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AGRÉÉE PAR LA FONDATION ABBÉ PIERRE N°34 / 2012 / SOMMAIRE maison dela solidarité 29 rue Edmond dar∫ois 92230 Gennevilliers T 01 47 90 49 03 F 01 47 33 60 93 [email protected] Thor! vous avez p. 1 Edito Accueillir : ils ont osé le faire Retour en arrière… évocation du présent p. 2/3 Roman-photo " Vous avez Thor ! Nous l'avons fait ! " p. 4 La compagnie " Cette compagnie-là " Il était une fois l'homme… Horaires, remerciements Au mois de septembre, la commune du Thor (Vaucluse) a reçu pendant trois jours « C’est pas du luxe ! », premier festival culturel organisé par la Fondation Abbé Pierre et animé par les publics accueillis dans les lieux d’accueil et dans les pensions de famille de son réseau. Au programme : stands, conférences- débats, jeux, animations diverses, pièces de théâtre etc. Toutes ces acti- vités ont été préparées pendant les mois précédents par les publics du réseau, et 300 d’entre eux se sont rendus sur place. Tout s’est bien déroulé ; les accueillis de la Maison de la Solidarité y ont présenté une pièce de théâtre, « Les Energés » , créée, travaillée et mise en scène avec la compagnie de théâtre, « Cette Compagnie-là » . Ils sont rentrés, touchés et enthousiastes. Mais pas seulement eux ! Le succès remporté par le Festival du Thor, à l’initiative de la Fondation Abbé Pierre — qui fait d’ailleurs l’objet de l’édi- to du présent journal et auquel ont participé plusieurs des « accueillis » de notre Maison — peut être salué avec bonheur et peut nous amener, « NOUS AUTRES » de la Maison de la Solidarité, à d’utiles et heureuses réflexions. Sans trop de modestie (il existe des moments où il est légi- time de ne pas l’être), j’aurais tendance à voir, au travers de cette manifestation « vauclusienne », une sorte de confirma- tion de la validité du choix que firent les fondateurs de notre Maison, en imprégnant nos activités d’un « climat culturel ». Je dis « climat » car le but recherché était que chacun puisse être sensible aux propositions faites : ateliers d’écriture, cafés-philo, sorties dans Paris et ailleurs, séjours méditerra- néens, écrits dans les livres, participations à des spectacles, navigation dans les mers du Nord… Souvenons-nous, entre autres, de la présence de très nombreux accueillis auprès de Richard Bohringer lisant leurs textes, et de la prestation de Denis Lavant au Théâtre de Gennevilliers, toujours en liaison avec ces mêmes écrits. Bien entendu, tous les accueillis n’ont pas toujours « mordu à l’hameçon ». Tous n’ont pas participé… MAIS TOUS SAVAIENT QUE CELA AVAIT LIEU ET TOUS EN AVAIENT DES ECHOS. Au moins, de ce point de vue, l’objectif était atteint. L’objectif, puisque le mot est prononcé, quel était-il et quel est-il toujours ? Il s’agit de convoquer des moments où RETOUR EN ARRIÈRE… ÉVOCATION DU PRÉSENT par Benjamin Steinberg ACCUEILLIR : ILS ONT OSÉ LE FAIRE par Régis Toulemonde, président recevoir cette fête mais propose déjà d’ouvrir ses portes pour la prochaine édition ! D’où cette importante évidence : les rencontres changent le regard porté sur l’autre. Même si la comparaison est difficile, c’est également, dans une certaine mesure, ce qui s’est produit à Londres. La tenue des Jeux Paralympiques a modifié la perception des Londoniens (et de bien d’autres) sur les personnes handicapées. Accueil chaleureux des spor- tifs et de leurs familles, ambiance fantastique avec un nombre impressionnant de billets vendus. Les Anglais ont été enthousiasmés. La cérémonie de clôture fut une grande fête fraternelle avec ses 80 000 specta- teurs dans le stade, sans compter l’audience élevée de la retransmission télévisée en direct* . Ces rencontres, quelles que soient leurs formes, sont autant d’occasions de mettre en avant la juste valeur de « l’autre » en donnant la parole à ceux qui en sont privés de par leur isolement et qui en viennent à se sentir « pas comme les autres ». * Aucune chaîne française de télévision publique n’a diffusé la céré- monie en direct. Quelle belle occasion manquée ! Voici ce que Monsieur le Maire du Thor, une fois le festival terminé, a écrit à la Fondation pour exprimer le ressenti de ses concitoyens : … « Je pense que nos concitoyens auront pu se rendre compte par eux-mêmes de l’importance d’accueillir l’autre quels que soient son parcours et ses difficultés de vie. Cet autre apte à développer des savoir- faire utiles à la construction de notre société… » … « J’espère aussi que ce festival aura permis de faire évoluer les représentations portées sur les personnes en grande précarité, ou tout au moins y aura contribué ». Certains (communes, quartiers, riverains) refusent l’installation de lieux d’accueil sous prétexte que les personnes accueillies présenteraient un danger pour l’ordre public. Pour cette même raison, la ville de Cavaillon a refusé au dernier moment d’accueillir le festival alors que la ville de Thor a non seulement osé chaque accueilli peut s’évader le plus loin possible de son état présent et trouver, ou retrouver, une part de sa person- nalité réelle, masquée par une vie trop dure. Cela était-il possible ? Cela est-il toujours possible ? Nous pouvons tous témoigner de pareils moments révéla- teurs. Pour être un peu plus exhaustif, il serait injuste de passer sous silence le bénéfice heureux de ces moments un peu privilégiés, bénéfice tiré par ceux qui ont la chance de ne pas être des « accueillis » et qui animent la vie de notre Maison. Voilà pourquoi je pense que le festival du Thor, moment culturel sans précédent, a, par sa réussite, apporté de l’eau à notre moulin, déjà un peu ancien, mais dont la roue tourne toujours. Nous l'avons fait!

