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19 NUMÉRO Chroniques d’Archives Patrimoine naturel, patrimoine culturel ... Comme l’an passé, nous avons joué le jeu du thème des Journées du Patrimoine. Le dossier que nous avons préparé vous permettra de continuer les visites que vous aurez faites dans les jardins et autres sites magnifiques de plein air exceptionnellement ouverts à cette occasion. Les archives recèlent en effet des trésors sur les jardins passés et présents du Dauphiné et nous avons pris beaucoup de plaisir à rassembler pour vous ces documents plus beaux les uns que les autres. Jugez-en d’ailleurs vous-même en parcourant Chroniques d’Archives ; vous ne regretterez pas votre détour par nos rayonnages. Et comme les jardins ne sont pas tous princiers ni savants, nous avons fait une place aux plus modestes d’entre eux, les jardins familiaux qui en marge de nos cités permettent à chacun de cultiver son lopin. L’actualité iséroise croise cette année le chemin des frères Champollion et les travaux de la Rencontre Égyptologique, organisée par l’Association Dauphinoise d’Égyptologie Champollion, se tiendront le 27 septembre prochain aux Archives de l’Isère. Nous vous présentons à cette occasion le fonds Champollion, l’un des fleurons du patrimoine du département. Avec ce dix-neuvième numéro, nous avons le plaisir d’inaugurer une nouvelle rubrique, « cotes à l’affiche ». Nous vous y présenterons dorénavant les travaux de recherche effectués à partir des fonds des Archives de l’Isère, les publications qui en résultent et les documents qui les ont permises. Vous aurez l’occasion, au fil des mois, d’avoir un aperçu de leur grande diversité. Je vous souhaite bonne lecture. Hélène Viallet, directrice LETTRE D’INFORMATION DES ARCHIVES DÉPARTEMENTALES DE L’ISÈRE SEPTEMBRE 2014 Dossier / Archives, côté jardin(s) Jardins de châteaux / Jardins botaniques: De l’exploitation des ressources naturelles à leur protection / Les jardins ouverts à tous Le Point sur... Les frères Champollion aux Archives de l’Isère Dans et hors les murs... La Première Guerre mondiale et le service éducatif / Monsieur le maire a rendez-vous avec ses archives Cotes à l’affiche... 84 registres du XIV e s. en ligne / Archives départementales de l’Isère (B 3139) La trouvaille de l’archiviste...

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19NUMÉRO

Chroniquesd’Archives

Patrimoine naturel, patrimoine culturel ... Comme l’an passé, nous avons joué le jeu du thèmedes Journées du Patrimoine. Le dossier que nous avons préparé vous permettra de continuerles visites que vous aurez faites dans les jardins et autres sites magnifiques de plein airexceptionnellement ouverts à cette occasion. Les archives recèlent en effet des trésors sur lesjardins passés et présents du Dauphiné et nous avons pris beaucoup de plaisir à rassemblerpour vous ces documents plus beaux les uns que les autres. Jugez-en d’ailleurs vous-même enparcourant Chroniques d’Archives ; vous ne regretterez pas votre détour par nos rayonnages.Et comme les jardins ne sont pas tous princiers ni savants, nous avons fait une place auxplus modestes d’entre eux, les jardins familiaux qui en marge de nos cités permettent à chacunde cultiver son lopin.

L’actualité iséroise croise cette année le chemin des frères Champollion et les travaux de laRencontre Égyptologique, organisée par l’Association Dauphinoise d’Égyptologie Champollion,se tiendront le 27 septembre prochain aux Archives de l’Isère. Nous vous présentons à cetteoccasion le fonds Champollion, l’un des fleurons du patrimoine du département.

Avec ce dix-neuvième numéro, nous avons le plaisir d’inaugurer une nouvelle rubrique, « cotesà l’affiche ». Nous vous y présenterons dorénavant les travaux de recherche effectués à partirdes fonds des Archives de l’Isère, les publications qui en résultent et les documents qui les ontpermises. Vous aurez l’occasion, au fil des mois, d’avoir un aperçu de leur grande diversité.

Je vous souhaite bonne lecture.

Hélène Viallet, directrice

LETTRE D’INFORMATION DES ARCHIVES DÉPARTEMENTALES DE L’ISÈRE SEPTEMBRE 2014

Dossier /

Archives, côté jardin(s)Jardins de châteaux /Jardins botaniques: De l’exploitation des ressources naturelles à leur protection / Les jardins ouverts à tous

Le Point sur...

Les frères Champollion aux Archives de l’Isère

Dans et hors les murs...

La Première Guerre mondialeet le service éducatif / Monsieur le maire a rendez-vous avec ses archives

Cotes à l’affiche...84 registres du XIVe s. en ligne / Archives départementales de l’Isère (B 3139)

La trouvaille de l’archiviste...

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La belle saison est finie ? Comme y invite le thème des Journées européennes du patrimoine 2014, il n’est cependant pas trop tard pour se promener de jardins en jardins… à travers leur histoire.Dès le Moyen Âge, une grande part des maisons sont vendues ou louées « avec jardin» – tout détail faisant toutefois le plus souvent défaut à propos de ces « appartenances ». Il faut de grands propriétaires, ou des usages bien particuliers, pour que minutes notariales, archives privées ou dossiers judiciaires de l’Époque moderne délivrent des informations détaillées, aujourd’hui précieuses pour la transmission ou la rénovation de ce patrimoine. À compter des XVIIIe et XIXe siècle, les sources se multiplient en même temps que les usages se modifient. La curiosité scientifique, mais aussi le souci de maintenir des espaces de promenade et de loisirs malgré l’urbanisation, entraînent une intervention des acteurs publics qui perdure jusqu’à nos jours, tandis que préoccupations sociales et périodes de crise ravivent en ville ou dans sa proche banlieue la culture de jardins vivriers.

