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LUNDI 9 MARS 2015 HOMMAGE À LORIN MAAZEL PROGRAMME

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LUNDI 9 MARS 2015HOMMAGE À LORIN MAAZEL

PROGRAMME

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LUNDI 9 MARS 2015 20H30

GRANDE SALLE

HOMMAGE À LORIN MAAZEL

Antonín DvořákConcerto pour violoncelle

ENTRACTE

Richard StraussAinsi parlait ZarathoustraTill l’Espiègle

MÜNCHNER PHILHARMONIKER

VALERY GERGIEV, DIRECTION

SOL GABETTA, VIOLONCELLE

FIN DU CONCERT VERS 22H45.

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HOMMAGE À LORIN MAAZEL

Baguette parmi les plus infaillibles des soixante dernières années, star du podium, Lorin Maazel devait diriger ce concert à l’occasion de ses 85 ans – il était né le 6 mars 1930. Mais le grand chef d’orchestre est décédé le 13 juillet 2014. Disparition inattendue : il aura joué jusqu’à la fin avec une jeunesse, un aplomb, une sureté et une précision remarquables, se permettant même de suppléer – un remplacement de luxe – de nombreux collègues indisposés. En 2013, il avait dirigé pas moins de 102 concerts dans 16 pays différents. Ceux qui ont assisté à son ultime prestation parisienne en 2013 – Symphonie n° 8 de Bruckner avec le Philharmonique de Vienne – se souviendront d’un maître ès orchestres aux capacités intactes. Sa technique légendaire y faisait encore des miracles, que ce soit en termes de cohésion sonore, de netteté de conception et d’architecture.

Né à Neuilly-sur-Seine de parents américains, il fut l’exemple parfait de l’enfant prodige, montant sur l’estrade dès l’âge de neuf ans. Deux ans plus tard, Toscanini – peu soupçonnable de complaisance – va jusqu’à lui confier les rênes de son orchestre de la NBC. À l’autre bout de sa carrière, le concert exceptionnel en Corée du Nord en compagnie du Philharmonique de New York s’inscrit comme un moment fort.

Valery Gergiev, qui lui a succédé au poste de directeur musical de l’Orchestre Philharmonique de Munich, a choisi un programme dans lequel l’artiste américain se sentait spécialement à l’aise. Lorin Maazel avait en effet enregistré entre 1995 et 1998 une intégrale des poèmes symphoniques de Strauss – un des jalons de sa gigantesque discogra-phie – avec l’Orchestre de la Radio Bavaroise, le couplage Ainsi parlait Zarathoustra/Till l’Espiègle ayant fait l’objet d’un disque dès 1962 avec le Philharmonia de Londres. Il existe également des captations avec l’Orchestre Philharmonique de Vienne. C’est dire si ces deux œuvres l’ont accompagné pendant des décennies. Il croyait aussi beaucoup en

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Sol Gabetta, au point d’avoir tenu à enregistrer avec la violoncelliste le Concerto de Chostakovitch, avec les Münchner Philharmoniker.

L’homme possédait bien des dons : compositeur (l’opéra à succès 1984, d’après Orwell) et violoniste, il n’hésitait pas, de temps à autre, à reprendre l’archet en concert. Doté d’une mémoire exceptionnelle, polyglotte, il appréciait particulièrement la littérature française.

Énigmatique à bien des égards, il restait volontiers sur son quant-à-soi. Son extrême pudeur lui interdisait tout épanchement en public. La clarté, l’élégance et la souplesse de sa battue s’accompagnaient d’une impassibilité qu’on a trop souvent pris pour de la froideur. Le personnage n’était pas dupe des mirages du métier : à la télévision, au cours de l’émission Le Grand Échiquier, il s’était adonné, avec force grands gestes, à une parodie de chef d’orchestre. Façon d’affirmer, très pince-sans-rire, que sa propre sensibilité prenait des détours plus secrets et s’accommodait mal d’une exposition ostentatoire.

BERTRAND BOISSARD

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ANTONÍN DVOŘÁK (1841-1904)

Concerto pour violoncelle et orchestre en si mineur, B. 191, op. 104

I. Allegro

II. Adagio ma non troppo

III. Finale. Allegro moderato

Composition : à New York entre le 8 novembre 1894 et le 9 février 1895.

Création : le 19 mars 1896 à Londres par l’Orchestre Philharmonique

de Londres, avec Leo Stern au violoncelle et le compositeur au pupitre.

Effectif : 2 flûtes (piccolo), 2 hautbois, 2 clarinettes, 2 bassons – 3 cors,

2 trompettes, 3 trombones, tuba – timbales – cordes – violoncelle solo.

