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Le nouveau chantierde la parité
La future loi sur le quota de femmes dans les conseils d'administrationdes entreprises ouvre un nouveau dossier pour les DRH. Ces derniers vont en effet
devoir alimenter le vivier de potentielles administratrices. Les politiques mises en place
pour féminiser les instances dirigeantes semblent efficaces.
Tous droits de reproduction réservés
Date : 26/10/2010
Pays : FRANCE
Page(s) : 20-23
Rubrique : ENQUETE
Diffusion : 13046
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Après l'abandon
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Une page se ferme, une
nouvelle s'ouvre dans le
traitement des inégali
tés entre les femmes et les
hommes au travail. Adoptée à
l'Assemblée nationale au début
de l'année, la proposition de loirelative à la "représentationéquilibrée des femmes et des
hommes au sein des conseils
d'administration et de surveillance"
sera discutée au Sé
nat le 27 octobre.
Dans la version des députés, les
conseils d'administration {CA)et de surveillance des sociétés
cotées ne peuvent pas comporter moins de 40 Va d'adminis
trateurs du même sexe, sous
peine d'annulation des nomi
nations hors quota. Les entre
prises disposeront de six ans
pour atteindre cet objectif et de
trois ans pour parvenir à une
proportion de 20 ^o.
Dans le même temps, les obligations des entreprises en ma
tière d'égalité salariale s'assou
plissent. Un article de la réforme
des retraites annule ainsi l'ob
jectif de suppression des écarts
de salaire entre les femmes et
les hommes d'ici à fin 2010,prévu dans la loi de mars 2006
sur l'égalité salariale et promis
par Nicolas Sarkozy.
1 îoo administratricesdans ies cinq ans
De la réalisation de l'égalité de
rémunération pour toutes à la
recherche de la mixité dans des
instances décisionnaires mais
minoritaires, l'égalité profes
sionnelle gagne-t-elle au chan
ge ? Rachel Silvera, membre du
Mage (marché du travail et
genre) du CNRS, par ailleurs
proche de la CGT, a beau être
favorable aux quotas dans les
CA, elle craint que l'abandon
de l'échéance de fin 2010 ne
brise la dynamique de négocia
tion enclenchée par les différentes lois (lire p. 29).
Quoi qu'il en soit, la proposi
tion de loi sur les quotas ouvre
un nouveau dossier pour les
DRH. Si elle est adoptée, il fau
dra trouver 1 100 administra
trices au cours des cinq prochaines années, calcule Caroline
Weber, directrice générale de
Middlenext, une association re
présentant les valeurs moyennes
cotées sur Euronext et Alter-
next.
Certes, la mixité des conseils
d'administration concerne
moins directement les DRH que
l'obligation d'aboutir à un ac
cord ou à un plan unilatéralpour l'égalité professionnelle :
les DRH n'ont pas voix au cha
pitre dans la composition d'un
conseil d'administration, quirelève du Code du commerce.
Certes, également, l'ouverture
des grandes écoles aux femmes
augmentera mécaniquement la
proportion de femmes éligibles
à l'administration des entreprises. Certes, enfin, les entre
prises pourront toujours faire
appel à des"cumulardes"
pour
atteindre leur quota, au lieu
d'élargir leur conseil à de nou
velles administratrices.
Mais, à terme, il faudra bien agir
pour augmenter la taille du vivier de femmes susceptibles
d'entrer dans les CA. Ce qui,pour le coup, relève de la com
pétence des DRH. C'est en toutcas l'hypothèse de l'Institut fran
çais des administrateurs (IFA)et de l'Observatoire sur la res
ponsabilité sociétale des entre
prises (Orse). Dans un rapport
conjoint, publié en septem
bre 2009 et consacré à la "représentation des femmes dans les
organes de gouvernance d'entreprise" l'IFA et l'Orse pré
voient que la réalisation du
quota de femmes dans les CA
se fera en deux temps.
