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Projet National de recherche et développement
INGENIERIE DE LA SECURITE INCENDIE
Naissance et développement d’un incendie ; Propagation des effluents (fumées) :
Evaluation des outils disponibles et domaines d’application
Avril 2011
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Sommaire
1. Introduction : ............................................................ 3
2. Les attentes des outils de calcul ..................................... 5
3. Les différents types de modèles et logiciels existants ........... 8
3.1 Les Modèles locaux (ou de Champ) 1980 ..................................... 8
3.2 Les Modèles globaux (ou : de zones, ou : de volumes finis) 1970 ....... 18
3.3 Les modèles « simples »........................................................ 25
Formules de Heskestad (1984) .............................................................. 26
Sollicitation thermique des éléments de structure par la flamme et le panache des
foyers : formule de Hasemi ................................................................. 29
3.4 Les outils de calcul utilisés aujourd’hui ..................................... 31
La conférence internationale sur l’application de réglementations performancielles
.................................................................................................. 32
Les études d’ingénierie de résistance au feu et de désenfumage menées en France
en application du règlement. ............................................................... 33
4. L'état actuel des logiciels : les points à améliorer. ............. 34
4.1 Les modèles ...................................................................... 34
4.2 Les logiciels ...................................................................... 36
5. Choisir un modèle et utiliser un logiciel ........................... 38
5.1 Retour d’expérience : Les enseignements des travaux du CIB W14 ..... 40
6. Conclusion ............................................................... 43
7. Compléments d’information ......................................... 45
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1. Introduction :
La deuxième partie du programme d’étude du Projet National Ingénierie de
la Sécurité Incendie (PNISI) est relative aux études techniques permettant
de faire le point sur les connaissances et outils disponibles ou qui devront
être réalisées afin d'acquérir des connaissances supplémentaires
nécessaires dans certains domaines.
L’action 9 du PNISI s’inscrit dans cette deuxième partie. Elle s’intéresse
aux phénomènes relatifs à la naissance, au développement de l’incendie et
à la propagation de la fumée à l’intérieur d’un bâtiment.
Elle porte plus précisément sur la caractérisation d’un feu selon son état à
l’aide d’outils de calcul. Ces derniers, dans ce domaine, sont nombreux.
Certains peuvent être utilisés en complément, caractérisant localement ou à un
instant donné, un phénomène spécifique modifiant le déroulement du feu ou son
effet.
Le programme de travail du PNISI en ce qui concerne cette action a été défini
ainsi : « Les travaux à accomplir sont d'examiner les programmes de calcul
destinés à des simulations de phénomènes du feu (production de chaleur,
enfumage, allumage, rayonnement thermique, …) afin de :
- faire une liste des outils utilisables ;
- cerner leurs domaines d'application ainsi que leurs limites, soit issues des
hypothèses de base, soit mises en évidence par des évaluations méthodiques,
soit rencontrées dans la pratique tout en se limitant aux outils ayant été
appliqués de façon documentée ou bénéficiant d'une expérience
d'application »
Ce rapport rassemble des informations relatives aux outils de calculs employés
en analyse quantitative de la sécurité incendie et plus particulièrement ceux
permettant d’estimer les sollicitations thermiques sur des cibles en cas de feu
dans un bâtiment.
Il rappelle les attentes des outils. Les différents types de modèles de
développement du feu sont présentés au troisième chapitre. Le chapitre suivant
dresse un rapide état des outils et logiciel et évoque les points à améliorer.
Enfin, quelques recommandations pour aider au choix des outils les plus adaptés
au problème de sécurité traité sont fournies au chapitre 5. Le dernier chapitre
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donne quelques informations complémentaires permettant d’approfondir le
sujet.
Il s’adresse avant tout au praticien de l’ISI qui souhaite disposer d’un aperçu
des outils de calcul disponibles. Dans ce but, il vise à donner une description
qualitative qui rend assez bien compte des phénomènes mis en jeu et aussi
une information assez précise afin d’entrevoir les apports et les limites des
outils.
Enfin, ce document est le fruit des travaux du PNISI réalisés par les différents
partenaires suivants : le centre technique industriel de la construction
métallique (CTICM), le laboratoire national de métrologie et d’essais (LNE),
l’institut national de l’environnement industriel et des risques (INERIS) et le
centre scientifique et technique du bâtiment (CSTB).
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2. Les attentes des outils de calcul
Le calcul est une des méthodes de détermination des performances d’ouvrages
et composants d’ouvrages. Les essais et le jugement d’expert en sont d’autres.
L’action 9 ne porte que sur le calcul.
Ce dernier est utilisable lorsqu’il est possible de faire usage d’un modèle de
comportement. Les méthodes de calcul et les modèles qu’elles appliquent
évoluent à mesure que progresse les sciences et que les outils de calcul
permettent de caractériser au plus près la vérité physique ou chimique des
phénomènes.
Dans le domaine de la sécurité incendie et notamment du contrôle de la fumée,
une première étape marquante de l’évolution des modèles d’évaluation des
performances de dispositifs de désenfumage, est la rédaction d'un rapport de la
"Fire Research Station" britannique, destiné à exposer une approche par le calcul
du dimensionnement des exutoires de désenfumage (Thomas et al., 1963), qui
introduit l'idée d'admettre un découpage du volume d'un local en deux zones
gazeuses (une zone haute chaude stratifiée à température évoluant au cours du
temps, une zone basse à température ambiante), exploitée abondamment
depuis.
Aujourd’hui, des modèles dits "de champ" décrivent localement l’ensemble des
phénomènes d’échanges entre des mailles qui peuvent être nombreuses, par
exemple des dizaines ou des centaines de milliers. Ils exploitent de très
nombreuses équations couplées d'échanges et de bilans qui permettent en
principe de calculer finement les champs de vitesse et de température dans les
gaz.
Ces deux exemples d’approche performancielle permettent d’orienter vers une
meilleure utilisation des sciences et des techniques disponibles. Concevoir en
termes d’exigences et performances conduit à réfléchir aux propriétés, aux
fonctions des composants, c’est-à-dire aux phénomènes.
Mais que peut-on attendre des outils de calcul ? Pour quelle utilisation pratique
en ingénierie de la sécurité incendie ?
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Pour répondre à ces questions il convient pour commencer de comprendre et
définir le problème de sécurité : Projet ou bâtiment existant, type d’activité,
existence ou non d’un cadre réglementaire ; puis d’examiner les endroits à
protéger : tout le bâtiment, une salle, des chambres, un couloir, …
La démarche consiste en fait à découper un système complexe en sous-systèmes
plus simples. Elle présente un avantage important qui est la possibilité, pour
chaque sous-système, soit d’établir par corrélations à partir d’expérimentations,
soit de valider expérimentalement, des modèles simples. C’est le cas par
exemple des formules décrivant l’activité de foyers types. On peut être aussi
amené à formaliser les couplages entre sous-systèmes. C’est le cas par exemple
des échanges de masse et d’énergie à l’intérieur d’un bâtiment dans les modèles
de zones.
Il est difficile de formuler des règles méthodologiques systématiques pour la
partition d’un système global en sous-systèmes, pour le choix du modèle le plus
adapté au problème de sécurité donné. On peut toutefois noter, par expérience,
que des modèles à première vue simplistes donnent des résultats très suffisants
pour la pratique.
Les divers outils de calculs, présentés dans ce document et utilisés en analyse de
la sécurité incendie pour évaluer les conditions de danger sur des cibles
permettent tous de quantifier des sollicitations thermiques (des actions
thermiques) en cas de feu dans un bâtiment. Ils doivent :
- Pour un projet de construction (de réhabilitation), aider à satisfaire les
exigences, réglementaires ou non, de la sécurité incendie. Permettre
l’évaluation des conséquences de modifications.
- Fournir des résultats utiles à l’application en un temps de calcul raisonnable
et exploiter des grandeurs physiques utiles à la sécurité ; c’est-à-dire des
grandeurs adaptées au bâtiment et aux cibles.
Dans la pratique ils peuvent par exemple servir à :
- Définir un scénario de feu pour évaluer, par exemple, l’enfumage d’un local
ou la durée de stabilité d’une structure. Pour cela il est nécessaire de
connaître l’activité des foyers potentiels présents ; la vitesse de
consommation, le débit calorifique des objets combustibles susceptibles de
causer un démarrage de feu.
- Evaluer les conditions de l’extension d’un feu. Pour cela il est nécessaire de
connaître les conditions d’allumage des objets combustibles situés à
proximité du premier foyer.
