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Droit des affaires Prof. Anne Talbot BUS2 365 I. PARTNERSHIPS , SOCIÉTÉ DE PERSONNES ET TRUSTS A. Les partnerships de CML Définition : la société en nom collectif est la relation qui existe entre des personnes qui exploitent une entreprise en commun en vue de réaliser un bénéfice . art 2 Partnership Act (Ontario) [ PA ]; - Def/entreprise/ inclut la plupart des activités économiques; définie spécifiquement par la loi; o « entreprise s’entend notamment d’un commerce, d’une occupation ou d’une profession » art 1.1 PA - Def/bénéfice/ ne désigne pas la réalisation de bénéfices mais plutôt une entreprise dont la motivation est la génération de bénéfices; il doit y avoir un effort raisonnable fait en ce sens; - Def/en commun/ il faut regarder les termes propres à l’entente, à la propriété relative à l’entreprise; i) Caractéristiques du partnership - La société est composée de plus d’une personne; - Elle implique aussi que les personnes associées ont choisi de coopérer en vertu d’un contrat ou d’une entente tacite; A.E. Lepage Ltd v Kamex Developments Ltd (1977) Ontario – CA Faits: L et K possèdent une propriété en commun; ils ont une entente par rapport à leurs droits respectifs quant au profit généré par cette propriété. L vend la propriété à un tiers sans l’autorisation de K. Est-ce que l’acte de vente a éteint le droit de propriété de K ? Litige: Existe-t-il un contrat de société? – non Analyse : Si une société existe → un partenaire peut lier la société ; si une société n’existe pas et qu’il n’y a qu’une entente de copropriété → un individu ne peut pas lier les autres pour leur part ; Dans le cas en appel, 2 co-propriétaires cherchant à revendre une propriété en utilisant les services exclusifs d’un courtier. Est-ce que les propriétaires exploitent une entreprise ? 1

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Droit des affairesProf. Anne Talbot

BUS2 365

I. PARTNERSHIPS , SOCIÉTÉ DE PERSONNES ET TRUSTS A. Les partnerships de CML Définition : la société en nom collectif est la relation qui existe entre des personnes qui exploitent une entreprise en commun en vue de réaliser un bénéfice. art 2 Partnership Act (Ontario) [PA];

- Def/entreprise/ inclut la plupart des activités économiques; définie spécifiquement par la loi;

o « entreprise s’entend notamment d’un commerce, d’une occupation ou d’une profession » art 1.1 PA

- Def/bénéfice/ ne désigne pas la réalisation de bénéfices mais plutôt une entreprise dont la motivation est la génération de bénéfices; il doit y avoir un effort raisonnable fait en ce sens;

- Def/en commun/ il faut regarder les termes propres à l’entente, à la propriété relative à l’entreprise;

i) Caractéristiques du partnership- La société est composée de plus d’une personne;- Elle implique aussi que les personnes associées ont choisi de coopérer en vertu

d’un contrat ou d’une entente tacite;

A.E. Lepage Ltd v Kamex Developments Ltd (1977) Ontario – CA

Faits: L et K possèdent une propriété en commun; ils ont une entente par rapport à leurs droits respectifs quant au profit généré par cette propriété. L vend la propriété à un tiers sans l’autorisation de K. Est-ce que l’acte de vente a éteint le droit de propriété de K ?Litige: Existe-t-il un contrat de société? – non Analyse : Si une société existe → un partenaire peut lier la société ; si une société n’existe pas et qu’il n’y a qu’une entente de copropriété → un individu ne peut pas lier les autres pour leur part ;Dans le cas en appel, 2 co-propriétaires cherchant à revendre une propriété en utilisant les services exclusifs d’un courtier. Est-ce que les propriétaires exploitent une entreprise ? Non. Il faut déterminer l’intention des individus à cet égard. Or, leur intention consiste plutôt à sécuriser une entente afin de déterminer leurs droits et obligations respectives en tant que co-propriétaires. Partant, chacun d’eux est libre de gérer sa part indivise de l’immeuble. Ratio   : une propriété en commun ne permet pas de présumer de l’existence d’une société ; les trois conditions (entreprise, en commun, en vue d’un bénéfice) doivent être satisfaites.

