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Le Tétras lyre (Tetrao tetrix) est une espèceboréo-montagnarde ayant une large répartitiongéographique. La diversité des milieux qu'il fré-quente en Europe n'est qu'apparente et masquede grandes similitudes. Tout d'abord, le Tétraslyre affectionne les habitats de transition entreles milieux ouverts et forestiers : stades jeunesdes forêts boréales claires et abords des tourbiè-res dans le nord de l'Europe, tourbières, landestourbeuses ou sèches et lisières des forêts alpinesen Europe occidentale et centrale. La deuxièmeressemblance des milieux fréquentés concerneleur richesse en Ericaceae et, en particulier, l'a-bondance des massifs de myrtilles communes(Vaccinium myrtillus) et de bruyères (Erica sp. -Calluna vulgaris) (KEULEN et al., 1997). Ces

dernières peuvent être remplacées localementpar des étendues de camarine (Empetrumnigrum) ou de rhododendrons (Rhododendronsp.) dans les forêts alpines.

Sur l'ensemble de leur aire de répartition, lespopulations de Tétras lyre subissent des fluctua-tions cycliques importantes. Celles-ci résultentd'interactions entre le climat, la nourriture dispo-nible, l'état de la végétation, la pression de pré-dation et la densité des oiseaux eux-mêmes. Siles vicissitudes du climat expliquent ces varia-tions naturelles, le déclin quasi généralisé, enre-gistré à l'échelle européenne, est lui générale-ment attribué à la diminution et la fragmentationdes surfaces habitables, à la détérioration des

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RÉSUMÉ - La population de Tétras lyres du plateau des Hautes-Fagnes est aujourd’hui mena-cée, comme celles des autres contrées européennes. Face à cette situation, un plan de restau-ration de l’espèce a été mis sur pied. La sélection des habitats par les coqs et par les poulesa été étudiée pendant 8 ans dans la plus grande partie de la zone occupée par l’espèce. Lerégime alimentaire a été étudié par l’analyse de crottes collectées tout au long de l’année. Lesrésultats montrent que les facteurs clés dans la sélection des habitats par les tétras sont laqualité des zones à Ericaceae, l’ouverture du milieu, la possibilité de trouver des terrainsplats et dégagés pour les arènes de parade, la présence de bois clairs (bouleaux et sorbiers)et la possibilité de creuser des igloos durant les périodes neigeuses. A la lumière de ces pre-miers résultats, la Direction de la Nature et des Forêts du Ministère de la Région Wallonne apris diverses mesures afin d’améliorer l’habitat au bénéfice du Tétras lyre dans la RéserveNaturelle Domaniale des Hautes-Fagnes.

Christine KEULEN, Olivier CHARLET, Pascal PONCIN & Jean-Claude RUWET

Evolution des populations de Tétras lyres (Tetrao tetrix) sur le plateau des Hautes-Fagnes en regard des modifications des paramètres écologiques du milieu

Introduction

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1. Site d’étudeLa Réserve Naturelle Domaniale des Hautes-Fagnes est située au nord-est de la Belgique; ellecouvre une superficie totale de 4.500 hectares etenglobe le point culminant du pays; l'altitude yvarie entre 500 et 694 mètres. Elle jouit d'un cli-mat plus froid et plus humide que le reste dupays. Elle se présente comme une mosaïqued'habitats sur sols essentiellement tourbeux etparatourbeux : tourbières hautes actives, tourbiè-res dégradées (résultant notamment de l'exploita-tion de la tourbe ou des incendies), landes tour-beuses, landes sèches à bruyère, nardaies, bou-laies, saulaies et aulnaies, hêtraies sur les crêteset massifs de résineux (Epicéas Picea abies pourla majeure partie) (KEULEN et al., 1997, 2000).

2. Recensements et écologiegénéraleDe janvier 1995 à mai 2003, les effectifs deTétras lyres ont été recensés dans la RéserveNaturelle Domaniale des Hautes-Fagnes, selonles mêmes méthodes que celles adoptées depuis1966 (RUWET et al., 1997; RUWET, 2000). Lesmâles sont dénombrés aux arènes de parade (du1er avril au 7 mai) à partir de postes d'observa-tion situés à une distance minimale de 500 mèt-res des oiseaux afin d'éviter tout dérangement.Les opérations de dénombrement sont réaliséesplusieurs fois sur chaque grande zone, afin decroiser les observations. Deux recensements glo-baux sont réalisés en outre avec une vingtained'observateurs, sous la direction du CRNFB, lors

qualités de l'habitat, à l'augmentation de la pres-sion de prédation et aux dérangements occasion-nés par l'homme, notamment par la chasse et letourisme (LONEUX et al., 1997).

En Wallonie, au début des années '60, l'espècen'était guère plus abondante qu'aujourd'hui. LesTétras lyres avaient déserté le camp militaire deLagland et la Botte du Hainaut. Suite à l'inter-diction du tir et à la conjonction d'une série defacteurs favorables (étés secs, incendieslocaux…), les populations se sont accrues audébut des années '70 et ont atteint des densitésexceptionnelles : 210 coqs dans les Hautes-Fagnes, 70-80 sur le Plateau des Tailles… pourne citer que les deux noyaux principaux et lesmieux connus. A partir de 1971, l'espèce enre-gistra des fluctuations de populations, ponctuéespar les aléas du climat, pour entamer un déclinmarqué à partir de 1993.

Au début des années '80, le Tétras a disparu duPlateau des Tailles. Actuellement, l'espèce n'estplus observée que sporadiquement en Croix-Scaille ou dans la région des Fagnes deMalchamps et de Stoumont, où la reproductionne serait qu'occasionnelle. L'espèce ayant égale-

ment disparu des sites campinois qu'elle fré-quentait jadis, la Réserve Naturelle Domanialedes Hautes-Fagnes constitue actuellement lerefuge ultime du Tétras lyre en Belgique. Lapopulation, en 2003, était estimée à 14 coqs seu-lement.

