notre supplément : courrier volumeii.-n') 4. prix...

12
Notre supplément : L'INDE NOUVELLE LE COURRIER PUBLICATION DE L'ORGANISATION DES NATIONS UNIES POUR L'EDUCATION, LA SCIENCE ET LA CULTURE Volume II.-N') 4. Prix : 25 Frs., 10 Cents (U. S. A.), 6 Pence (R.-U.). MAI 1949. Bouddha, le "Sage". Sa mémoire est vénérée nonseulement dans l'Inde, où il naquit il y a environ 2. 500 ans, mais dans le monde entier par des millions de bouddhistes. DANS CE NUMERO Lande dans le monde actuel (Pages 5 à 9) Qu'est-ce. que la démocratie ? (Pages 11) Le papier journal : une double crise (Pages 10 et 12) M. Torres Bodet en Angleterre (Pages 2 et 3)

Upload: tranngoc

Post on 13-Sep-2018

217 views

Category:

Documents


0 download

TRANSCRIPT

Page 1: Notre supplément : COURRIER VolumeII.-N') 4. Prix …unesdoc.unesco.org/images/0007/000739/073970fo.pdf · 2017-12-27 · Notre supplément : L'INDE NOUVELLE LE COURRIER ... où

Notre supplément :

L'INDE NOUVELLE

LE COURRIER

PUBLICATION DE L'ORGANISATION DES NATIONS UNIES POUR L'EDUCATION, LA SCIENCE ET LA CULTURE

Volume II.-N') 4. Prix : 25 Frs., 10 Cents (U. S. A.), 6 Pence (R.-U.). MAI 1949.

Bouddha, le "Sage". Sa mémoire est vénérée non seulement dans l'Inde, où il naquit il y a environ 2. 500 ans, mais dans le monde entier par des millions de bouddhistes.

DANS CE NUMERO

Lande dans le monde actuel(Pages 5 à 9)

Qu'est-ce. que la démocratie ?(Pages 11)

Le papier journal : une double crise

(Pages 10 et 12)

M. Torres Bodet en Angleterre

(Pages 2 et 3)

Page 2: Notre supplément : COURRIER VolumeII.-N') 4. Prix …unesdoc.unesco.org/images/0007/000739/073970fo.pdf · 2017-12-27 · Notre supplément : L'INDE NOUVELLE LE COURRIER ... où

LE COURRIER DE L'UNESCO Mal 1949

113. 1. 1 :.

Géographie

et compréhension

internationale

LA douzième Conférence in-ternationale de t'Educa-tion publique s'ouvrira le 4juillet à Genève, sous les aus-pices de l'Unesco et du Bureauinternat io nal d'Education(B. I. E.). Elle étudiera ;, entreautres questions, le rôle quepeut jouer l'enseignement dela géographie dans le dévelop-pement de la compréhensioninternationale.

Les discussions prévues de-vront mettre en lumière l'im-portance que peut prendrel'enseignement de la géogra-phie pour combattre chez lesjeunes les idées isolationnistesainsi que les préjugés concer-nant les nations et les civili-sations étrangères.

Dans le cadre de son pro-gramme éducatif pour 1949 et1950, l'Unesco prépare une bro-chure contenant des sugges-tions sur la formation d'unsens international chez l'en-fant au moyen de la géogra-phie ; en 1950, l'Unesco orgarnisera un stage d'études surl'enseignement de la géogra-phie.

L'Unesco et le B. I. E. profi-teront de la Conférence deGenève pour procéder à unéchange de vues sur cettequestion. La brochure qui estactuellement en préparationsera complétée à la lumière dece6 discussions et distribuéeà tous ceux qui doivent parti-ciper au stage d'études de1950.

La Conférence étudiera éga-lement l'enseignement scienti-fique dans les écoles primai-res, à partir des résultats del'enquête effectuée à ce sujetpar le B. Le. dans 47 pays.

En s'appuyant sur une en-quête analogue, la Conférenceétudiera en outre les métho-des qu'on utilise actuellementpour apprendre à lire et elleformulera des recommanda-tions sur les améliorations àleur apporter, qu'il s'agisse del'instruction des enfants oude celle des adultes illettrés.

Des rapports sur tes, condi-tions de l'enseignement en 1948dans divers pays seront pré-sentés à la Conférence et pu-bliés dans l'Annuaire inter-national de l'Education"pour1949,

LUNESCO DOIT ATTEINDRE

A PEINE quarante-huit heu-A"res après s'être entretenu,

à Washington, avec leprésident Truman, pour

clore son fructueux séjour auxEtats-Unis, M. Torres Bodet, di-recteur général de l'Unesco, arri-vait à Londres.

Du vendredi 8 avril au mardi12 (date de son retour à Paris),il s'entretenait d'abord avec M.Attlee, premier ministre, puisavec d'éminents professeurs d'Ox-ford et de Cambridge, et pronon-çait ensuite un discours devant laCommasion nationale du Royau-me-Uni.

S'adressant, le 11 avril, aux troiscents délégués qui assistaient à laréunicli de la Commission natio-nale (première séance de la com-m ; ssior : pour 1949), M. TorresBoaet évoqua ces journées de1943 qui virent naître l'Unesco.

"L'Unesco, dit-il, n'est pas en-core le puissant organisme dotéd'une influence universelle, dontcercains d'entre nous avaient rê-vé... Mais, et c'est là l'essentiel,l'édifice est debout."

Rendant hommage à M. JulianHuxley, premier directeur géné-raI de l'Unesco, il déclara quel'organisation était reconnais-sante à la Grande-Bretagne tantdes conseils que des critiquesqu'elle en avait reçus au coursóe ces années qu'on pourrait ap-peler"les années d'apprentissagede l'Unesco".

"Un excès d'ambitionintellectuelle..."

''"IL serait inquiétant que nousA attendions des louanges sansmélange, poursuivit-il, alors quepour notre propre compte noussommes bien loin d'être satisfaitsde notre oeuvre. Notre programmeest immense et les ressources dontnous disposons pour le mettre enoeuvre sont bien limitées. Sil'Unesco mérite un reproche, iln'n somme toute rien de désho-norant ; on l'accuse seulementd'un excès d'ambition intellec-tuile."

M. Torres Bodet expliqua en-suite qu'on avait dû d'abord"faire un relevé du-terrain"surlequel, tôt ou tard, l'Unesco au-rait il manæuvrer."D'oû l'am-pleur du programme élaboré àMexico et confirmé, dans sesgrandes lignes, à Beyrouth."

"Il nous reste, ajouta-t-il, nonpas à réduire l'envergure de no-tre programme 2primitif, mais àchoisir, en toute modestie, dansla vaste gamme de ces projets,ceux qui nous paraissent présen-ter le plus d'intérêt pour la cul-ture, sans jamais perdre le ensde. léalités.

Programme prioritaire

"'lìNE : mission comme celleque les Nations Unies ontconiiée à l'Unesco ne saurait por-ter. fruit rapidement. Il a falluDien des siècles pour que l'idée

ABONNEZ-VOUS

au"Courrier"

Le Courrier de l'Unesco est une publication périodique inter-nationale consaêrée aux travaux de l'Unesco et au progrès del'éducation, de la science et de la culture dans le monde.

Le prix de 1'bonnement est de 250 francs français par an (300francs fiançais en dehors de France), soit un dollar atner. cainou 5 schillings.

Jusqu'ici, le service de notre journal a été fait gratuitement àcertaines personnes. Afin de pouvoir atte'ndre un public plusétendu dans les quelque cinquante pays où il est distribué etd'où il reçoit ses information, le Courrier demande à ses lecteucsun geste QUI leur coûtera plus d'etfort que d'argent.

ABONNEZ-VOUS ! Parlez du Courrier å/JOS amis et recueillezdes abonnements.

Ecrivez directement au siège de Unesco. 19, avenue Kléber,Paris, ou à notre dépositaire dans votre pays.

Argentine : EditorlaJ Sudamerlcana S. A Alaina *M Buenos Aires.Au, lralie : H. A. Goddard LM.. 255a. Georlle SI. SydneyBelgique.-Librairie encyclo ! >"dique, 7, rue du LuxemDourg,

Bruxelles IVCanada : rne Kyerson Prias. 299 Queen Slreet West, Toronto.Cuba : La Casa Brilla. M Rene de Smetd. O'ReiUy. La Havant.Danemark : Emard Munksgaarc1, ti Norretade. Oopenha) : ue.France : Editlons Peaone. 13. rue Souttlot.. PansGfande-Bretane : H. M Stat10nery Office ; Londres : Yort House. K1ngs-

ordersJ.-Manchesier t : 39/41 t {ing Street.-Edimbourc 2 : ! 3aCastJe Street.-CardiCt : 1 St. Andrew'. Crescent.-Brislol 1 :T wer Lane-Belfast : 80 Chichester Slreet

Grèce : heroudakis. Librairie internationale. Athées.Fay-Bas : N. V MartJnus NiJhot !. Atd Fondsamillistratie y Lange

Voorcout. La Barye..Inde : Oxford Look S : Stationery Co.. Scindia House. La Nouvelle Deihi.Irak : MackenZIe 01< Maetenzie. BootseUers. the Bjokshcp. Barda (1.Liban et Syrie : Librairie Universelle. Av des Frantais. Beyrouth. Liban.Suede : AOt. C. E Fntzes Kunj (,. Hoveokhandel, Fredsj (atan 2, SUJckholm.Suisse : Librairie Payot. LausanneTebecoslovaQuie ! Librairie'. TODle. 11. Narodnl. Prallue.Uruguay-Libreria Internaeion&l S. R. L., Calle Uruguay 1331,

Montevideo.C. S. A-international Documents Service, Columbia University

Fret 2960 Broadway. New York 27. N. Y.

ELES MASSES

déclare

M. Torres Bodet devant

la ("ommission britannique

même de coopération intellec-tuelle puisse prévalo : r dans l'es-prit des élites sur l'appétit dedomination spirituelle. Et s'il afalju des siècles aux nations, com-ment attendre d'une institutionintergouvernementale qu'elle ob-tienne, en l'espace de quelquesmois, des succès aussi décisifs quemuliples ?

"C'est pourquoi, au moment deprèclser l'horaire de nos travaux,nous nous sommes inspirées d'uneconsidération fondamentale : no-tre prudence ne devait pas pren-dre l'apparence d'une renoncia-

M. Torres Bodet, je suis assaillide questions. Pourquoi l'Unescon'est-ellf pas en rapport avec telou tel autre groupe d'intellectuels,de penseurs, d'artistes et de poè-tes ? Son statut gouvernementallui fait-il oublier l'importance desassociations privés ? Vous nousavez dit que l'Unesco recherchele bonheur de l'homme. Pourquoidonc un tel gouffre s'ouvre-t-ilentre l'homme moyen et votreorganisation ?

"Je dois reconnaître que desquestions de ce genre me trou-blent profondément. Je sens, en

S'adressant aux 300 délégués de la Commission britannique, M. TorresBodet a insisté d'une façon toute particulière Sur l'importance des or-ganismes nationaux de coopération. Ci-dessus, quelques-uns des mem-

bres de la Commission nationale.

tion ; il importait de ne donnerà personne, et surtout pas à nous-mêmes. l'impression que les tra-vaux différés étaient abandonnés.Je veux dire par là que notrechoix ne sera pas fonction de lafacilite d'exécution, et qu'entreune réalisation frappante, maissans avenir, et un projet modestemais susceptible d'obtenir des ré-sultats utiles, nous n'hésiteronspas à choisir le second.

"DaM cet ordre d'idée, monpremiet geste, en tant que direc-teur genéral de l'Unesco. a été desoumettre au conseil exécutif uneliste de priorités, qui a été ap-piouvée par le conseil.

Les besoinset les possibilités du présent

''"NOUAS aurions tort, en effet,de diminuer l'ampleur denotre programme ; mais il eût étéplus dangereux encore de ne pascomprendre que les programmesrévisables sont les meilleurs. Lespeuples attendent de notre orga-nisatior autre chose qu'un cha-pelet de promesses, si bellesqueiles puissent être. Pour fixerles priorités, nous nous sommesposé trois questions : tout d'abordquels sont les projets qui peuventapporter au plus grand nombreles avantages les plus grands etles plu, durables ? En deuxièmelieu : quels sont ceux qui pourrontle mieux remplir leur mission,c'est-à-dire servir les masses ? Etenfin : quels sont les projets dontl'exécution est déjà si avancée queleur interruption équivaudrait àun échec coûteux et apparaitraitcommE une incompréhensible"so-lution de continuité"administra-tive ?

"Partout où je vais, continua

effet, qu'il existe encore un abimeentre les activités de l'Unesco etles besoins, les espoirs et les an-go ; s de l'homme moyen. or,tous ceux qui travaillent ài'Unesco doivent penser sans cesseau destin de cet"homme de larue'. En revanche, je puis poserà mon tour une question. N'ap-partient-il pas aux commissionsnationales de chaque pays de nousaider à combler ce grand vide ?

Le rôle d'avant-gardedes commissions nationales

GLf`HAQUE fois que je m'adres-se à un groupe comme levotre, ajouta M. Torres Bodet,je présente à ses membres laméme requête : aidez-nous à évi-ter que l'Unesco ne s'ankylose enpieine croissance. Dans la bataillequ'il faut livrer à l'ignorance età l'incompréhension, vous devezconstituer nos réserves. Et pour-tant, en un autre sens, vous de-vez aussi former notre avant-garde.

"Vous avez beaucoup fait pourrUnesco ; mais, songeant auxobstacles qui se dressent sur notre

route, nous ajouterons quel'Unesco attend encore beaucoupde vous.

"Ces obstacles sont de tous or-dres. IJ y a d'abord les obstaclespolitiques. Certes, l'Unesco désirerester étrangère à la politique ;mais la politique n'en est pasmoins une indéniable réalité, etle : conflits d'intérêts et de pas-sions qui en découlent réduisentsouven l'Unesco à jouer le rôlede témoin muet. Obstacles maté-riels ensuite. Alors que la cultureexige la multiplication des échan-ges et le développement des com-munications, les problèmes écono-miques dressent des barrières en-tre les Etats, arrêtent les livresaux frontières, paralysent les dé-placements des enquêteurs, sus-pé. ndent l'envoi de matériel scien-tifique et contingentent l'entréedes idées tout comme celle desmarchandises. Obstacles d'ordremoral enfin, et ce ne sont pasles moindres ; ce sont au con-traire les plus graves, car ilsn'éveillent désormais ni étonne-ment, ni indignation. Depuis troplongtemps les peuples sont nour-r : s de mensonges écrits ou parlés.Comment pourraient-ils mainte-nant se passionner soudain pourdes idées qui les appellent à re-doubler d'efforts en vue de créer,dans un avenir lointain, un uni-vers stable, raisonnable et juste ?

"Avant d'exiger d'eux ces nou-veaux sacrifices, l'Uneseo doitleur prouver qu'elle n'est pas unesimple abstraction, une tribuneà discours, une fabrique interna-tionale de projets en série.

"Mais l'Unesco est-elle seule àdonner de telles preuves ?

"L'Unesco, conclut M. TorresBodet, sait parfaitement que, parelle-même, elle ne peut rien pro-duire ni rien consommer. Tout cequ'elle donne, il faut d'abordqu'elle le reçoive. Son action se-rait dénuée de sens si elle devaitun jour être coupée de ses raci-nes, c'esà-dire des diverses res-sources spirituelles Qui permet-tent à ses Etats Membres de con-tribuer à assurer des relationsharmonieuses entre les diverspays et les différentes cultures.Vous-mêmes, messieurs, vous fai-tes partie de l'Unesco. Sans vous,sans les universités, les écrivains,les professeurs et les hommes desciences des 46 pays qui prennentpart actuellement à ses travaux,l'Unesco n'aurait aucune raisond'être, et elle ne serait pas.

L'Inde obtient

des bons de livresLe ministère indien de l'Educa-

tion a reçu pour 15. 000 dollarsde bons de livres"Unesco"et lesa répartis comme suit :

Universités : 10. 000 dollars ;institutions scientifiques : 4, 000dollars ; particuliers : 1. 000 dol-lars.

Pour satisfaire aux demandesd'ouvrages étrangers, en ne con-sidérant que les plus urgentes,l'Inde aurait besoin de cent àdeux cents mille dollars de bons.La quantité de bons « ue FUnescea pu répartir jusqu'ici à titreonéreux entre les divers pays re-présente un total de 100. 000 dol-lars ; d'autre part, en 1948 elle adistribué gratuitement pour en-viron 44, 000 dollars de bonspayés sur son Fonds de secourspour la reconstruction.

1. 1. T.

Le Congrès mondial

du théâtre à Zurich

Du 21 juin au 2 juillet se tien-dra à Zurich le deuxièmeCongrès de l'Institut internationaldu Théâtre.

Parmi les questions à J'mordre

du jour figure un projet de con-vention internationale en vue defaciliter les échanges et les tour-nées à l'étranger.

Le Congrès examinera égale-ment une proposition belge re-commandant particulièrement àl'attention des centres nationauxde II. I. T. les activités des théâ-tres d'amateurs. Il étudiera enoutre diverses méthodes suscepti-bles d'accroitre les échanges avecl'étranger dans le domaine duthéâtre.

L'I. I. T. a été fondé à Pragueen juillet dernier avec le con-cours de l'Unesco et sous son égi-de. Il sert de centre de liaisonentre les théâtres et les sociétésthéâtrales du monde entier. Lesreprésentants de vingt pays ontapprouvé la Charte portant créa-tion de cet organisme. Le prési-dent du comité exécutif de l'I. I. T.est M. Llewellen Rees, acteur an-glais connu et directeur de théâ-tre. L'Institut a son siège provi-soire à la Maison de l'Unesco, àParis, et M. Maur. ce Kurtz enest le secrétaire général.

Page 3: Notre supplément : COURRIER VolumeII.-N') 4. Prix …unesdoc.unesco.org/images/0007/000739/073970fo.pdf · 2017-12-27 · Notre supplément : L'INDE NOUVELLE LE COURRIER ... où

Mai 194 1. COURRIER DE L'UN ES CO s

II) U 16 au 21 avril se tenait à Mar-gate la conférence annuelle duSyndicat national anglais de l'en-seignement. M. Jaime Torres Bo-

det y prit la parole, le 18 avril, devant uneassistance qui comptait plus de 2, 000 insti-tuteurs et professeurs, représentant lesétablissements scolaires et universitairesd'Angleterre et du Pays de Galles, et desdélégués de divers autres pays (Etats-Unis. Union soviétique, Pologne, etc.).Tous lui firent un chaleureux accueil, etdes acclamations s'élevèrent de tous cô : éslorsqu'il leur fut présenté comme étant,pour le corps enseignant,"le premier ci-toyen du monde".

S'exprimant en anglais, lu, Torres Bo-det déclara que cette occasion évoquaitpour lui, en un raccourci unique, tou : el'histoire de l'Unesco ainsi que la missionqu'dire s'était assignée : son histoire, parceque c'est en Angleterre qu'est née l'Unesco,au sein d'une conférence tenue à Londres,en l'automne de 1945 ; sa mission, parceque ce sont les maîtres qui détiennent lesmoyens d'at : eindre le but essentiel del'Unesco :"amener, par l'éducation, lespeuples à se mieux comprendre, et lesmettre à même de se préparer un avenirmeilleur dans un monde pacifié.

L'espoir d'un avenir de paix

GUS'IL est une profession", ajouta-t-i !,"à laquelle, de par sa nature même,échoit l'obligation de faire germer l'idéalde l'Unesco dans l'esprit des jeunes, c'estla prof : ssion enseignante."C'est dans l'éducation que nous met-tons notre espoir d'un avenir de paix etde progrès. L'assemblée générale des Na-tions Unies l'a reconnu dans l'article 26dé la Déclaration universelle des Droitsde l'Homme, adoptée en décembre dernier.Cet article proclame :"toute personne adroit à l'éducation"sans qu'il soit établide distinction d'aucune sorte.

