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Optimiser le déploiement des énergies renouvelables Publié sur le site « Sauvons le climat » le Vendredi, 27 juillet 2012 16:26 Écrit par Hervé Nifenecker mieux faire pour moins cher [1] par Hervé Nifenecker La France s'est engagée à produire 23% de sa consommation d'énergie finale par des renouvelables et à réduire de 20% ses émissions de CO2, d'ici 2020. Il apparait qu’en concentrant ses efforts sur les énergies renouvelables chaleur elle pourrait obtenir ce résultat de façon beaucoup plus profitable à son économie qu’en les orientant principalement, comme l’avait prévu le Grenelle de l'environnement, sur les énergies renouvelables électriques. RESUME Pour contribuer à la réalisation de cet objectif il est possible d’agir en développant la part des énergies renouvelables dans la production de chaleur (solaire direct, biomasse, géothermie de surface), dans celle de l’électricité (hydraulique, mais surtout éolien, photovoltaïque) et, en matière de transport, dans les agro-carburants. Le choix de donner une priorité à l’électricité renouvelable a été fait par le Grenelle de l’environnement, à l’instar du Danemark, de l’Allemagne et de l’Espagne. La présente étude conteste ce choix techniquement discutable et démontre que d’autres solutions peuvent permettre d’atteindre l’objectif assigné dans des conditions économiques bien plus satisfaisantes. L’étude montre qu’en France la réalisation complète du programme de production d’énergie renouvelable électrique selon le Grenelle, se traduira dans les années à venir par des investissements supplémentaires de près de 45 milliards d’euros - sans compter les coûts de raccordement, les coûts de renforcement des réseaux électriques et les coûts des installations substitution; mais ces investissements resteront sans effet notable sur nos dépenses en combustibles fossiles et donc sur nos émissions de gaz à effet de serre [2] . La perversité du concept d’obligation d’achat à un prix fixé par l’administration a débouché, dans l’Europe entière, sur la création de bulles spéculatives en phase d’explosion pour le photovoltaïque et se profilant à l’horizon pour l’éolien. Par ailleurs en favorisant des technologies peu compétitives ce concept va très significativement renchérir le coût de l’électricité et faire perdre à notre pays l’un des rares avantages compétitifs dont il dispose encore [3] . L’étude pose également la question de savoir si la France a les moyens de se lancer dans des investissements dont la seule justification économique pourrait être de tenter, avec un grand retard, de créer de nouvelles filières industrielles alors que le marché mondial concerné par ces produits connaît des difficultés importantes, surtout en Europe, la Chine y prenant une part prépondérante.

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Optimiser le déploiement des énergies renouvelables Publié sur le site « Sauvons le climat » le Vendredi, 27 juillet 2012 16:26

Écrit par Hervé Nifenecker

mieux faire pour moins cher [1] par Hervé Nifenecker

La France s'est engagée à produire 23% de sa consommation d'énergie finale par des renouvelables et à réduire de 20% ses émissions de CO2, d'ici 2020.

Il apparait qu’en concentrant ses efforts sur les énergies renouvelables chaleur elle pourrait obtenir ce résultat de façon beaucoup plus profitable à son économie qu’en les orientant principalement, comme l’avait prévu le Grenelle de l'environnement, sur les énergies renouvelables électriques.

RESUME

Pour contribuer à la réalisation de cet objectif il est possible d’agir en développant la part des énergies renouvelables dans la production de chaleur (solaire direct, biomasse, géothermie de surface), dans celle de l’électricité (hydraulique, mais surtout éolien, photovoltaïque) et, en matière de transport, dans les agro-carburants.

Le choix de donner une priorité à l’électricité renouvelable a été fait par le Grenelle de l’environnement, à l’instar du Danemark, de l’Allemagne et de l’Espagne. La présente étude conteste ce choix techniquement discutable et démontre que d’autres solutions peuvent permettre d’atteindre l’objectif assigné dans des conditions économiques bien plus satisfaisantes.

L’étude montre qu’en France la réalisation complète du programme de production d’énergie renouvelable électrique selon le Grenelle, se traduira dans les années à venir par des investissements supplémentaires de près de 45 milliards d’euros - sans compter les coûts de raccordement, les coûts de renforcement des réseaux électriques et les coûts des installations substitution; mais ces investissements resteront sans effet notable sur nos dépenses en combustibles fossiles et donc sur nos émissions de gaz à effet de serre [2].

La perversité du concept d’obligation d’achat à un prix fixé par l’administration a débouché, dans l’Europe entière, sur la création de bulles spéculatives en phase d’explosion pour le photovoltaïque et se profilant à l’horizon pour l’éolien. Par ailleurs en favorisant des technologies peu compétitives ce concept va très significativement renchérir le coût de l’électricité et faire perdre à notre pays l’un des rares avantages compétitifs dont il dispose encore[3].

L’étude pose également la question de savoir si la France a les moyens de se lancer dans des investissements dont la seule justification économique pourrait être de tenter, avec un grand retard, de créer de nouvelles filières industrielles alors que le marché mondial concerné par ces produits connaît des difficultés importantes, surtout en Europe, la Chine y prenant une part prépondérante.

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Ces questions ayant été analysées, l’étude propose de remettre en question la procédure d’obligation d’achat pour toute nouvelle installation d’éoliennes et de favoriser les soutiens éventuels aux installations photovoltaïques permettant une autoconsommation de l’électricité produite.

Concrètement, l’étude démontre que l’objectif de 23% d’énergies renouvelables peut être réalisé par une augmentation de la production-consommation de chaleur renouvelable. Pour une dépense égale à celle nécessaire pour réaliser les propositions du Grenelle de l’énergie, il est possible d’économiser annuellement, en fin de période[4], plus de 8,6 millions de tonnes de combustibles fossiles (fioul et gaz) évitant l’émission de 50 millions de tonnes de CO2 soit 15% des 332 millions de tonnes émises en France en 2009[5].

Ainsi, non seulement l’objectif de 23% d’énergie renouvelable dans la consommation finale d’énergie serait atteint, mais aussi se rapprocherait-on de celui de la réduction de 20% des émissions de gaz à effet de serre prévu dans le « paquet climat » bruxellois.

L’étude démontre finalement que la substitution des renouvelables électriques par des renouvelables chaleurs peut, en dépit des investissements à réaliser, être très rentable : en fin de période, environ 15 milliards d’euros de carburants fossiles[6] seront annuellement économisés ce qui permettra de rentabiliser les investissements en une quinzaine d’années, voire en une dizaine d’années si une taxe Carbone de 100 euros par tonne de CO2 était instaurée dès maintenant.

Dans le scénario que nous proposons 80 milliards[7] d’euros sont économisés par l’instauration d’un moratoire sur la signature de contrats d’achat du courant éolien, une somme qui pourrait être consacrée à la rénovation thermique des bâtiments anciens. Cette somme permettrait d’améliorer l’isolation de quelques 8 millions de logements de 100 m2 de surface, économisant annuellement 5,7 millions de tonnes de combustibles fossiles (66 TWh), soit plus de 5,3 milliards d’euros.