Depuis plus de trente années, le Laboratoired'Ethologie de l'Université de Liège (Prof.Ruwet & Poncin et collaborateurs) étudie lecomportement, les structures sociales et la dyna-mique des populations du Tétras lyre (RUWET etal., 1997). Les exigences écologiques de l'espè-ce étaient peu connues. En 1995, devant la situa-tion critique de l'espèce, la Région Wallonne asoutenu financièrement un programme de restau-ration de l'espèce dans la Réserve NaturelleDomaniale des Hautes-Fagnes. Celui-ci compre-nait trois volets : scientifique (visant à cerner l'é-cologie du Tétras lyre sur le Haut-Plateau), tech-nique (pour la mise en œuvre de mesures de ges-tion du milieu en collaboration avec la DGRNE)et de vulgarisation (rédaction de panneaux etbrochures didactiques à l'attention du grandpublic). Le présent article développe les aspectsscientifiques de ce projet.

Matériel et méthode

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de la semaine des accouplements (période la pluspropice, située dans la dernière décade d'avril).

Dans un premier temps, les caractéristiques pay-sagères des arènes de parade ont aussi été analy-sées (KEULEN, 1997, 2000). Ensuite, les exigen-ces écologiques du Tétras lyre dans la Réserveont été étudiées.

Etant donné la situation critique de la population,le suivi par radio-trekking (auquel un facteurstress reste toujours imputable) a été rejeté d'em-blée. Les résultats développés ici sont donc fon-dés essentiellement sur des observations directes(contacts visuels) ou indirectes (repérage desigloos, fèces, empreintes, places de poudrage etde repos…). Durant quatre années, deux obser-vateurs ont travaillé simultanément sur le terrain,dès que les conditions météorologiques le per-mettaient et ce, tout au long de l'année. Les ob-servations directes des oiseaux et leurs mouve-ments ont été suivis au long d'itinéraires échan-tillons ou à partir de postes panoramiques choi-sis pour embrasser une zone de prospection laplus large possible (à l'aide de télescopes et dejumelles).

En parallèle, une enquête a été menée auprès desornithologues amateurs, des surveillants auxi-liaires de la Division Nature & Forêts et des ges-tionnaires de la réserve (DNF), afin de consignerde manière précise et synchrone leurs observa-tions. Plus de 550 données ont été collectées parce biais et cartographiées avec précision.

Durant les hivers 2000-2001 et 2001-2002, lessites d'igloos ont également été recherchés, justeà la fonte des neiges de manière à ne pas déran-ger les oiseaux durant une période particulière-ment cruciale. De même, eu égard à la situationcritique de la population, les nids n'ont pas faitl'objet de prospections systématiques, mais tou-tes les trouvailles fortuites ont été relevées préci-sément, y compris des nids utilisés mais désertésaprès la naissance des jeunes.

La Figure 1 montre la répartition des observa-tions réalisées dans une partie de la zone d'étudedurant l'année 2001. Chaque carré représenteune série d'observations (entre 5 et 10). A l'aided'un Système d'Information Géographique(Arcview 3.3), une zone tampon de 150 mètresde rayon a été créée autour de chaque carré poin-

té sur la carte de base représentéedans la Fig. 1. Pour travailler avecplus de précision, ces observa-tions ont été pointées sur desphotographies aériennes en cou-leurs et en infrarouge (RégionWallonne, clichés de 1998 -2000). L'ensemble des tamponsréalisés représente la zone fré-quentée par les Tétras pour unepériode ou un besoin donnés.Cette méthode s'apparente à celleutilisée par MALKOVA et al. (2000)dans les Monts Métallifères enTchéquie.

Fig. 1 - Observations de Tétras dans laFagne wallonne en 2001. Chaque petitcarré bleu représente 5-10 observa-tions. - Observations of Grouse inWalloon Fagne in 2001. Each smallblue square accounts for 5-10 observa-tions.


Ensuite, une analyse plus fine de la végétation aété menée sur le terrain, dans chacune des zonesclés ainsi déterminées. L'analyse de la végétationa été réalisée selon la méthodologie définie parBraun-Blanquet in VANDENBERGHEN (1982). Descritères de structure de la végétation sont égale-ment pris en compte.

3. Etude de l'évolution des paysagesL'étude de l'évolution de la végétation a été réali-sée à partir de photographies aériennes prises àune trentaine d'années d'intervalle (orthophoto-plans de 1970 et clichés RW de 1998). A partirde ces documents, les peuplements arborés pré-sentant un recouvrement de plus de 60 % ont été

cartographiés à l'aide d'un SIG (ESRI - Arcview3.3).

4. Analyse du régime alimentairePour compléter nos connaissances sur le régimealimentaire du Tétras lyre dans les Hautes-Fagnes, nous avons collecté un peu plus de 200fèces dans les igloos, les places de poudrage oude repos ou sur les arènes de parade et ce tout aulong de l'année 2001. Ces déjections ont été exa-minées au binoculaire et au microscope électro-nique. Leur analyse, jointe aux données récoltéeslors de deux précédentes études, nous permet deréaliser une synthèse originale quant au régimealimentaire de l'espèce dans la RéserveNaturelle.

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Résultats

1. Distribution et recensementsLes recensements globaux réalisés entre 1995 et2003 sont présentés dans le tableau 1. Ils confir-ment la situation particulièrement critique de lapopulation fagnarde du Tétras lyre au cours deces années. Durant les trois dernières années,une attention plus particulière a été apportée audénombrement des femelles et ce, en collation-nant les observations durant toute l'année. Lesrecensements montrent un sex-ratio différent dusex-ratio attendu de 1/1, avec 1,12 f/1 m en2001, 1,04 f /1 m en 2002, et 1,5 f / 1 m en 2003.De plus, vu la difficulté que représentent lesrecensements de femelles, toujours plus discrè-tes que les mâles, leurs nombres sont certaine-ment entachés d'une légère sous-estimation.

