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http://www.neur-one.fr [email protected] - 1 - 16/11/2008 1 D’après http://www2.ulg.ac.be/physioan/chapitre/ Mécanismes cellulaires d'iono et osmorégulation Les mouvements transmembranaires Les mouvements de substances à travers les membranes peuvent relever de cinq systèmes différents : La diffusion simple, le flot en masse, la diffusion facilitée (devenant, dans certains cas, du transport actif secondaire), le transport actif (parfois appelé primaire pour le distinguer du secondaire) et l'endocytose (ou encore l'association endocytose-exocytose dans le cas d'un mouvement transépithélial).. 1. La diffusion simple Flux diffusionnels et perméabilité La diffusion simple correspond au déplacement net de matière d'une région à une autre en fonction du gradient de concentration et des mouvements d'agitation thermique des molécules en solution. Ces déplacements sont régis par la loi de Fick selon laquelle la quantité de soluté (N) qui migre en un temps (t) sur une distance (x) est inversement proportionnelle à cette distance et est proportionnelle à la surface du plan de migration (A) ainsi qu'à la différence de concentration (C) existant de part et d'autre de ce plan (figure 1). Figure 1 : Flux diffusionnels :application de la loi de Fick aux mouvements diffusionnels transmembranaires. Détails dans le texte. (avec D : le coefficient de diffusion)

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http://www.neur-one.fr

[email protected] - 1 - 16/11/2008 1

D’après http://www2.ulg.ac.be/physioan/chapitre/

Mécanismes cellulaires d'iono et osmorégulation

Les mouvements transmembranaires

Les mouvements de substances à travers les membranes peuvent relever de cinq systèmes différents : La diffusion simple, le flot en masse, la diffusion facilitée (devenant, dans certains cas, du transport actif secondaire), le transport actif (parfois appelé primaire pour le distinguer du secondaire) et l'endocytose (ou encore l'association endocytose-exocytose dans le cas d'un mouvement transépithélial)..

1. La diffusion simple

• Flux diffusionnels et perméabilité

La diffusion simple correspond au déplacement net de matière d'une région à une autre en fonction du gradient de concentration et des mouvements d'agitation thermique des molécules en solution. Ces déplacements sont régis par la loi de Fick selon laquelle la quantité de soluté (∆N) qui migre en un temps (∆t) sur une distance (∆x) est inversement proportionnelle à cette distance et est proportionnelle à la surface du plan de migration (A) ainsi qu'à la différence de concentration (∆C) existant de part et d'autre de ce plan (figure 1).

Figure 1 : Flux diffusionnels :application de la loi de Fick aux mouvements diffusionnels transmembranaires.

Détails dans le texte. (avec D : le coefficient de diffusion)

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En physiologie, on considère classiquement le flux, noté J, d'un soluté à travers une membrane d'épaisseur ∆x. Ce flux représente en fait la quantité de substance ∆N qui migre en un temps ∆t à travers une surface de membrane A, soit :

On considère par ailleurs que la structure de la membrane n'intervient pas de manière sensible sur la répartition du

soluté étudié en son sein et donc que cette répartition est homogène dans les différents compartiments du système (compartiments aqueux et compartiment membrane). De plus, l'épaisseur de membrane étant difficile à connaître mais variant peu au niveau d'une structure donnée, on associe ce terme au coefficient de diffusion en un coefficient de perméabilité noté K :

La loi de Fick (1) devient donc : J = K ∆C (2) Le flux net ainsi défini est en fait la résultante de deux flux unidirectionnels (figure 1), l'un allant du compartiment 1

vers le compartiment 2 : J12 = K C1 l'autre allant du compartiment 2 vers le compartiment 1: J21 = K C2 . Le flux net résultant est donc : J12 - J21 = K (C1 - C2). Ce qui correspond à J = K ∆C.

Les flux unidirectionnels peuvent être mesurés, entre autres, au moyen d'isotopes radioactifs et il est dès lors possible

de faire des mesures de K pour différents solutés. Il faut dans ce cadre considéré que : • K est un simple coefficient phénoménologique. Il dépend bien sûr de caractéristiques spécifiques de la membrane

étudiée par rapport au soluté envisagé. Il ne peut cependant fournir aucune indication précise quant à ces caractéristiques.

• K est le même dans les deux sens. Ce dernier postulat permet de l'éliminer d'une analyse en faisant un rapport de flux. Dans ce cadre, le rapport des flux unidirectionnels est égal au rapport des concentrations en soluté dans les deux compartiments séparés par une membrane donnée.

(3) Pour les solutés chargés (ions inorganiques par exemple), le déplacement d'un compartiment à l'autre génère un

potentiel électrique. On en tient compte dans l'équation des rapports de flux (3) qui devient alors :

(4) avec E la différence de potentiel, Z la valence de l'ion , F le faraday et RT la constante des gaz.

Si donc, dans l'étude des flux d'un ion, le rapport J12/J21 mesuré expérimentalement correspond au rapport des flux

calculés par l'équation ci-dessus, les flux sont diffusionnels. Si tel n'est pas le cas, d'autres systèmes doivent également intervenir. Dans le cadre de certaines études de flux ioniques, il peut être intéressant d'annuler la différence de potentiel en faisant passer un courant à travers la préparation membranaire (« court-circuitage »). On peut ainsi éliminer les effets dus à la différence de potentiel sur le mouvement des ions.

Des relations 3 et 4 ci-dessus, il découle qu'en l'absence de différence de concentration et, pour les ions, de différence

de potentiel, les flux unidirectionnels sont égaux et il n'y a pas de flux net. Il découle également des relations décrites ci-dessus, qu'un flux diffusionnel est toujours proportionnel à la concentration du soluté, quelle que soit la concentration de celui-ci. On n'observe donc jamais de cinétique de saturation, comme c'est le cas pour les systèmes dans lesquels le mouvement d'un soluté implique une interaction entre un élément de la membrane et le soluté transporté. Nous pourrons ainsi par exemple distinguer la diffusion facilitée, qui implique un transporteur, de la diffusion simple.

K peut varier avec chaque substance et, pour une même substance, avec chaque membrane. Il est clair dans ce cadre

que le caractère plus ou moins liposoluble des solutés ainsi que leur plus ou moins grand diamètre (encombrement stérique) vont intervenir pour déterminer la facilité plus ou moins grande avec laquelle ils passeront à travers une membrane. Il faut par ailleurs remarquer que la perméabilité des solutés d'intérêt biologique dans les bicouches lipides est extrêmement faible, voire pratiquement nulle. Ainsi les bicouches lipidiques se révèlent pratiquement imperméables aux ions inorganiques, aux molécules polaires chargées tels différents acides aminés ou aux grosses molécules polaires non chargées tel le glucose (figure 2). Les mouvements diffusionnels de ces solutés doivent donc faire intervenir des structures particulières incorporées dans la bicouche.

• Phase huileuse et pores

• Comme nous venons de le voir, la diffusion à travers les membranes est en général très faible. Le pouvoir de

pénétration d'un soluté est par ailleurs étroitement lié à son degré de liposolubilité. Dans ce cadre, on a montré depuis longtemps, aussi bien sur membrane biologique que sur film lipidique, qu'il existe une relation étroite entre la perméabilité à différentes substances et leur coefficient de partage huile-eau, ce dernier étant un indice de leur liposolubilité (figure 3).

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Figure 2 : Perméabilité (cm/sec) d'une bicouche lipidique à différents solutés.

La bicouche est plus ou moins perméable à l'eau, aux petites molécules hydrophobes (O2, N2) et aux petites molécules polaires non chargées (urée, glycérol). Elle est pratiquement imperméable aux ions inorganiques ainsi qu'aux grosses molécules polaires chargées ou non chargées (acides aminés, glucose).

On remarqua cependant très tôt dans le cadre de ces expériences que les petites molécules présentant un certain caractère de solubilité dans l'eau tendent à se regrouper au-dessus de la droite décrivant la meilleure corrélation entre les données. Les petites molécules hydrosolubles passent donc plus rapidement à travers la membrane qui ne devrait le laisser supposer leur seule liposolubilité. Collander, qui fut le premier à rapporter ce fait dans les années 30, conclut donc que les petites molécules peuvent passer autrement que dans la phase huileuse et que, dès lors, la membrane agirait à la fois comme solvant sélectif et comme filtre moléculaire. On arriva ainsi à la notion de "pores" qui seraient constitués à l'intervention d'un système formant un réseau de mailles assurant une certaine continuité de la phase aqueuse entre les milieux extra et intracellulaire. En appui à cette conception, on observe une corrélation nette entre l'encombrement stérique de petites molécules hydrosolubles et leur plus ou moins grande perméabilité (figure 4). Des études "hydrodynamiques" de ce type conduisirent à l'idée de pores non-sélectifs ; ceux-ci ayant un diamètre moyen de 4,2 Å dans la membrane des globules rouges par exemple.

Figure 3 : Perméabilité relative de l'algue Chara à différents solutés en fonction du coefficient de partage huile/eau.

Pour les substances de type "urée", le diamètre des cercles donne une idée de leurs dimensions relatives.

L'interprétation des données relatives aux pores reste difficile et la signification qu'il faut leurs donner n'est actuellement pas univoque. La notion de pore membranaire doit donc être considérée à l'heure actuelle plutôt comme un concept opérationnel que comme un système correspondant à une structure physico-chimique particulière et clairement définie. Dans ce cadre, les pores envisagés ici seraient à distinguer des canaux sélectifs constitués de protéines intrinsèques spécifiques et qui jouent un rôle essentiel dans la perméabilité à de nombreux ions notamment. Ils sont aussi à distinguer des porines, structures bien définies en chaînes α , qui jouent dans les parois bactériennes le rôle de filtres moléculaires. On tend maintenant à

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considérer de plus en plus que les aquaporines, canaux intervenant dans les mouvements d'eau au niveau de différents types cellulaires, doivent intervenir ou même seraient à la base des observations rapportées concernant les mouvements de petites molécules hydrosolubles dans les membranes.

Figure 4 : Perméabilité relative de la membrane des globules rouges à différents solutés hydrosolubles en fonction de leurs

dimensions relatives.