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Numéro 34 — hiver 2012/12 — du journal 'les gens de l'oubli" de la Maison de la Solidarité (Fondation Abbé Pierre) à Gennevilliers. Sujet principal : le festival "C'est pas du luxe" à Le Thor.

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N°34 / 2012 / SOMMAIRE

maisondelasolidarité

29 rue Edmond dar∫ois92230 GennevilliersT 01 47 90 49 03F 01 47 33 60 [email protected]

Thor!vousavez

p. 1 Edito

Accueillir : ils ont osé le faire

Retour en arrière… évocation

du présent

p. 2/3 Roman-photo

" Vous avez Thor ! Nous l'avons fait ! "

p. 4 La compagnie " Cette compagnie-là "

Il était une fois l'homme…

Horaires, remerciements

Au mois de septembre, la commune du Thor (Vaucluse) a reçu pendant trois jours « C’est pas du luxe ! », premier festival culturel organisé par la Fondation Abbé Pierre et animé par les publics accueillis dans les lieux d’accueil et dans les pensions de famille de son réseau.

Au programme : stands, conférences-débats, jeux, animations diverses, pièces de théâtre etc. Toutes ces acti-vités ont été préparées pendant les mois précédents  par les publics du réseau, et 300 d’entre eux se sont rendus sur place.Tout s’est bien déroulé ; les accueillis de la Maison de la Solidarité y ont présenté une pièce de théâtre, « Les Energés », créée, travaillée et mise en scène avec la compagnie de théâtre,

« Cette Compagnie-là ». Ils sont rentrés, touchés et enthousiastes. Mais pas seulement eux !

Le succès remporté par le Festival du Thor, à l’initiative de la Fondation Abbé Pierre — qui fait d’ailleurs l’objet de l’édi-to du présent journal et auquel ont participé plusieurs des « accueillis » de notre Maison — peut être salué avec bonheur et peut nous amener, « NOUS AUTRES » de la Maison de la Solidarité, à d’utiles et heureuses réflexions.