Les carburants fossiles étant importés un tel programme permettrait en outre de réduire le déficit de notre balance des paiements de plus de 10 milliards d’Euros par an[8].

Cette étude montre que les options actuellement retenues pour assurer « notre transition énergétique » doivent d’urgence être revues afin d’être rendues à la fois réalistes et supportables par le consommateur et l’économie française.

1 Objectifs de l’Union Européenne et du Grenelle de l’environnement L’Union Européenne s’est fixé l’objectif de produire, en moyenne sur l’ensemble de l’Union, 20% de la consommation finale d’énergie sous forme d’énergie renouvelable. Pour la France cette proportion est de 23%. Le Grenelle de l’environnement a tenu compte de cette directive européenne.

Pour sa part, « Sauvons le Climat » a dénoncé la manière de faire de l’UE qui relevait plus d’un exercice de numérologie (3 fois 20 en 2020…soit 5 fois 20) que d’une analyse sérieuse

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visant à diminuer, au moindre coût, les émissions de CO2 et, par là, le recours aux énergies fossiles. Il eut été bien préférable de fixer à chaque Etat un objectif de réduction de ses émissions de Gaz à Effet de Serre (GES), libre à lui de choisir les moyens lui semblant adéquats pour ce faire.

Le président François Hollande a fait de la « transition énergétique » un des principaux objectifs de son quinquennat. Ce que pourrait être cette transition énergétique reste cependant encore à préciser. A cet effet, il a été annoncé qu’un débat sur l’énergie serait bientôt convoqué pour aider le gouvernement dans ses choix. « Sauvons le Climat» espère qu’un objectif majeur retenu pour cette transition sera une forte diminution du recours de notre pays aux combustibles fossiles. Cela nous semble souhaitable à la fois parce que leur combustion est la principale source de production de CO2, lui même principal gaz à effet de serre, et parce qu’il est crucial de minimiser notre dépendance aux importations de gaz et de pétrole. Il est, par ailleurs, probable que le gouvernement tiendra à respecter l’engagement de la France d’amener la part des énergies renouvelables à 23% de sa consommation finale d’énergie

Compte tenu de l’état de l’économie française, souffrant déjà d’une balance commerciale largement déficitaire, toute politique énergétique doit faire l’objet d’une optimisation économique. Il est donc souhaitable que la condition du développement des énergies renouvelables soit une réduction de notre consommation de combustibles fossiles.

La présente étude examine comment, en partant de l’objectif de 23% d’énergie renouvelable dans le mix énergétique final français (rappelons que l’engagement ne porte pas sur l’électricité renouvelable mais bien sur l’énergie renouvelable, c'est-à-dire, la chaleur, l’électricité et le carburant renouvelables) peuvent être optimisés simultanément les coûts, les émissions de gaz à effet de serre et la sécurité de nos approvisionnements.

Nous partons du constat qu’actuellement[9],

• la consommation de chaleur renouvelable est de 12,4 Mtep en 2010 (142 TWh) • la production d’électricité d’origine renouvelable atteint environ 70 TWh en 2011

(dont 50 par l’hydraulique).. • La consommation de biocarburant est de 2,8 Mtep (32 TWh). • Le total de la consommation d’énergies renouvelables atteint donc 244 TWh, à

comparer à une consommation finale totale de 2000 TWh, soit une proportion de renouvelables de 12 %.

On en déduit qu'il faudrait porter la contribution des énergies renouvelables à 437 TWh, soit une augmentation de 204 TWh - un quasi doublement - et que, pour faire face à cette exigence, on peut se reposer aussi bien sur la production d’électricité renouvelable que sur la production de chaleur renouvelable, dans des proportions à choisir.

On peut remarquer que c’est la production d’électricité par des éoliennes et des panneaux photovoltaïques qui a actuellement la faveur des politiques, des médias, et, aussi, du Syndicat des Energies Renouvelables, syndicat patronal du secteur. Cette préférence pour des techniques qui ont le grand inconvénient technique d’être intermittentes et peu prévisibles, est-elle vraiment justifiée économiquement et écologiquement?

2 - Les techniques renouvelables disponibles

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2.1 Chaleur renouvelable

2.1.1 La chaleur solaire

La chaleur solaire peut être utilisée pour la production de l’eau chaude sanitaire (ECS). Actuellement la consommation d’énergie pour la production d’eau chaude sanitaire est d’environ 50 TWh. Selon les tendances observées, elle devrait atteindre 55 TWh en 2020. Or on estime que le soleil pourrait fournirles 3/4 de cette consommation (le complément étant fourni par l’électricité), soit une consommation finale d’environ 40 TWh/an. Ceci nous apparaît comme une piste à privilégier

2.1.2 Le bois-combustible

Les besoins de chauffage atteignent actuellement 380 TWh. 45 TWh sont fournis par l’électricité, 95 TWh par le bois et 240 TWh par les combustibles fossiles. Selon nous, l’usage du bois- combustible pourrait fortement augmenter, en particulier dans les réseaux de chaleur, et permettre la fourniture de 120 TWh/an supplémentaires. Bien sûr, il sera nécessaire de veiller à ce que les nouvelles installations obéissent aux normes les plus strictes en ce qui concerne les émissions polluantes (oxydes d’azote, dioxines, poussières…).

2.1.3 La géothermie de surface

Les sondes géothermiques, échangeurs thermiques verticaux, captent par conduction la chaleur du sol (< 30°c) des terrains traversés, sans mobiliser l’eau souterraine. Associées aux dispositifs amplificateurs d’énergie que constituent les pompes à chaleur, elles autorisent le chauffage des habitations individuelles (une ou deux sondes de 100 m) et d’immeubles collectifs (champs de sondes). Des installations bien dimensionnées permettent d’atteindre, et même de dépasser un coefficient de performance de 3[10] : 1 kWh électrique consommé pour 3 kWh restitués sous forme de chaleur[11].

On peut estimer à 80 TWh l’énergie pouvant être ainsi fournie tant pour les constructions neuves que pour la rénovation, la géothermie se substituant à des installations existantes ayant recours au gaz, fuel ou charbon. La consommation d’électricité associée serait de l’ordre de 30 à 40 TWh. Cette contribution ajoutée à celle du bois combustible permettrait de ne plus recourir aux combustibles fossiles pour le chauffage.

2.2 Electricité renouvelable

En Europe, sous la pression de l’Allemagne, du Danemark et de l’Espagne, les énergies éoliennes et photovoltaïques sont systématiquement mises en avant. Dans cet engouement, il y a sans doute l’arrière-pensée que l’ennemi est plus le nucléaire que les combustibles fossiles… Avec l’appui des industriels de ces trois pays , dont le lobbying à convaincu la technocratie bruxelloise, le marché s’est développé à un rythme qui est en train de devenir économiquement insoutenable. En tout cas, malgré de nombreux avertissements de physiciens et ingénieurs de par le monde y compris dans ces deux pays, la mode des énergies renouvelables intermittentes s’est imposée jusqu’à la survenue de difficultés souvent accompagnées de « bulles », la première étant celle du photovoltaïque..