Durée : environ 40 minutes.

Cette œuvre rayonnante, le plus populaire des concertos pour violoncelle, s’inscrit dans un contexte biographique de mélancolie. Dvořák aborde sans enthousiasme sa troisième et dernière saison au Conservatoire de New York ; quoique dévoué de bon cœur aux Américains, il regrette de plus en plus sa Bohème natale.L’idée d’un concerto pour violoncelle lui est suggérée par l’exemple réussi d’un confrère américain, Victor Herbert ; à son tour il entre-prend rapidement son ouvrage, sans se référer à l’une de ses tentatives antérieures, le Concerto B. 10, esquissé trente ans auparavant. Pendant qu’il compose le deuxième mouvement, il reçoit une lettre poignante de sa belle-sœur Josefina, l’amour sans espoir de sa jeunesse : comme Mozart, il s’était accommodé d’épouser sa sœur… Gravement malade, Josefina lui écrit en des termes exceptionnellement affectueux qui sous-entendent un dernier adieu. Au milieu de l’adagio, Dvořák incor-pore la citation d’un lied que sa belle-sœur appréciait particulièrement, Lasst mich allein (Laissez-moi seul, B. 157 ou op. 82). De retour en Bohème en avril 1895, il apprend la mort de Josefina le 27 mai ; il remplace alors quatre mesures du finale par soixante autres, il évoque à nouveau le lied, et défie quiconque, éditeur ou interprètes, de contrarier ces modifications.

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En effet, la création du concerto ne se déroule pas sans heurts. L’ouvrage est dédié à Hanousch Wihan, un ami violoncelliste en compagnie duquel Dvořák a effectué une tournée dans son pays ; mais Wihan exige des retouches et veut incorporer à l’émouvante fin une cadence de sa façon. En définitive, c’est le jeune violoncelliste Leo Stern qui sera le créateur, et Wihan ne jouera « son » concerto qu’en 1899.

Après un concerto pour piano non dépourvu d’intérêt (1876) et un autre très séduisant pour violon (1879-1880), Dvořák atteint ici, dans de vastes proportions, la pleine maîtrise du genre. L’œuvre se déploie sur un fond de gravité où se devine l’influence de l’ami Brahms. Celui-ci devait d’ailleurs s’exclamer : « Si j’avais su que l’on pouvait tirer de tels accents du violoncelle, j’aurais écrit depuis longtemps un concerto pour cet instrument. » L’abondante partie soliste, hérissée de difficultés, se montre très chantante, souvent dans l’aigu, avec ces accents de candide fierté si personnels à Dvořák.

Le premier mouvement commence par ruminer son thème principal dans une lugubre couleur de clarinettes, à la Tchaïkovski. Après un crescendo dramatique, le thème, jeté avec un étonnant mélange de souplesse et de violence, semble inachevé : c’est une impulsion plus qu’une phrase. Après un pont frissonnant de trémolos et de pizzicatos, le second thème, au cor, chante avec une douce nostalgie, et constitue la première apparition d’un élément véritablement mélodique dans la pièce. La section conclusive, assez triomphante, sonne comme un extrait de danse slave, seule couleur folklorique dans ce mouvement. Le développement s’amorce par une version vive et fuyante, en imita-tions, du premier thème ; mais il se distingue surtout par une nouvelle idée, une cantilène du violoncelle, dont le profil à la fois douloureux et modal s’apparente aux mélodies d’inspiration amérindienne chez Dvořák à la même période. La réexposition, attaquée directement sur le second thème en majesté, éclaire fréquemment en majeur les idées de l’exposition, avec une certaine euphorie : car même dans le tourment, notre compositeur reste un solide optimiste.

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Le volet central, de large structure A-B-A, est une songerie remplie d’émotion. Les vents, flûte, hautbois, clarinette, les cors aussi, dialoguent avec le violoncelle ou se tressent à sa mélodie, tel un idyllique décor où s’exprime la vocalité chagrinée du soliste. C’est dans la partie médiane qu’est cité le lied, bien précédé par une sorte de choral solennel et fataliste ; ce thème est soumis à des variations où se donnent libre cours tant le cantabile du violoncelle que la poésie des bois. Vers la fin, le « quasi cadenza », en fait une cadence entièrement rédigée, s’entrelace à l’envol éthéré de la flûte ; celle-ci plane également dans la coda, où le vague à l’âme se transfigure en un désir d’infini.