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- Evaluer les conditions de danger sur des cibles (personnes, objets
combustibles, éléments de structure, environnement). Pour cela il est
nécessaire de connaître les caractéristiques des flammes des objets
combustibles susceptibles de causer un démarrage de feu pour pouvoir :
o Estimer si la flamme d’un foyer peut « toucher » un élément haut
de structure dans un bâtiment et mettre en danger sa stabilité ;
o Définir le contour d’une flamme supposée conique ou cylindrique
et ainsi caractériser une surface de rayonnement ;
o Dans un modèle global de feu de local, calculer le volume occupé
par la flamme dans le local ;
o Calculer des flux thermiques et des éclairements énergétiques ;
o Evaluer le débit d’air appelé par un foyer sur une certaine hauteur
et calculer la température moyenne des gaz chauds ;
o Dans un modèle global de feu, quantifier les flux de masse et
d’énergie présents le système général des équations de bilan.
- …
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3. Les différents types de modèles et logiciels existants
Les modèles de feu de bâtiment appliqués à des problèmes concrets sont
aujourd’hui nombreux (plusieurs dizaines). Il n’est pas envisageable de les
présenter tous.
Les modèles de feu sont au cœur de l’analyse quantitative. Ils permettent, à
partir des données fournies par l’utilisateur (géométrie du bâtiment,
caractéristiques du foyer déclenchant le scénario, caractéristiques des sources
potentiellement combustibles à son voisinage, conditions aérauliques et
thermiques initiales régnant dans le bâtiment, etc.) de calculer au cours du
temps le développement de l’incendie (extension à d’autres foyers) et les
données d’entrées (transport et transfert de la chaleur, mouvement des fumées)
nécessaires aux autres modèles.
3.1 Les Modèles locaux (ou de Champ) 1980
On écrit localement des équations de bilan et d’échange. Par exemple : les
équations aux dérivées partielles de Navier-Stokes (conservation de la
quantité de mouvement). On introduit des modèles de turbulence, de
combustion, de cinétique chimique, d’échanges de chaleur par rayonnement
entre gaz et parois. Il faut de bons algorithmes de résolutions. Quelques
programmes de ce type donnent de bons résultats.
Cependant, la puissance de calcul des ordinateurs ne permet actuellement
pas une utilisation pratique de tels outils pour un bâtiment constitués de
plusieurs niveaux eux-mêmes constitués de plusieurs locaux.
Le domaine étudié est découpé en un grand nombre de volumes de contrôle ou «
mailles » au niveau desquels les grandeurs sont supposées uniformes. Á chaque
maille sont attribuées des inconnues représentant les valeurs des grandeurs
physiques recherchées. Il s’agit alors de résoudre numériquement, de manière
locale et instationnaire, les équations de Navier Stokes traduisant les lois
d’échange et de conservation de la masse, de la quantité de mouvement, des
espèces et de l’énergie.
Il est courant de classer les modèles de champ ou CFD (Computation Fluid
Dynamic) selon les différents sous-modèles qu'ils mettent en œuvre, ainsi que
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selon les techniques numériques qu'ils utilisent. Cette section est destinée à
fournir les caractéristiques principales permettant d'identifier rapidement les
modèles de champ.
Approximation des équations régissant les écoulements
Les équations de la mécanique des fluides généralement utilisées pour l'étude
des écoulements réactifs sont les équations de Navier Stokes, auxquelles sont
ajoutées des équations de transport pour les espèces chimiques présentes dans
le mélange. Ces lois fondamentales régissant l’écoulement d’un fluide sont des
lois axiomatiques qui reposent sur les principes de conservation de la masse, de
la quantité de mouvement et de l’énergie. Le système d’équations obtenu est
fermé en utilisant des lois de comportement qui relient les contraintes
appliquées au fluide avec sa déformation, la diffusion des espèces avec leurs
concentrations et le flux de chaleur avec le champ de température. Une
équation d’état permet également de lier entre elles les grandeurs
thermodynamiques.
Les processus de combustion se déroulant lors d’un incendie induisent
généralement des vitesses du fluide qui sont très inférieures à la vitesse
référentielle du son. Les écoulements rencontrés dans ce contexte
correspondent donc à de faibles valeurs du nombre de Mach.
La principale difficulté liée à l’utilisation du système d’équations de Navier
Stokes dans ce contexte réside dans son caractère multi-échelles. En effet, ce
système d’équations est à la fois raide en temps et raide en espace. La raideur
en temps provient du fait que le temps caractéristique de propagation d’une
onde acoustique est beaucoup plus petit que le temps caractéristique du
mouvement du fluide.
Les conséquences de cette raideur sont très restrictives au niveau de la
résolution numérique des équations. Ainsi, pendant un pas de temps de la
simulation numérique, il est nécessaire que l’onde acoustique la plus rapide
traverse au plus une maille de calcul, ce qui fait qu’une particule matérielle ne
parcourt qu’une très faible distance. La résolution du problème nécessite alors
un nombre de pas de temps très grand. Il est par conséquent impossible en
pratique d’utiliser directement le système d’équations de Navier Stokes pour
simuler un incendie d’une durée de plusieurs dizaines de minutes.
On emploie donc généralement une approximation de ce système d'équation,
adaptée aux écoulements à faible nombre de Mach, pour la simulation des
situations d'incendie. Celle-ci permet de filtrer les ondes acoustiques pour ne
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garder que les écoulements à faible vitesse. Diverses techniques existent pour
réaliser cette tâche. Elles ne seront pas détaillées dans ce document.
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Turbulence des écoulements
Les écoulements résultant d'une situation réelle d'incendie sont généralement
turbulents. D’un point de vue général, les écoulements turbulents sont
caractérisés par une apparence très désordonnée, un comportement local non
prévisible et l’existence de nombreuses échelles spatiales et temporelles.
Le phénomène de turbulence apparaît lorsque la source d’énergie cinétique qui
met le fluide en mouvement est relativement intense devant les forces de
viscosité que ce dernier oppose à son déplacement. L’inverse de cette situation
est le régime laminaire pour lequel l’écoulement est « régulier » et prévisible.
Dans la grande majorité des cas, la turbulence de l’écoulement joue un rôle
fondamental sur les flammes. En effet, l’interaction de la turbulence avec les
phénomènes de combustion conduit d’une part à modifier la forme de la zone de
réaction entre combustible et comburant, et permet d’autre part d’atteindre
des intensités volumiques de dégagement de chaleur nettement plus élevées
qu’en régime laminaire. Ceci s’explique par le fait que le brassage dû à la
turbulence favorise grandement les transferts de masse et d’énergie au niveau
de la zone de réaction, en augmentant la surface d’échange et en améliorant les
phénomènes de diffusion. Il est par conséquent indispensable, dans les modèles
CFD, de prendre correctement en compte l'influence de la turbulence de
l'écoulement sur les différents mécanismes régissant le problème.
Simulation numérique des écoulements turbulents : Dans la plupart des
applications courantes, la taille caractéristique du plus petit tourbillon présent
au sein de l'écoulement turbulent est telle qu’il est impossible de résoudre
numériquement toutes les échelles présentes au sein de cet écoulement. En
effet, cela requiert l’utilisation d’une discrétisation largement hors de portée de
la puissance informatique actuellement disponible.
Heureusement, une connaissance extrêmement fine de toutes les structures de
l’écoulement n’est pas indispensable en pratique. Il est ainsi possible de réaliser
des simulations sur des maillages compatibles avec la puissance de calcul
disponible, à condition de réduire le spectre des phénomènes à résoudre. Pour
simuler numériquement les écoulements réels, on utilise une modélisation de la
turbulence. Deux grands types d’approche sont actuellement employés pour y
parvenir :
o L'approche RANS (« Reynolds Averaged Navier Stokes ») : Dans le cadre de
cette approche, seules les valeurs statistiquement moyennées des grandeurs
de l’écoulement sont recherchées. L’approche RANS permet d’utiliser des
maillages relativement grossiers et des pas de temps assez larges, ce qui
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aboutit à des temps de calcul raisonnablement réduits. C'est la raison
principale pour laquelle cette approche est aujourd'hui très répandue. Son
principal inconvénient est que la fermeture des équations est délicate car sa
portée est très générale, puisqu’elle modélise l’ensemble du spectre
turbulent.
o L'approche LES (« Large Eddy Simulation ») : La simulation des grandes
échelles ou LES est basée sur l’idée que si les grandes structures de
l’écoulement sont très différentes selon la géométrie du problème, les petits
tourbillons tendent au contraire à posséder un caractère universel et isotrope.
Le principe de la LES est de simuler uniquement les grandes échelles de
l’écoulement, les effets des petites échelles étant seulement modélisés. Ceci
nécessite la présence de termes additionnels dans les équations, destinés à
corriger les erreurs dues à la perte d’information au niveau de chaque maille.