Sur le mode de la flânerie, Chroniques vous proposed’entrebâiller la porte de jardins « privés » disparus.Les quelques cas abordés permettent d’apprécier ladiversité aussi bien que la précision des sources.

Archives, côté jardin(s)Jardins de châteaux

Bail et inventaire du verger et du potager du château de La Plaine (1664)Le 18 décembre 1664, Pierre Scarron, évêque deGrenoble, arrente pour quatre ans le château de laPlaine, à Saint-Martin-d’Hères, avec le jardin et leverger qui l’entourent, à Jean Chabat, de Chevrières,habitant à Grenoble. Le jardinier s’engage à mainte-nir les espaliers bien liés, tenir les arbres émondés,planter les « sauvageaux » qui lui seront fournis, lesentrer et replanter aux lieux qu’on lui ordonnera, les« laborer » quand il sera nécessaire ; cultiver les tu-lipes et autres fleurs sans en rien prétendre, ainsique les asperges (qui lui reviendront ) ; tondre tousles charmes aux saisons nécessaires ; ne prendredes saules que les perches utiles au jardin ( le sur-plus revenant à l’évêque ) ; maintenir les allées biennettes ; « laborer » les arbres de la grande allée,deux fois les pépinières et une fois les arbres nou-vellement plantés.Chaque année l’évêque se réserve toutes les poiresBon-chrétien d’hiver, Portail, Bési d’Héry, Beurréblanc, Sucrin noir, Éminente, Calville d’été. Les poiresCerteau et Rousselet, les abricots et autres fruitsd’été, tant du grand verger que de l’autre jardin, separtagent par moitié entre lui et son jardinier, demême que les pommes Calville d’hiver et Reinettes.L’évêque se réserve les fruits des espaliers, toutesles pêches Auberge et les brugnons. Les autres fruitssont cueillis par le fermier, auquel en revient la moitié.

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Ce dernier doit par ailleurs fournir pour la cuisine del’évêque toutes sortes d’herbes potagères, quatredouzaines de « pommes d’artichaux » la premièreannée et huit douzaines les suivantes, huit douzainesde pieds de cardes bien blanches « aux saisons », unpourceau gras à chaque Saint-Martin, etc.

Une « description et état de ce qui est au jardin deLa Plaine » faite par Louis Bruno, jardinier, en pré-sence de Jean Jullian, meunier au moulin de La Plaine,le 23 décembre 1664, est annexée au bail. Elle re-cense précisément les plantations subsistant en cedébut d’hiver : choux de Milan, chicorée, cardes,céleris, artichauts, laitues, épinards, choux pommés,oignons, persil, oseille,  pois, girolles, poireaux. [4G84, pièce5, protocole du notaire Antoine Bonnet]

A

En acquérant en septembre1687 de Guigonne Malatrat,veuve et héritière deCharles Sivolle, un jardinsitué sur les remparts deGrenoble, près de l’arsenal,et en y plantantconjointement avec Henri deSurville, seigneur d’Eybens,pour plus de cent louis d’ord’oignons de jonquilles, de jacinthes, et surtout deces onéreuses tulipes,« fleurs des plus rares etesquises qui se peut trouver»dont la mode ne passait pas,François Brunet, avocat enla cour, et son beau-frèreJean Mazel, receveur en l’élection de Grenoble,attendaient assurément degénéreux profits. C’était sans compter la « haine» de Pierre Sibille et Jacques Dalphin,apothicaires, dernierslocataires de la parcelle, oùils cultivaient leurs plantespharmaceutiques, et quiprétendaient avoir obtenu

de la demoiselle Malatrat ledroit de préférence dans savente. À la mi-octobre,disposant encore de leurclé, ces individus mettent eneffet à sac les 18 planchesbordées de buis,soigneusement plantées etnumérotées, avec l’aide dedeux comparses et une ragetelle que les poirier,pommier et lilas étendantleurs branches au-dessusdes plantations, ainsi que lacôtière, avec ses « arcs etcercles de bois chatagniers »et « palissons et perches debois saules », des soucheset un pied de jasminsauvage sont égalementdétruits. L’affaire est encorependante le 11 mars 1688 :la sentence rendue à cettedate ordonne peu ou prouune contre-expertise. [13 B 16 et 468, sentenceset dossiers de procédure dela Cour commune deGrenoble].

Apothicairescontre spéculateurs : mise à sac desplanches de tulipesdes sieurs Brunet,Mazel et de Surville(1687)

4 G 84

1 J 1744

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Plans et dépenses pour les jardins du château de Peyrins ( XVIIIe s.)Au XVIIIe siècle, la noblesse provinciale se pique sou-vent d’horticulture. Ainsi, le seigneur de Peyrins(Drôme) ne dédaigne pas de consigner dans son livrede raison une « recette pour cultiver les melons ».Les comptes de Charles puis Paul César Chabrièresde La Roche s’attachent cependant davantage à l’en-tretien du cadre monumental que végétal. Le premierd’entre eux note ainsi :

« Le 31e juilliet 1729, j’ay fait accomoder touttes messtatues de mon canal de Peyrins, de mesmes quecelles de la cour, les deux cascades et les quatres lionsur la porte, le tout m’a couté soit en blanc de Troysoit en huile soit en seruse, que pour le peintre, qua-tre-vingt franc. »

« 1743. J’y fait refaire la muralie et la terrasse ducotté que les eaux pluviales avoit gaté, qui m’a coutésoixente franc. »

Son fils mentionne régulièrement la plantation à Pey-rins – mais aussi dans d’autres de ses domaines –de noyers, d’amandiers et d’arbres fruitiers par di-zaines, de châtaigniers et de barbues par centaines,enfin de milliers de mûriers, achetés ou « pris dans[s]es pépinières ». En 1761 il « fait récurer le grandcanal du jardin et fait un mur à la teste et au tour del’isle, couttant le tout 912 livres ». En 1763 il « faitfaire la moitié du mur du jardin de Peyrins du cotté

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de bize, coutant 300 livres » et l’année suivante « letoit (…) des deux petis pavillons de la basse-cour enardoise » et « dix-huit caisses d’orenger, couttanttout compris 200 livres ». En 1768 il complète l’ou-vrage de 1763, « pour un mur au jardin de Peyrins,du cotté du midi, couttant 459 livres ».

