n francophone · 2018. 4. 2. · question de pouchkine, gogol, leskov, tolstoï, tchekhov... 17...

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Valéry Giscard d’Estaing pour un dialogue constructif et ouvert avec la Russie Suivez l’actualité de La Russie francophone sur www.russiefrancophone.com Actualités • Culture • Économie • Histoire • Cinéma page 8-9 © Photo Union Européenne pages 10-11 Nouvelle rubrique CULTURE pages 14-15 Les femmes françaises des décembristes pages 6-8 www.russiefrancophone.com 6 (17) Juin 2015

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  • pages 6-7Valéry Giscard d’Estaing pour un dialogue constructif et ouvert avec la Russie

    Suivez l’actualité de La Russie francophone sur

    www.russiefrancophone.com

    Actualités • Culture • Économie • Histoire • Cinéma

    page 8-9

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    pages 10-11

    Nouvelle rubrique CULTURE

    pages 14-15

    Les femmes françaises des décembristes

    pages 6-8

    La Russie francophone

    www.russiefrancophone.com

    № 6 (17) Ju in

    2015

  • 10 10

    SPECTACLE « TABAC ROUGE » Dans le cadre du XII festival

    international de théâtre Tchekhov.Derrière l’homme ou son double,

    une dizaine d’interprètes dansent le sabbat halluciné qui l’obsède.

    Théâtre Alexandrinsky, place Ostrovskogo, 6.

    ZAZ en concertPour la jeune star, cette tournée

    est une nouvelle occasion de découvrir le public moscovite.Concert aura lieu au Grand

    Palais du Kremlin.

    Moscou Moscou

    SEMAINE DU CINÉMA FRANÇAIS DANS LE CADRE DU

    « FESTIVAL DES FESTIVALS »Nous avons l’honneur de présen-ter huit films d’auteurs français réalisés au cours de ces der-

    nières années.Cinéma Rodina, Karavannaya 12, Cinéma Tchaika, Kutchinskaya 1/5En français. Sous-titrés en russe.

    Paris

    Littérature russe, ruptures et continuité

    Conférence 12: La littérature de la route. Nous sommes heureux de vous inviter à assister à cette

    12 conférence de notre cycle consacré à l’histoire de la littérature russe. Il y sera

    question de Pouchkine, Gogol, Leskov, Tolstoï, Tchekhov...

    Moscou17

    Ionesco SuiteDans le cadre du Festival

    Tchekho. Mise en scène : Em-manuel Demarcy- Mota Avec la troupe du Théâtre de la Ville.

    Centre Meyerhold Novoslobodskaïa , 23.

    Billets : www.chekhovfest.ru

    Moscou25

    LE JOURNAL D’UNE FEMME DE CHAMBRE

    Le Journal d’une femme de chambre, 2015. Drame, 1h35

    Réalisé par Benoît JacquotAvec Léa Seydoux, Vincent

    Lindon, Clotilde Mollet.Cinéma « 35mm », « Pioner », « 5 zvezd Novokouznetskaïa,

    « Fakel », Centre du film documentaire.

    2015

    Juin Juin

    Juin

    Juin

    Juin

    23

    Juin

    Juin

    18 St. Pétersbourg

  • p. 6-8

    p. 24-25

    Bien à vous,Boris VINOGRADOVDirecteur du journal,[email protected]

    p. 26

    Remerciements :Stephane NESTERSévérine TCHERNYSHOVADominique DUJARDINMyhué JONCOUR

    La une

    Cinéma

    Culture

    LA SÉLECTION DU MOIS Juin 2015.

    Les garçons et Guillaume, à table.

    Ils sont venus chez nous

    Valéry Giscard d’Estaing pour un dialogue constructif et ouvert avec la Russie.

    Les privilèges des étudiants en France. p. 13

    2015 : la principauté de Monaco accueille la Russie.

    Les femmes françaises des décembristes.

    Interview Ariane Ascaride.

    p. 14-15

    Éducation

    Paris devient la capitale mondiale du défi !

    p. 9Valéry Giscard d’Estaing à Moscou. Toute la communauté franco-phone russe a appris cette

    nouvelle avec pas mal d’étonnement. Le jeudi 28 mai, l’ancien Président français et Vladimir Poutine ont eu

    « un échange d’avis sur la situation en Ukraine et ses conséquences sur les

    relations entre la Russie et la France ».

    Le 29 mai, VGE est venu à l’Université Lomonossov (MGU) où il a présenté un discours sur l’état actuel des relations entre l’Union européenne et la Russie. D’après lui, la Russie apparaît pour des

    raisons historiques et culturelles comme un partenaire privilégié des pays

    occidentaux. On se doit de conserver avec la Russie un dialogue ouvert et

    constructif, dirigé vers la recherche de solutions équilibrées et pacifiques.

    Un nouveau livre de Valéry Giscard d’Estaing intitulé «La victoire de la

    Grande armée» a été présenté lors de sa visite en Russie.

    p. 16 Retour aux origines.

    p. 18-19

    Annoncer avecLa Russie francophoneContact : [email protected]

    Événements

    Entre TIENS et MIENS

    Jeune famille.p. 10-11

    p. 12

    p. 17 Chronique de théâtre Liliom.

    Interview avec VESNA.p. 20-21

    Histoire

    Naissance de la Russie moderne.p. 22-23

  • La nouvelle reine de la beauté ivoirienne se

    nomme Andréa Kakou N’guessan. Elle a été élue Miss Côte d’Ivoire 2015, dans la nuit du samedi 06 au dimanche 07 juin

    2015.

    CÔTE D’IVOIRE

    Après un recul marqué de janvier à mars, UBS Suisse

    s’attend à un deuxième trimestre également

    négatif pour l’économie helvétique. Conséquence du franc fort, un tiers du secteur des machines fait

    déjà des pertes.

    SUISSELe premier ministre

    Philippe Couillard confirme que

    des mesures visant à contrer la radicalisation,

    les crimes d’honneur et les discours haineux sont sur le point d’être présentées à l’Assem-blée nationale, mais il n’a pas voulu discuter

    de leur contenu.

    CANADA

    Nicolas Sarkozy est désormais au cœur de l’enquête sur l’affaire

    Bygmalion. Une nouvelle infraction

    risque en effet d’être retenue par les juges, celle de «financement illégal de la campagne

    électorale».

    FRANCE

    Le Monde francophone

  • Grand rendez-vous économique du pays, la Foire internationale d’Alger (FIA), dans sa 48e édition, ne s’est pas, pour ainsi dire, distinguée des précédentes éditions.

    ALGÉRIE

    Roi Mohammed VI se rendra dès la semaine prochaine au Sénégal, première étape de son

    nouveau périple africain qui le conduira en

    Guinée, Côte-d’Ivoire et au Gabon.

    MAROC

    Près de 80 bénévoles ont enfilé combinaison, masques et bouteilles

    pour répertorier les spé-cimens de pinna nobilis dans la réserve moné-

    gasque. Objectif : mieux les connaître.

    MONACO

    L’opposition wallonne quitte la plénière avant

    un vote sur la taxe kilométrique,

    dénonçant le manque de transparence

    du gouvernement.

    BELGIQUE

    • 220 millions de locuteurs de français répartis sur plus de 77 pays et territoires à travers les 5 continents.

    • 29 États souverains reconnaissent dans leur constitution le français, dont 13 comme langue officielle unique et 16 comme langue co-officielle.

  • Le jeudi 28 mai, l’ancien président français (1974-1981) Valéry Giscard d’Estaing, actuellement membre du conseil constitutionnel, s’est rendu à Moscou où il a

    rencontré le chef d’Etat russe Vladimir Poutine.

    Valéry Giscard d’Estaing pour un dialogue constructif et

    ouvert avec la Russie

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    A la une 6 7

    Officiellement, Valéry Giscard d’Estaing se trouvait à Moscou pour présenter la version russe de son livre consacré à la Grande armée na-poléonienne.

    Au cours de cette rencontre Vladimir Poutine et Valéry Giscard d’Estaing ont eu « un échange d’avis substantiel (...) sur la si-tuation en Ukraine et ses conséquences sur les relations entre la Russie et la France, ain-si que sur celles entre la Russie et l’Union européenne en général »

    Le vendredi 29 mai l’ancien président français s’est rendu à l’université d’Etat de Moscou Lomonossov pour y faire une allo-cution. Son discours porta essentiellement sur la situation des relations entre l’Union européenne et la Russie. Nous revenons

    plus en détail spécialement pour vous sur le contenu de ce discours. L’ancien Président a fait preuve d’une grande clairvoyance en dénonçant la dégradation de la situation et l’inadmissibilité de la propagande antirusse qui sévit actuellement en Europe.

    Nous avons retranscrit ici quelques ex-traits du discours :

    « Les relations entre l’Union Européenne et la Russie sont étroites. Nous avons une histoire et une culture commune, des inté-rêts socio-économiques mutuels-tout cela doit contribuer à notre rapprochement fu-tur. Je dirais même que la Russie est notre partenaire naturel le plus important. »

    Comment faire pour que nos relations soient plus proches ? Tout d’abord, regar-dons nos liens économiques. L’Union euro-

    péenne est le premier partenaire commer-cial de la Russie. L’Union Européenne est aussi le premier investisseur dans l’écono-mie russe, 75 pour-cent des investissements directs étrangers en Russie sont en prove-nance des Etats-membres de l’UE.

    A cet égard, la France apporte une contri-bution non négligeable. Cependant je pense à mon avis qu’elle reste trop modeste, je vou-drais des relations encore plus dynamiques entre nos deux pays. La France occupe la troisième place parmi les pays européens exportateurs vers la Russie, derrière l’Alle-magne et l’Italie. Le volume des échanges économiques entre nos deux pays a atteint 17 milliards d’euros en 2014. Je souhaite que ces chiffres augmentent à l’avenir.

    Stéphane GAESSLERcorrespondant

    spécial

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    Si on regarde la situation d’un point de vue politique, il est clair que la Russie a toujours préféré développer des relations bilatérales avec chacun des membres de l’UE, de manière distincte, plutôt qu’avec l’UE en tant qu’ensemble. Je pense que c’est dû au fait que la Russie se considère plutôt comme un centre, que comme la partie d’une structure qui la surpasserait. En outre, Moscou cherche à maintenir une étroite coopération avec les pays voisins, avec laquelle elle partage une histoire com-mune. Je pense qu’un avenir fructueux nous attend, et que les pays de l’UE sont à la première place pour coopérer avec la Russie.

    Je salue l’idée du ministre des affaires étrangères allemand Franck-Walter Steinmeier (SPD), qui a déclaré que « la Russie associe ses relations avec les pays de l’UE, en particulier ceux de l’Europe de l’Est, à de nombreux souvenirs histo-riques. Nous devons être attentifs au passé historique, il ne faut pas l’oublier, au même titre que l’avenir. Pour nous européens, la Russie restera toujours notre voisin le plus grand et le plus important ». Le même point de vue est partagé par la France.