L'approche LES est particulièrement prometteuse car elle tend naturellement
vers la solution exacte des équations lorsque l’on réduit la taille des mailles .
Et aussi parce qu’elle introduit moins d’empirisme que l'approche RANS qui ne
peut représenter que l’écoulement moyen, quelle que soit la résolution du
maillage utilisé.
La simulation des grandes échelles est particulièrement bien adaptée pour
simuler des situations d'incendie car les flammes que l'on y rencontre possèdent
des grandes structures qu'il est possible de résoudre assez finement,
contrairement à l'approche RANS.
Combustion
La prise en compte des phénomènes de combustion constitue une caractéristique
importante des modèles CFD destinés à simuler les écoulements réactifs. Le
traitement de la combustion permet de calculer le dégagement de chaleur local
du aux réactions chimiques. Au cours d'un incendie, ce dégagement de chaleur
entraîne une augmentation de la température des gaz, qui, sous l'effet des
forces de flottabilité, met le fluide en mouvement. L'estimation du dégagement
de chaleur nécessite par conséquent un soin particulier.
Mécanismes de combustion : La combustion est un phénomène d’oxydation
mettant généralement en jeu un grand nombre de réactions chimiques
irréversibles. Cet ensemble de réactions induit la plupart du temps un fort
dégagement de chaleur qui correspond au gain d’énergie résultant à la fois des
ruptures des liaisons entre les molécules du combustible, et de la création de
nouvelles molécules chimiquement plus stables. Ce dégagement de chaleur est
localisé dans une région très mince de l’espace où se situent les réactions. Le
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taux de réaction global entre combustible et comburant est une grandeur
physique très raide et fortement non linéaire. L’épaisseur de la zone de réaction
est de l’ordre du millimètre pour les situations courantes.
Pyrolyse : La combustion d’un solide résulte généralement du phénomène de
pyrolyse qui est un mécanisme de dégradation, sous l’effet d’un flux thermique,
des polymères existant à haute température à la surface d’un matériau
combustible solide. Ceci permet de générer des éléments combustibles volatiles
quittant le solide pour venir alimenter une flamme.
Flamme de diffusion : Durant la combustion d’un solide, les gaz combustibles
quittant la surface de celui-ci ne se mélangent pratiquement pas à l’oxygène
contenu dans l’air avant d’atteindre la zone de réaction. C’est la raison pour
laquelle la combustion est de type « flamme de diffusion ». La combustion y est
contrôlée à la fois par les réactions chimiques et par le transport des réactifs
l’un vers l’autre. La cinétique des réactions chimiques est fortement favorisée
par les températures atteintes au niveau de la flamme et c’est le transfert de
masse qui, en régissant la mise en présence des réactifs, constitue souvent le
principal facteur limitant le taux de réaction. Il est en pratique couramment
admis que la cinétique des réactions chimiques est infiniment rapide devant la
mise en présence des réactifs.
Production des suies : Au cours d’un incendie, les conditions dans lesquelles se
déroulent les réactions de combustion ne sont pas idéales, ce qui entraîne la
production d’espèces intermédiaires. Avec la condensation de certaines espèces
gazeuses, ceci conduit notamment à la formation des suies, qui sont des
agrégats composés essentiellement de carbone et dont la morphologie est
généralement complexe. Les suies jouent un rôle déterminant au niveau des
échanges radiatifs se déroulant au sein du feu. Leur cycle de vie est complexe
car il est fortement couplé avec les autres processus physiques se produisant au
cours d’un feu.
Modélisation de la combustion : Une résolution numérique optimale nécessite à
la fois l’utilisation d’un maillage beaucoup trop fin et la résolution simultanée
d’un nombre bien trop important de bilans chimiques pour être envisageable
avec les calculateurs actuels. Il est donc en pratique nécessaire de faire de
fortes hypothèses simplificatrices. Il existe dans la littérature de nombreux
modèles de combustion qui ont été développés pour différentes applications
industrielles notamment.
La flamme de diffusion naît de la rencontre de l’oxygène de l’air d’un côté et
des gaz de pyrolyse de l’autre. La flamme de diffusion dépend essentiellement
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de la mise en présence des réactifs et de la manière dont ils réagissent. L’étude
de ce type de flamme se heurte donc en premier lieu à un problème de
mélange.
La composition d’un mélange d’espèces chimiques peut être caractérisée par la
donnée des fractions massiques de chacune des espèces. Étant donné que la
production et la consommation des espèces sont liées entre elles par les
réactions de combustion, la description de la composition du mélange peut se
ramener à l'utilisation d'une unique variable appelée « fraction de mélange » et
définie par rapport aux fractions massiques du combustible et du comburant. La
fraction de mélange est régie par une équation de convection diffusion sans
terme source. Les modèles de combustion traitant des flammes de diffusion
exploitent généralement cette simplification.
Rayonnement thermique
Au cours d’un feu, les gaz issus de la combustion contribuent significativement
aux échanges radiatifs. Ces derniers jouent un rôle fondamental au cours d'un
feu car ils déterminent les sollicitations thermiques sur les cibles et sont
notamment à l'origine du fort couplage existant entre les dégagements de
chaleur au niveau des flammes du foyer et le débit de pyrolyse du combustible.
Les photons qui traversent un milieu participant peuvent être déviés dans
diverses directions par diffusion, ou encore absorbés par les molécules
constituant le milieu traversé. Les molécules d’un gaz peuvent en effet
emmagasiner de l’énergie radiative sous forme de rotation, de vibration ou
encore en modifiant l’état d’énergie de leurs électrons. Les quantités d’énergie
pouvant être acquises ou restituées de la sorte prennent des valeurs discrètes et
dépendent de la structure même des molécules concernées. Ces quantités
correspondent donc à certaines plages de valeurs de la longueur d’onde du
rayonnement incident. Ainsi, un gaz présente en général des bandes
d’absorption en dehors desquelles il peut être considéré comme totalement
transparent au rayonnement. Au sein des gaz issus de la combustion, les
molécules asymétriques comme CO2, H2O, CH4, etc., ainsi que les suies,
présentent des bandes d’absorption non négligeables.
Modélisation du rayonnement : Pour la plupart des incendies, il est souvent
supposé que ce sont les suies qui contrôlent l’essentiel de l’absorption du
rayonnement dans les fumées. Il est alors possible de simplifier la résolution du
problème en s'affranchissant de la dépendance spectrale de l'équation de
transfert radiatif. On parle alors de modèle « à large bande ». Il existe
cependant des modèles plus fins, dits « à bandes étroites » tenant compte de
l'existence d'un certain nombre de bandes d'absorption correspondant à plusieurs
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plages de longueur d'onde. Il faut alors résoudre une équation de transfert
radiatif par bande.
L'équation de transfert radiatif exprime l'évolution de la luminance énergétique
le long d'une direction donnée. C'est une équation intégrale qui nécessite la mise
en œuvre de techniques numériques particulières, généralement coûteuses en
temps de calcul. C'est la raison pour laquelle la résolution de cette équation est
généralement faite de manière relativement approximative dans les codes CFD.
Apports et limites
Les modèles CFD donnent accès à une grande quantité d’informations
comparativement aux autres modèles. Les écoulements sont représentés jusqu’à
des échelles de l’ordre de la taille des mailles utilisées. De nombreuses
grandeurs peuvent être extraites des simulations, ce qui fournit une aide
précieuse pour la compréhension de phénomènes physiques complexes en
interaction les uns avec les autres. Ce type de modélisation n’a virtuellement
pas de limite, puisqu’il est toujours théoriquement possible de raffiner encore la
discrétisation et de prendre en compte de manière détaillée des phénomènes de
plus en plus fins. Cependant, la représentativité d’un modèle à champ, aussi
précis soit-il, se heurte aux incertitudes sur les conditions aux limites réelles :
pour rester cohérent, plus la modélisation est fine et plus les conditions aux
limites doivent être connues avec précision.
Pour le moment, les moyens informatiques n’autorisent qu’une prise en compte
relativement sommaire des conditions aux limites. Ce point n’est pas vraiment
pénalisant, étant donné que ces conditions sont généralement mal connues pour
la simulation d’une situation de feu réelle.
La simulation numérique des feux par les modèles CFD est généralement
délicate car dans ce domaine d’application, les couplages entre les phénomènes
physiques sont particulièrement forts. La représentativité des résultats doit donc
être considérée avec précaution, ce qui nécessite une solide expérience de la
part de l’utilisateur.