Dans les années 1760-1770, le maréchal de Peyrinsest chargé annuellement de l’entretien des « ferruresdes chars, charettes, brouettes, tombereaux, outilsd’agriculture, de jardin et de masson ».

Après avoir, par convention du 4 juillet 1764, engagéThomas Bénigne Guillot, commissaire ès droits sei-gneuriaux, « pour la rénovation de [s]es terriers,plans geometriques et autres operations », PaulCésar Chabrières de La Roche charge le 28 avril1776 Jean-François Girard, géographe (autrementdit géomètre), de « lever les plans de toutes [s]espossessions et planter des limittes à chaque fond ».« Papiers à plans et couleurs » sont à la charge dugéographe, boussole, chaîne et lunettes de longuevue permettant de mener rigoureusement les opéra-tions d’arpentage sont prêtées par le seigneur. Cesdeux missions se concluent cependant dans la brouille,et les deux beaux plans des jardins qui nous sont par-venus sont tous deux postérieurs.

[142 J 415, 430 et 436, fonds La Sizeranne-Blesson]

Jardins de châteauxArchives, côté jardin(s)

142 J 670

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Plantations du château de Chapeau Cornu(XIXe s.)Au XIXe siècle, à Vigneu, les fruits ont la part belledans le jardin aménagé au pied du château de Cha-peau Cornu. Un plan annoté fait état de près de 2500fraisiers de diverses qualités (Belle de Macheteaux,Reine Victoria, La Reine, Triomphe de Liège, etc.)fournis par Bonnefond, Collomb-Armand, Blanc, Ri-vière et Clerc (d’Oullins), plantés le 28 janvier 1856,et de pêchers (Abricotier, Grosse Mignonne, Pour-prée hâtive, Magdeleine, Nivette, etc.) plantés le 19mars 1857. S’y trouvent également mêlés des abri-cotiers et poiriers de diverses espèces. Un nouveauverger est planté en 1863, associant à des pommiers(Reinette et Calville) quelques cerisiers (Bigarreau).

D’autres pièces du même dossier [15 J 39] attestentle soin par ailleurs apporté au jardin anglais dessinépour Ferdinand de Certeau par M. Luizet (Écully).Son plan paraît perdu, mais sa légende et les fac-tures conservées suffisent à évoquer une belle réa-lisation. Deux livraisons sont en particulier effectuéesles 4 et 26 mars 1847. La première consiste en 6 bal-lots et compte 85 articles : un sophora du Japon, unpeuplier de Caroline, 2 marronniers à fleur double, 2catalpas, un frêne pendant, 3 pommiers à fleur dou-ble, 5 cytises des Alpes, 5 boules de neige, 5 ptéléas,8 althéas variés, etc., etc. La seconde concerne 45plantes vivaces « d’un très joly choix », qui se trou-vaient lors du premier envoi en terre gelée, 2 pivoinesen arbre, en pot, 6 chèvrefeuilles Simper, et desgraines de Reine marguerite unicolor. Le 8 avril 1867sont encore plantés «18 sujets » : 5 épicéas, 5 cèdresDéodora, 2 genêts d’Espagne, 2 chèvrefeuilles, 2althéas et 2 boules-de-neige.

Pagode et autres aménagements « dansle moderne goût » à Moirans ( XVIIIe s.)Moirans, reconnu pour son beau et grand jardin à lafrançaise dit « Parc de la Grille », aurait aussi pu bé-néficier d’un autre espace de promenade, cette foisdans le « moderne goût » anglo-chinois, très en voguedans les décennies 1760 à 1780. Le projet, non réa-lisé, nous en est parvenu incomplet, mais témoigneparfaitement de l’évolution des sensibilités au secondXVIIIe siècle. Il associe à une végétation et des piècesd’eau « pittoresques » des « fabriques » miniatures,dont une ferme en pisé et un « petit kiosque chinois »porté par une grotte artificielle, laquelle paraît biens’inspirer de la « Vue du Kiosque de Rembouillet »(1784) publiée dans le 11e des vingt cahiers de Détailsdes nouveaux jardins à la mode du graveur Georges-Louis Le Rouge.

1 J 1654

15 J 39

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Les premiers jardinsLa création du premier jardin botanique en Dauphinédate de 1782, lorsque l’intendant Christophe Pajot deMarcheval, rend une ordonnance sur les établisse-ments relatifs à la santé publique. Estimant que « laconnaissance des plantes et de leurs propriétés [est]d’une nécessité indispensable, principalement dansl’exercice de l’art de guérir », il décide de créer unjardin botanique porte de Bonne et « [d’y établir] an-nuellement un cours pratique de cette science, par-ticulièrement pour les élèves de l’école de chirurgie,destinés à suppléer les médecins dans les cam-pagnes ». Le premier règlement d’accès au jardins’articule ainsi autour de l’organisation de l’enseigne-ment de la botanique ; la gestion en sera confiée aumédecin Dominique Villars, auteur de l’Histoire desplantes du Dauphiné et professeur d’histoire naturelle.On précise également que le jardin contiendra 3000plantes : 1600 « indigènes » à la province, les autres« exotiques » laissées au choix du professeur mais enprivilégiant celles «employées dans la vie domestique,l’agriculture, la médecine, les arts » [2C 80].

En 1786, on décide de déplacer le jardin à La Tronche,paroisse Saint-Ferjus, afin de lui adjoindre une pé-pinière royale qui regrouperait un peu plus de 45000pieds de 31 espèces différentes, réparties entre unverger, un potager et un labyrinthe.

