces films (variable 27).

Sans venir appuyer les constatations prtctdentes de fason aussi tclatante que pour les deux autres analyses, les deux liaisons ntgatives entre B2 et C1 sont ntanmoins tout B fait en accord avec le reste des rtsultats.

104 PREFERENCES A L’EGARD DU SPECTACLE CINEMATOGRAPHIQE

B2

c2 Liaisons significatives au seuil de:

Liaisons positives Liaisons nigatives

FIGURE 8

LIAISONS POSITIVES ET LIAISONS NEGATIVES ENTRE LES VARIABLES DU GROUPE B ET Les VARIABLES DU GROUPE C

I1 apparait bien que le recherche d’un cinbma que nous avow appelC ccdrieux)) et celle d‘un cinkma de la distraction s’appuient sur deux dries de motivations oppodes. Dans le premier cas, on a af€aire au group des motivations en rapport avec le souci de se cultiver et de s’instruire, une plus grande importance &.ant accordie tr la personnalitb de l’auteur du film. Dans le second cas, il s’agit de motivations de nature ludique, elles-dmes lik tr l’importance accordbe au pres- tige des interprktes. Encore une fok, les dew analyses partielles semblent avoir difFbenci6 l’ensemble des variables selon un criti5x-e partiellement commun. Les groupes d’intCrCts dtgagb par l’analyse de B sont libs de faCon systbmatique aux groupes de motivations apparus au cours de l’analyse de C.

C O N C L U S I O N

Cette recherche fait appardtre clairement, A l’inttrieur du champ des variables etudikes, le caracthe systhatique du r k a u de relations qui s’ttablissent entre elles. Les co-occurrences de comportements ou d’intbrets ne se produisent ivi- demment pas de manihe alhtoire : elles dbterminent des regroupements le plus souvent bien diff Qenci6ss, susceptibles d’une interprbtation exhaustive. En outre,

MICHEL DENIS 105

les trois niveaux d’orientation distingub 4 priori - modalit& de la frtquentation, types de films prtftrts, motivations dtclartes - se rtvtlent en Ctroite inter- dtpendance.

Notre interprttation s’enrichit bien sGr P chaque niveau de l’analyse : d’abord celui des liaisons internes P chaque secteur; ensuite celui des relations entre secteurs pris deux P deux. Elle dkbouche enfin sur une interprttation globale, oh la prise en considtration simultante des trois secteurs permet de dtgager dewc grandes configurations d‘inttr&ts et de comportements dtfinissant deux grands types de participation cintmatographique ainsi caracttrisables :

(4) Frtquentation assidue des institutions oh le cinema, considtrt comme art ou comme ouverture sur la rtalitt, est de toute fason considtrt comme un sujet d’inttrzt drieux, ainsi que le confirment les dkclarations des sujets P props des motifs de leur frtquentation. Cette participation au loisir cintmatographique, active et orientte, s’appuie non seulement sur une connaissance historique du domaine considire‘, mais aussi sur une recherche constante d’informations nouvelles. On peut prtsumer que cet ensemble de traits se rattache P une con- ception plus large du loisir comme moyen de dtveloppement culturel.

(b) Distance A I’Egard de ces institutions spkifiquement cintmatographiques, compende par une plus grande assiduitt aux spectacles ttltvists. Cette participa- tion moins active reste orientte vers certains types de messages dont le contenu apparait A l’analyse essentiellement destint P procurer au spectateur une dktente psychologique et un distraction, ce que vient confrmer l’tnonct meme de ses moti- vations conscientes.

Soulignons que cette diffhenciation s’opike, compte tenu de notre mtthode, P un niveau encore bien gtntral. I1 va de soi que des recherches plus fines pourraient faire apparaitre, A l’inttrieur de ces deux grandes configurations, des types de participation plus prtcishent difftrencib.

Une investigation plus approfondie peut consister, d’autre part, A sp6cifier par quelles autres variables plus gtntrales sont dttermintes ces deux constellations d’intkrtts. A titre de sondage, deux d’entre elles, d’ailleurs non indEpendantes, - l’2ge et le niveau d’instruction des sujets - ont fait ici l’objet d’une Etude complkmentaire.

La variable 2ge prhente ainsi trois liaisons positives, avec l’inttr&t pour les classiques du cinima ( p <0,05), avec I’inttrCt pour les films documentaires ( p <0,001), avec la motivation culturelle ( p <0,02), et quatre liaisons negatives, avec l’assiduitt aux films ttltvisls ( p <0,001), l’inttret pour les films policiers ( p <0,02), l’inttrCt pour les films d‘aventures ( p <O,Ol) et l’intCr2t pour les westerns ( p <0,05). Les liaisons positives n’apparaissent ainsi qu’avec des variables appartenant au premier type de participatiun cinkmatographique, tandis que la variable testte n’entretient que des liaisons ntgatives avec les variables du second regroupement. L‘2ge apparait donc comme un facteur non ntgligeable de modulation des inttrets cintmatographiques, dans le sens d‘une participation plus active et moins ludique.

