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Dossier DOSSIER [ [ [ NRP Février 2015, n°25 [ NRP Juin 2015, n°27 Mémoire Langue et culture. Engouement pour le dialectal Parlons algérien ! Walid Bouchakour Enfance abandonnée : Kafala ou adoption, les avis divergent Farida Larbi Zoom sur un riche patrimoine filmique et iconographique O. HIND « L'éducation en Algérie : des mots et des maux » Droit Culture/Médias Economie Éducation, Profession : «enseignant-commerçant Ahmed Tessa

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DossierDOSSIER

[

[

[

NRP Février 2015, n°25

[

NRP Juin 2015, n°27

Mémoire

Langue et culture. Engouement pour le dialectal Parlons algérien !

Walid Bouchakour

Enfance abandonnée : Kafala ou adoption, les avis divergent

Farida Larbi

Zoom sur un riche patrimoine filmique et iconographique

O. HIND

« L'éducation en Algérie : des mots et des maux  »

Droit

Culture/Médias

EconomieÉducation, Profession : «enseignant-commerçant

Ahmed Tessa

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Sommaire

La NRP est la nouvelle formule de la « Revue de presse », créée en 1956 par le centre des Glycines d’Alger.

[Attestation du ministère de l’information: A1 23, 7 février 1977]

Revue bimensuelle réalisée en collaboration avec le :

Ont collaboré à ce numéro

Ryad CHIKHI, Bernard JANICOT, Leila TENNCI, Ghalem DOUAR,

Lamya TENNCI, Sid Ahmed ABED, Mokhtar MEFTAH, Samir REBIAI, Laid Nasro OUENZAR

CENTRE DE DOCUMENTATION ECONOMIQUE ET SOCIALE

3, rue Kadiri Sid Ahmed, Oran • Tel: +213 41 40 85 83 •Site web: www.cdesoran.org / Facebook : Cdes Oran

EconomieL’École algérienne plongée dans une extrême détresse,Ahmed Farrah, p.9

Éducation, Profession : «enseignant-commerçant, Ahmed

Tessa,p.9-10

Il faut reconvertir les établissements vers les besoins

économiques du pays,LEILA BOUKLI,p10

DroitEnfance abandonnée : Kafala ou adoption, les avisdivergent,Farida Larbi, p.11

Algérie : seules 2500 femmes divorcées bénéficient de la

pension alimentaire,p.12

Culture/MédiasLangue et culture. Engouement pour le dialectal : Parlons

algérien !, Walid Bouchakour, p.13-14

Taos Amrouche, une femme sous influence, Nicolas Michel,

p.14-15

MémoireZoom sur un riche patrimoine filmique et iconographique, O.HIND,p.16

Tipaza : le tombeau de la chrétienne, un monument ruinepar la négligence, Ghada HAMROUCHE, p.17

Bibliographie, p.18

Dossier

« L'éducation en Algérie : des mots et des maux »»

Des mots et des maux sur l’Education nationale, Z. Lotfi, p.4

Ecole en quête de paternité : Effacer et tout recommence,Omar

BENBEKHTI, p.5

Un business à grande échelle qui touche 8 millions d’élèves en

Algérie, Hakem Bachi, p.6

Accès à l’éducation aux enfants en situation de handicap : Ce

sont les encadreurs qui manquent le plus,Abbas A. H.,p.7

400 Mineurs croupissent dans les établissements pénitentiaires,

Ali AMZAL p.7-8

Violence en milieu scolaire: 97 % des cas dus à des facteurs

exogènes ,. p.8

[email protected]

N° 27, Juin 2015

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NRP, Juin 2015, n°27

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Editorial

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NRP, Juin 2015, n°27

Meftah Mokhtar

L’éducation en Algérie passe par une étape délicate et polémique ; les spécialistes et les

parties prenantes posent beaucoup de questions sur l’avenir de cette institution sensible

dans la société. On croit que le gouvernement serait le seul responsable de la régression

du niveau de l’éducation. Mais en fait, la famille et la société civile sont aussi impliquées,

et leur démission a aggravé pas mal la situation.

La multiplication des crises dans l’éducation et l’enseignement a suscité l’apparition de

phénomènes étranges : le phénomène des cours particuliers ou des cours parallèles est

l’un des cas qui montre évidement le déficit du secteur scolaire. Les ministres successifs

étaient accablés vis-à-vis de cet enseignement informel et n’ont pas mis en action des

stratégies et des solutions fiables aux profits des générationsà venir.

La presse nationalepublie quotidiennement des statistiques éprouvantes sur la

violence au sein des établissements scolaires : combien d’instituteurs agressés ? Combien

d’élèves maltraités ?L’école algérienne devient de plus en plus un lieu non-sécurisé ce qui

exige de tous les acteurs sociaux de la société de sonner l’alarme et de trouver

immédiatement le remède pour cette pathologie sociale qui a perturbé depuis une

dizaine d’année son fonctionnement intérieur.

Le dernier épisode du feuilleton dramatique de l’enseignement en Algérie était le CD !,

c’est-à-dire remplacer le prof par un simple CD compressé, cette médiocrité nous pousse

à poser la question suivante : à quoi sert l’école en Algérie ?

Cependant, le problème de l’éducation n’est pas limité au domaine scolaire. Les

handicapés et les enfants de la prison peuvent être considérés comme une autre

défaillance pour notre système éducatif. En dépit des efforts fournis par les autorités

officielles à leur endroit, cette catégorie reste privée d’une vraie réintégration dans la

société.

Et pourtant, la valeur de la société dépend de la qualité de son éducation, car

l’éducation est le miroir de la société et son développement ne peut se réaliser qu’à

travers une culture de coopération entre gouvernants et gouvernés.

« L'éducation en Algérie :

des mots et des maux »

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NRP, Juin 2015, n°27

DOSSIERDes mots et des maux sur l’Education nationale

La dernière trouvaille de notreministre de l’éducation nationalepour rattraper les cours perduspendant la grève des enseignants,qui dure depuis plus de quatresemaines, consiste à distribuer desCD contenant tout le programme dela troisième année secondaire auxélèves des classes terminales.

L’école algérienne va très mal. Quiaura le courage de prendre lesmesures nécessaires à sonredressement ?

Cela leur permettrait, semble-t-il, depréparer le BAC sereinement et entoute quiétude ! Autrement dit, oncherche à remplacer l’enseignantgréviste par des cours électroniqueset des leçons virtuelles que lesapprenants peuvent consulter sur lesite de l’Off ice national del’enseignement à distance.

Une telle initiative est louable dansla mesure où elle accompagne etcomplète le travail de l’enseignanten classe. Car elle permettra à l’élèved’être autonome dans sonapprentissage, ce qui est d’ailleursvisé par la nouvelle approche misesur le terrain et exigée par unemondialisation galopante :l’approche par les compétences.Rappelant que les pays développésont, dès les années 1990, mis cesnouvelles technologies au profit del’élève en donnant naissance àl’école numérique ou virtuelle. Sonobjectif était de maintenir le contactentre les enseignants et lesapprenants en dehors des heures decours af in de parer à toutes leséventualités à savoir : réexpliquerdes difficultés rencontrées dans uncours ou aider l’élève à faire sesdevoirs … Mais il n’a jamais étéquestion de se passer del’enseignant. Ces pays, trèsregardant sur les dépensespubliques, se seraient-ils privés d’unetelle aubaine ? Epargner des sommesfaramineuses au Trésor public ! Seulle génie algérien y est parvenu !

Pensez-vous que nos élèves ontbesoin de ces CD ou de ces adressesde sites ? En outre, l’école a-t-elle lesmoyens de graver le nombresuff isant de CD ? J’en doute,connaissant les moyens du bord.D’ailleurs, le déferlement desinformations sur le net et ladémocratisation de l’outilinformatique permet, même à unnovice en la matière, d’accéder àune multitude de sites, ou fairepartie de groupes sur les réseaux

sociaux qui peuvent répondreparfaitement à ses attentes. Et celanos élèves le savent et le maîtrisent.Pourquoi alors tout ce grand tapagemédiatique qui, je pense, n’a pourbut que de tenter de gagner dutemps pour casser et à jamais la grèvedes enseignants. Restant convaincuque son dénouement ne pourra sefaire que par un face à face franc,serein et responsable entre laministre de l’éducation et le syndicatayant appelé à la grève, où primeral’intérêt de l’élève afin d’éviter desdérapages certains.

Ce que semble dire notre ministredans sa dernière sortie médiatiqueest un sans précédent grave jamaisatteint depuis l’ indépendance :l’enseignant ne sert à rien dansl’école algérienne et on peut lemettre dehors sans nuire à lascolarité de vos enfants. Une autreaccusation qui vient de s’ajouter autableau dressé peu reluisant del’éducateur. Cet être immoral,abject, grassement payé, ce suceurde sang, ce fainéant, qui ne fout rienen classe pour obliger ses élèves àprendre des cours particuliers qu’ildonne, lui-même, dans des garagesinsalubres contre des sommesfaramineuses. Pourquoi cherche-t-on à ternir coute que coute l’imagede tous les enseignants ? Pourquoiveut-on tous les discréditer ? Nereste-t-il pas des enseignantsconsciencieux et qui font leur travailconvenablement ? Pourquoi sousd’autres cieux, qui se respectentbien sûr, l’enseignant est valorisé,respecté alors que chez nous, il n’ajamais cessé d’être stigmatisé etpointé du doigt ?