Le conseil de département de l’Isère envisage dès1791 un nouveau transfert du jardin à l’hôpital desPères de Charité de Grenoble pour le rapprocher des

élèves chirurgiens et médecins, à charge de s’enten-dre avec la municipalité de Grenoble, et il est décidéde fermer la pépinière. En 1793, le domaine de LaTronche a été vendu à Barral, maire de Grenoble, etil devient urgent de déplacer le jardin. L’emplacementchoisi est la maison du dépôt de mendicité, rue duFaubourg Saint-Joseph à Grenoble. Des travaux sontentrepris pour séparer les deux espaces et accueillirle personnel. Le jardin, toujours sous la direction deVillars et entretenu par les jardiniers Liottard, pèreet fils, doit en effet rester ouvert au public.

Le jardin municipalEn 1807, le jardin est confié à la ville de Grenoble parle conseil général. Dans le même temps, les échangesavec d’autres jardins botaniques ou museums se mul-tiplient et la collection de graines est enrichie des en-vois du museum d’histoire naturelle de Paris « pourdevenir utile aux progrès de l’économie rurale fran-çaise » [L 82].

En 1844, la rénovation des fortifications de Grenobleinduit un nouveau transfert du jardin. La municipalitédécide de l’installer dans les quartiers Très-Cloîtreet Saint-Joseph, dans la propriété dite du Bois-Rol-land, où il se trouve encore aujourd’hui. Le jardinprend alors la dénomination de Jardin des plantes etaccueille le nouveau museum d’histoire naturelle. Leconseil municipal justifie ces dépenses en insistant

Jardins botaniques :De l’exploitat ion des ressources naturelles à

3 C 31

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sur le rôle de centre universitaire de Grenoble, sonancien statut de capitale de l’ancien Dauphiné et larichesse de la flore environnante « la plus belle deFrance », mais aussi en soulignant l’effet réel que cejardin et le muséum peuvent avoir « à une époquemarquée par tant de progrès dans les sciences na-turelles et où il n’est presque pas un de ces progrèsqui ne se traduise immédiatement en application, enpratiques fécondes pour le sol, pour l’industrie, pourle commerce ». L’extension du jardin en 1854 pro-voque des tensions entre la municipalité et les rive-rains dont la rue doit être englobée. Ils s’étonnent« qu’une création aussi récente soit déjà insuffisantepour les besoins de l’instruction médicale et bota-nique lorsque lors de sa création, il avait été consi-déré comme deux fois trop grand ». La municipalitédéfend son projet : il ne s’agit pas d’agrandir le jardinbotanique mais d’y annexer « un jardin paysager »car « séduite par ce bel emplacement […], par le ma-gnifique coup d’œil dont on jouirait […], l’administra-tion a voulu […] agrandir la partie pittoresque dujardin des plantes et y créer une promenade pour lequartier qui en manque » [2 O185/26]. Le projet estfinalement réalisé et le Jardin sera encore augmentéd’un jardin fruitier, d’une orangerie, de serres… En1922 la faculté des sciences s’associe à la municipa-lité de Grenoble pour la gestion du Jardin, avant quecette dernière ne la confie à son service Promenadeset Jardins dans les années 1950.

leur protect ion

2 C 869

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L’expérience iséroise du jardin alpin de ChamrousseC’est à une initiative privée, soutenue par les pou-voirs publics, que la France doit son premier jardinalpin. En 1892, Henry Correvon, président de l’Asso-ciation pour la protection des plantes et créateurd’un jardin alpin en Suisse, et Allemand, jardinier enchef de la ville de Grenoble chargé notamment duJardin des plantes, tiennent une conférence sur lesplantes alpines et leur protection. Ils s’inquiètent eneffet des dangers de la déforestation associée au pil-lage des plantes par les amateurs, les botanistes etles marchands. La Société desTouristes du Dauphiné,soutenue par la Société horticole dauphinoise, pro-pose en 1893 de créer un « jardin alpin » qui conser-verait en un seul lieu le plus grandes nombres deplantes alpines et choisit de l’installer sur la mon-tagne de Chamrousse, au lieu-dit de Roche-Béran-ger, dans le massif de Belledonne. Enthousiastes, lescommunes de Vaulnayes-le-Haut, Vaulnay-le-Bas,Brié-et-Argonne et Herbeys acceptent de lui louerpour 29 ans 5000 m² de pâturages communaux en in-divis, « considérant que l’établissement d’un jardinalpin est d’une utilité incontestable pour le pays, lascience, l’alpinisme » mais servira aussi « à des ex-périences agricoles » [2O185/47]. La municipalité deGrenoble vote une subvention de 500 francs en fa-veur du projet. Le jardin bénéficie pour fonctionner desubventions du conseil général, de l’État –ministèresde l’Instruction publique et de l’Agriculture –, de laville de Grenoble et de la Société horticole dauphinoise.

Jean-Paul Lachmann, professeur de botanique àl’université de Grenoble à qui la Société confie la di-rection du jardin, y ajoute une mission de recherche.Il s’applique en effet à faire du jardin un établisse-ment scientifique, lieu d’études et d’expériences, etpas seulement un conservatoire. Dès 1893, un jardi-nier sur place effectue des relevés météorologiquesqu’il met en regard avec la croissance des plantes.En 1894, le jardin commence à échanger des grainesavec le réseau des jardins botaniques français etétrangers.

En 1898, la Société préfère alors céder le jardin à laFaculté, qui lui semble plus à même d’en gérer l’as-pect scientifique. Mais la chaire de botanique ne dis-pose pas des moyens suffisants pour entretenir lejardin et son titulaire doit renoncer à se rendre surplace pour raisons de santé. Enfin, l’accès difficile etles logements sommaires ne permettent ne permet-tent pas un entretien et une surveillance continuelsdu jardin. Le jardin est délaissé progressivement audébut des années 1900. Il sera finalement remplacépar la refondation du jardin alpin du Lautaret, égale-ment géré par l’Université, après la Première Guerremondiale.