Volzke Construction Ltd v Westlock Foods Ltd (1986) Alberta – CA

Faits: V construit une extension à un centre commercial opéré par W. W se retrouve

1

Droit des affaires/TalbotHiver 2016

en défaut de paiement. V poursuit Bonel, alléguant que W et B sont associés. Question : Est-ce que B et W sont associés ou co-propriétaires ? – associés. Analyse :L’intention est clé dans une telle détermination et se révèle à partir de l’entente ou du comportement des parties. Plusieurs éléments indiquent la présence d’une société (e.g. B possède 20% de parts du centre commercial ; B et W partagent les coûts de développement de l’entreprise ; ils s’entre-désignent comme associés ; division des bénéfices; compte de banque partagé). Ratio: le contrôle sur l’entreprise n’est pas un facteur déterminant de l’existence d’une société. L’intention est dérivée du comportement et n’a pas à être explicite.À contraster avec Kamex, où la propriété en commun n’est pas suffisante pour établir l’existence de la société. Distinction : cadre personnel vs cadre commercial.

Pooley v Driver (1876) UK

Faits: Prêt accordé à D, qui prête à son tour à Barret & Higgins, une société. Cette société s’avère insolvable. P intente une action contre D, alléguant qu’il est associé de B&H. D nie être associé et affirme qu’il n’est qu’un créditeur. Question : Le contrat de prêt a-t-il créé une société ? – oui.Analyse :Cas particulier : l’associé silencieux. D n’était pas véritablement impliqué auprès de l’association, mais participait tout de même un peu à l’administration et récoltait une part des bénéfices. Il s’agit d’une société déguisée en contrat de prêt. Indice → les parts calculées dans l’entreprise incluent celles du prêteur, ce qui est inusité pour un simple contrat de prêt. La relation véritable unissant D à B&H est celle d’un associé « dormant », ou silencieux. D cherchait à récolter des profits et permettait que l’entreprise soit menée en son nom. Or, D voulait limiter sa part de responsabilité advenant une perte. Ratio   : La détermination de l’existence d’une société doit prendre en considération toutes les circonstances entourant l’entente, et non seulement les mots/documents employés par les parties; indices d’une entente de société → partage des profits, partage du capital de la société, contrôle sur la gestion des fonds, entente portant sur l’éventualité d’une dissolution par faillite, termes inhabituels de remboursement d’un prêt.

Cox & Wheatcroft v Hickman (1860) UK

Faits : une garantie est concédée aux créanciers d’une entreprise en difficulté financière. Cette entente permet aux créanciers de récolter une part des bénéfices générés, mais le bénéficiaire du trust créé pour les besoins de la garantie participe à l’entreprise. Un créancier tiers de l’entreprise veut poursuivre un créancier bénéficiant de la garantie, alléguant qu’il est associé.Question : est-ce que le contrat de garantie crée une société ? – non. Analyse :Bien que l’intéressement aux profits permette de présumer de l’existence d’une société, il ne s’agit pas d’une présomption irréfragable.Ratio   : l’intéressement au profit n’est pas suffisant pour établir l’existence d’une société et il faut examiner le contexte de la réception de ce profit ;À contraster avec Pooley v Driver. Ici, l’entreprise ne semble pas être exploitée « en

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commun ».

Existence d’une société

Art 3 PA

- (1) La propriété commune; (2) le partage des recettes brutes ne créent pas en soir une SENC, que les propriétaires partagent ou non les bénéfices tirés de son usage;

- La réception d’une quote-part constitue la preuve, en l’absence de preuve contraire, qu’elle est un associé de la SENC; moyen de preuve contraire :

o (a) La réception du paiement d’une créance sur les bénéfices que réalise une entreprise n’en fait pas un associé;

o (b) Un K de rémunération d’un employé par une quote-part des bénéfices ne fait pas de cet employé un associé;