Cela me pousse à rappeler, à titred’exemple, les déclarations del’ancien président français lors de sa

campagne présidentielle : «Jetravaillerais à rendre àl’enseignant son autorité. Jeveux que les élèves se lèventquand il entre dans sa classe,comme autrefois.» Qu’en est ilde cette autorité chez nous ?Disons-le franchement, l’élèveest devenu le seigneur deslieux. Il fait ce qu’il veut etquand ça lui chante, sans avoirà rendre des comptes à qui quece soit. Et si ça continue commeça, on ordonnera auxenseignants de se lever quandil f inira par se résigner àrejoindre sa classe ! Cetteindiscipline et cette gabegie quirègnent dans nos écoles peutexpliquer le nombre effarant eteffrayant d’enseignants qui ontdemandé cette année de partiren retraite qu’elle soit à termeou anticipée. Des questions àméditer pour ne pas tomberdans le piège qui vous est tenduet dont nos enfants seront lesvictimes.Il est grand temps detirer la sonnette d’alarme.L’école algérienne va très mal.Prenons nos responsabilités etengageons les vrais débatspour la remettre sur les rails. Etqu’on le veuille ou pas,l’enseignant est un partenaireincontournable. Aucuneréforme ne pourra aboutir sanssa contribution et sonimplication. Cessons donc de leconsidérer comme l’ennemipublic numéro un à abattre. Il yva de l’intérêt de notre écoleet par voie de conséquence denos enfants.A bon entendeur.

Z. Lotfi

16 Mars 2015

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NRP, Juin 2015, n°27

DOSSIER

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A l’école primaire, quand j’étaisenfant, il y a bien longtemps, certainsélèves répondaient à l’appel par lenom de SNP. Des années plus tardje compris que cela voulait dire SansNom Patronymique. L’écolealgérienne est aujourd’hui SNP. Ellen’a pas de patronyme. Lesthuriféraires du nationalismebureaucratique la qualif ient de« creuset de la nation », mais dequelle nation parle-t-on ?

Tout le monde exprime le verdictd’une école, sinistrée, dénaturée,déprimée, inadaptée, dépassée ;mais personne n’ose la prendre enmain ni lui donner un nom, unpatronyme. Elle a été, des années

durant, livrée au crétinisme et àl’ignorance crasse. Aujourd’hui, ellese débat dans la recherche d’unepaternité. Il y a longtemps qu’elle aperdu sa mère. Le pouvoir a cru bond’injecter des milliards dans ce quel’on appelle « l’appareil éducatif »,mais sans lui donner une âme, sansla couver des soins nécessaires à uneévolution saine, sans lui assurer unecroissance et un développementharmonieux, agrégé et adapté à lamodernité, la plongeant dans unobscurantisme moyenâgeux et despratiques d’incantations primitives.

L’école de la casse. L’école de lahaine et de l’exclusion. L’école del’affairisme et de la spéculation.L’école qui abrutit. Cette école là n’apas besoin de former des têtes bienfaites ni bien pleines. L’école n’estpas l’otage de « représentantsmonnayant scolarité des enfants

contre accroissement d’avantagesmatériels » comme prétendu par lesthuriféraires du pouvoir.

Elle est l’otage d’un pouvoir qui l’amise à la casse avec pour objectifd’abrutir des générations entières.Le déficit de compétence dans lesystème éducatif  s’est renforcédepuis que l’on a arabisé, sansprogrammation ni planification, tousles cycles d’enseignement. Ceci, ilfaut avoir le courage de lereconnaître et de l’admettre.

Les faiseurs de rois manu militari, lesprestidigitateurs des fortunesexpress, les magiciens des carrièressubites, les législateurs du horsnormes n’ont jamais mis à

l’escompte le devenir de l’éducationsi tant est qu’ils aient eu del’éducation eux-mêmes.L’incompétence a-t-elle besoin deproduire des compétences ?

Aujourd’hui elle pleure des larmesde sang à cause d’un enseignementbasé sur deux choses : lamémorisation et la restitution. Violéeavant sa puberté, on en a fait unef il le-mère porteuse d’unmonolinguisme analphabète, dansune société livrée aux malfrats et àla débilité pour asseoir la prodigalitéd’un pouvoir rêvant de razzia.

Aujourd’hui, elle est jetée en pâture,annihilant l’idéal de former descitoyens. On n’en veut pas descitoyens ! On parque des générationsdans l’enclos de la soumission et dela consommation de leurres post-mortem. On n’éduque pas à la vie,on forme à la morbidité.

Aujourd’hui, on en a fait uncadavre encerclé. On apprendaux enfants ni à lire, ni à écrire,ni à compter, encore moins àpenser. On leur apprend àtricher. Tricher ici-bas et pourl’Au-delà ! Louvoyer avec laconnaissance, louvoyer avecles croyances. C’est cela qu’oninculque.

Et les enseignants dans toutcela ? Eux aussi ont étéformatés pour louvoyer etdribbler un pouvoir autiste quine les reconnaît pas, ne les ajamais reconnus commeéducateurs de valeurs à éleverau rang de la citoyenneté,payés seulement pourencadrer un bétail humain àformer à la soumission. Maisceux-ci ne veulent plus decette fonction. Ils s’insurgentet refusent le dialoguer avec unpouvoir terrifiant qui n’aspirequ’à soumettre la société à safascination.

A quoi bon étudier ?demandent  nos enfants.Puisque ceux qui gouvernentet vous soumettent sont designorants qui ont gagnébeaucoup d’argent, sansscience, sans savoir ! Laministre de l’Educationnationale a souligné quel’amélioration de la qualité del’enseignement est tributairedu développement d’unsystème pertinent et efficacede formation du personnel del’enseignement.

Cela est d’une telle évidence.Rien d’innovant à ceniveau…Un vœu pieux sansplus. Mais quelles actions sontréellement menées sur leterrain pour effacer les fautes,recommencer à zéro et réglerenf in le problème ? Unproblème qui n’a pas desolution est un problème qui amal été posé, déclarait A.Einstein. L’école du 21ème sièclea pour mission de produire del’avenir et non pas de maintenirun statu quo morbide.

Ecole en quête de paternité : Effacer et tout recommencerOmar BENBEKHTI

12 Février 2015

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DOSSIER

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Les cours particuliers, la défaillance du système scolaire en Algérie

Un business à grande échelle qui touche 8 millions d’élèves en Algérie

La définition universelle, auparavant,d’un cours particulier, c’est un coursoù l’élève est seul avec leprofesseur… Les cours se donnentsous forme individuelle, au domicilede l’élève… ; ils se donnent aussi àde petits groupes de cinq ou sixélèves, dans la salle de séjour d’unenseignant à la retraite ou dans deslocaux louée pour cette occasion ;ils peuvent aussi prendre place dansune salle de classe de l’école, aprèsles heures scolaires où tout le mondetrouve son compte.

L’Algérie est ainsi la « championnedans le monde » des coursparticuliers.1 élève sur 2 au primaire,quatre collégiens sur 5 et 3 lycéenssur 4 y auraientrecours, et danstoutes les matières; et les famillesa l g é r i e n n e sdépensent un peuplus de 200milliards de dinarspar an en courspour 8 mill ionsd’élèves. Lesoutien scolairefonctionne sur lemarché del’angoisse scolairealimenté par unsystème de notes,de classements, d’examens et demenace de redoublement. Il ne sertqu’à rassurer les parents… Leschiffres le confirment, le businessdes cours particuliers en Algérie seporte bien. Ce ne sont pas moins de40 millions d’heures de cours quisont dispensées chaque année. Lademande est grandissante. Lephénomène des cours particuliers,qui a pris au f il des années desproportions démesurées, constitueindéniablement une des tâches surle sombre tableau de l’Éducation enAlgérie.

 Ces cours, dit particuliers, nerelèvent plus de la pédagogie, maisdu vulgaire mais néanmoins lucratifbusiness qui a complètementdévoyé la pratique scolaire. Véritablephénomène de mode ou réellenécessité, les cours particuliers,qualif iés également d’«

enseignement à la carte »,constituent une source financièreassurément importante pour leséducateurs qui ont opté pour cettevoie, au demeurant très lucrative…

En effet, si certains professeurspréfèrent prendre des groupesn’excédant pas trois ou quatreélèves, les parents doivent, enrevanche, payer plus cher, soit 5 000à 6 000 DA quatre séancesmensuelles de deux heures, et bienentendu, par matière. Audemeurant, des cours de soutienpris, à titre d’exemple, par un élèvede terminale peuvent atteindre 10000 DA par mois... 

En Algérie, l’une des premièresraisons, ce sont les défaillances dusystème scolaire qui alimentent laprise de cours, la seconde raison estun pouvoir d’achat galopant qui aobligé une grande partie à s’adonnerà ce commerce et la troisième est ladémission des parents d’élèves vis-à-vis de leur responsabilité… Onconstate donc que pour moins de lamoitié des adeptes, les coursparticuliers ont été féconds entermes d’amélioration des résultats,même si, en même temps, 25%déclarent une améliorationmodeste. Il est sûrement souhaitablede conduire des études précises surl’évolution des performancespermises par les cours particuliers.Car, étant donné les résultats,somme toute, limités, on peut sedemander pourquoi les parentscontinuent à supporter ce débours…une amélioration modeste des

résultats, c’est tout de mêmeune amélioration. C’est à celaque la plupart des parents sontsensibles, même si une partd’entre eux pouvait, plus oumoins secrètement, l’espérerplus notable…

Les cours particuliers peuventprospérer sur une image dedéliquescence de l’écolepublique où, aux yeux ou auxdires des parents et des élèves,on n’apprendrait pas grand-chose ; et ils peuventégalement y contribuer quandles enseignants délaissent leursélèves du secteur public etconservent leur énergie pour

leurs élèvesprivés. Laméfiance vis-à-vis de l’écolepeut setraduire paru n eaugmentationd el’absentéismes c o l a i r ed’élèves quirestent assidusdans lafréquentationdes coursparticuliers ; ou

bien encore les preneurs decours perturbent la classe.L’école est soupçonnée de nepas bien faire son travail, lesenseignants sont parfoisdénigrés : mal payés,démotivés, mais assurés de leuremploi de fonctionnaires, toutles opposerait aux enseignantsqui, au contraire, chercheraientle succès de leurs élèves, clé deleur propre fortune ; lesstéréotypes se donnent ici librecours. Plus les cours particulierssont donnés massivement, plusle niveau scolaire etuniversitaire est en baissecontinue, et l’avenir desgénérations futures se trouvemenacé. 