    Par ailleurs, la culture et la richesse spi-rituelles de la Russie sont très proches de l’Europe. Nous sommes tous des héritiers de la culture gréco-latine, c’est pourquoi nous avons des intérêts communs. Par-mi les pays européens, la Russie apparaît pour des raisons historiques et cultu-relles comme notre partenaire privilégié. On doit conserver avec la Russie un dia-logue ouvert et constructif, dirigé vers la recherche de solutions équilibrées et pacifiques. On doit précisément donner la priorité à l’initiative pacifique, plutôt qu’aux tentatives pour nous pousser les uns contre les autres, qui sont aujourd’hui soutenues par quelques Etats au fort poten-tiel militaire.

    En ce qui concerne la crise ukrainienne, je ne pense pas qu’elle ait une importance cruciale pour la France précisément et l’Europe en général. Son ampleur et sa signification sont limitées à la Russie et à l’Ukraine. Mais avons-nous bien travail-lé ? Premièrement, la communication n’a pas été correctement conduite. Hier, j’ai parlé avec Vladimir Poutine, et il m’a dit que la Russie ne s’apprête en aucune façon à changer les frontières de l’Ukraine. Ce-pendant, personne ne sait cela, les médias transmettent des choses très différentes. La communication telle qu’elle est construite aujourd’hui est insuffisante et même dan-gereuse. »

    Plus loin l’ancien Président évoque l’an-nexion de la Crimée ; il déclare :

    « Tout ceci se passe sur la frontière de la Russie, et Kiev n’est pas loin de Moscou. D’une part, la Crimée a fait partie de la

    Russie depuis sa conquête sur les Turcs au XVIIIè siècle par la grande Catherine et le Prince Potemkine. Et d’ailleurs, le dernier acte de la Seconde guerre mondiale s’est tenu à Yalta, donc en Crimée, à l’invita-tion des Russes. D’autre part, l’Ukraine est gérée depuis plusieurs années dans des conditions troubles : incompétence, désordres, corruptions et domination par des oligarques... »

    A demi-mot Valéry Giscard d’Estaing ne s’oppose pas à la réunion de la Crimée à la Russie. Pour l’ancien Président, le pro-blème géopolitique de la Crimée regarde la Russie et l’Ukraine, les Etats occiden-taux n’ont aucune légitimité de légiférer sur l’appartenance d’un territoire qui se trouva toujours dans l’aire d’influence de la Russie.

    Valéry Giscard d’Estaing dénonce aussi le système des sanctions imposé pat l’UE :

    « En outre l’Union européenne prend de mauvaises décisions, lorsqu’elle impose à la Russie des sanctions. Tout a commen-cé avec des sanctions dirigées contre des personnes, qui n’ont pas le pouvoir de ré-pondre ou de se protéger vis-à-vis de ce genre de décisions.

    Valéry Giscard d’Estaing

    Diplômé de l’Ecole Polytechnique et de l’Ecole Nationale d’Adminis-tration, VGE devient en 1959 le plus jeune secrétaire d’État aux Finances de la Ve République, puis ministre des Finances et des Affaires économiques (1962-1966). Libéré de ses fonctions, il anime au Parlement le nouveau groupe des Républicains Indépendants (RI) et se démarque de la majorité, allant jusqu’à faire voter non au référendum du général de Gaulle sur la régionalisa-tion en 1969.

    Après la victoire du non et la démis-sion du Général, VGE devient ministre des Finances sous la présidence de Georges Pompidou (1969-1974), puis est élu président par 50,81 % des voix contre François Mitterrand, le 19 mai 1974. Pour une «société libé-rale avancée», son septennat s’ouvre sous le signe des réformes : âge de la majorité à 18 ans, légalisation de l’avortement, création d’un secrétariat d’État à la condition féminine, divorce par consentement mutuel… Aux côtés notamment du chancelier allemand Helmut Schmidt, il crée le système mo-nétaire européen (SME).

    Battu par le socialiste François Mitterrand en mai 1981, VGE deviendra président de la Convention sur l’avenir de l’Europe et présentera en juillet 2003 le traité établissant une consti-tution pour l’Europe (TCE) qui ne sera cependant pas ratifié par la France lors du référendum de 2005.

    source : france.fr

    75% des investissements

    directs étrangers en Russie sont en provenance des Etats-membres de l’UE.

    « Les relations entre l’Union Européenne et la Russie

    sont étroites. Nous avons une histoire et une culture

    commune, des intérêts socio-économiques mu-

    tuels-tout cela doit contri-buer à notre rapprochement futur. Je dirais même que la Russie est notre partenaire naturel le plus important. »

    Valéry Giscard d’Estaing, l’ancien Président français

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    A la une 6 7

  • Dans les médias ces personnes ont été diffamées, et Bruxelles a tout accepté. Je pense que cette situation contredit com-plètement les valeurs européennes. »

    Les Etats de l’Union européenne de-vraient s’opposer à l’introduction de nouvelles sanctions contre la Russie. Je pense que tout le monde est d’accord pour dire que les sanctions sont nuisibles aux deux parties, parce qu’elles sapent nos liens commerciaux et l’ensemble de nos échanges. Dans le contexte actuel des dérèglements et bouleversements qui secouent l’arène mondiale, devant la montée de la violence au Moyen-Orient, et l’incertitude des prochaines élections dans de nombreux pays, personne ne peut souhaiter l’affaiblissement de l’économie

    russe — elle a les moyens de devenir un marché en plein développement grâce à son potentiel économique et à sa relative stabilité, dans le contexte des chocs spé-culatifs qui caractérisent la finance mon-diale.

    Je n’ai moi-même jamais partagé les thèses antirusses et je n’ai jamais exprimé de tels sentiments. Je crois que tout cela est dû à l’influence de forces politiques issues des Etats-Unis. C’est précisément là-bas, que ces sentiments sont nés, l’Eu-rope les a soutenus, mais elle n’en est pas la source. Aujourd’hui la situation est en train de changer pour le mieux, le se-crétaire d’Etat américain John Kerry est venu à Moscou, d’autres visites et ren-contres ont eu lieu.

    A mon avis, les relations entre l’Europe et la Russie vont se stabiliser d’ici la fin de l’année 2015. Les sanctions ont porté pré-judice à tout le monde. Nous voyons une escalade de la violence au Moyen-Orient, et la détérioration de nos relations bilaté-rales ne mèneront à rien, si ce n’est qu’à aggraver encore plus l’instabilité mon-diale. »

    Si l’Europe pouvait agir seule, ses re-lations avec la Russie seraient moins compliquées, car l’opinion publique eu-ropéenne n’est pas hostile à la Russie, a indiqué l’ancien chef de l’Etat français dans une interview à la télévision russe. Selon lui, certains responsables améri-cains cherchent à promouvoir la politique antirusse et utilisent n’importe quel pré-texte pour aggraver les relations entre les deux pays. La France est pour sa part

    prête à contribuer au règlement pacifique des discordes qui opposent la Russie et l’Occident. Valéry Giscard d’Estaing es-time également que les médias occiden-taux doivent cesser de donner une vision unilatérale de la crise ukrainienne et de passer sous silence certains dérapages de Kiev.

    Un message de paix et de coopération qui est remarquable et courageux dans le contexte d’une escalade de la russopho-bie au sein d’une partie des élites euro-péennes et de la grande majorité des mé-dias d’Europe de l’Ouest.

    L’ancien chef d’état français a reçu à cette occasion le titre de professeur émé-rite de l’université d’Etat de Moscou Lo-monossov :

    « Pour votre contribution à la pensée politique moderne, au renforcement de l’amitié franco-russe et à la coopération avec l’université de Moscou […] » a dé-claré le recteur de l’université Viktor Sadovničij lors de la cérémonie de remise du titre.

    Giscard d’Estaing, спасибо и добро пожаловать в Россию !

    A la une 8 Événements 9

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    « ... a mon avis, les relations entre l’Europe et la Russie vont se stabiliser d’ici la fin de l’année 2015. Les sanc-tions ont porté préjudice à

    tout le monde. Nous voyons une escalade de la violence au Moyen-Orient, et la dé-térioration de nos relations bilatérales ne mèneront à rien, si ce n’est qu’à aggra-ver encore plus l’instabilité

    mondiale. »

    Valéry Giscard d’Estaing, l’ancien Président français

  • Dans le programme, vous trouverez la liste des diverses manifestations qui sont

    prévues tout au long de l’année 2015.

    Prestige, diversité, originalité….cette année 2015 est le reflet de tout ce qui a pu rapprocher, au fil de l’Histoire, la Russie

    de Monaco.

    Jeudi 11 juin, Hotel Hermitage (salon Trianon) :

    Conférence : « Les Grimaldi et la Mer Noire » Renseignements : +377 98 06 40 00

    Jeudi 11 juin à 20 heures 30, Salle Garnier :

    Spectacle organisé par la DENJS en colla-boration avec les Ballets de Monte Carlo : « Là où je t’emmènerai » (sur invitation)

    Vendredi 12 juin, Fine Art Gallery of Russian Masters :

    Conférence sur l’art russe.Renseignements : +377 93 25 23 36

    Du vendredi 12 au vendredi 19 juin, Café de Paris et Hôtel Hermitage :Année de la Russie à Monaco : Saisons de la gastronomie Russe.Renseignements : 06 30 07 68 88

    Vendredi 12 juin, Fine Art Gallery of Russian Masters :

    Conférence sur l’art russe.Renseignements : +377 93 25 23 36

    Vendredi 12 juin (sur invitation) – Fête Nationale de la Fédération de Russie :

    Réception du Consul Général Honoraire, Mme Ekaterina Seminikhina.

    Samedi 13 juin, Musée Océanographique Année de la Russie à Monaco : Exposition sur le thème «Stories in Stone» par Vasily Konovalenko, sculpture.Renseignements : +377 93 15 36 00

    Du samedi 13 au jeudi 18 juin, Grimaldi Forum :

    55e Festival International de Télévision de Monte CarloRenseignements : +377 93 10 40 60

    Jusqu’au 30 septembre, de 10h à 18h - Musée Naval – Fontvieille

    Exposition de maquettes de navires russes de la collection du Professeur Claude Pal-lanca« La Marine russe de Pierre le Grand à au-jourd’hui »Renseignements : +377 92 05 28 48

    « 2015, année de la Russie à Monaco » regroupe sous un même label un ensemble de manifestations organisées sur le territoire monégasque met-tant en valeur le patrimoine commun, les rapports historiques et culturels

    réunissant les deux Etats. Cette année mettra également en exergue les relations entre Monaco et la Russie dans les domaines les plus variés : la

    science, l’éducation, le sport, la gastronomie ou la mode…

    2015 : la principauté de Monaco accueille la Russie

    A la une 8 Événements 9

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  • 1. Anna Karénine de Léon Tolstoï commence par : « Toutes les familles heureuses se

    ressemblent, mais chaque famille malheureuse l’est à sa façon ». Qu’est-ce que

    vous en pensez ? Pourquoi êtes-vous heureux ?