Thorne v N-B (Workmen’s Compensation Board) (1962) Nouveau-Brunswick – CA

Faits: T cherche à être indemnisé par le fond de compensation des travailleurs. T est associé. Or, le droit des contrats stipule que personne ne peut être son propre employeur. Est-ce que T peut être considéré comme employé de la société à laquelle il est associé ? Question: est-ce qu’un partnership possède une personnalité juridique ? – non. Analyse :Une société peut ester en justice et être poursuivie à son nom → cette pratique est seulement utilisée pour faciliter les procédures mais est insuffisante pour conclure à une personnalité juridique.Contrairement à une entreprise individuelle, un partnership constitue une organisation légale. Cependant, ni l’une ni l’autre ne possède la personnalité juridique et la responsabilité de l’entreprise repose sur chaque individu (propriétaire ou associé). Ratio   : le partnership n’a pas d’existence juridique séparée de ses constituantes, il consiste en l’ensemble de ses parties et rien d’autres (idem en CVL).

ii) Fonctionnement du partnership1. Les associés et les tiers

- Les règles applicables aux relations avec les tiers ne sont pas supplétives;- Règle générale : les associés sont collectivement responsables vis-à-vis des

obligations de la société survenues dans le cours normal de ses affaires (art 7 Loi SENC); la société peut être liée par n’importe lequel de ses associés.

- Possibilité de restreindre le pouvoir d’un ou plusieurs associés, mais cette restriction n’a d’effets qu’entre les parties et les tiers informés (art 6 Loi SENC);

- Les obligations découlant de contrats sont conjointes pour les associés (art 10.1 Loi SENC);

- Lorsque la responsabilité découle d’un acte illicite d’un associé ou en cas de détournement de fonds ou de biens, la responsabilité devient solidaire (art 11-13 Loi SENC); l’acte illicite doit cependant avoir été commis dans le cours des activités de la société (doit présenter des liens assez forts avec les activités habituelles de la firme)

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Clarke v Burton (1958) - Ontario

Retrait d’un associé : holding-out si l’associé ne donne pas d’avis. Exception : si l’associé n’est pas connu comme associé par le tiers, sa responsabilité s’éteint dès le retrait;Retrait d’un associé : le tiers est présumé ne pas avoir connaissance du retrait;

2. Fin du partnership- La société peut prendre fin du consentement des associés, à l’arrivée de son

terme, suite à l’avis de l’un des associés de mettre fin à la société (la société est dissolue et doit être recréée à nouveau) et suite au décès/faillite de l’un des associés (art 32 Loi SENC);

- Il est possible de demander à un tribunal de mettre fin à la société (art 35 Loi SENC);

B. La société de CVL – la société de personnes/contractuelle i) Typologie des différentes sociétés de personnes

1. Société en nom collectif (Loi SENC, art 2198–2235 CcQ);2. Société en commandite (Loi SEC, art 2236 –2249 CcQ);3. Société en participation (Loi SEP, art 2250 –2266 CcQ);

ii) Attributs de la société- La société a différents attributs qui la rapprochent d’une personne

physique/morale, mais il lui en manque certains pour être assimilée à une vraie personne;

- Seule la SPA possède tous les attributs légaux (ou presque) d’une personne physique;

1. La société a un nom2. La société a un domicile

- Art 2189 al/2 CcQ et art 33 al/2.1 de la Loi sur la publicité légale des entreprises [Loi LPLE]

- Cette exigence s’applique à la société en nom collectif et à la société en commandite;

3. La société peut ester en justice- Art 2225 CcQ : la société peut ester en justice sous le nom qu’elle déclare et

peut être poursuivie sous ce nom;- NB : cette caractéristique ne s’applique pas à la société en participation.

4. La société peut contracter- Art 2219 et s CcQ : est implicite la notion que la société peut se lier et être

liée contractuellement; voir art 2221 CcQ relativement à la responsabilité personnelle des associés et de la société;

5. La société a-t-elle un patrimoine?- Est-ce qu’une société peut posséder des biens? La possibilité de posséder

des biens n’appartient en principes qu’aux personnes dotées de la personnalité juridique (approche classique – théorie personnaliste du patrimoine; art 2, 298 CcQ);

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- Réponse courte : oui, tant que la société est solvable; il faut cependant déterminer si le régime patrimonial tombe sous la désignation d’affectation ou de division;

- Sous le CcBC, Québec (Ville de) c. Compagnie d’immeuble Allard (1996) Québec – CA a établi que la société de personne n’a pas de personnalité juridique et n’a donc pas de patrimoine.