Hakem Bachi

13 Avril 2015

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NRP, Juin 2015, n°27

DOSSIER

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Accès à l’éducation aux enfants en situation de handicap

Ce sont les encadreurs qui manquent le plus

Dans le cadre du projet de «développement de dispositifs etd’actions de plaidoyer pour l’accèsau droit à la scolarisation aux enfantsen situation de handicap », laFédération algérienne despersonnes handicapées (FAPH) aorganisé, hier, à l’hôtel Riadh de Sidi-Fredj, un séminaire qui a pour thème« L’accès au droit à l’éducation auxenfants en situation de handicap ».

La ministre de la Solidarité nationale,de la Famille et de la Condition de lafemme, Souad Bendjaballah, qui aprocédé à l’ouverture de ceséminaire. Elle a dressé le bilan duministère sur cette frange de lasociété en indiquant que sondépartement « possède 186 centresspécialisés pour prendre en chargeles handicapés. Auxquels s’ajoutent15 centres en cours de réalisation, quiseront ouverts en 2015, et 31 autressont programmés pour fin 2014 ». Laministre précise que sondépartement souffre du déficit enencadrement et en personnelspécialisé. « Cinq mille encadreurspour 18.000 enfants pris en chargeest insuff isant », dira MmeBendjaballah. Mais cela n’a pasempêché de scolariser près de19.000 enfants handicapés au niveaud’établissements relevant du

secteur de la Solidarité nationale. «18.846 enfants sont scolarisés auniveau de centres relevant dusecteur de la solidarité nationale,dont 320 en préscolaire », a déclaréla ministre. « La majorité de cesenfants (plus de 12.000) souffrent dehandicap mental et 23 enfantshandicapés moteurs sont scolarisésau niveau de nos centres », a-t-elleprécisé, insistant sur la nécessité deformer en urgence des formateurspour la prise en charge deshandicapés mentaux. Elle a annoncé,par ailleurs, que le ministère vient depasser un marché de gré à gré avecla Société nationale des véhiculesindustriels (SNVI) pour l’achat de 380bus. Pour sa part, la présidente de lafédération algérienne de personneshandicapées, Atika Mammeri, arevendiqué le droit des handicapésd’avoir un appareillage de qualité etde leur choix. « Notre souci est depouvoir avoir un appareillage dequalité qui puisse répondre à nosattentes », a indiqué Mme Mammeri.Elle a ajouté que son associationmilite pour que les handicapés aientla possibil ité de choisir leursappareils. Elle a expliqué que la Caissenationale des assurés sociaux (Cnas)a établi une convention avec un seulappareilleur, l’Off ice nationald’appareillage et d’accessoires pour

personnes handicapés(ONAAPH), réduisant ainsi lechoix des handicapés. « Lagrande difficulté réside aussidans le fait que les produits del’ONAAPH sont rarementdisponibles, ce qui nouspénalise grandement », a-t-elledéploré. Mme Mammeri asoutenu dans ce sens qu’il fautouvrir le champ à tous lesappareilleurs qui répondent aucahier de charges pour que lehandicapé choisisse sonéquipement. L’ensemble desassociations présentes ontplaidé pour le droit et deshoraires adaptés lors desconcours et examens, droit aurespect de la dignité et le droità des soins en réadaptationfonctionnelle. Les participantsau séminaire ont interpelé lesautorités afin d’encourager etaider les associations depersonnes handicapées, leursfamilles et leurs défenseurs. Ilsréclament aussi le droit auxloisirs parmi tout le monde. Ilsrecommandent de poursuivredes études le plus loin possible.

Abbas A. H.

16 novembre 2013

Les enfants de la prison

400 MINEURS CROUPISSENT DANS LES ÉTABLISSEMENTS PÉNITENTIAIRES

Pour l’année 2014, il a été enregistré près de 6 154 agressions sur des enfants. Pour les trois premiers moisde 2015, 1 200 enfants ont été violentés, dont neuf ont péri suite à leurs agressions.

Pas moins de 400 enfants mineurscroupissent dans les établissementspénitentiaires à travers le pays, a in-diqué jeudi dernier, à Alger la direc-tion générale de l’administration pé-nitentiaire et de la réinsertion socialedes détenus. Intervenant lors d’unerencontre sur la responsabilité pé-nale de l’enfant, la juge des mineurs,Meriem Chorfi, a affirmé que 400enfants se trouvaient actuellementdans des établissements pénitentiai-res. Ils sont soumis à des «mesuresspéciales et souples telles que stipu-lées par la loi». En vertu de la loi ré-gissant l’organisation des prisons etla réinsertion sociale des détenus,l’enfant détenu de moins de 18 ansest «séparé des détenus adultes,

peut être en contact direct avec lesvisiteurs et est soumis à des mesu-res disciplinaires allégées en cas d’in-fraction au règlement intérieur del’établissement». Il bénéficie de va-cances d’une trentaine de jours pen-dant l’été qu’il passe avec sa familleet des vacances de 10 jours, tous lestrois mois, à l’occasion des fêtes na-tionales et religieuses.

C’est le projet de loi de la protectionde l’enfant qui a été au centre destravaux du colloque organisé par leCentre de recherche juridique et ju-diciaire, ce jeudi à Alger. Ce projetde loi soumis à l’APN pour adoption,représentera selon M.Chafaï direc-teur général du Centre de recherchejuridique et judiciaire, le trait d’union

entre les autorités judiciaires etles autorités sécuritaires. Sur leterrain, le phénomène de la vio-lence contre les enfants a prisdes proportions énormes, leschiffres sont plus qu’inquié-tants. Pour l’année 2014, il a étéenregistré prés de 6 154 agres-sions sur enfants. Pour les troispremiers mois de 2015, 1 200enfants ont été violentés, dontneuf ont péri suite à leurs agres-sions. Pour les législateurs quiont animé cette conférence, ilest grand temps de reconsidé-rer les droits de l’enfant. Ils’agira, à travers les textes etles amendements débattus,d’apporter un réel encadre-

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NRP, Juin 2015, n°27

DOSSIER

8

02 Mai 2015

ment juridique, soutenu par un suivisécuritaire, pour cette catégorie vul-nérable. A cet effet, la protection pé-nale de l’enfant s’articulera autourplusieurs volets, qui circonscrira leslacunes et les failles présentes dansles différentes dispositions de la loi.Il faut savoir que jusqu’à la fin duXIXe siècle, l’enfant était jugé, incar-céré au même titre qu’un adulte.Dans son contenu, ce nouveau pro-jet de loi pour la protection de l’en-fant, apporte de nouveaux amende-ments qui ont auront pour rôle derecadrer le traitement de l’enfant,victime ou suspect.Parmi les nou-veautés, la présence obligatoire d’unavocat tout au long de l’instruction,la réduction de la garde à vue pourmineurs à 24heures maximum, et laréduction de la durée de la déten-tion provisoire à deux mois au lieude 04mois. Mais aussi, avoir la possi-bilité de médiatiser l’instruction àtout moment de l’instruction, res-ponsabiliser l’enfant en lui donnantle droit de s’exprimer dans toutes lesétapes de l’instruction. En outre, lesgrandes lignes de ces projets de loidemeurent la grande importance dece projet de loi, il s’agira de combat-tre ce fléau à travers des instrumentsjuridiques, qui, sur le terrain, permet-tront aux autorités sécuritaires, deprévenir, de sensibiliser la société,

mais aussi d’intervenir dans le res-pect des droits de l’enfant.

Effectivement, ce projet de loi seraun organe national de promotion etde protection de l’enfant. Il mettraen place des mécanismes et desoutils de lutte entre autres, contrel’agression sexuelle, physique etmorale de l’enfant, l’enlèvement etle trafic d’enfants, l’exploitation desenfants dans l’audiovisuel, dans lamendicité et dans les réseaux de tra-fic de drogue. Mais aussi l’enrôle-ment des enfants dans des conflitsarmés. D’un autre côté, il s’agira deprotéger l’enfant en milieu carcéralet faire valoir le rôle du délégué na-tional, et du médiateur pour amélio-rer les conditions de détention desmineurs et leur insertion dans la so-ciété. D’autre part, revoir les origi-nes de ses dérives constitue une par-tie essentielle dans leur traitements.A ce sujet, vient en premier, unedémission totale des parents deleurs rôle d’éducation, l’expositioninconsciente de l’enfant au danger,en le traitant comme une sous-per-sonne et une détention des primodélinquants mitigée, et sans effetsde redressement, du fait que celle-ci n’est pas spécifique aux seuls ado-lescents. Ils ont considérablementaccentué la récidive, et augmenté les

risques d’agression sur les en-fants. Par ailleurs, en dépit detous les efforts consentis parles autorités et les acteurs so-ciaux pour réduire l’ampleur dece phénomène, devant l’effi-cacité et la pertinence del’amendement de lois que com-porte ce nouveau projet de loipour la protection pénale del’enfant, il demeurera deuxfailles importantes, non pas dece système, mais dans la so-ciété, à savoir: le silence de l’en-fant agressé qui aggrave sensi-blement la situation. A cet ef-fet, il faut rappeler que le nou-veau projet de loi prévoit, dansce sens, la possibilité à l’enfantagressé de recourir à la justice,même après avoir atteint l’âgeadulte. Plus grave, et dépour-vue d’alternative, la deuxièmefaille est sans conteste, la diffi-culté de prévenir et de pouvoiragir avant que l’agression et lecrime sur l’enfant ne soientcommis.