    Avoir un enfant c’est beaucoup de bonheur mais c’est aussi des moments difficiles. Les premiers mois, il faut apprendre à gérer avec un bébé qui demande énormément d’atten-tion, jour et nuit, ce qui engendre beaucoup de fatigue. Il y a aussi les pleurs, que l’on ne

    parvient pas toujours à comprendre. Il est aussi important que chacun trouve sa place dans le foyer.

    Malgré cela, nous sommes plus qu’heu-reux dans cette nouvelle vie. Un enfant chamboule tout mais il sait nous récompen-ser en apportant beaucoup d’amour.

    2. Comment vous passez le temps libre ?

    Nous avons aménager dans une nouvelle ville depuis peu. Durant notre temps libre, nous découvrons notre nouvelle ville, on visite, on se promène, on redécouvre. Nous passons évidemment une bonne parti de notre temps libre à nous occuper de notre fille, en l’amenant jouer au parc par exemple.

    3. Vos parents vous aident ? Comment ?

    Nos parents ne peuvent malheureusement pas nous aider car ils n’habitent pas du tout dans la même région que nous.

    4. Pensez-vous que maintenant il est plus facile

    d’élever un enfant qu’avant ? A notre époque nous choisissons d’avoir

    des enfants où non, et choisir d’élever un enfant coûte assez cher. Nous pensons, de ce fait, que c’est plus difficile qu’avant d’élever un enfant en vue des responsabilités que l’on a envers lui.

    5. Profitez-vous des aides de l’État en tant que

    jeune famille ?Oui, nous touchons la PAJE (prestation

    d’accueil du jeune enfant) par les allocations familiales. C’est une aide donnée aux parents en fonction de leur salaires. Cette aide nous permet de faire face aux dépenses liées à notre fille. Elle est versée pendant trois ans à compter de la naissance du bébé. Il existe d’autres aides en France, néanmoins c’est la seule à laquelle nous avons le droit.

    6. Notre rubrique unit des gens de la Russie et

    de la France. Je vous présente vos homologues russes : il s’appellent Daria et Artème, ils ont

    tous les deux 25 ans, ils ont un enfant et habitent Moscou. Que voudriez-vous savoir sur le mode de vie des familles russe ? Vous

    avez la possibilité de leur poser une question.

    • En France, le père a une place impor-tante dans l’éducation de l’enfant, est-ce différent en Russie ?

    Réponse :Dans le monde entier et en Russie parti-

    culièrement, ça dépend... Chez nous le père joue un rôle important. Il faut préciser que dans notre cas le père travaille la plupart de temps et la mère veille l’enfant. Le reste, nous sommes sur le même pied ! • Financièrement, est-il difficile d’avoir

    un enfant en Russie ?Réponse :

    Oui, c’est difficile ! Nous trouvons qu’un enfant demande beaucoup plus de l’argent qu’un adulte.

    7. Nos lecteurs sont majoritairement jeunes.

    Pourriez-vous conseiller quelque chose pour ceux qui débutent une relation.

    Dans la sphère politique je dirais que c’est Nous leurs conseillerions de prendre le temps de profiter de leur couple et de bien apprendre à se connaitre avant d’avoir un enfant. Car avoir un enfant prend beaucoup de temps et d’énergie, il vaut mieux avoir un couple solide pour y faire face. Nombreux sont ceux qui se séparent en France à l’arri-vée d’un bébé. (Lui:) C’est pour ma part un engagement pour la vie. Il faut que ce soit mûrement réfléchi.

    ENTRE TIENS

    Jeune famille

    Malgré tout, nous sommes plus

    qu’heureux dans cette nouvelle

    vie. Un enfant chamboule

    tout mais il sait nous

    récompenser en apportant beaucoup d’amour.

    Gwen et Julien, Paris, France.

    www.russiefrancophone.com

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    MIENSTIENS et

    Jeune famille

    Daria et Artème, Moscou, Russie.

    1. Anna Karénine de Léon Tolstoï com-

    mence par : «Toutes les familles heureuses se ressemblent, mais chaque famille malheu-

    reuse l’est à sa façon». Qu’est-ce que vous en pensez? Pourquoi êtes-vous heureux ?

    Lui : Le bonheur est un sentiment subjec-tif, comment on peut le décrire ?

    Elle : Moi, je le sens en parlant avec des copines. Surtout avec celles qui à des pro-blèmes dans la vie privée. Elles se mettent à raconter des choses sur ses nouveaux co-pains, qu’est-ce qu’ils ont dites, qu’est-ce qu’elles leur ont répondues... Mais quand on te demande tu dis juste : « bon », « Ça va bien » Tu n’as pas grandes choses à racon-ter. Nous nous entendons bien donc il y n’a pas de discussions. On ne discute que des problèmes normalement. En réalité lorsque vous n’avez pas grandes choses à raconter c’est le bonheur.

    2. Comment vous passez le temps libre ?

    Elle : Nous avons rarement le temps libre. Mais si on l’a on le passe quasiment tou-jours avec l’enfant. On peut se promener en-semble aux parcs ou bien aller aux proches. À mon avis, il faut diviser le temps libre et le temps personnel. Le temps libre on peut bien passer avec l’enfant.

    Lui : La première demi-année après la naissance du bébé il n’y a pas du tout le temps libre. L’enfant c’est le membre de la famille. Donc on peut bien passer le temps avec lui en faisant quelque chose d’intéres-sante. Au contraire quand tu as le temps personnel tu ne fais rien.

    Elle : C’est vrai que la première demi-an-née est la pire. C’est quand le bébé est plus faible. À cette époque-là nos parents nous ont aidés beaucoup.

    3. Vos parents vous aident ? Comment ?

    Elle : Avant tout ils peuvent veiller l’en-fant. Après ils peuvent partager la nourri-ture avec nous et c’est aussi une aide ! Ils ne donnent pas des conseils, heureusement. Parce que je connais des familles où les conseils de parents c’est un problème.

    Lui : Les parents aident quand nous ache-tons quelque chose de grande, la voiture, par exemple ou le voyage.

    4. Pensez-vous que maintenant il est plus facile

    d’élever un enfant qu’avant ? Elle : C’est difficile à dire. Tout était plus

    simple, bien entendu. Il y avait des crèches auprès des usines. À cette époque les mères peuvent s’absenter pour nourrir ses bébés. En plus, personne n’a pensé d’éducation comme on pense à nos jours. Les parents ont amené ses enfants au jardin d’enfants en allant au travail. Pourtant il y avait des queues dans les magasins. Il y n’avait pas des couches-culottes...

    Lui : ... des couches-culottes et des élec-troménagers qui facilitaient l’existence au-jourd’hui. Cependant les étudiant ont pu vivre avec ses bourses seulement.

    5. Profitez-vous des aides de l’État en tant

    que jeune famille ?Elle : Elle n’est pas grande, mais on la sent

    quand même. Par exemple on a profité d’un programme « jeune famille » . En plus, l’en-treprise où j’ai travaillé avant la naissance de bébé me paye de subvention. Je suppose qu’en Europe la situation et pire. L’assu-rance médicale est chère et ils peuvent uti-liser L’AMU juste en situations graves. Au contraire nous avons des avantages en les soins de santé.

    6. Notre rubrique unit des gens de la Russie et de la France. Je vous présente vos homolo-gues français: il s’appellent Gwen et Julien,

    ils ont un enfant et habitent Paris. Que voudriez-vous savoir sur le mode de vie des

    familles français? Vous avez la possibilité de leur poser des questions.

    Lui : À quel point ils sont autosuffisants ?Elle: Comment imaginent-ils son avenir

    heureux ?7.

    Nos lecteurs sont majoritairement jeunes. Pourriez-vous conseiller quelque chose pour

    ceux qui débutent une relation.Lui : Il ne faut pas se faire des illusions il

    faut savoir prendre patience.Elle : Soyez patients ! Et puis, je souhaite-

    rais à tous de comprendre qu’une personne qui est avec vous c’est la personne avec qui vous voulez être toute votre vie.

    Il ne faut pas se faire de

    s illusions il

    faut savoir prendre patie

    nce.Artème

    Konstantin KRASNOSLOBODTSEV

    Remerciements :Sophia AKIMOVA Tatiana SALAH

  • Le concept ? Intripid est un jeu qui permet de visiter sa ville en s’amu-sant. Pour sortir du quotidien, Intripid propose aux parisiens et touristes adeptes de challenges de découvrir Paris en vivant une expérience originale. Ils de-vront se rendre dans des établissements partenaires où ils pourront relever un défi. Les ga- gnants remportent chacun sur place une carte « mission réussie ». Ces cartes disposent d’un code unique débloquant des points et des cadeaux sur le site du jeu.

    Pourquoi jouer ? Le visiteur devient ac-teur de sa visite, en mettant en avant ses qualités autour de défis gastronomiques, culturels, romantiques, sportifs ou festifs que proposent les patrons des établisse-ments. Suite à ses exploits, l’utilisateur progresse dans le jeu grâce aux points : son avatar évolue, il grimpe dans les niveaux, atteint des objectifs, partage ses expériences et remporte des cadeaux. Le vainqueur de la saison 2 gagnera un voyage entre amis en Europe !

    L’esprit Intripid ? Lors de ses aventures, l’utilisateur rencontre d’autres joueurs, dans une ambiance convi- viale et ludique à Paris. Les établissements partenaires mettent en avant leurs spécificités, leurs pas- sions, autour d’un défi. Cela favorise

    les interactions avec les visiteurs. Avec In-tripid les récompenses et les réductions chez les partenaires ne sont pas dues mais méritées.

    L’équipe : L’envie d’entreprendre anime l’équipe Intripid composée de 4 membres apportant chacun leurs compétences sin-gulières : Baptiste, Matthieu, Emmanuel et Alexandre. Pour eux, la vie avec des challen- ges est plus trépidante. Grands joueurs dans l’âme, leur objectif est de « ré-véler le potentiel qui sommeille en chacun » grâce à « une nouvelle manière de visiter la ville » afin « d’apprendre en s’amusant ». Fiers de ce concept inédit, ils ont hâte de développer ce jeu déclinable à toutes sortes d’établissement.