2. Sélection de l'habitatLe domaine vital de la population fagnarde deTétras lyres a été cartographié avec un effort derecherche maximum durant les années 2001 et2002. Les observations nous ont permis de dres-ser des cartes montrant les principales zonessélectionnées par les Tétras lyres pour satisfaire

leurs besoins durant les différentes phases deleur cycle de vie (voir, pour exemple, les Fig. 2& 3).

La Fagne des Deux Séries (Photo 1) est une zonetrès importante pour la population fagnarde deTétras lyres. Trois arènes principales et deuxsites d'arènes secondaires y sont localisés. L'unedes arènes ancestrales les plus connues est situéeau sommet de la région, sur un haut-plateau (alt.665 m). Elle se présente sous la forme d'unelande résultant de la dégradation de la tourbièreet dominée essentiellement par la molinie(Molinia caerulea). D'anciennes fosses d'extrac-tion de la tourbe bordent le site de l'arène et sontcolonisées par des peuplements de myrtille com-mune, de myrtilles de loup (Vaccinium uligino-sum) et de callune. Des buissons épars de saulesà oreillettes (Salix aurita), des jeunes bouleauxpubescents (Betula pubescens) ou des sorbiersdes oiseleurs (Sorbus aucuparia) complètent letableau. Une autre arène ancienne est située encontrebas de la précédente (alt. 620 m) dans uneplaine largement ouverte et dominée essentielle-ment par la molinie. La distance entre ces deuxsites de parade principaux est de 1.600 mètres.Entre les deux arènes, une rupture de pente bien


Tableau 1 - Evolution globale du nombre de coqs de Tétras lyres recensés aux arènes de parade entre 1995 et2003 dans les 4 grands secteurs de la Réserve Naturelle Domaniale des Hautes-Fagnes (+ jeunes non fixés). - Evolution of the number of cocks of Black Grouses observed at the leck arenas between 1995 and 2003 in the4 great sectors of the Domanial Nature Reserve of High-Fagnes (non-fixed youngs)

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Fagnes Fagnes Fagne Fagnes de Totaldu NE de la Baraque Wallonne Malmedy

Années Michel et Clefaye1995 6 18 11 1 361996 4 17 5 0 261997 4 16 8 1 291998 5 13 5 0 231999 7 15 8 0 302000 5 11 4 0? 202001 6 12 7 0? 252002 7 9 (+2) 7 0 ? 23 (+2?)2003 1 (+1?) 7 5 1? 13 (+2?)

Tableau 2 - Evolution détaillée du nombre de mâles et de femelles (nombre minimum) sur chacun des sites deparade de la Réserve Naturelle Domaniale des Hautes-Fagnes entre 2001 et 2003. - Detailed evolution of thenumber of males and females (minimum number) on each leck of the Domanial Nature Reserve of High-Fagnesbetween 2001 and 2003.

Années 2001 2002 2003M F M F M F

Fagnes du Nord-EstHahnestreck - Steinley 2 . 2 . 0 .Kuttenhart 1 . 1 . 0 .Allgemeines Venn 1 . 1 . 0 .Misten/Brackvenn 1+1 . 3 . 1+1 .

6 5 7 9 2? 3

Fagnes de Malmedy 0? 2 0? ? 1? 3?

Fagnes de la Baraque MichelSoor 1 . 1 . 1 .Duret 3+1 . 3+1 . 2+1 .Brochepierre (rupture de pente) 1 . 1 . 2 .Les Potales 4+1 . 3 . 1 .Trôs Brôlî 1 . 0 . 0 .

12 10 9 8 7 9

Fagne wallonneGrande tourbière 3 . 3 . 2 .Groneux 1 . 1 . 1 .Drèlô 2 . 1+1 . 1 .Clefaye 1 1 1 . . .

7 11 7 8 5 6


marquée est occupée par d'importants peuple-ments d'Ericacées ponctués de saules à oreillet-tes (le recouvrement arboré global est inférieureà 30 %). Une troisième arène est située dans unezone de source à proximité de la deuxième etcomporte, dans ses parties les plus sèches, d'im-portantes plages de callune. Cette zone est un

espace de transition entre les faciès de tourbièredégradée à molinie et une zone de forêt feuillue.La distance entre cette arène et les deux autresest respectivement de 1.000 et 2.600 mètres.

Deux arènes secondaires sont également instal-lées à proximité des précédentes, en particulierdans de larges plaques de callunes, au pied de la

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Fig. 2 & 3 - Zones d’actvité des Téras lyre en Fagne Wallonne (en été et en hiver). - Areas of activity of Grousein Walloon Fagne (in summer and winter).

Photo 1 - La Fagne des Deux Séries; à l’avant-plan, l’arêne de parade en été, à larrière plan des sites dereproduction ou d’hivernage dans la rupture de pente. - Fagne of the Two Series; with in the foreground, theleck in summer, and in the background, sites of breeding or wintering in the break of slope. (C. Keulen)

Printemps-été Hiver


rupture de pente de Brochepierre, entre les deuxpremières arènes. Avec ses importants peuple-ments d'Ericacées, la rupture de pente qui sépareen quelque sorte ces deux parties de la Fagne desDeux Séries (Photo 2) joue un rôle essentiel danstoutes les phases du cycle vital des Tétras. Lespoules y sont très régulièrement observées toutau long de l'année, tout comme dans les impor-tantes plages de callune qui jouxtent l'emplace-ment des arènes principales. Toutes ces zonesconstituent des sites très importants pour la nidi-fication et l'élevage des jeunes mais aussi pourl'alimentation et le repos en toutes saisons.Durant l'automne, les oiseaux sont égalementobservés dans les talus qui bordent une route

empierrée qui délimite, au nord, la Fagne desDeux Séries. Les importants peuplements de cal-lune et de myrtille commune qui se développentsur ces sols bien drainés fournissent en effet auxoiseaux des sites de nourrissage et de repos toutaussi appréciés. La route empierrée fournit enoutre aux oiseaux des places de poudrage inté-ressantes. Signalons enfin que d'autres places depoudrage ou de repos ont été régulièrementdécouvertes dans les galettes de terre de chablisd'épicéas situés au sommet de la rupture de penteprécédemment citée, dans une zone particulière-ment appréciée par les poules en toutes saisons.