"Dans certains pays, une tee affirma-tion semble un truisme. Mais il s'en fautde beaucoup que l'on jouisse partout dece droit. En fait. aujourd'hui, plus de lamoitié des êtres humains sont illettrés. Ende nombreux pays, la proportion des illet-trés dépasse 60 % ; en Afrique et en Asie,elle s'élève à 90 %,

"L'article 26 dit encore :"l'éducationdoit être gratuite, au mo'. ns en ce qui con-cerne l'enseignement élémentaire et fon-damental. L'enseignement élémentaire estobligatoire."Tous ont un droit égal

à l'éducation

GGA vous, citoyens de ce pays, ces prin-cipes paraîtront aussi évidents quele droit à l'éducation lui-même. Ils ontété appliqués en Grande-Bretagne, et lesefforts de votre corporation et de votresyndicat y ont puissamment contribué.Vous n'avez pas toléré que les bienfaits

L'AVE1-TVIR DE LA PAIX

entre les mains des éducateurs

de l'éducation ne soient dispensés qu'àune partie des enfants de Grande-Bre-tagne.

Or en tant que citoyens du monde,nous ne pouvons pas-vous ne pouvezpas-tolérer que la moitié des enfantsdu globe continuent à rester privés delivres, d'écoles, de maîtres, bref d'éduca-tion, parce que le hasard a voulu qu'ilsnaquissent dans des pays que l'on qualified'arriérés.

"Tant que ces conditions prévaudront,nous serons tous citoyens d'un mondearriéré.

"Dispenser à tous l'enseignement élé-mentaire sera : t un énorme progrès ; maisnous ne saurions nous en contenter. Com-me vous le savez fort bien, la société n'estpas libérée de tous ses devoirs envers lesenfants lorsqu'elle leur a appris à lire,à écrire et à compter. Ces enfants, quidoivent construire l'avenir-et un mondemeilleur et plus pacifique que le nôtre-ne pourront mener à bien leur tâche ques'ils ont la possibilité de développer plei-nement leurs dons et leurs aptitudes.

"La Déclaration universelle des Droitsde l'Homme le proclame en ces termes :"Toute personne a le droit de prendrepart librement à la vie culturelle de la.communauté, de jouir des arts et de parti-ciper au progrès scientifique et aux bien-faits qui en résultent."

lu. Georsre Tomtinson, ministre britannique de l'Education, commente pour desécoliers un panneau ëur les Droits de l'Homme d'une Exposition"Unesco". On voit,

à droite, M. Torres Bodet.

Histoire et nationalisme

"AUCUN de nous n'oserait accepter l'in-justice, qus dis-je, le danger quiconsisterait à réserver la culture à uneminorité tands qu'un enseignement pure-ment utilitaire serait parcimonieusementdonné à la majorité.

"Mais notre objectif est plus ambitieuxencore. Nous devons donner à tous lesentants les moyens d'acquérir une véri-table éducation. Nous devons aussi les ai-der à devenir, non seulement de bonscitoyens de leur pays, mais encore debons citoyens du monde. A cette fin, ilest essentiel qu'on leur enseigne l'histoirede manière à leur permettre de se pré-munir contre les préjugés et les concep-tions étroites du nationalisme. Trop sou-vent aujourd'hui l'école laisse l'enfantdans l'ignorance de l'histoire des peuplesétrangers. Trop souvent, à la sortie del'éco : e, il n'a aucune idée de la manièredont s'est formée la civilisation univer-selle et dont elle continue à se former,

L'aide aux écoles des pays dévastés : un des aspects de oeuvre de t'Unesco mis enlumière par l'Exposition organisée à Londres, le mois dernier, par la Commission

britannique pour l'Unesco

grâcs à l'oeuvre de nombreux peuples etde nombreuses civilisations particulières.

"Comment l'enfant qui n'a jamais en-tendu parler que des hauts faits de seshéros nationaux pourrait-il, une fois de-venu adulte. éch3. pper à l'emprise de con-cepts aussi néfastes que ceux d'"ennemihéréditaire", d'"étranger"et de"raceinférieure" ?

"Il n'est pas moins évident que, nosécoles et nos maitres fussent-ils les meil-leurs. l'éducation civique doit être renfor-cée par l'exempl de la famille, de la citéet du pays. La morale ne s'enseigne paspar des moins d'ordre ou par des apho-rismes. elle doit s'appuyer sur les leçonsde la vie."

"On n'échappe pas à l'avenu*"

GGON dira que nous. n'avons pas choisile le meilleur moment pour les tâchesque nous nous sommes fixées. Nous vivonsdans un monde d tensions morales etpolitiques, menacé par une dangereuse re-crudescence du nationalisme agressif oudéfensit. Mais l'homme ne choisit pas sondestin ; comme l'a dit un grand éduca-teur sud-américain :"On n'échappe pas àl'avenir".

M. Torres Bodet reconnait que l'état dete : lsion actuel rend la tâche plues lourdeet les responsabilités p : us grandes. Assu-rément, on ne pouvait demander aux maï-tres de"porter sur leurs épaules toute lacharge morale de notre temps, bien quecertains ai. nieraient qu'ils le fissent, espé-rant sans douze ainsi se décharger eux-mêmes de toute responsabilité".

Et, ajcuta-t-il."la situation de l'Unescon'est guère différente".

"Si aux. yeux de certains les problèmespolitiques de notre époque font de l'Unescoune sympathique mais inutile annexe desNations Unies, d'autres. en revanche, esti-ment qu'en donnant la vie à cette orga-nisation ils se sont déchargés eux-mêmesde toute responsabilité.

"Depuis trois ans que l'organisation estcréée, poursuivit-il, quarante-six pays y ontadhéré, et ne lui ont donné à eux tousqu'un budget inférieur cette année à deuxmillions de livres. Si c'étaient là toutes lesressources de l'Unesco, si ses fonctionnai-res étaient ses seuls combattants, alors sa.cause serait sans espoir."

UNE INITIATIVE DE L'UNESCO

Les échanges de publications

sont étendus à l'Allemagne

lU N Centre d'échange de livres enAUemagne qui permettra aux bi-bliothèques des quatre zones d'oc-

cupation d'échanger des publicationsavec des pays du monde entier vientd être officiellement établi sur l'initiativede l'Unesco. Des dispositions pour lacréation d'un centre similaire au Japonont été mises au point le mois dernierà Tokio.

Le nouveau centre allemand d'échan-ge de livres (Tauschstelie) établi à Bad-Godesberg en zone occidentale, sera fi-nancé par la Notgemeinscheft der deuts-chen Wissenschaft (Conseil extraordi-naire pour le progrès de la science aille-mande) et par une donation probable dela Fondation Rockefetter.

Les plans préparant le centre allemandont été élaborés au cours d'une réunionorganisée par l'Unesco à Bad-Godesbergte 12 avril, à laquelle assistaient des bi-bliothécaires de presque toutes les biblio-thèques universitaires de l'Allemagneoccidentale. De plus, un représentantd'un centre d'échange de livres du sec-teur russe de Berlin assistait à la réu-nion et fut d'raccord pour assurer uneétroite colIaboration entre le nouveauTauschste) Ie et le centre d'échange de

Berlin. Ainsi, à eux deux, tes centres cou-vriront les quatre zones d Allemagne.

Le centre de Bad Godesberg travaitteradirectement avec l'Unesco en assurantl'échange de publications entre tAttema-gne et les Etats membres de l'Unesco.En particulier, il fournira des renseigne-ments sur les institutions allemandessouhaitant des échanges sur tous les su-jets prévus et disposer de listes com-plètes de publications allemandes en vuede ces échanges.

LU n e s c 0 distribuera prochainementtes premières listes de cent institutionsaUemandes aux centres appropriés d'au-tres pays. En de nombreux cas, lesTauschstelle, nouveUement établis, pour-ront fournir toute information se rap-portant aux échanges. Les renseigne-ments concernant de telles activités avecl'Allemagne pourraient être adressés àTauscbstelle c o Notgemeinschaft derheutschen Wissensi ? haft, Buechlerstrasse55, Bad Godsbfrg, Germany.

U Japon la bibliothèque de ta Diète/g national à Tokio a été désignéepour agir comme centre de coor-dinati-pour l'échanl'e de publications

et a également fourni à l'Unesco des lis-te. de sociétés connues, d'institutionsscientifiques, d'universités, de bibliothè-ques publiques, de stations agricoles ex-périmentales et de clubs de l'Unesco auJapon, tous désirant participer à des ac-cords d'échanges internationaux.

Ces listes qui comprennent près de huitcents institutions. seront distribuées parl'Unesco dans toutes les parties du mon-de et seront suivies de listes de publica-tions japonaises susceptibles d'échange.

Ceux qui seraient intéressés à établirdes accords d'échange avec le Japon oudésirant obtenir une information biblio-graphique de ce pays peuvent se mettreen relations à la bibliothèque de la Diètenationale, avec M. T. Kanameri, direc-teur de la bibliothèque à Akasaka, Tokio.

Ces deux nouveaux centres représen-tent une importante partie du program-me d'éducation de science et de culturede l'Unesco pour l'Al1emagne et le Ja-pon et portent à cinq le nombre des cen-tres nationaux suscités par les efforts del'Unesco. Les trois autres centres se trou-vent au Canada, dans le Royaume-Uniet aux Etats-Uni dAmérique.

Un trésor incomparablement riche

"l'MAIS, remarqua M. Torres Bodet,. 1 noues pouvons puiser dans un tré-sor incomparablement riche-le trésoraccumu : é, éprouvé et sans cesse accru deconnaissances et d'expériences que nousont transmis les poète, les philosophes etles savan. s de tous les temps.

"Nous avens aussi nos armées : dans lepassé, les héros innombrables-célèbreset inconnus-qui ont lutté avant nouspour conquérir les droits et les avantagesdont nous avons la jouissance. Aujourd'hui,nos soldats sont les hommes et les fem-mes de boni ? volonté de tous les pays, et,en première ligne, les millions de maî-tres.

(Suite page 4)

Nouvelle offensive

contre l'analphabétisme

en Amérique latine

POUR plus de la moitié de la po-pulation du globe, un texte im-prime est encore aujourd'hui ungrimoire indéchiffrable.

Dans toutes les parties du mon-de, une lutte incessante est menéepour remédier à cette situation.Durant les vingt-cinq dernièresannées, deux cent cinquante mil-lions d adultes ont appris à lireet à écrire ; mais on estime àdouze cent millions le nombre ac-tuel des illettrés, dont la majoritése trouve en Asie, en Afrique et enAmérique du Sud. C'est dans cesparties du monde que les gouver-nemcnts nationaux et tes organisa-tions internationales doivent lutteravec le plus d'énergie et avec desrésultats qui, pour être encore par-tiers. n'en sont pas moins encoura-geants.

D'importantes campagnes sonten cours au Brésil, en Haïti, aul'lexique et dans les autres paysd'Amérique latine. En Inde, le Co-mité créé à Bombay pour l'éduca-tion des adultes a réussi, en neufans, à montrer à lire et à écrire à140. 000 personnes. Des plans ontété dressés en Roumanie pourfaire disparaître l'analphabétismed'ici 1951 ; dans le même but, l'Ita-lie a lancé dans la lutte dix mille.nouveaux instituteurs.

C'est avec l'idée de rendre ac-cessibles à tous les pays les meil-leures techn : ques pédagogiques quel'Unesco et l'Union panaméricainevont patronner au Brésil un staged'études pratiques de six semaines,destiné aux éducateurs d'Amériquelatine et qui doit s'ouvrir le 27 juil-let. Une réunion analogue, desti-née aux éducateurs d Extrême-Orient, se tiendra ultérieurement,dans le courant de cette année, àDelhi tlnde).

Le gouvernement brésilien a af-fecté une somme de 50. 000 dollarsà ce stage d'études pratiques, au-quc) doivent assister 120 déléguésoriginaires d'au moins vingt-cinqpays. C'est à Niteroi, capitale det'Etat de Rio-de-Janeiro, que seréuniront les délégués et les mem-bres du Secrétariat de l'Unesco,qui seront, les uns et les autres, leshôtes du gouvernement brésilien.

Les questions étudiées seront lescauses de l'analphabétisme sur lecontinent américain ; la prépara-tion des campagnes contre l'anal-phabétisme, les méthodes et lematériel d'enseignement appro-priés, les moyens de parfaire t'oeu-vre accomplie au cours de ces cam-pagnes. et de coordonner cet en-seignement avec les programmesd'éducation des adultes et autresactivités analogues.

Page 4: Notre supplément : COURRIER VolumeII.-N') 4. Prix …unesdoc.unesco.org/images/0007/000739/073970fo.pdf · 2017-12-27 · Notre supplément : L'INDE NOUVELLE LE COURRIER ... où

LE COURRIER DE L* UNESCO Mai 1949

La ville de Wiehitft

U. S. A.

.. adopte Orléans

N. Y. T. and A. P.

M. Jean Falaise (à gauche), adjoint au maire d'Orléans, accueilli, auxU. S. A. par M. William T. Salome, de Wichita, Etat du Kansas

ILES NOUVELLES ECOLES

INTERNATIONALES

VEULENT UNIFIER

LEURS PROGRAMMES

ID URANT ces dernières Mnêe6 se sont créées, dans diverses régions, des écolesd'un type nouveau. Insistant sur l'enseignement de la compréhension et dela. collaboration intcrnaticnales, ces"Ecoles internationales"abritent desétudiants et des professeurs venus de pays différents ; garçons et filles Y

doivent être formés au civisme, mais à un civisme qui ne soit pas purement national,pt. nn'Hr. p. nmnasnR ie sentiment d'une res-

IL'IDE qu'on puisse"adopter"des villes a éveillé cemois-ci un certain intérêt en divers points du globe.JM L'une des plus anciennes villes de France, Orléans.aujourd'hui dévastée, venait en effet d'être"adop-

tée"par Wichita, centre agricole et de constructions aéro-nautiques (Etat du Kansas, U. S. A.). Cette manifestationd'amitié internationale est une initiative de la Commissiondu Kansas pour l'Unesco, et devrait être suivie d'autres"adoptions"du même genre.

L'adoption a été officiellement consacrée les 7 et 8 mai,date où Orléans et Wichita ont célébré simultanément le520'anniversaire de la libération d'Orléans par Jeanned'Arc. A Wichita, l'adjoint au maire d'Orléans a participêaux fêtes, ainsi qu'un groupe de vétérans américains du137'régiment d'infanterie, qui libéra Orléans au cours dela deuxième guerre mondiale. Ce régiment avait été forméen grande partie au Kansas. De l'autre côté de l'Atlanti-que, à Orléans, le maire de Wichita prenait part aux céré-monies traditionnelles en l'honneur de Jeanne d'Arc.

Dans les deux villes, des comités avaient établi Un pro-gramme commun. Des enregistrements radiophoniques an-glaIS et français des cérémonies de Wichita ont été échan-gés contre des messages transmis d'Orléans. Les écoles,les clubs photographiques et les organisations civiques de

Wichita ont recueilli des fourmtures sco-laires, des objets d'art, des couleurs etdes pinceaux, des outils et des articlesd sport, qui seront expédiés à Orléans.Des dispositions ont également été prisespour envoyer à Orléans, au mois dejuillet et d'août, un groupe de citoyensde Wichita à titlre d'"ambassadeurs mu-nicipaux".

ponsabilité envers l'humanité même.Le mois dernier, quatorze directeurs

d'écoles internationales situées dans huitpays différents se sont rencontrés à laMaison de l'Unesco nour confronteü leursexpériences et poser les fondements d'uneplus étroite coopération.

A l'ordre du jour figuraient : le pro-blème de la formation d'un cadre ensei-gnant pour ces écoles ; celui des échangesd'élèves et professeurs.

La formation des cadres

POUR ces écoles"d'avant-garde", quifont à l'éducation internationale unelarge part dans leurs programmes, lagrande difficulté, comme l'a reconnu laconférence, est de trouver des professeursqu'anime un esprit véritablement inter-national. Afin de remédier à l'insuffisancedes cadres actuels, la conférence a décidéd'organiser pendant l'été de 1950, uncours de six à huit semaines, destiné àinitier les professeurs aux principes desécoles internationales et à développerparmi eux un esprit international.

Les écoles représentées à la conférenceorganiseront en outre un stage"complé-mentaire"d'études pratiques, dont on feraprofiter le plus grand nombre possible deprofesseurs ayant suivi ces cours. Ces pro-fesseurs seront attachés, en qualité d'ob-servateurs, aux écoles existants, et pour-ront aussi. le cas échéant, participer àleurs travaux.

Un diplôme international

A titre d'essai, les directeurs d'écoles ont décidé de décerner à leursélèves, en 1950, un diplôme international :les conditions exigées pour l'obtention dece diplôme seront : une connaissance sa-tisfaisante d'une langue étrangère et laprésentat : on d'une thèse sur un sujet d'in-térêt international.

Après avoir étudié la possibilité d'insti-tuer un diplôme international qui donne-rait accès aux universités de tous les pays,la conférence a estimé que ce projet sou-lèverait des difficultés encore trop consi-dérables pour qu'on puisse songer à leréaliser dès à présent.

Un"réseau"scolaire

international

SELON un projet présenté par un desdélégués, on pourrait grouper en uneinstitution mondiale unique les écoles in-ternationales situées dans des pays diffé-rents. Cette nouvelle institut : on s'inspire-rait des principes et des conceptions inter-nationales de la communauté internatio-nale d'enfants de Werkplaats, qui se trouveà Bilthoven, en Hollande. M. Kees Boeke,directeur de l'école de Bilthoven, a définicomme suit les deux caractéristiques es-sentielles de cette communauté : l'ensei-gnement y est donné d'après les prin-cipes modernes, et il répond, dans toutela mesure du possible, aux intérèts et auxbesoins des enfants ; toutes les décisions'1 sont prises à l'unanimité.

Il a souligné que toutes les écoles quiappartiendraient au"réseau"prOjeté de-vraient adopter les mêmes méthodes, afinque les élèves puissent facilement changerde pays sans que leur études s'en trou-vent retardées.

La compréhensionentre les peuples

PAR exemple, un petit Américain pour-rait fréquenter quelque temps, enHollande ou en Angleterre, une école delangue anglaise. Au cours de cette pé-riode, il s'initierait au français afin de sepréparer à passer un an ou deux dansune école de langue française, en Bel-gique, en France et en Suisse. Il con-tinuerait là le même programme d'études,tout en s'appliquant à apprendre parexemple l'espagnol, afin d'être en mesurede terminer ses études secondaires enAmérique du Sud.

Il se serait donc trouvé, durant cettelongue période, avec des enfants de na-tionalité différente, avec qui il se seraitlié d'amitié.

La conférence a décidé d'étudier, lorsd'une prochaine session qui se tiendra àl'école de Bilthoven, les méthodes propo-sées par M. Boeke.

Dans les rapports que lui ont soumis lesdirecteurs d'école ou les éducateurs,l'Unesco a puisé des informations pré-cieuses, fondées sur une expérience pra-tique, et elle s'en inspirera pour formulerdes propositions tendant à faire accorderà l'éducation internationale une impor-tance semblable dans d'autres écoles.

MOULIN-VIEUX

Camp de vacances

pour orphelins

de guerre

LA Fédération internationale des Com-munautés d'enfants, créée avec l'aidede l'Unesco, organisera cet été un campinternational d'orphelins de guerre. LaFédération a choisi comme emplacementpour ce camp la République d'enfants deMoulin-Vieux, située aux environs de Gre-noble.

Avec l'appui de l'Unesco, d'organismesgouvernementaux et de particuliers, laFédération se propose de réunir là, durantle mois d'août, une cinquantaine d'orphe-lins de guerre de douze à quinze ans,appartenant aux Communautés d'enfantsde dix-sept pays.

Ces enfants acquerront aipsi une pré-cieuse expérience de la vie internationale,et ce camp, grâce à sa situation, présen-tera autant d'avantages pour leur santéque pour leur éducation.

Au programme figurent notamment laculture physique, les excursions dans larégion, l'étude du folklore de plusieursnations.

L'idée est due aux enfants de Moulin-Vieux. L'organisation dru camp revien-dra à environ 2. 500. 000 francs françaiset la Fédération lance un appel pourqu'on l'aide à en assurer ! e succès.

Les dons en es, fèces peuvent êtreadressés au Dr Marie Meierhorfer, tré-sorière de la Fédération internationale

des Communautés d'enfants, 22, Wein-bergstrasse, Zurich t Suisse).

Aide en matière d'Education

NE quinzaine d'autres villes duM J Kansas, naguère citadelle de"l'is<&gt;-lationnisme"aux Etats-Unis, vont

adopter des villes européenne, grâce àla Commission de l'Etat du Kansas, àlaquelle sont mamtenant affiliés plus dequarante Conseils de Comté pour l'Unes-co Des envois de matériel scolaire etdes dons, de nature culturelle, serontfaits aux écoles et aux universités d'EU-rope, par cette voie.