• Canaux spécifiques L'essentiel des mouvements diffusionnels va donc impliquer des canaux ou même des "transporteurs". Les

transporteurs concernés interviendront dans le cadre d'une diffusion dite facilitée de solutés organiques, sucres et acides aminés notamment ou d'ions inorganiques. Les canaux joueront un rôle particulièrement important dans la perméabilité à différents ions inorganiques ou à l'eau. Ces canaux, généralement assez sélectifs, vont en effet permettre, non seulement une diffusion plus rapide mais encore une régulation, un contrôle, des mouvements transmembranaires soit de différents ions dans le cas des canaux ioniques (ionophores : voir ci-après), soit de l'eau dans le cas des aquaporines . Les canaux peuvent prendre une configuration ouverte ou fermée ; dès lors, le contrôle de leur "activité" concerne en fait une plus ou moins grande probabilité d'ouverture dans une condition donnée et/ou l'insertion d'un nombre plus ou moins élevé de molécules-canal dans la membrane. Ce dernier mécanisme est relativement lent puisqu'il implique la plupart du temps une modification de l'activité transcriptionnelle au niveau génique. Les changements d'activité extrêmement rapide observés dans différentes situations comme la génération du potentiel d'action par exemple seront donc exclusivement en rapport avec des modifications de la probabilité d'ouverture. Comme nous le verrons, "l'activité" des canaux peut être contrôlée par différents stimuli tels que la différence de potentiel transmembranaire, certains modulateurs chimiques (Ca2+, neurotransmetteurs, hormones) ou encore certains changements mécaniques (étirement).

L'organisation structurale de ces canaux est étudiée depuis le milieu des années 80. Quelques-uns d'entre eux sont

maintenant bien connus. Il s'agit de protéines intrinsèques de nature oligomériques le plus souvent constituées d'un nombre variable d'unités transmembranaires homologues. Ces unités sont organisées de telle manière qu'elles délimitent un pore traversant la membrane. Elles présentent un nombre variable de segments (domaines) α-hélicoïdaux reliés entre eux par des segments extra et intracellulaires. Leur arrangement dans l'unité, de même que l'arrangement des unités les unes par rapport aux autres, déterminent les caractéristiques spécifiques du canal.

Différentes fonctions annexes (activation-inactivation-phosphorylation, etc...) sont souvent en relation avec les

caractéristiques de différents segments externes ou internes à la membrane reliant entre eux les segments hélicoïdaux. Dans de nombreux cas, différentes fonctions de régulation relèvent de protéines particulières associées à la molécule-canal proprement dite. La figure 5 illustre, à titre d'exemple, l'organisation considérée actuellement comme la plus probable d'un type de canal à K+ activé par le potentiel intervenant dans la génération du potentiel d'action.

Les autres canaux dépendant du potentiel de membrane qui ont été clonés jusqu'à présent (Na+, Ca2+) montrent des

structures très voisines et présentent entre eux des degrés plus ou moins élevés d'homologie. Ils sont chacun constitué de 4 unités ayant chacune 6 domaines α-hélicoïdaux. La figure 6 montre par ailleurs l'organisation la plus probable d'un canal à Na+ épithélial sensible à l’amiloride (ENaC :epithélial Na channel). Les canaux détecteurs d'acide (canaux ASIC : acid-sensing ion channel) qui interviennent dans le contrôle du pH intracellulaire ont la même configuration générale et sont également sensibles à l'amiloride.

Il apparaît donc que les canaux ioniques sont tous dérivés, malgré leurs spécificités fonctionnelles parfois très

différentes, de quelques structures protéiques ne différant parfois que très peu entre elles. On peut ainsi distinguer à l'heure actuelle :

1) Des canaux dont l'activité (la probabilité d'ouverture) dépend du potentiel de membrane (Kv, Nav, Cav..). 2) Des canaux modulés par des ions y compris H+ (ASIC, KCa, KNa). Les canaux KATP feraient partie de ce groupe,

bien que dans de nombreux cas, la structure de ces canaux ne soit pas encore connue.

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3) Des canaux directement activés par des récepteurs. Les exemples les mieux étudiés sont les récepteurs-canaux intervenant dans la transmission synaptique. Ils sont constitués de 5 unités ayant 4 domaines α-hélicoïdaux.

4) Des canaux activés par des seconds messagers, tel l’AMP cyclique ou le GMP cyclique. De tels canaux interviennent par exemple dans le mécanisme de transduction au niveau des récepteurs rétiniens et olfactifs. De structure voisine des celle des canaux voltagedépendants paraissent constitués d’un assemblage de 4 unités possédant chacune 6 segments α-hélicoïdaux transmembranaires et une boucle intramembranaire entre les segments 5 et 6.

Figure 5 : Exemple de protéine intrinsèque : le canal K+ potentiel-dépendant : profil d'hydrophobicité et topologie probable

d'une unité (A) - organisation de 4 unités formant le canal (B) et visualisation du canal dans la membrane (C). D'après Cattéral (Science, 242, 50, 1988), modifié. Les protéines intrinsèques des membranes plasmiques des cellules animales ont des segments transmembranaires essentiellement organisés en hélice α, structure thermodynamiquement favorable dans un milieu huileux. Le nombre probable de segments α-hélicoïdaux est déterminé à partir de la structure primaire des protéines en assignant à chaque acide aminé un indice d'hydrophobicité. En portant sur un graphique l'indice de l'acide aminé en fonction de sa position dans la séquence, on obtient un profil d'hydrophobicité qui fait apparaître autant de régions hydrophobes de 20 à 40 acides aminés qu'il y a d'hélices α. La structure plissée en chaîne β, qui permet également une insertion transmembranaire, paraît rare au niveau des membranes des cellules animales. La protéine prise ici comme exemple est une des rares à l'heure actuelle où l'on admet la présence de deux chaînes β à côté de 6 segments α-hélicoïdaux. Le canal complet est en fait constitué de l'association de 4 unités identiques. Il a une organisation générale voisine de celle du canal Na+ sensible au potentiel.

Figure 6 : Représentation schématique de l'organisation probable d'un canal à Na+ épithélial (ENaC), sensible à

l'amiloride. Il comprend 4 unités (2 seulement sont ici représentées) comportant chacune 2 segments α-hélicoïdaux transmembranaires (M1 et M2 )arrangés autour d'un canal central dont l'amiloride (A) peut bloquer assez spécifiquement l'ouverture. D'après Horisberger (Cur. Op. Cell. Biol., 10, 443, 1998), modifié. Il se pourrait que, dans certains cas, le canal ne comporte que 3 unités et non 4.

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5) Des canaux activés par des récepteurs associés à des protéines G dont l'unité réceptrice comporte 7 domaines α-

hélicoïdaux. De tels récepteurs interviennent dans la transmission synaptique ; les protéines G activent alors directement ou indirectement des canaux ioniques. Ils interviennent également dans la transmission des messages hormonaux lorsqu'ils sont associés, via des protéines G, soit à l'ouverture de canaux soit à l'activation de kinases.

6) Des canaux mécanosensibles tels que les "stretch-activated" ou "stretch-inactivated ions channels" intervenant notamment dans la régulation du volume cellule ou dans la transduction de signaux au niveau de mécanorécepteurs.

7) On distingue encore, à côté de ces canaux ioniques présents en plus ou moins grand nombre dans les membranes plasmiques, des canaux endocellulaires. On a ainsi mis en évidence des canaux sélectifs aux ions Ca2+, K+ et Cl- notamment au niveau des membranes de différents organites intracellulaires : réticulum endoplasmique, mitochondrie, noyau.

Dans la plupart des cas, leur structure reste à définir. Les plus connus à l'heure actuelle sont certainement les canaux

Ca2+ du réticulum sarcoplasmique des fibres musculaires qui contrôlent la libération du Ca2+ intervenant dans l'activation du système contractile. Deux familles de canaux sont responsables de cette libération : ceux associés à un récepteur à l'IP3 (inositol triphosphate) et ceux sensibles à la ryanodine qui possèdent une région réceptrice sensible à cet alcaloïde végétal. 2. Flot en masse - Mouvement d'eau et effet solvant

• Interactions eau-solutés Le flot en masse ou l'effet dit "solvant" définit un mouvement de soluté par entraînement dans un flot d'eau. Dès la fin

des années 1950, des mesures de flux d'eau à travers des membranes biologiques, plasmiques (globules rouges) ou épithéliales (peau de grenouille ou de crapaud), ont montré que les coefficients de perméabilité obtenus pour l'eau à partir de flux unidirectionnels en condition d'isosmoticité ou à partir de flux nets résultant de l'établissement d'un gradient osmotique étaient largement différents. La perméabilité "osmotique" mesurée dans le second cas recouvre donc des mécanismes différents de la perméabilité "diffusionnelle" mesurée dans le premier cas. Des études ultérieures ont démontré qu'effectivement les coefficients de perméabilité "osmotiques" pourraient être mis en rapport avec l'établissement de flots en masse d'eau à travers des pores, en phase aqueuse. L'existence de ces "écoulements massifs" permet d'expliquer les phénomènes d'entraînement par le solvant observés pour de nombreuses substances hydrophiles de relativement petites tailles (effet solvant, solvant drag des anglo-saxons). On peut en effet démontrer pour ces solutés l'existence d'un flux diffusionnel net dès l'instant où on établit un flux osmotique d'eau alors qu'il n'y a pas de gradient de concentration (figure 7A). On admet dans ce cadre que les molécules du soluté passent par des pores assez larges, entraînées par le mouvement diffusionnel des molécules d'eau suivant le gradient osmotique. Dans ce cadre, les flux unidirectionnels diffusionnels du soluté à travers la bicouche restent égaux puisque le gradient de concentration est nul (figure 7A). Par ailleurs, il est clair que s'il existe un gradient de concentration favorisant le mouvement d'un soluté dans un sens et un gradient osmotique favorisant un mouvement d'eau dans l'autre sens (figures B et C), des phénomènes de friction entre molécules en mouvement vont ralentir les deux flux. Ces interactions seront évidemment d'importance d'autant plus significative que le diamètre des pores sera faible et que les flux seront grands, augmentant les probabilités de friction. De plus, si le flux osmotique d'eau est suffisamment important, il peut rendre compte d'un flux net de soluté allant à l'encontre du gradient de concentration (figure 7C). Physiologiquement, les interactions eau-soluté ne sont importantes qu'au niveau des épithélia présentant des flux nets d'eau importants : peau et vessie de batraciens, intestin, rein, vaisseaux sanguins par exemple. Ces flux vont s'établir soit en fonction de différences entre pression hydrostatique (Phydr) et pression osmotique (Posm) des compartiments soit en fonction de l'établissement d'un flux osmotique d'eau suite à production d'un gradient osmotique. Envisageons rapidement quelques exemples illustrant ces deux situations. flux dus à une pression hydrostatique