Le finale est un rondo assez libre dans sa succession de tonalités et d’épisodes toujours captivants. Aussi judicieusement introduit que le premier mouvement, il commence par une marche éloignée, où le thème principal, par scansions, se rapproche. Le violoncelle déploie enfin au complet ce thème, sorte de bannière emblématique, compa-rable au finale de la Symphonie n° 9, dite « du Nouveau Monde » (1893) ; thème encore sérieux, en mineur, mais dont les traitements ou les à-côtés énergiques susciteront des joies issues tout droit du folklore bohémien. Tout aussi révélatrice est la présence constante d’oiseaux aux bois, qui chez le compositeur symbolisent les enchantements de sa mère patrie. Vers le milieu du mouvement le violoncelle propose un thème nouveau, contrastant par sa tendresse et son lyrisme. Peu avant la coda, le fameux ajout de soixante mesures est un ravissant poème embrumé de lointain, que percent les ramages des trompettes bouchées, des flûtes et des clarinettes à la tierce… le soliste se contente de les accompagner, de son bourdon rustique. Le lied aimé de Josefina peut jaillir, telle une larme, au violon solo et à la flûte. Une évocation résignée du premier mouvement précède la réaction vigoureuse de l’orchestre, qui ramasse toutes ses forces pour le superbe crescendo final ; l’apothéose du thème principal s’achève par un enchaînement d’accords aussi ferme qu’original.

ISABELLE WERCK

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RICHARD STRAUSS (1864-1949)

Also sprach Zarathustra [Ainsi parlait Zarathoustra], poème symphonique op. 30

Introduction – De ceux des arrière-mondes – De l’aspiration suprême –

Des joies et des passions – Le chant du tombeau – De la science –

Le convalescent – Le chant de la danse – Le chant du voyageur de la nuit

Composition : février-août 1896.

Création : 27 novembre 1896, Francfort-sur-le-Main, sous la direction du

compositeur ; 30 novembre 1896, Berlin, sous la direction d’Arthur Nikisch.

Effectif : piccolo, 3 flûtes, 3 hautbois, cor anglais, clarinette en mi bémol, 2

clarinettes en si bémol, clarinette basse, 3 bassons, contrebasson – 6 cors, 4

trompettes, 3 trombones, 2 tubas – timbales, grosse caisse, cymbales, triangle, jeu

de timbres, cloche – orgue, 2 harpes – cordes.

Durée : environ 33 minutes.

Aucun philosophe n’aura inspiré les musiciens comme Nietzsche – il faut dire que lui-même chérissait tout particulièrement l’art d’Euterpe. Après Wagner (avec les tensions que l’on connaît), avant Delius (A Mass of Life, 1905), deux des plus grands symphonistes germaniques du tour-nant du XIXe au XXe siècle lui rendront un hommage direct : Mahler avec le quatrième mouvement « O Mensch! Gib Acht! » de sa Troisième Symphonie (1895-1896), et Strauss avec le poème symphonique Ainsi parlait Zarathoustra (1896), « librement composé d’après Friedrich Nietzsche ». Chez l’un comme chez l’autre, nulle prétention cependant de péné-trer les profondeurs de la pensée nietzschéenne. Strauss s’en défendit d’ailleurs rapidement : « Je n’ai pas voulu écrire de la musique philosophique, ni traduire musicalement la grande œuvre de Nietzsche. Je me suis proposé de tracer un tableau du développement de la race humaine depuis ses origines […] jusqu’à la conception nietzschéenne du Surhomme. Tout le poème symphonique est pensé comme un hommage au génie de Nietzsche, qui trouve sa plus haute expression dans son ouvrage Ainsi parlait Zarathoustra. » Voici peut-être de quoi apaiser

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quelque peu les contempteurs de la prétention straussienne… d’autant que musicalement, le compositeur, bien que rompu aux orchestrations les plus subtiles, y « écrit gros » parfois : en fait de « glorieux » (comme il le note dans une lettre à sa femme avec enthousiasme la veille de la création), Zarathoustra l’est vite un peu trop si l’on n’y prend pas garde…