Les projets du Kansas à ce sujet ontété établis avec l'aide de"Operation De-mocracy", organisation américaine noncommerciale qui, depuis 1947, a contri-bué à"marier"plus de 250 villes d'Amé-rique et d'Europe. On trouve au bureau

de cet organisme, 369 Lexington Avenue,à New-York, une liste de 40 autres villesaméricaines désireuses d'entrer en rap-ports avec des villes étrangères.

La plupart des vil1es"adoptées"enEurope se trouvent en France, aux Pays-Bas, au Luxembourg, en Allemagne et enItalie."Operation Democracy"envisagemaintena : 1t la possibilité d'entrer en rap-ports avec la Corée, l'Inde et la Yougo-slavie.

Origine du projet

Il L est difficile d'assigner à cette en-t treprise une origine précise, parmiles tentatives plus ou moins heu-

reuses d'internationalisme qui surgirentun peu partout en Amérique, au courset à la suite de la seconde guerre mon-diale. On sait, par exemple, que dès 1943,Hudson (Ohio) adoptait Souburg (enHolla : 1de). Quelques organisations privéesont également utilisé la formule"deville à ville"pour recueillir des fondsaux Etats-Unis.

Toutefois, c'est surtout grâce à la pu-blicité donnée en 1946, le jour'de"Thanks-g ; ving" à la formule"Dunkirk (Etat deNew-York) à Dunkerque (France)", quece mouvement prit de l'extension. Enautomne 1947, la ville de Locust Valley(Long Isla : 1d) adoptait Sainte-Mère-Eglise (Mandhe). Animée d'un bel opti-misme. Locust Valley donna à son comitéle titre officiel de"Operation Democra-cy". Ce titre naquit autant de la sponta-néité que de l'élan lui-même qui poussaitdes hommes du commun à remplir cettemission pacifique envers les autres hom-mes.

Ce projet connut un succès immédiatet bientôt nombre d'autres villes améri-cAines demandèrent à se renseigner. Desdons permirent à"Operation Democra-cy"d'installer son siège social à NewYork en janvier 1948. Elle établit alorsun programme applicable à tout le payset s'occupa de mettre les choses en train.Ce programme était fondé sur les princi-pes suivants :

De peuple à peuple

I. Toute assistance à l'étranger doit, àce stade, comporter un message person-nel de peuple à peuple, Elle doit prélu-der à un échange d'amitiés et d'idées.

2. La ville est l'organe idéal pour deséchanges de ce genre. Elle peut agirrapidement avec toutes ses ressources.ElIe s'intéresse à tous les aspects de lavie sociale, professionnelIe et culturelIe ;d'autre part, sa structure fondamentaleest ! a même en tout lieu.

3. Une action colIective selon des prin-cipes internationaux est un facteur impor-tant d'éducation de l'opinion nationale.E) ! e fait comprendre"à l'homme de larue"la réalité vivante, mieux que nele font les manchettes des journaux et ! esconversations des diplomates.

"Operation Democracy"se proposaitles objectifs suivants :

1. Susciter et développer partout auxEtats-Unis de l'intérêt pour idée d'adop-tion"des villes ; exposer cette idée auxvit) es étrangères.

2. Renseigner les villes d'Amérique surles villes étrangères, les conseiller sur le

350 villes d'Amé-

rique et d'Europe

participent à

un programme

d'entraide et de

rapprochementculturel.

mode d'organisation à adopter, assurerl'expédition des dons, la liaison avec lesorganismes officiels et privés, et un ser-vice de propagande.

3. Coordonner les efforts des villes,sans rigidité, mais selon une unité fonda-mentale, avec des buts communs et uneintention commune.

4. Se tenir au courant des conditionsà l'étranger, des modifications à apporterà la distribution des seoours selon leschangements de la situation, des nouvel-les possibilités d'échanges culturels, etc.,et renseigner les villes américaines surces questions.

"Operation Democracy'"insiste surl'idée que l'aide apportée fait pour ainsidire partie des relations de ville à ville,qu'elle s'accompagne de rapports person-nels d'amitié entre donateurs et bénéfi-ciaires, et qu'elle doit être le début d'unvaste programme de relations entre deuxvilles.

Collaboration avec l'Unesco

N devait s'attendre à ce qu'une orga-. nisation comme"Operatio : 1 Demo-cracy"éablit une étroite coopéra-

tion avec divers services des NationsUnies. L'accord en vertu duquel elle tra-vaille avec l'Unesco fournit un des meil-leurs exemples de cette coopération. AuKansas, en Californie et dans l'Etat duIowa, où l'Unesco est très active et ob-tient une large participation populaire àses entreprises, le programme d'"Opera-tion Democraey"a été recommandé parles conseils pour l'Unesco à leurs com-missions régionales ; et un grand nombrede groupes locaux ont persuadé leurs mu-nicipalités de s'intéresser à l'''adoption''des vigies. Conformément aux objectifspoursuivis par l'Unesco, les efforts por-tent presque entièrement sur les échan-ges culturels et sur l'envoi à l'étrangerde livres, fourniture scolaires, et tousobjets destinés à l'enseignement.

A. mesure que diminuera en Europe lebesoin de sec6urs immédiats,"OperãtionDemocracy"orientera ses efforts-et eUecommence déjà à le faire-vers le relè-vement de l'éducation et l'accroissementdes échanges culturels, conformémentaux directives de l'Unesco. Elle s'efforceraégalement de signaler à l'attention desvilles américaines les régions qui ont étéjusqu'ici négligées.

Toutefois,"Operation Democracy"continuera avant tout à développer lacoopération entre TOUS LES GROUPES,TOUTES LES INSTITUTIONS et TOU-TES LES PERSONNES Qui travaillentà encourager la compréhension interna-tionale. Plutôt qu'un"mouvement", elleest, et entend rester, un"service". Si,par la suite, venait à se développer un"mouvement"en faveur de l'adoption desvilles, ou si quelque groupemént déjàexistant, tel que la Commission nationaledes Etats-Unis pour l'Unesco. décidaitde généraliser cette méthode d'action e : lla faisant sienne,"Operation Democra-ey''mettrait volontiers à sa dispositiontous les services techniques qu'elle a or-ganisés.

L'ADVENIR

DE LA PAIX

(Suite de la page 3,)

"Enfin, Je progrès scientifique nous aforgé des armes qui, si elles peuvent ser-vir au suicide de l'humanité, nous serventaussi dans notre combat.

"Pour l'accomplissement de cette tâche,l'Unesco place les plus grands espoirs enla Grande-Bretagne qui, depuis des siè-cles, apporte à la culture universelle unesi magnifique contribution.

"Educateurs britanniques, votre patri-moine culturel vous désigne spécialementpour la tâche qui attend le monde, e : quiest la raison d'être de l'Unesco.

"Nous avons le devoir de faire apparaî-tre à tous les peuples, au milieu de la di-versité des. langues, des coutumes et destechniques, la solidarité et l'unité dugenre humain.

"Nous avons le devoir de nouer entretous les hommes les liens qui leur permet-tront, ainsi qu'à leurs enfants-et àtous les enfants du monde-de menerune vie paisible et plus heureuse."

4

Page 5: Notre supplément : COURRIER VolumeII.-N') 4. Prix …unesdoc.unesco.org/images/0007/000739/073970fo.pdf · 2017-12-27 · Notre supplément : L'INDE NOUVELLE LE COURRIER ... où

LE COURRIER

PUBLICATION DE L'ORGANISATION DES NATIONS UNIES POUR L'EDUCATION, LA SCIENCE ET LA CULTURE

Volume Il.-NO... MAI mi.

L'INDE

DANS LE

MONDE

ACTUEL

On voit, ici, Gandhi s'ontretenant avec un vieux paysan mu-sulman au coma d'une tournée qu'il fit à travers tes Indesen 1947, pour tenter de rapprocher Hindous et Musulmans.Au centre, une bannière destinée à rappeler à des étudiantsde l'Inde nouvelle le souvenir d'Acoka le Pieux, empereur

hindou du troisième siècle avant J. C.

Le Pandit Nehru, premier ministre de l'Inde (à droite), àl'ouverture de ! a réunion de la Commission indienne pourl'Unesco. Parmi les prsonnalités qui l'entourent, on remar-que (de gauche à droite) sir E, arvepalli Radhakrishnan.président du Conseil exécutif de l'Unesco, et lantana Azad,

ministre de l'éducation de l'Inde

mt E mois dernier, ta Commission nationale indien-ne de coopération avec l'Unesco tenait sa pre-mière séance à la Nouvelle-Delhi, et soulignaitainsi l'importance croissante que pro. nuent

l'Inde et les pays d'Asie dans le développement del'éducation, de la science et de la culture.

"Déjà l'Inde se classe parmi les plus grands Etatsd'un très vieux continent que l'histoire appelée mainte-nuant à de nouvelles responsabilités. Déjà sous la.direction éclairée de S. Exc. le Pandit Nehru, elle ajoué un rôle digne d'elle au sein des Nations Unieset de leurs Institutions spécialisées", déclarait M.Torres Bodet dans un message à la Commission na-tlonale cte l"lncte

"Votre riche et antique culture, pour-suit le message du Directeur général,votre conception de la nature et de ladestinée de l'homme sont un remDartcontre le matérialisme qui menace aujour-d'hui l'humanité

"L'Inde a sa place marquée au se : n del'Unesco. Son importance ne fera ques'accroître à l'avenir et j'attends d'tellede grandes choses. Ce sera la haute mis-sion de votre Commission de nous assu-rer la coopération de vos penseurs, de vossavants et de vos artistes qui sera pournous'un soutien et une richesse."

Reprenant une idée exprimée par Ra-bindranath Tagore, M. Torres Bodetpoursuit en ces termes :"Pour atteindreles fins universelles qui lui sont assi-gnées, une seule voie s'ouvre à l'Unesco,('pli.. d'un effort commun de toutes lesîi'úr : ; ; oñ'pås v ; ; ;"î : { ; ; {if ; r-mit ; td' ; n ;-la monot {) nie.mais vers la plénitude d'une diversité féconde cimen-mais vers la CO d'une 11DrétJ. féconde cimen-tée par la connrétiension mutuelle.

L'exemple de Gandhi"De tous les hommes de notre temps, dit encore le

Directeur gênerai, le Mahatma Gandhi est celui dontla vie entière illustre le mieux l'idéal de la paix etde la fraternisé humaine. Me permettrez-vous de re-prendre la définition qu'il a donnée pour l'Unesco desfondements moraux et philosophiques d'une déclara-tion universelle des Droits de l'homme :

"Ma mère tort sage bien qu'illettré m'a apprisque les droits, pour être mérités et garantis, doi-vent tous reuoser sur le devoir accompM. C'estainsi que Je droit même à la vie ne nous apoar-tIent que si n « us remplissons nos devoirs en tantque citoyens de l'univers."

"Ce message est gravé dans nos coeurs, conclut leDirecteur général. Il guidera nos efforts futurs, demême. j'en suis assuré, qu'tel guidera les vôtres. *'

C1RS de sa dernière séance. la Commission natio-nale indienne adopta à l'unanimité une résolu-tion proclamant que le Mahatma Gandhi avait

été le plus grand serviteur de la paix, de la non-vio-lence et de la compréhension internationale et que"dans la situation troublée où se trouve aujourd'huile monde, les hommes de tous les pays ont besoin deson message et de ses méthodes". La Commission aen outre décidé la création d'un comité chargé de"promouvoir, diriger et encourager l'étude des idéeset des méthodes préconisées par Gandhiji".

Ces études devront permettre d'élaborer un program-me d'action pour le maintien de la paix dans le mon-de entier et le développement de l'amitié internatio-

Le mois dernier, à la Nouvelle-Delhi, la Commission nationale de l'lndepour l'Unesco tenait sa séance officielle d'inauguration, à laquelle assis-taient d'éminents lH"nseurs, des savants distingués et de nombreux hommesd'Etat de l'lande et dit reste de l'Asie.

Dans la rpmarquable mosaïque que constituent les cultures orientales,l'lande représente un des motifs les plus ancien. Ce qui n'empêche sonimportance d'hêtre de plus pn plus marquée dans le monde.

C'est pourquoi le"Courrier de l'Unesco"consacre ce supplément àl'études Jes problèmes éducatifs, scientifiques et culturels que résout, enIll"développant, l'ln de nouvelle.

il il.. UJOURD'HUI, les événements mondiauxont donné à l'Asie une importance de toutpremier plan, et cette importance ne pour-

ra que s'accroître."Jf sais qu'il existe des trésors de bonne volonté

et de bienveillance ; mais je voudrais que l'on com-prenne clairement que l'Asie jouera un rôle capital ence sens que certains de ses prob : èmes ont une impor-tance capitale pour le monde.

"Sous l'aspect politique de la question, poursuivit lePandit Nehru, nous trouvons de vastes mouvements demasses ; la tâche qui attend l'Unesco est immense.

Je suis heureux que l'Unesco étende sans cesse son.action, et cela non seulement en l'étendant à l'Asi

et à l'Afrique, mais en abandonnant aussisa"tour d'ivoire".

Faisant observer que la plupart desgens, à l'heure actuelle, ne possèdent au-cun critère qui leur permette de juger desévénements, de la politique, ou même deleurs propres actions, le premier Ministredéclara :"Si vous ne parvenez pas à éta-blir un critère, une échelle commune desvaleurs, il n'y a guère d'espoir ni pournous, ni pour l'humanité. Je cro ; s quec'est à l'Unesco qu'il appartient de veillerà ce que ces valeurs soient préservées."

Au service

de la société universelle

nale. programme qui sera présenté à la Conférencegénérale de l'Unesco, lors de sa cinquième session, enmai 1950.

En ouvrant la session de la Commission nationaleindienne, le Pandit Jawarharlal Nehru, chef du gou-vernement de l'Inde, invita l'assemblée, qui comptaitplus de trois cents personnes venues de divers paysd'Asie, à examiner les problèmes mondiaux en for. actionde cette donnée capitale qu'est la rapide transforma-tion de l'Asie. Il insista sur le rôle nouveau et fonda-mental que joue l'Asie dans le monde moderne, etsur la nécessité d'affirmer les valeurs morales et spi-rituelles et de bien comprendre les grands problèmesqui sont à l'origine de"cet immense courant spiri-tuel qui déferle sur toute l'Asie".

"Nous nous trouvons actuellement à un momentdécisif de l'histoire mondiale, déclara le Pandit Nehru :le centre de gravité se déplace à nouveau. Ce qui sepasse en Asie Influencera puissamment non seulementsur le sort de l'Asie elle-même, mais sur celui de l'Eu-roue et du monde entier.

"Autrefois, remarqua-t-il, on vivait dans l'ignorancedes grands problèmes qui se posent en Asie, ou bienon ne leur accordait pas l'attention qu'ils mériteutsur le plan politique et économique.

ANS une brillante improvisation, sir SarvepaIIlRadhakrishnan, présider. t du Conseil exécutifde l'Unesco et l'un des plus grands penseurs de

l'Inde contemporaine, insista sur le fait que l'Unescon'est pas une institution politique ; il rappela à sesauditeurs que, s'ils ont des griefs contre les chefspolitiques de certains pays, ils ne doivent pas pourcela en avoir contre la littérature de ces pays. Il citales exemples de Goethe, de Kant. de Tolstoï et deDostoïevski."Pour survivre. l'humanité doit s'instruirepar l'expérience, déclara-t-il ; pour survivre les r. ationsdoivent renoncer à une partie de leur souverainetéafin de servir la société universelle."

Si l'humanité doit former une société universelle.ajoutà-t-i !. il faudra par une éducation appropriée.former les futurs citovens du monde en leur faisantcomprendre que le ratriotisme national doit être su-bordonné au patriotisme humain.

Maulana Abdul Kalam Azad, ministre de !'Education.exnrima l'espoir de voir la Commission nationaleindienne devenir te foyer de la vie scientifique et cul-ture ! Ie de la nation et travailler à établir des liens de

coopération et de compréhension avec les autres pays.

JJIU IV IV IL I\' lr

Page 6: Notre supplément : COURRIER VolumeII.-N') 4. Prix …unesdoc.unesco.org/images/0007/000739/073970fo.pdf · 2017-12-27 · Notre supplément : L'INDE NOUVELLE LE COURRIER ... où

"L'éducation intégrale"

LE MAHATMA GANDHI

et et le Nai TaliIll"

PAR

HUMAYUN

KABIR,

Conseiller en ma-t i è T e d'éducationprès le gouverne-

ment de l'Inde.

IV ARMI les problèmes qui se po-sent à l'Inde au moment où eUeaccède à l'indépendance, il n'en

est guère de p) us saisissant que ceiui deJ'analphabétisme. Ayant choisi d'être unedémocratie laïque, il est urgent pour eUede donner aux énorme, populationsqu'dire gouverne une éducation appro-priée.Pour mesurer l'importance et la diffi-culté de la tâche, il suffit de rappelerque près de 85 0 0 de la population del'Inde sont illettrés ; or, la sécurité, laprospérité et le progrès de l'Etat repose-ront désormais sur cette population.Four éliminer l'analphabétisme, le gou-vernement doit, d'une part. se préoccu-per de l'éducation des enfants, afm depréparer les futurs citoyens.

Plus urgente encore est l'éduca-tion des adultes illettrés ; et il ne suf-fit pas de leur apprendre à ! ire et àécrire, puisque, au moment même ou Ilsapprendront leurs première lettres, illeur faudra déjà user de leurs droits ci-viques.

Pour les enfants d'âge scolaire, le gou-vernement a établi un programme d'édu-cation élémentaire. II s'agit d'instituerl'instruction gratuite et obligatoire pourtous les enfants de 6 à 14 ans. Quandon sait que ces enfants sont au nombred'environ-45 millions, on comDl'end l'am-peur d'un tel problème. Il v a d'abordà résoudre la question des bâtimentsscolaires, et celle des crédits à fournir.En outre, on compte actuellement troppeu d'instituteurs Qualifiés pour songerà instituer immédiatement l'instructionobligatoire pour tous.

Trois plans quinquennaux

Ai.. USSI, le gouvernement a-t-il établitrois plans quinquennaux : le pre-mier plan quinquennal Instituel'instruction obligatoire pour 50 0, 0 en-viron des enfants âgés de 6 à 11 ans.Durant cette période, seuls les enfantsdes viJIages les plus peuplés seront prisen main, et l'obligation scolaire s'éten-dra, d'année en année, aux différentsâges. Ainsi, la première année, dans lesagglomérations d'au mo. ns 1. 500 habi-tants, l'instruction sera obligatoire pourtous les enfants de 6 à 7 ans. L'annéesuivante, elle le deviendra égalementpour les enfants de 7 à 8 ans, etc. Ledeuxième plan quinquennal étendra, se-lon la même méthode, l'instruct : on obli-gatoire aux populations isolées des vil-lages comptant moins de 1. 500 habitants.Le troisième plan quinquennal étendraenfin 1 instruction obligatoire à tous lesenfants de 11 à 14 ans.

Pour les adultes illettrées, le gouverne-ment prévoit un programme assez dif-férent. L'expérience montre que les adul-tes témoignent peu d'intérêt pour unenseignement de type scolaire. Il fautleur donner une éducation qui so. t uneéducation sociale, et oui, tout en faisantdécroitre le nombre des illettrés, vise sur-tout à former l'esprit, à inculquer auxcitoyens d'un Etat démocratique le sensaigu de leurs droits et de leurs devoirs,à leur donner, en outre, des notionsd'hygiène.

Les adultes sont particulièrement sen-sibles aux motifs d'ordre économique ;on s'efforcera donc d'éveiller leur inté-rêt en leur fournissant des connaissan-ces qui les mettront à même de mieuxgagner leur vie. Une éducation socialeaura également pour effet de développerla sensibilité, et elle puisera å cette finla littérature, la musique, la danse ettoutes autres activités artistiques. Enfin,et c'est là ce qui importe le plus, elleinsistera sur l'idée de la fraternité en-tre les hommes, et cherchera à convain-cre l'adulte qu'il ne peut y avoir, sanstolérance, ni démocratie ni paix.