- Sous le CcQ, cette décision demeure valide (voir art 2188 CcQ), puisque seule la société par action possède la personnalité morale. Ceci étant dit, sous le nouveau Code, tout en préservant la théorie personnaliste du patrimoine, la théorie autonomiste est dorénavant introduite (art 302 CcQ). Il est possible de prendre une partie du patrimoine d’une personne pour l’affecter à une fin propre, lequel n’aura cependant pas de titulaire (e.g. fiducie, patrimoine par affectation, patrimoine par division – voir Bouchard à ce sujet). Par exemple, la création d’un patrimoine par division permettrait à une société de personnes de posséder un patrimoine.

- Il faut néanmoins noter qu’une société de personnes, sous cette théorie, ne peut posséder un patrimoine qu’aussi longtemps que le patrimoine est solvable; c’est ensuite le patrimoine des associés qui prend le relais.

- Voir à cet égard Ferme CGR enr. Senc (syndic de) 2010 Québec – CA;

- La Cour reconnaît l’absence de personnalité juridique de la société, en prenant appui sur art 2188 CcQ; elle refuse cependant de reconnaître que la SENC n’a pas de patrimoine distinct : dans le cas en appel, il s’agirait d’un patrimoine d’affectation. La Cour s’appuie sur les attributs de la société pour établir cette décision (nom, domicile, capacité d’ester);

- La société a-t-elle un patrimoine d’affectation?- Ce type de patrimoine (voir art 302 CcQ) créerait une entité distincte

du patrimoine par rapport aux membres de la société (création d’un patrimoine objet, semblable à celui des fiducies);

- Avantage : cette désignation permet d’éviter une discussion sur la notion de propriété collective dans la société;

- Inconvénient : cette désignation implique un patrimoine étanche, ce qui n’est pas le cas des sociétés de personnes.

- La société a-t-elle un patrimoine de division?- Déf/division de patrimoine (voir art 302 CcQ)/ un patrimoine affecté à

un but spécifique poursuivi par la société, constitué des apports des associés et des droits acquis par la société;

- Le patrimoine de division préserve le lien avec le constituant du patrimoine;

- Ce patrimoine est soumis à la volonté de l’ensemble des associés, ce qui empêche les créanciers personnels de l’associé de puiser dans le patrimoine de la société; voir art 2221, 2246 CcQ en ce qui a trait à une reconnaissance légale du patrimoine de division d’une société de personnes – pas très explicite.

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- Selon Bouchard, non : le patrimoine de la société doit être considéré comme une propriété collective. C’est donc la collectivité des associés qui est propriétaire de ce patrimoine, et ce, jusqu’au partage où la propriété redeviendra individuelle – donc patrimoine de division. La jurisprudence, au contraire, suggère qu’il s’agirait d’un patrimoine d’affectation, mais cela cause plusieurs problèmes doctrinaux, notamment au niveau de la responsabilité des associés.

- Def/division de patrimoine/ patrimoine affecté à un but spécifique poursuivi par la société, constitué des apports des associés et des droits acquis par la société. Ce patrimoine est soumis à la volonté de l’ensemble des associés, ce qui empêche les créanciers personnels de l’associé de puiser dans le patrimoine de la société. Le patrimoine de division préserve le lien avec le constituant du patrimoine.

iii) Les conditions essentielles de formation de la sociétéLes conditions ci-dessous sont impératives à l’existence d’un contrat de société :

1. Apport des associés - L’apport des associés n’a pas à être identique – peut varier en nature et

en valeur selon les associés;- Défaut de se conformer à cette condition peut entraîner 2 conséquences :

i. Recours en dommages et intérêts (art 2198 al.2 CcQ);ii. Dissolution de la société (art 2186 al.1 CcQ);

- La prestation de l’apport donne droit à une part sociale pour l’associé et des droits afférents; la somme des apports constitue le patrimoine de la société;

- La part sociale donne droit à une part des bénéfices (art 2201, 2202, 2203 CcQ) lorsque la société est active;

- La part sociale comporte également un droit de remboursement au jour de la dissolution de la société (art 2230, 2235, 361 CcQ) si les conditions le permettent, et un ultime partage des bénéfices, le cas échéant.