Si l’étude et la protection de la flore alpine consti-tuent la première raison d’être du jardin, on y associepresque aussitôt des motivations plus « pratiques »de recherche et d’acclimatation d’espèces fores-tières, fruitières, potagères et fourragères suscep-tibles d’améliorer la vie de la population de la hautemontagne [21T196].

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Jardins botaniques 

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Jardins publics : une respiration dans la ville Les jardins privés et les jardins botaniques n’étaientouverts qu’à un public restreint. Faute de pouvoir y accéder, la population se prome-nait alors aux abords des remparts et se rassemblaitaux portes des villes, dans les espaces dégagés deprairies ou de plaines. Avec le développement urbainles espaces de jardins deviennent moins nombreux etle besoin d’espaces verts ouverts à la population sefait sentir. Le jardin de l’hôtel de Lesdiguières passepour le plus ancien jardin public de Grenoble. Il estvrai qu’il est devenu ce parc aujourd’hui connu sousle nom de Jardin de Ville. En effet, les derniers ducsde Lesdiguières, propriétaires de l’hôtel et des jar-dins, n’y résidaient pas souvent et acceptaient queles habitants se promènent dans le bois et sur lesterrasses de leur propriété, ce qui fut continué souslesVilleroy, héritiers et successeurs des Lesdiguières.Les avantages d’une promenade ouverte à tous a étéle principal motif de l’achat par la ville de Grenoblede cet hôtel de Lesdiguières et du parc attenant, lorsde sa mise en vente par les Villeroy en 1719 : « uneacquisition […] qui, par le service qu’elle rendra aupublic, en lui conservant une promenade qui n’est pasmoins nécessaire à la santé des habitants qu’à la dé-coration de cette capitale » [AMG BB 231]. Dès lors,il est possible de suivre, grâce aux délibérations mu-nicipales, les transformations et l’entretien de ce jar-din de ville qui, en plus d’être un lieu de promenadeapprécié, accueillait également des réjouissances

Les jardins ouverts à touspubliques telles que bals ou concerts mais aussi desfoires dont la plus importante était depuis 1780 lafoire des Rameaux tenue à cet endroit jusqu’à la findu XIXe siècle. Durant tout ce siècle, le développementde l’urbanisation va de pair avec celui des jardins pu-blics. Ils sont non seulement des lieux de promenademais aussi de convivialité et un élément clé des poli-tiques urbaines. La plupart du temps, il s’agit de jar-dins de propriétés devenues bien national à laRévolution ou achetés à des particuliers : « Vu le pland’extension, d’aménagement et d’embellissement dela ville, considérant que la propriété dont il s’agit[ propriété Veuve Delaunay] est unique à Bourgoinpour être affectée à un jardin public d’agrément quimanque évidemment dans la ville pour l’hygiène pu-blique et le bien-être de ses habitants […], en consé-quence décide l’acquisition de la propriété dont ils’agit en vue de sa transformation en jardin public,autorise et donne tous pouvoirs au maire pour pour-suivre, au besoin par expropriation, l’acquisition decette propriété en vue de lui donner cette destina-tion. » Il est précisé plus loin que « cette acquisitionn’interviendra  évidemment que lorsque la ville sesera procuré les ressources nécessaires… »[délibération municipale du 18 juin 1931, 2 O 54/5].Nombreuses sont les cités à construire un kiosque àmusique, lieu de concerts et de sociabilité. La créa-tion et l’entretien des jardins publics étant du ressortdes communes, c’est dans les archives de ces der-nières qu’il faut rechercher les renseignements surl’histoire de ces espaces.

Archives, côté jardin(s)

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désignation de jury, remise de prix en grande pompe,élaboration de brochures et de diplômes abondam-ment illustrés, etc..

Et qui dit administration dit archives ; on ne peut quese féliciter de pouvoir par elles admirer les jardins,parterres et autres lieux décorés de plantes et defleurs, qui sinon ne laisseraient aucune trace. L’his-torien peut aussi mesurer l’évolution de la société surplusieurs décennies grâce à ces documents. À tra-vers les circulaires de la préfecture et celles duconseil général depuis la décentralisation, à traversles articles de journaux, se lit l’évolution des attentesvis-à-vis du fleurissement et du concours des mai-sons et villages fleuris : en 1961, les campagnes defleurissement doivent transformer villes et villages en« cités aimables et coquettes » ; en 1964, elles ten-dent « à placer la France, pour ce qui concerne l’ac-cueil fleuri, au niveau de certains de ses voisins » ;en 1999, elles sont là pour « mettre en valeur le patri-moine et améliorer le cadre de vie » ; en 2014 enfin,elles s’associent à « une gestion respectueuse del’environnement » et assument un « rôle social ». Onsera aussi frappé par l’implication des élus, nomméspar le président du conseil général pour présider lesjurys. Leur rôle, lors d’une grande cérémonie an-nuelle, est de remettre prix et diplômes et de pronon-cer un discours. En 1975, on relevait ainsi le nomd’Aimé Paquet, conseiller général, médiateur de laRépublique et ancien député.