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En France, le Grenelle de l’environnement prévoit la construction de 25 GW d’éolien dont 6 en offshore et de 5,4 GW en installations solaires photovoltaïques. Fin 2011, 6700 MW d’éolien et 2230 MW de solaire étaient opérationnels

2.2.1 L’éolien au sol

A partir du tarif d’achat de 82 €/MWh[12] (pour 15 ans) du courant fourni par les éoliennes au sol on peut estimer un coût d’investissement de l’éolien de 1,6 millions d’Euros par MW[13]. Pour les 19 GW prévus par le Grenelle on arrive à un coût d’investissement total de 30 milliards d’Euros. La production de ce parc serait d’environ 38 TWh[14].

2.2.2 L’éolien off-shore

Pour l’éolien off-shore l’appel d’offres récemment dépouillé conduisant à un prix d’achat de 226 €/MWh, on peut retenir un investissement de 3,7 millions d’euros par MW[15], soit un coût total de 22 milliards d’euros pour les 6 GW prévus. La production de ce parc serait de 18 TWh[16].

2.2.3 Le solaire photovoltaïque

Pour le solaire photovoltaïque il y a lieu de distinguer les petites installations individuelles (quelques kW) et les installations industrielles (supérieures à 36 kW). Dans les deux cas, plus encore que pour l’éolien terrestre, le développement est artificiel, car fondé sur le mécanisme de l’obligation d’achat à des tarifs très élevés. Dans le cas des installations individuelles intégrées au bâti (dans le respect de normes françaises rigoureuses) l’essentiel du coût d’investissement n’est pas celui des cellules, mais celui du montage mécanique. Il faut actuellement compter un investissement d’environ 5000 Euros pour une puissance de 1 kW produisant 1 MWh par an[17]. Le tarif d’achat est, à ce jour, de 370 Euros par MWh. On peut considérer qu’un investissement de 4000 Euros par kW est rentable (temps de retour de 10 ans au tarif de 370 Euros par MWh)

Pour les installations industrielles le tarif d’achat est ramené à 193 €/MWh pour les installations de 36 à 100 kW. On peut en déduire un coût d’investissement correspondant de 2000€/kW.

Compte tenu de la répartition actuelle des types d’installations, nous avons retenu un coût moyen d’installation de 3000 €/kW..

Le programme de 5,4 GW conduit alors à un investissement proche de 16 Mrd€. Pratiquement, la totalité de cet investissement est compensé par la collectivité nationale au travers de la CSPE qui prend en compte le surcoût des tarifs d’achat obligé. La production annuelle atteindrait environ 5 TWh – soit de l’ordre de 1% de la production électrique française actuelle.

Il nous semble qu’il est important de mettre en place une politique décourageant la vente de la production sur le réseau aux dépens du consommateur (via la CSPE), mais, au contraire, de promouvoir un usage décentralisé de l’énergie solaire en favorisant l’autoconsommation du courant continu produit, par exemple, pour la recharge des batteries de téléphone portable, d’ordinateurs et, surtout, de véhicules électriques[18].

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2.3 Rénovation Thermique

Bien que la rénovation thermique ne concourre pas significativement à la réalisation de l’objectif d’obtention de 23% d’énergie renouvelable dans le mix, il est particulièrement intéressant de lui affecter les économies qui pourraient être faites en optimisant le coût de cette réalisation. Une étude d’Orselli (rapport au Conseil Général des Ponts n° 004831-01 « Economies et substitutions d’énergie dans les bâtiments ») conclut à un coût de rénovation de 5000 Euros pour abaisser de 50% la consommation d’un logement type de 100 m2 chauffé au fioul ou au gaz, soit de 20000 kWh/an à 10000 kWh/an, ces 5000 € correspondant à la différence entre une rénovation visant les économies d’énergie (huisseries et vitrage, chaudière basse consommation) et une rénovation ordinaire. Il y a actuellement environ 30 millions de logements en France. On peut estimer qu’un logement est rénové tous les 50 ans, ce qui conduit à la rénovation de 600000 logements par an. Il est clair que ce type de rénovation thermique devrait être prioritaire et permettrait à elle seule une économie annuelle de 60 TWh/an (4,8 G€/an) au bout de 10 ans, pour un coût total de 30 G€.

Si la rénovation thermique est entreprise pour elle même, elle peut se limiter à l’isolation des combles et au remplacement des huisseries. Le coût d’isolation des combles est estimé à 35€/m2, et celui du remplacement des huisseries à 500 €/m2. On peut ainsi calculer que le coût de rénovation d’un appartement de 100 m2 appartenant à un immeuble de 4 étages contenant 8 appartements serait de l’ordre de 8000 Euros.

Nous avons retenu un coût « confortable » de 10000 Euros pour la rénovation thermique d’un logement de 100 m2, soit 1000 Euros pour économiser 1 MWh chaque année.

3 Les coûts élémentaires Nous avons précédemment présenté trois techniques de production de chaleur renouvelable (la chaleur solaire pour la production d’eau chaude sanitaire, la combustion de la biomasse, particulièrement du bois, la chaleur solaire extraite du sol grâce à des pompes à chaleur) et pour l’électricité la production par des éoliennes au sol, en mer et par des panneaux photovoltaïques.

Nous allons ici chercher à définir les combinaisons de ces différentes techniques permettant d’atteindre une production de 204 TWh/an précités (Ch. Introduction) en minimisant les coûts et les émissions de CO2. Les coûts d’investissement pour obtenir une production (ou une économie ) de 1 MWh par an sont donnés dans le tableau ci-dessous.

ECS Bois PACEolien

au sol

Eolien

off-shorePV Rénovation

€1000 850 1000 800 1230 3000 1000

Tableau 1

Estimation des coûts d’investissement nécessaires pour produire ou économiser 1 MWh par an.

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En supposant que les investissements sont financés par des emprunts à 15 ans avec un intérêt de 4% par an, et en ajoutant les autres éléments de coût (énergie, fonctionnement, profit, transmission, perte de revenu pour les productions devant s’ajuster à celles de l’éolien et du photovoltaïque) nous obtenons les coûts unitaires du MWh donnés sur la Figure 1. Nous supposons que la durée de vie de ces équipements dépasse 15 ans sans coût de maintenance majeur. Sur la figure il s’agit des coûts subis par le consommateur final. Le coût à la production pour l’électricité renouvelable intermittente est diminué des coûts de transmission et de perte de revenu des énergies de substitution. Nous avons complété la figure par le coût d’une rénovation thermique ramenant typiquement la consommation moyenne des logements anciens de 200 kWh/m2 à 100 kWh/m2, soit, pour un appartement de 100 m2, une économie de consommation énergétique de 10 MWh.