Un phtnomhe analogue se dkgage, et de fason encore mieux marqute, lorsque Yon considtre le niveau d’instruction des sujets. Ses huit liaisons positives rattachent exclusivement cette variable P des variables du premier regroupement : taux de frequentation cintmatographique gtntrale ( p <O,Ol), frtquentation de la Cintma- thique ( p <0,001), recherche d’infoxmation par les journaux ( p <O,Ol), recherche

106 PREFERENCES A L’EGARD DU SPECTACLE CINEMATOGRAPHIQLE

d’information par les revues de cintma ( p <0,01), niveau de connaissances cint- matographiques ( p <0,001), inttrzt pour les classiques du cintma ( p <0,02), motivation culturelle (p<0,05), motivation A la connaissance du cintma (p <0,05). En revanche, les six liaisons nCgatives sont toutes dirigtes vers des variables du second regroupement : possession d’un rtcepteur de ttltvision (p <0,001), assiduitt aux films ttlivisb ( p <0,05), inttret pour les films policiers ( p <0 ,05) , intCrtt pour les films d’aventures ( p <O,OOl), intCrCt pour les westerns (p <0,05), im- portance accordte aux interprktes (p <0,05).

Plus pertinent, semble-t-il, que l’%ge, en raison du nombre plus tlevt de liaisons significatives dtgagtes, le niveau culture1 est certainement une variable dCter- minante du type d’inttret manifest6 ?i l’tgard du cintma. Ce rbultat n’est pas surprenant en regard des donnks relatives A d’autres domaines artistiques (voir Bernard, 1973). I1 thoigne de l’existence de variables, sans doute non spCcifiques, mais susceptibles de crter les conditions d’une participation plus ou nioins onentte et plus ou moins active 2 l’tgard du loisir artistique.

R E F E R E N C E S

BACHER, F. (1 957a). ((Etude de la liaison statistique entre deux variables par la mCthode de l’information)), BINOP, 13, 13-25. - (19573). ((Etude de la structure de l’information apportte par l’examen

d’orientation professionnelle)), ibid. 13, numtro sgcial. - (1958). ((La mtthode de l’information appliqute ?i l’ttude des liaisons entre

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MICHEL DENIS 107

ANNEXE I

C 0 M P O S I T I 0 N S 0 CI 0 L 0 GI Q U E D E L’ E C HAN T I L L 0 N Rkpartition en fonction de l‘&e

Em. 112 15-24 am 50 62

25-34 ans 20 14 34 34-44 ans 17 18 35

98 105 203

M F .

45 ans et plus 11 11 22

Rkpartition en fonction du niueau d’instructionl

M F Em. Primaires 17 (4) 22 (7) 39 (11) Techniques 26 (0) 15 (1) 41 (1) Secondaires incomplets 27 (14) 42 (25) 69 (39)

Suptrieurs 19 (8) 16 (2) 35 (10) 98 (31) 105 (39) 203 (70)

Secondaires complets 9 (5) 10 (4) 19 (9)

Rkpartition en fonction de I‘activitk professionnellel

Patrons de l’industrie et du commerce

Professions 1ibCrales et cadres supCrieurs

Cadres moyens Emplo yts Ouvriers Personnels de service Autres catbgories Personnes non actives

M

1

10 19 8

23 2 2

33 (31) 98

F

I

8 23 19 1 0 1

105 52 (39)

Em.

2

18 42 27 24

2 3

203 85 (70)

1. Entre parenthtses figure le nombre de sujets scolaires et Ctudiants pour chacun des niveaux considkrb.

108 PREFERENCES A L’ECARD DU SPECTACLE CINEMATOCRAPHIQUE

ANNEXE I1 L I S T E DES VARIABLES’

Modalite‘s de fre‘quentation et rechrch d’information 1. Taw de frtquentation cintmatographique gtntrale (salles commerciales) (5). 2. Frtquentation d‘un cint-club (3). 3. Possession d’un rtcepteur de ttltvision (2). 4. Assiduitt aux films ttltvisks (4). 5. Frequentation de la Cintmathtque franGaise (3). 6. Recherche d’information par les journaux (3). 7. Recherche d’information par les revues de cinCma (2). 8. Niveau de connaissances cintmatographiques (6).

Prqhences cinhztografihiques en fonction du genre

10. InttrCt dtclart pour les films policiers (3). 11. Inttret dtclart pour les films d’aventures (3). 12. Inttret dtclart pour les westerns (3). 13. Inttret dtclarC pour les films comiques (3). 14. Inttret dtclart pour les drames psychologiques (3). 15. Inttret dtclart pour les documentaires (3). 16. IntCrCt dtclart pour les films d’horreur (3). 17. Inttrzt dCclart pour les films A sujet social (3). 18. InttrCt dtclart pour les comtdies musicales (3). 19. Inttret dtclart pour les dessins animts (3).

9. InttrCt dtclart pour les grands classiques du cintma (3).

Motivationr de la fre‘quentation eb critdres de choix 20. Motivation distraction (2). 21. Motivation culture (2). 22. Motivation evasion (2). 23. Motivation instruction (2). 24. Motivation connaissance du cintma (2). 25. Crithe metteur en sctne pour le dernier film vu (2). 26. Crittre genre pour le dernier film vu (2). 27. Crittre interprttes pour le dernier film VLI (2). 28. Crittre titre pour le dernier film vu (2).

1. Entre parenthtses figure le nombre de valeurs qu’est susceptible de prendre chaque variable lors du traitement.