Dans le domaine de l’étude des incendies, la résolution de la discrétisation
numérique est arrivée aujourd’hui pratiquement au niveau de la résolution des
mesures expérimentales réellement mises en œuvre pour les situations de feu à
l’échelle un, c’est-à-dire de l’ordre de la dizaine de centimètres pour un
compartiment de volume inférieur à 1000 m3. Les comparaisons entre prédiction
et expérience sont donc relativement aisées. La contrepartie de la finesse de la
représentation du problème étudié est évidemment le temps de calcul important
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pour traiter l’information. Il est souvent nécessaire d’adapter le modèle aux
performances du moyen de calcul utilisé.
Pour fixer un ordre de grandeur, le nombre de mailles utilisées aujourd’hui est
de l’ordre de 106 avec un ordinateur de bureau équipé d’un processeur cadencé
à 3 GHz et disposant de 1 Go de mémoire vive. Avec ce type de discrétisation, il
faut compter environ une semaine de calcul pour simuler un feu d’une trentaine
de minutes.
Le tableau 1 suivant donne une liste non exhaustive d’outils existants mise à
jour en 2003 par Olenick et Carpenter.
On ajoutera à cette liste, le code ISIS développé par l’IRSN ainsi que le code
SATURNE développé par EDF.
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3.2 Les Modèles globaux
(ou : de zones, ou : de volumes finis) 1970
Le volume concerné par les effets du feu est découpé en « grosses » zones où
on admet que les caractéristiques sont uniformes (mais variables au cours du
temps). Les équations de bilan et d’échange sont « peu » nombreuses et
conduisent à des systèmes d’équations différentielles du temps.
Des dizaines de modèles de ce type sont plus ou moins opérationnels. Les
moyens de calcul et les algorithmes de résolution numérique nécessaires sont
plus accessibles.
L’idée de base d'un découpage en zones d'un espace de bâtiment concerné par
un feu vient de l’observation que les gaz chauds issus d’un foyer s’accumulent
sous le plafond d’un local en présentant une frontière basse à peu près
horizontale avec l’air frais situé au-dessous. Ceci est valable pour des locaux de
forme géométrique classique, des parallélépipèdes rectangles, et pour des
foyers placés en partie basse du local et assez puissants par rapport aux
dimensions du local (sinon, la fumée vite refroidie dans son ascension se répartit
en volutes ou lentilles), et en l’absence de "courants d’air" importants. La notion
de foyers assez puissants est empirique : pour une chambre, il s’agit de débits
calorifiques quelques dizaines de kW, et, pour un grand atrium, de MW.
Une "zone" est soit un volume, soit une surface, où on admet l'uniformité de
certaines grandeurs caractéristiques du modèle.
Pour une zone volumique, on suppose qu'en chaque point du volume sont
identiques à un instant donné : la température, la composition en espèces
gazeuses ou condensées, l'opacité. Les frontières du volume sont, soit imposées
matériellement (plafond et partie haute des murs d'un local sont ainsi des
frontières de la zone haute de gaz chaud), soit définies par une hypothèse (la
frontière basse du volume de la zone haute est définie par la cote verticale qui
est associée à un profil vertical de température qui y change brutalement de
valeur).
Les zones surfaciques sont liées aux surfaces des solides ou à des surfaces
virtuelles, frontières de zones de gaz. Par exemple, la température et
l'émissivité sont par hypothèse uniformes sur une zone de surface. Une zone de
surface peut ainsi être toute la surface frontière solide d'une zone de gaz (un
plafond, par exemple), ou bien une partie de celle-ci (un morceau de mur par
exemple), selon l’hypothèse effectuée sur le maillage et la finesse recherchée
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de ce maillage. L'interface entre zones volumiques basse et haute des modèles
de zones est une surface virtuelle traversée par endroits par les flux de masse et
d'enthalpie dus aux foyers en zone gazeuse basse.
Les bilans effectués dans, par exemple, les zones volumiques haute et basse
dans un local, sont traités en considérant ces zones comme des volumes de
contrôle, de la manière exposée qualitativement ci-dessous et détaillée aux
paragraphes suivants.
Les zones de gaz (zone basse zb, zone haute zh, zones de flammes et panaches,
zones de mondes extérieurs) et les zones de surfaces solides échangent matière,
espèces et énergie. Pour les zones de surfaces solides, seuls les solides
combustibles peuvent échanger de la masse sous la forme d'un flux massique de
gaz de pyrolyse sortant. Les zones de surfaces de parois inertes du local
n'échangent que de la chaleur (dans un sens ou dans l'autre, selon le moment
considéré : elles en reçoivent pendant la croissance du feu, et en perdent durant
son déclin).
Le remplissage de la zone haute zh se fait par l'apport de masse (sous forme
d'espèces chimiques) venant des flammes et panaches thermiques, et,
éventuellement, par injection de gaz de pyrolyse venant d'un solide combustible
en partie haute du local, et par apport d'air depuis l'extérieur si le champ de
pression et les ouvertures (position, dimensions) permettent cet apport. Le
vidage de zh se fait par un transport de gaz chaud au travers des ouvertures, si
le champ de pression et les ouvertures permettent ce transport.
La zone basse zb reçoit de l'air extérieur et perd matière et énergie à cause de
l'entraînement causé par flammes et panaches, et, éventuellement, et
également par transport vers l'extérieur du local.
Les flammes et panaches sont donc dans ce type de modèle des "canaux"
alimentant la zone haute en masse, espèces, énergie. Pour traiter les échanges
radiatifs liés à une flamme, celle-ci peut être vue comme une zone de surface à
température et caractéristiques optiques uniformes. Le calcul du débit d'air
entraîné par la flamme fait par contre intervenir une variation de ses
caractéristiques avec la hauteur.
Hypothèses de stationnarité
Certaines des lois empiriques utilisées sont en fait tirées d’expériences en
conditions stationnaires pour le phénomène concerné. Par exemple, les lois
d'entraînement d’air dans flammes et panaches thermiques sont des lois quasi-
stationnaires par rapport aux phénomènes d’entraînement d’air, qu'on admet à
20/45
chaque instant pour le feu dans un local même quand la puissance d’un foyer
varie.
Hypothèses sur le transport de masse aux ouvertures
Le transport de matière par des ouvertures se fait entre zones, conformément à
la démarche de découpage de ces modèles : le volume d'un local (local feu, ou
local en communication avec lui) est découpé en zones, et le monde extérieur
est une zone volumique caractérisée par sa pression (où le vent peut apporter
une composante dynamique), sa température, et sa composition.
o En ventilation naturelle :
les débits gazeux et la vitesse des écoulements sont calculés en
supposant que la pression dans un local ne varie qu'avec la hauteur
depuis le sol ;
Les débits aux ouvertures s’expriment à partir de la loi de Bernoulli,
avec un coefficient global de contraction.
o En ventilation forcée :
soit on se donne le débit volumique amené ou extrait,
soit, ce qui est beaucoup plus lourd, on modélise le circuit aéraulique
et le ventilateur, ce qui revient à raccorder au modèle de feu un
modèle de ventilation.
Rappelons qu'aux flux massiques par des ouvertures sont associés des flux
enthalpiques.
Réactions chimiques
Dans les modèles de zones on suppose que les réactions chimiques sont
instantanées :
o la cinétique chimique n'est pas explicitée ; on exploite des bilans chimiques
globaux en supposant généralement que les réactions sont complètes ;
o la cinétique physique de "mélangeage" des réactifs est en général supposée,
elle aussi, infiniment rapide.
Des corrections plus ou moins empiriques peuvent cependant être introduites sur
ces deux approximations.
Les champs de pression
Dans chaque local, on retient la loi de la statique des fluides pour représenter
un champ vertical de pression dans les zones zb et zh du local.
21/45
Conservation de la quantité de mouvement
Les équations de base de conservation de la quantité de mouvement (équations
de Navier-Stokes) ne sont pas introduites explicitement dans les modèles de
zones. La loi de Bernoulli, une forme très simplifiée des équations de Navier-
Stokes, est utilisée pour le calcul des débits aux ouvertures. Pour le calcul des
débits d'air entraînés dans les flammes et panaches thermiques, des expressions
semi-empiriques sont utilisées.
La turbulence
Les modèles de zones n'incluent pas de représentation de la turbulence. Pour
exprimer les coefficients d'échange thermique convectif entre gaz et solides, ou
bien les coefficients d'orifice relatifs aux ouvertures (appliqués sur les débits
fournis à partir de la loi de Bernoulli), on exploite des relations de corrélation
adaptées au régime d'écoulement : laminaire ou turbulent. L'effet de la
turbulence dans l'entraînement d'air dans les panaches est représenté par des
coefficients empiriques.
Équation d'état
On suppose que les milieux gazeux obéissent à la loi des gaz parfaits, même s’ils
contiennent des particules solides ou liquides supposées en équilibre thermique.