Figure 1:

Estimation des coûts à la consommation et d’économie d’une énergie de 1 MWh par an pour différentes techniques faisant appel aux énergies renouvelables. L’égalité des coûts pour l’ECS et la rénovation vient du fait que, dans les deux cas, l’investissement nécessaire pour produire ou économiser 1 MWh est égal à 1000 euros. Pour la production d'électricité la différence entre les coûts à la production et la consommation correspondent aux coûts du transport et de la distribution (40 €/MWh) ainsi que du manque à gagner des moyens de substitution (pris ici égaux à 30 €/MWh)

On remarque sur la Figure 1 les coûts élevés de l’éolien en mer (off-shore) et du photovoltaïque. De plus, alors que les coûts calculés pour la production de chaleur correspondent à des coûts finaux pour le consommateur, il n’en n’est rien pour les coûts de l’électricité renouvelable puisqu’il faudrait ajouter le prix de la distribution (de l’ordre de 40 €/MWh ) et celui des sources d’énergie modulables qui doivent compenser l’intermittence de

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l’éolien[19] et du photovoltaïque[20]. Les coûts à la production de l’éolien et du photovoltaïque correspondent, à peu de choses près, aux tarifs définis par la CRE , les coûts à la consommation ajoutent la prise en compte des coûts de transport et de distribution de l'électricité (pour 40 €/MWh) et de la perte d'exploitation des centrales chargées de se substituer aux productions renouvelables intermittentes (que nous avons choisi d’estimer à 30 €/MWh sachant que 80% de cette puissance de substitution est fournie par les centrales nucléaires). Cette rubrique couvre aussi la perte d’efficacité des centrales dispatchables (gaz, charbon ou nucléaire) qui servent de « béquille » à l’électricité renouvelable intermittente. On notera que pour les deux premières cela engendre de plus une production accrue de CO2.

La technique la moins onéreuse est la production d’eau chaude sanitaire, pourtant très peu développée dans notre pays.

Figure 2:

Valeur des coûts du MWh combustible évité pour les différentes techniques

Pour estimer à leur juste valeur, indépendamment de leur coût brut, les différentes techniques qui pourraient concourir à atteindre l’objectif de 23% d’énergies renouvelables, il est nécessaire de prendre en compte la quantité de combustibles fossiles évités, et, par voie de conséquence, celle des émissions de CO2 non produites par l’usage de ces techniques. Le coût des combustibles évités est donné sur la Figure 2, celui de la tonne de CO2 évité sur la Figure 3. On voit sur ces figures que la production d’électricité renouvelable est très peu efficace pour économiser les combustibles fossiles et limiter les émissions de CO2. Ceci est dû à la structure particulière de la production d’électricité en France, caractérisée par un très faible recours aux énergies carbonées. La part des centrales « fossiles » dans cette production est, en effet, inférieure à 10%. Lorsque les productions éoliennes ou photovoltaïques sont

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importantes, ce sont essentiellement les productions hydroélectriques et nucléaires qui s’effacent, effacement accompagné, pour une faible part, par une augmentation des exportations. Techniquement, l’examen des productions horaires d’électricité publiées par RTE ne montre pas de nettes corrélations négatives entre la production éolienne et la production fossile. 1 MWh produit par les éoliennes et les panneaux photovoltaïques ne réduit donc la consommation d’électricité fossile que de 0,1 MWh en moyenne. Au contraire 1 MWh d’eau chaude sanitaire produite par chaleur solaire réduit d’autant les besoins en chaleur produite par des chaudières à gaz ou au fioul. Si l’efficacité des ces chaudières n’est pas excellente l’économie sera encore plus importante.

En ce qui concerne les coûts de la production d’eau chaude sanitaire, nous donnons un coût du combustible évité supposant une substitution à une chaleur produite par du gaz ou du fioul. Dans la pratique, environ un tiers des installations sont des chauffe eau électriques ; dans ce cas le coût du CO2 évité par le recours à la chaleur solaire est multiplié par 10. En raisonnant sur la valeur moyenne du parc, la valeur de 432 €/tonne CO2 devient 617 €. De même le coût du combustible évité affiché (Figure 2) devient 123 €/MWh plutôt que 86.

Figure 3

Valeurs du coût de la tonne de CO2 évitée pour les différentes techniques

4 Scénarios

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Examen de quatre scénarios possibles pour atteindre 23% d’énergie renouvelable dans la consommation finale.

Rappelons les possibilités de production de chaleur renouvelable telles qu’estimées dans le scénario Negatep[21]

Ressources Mtep Ressources TWh

ECS 3,5 40

Bois 10 120

PAC 9 105

Tableau 2

Potentiels de production des principales sources de chaleur renouvelable

A partir de ces potentiels de production de chaleur renouvelables nous avons construit deux scénarios principaux (1 et 2) et deux complémentaires (3 et 4) :

· Dans le scénario 1, seule la production de chaleur est développée, l’éolien, le photovoltaïque étant gardés à leur niveau actuel.

· Dans le scénario 2 nous supposons que les productions éoliennes sont au niveau prévu par le Grenelle, soit 19 GW et 6 GW pour les productions au sol et en mer respectivement et 5,4 GW pour le photovoltaïque. La production de chaleur est ajustée pour atteindre l’objectif de 204 TWh de production supplémentaire d’énergies renouvelables. Nous verrons que ce scénario est sensiblement plus onéreux que le scénario 1, du fait de plus faibles économies de combustible.

· Dans le scénario 3 la différence de coût entre les scénarios 1 et 2 est utilisée pour réaliser des rénovations thermiques de bâtiments les plus énergivores.

· Enfin, dans le scénario 4, nous supposons que les 204 TWh sont entièrement fournis par l’éolien au sol. Ce scénario est très irréaliste mais il semble que tous n’en soient pas conscients. En particulier certains espèrent utiliser les productions éoliennes et photovoltaïques pour réduire la part du nucléaire dans la production électrique à 50%

Les productions dans les 4 scénarios sont illustrées sur la Figure 4. Dans le scénario 2 nous avons fait le choix qui minimise le coût de la production de chaleur, ce qui conduit à annuler la contribution des pompes à chaleur. Il est, cependant, fort probable que les pompes à chaleur seraient appelées à fournir une partie de l’énergie manquante malgré un coût légèrement plus important que celui de la chaleur bois. Dans le scénario 3, nous avons inclus la rénovation thermique des bâtiments pour un coût de 80 milliards d’euros, différence des coûts entre les scénarios 2 et 1. Ces 80 milliards d’euros permettraient d’économiser 87 MWh/an, correspondant à la rénovation de 8,5 millions d’appartements de 100m².