Le meilleur exemple de ce type de flot en masse concerne les mouvements de solutés suite à filtration sous pression au

niveau de l'endothélium vasculaire. Ce problème est envisagé dans le cadre des mouvements de fluide et de substances au niveau des capillaires sanguins. La filtration sous pression au niveau des glomérules de Malpighi dans le rein est un autre exemple de ce type. Les structures concernées ont été décrites précédemment. Très brièvement, les glomérules sont constitués d'un important peloton de capillaires sanguins entouré de cellules podocytaires et logé dans une capsule membraneuse dite de Bowman. L'organisation des podocytes et le caractère largement fenestré des capillaires à ce niveau permet une importante filtration d'eau et donc l'installation d'un flot en masse dans lequel tous les solutés de petites dimensions passe du sang vers les tubules. Comme le montre la figure 8, la pression de filtration au niveau des glomérules chez l'homme résulte d'une balance entre :

1) la pression hydrostatique au niveau artériolaire, résultat du travail cardiaque (±75 mmHg), qui pousse le flot d'eau vers l'extérieur du peloton artériolaire ;

2) la pression osmotique (oncotique) due aux protéines non diffusibles qui génère un flux de rappel (±25 mmHg) et

3) les difficultés de passage qui freinent le mouvement (pression interstitielle ±10 mmHg et pression intratubulaire ±10 mmHg). L'eau est donc "ultrafiltrée" sous une pression de ±30 mmHg. Cette pression est suffisante pour rendre compte d'un passage, chez l’homme, de ±200 litres d'eau par jour, avec tous les

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éléments solubles qu'elle contient sauf les protéines. Comme nous le signalons également pour le flot en masse au niveau des capillaires, il est clair que tout élément perturbant l'un ou l'autre des paramètres intervenants induira une modification de filtration et dès lors du flot urinaire : diminution par diminution de la pression hydrostatique dans le cas de l'insuffisance cardiaque; diminution également par augmentation de la pression intratubulaire dans le cas de pierres au rein par exemple.

Figure 7 : Schéma conceptuel pouvant rendre compte des relations entre flux osmotique de solvant (suivant Osm1 et Osm2 :

H2O), flux diffusionnel d’un soluté (suivant C1 et C2 : soluté 1 - 2) et "effet solvant" pour ce soluté (soluté 3). Á la limite, un flux net du soluté peut s'établir à l'encontre du gradient de concentration s'il existe un flot d'eau entraînant un effet de drague suffisamment important (situation C).

Figure 8 : Composantes de la pression d'ultrafiltration responsable de l'établissement d'un flot en masse au niveau des

glomérules de Malpighi chez l'homme. Détails dans le texte.

• Flux osmotiques d'eau De très nombreuses structures sont le siège de flux osmotiques d'eau. Ces flux peuvent intervenir de façon majeure dans

les balances hydriques ; c'est le cas notamment au niveau de l'intestin, des reins, des téguments extérieurs chez certaines espèces, des branchies, des tubes de Malpighi des insectes, etc... Dans d'autres cas, ces flux sont à la base de l'élaboration de liquides de sécrétion (glandes salivaires, lacrymales, à sel, sécrétions pancréatique, biliaire, etc...). Ils seront dits hypertoniques ou isotoniques selon qu'il existe ou non un gradient d'osmolarité "macroscopique" mesurable au niveau de la structure qui les génère.

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• • Flux isotoniques

Ces mouvements sont consécutifs à l'établissement d'un gradient osmotique restant localisé à l'une ou l'autre face de

l'épithélium. La génération du gradient fait intervenir un transport actif d'ion : Na+ le plus souvent, parfois K+, Cl- ou encore H+. Les gradients étant limités à l'épithélium, ces flux sont parfois qualifiés d'isotoniques ; ce qui permet de distinguer, dans le cas du rein des mammifères par exemple, le flux d'eau au niveau des tubules de celui, tout différent, dépendant du système de l'anse de Henlé et dans lequel le flux d'eau s'établit suivant un large gradient d'hypertonicité maintenu en permanence par le jeu de transport et de diffusion de NaCl dans toute la région médullaire. Dans le cas des flux isotoniques tubulaires en effet, l'eau suit "immédiatement" le NaCl, empêchant toute formation de gradient osmotique au niveau sanguin. L'eau qui arrive ainsi, à travers l'épithélium, au niveau des liquides interstitiels et sanguins, est dès lors isosmotique à ceux-ci (figure 9).

Figure 9 : Flux d'eau au niveau des épithélia dits serrés.

A : Relations entre les flux entrants d'eau et de Na+ au niveau de l'intestin grêle du rat (valeurs relatives). B : Représentation schématique, les compartiments 1, 2 et 3 font référence au modèle décrit en C ci-après. C : Système modèle de Curran et MacIntosh permettant de démontrer l'établissement d'un flux net d'eau allant à l'encontre d'un gradient osmotique apparent (cas de l'intestin). Explications dans le texte. D : Vue en microscopie électronique de la face muqueuse d’un intestin de mammifère. Remarquez les jonctions serrées fermant les espaces intercellulaires. D'après Weiss 1988, modifié.

Dans certains cas, le flux d'eau peut s'établir contre un gradient osmotique apparent. C'est le cas, par exemple, au niveau de l'intestin qui est le siège d'une importante absorption d'eau de la lumière vers le sang alors que le gradient osmotique est installé dans le sens sang-lumière. Cette contradiction apparente s'explique aisément en faisant appel au système modèle mis au point par Curran et MacIntosh dans les années 60 (figure 9C). Dans ce système, un compartiment 1 est séparé d'un

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compartiment 2 de volume fixe et à osmolarité plus élevée par une membrane semi-perméable (perméable uniquement à l'eau). Ce dernier compartiment est séparé d'un troisième (3) à osmolarité plus basse que le premier par un verre poreux très perméable à la fois à l'eau et aux solutés. Dans un tel système, un flux d'eau va s'établir du compartiment 1 vers le compartiment 3 bien que l'osmolarité de celui-ci soit plus basse que celle du compartiment 1. Ce phénomène est essentiellement dû à la différence de perméabilité des deux cloisons entourant un compartiment central à haute osmolarité et de volume fixe. En effet, l'eau attirée vers ce compartiment à partir des deux autres ne peut s'écouler avec les solutés que vers 3. Le verre poreux ne constitue en fait qu'une séparation quasi virtuelle, en termes de mouvements d'eau et de solutés. Le système se réduit donc à deux compartiments 1 et 2-3, avec dans ce dernier un gradient de concentration allant de gauche à droite. Ce type d'organisation se retrouve non seulement au niveau de l'intestin mais aussi au niveau des tubules contournés rénaux. L'épithélium de ces tissus montre en effet des jonctions dites "serrées" (figure 9D) imperméabilisant les espaces intercellulaires à la face apicale et la rendant ainsi quasi semi-perméable (les membranes plasmiques sont en effet très peu perméables aux solutés). Le système latéro-basal, largement ouvert sur le côté séreux et présentant des lacunes intercellulaires dans lesquelles peut s'accumuler du NaCl suite à une intense activité de transport actif de Na+, représente les compartiments 2 et 3.

• Flux hypertonique

L'exemple classique de ce type de système est le flux d'eau qui s'établit au niveau du rein des mammifères entre le canal

collecteur et la région de l'anse de Henlé. Très brièvement, l'établissement d'un transport actif de Na+ dans la partie ascendante de l'anse et son imperméabilité à l'eau font de l'anse un système concentrateur à contre-courant permettant la génération d'un gradient osmotique pouvant être très important entre la région de l'anse et le canal collecteur. Il s'établit ainsi un flot osmotique d'eau allant du canal vers la région de l'anse. L'importance de ce flux d'eau est contrôlée par l'hormone antidiurétique (ADH) qui agit directement sur des canaux particuliers spécifiques à l'eau : les aquaporines.

• les aquaporines Les aquaporines sont des structures-canaux présentant une certaine spécificité pour l'eau. Certaines d'entre elles

montrent toutefois une certaine perméabilité au glycérol ou à l'urée, voire à d'autres solutés neutres. Elles pourraient donc largement contribuer dans ce cadre à un effet solvant.

Tout d'abord mises en évidence au niveau rénal, les aquaporines (AQPs) forment une famille de protéines assez

généralement répandue intervenant dans les flux osmotiques d'eau au niveau des épithélia. On les a jusqu'à présent numérotées de 0 à 9 et on les a mises en évidence, outre dans les tubes collecteurs du rein, au niveau de l'épithélium de l'intestin, des alvéoles pulmonaires, des canaux testiculaire et cholédoque ou encore des glandes salivaires et lacrymales ainsi qu'au niveau de cellules de l'épithélium responsable de la formation de l'humeur aqueuse de l'œil. Elles représentent ici plus de 50% des protéines de la membrane plasmique. Dans ce cadre spécifique, et bien que leur dénomination actuelle soit AQP0, elles continuent souvent à porter leur ancien nom de MIP 26 (Major Intrinsic Protein de 26 KDa). De même l'AQP1, largement exprimée dans différents épithélia perméables à l'eau garde également souvent sont ancienne dénomination de CHIP28 (Channel-forming Integral Protein de 28 KDa). Des aquaporines ont également été mise en évidence récemment au niveau des globules rouges, des tissus cardiaque, adipeux et hépatique. Il semble donc que ces canaux soient généralement répandus au niveau des membranes plasmiques.

Leur organisation structurale a récemment été étudiée (figure 10). Chaque unité constitutive paraît formée de 6

segments α -hélicoïdaux transmembranaires avec, dans les domaines de liaison B et E, 2 motifs asparagine, proline, alanine (NPA) très hautement conservés, qui pourraient être directement impliqués dans la structure du canal. Chaque aquaporine paraît formée par l'association de 4 de ces monomères. Ainsi AQP1 apparaît en analyse cristallographique comme une structure tétramérique avec 4 canaux à eau indépendants (Li et al. 1997 : Nat. Struct. Biol. 4, 263 - Walz et al., 1997 : Nature 387, 624 - Cheng et al. 1997 : Nature , 387, 627).