Ali AMZAL

Violence en milieu scolaire: 97 % des cas dus à des facteurs exogènes

Des facteurs exogènes sont àl’origine de la violence en milieuscolaire dans une grande proportion(97%), a-t-on appris, lundi à Mascara,de la chef du bureau orientationscolaire au ministère de l’Educationnationale.

Des études scientifiques menées auniveau du ministère de l’Educationnationale ont révêlé que 3 pcseulement des cas de violence enmilieu scolaire ont une relationdirecte avec l’établissement et sonenvironnement et le reste relève defacteurs exogènes (famille, amis,entre autres), a indiquéMahiZoubida lors d’un colloquerégional sur la gestion des conflits ausein des établissements scolaires,ouvert dimanche.«Il ne faut pasparler de violence en milieu scolairecomme étant un phénomènecollectif, mais d’animositéindividuelle liée à des problèmes decomportement par la faute departies de la société n’ayant pas jouéleur rôle d’éducation dont la famille»,a-t-elle souligné.

Cette rencontre de quatre jours estorganisée par le ministère dusecteur en collaboration avec uneorganisation s’intéressant au

développement des peuples baséeen Allemagne. Des conseillersd’orientation scolaire de 25 wilayaset des cadres du ministère de tutellespécialistes en psychologie,sociologie, prennent part à cette

rencontre, pour débattre demodèles de traitement desphénomènes de la violence etde gestion des conflits au seinde l’école et de sonenvironnement.

Ce colloque vise, selon laresponsable, à enrichir lesconnaissances des conseillersd’orientation scolaire enmatière de gestion des conflitsau sein de l’établissementscolaire et a constituer uneéquipe de formateurs parmi lesparticipants pour animer leprogramme du ministère del’Education nationale au profitd’autres parties (personnels,enseignants, parents d’élèves,...) af in d’endiguer lephénomène de la violence enmilieu scolaire.

06 Avril

2015

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[ECONOMIE]

22 Mars 2015

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L’École algérienne plongée dans une extrême détresseEt voilà ! Encore une fois le tempo est donné, le moment est bien choisi, la valse à dix temps nous est jouée, oui

mais sur quel pied allons-nous danser ?

Les dix «philharmonistes» nousagacent, ravissent le temps autemps, le tiennent en otage. Larançon est une grille des salaires,dans l’école des maîtres-chanteurs.C’est la mélodie qui parvient à la rueet que les gens n’apprécient guère.

Depuis dix ans, les revendicationssalariales sont devenues récurrentesdans le secteur de l’enseignement,et le bout du tunnel n’est pas encorevisible. La nouvelle grille declassification de la fonction publiquesemble être déjà complètementdésuète et inadaptée à la situation.Ses concepteurs la voulaient baséesur la certification diplômante et lescompétences acquises et non passur les habilités, les tâches allouéeset les performances supposées dessalariés, comme le fut le statutgénéral de travailleurs de 1985. Aprèsla révision du statut particulier desenseignants (Pas celui de tous lesfonctionnaires de l’éducationnationale), des aberrations sontnées. Certains inspecteurs del’éducation nationale, n’ayant jamaisété à l’université parce que nonbacheliers, se sont trouvés classés auplus haut de la grille de la fonctionpublique, mieux classés que lesmédecins des hôpitaux, que lesarchitectes que les informaticiens,que les pharmaciens, que leschirurgiens-dentistes, que lesingénieurs. Le comble est pousséjusqu’au ridicule, dans quel pays aumonde des censeurs de lycées (euxmême anciens professeurs) après

plus de trente ans de service, quiorganisent et contrôlent le travail desenseignants et suivent leur assiduitésont moins classés qu’eux? Commentles Proviseurs des lycées et lesDirecteurs des collèges sont classéssur la même échelle que lesenseignants qui sont sous leurautorité ? Malgré toutes lesaugmentations salariales consentiesaux enseignants, leur pouvoird’achat reste largement en deçà decelui de beaucoup d’autres secteurséconomiques, le cas d’un proviseurde lycée au 12éme échelon del’échelle 16, après 32 ans de serviceperçoit un salaire net de 74000Da,quand un simple agent à la Sonelgaz,Naftal, Sonatrach ou à la CNAS, laCNR est mieux payé que lui.

(….) Les inspecteurs de l’Éducationnationale se sont trouvés, immiscésdans un travail bureaucratique dansdes pseudo-commissions du suivi dela réalisation des programmes desclasses d’examens, pour f ixer leseuil d’avancement des cours(Ataba), au lieu de se concentrerdans leur rôle pédagogique. Laréalisation des programmes incombeaux professeurs, sous le contrôle duchef d’établissement, les cours sontnotifiés, et paraphés dans les cahiersde texte de chaque classe. Laresponsabilité du professeur estengagée, dans le cas où un sujetn’est pas traité en classe et posé àl’examen. La responsabilisation desenseignants devrait être inscritedans un contrat annuel à chaque

début d’année scolaire (Le devoir deprestation de service- enseigner encontrepartie d’un droit - un salaire etun congé annuel). La répartitionannuelle des cours par matières estunifiée au niveau national ; chaquesemaine de grève suivie estsoustraite mécaniquement, carrarement rattrapée. Un professeurqui s’absente pour une longuedurée devrait, en théorie, être illicopresto remplacé par le chefd’établissement et c’est son rôle,dans le cas contraire, il en seraitcomptable.

Cette École sera l’instrument le plusdéterminant pour la réalisation detout projet de société :

1- Quel projet de société veut-on pourl’Algérie de 2050 ?

2- Aura-t-elle sa place dans un mondequi sera totalement numérique ?

3- Quelle École doit-on mettre surpied pour y arriver ?

4- Avec quels moyensInfrastructures, programmesscolaires, formation des formateurs,formation des enseignants, moyensdidactiques, instruments de mesure,pôles d’excellence, normesinternationales de certif ication,apprentissage ?

Ahmed Farrah

Éducation, Profession : «enseignant-commerçant»

Sur les ondes de la Chaîne III, dansl’émission «Point de vue» dumercredi 25 février 2015, lesauditeurs ont pu écouter lesaccusations au vitriol d’un parentd’élève. Il a déversé sa colère sur lecomportement indécent de cetteminorité d’enseignants grévistes]...[ici une nouvelle/témoignage puiséed’un vécu. Ou quand le réel rejointet dépasse le fictif.]...[

Mme Abou-Eddinar : fais vite,prends la caisse et la calculette. Lesélèves doivent se poser desquestions. Ils n’ont pas l’habitude denous voir pointer en retard.- M.Abou-Eddinar : Ne t’en fais pas. Plusnous les tenons en haleine, plus ilss’accrochent à nous. C’est là uneastuce du marketing moderne. Ne

sais-tu pas qu’ils sont drogués auxcours payants ?

Ce couple d’enseignants, monsieurest professeur de mathématiques etmadame de physique, a trouvé unbon filon pour se construire unestature de bourgeois «àl’algérienne». Ils ont démarré leurcommerce de cours payants dans ungarage miteux, il y a de cela unedizaine d’années. Les jours deprotestations syndicales, on lesretrouve aux premiers rangs. Dansles assemblées généralesd’enseignants, ils sont les plus zélésà exiger du syndicat la ripostemaximale : la grève illimitée. Lafuneste «aataba» (seuil desprogrammes à charcuter) a été poureux une aubaine inespérée. Après

avoir convaincu leurs élèves dedéserter les cours officiels au motifque le programme est trop chargé,le couple se frotte les mains. Dès lami-avril, leur immeuble carbure sansdiscontinuer du matin jusque tard ensoirée. Toutefois, ils prennent laprécaution de pointer au lycée pourémarger la feuille de présence etfaire constater à l’administrationl’absence des élèves.]...[Sur lefronton de l’imposante bâtisse uneenseigne lumineuse portant dans lesdeux langues cet intitulé : «Cours desoutien : de la crèche au lycée». Ilsl’ont inauguré en grande pompe, enprésence des autorités locales et dugratin des arrivistes de la région.

] … [Les examens approchant àgrands pas, notre couple de

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[ECONOMIE]

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commerçants déploya les grandsmoyens. Et pour les aider, ils firentappel à l’un de leurs amis, «libraire àl’algérienne», qui tient en horreur leslivres de littérature. Il s’est spécialisédans le parascolaire ainsi que dans lavente de titres piratés etfrauduleusement imprimés,notamment les annales du bacpiratées. Le gros de son chiffred’affaires, il le réalise lors de sestournées dans les établissementsscolaires. Les chefs d’établissementsont aux petits soins avec lui. Ils luiréservent la totalité de la subventionannuelle allouée par l’Etat. C’est dela sorte que les bibliothèquesscolaires sont pleines à craquer delivres parascolaires truffés de fautes,mais très prisés par les candidats auxexamens. ]...[nos deux comparsesont imaginé une formule imparablepour asseoir définitivement leurnotoriété de «super-enseignants»qui trustent de brillants résultats. Ilsprécèdent les inscriptions deseptembre par une phase sélectivequi démarre début juillet, dès laréception des bulletins scolaires. Ils

prennent soin d’exiger de leursclients une copie pour ne retenir queceux qui ont desmoyennesexcellentes ou à la limitebonnes. Et nul ne saura qu’un trisélectif a eu lieu.]...[le couple faitmouche : il a la garantie d’un bonscore aux examens off iciels etl’assurance d’un boom publicitairedans les hammams, les mosquées,les fêtes et les salles de classe. Desendroits écumés par ses rabatteurs.