    L’avenir : Une application mobile est en cours de création. Intripid fonctionne sous forme de saisons, d’une durée de 6 mois, avec un cadeau conséquent à gagner pour le premier de chaque semestre. Des parcours sur-mesure de défis seront également mis en place pour les séminaires d’entreprises, les enterrements de vie de jeunes filles ou de garçons. Une version en anglais est prévue pour les touristes. Paris est idéal pour dé-buter l’aventure, mais l’équipe compte ex-porter son concept dans de nouvelles villes.

    Intripid se lance à Paris. Le concept de notre jeu consiste à réaliser des défis dans des bars, des restaurants, des boutiques ou des musées à

    Paris afin de gagner des cadeaux. Les challenges à accomplir sont présentés sur le site communautaire www.intripid.fr.

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    Paris devient la capitale mondiale du défi !

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    Alexandra SAMOLETNIKOVA

    Étudiant

    1. L’inscription administrative - une fois cela fait, vous devenez officiellement étu-diant, la carte étudiante est à votre disposi-tion à partir de ce moment-là ; il faut payer les frais d’inscription à cet étape (environ €600)

    2. L’inscription pédagogique - la seconde partie ; vous devez vous inscrire aux cours obligatoires et choisir des cours en option.

    En France, si vous êtes étudiant vous avez beaucoup de privilèges. Pour tous les connaître je vous conseille d’aller au CROUS (Le Centre Régional des Oeuvres Universitaires et Scolaires). Dans ce centre on vous répondra à toutes les questions qui semblent intéressantes; même si vous n’êtes toujours pas sûr de parler assez bien le français, les personnes y parlent également d’autres langues (anglais, allemand et espa-gnol). En tant qu’étudiant, vous avez droit à des réductions et des bonus dans beaucoup d’institutions tels que les théâtres, les ciné-mas, les bars, les centres d’expositions, les musées etc... Ce qu’il faut faire, c’est rap-peler que vous êtes étudiant en présentant votre carte, ce que parfois les gens oublient

    de faire. En outre, il y a aussi une réduction de 50% pour la carte de transport.

    Une fois que vous êtes en France concer-nant le loyer et le logement, vous avez le droit aux APL (Aide Personnalisée au Loge-ment)  et je vous conseille de vous présenter à la CAF (Caisse d’Allocation Familiale). Ces aides financières varient normalement de €80 à €250 par mois. Pour postuler, il faut présenter quelques papiers (on est en France, «quelques» est une notion très élas-tique, soyez très attentif, s’il vous plaît).

    Maintenant, on va parler des prix en France. Le logement est assez cher, la qua-lité (surtout à Paris) laisse à désirer (ça dé-pend, bien sûr), j’espère de tout mon coeur, que vous allez trouver un bon logement, parce que sa qualité a une grande influence sur la qualité de vos études.

    Concernant la vie et les opportunités à Paris, je vous invite à explorer cette ville vous même, l’expérience de chacun est unique, vivez.

    Les privilèges des étudiants en France

    Vous avez reçu l’invitation d’une des Universités françaises, vous avez fait toutes les procédures à l’ambassade de France en Russie, vous avez bien reçu le visa, vous êtes venu en France et vous avez commencé la procédure avec le fameux OFII. Maintenant, on va à

    l’Université d’accueil pour effectuer :

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  • Elshan SADIKOV

    Les femmes françaises des décembristes

    Il y a presque centre quatre vient dix ans, le 14 décembre 1825, dans la capitale de l’Empire russe, à Saint Pétersbourg, sur la Place du Sénat, survint une émeute d’un

    groupe d’officiers, issus de l’aristocratie et disposés à la révolution. Le but était d’abolir

    l’aristocratie et le servage. Cette révolte entra dans l’histoire comme L’Insurrection

    des Décembristes.

    Culture 14 Culture 15

    Elle eut une résonance excep-tionnelle dans la société russe et contribua grandement à la vie socio-politique du pays sous le règne Nicolas Ier.

    Le même jour, les troupes impériales étouffèrent la révolte. Au total, 579 hommes furent renvoyés devant la Grande Cour et 287 furent reconnus coupables. Cinq organisateurs principaux furent pendus et trente et un furent condamnés aux travaux forcés à perpétuité. D’autres participants reçurent des «  peines plus légères  »  : ceux-ci furent rétrogradés jusqu’au grade de soldats. Ils furent mis en prison, ou incorporés dans l’armée du Caucase.

    Un grand nombre de rebelles étaient mariés et avaient une famille. Parmi les épouses, il se fut trouvé des femmes fort courageuses pour suivre leur mari au ba-gne. Ils partagèrent ainsi avec elles toutes les difficultés de l’exil. Ces braves femmes entrèrent dans l’histoire comme les femmes de décembristes. Après le procès, l’empereur accorda le droit aux épouses des condamnés de divorcer de leur mari Cependant, la grande majorité d’entre elles repoussèrent cette proposition. Ces femmes nobles abandonnèrent le luxe et le confort de la vie de la capital et, confiant leurs enfants aux soins de leurs parents, suivirent leur mari en Sibérie.

    Une fois qu’elles eurent décidé de re-

    joindre leurs époux disgraciés dans leur exil, ces femmes louables se virent privées de leur titre de noblesse et de leurs privi-lèges. Elles basculèrent ainsi dans la situa-tion des « femmes de forçats ». Les droits furent limités pour leurs correspondances et leurs déplacements ; et il leur était inter-dit de disposer de leurs biens.

    Leurs enfants nés en Sibérie furent considérés comme des serfs de l’Etat. Cependant, rien n’arrêta ces femmes, do-tées d’une exceptionnelle force d’esprit et d’une conscience du devoir exacerbé que rien ne n’aurait pu entacher.

    L’attitude des parents et celle des proches à leur égard fut partagée. Certains désap-prouvaient cet acte de folie et tentèrent par tous les moyens de les en dissuader tandis que d’autres, au contraire, les soutenaient moralement.

    C’est par l’appel de l’âme que ces sujets d’élite entreprirent un voyage exception-nel de 7000 kilomètres, de Saint Péters-bourg jusqu’aux confins lointains, froids, sans conforts et aux conditions de vie pré-caires.

    …Est-ce par hasard ou non, mais parmi ces onze femmes vaillantes, trois étaient d’origine française  : la princesse Ekateri-na Troubetskaïa (1800-1854), née Cathe-rine Loubrevie de Laval, Camille Ivachova (1808-1840), née Le Dantu, épouse de Vassili Ivachiev et Praskovia Annen-kova(1800-1876), née Janette Pauline

    Gueble, épouse d’Ivan Annenkov. De vé-ritables héritières dignes de Jeanne d’Arc !

    Qui étaient donc ces hommes braves, qui avaient osé défier le despotisme et qui étaient sortis sur la Place du Sénat le 14 décembre 1825 ? Qui étaient ces héros qui avaient suscité autant d’amour de la part de ces belles dames ?

    Comme nous l’avions dit, les officiers qui prirent part à ce soulèvement étaient tous issus de l’aristocratie. Ils avaient tout lieu d’être satisfaits du pouvoir en place. Certains d’entre eux étaient héritiers de grandes fortunes. Ils n’étaient pas dans le besoin. Le pouvoir les avait bien réchauffés dans on sein… Cependant, ils se liguèrent contre le régime existant.

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    Praskovia Annenkova.

    Camille Ivachova.

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  • Il est à croire que beaucoup d’officiers russes insurgés avaient pris part à la guerre nationale contre Napoléon Ier en 1812. Une guerre qui finit par la défaite de ce dernier et qui sonna en somme la fin du Premier Empire en 1815. Combattant et avançant, ils allèrent jusqu’à Paris. Naturellement, ils se tenaient pour les libérateurs de l’Europe, chassant la tyrannie. Rentrés au pays, ces vainqueurs se mirent à rêver à réformer le régime tsariste, tout inspirés des révolu-tions nées en Occident.

    Puis il y eut … la journée du 14 décembre 1825…, la Place du Sénat…, la confusion dans le palais d’Hiver...

    Ce n’était pas à proprement parler d’une révolte, mais plutôt un acte d’insurrection.

    Les régiments restèrent sur place, indé-cis, dans l’attente des instructions de la part du meneur de la révolte, Serge Troubetzkoï, qui refusait de jurer fidélité au nouvel em-pereur. Au dernier moment, Troubetzkoï ne se rendit pas à la Place du Senat, ayant anticipé l’échec de l’entreprise. Cela ne le sauva pas du destin cruel cependant. Il fut condamné, d’abord à la peine de mort, en tant qu’«  Instigateur de l’insurrection  », peine commuée par la suite à vingt ans de bagne et une déportation définitive en Si-bérie.

    Il faut tout de même lui reconnaître toute l’audace et l’inédit, à cet acte de soulève-ment. Et à juste raison, puisque Nicolas Ier fut à tel point effrayé qu’il faillit céder aux

    revendications des rebelles. Ce ne fut qu’à la confusion des comploteurs qui fît gagner du temps à Nicolas Ier, et qu’il put faire ré-primer l’insurrection par la force armée.

    Décembre 1825 apporta à l’Empire russe non seulement le froid hivernal et un chan-gement de monarque mais aussi, une ten-tative de coup d’Etat militaire, qui avait la particularité d’être sans précédent et qui sera suivie d’effets.

    Tous les actes révolutionnaires envers le palais n’ont eu un retentissement aussi grand que celui qui se déroula ce jour-là sur la place du Sénat, à Saint Pétersbourg. La noblesse des idées de liberté et d’égalité pour toutes les couches de la population, portées et défendues par les décembristes leur permirent d’adhérer l’opinion et l’es-time de tous, à commencer par l’affection de leurs dames.

    … Malgré la distinction de leurs ori-gines sociales, de leur éducation, de leur position sociales et de leur âge, ces maî-tresses femmes furent unanimes dans la décision de soutenir leur mari. En Sibérie, ces femmes ne pouvaient s’occuper que par ce qui leur était permis et par ce qui leur était accessible. Installées à proximité des centres de détention de leur mari, elles allé-

    geaient leur dure vie autant qu’elles le pou-vaient ; cousant et réparant des vêtements. Et elles faisaient de même pour la vie de la population locale. A Tchita, dans une ag-glomération sibérienne, un hôpital fut bâti par les femmes de décembristes. Elles y fai-saient soigner les prisonniers tout comme les habitants des lieux.

    Malheureusement, toutes les exilées vo-lontaires ne survécurent pas à l’exil sibé-rien. Après la proclamation de l’amnistie 30 ans après, le 28 août 1856, seules huit femmes retournèrent au pays, dont cinq avec leur mari.

    A la veille de l’anniversaire de ce fait his-torique, l’auteur de ces lignes a voulu jeter de nouveau une vive lumière sur les évène-ments des jours passés. La fois prochaine, nous étudierons l’histoire des femmes dé-cembristes d’origine française en détail, ce qui devrait particulièrement intéresser nos lecteurs francophones.