Le système de régulation de l'activité des aquaporines par l'ADH a été abordé au niveau des canaux collecteurs du rein. Le passage d'eau implique ici une AQP2, essentiellement apicale et des AQP 3 et 4 au niveau basolatéral. La régulation du passage d'eau ne ferait intervenir qu'un contrôle de l'AQP2 apical. Elle met en jeu 1) une modification par l'ADH de l'expression de la protéine au niveau transcriptionnel et 2) une augmentation de l'insertion dans les membranes plasmiques de vésicules transportant l'AQP2 nouvellement synthétisé. Il semble que les protéines d'adressage et de fusion soient de la même famille que celles impliquées dans l'endocytose et l'exocytose ou dans les processus de neurosécrétion (système SNAP-SNARE).

• Le transport (en file) généralités - approches cinétiques

Les mécanismes qui vont nous intéresser ici relèvent de processus de transport dits "en ligne" ou "en file" de solutés, le

plus souvent contre leur gradient de concentration. La qualification "en file" leurs a été donnée pour les distinguer des systèmes de transport dits "vésiculaires" dans lesquels les éléments transportés sont enfermés dans des vésicules que forment la membrane plasmique. Dans le transport "en file", les molécules de solutés passent à travers la membrane les unes après les autres à l'intervention d'une structure transportrice. Plus simplement, on réfère en général au transport "en ligne" sous le terme de

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transport et au transport vésiculaire en utilisant directement la dénomination du mécanisme considéré (endocytose, phagocytose, etc…).

Figure 10 : A : Organisation probable d'une unité monomérique montrant les 6 domaines α-hélicoïdaux transmembranaires et les domaines de liaison B et E portant les motifs NPA. La structure serait repliée sur elle-même et l'orientation des domaines α-hélicoïdaux donnerait à l'ensemble une forme générale de sablier (B), rapprochant ainsi les motifs NPA qui interviendraient dans l'organisation d'un canal central. Les aquaporines apparaissent comme des structures tétramériques associant 4 monomères portant chacun un canal comme le suggère les profils de densité de l'APQ1 de globule rouge humain obtenu par cryocristallographie électronique (C). 1 à 6 : hélices α-hélicoïdales ; LA à LE : liaisons entre les hélices ; NPA : motif asparagine, proline, alanine.

A l'inverse de la diffusion, les mécanismes de transport impliquent toujours une interaction entre un transporteur membranaire et le soluté transporté. Ils se distinguent dès lors de la simple diffusion par deux caractéristiques fondamentales : 1) Ils augmentent considérablement la vitesse de passage du soluté à travers la membrane, surtout aux concentrations physiologiques, généralement basses (figure 11). 2) Ils interviennent toujours dans des processus dits saturables. Considérant un nombre donné de transporteurs sur une surface donnée de membrane, on ne peut en effet faire passer qu'un nombre limité de molécules de soluté par unité de temps, le système de transport devenant saturé à partir d'une certaine concentration. Les analyses du flux (J) d'un soluté en fonction de sa concentration (C) montrent donc des courbes de type hyperbolique (figure 9). Dans ce cadre, on considère souvent le comportement d'un transporteur comme étant semblable à celui d'une enzyme "michaelienne". Par analogie, on pourra donc caractériser les transporteurs par une constante d'affinité (Kt) pour le soluté transporté et une vitesse de transport (flux) maximum (Jmax) avec :

C étant la concentration en soluté pour laquelle un flux J est mesuré. Les résultats de ce type d'études se prêtent évidemment à toutes les présentations graphiques utilisées en enzymologie,

notamment celle de Lineweaver-Burk. L'étude, dans cette présentation, de l'effet de modulateurs du transport permet de mettre en évidence des inhibiteurs compétitifs, non compétitifs ou incompétitifs de même que des activateurs couplés ou non couplés. Un schéma résumé, rappelant ce qu'est cette approche cinétique, est repris dans la figure 11. En appliquant cette approche au transport de glucose, on a par exemple pu montrer que le Na+ est un activateur couplé alors que l'insuline, une hormone hypoglycémiante, apparaît comme un activateur non couplé. De même, le galactose apparaît comme un inhibiteur compétitif et le p-chloromercuribenzoate comme un inhibiteur non compétitif.

Les études de flux ont par ailleurs permis de distinguer deux systèmes de transport différents. La diffusion facilitée

dans laquelle le mouvement de soluté s'effectue dans le sens du gradient de concentration mais à une vitesse plus élevée que par simple diffusion (figure 11). Le transport actif dans lequel le mouvement de soluté s'effectue à l'encontre du gradient de concentration. On peut encore distinguer dans ce cadre un transport actif secondaire d'un transport actif primaire. Comme nous le verrons en b ci-dessous, le système de transport actif secondaire peut s'envisager comme un système de diffusion facilitée dans lequel le mouvement d'un soluté dans le sens de son gradient de concentration peut entraîner, au niveau du même transporteur, le mouvement d'un autre soluté dans le sens opposé à son gradient. Dans ce cadre, l'énergie nécessaire au mouvement contre gradient provient du gradient de concentration du soluté co-transporté. Dans le transport actif dit primaire par contre, l'énergie nécessaire au transport contre gradient est directement dérivée d'une réaction métabolique. Il s'agit le plus souvent d'une réaction d'hydrolyse d'une liaison esther-phosphate riche en énergie.

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Figure 11 : Analyse cinétique simple de l'activité d’un système saturable impliquant un transporteur.

A : Flux d’un soluté en fonction de sa concentration dans un système diffusionnel ( ––– ) et dans un système impliquant un transporteur ( ––– ) ; en beige, la zone de concentration physiologique du soluté. B, C : Représentation graphique de type Lineweaver-Burk. 3. diffusion facilitée et transport actif secondaire

La diffusion facilitée implique toujours, comme nous l'avons dit, le mouvement d'au moins un soluté dans le sens de

son gradient de concentration. Le mécanisme impliqué est classiquement représenté schématiquement par un système "ping-pong" ou "flip-flop". Dans ce cadre, les molécules de soluté sont transportées individuellement d'un côté à l'autre de la membrane à la suite d'un changement de configuration du transporteur. Le système est réversible, le soluté pouvant être transporté aussi bien OUT/IN que IN/OUT, en fonction de son gradient de concentration. Le transporteur pourrait donc exister dans au moins deux états conformationnels entre lesquels il oscillerait. La première étape du transport implique la reconnaissance et la fixation du soluté soit à la face externe soit à la face interne. Cette étape est caractérisée par la constante Kt définissant l'affinité du transporteur pour le soluté transporté. La spécificité de la fixation est plus ou moins stricte, un transporteur donné pouvant reconnaître plus ou moins spécifiquement un soluté donné ou une classe de solutés de nature chimique voisine. Un soluté peut donc devenir inhibiteur compétitif du transport d'un autre de structure proche (cas du galactose par rapport au glucose par exemple). Les étapes suivantes font intervenir le passage du soluté à travers la membrane puis la dissociation du complexe transporteur-soluté. Les mécanismes intimes intervenant dans ces différentes étapes sont à l'heure actuelle inconnus. Ils mettent évidemment en œuvre des changements de configuration réversibles du transporteur (état "ping" ou "flip" d'un côté -"pong" ou "flop" de l'autre - figure 12). Les flux unidirectionnels seront donc entrant et sortant, le flux net étant fonction du gradient de concentration du soluté de part et d'autre de la membrane. Il semble cependant que le problème puisse être plus complexe dans certains cas ; l'établissement du transport dans un sens pourrait en effet affecter la vitesse de passage dans l'autre sens.

Un même transporteur peut par ailleurs fixer 1, 2, 3 ou même 4 solutés différents ; le transport allant soit dans le même

sens pour tous les solutés, soit dans des sens différents. On parlera ainsi d'uniport pour les transporteurs ne fixant qu'un soluté, de symport pour les transporteurs fixant 2 ou plusieurs solutés allant dans le même sens ou d'antiport lorsque les transporteurs fixent 2 ou plusieurs solutés allant dans des sens différents (figure 12). Au niveau des symports et des antiports, les transporteurs peuvent coupler les mouvements de différentes espèces ioniques ou des mouvements d'ions inorganiques avec des mouvements de différentes molécules organiques (glucose, acides aminés ou neurotransmetteurs par exemple). En principe, le mouvement s'effectue toujours, comme nous l'avons déjà signalé, dans le sens du gradient de concentration. Dans certains cas d'antiports ou de symports cependant, l'énergie emmagasinée dans le gradient de concentration d'un soluté peut servir à en transporter un autre contre son gradient de concentration dans un système dit de transport actif secondaire ou de diffusion facilitée contre gradient. Le phénomène est illustré dans la figure 10B reprenant quelques types d'antiports et de symports d'importance biologique. Les mouvements définis sont ceux effectués normalement au niveau des cellules, compte tenu des gradients existants. Ainsi les cellules animales présentent en général des gradients Na+, Cl- et Ca2+ organisés OUT/IN et un gradient K+ organisé IN/OUT. Par ailleurs, l'activité métabolique génère du H+, du HCO3 - et du NH4

+, établissent donc des gradients IN/OUT pour ces ions. On

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voit donc que pour le symport Na-Cl ainsi que pour les antiports Na+/H+, Cl-/HCO3- et Na+/NH4+, les mouvements se font dans

le sens des gradients électrochimiques. Par contre, dans le symport Na+-K+-2Cl-, l'énergie des gradients OUT/IN en Na+ et Cl- permet de transporter du K+ contre son gradient de concentration. Il en va de même pour le symport K+-Cl- qui transportera du Cl- de IN vers OUT contre son gradient de concentration en fonction du gradient de K+. La liste de ces transporteurs augmente régulièrement. On a ainsi montré récemment la présence au niveau du rein et de l'intestin du rat d'antiporteurs 2 Na+/HPO4

2- et 2 Na+/SO4

2-.

Figure 12: Le transport par diffusion facilitée

A : Schéma illustrant le système "ping-pong" dans le cas de différents types de transporteurs : uniport, symport et antiport. B : Quelques types de symport et d’antiport d’importance biologique, les solutés grisés sont transportés contre gradient (détails dans le texte).

Il est à noter que les symports et antiports ioniques décrits jusqu'à présent chez les vertébrés génèrent des mouvements d'ions qui sont dans la plupart des cas électroneutres. En effet, en considérant un co-transporteur, le mouvement d'un ion positif est généralement couplé à celui d'un ion négatif; dans le cas d'un échangeur, le mouvement d'un ion dans un sens est couplé au mouvement d'un ion de même signe dans l'autre sens. Ces systèmes ne génèrent donc pas de potentiel transmembranaire. La première des exceptions à cette règle a été l'antiporteur 2 Na+/H+ mis en évidence pour la première fois en 1989 au niveau de tissus de différents invertébrés par deux équipes américaines travaillant indépendamment l'une de l'autre (Ahearn et Clay : Amer. J. Physiol., 257, R484, 1989 - Shetlar et Towle : Amer. J. Physiol, 257, R924, 1989).