Transformer la France en jardin ?Même un sujet a priori « léger», le fleurissement, n’apas laissé indifférent l’État (par le biais de la préfec-ture) et les collectivités territoriales. Depuis la fin desannées 1950, ces administrations ont eu la volontéd’intervenir via les campagnes annuelles « pour fleu-rir la France » et les concours de fleurissement afinde soutenir et d’encourager les initiatives privées etpubliques. Toute une organisation, très hiérarchisée,pour le concours des villes, villages et maisons fleuriesa été mise en place depuis 1959 : création de comitésnationaux, régionaux et départementaux, définitiond’une multitude de catégories (communes de moins500habitants, de 501 à 1000, de montagne, de plaine,…),

Afin d’offrir aux visiteursun autre regard surl’histoire des jardins auMoyen Âge, le jardin dumusée de Saint-Antoine-l’Abbaye, propriété duConseil général de l’Isère,vient en effet d’êtreréaménagé. En l’abbaye de Saint-Antoine, maison-mère desHospitaliers, les jardinsétaient une ressourceessentielle pourl’élaboration de remèdesnécessaires aux soinsprodigués. Les plantes présentées aucœur du jardin durant cesdix dernières annéesétaient, pour la majoritéd’entre elles, conformes à celles utilisées autrefoispar les hospitaliers deSaint-Antoine pour laconfection des onguents,emplâtres et décoctions, àbase de vin, de miel ou defarine d’orge, destinées auxmalades atteints du mal desArdents. Elles avaient étéchoisies selon les traitésd’herboristes, les herbiersde botanistes ou lesrecettes d’apothicairesrédigés entre le XVe et leXVIIIe siècles.Profitez de la réouverturedu jardin médiéval pourassocier le parcours audiscours !http://www.musee-saint-antoine.fr/826-jardins.htm

Renaissance du jardin du muséede Saint-Antoine

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Dossier

Avec la révolutionindustrielle et laconcentration urbaine, deplus en plus d’habitantsn’ont plus de possibilité decultiver un potager. C’est pour palier ce manqueque sont apparus lespremiers jardins ouvriersdans le nord de la France.Ils se généralisent peu àpeu, bientôt encadrés parune réglementation. Ils permettent, en plus de procurer aux familles desressources alimentaires,« aux ouvriers d’échapper à leurs taudis en profitantd’un air plus respirable, ils les éloignent aussi descabarets et encouragent lesactivités familiales au seinde ces espaces verts »(Abbé Lemire, député-maired’Hazebrouck et initiateurdes jardins ouvriers dans ledépartement du Nord). Ils’agit de parcelles prêtéesou louées à des famillesouvrières qui ne possèdentpas de jardin et géréesdans un cadre associatif.

Si des municipalités sont souvent à l’origine de ces associations, des entreprises ou desgroupements professionnelsle sont également, d’où laprésence de dossiers dansleurs fonds d’archivesrespectifs. En raison des difficultés deravitaillement, la PremièreGuerre mondiale et surtoutla Seconde vont donner uncoup d’accélérateur audéveloppement des jardinsouvriers. Le régime de Vichyen particulier, tant pour des raisons économiquesque dans le cadre de la Révolution Nationale,encourage et encadre leurcréation ( loi des 18 août et 25 novembre 1940). Et c’est sans surprise quel’on trouvera les dossiersles plus intéressants sur le sujet dans les archives duservice du Ravitaillement.Avec la fin des restrictionsle nombre en a beaucoupdiminué, induisant en 1949la dissolution de l’Union des

Associations de jardinsouvriers de l’Isère, créée en1942. Le conseil généralcontinue cependantd’attribuer des subventionsaux communes qui aident àla réalisation de ces jardins,appelés depuis 1952, dansles textes sinon dans lesfaits, familiaux et non plusouvriers.Signalons aussi les « cités jardin » dont il existequelques exemples enIsère : ce sont desensembles d’habitations à loyers modérés organisésautour d’espaces vertscommuns et de jardinsprivatifs. Comme les jardinsouvriers, elles ont étéconstruites dans lapremière moitié du XXe siècledans des communes à fortepopulation ouvrière, telle la cité Bourgeat aux Abretsou celle de la Viscose àÉchirolles.

Les jardins ouvriers

Archives, côté jardin(s)

9 Fi 29

Coll. Musée de la viscose, Ville d’Échirolles

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Samedi 27 septembre, les Archives accueilleront uneRencontre égyptologique, manifestation organiséepar l’Association dauphinoise d’égyptologie Cham-pollion à l’occasion de ses vingt ans d’activité.

Une relation étroite lie en effet les Archives dépar-tementales et l’ADEC: la présence dans les fonds desArchives des 65 volumes de correspondance et d’ar-chives des frères Champollion. Cet ensemble, acquisen 2001 par le département en même temps que lapropriété familiale de Vif, et qui appartenait à l’aînédes frères Champollion, Jacques-Joseph (1778-1867 ), est l’un des fonds les plus remarquables desArchives de l’Isère et du patrimoine écrit français.Parmi ces volumes, plusieurs concernent les re-cherches de Jean-François Champollion (1790-1832),le père de l’égyptologie. Des centaines de lettreséchangées avec son frère entre Paris et Grenoble,depuis l’Italie (1824-1826) puis l’Égypte (1828-1829),et avec de nombreux savants français et étrangersrestituent toutes les facettes de l’activité scientifiqueet intellectuelle des deux hommes dont les centresd’intérêt étaient multiples. Elles dévoilent aussi l’in-timité de ces deux personnages et de leur famille.

Natifs tous les deux de Figeac (Lot) où leur grand-père, colporteur originaire du Valbonnais, s’étaitétabli vers 1770, les deux frères Champollion,Jacques-Joseph et Jean-François, ont passé unepartie de leur vie en Isère. C’est à Grenoble queJean-François fait ses études sous la houlette deson frère aîné, Jacques-Joseph. C’est à cette époque

que va naître sa passion pour les langues ancienneset pour l’Égypte. Et c’est à Vif qu’il viendra réguliè-rement passer l’été afin de se délasser de ses tra-vaux.

Si l’œuvre égyptologique de Jean-François Champol-lion, mort prématurément en 1832 à l’âge de 42 ans,est mondialement connue, il faut rappeler que sonfrère aîné, surnommé Champollion-Figeac, archéo-logue et grand érudit, fut conservateur de la biblio-thèque de Grenoble et professeur à l’université decette ville. Après une période de disgrâce du fait deses opinions politiques durant la période des Cent-Jours en 1815, il est appelé en 1828 à de hautesfonctions à Paris : il est nommé conservateur desmanuscrits à la Bibliothèque royale et professeur depaléographie à l’École des Chartes. Sa carrière serainterrompue en 1848, une nouvelle fois pour des rai-sons politiques. En 1852, il fut nommé conservateurde la bibliothèque du château de Fontainebleau, sondernier poste.