Durant la période hivernale, lorsque le sol estcouvert de neige, les oiseaux se nourrissent

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Tableau 3 - Description de la végétation des sites de nidification de la Fagne des Deux Séries. - Descriptionof the vegetation at the nesting sites of the Fagne of the Two Series.

Sites Végétation dominante Hauteur Autres espèces

"Brochepierre" sommet Sorbus aucuparia 1 < 2 m Deschampsia flexuosa +Salix aurita 2 <2 m Galium saxatile +Vaccinium myrtillus 4 60-80 cm Vaccinium vitis idaea +Calluna vulgaris 3 40-60 cm Carex nigra +Vaccinium uliginosum 2 60-80 cm

"Brochepierre" bas Salix aurita 3 < 2 m Vaccinium uliginosum +Calluna vulgaris 3 40-60 cmMolinia caerulea 3 >60 cmErica tetralix 1 <20 cmCarex nigra 1 < 20 cm

Soor Calluna vulgaris 4 > 40 cm Vaccinium vitis-idaea +Molinia caerulea 3 > 60 cm Vaccinium uliginosum +Erica tetralix 1 <20 cm

Tableau 4 - Description de la végétation sur les sites d'igloos et d'hivernage de la Fagne des Deux Séries. -Description of the vegetation of the sites of igloos and wintering of the Fagne of the Two Series.

Sites Végétation dominante Hauteur Autres espèces

"Brochepierre" sommet Sorbus aucuparia 1 < 2 m Deschampsia flexuosa +Salix aurita 2 < 2 m Galium saxatile +Vaccinium myrtillus 4 60-80 cm Vaccinium vitis idaea +Calluna vulgaris 3 40-60 cm Carex nigra +Vaccinium uliginosum 2 60-80 cm

Bois ouverts Betula pubescens 4 4-10 m Galium saxatile +Vaccinium myrtillus 4 60-80 cmPteridium aquilinum 2 80 cmDescampsia flexuosa 1 30 cm


essentiellement dans des bois ouverts composésde sorbiers des oiseleurs ou de bouleaux pubes-cents avec, en strate sous-arbustive, d'importantspeuplements de myrtilles communes et de myr-tilles des loups mêlées à de la callune. Les sitesd'igloos sont eux principalement situés dans larupture de pente, dans les zones sommitales ouau pied de celles-ci, là où la neige s'accumuledavantage en congères. Les pistes créées par lescervidés ou les sentiers de promenade, par lesmicro-dépressions qu'ils créent, sont égalementsouvent choisis pour l'installation des igloos surcette rupture de pente. La végétation de ceszones est dominée par les Ericacées, commenous l'avons vu plus haut.

Les tableaux 3 & 4 présentent les résultats de l'a-nalyse de végétation menée sur les sites de nidi-fication et d'hivernage de la Fagne des DeuxSéries

La Fagne wallonne constitue une autre zoneoccupée depuis des décennies par les Tétraslyres (Fig. 3 et photo 2). Une tourbière activeinstallée à mi-versant (en selle) en occupe le cen-

tre tandis que deux cours d'eau la traversent : laHelle et la Rur. La végétation variée reflète latopographie assez complexe de cette zone. Lesparties les plus basses (alt. 650 m) sont occupéespar des zones marécageuses (jonchaies, cari-çaies, anciennes nardaies…). Sur les sommets ou" sètchamps ", la lande sèche à callune est domi-nante. La lande tourbeuse, issue de la dégrada-tion de la tourbière, occupe une large part de lazone, avec des faciès dégradés dominés par lamolinie. Des étendues de myrtilles et de callunesà mi-pente, des bois clairs de bouleaux et de sor-biers, une vieille aulnaie et des semis naturels derésineux (épicéas essentiellement) complètent letableau.

Une importante arène est située sur la grandetourbière : les places de parade préférées descoqs y sont localisées à la limite entre la tourbiè-re et la lande dégradée ou dans des zones fran-chement dégradées dominées par la callune.Deux autres arènes sont localisées dans les par-ties basses de la Fagne, à proximité immédiated'importants massifs d'Ericacées. La distanceentre les trois arènes, occupant chacune les som-

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Photo 2 - Vue panoramique de la La Fagne Wallonne. - Panoramic view of the Walloon Fagne. (C. Keulen)


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Photo 3 - Abroutissement important des massifs d’Ericacées par les Cervidés en Fagne du N.E.; la végétationau sol n’atteint plus la hauteur requise pour la nidification. - Significant browsing of the clumps of Ericaceaby the Deer tribe in Fagne of the N.E.; the vegetation on the ground does not reach anymore the height neces-sary for the nesting.

mets d'un triangle, est d'environ 900-1.000 mèt-res. Les oiseaux se tiennent principalement dansles zones d'Ericacées et sur la tourbière active etce tout au long de l'année. L'un des sites préféréspour l'installation des nids est constitué par lesommet de l'ancienne tranchée d'exploitation detourbe, dans des zones dégradées dominées parla bruyère. Ces zones jouissent effectivementaussi d'un drainage et d'un ensoleillement parti-culier propice au développement des insectes,indispensables pour l'élevage des poussins.

Durant les périodes neigeuses, les Tétras se ras-semblent dans deux bois clairs, respectivementdominés par les bouleaux pubescents (Drèlô) etpar les sorbiers des oiseleurs (Groneux). Ensous-étage, ces deux bois comprennent des peu-plements d'Ericacées en recouvrement impor-tant. Il s'agit essentiellement de myrtille commu-ne et de myrtille des loups auxquelles se mêlentla callune dans les parties les plus sèches. Cesdeux bosquets sont également sélectionnéscomme sites d'igloos. Ceux-ci sont creusés demanière à ce que les oiseaux accèdent auxEricacées.