2. Partage des bénéfices - Stipulation à l’effet contraire est sans effet (art 2203 CcQ) – cela évite un

recours au tribunal pour faire déclarer nulle une telle clause;- Il faut être en présence de bénéfices tangibles pour parler de partage :

des bénéfices d’ordre moral ou intellectuel, de simples économies ne sont pas considérés comme des bénéfices. Il faut un enrichissement de l’associé.

3. Intention des parties de s’associer ( affectio societatis ) i. Une collaboration active et consciente des parties

- Les parties ont l’intention d’exploiter ensemble une entreprise et cela se manifeste concrètement par des actions positives qui ne permettent pas de dire que leur association est le fruit du hasard;

- Les parties ont un intérêt commun ou mutuel – les associés ont tous intérêt à ce que le projet réussisse et génère des profits;

ii. Sur un pied d’égalité

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- Il n’y a pas de subordination dans la relation entre les associés;

- Cela ne veut pas dire qu’ils auront tous le même rôle : une division des tâches est possible;

iii. Intéressée - Il faut être en mesure de démontrer que les parties ont un

intérêt pécuniaire dans cette collaboration et qu’ils partageront les bénéfices (conjoints de fait = insuffisant);

En brefPartnership (CML) Société (CVL)1. Relation2. Exploitant une entreprise3. En vue de faire des bénéfices

1. Apport ($ ou service – peut déterminer la part de bénéfice – lié à la notion de patrimoine, capital social)2. Intention de s’associer (intention active; relation d’égalité → ≠ relation employé/employeur; intéressée → intérêt pécuniaire)3. Partage des bénéfices;

iv) Le fonctionnement général de la société de personnes

- En principe, les associés se donnent un mandat réciproque de représenter la société (art 2215 CcQ); ce pouvoir est limité par un droit de veto de chacun des associés ou par des limites contractuelles internes (art 2219 CcQ)

- Les associés peuvent aussi choisir de nommer un gérant (art 2213-14 CcQ);

- Certaines décisions obéissent à un régime spécial : les décisions collectives (art 2216 CcQ) et les décisions modifiant le contrat de société (art 2216 CcQ, Proulx c. Alary [2004]);

- Pour le reste, tous les associés participent au processus décisionnel (soumis à la règle du 50%+1) (art 2216 CcQ))

Obligations des associés :

- Fournir un apport (art 2198–2200 CcQ);- Obligation de loyauté (équivalent des obligations fiduciaires en CML) –

obligation générale qui découle de l’économie du code;- Non concurrence : ne pas priver la société (art 2204 CcQ) & ne pas faire

compétition (art 2204 CcQ);

Droits des associés :

- Évaluation/cession de la part sociale (art 2209-10 CcQ);- Renseignement/information (art 2218 CcQ);

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- Utilisation des biens de la société (art 2208 CcQ) & droit au remboursement des dépenses (art 2205 CcQ) – le corollaire de l’obligation de non concurrence;

Charlaine Bouchard , Les rapprochements entre la société de personnes et le partnership   : une étude de droit comparé canadien

- La société est, tant en CVL qu’en CML, un groupement contractuel de personnes où l’autonomie de la volonté est fondamentale. Distinction CVL/CML : les éléments de formation des K.

- CVL  : K nommé – arts 2186 et s CcQ; 3 conditions :o Mise en commun d’apports (pp 159-160)

Obligation qui pèse sur ch. associé, mais qui peut être variable en genre/nombre;

Obligation liée à la constitution d’un patrimoine autonome affecté à l’atteinte d’un but commun → apport conditionne la qualité d’associé (part sociale → droit pécuniaires/droits sociaux (droit à l’information & droit à la participation);

La cession de part sociale est soumis à l’accord de tous les associés (pcq obligation conjointe ou solidaire au passif);

Apport = numéraire/biens/connaissance ou activitéo Le partage de bénéfices pécuniaires (p 161)