Le gradient électrochimique en différents ions inorganiques peut aussi être utilisé pour transporter contre leur gradient différents composés organiques : acide γ aminobutyrique (GABA), glutamate ou noradrénaline dans les synapses du système nerveux (voir figure 12) ou encore acides aminés ou glucose (figure 13). Ce système parait être le seul impliqué dans le transport transmembranaire de ces composés au niveau des membranes plasmiques des cellules animales. Des systèmes de transport actif primaire de glucose, d'acides aminés ou de GABA n'ont en effet jamais été mis en évidence jusqu'à ce jour. Les coporteurs Na+-glucose et Na+-acides aminés jouent par ailleurs un rôle majeur dans le transport transépithélial de ces molécules, au niveau de l'intestin notamment. A côté de ces coporteurs, on a récemment mis en évidence un coporteur H+-pept impliqué dans le transport transmembranaire de différents peptides avec acidification du milieu intracellulaire (Fei et al. : Nature, 368, 563, 1994). On trouve aussi un coporteur K+-acides aminés chez les insectes.

Ce sont les transporteurs de glucose qui ont été les plus étudiés jusqu'à présent; ils appartiennent à une famille de

protéines à 12 segments transmembranaires en hélice α. Ils sont actuellement classés en une série de grandes familles (GLUT 1 à 4) en fonction de leur localisation tissulaire. Les profils d'hydrophobicité obtenus pour d'autres transporteurs (Na+/H+ ou GABA - 2 Na+ - Cl-) indiquent également la présence de 12 segments α-hélicoïdaux transmembranaires. Il ne semble cependant pas exister d'homologie de séquence entre uniports, symports et antiports, même lorsqu'ils sont impliqués dans les mouvements d'un même soluté. Ainsi, le cotransporteur Na+-glucose de la face apicale des entérocytes est tout à fait différent de l'uniport glucose localisé à la face basale. Par ailleurs, il existe des transporteurs à 6 segments α-hélicoïdaux (uniport urée) et le coporteur glutamate des cellules nerveuses en comporte 10 alors que celui de l'intestin en a 12 (voir par exemple Harvey et Nelson 1994).

4. Transport actif (primaire)

Le transport actif caractérise un mouvement de soluté contre son gradient de concentration à l'intervention d'une

réaction métabolique assurant le couplage énergétique. On distingue ainsi le transport actif (primaire) de la diffusion facilitée

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contre gradient électrochimique (dite aussi transport actif secondaire) dans laquelle le mouvement d'un soluté dans le sens de son gradient de concentration permet le transport d'un autre soluté contre son gradient.

Figure 13 : Le transport transépithélial de glucose au niveau de l’intestin

Il implique une diffusion facilitée mettant en œuvre un cotransporteur (symport) Na+-Glucose à la face apicale des entérocytes et un uniport à la face basale. L’activité du cotransporteur permet une accumulation intracellulaire de glucose et un transport contre gradient à la face apicale. Détails dans le texte.

Les transporteurs sont ici associés à des ATPases qui couplent le transport de différents ions inorganiques et de certains

composés organiques à l'hydrolyse de l'ATP. Les ATPases font partie intégrante des transporteurs qui sont dès lors généralement dénommés ATPases. Ainsi par exemple les Ca2+-ATPases désignent les systèmes de transport actif du calcium et les Na+/K+ATPases désignent les transporteurs impliqués dans des mouvements actifs couplés de Na+ dans un sens et de K+ dans l'autre sens. Ce système est tout à fait différent d'un antiporteur puisque ici, les deux ions se meuvent à l'encontre de leur gradient de concentration respectif (voir plus loin). Dans les systèmes de transport actif, l'activité d'hydrolyse de l'ATP est absolument essentielle au fonctionnement ; couper la fourniture d'ATP, en inhibant par exemple les phosphorylations oxydatives, revient à inhiber complètement l'activité de transport qui peut être rétablie par fourniture d'ATP ou d'un autre composé à liaison phosphate riche (figure 14).

Figure 14 : Effet inhibiteur du cyanure (inhibition des phosphorylations oxydatives) sur le flux sortant actif de Na+ au

niveau d'un axone géant de calmar. Le flux est rétabli temporairement par addition au milieu de phosphates à liaison riche (ATP ou arginine-P).

On distingue actuellement les ATPases "ioniques" impliquées dans le transport actif d'ions inorganiques des ATPases "de trafic" ou transporteurs ABC, impliqués dans le transport de solutés organiques.

• 1 Les ATPases ioniques

Types et localisation

Les ATPases ioniques se classent actuellement en 3 catégories : P, V et F. Les F-ATPases ou encore ATPsynthases pourraient être définies comme des H+-ATPases particulières. Présentes dans

les mitochondries, elles couplent en conditions physiologiques le mouvement de H+ suivant son important gradient à la synthèse de l'ATP à partir d'ADP et de P. Ces systèmes sont donc à considérer effectivement comme des synthases plutôt que des

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ATPases. Les ATPsynthases font partie intégrante du système de phosphorylation oxydative caractérisant le mécanisme mitochondrial de formation d'ATP (chaîne de transfert d'électrons). Elles ne sont donc pas primordialement impliquées dans les mouvements transmembranaires de solutés qui nous intéressent ici ; nous ne les envisagerons donc pas de façon plus détaillée. Notons cependant que les F-ATPases présentent un haut degré d'homologie avec les V-ATPases que nous allons envisager maintenant.

Les V-ATPases sont des H+-ATPases que l'on retrouve spécifiquement au niveau des membranes de différents

organites intracellulaires (vésicules, lysosome, etc…). Leur rôle est d'acidifier le compartiment intravésiculaire. Elles jouent dans ce cadre un rôle important dans les processus endocytaires

Les P-ATPases couplent l'hydrolyse de l'ATP au transport de différents ions à travers les membranes plasmiques ou, en ce qui concerne le Ca2+, également au niveau du réticulum endoplasmique. La Ca2+-ATPase du RE a pour rôle de pomper le calcium cytoplasmique dans le réticulum, réserve majeure de calcium intracellulaire. Elle joue dès lors dans le muscle un rôle primordial dans la relaxation qui suit l'excitation ; cette dernière étant déterminée par une relarguage massif d'ions Ca2+ dans les myofibrilles. Dans les autres cellules, elle joue un rôle, avec la Ca2+-ATPase membranaire, dans la régulation de la concentration en Ca2+ du milieu intracellulaire. Le Ca2+ intervient dans différents systèmes de signalisation intracellulaire et sa concentration est dès lors contrôlée de manière très fine. Nous reviendrons sur les Ca2+-ATPases dans les chapitres plus directement concernés par leurs activités physiologiques (figure 15).

Figure 15 : Les P-ATPases

A : Profils d’hydrophobicité comparés de la Na+/K+-ATPase membranaire et de la Ca2+-ATPase du RE (d’après Shechter 1997, modifié). B : Les différents domaines de la Ca2+-ATPase du RE. C : Représentation schématique de la Na+/K+-ATPase et D: Schéma de fonctionnement.

Outre les Ca2+-ATPases, on trouve également dans les membranes plasmiques des Na+/K+-ATPases, des H+/K+-ATPases et des H+-ATPases. Il y aurait également des Cl–-ATPases ; l'existence de ces dernières reste toutefois sujette à controverse. Les H+-ATPases n'ont été mises en évidence que récemment dans les membranes plasmiques de différents épithélia chez les animaux et leur rôle physiologique reste souvent assez mal défini. Elles pourraient notamment jouer un rôle majeur dans l'important flux entrant de Na+ qui s'effectue au niveau de différents épithélia limitant chez les animaux d'eau douce (branchies, peau…) ou encore dans le transport d'acides aminés au niveau de l'intestin des insectes. La H+/K+-ATPase paraît essentiellement exprimée au niveau de la muqueuse gastrique où elle joue un rôle important dans la sécrétion de H+.

Les Na+/K+-ATPases sont exprimées au niveau des membranes plasmiques de tous les types cellulaires chez les

animaux. Ces transporteurs jouent un rôle primordial dans l'établissement des gradients de concentration en Na+ et K+ ; gradients

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qui jouent à leur tour un rôle essentiel dans 1) l'établissement des potentiels de membrane et les phénomènes bioélectriques ; 2) l'activité des systèmes de diffusions facilitées et dès lors le maintien des concentrations ioniques intracellulaires ou encore l'entrée de différents solutés organiques dans les cellules (glucose, acides aminés) ; 3) le maintien du volume cellulaire.

Les Na+/K+-ATPases sont donc à la base d'un système fondamental dit de "pompes et fuites" gérant à la fois les

équilibres ioniques, les potentiels de membrane, l'équilibre osmotique et le volume cellulaire. Elles jouent également un rôle primordial dans les transports de Na+ transépithéliaux. A ce niveau, la Na+/K+-ATPase est toujours présente au niveau des membranes basales ou basolatérales. Elle n'est jamais exprimée au niveau apical. Elle interviendra donc dans le transport du Na+

du milieu intracellulaire vers le milieu IN (séreux) et non dans la sécrétion de l'ion vers le milieu extérieur. Les Na+/K+-ATPases paraissent toutes présenter une stoïchiométrie d'échange 3-2 (3 Na+ dans le sens IN/OUT pour 2

K+ dans le sens OUT/IN). Leur activité est donc électrogénique et participe, comme nous le verrons plus loin (section 6) à la génération du potentiel de membrane. Elles sont par ailleurs inhibées spécifiquement par l'ouabaïne, un glycoside cardiaque utilisé autrefois en médecine pour ces propriétés tonicardiaques. Incompris à l'époque, cet effet paraît en fait dû à une augmentation du Na+ IN provoquée par l'inhibiteur, induisant une diminution d'activité de l'antiporteur Ca2+/2Na+ avec, pour conséquence, une augmentation du Ca2+ IN et, dès lors, une augmentation du tonus cardiaque.

Organisation structurale, mode d'action

L'organisation tridimensionnelle des P-ATPases n'est pas encore complètement élucidée. Ces transporteurs possèdent

tous au moins une chaîne polypeptidique (chaîne α de ±100 kDa) qui paraît responsable de l'hydrolyse de l'ATP et du transport d'ion. Les sous-unités α des différentes P-ATPases, y compris la Ca2+-ATPase du RE et la H+/K+-ATPase gastrique, présentent une certaine homologie de séquences et ont des profils d'hydrophobicité voisins (figure 15) avec 10 segments α-hélicoïdaux transmembranaires.