Sans trop de modestie (il existe des moments où il est légi-time de ne pas l’être), j’aurais tendance à voir, au travers de cette manifestation « vauclusienne », une sorte de confirma-tion de la validité du choix que firent les fondateurs de notre Maison, en imprégnant nos activités d’un « climat culturel ».Je dis « climat » car le but recherché était que chacun puisse être sensible aux propositions faites : ateliers d’écriture,

cafés-philo, sorties dans Paris et ailleurs, séjours méditerra-néens, écrits dans les livres, participations à des spectacles, navigation dans les mers du Nord…Souvenons-nous, entre autres, de la présence de très nombreux accueillis auprès de Richard Bohringer lisant leurs textes, et de la prestation de Denis Lavant au Théâtre de Gennevilliers, toujours en liaison avec ces mêmes écrits.Bien entendu, tous les accueillis n’ont pas toujours « mordu à l’hameçon ». Tous n’ont pas participé… MAIS TOUS SAVAIENT QUE CELA AVAIT LIEU ET TOUS EN AVAIENT DES ECHOS.Au moins, de ce point de vue, l’objectif était atteint.

L’objectif, puisque le mot est prononcé, quel était-il et quel est-il toujours  ? Il s’agit de convoquer des moments où

RETOUR EN ARRIÈRE… ÉVOCATION DU PRÉSENTpar Benjamin Steinberg

ACCUEILLIR : ILS ONT OSÉ LE FAIREpar Régis Toulemonde, président

recevoir cette fête mais propose déjà d’ouvrir ses portes pour la prochaine édition !

D’où cette importante évidence : les rencontres changent le regard porté sur l’autre.

Même si la comparaison est difficile, c’est également, dans une certaine mesure, ce qui s’est produit à Londres. La tenue des Jeux Paralympiques a modifié la perception des Londoniens (et de bien d’autres) sur les personnes handicapées. Accueil chaleureux des spor-tifs et de leurs familles, ambiance fantastique avec un nombre impressionnant de billets vendus. Les Anglais ont été enthousiasmés. La cérémonie de clôture fut une grande fête fraternelle avec ses 80 000 specta-teurs dans le stade, sans compter l’audience élevée de la retransmission télévisée en direct*.

Ces rencontres, quelles que soient leurs formes, sont autant d’occasions de mettre en avant la juste valeur de « l’autre » en donnant la parole à ceux qui en sont privés de par leur isolement et qui en viennent à se sentir « pas comme les autres ».

* Aucune chaîne française de télévision publique n’a diffusé la céré-monie en direct. Quelle belle occasion manquée !

Voici ce que Monsieur le Maire du Thor, une fois le festival terminé, a écrit à la Fondation pour exprimer le ressenti de ses concitoyens :

… « Je pense que nos concitoyens auront pu se rendre compte par eux-mêmes de l’importance d’accueillir l’autre quels que soient son parcours et ses difficultés de vie. Cet autre apte à développer des savoir-faire utiles à la construction de notre société… » … « J’espère aussi que ce festival aura permis de faire évoluer les représentations portées sur les personnes en grande précarité, ou tout au moins y aura contribué ».

Certains (communes, quartiers, riverains) refusent l’installation de lieux d’accueil sous prétexte que les personnes accueillies présenteraient un danger pour l’ordre public. Pour cette même raison, la ville de Cavaillon a refusé au dernier moment d’accueillir le festival alors que la ville de Thor a non seulement osé

chaque accueilli peut s’évader le plus loin possible de son état présent et trouver, ou retrouver, une part de sa person-nalité réelle, masquée par une vie trop dure. Cela était-il possible ? Cela est-il toujours possible ?

Nous pouvons tous témoigner de pareils moments révéla-teurs. Pour être un peu plus exhaustif, il serait injuste de passer sous silence le bénéfice heureux de ces moments un peu privilégiés, bénéfice tiré par ceux qui ont la chance de ne pas être des « accueillis » et qui animent la vie de notre Maison.

Voilà pourquoi je pense que le festival du Thor, moment culturel sans précédent, a, par sa réussite, apporté de l’eau à notre moulin, déjà un peu ancien, mais dont la roue tourne toujours.

Nous l'avons fait!

" Vous avez Thor ! Nous l'avons fait ! " est un roman-photo d'une incroyable aventure théâtrale et humaine de la Maison de la Solidarité.