La société (= lucrative) est pour le bénéfice des associés → aucun associé ne peut être exclu de la participation aux profits)

Def/bénéfice/ ce qui contribue à l’enrichissement positif du patrimoine des associés (≠ économie);

L’égalité du partage n’est pas nécessaire, mais présumée si pas d’autres arrangements (art 2202, al1 CcQ); la participation aux bénéfices emporte l’obligation de partager les pertes (art 2201 CcQ);

o L’esprit de collaboration (p 162) Affection societatis – intention des associés de collaborer à une

entreprise commune/convergence d’intérêts/volonté d’union; L’intention se dégage des faits et attitudes des parties;

- CML  : Def/general partnership – société en nom collectif/ relation qui existe entre des personnes qui exploitent une entreprise en commun en vue de réaliser un bénéfice.

- Fondée implicitement sur l’existence d’un contrat exprès/implicite;- Copropriété et partage des recettes brutes ne sont pas suffisants pour créer

une société, mais la réception d’une quote-part des bénéfices constitue une preuve prima facie de la qualité d’associé.

- Généralement 3 conditions :o La présence d’une entreprise (pp 166-167)

Plus flexible que le critère civiliste – « any commercial activity or adventure amounts to a business » sans de critères quant à un seuil minimal d’organisation;

o Exploitation commune (pp 168-169) Min. 2 personnes qui exploitent une entreprise en commun; L’équivalent de l’esprit de collaboration; on atteste de l’intention

des parties de s’associer;o En vue de réaliser des bénéfices (pp 169-171)

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Intention de réaliser plutôt que « partage » comme en CVL; Pas nécessaire que le profit soit l’élément premier que

recherche l’entreprise, tant qu’il s’agit d’un élément véritable; possible d’arriver à la qualification de société même en l’absence de réalisation ou de partage des profits;

- Les différentes formes de sociétés (CVL)o Sociétés immatriculées (pp 172-174)

Société en nom collectif (pp 173-173) Règles impératives rares; véhicule flexible; Patrimoine autonome et capacité juridique distincte; Associés responsables conjointement ou solidairement

sur leur patrimoine personnel des obligations de la société;

Présomption de mandat de réciprocité entre associés : tout acte accompli par un associé engagera ses coassociés;

Société en commandite (p 174) 2 catégories d’associés :

Commanditaire – apporte des fonds, responsabilité limitée à ces fonds;

Commandités – apporte des idées/gestion; responsabilité solidaire;

o Société non immatriculées (pp 174-178) Société en participation

Catégorie résiduelle; soustraite à tout régime de publicité (≠ SENC & SEC); aucune individualité juridique (patrimoine, nom, domicile, capacité d’ester)

- La personnalité moraleo Originellement, aptitude commune à posséder des droits (par ex. un

patrimoine) et à être sujet d’obligations sous l’égide d’une personne fictive; raisonnement : pour avoir un patrimoine, il faut être un sujet, donc si un groupement possède des droits, il faut lui reconnaître la personnalité morale.

o Théorie classique du patrimoine (Aubry et Rau) (pp 196 et s) : un patrimoine distinct suit la personnalité; sous le CcBC (voir Allard), le terme société est synonyme de « collectivité des associés », donc la société n’a pas de personnalité distincte de celles de ses associés. On parle plutôt de mode collectif de détention des droits, qui ouvre la porte à l’idée d’un patrimoine autonome, sans sujet.

o Le patrimoine d’affectation dans le CcQ Sociétés peuvent maintenant jouir d’une individualité juridique

et d’un patrimoine autonome sans pour autant être reconnue comme personne morale. SENC et SEC peuvent ester en justice, racheter les parts sociales de leur membre, ne compter qu’un seul membre, avoir une existence indépendante de leurs membres. Pourquoi?