À l’exception de courtes périodes où les deux frèresvécurent ensemble, (adolescence de Jean-François,années d’exil à Figeac, étés à Vif ), Jacques-Josephet Jean-François restèrent étroitement liés grâce àun échange incessant de lettres pendant trente ans.La lecture de cette correspondance nous révèle no-tamment la riche personnalité de son frère aîné, re-jeté dans l’ombre par la célébrité de son cadet. Il futpourtant son tuteur et demeura toute sa vie sonmentor, l’encourageant inlassablement dans ses

Le Point sur...

Les frères Champollion aux Archives

Champollion – Vol35

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recherches et lui apportant tous les contacts etappuis nécessaires à sa vie sociale. Sans Jacques-Joseph qui fut toujours étroitement associé à sestravaux, Champollion le Jeune ne serait pas parvenuà déchiffrer les hiéroglyphes, à publier le résultat deses recherches, à pouvoir faire le voyage d’Égypte…

Afin de permettre la consultation et la valorisationde ce fonds d’archives, qui n’est pas accessible ac-tuellement en raison de sa fragilité et de l’absenced’inventaire, une collaboration originale s’est instau-rée depuis 2010 entre l’ADEC et les Archives dépar-tementales : le dépouillement intégral des milliers delettres et de documents par une jeune égyptologueconstituera à terme une base de données extrême-ment riche, préalable obligatoire à la numérisationdes fonds. Ce travail de bénédictin qu’il convient desaluer car les difficultés sont grandes, allant du dé-chiffrement de plusieurs écritures jusqu’à l’identification des correspondants, couvre maintenant la moitié des volumes. D’ici quelques années, les 65 volumes dont certains devront être restaurés, seront consultables par tous les chercheurs sous forme numérique. Une mine pour la recherche !

de l’Isère

Champollion – Vol35

8° 1058

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Monsieur le maire a rendez-vous avec ses archivesUne lettre signée du préfet, envoyée via les Archivesdépartementales de l’Isère, vient d’être remise aumaire tout fraîchement élu. Dans le tourbillon des dé-cisions urgentes qui accompagne la prise de fonctiondu maire, le préfet lui demande au contraire de pren-dre du temps et l’invite à la visite… de sa mairie, pouraller à la rencontre des archives communales !

« que monsieur le maire convie l’ancien édile et desélus à le suivre, précise le courrier préfectoral, etque se munissant du plan du bâtiment, de crayons etde papier, voire même de lampe torche et d’appareilde photo, il parte à la recherche des archives. Ainsiil pourra mener à bien la grande opération de réco-lement ».

« Récolement » ? Mais que signifie au juste ce mot ?Est-ce obligatoire ? Comment procéder ? s’interrogenotre nouveau maire.

Grâce aux renseignements fournis par le site internetdes Archives de l’Isère, ces points sont rapidementet dûment éclaircis : « le récolement est un état deslieux des archives ; il consiste en l’établissement d’uneliste détaillée des documents les plus importants avecleur localisation ; il est réalisé lors du renouvellementde l’exécutif. Il engage la responsabilité des maireset de ce fait aucun maire (élu ou réélu) ne peut s’endispenser. »

Il ne reste plus qu’à passer aux travaux pratiques.

On ouvre les armoires du secrétariat, on grimpe surdes chaises, on accède aux placards les plus élevés, onescalade des échelles, on traque les recoins oubliés,

on vérifie la cave, on contrôle le grenier, on secouela poussière, on note scrupuleusement tous les do-cuments importants (délibérations, registres parois-siaux, état civil, plan cadastral).

Et si cette quête des archives s’avère trop aventu-reuse et compliquée, le nouveau maire jurera « plusjamais ça ! » et prendra les mesures qui s’imposent :contacts avec les ADI pour obtenir les meilleursconseils, aménagement d’un vrai local pour les ar-chives et classement des dossiers. Le prochain réco-lement, dans 6 ans, ne sera plus qu’une promenadede santé !

Et les photos prises à l’occasion de cette visite de lamairie (nid de guêpes dans les boîtes d’archives,tapis de mouches mortes, filaments de toiles d’arai-gnée, …) et exposées en permanence sur le bureaudu maire soutiendront sans faillir ces bonnes réso-lutions !

Hors ou dans les murs

La Première Guerre mondialeet le service éducatifDans le cadre du centenaire de la Grande Guerre, leservice éducatif des ADI a préparé des ateliers des-tinés aux élèves du primaire comme du secondaire.Les thématiques abordées sont variées : l’entrée enguerre des Isérois ; le soldat, le front et la guerre ;le contrôle de l’opinion ; la mémoire de la guerre…Tous ces ateliers utilisent les fonds variés et trèsriches des ADI afin de permettre aux enfants d’ac-quérir « le goût de l’archive » et surtout de « faire del’histoire » : questionner des documents de nature di-verse (affiches, photographies, articles, correspon-dances, rapports…), comprendre et expliquer…

Contact : [email protected]

10 Fi 222

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[8 B 254 à 8B277] et [8B609 à 8B631]: quarante-sept comptes, principalement des recettes desTerresde La Tour (1311-1336), Viennois (1343-1350), Grési-vaudan, Briançonnais, Embrunais, Gapençais, Champ-saur et Baronnies (1317-1349) ;

[B 2809 à B 2814] : six comptes des gabelles, péageset monnaies (1339-1349).

Cette mise en ligne n’est qu’une étape, ou un outil,pour favoriser l’accès, la transcription et l’étude deces sources, et ainsi accroître les connaissances surle fonctionnement des « États » médiévaux, à compa-rer avec celle de leurs voisins, Empire, Italie, Franceet Aragon. Journées d’étude et colloques les accom-pagnent depuis 2011.