Durant les trente dernières années, les sites lesplus recherchés pour le creusement des igloos sesituaient dans la tranchée d'exploitation mar-quant la limite entre la tourbière active intacte etles zones jadis exploitées pour l'extraction de latourbe. Ces lieux étaient traditionnellementoccupés par d'importantes congères propices aucreusement des igloos.

A la fin des années '90, les travaux de restaura-tion de la tourbière ont amené les gestionnaires àreprofiler cette tranchée sur une grande partie età creuser des bassins à son pied. Les sites propi-ces à l'accumulation neigeuse ont ainsi disparu(ainsi que des sites privilégiés pour l'installationde nids) amenant les oiseaux à choisir d'autreszones d'hivernage. Outre les deux bosquets pré-cédemment cités, leur choix s'est alors porté versun chemin ancestral empierré qui traverse laFagne Wallonne. Certaines zones de ce cheminsont également favorables à la formation decongères. Les zones les plus exploitées pour lecreusement des igloos sont dès lors des massifsd'Ericacées (callunes et myrtilles essentielle-ment) à proximité immédiate du chemin et idéa-


lement, sous des épicéas en petits bouquets. Lesigloos sont alors creusés pour amener les oiseauxsous les branches retombantes des épicéas,enfouies dans la neige.

Ce site glane actuellement non seulement lesTétras de la Fagne wallonne mais aussi, proba-blement, des oiseaux provenant de la tourbièrede Clefaye ou de certaines parties de la Fagnedes Deux Séries. En effet, des rassemblementsde 17 oiseaux (12 mâles et 5 femelles) ont étéobservés là, au petit matin, à la sortie des igloos,alors que la population de la Fagne Wallonneétait bien inférieure à ce chiffre.

Le tableau 5 présente les résultats de l'analyse devégétation réalisée sur les principaux sites denidification et d'hivernage de la Fagne Wallonne.

3. Analyse du régime alimentaireLe Tableau 6 présente les résultats récapitulatifsdes différentes analyses de fèces réalisées enFagne Wallonne (pour plus de détails voir aussiRENARD, 1998 a et b). La myrtille commune et lacallune fournissent l'essentiel de la nourriture etce tout au long de l'année. Les chatons de bou-leau pubescent quant à eux représentent l'essen-tiel du régime alimentaire hivernal, surtoutdurant les périodes de neige. La linaigrette vagi-née (Eriophorum vaginatum) est aussi présentedans le menu mais essentiellement durant lemois de mai, époque de sa floraison. D'autresplantes comme les renoncules rampantes(Ranunculus repens) sont localement bien repré-sentées.

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Tableau 5 - Description de la végétation sur les principaux sites de nidification et d'hivernage de la FagneWallonne. - Description of the vegetation on the principal sites of nesting and wintering in the Walloon Fagne.

Sites Végétation dominante Hauteur max. Autres espèces

Mur de tourbe Molinia caerulea 1 Andromeda polifolia +Erica tetralix 1 <20 cmCalluna vulgaris 4 60-80 cmPolytrichum strictum 1 < 10 cm

Grande tourbière Empetrum nigrum 1 20-40 cmSphagnum papillosum 2 < 10 cm Eriophorum vaginatum +Vaccinium oxycoccos 1 < 10 cmAndromeda polifolia 1 < 10 cmErica tetralix 3 < 20 cmCalluna vulgaris 2 40-60 cmPolytrichum strictum 1 < 10 cm

Groneux Sorbus aucuparia 3 4 à 10 m Vaccinium vitis-idaea +Vaccinium myrtillus 4 60-80 cm Galium saxatile +Vaccinium uliginosum 3 60-80 cm Dryopteris carthusiana +Calluna vulgaris 1 40-60 cmDeschampsia flexuosa 1 < 20 cm

Drèlô Betula pubescens 1 4-10 m Vaccinium vitis idaea +Picea abies 2 < 4 m Vaccinium uliginosum +Salix aurita 3 < 3 mCalluna vulgaris 2 40 cmVaccinium myrtillus 2 40-60 cmMolinia caerulea 3 40-60 cm


4. Synthèse des données relativesaux exigences écologiques duTétras dans la Réserve desHautes-Fagnes

Dans un précédent article (KEULEN, 1997), nousavions analysé (par le biais d'une analyse multi-variée ACP) les caractéristiques paysagères quiaugmentent l'attractivité des arènes. La présenteétude vient à l'appui de ces données et montreque les facteurs clés dans la sélection de l'habitatsont les suivants :

• La proximité et la qualité des peuplementsd'Ericacées. La hauteur idéale de ces buissonsest de 60 cm ; à cette hauteur, les buissons demyrtille commune et de callune fournissent laplupart des sites idéaux pour la nidification etl'élevage des jeunes ainsi que pour l’alimenta-tion et le repos tout au long de l'année.

• La proximité de bosquets clairs de bouleaux oude sorbiers de 4 à 10 mètres de haut avec idéa-lement une strate sous-arbustive d'Ericacées;ces bosquets fournissent aux oiseaux la sourceprincipale de l'alimentation hivernale ou cons-tituent des sites idéaux pour l'installation d'i-gloos.

• La possibilité de parader sur des surfaces pla-nes et régulières, à végétation courte et au solnon mouilleux ; ces surfaces doivent jouird'une large ouverture sur le paysage. Dans lesHautes-Fagnes, ces arènes sont relativementéloignées (+/- 500 m) par rapport aux massifsboisés de résineux et de feuillus. Ce choix pourles zones dégagées assure non seulement unemeilleure visibilité par rapport aux femellesmais aussi une meilleure propagation du son;des études réalisées notamment en Scandinaviemontrent en effet que les femelles sont davan-tage attirées par des arènes " bruyantes " : ceciexpliquerait que des zones apparemmentattractives mais fortement enclavées dans lesmassifs d'épicéas (cas de Cléfaye, d'Hoscheit,de l'Imgenbroicher Venn…), sont délaissées oupeu occupées. Par contre, les arènes les plusactives (Fagne des Deux-Séries et de laBaraque Michel) sont celles qui jouissent dupaysage le plus dégagé. Les positions élevéessont aussi préférées.