Le nouveau CcQ privilégie une conception patrimoniale non plus fondée exclusivement sur la personne, mais plutôt sur l’affectation commune des biens (voir art 2, 2645 CcQ). Le patrimoine d’une personne peut comprendre une division ou

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affectation de certains biens qui le composent. Patrimoine d’affectation = sans sujet, dont le régime est autonome de celui du constituant (fondation et fiducie); Patrimoine de division = certains droits sont affectés à un même but et forme un gage exclusif pour certains créanciers; pas un régime autonome –perméabilité du cloisonnement patrimonial : les associés demeurent personnellement responsables des dettes sociales, lorsque le patrimoine divisé est épuisé;

v) Fonctionnement particulier A. la société en commanditeSociété = [Commandités ← Commanditaires]

- La société en commandite a un mode de gestion particulier : ses associés sont divisés en commanditaires et en commandités – seuls les commandités peuvent assurer la gestion de la société en commandite (art 2236, 2238. 2244 CcQ), les commanditaires fournissant le financement de celle-ci. Ainsi, dans une SEC, seuls les commandités disposent du pouvoir de lier la société – or, la société pourra être liée par un commanditaire si elle ratifie le contrat.

- Les tiers sont présumés connaître l’identité des commandités et des commanditaires;

- Partage des bénéfices : sujette à une limite importante – on ne doit pas venir entamer le capital social par la distribution des profits dans une optique de protection des tiers créanciers de la SEC (art 2242 CcQ);

B. Régime général où la société est liée aux tiersSI LE COCONTRACTANT EST LA SOCIÉTÉ

SI LE COCONTRACTANT EST UN ASSOCIÉ

SI L’ON EST EN PRÉSENCE D’UN ASSOCIÉ APPARENT

La société est liée pour tout acte passé par la société (agissant par un/ses associés ou par le gérant); Art 2215, 2219 CcQ

La société est liée pour tout acte passé par un associé en son nom personnel mais s’inscrit dans le cours de ses activités ou porte sur des biens dont la société a l’usage (dem dans le cas de la SEC pour un acte passé par un commandité); Art 2220 CCQ;

Même régime pour l’associé apparent; Art 2222 CcQ

LIMITE : acte passé hors du cours des activités; Art 2219 CcQ

LIMITE : acte passé hors du cours des activités; Art 2220 CcQ

LIMITE : la société ne sera pas liée si elle a pris les mesures pour prévenir l’erreur des tiers

LIMITE : le tiers est de mauvaise foi (pas en ce

LIMITE : acte portant sur des biens dont la société

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qui a trait aux règles de partage

n’a pas l’usage OU lorsque le tiers est de mauvaise foi

C. Régime général où l’associé est lié vis-à-vis du tiersSENC SEC SEP

Responsabilité subsidiaire de l’associé – art 2221 CcQ; la créance du tiers prend rang après les créanciers personnels

Régime spécifiqueResponsabilité solidaire et subsidiaire du commandité (art 2246 CcQ)

Non visée par le régime généralResponsabilité de l’associé (pas un recours subsidiaire) art 2254 CcQ;L’associé ne lie pas la société, sauf si le cocontractant est la société

Exception : immixtion du commanditaire dans les décisions (art 2244 CcQ)Exception : dénomination sociale non conforme (art 2247, 2197 CcQ)

C. Le trust - Il est possible de reproduire, par le truchement d’un express trust, en général, le

même mode de fonctionnement que celui d’une société par actions;o Dans ce cas, le constituant (settlor) investira des fonds dans le trust, ces

fonds seront administrés par le fiduciaire (trustee) et il est probable que le constituant jouera aussi le rôle de bénéficiaire et il pourra, comme un actionnaire, recevoir des dividendes en proportion des parts;

- En quoi peut-on utiliser le trust comme véhicule alternatif à la SPA, particulièrement à des fins de gestions d’entreprise (e.g. conséquences fiscales);

SPA et trust  : une comparaison1. L’individualité juridique du trust

- Le trust ne possède pas la personnalité morale;- Le trust réussit néanmoins à reproduire certaines caractéristiques propres à la

personnalité morale :o Le trustee est titulaire des droits sur les biens affectés au trust (pas les

bénéficiaires); voir Frajman pour les différences avec la fiducie CVL;o Il est donc loisible pour les bénéficiaires de contracter avec le trust;

2. La responsabilité limitée- Puisque le trustee est titulaire des droits sur les biens, il sera normalement

appelé à répondre des obligations contractuelles ou extracontractuelles : ainsi on pourrait présumer que les bénéficiaires du trust pourront avoir des responsabilités pratiquement semblables à celles des actionnaires au sein d’une SPA (soit à peu près nulle);