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    « ...en suivant leurs maris et continuant le lien conjugal avec eux, elles deviendront naturellement complices de leur sort et perdront ainsi leur propre ancien titre et, c’est-à-dire, seront déjà reconnues pas autrement que les femmes de forçats et d’exilés...»

    (De la prescription civile).

    Décembristes dans le moulin à Tchita. (La peinture du décembriste N. Repin)

    Ekaterina Troubetskaïa.

    Décembristes dans la cellule de l’ostrog à Tchita. (La peinture du

    décembriste N. Repin)

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  • Mais quelle est la source de tous ces chef-d’oeuvres dont nous sommes les contemplateurs au-jourd’hui? Quand est né l’art et quelles rai-sons ont suscité son émergence ?

    L’art préhistorique est apparu au Paléo-lithique moyen c’est-à-dire il y a aux alen-tours de 50 milles ans. Selon les recherches des savants, il existe quelques théories à pro-pos des racines de l’avènement de l’art.

    1) l’art est fait pour l’art: d’après cette conception, l’art préhistorique a été créé jus-tement pour le plaisir et le divertissement de l’homme primitif.

    2) la théorie magique: l’émergence des images pariétales et de la sculpture (les formes les plus répandues de l’art paléo-lithique) a été engendré par l’idée annonçant que les images aident à la réussite dans la chasse. Ainsi le processus de leur création devient une sorte de rituel.

    3) la conception du travail : l’art est une forme de l’activité de production.

    4) la théorie biologique : l’aptitude pour l’art existe dans nos gènes. Le développe-ment de ces vocations provoque au bout du compte l’avènement de l’art.

    En ce qui concerne les sujets d’art préhis-torique le plus souvent c’étaient des images des animaux et des scènes de chasse qui rem-plissaient la surface des murs. La composi-tion à cette époque-là est présentée très rare. Cette circonstance est due au fait que pour le peintre paléolithique l’image d’animal ré-aliste sans les enjolivements et les éléments détournants est au point de mire.

    L’art paléolithique était très répandu au nord. Entre autre, beaucoup de grottes com-prenant de la peinture pariétale et présentant la primordialité pour les savants sont situées en France. Les parois de la grotte de Lascaux, des Trois-Frères et de Laussel sont impré-gnées de l’art paléolithique. Mais parmi ces grands monuments il y a celui qui devient une vraie perle de l’art préhistorique - la grotte Chauvet-Pont d’arc.

    La grotte est située en région Rhône-Alpes dans le département de l’Ardèche. La lon-gueur de la grotte est estimée à 800 mètres. Elle a été découverte en 1994 par Jean-Marie Chauvet. Elle est datée de 36 mille ans avant notre ère et donc comprend un des plus vieux ensembles de la peinture pariétale du monde.

    Plus de 430 images d’animaux ont été tra-cées sur la surface de ses murs. On rencontre ici les chevaux, les mammouths, les félins (les plus fréquentes), les panthères, les ours etc. Presque espèces d’animaux sont identi-fiables grâce au naturalisme des figures et à la réalité des postures.

    La grotte Chauvet recèle des peintures et des gravures en couleurs rouge et noir. Comme matériau de base pour le rouge on utilisait les pigments minéraux d’ocre rouge et pour le noir - les pigments de charbon de bois. Il importe qu’on dise que la majorité des figures rouges a été posée à l’entrée de la grotte pendant que les images noires se si-tuent dans les salles les plus éloignées.

    Avant d’appliquer les dessins les parois ont été couvertes par le pigment blanc pour que toutes les images soient visibles à l’œil. Il faut mettre en exergue que les inconvénients des murs n’ont pas été dissimulés, au contraire

    ces défauts ont fait le lit pour le peintre pa-léolithique, en utilisant les factures des murs pour atteindre le naturalisme au plus haut degré.

    À propos des peintres qui ont créé cet ensemble : Jean-Marie Chauvet a révélé plu-sieurs « mains » qui ont contribué à l’enfan-tement de cette peinture pariétale. En outre selon lui, les images n’ont pas été faites en même temps en dépit du style artistique ho-mogène de l’ensemble.

    L’originalité de la grotte Chauvet-Pont d’arc est aussi suivie par les autres points. Avant tout, c’est le bestiaire qui est présenté ici: en règle générale ce ne sont que des ani-maux de chasse qui remplissent les parois des grottes. Mais la grotte Chauvet dispose des images des animaux dangereux qui ne formaient pas le ration de l’homme primitif. C’est un cas exceptionnel. Il est primordial d’ajouter que dans les peintures noires on peut observer les premiers pas de la création de la perspective. Enfin, le peintre paléo-lithique véhicule la facture de la fourrure en usant l’ombragement: il diffuse la peinture par le doigt afin de briguer les gradations.

    Il y a des années la société n’avait pas l’op-portunité de contempler les merveilles de la grotte Chauvet (la grotte restait fermée pour le public pour préserver le trésor). Mais le 25 avril 2015 s’est déroulée l’ouverture so-lennelle de la réplique de la grotte Chauvet qui se situe à 5km de l’emplacement de la grotte originelle. Cet évènement a suscité une énorme vague des touristes en Ardèche. La réplique subit aujourd’hui le déferlement incroyable de ce que montre l’intérêt du pu-blic aux origines de l’art.

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    La grotte Chauvet-Pont.

    Retour aux originesArt... Quand on prononce ce mot, dans nos têtes apparaissent les images de la peinture des impressionnistes, de l’architecture des cathédrales gothiques et de la sculpture antique.

    Ekaterina KOUDRIACHOVA

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  • Culture

    Chronique de théâtre Liliom

    Liliom de Jean Bellorini, l’histoire d’une passion douce-amère entre deux êtres que tout oppose, Julie et Liliom.

    La langue de Ferenc Molnar fait écho à l’universalité des premiers émois amou-reux vécus par une jeune fille naïve et sin-cère, Julie, et Liliom, un jeune homme, dont le quotidien est rythmé par la violence, le jeu et l’alcool. Le texte est un hymne à la communion des mots, une musique écrite avec vitalité sur la présence humaine.

    Jean Bellorini a donné vie à l’écriture de l’auteur éponyme à l’automne dernier sur la scène du Théâtre Gérard Philippe à Saint-Denis, ville située dans le nord-est parisien. L’adaptation est reprise par l’Odéon – Théâtre de l’Europe – en sa deu-xième salle, les Ateliers Berthier à Paris.

    L’histoire. Liliom est un bonimenteur de foire, une belle gueule qui travaille sur le manège tenu par Madame Muscat, un p’tit mec qui préfère aux contraintes, les p’tits plaisirs que procurent les illusions de la vie. Julie et son amie sont prises à partie par la directrice des auto-tamponneuses, laquelle reproche à Julie de se laisser aller entre les bras de Liliom. Ce dernier intervient, le ton s’élève, Madame Muscat le renvoie et Liliom retrouve la liberté. Une liberté qui l’incite à faire des magouilles pour sur-vivre. La raison du cœur de la jeune fille l’emporte sur les conseils de son entourage qui lui demande d’éviter de fréquenter le vaurien. S’ensuit l’histoire sourde d’une passion non avouée de Julie pour Liliom et lui de feindre l’intérêt manifesté par sa jeune amie.

    Jean Bellorini tisse des liens étroits avec la jeunesse, laquelle s’investit avec sa fougue et sa dynamique sur le territoire ar-tistique développé par le directeur du TGP. Tempête sous un crâne de Victor Hugo, Pa-roles gelées de Rabelais, La bonne âme du Se-Tchouan de Bertold Brecht, des adapta-tions mise en œuvre avec une jeune distri-bution dans l’ensemble. Une pédagogie qui associe l’expérience d’artistes renommés comme Jacques Hadjaje, Teddy Melis et Marc Plas à de jeunes comédiens talen-tueux et présents dans toutes les spectacles de Bellorini, Clara Mayer et Hugo Sablic.

    Cette adaptation se veut une nouvelle fois présentée comme un conte, un album en pop-up qui s’ouvre sur l’univers litté-raire de Ferenc Molnar et libère des images dont les couleurs riment avec la richesse d’une langue, le hongrois. La traduction du texte par Kristina Rady, Alexis Moati et Stratis Vouyoucas est sublime car elle conserve l’âme et la poésie de l’auteur.

    Le théâtre de Jean Bellorini, c’est une invitation à l’évasion, une traversée d’écri-tures de la littérature classique reprises dans une scénographie contemporaine où le décor vit avec l’articulation des ef-fets techniques produits par les jeux de lumières. La musique est indissociable de son travail car elle perpétue la tradition du théâtre d’époque librement revisité dans des formes contemporaines. Les costumes signés Laurianne Scimemi, la note de l’élé-gance et de la simplicité portée par des per-sonnages qui se révèlent en eux.

    La mise en scène s’ouvre sur un ma-nège d’auto-tamponneuses, les spots ren-

    voient une lumière artificielle comme l’est l’ivresse de l’ambiance foraine. L’esprit est à la fête, les visages expriment le bonheur, aussi éphémère soit-il. Tout d’un coup, la musique s’arrête, une voix s’élève, puis une autre, des heurts, une bousculade. La bonne humeur n’est plus, la violence subie rappelle la fragilité de la vie. La fête fo-raine, une virgule de bonheur extraite au clair-obscur d’existences ancrées dans leur mode le plus simple expression, la misère.

    Liliom, un texte sur la vie, un spectacle sur des vérités de vie relayées par des ar-tistes généreux et sincères, des comédiens qui jouent pour ‘de vrai’ comme l’est le travail de Jean Bellorini. Julien Bouanich est habité par le personnage de Liliom. Une magnifique présence de tous les ins-tants. Clara Mayer s’impose dans le rôle de Julie car elle montre une sensibilité qui se lit à fleur d’yeux, la marque des grands comédiens. Jacques Hadjaje est de tous les registres, Litzman, la Mère Hollunder et le secrétaire du ciel, il excelle en chacun.

    Liliom, c’est un ensemble artistiquement exquis. Julien Bouanich, Amandine Cal-sat, Julien Cigana, Teddy Melis, Delphine Cottu, Jacques Hadjaje, Clara Mayer, Marc Plas, Lidwine de Royer Beaupré, Hugo Sablic, Sébastien Trouvé, Damien Vigou-roux régalent le public. Jean Bellorini, un homme qui dompte les textes et les écri-tures obéissent à la poésie de son univers, le conte et la jeunesse.