Le groupe est très sympa, ils portent le projet

avec nous, solidaires entre eux, pas de moque-

rie, ils s’entraident. Ils sont très volontaires, on

les sent vraiment comédiens.

mon m2 – ton m2 – son m2

La Batucada de Grenoble déambule joyeusement

sous le soleil parmis les festivaliers du Thor.

Bon app' !

À Valenciennes, Les spermatozoïdes ont de l'humour !

Soutenir un festival pareil, oui, à fond !

…mais je ne veux pas être la marraine d'un

enfant mort-né…

wrouuuuuum…

Départ dans 3 minutes !

" Les energés " entrent en scène

Thor!vousavez

Nous l'avons fait!

" Le m2 " — tel est le défi artistique proposé à chaque festivalier. Toutes nos œuvres transforment la place du Fer à cheval, au cœur de la ville, en installation poétique et éphémère.

On va pas me croire, tiens, prends-moi en photo !

La première fois j’ai eu peur, comme si mon cœur allait sortir

la transpiration… mais après quand tout le monde a applaudi…

TAR

ATA

TAA

AA

AA

AA

AA

AA

AA

A

" Cent poèmes contre la misère " (lu par Marie-Christine Barrault)

La Batucada de Grenoble déambule joyeusement

sous le soleil parmis les festivaliers du Thor.

Il y a six mois que je viens.

J'aime le théâtre, un jour je serai

un grand comédien.

Soutenir un festival pareil, oui, à fond !

…mais je ne veux pas être la marraine d'un

enfant mort-né…

On va où maintenant ? Au pigeonnier ou à la maison de retraite ?

…mais je rigole !

cheeeeeeese…

On a fait 10 h d'autocar, on a répété les

textes dans le bus, c'était très joyeux.

Arrivés depuis 3 minutes !

Après le spectacle, quand on est parti, derrière les chaises

j’ai vu mille couleurs mais les gens me croient pas.

La première fois j’ai eu peur, comme si mon cœur allait sortir

la transpiration… mais après quand tout le monde a applaudi…

Àl'année

prochaine !

TAR

ATA

TAA

AA

AA

AA

AA

AA

AA

A

Tout ce qu’on a vu est beau, nous sommes

très heureux, on aurait du rester 15 jours.

La compagnie « Cette compagnie-là » n’en est pas à son coup d’essai avec la Maison de la Solidarité (en 2011, atelier court sur le thème du Petit Poucet). Cette année, le travail, plus long, est placé sous le signe de l’énergie, d’où le titre du spectacle présenté à Thor « Les énergés ». Et il en fallait une belle énergie pour rassembler un noyau dur d’accueillis, les unir et les contenir malgré leurs contraintes personnelles souvent lourdes !

À l’origine, aucune trame de texte mais des supports poétiques, sociologiques nourris par des exercices corporels qui permettent de faire naître des images, de recueillir des propositions. Ce mouvement collectif laisse la place à ce que chacun est. Ainsi, parmi eux, des musiciens aux expériences multiples  (animations de mariage, dons en percussions) ont pu exprimer leur talent au travers de boîtes à rythmes, guitare basse, ou tout simplement (mais si important !) au travers de leurs voix. « Chacun est une pièce essentielle du puzzle

dans la générosité », témoigne Maïa Nicolas, l'une des comédiennes de la compagnie. La parole est essentielle pour

échanger et étoffer le travail en petits groupes sur les supports de textes. Sans oublier le rire au cœur de la pratique d’Antony Quenet, metteur en scène de ce théâtre contemporain qui ne projette pas un sujet sur les personnes mais alimente son spectacle des personnes.

Au fil des semaines, et environ 85 heures travaillées en ateliers, et après une première présentation à la MLC d’Asnières fin mai, les participants ont donné de plus en plus d’eux-même et ont inspiré le travail des comédiens. Le spectacle se peaufine alors dans l’enthou-siasme pour le festival de septembre : l’enjeu artistique est de taille et tire le groupe entier vers un objectif de création de représentation publique à dimension natio-nale.