• L'ouverture générale du paysage des différen-tes zones exploitées par les oiseaux, permettantnotamment les transitions douces entre les dif-férents milieux qu'ils exploitent.

• La présence de congères où creuser des igloos,en période neigeuse.

• Les épicéas d'une taille supérieure à 4 mètres,isolés ou en petits bosquets de 2/ ha et situés àproximité immédiate des massifs d'Ericacéesjouent également un rôle important commerefuges pour les oiseaux et ce notammentlorsque la couverture neigeuse est trop faiblepour le creusement des igloos.

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Tableau 6 - Résultats de l'analyse des fèces collec-tées en 2001. - Results of the analysis of droppingscollected in 2001.

Composition (%/vol.)Vaccinium myrtillus 31.4Calluna vulgaris 17.5Betula pubescens 15.2Carex nigra 6.1Eriophorum vaginatum 1Ranunculus repens 5.7Vaccinium vitis-idaea <1Vaccinium uliginosum <1Erica tetralix <1Salix aurita 2.8Galium saxatile <1Populus tremula <1Vaccinium oxycoccos <1Rumex sp. <1Juncus squarrosus <1Potentilla erecta <1Scirpus cespitosus <1Andromeda polifolia <1Picea abies 1.2Taraxacum sp. <1Dicotylae sp. <1Monocotylae sp 5.4

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5. L'évolution du milieu natureldans les Hautes-FagneLa comparaison des photographies aériennes àune trentaine d'années d'intervalle nous rensei-gne utilement sur l'évolution du milieu dans laRéserve Naturelle Domaniale des Hautes-Fagneset nous permet d'apprécier son influence sur l'é-volution des populations de l'espèce en regard deses exigences écologiques. Les cartographiesissues de l'examen de ces photographies mont-rent que, de 1970 à 1990, le paysage des Hautes-Fagnes a subi une lente altération. Celle-ci estdue à deux facteurs principaux : l'envahissementarboré naturel et les plantations d'épicéas autourde la Réserve Naturelle. Cette situation est plusparticulièrement visible dans deux grandes zonesde la réserve, connues dans les années '70 pourhéberger d'importantes arènes (et populations deTétras lyres) : il s'agit de la zone de la GrandeFange (hébergeant les arènes des "Fermes enFagnes" de Jalhay - 30 coqs en 1971) et desFagnes du nord-est (entre Eupen et Montjoie,hébergeant notamment l'arène du Kutenhart etdu Hahnestrek - respectivement 20 et 35 coqs en1971). Les Fig. 4 & 5 illustrent l'évolution spec-

taculaire de la couverture arborée dans une par-tie des Fagnes du nord-est entre 1970 et 1995.Cet envahissement arboré est essentiellement dûà la croissance des saules à oreillettes, bouleauxpubescents et peupliers trembles (Populus tre-mula). Dans la zone de la Grande Fange s'ajouteà ces espèces le sorbier des oiseleurs. A cet enva-hissement arboré naturel s'additionnent des plan-tations d'épicéas réalisées dans les années 1960.Les zones plantées ont conservé une certaineattractivité pour les oiseaux jusqu'à ce que lesarbres atteignent une quinzaine d'années et ontensuite été désertées. Elles ont en outre diminuél'attractivité des zones limitrophes pour lesTétras.

Outre la fermeture du paysage, le développe-ment arboré a pour conséquence directe unediminution des peuplements d'Ericacées, littéra-lement étouffés sous le développement des sau-les à oreillettes, notamment. Mais le développe-ment arboré favorise aussi la présence deconcurrents ou de prédateurs du Tétras lyre. Eneffet, il permet, par exemple, aux Sangliers (Susscrofa) de gagner au cœur de la Fagne des zonesoù ils étaient absents (densités, estimées avec laprudence qui s'impose, à 4/100 hectares en 2003

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Figs 4 et 5 - Cartes topographiques d’une partie des Fagnes du nord-est en 1970 et 1995 (partie circonscritepar le rectangle sur la Fig. 4). L’extension des plantations d’épicéas (gris foncé) est nette, surtout dans le nord,tandis que la lande se voit envahie de boisements naturels de feuillus (gris clair). - Topographic maps of partof Fagnes of the Northeast in 1970 and 1995 (part circumscribed by the rectangle on the fig. 4). The exten-sion of spruce plantations (dark grey) is obvious, especially in the north, while moor area is invaded by natu-ral regrowth of deciduous trees (light grey).


pour 2,5/100 ha en 2000); leur présence entraîne,outre une prédation accrue sur les sites de nidifi-cation, des détériorations des massifs d'Ericacéeset un labour important du sol sur certains sites deparade. Les populations de Cerfs (Cervus ela-phus) sont également en nette augmentation (6,5têtes / 100 ha dans des milieux relativement pau-vres contre une densité estimée à 2,5 têtes / 100ha dans les années '70). En certains endroits,cette présence de cervidés se traduit par unabroutissement important sur les massifsd'Ericacées qui, trop arasés, ne présentent plusles caractéristiques idéales pour la nidificationdes Tétras (hauteur inférieure à 40 cm) ou, enhiver, n'offrent plus de bourgeons nécessaires àleur alimentation (photo 3). Cette concurrenceentre cervidés et Tétras lyres semble néanmoinslimitée à la zone du Steinley et du Kutenhart.Nous ne disposons pas de chiffres permettantd'apprécier une augmentation de la prédation parles corvidés (essentiellement la Corneille noire -Corvus corone) mais leur présence au cœur de laFagne est désormais attestée.