    Philippe DELHUMEAU

    Texte : Ferenc Molnar, Mise en scène : Jean Bellorini, Traduction : Kristina Rady, Alexis Moati, Stratis Vouyoucas, Scénographie : Jean Bellorini, Costumes : Laurianne Scimemi, Musique : Jean Bellorini, Lidwine de Royer Beaupré, Hugo Sablic,

    Sébastien Trouvé, Avec : Julien Bouanich, Amandine Calsat, Julien Cigana,Teddy Melis, Delphine Cottu, Jacques Hadjaje, Clara Mayer, Marc Plas, Lidwine de Royer Beaupré, Hugo Sablic, Sébastien Trouvé, Damien Vigouroux.

    Ateliers : Berthier – Paris 17ème, 28 mai – 28 juin 2015.

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    Ils sont venus chez nous 19

    Ariane Ascaride, une actrice fran-çaise touchée par les fées depuis le 10 octobre 1954. C’est à Marseille qu’Ariane écarquilla les yeux pour la pre-mière fois. Sa famille, une distribution digne des romans de Marcel Pagnol, le papa d’ori-gine napolitaine appréciait la scène en ama-teur, la maman Henriette était employée de bureau, deux frères, Pierre, comédien, met-teur en scène, créateur du théâtre à domicile, et Gilles, sociologue et écrivain.

    Le théâtre, elle le découvre dans les spec-tacles amateurs où son père joue. Ariane As-caride, élève au Conservatoire national d’art dramatique de Paris, a pour professeurs An-toine Vitez et Marcel Bluwal. Les planches, elle les foulera dans les pièces montées par son frère, Pierre Ascaride. Le clap de cinéma, elle l’entendra dans La Communion solen-nelle, film de René Féret en 1977.

    Mariée avec le réalisateur français de ciné-ma, Robert Guédiguian, le fil d’Ariane suit la filmographie de son époux depuis Dernier été en 1980, A la vie, à la mort ! en 1995, La ville est tranquille en 2000, Le Voyage en Arménie en 2006, Les Neiges du Kilimandjaro en 2011, jusqu’à Une histoire de fou en 2015. La liste n’est pas exhaustive, Ariane Ascaride connai-tra la consécration en 1998 dans Marius et Jeannette, film de Robert Guédiguian, avec le César de la meilleure actrice.

    Elle est à l’affiche dans d’autres films, Le Ventre de Juliette de Martin Provost en 2001, Le Thé d’Ania de Said Ould Khelifa en 2004, Le Hérisson de Mona Achache en 2009, La Délicatesse de Stéphane et David Foenkinos en 2011…

    Au théâtre, Ariane Ascaride interprète différents registres dans des pièces mises en scène par Pierre Ascaride avec Ma Famille-re-

    vue d’Eduardo De Filippo en 1985, Didier Long avec Mathilde de Véronique Olmi en 2003, Didier Bezace avec La Maman bohême / Médée de Dario Fo et Franca Rame en 2007, Danièle Thompson avec L’Amour, la mort, les fringues de Nora et Delia Ephron en 2011, Si-mon Abkarian avec Le Dernier jour du jeûne en 2013-2014, Marc Paquien avec Le Silence de Molière en 2015…

    A la télévision, elle tourne dans des télé-films comme dans L’Apprentissage de la ville de Caroline Huppert en 1982, Retiens la nuit de Dominique Cabrera en 2000, Les mauvais jours de Pascale Bailly en 2011, C’est pas de l’amour de Jérôme Cornuau en 2013…

    Deux jours avant l’interview, j’ai vu Ariane Ascaride interprétait une parenthèse de son enfance dans la pièce Touchée par les fées, mise en scène de Thierry Thieû Niang, au Théâtre de l’Aquarium.

    Interview Ariane AscarideRencontre avec Ariane Ascaride, une grande Dame de la scène française qui porte avec élégance et éloquence une garde-robe d’univers scéniques impressionnants, actrice, comédienne, metteure en scène et réalisatrice.

    Réalisée par Philippe DELHUMEAU

  • Ils sont venus chez nous 19Ce fut une belle soirée qui m’en rappela

    une autre sur la scène du Théâtre Nanterre – Amandiers en 2014 où la comédienne jouait dans Le Dernier jour du jeûne de Simon Ab-karian.

    Rencontrer Ariane Ascaride, c’est un fris-son de bonheur qui m’a parcouru jusqu’au jour J. Arrivé sur le lieu du rendez-vous, c’est un frisson d’impression qui s’est figé jusqu’à l’ouverture de la porte d’entrée. Soudain, le temps s’est arrêté sur un bonjour convivial et la sincérité de la poignée de main échangée. Installés dans une pièce à usage de bureau, les livres en nombre étagés ci et là disent en silence ce que les lectures ont dû réveiller comme projets de réalisateur et révéler, in fine, des films et des spectacles aboutis.

    Devant une tasse de café fumant, la conversation avec Ariane Ascaride s’engage assez vite. Aux questions posées, l’actrice ré-pond avec le naturel qui lui appartient tant sur scène que dans la vie. Au terme de l’ul-time question, « Ariane, le mot de la fin, je vous laisse l’improviser », une réponse ins-tantanée, comme je les apprécie, fuse et cette fois, il est temps d’arrêter l’enregistrement, de remercier Ariane Ascaride et de repartir à la vie.

    Ariane Ascaride, bonjour. Je vous remer-cie de me recevoir pour réaliser cette inter-view.

    Ariane Ascaride, le théâtre pour vous, c’est A la vie, A la mort ! ou Une commu-

    nion solennelle ?Ariane Ascaride : « D’abord, je pense que

    c’est à la vie à la mort. J’ai commencé ma vie dans une maison où il y avait un homme qui faisait du théâtre amateur, mais qui faisait du théâtre. J’ai toujours dit que le théâtre pour moi, c’est une odeur. Mon père avait une grande boite de maquillage qu’il était interdit de toucher et que j’entrouvrais en rentrant de l’école pour sentir l’odeur des produits de maquillage. C’était des grands bâtons de fard comme il n’en existe plus du tout maintenant et il y avait une odeur très, très forte. Ça fait partie des odeurs de ma toute petite enfance et c’est quelque chose qui m’accompagne. J’ai commencé à jouer, on m’a fait jouer, et on ne m’a pas demandé si j’étais d’accord ou pas. J’ai vraiment souvenir que ça n’a pas été quelque chose qu’on m’avait demandé, « est-ce que tu veux le faire ». On m’a dit : « Il faut le faire ». Je dis souvent que j’avais une telle liberté quand j’étais enfant sur un plateau. C’était tellement simple car je n’avais pas la conscience de la responsabi-lité que ça pouvait être. C’était comme dans la cour de récréation, je m’amusais. En fait, j’essaie de retrouver ça, toute ma vie, je vais essayer de retrouver ça parce qu’au fur et à mesure que je grandissais, la responsabilité et la conscience de ce que je faisais venaient. Après, cette espèce d’angoisse absolument démoniaque que j’ai avant de jouer, un trac qui ne fait que s’agrandir au fur et à mesure

    que les années passent, et pourtant j’es-saie toujours de retrouver cette aisance que j’avais quand j’étais enfant. Donc, c’est plutôt à la vie, à la mort. La communion solennelle, c’est marrant que vous me parliez de ça car René Féret vient de disparaitre et je lui dois beaucoup. C’est lui qui m’a poussé à devenir comédienne professionnelle. »

    Touchée par les fées, est-ce une paren-thèse qui s’ouvre sur votre enfance ou

    des mots entre guillemets que vous aviez besoin de dire à votre père ?

    A.A. : « En fait au départ, ce n’est pas moi qui l’ai choisi. Quand la SACD m’a proposé ce ‘Sujet à vif ’ en Avignon, on m’a dit que je devais faire quelque chose que je n’avais ja-mais fait. Le principe était celui-là et quand c’est parti, j’ai dit : je veux voler, et j’ai rajou-té  : je suis la fille de Peter Pan et c’est pour cette raison que je veux voler. Ils étaient un peu inquiets et ils se sont demandés à qui ils avaient à faire. A partir de là quand je suis sortie du rendez-vous, je me suis dit, je vais raconter pourquoi je veux voler. En racon-tant ça, j’étais obligée de passer par mon en-fance, par mon père, par ma mère, par cette maison complétement dingo. C’est ainsi que le projet s’est construit et en même temps, je suis heureuse de l’avoir fait. Ce que je disais : je vous raconte des choses, mais vous ne sa-vez pas trop bien ce que moi j’ai dans la tête. Je garde une distance et je veux la garder, je n’ai pas envie de m’étaler. Un acteur a tou-jours besoin à un moment ou à un autre de repasser par son enfance pour son travail. L’acteur que nous sommes est constitué de ce qu’il a vécu, comment il a démarré dans la vie, d’où il est né. »

    Vos années durant, vous avez interprété de nombreux personnages au théâtre, au cinéma et à la télévision. Rêvez-vous à un

    coin d’azur inexploré ?A.A.  : « Un coin d’azur inexploré, j’en ai

    un petit. C’est l’endroit où je vais pour ne plus du tout penser au théâtre et à mon mé-tier, juste me balader dans la colline et être au bord de la mer. Celui-là, je l’ai et j’essaie de le protéger un peu jalousement. Je suis dans trois couleurs qui sont le bleu du ciel et de la mer, le blanc de la pierre calcaire et le vert des pins. »

    Le 12 mai, vous avez joué Esprit – Madeleine Poquelin, la fille de Molière et

    d’Armande, dans la pièce Le Silence de Molière mise en scène par Marc Paquien.

    Racontez-nous votre rencontre avec la fille de Molière.

    A.A.  : «  C’est une drôle d’histoire, Marc Paquien m’a envoyé le texte du Silence de Molière. Après l’avoir lu, j’ai dit  : c’est moi qui dois jouer ce personnage, c’était évident. Madeleine Poquelin a fait tout l’inverse de moi, elle s’est retirée du monde, elle n’a jamais joué, elle est née et elle a vécu dans cette maison où il y avait Molière et toute la famille Béjart, ils parlaient théâtre, ils vi-vaient pour le théâtre, ils se disputaient sur le plateau et ensuite à la maison. Je pense que pour elle, c’était très dur car elle n’était pas comme les autres. Eux ne comprenaient pas bien qui était cette enfant. En plus s’est ajou-tée à ça, cette rumeur absolument terrifiante qui a dit qu’elle était la fille de son père et de sa sœur, d’un inceste. Il y a des pamphlets qui sont sortis, alors que son père était déjà mort. Je pense que cette situation l’a dé-truite, elle a voulu se couper du monde. Elle a été submergée par l’ombre de cette famille incroyable qui ne s’est pas rendu compte car le théâtre était omniprésent dans leur vie. Quand les pamphlets ont été publiés, per-sonne ne s’est préoccupé du fait que Molière

    avait une fille et de ce que ça pouvait lui faire. Cette fille a porté sa vie durant cette rumeur qui n’a jamais été avérée et c’est une douleur qu’elle emportera avec elle jusqu’au bout de sa vie. »

    Ariane, le mot de la fin, je vous laisse l’improviser.