ANS les débuts, le programme d'édu-cation sociale sera conçu pour lesindividus seulement qui auront de

15 à 45 ans ; il insistera particuJièrem. entsur l'éducation des femmes et des jeu-nes filles, car l'éducation des mères est

la meilleure garantie de l'éducation desfils. L'application de ce programme de-vrait avoir pour effet de réduire de moi-tié, en cinq ans. la proportion des anal-phabètes parmi les gens de cet âge.

Afin d'éviter qu'is ne retournent àl'analphabétisme, on s'efforcera de con-server chez les adultes le niveau d'ins-truction qu'ils auront acquis, en les fai-sant, par exemple, participer à des clubs,à des cercles d'études, à des cours d'étéet autres institutions analogues. Il s'agiten somme de faire en sorte Que l'écoledu village ne soit pas simplement l'en-droit où J'on instruit les enfants, maiste centre de toute la communauté. Enoutre, plusieurs jours par semaine, l'école.sera exclusivement réservée aux jeunesfilles et aux femmes.

ES méthodes actives devront préva-) t loir, tant dans l'éducation élémen-taire donnée aux enfants, que dansl'éducation sociale dispensée aux adul-tes.

"NAI TALIM"

E fut Gandhiji qui, le premier, tenta de généraliser l'applica-tion du principe de renseigne-ment par les méthodes actives. Il allamême jusqu'à soutenir que cette acti-vité devait avoir une portée sociale.C'est le principe de la formation pro-fessionnelle. Pour lui, l'apprentissaged'un métier doit faire partie de touteéducation, et cela dès l'enfance. Uneéducation fondée sor ce principe ai-dera l'enfant non seulement à déve-lopper ses facultés, mais à prendreconscience de sa fonction sociale dèsl'âge le plus tendre.

De plus, en fondant l'instruction surun enseignement professionnel, il seraplus facile de la rendre accessible à tous.Il est incontestable que nous sommesactuellement en retard du point de vue

. économique. Nos ressources ne nous per-mettent pas d'adopter un système d'en-seignement qui soit très coûteux, quel-que avantage qu'il puisse offrir par ail-leurs. Or, ce système d'éducation élémen-taire contribuerait à résoudre le problè-me financier, en permettant à l'ensei-gnement de subvenir au moins partiel-lement à ses besoins.

La recherche de la qualité

ANS doute court-on le risque, avecun tel système, de transformer- l'école en usine et d'y exploiter le

travail des enfants. Ce serait assurémentun abus et il n'est aucun système quine puisse donner lieu à des abus. Qu'ils'agisse de 1'enfant ou de l'adulte, l'ac-tion est un moyen d'éducation. L'édu-cation est donc fa fin, et le métier ma-nuel le moyen ; mais, comme dirait Gan-dhiji, pour être distincts, la fin et lemoyen ne sont pourtant pas séparés.Tant que l'on n'oublie pas qu'il s'agitd'une école destinée à former les ci-toyens de l'avenir, et non d'une usineproduisant des marchandises de consom-mation courante, il ny a rien Que delouable à demander que les objets fabri-qués-même s'ils le sont par des en-fants-soient de bonne Qualité : larecherche de la qualité fait partie desprincipes mêmes de l'éducation. Si l'onfait une chose, autant la faire bien.

I () ARLER des. littératures indiennescontemporames, ce serait unetâche aussi considérable que deparler des littératures de l'Euro-

pu. entière. On n'en saurait donner iciqu'une impression d'ensemble. tout auplus une esquisse. Shrimati Sophia Wa-dia. fondateur et éditeur du P. E. N. indien,a dit :"L'Inde moderne connait, sousl'influence des littératures occidentales,une véritable renaissance."C'est sous cetaspect que je voudrais aborder la ques-tion.

On parle dans l'Inde au moins dixlangues, toutes fort importantes. Parmices langues doit figurer l'angiais, languede l'"lntelligenzia"et facteur d'unitépar excellence ; on aura une idée de sonimportance si l'on sait qu'il parait auBenga : e mille périodiques en anglais, etdans l'Inde du Sud un nombre équiva-lent. Il est significatif, par exemple, queles oeuvres en hindi et en urdu du grandromancier Premchand ne soient guèreconnus dans les autres parties de l'Indeautrement que dans leur traduction an-glaise.

Rabindranath Tagore est connu dansl'Inde entière, surtout par ses traduc-tions anglaises de ses propres oeuvres :et le prix Nobel lui a été décerné pourla traduction-ou plutôt l'adaptation- de son recueil de poèmes bengalisGitanjali. Iqbal, le grand poète du Pend-jab, n'est connu en dehors de sa provinceque par la traduction qu'Hefbert Nichol-son a donnée de son poème monumen-tal. The Secrets of Self (Les Secrets duMoi).

La Poésie

ANS ce qu'on a fini par appelerla littérature anglo-indienne, plu-sieurs écrivains ont laissé une peu-

vre remarquable, sinon toujours deschefs-d'oeuvre. R. C. Dutt a donné entrès beaux hexamètres une version deRamayana et du Mahabharata ; il est lepremier (ou peu s'en faut) qui ait pré-senté au public de langue anglaise legrand poème épique de t'Inde. Toru Dutt.qu'Edmond Gosse qua) ifie de"fragilefleur exotique de la poésie", a composéd'admirables poèmes avant de mourir, àl'âge de vingt ans. En parlant de la poé-sie, on ne saurait passer sous silenceSceptred Flùte de Sarojini Naidu, qui asoulevé l'admiration du monde entier, nila poésie mystique et lyrique du sage SriAurobindo, ni le Gitanjali de Rabindra-nath Tagore, et l'on doit rendre un hom-mage éclatant à The WeIl of the Peo-ple, de Bharati Sajabbai. ainsi qu'à l'æu-vre de B. Rajan et de HarindranathChattopahyaya.

Le Roman

NE place toute spéciale doit revenirdans le roman à Mulk Raj Anand,dont le Coolie, écrit directement en

anglais, a été traduit en treize langues ;à Men and Rivcrs de Humayun Kabir, àThe English Teacher de R. K. Narayan,à So l\'lany Hungers de Bhadhani Bhatacharya, à Kartapura de Raja Rao ;dans la nouvelle à R. K. Narayan, dansla critique d'art à The Dance of Shiva,d'Amanda Coomaraswamy ; dans l'auto-biographie au Pandit Jawaharlal Nehru,et dans la philosophie et l'essai à K. S.Srinivasa lyengar, à Swami Vivekanan-da, au Mahatma Gandhi et au profes-seur Radhakrishnan.

Dans l'ensemble, la littérature de lan-gue anglaise a subi l'influence occiden-tale : c'est un magnifique effort de syn-thèse largement internationale (1).

Tagore et Iqbal sont les sommets. Ilssont tous deux aussi grands poètes, mais

Le système d'éducation dans !'tnde nouveHe insiste sur ! e dévftoppement de J'artisanat,eemme Je conseillait Gandhi (ci dessus ! e Mahatma et le Pandit Nehru prêchant d exempte)

LITTERAI. URI

et influence

Par BALIX

Auteur de plusieurs recueils de poésies, dequi doit ]XlI

Tagore a créé des formes plus nombreu-ses : romancier, nouvelliste. essayiste,penseur, artiste, musicien, auteur drama-tique et critique, il excella dans tous lesgenres. Son génie extraordinaire, émi-nemment universel, n'a pas encore étéapprécié à sa vraie valeur. Iqbal et Ta-gore ont compris tous deux que la cul-ture ne peut survive que si elle s'enga-ge sur une voie nouvelle, si elle crée desvaleurs nouvelles : si elle retrouve subs-tance et vigueur au contact d'influencesextérieures, en fait. si elle acquiert lesens de l'universel. Tagore fut le géniequi, tout en restant foncièrement indien.fut un véritable citoyen du monde.

Les conflits sociaux, sous tous leur*

"Jeûna femme écrivant une lettred'amour" (VUX sièc ! e), scutpture

d ! un temple indien d'Orissa

ORSQUE je le vis pour la dernitre

IL fois, Rab'ndranath Tagore était,un homme vénérable, chargé d'anset d'honneurs. Il rentrait d'un

voyage en Perse où il avait été !'/tôte del'Empereur. Le long trajet en avion l'avantfatigué et il avait peine à retrouver sonsouffle au ln"lieu cle la joule. Et pourtant.il était venu rendre hommage à l'un deses compatriotes, un grand savant aujour-d'hui disparu, Sir P. C. Roy. Tagore fit unbref discours empreint de tout le charmede sa pel'sonna1ité. On"resp rait"la pré-sence meme de la grandeur. Dans sa robemagnifique, avec ses chn'eux d'argent, ilsemblait surqir directement du glorieuxpassé de l'Inde. Mais en même temps silincarnait l'espoir en l'avenir.

Le souvenir de ce jour JIU donne ussentiment de fier te, parce qu'une jQÍs aumoins dans ma vie je ne jus pas déçupar la présence de la grondeur.

Confluences

Irì-'\BINDRANA TH TAGORE naquit lé1-<'6 mai 1861, à une époque critiquedans l'histoire politique et littérairede l'Inde moderne.

"Je naquis au moment où l'ère moder-ne venait de poindre au Bengale, écrit-il.L'astre des temps révolus s'abaissait versl'horizon, mais n'avait pas encore tout àfait disparu. Je pus m'en rendre compte,en partie par intuition, en partie parexpérience. On pouvait déceler dans l'an-cien ordre de choses maints signes deàécrépitude, de relâchement et de débilitédont on pourrait avoir honte si on lesjugeait d'après les critères modernes. Etpourtant, certaines choses, tel les rayonsdu soleil couchant parmi les ombres dusoir, n'étaient pas du domaine des ténè-bres..."

La jeunesse de Tagore fut tout impré-gr. ée de l'esprit admirable des Upanishad ;mais en même temps, il subissait l'in-fluence des idées avancées Qui fermen-taient alors au Benale. Il ressentit ainsitrès tôt la fièvi-e d'un nationalisme fer-vent, à un moment où de nombreux In-diens instruits se piquaient de n'employerque la langue anglaise.

Etant adolescent. Tagore vint en Euro-pe étudier les lettres. Ce fut sans douteun moment décisif de son évolution. Ildevait produire désormais des oeuvresqui témoigneraient, peut-être à son insu,de l'assimilation magistrale des deuxcultures par un esprit analytique etéminemment créateur.

Santiniketan

Demeure de la Paix

N 1901, Rabindranath Tagore fondaL un centre éducatif qu'il appela San-iiniketa. (Demeure delà paix), dMM

Page 7: Notre supplément : COURRIER VolumeII.-N') 4. Prix …unesdoc.unesco.org/images/0007/000739/073970fo.pdf · 2017-12-27 · Notre supplément : L'INDE NOUVELLE LE COURRIER ... où

S IMDIENNES

occidentale

N DHINGRA

'ces, d'essa' et d'un rom ; un"Out of TimeHre sous peu

aspects, sont le thème principal des lit-tératures indiennes modernes. Les tra-ductions des grands écrivains étrangers :Shaw. Kafka. Rolland et Gide, jouissenttoujours de la faveur du public. La nou-velle, notamment la nouvelle française,eméricaine, russe ou anglaise, est toutparticulièrement appréciée, ainsi que lesrécits de voyage, les esquisses dramati-ques. la poésie moderne et la critique Jit-téraife. A vrai dire, le public est insa-tiable.

Le Théâtre moderne

lrELLE est la situation depuis quel-ques années. On a écrit et montédes pièces, mais il s'agit surtout

d'adaptations, de traductions et de co-médies sociales, parfois de pièces sati-riques. ou simplement d'oeuvres de pro-pagande sociale ou politique. Le succèsfacile du sketch radiophonique sembleavoir frappé de stérilité la plupart desauteurs dramatiques. Le jardin de lapoésie offre un spectacle différent ;Bachhan, Josh et Hafeez ont composédes vers champêtres.. des poèmes lyriquese : ; diverses æU\Tes excellentes. L'inspira-tion poétique, en tout cas, n'est nuHe-ment tarie et elle a produit quelqueschefs-d'oeuvre de raffinement. Quant à13. tendance générale actuelle, c'est

d'écrire pour les masses.

L'Inde nouvelle se libère lentement desétroites formules en"isme"que lui aléguées l'étranger. La valeur de la lit-térature se mesure à l'apport dont eUeenrichit la civilisation. La civilisation asans doute des caractéristiques nationalesou des traits régionaux, mais elle doit dé-passer les frontières que lui assigne lagéographie. La littérature exprime ce quiélève l'nomme ; son but est de cultiverJ'esprit, et son meilleur effet est de l'en-anoblir.

Il doit y avoir et il y aura une"réha-bilitation du passé"et, pour reprendreles termes mêmes d'Ananda Coomaras-wamy,"un travail d'introspection créa-trice, pré : ude à un renouveau d'activité...L'Inde, comme l'Europe, doit renonceraux vestiges de l'antique civilisation :nous nous éloignons du passé et nous de-vons bâtir notre émeu, rie dans l'avenir.Mais comprendre ce que nous laissonsderrière nous, l'accepter pour nôtre avecune conviction passionnée et l'aimer,c'est là le seul fon-dement qu'zon puis-se donner aux puis-sances intellectuel-Jeset spirituehes.Si le moment n'estguère venu encorede créer de nouvel-les valeurs,... non-blions pas que-ojtecréation demandedu temps et biendes souffrances.

(1) Parmi les plus grands noms des motter*-tlires indiennes contemporaines, dans les iwan-gues autres que l'anglais, citons Banklm Chan-dra Sarat Chandra et Tarsahankar, en ben-gali. Prem, Chand, Jainendra Kumar. en hindi ;Iqbal, Josh. Akbar. tsmtt Chughtai, Faiz, rDurdu ; KM. Gandhi, en gujrati ; Bhai Viv

Singh, llohan Sinsh. en pendjabi ; Masti Ven-katesa tyenear, en kannada ;"allathol, eu ma-Jayalam. 11 existe de bonnes t. raductions an-glaises de la plupart de t'es écrivains, qui attei-gnent ainsi un pubticptus étendu.

Vers l'industrialisation

LA VIE SCIENTIFI Q DE

dans l'Inde moderne

Par S. N. SEN

secrétaire de l'lndian Ass ociation for the Cultivation of Science, Calcutta

IL A contribution remarquable quel'Inde a apportée à la penséeabstraite, philosophique et reli-gieuse, nous fait parfois oublier le

rô : e non moins important qu'elle a jouédans le domaine des sciences positives.En fait, l'étude des sciences est aussi an-cienne aux Indes que la civilisation elle-même, qui est contemporaine de cellesdes Sumériens et des Babyloniens. Lessavants qui se sont livrés à des médita-tions et à des expériences sur les rivesdu Gange et de l'Indus n'ont pas seule-ment ouvert de nouveaux horizons à lavie morale et intetlectuelle, ils ont aussirendu l'existence plus-facile par de nom-bréuses inventions et découvertes en ma-thématiques et en astronomie, en chimieet en métallurgie, en médecine et enbotanique. Ils ont laissé dans la sciencemondiale une empreinte ineffaçable

Les féconds échanges d'idées entre hom-mes de science de différents pays. con-dition essentieile du progrès, sont, depuisdes siècles, un trait caractéristique dela science comme de toute la culture in-dienne. L'Inde a donné aux autres paysautant qu'elle a reçu d'eux. C'est ainsique les mathématiciens arabes ont beau-coup profité des progrès réalisés danal'Inde, et que de savants mathématicIensindiens furent invités à la cour des Ca-

RABINDRANATH TAGORE

une petite localité du nom de Bolepur, à138 km. de Ca ! cutta. II y adapta auxconditions modernes l'antiaue idéal del'ermitage au fond des bois. Vin2t ansplus tard. il transforma ce centre enune université mondiale qu'fil appelaVisva Bharati, et qui devint un foyer deculture non plus seulement indiennemais universelle. L'oeuvre que Tagore de-vait poursuivre toute sa vie étaie, om-mencée.Animé d'une foi profonde dans t ave-nir d'une fédération cultureJle de toutesles races et de tous les peuples. Tagore,dans ses écrits comme dans son ensei-gnement, a toujoursardemment défendu lacause de l'union avecl'Occident, et l'idéed'une coopération ami-cale.

"L'humanité, écrit-il, est déchirée p., ;'. sasouffrance et la méfiance, par une mé-sentente qui ébranle jusqu'aux fonde-ments de la vie. C'est à nous, citoyensde la République des Lettres, qu'il appar-tient de délivrer tua race humaine de lamalédiction que fait peser sur elle unedivision aussi contraire à la nature...Quel que soit le pays auquel nous appar-tenions, nous avons tous mission d'unirnos efforts pour rapprocher les hommes,pour fonder, sur des bases solides, la fra-ternité humaine qui sauvera l'humanitédu suicide de la guerre..."

Tagore put voir ses compatriotes, auxIndes et en Asie, établir cette fraternitéhumaine, non point par un nivellementdes différences entre les peuples-cqu'il ne croyait ni possible ni souhaita-ble-mais en les acceptant, au cont. rai-re :"L'unité. écrit-U, ne se fait pas mal-

l ; ré les différences, mais grâce à elles.""Il faut qu'en se rapprochant les races

conservent chacune leurs caractères pro-pres, écrit encore Tagore ; il ne faut paschercher l'unifarmité qui serait la mort.mais l'unité qui est la vie."

Tagore fut appelé la Sentinelle duel'Orient, le"Poète 1auréat"de l'Asie. Setoeuvres ont été traduites en un très grandnombre de langues.

Lorsque parut en 1913 son recueil depoèmes Gitanjali (Offrandes de chansons),l'Europe et tout le monde occidental ensubirent l'enchantement. W. B. Yeats

note l'impression profonde que produisitsur lui le mysticisme de cette poésie. Ta-gore fut récompensé par le prix Nobelde littérature, honneur qu'il fut le pre-mie asiatique à recevoir.

L'un des poèmes de Gitanjali est unePrière ; Tagore y exprime le désir de voir

son pays atteindre enfin le havre de laLiberté ; non pas la liberté que donne aucitoyen Un étroit nationali. sme, maia celle

'.-.,.-"Î.--. ; ;-,..,

Sentinelle de. [' Est

de l'esprit, de la pensée :"... où l'espritest dé : iwé d la peur... où ! e savo ! r Mtlibre... où Jes mots viennent du plus pro-fond de la vérité..."

Au cours de sa longue carrière, extrê-mement remplie, Tagore écrivit plus detrois mille chanson et poèmes. Ses nou-velles sont des cheîs-d'oeuvre de prose.

aans lesquels Il evo-. que avec sympathie et

compréhension'a viedes humbles, leurssoucis, leurs épreuveset leur courage saspièces et ses romansfournissent une re-

marquable analyse des forces historiqueset sociales qui ont présidé à la formationde la littérature indienne.

L'Ecole de Tagore

- i AGORE a exercé une influence ca-H pitale sur les écrivains du Bengaleet de l'Inde tout entière. Il a si

longtemps dominé la scène littéraire desa province natale qu'sil n'y eut au Ben-gale, pendant près de soixante ans, au-cune nouvelle école littéraire, si l'on fx-cepte toutefois la tendance esquissée parle remarquable romancier Sarat Chat-terjee.

Il s'était développé au Bengale un vé-ritable culte de Tagore, au point queles jeunes écrivains et les jeunes artistesimitaient jusqu'à l'écriture du poète, etparlaient la langue de ses poèmes.

Quant, à soixante ans, Tagore se tour-na vers la peinture, il produisit une im-pression profonde, non seulement aux In-des, mais à Paris, où furent exposées sestableaux. Les aspects multiples de son gé-nit sont trop complexs pour qu'on enpuisse faire une étude approfondie dansun article aussi bref. Il s'était assimilela culture islamique et la cultures euro-péenne, et il écrivit beaucoup en anglais,enrichissant de profonds essais philoso-phiques, et de traductions de certainesèp ses oeuvres écrites en bengali, la lit-térature de langue anglaise.

Rabindranath est peut-être le seul poèteindien dont le génie ait été reconnu de'son vivant dans le monde entier. Les so-ciétés savantes comme les institutionsles plus modestes le comblaient d'hon-reurs. L'hommage des masses suivait lepoète pamtout où il allait défendre lacause de la littérature indienne. Pour laconférence Hibbert, en 1931, il choisitcomme sujet"la Religion de l'Homme",présentant une synthèse de ce qu'tt Ja de meilleur dans ee phitoeophiet de

l'Orient et de l'Occident. Ce fut commeun rayon d'espoir et de foi qui nous fitdépasser dans le temps et dans t'espaceles limites de notre civilisation.