Les investissements correspondant aux productions de la figure 4 sont présentés sur la figure 5. A partir de ces coûts d’investissement on peut estimer l’importance des besoins de main

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d’œuvre pour les 4 scénarios. Ce besoin est illustré sur le Figure 6. Nous supposons un coût de la main d’œuvre de 40 000 eurospar personne et par an. Par contre, dans le cas de la production d'électricité éolienne et photovoltaïque nous supposons que la moitié des coûts correspondent à des matériels importés, ce qui porte le coût de la main d’œuvre française à 80 000 euros par personne et par an.

Le scénario 3 qui comporte une rénovation thermique des bâtiments est le plus producteur d'emplois. Le nombre d'emplois-an atteindrait 6 millions soit 600 000 emplois pour une période de 10 ans. L'essentiel de ces emplois seraient dans le secteur du bâtiment. Dans le cas d'un équipement « tout éolien » le nombre d'emplois nécessaires n'excéderait pas 2 millions d'emplois-an.

Figure 4:

Productions supplémentaires d’ici 2020 par les énergies renouvelables pour les 4 scénarios. Rappelons qu’un Térawatt-heure (TWh) est égal à un million de Mégawatt-heure

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Figure 5:

Coûts d'investissement pour les différents scénarios. Le G€ correspond à un milliard d’euros

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Figure 6:

Besoins en main d’œuvre pour les 4 scénarios, exprimés en million d’emplois an.

Sur la Figure 7, nous comparons les coûts totaux (investissement +fonctionnement) pour les différents scénarios. Les coûts bruts sont obtenus par la multiplication des productions indiquées sur la Figure 4 par les coûts donnés sur la Figure 1, le tout étant multiplié par une durée de 15 ans. Les coûts du combustible évité sont égaux au produit des productions indiquées sur la Figure 4 par 80 €/MWh pour la production de chaleur et la rénovation, mais seulement par 8 €/MWh pour la production d’électricité, également sur une durée de 15 ans.

Le prix de 80 €/MWh est supérieur à celui du gaz payé actuellement par les particuliers dans le cadre des tarifs réglementés (environ 60 €/MWh, mais, dès maintenant, 77 €/MWh aux Pays Bas). Nous avons supposé qu’il augmentera significativement dans les 15 prochaines années.

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Figure 7:

Comparaison des coûts totalisés sur 15 ans pour les 4 scénarios. Le prix des combustibles évités a été pris égal à 80 €/MWh. Ce prix est supérieur à celui du gaz payé actuellement par les particuliers dans le cadre des tarifs réglementés (environ 50 €/MWh). Nous avons supposé qu’il augmente significativement dans les 15 prochaines années. Un G€ est un milliard d’euros

Les coûts nets sont la différence entre les coûts bruts et les coûts des combustibles évités. Ils correspondent aux coûts qui devront être supportés par la collectivité si on veut que la transition énergétique ne soit pas trop onéreuse pour ceux qui la mettront en œuvre.

La collectivité s’y retrouvera dans la diminution des importations, comme on peut le voir sur la Figure 8 qui montre les économies sur l’importation de combustibles fossiles (gaz et fioul) qui seraient faites pour les 4 scénarios. On remarque que, même si le scénario 3 qui comporte une composante de rénovation thermique est plus onéreux que le scénario 1, ses performances en termes de balance des paiements sont remarquables puisqu’on pourrait économiser environ 10 milliards d’euros par an. Par contre, un scénario basé essentiellement sur une production d’électricité par des éoliennes au sol (la solution la plus économique, et de loin, pour la production d’électricité renouvelable) aurait probablement un impact négatif sur la balance commerciale car il faudra importer une part importante du matériel. Sur les 15 ans du programme il faudrait, en effet, en admettant que 50% du coût des éoliennes et panneaux photovoltaïques est du matériel acheté à l’étranger, importer plus de 2 milliards d’euros de matériel annuellement.

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Figure 8:

Economies annuelles sur les importations de combustible fossile (gaz et fioul) pour les 4 scénarios. Le prix du gaz importé est pris égal à 40 €/MWh.

Une autre conséquence de l’utilisation de la chaleur renouvelable est qu’elle diminue les émissions de CO2. La Figure 9 compare les performances des 4 scénarios à cet égard. Dans le cas le plus favorable, celui du scénario 3, l’économie pourrait atteindre 50 millions de tonnes, soit 15% de nos émissions actuelles. Valorisées à 100 €/tonne l’économie correspondante atteindrait 5 milliards d’euros par an.

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Figure 9:

Emissions de CO2 évitées chaque année par les 4 scénarios. Pour la production de chaleur la quantité de CO2 évitée est environ de 200 kg de CO2/MWh. Pour la production d’électricité cette quantité est ramenée à 20 kg de CO2/MWh. Les unité sont en Million de tonnes de CO2 évité par an (Mt/an)

5 Changer de méthode De ce qui précède, on peut tout d’abord conclure que la production d’électricité à l’aide d’énergies renouvelables intermittentes (éolienne et solaire) ne présente pas d’intérêt dans les conditions actuelles de la production d’électricité en France continentale.

Le soutien à cette production prend deux formes : crédits d’impôts et subventions, d’une part, obligation d’achat associée ou non à un appel d’offres d’autre part.

L’obligation d’achat a été le principal moyen utilisé pour assurer un développement rapide de l’éolien et du photovoltaïque en Europe. L’attractivité financière de cette méthode a été telle que des bulles spéculatives se sont formées dans presque toute l’Europe : l’Espagne, la France, l’Allemagne, le Royaume Uni, la République Tchèque… ont dû donner un coup de frein sérieux au développement du photovoltaïque.

Ce qu’on peut déjà nommer l’éclatement d’une bulle photovoltaïque est dû au caractère complètement artificiel de la procédure d’obligation d’achat, d’une part, à la concurrence chinoise d’autre part.

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5.1 L’obligation d’achat

Le système de l’obligation d’achat assure au producteur de voir sa production écoulée sur le réseau (ErDF ou RTE) à des tarifs arrêtés par le Ministre en charge de l’énergie ou issus d’appels d’offres lancés par le même Ministre, sur avis formel de la Commission de Régulation de l’Energie (CRE). L’acheteur (le distributeur) n’a aucun moyen de mettre en concurrence les fournisseurs puisqu’il est contraint à l’achat. Il n’y a donc pas d’incitation à améliorer la productivité des installations. Les tarifs définis par la CRE résultent d’un compromis avec le lobby de la production renouvelable, le Syndicat des Energies Renouvelables, et non d’une mise en concurrence des meilleures technologies. Les vendeurs n’ont que fort peu d’intérêt à développer de la R et D qui coûte cher alors qu’il leur suffit de faire pression pour obtenir des prix rémunérateurs.

Le résultat est là : les deux entreprises les plus engagées dans le développement d’une technologie française de l’éolien (Vergnet) et du photovoltaïque (Photowatt) se sont retrouvées en grandes difficultés financières, sinon en faillite.