Chantal Delval, encadrante et salariée de la Maison, travaille avec le groupe en tant que comédienne et

surtout accompagnatrice du projet. Elle constate avec bonheur la solidarité, l’entraide, la volonté et l’attitude professionnelle des huit accueillis, elle qui craignait un relâchement sur la durée. Le jour de la représentation avec régie lumières et sons, et public nombreux (la Fondation Abbé Pierre, Marie-Christine Barrault, marraine de la manifestation, et anonymes), le stress monte comme pour tout acteur au moment du lever de rideau ! Au point que l’un d’entre eux avant d’entrer en scène, dit  à Chantal : « Viens, on s’en va »  ; mais il est resté ! Car « le relationnel se fait autrement quand on est en groupe dans un projet en dehors de la Maison de la Solidarité, ils sont plus dans l’échange, dans le don et moins dans la demande. » souligne-t-elle.

En dehors du succès manifeste du spectacle, les accueil-lis retrouve la pêche, se sentent « remplis » avec l’envie d’avancer ; certains ont obtenu un stage ou une forma-tion. Anne Cosquer, directrice de la Maison, et porteuse du projet, est d’ailleurs convaincue, pour les personnes dévalorisées en situation d’exclusion, de l’importance des ateliers culturels et de celle en particulier du théâtre, outil essentiel pour l'estime de soi et la confiance. Sans compter l’expérience de voyage et de la découverte d’une région « dont on verra les bienfaits et l’impact direct d’ici quelques semaines sur les personnes, comme les séjours organisés précédemment par la Maison de la Solidarité. »

Son envie est bien sûr de pouvoir renouveler l’expé-rience, à l’instar de Chantal et des participants fiers d’avoir participé à l’aventure. À voir si une deuxième édition du Festival peut avoir lieu, peut-être avec d’autres, ceux qui ne sont pas partis et auxquels le roman-photo du séjour est dédié.

Comédiens « Cette compagnie-là » : Joanna, Maia, Antony, Tonio

http://cettecompagniela.fr (vidéo Petit Poucet)

Comédiens amateurs : Ali, Brahim 1, Brahim 2, Hicham, Issam, Mohamed, Rachid, Saïd.

La force de mettre

un pied devant l’autre.

LA COMPAGNIE « CETTE COMPAGNIE-LÀ »par Pascale Roux

JUSQU'AUHORAIRES D’ACCUEIL

17 décembre 2012 - 31 mars 2013 :

lundi - vendredi : 8 h - 11 h et 12 h - 14 h 18 h 30 - 20 h

Nous tenons à remercier tous nos partenaires pour leur aide précieuse et leur dévouement envers la Maison de la Solidarité.

REMERCIEMENTS

LES GENS DE L’OUBLI - n°34

Directeur de publication et président de l’AssociationRégis Toulemonde

Comité de rédaction : Stéphane Barbanchon, Jeanine Boisard, Olaf Mühlmann, Pascale Roux, Benjamin Steinberg, Ghislaine Valadou.

Notre joyeuse frappeuse de textes : Michèle Maffre

Notre fidèle correctrice : Jeanine Boisard

Pour toute remarque, contactez-nous au 01 47 90 49 03.

Directrice de la Maison : Anne Cosquer

Crédits photos : D.R. Maison de la Solidarité.

Conception graphique : © rübimann design www.rubimann.com

Impression : LNI

Imprimé sur papier 100% recyclé, Cyclus print 115g/m2

IL ÉTAIT UNE FOIS L'HOMME...par Stéphane Barbanchon

Halls de gares, d'immeubles, bouches de métro, trottoirs, cages d'escaliers... Nos yeux y dévisagent à peine la douleur, la solitude, l'errance de ces existences privées de tous les essentiels. Ils sont là, en toute saison, comme fondus dans un paysage familier : décors des lieux de passage, acteurs du dehors, héros inconnus de nos sociétés où l’avoir prime sur l'être. Avoir pour être, nouvelle utopie pour consommer et se consumer sous les lumières de l'apparence...