Rabindranath Tagore mourut en 1941 :Je monde avait à nouveau sombré dansun conflit, contre l'idée duquel Tagores'était si souvent élevé, joignant les actesà la parole. Aux Indes, il continue àvivre dans le coeur de tous, hommes, fem-mes et enfants ; et cela parce qu'il croyaitt ; use le poète avait pour mission"de cap-ter les voix que l'oreille humaine ne peuter :. core e : 1tendr. d'inspirer la foi dans lerêve qui s'ébauche, et d'apporter à unmonde sceptique l'annonce de la fleurqu'. va naître".

Rabindranath Tagore

PMW Lauréat de l'ARe

lifes pour traduire le monumental ou-vrage de mathématiques qui porte le nomgénéral de Suryya Sidhantikas. Il estbien connu que la notion de zéro et celledes nombres imaginaires ont pris nais-sance dans l'Inde et sont parvenues enEurope à travers le monde arabe. D'urnemanière analogue, l'astronomie indienne,fondée alors sur l'expérience et l'observa-tion, a subi l'influence des travaux quise poursuivaient, à cette époque, en Perse.

Renaissance scientifique

aux Indes

EPUIS peu, les digues de la sciencemoderne se sont ouvertes pourl'Inde, et le champ longtemps sté-

rile de sa pensée et de son activité intel-lectuelle est de nouveau irrigué. Déjà semarquent les signes incontestables d'unefécondité retrouvée. La brillante moissonde savants qu'elle a produite depuis cin-quante ans nous permet d'espérer quel'Inde apportera bientôt à l'ensemble dela science une contribution aussi impor-tante que les autres nations.

Dans le domaine de la physique expé-rimentale et mathématique, les savantsindiens se sont déjà fait une place d'hon-neur dans la communauté internationaledes physiciens. Feu J.-C. Bose fut l'un despremiers à effectuer des recherches sur latransmission radiophonique et sur la sen-sibilité des plantes vivantes. C.-V. Ramanreçut le prix Nobel pour ses travaux surla diffusion de la lumière, la physiquemoléculaire et la cristallographie. M. N.Saha fut un des pionniers de la physiqueastrale et de la physique nucléaire. H.-J.Bhabha a élaboré la première théorieconvaincante sur les rayons cosmiques etles particules fondamentales de la ma-tière, tandis que Subrahmanyan Chan-drasekhar, actuellement aux Etats-Unis,a fait des découvertes importantes dansle domaine de la dynamique stellaire etde la physique astrale.

(Lire la suite page 9).

Une loi supprime

la caste des parias

DEPUIS des siècles, la condition des"lntoucClables"a jeté sur l'Inde unesorte de malédiction. Le mahatmam Gan-dhi s'était révolté dès l'enfance contrece principe et ses applications, et il s'étaitvoué, avec nombre de ses compatriotes,a la lutte pour l'abolition da systèmedes"Intouchables".

"Peut-être, écrivait-il, n'est-ce là qu'unrêve n'ayant pas plus de réalité que Far-gent qu'zon croit voir au fond d'un co-quUIage. Mais je ne le crois pas."

En une autre occasion, il déclarait :"Swaraj (autonomie ou indépendance)serait un mot vide de nens si nous en-tendions maintenir un cinquième de lapopulation indienne dans un état perpé-tuel de sujétion, et si nous refusions àces êtres humains la possibilité d'accéderà notre culture nationale."

Au mois de janvier dernier, un peuplus d'un an après l'établissement duswaraj, le gouvernement de l'Inde adoptaune loi constitutionnelle abolissant lacondition d'"Intouchable", Cette mesurerévotut : onnaire coïncida avec l'adoptionòe la Déclaration des Droits de l'Homme,que l'Inde s'efforce ainsi de traduire deson mieux dans la réalité.

La nouvelle loi accorde à chaque tondien. sans dict : nction de sexe ou de rangsocial, la pleine jouissance de tous lesdroits qui s'attachent à la qualité decitoyen. C'est ainsi que, l'année pro-chaine, pour la première fois, des mil-lions d'anciens"Intouchables"voterontlors des élections générâtes.

Il est encore d'autres domames où lesanciens"Intouchables"voient s'améhorerleur situation. Des temnles auxouels ]lsn'avaient pas accès jusqu'ici leur sontdésormais ouverts. A Bombay. le gouver-nement leur a déià ouvert un certainnombre d'écoles, sur les recommanda-tions d'un comité qui comprenait leDr Ambedkar, lui-mêmes ancien"Intou-chable"et actuellement ministre de laJustice de !'Inde. Conformément à unplan qui doit se réaliser en dix ans. legouvernement envisage de donner à tousles Indiens une éducation qui leur per-mette de prendre pleinement part à la. nationale.

PAR

. NIRMAL CHAUDHURI

Page 8: Notre supplément : COURRIER VolumeII.-N') 4. Prix …unesdoc.unesco.org/images/0007/000739/073970fo.pdf · 2017-12-27 · Notre supplément : L'INDE NOUVELLE LE COURRIER ... où

a LE COURRIER DE L'UNESCO Mai 1949

LA RENAISSANCE ARTISTIQUE DE L'DINDE

MUSIQUE, DANSE, PEINTURE

........, OUS parlons dans l'Inde1 des soixante-quatre arts ;1 mais notre décadence a

été si profonde ces trois ou qua-tre derniers siècles que seule lamusique exprime encore, par sestraditions toujours vivantes etpar l'évolution de sa technique,le génie artistique de l'Inde. LesMogols étaient grands amateursde musique ; aussi la traditionmusicale. surtout dans l'Inde duNord, reste-t-elle aujourd'hui vi-vante et capable de s'assimilerdes éléments nouveaux.

Mais toute tradition ne peuts'assimiler des éléments nouveauxque dans le cadre des principesétablis : et même lorsqu'il créedes formes nouvelles, le change-ment est. en fin de compte, im-perceptible. Le rand musicienAbdul Karim Khan ne le cédaiten rien aux maîtres de la tradi-tion musicale indienne ; mais ila introduit un élément nouveaudans la musique moderne sansenfreindre les principes établis.Ce sont certainement ses disci-ples et lui qui montrent aujour-d'hui de la façon la plus frai-pante comment la tradition in-dienne peut. s'adapter aux condi-tions modernes. La célèbre écolede musique de Lucknow fournitun autre exemple de cet espritnouveau.

Mais dans le Sud, où la tradi-tion est demeurée plus rude. lepublic conserve le goût de for-mes qui se sont conservées im-muables depuis peut-être plu-sieurs centaines de siècles, et lamusique continue à tenir une

PAR

RAJA RAO,Auteur de nouvelles et rks ro-mans :"Kawthapura"et"Cows

of the Barr : cade".

sibilités de cetart traditionnelde l'Inde.

grande place dans la vie des po-pulations. A chaque pas, dans lesrues des villes du Sud, vous pour-rez entendre les plus beaux mor-ceaux de la musique classique etvoir les danses traditionnelles del'Inde.

Les danses traditionnelles

LES danses indiennes tradi-tionnelles restent, en effet,une expression très authen-

tique de la vie sociale de l'Indedu Sud. Dans un temple, dansune cour, dans une maison, onverra encore le pas des célèbresBharata Natya Sastra qu'accom-pagnent les gestes symboliquesdes mains et le mouvement desyeux. Dans le Malabar, les tra-ditions chorégraphiques Katha-cali sont si populaires que, pres-que toutes les semaines, des trou-pes vont de village en village mi-mer en dansant l'histoire de l'undes grands personnages épiques,saint, héros ou mère. Dans leNord, et notamment dans les di-vers Etats gouvernés par les ma-harajahs, l'école septentrionale,que l'on appelle Kathak, est en-core florissante ; elle se caracté-rise par des pas très compliqués.Dans l'est du pays, l'école Mani-pari a retrouvé la grâce qui, ail-leurs, s'est perdue.

Il n'est pas douteux que ladanse indienne, sous sa formetraditionnelle et artistique, estappelée à exercer une très grandeinfluence sur les techniciens cho-régraphiques de l'Europe, lors-qu'elle y sera mieux connue. Lesuccès d'un danseur tel que RamGopal montre les immenses pos-

La peinture

cherche

sa voie

IF N peintu-jt re. ladé-cadencede la tradit : on

artistique del'Inde est plusprofonde qudans aucun au-tra art. Il seraitpeu t-être in-exact de direque le XIX° siè-cle n'a eu aucungrand peintre.Mais depuisquelque temps,c'est-à-dire de-puis que l'on a

redécouvert.avec l'art d'A-janta et avec lespeintures mogo-les et rajpoutes,les anciennestraditions, uneffort sincère aété fait en vuede renouer lesliens entre l'part contemporain etl'art du passé. Les résultats n'ontpas toujours été heureux, car lenéo-classicisme était imprégnéd'un sentimentalisme qui ne sem-ble pas avoir sa place dans unerenaissance artistique vigoureuse.Toutefois, les efforts de quelquespeintres bengalis, le génie de cer-tains peintres formés aux écoleseuropéennes et qui ont su, com-me Amrita Sherghil, redécouvrirle style propre à la sensibilitéindienne, ont abouti à des ten-tatives intéressantes et, parfois, àde véritables chefs-d'oeuvre. Il

Une jeune fille apprend à jouer de la."veena", l'un des Instruments les pluspopulaires de l'dinde

faut, néanmoins, reconnaitre quel'Inde ne possède aujourd'hui au-cun grand peintre, alors qu'ellea des poètes, des musiciens et desdanseurs qui ne le cèdent à au-cun artiste des siècles précédents.

L'assimilation du passé

I[) ANS le domaine des arts,de même que sur le plansocial et intellectuel, le

problème indien reste le même :la révolte contre le passé n'aabouti qu'à rendre plus évidentela nécessité inéluctable d'assimi-ler le passé. En réalité, la tradi-

Mon, qui est fondée sur des prin-cipes immuables, possède unesurprenante faculté d'adaptation.L'artiste indien ne craint pasd'être moderne parce que, pourlui, être moderne c'est donnerune forme contemporaine à uneexpression classique. Le réalismeou le changement ne sauraientl'effrayer, car il ne s'agit que derenouveler l'expression, et nonles principes. La tradition artis-tique indienne montre ainsi aumonde que la découverte méta-physique est la seule vraie dé-couverte dont s'accompagne toutrenouveau. C'est ce qui donne àl'art indien ses raisons d'espérer.

La chOréphie indienne estrestée fidèle jusqu'à nos joursaux principes qu'elle observaitil y a !. oøo ans,

Au moyen de restes, d'attitu-des et de mouvements quiconstituent 00 véritable"Ian-gase". très étudié et d'une ex-trême subtilité, les danseurs"racontent"d8S épisodes desgrandes légendes indiennes ;leur danse exprime toutes lesnuances de l'amour, de la pas-sion, de la colère ou de lacrainte.

Cette tecnique comporte demultiples mouvements despieds, des chevilles et du torse.Le cou. la tête. les yeux et lessourcils jouent également Unrôle important : les trois prin-cipaux mouvements des yeuxpeuvent exprimer trente-sixsentiments..

Les estes des mains et desdoigts (moudras) viennent en-core enrichir ce tangage choré-franhinue. Avec chacune desdeux tnatns. on neuf exécutertrente-huit mOI1<lras : et avecles deux ensemble, trente-sept.Certaines de ces fibres pen-vent avoir iU'3qU'à quarante si-gnifications.

CE QUE LE CINEMA INDIEN

APPORTERAIT A LOCCIDENT

PAR

Kwaja Ahmad Abbas

promoteur du théâtre popu-laire indien, qui possède uneconnaissance a : pprojondie del'industrie cinématogrg. : phiquede son ! pays et en donne ci-dessous les caractéristiques -

sentielles.

\ la différence de bien d'au-tres pays, l'Inde n'a guèreeu jusqu'ici l'occasion de

faire connaître sa culture au de-hors en exportant des films. Lesquelques films indiens Qui ontfranchi les océans n'ont été pro-jetés que devant un public trèsrestreint, et il est douteux qu'ilspuissent. jamais concurrencer avecsuccès sur les marcl1l ! s étrangersles films américains et européens.

Mais ce n'est pas une raisonpour Que les meilleurs d'entreeux ne puissent toucher, àl'étranger, un public choisi despécialistes. Certains de nos am-bassadeurs ont déjà songé à seprocurer de bons filIp5 indiens età les faire projeter dans leursambassades. Les ciné-clubs, lesorganisations culturelles. les ins-titutions enseignantes, dans tousles nays. seraient certainementheureux de pouvoir, de temps àautre, projeter une bonne sélec-tion de films indiens.

Il importe toutefois que le pu-blic étranger apprenne à cons : dé-rer les films indiens comme unmiroir de la vie"indienne", etqu'il ne s'attende pas à y trouverle même genre d'intérêt que dansles productions en série d'Holly-wood. L'étranger jugera sansdoute trop longs certains filmsindiens, bien que jusqu'ici aucund'eux n'ait battu le record de"Autant en emporte le vent".

C'est que, en fait, le dévelop-pement d'un film indien se faitgénéralement sur un rythme pluslent que celui d'un film améri-cain. Il parait donc plus long àl'étranger.

Cela ne tient pas seulement aumontage du film. mais à touteune conception de la vie. Lesfilms indiens sont lents parce quele rythme de la vie indienne estlent. Les films indiens aCQu<"rrontpeut-être le rythme accéléré etfébrile d'un"thriller"d'Hollv-wood, si un jour, par l'effet de

Siva, bronze du XIVe siècle ('Iu-sée d'art oriental d'Amsterdam)

l'industrialisation, se crée dansle pays une atmosphère psycholo-gique semblable à celle de l'An-gleterre ou de l'Amérique.

Ce qui irrite souvent les étran-gers, et même les Indiens occi-dentalisés, c'est la part prépon-dérante que tient le chant dansle film indien. La raison com-merciale (et par conséquent es-sentielle) en est, que dans l'Inde,le cinéma est la seule distractionqu'on puisse offrir à des millionsde paysans déracinés ou ae gensvenus des petites villes, qui. envenant s'installer dans les cités,ont perdu leur riche tradition dechants et de danses popula : ressans rien trouver qui la rem-place.

En outre, du fait que le senti-ment religieux a des modes d'ex-pression musicale tels que le"kir-tah". le"bhajah"et le"qawwali",le chant, pour les Indiens plusque pour tout autre peuple, setrouve intimement mêlé à la vie.quotidienne.

Quels sont les films indiensau'il conviendrait de montrer àl'étranger ? A cette question ily a autant de réponses différen-tes que de genres cinématogra-phiques. Certains voudraient quece soient des films mythologiques.tirés des pourânas. parce qu'ilsreprésentent le patrimoine SDiri-tuel de l'Inde : d'autre préfére-

raient des films historiaues sur

nos empereurs et nos impératri-ces, pour révéler au monde"lasplendeur antique de l'Inde".Sans aucun doute, l'apparat deces films pittoresques plairait aupublic occidental, car il corres-pondrait à l'idée que se fait del'Orient"exotique"l'Occidentalmoyen.

Les ultra-réalistes, d'esprit mo-derne, interdiraient l'exportationfie tout film de ce genre et insis-teraient pour que seuls soient en-voyés à l'étranger des t'iims trai-tant de thèmes contemporains.Et là encore, les opinions diffé-reraient : faut-il envoyer àl'étranger des films Qui exposentles vices de notre système social,et risquent de donner une opi-nion défavorable de l'Inde ?

Si j'avais à me prononcer surla question, je choisirais, pour lesprésenter à l'étranger, dix films,dont je ne prétends pas qu'ilssoient les meilleurs films indiens

L'actrice indienne Jayasree dansle rôle principal du film Sakoun-tala, qui s'inspire d'une oeuvre

sanl>crite de Kalidasa

(bien que certains d'entre euxsoient en fait parmi les meil-leurs) mais qui me paraissentdonner de l'Inde et du cinémaindien une idée à peu près com-plète. Voici donc ma liste :

1. SEETA (East India Filmes). C'esti mou avis le film le plus beau, leplus noble et le plus significatif dupoint de vue mythologique qui ait étéproduit aux Indes jusqu'ici, n n'arien du clinquant de mauvais aloiqM)caractérise certains films plus élaba-rés et plus coûteux trottant le mêmethème.

2. VIDYAPATI (New Theatres). Con-sidéré par beaucoup comme te plusgrand et Je dernier chef d'oeuvre deDevakl Bose, ce film devrait fleurersur la liste parce qu'il traite avec artun thème mystico sentimentat typique-ment indien ; se rapportant à une épo-que bien définie de l'histoire de l'Inde,Il donne un tableau (quelques pen idéa-Hté) de J'ancienne sociHé frodaJe.

3. rUKAR (Mtnerva). Bien qu'onait produit sur des thèmes Mo : hats.des films meilleurs da point de vuetechnique. celui-cri reste ! e ptus émou-vant et le plus représentatif. Cetterévocation du sentiment de la Justicechez JrhanC'ir permettra d'appréciez lesplus bel1es yertus de l'époque moehale.

4., TUKARAM (PrabhatL On a faitdes douzalne de films reiit ; ieM sur toustes saints imaginales de t'Inde, maisTukaram reste sans étal par son ex-trame simplicité, la précision dans ledétail, et son caractère humatn. nn'est pas besoin de croire su miracle,ni même å la rf'1ilon. pour croire enun être humain tel que Tukaram :c'est Je saint prolét"rlen qui prêchapar ! lM bonnes aell. ns 8ne... lebenté

6. DEVDAS (New Théâtres). C'estl'histoire classique d'un amour mal-heure, écrite par J"lnlmitable SaratChatterjee, et filmée par Barua avectout son sens artistique et toute i'ar-deur de sa jeunesse.

6. PRESIDENT (New Théâtres). Mé.lodrame moderne dans le style deHollywood ; le premier film indien dusenre"un jeune homme rencontre unejeune fille", il représente un apportdurable du metteur con scène NitioBose au cinéma indien.

7. INATTENDU (Frabhat). Mis enscène par Shantaram au temps où ilcroyait au réalisme absolu. Le premierfilm audacieux et progressiste sur lethème du mariage (orce.

8. BARI DIDI (New Théâtres), Labelle et polrnante histoire d'une veuvelrustrée dans ses sentiments. Ce récitest conté avec un rare sens artistiqueet une réserve pleine de dignité.

9. DHARTI KE LAL ou EN.'ANTSDE LA TERRE (People's Théâtre). Lepremier documentaire réalisé et nencommercial sur la sombre tragédie dela famine du Bengale

10. DOCTEUR KOTNIS (Rajkamat).Hommage filmé de Shantaram ail jeu-ne martyr hindou nui. parti pour JaChine avec la mission médicale daCongrès, y trouva la mort au servicede l'humanité. On ne saarait trouvermeilleure conclusion 1 oette série efilms destines 1 donner ane Imare...

t'ïndt.

Page 9: Notre supplément : COURRIER VolumeII.-N') 4. Prix …unesdoc.unesco.org/images/0007/000739/073970fo.pdf · 2017-12-27 · Notre supplément : L'INDE NOUVELLE LE COURRIER ... où

Ma : 1949 LE COURRIER DE L'UNESCO

* 115 de la population mondiale vit aux Indes. * LA POPULATION augmente de 5 millions par an.

* 10 millions de personnes y meurent chaque année. * L'AGRICULTURE occupe 70 % des habitants.

* 40 pour cent des enfants y meurent avant 5 ans. * 53 pour cent seulement des terres sont cultivés.

Problème démographique de l'Inde

2e PARTIEDans notre numéro du mois

d'avril, le Dr S. Chandrasekhar,Chef du Département des Etudeséconomvques à l'Université d'An-namalai, Chidambaram (Inde),étudiait quelques-uns des facteurspr : nc : paM. r Mt e-cpKQMeKt ! &Euro;S pro-principaux qui expliquent les pro-blèmes démographiques de l'Indeet du Pakistan.

Nous publrons ci-dessous un se-cond article où l'auteur envisageles solutions qu'on peut apporterà ces problèmes. Ces deux articlesparaîtront sous peu, avec des déve-loppements complémentaires, dansune brochure de la série Les Hom-mes et leur Nourriture, publiéesous le patronage de l'Unesco.

Le mois dernier, le Dr Chandra-sekhar conclua't que æ problèmedémographique doit être examinéen fonction des moyens de subsis-tance, et surtout des ressourcesalimentaires.