L’œuvre se divise en neuf parties, tout en adoptant une forme durchkom-poniert, sans arrêts décelables à l’oreille. L’introduction, qui dépeint le lever du jour (« Le soleil se lève. L’Individu se fond dans le Monde, le Monde se fond dans l’Individu »), est de loin le passage le plus connu : elle a été consi-dérablement popularisée par le film de Stanley Kubrick 2001, L’Odyssée de l’espace (1968). Ramassée, particulièrement efficace, elle se fonde sur quelques éléments simplissimes : un sourd grondement de do grave qui en forme le socle (contrebasson, orgue, contrebasse), un arpège do-sol-do, souvent appelé motif de la Nature, construit avec les premières harmoniques de ce do grave, la brusque minorisation de l’accord de do majeur. Suivent huit sections qui délivrent la parole de Zarathoustra : De ceux des arrière-mondes, qui présente le motif de l’Homme, en si mineur, avant de s’abandonner au lyrisme ; De l’aspiration suprême, où se mêlent des rappels du thème de la Nature et du Credo grégorien entendu dans l’épisode précédent ; Des joies et des passions, animé, avec ses violons et cors « très expressifs » (« sehr ausdrucksvoll »), volontiers tortueux mais pleins d’élan, dont les motifs réapparaîtront dans Le chant du tombeau. De la science : voici une fugue volontiers austère et très chromatique sur les deux thèmes principaux, la Nature et l’Homme ; toute tristesse se dissipe avec Le convalescent, page virtuose d’orchestre où Strauss dessine la figure du Surhomme, tandis que Le chant de la danse voit l’irruption d’une valse viennoise (!) chantée par le violon solo, « ronde de l’univers » (Romain Rolland) parfois un peu triviale. Pour finir, Le chant du voyageur de la nuit, introduit par douze coups de cloches ; Zarathoustra aspire à l’éternité, mais son voyage n’est-il pas un éternel recommencement, comme le suggère la douce superposition finale des accords de do et de si, qui laisse l’œuvre ouverte ?

ANGÈLE LEROY

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Till Eulenspiegel [Till l’Espiègle], poème symphonique op. 28

Composition : hiver 1894-1995 ; achèvement le 6 mai 1895.

Création : le 5 novembre 1895 à Cologne par l’orchestre du Gürzenich placé

sous la conduite de Franz Wüllner ; le 29 novembre suivant à Munich

sous la direction de Richard Strauss.

Effectif : piccolo, 3 flûtes, 3 hautbois, cor anglais, 2 clarinettes en si bémol,

clarinette en mi bémol, clarinette basse, 3 bassons, contrebasson – 4 cors en fa

et en mi, 4 cors en ré (ad libitum), 3 trompettes en fa et en ut, 3 trompettes en ré

(ad libitum), 3 trombones, tuba – timbales, percussions – cordes.

Durée : environ 14 minutes.

Till Eulenspiegel est un personnage malicieux et farceur, issu de la littérature populaire du nord de l’Allemagne. Son nom, à l’étymologie quelque peu triviale, est à l’origine de l’adjectif « espiègle » en fran-çais. Agitateur rusé et naïf, trublion égaré dans le monde des adultes ou simple porte-parole des classes inférieures en rébellion contre la bourgeoisie conservatrice, il est le héros de nombreuses aventures, dont les plus anciennes remontent au début du XVIe siècle. La première version de ses exploits est en effet publiée de façon anonyme au cours des années 1510 sous le titre Un ouvrage amusant sur Till l’Espiègle. Selon cette première source, Till serait né en 1300 en Saxe et mort à Möllen, près de Lübeck, en 1350. Si son existence historique ne peut toutefois être attestée, sa fortune s’est développée rapidement grâce à la traduction et l’adaptation dans différentes langues de ses équipées – péripéties auxquelles les auteurs successifs n’ont pas manqué d’ajouter de nouveaux épisodes.

Héros littéraire, Till est également devenu célèbre dans le monde musical grâce au poème symphonique de Richard Strauss. Le compo-siteur n’a pas traité le sujet sous le coup du simple hasard. Déçu par l’accueil froid réservé à son premier opéra, Guntram, et en butte à la frange conservatrice du public, il s’est plu à rêver aux prouesses (ou méfaits…) légendaires de Till – l’ennemi révéré des philistins. Influencé

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par les écrits de Nietzsche et de Stirner, il s’est peint par ailleurs comme un être solitaire, un individualiste forcené contestant la loi d’autrui et n’obéissant qu’à sa propre conscience – tout comme le héros littéraire.

Commencée à l’hiver 1894, la partition porte en sous-titre « Les Joyeuses équipées de Till l’Espiègle, d’après l’ancienne légende pica-resque, en forme de rondeau ». La forme n’est pas celle d’un rondo pur mais peut se lire selon le schéma traditionnel exposition, péripéties, catastrophe (la mort de Till Eulenspiegel). Les six couplets ne sont pas séparés par les récurrences d’un même refrain mais par des cadences, des suspensions brutales ou, plus généralement, par l’intervention malicieuse de deux motifs liés au personnage principal : l’un énoncé par le cor dès les premières mesures, l’autre par la clarinette quelques temps plus tard. La composition s’apparente au conte populaire dont elle reprend les éléments constitutifs : la brièveté, la narration en épisodes diversifiés, la mise à distance puis la morale finale édifica-trice. Après la création, un critique, Wilhelm Mauke, réalisa un guide d’écoute que Strauss agréa, allant jusqu’à en noter les phrases dans sa propre partition. Selon ces indications, l’introduction des violons reproduit le célèbre « Il était une fois » des contes ; les deux thèmes essentiels apparaissent ensuite, surmontés des mots : « Un fripon nommé Till l’Espiègle » puis, sous le solo de clarinette, « Un méchant gnome, en vérité, à l’affût de nouveau coups ».