    A.A.  : «  Le mot de la fin, il n’y a pas de fin. La fin, ça n’existe pas. Il y la faim, celle qu’on peut avoir quand on vit dans des mondes terribles. Aujourd’hui, il y a des enfants qui ont faim. Mais la fin, je n’accepterai jamais de dire que la fin, ça existe. On transmet, c’est la transmission quand quelqu’un s’en va, il a laissé des pe-tits cailloux à un ou une autre qui les re-prend et les fait avancer. Il n’y a pas de fin. Merci beaucoup Ariane Ascaride.

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    Vesna, la rencontre de deux cultures, l’âme de l’Oural russe et la dou-ceur du nord de la France. Vesna, c’est la traduction de deux langues écrites sur une partition mêlant la beauté et le mystère des résonnances orientales à l’intérêt mani-festé pour rentrer de voix et de corps dans la culture russe.

    Vesna, la découverte d’un duo qui explore de nouveaux horizons musicaux marqués par la voix chaude et profonde de Veronika Buly-cheva, l’influence du blues, de la bossa et de la pop, et la promesse d’une voix, celle de Sté-phanie Acquette, qui lie d’aise l’accentuation française à l’instrumentalisation de la flûte irlandaise et de la guitare.

    A cette composition, il convient d’ajou-ter Jean-Emmanuel Fatna, percussionniste guyanais, qui apporte au tempo la chaleur des rythmes sud-américains.

    Si Vesna, Весна, se traduit par printemps en français, c’est aussi un album en pop-up où Veronika Bulycheva et Stéphanie Acquette révèlent à chaque page tournée la beauté et la sincérité des chants couvrant des âmes et des émotions extraits à la profondeur des steppes et des montagnes russes.

    Ce concert fut donné à La Java, salle de concert située dans le quartier populaire du XIème arrondissement, devant un public heureux d’entendre des chansons issues du répertoire initial de Veronika Bulycheva et d’apprécier les titres enregistrés sur le pre-mier EP de Vesna, dont la magnifique chan-son ‘V DEREVNE’.

    La soirée du 6 mai 2015 restera graver dans la mémoire des gens avides de nouvelle et belle découverte comme l’est le duo fran-co-russe Vesna, Veronika Bulycheva et Sté-phanie Acquette.

    Veronika Bulycheva, un oiseau qui a quitté son nid posé dans un village de l’Oural pour venir voler de ses propres ailes dans le pays de Jean-Jacques Rousseau et de Victor Hugo. Un oiseau qui est venu vivre sa passion le chant russe et l’exprime de la plus belle des manières avec sa voix profondément intense et rythmée par les influences musicales de la pop, du blues et de la bossa. Veronika est une artiste accomplie depuis plusieurs années avec à son actif quatre CD de chants tradi-tionnels russes enregistrés sous le pseudo-nyme Mamouchka. En 2012, une rencontre avec Stéphanie Acquette, une jeune française

    originaire du nord de la France, va provoquer la naissance d’un duo appelé Vesna. Stéphanie Acquette a un parcours atypique : étudiante à Sciences Po à Lille, la fibre artistique apparue l’année de ses huit ans avec l’apprentissage de la musique la rattrape tout d’un coup et elle décide de descendre à Paris. De tempérament ouverte et culturellement curieuse, Stéphanie fait connaissance de musiciens tsiganes et s’intéresse à la musique slave. Sa passion pour la culture russe l’incite à s’inscrire à l’Insti-tut des langues et des civilisations orientales (INALCO) à Paris.

    L’interview révèle une femme dont le cœur bat toujours pour l’Oural et se partage avec la France pour la liberté d’expression artistique, même si ce n’est pas toujours facile, dit Vero-nika Bulycheva. Stéphanie Acquette, c’est la rencontre avec une jeune femme qui voue une passion intime pour la culture russe, mais re-vendique avant tout la France comme sa terre de naissance et de vie.

    Veronika Bulycheva, bonjour. Racontez aux lecteurs du journal La Russie franco-phone votre histoire.

    Veronika Bulycheva  : « Je suis Russe. De culture, je suis un peu ethnique par mes ori-gines. Je suis typée, ce qui fait que les Russes ne me reconnaissent pas en tant que Russe. Je me sens très bien en France et je suis même devenue un peu Française car je suis acceptée comme je suis. Je trouve que je ne parle pas très bien le français et c’est gentil de me faire remarquer que je m’exprime bien dans cette langue.

    Sur la scène de La Java, la grande aiguille de l’horloge s’est arrêtée à l’heure franco-russe, le temps du concert de Vesna. Vesna, un duo

    franco-russe. Un cœur artistique à deux voix porté par Veronika Bulycheva et Stéphanie Acquette.

    Vesna.

    Ils sont venus chez nous 21

  • J’ai appris le français dans la rue avec les gens car j’ai toujours été attiré par les per-sonnes qui parlent bien. Alors, je me collais à eux, je mémorisais tout ce qu’ils disaient et je voulais répéter leurs propos. J’ai appris par cœur un dictionnaire de quarante-six mille mots et je le lisais comme un livre de poche. »

    Stéphanie Acquette, bonjour. Présen-tez-vous à votre tour, s’il vous plait.

    Stéphanie Acquette : « J’ai un parcours très diversifié et j’espère qu’un jour, toutes mes directions prendront sens. Chaque facette enrichit l’être global. Je viens du nord de la France, rien ne me prédisposait à m’intéres-ser à la Russie et à apprendre la langue russe. C’est seulement quand je suis arrivée à Paris que j’ai rencontré la Russie et des personnes qui m’ont appris à aimer leur pays. Ainsi, je me suis inscrite à l’INALCO pour apprendre le russe. J’ai aussi suivi des études de cinéma documentaire à Paris, j’ai travaillé dans une société qui préparait des documentaires sur des musiciens, des artistes de jazz essentiel-lement. J’ai pu écumer tous les clubs de jazz de la capitale et tous les festivals de jazz en France et en Europe. A une période, j’ai fait un détour par le conservatoire de théâtre et finalement, je suis tombée amoureuse de la langue russe que je voulais chanter et em-ployer dans la musique. L’INALCO, c’était

    pour épouser mon objet d’études. »V.B.  : « Le fait que Stéphanie ait appris

    l’histoire, la géographie, l’économie, la langue russe a permis de franchir plusieurs étapes de connaissances, car ce n’est pas moi qui devait le faire. »

    S.A.  :  « Ma rencontre avec Veronika est une rencontre interculturelle. Au départ, il n’était pas évident qu’une Française et une Russe se comprennent à ce niveau-là. »

    Comment vous êtes-vous rencontrée ?S.A. : « A la librairie du Globe que je fré-

    quentais régulièrement, des gens me par-laient souvent de Veronika Bulycheva et me suggéraient d’écouter ses chansons. Nous nous sommes rencontrées lors d’une soirée organisée par une personne qui travaille à la librairie du Globe. Je me suis tout de suite

    rendu compte que Veronika n’était pas la ca-ricature de la chanteuse russe typique et que c’était une musicienne digne de ce nom. »

    Qu’est-ce qui vous a séduit chez Veronika ?

    S.A.  : « Veronika développe et joue une musique originale par rapport à la musique russe contemporaine car elle a une concep-tion du rythme très particulière. C’est une grande artiste de variété internationale au même titre que Sting. Elle est de ces créateurs qui sont capables de travailler des registres différents. Ce qui m’a séduit aussi, c’est son avance par rapport à moi sur la pratique ins-trumentale. Elle m’a prise sous son aile en me transmettant son savoir et en m’aidant à me perfectionner musicalement. »

    Veronika, comment l’avez-vous prise sous votre aile ?

    V.B. : « Cela n’a pas été une entame pro-fessionnelle immédiate. Une vraie rencontre se fait d’une manière naturelle et lente. L’as-sociation des éléments murit tranquillement et nous nous sommes retrouvées à jouer ensemble de la musique. Un jour, il s’est produit que Stéphanie est venue chanter, la situation s’est répétée et cela nous a plu de nous côtoyer pour interpréter la musique en-semble. Ensuite, ça a donné naissance à un projet et maintenant, nous nous investissons beaucoup à long terme avec une production. Le plaisir de départ s’est transformé en un véritable métier. »

    Comment est né le duo artistique que vous composez, Vesna ?

    S.A. : « Nous nous sommes rencontrées, il y a trois ans et on a tout de suite commencé à jouer ensemble. Nous avions envie de trou-ver un nom fédérateur, et à la fin de l’année dernière, nous avons décidé de nous appe-ler Vesna, le printemps en russe. Ce nom évoque l’idée du renouveau, de la fraicheur, d’un nouveau départ dans la vie artistique de Veronika. »

    Cet EP, c’est le premier fruit de Vesna ?V.B. : « Tout à fait. C’est pour cette raison

    que nous lui avons donné le même nom pour pouvoir stabiliser Vesna. Les grands artistes seront de plus en plus souvent amenés à sor-tir des EP car les albums coutent chers à la production. Comme nous avions envie de faire quelque chose de bonne qualité, nous nous sommes consacrées à cinq titres et nous les avons bien faits. »

    S.A. : « Cela fait trois ans que nous jouons ensemble et nous avons très bien rôdé notre duo dans toutes sortes de configurations. Cet EP est une carte de visite pour nous, il montre l’étendue de nos possibilités sonores des différents styles qui habitent Vesna. Cet EP préfigure un album que nous essaierons d’enregistrer l’année prochaine et qui sera

    beaucoup plus orchestré avec d’autres musi-ciens. Cet EP ressemble à une bande démo live avec la formation à trois. »

    Dans les chansons de l’EP, est-ce qu’il y a une influence commune

    à vous deux ?V.B.  : «  Très bonne question  ! Avec Sté-

    phanie, on s’est rencontrées le temps d’étu-dier les sonorités et de se donner le courage nécessaire. J’ai appris qu’elle jouait très bien de la flûte, son registre de voix assez aigue par rapport à moi est très brillant et il m’a inspiré. Nous avons deux voix bien dis-tinctes et avec nos deux présences, Stéphanie joue la basse. »

    A l’écoute de ce premier EP, nous ne res-sentons pas le pathos des chansons russes traditionnelles et folkloriques. Il y a une vé-ritable implication artistique de l’une et de l’autre. Une certaine douleur de l’âme russe se ressent dans les paroles, mais vous les in-terprétez si bien avec la sincérité et l’élan qui vous appartiennent, que nous ne recevons pas cette souffrance comme telle car elle est camouflée par l’association instrumentale et par vos voix qui vont au-delà des émotions.

    Deux mots pour définir cet EP, l’évasion et la découverte. L’évasion pour la qualité littéraire des textes qui font penser à la beau-té des mots et à l’humilité du regard de Jean

    Giono. La découverte pour l’alchimie de vos voix belles et esthétiquement insoupçon-nables.