Alors que la procédure d’obligation d’achat visait deux objectifs : permettre d’atteindre un pourcentage de 23% d’énergie renouvelable dans la consommation finale, développer une industrie nationale, elle échoue clairement sur les deux points :

· En ce qui concerne l’objectif de 23% d’énergie renouvelable, nous avons vu qu’il est bien préférable de tabler sur la production de chaleur.

· En ce qui concerne la création et le développement d’un secteur français de fabricants d’éoliennes et de cellules photovoltaïques, l’échec est complet puisque les entreprises qui existaient avant la mise en œuvre de cette procédure sont aujourd’hui en très grandes difficultés.

Il est donc nécessaire, avant toute autre mesure, de remettre en question la procédure d’obligation d’achat.

Faut-il, pour autant, renoncer à toute forme de soutien de la production d’électricité éolienne ou solaire ? La réponse dépend à la fois du type de l’énergie et de la localisation des installations.

5.2 Le cas du solaire photovoltaïque

Le caractère assez prévisible de la production, les évolutions technologiques rapides et la perspective du développement des voitures électriques et hybrides rechargeables font que l’électricité photovoltaïque est porteuse d’avenir. Par contre, pour qu’elle puisse se développer sainement, il ne faut pas encourager sa vente sur le réseau dans laquelle elle perd toute sa spécificité et se transforme en simple opportunité de spéculation.

Nous proposons donc de soutenir l’auto-consommation de cette production sous sa forme naturelle de courant continu. Pour le soutien à cette évolution, en particulier pour ce qui concerne l’utilisation du courant continu, on peut envisager une subvention au kWh effectivement utilisé. Par ailleurs il faut encourager les recherches sur l’utilisation directe du courant continu (recharge de batteries, production de froid, appareils électroménagers). Un autre aspect de l’énergie photovoltaïque est qu’elle est probablement la mieux adaptée

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pour les sites non reliés au réseau. Il y a lieu d’encourager la participation d’entreprises françaises à l’équipement de nombreux villages africains dans le cadre des mécanismes de développement propre[22].

Sur nos îles tropicales et en Corse, le photovoltaïque permet de réduire le recours aux combustibles fossiles[23] avec une efficacité 10 fois plus grande qu’en France continentale[24]. Les conditions d’ensoleillement y sont généralement bien meilleures et plus constantes sur l’année. De plus, le pic de demande tend à se déplacer en milieu de journée du fait de la climatisation. L’idéal serait de coupler les systèmes de production photovoltaïque à des stockages hydroélectriques.

5.3 Le cas de l’éolien

Nous avons vu que, au moins en France continentale, la poursuite de l’équipement en éolien ne se justifie pas. Il est temps de mettre un terme à cette gabegie. Bien entendu, il faudra se préoccuper du sort de la main d’œuvre employée dans le secteur. Les qualifications de cette main d’œuvre relevant largement du BTP (aucune éolienne installée dans l’hexagone n’ayant été fabriquée en France[25]…), elle pourrait sans problème majeur être reconvertie dans la rénovation thermique des bâtiments. De plus, l’importation d’éoliennes construites à l’étranger contribue au déficit de notre balance commerciale (d’environ 1 Mrd € par GW installé). L’électricité d’origine éolienne pourrait sans doute retrouver de l’intérêt si on était capable de l’associer à des dispositifs de stockage suffisants. A notre avis, c’est là qu’il faut porter l’effort de recherche et développement. En attendant que de tels dispositifs soient disponibles dans des conditions de rentabilité raisonnable il fautdécider un moratoire sur le soutien au développement de l’énergie éolienne en France continentale[26].

Sur nos îles, l’éolien, tout particulièrement sous la forme rabattable développée par Vergnet, est beaucoup plus justifié puisqu’il permet avec 10 fois plus d’efficacité que sur le continent de diminuer le recours aux combustibles fossiles et les émissions de CO2.

5.4 Les perspectives industrielles créées par le développement de la chaleur renouvelable

Les installations de production de chaleur concernent principalement le secteur de l'habitat et du tertiaire. Les bénéficiaires sont essentiellement des particuliers. Les installateurs seront largement des artisans et PME.

5.4.1 Eau chaude sanitaire.

Pour produire 40 TWh d'eau chaude sanitaire, à raison d'une production de 500 kWh/m2/an, on voit qu'il faut 80 millions de m2 de capteur. Supposant une installation s'étalant sur 10 ans il s'agit de réaliser 8 millions de m2 de capteur chaque année. Le chiffre d'affaire correspondant de 4 milliards d'euros par an fournirait environ 100000 emplois (pendant 10 ans), à condition que le matériel soit produit en France. Il faut donc mettre sur place une véritable filière industrielle française des capteurs solaires thermiques. Ceci devrait être facilité par le fait que les acteurs principaux seront les PME installatrices qui auront besoin d'une formation et de conseils qui pourraient leur être fournis par l'ADEME, par exemple.

5.4.2 Filière bois-combustible

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En ce qui concerne la filière bois les besoins concernent les chaudières et le bois combustible.

La production de 120 Twh/an correspond à l'installation de 6 millions de chaudières, soit 600000 par an pour un chiffre d'affaire de 10 milliards par an, correspondant à un besoin de 250000 emplois. Si les clients resteront essentiellement des particuliers, la fabrication des chaudières relève de l'industrie. Les spécialistes les plus reconnus sont les autrichiens. Compte tenu de l'importance des besoins, on peut envisager l'installation d'usines en France par les entreprises autrichiennes. Les besoins en bois combustible (granulés, bois déchiqueté) correspondent à un chiffre d'affaires de 5 milliards par an correspondant à environ 125000 emplois en fin de programme. Il s'agit là d'améliorer la gestion de nos forêts et de renforcer les installations de fabrication du combustible (granulés ou bois déchiqueté).

5.4.3 Pompes à chaleur

Pour produire 44 TWh/an il faut environ 2,2 millions de PAC, soit 220000 par an, correspondant à un chiffre d'affaires de 4,5 milliards d'euros et 110000 emplois. Là encore, compte tenu de l'importance du programme il y a lieu de mettre en place une grande filière industrielle de production de PAC. Peut-on envisager d'intéresser à un tel programme nos constructeurs automobiles, qui maîtrisent parfaitement la production en grande série et à bas coût de produits très techniques ?

5.5 Incitations et financements

Comment amener les particuliers à entreprendre les investissements dans les énergies renouvelables[27] ? Plusieurs méthodes sont envisageables. Pour l'électricité renouvelable, c'est la méthode de l'obligation d'achat qui a été choisie. Cette méthode découple l'intérêt du consommateur du coût qui est supporté par l'ensemble des consommateurs d'électricité. Pour les installations de production de chaleur, une solution simple consiste à instaurer une taxe sur l'usage de fioul et de gaz, le produit de cette taxe permettant, par exemple, de financer des prêts à taux zéro pour les installations de chauffage au bois et les pompes à chaleur.