La constante molaire R (J.K-1.mole-1), ou massique r (J.K-1.kg-1), peut soit
recevoir une valeur fixe (c’est le cas courant), soit être calculée à partir de la
composition chimique du gaz ... à déterminer.
Le tableau 2 suivant donne une liste non exhaustive d’outils existants mise à
jour en 2003 par Olenick et Carpenter.
On ajoutera à cette liste le modèle FISBA (deux zones, une seule pièce)
développé au CSTB.
25/45
3.3 Les modèles « simples »
Ce sont :
- soit des formules physiques permettant le calcul approché de l’évolution
d’une grandeur (la hauteur de flamme, le débit d’air entraîné par un
foyer, … ), donc des modèles ponctuels ;
- soit des résultats de traitement statistique (corrélations, régression, …) de
mesures effectuées en situations réalistes, qui sont utilisées de façon
prédictive à l’intérieur de certaines limites
Ils visent à des précisions approximatives. Ces modèles conduisent à des
calculs rapides.
Le tableau suivant fournit une liste non exhaustive de modèles simples utilisés
dans la pratique. Il en existe d’autres. Le lecteur pourra consulter utilement les
ouvrages référencés au chapitre 7.
Température moyenne des gaz chauds dans un local
Formule de Babrauskas (1981)
Formule de Mc Caffrey et al (ventilation naturelle).
Formule de Foote, Pagni et Alvares (ventilation mécanique)
Hauteur de flamme
Formules de Zukoski (1995) - (Sources ponctuelles en symétrie cylindrique)
Formules de McCaffrey (1979)
Formules de Heskestad (1984)
Température de flamme
Formules de Zukoski (1995) - (Sources ponctuelles en symétrie cylindrique)
Formules de McCaffrey (1979)
Formules de Heskestad (1984)
Débit d’air entraîné dans la flamme
Loi de "gros foyer", Thomas et al (1963)
Loi de "petit foyer", Thomas et al (1963)
Sollicitation thermique d’éléments de structure par la flamme et le panache
Formule de Hasemi
Les outils proposés dans l’eurocode 1 pour calculer l’action thermique sur des
éléments de structure en vue d’évaluer quantitativement leur stabilité relève de
26/45
cette catégorie d’outils. On relève la formule d’Heskestad et d’Hasemi pour des
foyers localisés, des courbes température/temps (courbe ISO-R834, HCM, …), et
une courbe paramétrique pour des feux puissants généralisés à l’intérieur d’un
local.
Parmi les outils cités, nous avons souhaité présenter les formules d’Heskestad et
d’Hasemi.
Formules de Heskestad (1984)
Hauteur de flamme :
Les formules sont dans la pratique destinées à :
Estimer si la flamme d’un foyer peut »toucher » un élément haut dans un
bâtiment (et mettre en danger sa stabilité) ;
Dans un modèle globale de feu de local, définir le contour d’une flamme
supposée conique ou cylindrique et ainsi caractériser une surface source
de rayonnement, en évaluer l’aire rayonnante, et également calculer le
volume occupé par la flamme dans le local.
La hauteur de la flamme stable (à la limite de la région intermittente), comptée
depuis la source réelle, s’exprime approximativement selon Heskestad par :
[A2] 4,0
sF, 23,0*02,1 QDH
La hauteur de flamme intermittente à 50 % (au-dessus de laquelle commence
l’écoulement non réactif du panache) est comptée depuis la source réelle et
s'exprime approximativement selon :
[A3] 4,0
convviF, 166,0 QzH
où convQ est la puissance convectée, inférieure au débit calorifique puisque une
partie de la puissance liée au débit calorifique est rayonnée.
Température de la flamme et de son panache thermique :
Les formules fournissant la température de flamme sont utilisées pour
calculer des flux thermiques et des éclairements énergétiques sur des cibles.
Elle sert par exemple à évaluer la sollicitation thermique reçue par une cible
placée dans l’écoulement et à calculer la puissance émise par rayonnement
thermique, susceptible d’agresser une cible placée hors de la flamme ou du
panache.
27/45
Heskestad propose la formule suivante pour la température axiale du panache,
c’est-à-dire au-dessus de la zone intermittente de flamme :
[A4]
3
5
v
3
2
conv
3
1
2p
0
0axe 1.9
zz
Qcg
T
TT
où :
- axeT est la température sur l’axe (K),
- 0T est la température initiale de l'air (K),
- convQ est le débit calorifique convecté, en kW,
- g est l’accélération de la pesanteur (9,81 m/s2),
- pc est la chaleur massique de l’air à pression constante (pression normale)
pour la température 0T , en kJ/kg/K,
- est la masse volumique de l’air pour la température 0T ,
- vzz est la hauteur depuis l’origine virtuelle (m).
vz sert à repérer le sommet du cône limitant le panache.
La position est calculée depuis la surface-source réelle, en fonction du diamètre
de la source de combustible gazeux et de la puissance du foyer. Si l’origine
virtuelle est au-dessus de la source réelle, vz est positif. Dans l’exemple donné
sur la figure A-1, vz est négatif.
[A1] 5
2
.
v *083,0*02,1 QDz où le débit calorifique .
Q est en kW, et les
longueurs sont en m.
Application de la formule :
- On calcule la position du sommet virtuel du cône depuis la source réelle de
combustible, vz , selon la formule [A1].
- On pose que le demi-angle au sommet est de 7,5 °,
- On n’utilise pas les formules [A2] et [A3],
- On utilise la formule [A4] pour calculer le champ vertical de la température
axiale, en entrant la valeur du débit calorifique total en kW (et non pas la
seule partie convectée), et en supposant que la température du début de
l’écoulement est de 1400 K (ou, si la température normale 0T est nettement
différente de 300 K : 0T + 1100 K).
Les formules [A1] et [A4] peuvent s’appliquer à l’aide d’une feuille de calcul de
tableur.
28/45
Limites de la formule :
La formule [A4] ci-dessus, valable en principe pour le seul panache, mais
appliquée dès la base de la flamme, donne des valeurs majorantes de la
température axiale, par rapport à un modèle plus compliqué où on calcule
différemment la température axiale selon les différentes régions de
l’écoulement.
La fraction rayonnée étant dépendante de la nature du foyer, il est courant de
la majorer en prenant 30 ou 40 % du débit calorifique, faute de connaissances
plus précises. Dans la mesure où ne connaît pas cette fraction pour les foyers
considérés à moins de les étudier un par un, une hypothèse simple et majorante
est de poser que le débit convecté est égal au débit calorifique si on se sert de
la température axiale pour évaluer la puissance rayonnée.
Les formules de Heskestad sont applicables à un domaine étendu de débit
calorifique et de diamètre de source, pour : 7 < D
Q5
2
< 700 kW2/5/m.
La validation expérimentale de ces formules ou de celles, voisines, de Zukoski, a
porté sur plusieurs tailles et puissances de foyer (Cf. “ Combustion Fundamentals
of fire ”, G. Cox, chapitre 3 “ Properties of fire plumes ” par E. Zukoski).
Si vz donné par la formule [A1] est positif, la formule [A4] où intervient le terme
3
5
vzz , n’est pas applicable pour les valeurs de z < vz . Les cas où l’origine
virtuelle est au-dessus de la source réelle ne sont pas compatibles avec cette
approche calcul. Cependant, pour permettre l’utilisation de la formule [A4] nous
avons admis que l’origine virtuelle du panache se trouve au niveau de la source
réelle.
Cas d’une flamme proche d’un mur :
Si la base du foyer est polygonale et :
- Si le foyer est placé près d'un mur, l'écoulement gazeux est perturbé : la
flamme s'allonge et l'écoulement se rapproche du mur. On pose de façon
majorante que la prise en compte de ces perturbations a lieu à une distance
du mur égale au diamètre du foyer.
La méthode retenue pour calculer dans ce cas le profil vertical de
température consiste à doubler la surface source en imaginant une image
miroir par rapport au mur, et à entrer dans les formules un débit calorifique
double.
- Si le foyer est placé dans un coin, alors la température sur l’axe est calculée
avec un débit calorifique 4 fois supérieur à sa valeur initiale.
29/45
La formule [A4] s’écrit alors :
3
5
v
3
2
conv
3
1
2
p
0
0axe 1.9
zz
kQcg
T
TT ; avec k = 2 ou 4 , selon la position du
foyer
Remarque : Si la base du foyer est réellement circulaire, le mur a peu
d’influence sur l’écoulement. Dans ce cas le profil vertical de température est
calculé à partir de la valeur nominale du débit calorifique d’un foyer placé loin
des murs.
Sollicitation thermique des éléments de structure par la flamme et
le panache des foyers : formule de Hasemi
La méthode retenue repose sur l'utilisation d'une formule donnant la répartition
spatiale de la densité de flux thermique entrant par unité de surface d'un
élément issue des travaux de Hasemi.