]...[un vent de révolte sociale soufflasur le pays. Les quartiers populairesdes vil les se soulevèrent. Desdébordements juvéniles ont faillimettre la ville à feu et à sang. Parmiles nombreux magasins brulés etsaccagés dans le centre-ville, figuraitl’immeuble du couple Abou-Eddinar.]...[Une fois le calme revenu, lesenquêtes commencèrent. D’abordcelles des assurances. Les épouxAbou-Eddinar furent convoqués aupalais de justice pour s’expliquer surdes anomalies.Et elles furentnombreuses : défaut d’assurancegarantissant la sécurité des clients,

pas d’agrément officiel, ni registredu commerce et activité lucrativeinterdite pour un fonctionnaire del’Etat. Cerise sur le gâteau :accusation d’évasion f iscale. Cedernier point fut soumis àl’appréciation des évaluateurs desimpôts : des centaines de milliers dedinars évaporés. Avec ce tristeépisode prit fin la saga du couple,entraînant dans sa chute lesresponsables des administrationschargés d’appliquer la loi contre lemarché informel.

* Pédagogue. Extraits d’un essai àparaître bientôt : Que faire pouréradiquer le fléau des cours payants ?

« Il faut reconvertir les établissementsvers les besoins économiques du pays »

El-Djazaïr.com : L’Algérie célèbre le 50eanniversaire de son indépendance,comment évaluez-vous le parcours dusecteur de la formation professionnelle? 

Mohamed Mebarki : ]...[ C’est un secteurqui a été pris en charge par l’Etat algériendès le début de l’indépendance. L’Etatavait tout de suite pris conscience del’importance que revêt la formationprofessionnelle en tant que pourvoyeurde main-d’œuvre qualifiée à l’économienationale naissante] … [, il a été procédéà la création d’un Commissariat à laFormation professionnelle et à laPromotion des cadres, et un peu plustard, à un Conseil national consultatif dela formation professionnelle et de lapromotion des cadres, rattachés à laprésidence de la République. Il fallaitprendre en charge, en urgence, laformation de l’encadrement algérien, etdonc reconvertir les établissements versles besoins économiques du pays, dansdes spécialités commel’électromécanique, le machinismeagricole, la maintenance industrielle,etc.] … [

El-Djazaïr.com : Et aujourd’hui, quellessont les réalisations les plus importantes?

Mohamed Mebarki  :  Aujourd’hui, noussommes à plus de 1100 établissementsde formation, répartis à travers le pays,

qui accueillent des milliers de jeunes, etqui assurent des centaines de spécialitésliées au développement économique etsocial. ] … [Le réseau de structures deformation totalise une capacitépédagogique de plus de 300 000 postesde formation en mode résidentiel avec54 500 lits pour le régime d’internat, alorsque le potentiel de formation parapprentissage est évalué à plus de 500000 postes, en plus du potentiel deformation à distance dont les limitespeuvent être repoussées au gré de lademande.  Ce réseau de formation, déjàassez dense, ne cesse de se renforcer eninfrastructures puisque, rien que cetteannée, douze nouveaux établissements,un Institut national supérieur deformation professionnelle (INSFP) de450 postes pédagogiques, sept Centresde formation professionnelled’apprentissage (CFPA) de 1900 postespédagogiques et quatre annexes de 275postes pédagogiques viennent d’ouvrir.][

El-Djazaïr.com : Nous avons constaté unmanque d’engouement des jeunes pourla formation professionnelle. Quelle enest la cause, d’après vous, Monsieur leMinistre ?

] … [le secteur de la formation et del’enseignement professionnels souffred’une fausse image, puisque lesdysfonctionnements qu’on lui prête ne

sont plus de mise, depuis longtemps. C’est pourquoi, nous travail lons àréhabiliter le secteur de la formationprofessionnelle et à corriger laperception, injuste, qu’a la société à sonégard, pour en faire un secteur vital pourle développement économique et socialdu pays, et facilitateur de l’insertion desjeunes au travail. ] [ 

El-Djazaïr.com : Un dernier mot,Monsieur le Ministre, peut-être sur lesperspectives de la formationprofessionnelle dans le contexteéconomique ?

Mohamed Mebarki : L’Algérie a, dès lerecouvrement de son indépendance, prisconscience du rôle de la formationprofessionnelle dans le développementéconomique et social. Le pays a investides moyens colossaux pour parvenir àmettre en place un réseau national,capable de répondre au double besoinen main-d’œuvre qualif iée pourl’entreprise et en formation pour insérerles jeunes dans le monde du travail.Aujourd’hui, alors que le pays connaît undéveloppement économique etindustriel en pleine croissance, et unepopulation jeune, le défi est d’autant plusgrand.  ] … [

Ahmed Tessa

03 Mars 2015

Mohamed Mebarki, ministre de la Formation et de l’Enseignement professionnels, à El Djazaïr.com

Entretien réalisé par LEILA BOUKLI

N° 86 - Mai 2015

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[DROIT]Enfance abandonnée : Kafala ou adoption, les avis divergentLa notion d’adoption et ce qu’elle véhicule, et celle de kafala avec ses insuffisances sont au centre d’une vérita-

ble polémique entre juristes, sociologues, hommes de culte et législateurs. La kafala se définit comme étantl’engagement de prendre en charge un enfant mineur, lui donner son nom sans pouvoir créer un quelconque

lien de filiation, en lui assurant, entretien, éducation et protection.

Des juristes affirment qu’il existe deslacunes juridiques au niveau du Codede la famille qui interdit l’adoptionmais autorise la kafala et cette op-tion  s’avère un concept insuffisantsur plusieurs plans. D’abord, sur leplan filiation, la concordance desnoms reste un concept non clair.Aussi, il faut que la kafala soit un pro-jet de vie et non un acte de charité.Quelqu’un qui prend un enfant pourla kafala c’est pour la vie. Malheureu-sement, le droit algérien ne consi-dère pas le lien parental. La kafala estconsidérée comme un acte de cha-

rité et c’est pour cela que les avo-cats appellent à ce que le Code de lafamille fasse de la kafala une missionnoble qui consiste à construire unadulte de demain. Il est à soulignerque cet enfant n’a aucune protec-tion naturelle après le décès du kafil,parent adoptif. Aussi, la Kafala prendfin une fois les parents décédés.L’enfant se retrouve à la rue. Si c’estune fille, elle est exposée au dangerde la prostitution et si c’est un gar-çon, il deviendra du jour au lende-main délinquant. C’est également,l’une des grandes insuffisances quela n’implique pas les deux parents eten cas de divorce du couple kafil,l’enfant se retrouve automatique-ment dans la rue, car l’un d’eux n’apas le droit de garde ni le droit devisite. C’est contraire au droit civi-que. Toutes ces lacunes doivent êtreétudiées, revues et ce en dévelop-pant des concepts nouveaux sansqu’ils soient contraires à la moralitéreligieuse. Des concepts fondés surle lien socio-affectif, expliquera MeHouhou Afin de protéger l’enfant nésous X. L’avocate demande que sa

situation reste secrète entre l’admi-nistration et l’école pour que cetenfant puisse avoir une vie et surtoutune scolarisation normale. Pour res-ter dans la conformité religieuse etdans le respect de la moralité de l’is-lam, «nous proposons une loi quioblige le géniteur à reconnaître sonenfant, soit par ADN, soit volontaire-ment (la reconnaissance de pater-nité). Éventuellement, de renforcerl’article 44 du Code de la famille  de-vant le tribunal, le juge doit accepterla reconnaissance de paternité sansobliger le demandeur de passer par

le contrat de mariage. Nous ne pro-posons pas l’adoption lorsque la fi-liation de l’enfant est connue. Noussommes pour la filiation d’un enfantné sous X. C’est un droit et nous de-vons protéger cette catégorie depersonnes qui est vulnérable et ex-posée à tous les dangers.

On essaye de régler un phénomènede société qui n’a jamais fait objetde réflexion doctrinale, Le problèmede ces enfants, dit-elle, c’est quel’enfant a droit à la filiation, une foisqu’il retrouve ses parents, mais il n’apas droit à l’identité. «L’enfant peutétablir qu’il est l’enfant de X ou de Ymais il ne peut pas avoir cette iden-tité et ceci même si les parents leveulent». Une autre avocate , aussi«acharnée» a défendre les intérêtsdes enfants abandonnés en l’occur-rence Me Benbraham propose Ausujet de l’avenir de l’enfant qui restesans nom à vie, l’obligation qui doitse faire sur les mères célibataires,lors de l’accouchement, de donnerleur nom à l’enfant et même à décla-rer le nom du père biologique.» His-

toire de responsabiliser ces gens.«Impossible» disent les médecins laréalité est plus complexe estiment-ils. Le refus d’accueillir les femmesqui veulent abandonner leur bébéest considéré comme non-assis-tance à personne en danger. «Lemédecin a pour mission de sauverdes vies humaines.»

Pour leur part, les hommes de reli-gion, s’interrogent  sur la faisabilitéde cette proposition dans la sociétéalgérienne où les réactions envers lamère célibataire peuvent aller de lamarginalisation jusqu’à la menace de

mort. Cheikh Tahar, imam à Chéragaexplique qu’«avant, il y avait le pro-blème d’orphelins il n’y avait pas leproblème des enfants nés sous x. Lamère était connue le père aussi d’unefaçon générale  donc il y a  El-Kafala». Et d’ajouter «l’enfant est élevé,chéri nourri mais puisqu’on connaitses véritables ascendants, il n’y avaitpas à les changer le Coran dit qu’ilfaut les nommer aux noms de leursparents quand ils sont connus», sou-ligne-t-il.