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Figure 10 :

Comparaison des coûts bruts pour le consommateur avec le prix de l'énergie (gaz et électricité) remplacée (en l'occurrence 80 €/MWh pour les deux sources). L'influence d'une taxe Carbone de 100€/tonne de CO2 est indiquée (supplément de 20 €/MWh). De même l'influence sur le coût brut d'un financement à taux 0 est démontrée.

Sur la Figure 10 on a reporté les coûts bruts à la production des différentes techniques de production de chaleur et d'électricité renouvelables. Ces coûts ont été calculés dans l'hypothèse d'investissements financés par des emprunts à 15 ans et taux d'intérêt de 4%. Dans ces conditions l'ECS et la rénovation thermique sont proches de la compétitivité sans l'atteindre pleinement. Avec une taxe de 100 €/tonne de CO2 (20 €/MWh) la compétitivité est assurée pour l'ECS, l'éolien au sol (en ce qui concerne la production, mais rappelons qu'elle est loin d'être atteinte pour la consommation) et la rénovation thermique. Une forme de soutien complémentaire serait l'utilisation d'un financement à taux zéro. Dans ce cas la production de chaleur par chaudière bois ou par PAC est proche de la compétitivité.

On pourrait instituer une taxe carbone croissant progressivement de manière à rendre compétitifs, en premier lieu, la production d'ECS et la rénovation thermique (il suffit ici d'une taxe carbone de 14 €/MWh) puis le chauffage au bois (rentable pour une taxe carbone de 35 €/MWh) puis les PAC (rentables pour une taxe carbone de 40 €/MWh). Il faut préciser ici que la rentabilité ne dépend pas directement de la valeur de la taxe carbone mais du prix du gaz

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taxe incluse ; autrement dit, si le prix du gaz augmente la taxe carbone pourrait être diminuée. Il serait aussi envisageable de dispenser de la taxe les particuliers ou entreprises s’engageant à effectuer les travaux dans un délai raisonnable (par exemple 10 ans). Au bout de ce délai et si les travaux n’étaient pas réalisés le remboursement de la taxe serait dû.

6 ConclusionsA production égale d’énergie renouvelable atteignant 23% dans la consommation finale et à coût égal on voit qu’un scénario reposant exclusivement sur la production de chaleur et la rénovation thermique est beaucoup plus performant qu’un scénario basé sur les recommandations du Grenelle. Dans le premier cas, l’économie sur les combustibles importés est de 10 milliards d’euros par an alors qu’il n’est que de 6 milliards dans le deuxième. L’économie dans les émissions de CO2 est de 50 millions de tonnes dans le premier cas et de 30 millions dans le second. Encore faut-il souligner que les économies de combustibles et de CO2 atteintes par le scénario « Grenelle » sont essentiellement dues à la production de chaleur renouvelable. Dans le cas extrême où l’éolien produirait la totalité de l’énergie renouvelable nécessaire pour atteindre les 23% de la consommation finale, les économies sur les combustibles importés seraient inférieures à un milliard d’euros par an qui ne compenseraient pas des importations de matériel proches de 2 milliards par an. Les économies de CO2 seraient inférieures à 5 millions de tonnes.

On ne peut qu’être surpris par le fait que l’intérêt de la production de chaleur par les énergies renouvelables n’ait pas été souligné davantage par le Grenelle. Il est temps de reconnaître que le faible recours aux énergies carbonés pour la production d’électricité en France continentale ôte 90 % de leur intérêt aux productions éoliennes et photovoltaïques.

L’usage de la chaleur renouvelable est la voie qui s’impose. C’est la moins chère et celle qui concourt en même temps, de manière très importante, à atteindre un autre objectif , celui de réduire nos émissions de Gaz à effet de serre de 20% par rapport à 1990. C’est aussi la voie qui réduit le plus efficacement notre dépendance vis à vis du gaz et du pétrole (fioul). Les investissements sont lourds, de l’ordre de 200 milliards, mais ils permettraient d’économiser, chaque année, environ 20 millions de tonnes, soit 9 milliards d'euros à l'importation, de combustibles fossiles. Ils fourniraient 6 millions d’années de travail en France (soit de l’emploi pour 600000 salariés pendant 10 ans)

L’investissement serait amorti en une quinzaine d’années. L’émission d’environ 50 millions de tonnes de CO2/an serait évitée. Le développement de l’ECS et la rénovation thermique des bâtiments anciens devraient avoir la priorité car ces mesures conduisent à des coûts par tonne de combustible évités très faibles.

Au contraire les 45 milliards d’euros supplémentaires qui seraient dépensés si les recommandations du Grenelle de l’environnement, concernant l’éolien et le photovoltaïque, étaient intégralement suivies, n’auraient pratiquement d’effets ni sur nos importations de combustibles fossiles ni sur nos émissions de gaz carbonique. Ils produiraient moins de 30% des 204 TWh exigés pour atteindre les 23% d’énergie renouvelable dans la consommation finale. Cette médiocre performance des énergies renouvelables intermittentes est la conséquence de l’importance du nucléaire et de l’hydroélectricité dans la production

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électrique française. Dans des pays faisant un large appel aux combustiblesfossiles pour produire leur électricité la conclusion serait différente, tout comme dans nos îles. Faudrait il, pour justifier le programme éolien augmenter de façon importante la production électrique d’origine thermique ? Faut-il multiplier par 5 ou 10 les émissions de CO2 par notre système de production d’électricité pour les diminuer ensuite de 10% ?

Il y a donc lieu de revoir profondément la procédure d’obligation d’achat pour l’électricité produite par les éoliennes et les cellules photovoltaïques.

Un encouragement possible et sain du photovoltaïque n’est envisageable que dans l’hypothèse de l’autoconsommation du courant produit.

Le mécanisme de la CSPE devrait être réorienté pour encourager le développement de l’usage de la chaleur renouvelable (prêts bonifiés, par exemple), et, surtout, la rénovation thermique des bâtiments anciens. Ainsi les 45 milliards d’euros qui manquent encore pour atteindre les objectifs du Grenelle pour l’éolien et le photovoltaïque pourraient être utilisés de manière bien plus efficace en aidant à la rénovation thermique. Une telle somme permettrait de rénover 8,5 millions de logement, économisant ainsi 7 millions de tonnes équivalent pétrole, 7 Mrd d'€/an pour les particuliers[28]et évitant l’émission de 17 millions de tonnes de CO2. Finalement la mise en œuvre d’une politique de soutien (par l'instauration d'une taxe carbone et par des prêts à long terme et faible intérêt) au développement de la chaleur renouvelable et à la rénovation thermique éviterait l’importation de 21,5 Mtep de combustibles fossiles (10 Mrd€/an) et l’émission de 50 Millions de tonnes de CO2, soit plus de 15% de nos émissions actuelles, confirmant définitivement notre position actuelle de champion européen en termes de modicité d’émissions de CO2 par tête [29]

Voilà ce que pourrait être l’amorce d’une vraie transition énergétique.