La densité de flux thermique entrant dans les éléments de structure proches des
foyers a été exprimée par une formule issue de corrélations tirées de résultats
de mesure sur un ensemble d'essais.
Les expériences à la base de l’expression de la densité de flux thermique entrant
dans les éléments de structure ont porté sur des feux de propane (puissance
calorifique de 100 à 900 kW, constante). Un brûleur circulaire de diamètre 50
cm, ou un brûleur carré de 1 m de côté alimentait les flammes. La distance
entre le bruleur et la poutre variait de 0,60 m à 1,20 m.
Les corrélations tirées de ces expériences mènent à la formule suivante,
exprimant le champ de la densité de flux thermique reçu par un fluxmètre placé
sur la surface horizontale basse d'une poutre sous plafond. Le choix des
dimensions de la section de la poutre utilisée dans les essais a été effectué de
sorte que les corrélations obtenues s'appliquent aussi à des foyers de puissance
plus réaliste et à des poutres courantes.
H est la différence entre la hauteur de la source, SH , et celle du point
considéré sur la surface basse de la poutre, AH , en mètres : SA HHH .
r est la distance radiale entre l'axe de la flamme et le point considéré (m).
D est le diamètre équivalent du foyer (m).
Q est le débit calorifique du foyer (W).
H
*
Q est le débit calorifique adimensionné selon la hauteur H :
30/45
5,26
*
1011,1 H
QQH
HL est la longueur de la flamme s'écoulant sous la poutre (m), calculée selon :
30,0*
90,2 HQH
HLH
D
*
Q est le débit calorifique adimensionné selon le diamètre D :
5,26
*
10*11,1 D
QQD
'z est la distance entre la source réelle et une origine virtuelle (m), calculée
selon :
si DQ*
< 1,
3
2*
5
2*
4,2' DD QQDz
si DQ*
> 1,
5
2*
14,2' DQDz
y est une grandeur sans dimension calculée selon :
'
'
zHL
zHry
H "
1q est la densité superficielle de flux thermique entrant dans un fluxmètre
(kW/m²) placé au niveau de la surface horizontale basse d'une poutre sous
plafond.
ST est la température en un point de la surface exposée de l'élément (K).
h est le coefficient d'échange convectif entre l'élément et le gaz au contact, en
W/(m².K),
est un coefficient représentant l'efficacité de l'échange radiatif entre la
surface exposée et le gaz ; il correspond à une émissivité.
est la constante de Boltzmann (= 5,67 10-8 W/(m².K4) ). "
2q est la densité superficielle de flux thermique entrant dans la surface exposée
d'un élément de structure (kW/m²),
La densité de flux entrant dans un fluxmètre placé à la hauteur de la surface
basse d'une poutre est exprimée le façon suivante :
si y < 0,30 100"
1q
31/45
si 0,30 < y < 1 yq 12130,136"
1
si y > 1 7,3"
1 15yq
Application
Une application de cette méthode été effectuée pour modéliser l’action
thermique de la structure d’un parc de stationnement soumise aux effets d’un
feu de véhicules en stationnement (travaux du CTICM, 2000). Cette approche à
par ailleurs reçu un avis favorable du comité d'étude et de classification des
matériaux et éléments de construction par rapport au danger d'incendie (CECMI).
Validation
Il ne s’agit pas d’une validation scientifique à proprement parler mais de la
validation d’une démarche dans l’environnement où elle a été entreprise.
Compte tenu de la complexité des phénomènes présents de combustion,
d'échanges de matière et de chaleur, la formule ne peut pas permettre
d'atteindre une précision de l'ordre du % sur la température des éléments de
structure.
3.4 Les outils de calcul utilisés aujourd’hui
Les chapitres précédents ont dressé des listes d’outils de calcul susceptibles
d’être utilisés pour évaluer les actions thermiques, le mouvement et le contrôle
de la fumée dans un bâtiment. Ils sont nombreux. Ce chapitre donne un aperçu
des outils utilisés aujourd’hui au travers des travaux suivants :
- Au plan international, tous les deux ans depuis 1996, la conférence
internationale sur les réglementations performancielles et les méthodes
d'ingénierie incendie organisée par la SFPE (Society of Fire Protection
Engineers) est l’occasion pour les pays disposant d’une réglementation
performancielle de la mettre en application sur des « cas d’étude ». Nous
avons recherché dans les actes de la conférence les outils de calculs utilisés
par les différents pays participants (Australie, Canada, Etats-Unis, Japon,
Nouvelle Zélande, Royaume Uni et Suède) lors des 4 dernières éditions.
- En France, depuis 2004, dans le cadre de l’application du règlement de
sécurité contre l’incendie relatif aux établissements recevant du public des
études d’ingénierie de résistance au feu et de désenfumage sont réalisées.
Leur réalisation fait appel à la simulation. Une liste des outils de simulation
est donnée.
32/45
La conférence internationale sur l’application de réglementations
performancielles
Une étude de cas est proposée aux différents participants. Celle-ci fixe les
fonctions principales du bâtiment et définit les principaux objectifs de sécurité
en cas d’incendie. Pour satisfaire les exigences fonctionnelles et les objectifs de
sécurité, Il appartient à chaque participant dans le cadre de leur réglementation
performancielle, de définir les méthodes et de choisir les outils de calcul les
mieux adaptés.
Sur les quatre derniers cas d'étude portant sur des bâtiments différents :
- un immeuble de bureau grande hauteur en 1998,
- un hôtel de grande hauteur en 2002,
- un centre de transport en 2004 et
- un centre d'accueil de grande hauteur pour personnes âgées en 2006)
sont recensés les différents outils de calcul utilisés portant sur le développement
du feu, le mouvement de la fumée et le contrôle de l’enfumage.
Remarque : Dans ces études, l’évacuation des personnes, la stabilité des structures, la détection
d’un départ de feu, sont des aspects également examinés à l’aide d’outils de calcul. Pour plus de
détails sur les travaux menés, le lecteur pourra consulter les actes des 4 dernières
« International Conference on Performance-Based Codes and Fire Safety Design Methods »
Type de modèle Nom du logiciel ou grandeur physique recherchée
« simple » - Débit d’entraînement d’air dans la flamme et son
panache,
- Dimensions de flammes extérieures,
- Hauteur libre de fumée,
- Température de couche chaude
Une ou plusieurs
zones de gaz
CFAST, BRANZFIRE
champ FDS
33/45
Les études d’ingénierie de résistance au feu et de désenfumage
menées en France en application du règlement.
En ingénierie de la résistance au feu ce sont les conditions de stabilité d’une
structure en cas de feu qui sont étudiées et en ingénierie du désenfumage c’est
la performance d’un dispositif de désenfumage qui est recherchée.
En résistance au feu on cherche à évaluer les actions thermiques du feu sur des
éléments de structure alors qu’en désenfumage les cibles sont les personnes (le
public et les secours).
Le tableau suivant dresse la liste des modèles retenus et des outils utilisés pour
réaliser ces études.
Type de modèle Nom du logiciel ou grandeur physique recherchée
« simple » - Eclairement d’une flamme et de son panache sur
une cible,
- Hauteur et température de flamme,
- Hauteur libre de fumée
Une ou plusieurs
zones de gaz
OZONE, FISBA, NAT
champ FDS
34/45
4. L'état actuel des logiciels : les points à améliorer.
Cette brève synthèse s'appuie sur une analyse bâtie sur l’expérience des
différents partenaires de cette action, ainsi que sur des travaux internationaux
poursuivis par exemple au sein de l'International Association for Fire Safety
Science (IAFSS) ou au centre de recherches américain du National Institute for
Standards and Technology, le NIST, qui soutient des efforts importants dans le
domaine. Ce texte a également profité d'échanges nombreux établis avec des
collègues de divers pays, dont ceux de l'Union Européenne, et, faut-il le dire,
avec nos collègues français de divers laboratoires ou centres de recherches.
L’état des modèles (les équations) est examiné. Les points liés à l'utilisation des
outils de calcul sont ensuite commentés.
4.1 Les modèles
Les modèles de zones sont très nombreux, construits à partir des premiers
travaux suédois, américains, britaniques, japonais ... et sont plus ou moins
validés.
Les modèles de champ sont moins nombreux, de plus en plus développés
(principalement en Royaume Uni et aux Etats-Unis) et font l'objet de validations
en nombre croissant.