De la venue de Jeanne(B 3139)Le traité de adventu Iohanne est un texte exception-nel par sa date et son approche : achevé en juin 1429,au moment même des grands succès de Jeanned’Arc, il s’appuie sur une argumentation des plus ri-goureuses, selon les critères universitaires de sonépoque, pour légitimer et justifier l’intervention di-vine en faveur de Charles VII que constitue l’irruptionprodigieuse de la Pucelle. L’édition scientifique parOlivier Hanne de cet ouvrage composé en latin parle juriste et théologien Jacques Gélu, conseiller duroi et archevêque d’Embrun, s’appuie sur le manus-crit conservé aux Archives départementales de l’Isèresous la cote B3139, considéré comme le plus completet le plus proche de l’auteur, ainsi que sur les ma-nuscrits de la Bibliothèque nationale de France latin6199 et Dupuy 639, qui en sont les deux seules au-tres versions connues. Présentation, traduction etindex rendent pour la première fois ce texte étonnantintelligible et accessible dans son intégralité.

Jacques Gélu, De la venue de Jeanne, un traité sco-lastique en faveur de Jeanne d’Arc (1429), éd.OlivierHanne, Aix-en-Provence, Presses Universitaires deProvence, 2012 [ADI : BIB_8°5605]

Une présentation synthétique due à l’éditeur lui-même est également accessible en ligne :

http://halshs.archives-ouvertes.fr/docs/00/99/58/22/PDF/Jacques_GA_lu.pdf

Cotes à l’affiche

B 3139

84 registres du XIVe s. en ligne Dans le cadre du programme « Genèse médiévaled’une méthode administrative » (GEMMA), financépar l’Agence nationale de la Recherche (ANR), lesArchives départementales de l’Isère associées àl’Université Pierre-Mendès-France (Grenoble 2) ontsélectionné et numérisé 84 registres de comptes duXIVe siècle issus du fonds de la Chambre des comptesde Dauphiné. Le résultat de cette numérisation est désormais ac-cessible sur le site « Ressources comptables en Dau-phiné, Provence, Savoie et Venaissin (XIIIe-XVes.) »

http://ressourcescomptables.huma-num.fr/.

Les cotes retenues représentent l’intégralité des re-gistres comptables « centraux » conservés pour leXIVe siècle en Dauphiné, ainsi qu’un échantillon repré-sentatif des comptes des châtelains et autres offi-ciers de la même période :

[9B1 à 9 B30/1] : trente-et-un comptes des tréso-riers et receveurs des dauphins Jean II (1317-1318),Humbert II (1333-1336), Charles I (1355-1368) etCharles II (1369-1405) ;

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Du côté desarchives communales

AUX ARCHIVES DÉPARTEMENTALES

* Fitilieu [4 E 661] 3.80 ml : Le fonds déposé de la commune a été classé et répertorié. Ce dépôt est composé de parcellairesroturiers et nobles de 1708 etd’un courcier 1708-1790, maisaussi d’un intéressant fondsd’archives du XIXe siècle avecnotamment des recensements de

Archives à voix haute !Pour les Journées du Patrimoine2014, les 20 et 21 septembre, des visites des coulisses des Archives sont organisées.Une animation sera à cetteoccasion proposée : descomédiens de la CompagnieZéotrope liront et mettront en scène des textes datant de la Première Guerre mondiale, en particulier descorrespondances, tandis qu’unmusicien mettra ces mots enrésonnance. Réservation indispensable au 04 76 54 37 81

Fermeture de NoëlCette année la fermeture annuelle au public de notre sallede lecture a été répartie sur deux périodes : la semaine du 15 août et celle de Noël. Les archives seront donc fermées du 26 au 31 décembre,réouverture le 2 janvier au matin.

Compteurs d’archives

la population 1841-1911, desrecensements militaires (classes1816-1906), des listes électorales(1831-1906), sans compter lesbudgets, les dossiers de travauxeffectués tant sur la voirie quesur les bâtiments communaux.

Registres paroissiauxUne analyse plus fine a permis de corriger des erreurs et de réaffecter des registres à labonne paroisse :* Proveyzieux : le registre 1616-1625 conservé dans la collectioncommunale de Saint-Jean-le-Vieux* Saint-Jean-le-Vieux : le registre1605-1626 conservé en 5E et attribué par erreur à Theys.

Centenaire dela Guerre 1914-1918Un nouvel inventaire des dossiersindividuels d’étrangers durant la Première Guerre mondiale [61M17-25] permet de retracerla présence d’environ 1400ressortissants allemands, austro-hongrois, turcs (dont lesArméniens et les Grecs), suisses,italiens, algériens et travailleurscoloniaux… À leur arrivée dans une nouvelle commune, les étrangers avaient l’obligation de se déclarer en mairie. Ces déclarations ont ététransmises à la préfecture del’Isère puis versées aux Archivesdépartementales.

Pratique

POUR NOUS JOINDRE

Par courrier : Hôtel du département, 7 rue Fantin-Latour, BP 1096 38022 Grenoble cedex 1Par couriel : [email protected]

Direction / Hélène VialletResponsable de la publication / Natalie BonnetPhotographies /Jean-Paul Guillet

04 76 54 37 81www.archives-isere.fr

Vous avez pu admirer, au fil despages de ce numéro, de ravissantesfleurs. Il s’agit du catalogue, formé de vingt planches de dessins,d’un marchand-colporteur de l’Oisans et datant du début duXIXe siècle. Certains colporteurss’étaient en effet fait une spécialitédu commerce des graines et semences. Ce document a étéacheté par le département del’Isère pour les Archives en 1999. Il est depuis en dépôt au Musée Dauphinois.

Ce défilé des belles de l’Oisans se clôt sur l’apparition d’une inconnue au(x) teint(es) resplendissant(es) et au maintienpossiblement azaléique. D’où un appel à la communauté botaniste aux fins d’identification.

La trouvail le de l’archiviste

1 J 1744