Aujourd’hui on assiste au problèmedes enfants nées sous « X » pour celales musulmans sont partagés à pro-pos de l’adoption, certains admet-tent que l’enfant porte le nom desparents adoptifs d’autres non. On ale Coran, la sunna et la charia, il fautjuste un peu d’Idjtihad.

14 Janvier 2015

Farida Larbi

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NRP, Juin 2015, n°27

[DROIT]Algérie : seules 2500 femmes divorcées

bénéficient de la pension alimentaire

Malgré  la consolidation de la placede la femme dans la sociétéalgérienne, et notamment celle dela femme divorcée avec l’annonce le8 mars dernier de la création d’unepension qui doit lui être allouée, laréalité n’est pas encore à la hauteurdes espérances. S’adressant auConseil de la Nation hier, le ministrede la Justice Tayeb Louh a regrettéque la femme algérienne «rencontretoujours plusieurs problèmes quioffensent sa dignité dont la difficultéde recouvrer une pensionalimentaire après un divorce, enraison de l’incapacité ou du refus deson ex-mari de la verser».

En effet, malgré les amendementsapportés au code de la famille, lafemme divorcée se retrouve dansune situation précaire, faute de

moyen pour élever seule sesenfants. En cause, le faible montantet surtout la difficulté pour toucherla pension alimentaire que doit verserl’ancien conjoint. Le ministre de laJustice a ainsi rappelé que sur untotal de 22.189 décisions de justicerelatives à l’octroi d’une pensionalimentaire, seules 2.498 avaient étéappliquées en 2013. Comme lesouligne le journal Horizons dans unarticle sur les femmes divorcées, denombreux pères de familles ensituation d’insolvabilité ont étécondamnés pour non-versement depension alimentaire. La pensiondevient alors une dette civile àréclamer devant les juridictionsciviles, mais la procédure restelourde pour les femmes sansressources.

Le projet de loi sur la création Fondsde pension alimentaire au profit desfemmes divorcées ayant la garde deleurs enfants prévoit le versementd’une redevance financière « en casde non-exécution totale ou partiellede l’ordonnance ou du jugementfixant la pension alimentaire, enraison du refus du débiteur (le pèrede l’enfant) de payer, de sonincapacité de le faire ou de laméconnaissance de son lieu derésidence. » relève l’APS. Unemesure qui doit permettre auxfemmes divorcées de toucher plusfacilement leur pension alimentaireen cas de non-paiement de l’ancienconjoint.

La demande du bénéf ice deredevances financières du fond dela pension alimentaire est présentéeau juge président de la section desaffaires familiales, précise l’APS.

La commission des affairesjuridiques, administratives et desdroits de l’Homme du Conseil de laNation a salué cette initiative dansson rapport préliminaire. Elle n’acependant pas manqué d’exprimerses préoccupations quant à la miseen oeuvre de la procédure deredevance f inancière  dans lesrégions du sud où les instances encharge de ces dossiers sontinsuff isantes ou éloignées, notel’APS.

11 Décembre 2014

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NRP, Avril 2014, n°21

[CULTURE/MÉDIAS]

Langue et culture. Engouement pour le dialectal

Parlons algérien !Langue authentique du pays ou langue de la rue ? Simple variante de l’arabe ou produit du génie populaire

maghrébin ? Dialecte ou langue ? Les avis sont souvent tranchés et les débats contradictoires sur ce parler quiest pourtant pratiqué et compris par la très grande majorité des Algériens. Linguistes, intellectuels et artistes

s’intéressent de plus en plus au parler algérien.

Bien qu’il ne jouisse d’aucunereconnaissance officielle, le dialectalrevient systématiquement sur ledevant de la scène dès qu’onsouhaite s’adresser aux Algériens.On pensera, par exemple, auxpolitiques ou aux publicitaires qui ontvite compris que pour parler auxAlgériens, il fallait parler algérien. S’ilne… fait pas l’objet derevendications politiques, le dialectals’impose et s’épanouit simplementpar son usage quotidien.

En plus d’être la langue maternelle…le dialectal possède également unedimension littéraire à travers unelittérature populaire ancienne,extrêmement riche et encorevivante. Ces aspects ont été évoquéslors d’une récente journée d’étudeau Centre d’études diocésaind’Alger. Autour de la questionvolontiers polémique «La darija, unelangue à part entière ?», spécialisteset passionnés du dialectalalgérien ont présenté leurstravaux et exposé leursconceptions… La linguisteKhaoula Taleb Ibrahimi… aconsidéré que «les lignessont en train de bouger» dansnotre rapport à la langue. «Lastigmatisation au nom d’unpurisme exclusif de touteexpression non canonique nesemble plus de mise», lit-ondans la présentation…

On note, certes, uneprofusion et une confusiond’appellations concernant leparler algérien, mais lesconférenciers trouveront lesmots pour cerner cettelangue. «Dans quelle languerêvons-nous ? Quelle langueparle une dame centenairede La Casbah qui necomprend ni l’arabeclassique ni le français  ?...C’est cela notre languematernelle», résume MehdiBerrachid, journaliste etauteur. Le spécialiste enlittérature populaire,Abdelhamid Bourayou,insiste pour sa part sur le richecorpus littéraire produit danscette langue… Il rappelleque les auteurs de poésie

populaire sont issus d’une élited’intellectuels et de fins lettrés quiont choisi de versifier dans la languecomprise par le plus grand nombre.«La poésie ‘’melhoun’’ se retrouvedans tout le pays, d’est en ouest etdu nord au sud»... Il rappelletoutefois que la langue du melhounn’est pas la langue de tous les jours,mais constitue une sorte de registresoutenu ou de langue littérairealgérienne et, au-delà, maghrébine.

Interrogé sur la langue du melhoun,le sociologue de la poésie populaire,Ahmed Amine Dellaï, nousexpliquera : «Un poète est unlittérateur, il compose dans unelangue littéraire, un poète populairecompose dans une langue qui doitêtre populaire (dialectale dans sasyntaxe) et en même tempsélaborée, riche en vocabulaire». Lemot melhoun désigne d’ailleurs toutautant la poésie que sa langue qui est

une sorte de «dialectal littérarisé».Cette langue est partagée par ungrand nombre de poètes à traverstout le Maghreb. La langue, commela forme poétique, a perduré dans letemps. Du XVIe siècle… à nos jours,les poètes de melhoun puisent dansle même fonds linguistique avec,bien entendu, des néologismes etdes variations qui font la vitalité decette pratique artistique.Concernant le rapport de cettelangue à l’arabe classique, M. Dellaïillustre : «Elle est plus proche del’arabe que le français du latin. Maisun arabe avec un soubassementprosodique berbère… Pour avoir uneidée, sur le plan rythmique le dialectearabe oriental serait du blues, et ledialecte arabe maghrébin du rock !» 

Allant de pair avec la poésie, lachanson a porté haut le verbealgérien à travers les différentesmusiques algériennes. Les

chanteurs de chaâbi ont parexemple remis au goût du jour despoèmes tirés du patrimoine. Ilsont également impulsé unenouvelle dynamique de création,à l’image de la collaboration entreMohamed El Anka et MustaphaToumi qui donnera le chef-d’œuvre Sobhan allah ya l’tif.D’autres paroliers… écriront,durant les années 70’ deschansons dans une langue inspiréedu parler de leur temps.

Au cinéma, le dialectal a été choisidès les premiers courts-métragesd’avant l’ indépendance... Cemedia artistique destiné à unediffusion auprès de tous lespublics utilise naturellement lalangue comprise par le plus grandnombre… Il en va de même pourle théâtre algérien dont l’une destoutes premières pièces, Djeha(1926), est écrite dans le parlerpopulaire par Allalou. Dans unouvrage à paraître, le critique dethéâtre Ahmed Cheniki… rappelleque la langue du théâtre a étédéterminée par des facteurshistoriques touchant aux auteursmais aussi, et surtout, au public…Rachid Ksentini, Allalou ouMohamed Touri sont d’originepopulaire. Comment pouvaient-ilsse permettre d’exclure de leur

Walid Bouchakour

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[CULTURE/MÉDIAS]espace de représentation les gensauxquels ils s’adressaient ? Entre le‘‘peuple’’ et l’élite cultivée, ilsavaient choisi le ‘‘peuple’’. C’est lerécepteur qui détermine la langue àemployer». C’est ce même choix quiincitera, plus tard, Kateb Yacine àabandonner le français pour produireun théâtre en dialectal. Lesdramaturges Ould AbderrahmaneKaki et Abdelkader Alloula ont écritparmi les plus grands classiques dugenre : «Kaki a adopté le style dumelhoun ; Alloula, lui, a poétisé ledialectal», explique Mohamed Kali,journaliste et auteur de Cent ans dethéâtre algérien…

Des dicos et des hommes

Outre leur usage pratique, «lesdictionnaires permettent de jaugerl’évolution d’une langue d’uneépoque à l’autre», rappelle MehdiBerrachid, auteur d’un excellent

Dictionnaire du parler algérois. Avantlui, d’éminents chercheurs se sontpenchés sur la langue algériennepour tenter de la cerner dans undictionnaire. Le nom de MohamedBen Cheneb (1869-1929) resteaujourd’hui encore une référencedans ce domaine de recherche. Ondoit à ce brillant érudit une versionrevue et corrigée du Dictionnairepratique arabe-français de MarcelinBeaussier, paru initialement en 1871(rééditée en 2014 par l’OPU). Cetouvrage est le premier dictionnairebilingue du parler algérien et reste lamatrice des publications suivantes.Ben Cheneb s’est aussi penché surles rapports de cette langue avec leturc et le persan. En 1882, BelkacemBen Sedira dévoile à son tour sonDictionnaire bilingue de la langueparlée en Algérie… La périodecoloniale a paradoxalement connuun nombre important de recherches

sur le sujet… Dans l’Algérieindépendante, la tendance étaitd’abord à l’unif ication sous labannière d’une langue unique. Parla suite, dans le sillage des études surle tamazight, le parler algérien aconnu un regain d’intérêt. Les outilsde la linguistique modernepermettent d’aborder le parleralgérien de façon inédite dans lesrecherches universitaires…

02 Mai 2015

Taos Amrouche, une femme sous influence

Les éditions Joëlle Losfeld publientles Carnets intimes de la chanteusekabyle Taos Amrouche, qui fut aussiune romancière éperdument éprisede l’écrivain français Jean Giono.