Le traitement des phénomènes physiques rapides
Les modèles les plus anciens, limités par des ordinateurs peu puissants,
pouvaient présenter le défaut de mal traiter des aspects instationnaires ou
rapides. Si le modèle ne permet pas de représenter un bref pic de pression ou de
température, ou le mouvement rapide d'une « vague » de fumée, la simulation
laissera de côté un événement qui peut avoir de graves conséquences sur les
personnes, l'enveloppe ou les structures. Une approche trop « quasi-
stationnaire » de la résolution des équations peut conduire à cette insuffisante,
Il est ainsi souhaitable d'utiliser les équations sous leur forme générale, avec
toutes les dérivées, même si la résolution est plus lourde.
Le traitement des phénomènes physicochimiques rapides
La détonation nest pas, à notre connaissance, modélisée dans les modèles de feu
courants. On sait cependant qu'un feu peut causer des détonations de gaz ou de
poussières. Dans les milieux industriels, il est prudent d'évaluer les conséquences
de cette limitation lors de la pratique des simulations,
35/45
La déflagration liée par exemple à un « backdraught », ou « backdraft », est
abordée dans quelques modèles.
Les réactions chimiques
La cinétique des réactions chimiques en phase gazeuse est en général supposée
infiniment rapide, c'est-à-dire qu'on ne modélise pas la vitesse à laquelle ces
réactions progressent. La mise en mélange des réactifs gazeux (produits de la
pyrolyse, oxygène), liée à la turbulence, est en fait plus lente que les réactions
chimiques qu'on s'attend à rencontrer. De plus, on ignore la composition
détaillée des mélanges gazeux produits dans des feux courants où des matériaux
divers se dégradent simultanément. On se donne en général des chaleurs
globales de combustion. Cette question est liée à celle de la toxicité des gaz : si
on sait que CO2, H2O, et CO sont abondants dans la combustion des matériaux à
base de carbone, on est incapable de prédire l'évolution spatiale et temporelle
d'autres gaz présents en très faible concentration, et éventuellement toxiques.
La turbulence
Les écoulements non laminaires, partiellement ou fortement turbulents, sont
très courants dans les feux. La qualité du traitement de la turbulence joue sur la
représentation des écoulements et la mise en mélange des gaz réactifs. La
modélisation de la turbulence reçoit, selon le modèle, un degré de complexité
très variable. Les modèle de champs récents utilisent par exemple des
approches de « large eddies » assez lourdes numériquement, et peut-être encore
insuffisante pour certains aspects instationnaires.
La représentation de l’activité des foyers
Les foyers sont le plus souvent assimilés à une source surfacique de gaz
combustible, souvent horizontale, parfois verticale, à laquelle on attache un
débit massique de combustible et une chaleur de combustion, issus d'essais en
grandeurs ou d'expériences de laboratoire. L'aspect tri-dimensionnel est souvent
ignoré, de même que la présence de matériaux différents en surface et en
profondeur.
De bons résultats de simulations ont néanmoins été obtenus pour des feux de
foyers uniques ou pour des situations de feu généralisé à l'ensemble du contenu.
Les cas difficiles correspondent au feu de plusieurs foyers fortement 3-D placés à
faible distance les uns des autres.
36/45
L'allumage
L'allumage d'un solide ou d'un liquide fait intervenir plusieurs phénomènes
couplés. La modélisation la plus simple consiste à exploiter une valeur empirique
de flux thermique reçu critique, ou de température de surface critique. Des
modèles beaucoup plus complexes ont été développés mais encore peu
appliqués,
Les échanges radiatifs
La théorie mathématique et les méthodes d'intégration sont disponibles, mais
des calculs précis nécessitent de volumineux calculs. De plus, on manque en
général de données sur les propriétés optiques – surtout spectriques – des
surfaces de matériaux. Les caractéristiques optiques des gaz et de la fumée sont
également approximativement connues : la composition en gaz est
approximative et, surtout, on a du mal à représenter les particules solides
(suies, fragments de pyrolyse) ou liquides (pyrolysats liquides, gouttes d'eau)
présentes dans la fumée. Un milieu gazeux riches en suie peur être assimilé à un
corps noir, ce qui apporte un allégement considérable du traitement des
échanges optiques.
4.2 Les logiciels
La mise en données
La fourniture des nombreuses données, nécessaires pour simuler un feu dans un
ensemble de plusieurs pièces, a fait l'objet d'efforts de mise en forme assez
conviviale et/ou de la réalisation de modules capables de lire des fichiers
détaillés pour architectes.
La présentation des résultats
Plusieurs post-processeurs évolués permettent aujourd'hui de représenter
clairement vitesse et température en divers endroits et en fonction du temps. La
beauté des images offre cependant un danger : on peut avoir tendance à les
croire sans réserve !
Le temps calcul
C'est encore un point noir ! Les programmes de simulation 3-D les plus évolués
demandent des jours de temps-calcul sur un bon microordinateur. Des calculs
37/45
parallélisés permettent de gagner du temps, au détriment d'une programmation
plus complète et du besoin d'une configuration informatique plus coûteuse.
38/45
5. Choisir un modèle et utiliser un logiciel
Pour aider au choix du modèle et du programme informatique associé, un
ensemble minimum de critères est unanimement partagé par la communauté
scientifique de l’ingénierie du feu. On peut citer :
- Les hypothèses de base du modèle sont présentées.
- Le programme est utilisable donc documenté. Des exemples d’utilisation sont
éventuellement fournis.
- Le programme a été utilisé sur des applications concrètes.
- Le programme a fait l’objet de confrontations à l’expérience où à la
comparaison avec d’autres modèles plus fins. Pour cela il faut :
o Avoir accès aux résultats expérimentaux ;
o Avoir accès aux données et pouvoir en évaluer la qualité ;
o Disposer d’informations sur les conditions de l’expérience et sur la
métrologie mise en œuvre.
- Le programme offre des possibilités d’adaptation (évolutions du code par les
développeurs, code source)
- Le programme offre des possibilités de couplage avec d’autres outils (calcul
de mécanique, de mouvement des personnes, …)
Il revient ensuite à l’utilisateur (au praticien de l’ISI) de choisir l’outil adapté au
problème posé. Voici quelques questions qui peuvent aider à ce choix.
- Quelles sont les fonctions importantes pour la sécurité qui doivent être
maintenues ?
o Le compartimentage d’un local ou d’un ensemble de locaux,
o la stabilité d’une construction,
o L’efficacité d’un dispositif de désenfumage naturel ou mécanique,
o le fonctionnement d’un équipement sensible à la sécurité [câbles
électriques, réseau d’alimentation en eau d’extinction, ...],
o …
- A quel stade de développement du feu s’intéresse-t-on ?
o Dès l’allumage,
39/45
o pendant la phase de croissance du feu,
o au stade d’un feu puissant [pré-flashover],
o au stade d’un feu généralisé [post-flashover],
o …
- Quelles sont les cibles ?
o personnes,
o secours,
o structure,
o équipement,
o environnement
- Où se situe la cible relativement à la source d’agression ?
o dans le local source du feu,
o hors du local source du feu,
o dans les flammes du foyer,
o dans le panache thermique du foyer,
o dans un écoulement sous plafond du panache thermique,
o dans un une couche de gaz chauds accumulée sous le plafond, à proximité
d’une paroi,
o …
- Quels sont les phénomènes physiques qu’il conviendra de représenter ?
o Allumage du premier foyer et développement de son activité,
o extension du feu aux objets combustibles voisins, tous les objets présents
participent à la combustion,
o sollicitation thermique d’un dispositif de détection, d’une tête
d’arrosage, d’un exutoire de fumée,
o sollicitation d’un élément de structure,
o Interaction eau/foyer,
o Sollicitation thermique des ouvertures vers l’extérieur (bris de vitrage), à
l’intérieur du bâtiment (portes, …),
o Pression à l’intérieur du local
o …
40/45
5.1 Retour d’expérience :
Les enseignements des travaux du CIB W14
Le groupe de travail W14 du Conseil International du Bâtiment (CIB) a animé de
1994 à 1998 une action internationale d’évaluation des modèles et logiciels de
feu en bâtiment.
La démarche suivie a consisté à faire établir une liste de scénarios de feu par un
spécialiste extérieur au groupe constitué par les personnes réalisant les
simulations. Les données d’entrées nécessaires aux simulations ont été fournies
à tous les développeurs ou utilisateurs de modèles de feu en bâtiment membre
du CIB et, de façon générale, à tous ceux ayant manifesté leur intention de
participer à cette action.
Des règles de « calcul en aveugle » ont alors été posées, pour réaliser dans un
premier temps des simulations numériques indépendamment et sans connaître a
priori de résultats issus de calcul ou de mesure. Ainsi, relativement aux
scénarios, aucun résultat de mesure ou de calcul antérieur n’a été communiqué,
et aucune référence à de tels résultats n’a été donnée. Dans un deuxième
temps, les résultats de mesures ont été communiqués et de nouvelles
simulations ont été effectuées.