6. Travaux d'aménagementA la lumière des premiers résultas obtenus dansle volet scientifique, des travaux d'aménagementont été testés sur le terrain dans le but de lesappliquer à d'autres zones. Les Services exté-rieurs de la Division Nature et Forêt de la RégionWallonne ont grandement collaboré à ce pro-gramme et, encadrés par un groupe de scienti-fiques, ont mis en œuvre toute une série de tra-vaux. Outre le fauchage des lieux de paraderéalisés depuis une dizaine d'années déjà, desefforts ont été consentis pour :

• augmenter encore l'attractivité des zones deparade en ouvrant davantage le paysage à pro-ximité ;

• rétablir des zones de transition entre différentssites de reproduction isolés par des boisementsimportants en réalisant des " couloirs " detransition entre différents sites clés dans le but, non seulement d'ouvrir le paysage, mais ausside régénérer les massifs d'Ericacées (photo 4)

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Photo 4 - Travaux d’ouverture du milieu dans la Grande Fange. - Opening work of the milieu in the GrandeFange. (C. Keulen)


Les résultats relatifs à l'écologie du Tétras lyredans la Réserve Naturelle Domaniale des HautesFagnes sont sans surprise. Nos études montrentque, comme dans d'autres régions d'Europe, leTétras lyre affectionne plus particulièrement unmilieu de transition comprenant une série d'habi-tats (voir par exemple BERGMANN & KLAUS,1994, ANGELSTAM et al., 2000, BAINES et al.,2000, BOCCA, 2000, HERINGA, 2000, MALKOVAet al., 2000, RAMANZIN et al., 2000). Pour satis-faire les différentes phases de son cycle vital, leTétras lyre a besoin :

• d'étendues planes largement ouvertes sur lepaysage pour la parade,

• d'étendues de buissons bas de myrtilles, pour lanidification et l'élevage des jeunes et l’alimen-tation nourrissage en toutes saisons,

• de bois clairs pour l’alimentation, le repos oula nidification,

• de zones où la neige s'accumule pour le creu-sement des igloos

• Comme dans les autres régions d'Europe, laqualité des peuplements d'Ericacées (hauteur etvaleur nutritive) ainsi que l'ouverture généraledu paysage apparaissent comme des facteursdéterminants dans la sélection de l'habitat.

Les conclusions du colloque européen consacréau sort du Tétras lyre dans les landes et tourbiè-res d'Europe s'interrogeaient sur l'avenir duTétras lyre dans les Hautes-Fagnes de Belgique(DOYEN, 2000). Il apparaît évident que la situa-tion de cette espèce est particulièrement critiqueen Région Wallonne, comme le montrent lesrecensements réalisés en 2003 : 14 coqs seule-ment observés aux arènes de parade.

Au rang des hypothèses avancées habituellementpour expliquer le déclin du Tétras lyre enEurope, figurent le réchauffement climatique, lapression touristique et autres facteurs de déran-gement, les modifications sensibles des capaci-tés d'accueil du milieu, l'augmentation de lapression de prédation et l'érosion génétique de lapopulation. Les travaux de LONEUX et al. (1997)& LONEUX (2000) ont montré que les variationsclimatiques rendent compte de l'évolution de lapopulation des Tétras lyres dans la Réserve desHautes-Fagnes jusqu'en 1995. Selon la littératu-re européenne, il apparaît également qu'il ne fautpas considérer le réchauffement climatiquecomme un facteur déterminant dans le déclin del'espèce, du moins sur une aussi courte période.Le déclin alarmant affiché par la population surles huit dernières années doit dès lors êtrerecherché parmi d'autres causes.

La pression touristique, avancée comme causeimportante de déclin dans de nombreusesrégions (notamment dans les Alpes - BOCCA,2000 ), ne doit pas non plus être mise en causepour la Réserve Naturelle Domaniale desHautes-Fagnes, au vu des efforts drastiques qui yont été entrepris pour canaliser le public (caille-bottis, zones interdites…) ou protéger la périodede reproduction (interdiction de circuler dans lessites clés de la mi-mars à la fin juin ou finjuillet).

Les causes du déclin doivent donc être davan-tage recherchées ailleurs, en particulier dans l'al-tération des capacités d'accueil du milieu, quientraîne une augmentation de la pression de pré-dation et un morcellement ou une disparition dessurfaces favorables à l'espèce. Des efforts ont été

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Discussion et conclusions

• d'autres travaux consistent en la restauration demassifs d'Ericacées par étrépage, gyrobroyageou pâturage dans les zones dégradées à faciès àmolinie.

Bien qu'il soit trop tôt pour se prononcer sur l'ef-ficacité de ces techniques, signalons que les pre-mières observations réalisées en 2002 donnaientdes résultats encourageants avec une plus grandefidélité des coqs à certains sites devenus, avantrestauration, pratiquement impropres à la parade.


entrepris pour remédier à cette situation maisrestent insuffisants, vu l'ampleur du phénomènede colonisation arborée. Il est clair que, sansmesure supplémentaire d'ouverture du milieu,les populations de Tétras lyres de la GrandeFange ou des Fagnes du Nord-Est (Brackvennnord, Allgemeines Venn, Steinley et Kutenhart)sont amenées à disparaître à plus ou moins courtterme. Lorsque l'on connaît l'importance quereprésente, pour la diversité génétique des popu-lations de Tétras (HOGLUND & SEGELBACKER,2003), la présence de plusieurs noyaux de popu-lation peu éloignés les uns des autres, il est pri-mordial de mettre tout en œuvre pour conserveret renforcer ces noyaux afin d'éviter de fragiliserdavantage la population de Tétras lyres.L'ouverture du milieu doit concerner l'ensembledes habitats recherchés par le Tétras lyre poursatisfaire ses besoins vitaux et non uniquementle périmètre immédiat des arènes de parade.