Après une exposition où les deux éléments sont développés, se succèdent les différents épisodes. Le premier, lancé par des fusées de clarinettes et une intervention retentissante des cymbales, illustre un premier méfait : Till s’élance à cheval dans un marché et en disperse les marchandises. Les crécelles, les accords dissonants et les motifs épars laissent deviner l’ampleur du désastre… Déguisé en pasteur, il harangue ensuite la foule au son d’une mélodie solennelle exposée par les altos, les clarinettes et les bassons. Une cadence d’un violon soliste, couronnée par un glis-sando étincelant, annonce le troisième épisode : une scène de séduction animée par les arabesques des bois. Till prononce une demande en

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mariage mais est éconduit, à sa grande surprise. Il jure dès lors de se venger et réalise son dessein en tenant un discours ubuesque devant une assemblée de philistins, vrais pédants et faux doctes. Un nouvel épisode commence en forme de marche désordonnée où le contrepoint révèle un conflit grandissant entre la basse et les voix supérieures. Une valse en mineur laisse imaginer le protagoniste dansant et se gaussant de ses contemporains avant qu’une réexposition des thèmes principaux ne marque une pause – sorte de bilan à mi-chemin. L’action n’est pas pour autant terminée : la foule se réunit et profère des menaces. Le ton monte. La musique mène vers des sommets de plus en plus violents jusqu’à la catastrophe : Till est fait prisonnier et traîné devant un tribunal. Des accords sombres des trombones accompagnés de la caisse claire alternent avec des répliques sarcastiques de la clarinette, le héros désirant encore parader. La sentence est prononcée par les cuivres et les bassons : Till est condamné à mort par pendaison. Son thème se disloque sur des trilles de la flûte. Les violons reprennent ensuite le matériau de l’introduction, mettant le récit à distance et refermant le conte à la manière des anciennes « moralités ». L’atmosphère change, se fait à la fois douce et naïve avant que la clarinette ne reprenne le thème principal, ultime pirouette d’un personnage désormais entré dans la légende.

JEAN-FRANÇOIS BOUKOBZA

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SOL GABETTA

Sol Gabetta se fait connaître au niveau international en remportant le Prix Crédit Suisse Jeunes Solistes en 2004 et en faisant ses débuts avec les Wiener Philharmoniker et Valery Gergiev. Née en Argentine, elle a remporté son premier concours à l’âge de dix ans, bientôt suivi par le Prix Natalia Gutman ainsi que des distinctions au Concours Tchaïkovski de Moscou et au Concours international de l’ARD à Munich. Nominée aux Grammy Awards, elle a été nommée « Jeune artiste de l’année 2010 » par Gramophone et obtient le Prix Würth des Jeunesses Musicales en 2012. Après ses débuts très applaudis avec les Berliner Philharmoniker et Sir Simon Rattle au Festival de Pâques de Baden-Baden en 2014, elle fait ses débuts avec la Staatskapelle de Berlin en décembre 2014. Ses engagements marquants cette saison comprennent également ses débuts avec l’Orchestre Symphonique de Toronto et une tournée européenne avec le London Philharmonic Orchestra et Vladimir Jurowski, ainsi que

des récitals à travers l’Europe avec Bertrand Chamayou – avec qui elle publiera un CD en 2015. Sol Gabetta se produit aujourd’hui avec les orchestres et chefs les plus renommés, notamment l’Orchestra dell’Accademia Nazionale di Santa Cecilia, le National Symphony Orchestra de Washington, l’Orchestre National de France, l’Orchestre Royal du Concertgebouw d’Amsterdam, l’Orchestre Symphonique de la Radio Bavaroise, les Bamberger Symphoniker, l’Orchestre de la Tonhalle de Zurich, l’Orchestre du Bolchoï, l’Orchestre Symphonique de la Radio Finlandaise, l’Orchestre de Philadelphie, le London Philharmonic Orchestra et le Philharmonia Orchestra, collaborant avec des chefs comme Giovanni Antonini, Mario Venzago, Pablo Heras-Casado et Thomas Hengelbrock. Après des résidences à la Philharmonie et au Konzerthaus de Berlin, elle a été artiste en résidence au Festival du Schleswig-Holstein à l’été 2014. Elle est régulièrement invitée par les festivals de Verbier, Gstaad, Schwetzingen, Rheingau, la Schubertiade de Schwarzenberg