Au milieu des années 1990, l’éditricefrançaise Joëlle Losfeld eut la bonneet généreuse idée de sauver del’oubli les livres de la chanteused’origine algérienne MargueriteTaos Amrouche. En 1995 et 1996, ellepublia ses quatre romans - Jacinthenoire, Rue des Tambourins, L’Amantimaginaire et Solitude ma mère - ainsiqu’un texte de l’universitaire DeniseBrahimi, Taos Amrouche,romancière.

Vingt ans plus tard, la mêmeéditrice complète ce travail enrévélant les Carnets intimesde la chanteuse, soit unesomme de plus de 400 pagescouvrant la période 1953-1960.La presse française n’a pasmanqué de se jeter avecvoracité sur cette œuvre toutà fait singulière. Et pour cause! Dans les cahiers manuscritsauxquels elle se confieméthodiquement, TaosAmrouche raconte avec forcedétails sa liaison passionnelleavec l’un des plus célèbreshommes de lettres français,Jean Giono.

N’écrivant pas pour être lue,elle s’exprime sans garde-fous, allant jusqu’à décrire ses

(rares) moments d’extase charnelleavec l’auteur du Hussard sur le toit…En réalité, ces Carnets intimes sontle récit au jour le jour d’une passionde sept ans, certes brûlante… maisoù l’aspect charnel n’est qu’une desdimensions d’un amour à sensunique qui fut aussi intellectuel.

«Certes, on s’émerveille devant lalangue de Camus, écrit TaosAmrouche. On se dit : voilàquelqu’un qui connaît les lois del’architecture. C’est noble, c’est pur,c’est simple de lignes, ça évoquemême une plénitude antique mais çane remplit pas le ventre vide, cela neredonne pas le goût de vivre.Personne n’a cette pâte sensuelle et

pourtant lyrique de Jean ni cesfusées qui partent du sein de la terreet des blés vers les espaces stellaires.Avec lui, tout est mélangé, brassé.Le ciel est à l’image de la terre et laterre à l’image du ciel comme lui-même est colline, herbe, nuages,comme lui est plein de sang vert...»

Rien n’est passé sous silence

Si les confessions de l’amoureusetransie peuvent parfois dériver versdes considérations l ittérairesclairvoyantes… au fur et à mesurede la lecture s’installe une impressionde gêne, comme si les secrets lesplus inavouables d’une femmeétaient jetés en pâture à un public

qui n’en demandait pas tant.Ses jalousies, ses remarquesmesquines à l’encontre de lafemme de Giono et de sessupposées maîtresses, sescalculs, ses échecs, sessouffrances, sonégocentrisme, son orgueil,rien n’est passé sous silence.

Comme l’écrit le docteur ensémiologie YaminaMokaddem dans sa courtepréface : «Tels sont cescahiers, dans lesquels, pourles transcrire, nous sommesentrés presque pareffraction, tant ils nous sontapparus comme un templeinviolable, au sein duquel lesecret de l’écriture del’auteur, son expression de

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[CULTURE/MÉDIAS]l’unique et de l’intime, allait être etétait dévoilé.»…

Les Carnets apportent un autreéclairage sur ce personnage hors ducommun. De son vivant, c’était unefemme théâtrale qui crânait parcequ’elle avait toujours l’impressionqu’on voulait l’écraser. Avoir sa visionde l’intérieur est passionnant.» Âgéede quarante ans en 1953 - elle est néeen 1913, à Tunis, de parents kabyleschrétiens -, aveuglée par sa passion,Taos Amrouche resteparadoxalement d’une grandelucidité quant à son besoind’absolu. «Je pensebrusquement à la soeur dePaul Claudel, sculpteur, queson amour et son admirationpour Rodin ont perdue.L’article effrayant que j’ai lusur sa fin misérable m’a faitfrémir. Rodin l’avait commedévastée. Rien n’avait pu lasauver, pas même son art…»Confrontée à ces carnetsavant que leur publication nesoit autorisée par la fille queTaos Amrouche eut avec sonmari, le peintre françaisAndré Bourdil, DeniseBrahimi confie : «L’intérêt deces écrits, c’est leur caractèreobsessionnel. Sa passionoccupe la totalité de sa vieentre 1953 et 1960. Dotéed’une force d’aimerincroyable, elle ne craint pasle ridicule ni les railleries decertains amis de Giono. Elles’accroche à lui avec unedétermination inouïe»… Le20 mai 1960, en pleine guerred’Algérie, Taos Amrouche écrit ceci: «Je vis dans l’ignorance la pluscomplète de ce qui se passe dans lemonde. Pourtant, le ciel politique estsombre et j’entends dire que destorpilles transportent dans lesespaces interplanétaires desobservateurs vivants. Cela me laissefroide.» Les mentions relatives aux«événements» sont rares, allusives,alors même que le frère de Taos, lepoète et homme de radio JeanAmrouche, est en contact avec lesinstances du FLN comme avec legénéral de Gaulle.

À vrai dire, il aurait été souhaitable,pour le lecteur comme pour TaosAmrouche elle-même, d’adjoindreaux Carnets un appareil critiqueconséquent rappelant aux moins de20 ans qui fut cette femme. À savoir: une romancière mais aussi, etsurtout, une chanteuse

extraordinaire. Née en Tunisie,parce que ses parents avaient quittél’Algérie en 1910, elle a reçu de samère Fadhma Aït MansourAmrouche le «feu sacré» des chantsberbères. «Fadhma Aït Mansour aété élevée en Algérie chez lesbonnes sœurs, raconte DeniseBrahimi.

Une institutrice a aussi beaucoupcompté pour elle, lui communiquantle goût des textes et de la littératurefrançaise. Elle adorait parler, elleavait le sens du langage et il lui arrivait

fréquemment pendant ses séjoursen Kabylie de rassembler son mondepour raconter des histoires.» Sonpenchant pour les choses de l’esprit,Taos Amrouche le doit aussi à sonfrère Jean, qui «l’a précédée dansl’acquisition des connaissances» etqui, à Tunis, fréquentait denombreux intellectuels.

C’est d’ailleurs un certain André Gidequi lira parmi les premiers Jacinthenoire, le roman que Taos Amrouchetermine en 1939 et sur lequell’écrivain rédige une lettreenthousiaste. Mais la SecondeGuerre mondiale retarderalongtemps la publication du livre…

Kabyle et chrétienne

Des images lumineuses de l’enfanceà Radès, du sentiment de rejet lié aufait d’être à la fois kabyle etchrétienne, tout comme de l’aide

reçue de Jean Giono par le coupleBourdil-Amrouche lors de sonarrivée en France, les carnets nedisent pas grand-chose tantl’amoureuse est obnubilée par lesrendez-vous manqués et lesdérobades de celui qui inspireraL’Amant imaginaire. De même ils nedisent rien, ou si peu, des succèsremarquables de ses chantsberbères - toujours éditésaujourd’hui… Elle aimaitpassionnément chanter et donnait à

chaque fois le meilleur d’elle-même, offrant ses chantsaux publics européens…,dans des milieux qui étaientloin d’être populaires. Sesconcerts ont été destriomphes, dans lesnombreux pays où elle estallée jusqu’en 1976,quelques mois avant sa mort.

C’est la partie de son œuvrequi a été retenue, plus queses romans, qui relèventd’un genre que l’on pourraitaujourd’hui apparenter àl’autof iction.» TaosAmrouche participa mêmeau Festival mondial des artsnègres organisé par LéopoldSédar Senghor en 1966 - etle poète président lui renditun hommage appuyé dans unarticle publié dans le no 103de Présence africaine, en1977. «C’est Mme TaosAmrouche qui nous ramenaaux racines, encore

humides, de ce grand peuple qu’estl’ethnie berbère, qui, au moment desconquêtes grecques et romaines,occupait toute l’Afrique du Nord,avec ses expressions égyptienne,libyenne, numide et «maure». C’estelle qui fit connaître et, surtout,sentir les chants-poèmes desBerbères dans leur langueoriginaire… Quant à la guerred’Algérie, il est évident que cettefarouche promotrice de la cultureberbère y accordait une importancecapitale. «Elle a reçu beaucoup degens du FLN, des combattants,affirme Denise Brahimi. Elle était,comme son frère Jean, passionnéepar la cause de l’indépendance.»