La Ca2+-ATPase du RE présenterait, outre son domaine membranaire à 10 segments α-hélicoïdaux entre lesquels serait

organisé un canal, un large domaine cytoplasmique organisé en 3 parties : l'une, avec prolongements α-hélicoïdaux, intervenant dans la fixation du calcium et dans son transport vectoriel, les deux autres intervenant dans la fixation de l'ATP et dans la phosphorylation (figure 15). La Na+/K+-ATPase paraît composée de deux sous-unités α associées chacune à une unité β plus petite. Les unités α assureraient la fixation et la translocation des ions Na+ et K+ ainsi que la fixation et la phosphorylation de l'ATP. Le rôle des sous-unités β reste inconnu à l'heure actuelle. Les sous-unités αposséderaient également un site de fixation pour l'ouabaïne, glycoside cardiaque inhibant spécifiquement l'activité du transporteur (figure 15).

Les P-ATPases paraissent pouvoir exister en deux états E1 et E2. L'état E1 permet la fixation de l'ATP et la

phosphorylation du transporteur ainsi que la fixation de l'ion se trouvant du côté cytoplasmique. La transition de l'état E1 à l'état E2 ferait alors basculer le site de fixation du côté extracellulaire et modifierait son affinité pour l'ion fixé qui serait ainsi relarguer dans l'espace extracellulaire. Le transporteur serait alors déphosphorylé et reviendrait à l'état E1. Dans le système d'échange Na+/K+, l'état E2 phosphorylé permettrait la fixation du K+, sa translocation interviendrait alors en même temps que la déphosphorylation du transporteur qui reviendrait à l'état E1 (figure 15).

Les H+-ATPases des membranes plasmiques n'ont été découvertes que récemment. Leur organisation structurale, leur mode d'action de même que, comme nous l'avons déjà signalé, leurs rôles physiologiques ne sont pas encore complètement élucidés. Leur structure paraît être très voisine, voire identique, à celle des H+-ATPases vésiculaires (V-ATPases, voir ci-après, voir aussi Wieczorek et al., J. Exp. Biol., 203, 127, 2000). Ces H+-ATPases sont dès lors tout à fait différentes des autres ATPases ioniques des membranes plasmiques. De nombreux auteurs réfèrent d'ailleurs toujours au terme de V-ATPases pour désigner indifféremment les H+-ATPases des vésicules intracellulaires et des membranes plasmiques. Une pratique que nous avons préféré ne pas suivre, regroupant les H+-ATPases des membranes plasmiques avec les P-ATPases et réservant le terme V-ATPases aux transporteurs actifs de H+ des vésicules intracellulaires.

• 2. Les "trafics" ATPases Les trafics ATPases ou transporteurs ABC (ATP Binding Cassette) couplent le transport de solutés organiques à

l'hydrolyse de l'ATP. Ils appartiennent à une famille de protéines présentant deux domaines de 6 segments transmembranaires en α hélice et 2 domaines hydrophiles situés du côté interne de la membrane plasmique (figure 16). Certains de ces transporteurs paraissent par ailleurs présenter des propriétés de canal à Cl-. Ils ont été jusqu'à présent mieux étudiés chez les bactéries que chez les eucaryotes, au niveau desquels leurs caractéristiques physiologiques restent souvent peu claires.

Figure 16 : Représentation schématique de CFTR. Détails dans le texte.

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Ainsi par exemple, les protéines du groupe MDR (Multi Drug Resistance) paraissent impliquées dans le transport de

lipides soit à travers la membrane plasmique soit d'une couche de lipides à l'autre (MDR2 chez l'homme et la souris). Elles sont également impliquées dans la sécrétion active de drogues anticancéreuses (MDR1), conférant ainsi aux cellules une certaine résistance à ces drogues (d'où le nom des protéines du groupe). MDR1 possède par ailleurs des propriétés de canal Cl régulé par l'osmolarité du milieu ; la mise en milieu hypoosmotique de cellules exprimant la protéine induit en effet une augmentation de la conductance au Cl- (Valverde et al., Nature, 355, 830, 1992). La protéine CFTR (Cystic Fibrosis Transmembrane Conductance Regulator), dont l'altération du gène conduit à la mucoviscidose, présente une grande analogie topologique avec les transporteurs ABC. Elle paraît impliquée dans la régulation de l'activité de canaux Cl- dont le dysfonctionnement serait une des causes premières de la maladie. Celle-ci se traduit, dans son expression la plus grave, par un épaississement du mucus des voies respiratoires pouvant engendrer difficultés respiratoires et infections chroniques devenant létales. En fait, des études en patch clamp ont montré que CFTR est un canal Cl- régulé de manière complexe par phosphorylation via une protéine kinase A activée par l'AMPc et l'ATP. L'activation du canal CFTR permet l'activation d'un autre canal Cl- (ORCC : Outward Rectifying Chloride Channel) de conductance plus élevée (Egan et al., Nature 358, 581, 1992). La mucoviscidose résulterait du manque d'activation de ce canal par un CFTR altéré. Les interactions entre les deux protéines restent loin d'être éclaircies.

• Exemples de mouvements d'ions au niveau membranaire Les équilibres hydriques et ioniques au niveau organismique résultent essentiellement de mouvements d'ions et d'eau au

niveau des membranes plasmiques des cellules auxquels il faut ajouter, au niveau des épithélia, quelques mouvements paracellulaires. Nous pouvons considérer que les mouvements des 3 ions inorganiques majoritaires (Na+, K+ et Cl-) résultent de l'activité d'un système dit de "pompes et fuites" (figure 15) essentiellement basé sur des gradients de concentration établis par le système de transport actif Na+/K+ (Na+/K+-ATPase). Ce système permet l'établissement de gradients de concentration Na+ (OUT/IN) et K+ (IN/OUT) sur lesquels se greffent différents mécanismes : diffusion via des canaux, diffusion facilitée. Par ailleurs, l'activité du transport actif Na+/K+ et les mouvements diffusionnels du K+ génèrent un potentiel de membrane + extérieur - intérieur qui va influer sur les mouvements diffusionnels d'ions. Ainsi, par exemple les mouvements sortants de Cl- seront essentiellement régis par un cotransport K+-Cl- et une diffusion suivant le gradient de potentiel. Remarquons par ailleurs que la mise en évidence récente de systèmes de transport actif de H+ et de Cl- de même que celle de coporteurs et d'antiporteurs utilisant le gradient de H+ au lieu d'un gradient de Na+ devraient sous peu élargir le concept du système de "pompes et fuites". Ces systèmes, ainsi peut être que d'autres encore, devraient en effet être inclus dans le schéma général (voir § suivant et figures 17 et 18). Remarquons encore que, dans les conditions normales, les flux IN et OUT pour les 3 ions osmotiquement majoritaires doivent s'équilibrer de telle sorte qu'il n'y ait pas de flux net qui engendrerait un déséquilibre osmotique et dès lors une variation de volume. Un schéma simple illustrant le concept de "pompes et fuites" est présenté dans la figure 17. Il reprend l'essentiel des mécanismes de base pouvant intervenir dans les mouvements ioniques. Un certain nombre d'entre eux sont présents dans tous les types cellulaires, c'est le cas par exemple de la Na+/K+-ATPase, de certains canaux et de différents symports et antiports. Ils ne sont cependant ni tous ni toujours exprimés partout. C'est en fait l'expression différentielle de ces mécanismes et sa régulation, soit au niveau de cellules différentes ou, en ce qui concerne les épithélia, au niveau de la face apicale ou de la face basale, qui confère aux tissus une spécificité fonctionnelle. Ainsi par exemple, l'organisation des transporteurs de glucose au niveau de l'épithélium intestinal ou l'organisation des canaux Na+ et K+ dépendant du potentiel au niveau du tissu axonal. Ces spécificités seront envisagées plus particulièrement dans les chapitres concernés. La figure 16 reprend, à titre d'exemple, quelques systèmes de transport transépithéliaux.

Figure 17 : Le système de "pompes et fuites"

Celui-ci joue un rôle fondamental dans la gestion des équilibres ioniques, des potentiels de membrane et du volume cellulaire. Les mécanismes pouvant intervenir sont loin d'être tous représentés. Détails dans le texte.

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Les exemples choisis font essentiellement intervenir les gradients ioniques établis sur base de l'activité d'un transport actif Na+/K+ d'une part (pour Na+, K+ et Cl-) et du métabolisme intracellulaire d'autre part (pour H+ et HCO3-). Ils n'excluent évidemment pas l'existence d'autres systèmes. Ainsi par exemple, chez les poissons d'eau douce comme la truite, l'entrée de NaCl à la face apicale de l'épithélium branchial paraît essentiellement impliquer un échangeur HCO3-/Cl- localisé au niveau de cellules pavimenteuses pour le Cl- et un canal Na+ couplé à l'activité d'une H+-ATPase localisés au niveau de cellules dites riches en mitochondries pour le Na+ (figure 18A - Wilson et al., J. Exp. Biol., 203, 2279, 2000). Un système H+-ATPase - canal Na+ paraît également intervenir dans l'entrée de Na+ au niveau des branchies des crustacés d'eau douce. Son rôle éventuel chez les crustacés marins euryhalins en milieu dilué paraît par contre beaucoup moins évident à l'heure actuelle. Il semble par ailleurs qu'au niveau de l'intestin des insectes, le transport d'acides aminés à la face apicale des entérocytes soit organisé sur base de coporteurs K+-AA plutôt que sur un système Na+-AA comme chez les autres espèces. Le gradient OUT/IN de K+ nécessaire au fonctionnement du mécanisme paraît engendrer au niveau de la face apicale de cellules particulières jouxtant les entérocytes et présentant une forte activité H+-ATPasique ainsi qu'un transport d'échange K+/2H+. L'activité couplée de ces deux systèmes résulte en une sécrétion de K+ qui est alors utilisé par les entérocytes au transport d'acides aminés. A ce jour, l'activité d'un antiporteur K+/H+ ne paraît importante que chez les insectes et le rôle physiologique du couple H+-ATPase, antiporteur K+/2H+ leurs serait spécifique, intervenant non seulement au niveau de l'intestin mais aussi des tubes de Malpighi (Wieczorek et al., J. Biol. Chem, 266, 15340, 1991, J. Exp. Biol., 203, 127, 2000 ; Lepier et al., J. Exp. Biol. 196, 361, 1994 - aussi dans Harvey et Nelson, 1994). Le système marche d'autant mieux que le gradient de K+ IN/OUT est élevé. Dans ce cadre, il est intéressant de remarquer que la Na+/K+- ATPase ne serait que peu ou pas exprimée à la face basale de l'épithélium.