Citons Milan Kundera : « Nous serons tous transformés en kitsch… Le kitsch, c'est la dernière station entre l'être et l'oubli » (L'Insoutenable légèreté de l'être, éd. Folio). Ces hommes et ces femmes de la rue sont notre kitsch, nos oubliés. Ils n'ont rien, et donc n’existent pas ; sans argent pour se nourrir, se soigner, se vêtir, se loger, sans reconnaissance sociale, ils sont ainsi privés d’accès aux droits les plus fondamentaux. Nos accueils de jour leur permettent de palier aux besoins essentiels tout en construisant avec eux des parcours de vie qui passent par la santé, le logement, l'insertion professionnelle... Le logement est la base indispensable à la réalisation d'une vie autonome. Comment être un individu acteur de sa vie, citoyen à part entière, sans un chez soi ? Pour tenter de répondre avec cohérence à ce besoin primaire, le secteur social, sous l'action du gouvernement précédent, affiche depuis deux ans les quatre lettres du SIAO pour mettre en lumière une notion géniale et pourtant si simple baignée de bon sens : sortir les personnes sans domicile de la précarité des hébergements d'urgences, via des parcours cohérents, pour accéder à des logements durables et adaptés.

LE SIAO, OU SERVICE INTÉGRÉ DE L'ACCUEIL

ET DE L'ORIENTATION, C'EST QUOI ?Un projet porté par le gouvernement et piloté par un collectif d'associations, présent dans tous les départements français sous des formes et avec des objectifs sensiblement variés.

Quelles sont les missions du SIAO des Hauts-de-Seine ?1. Faciliter sur son territoire d'intervention à partir d'une évaluation partagée des situations, l'accès à un logement (hors droit commun) ou à un hébergement pour les personnes sans domicile. Le travailleur social complète le dossier et rédige une évaluation sociale pour positionner la personne demandeuse sur une place la plus adaptée aux probléma-tiques recensées.

2. Coordonner les acteurs qui interviennent auprès de ces personnes afin de proposer une amélioration des prestations proposées et veiller au principe de continuité des prises en charge, c’est-à-dire mettre de la cohérence dans les parcours, uniformiser certaines pratiques professionnelles, et éviter la multiplication des intervenants pour ne pas refaire à l'infini ce qui a déjà été réalisé.

3. Mettre en place un observatoire de l'accès à l'hébergement et au logement temporaire et durable par la mesure et l'analyse d'indicateurs. Cet observatoire doit permettre de remonter les besoins pour aider à la création de places d'hébergement ou de logements autonomes dans les secteurs qui en ont le plus besoin.

4. Être une force de proposition afin de promouvoir l'innova-tion et l'expérimentation sur l'ensemble du parcours résiden-tiel, allant de l'hébergement au logement, ainsi que sur les modalités d'intervention sociale. Cette fonction peut se décliner par l'élaboration de projets.

5. Tirer de ces analyses des recommandations de bonnes pratiques à destination des établissements d'accueil et, dans une perspective d'évaluation et d'amélioration, de ses orien-tations d’ y associer des usagers.

La démarche du SIAO des Hauts-de-Seine tend à remettre l'individu au centre de son projet de vie en proposant une réponse en adéquation avec les spécificités de chacun. L'oublié se singularise. Avoir un toit pour redevenir acteur de sa vie.

Être pour devenir, se projeter pour exister ! C'est peut-être ça, au fond, la force du SIAO : penser l'humain en toute humani-té... Cependant, la mise en place du SIAO des Hauts-de-Seine n'a pas entraîné la création de places d'hébergement et la mise à disposition de logements, dans le parc locatif, en nombre suffisant pour palier aux besoins sans cesse plus importants. Les places d'urgences, pilotées par le 115, sont de moins en moins accessibles aux sans papiers ; en effet, les travailleurs sociaux ne peuvent pas constituer les dossiers pour ce public spécifique puisque ce dernier ne peut prétendre à une place de stabilisation.

Avec toutes les attentes et les interrogations portées par cette nouvelle démarche, il a semblé essentiel à la Maison de la Solidarité de participer à cette nouvelle aventure humaine en intégrant, en octobre 2012, le bureau du collectif associatif pour y faire entendre sa voix et rester vigilant quant aux finali-tés et protocoles mis en place dans ce processus.