Développer L'offre
Lors d'une phase de transition,les acteurs cherchent simple
ment à répondre à la demande
de nouvelles administratricesen puisant dans le vivier exis
tant. Puis, dans une seconde
phase, plus longue, il s'agit dedévelopper l'offre, en sollicitantdes femmes moins expérimen
tées et donc plus jeunes. « Dans
cette optique, les acteurs tradi
tionnels de l'entreprise, notamment les managers, et aussi lesdirections de ressources hu
maines, ont un rôle fondamen
tal à jouer, à condition aussi que
les femmes deviennent
à part entière les pro
pres acteurs de leur de
venir et se saisissent de
leurs futures opportu-
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njtés de parcours profession
nel », relèvent les auteurs du
rapport
"Ladyboom"
Actuellement, les entreprises
françaises sont dans lapremière
phase. Anticipant sans doute la
loi sur les quotas, leurs conseils
d'administration connaissent
en ce moment, selon l'expres
sion de l'agence de communication financière Capitalcom,
un "ladyboom* qui fait le bon
heur des cabinets de chasse de
tètes (lire ci-dessous). Selon le
dernier tableau de bord de l'Eu-
ropean professional women's
network, publié au mois d'oc
tobre, la proportion de femmes
dans les CA des 56 entreprisesfrançaises les plus capitaliséesest passée de 7,6 % en 2008 à
pratiquement 12 Vo en 2010.
Une belle progression, même si
les deux tiers du chemin restent
encore à parcourir pour at
teindre le seuil intermédiaire de
20 «ft.
Cependant, relève le cabinetRussel Reynolds Associates, co
auteur du tableau de bord, 3 ad
ministratrices sur 5 entrées dans
les conseils du CAC 40 en 201 0
sont des étrangères. H faut donc
développer le vivier français.
Pour d'autres raisons, mais qui
servent objectivement la mixitédes CA, certaines entreprises se
sont déjà impliquées en faveur
de la promotion des femmes
dans les instances dirigeantes.
Leur motivation est principalement dediversifier l'encadre
ment supérieur et de gérer les
talents, dans une perspective
d'égalité de traitement et de
création de valeur. En tout cas,
aucune n'envisage la progression des femmes comme un
moyen de promouvoir un hypothétique style managérial fé
minin, que Christine Lagarde,ministre de l'Economie, dans
une récente interview auJVfonde,
définit ainsi : « Plus participa
tif, plus inclusif, plus respec
tueux, plus lent parfois. »
Trois leviers d'action
Stéphanie Mateos, directrice de
projets au cabinet de conseil enmanagement Korda Se Partners,
intervient auprès d'entreprises
qui veulent favoriser la progres
sion des femmes dans les ins
tances dirigeantes. Elle constate
que les entreprises actionnent
trois leviers.
Le premier consiste à agir sur la
culture d'entreprise, via des for
mations à la diversité et une organisation du travail plus flexible
(télétravail, horaires de réu
nions.. .). Le deuxième porte sur
les processus RH de recrutement
et de promotion, ainsi que sur
l'identification des hauts poten
tiels. C'est ce que font, par exem
ple, Bouygues Immobilier, Fran
ce Télécom,Total ou Air Liquide(lire p. 24, 25 et 28). Enfin, et
c'estla tendancedu moment, de
plus en plus d'entreprises cher
chent à "libérer le potentiel desfemmes"endéveloppant,àrins-
tar d'Auchan, d'Allianz (Vire p.
26 et 27) ou de Renault, lès ré
seaux de femmes, le mentorat
etle tutorat « Cela n'estpas suf
fisant », prévient toutefois Sté
phanie Mateos. Une réelle pro
motion des femmes dans les plus
hautes instances « suppose de
les faire monter à tous les ni
veaux »; en outre, le projet doit
être « défendu par la DG, spon
sorisé - idéalement par un
homme -, ciblé, et suivi dans la
durée ».
Objectifs chiffrésBien plus sûres d'elles que sur
le dossier de l'égalité salariale,certaines entreprises se fixentdes objectifs chiffrés et des
échéances pour augmenter la
proportion de femmes dans
l'encadrement supérieur. France
Télécom veutatteindre 35 "ften
cinq ans ;Allianz vise 30 %mais
sans échéances ; et Lafarge 20 Vo
d'ici à 2012. Contrairement à
l'égalité salariale, la mixité des
instances dirigeantes a ceci
d'encourageant qu'elle se me
sure beaucoup plus facilement
Ainsi, la proportion de femmesparmi les hauts potentiels de
Total a progressé de4 points en
quatre ans ; et de 16 points ensept ans à Air liquide. En re
vanche, Lafarge n'atteindra pas
son objectif dans les délais. Etil est trop tôt pour faire un pronostic pour France Télécom et
Allianz.»EMMANUEL FRANCK
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