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et le Festival Beethoven de Bonn. Sol Gabetta se produit très régulièrement en musique de chambre, donnant notamment des concerts au Wigmore Hall de Londres, au Palau de la Música Catalana de Barcelone et au Théâtre des Champs-Élysées à Paris, avec des partenaires comme Patricia Kopatchinskaja, Baiba Skride et surtout Bertrand Chamayou. Elle a fondé un festival de musique de chambre en Suisse, le Festival Solsberg. Sol Gabetta a été nommée « Instrumentiste de l’année 2013 » aux Echo Klassik Awards pour son interprétation du Concerto pour violoncelle de Chostakovitch avec les Berliner Philharmoniker et Lorin Maazel. Elle a également reçu ce même prix en 2007, 2009 et 2011 pour ses enregistrements des concertos de Haydn, Mozart et Elgar, ainsi que d’œuvres de Tchaïkovski et Ginastera. Elle a publié une vaste discographie chez Sony et un récital en duo avec Hélène Grimaud pour Deutsche Grammophon. Grâce à une généreuse donation du Rahn Kulturfonds, Sol Gabetta joue sur un violoncelle de Guadagnini datant de 1759. Sol Gabetta

enseigne à l’Académie de Musique de Bâle depuis 2005.

VALERY GERGIEV

Valery Gergiev est directeur artistique et directeur général du Théâtre Mariinsky de Saint-Pétersbourg. Depuis 1988, il a mené le ballet, la troupe d’opéra et l’orchestre du Théâtre Mariinsky dans plus de 50 pays. Ses 26 ans à la tête de cette institution ont également donné naissance, aux côtés du Théâtre Mariinsky, au Mariinsky Concert Hall (2006) et au Mariinsky II (mai 2013). Il est également fondateur et directeur artistique du festival Étoiles des Nuits Blanches et Nouveaux Horizons à Saint-Pétersbourg, du Festival de Pâques de Moscou, du Festival Gergiev de l’Orchestre Philharmonique de Rotterdam, du Festival de Mikkeli (Finlande), du Festival de Musique Classique de la Mer Rouge à Eilat (Israël), ainsi que chef principal du World Orchestra for Peace. Chef principal du London Symphony Orchestra depuis 2007, Valery Gergiev se produit avec l’orchestre au Barbican Center, aux Proms de la BBC, au

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Festival d’Édimbourg ainsi qu’en tournée en Europe, en Amérique du Nord et en Asie. En juillet 2013, il a dirigé la première tournée internationale du National Youth Orchestra of the United States of America, un orchestre fondé par le Weill Music Institute de Carnegie Hall. Il les dirigera à nouveau pour une tournée européenne en 2016. À l’automne 2016, il deviendra chef principal de l’Orchestre Philharmonique de Munich. Ses enregistrements sont régulièrement récompensés en Europe, en Asie et aux États-Unis. Ses dernières sorties sur le label du Mariinsky comprennent les Concertos pour piano n° 1 et n° 2 de Tchaïkovski, le Concerto pour piano n° 3 et la Symphonie n° 5 de Prokofiev, Roméo et Juliette de Prokofiev, Tableaux d’une exposition, Une nuit sur le mont Chauve et les Chants et Danses de la mort de Moussorgski. Ses parutions récentes sur LSO Live comprennent Un requiem allemand de Brahms, la Symphonie fantastique et l’Ouverture « Waverley » de Berlioz, ainsi que Harold en Italie et La mort de Cléopâtre, du même compositeur. Valery Gergiev a dirigé de nombreux cycles de concerts autour d’un

compositeur, notamment à New York et à Londres, consacrés à Berlioz, Brahms, Dutilleux, Mahler, Prokofiev, Chostakovitch, Stravinski et Tchaïkovski, ainsi que L’Anneau du Nibelung de Wagner. Il a fait découvrir aux publics du monde entier des opéras russes rarement joués. Il a reçu de nombreuses distinctions, parmi lesquelles le Prix Dmitri Chostakovitch, le titre de chevalier dans l’ordre du Lion néerlandais, l’Ordre du Soleil Levant au Japon et la Légion d’Honneur en France.