Un format informatique commun a été fixé pour le stockage des données
d’entrée comme pour celui des résultats de calcul à effectuer, de façon à
faciliter les comparaisons entre les différentes simulations.
Différents types de scénarios de feu dans un local ont été utilisés. Les variations
entre ces différents scénarios ont principalement porté sur les dimensions du
local et la nature et la disposition des foyers (feux de bac de combustible liquide
ou feux de meubles).
Pour traiter les scénarios, chaque simulateur a été libre du choix du modèle et
du choix des options du modèle qu’il retient.
Au total, trois modèles de champ et neuf modèles de zones ont été utilisés par
plus de 21 personnes différentes. Pour la France, des simulations ont effectuées
par le CEA/IPSN (avec le logiciel FLAMME-S de l’IPSN), le CTICM (avec CFAST et
FIRST, logiciels du NIST) et le CSTB (avec FISBA).
Cette campagne de confrontation, exemplaire par la démarche adoptée, le
nombre de participants et le nombre de scénarios considérés, possède toutefois
certaines limites :
- La première est que certains scénarios se sont révélés être à la limite de
validité des modèles de zones car il faisait intervenir des feux intenses et
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l’hypothèse de stratification des fumées utilisée par ce type de modèles à
l’intérieur du local en feu n’est pas forcément justifiée dans ce cas.
- La seconde vient du fait que les participants avaient des ressources limitées à
consacrer aux études.
Les résultats de cette confrontation ne doivent donc pas être considérés comme
une validation minutieuse ou comme permettant de juger la qualité des modèles
et des utilisateurs les uns par rapports aux autres. Le but essentiel de cette
action était de fournir un aperçu critique des possibilités et des limites des
différents modèles et logiciels.
On trouvera les résultats de cette action dans le rapport : « .Hostikka S., Keski-
Rahkonen O., - Results of CIB W14 Round Robin for Code assessment, Scenario B
– VTT Building and Transport, Technical Research Centre of Finland – pp.79 –
version provisoire à paraître – 1998 »
Tous les modèles ont donnés des résultats présentant des écarts significatifs
avec les résultats de mesures lors des « calculs en aveugle ». Lors des calculs
effectués dans un deuxième temps en connaissant les résultats des mesures, il a
été montré que ces écarts pouvaient être réduits en choisissant des sous-
modèles alternatifs ou en modifiant certains paramètres optionnels. D’après
l’estimation quantitative des erreurs effectuée par les rapporteurs, les
divergences entre les résultats des calculs et les données expérimentales varient
de plus ou moins 10 % jusqu’à un facteur 2. Ces divergences sont du même ordre
de grandeur que les incertitudes liées aux mesures expérimentales et aux
données d’entrées (en particulier concernant les débits calorifiques mis en jeu
dans les scénarios d’incendie considérés).
La conclusion donnée par les rapporteurs est que l’incertitude accordée aux
résultats des calculs est de l’ordre de 25 % sur la prédiction de la température et
de la hauteur de la couche de fumées. Mais il est important de noter que cette
incertitude n’est valable que lorsque les modèles sont utilisés correctement.
En effet, les rapporteurs indiquent que l’influence de l’utilisateur sur la qualité
des résultats a été largement démontrée par cette campagne de confrontations
où différents utilisateurs ont utilisé le même code.
Il est donc clairement apparu que l’utilisateur du logiciel revêtait un caractère
déterminant dans la chaîne d’utilisation de la modélisation numérique du feu
dans une approche d’ingénierie de la sécurité incendie. Il faut de plus souligner,
facteur favorable, que le groupe de participants à la confrontation était
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constitué par des développeurs de logiciels et des personnes ayant des
connaissances et une pratique approfondies des phénomènes physiques du feu.
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6. Conclusion
La simulation numérique des phénomènes physiques du feu et de ses effets sur
les personnes, les structures, … occupe une place centrale en ingénierie de
sécurité incendie. Ces outils constituent un langage performanciel permettant
une meilleure utilisation des sciences et techniques disponibles au service d’une
meilleure mise en sécurité des citoyens. Cette synthèse a souligné la richesse
des modèles et logiciels disponibles et utilisables par le praticien de l’ISI.
Elle a également mis clairement en évidence que les différents types d’outils,
modèles simples, globaux et locaux sont utilisables. C’est l’examen de la
situation considérée à l’échelle fonctionnelle, temporelle et phénoménologique
qui conduira à retenir tel ou tel modèle, tel ou tel logiciel.
Parmi les types d’outils, les modèles de champ occupent une place particulière
dans la mesure où ils utilisent les équations sous leur forme générale. Ils sont
donc potentiellement utilisables pour toutes les situations : de la sollicitation au
détecteur, au feu généralisé en passant par le mouvement des fumées dans un
local comme dans un bâtiment à plusieurs niveaux. Ce sont les outils de demain.
Le nombre de données nécessaires à l’utilisation des logiciels augmente avec la
précision attendue du résultat. De quelques une pour un modèle simple de feu
localisé, le modèle de champ en réclame plusieurs dizaines. L’accès à ces
données, la qualité de celles-ci sont des points qu’il convient de considérer dans
le choix du modèle.
Le rôle essentiel de l’utilisateur a été souligné. Ce dernier doit disposer des
connaissances suffisantes pour identifier les phénomènes physiques dominants,
choisir les modèles appropriés et utiliser les logiciels adaptés. Ainsi, l’utilisation
des outils de calcul non plus dans le contexte de la recherche et de l’acquisition
de connaissance mais dans un cadre d’activités commerciales pose la question
de la formation des utilisateurs. Ce dernier aspect constitue un enjeu majeur du
développement de l’ISI en France.
C’est pour toutes ces raisons que nous n’avons pas souhaité, dans cette
synthèse, recommander l’utilisation d’outils particuliers, même si certains de
ceux figurant dans les listes proposées sont déjà largement utilisés.
Dans la mesure où c’est la fumée qui est le facteur le plus dangereux pour les
personnes, il est nécessaire de bien en simuler le mouvement. Dans cet objectif,
il faudrait mieux calculer les propriétés optiques de la fumée. Par ailleurs, il est
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important de mieux connaître l’activité de foyers réels, la cinétique de
développement du feu depuis l’allumage du premier foyer pour mieux évaluer
les flux de danger sur les personnes pendant les premières minutes du feu. Les
confrontations à venir devraient se dérouler à partir de campagnes précisément
montées pour évaluer la qualité des modèles sur les points qui restent les plus
fragiles.
Enfin, une pratique de l’ingénierie ouverte à un plus grand nombre d’acteurs
pose la question de la « qualification » des outils. Des méthodes existent pour
qualifier les logiciels. Leurs mises en oeuvre réclament des moyens importants.
Le choix de l’outil de calcul adapté au problème de sécurité posé peut aussi être
laissé au praticien de l’ISI.
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Le programme de travail du PNISI portait sur l’utilisation de modèles
déterministes. Dans une approche probabiliste de la sécurité incendie, des
modèles simples, d’une précision limitée peuvent permettre d’identifier parmi
de très nombreux scénarios ceux, « critiques », pour lesquels l’utilisation de
modèles globaux et locaux s’avérerait plus pertinente pour appréhender les flux
de danger sur les personnes, les équipements, la structure et l’environnement.
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7. Compléments d’information
Le site www.firemodelsurvey.com (Combustion Science and Engineering, Inc.)
permet de recueillir des informations sur des logiciels liés à la sécurité incendie,
fournies par leurs auteurs. On trouve aussi sur ce site des fiches relatives à des
produits plus anciens (à partir de 1992).
Le groupe de travail W14 du CIB (Conseil International du Bâtiment) qui définit
des programmes d’études et organise des échanges d’informations fournit des
résultats de confrontations essais/calcul.
L’IAFSS, « International Association for Fire Safety Science », fondée en 1985,
qui a organisée son huitième symposium en Chine en 2005, permet de suivre
l’état des connaissances scientifiques dans le domaine
Le groupe de travail WG1 de l’ISO/TC92/SC4 (International Organization for
Standardization) vise, entre autre, à une utilisation pratique des outils.
Des compléments théoriques sont apportés par :
- L’ouvrage de James G. Quintière « Fundamentals of fire phenomena » édité
par Wiley, 2006
- Le Handbook américain de « Fire Safety Engineering » édité par la SFPE et la
NFPA.
- Le tome de « physique du feu de bâtiment pour l'ingénieur» édité par le
CSTB, 2001
- L’ouvrage collectif, G. Cox et al., « Combustion fundamentals of Fire », édité
par academic press, 1995
- La revue « Fire Safety Journal »