Figure 18 : Exemples d'intervention de mécanismes de transport d'ions dans des flux transépithéliaux.

A : Transport IN de NaCl, branchies de poissons et de crustacés en eau douce. B : Transport IN de NaCl et de KCl, tubules proximaux et partie ascendante de l'anse de Henlé des néphrons. C : Sécrétion de HCl, muqueuse gastrique. Les potentiels repris sont uniquement ceux impliqués dans des mouvements diffusionnels d'ions contre gradient. 5. Le transport vésiculaire (figure 19)

• Généralités

Les mécanismes considérés ici concernent le passage de solutés ou d'éléments macromoléculaires à l'intervention de la

formation, à partir de la membrane plasmique, de vésicules qui les englobent puis, descendant dans le cytoplasme, forment des endosomes pouvant avoir différentes destinations. Ceux-ci peuvent en effet fusionner avec des granules de stockage, avec le lysosome dans le cadre d'une digestion et d'une absorption intracellulaire ou, dans le cas des épithélia, avec la membrane plasmique de la face opposée de la cellule dans un phénomène de transcytose.

A l'inverse des mécanismes de transport dits "en ligne" considérés précédemment, le transport vésiculaire permet le

passage d'éléments macromoléculaires de dimensions importantes, pouvant aller jusqu'à l'absorption de débris cellulaires, de bactéries ou de cellules entières. Différents solutés de petites tailles passent également dans les cellules par ce système plutôt que par un transport "en ligne", ainsi par exemple le fer est "endocyté" plutôt que "transporté" (voir plus loin).

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On distingue généralement différents mécanismes de formation de vésicules transportrices : la pinocytose, la potocytose, l'endocytose et la phagocytose. Dans les trois premiers cas, les éléments transportés sont de relativement petites tailles, allant par exemple du fer à différentes protéines ou aux vésicules LDL transportant le cholestérol. Dans le dernier cas, les éléments sont spécifiquement de grande dimension (de l'ordre de 1 à 2 mm ou plus) : débris cellulaires, voire cellules entières. La potocytose, l'endocytose et la phagocytose font intervenir la liaison de l'élément à transporter ou d'un ligand associé à cet élément avec un récepteur membranaire, ce qui n'est pas le cas de la pinocytose. Les récepteurs sont très spécifiques des ligands ou des éléments à transporter et montrent généralement une très haute affinité pour ceux-ci, avec des Km de l'ordre de 10-8 M.

Figure 19 : Les systèmes de transport vésiculaire (A) et le devenir possible des vésicules transportrices (B).

• la pinocytose Ce mécanisme est resté peu étudié. Il fait intervenir la formation d'invaginations ou de pseudopodes qui forment

finalement des vésicules membranaires contenant un peu du milieu extracellulaire avec les substances en solution qu'il renferme (figure 20). Il s'agit donc d'un processus non spécifique qui pourrait être en relation avec l'activité normale de remplacement de la membrane plasmique. Les cellules eucaryotes ingèrent en effet continuellement des morceaux de leur membrane plasmique par un phénomène de type pinocytaire. La vitesse de ce processus peut être relativement élevée ; on estime ainsi qu'un macrophage remplace l'ensemble de sa membrane plasmique toutes les 30 minutes. On a cependant observé que l'activité pinocytaire pouvait être augmentée largement par la présence dans le milieu de certains solutés comme des acides aminés par exemple.

Figure 20 : La pinocytose : phénomène d'absorption non spécifique du milieu extracellulaire avec les substances en solution

qu'il contient. Les invaginations membranaires apparaissant dans ce processus se fragmentent peu à peu en fines gouttelettes ou vésicules qui s'enfoncent dans le cytoplasme. Il pourrait ne s'agir que d'une conséquence du processus de renouvellement normal de la membrane et non pas d'un mécanisme de transport particulier.

• l'endocytose

L'endocytose est certainement le mécanisme de transport vésiculaire le mieux étudié à ce jour. La recherche fondamentale a en effet largement bénéficié de l'intérêt de la médecine pour le transport du cholestérol et son absorption qui s'effectue par endocytose de vésicules LDL. Ces vésicules contiennent quelque 1500 molécules d'esters de cholestérol enfermées dans une enveloppe constituée essentiellement de cholestérol non estérifié et de phospholipides. On y trouve également une protéine (Apo-protéine ou Apo B) qui sert de ligand qui va permettre la liaison de la vésicule à endocyter au récepteur spécifique se trouvant sur la membrane des cellules cibles.

En fait, le processus général de formation des vésicules endocytaires s'est révélé être similaire pour les différents

éléments transportés étudiés à ce jour. Il débute avec une liaison ligand-récepteur qui, comme nous l'avons déjà signalé, est extrêmement spécifique. Après liaison, il paraît y avoir concentration des complexes ligand + élément transporté - récepteur par migration latérale vers des domaines particuliers de la membrane au niveau desquels débute un processus d'internalisation avec formation de puits dits "recouverts", "mantelés" ou "enveloppés" (figure 21A). Ceux-ci apparaissent en microscopie électronique comme des dépressions recouvertes sur la face interne par un réseau de nature protéique (réseau de clatrines ou

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clathrines) formant un filet soutenant la dépression membranaire (figure 21B,C). Ce réseau est formé d'arrangements de chaînes polypeptidiques de clatrines, une protéine fibreuse résultant de l'association d'une chaîne lourde H (180 Kda) et d'une chaîne légère L (35 Kda).

Figure 21 : Le phénomène d'endocytose.

A : Représentation del'ensemble du processus dans lecas de la digestion de l'élémenttransporté par le lysosome.Détails dans le texte. B et C :Clatrines, triskelions et réseaude clatrines constitué à partirde ceux-ci. D : Vues illustrant laformation des puits recouvertset l'internalisation aboutissant àla formation de vésiculesmantelées (C et D : d’aprèsHeuser, J. Cell. Biol. 84, 560,1980, modifié). E : Schémamontrant la structure globaleprobable d'une V-ATPase,pompe assurant le transportactif de H+ dans le milieuintravésiculaire. Il estintéressant de remarquer que,contrairement aux autresATPases des membranesplasmiques, les V-ATPasesprésentent de nombreuseshomologies avec les F-ATPases(ATP syntases) intervenant dansla formation d'ATP àl'intervention du gradient de H+

mitochondrial. Elles présententdeux grands secteurs, un, V0intramembranaire de ±250Kda, impliqué, avec une sous-unité α, dans le transportvectoriel des protons et un , V1extramembranaire de ±500Kda, qui contient différentsdomaines catalytiques (de A àH). D'après Futai et al., J. Exp.Biol., 203, 107, 2000, modifié.

Les clatrines s'organisent en des structures trimériques, les "triskelions", qui sont à la base de l'organisation du "filet"

soutenant la membrane. Les étapes de l'internalisation et de la formation du réseau de clatrines restent à l'heure actuelle mal connues. Il apparaît en tout cas que certaines parties du domaine cytoplasmique des récepteurs peuvent fixer, suite à activation par la liaison avec le ligand, des adaptines (protéines AP2) qui vont permettre l'accrochage des clatrines à la membrane. La séquence du domaine cytoplasmique des récepteurs permettant "l'apontage" des AP2 est relativement variable. Il existe toutefois dans la partie terminale de tous ces récepteurs un résidu tyrosine permettant une phosphorylation qui paraît essentielle comme le

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démontrent des études sur mutants dépourvus de ce résidu et ne présentant que peu ou pas d'internalisation. Dans de nombreux cas, l'activation de l'internalisation et la formation du réseau de clatrines débute avec une dimérisation des récepteurs, dimérisation autorisant la phosphorylation de la région régulatrice. C'est le cas par exemple pour l'endocytose du fer; ce n'est à l'inverse pas le cas pour celle des vésicules LDL où le récepteur reste monomérique. Le processus d'internalisation se termine par la formation d'une vésicule dite mantelée (entourée d'un "manteau" de clatrines) d'un diamètre d'environ 80 nm et libre dans le cytoplasme. La vésiculation s'accompagne de l'activation d'une V-ATPase (figure 21E) responsable d'une acidification du contenu vésiculaire. L'apport de protons paraît induire la perte de la couverture de clatrines puis la libération des récepteurs et éventuellement du ligand des éléments transportés. On assiste ainsi à la formation de vésicules lisses et à leurs vésiculation avec recyclage, via la formation d'endosomes dits "précoces", des récepteurs et des phospholipides de membranes internalisées, parfois aussi des ligands. D'un point de vue cinétique, les endosomes précoces sont les premières structures intracellulaires après les vésicules lisses à être marquées à partir de traceurs radioactifs internalisés, d'où leur dénomination de "précoce". Un marquage plus tardif s'effectue au niveau d'endosomes dits tardifs qui constituent, dans une étape suivante, un compartiment où s'accumulent les produits destinés à la digestion lysosomiale (figure 21A). Voir la figure 22.

Figure 22 : Schéma simplifié illustrant la fixation des clatrines participant à la formation de l'enveloppe des puits via les adaptines.

En fait, les AP2 sont des hétérotétramères dont certaines sous-unités lient les clatrines à la membrane, d'autres les liant aux récepteurs.

Le devenir des ligands et des récepteurs internalisés est variable. Un des membres du couple ou les deux peuvent en effet être dégradés ou recyclés, les causes intimes de ce devenir restant à l'heure actuelle inconnues. Dans le cas de l'endocytose des vésicules LDL à cholestérol par exemple, seules les récepteurs sont recyclés. La vésicule contenant le LDL et ses ligands protéiques (Apo B) fusionnent avec le complexe lysosomial. Dans le cas de l'endocytose du fer par contre, récepteurs, ligands et membranes internalisées sont recyclés ; le fer quitte en fait le ligand suite à acidification des vésicules transportrices ; les complexes ligands-récepteurs sont ensuite recyclés, n'étant eux-mêmes dissociés qu'après fusion des vésicules les contenant avec la membrane. Rien dans ce cas ne va au lysosome (figure 23). Dans d'autres cas encore, les vésicules lisses fusionnent avec la membrane plasmique dans un système de transcytose.