25 Décembre 2014

Nicolas Michel

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[MÉMOIRE]

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ZOOM SUR UN RICHE PATRIMOINE FILMIQUEET ICONOGRAPHIQUE

…Fêter les 50 ans de laCinémathèque algérienne n’est pasune sinécure. C’est d’autant plussymbolique…. de découvrir … «lasaga de la création de lacinémathèque» avec ses temps forts… de films célèbres dont La batailled’Alger…Comme il est impossible decouvrir l’histoire du demi-siècled’activités de la cinémathèque, nousavons pris le parti de raconter lapériode qui a vu sa naissance et denous arrêter à la fin du Panaf et desannées 1960. Les visuels … sedéclinent autour des aff ichesconçues par le très talentueux artistesuisse François Roulet et desphotographies prises par DanielLeterrier. Tous deux étaientmembres de cette dream teamqu’animait avec brio etrayonnement, Jean-Michel Arnold.… du Mama, il suffira aux visiteursde traverser la rue pour aller suivreles cycles de films qui renvoient à latrentaine d’aff iches de FrançoisRoulet. A chacun de ces cycles quiavaient été programmés par Jean-Michel Arnold, correspond une mini-rétrospective d’œuvres classiqueset une centaine de films du mondeentier, datant des années 1960 etprovenant du fonds de laCinémathèque algérienne...» écrit lecommissaire général AhmedBédjaoui dans le riche catalogue decette exposition dont un portrait ennoir et blanc lui est consacré aussi,bien évidemment compte tenu deson grand apport au 7e art algérien.Parmi les autres portraits que l’onpeut distinguer également celuid’Elias Moussaoui, responsable desarchives, Bernard Riobé, pianisteimprovisateur qui a accompagnénotamment les films muets avecgrâce et subtilité. Le cinéma africain

avait eu droit notamment au premierFestival culturel panafricain de 1969.Il est il lustré par ses ferventsreprésentants tels SoulemyaneCissé, Med Hondo, Djibril DiopMambaty et Semben Ousmane, SamBabakar, Lionel N’Gakane entreautres. L’expo a choisi aussi deraconter un cinéaste, Von Sternberg,immortalisé en images noir et blancpar le photographe Daniel Leterrierqui l’a suivi dans ses déambulations àtravers les villes d’Alger, Tlemcen, aucœur de groupes différents: desfemmes, des enfants, des musiciens

et des marchands.Une trentaine declichés inédits, faut-il le souligner. Al’entrée du Mama, au fond, le publicpourra admirer les dessins et autresaff iches signées François Roulet.Véritables chefs d’œuvre qui nousont marqués tant par leur forme etcouleurs expressives qui attirentd’emblée l’attention.«De l’avisunanime, les trente-deux affichesqu’il a composées durant les septannées qu’il a consacrées au servicede la Cinémathèque algérienne

constituent la partie la plus aboutiede son œuvre graphique et un grandmoment de l’histoire de l’affiche decinéma» écrit Françoise Coursagetdans le catalogue. A côté de celal’expo comporte aussi plusieurscycles de cinéma déclinés enaffiches et d’images extraites descélèbres f ilms présentés à lacinémathèque.On citera celles descinéastes du maquis comme feuRené Vautier, disparu cette année,Pierre Clément, Djamel Chandarli,Mohamed LakhadarHamina, lecinéma des années 1960 en Algérie,comme celui de MustapahaBadie,Ahmed Rachedi, Riad MohamedSlim, TewfikFarès, AbderrahmaneB o u g u e r m o u h ,GhaoutiBendeddouche, Sid AliMazif, mais aussi les coproductionsdont La bataille d’Alger de Gillo,PontecorvoPeriOnzo, L’étranger deLuchino Visconti, Z de Costa Gavras,des cycles du cinéma mondial, àl’instar de Charlie Chaplin, Le cinémasoviétique, l’expressionismeallemand, Fritz Lang, Josef VonStenberg, le cinéma français, et sesbelles affiches telles des films Lebeau Serge de Claude Chabrol, Larègle du jeu de Jean Renoir, Jules etJim de François Truffaut, Jean-LucGodard, mais encore le cinéma

suédois, polonais, italien, japonais,maghrébin, arabe avec YoussfChahine, le western de John Ford, lef ilm noir, Alfred Hitchcock, lacomédie musicale américaine etc…

O. HIND

11 Mai 2015

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[MÉMOIRE]

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TIPAZA : LE TOMBEAU DE LA CHRETIENNE,

UN MONUMENT RUINE PAR LA NEGLIGENCEEntre la mer turquoise et l’imposantmont Chenoua, à l’écart de lanouvelle rocade sud qui rase le basde la colline qu’il surplombe, trônece monument majestueux propiceau repos éternel. Constructioncylindrique, le tombeau de lachrétienne, le mausolée des rois deMaurétanie ou Kbar al Roumia, sedégrade. Comme promis à l’oubliéternel. Le vide sidéral. Depuis desannées, les visiteurs ne font que leconstat de l’abandon des lieux. Lespectacle est affligeant. Sur la plate-forme attenante au monument,s’étale un immense parking sur unevaste esplanade. Deux restaurants ysont installés. Une porte d’entréepayante vers le tombeauproprement où campent desvendeurs de babioles qui n’ont riend’original. Une fois la porte franchie

moyennant un ticket de 20 dinars, onse retrouve face à un monument quis’impose... et puis rien! Unquadragénaire originaire du sudpropose du thé badauds, descacahuètes et… son chameau auxéventuels touristes pour des photossouvenirs. C’est le seul«accompagnement» visible pour lesvisiteurs qui viennent pour lapremière fois pour regarder despierres, sans plus. Rien pour leurexpliquer ce que représente cetimposant monument. Ni guidestouristiques, ni brochures, pas lemoindre opuscule pour renseignerles visiteurs. Seule une plaque enretrait que l’on remarquerait à peineindique que le monument a étéclassé au patrimoine mondial del’humanité par l’Unesco en 1982. Celainspire du respect mais n’informepas.Et pourtant, il y a des histoires à

raconter sur ce «tombeau de laroumiya»! Selon certaines versions,le tombeau a été édifié en hommageà une impératrice d’origine romaine.Adulée par son peuple, cettesouveraine avait pour nom CléopâtreSéléné, fille de la reine égyptienneCléopâtre et épouse de Juba II,empereur de la Maurétaniecésarienne dont la capitale est laCésarée, l’actuelle Cherchell. Pourd’autres historiens, il s’agit plutôtd’un mausolée royal construit par lemême Juba II et son épouseCléopâtre Sélène. C’est cettehypothèse que conforte l’historienfrançais Adrien Berbrugger. Ilaffirme que ce tombeau n’est en faitque le mausolée des rois berbèresConstruit par Juba II. Ce dernier

voulait consacrer une sépultured’égale valeur à celle de ses propresancêtres numides, celle deMedghassan, et des pyramides despharaons d’Egypte, contréed’origine de sa propre épouse.L’unique entrée du monumentsituée dans un soubassement ducôté de l’est est emmurée depuis1994. A cette époque-là, explique undes agents sur place, les terroristesavaient menacé de faire sauter letombeau. Ce qui a poussé lesautorités à en condamner l’entrée.Rien n’a changé depuis, l’uniqueaccès au mausolée resteemmuré.»L’endroit est magnifiquemais rien n’incite ses visiteurs à yrevenir», note un des rares pères defamille à s’y aventurer avec saprogéniture. Deux catégories devisiteurs se côtoient ici : des jeunesgens en quête d’un coin à l’abri des

regards, dans les buissons alentour,et des curieux qui veulent découvrirpar eux-mêmes cette «merveille»dont on leur a tellement parlé. Lespremiers sont mal vus par lesseconds. On y rencontre aussi desgamins qui escaladent les parois enescalier. Le site est une vraiepassoire, constate un gardien. On yaccède de toute part. A l’arrivée desgardiens, le matin, de nombreusespersonnes sont déjà à l’intérieur. Ala fermeture de la porte, à 17h, desgens continuent de venir. On laissefaire. On n’empêche pas les gens degraver des noms et des dates sur lesparois du monument. On permetmême à des troupeaux de paîtretranquillement dans l’enceinte !Lemonument funéraire qui a traverséles siècles résiste mal à unedégradation qui est plus le fait de

l’homme que celle du temps. Aucuntravail de restauration ou deconsolidation n’a été engagé depuisfort longtemps. Les blocs qui entombent et jonchent le sol en sonttémoin. En faisant le tour de l’édifice,on constate qu’entre les pierrespoussent des buissons et desarbrisseaux. Des plantes quidégradent un peu plus le vestige eteffritent ses matériaux.Si rien n’estfait rapidement, le monument finirapar ressembler à une immensetouffe d’herbe plutôt qu’à uneatypique pyramide cylindrée. Le«Tombeau de la chrétienne» est unebelle ruine en danger.

12 Mai 2015

Ghada HAMROUCHE

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[BIBLIOGRAPHIE]

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[REVUE]

En 1953, Taos Amrouche est à un moment charnière desa vie, qu'lle ressent elle-même comme particulièrementimportant, et l'écriture de son journal va agir tel un exu-toire, lui permettant de se raconter, de se comprendreet d'essayer de comprendre également le comporte-ment et la psychologie de personnes appréciées etaimées, ou exécrées, qui l'ont accompagnée à différentsmoments de sa vie.»

Carnets intimes

MARGUERITE TAOS AMROUCHE

Présentation et notes de Yamina Mokaddem.Editions Joëlle Losfeld ,2014

[FILM]

Tous les chemins mènent à l'autre -Chroniques d'un tour du monde

interreligieuxSamuel Grzybowski

Editions de l’Atelier ,2015

La guerre des civilisations et des religions n’est pas fa-tale. Avec un juif, un musulman, une bouddhiste, un athéeet une agnostique, Samuel Grzybowski est parti à la ren-contre des artisans du dialogue au cours d’un tour dumonde. Un étonnant carnet de route autour du globe.

Certifiée Halal

Réalisé par Mahmoud Zemmouri

2015

[MUSIC]

Emmaar - Tinariwen

Le nom propre maghrébin de l’homme, del’habitat, du relief et de l’eau

sous la direction de

Ouerdia SADAT YERMECHE

et FARID BENRAMDANE

Editions du CRASC ,2013