MÜNCHNER PHILHARMONIKER

Le Münchner Philharmoniker a été fondé en 1893 et a depuis lors, sous la direction de chefs renommés, grandement participé à l’enrichissement de la vie musicale munichoise. Dès ses premières années d’existence, des chefs d’orchestre comme Hans Winderstein et Felix Weingartner ont su garantir la qualité de ses interprétations. Gustav Mahler l’a dirigé lors de la création de ses Symphonies n° 4 et n° 8, et en novembre 1911, la création

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du Chant de la terre du même compositeur a été dirigée par Bruno Walter. Ferdinand Löwe a dirigé les premiers concerts Bruckner, établissant une tradition poursuivie brillamment par Siegmund von Hausegger et Oswald von Kabasta. Eugen Jochum a ouvert le premier concert de l’après-guerre avec l’Ouverture du Songe d’une nuit d’été de Felix Mendelssohn. À l’automne 1945, l’orchestre fait appel à Hans Rosbaud, chef d’orchestre exceptionnel et par ailleurs ardent défenseur de la musique de son temps. Son successeur, de 1949 à 1965, fut Fritz Rieger, sous la direction duquel furent jetées les bases de la formation des jeunes musiciens. Sous la direction de Rudolf Kempe (1967-1976), l’orchestre a effectué sa première tournée en URSS. Sergiu Celibidache a dirigé sa première série de concerts avec le Münchner Philharmoniker en 1979, avant d’être nommé directeur musical général de l’orchestre la même année. Ses légendaires concerts Bruckner ont largement contribué à la réputation internationale de l’orchestre. De septembre 1999 à juillet 2004, James Levine a

été chef principal des Münchner Phi lhar moniker, qui ont obtenu le prix de la « Meilleure programmation de concert de la saison 2002/2003 » de l’Association des Éditeurs de Musique Allemands au printemps 2003. En janvier 2004, les Münchner Philharmoniker ont nommé Zubin Mehta premier chef lauréat de l’histoire de l’orchestre. En mai 2003, Christian Thielemann a été nommé directeur musical général. Il a mené l’orchestre en tournée au Japon, en Corée et en Chine en novembre 2007. Ces concerts très applaudis ont été suivis d’une nouvelle tournée de cinq concerts au Japon en mai 2010. En janvier 2009 a débuté une série de représentations du Chevalier à la rose de Richard Strauss au Festspielhaus de Baden-Baden, suivies par Elektra, du même compositeur, l’année suivante. Les musiciens ont interprété les quatre symphonies de Brahms en janvier 2011. L’orchestre a effectué une tournée en Amérique du Sud sous la baguette de son chef lauréat Zubin Mehta en septembre 2010, recevant un accueil chaleureux aussi bien de la presse que du public. Pour

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célébrer le 100e anniversaire de la création de l’œuvre, Christian Thielemann a dirigé à deux reprises la Symphonie n° 8 de Mahler en octobre 2010. Lorin Maazel a été nommé au poste de chef principal en 2012. Durant ses deux années passées à cette fonction, il a développé le répertoire de l’orchestre et travaillé sa sonorité. Valery Gergiev le remplacera à partir de la saison 2015/2016.

Violons ISreten Krstič, 1er violon soloLorenz Nasturica-Herschcowici, 1er violon soloJulian Shevlin, 1er violon soloKarel Eberle, soliste associéOdette Couch, soliste associéClaudia SutilPhilip MiddlemanNenad DaleorePeter BecherRegina MatthesWolfram LohschützMartin ManzCéline VaudéYusi ChenChing-Ting ChangHelena Madoka BergIason KeramidisFlorentine Lenz

Michaela Buchholz *Jikmu Lee *

Violons IISimon Fordham, solisteAlexander Möck, solisteIIona Cudek, co-solisteMatthias Löhlein, soliste assistantKatharina ReichstallerNils SchadClara Bergius-BühlEsther MerzKatharina TriendlAna Vladanovic-LebedinskiBernhard MetzNamiko FuseQi ZhouClément CourtinTraudel ReichSigrid Berwanger *Laura Mead *Jiweon Moon *

AltosJano Lisboa, solisteBurkhard Sigl, co-solisteJulia Rebekka Adler, co-solisteMax SpengerHerbert StoiberWolfgang StinglGunter PretzelWolfgang BergBeate Springorum

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Agata Józefowicz-FiołekKonstantin SellheimJulio LópezValentin EichlerChrista Jardine *Julie Risbet *

VioloncellesMichael Hell, solisteFloris Mijnders, solisteStephan Haack, co-solisteThomas Ruge, co-solisteHerbert HeimVeit Wenk-WolffSissy SchmidhuberElke Funk-HoeverManuel von der NahmerIsolde HayerSven FaulianDavid HausdorfJoachim Wohlgemuth