Figure 23 : L'endocytose du fer.

Le fer est un élément important dont les besoins cellulaires sont comblés par endocytose. Dans ce processus, le fer est tout d'abord fixé à une globuline sanguine : la transferrine qui d'apotransferrine devient ferritransferrine après avoir fixé 2 atomes

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de fer sous forme déprotonée. La ferritransferrine sert de ligand qui s'associe à un récepteur membranaire spécifique dimérisé. Il y a alors internalisation des zones membranaires allant former les puits, apontage des adaptines et organisation du réseau de clatrines conduisant à la formation de vésicules mantelées. L'acidification du milieu intravasculaire permet la dissociation des complexes fer-transferrine et le relarguage du fer qui est alors stocké sur de la ferritine, une protéine intracellulaire pouvant fixer des milliers d'ions ferrique. A pH acide, l'apotransferrine reste ancrée à son récepteur et l'ensemble est recyclé via les endosomes précoces. Au pH neutre du milieu extracellulaire, l'apotransferrine se détache du récepteur et un nouveau cycle peut recommencer

Le déterminisme de la fusion des vésicules et donc leur devenir paraît faire intervenir un système de protéines d'adressage qui paraît s'installer lors de la formation des puits. Ce système, tout d'abord étudié dans le cadre de la fusion des vésicules synaptiques contenant les neurotransmetteurs avec la membrane de la région axonale présynaptique s'est révélé d'être d'intérêt général. Il est actuellement connu sous la dénomination de système SNAP-SNARE.

• le système de fusion SNAP-SNARE Le système SNAP-SNARE paraît impliqué de façon générale dans les phénomènes de fusion des vésicules

transportrices à la membrane. Il fait intervenir des protéines SNARE (pour SNAP Receptor), réceptrices de protéines SNAP (pour Soluble NSF Attachment Protein), elles-mêmes réceptrices de protéines de fusion NSF (pour N-ethylmaléimide Sensitive Factor).

Les SNARES apparaissent comme des protéines intégrales de membrane. La fusion et la reconnaissance préalable par

la vésicule de la membrane cible appropriée se font à l'intervention de 2 protéines SNARE. Une v-SNARE sur la vésicule et une t-SNARE (target) sur la membrane cible. L'association des v et t SNARES permet l'apontage de SNAPs qui eux-mêmes permettent la liaison de NSFs aux complexes SNAP-SNARE. Les NSFs possèdent une activité ATPasique qui intervient dans la fusion et la dissociation des complexes v-SNARE/t-SNARE (figure 24).Un système similaire paraît également impliqué dans l'apontage membranaire des vésicules COP (mantelée de Coat Proteins) transportant les protéines fabriquées par le reticulum endoplasmique ou le golgi.

• potocytose et cavéoles La potocytose réfère à un mécanisme de découverte récente impliquant la formation de cavéoles au niveau de la

membrane plasmique (figure 25). Les cavéoles apparaissent en microscopie électronique comme des puits comparables à ceux du système endocytaire (voir ci-dessus) mais s'en distinguant par une absence de couverture (clatrines) et un diamètre plus réduit. Depuis leur découverte, les cavéoles ont été mise en évidence au niveau de différents types cellulaires. Leur nombre peut être très élevé comme par exemple au niveau des cellules endothéliales, des adipocytes ou des muscles. Les lymphocytes par contre paraissent en être totalement dépourvus.

Les cavéoles pourraient être à la base d'une voie particulière d'internalisation de différentes molécules (folate, différentes protéines de signalisation ancrée au GPI, etc.). Dans ce rôle, elles concentreraient ces molécules au niveau de structures réceptrices particulièrement nombreuses dans les microdomaines membranaires où elles se forment (domaines à cavéolines). Après association des récepteurs avec les éléments à transporter, les cavéoles se fermeraient, donnant naissance à des vésicules qui, à l'inverse des vésicules endocytaires, resteraient la plupart du temps au contact de la membrane. L'acidification du milieu intracavéolaire par activation de V-ATPases engendrerait la libération des éléments transportés des récepteurs. Les éléments pourraient alors être transportés activement à travers la membrane cavéolaire par des transporteurs spécifiques (comme on l'envisage pour l'acide folique) ou encore libérés dans le milieu intracellulaire par ouverture de la cavéole sur ce milieu (figure 25).

La potocytose reste cependant un phénomène loin de faire l'unanimité, les études à son sujet étant encore parfois

contradictoires. Les cavéoles contiennent des concentrations élevées d'une famille de protéines particulières, les cavéolines, présentant

toutes un domaine N-terminal hydrophile permettant des interactions avec de nombreuses autres protéines, un domaine intramembranaire et un domaine C-terminal palmitoylé servant de système d'ancrage à la membrane (figure 1-60). Ces protéines sont très conservées et on les trouve pratiquement inchangées depuis les cellules des invertébrés les plus primitifs jusqu'aux mammifères. Les domaines N-terminaux d'accrochage des cavéolines permettraient la concentration, au niveau des microdomaines membranaires où elles se trouvent, de différentes protéines actives : récepteurs et transporteurs de folate, pompe à calcium, eNOS (endothélial Nitric Oxide Synthase), protéines G, protéine Kinase A, TNFR (récepteur du TNF, une cytokine déclenchant l'apoptose), facteurs de croissance, etc. Les cavéoles paraissent donc pouvoir jouer un rôle important non seulement dans le transfert transmembranaire de différents éléments mais encore dans différents mécanismes de signalisation transmembranaire, de différentiation cellulaire ou encore d'initiation de l'apoptose. Le rôle des cavéoles paraît donc nettement plus large qu'une potocytose éventuelle. Il reste toutefois loin d'être éclairci et fait à l'heure actuelle l'objet de nombreuses études.

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Figure 24 : Fusion des vésicules à la membrane-cible : le système SNAP-SNARE. Détails dans le texte.

Figure 25 : Cavéoles, cavéolines et potocytose : un rôle possible des cavéoles

Les cavéoles représenteraient une forme particulière des microdomaines membranaires à cavéolines. Détails dans le texte. A : Schéma du mécanisme de transport du folate par potocytose (d'après Anderson et al., Science, 255, 410, 1992, modifié). B : Vue en microscopie électronique de cavéoles au niveau d'hépatocytes en culture (d'après Henley et al., J. Cell. Biol., 141, 85, 1998). C : Schéma de 2 cavéoles fixées à la membrane par une boucle intramembranaire et palmitoylation du domaine C-terminal.

• la phagocytose La phagocytose apparaît comme une forme particulière d'endocytose. Elle paraît en effet faire intervenir les mêmes

mécanismes d'internalisation, d'acidification du contenu vésiculaire et de liaison au lysosome que celle-ci. Les vésicules formées après ingestion ne possèdent cependant pas de manteau de clatrines. De plus, le processus de vésiculation est différent et permet l'ingestion de particules de grandes tailles (débris cellulaires, bactéries, cellules âgées, infectées ou étrangères). En cela, la phagocytose apparaît comme un mécanisme de nettoyage ou de défense de l'organisme. Chez différents protozoaires ainsi que chez les cœlentérés, elle constitue par ailleurs une voie d'alimentation. Chez les pluricellulaires, l'ingestion de particules de

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grandes tailles est le fait de cellules phagocytaires spécialisées. Elles existent chez toutes les espèces mais on ne dispose pour la plupart d'entre elles que d'une description morphologique. Le mécanisme d'ingestion n'a été bien étudié qu'au niveau des globules blancs des mammifères où lymphocytes, monocytes et polynucléaires se chargent de l'élimination des structures infectieuses, abîmées ou sénescentes. Le cas le plus connu est évidemment la réaction de défense immunitaire à une infection. Très brièvement, les agents étrangers à éliminer (antigènes) reçoivent de lymphocytes B ou T auxiliaires des ligands (anticorps ou immunoglobulines : Ig) qui vont être reconnus par des récepteurs spécifiques des macrophages qui les phagocytent (figure 26). Certains types de lymphocytes (T cytotoxiques ou Tc) ont également des récepteurs qui leurs permettent de reconnaître une cellule antigénique cible mais ceux-ci la tuent et ne la phagocytent pas.

La phagocytose par les macrophages débute avec l'émission de pseudopodes qui englobent progressivement l'antigène

pour autant que celui-ci soit entièrement recouvert d'anticorps. Si l'antigène n'est pas recouvert complètement, le processus s'arrête, empêchant l'ingestion. Nombre de récepteurs et d'anticorps impliqués dans les réactions immunitaires sont maintenant bien connus. Nous renverrons le lecteur intéressé par plus de détails à un traité d'immunologie.

Les particules étrangères ne relevant pas du système de reconnaissance cellulaire avec production d'anticorps sont

recouvertes de façon non spécifique par des protéines sériques dites de complément qui vont induire la phagocytose des macrophages par liaison à des récepteurs particuliers dits récepteurs de complément. Certaines protéines du système de complément peuvent également intervenir dans la lyse d'un antigène. Elles reconnaissent en effet le complexe anticorps-antigène et, se fixant à la membrane de ce dernier, y induisent des perforations.

La phagocytose par les macrophages intervient également de façon essentielle dans l'élimination des globules rouges

sénescents (figure 26). On estime ainsi que chez l'homme, 1011 globules rouges sont phagocytés chaque jour. D'un point de vue quantitatif, cette fonction des macrophages apparaît donc comme plus importante que celle qu'ils occupent dans les réactions immunitaires. Le mécanisme qui permet aux macrophages de distinguer les globules rouges vieillis des autres reste mal connu. De même, on ne connaît à l'heure actuelle pas grand chose des mécanismes induisant et régissant la phagocytose alimentaire chez les protozoaires ou les cœlentérés.

Figure 26 : A : La phagocytose de type immunitaire.

L'antigène à ingérer est recouvert d'anticorps (ligands) reconnus par des récepteurs spécifiques des macrophages. Dans ce système, l'antigène est tout d'abord "présenté" à des lymphocytes auxiliaires par un macrophage. Les lymphocytes ainsi activés produisent alors des anticorps qu'ils libèrent dans le sang. Ceux-ci vont se fixer spécifiquement sur les antigènes et seront reconnus par des récepteurs spécifiques synthétisés par les macrophages, la liaison récepteur-anticorps induisant l'ingestion. B : Vue en microscopie électronique d'un macrophage ingérant 2 globules rouges sénescents. Remarquez la membrane du macrophage qui s'étale et englobe progressivement les globules (d'après Weiss 1988, modifié).