VIL'AGRICULTURE hindoue est carac-M térisée par des méthodes primiti-ves d'exploitation, par sa subordi-nation aux caprices de la mousson,

et par la subdivision ou fragmentationdes terres due aux lois hindoues et mu-sulmanes qui régissent les successions(les biens immobiliers sont en généralpartagés également entre tous les héri-tiers mâles.) ; ce qui rend les propriétésdifficilement rentables et multiplie à l'ex-cès le nombre de ceux qui vivent de la.terre.

Le retard de la technique agricoledans l'Inde explique non seulement l'in-suffisance du rendement moyen des ou-vriers agricoles, qui est faible même parrapport à celui des paysans japonais ouchinois, mais aussi le fait que le sol sedétériore graduellement, par l'effet del'érosion et du déboisement.

Il ne faudrait pas en conclure néan-moins qu'il est impossible d'améliorerl'agriculture hindoue et son rendement.D'après les statistiques officielles de1939, un tiers des terres cultivables nesont pas exploitées-sans compter lesterres en jachère.

Ainsi, sur une surface cultivable de173 millions d'hectares, 53 % seulementsont ensemencés, 11, 6. % demeurent enjachère, et 35, 8 % sont cultivables maisnon exploités.

L'Inde n'a donc pas encore épuisé sesressources en terres cultivables ; mais lesterres cultivées semble : 1t avoir subi lesravages de l'érosion et avoir été épuiséespar des méthodes primitives d'exploita-tion. Grâce aux méthodes sc'entifiquesde l'agriculture moderne qui permettentd'empêcher l'érosion et de régénérer lesol, on devrait arriver à doubler le ren-dement des terres cultivées et à mettre envaieur une grande partie des terres ditesnon cultivables ; une telle améliorationsera des plus utiles mais elle ne sauraitcependant résoudre qu'une faible partiedes difficultés rencontrées.

S'il est possible avec l'aide de la scien-ce d'augmenter le rendement de la terreet de cultiver de plus grandes surfaces,cela ne suffira pourtant pas à améliorerJe niveau de vie de toute la population

Terres cultivées (40 ares et demi

par habitant)

hindoue ou à résoudre entièrement Jeproblème démographique, aussi longtempsque l'industrie, ou d'autres activités pro-ductrices. n'auront pas attiré à elles ungrand nombre de ceux qui vivent actuel-lement de la terre.

Industrialisation

m'INDUSTRIALISATION est souventt présentée comme un remède fonda-mental aux problèmes démographi-

ques de l'Inde. L'industrialisation qu'aconnue l'Inde depuis trente ans n'a tou-tefois pas contribue à résoudre le problè-me démographique parce qu'elle ne s'estpas opérée de façon systématique et ré-gulière, et que le nombre des gens quiont accédé aux emplois lucratifs offertspar l'industrie moderne n'a même pasatteint 1 % de la population totale.

Seule une industrialisation rapide etde grande envergure, conduite selon unplan bien arrêté, et aIlai1t de pair avecle développement de l'artisanat-lesdeux choses ne s'opposent pas nécessai-rement-pourra. remédier à l'accrois-sement continuel de la population, enattirant vers les usines une part des ha-bitants d'une campagne surpeuplée.

'L'industrialisation de l'Inde présenteune grande importance pour la solutiondu problème démographique, et cela pourdeux raisons : elle améliorera le rende-ment, mettra à la disposition des Hindousun grand nombre de produits dont lebesoin se fait grandement sentir, et leurprocurera toutes sortes d'avantages ; elletransformera aiasi l'économie actuelle enfaisant passer l'Inde de la pénurie àl'abondance. En second lieu. et ce pointest probablement plus important encorepour l'Inde, l'industrialisation favoriseral'apparition de nouveaux modes de vie,de type urbain, qui entraineroat la limi-tation volontaire du nombre des nais-sances.

,, migrations

, f\UE dire des migrations en tant quesolution au problème démographi-que dans l'Inde ? En ce qui concer-

ne l'émigration à l'étranger, il semblequ'elle ne soit guère possible. Le monden'est pas encore prêt à adopter, en ma-tière de migrations, une politique inter-nationale qui soit fondée sur une équi-table évaluation des exigences et des res-sources des divers pays et de leurs po-pulations et, si nous reconnaissons, com-me il le faut bien, que tout pays a ledroit de décider de la comnosition de sapopulation, l'Inde ne peut s'élever contrel'attitude de certains pays qui. bien quepeu peuplés, refusent de recevoir ungrand nombre d'immigrants hindous.

L'Inde ne voudrait pas non plus con-tribuer à créer de pénibles problèmes deminorités, tels que ceux qui se posentdéjà dans l'Union Sud-Africaine. Le : : 10m-bre d'Hindous établis définitivement àl'étranger s'élève actuellement à 4 mil-lions et demi, mais la population de l'Indes'accroît chaque année d'environ cinqmillions. Même si l'émigration lui offraitune issue, on ne pourrait s'attendre àvoir la majeure partie de cette populationsupplémentaire quitter le pays. Pourl'Inde d'ailleurs cette possibilité ne sau-rait constituer une solution définitive.

Il n'apparaît pas non plus qu'on puissecompter beaucoup sur la possibilité. pourcombattre le surpeuplement, de provoquerdes migrations intérieures, car il n'y apas, sur les territoires de l'Inde et duPakistan, d'espaces libres suffisants.

TE'éTUDE des mîgratio : 1s entre pro-M vinces au cours des trente demires années montre que certaines

d'entre elles constituent un phénomènepermanent. Bien que nous ne disposionspas à cet égard de chiffres certains.nous pouvons dire que ces mouvementsde population ont dans l'ensemble lecaractère de migrations saisonnières etque leurs effets ne sont pas permanents.D'ailleurs, au moment même où ungroupe quitte une province, il selIlblequ'un autre groupe y arrive, de sortequ'en définitive ces mouvements d'uneprovince à l'autre ou à l'intérieur d'uneméme province ne remédient nullement ausurpeuplement.

Si les mouvements de population entredifférentes régions s'expliquent non parle fait que la pauvreté chasse l'hommedes régions surpeuplées, mais plutôt par-ce que l'attire la prospérité relative desrégions moins peuplées, il faut bien re-connaître qu'il n'existe dans l'Inde au-cune région où le niveau de vie des mas-ses soit nettement plus élevé que dans

les autres. Le niveau de vie ne variepas suffisamment, d'une province à ueautre, ou d'une zone agricole à une autre,pour que les habitants soient incités à sedéplacer. Aussi toutes les migrationsintérieures qui se sont produites dansl'Inde au cours des trente dernières an-nés ont-elles eu pour cause soit de gra-ves fam'. nes, soit la construction de nou-veaux réseaux d'irrigation ou de nouveauxcanaux permettant de mettre en valeurde nouvelles terres.

Dans ces conditions, les migrations inté-rieures ne peuvent guère apporter de so-lution au surpeuplement et la division dupays en deux parties, qui a déjà forcécertaines communautés des deux domi-nions à émigrer en masse d'une régionà l'autre ne laisse guère prévoir de nou-velles migrations entre provinces.

La limitation des naissances

LA dernière solution qui reste à envi-sager, la plus importante aussi, estla limitation volontaire du nom-

bre des naissances. Comme la modernisa-tion de l'agriculture et l'industrialisation,la limitation volontaire du nombre desnaissances a certainement un rôle essen-tiel à jouer dans la solution du problèmedémographique en Inde.

Si on laisse de côté le traditionnalismehabituel aux populations rurales, qui faitobstacle à toutes les réformes, on peutdire qu'à l'inverse de ce qui se passedans certains autres nays, la limitationvolontaire du nombre des naissances nerencontre dans l'Inde aucune opposition.systématique de la part du gouvernementou des cultes. Les religions hindoues n'ysont pas défavorables.

Préserver la vie humaine

- ` ALGRE les progrès scientifiquessans précédent qui ont été réa-lisés depuis trente ou quaranteans, l'Inde perd encore un nombre con-sidérable de vies humaines s'échelonnantde l'état prénatal à la vieillesse. Malgréles connaissances scientifiques et techni-ques, et toutes les ressources dont ondispose pour protéger la santé, pour gué-rir ou soulager les nombreuses maladieset infirmités auxquelles l'homme est ex-posé, l'Inde continue à gaspiller des mil-liers de vies humaines.

Malgré la croyance à la valeur intrin-sèque de la vie, qui est à la base mêmede la civilisation hindoue, l'Inde a par-fois résisté à certaines réformes propresà favoriser une vie saine et active. Beau-coup de vies humaines sont, encore au-jourd'hui, abîmées ou détruites, alors quece malheur pourrait parfaitement êt. reévité ; et cela pour la simple raison quecertaines idées et croyances traditionnel-les survivent à une époque depuis long-temps dépassée, où il fallait affronterpresque sans armes les maladies et lespérils de toute nature, sans bien connaî-tre les exigences et les ressources de lanature humaine.

Si la croyance à un destin qui dirige-rait notre vie est ac : uellement en voiede disparition, il en subsiste pourtantencore des traces. Dans toutes les socié-tés, et dans l'Inde plus qu'ailleurs, lescroyances fatalistes persistent, même unefois périmées pr l'effet du développe-ment des connaissances scientifiquespourtant impuissantes à les éliminer.

Il n'y a de solution que si l'on renonceà des idées et à des pratiques archaïquesincompatibles tant avec les connaissan-ces actuelles qu'avec une conception dé-mocratique des valeurs humaines.

LA VIE SCIENTIFIQUE

.,.. (Suite de la page 7)

Peu P.-C. Rây, doyen de la science in-dienne, fonda, presque seul, l'Ecole in-dienne de chimie, à la tête de laquelle setrouvent actuellement des chimistes bril-lants tels que S.-S. Bhatnagar, J.-C.Ghosh, N.-R. Dhar, J.-N. Mukherji, K.Venkaturaman, P.-S. Guha. Grâce à Bhat-nagar, à Ghosh, à Dhar et à Mukherii, lachimie physique notamment a fait der-nièrement des progrès remarquables.

Depuis cinquante ans

If""ETI'E incursion rapide dans l'oeuvret.../de quelques savants de premierplan, choisis au hasard, ne peutguère donner une idée du nombre et del'intensité des recherches qui se poursui-vent actuellement aux Indes dans diffé-rentes spécialités scientifiques. Notre in-tention n'est pas, d'ailleurs, d'en rendrecompte ici. Ce qu'il importe de noter,c'est que les efforts entrepris depuis cin-quante ans à peine pour développer lessciences modernes ont déjà commencé àporter leurs fruits.

Ainsi, si l'on tient compte de la daterelativement récente à laquelle on a pucommencer les recherches scientifiques, etde l'extrême pauvreté des laboratoires,l'Inde, qui compte un lauréat du prixNobel et onze"pellows"de la Royal So-ciety-distinction scientifique la plusélevée dans le Commonwealth britanni-que-a obtenu, dans ce domaine, des ré-sultats qui font honneur à son génieinventif et créateur.

Technologie

et recherches appliquées

TOUTEFOIS, dans le domaine des re-M cherches appliquées et de la techno-logie, les résultats ne sont pas aussi

encourageants ; les progrès sont liés icià la situation économique du pays ; or,le caractère essentiellement agricole del'économie indienne, l'insuffisance du dé-veloppement industriel, ont constitué jus-qu'ici un obstacle au progrès des scien-ces appliquées. Que l'Inde ne puisse pour-suivre son développement économiquesans être fortement industrialisée, c'est ce

qui ressort clairement tant de l'expériencedes autres pays que de la sienne propre.Une audacieuse politique d'industrialisa-tion peut seule créer les conditions favo-rables à l'épanouissement de la recherchetechnologique.

Il est vrai, en revanche, que le succèsde l'industrialisation dépendra dans unelarge mesure des ressources scientifiqueset techniques du pays.

Les hommes d'Etat, autant que leshommes de science, ont aujourd'hui clai-rement conscience de Ce fait. Nul neconteste plus le rôle essentiel que lascience est appelée à jouer dans l'évolu-tion future de l'Inde-malgré l'opposi-tion que certains milieux ont autrefoismanifestée à l'égard du progrès scienti-tique. Le premier ministre, JawaharlalNehru, qui a lui-mêmes reçu une forma-tion scientifique, a reconnu l'importancecapitale de la science pour la prospériténationale en créant un service scientifi-que gouvernemental autonome, placé di-rectement sous son autorité. Un des prin-cipaux organes de Ce département. leconseil de la recherche scientifique etindustrielle, étudie la création d'un ré-seau de laboratoires nationaux. Un cer-tain nombre de laboratoires ont déjà étécréés, sous la direction d'hommes descience indiens ou étrangers d'une hautecompétence et de réputation internatio-nale.

La coopération internationale

M'INDE traverse une période décisivede son histoire. Le gage le plus sûrde son progrès futur sera son déve-

loppement scientifique. Elle a besoin, plusque jamais, de collaborer étroitement avecles autres nations tant dans le domainedes sciences pures que dans celui dessciences appliquées. C'est pour cette rai-son qu'elle a accueilli avec une satisfac-tion toute particulière la création del'Unesco et de ses postes de coopérationscientifique, dont l'un fonctionne actuel-lement dans l'Inde, où il a déjà rendude grands services. Cette collaborationscientifique ne profitera pas seulement àl'Inde, mais à toutes les nations dumonde.

S. N. SEN.

et du Pakistan

.

par Sriþati Chandrasekhar

Page 10: Notre supplément : COURRIER VolumeII.-N') 4. Prix …unesdoc.unesco.org/images/0007/000739/073970fo.pdf · 2017-12-27 · Notre supplément : L'INDE NOUVELLE LE COURRIER ... où

te PAPIER JOURS AIL :

UNE DOUBLE CRISE.

Les conséquences culturelles de la pénurie du papier..

De la forêt à l'imprimerie : (de droite à gauche) par leflottage, te bois est transporté à l'usine, où il est trans-formé en une pâte épaisse que recueillent d'immenses cuvesavant de devenir du papier prêt pour las rotatives.

Une Cara'vane mOl1diale

de la RUllio. :

IV ARMI les divers produits du bois,il en est un qui présente pourl'Unesco un intérêt particulier,en ce qu'il constitue un des ma-

tériaux indlspensables à la diffusion der'êducation, de la connaissance scientifi-que et culturelle et au développement del'information des masses. Je veux parlerdu papier, et singulièrement du papierjournal.

Depuis sa création, l'Unesco n'a cesséd'accorder à la question des besoins mon-diaux en papier et en papier journalune attention spéciale. L'enquête sur lesbesoins techniques de la presse, de la ra-dio et du cinéma que notre Organisationpoursuit méthodiquement depuis 1947 etqui, à la fin de l'année en cours, auracouvert quarante-quatre pays, a permis de

montrer ce que sont ces besoins.Les experts réunis chaque an-

née pour considérer les résultatsde l'enquête ont souligné les dan-gers d'un approvisionnement in-suffisant au triple point de vuede l'indépendance de la presse,du progrès soc : al et de la compré-hension internationale. Ces rap-ports ont été publiés.

Plus qu'une marchandise

ELUI de la Commission de8J 1948 s'exprimait ainsi :

Bien que la production mon-diale de papier journal dépasseaujourd'hui son niveau d'avantguerre, elle est insuffisante parrapport à la demande. Ce dé-fics menace de s'aggraver en-core si l'on ne prend'/Jas im-médiatement des mesuresénergiques en vue d'accéléreret de développer la produc-tion.

Le 28 avril, à Montréal, lesdélégués à la conférence pré-

poratoi're sur les problèmesmondiaux de la pâte à papier,représentant 26 pays (parmilesquels l'U. R. S, S" l'Allemagneet le Japon), entendaient lec-ture d'un message de M. Tor-res Bodet. Directeur généralde l'Unesco.

Etant donné l'importancedes problèmes soulevés par M.Torres Bodet, le Courrier del'Unesco donne ici un trèslarge extrait de ce message.

E Comité d'expert en matière de radio, qui s'est réuni à la Mai-

IL son de l'Unesco à Paris, au début de ce mois, a recommandé:'adoption du, projet dit de"Caravane mondiale de la radio"- selon l'expression de M. Torres Bodet. directeur général de l'Unesco.Ct projet prévoit l'utilisations d un matériel mobile de radio en diversDavs où seraient enregistrés desprogrammes intéressent le pointde vue de l'Uneso.

Le Comité a suggéré d'inviterdes producteurs de diverss orga-n : sat'ons nat ; onals à cooérer àrétablissement de ces programmes.

Le Comité estime que la pre-mière"e1ravane", si le projet étaitapprouvé, pourrait débuter auprintemps prochain et faire plu-sieurs pays d'Europe. Si les résul-tats étaient satisfaisants, l'Unes-co envisagerait la possibilité dèréaliser des programmes analo-gues en d'autres pays.

M. Torres Bodet a déclaré auxexperts de la radio que le néces-saire serait fa. t pour obtenirl'approbation de la Conférencegénérale de l'Unesco.

Le Comité, qui comprenaitd'éminents personnalités fran-çaises, suisses. belges, anglaises.brésiliennes, américaines et in-diennes, était chargé d'examinerle travail accompli au cours deces derniers mois paries servicesradiophoniques de l'Unesco. Féli-citant ces services des efforts réa-lisés et des résultats déjà obte-nus. il a formulé l'espoir qu'onleur fournirait les moyens nonseulement de poursuivie leur ac-tivité, mais d'en élargir le champ.Une trentaine de pays utilisent

actuellement les textes et les en-registrements qu'ils reçoivent del'Unesco, et notamment le pro-

gramme hebdomadaire intitulé :"Le tour du monde de l'Unesco."

Le Comité a formulé le voeuque l'Unesco développe les échan-ges rad : ophon : ques du genre de"Musique et Folklore", program-me qui a été réalisé récemmentavec la contribution de sept paysdifférents.

nurte grave empëche-ta press. e des'acquitter de SOn devoir priot'ipalqui est d'informe les peuples dumonde."

*'I.'approvisMnnement de la presseen panier journal est d'une impor-tance capitale pour la réalisationdes objectifs de l'Unesco. La pénu-rie actuelle crée des conditions tel-les que le papier journal doit êtreconsidéré comme beaucoup plusqu'une marchandise. Un approvi-sionnement limité tend à restrein-dre la liberté d'expression. Une pé-

L'action de Unesco

'es dans cet esprit et surC là base de cette documen-tation que l'Unesco a at-tiré à plusieurs reprises l'atten-tion des Nations Unies sur lesproblèmes que posent l'insuffisan-ce de la production et l'inéga-lité de la répartition du papierjournal : à la sous-commissionde la Liberté de l'Information etde la Presse d'abord, puis à laConférence sur la Liberté de l'In-formation qui s'est tenue au prin-temps 1948 à Genève. Cette der-nière conférence a adopté unerecommandation qui est actuel-lement devant l'Assemblée Gé-nérale des Nations Unies et dontvoici le texte :

"LIA CONFERENCE DES NA-T30NS UNIES SUR LA USER TE DEL'INFORMATION,

Emissions

radiophoniques du poste"Unesco"de coopération

scientifique en Amériquelatine

Deux sér : es d'émissions régulières,dest : nées aux auditzurs de l'Amé-risque latine, seron : inaugurées, cemois-ci, par le doute de Coopéra-tion scientifique, à Montevideo.

Ces émissions seront retransmi-ses par l'Equateur et l'Uruguay.Elles renseigneront le public surl'activité scientifique de l'Unescoet de ses postes de coopérationscientifique.

Elles comporteront égalementdes conférences de vulgarisationscientifique et répondront à cer-taines des demandes d'informationadressées au poste dp Montevideo.

MM. Schneider et a Prat o

A LUNESCO, deux postes importants qui étaient depuis un ansans titulaires, ont été pourvus te mois dernier : M. DouglasH. Schneider a été nommé chef du Département de l'Informationdes Masses, et le Dr. Carlo a Prato, chef du Bureau de l'Information.Depuis que M. Jaime Torres Bodet a assumé la direction de l'Unesco,en décembre 1948, ce sont les deux premières nominations importan-tes qui aient été faites.

U 1 E N connudans les mi-lieux de la pres-se, de la radioet du cinéma,tant à Paris quedans d'autrescapitales euro-Jéennes, M Dou-glas H. Schnei-der, qui diri-

ga : t jusqu'ici, au State Depart-ment, le Service d'information àl'étranger, a été nommé àl'Unesco, et est attendu incessam-ment à Paris.