    Veronika Bulycheva et Stéphanie Ac-quette, un duo dont la flamme n’est pas l’Olympe, mais la flamme de la vie, la flamme de deux cultures réunies pour bril-ler simultanément, la flamme d’une musique sans frontière, la flamme de deux voix faites pour chanter l’amour et les vérités des gens de la terre et du monde.

    Veronika et Stéphanie, je vous souhaite longue route et que vos chansons peuplent nos oreilles de belles paroles et de vraies ren-contres sincères, comme vous l’êtes.

    Stéphanie Acquette. Veronika Bulycheva.

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    Interview

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    L’ouvrage de Catherine de Montlibert sur L’Emancipation des serfs de Russie 1830-18611 est un petit livre d’un grand intérêt. Il a l’avantage, sur un terrain labouré par de très nombreux auteurs, de prendre ce sujet du point de vue de l’histoire intellectuel et de regarder com-

    ment le débat sur l’abolition du servage contribua à la naissance de la figure de l’intellectuel en Russie.

    Ce n‘est pas un livre sur l’histoire économique ou sociale de la Rus-sie, encore que l’on y trouve des notations très intéressantes, en particulier dans le chapitre 1 (Définir le servage) mais aussi dans le chapitre 8 (Objectiver l’impact de l’abolition du servage sur l’évolution des structures du développement). C’est un livre qui traite de comment un débat a permis de créer un espace politique. De ce point de vue, ce livre s’adresse à tous les lecteurs, aus-si bien aux amoureux de la Russie et de sa littérature, car les écrivains sont beaucoup mis à contribution, que les personnes qu’in-téresse l’histoire intellectuelle et le rapport entre le littérateur et sa société. L’un des principaux talents de Catherine de Mont-libert a été de réaliser un livre qui soit ac-cessible à de nombreux publics, un livre qui, dans son style comme dans sa structure, se prête à plusieurs types de lectures.

    Dès l’introduction, l’auteur précise le cor-pus de textes qu’il va solliciter. On y trouve des noms célèbres pour tous les amoureux de la culture russe et de l’histoire, qu’il s’agisse de Nicolas Tourguenieff, Alexandre Herzen ou Pierre Dolgorouki. Mais, à ces auteurs viennent s’ajouter Ivan Tourgue-niev, Nicolas Troubetzkoï et quelques autres. On est en présence d’un échantillon contrasté. Certains de ces auteurs ont exer-cé des responsabilités politiques, mais tous ont mené la vie amère de proscrit. Et tous, cependant, sont des personnes de grande culture, avec des parcours universitaires qui, pour l’époque, sont assez remarquables. Surtout, ils ont tous eu à cœur de s’attaquer à l’institution du servage pour le bien de leur pays ; ils voyaient dans cette institution à la fois une tache et une torsion dans l’his-toire de la Russie par rapport aux puissances européennes. Car, ceci est bien précisé dans

    le chapitre premier, le servage fut une ins-titution qui a empêché la modernisation administrative et étatique de la Russie tout en étant largement le fruit s’un stratégie de modernisation de l’Etat. Ce paradoxe s’ex-plique par la nature essentiellement fiscale du servage. Le servage permet, sur un es-pace immense et relativement vide, l’accu-mulation de la rente foncière entre les mains de quelques uns. Car, la Russie ne s’est pas développée, comme on tend à la dire trop souvent, uniquement à partir des années 1870. Le développement économique, la construction de manufactures, a caractéri-sé les premières années du XIX siècle. Mais, ce développement, et en particulier le déve-loppement d’une industrie importante, ont été bloqués à partir de 1850 par l’institution

    du servage. Plus subtilement, l’organisation étatique est restée sur biens des secteurs en friche justement à cause du servage. L’un des points les plus remarquables de cet ou-vrage est d’insister sur le lien qu’il y aura entre l’abolition du servage et la nécessaire constitution d’institutions locales capables de faire descendre et remonter l’autorité éta-tique. Une lecture dans le cadre de l’histoire des institutions et de la science politique s’avère alors possible.

    Une des points importants dans l’histoire de la constitution d’un espace politique par les combats de certains intellectuels est de montrer le parallèle entre la Russie et les Etats-Unis. Ces derniers, eux aussi, doivent affronter une institution particulière, l’es-clavage. Et si servage et esclavage ne sont pas synonymes, il n’en reste pas moins que dans la lutte contres ces deux institutions en réalité tant la Russie que les Etats-Unis se construisent, ou tentent de le faire, comme des Etats modernes. Il faut d’ailleurs rappe-ler que la Russie fut, et ce n’est sans doute pas un hasard, l’une des puissances euro-péennes qui ne ménagèrent pas leur soutien aux forces de l’Union lors de la guerre de Sécession. De ce point de vue, l’éclairage de l’histoire militaire est intéressant. Le pa-rallèle entre les deux pays est bien abordé dans un ouvrage déjà ancien de Bruce Men-ning[2]. Cet auteur montre bien comment la question de l’institution particulière (ser-vage ou esclavage) a dominé en 1860 le dé-bat sur le soutien aux forces de l’Union par le gouvernement russe, mais aussi sa lecture des combats de la guerre de Sécession.

    On retrouve cet aspect dans la question des intellectuels, mais aussi dans leur rela-tion avec l’espace publique. La création d’un véritable « espace politique » se heurte, en Russie aux pratiques de l’autocratie, et à la censure.

    Naissance de la Russie moderne

    Histoire 22 Histoire 23

  • De nombreux intellectuels sont forcés de s’exiler, que ce soit un exil intérieur ou un exil vers l’étranger. De la naîtra la fameuse distinction entre occidentalistes et slavo-philes, mais qui est une distinction qui porte en réalité – du moins me semble-t-il – plus sur les conditions de liquidation du servage (et de ses conséquences) que sur le principe de l’abolition.

    Certains des auteurs étudies dans ce livre sont des personnages de la communauté russe en exil, comme Nicolas Tourguénieff, qui fut un décabristes (ou partisan de la ten-tative de révolution de 1824) mais qui fut, aussi, un haut fonctionnaire. Il présente une acuité dans le constat qu’il tire de la situa-tion de la Russie à la fin des années 1840 qui a peu d’égal. D’autres, comme Pierre Dolgo-rouki, vont rester en Russie, avoir des fonc-tions relativement importantes, et chercher à construire un Etat moderne où le Tsar tirerait son autorité des lois d’une adminis-tration moderne. De ce point de vue, il faut ici rappeler le caractère paradoxal du pro-cessus d’abolition du servage, processus qui sera mis en œuvre par l’Etat tsariste mais qui implique en réalité une reconfiguration profonde de cet Etat.

    Ici commence le tableau d’une Russie écartelée entre le rêve d’intellectuels que l’on qualifiera de libéraux et qui mettent au premier plan la question de la refonte d’un état de droit et les intellectuels qui sont avant tout préoccupés par la question de la liberté, personnelle mais aussi collective, et qui vont en chercher les racines soit dans une démarche charismatique soit dans une démarche révolutionnaire. Les chapitres sur les successeurs de Nicolas Tourguénieff ou sur Pierre Dolgorouki, et son rôle dans la tentative de constituer une administration territoriale moderne, sont ici particulière-ment intéressants. Ils montrent que même quand ils sont en apparence cantonnés à des petits cercles, en particulier dans l’émi-gration (à Paris), les débats des « grands

    intellectuels » jouent un rôle considérable à la fois dans la construction d’une opinion publique mais aussi dans la construction de représentations (et en particulier sur la question de la conflictualité sociale) qui se font sentir y compris au sein de leurs adver-saires autour de l’administration tsariste. C’est ici que l’on mesure toute l’importance d’une histoire intellectuelle, qui est moins une histoire des idées qu’une histoire des représentations.

    En fait, ce que met en évidence ce livre, c’est la difficulté à construire un « après ser-vage ». Si les intellectuels sont relativement unis dans leur lutte contre le servage, ils se divisent sur les solutions à mettre en œuvre pour stabiliser la société à la fois politique-ment, économiquement et légalement. On entend bien que si le servage a disparu, les contradictions économiques et sociales qui lui avaient conféré son importance au début du XIXè siècle, la question fiscale et celle de l’investissement, n’ont pas disparu. La Russie doit affronter la question de l’in-vestissement alors que l’épargne est faible, et qu’il est dans une large mesure capturé par les conditions mises à la fin du servage. Comme aux Etats-Unis, on mesure que les conditions de l’abolition, qu’il s’agisse de l’abolition de l’esclavage ou du servage, sont au moins aussi importantes que cette abo-lition elle-même. Le choix adopté par la ré-gime tsariste, principe d’un « rachat collec-tif » de leur liberté par les paysans et faible distribution de terre, a largement condi-tionné la suite, et en particulier la trajec-toire sociale jusqu’à la Révolution de 1905. D’autres facteurs sont intervenus, comme la concurrence entre l’empire tsariste et les autres puissances limitrophes, empire otto-man, Autriche-Hongrie ou encore Japon, ou encore le croît démographique important qui va rendre la « faim de terre » de plus en plus insupportable[3]. L’éclatement des posi-tions des intellectuels sur ces divers points, le glissement d’une partie d’entre eux vers une opposition radicale au régime tsariste,

    caractérisera la société russe après 1870. Cet éclatement sera de plus en plus irrémédiable au fur et à mesure que surgira une nouvelle génération, qui ne se sentira plus concernée par la question – pour elle résolue – du ser-vage.

    Ce rapide survol de l’ouvrage de Catherine de Montlibert montre l’extrême richesse de ce dernier. C’est un ouvrage remarquable en cela qu’il s’adresse avec bonheur tant au simple lecteur, intéressé par la culture et l’histoire russe, qu’au lecteur plus spécialisé ayant déjà une bonne connaissance des pro-blématiques économiques et sociales domi-nantes en Russie. Tous y trouveront matière à réflexion, mais aussi seront certainement conquis par un style alerte qui en rend la lecture passionnante comme celle d’un livre policier. En cela, Catherine de Montlibert fait preuve – et ce livre en est témoignage – d’un incontestable talent non seulement de chercheur mais aussi de vulgarisateur.

    [1] De Montlibert C., L’Emancipation des serfs de Russie 1830-186, Editions de Paris, Paris, 2015

    [2] Menning B., Bayonets Before Bullets: The Impe-rial Russian Army, 1861-1914, Indiana University Press, 2000 (paperback).

    [3] Rappelons qu’au début du XVIIIè siècle la popu-lation de l’empire tsariste est équivalente à celle de la France, mais qu’elle sera 4 fois supérieure à la veille de la guerre de 1914.

    Jacques SapirSes travaux de cher