L'augmentation de la pression de prédation appa-

raît de plus en plus comme un facteur prépondé-rant dans le déclin des Tétras lyres et des autrestétraonidés à l'échelle européenne (voir notam-ment KAUHALA & HELLE, 2002; MULLER, 2001;WAREN & BAINES, 2002). Il est clair qu'unepopulation saine, dans des conditions de milieuadéquates, doit être à même de résister à la pres-sion de prédation, du moins si certaines espècesn'ont pas été anormalement favorisées par l'acti-vité humaine (nourrissage des sangliers dans leszones limitrophes à la réserve, vaccination desrenards…). L'examen de la littérature européen-ne montre également qu'une population affaibliese maintient difficilement dans de telles condi-tions. En Grande-Bretagne et en Allemagne, lesgestionnaires des milieux hébergeant les popula-tions de Tétras lyres exercent une régulationimportante sur les populations de prédateurs;leurs efforts se sont traduits par une augmenta-tion significative du taux de recrutement en jeu-nes (WARREN & BAINES, 2003). Avant de s'enga-ger dans de telles mesures, qui soulèvent nombre

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Photo 5 - Tranchée d’exploitation de la grande tourbière en la Fagne wallonne :les massifs d’Ericacées ausommet de la tranchée constituent des sites de nidification idéaux pour les Tétras lyres, tandis que la tranchéereprésente une zone d’accumulation de neige propice au creusement des igloos. - Extraction trench in the largepeat bog in the Walloon Fagne : clusters of Ericacea at the top of the trench constitute ideal sites of nestingfor the Black Grouse, while the trench represents a zone of snow drift favourable to the digging of igloos.


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SUMMARY - Evolution of the populations of the Black Grouse (Tetrao tetrix) in the BelgianHautes-Fagnes with respect to the modifications of the habitat’s ecological parameters.

During the last thirty-seven years the populationof Black Grouse in the Belgian Hautes-Fagneshas undergone a long declining trend. In view ofthis critical situation, a restoration plan for thespecies has been lauched. Habitat selection bycocks and hens was investigated in the mainparts of the SAC, during eight years. The dietcomposition was also studied by analysingdroppings collected all round the year. Results

show that key factors in habitat selection forBlack Grouse are the quality of the Ericaceaecover, the opening of the landscape, the possibi-lity to find flat place to display, the presence ofopen woods (Birch and Rowan) and the possibi-lity of burrowing igloos during snow periods.Considering the first results from the study, theForestry Districts have undertaken differentmeasures to improve Black Grouse habitats.

de problèmes éthiques, il nous apparaît impor-tant de s'attacher à gérer l'habitat de manière à lerendre le moins attractif possible pour les préda-teurs et espèces concurrentes, du moins dans laRéserve Naturelle. Il conviendra aussi de revoircertaines politiques cynégétiques aux abordsimmédiats de la Réserve.

La mise en oeuvre de mesures de gestion favora-bles au Tétras lyre implique, de manière urgente,la révision de certaines options prises dans leplan de gestion de la Réserve, qui prévoit,notamment, de laisser à une évolution naturelle(et donc à un retour vers la forêt) une grande par-tie des Fagnes du nord-est. Le Tétras lyre n'estpas seulement un symbole du Parc NaturelHautes-Fagnes-Eifel mais aussi une espèce"parapluie", dont la survie conditionne celled'autres espèces animales ou végétales liées auxmilieux ouverts. Espérons que grâce aux arrêtésde désignation des sites Natura 2000, des mesu-res urgentes et drastiques d'aménagement dumilieu soient entreprises pour que le Tétras lyrereste un label de qualité du milieu fagnard,durant des années encore.

REMERCIEMENTS - Ce travail est avant tout le fruitd'une collaboration fructueuse entre notre Laboratoireet le personnel de la DNF et nous tenons à remercierchaleureusement : Monsieur le Directeur L.Schlembach, Messieurs les Ingénieurs Dahmen,Doyen, Pieper, et Mertes, ainsi que tous leurs agents,pour leur collaboration sur le terrain, tant dans la miseen oeure des mesures de gestion que dans les échan-ges d'informations et les observations de terrain.Nous avons en outre pu bénéficier des observationsdes personnes suivantes : Batteux D., Bertrand H.,Biemont E., Carl H., Collard J., Delrez J., Demaret P.,Dericum H., Deroanne M., Doms E., Dupret J.,Emmelmann H., Fossé F, Gennée R., Groulard JM,Herman R., Hody, R., Houbart S., Gros M., Gross ,Kreutz J., Lejoly G., Maisin C., Michel C., Moxhet P.,Nielt A., Nizet JM., Oger, Paquo M., Pauly, Pirlet N.,Piron G., Pironnet A., Pommée R., Portzenheim D.,Renard F., Rousselle P., Scholl, Séveno, N.,Schoonbroodt C., Van Roy K., et Wihman...Qu'elles en soient remerciées.Merci aussi à Pascal Ghiette (CRNFB) pour l'organi-sation des recensements printaniers et son aide dans lebalisage des travaux de gestion.

Au moment de terminer cet article, il nous paraît important de signaler qu'à la faveur du cli-mat exceptionnel que nous avons connu durant l'été 2003, le recrutement en jeunes a porté lapopulation fagnarde à 28 coqs et des oiseaux ont également été vus recolonisant des sites gérésrécemment par la Division Nature & Forêts. De plus, un plan de gestion basé sur les exigen-ces écologiques du Tétras lyre et rédigé par Le CRNFB et la DNF est actuellement étudié parla Commission de gestion de la Réserve Naturelle Domaniale des Hautes-Fagnes.


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Christine KEULENCentre de Recherche de la Nature,

des Forêts et du Bois23 avenue Maréchal Juin

B - 5030 [email protected]

Laboratoire de Biologie du comportementEthologie et Psychologie animale

Université de LiègeQuai Van Beneden, 224020 Liège - Belgique

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Tétras lyre - Black Grouse; Hautes-Fagnes, Belgique. Photo F. Renard


lyres tetrao tetrix sur le plateau des hautes-fagnes en regard des … · 2015. 11. 13. · les...

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