[1]Il s’agit ici d’un travail préliminaire qui mériterait une étude plus approfondie, par exemple par la DGEC ou dans le cadre des débats sur la transition énergétique.

Nous ne pensons toutefois pas qu’une telle étude puisse remettre en question les ordres de grandeurs retenus dans le présent travail.

[2] Ce dernier point n’est pas vrai pour des pays comme le Danemark qui produisent leur électricité essentiellement grâce à des centrales à charbon ou à gaz.

[3] Rappelons que le coût de l’électricité nucléaire a été estimé par la Cour des Comptes à 49 €/MWh. Ce coût représente pour l’essentiel celui des investissements - y compris le démantèlement la gestion des déchets et les mesures additionnelles de sécurité post-Fukushima - Le tarif d’achat de l’éolien au sol est de 82 €/MWh, soit, dans la mesure ou l’excès de production éolienne est compensée à 80 % par une baisse de la production nucléaire, un coût net pour les consommateurs de près de 75 €/MWh. (le coût variable, essentiellement celui du combustible étant estimé à 5,23 €/MWh). L’appel d’offre pour

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l’éolien off-shore a abouti à un prix d’achat de 226 €/MWh, le tarif d’achat du photovoltaïque étant de 370 €/MWh pour les petites installations et de 196 €/MWh pour les installations de type industriel

[4] «Fin de période » correspond au moment où les 23% d’énergies renouvelables auront été atteints, soit, en principe, en 2020.

[5] Voir les données du CITEPA

[6] Rappelons que les importations de combustibles fossiles participent à hauteur de 60 milliards au déficit commercial de la France de 75 milliards d’euros

[7] A la suppression de l’investissement dans la construction d’éoliennes il faut, en effet ajouter le gain sur les combustibles.

[8] Nous avons supposé que le prix payé par les consommateurs de gaz sera de 80 €/MWh, et que celui payé à l’importation sera de 40 €/MWh

[9] Cf. sénario Negatep.(http://www.sauvonsleclimat.org/images/articles/pdf_files/best_of/negatep%202011.pdf) (section D4, D6) A noter que pour les énergies renouvelables production et consommation sont pratiquement égales

[10] Des coefficients de 4 sont envisageables mais, par prudence nous avons retenu la valeur 3

[11] La géothermie basse énergie (30-90°c) a recours à la chaleur des nappes captives des grands bassins sédimentaires. Elle équipe déjà 166 000 équivalents logements et connaît de nouveaux développements, avec les réseaux de chaleur associés. La géothermie (haute énergie > 150° c), profonde (3500 - 4500 m) met également à profit la chaleur produite par la terre (par la radioactivité ou les résidus de la chaleur primordiale). Le fluxgéothermique profond est très faible, en moyenne de l’ordre de 0,05 W/m2, soit environ 4 000 fois moins que la valeur moyenne du flux solaire. On estime que l’usage de la chaleur géothermique profonde pourrait atteindre 4 TWh/an, au prix de l’utilisation de techniques de fracturation des roches semblables à celles permettant d’extraire le gaz et le pétrole de schiste. Nous l’avons négligée.

[12] En fait, par suite de clauses d’indexation, le coût du MWh éolien est supérieur. Selon la Commission de Régulation de l’Energie, il s’élève actuellement à 87€/MWh.

[13] On doit regretter le manque de transparence sur les coûts réels de l’éolien, prétendument pour des raisons de secret commercial. Ce manque de transparence est d’autant plus choquant que le consommateur n’a pas de choix du fait de l’obligation d’achat. Pour estimer le coût d’investissement nous faisons l’hypothèse que le tarif d’achat est tel que, dans les cas les plus défavorables, il couvre exactement les coûts. Le calcul est fait sur 15 ans d’exploitation. Au tarif d’achat, une éolienne terrestre de 1 MW, produisant 2000 MWh/an, rapporte 2,46 M€ sur 15 ans. Tenant compte d’un intérêt de 5% on arrive à la valeur de 1,6 M€/MW

[14] Sur la base d’une durée effective de production de 2000 heures par an.

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[15] Valeur calculée à partir de chiffres fournis par le Ministre de l’Industrie concernant l’impact sur la CSPE. Pour obtenir le coût annoncé de 220 €/MWh il faut sans doute inclure des frais de maintenance de l’ordre de 40% de l’investissement initial.

[16] Sur la base d’une durée effective de production de 3000 heures par an

[17] Sur la base d’une durée effective de production de 1000 heures par an

[18] Cette modalité d’usage du solaire est actuellement négligeable en France ainsi d’ailleurs que dans tous les pays pratiquant le tarif d’achat obligé comme l’Allemagne par exemple.

[19] Voir notre étude http://www.sauvonsleclimat.org/communiqueshtml/com-intermittence-foisonnement/35-fparticles/1163-com-intermittence-foisonnement.html

[20] Si une production éolienne de 1 MWh est compensée par une diminution de la production nucléaire de 1 MWh la perte de recette correspondante est de l'ordre de 30 €

[21] Voir : http://www.sauvonsleclimat.org/best-of-slchtml/diviser-par-quatre-les-rejets-de-co2-dus-a-lenergie-lescenario-negatep/35-fparticles/465-diviser-par-quatre-les-rejets-de-co2-dus-a-lenergie-le-scenario-negatep.html

[22] Le député de Haute-Savoie, Claude Birraux et notre regretté Patrick Jourde avaient fait une proposition très intéressante dans ce sens.

[23] De plus le combustible le plus utilisé sur les îles est le fioul lourd particulièrement polluant et cher.

[24] En effet, alors qu’en France continentale les centrales fossiles ne fournissent qu’environ 10% de la de la consommation d’électricité, sur les îles elles en fournissent la presque totalité.

[25] Hormis les vieilles, et désuètes, machines Jeumont.

[26] Le système des certificats verts qui impose aux producteurs de fournir une part de leur production sous forme d’électricité renouvelable a, par rapport à l’obligation d’achat, le mérite de limiter le risque de bulle et, surtout, de maintenir une concurrence entre les fournisseurs. Par ailleurs, si une partie de la population souhaite le développement de l’électricité renouvelable, pourquoi ne pas laisser au consommateur le choix entre un tarif « normal » de l’électricité, et un tarif renouvelable permettant ce développement. On saurait ainsi quelle est la proportion de français vraiment motivée pour le développement de la production d’électricité renouvelable ; point ne serait besoin d’un référendum….

[27] Rappelons qu’il s’agit ici de chaleur renouvelable venant en remplacement de chauffage au gaz ou au fioul, et non de chauffage électrique.

[28] Rappelons que nous avons supposé un prix du MWh de gaz de 80 €/MWh au détail et de 40 €/MWh à l'importation.

[29] En ce qui concerne les émissions de CO2 (source AIE) un français émet 5,5 tonnes de CO2 par, un allemand 9,16, et un européen moyen 7,15.

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