M. Schneider a fait ses étudesaux Etats-Unis, en Angleterre eten France. Il a enseigné l'anglais,le français et le latin dans uncollège libre aux environs de Pa-ris, et il a organisé en Francedes cours de vacances qui per-mettaient aux étudiants améri-cains d'entrer en contact avecdes Français de leur âge, et dese familiariser avec les traditionset la vie françaises.

En 19M. M. Schneider retour-na aux Etats-Unis pour dirigerles émissions eurooéennes de laWorld Wide Broadcasting Foun-dation, puis les émissions inter-

nationales de cette fondation auposte WRUL, à Boston.

Lorsque les Etats-Unis entrè-rent en guerre, M. Schneider futnommé au Service d'Information.(O. W. I.) du gouvernement amé-ricain, en qualité de directeuradjoint, puis de directeur du Bu-reau des émissions de I'O. W. I.,à New-York. En 1943 et 1944, ildirigea, à Alger, la"Radio desNations Unies"sur le théâtre desopérations en Méditerranée.

La fin des hostilités trouvaM. Schneider au Service de con-trôle des informations en Allema-gne, où il était chargé de l'exa-men de la presse, de la radio etdu cinéma allemands. En novem-bre 1946, il fut nommé conseillerd'ambassade à Paris et chargé desservices d'information et d'échan-ges culturels.

M. Schneider rentra à Washing-ton en septembre dernier et,avant de donner sa démissionpour entrer à l'Unesco, il dirigeaitau Département d'Etat des Etats-Unis le service chargé d'établirles programmes d'information àl'étranger, service qui coordonneles programmes d'information etd'échanges culturels pour le mon-de entier. M. Schneider est âgéde 48 ara.

ADVERSAIRErésolu deMussolini, d u'ascisme et du1azisme, et cela 1iès la première 1heure, M. Cariet prato a faitune brillante: arrière de jour-laliste interna-tional.

Pendant la première guerremondiale, il collabora à des jour-,naux anglais, français et scandi-naves. Il assista à la Conférencede la Paix, à Versailles, en qua-lité d'attaché de presse de ladélégation italienne. En 1931, ilfonda à Genève le"Journal desNations", quotidien internationaldont il fut le rédacteur en chef.

Le début de la seconde guerremondiale le trouva à Paris col-laborant, avec Pertinax, à l'heb-domadaire français"L'EuropeNouvelle". Pendant la guerre ilfut parmi les fondateurs des pre-miers journaux clandestins. En1941, il se rendit aux Etats-Unispour aider à fonder le Comité ita-lien de libération nationale. L'an-née suivante, il dirigeait la sec-tion italienne de"La Voix del'Amérique".

Pendant son séjour aux Etats-Unis, il fonda la revue mensuelle"Free World", et collabora'à denombreux journaux et magazines.notamment au"New York Times"dont il avait été, pendant plusde douze ans, correspOndant àGenève. Il fut aussi conseillertechnique du groupe"Life, Timeand Fortune".

En 19t4, il fut désigné parl'Etat-major interallié pour opé-rer la liaison entre les partisansde l'Italie du Nord et les maquisfrançais

ATTIRE l'attentif du Conseiléconomique et social sur les tacon-vénients et dangers qui peuvent ré-sulter pour la liberté de l'informa-tion d'une production insuffisanteet d'une répartition inégale du pa-pier journal ;

RECOMMANDE au Conseil éoon...mique et social d'envisager aussi ra-pidement que possible, compte tenudu résultat des enquêtes conduitespar le Conseil et par l'Unesco, desmesures pratiques pour remédier àcette situation ;

RECOMMANDE aux gouverne-ments de fournir tout leur. appui à) exécution du plan de l'Unesco pourvenir en aide aux pays dévastés parla guerre ;

ET INVITE 1/UNESCO à rendre cemême service aux autres pays quisouffrent d'une pénurie de papierjournal."

Les besoins du progrès

intellectuel et social

REPENDANT, c'est aujour-d'hue la première fois quel'Unesco se trouve en me-sure de faire entendre sa voixdans le cadre d'une conférence despécialistes où les divers aspectstechniques et économiques du pro-bleme sont considérés avec toutela compétence désirable. Je dé-sire en exprimer ma reconnais-sance à l'Orga, nisation pour l'Ali-mentation et l'Agriculture et auGouvernement canadien. II m'estparticulièrement agréable de sai-sir cette occasion de témoignerpubliquement ma satisfaction dela coopération qui s'est établiesur cette question entre mon se-crétariat et celui de l'Organisa-tion pour l'Alimentation et l'Agri-culture.

Je voudrais que cette collabora-tion entre institutions spéciali-sées aux compétences complé-mentaires préfigure l'effort desgouvernements pour donner auproblème qui nous occupe une so-lution qui tienne compte à la foisdes réalités écoomiques et des exi-gences sociales, des nécessitésmatérielles et des aspirations spi-rituelles.

Ce sont ces exigences socialeset ces aspirations spirituelles qui,en cette matière comme en toutesautres, définissent le point devue de !'Unesco. Le point de vuede 1 Unesco c'est celui du publicet de ceux qui le servent : desélites professionnelles qui veu-lent s'exprimer, des masses po-pulaires qui demandent d'êtreinstruites, des peuples qui cher-chent à se connaître et à se com-prendre. En un mot, l'Unescoaborde le problème-celui dupapier comme tous les autres pro-blèmes-à partir des besoins duprogrès intellectuel et du progrèssocial. C'est pour elle un devoirqui est inscrit dans son Acteconstitutif et que les conférencesgénérales qui Se sont succédé de-puis sa création ont constammentconfirmé.

(Suite pae l<t

10 LE COURRIER DE L'UNE S CO Ma : 1949

L

entrent à FUnesco

Page 11: Notre supplément : COURRIER VolumeII.-N') 4. Prix …unesdoc.unesco.org/images/0007/000739/073970fo.pdf · 2017-12-27 · Notre supplément : L'INDE NOUVELLE LE COURRIER ... où

mai 1949 LE COURRIER DE L'UNESCO Il

Nous publions ci-dessous des ex-traits de quelques-unes des répon-ses à l'enquête entreprise parl'Unesco sur les conflits idéologi-ques actuels concernant la notionde"démocratie",

Ces extraits ne représententqu'une petite partie des 50 répon-ses (dont certaines ont plus de20 pages) fournies pac des philo-sophes, des historiens, des sociolo-gues du monde entier.

Les résultats de l'enquête del'Unesco seront probablement pu-bLés en volume, avec un choix deréponses.

QUESTION :"Dans quelle mesure êtes-vous prêt à convenir que le terme"dé-mocratie"est ambigu ?"

Réponse du Professeur Mac Keon, del'Université de Chicago :

Le mot"démocratie"est ambigu, nonparce que différentes formules ont étéproposées pour définir sa signification,mais parce que différentes interprétationsont été proposées et élaborées pour uneformule sur laquelle on s'est accordé avecune remarquable continuité. Peu de dis-cussions sur la démocratie, pour ou con-tre, ont refusé de prendre pour point dedépart l'interprétation selon laquelle la"démocratie"est"le gouvernement dupeuple pour le peuple". Les ambiguïtésdans l'interprétation de cette formule pro-viennent de deux sources : comment dé-terminer les moyens par lesquels le peu-ple peut gouverner"pour le peuple" ?Qu'est-ce exactement que"le peuple" ?Les discussions concernant la premièresource d'ambiguïté conduisent à recher-dler des définitions pour des termescomme"loi","ordre","liberté","éga.-lité", tandis que les discussions concer-nant la deuxième source d'ambiguïté obli-gent à examiner des associa. tions de ter-mes contradictoires comme ceux de"majorité et minorité","riche ; ; et pau-vres".

QUESTION :"L'opmion s'est largementrépandue qu'il n'y a pas de"démocratie"en soi, mais uniquement une longue sé-rie de"démocraties"qui varient avec lesconditions historiques, sociales et psy-chologiques : il y ! t une démocratie athé-nienne, une démocratie médiévale, unedémocratie bourgeoise, une démocratieprolétarienne, une démocratie soviétique,mais pas de"démocratie"en général.Dans quelle mesure seriez-vous d'accordavec cette opinion ?"

Réponse du'professeur Charles Bet-telheim, de l'Université de Paris :

La démocratie bourgeoise est une démo-cratie pour les bourgeois et une dictaturepour les prolétaires. Lorsque la. démocratiebourgeoise prend l'aspect le plus démocra-tique, cette dictature se manifeste essen-tiellement comme une dictature idéologi-que : imposition (au moyen de l'école,de l'église, de la. presse, de la radio, ducinéma, etc.) au prolétariat des concep-tions et des idéaux qui servent au main-tien de la domination bourgeoise : maisles armes de la dictature matérielle etviolente (la police, l'armée, les tribunaux,les prisons) restent toujours à portée dela main et il y est fait recours chaquefois que le prolétariat (à l'occasion d'unegrève, par exemple) s'écarte du cheminque la bourgeoisie lui désire voir suivre ;il y est fait recours aussi lorsque la dic-tature idéologique faiblit et que le prolé-tariat adhère à une autre idéologie quecelle de la bourgeoisie : celle-ci cherchealors à substituer la dictature ouverte àla dictature masquée antérieure, et la.démocratie bourgeoise disparait.

La démocratie prolétarienne, à son tour,est une démocratie pour le prolétariat, etune dictature pour la bourgeoisie.

QUESTION :"La démocratie prêsuppose-t-elle un accord général sur des prin-cipes fondamentaux et incontestablesdans les groupes au sein desquels elleest en vigueur ? Dans l'affirmative,quels tout ces principes ?"

Réponse du Docteur A. C. Swing, derUniversité de Cambridge :

Je crois que la démocratie ne présup-pose aucun accord général sur un principefondamental donné, excepté celui-ci : queles différences entre deux partis opposésne sont jamais assez graves pour êtreréglées par la force.

QUESTION :"Problème terminologique :le mot"démocratie"doit-il être employépour exprimer un concept étroit, un con-cept politique désignant des méthodescommandant la prise de décisions, oudoit-il être employé pour exprimer unconcept large, un concept politico-socialdésignant non seulement les conditionset les méthodes, mais encore les résul-tats de la prise de décisions ?"

Réponse du Professeur C. 1. Lewis, derUnivers : té de Harvard :

Dire que quelque chose doit être faitimplique l'existence d'un critère d'exacti-tude. Mais. précisément, le sens générale-ment donné aux mots est le critère deleur utilisation correcte. A moins que, oujusqu'à ce qu'il existe une interprétationclaire, universellement comprise et admisepour le mot"démocratie", la question desavoir si le mot"démocratie"doit êtreemployé dans un sens plutôt que dans un

Etude des conflits actuels

d'interprétation.

ici) ANS le monde entier, profanes et experts n'ont jamais eu plus vive-ment conscience des conflits et des contradictions intellectuelles danslesquels fhumanité se débat qu'au cours des quelques dernières an-nées. Les conflits idéologiques sont partout présents, entre nations

et au sein de chaque nation, entre les individus et dans l'esprit de chaqueindividu.

Peu de mots ont fait éclater plus de controverses que le terme de"démo-cratie". Le problème est vaste et d une portée considérable : il s'élève bienau-dessus du plara de la sémantique. II implique, entre autres données, desdifférences dans f évolution historique, le conditionnement social et la struc-ture politique des peuples. Il se rattache étroitement à tout l'ensemble depn. blèmes que pose l'influence de la tecltnique et de la civilisation industriellesur la vie de chaque habitant du monde. Problème philosophique, certell,mais aUlISi choix dont dépend la glaerre ou la paix.

Beaucoup sans doute se sont déjà efforcés de découvrir les causes des désac-cards, d'en fixer les responsabilités, mais le problème n'a jarrwill été abordésur le plan international. dans le cadre des effortll villa nt à amener les peuplellà se mieux comprendre.

t. FI."de clarifier les débat actuels, l'Unesco a entrepris une raste enquêteA sur le concept de"démacratie". Elle a envoyé pour cela un question-naire à près de cinq cents philosophes, historiens, « tes et économilltes,OInsi qu'à toutes les commissions nationales de l'Unesco.

En possesoon de/eMrs réponses (dont le lecteur trortuera de brefs extraitssur cette même page), un comité d'experts appartenant à six pays différentss'est réuni au débnt de ce mois"pour analyser les causes d'ambiguïté etde confusion dans l'usage actuel du terme de démocratie, et leur influencesur les querelles politiques d'aujourd'hui".

Dans une déclaration. finale qu'ils ont tous saignée, les six membres duComité constatent qu'il n'existe pas deux conceptions extrêmes et immuableset que"nombreux sont les signes d'un accortl sur des points fondamentaux".

L"entente est posstote, lit-on ailleurs, si les faits invoqltes sont traités commefnits et opposés à des fait., et si les idéaux et les théories sont trnités commedes nspirntions et opposés à d'autres expressions de fins et d'intentions.

Les six experts reconnaissent que la clarification du conflit idéologique denotre temps... ne saurait par elle-mêmes garantir l'établissements de la paix., Uais, au moins, elle permettra de séparer les questions authentiques de. & fauxproblèmes qui ne naissent que de la confw, ; on intellectuelle.

..-IL A clarté de l'expression rendra donc possible la' ; ompréhension mu-tuelle" ; en permettant de séparer tes questions authentiques desfaux problèmes,"elle simplifiera la situation générale et permettra la concen-tration de l'attention sur des questions pratiques et la possibilité de solu-tion en acte".

La déclaration enregistre le fair'que"pour la première dans danll l'hilltoiredu monde nulle doctrine ne se donne comme antidémocratique" ; elle ajouteque"fussent-elles aussi riolemment opposées que l'on voudra (les diversellformes de démocratie), ellell n'en relèvent pas moins d'une commune traditiond'hun, anisme"..

Les six experts ont admis que"cet accord sur l'affirmation des principesderniers est enfoui sous une musse extrêmement complexe de désaccordes" ;mais"11 ne faut pas oublier le rôle que jouent les rivalités de puissance :. clIH' durcissent lt ! conflit idéologique en le schématisent, en réduisant à uneopposition simple et tranchée la multiplicité des doctrines et des partis".

En outre, pOlarsuivent les experts,"si nons pensons que le conflit idéolo-gique peut être éclairé, notre conviction repose sur le fait qu'il ne met pasen présence deux conceptions immuables et extrêmes... En éclairant les ques-tions fondamentales, on atténuera les effets sur le grand public de la propa-gande tendant à provoquer la violence".

LA conclusion du document est la suivante :"En dernière analyse, la solu-tion des conflits idéologiques repose sur le libre échange des informa-tions, des matériaux de la culture et des personnes. Les peuples du mondene peuvent se comprendre mutuellement dans toute la diversité de leur vieculturelle, sociale et politiques... sans un contact mutuel plus libre et plusriche."

Les membres du comité qui ont rédigé le rapport sont : Sergio Buarquede Hollanda (Brésil) ; Edward H. Carr (Grande-Bretagnt') ; Richard McKeon(Etats-Unis) ; Charles Perelman (Belgique) ; Pierre Ricæur (France) etAl,'Ross (Danemark).

autre est une question qui ne comportepas de réponse. Toute répons à cettequestion révélerait seulement la préfé-rence ou l'idée préconçue de celui quirépond.

Je

QUESTION :"Dans quelle mesure esti-mez-vous justifiée et féconde la distinc-tion nette entre le concept de"méthodecommandant la prise des décisions"etcelui de"contenu de la décision prise" ?

"Quels argument, à votre avis, justi-fieraient-ils la tendance à réserver lemot"démocratie"pour la méthode com-mandant la prise des décisions et à luirefuser, en conséquence, un sens pluslarge comprenant non seulement lesconditions et méthodes, mais encore lecontenu des décidions ? Ce genre de rai-sonnement a déchaîné de violentes atta-ques. Socialistes et communistes, anar-chistes et syndicalistes se sont livrés àdes analyser sévères du concept"formel"de la démocratie."

Réponse de M. Humayun Sabir, deNew-Delhi :

Ce qu'il est intéressant de noter, c'estque les protagonistes de la"démocratie",autant que ceux du"socialisme", sont,malgré leur vif désaccord sur les valeursrelatives de la liberté et de l'égalité, d'ac-cord pour distinguer nettement la fin etles moyens. Les"démocrates"mettentl'accent sur la liberté et affirment que.quel qu'en soit le résultat, la méthodecommandant la prise des décisions est cequi importe le plus. Tant que la décisionpolitique conserve, dans les procédés quil'ont commandée, l'apparence de la li-berté, il importe peu de savoir si elle aurapour conséquence la justice sociale ou soncontraire. En d'autres termes, ce qui im-porte pour le"démocrate", ce sont lesmoyens, non la fin. De son côté, le"socia..,liste"qui affirme que l'égalité doit êtreinstituée dans toutes les sphères de lavie, quelles que soient les méthodes adop-tées pour atteindre ce but, n'est pas loinde témoigner de son accord avec l'opinionselon laquelle la fin justifie les moyens.

Ainsi tous deux s'entendent pour consta-ter le divorce d'entre la fin et les moyens,cependant que l'un affirme que ce sontles moyens qui comptent, et l'autre la fin.

Sans entrer dans une discussion méta-physique sur ce point, il faut néanmoinssouligner que de telles tentatives pourséparer la fin des moyens n'ont jamaisabouti qu'à des contradictions. La con-damnation d'une fin doit nécessairementcomporter la condamnation des moyenspropres à l'obtenir. De la même manière,si les moyens utilisés sont condamnables,cela doit faire immédiatement douter dela justification de la fin qu'ils poursui-vent.

QUESTION :"La fameuse expressiond'Abraham Lincoln à Gettysburg :"Gouvernement du peuple par le peuple,pour le peuple", a souvent servi de pointde départ pour la détermination des cri-tères essentiels de la démocratie. Laprépc"ition"du"indiquant l'obéissancedu peuple an gouvernement, la préposi-tion"par"indiquant la participation ac-tive du peuple à la détermination desdécisions prises par le gouvernement, etla préposition"pour"indiquant la valeurde ces décisions pour le bien-être géné-rai du peuple.

"Dans quelle mesure ces explicationscorrespondent-etles à votre propre inter-prétation de la formule de Lincoln ?"

Réponse du Professeur Perelman, del'Université de Bruxelles :

La formule de Lincoln, d'après laquelleTa. démocratie devrait être le gouverne-ment du peuple ; par le peuple et pour lepeuple, a eu dans la philosophie politiqueun grand succès parce que, séparée de soncontexte, elle peut toujours être inter-prétée d'une façon qui corresponde à desidéaux politiques opposés ; il suffira soitd'interpréter les éléments de cette for-mille d'une façon légèrement différente,soit de mettre l'accent sur telle ou tellede ses parties.. PersonneJJement j'ai inter-prété l'expression"gouvernement du peu-

pIe"comme indiquant le fait que Je peu'pIe eau la source du pouvoir dans unedémocratie, car je ne vois pas en quoil'obéissance du peuple au gouvernementcaractériserait la démocratie plutôt quen'importe quel autre régime. Il est diffi-cile de dire s'il s'agit là de trois critèresnécessaires d'un régime démocratique,parce que cette formule est trop vaguepour permettre la détermination d'un cri-tère suffisamment précis : on pourra tolu'"jours trouver une interprétation et uneadaptation de cette formule qui permet-traient de rappliquez à des régimes quecertains oourraient hésiter à considérercomme démocratiques.

X

QUESTION :"Problème psychologique etsocial : une"démocratie", au sens détroitdu mot, peut-elle fonctionner commetelle si rien n'cst fait pour la rendre"démocratique"au sens lare du mot ?"

Réponse du Docteur Ma. Nomad, deNew-York :

Elle ne le peut pas. Car, sous une"démocratie étroite"de ce genre, l'énormemajorité des votants, convaincue qu'ellene pourra jamais se délivrer de son incu-rabe pauvreté, sera tentée de vendre sesvoix aux plus offrants ; à moins que cettemajorité ne devienne la proie facile desdémagogues totalitaires, qui l'encourage-ront à se débarrasser d'une démocratiepurement"formeHe"pour la remplacerpar un despotisme qu'ils lui présenterontcomme une démocratie"élargie","prolé-tarienne"ou"populaire".