ContrebassesSławomir Grenda, solisteFora Baltacigil, solisteAlexander Preuß, co-solisteHolger HerrmannStepan KratochvilShengni GuoEmilio Yepes MartinezUlrich ZellerThomas Hille

FlûtesMichael Martin Kofler, solisteHerman van Kogelenberg, solisteBurkhard Jäckle, co-solisteMartin BeličGabriele Krötz, piccolo

HautboisUlrich Becker, solisteMarie-Luise Modersohn, solisteLisa OutredBernhard BerwangerKai Rapsch, cor anglais

ClarinettesAlexandra Gruber, solisteLászló Kuti, solisteAnnette Maucher, co-solisteMatthias AmbrosiusAlbert Osterhammer, clarinette basse

BassonsLyndon Watts, solisteSebastian Stevensson, soloJürgen PoppJörg Urbach, contrebassonJohannes Hofbauer *

CorsJörg Brückner, solisteUlrich Haider, co-solisteRobert RossAlois Schlemer

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Hubert PilstlMia AselmeyerThiemo Besch*

TrompettesGuido Segers, solisteBernhard Peschl, co-solisteFranz UnterrainerMarkus RainerFlorian Klingler

TrombonesDany Bonvin, solisteDavid Rejano Cantero, solisteMatthias Fischer, co-solisteQuirin WillertBenjamin Appel, trombone basse

TubaThomas Walsh

TimbalesStefan Gagelmann, solisteGuido Rückel, solisteWalter Schwarz, co-soliste

PercussionSebastian Förschl, solisteJörg Hannabach

HarpeTeresa Zimmermann

* contrat temporaire

Représentants de l’orchestreStephan HaackMatthias AmbrosiusKonstantin Sellheim

Académie

ViolonsYamadi AsamiYuan-Wen ChangAlexandra Raab

AltoKatharina Schmid

VioloncelleAngela Chang

ContrebasseJohannes Treutlein

BassonRyo Yoshimura

TubaMichael Schwarzfischer

PercussionMichael Leopold

01 4 4 8 4 4 4 8 42 21 , AV E N U E J E A N - J A U R È S 7 5 019 PA R I S P O R T E D E PA N T I N

P H I L H A R M O N I E D E PA R I S . F R

GERGIEV - MARIINSKYMERCREDI 25 MARS - 20H30GRANDE SALLE - PHILHARMONIE 1

ORCHESTRE DU THÉÂTRE MARIINSKY - VALERY GERGIEVANASTASIA KALAGINA, SOPRANOChtchedrine Concerto pour orchestre no 1 « Couplets polissons »Moussorgski Les Enfantines Moussorgski / Ravel Tableaux d’une exposition

JEUDI 26 MARS - 20H30GRANDE SALLE - PHILHARMONIE 1

MARIINSKY STRADIVARIUS ENSEMBLE - VALERY GERGIEVDENIS MATSUEV, PIANO - TIMUR MARTYNOV, TROMPETTEGrieg Suite « au temps de Holberg »Chostakovitch Concerto pour piano, trompette et cordes Tchaïkovski Sérénade pour cordes op. 48

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01 4 4 8 4 4 4 8 42 21 , AV E N U E J E A N - J A U R È S 7 5 019 PA R I S P O R T E D E PA N T I N

P H I L H A R M O N I E D E PA R I S . F R

LUNDI 20 AVRIL - 20H30GRANDE SALLE - PHILHARMONIE 1

LONDON SYMPHONY ORCHESTRA

PETER EÖTVÖS, DIRECTION

Pierre Boulez Livre pour cordes - Rituel in memoriam Bruno Maderna Igor Stravinski Le Sacre du printemps

Créateur reconnu, tout autant que chef brillant dans le répertoire moderne, Peter Eötvös s’associe au London Symphony Orchestra pour libérer la flamboyance du Livre pour cordes et de Rituel in memoriam Bruno Maderna composés par Pierre Boulez, avant d’interpréter Le Sacre du printemps, œuvre maîtresse de Stravinski.

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Mécénat Musical Société Générale, Association loi 1901 Siège social : 29 bd Haussmann 75009 Paris - Photographie : Julien Mignot - FRED & FARID

PARTENAIREDE LA MUSIQUE CLASSIQUE

SOCIÉTÉ GÉNÉRALEMÉCÉNAT MUSICAL

DEPUIS 25 ANS

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01 4 4 8 4 4 4 8 42 21 , AV E N U E J E A N - J A U R È S 7 5 019 PA R I S P O R T E D E PA N T I N

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