X

QUESTION :"Problème politique, problème des priorités, des rapports entrela fin et les moyens : la"démocratiepolitique"est-eHe le meilleur moyend'atteindre l'objectif de la"démocratiesociale" ? La"démocratie sociale''est-elle le meilleur moyen d'atteindre l'ob-jectif de la"démocratie politique" ? La"démocratie politique"est-elle unmoyen d'atteindre un objectif particu-lier quel qu'il soit ? Existe-t-il entre cesdeux C041CCptS un rapport quelconque demoyen à fin ?"

Réponse du Professeur Quincy Wrightde l'Université de Chicago :

Je pense que la démocratie polltique etla démocratie sociale ont des rapportsréciproq : les de fins et de moyens, c'est-à-dire que chacune peut être considéréecomme moyen ou comme fin de l'autre,selon la philosophie générale des valeursde chaque individu. En pratiques, je penseque dans la plupart des cas, il est plusefficace de commencer par la démocratiepo : itique, en se donnant pour but de déve-lopper la démocratie sociale par les pro-grès de la démocratie politique, commecela a été fait en Angleterre. Il convientnéanmoins de dire que la démocratie politique implique la nécessité d'une certainesécurité et d'un niveau moyen de cultureet de prospérité. Il est clair que les res-sources et la situation géographique del'Angleterre et des Etats-Unis sont plusfavorables à la réunion de ces conditionsque dans n'importe quel autre pays. nn'est donc pas surprenant que la démo-cratie politique se soit d'a. bord développéedans ces pays. La situation mondiale ac-tutelle, qui comporte en même temps desrapports internationaux plus étroits etune survivance des anciens pouvoirs politi-ques, crée certainement des conditions dé-favorables aux démocraties politiques.Cette situation ne pourra ètre réglée quepar une organisation mondiale qui dontnuera. à tous les Etats de plus grandesassurances pour leur sécurité.

QUESTION :"Exista ti ! une incompati-bilité entre l'ultime objectif politiquedécrit par Lénine et les objectifs aux-que) d'autres théoriciens attribuent unevaleur fondamentale ou intrinsèque ?'

Réponse du Professeur Stanislas Os-sowski, de l'Université de Varsovie :

En suivant les discussions concernantdes questions de principe entre les adversaires idéologiques des deux camps,nous sommes frappé par le fait qu'unelangue commune n'y fait pas défaut. Il enest autrement dans leurs discussions avecles partisans du racisme, ceux de la croixgammée. Tous les deux, motivant leurprogramme, font appel aux mêmes va-leurs. bien que les accents n'y soient pasplacés d'une manière identique. La con-damnation des démocraties occiàentalespar le partisan de la socialisation desmoyens de production n'est pas une oppo-sition au culte de la liberté. La lutte avecle Hbéralisme économique, la lutte avec 1libéralisme bourgeois peuvent être enga-gées au nom d'un libéralisme conçu d'unemanière différente. L'argumentation,dans dcs discussions pareilles, tend engénéral à démontrer que le Darti adversea trahi ou altéré les idéaux approuvés parles deux adversaires. Je ne veux pas dimi-nuer de cette manière les différences es-sentielles qui existent entre l'un et l'autrecamp, les différences concernant l'échelledes valeurs et les manières de réagir enréponse à différents faits actuels de lavie sociale et politique. Nous voulons juste-ment essayer de chercher comment il estpossible d'arriver à des contradictionsidéologiques si aiguës, en partant des mê-mes postulats principaux. Cela jetteraaussi quelque lumière sur la pluralité desens du tenDe"démocratie".

(M'EST- W ! E LÀ « B) EM@&Euro;T ! ! E ?

Page 12: Notre supplément : COURRIER VolumeII.-N') 4. Prix …unesdoc.unesco.org/images/0007/000739/073970fo.pdf · 2017-12-27 · Notre supplément : L'INDE NOUVELLE LE COURRIER ... où

1 ! LE COURRIER DE L'UN ES CO Mai 1949

Le papier journal : une double crise

(Suite de la page 10)

chue où l'offre égalera la demandecommerciale, il apparait que rienne serait plus injuste, ni plusdangereux que de Se satisfaire decet équilibre qui n'en est pas un.

C'est au nom de ce devoir quepresque tous les Etats représen-té ici ont fait leur, que je mepermets de soumettre à votre con-sidération les observations sui-vantes

'es un fait que depuis laM. fin de la guerre une amé-lioration très sensible est in-tervenue en ce qui concerne laproduction mondiale du papierjournal Cette amélioration estdue essentiellement à l'accroisse-ment de la production de l'Amé-rique du Nord qui, en quatre ans,ressort à 25 0/0. C'est ainsi quele Canada produit actuellementun millions de tonnes de plusqu'en 1945 (ce qui donne, avecTerre-Neuve, un total de 4. 535. 000tonnes, soit 60 0/0 de la produc-tion mondiale). C'est là un effort

remarquable auquel il sied derendre hommage.

Aujourd'hui la production mon-diale a dépassé 7 millions et de-mi de tonnes, alors que la moyen-ne des années 1935-1939 s'établitlégèrement au-dessous de cechiffre.

D'où une première question :ce niveau de production est-ilsuffisant ? A cette questionl'Unesco répond catégoriquement :non.

Pour l'Unesco, il existe une in-suffisance considérable de la pro-duction et cette insuffisance me-nace de s'aggraver de plus enplus au cours des années et desdécades à venir si on ne prendpas dès maintenant des mesuresenergiques pour accélérer lerythme d'accroissement de la pro-duction.

L'

LA DEMANDE TRADUIT IMP ARF AITEl\IENT

LES EXIGENCES REELLES DU PROGRES

'EST ici que je voudraisM, me référer à la notion desbesoins intellectuels ds peu-ples du monde que j'énonçaiston' à l'heure.

Je sais qu'on a évalué la de-mande ; zen papier journal pour1949 à 8. 200. 000 tonnes, ce quifait ressortir une marge en som-me assez faible par rapport à laproduction probable. Même si lesgouvernements abolissaient lesrestrictions à l'importation de pâ-te. de charbon ou de papier, queleur imposent les conditions dumarché international des mon-naies et si on revenait brusque-ment à un régime universel d'éco-nomie libérale, la demande nedépasserait sans doute pas debeaucoup 9 millions et demi. Cequi ne constitue nullement pourla production présente un objec-tif inacecssible, si l'on se rappellequ'il existe actuellement une ca-pacité mécanique de productioninemployée de près de 1. 400. 000tonnes.

Mais que signifient ces chif-fres ? Ils signifient que tellessont les quantités de papier jour-nal que les gouvernements ou lapresse estiment pouvoir êtreachetées et consommées commer-cialement. Ils ne signifient pasque telles sont celles que les peu-ples devraient consommer pourleur information. C'est pourtantcela le véritable étalon, le justebut. *

Pour apprécier correctement,je veux dire humainement, le de-gré d'adaptation de la production,il ne suffit pas de comparer celle-CI à la demande. La demande estun fait commercial qui ne tra-duit que très imparfaitement lesvéritables désirs, et moins encoreles besoins objectifs de la collée-tivité. Aujourd'hui surtout, tropde facteurs interviennent pour laréduire à un minimum en decàdes exigences réelles du progrèssocial et international : restric-tions financières, décisions politi-ques, impuissance économique,ignorance. technique.

La production de papier

journal aux IndesPour lutter contre l'analpha-

bétisme aux Indics, il est in-dispensable d'accroître la pro-duction du papier destiné àl'impression des livres et desjournaux.

Un plan récemment :-oublié àla Nouvelle-Delhi prévoit pour1952 une production de papierde 250. 000 tonnes, comprenantnotamment, et pour la pre-mère fois aux Indes, du pa-pier journal.

IL IRA-T-ON que les besoinsréels sont impossibles àévaluer ? Il n'en est rien.

Ces besoins éclatent aux yeux detous. Us sont inscrits noir surblanc dans les statistiques démo-graphiqnes et scolaires. Or il nefait aucun doute qu'entre lecontenu de ces statistiques,d'une part, et la production-et plus encore l'offre commer-ciale, d'autre part, il existe undécalage impressionnant et quiest appelé à s'aggraver considé-rablement dans Un proche avenir.

Même dans les pays industriali-sés et à faible proportion d'illet-trés, il s'en faut que la pressedispose partout d'un approvision-nement adéquat. C'est ainsi quedans les vieux pays d'Europe oc-cidentale, les difficultés de chan-ge combinées avec les nécessitéslénérales de la reconstruction et

les charges militaires obligent àdes restrictions qui réduisent laccnsommation à un niveau no-toirement insuffisant, alors mêmequ'il existe dans ces pays des ca-pacités de production suscepti-bles d'assurer et au-delà les be-soins nationaux. Tel est le casdu Royaume-Uni, de la France,des Pays-Bas, de l'Italie, dont laconsommation annuelle par habi-tant en kilogrammes est passéerespectivement entre 1935-1939 et1948 de 26, 2 à 8, de 8, 8 à 6, 4, de12, 2 à 6. 3 eut, de 1, 7 à 1, 3,

Même les Etats-Unis et le Ca-nada, qui consomment ensemble

CONSOMMATION ANNUELLEEN KILOGRAMMES DE PAPIER

JOURNAL PAR HABITANT

IL ES analphabètes constituentercore plus de la moitiéde la population du globe.

Et pourtant il n'y a pas assezde papier-surtout étant donnésa très inégale répartition-pourceux qui savent lire. Tels sont lesfaits fondamentaux qu'il convientd'avoir constamment présents àl'esprit si on veut concevoir unplan de production à la mesuredes exigences réelles de l'huma-nité. Telle est la situation qu'ils'agit non d'accepter, mais de dé-noncer comme anormale et decorriger comme malsaine. Fautede quoi nous irions à l'encontredu dynamisme de l'Histoire.

Cependant j'ai trop vivementInsIsté sur l'ampleur des besoinsà satisfaire pour que je puisseme dispenser complètement d'in-diquer quelques mesures suscepti-bles d'accroître plus ou moins ai-sément la production actuelle.

Certaines de ces mesures onttrait. à la fabrication du papier,d'autres à. la production et àfutiiisation du bois.

En ce qui concerne la fabrica-tion du papier, il conviendraitd'obtenir le plein emploi de lacapacité mécan : que existante,dont j'a'déjà dit qu'une part del'ordre de 1. 400. 000 tonnes de-meure aujourd'hui encore inuti-lisée. De ce total, le tiers environrevient à la Grande-Bretagne. Ilfaut aussi citer le Japon, dont laproduction est tombée de 400. 000à 100. 000 tonnes, et l'Allemagnequi n'atteint pas encore la moitiéde sa production d'avant guerre.Je n'ignore pas les causes com-plexes et souvent très indirectesde cet état de fait. Je dis simple-ment qu'il importe de s'efforcer

d'v remédier

plus de 5 millions de tonnes, soitles deux tiers de la productionmondiale, envisagent des besoinssupplémenfaires d'environ 1 mil-lion de tonnes pour les prochainesannées.

a...'AIS que dire des vastes con-tinents d'Amérique duSud, d'Asie et d'Afriquequi actuellement consomment àpeme Il 0/0 de la production mon-diale alors que leur populationconstitue 67 0/0 de celle de la pla-nète ? Ces pays sont en croissan-ce démographique rapide. A elleseuie, l'Inde s'accroît chaque an-née de près de 3. 600. 000 habi-tants. Et partout une évolutionpolitique, économique, technique.intellectuelie d'une immense por-tee se précise et se précipite, quiappelle, exige et déjà amorce undéveloppement massif de l'ins-truction.

Or si, en quatorze ans, de 1934à 1947, l'Uruguay, l'Equateur etCuba ont pu doubler et le Vene-zuela tripler leur consommationen papier, il n'en a pas été demême de la Chine à qui l'huma-nité doit l'invention du papier etdont la consommation annuellepar tête d'habitant ne dépassepas 0, 1 kilogramme, bien que lenombre des habitants qui saventlire ait augmenté de 10 0/0 endix ans, ni de l'Inde et du Pakis-tan qui sont à peu près dans lamême situation que la Chine, nidu Siam qui consomme moinsqu'avant la guerre alors que lenombre de ceux qui ont appris àlire et à écrire a augmenté de17 0/0 en sept ans, ni de la Tur-quie, dont la consommation abaissé de 20 0/0 malgré le déve-loppement continu de l'instructionpublique.

Ainsi, bien que la productionait retrouvé son niveau d'avantguerre et que le temps soit pro-

ais, même uti-, lisée à plein etselon les mé-thodes d'exploitationles plus perfection-nées, il est évident quela capacité mécaniquede fabrication actuellene saurait suffire,surtout aux besoinsde demain. Dans cesconditions, il apparaîtnécessaire d'envisager,sur une échelle im-portante, la construc-tion et l'équipement denouvelles usines, etcela malgré les gran-des difficultés queconstituent le coût del'outillage, dont lesprix sont de deux foiset demie supérieurs àce qu'ils étaient avantla guerre, et les dé-lais considérables demisé en train. En dé-pit de toutes ces diffi-cultés des projets n-téressants sont à létu-de ou même eT ! voi-----------------

de réalisation dans divers pays.Il conviendrait d'encourager cesinitiatives et au besoin de lesaider, par exemple en organisantl'envoi dans ces pays d'ingénieurst de techniciens.

De même, et ne serait-ce quepour économiser les réserves fo-restières, il y aurait lieu de sti-muler les recherches en vue deremplacer, au moins en partie, lapâte de bois par d'autres matiè-res telles que la paille, la paillede riz, les déchets de la canne àsucre, le jonc, le bambou et cer-taines herbes tropicales. Il fautmalheureusement convenir. queles expériences poursuivies dansc domaine sont loin d'être con-cIliantes pour ce qui est du pa-pier journal qui doit répondre àdes conditions très particulièrespour pouvoir être traité par lesrotatives à grande vitesse. Les ré-sultats obtenus jusqu'ici, de mê-me que les divers procédés de ré-cupération par refonte ou désen-crage des vieux papiers ne sau-raien apporter que des palliatifsà l'insuffisance de la production.Cependant les besoins, je le répè-te, sont si grands et si urgentsqu on ne devrait négliger aucuneressource supplémentaire.

Pour favoriser

un accroissement rapide

de la production

(2QUANT à la production fores-f tière, il ne sied pas au pro-fane que je suis de faire la

moindre suggestion aux expertsque vous êtes. Toutefois, en cequi concerne l'utilisation de cetteproduction par l'industrie pape-tière. n'importe qui ne peut man-quer d'être frappé par deux faitetees remarquables.

LUnesco reproduira

des périodiques épuisés

En réponse à de nombreuxappels qui lui ont été adresséspar diverses institutions et bi-bliothèques, les une sinistrées,les autres de création récente,l'Unesco a conçu le projet defaire reproduire en microfilmsou photo-offset un certainnombre de publications pério-diques importantes actuelle-ment épuisées.

L'Unesco a commencé parchoisir UI1 petit nombre de pé-riodiques à reproduire et elle

a pris contact avec leurs an-ciens éditeur. Quand elle sesera mise d'accord avec eux,elle communiquera aux sous-cripteurs éventuels la liste deces périodiques en indiquant,entre autres renseignements.les frais de reproduction. Se-lon la demande, la reproduc-tion sera effectuée soit parmicrofitm. soit par photo titho-graphie, et des contrats serontpassés avec des établissementscommerciaux.

Le premier de ces faits est lapart, que je n'hésite pas à qua-lifier de très faible, qui dans lesmultiples utilisations du bois estconsacrée à la fabrication du pa-pier. Au cours de ces dernièresannées, cette part a encore dimi-nué, notamment en Europe, dufait des pressants besoins en. com-bustibles, en matériaux de cons-truction et en textiles occasion-nés par les ravages de la guerre.Au Canada même, on m'assurequ'elle n'a jamais dépassé 170/0du bois abattu.

L autre fait qui caractérise. l'uti-lisation du bois par l'industrie pa-petière est le très petit nombre

Répartition mondiale du papierjournal

d'essences susceptibles d'être em-ployées pour la fabrication du pa-pier journal. En dépit des expé-riences en divers pays sur cer-tams bois tropicaux, les essencesutilisables demeurent réduites ausapin, au baumier, au peuplier età l'épicéa, auxquels est venu s'a-jouter récemment le pin méri-diona'.. qui a donné d'excellentsrésultats dans le sud des Etats-Unis et qui se recommande parsr rapide croissance.

Cs faits me paraissent indiquerle sens dans lequel devraients'orienter les efforts de la coopé-ration internationale. Certes, jen'ignare pas que le bois doit ser-vir à'de nombreux usages d'uneimportance vitale pour l'homme,tels que la construction, le chauf-fage. l'équipement des mines, etje comprends qu'il est très diffi-cile d'arbitrer entre des besoinsconcurrents également pressantset essentiels. Malgré tout, je vou-drais demander à cette Confé-rence d'examiner la possibilitéd'inclure dans les recommanda-tions que vous seriez amenés àadresser aux gouvernements laproposition que soit élevé le pour-centrage de la production de boisconsacre à la fabrication du pa-pier. A tout le moins, il me pa-rait qu'il conviendrait de réserverpar priorité à cette fabricationl'utilisation des essences que j'aiénumérées précédemment.

APPEL EN FAVEUR D'UNE REPARTITION

PLUS EQUITABLE DU PAPIER

L est enfin une dernière ob-M servation que j'estime de mondevoir de formuler. Elle a

trait non plus à la production dupapier journal, mais à sa distri-bution.

Cette distribution continue d'ê-tre régie pour les principaux pro-ducteurs par les engagementscommerciaux en vigueur avant laguerre Ainsi elle ne tient que trèsmsuffisamment compte des nou-veaux besoins qu'ont ouverts lesgrands bouleversements politiqueset sociaux qui sont intervenusdans le monde au cours des dixdernières années. Déjà à peu prèsexclusivement orientée avant laguerre vers les pays industriali-ses. la concentration de cette dis-trlhution s'est encore aggravéedepuis la guerre du fait de l'iné-galité du pouvoir d'achat desmonnaies et plus spécialement dece que l'on a appelé"la faminede dollars". C'est ainsi que cer-tams pays exportent une partiedf leu'production vers les paysà monnaie plus forte, bien queleur marché intérieur soit insuf-fisamment approvisionné.

Le résultat de la con jonc Lon deces deux facteurs est une extrê-me inégalité dans la consomma-tion. De vastes régions du mondesont pratiquement dépourvuesd'approvisionnement. Et c'est pré-cisément là où les besoins sontle plus grands pour intensifierla lutte contre l'ignorance, queles ressources manquent le plus.L Unesco a produit à ce sujet desstatistique qui font ressortir lacor sommation annuelle en kilo-grammes par habitant. Ces chif-fres dispensent de longs commen-taIres

Il L n'appartient pas à l'Unescode suggérer ici des remèdesà cette situation. Mais il est

de son devoir de faire, en cha-que occasion, appel à la bonnevolonte de tous afin de corriger

dans toute la mesure du possibleU : 1e teJIe inégalité dans la répar-tition d'un produit aussi essentiel

Population mondiale

au progrès intellectuel et socialde l'humanité.

Ii se peut que le cadre de cetteConférence préparatoire, consa-crée à l'ensemble des problèmesrelatifs aux diverses utilisationsdu bo : , ne permette pas l'étudeapprofondie, qui serait souhaita-ble. des questions que je viensd'évoquer. Pour le cas où il enserait-ainsi, je veux exprimer ledésir qu'une Conférence spécialesoit ultérieurement convoquée.qu : serait exclusivement consa-cree aux questions du papier etdu papier journal.

Ma :. > dès maintenant, en vousadressant mes meilleurs voeux desuccès pour vos travaux, je dé-Slre vous renouveler l'expressionde ma gratitude pour l'occasionq'u m'a été offerte de m'associerà vos efforts. Par avance, je saisque mon appel n'aura pas étéadressé en vain. Entre ceux qui.veillent sur la croissance des ar-bres et ceux qui se consacrent àl'éducation des enfants, il existeune sympathie naturelle qui nesauraI, se démentir.

Administration et Rédaction : UNESCO, 19. Av. Kleber. Paris, 16e.RM. en chef : S.-M. Koffler.-Secrét. de réd. : R. Grenier.-Gér. : H. Kaplan.

TOUTE REPRODUCTION AUTORISEE

Jmpri1nerie da"New York Herald Tribune", 21, rue de Berri, P"ri5 (....vaeaco Oubli. mu

apc aaa D pa0a