- Deux sources de responsabilité potentielles pour les bénéficiaires :

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o Le droit à l’indemnisation du trustee de la part du bénéficiaire, sachant que la plupart des business trusts vont retirer ce droit au trustee par contrat et que les tribunaux canadiens sont réticents à autoriser la subrogation des créanciers par rapport à ce droit;

o L’application de la doctrine du mandat (agency) aux bénéficiaires lorsque les faits le justifient (bare trustee – contrôle par les bénéficiaires) ou une assimilation de ceux-ci à des associés.

Conditions d’un bare trustee – relation principal/agent (ce n’est plus un trust);

Ne possède pas de pouvoirs indépendants; & Les bénéficiaires ont le pouvoir d’exiger la remise des

biens par le trustee;- Droits des bénéficiaires :

o Droit d’élire les trustees;o Modification de l’acte constitutif;o Révocation des trustees;o Fin du trust;

- L’ambiguïté repose en ce que toutes ces critères existent également dans une SPA et donc il est possible que l’entreprise soit assujettie à la doctrine du contrôle/mandat;

3. L’existence perpétuelle- Les trusts sont assujettis au Perpetuities Act, lequel limite la durée de vie d’un

trust à une période déterminable, ce qui vient limiter leur attrait;- D’autre part, les trusts sont assujettis à un régime fiscal particulier, lequel impose

une présomption de disposition de ses actifs à chaque 21 ans;- Pour autant, certains types de trusts ont fait l’objet de dispenses dans les lois

applicables (voir Frajman);

Un des problèmes potentiels du trust comme véhicule d’exploitation d’entreprise réside dans l’absence de mesures de protection prévues par la loi; bien que la CML aie prévu des mesures de protection des bénéficiaires, celles-ci ne sont pas toujours adaptées à la réalité de l’exploitation d’une entreprise;

Par contre, ce type de flexibilité peut présenter des avantages dans d’autres contextes, comme dans le milieu des œuvres caritatives (voir Frajman);

Daniel Frajman, Trusts vs Corporations

- CML et CVL: la fiducie place la propriété dans un régime indépendant de celui du constituant, la propriété est placée en fiducie pour un but particulier, la propriété est administrée par un fiduciaire.

- CVL (Qc) : la fiducie est un patrimoine séparé qui est affecté à une fin particulière, sur lequel ni le constituant, ni le fiduciaire, ni le bénéficiaire n’a de droit réel (arts 1260-1265 CcQ);

- CML : le standard de détermination d’existence d’une fiducie consiste en une déclaration de fiducie, qui doit démontrer une intention, un sujet et des objets associés au véhicule fiduciaire (voir par ex Air Canada plus bas).

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II. Personnalité morale   : création et fondements A. La genèse de la société par actions (SPA)

- La constitution d’une corporation détermine qui est en contrôle et qui récolte quelle part des profits, et dans une certaine mesure, détermine qui est responsable en droit;

- La principale fonction de cette constitution est de prescrire le mode de fonctionnement interne poursuivi par la gouvernance de la corporation (allouer les droits, les devoirs, les obligations, etc.).

- Les sociétés canadiennes sont régies par 4 grands principes de base (Welling, aux pp 93 et s.)

o La personnalité morale; principe selon lequel le comportement d’une corporation sera considéré comme légalement analogue à celui d’un individu;

o La division des pouvoirs entre les investisseurs (les actionnaires) et le conseil d’administration;

Mais un actionnaire peut être élu sur le conseil d’administration; Selon l’idée que les opérations de base de l’entreprise incorporée

seront gérées par un groupe managérial relativement indépendant;

o La règle de la majorité, qui veut que certaines décisions soient approuvées par les investisseurs (les actionnaires);

Les décisions corporatives internes seront faites suivant un processus démocratique parmi les individus qui sont constitutionnellement habilités (soit les actionnaires);

o La protection des actionnaires (ou autres constituantes) minoritaires; les inclinations d’une majorité (d’administrateurs ou d’actionnaires) doivent être limitées de manière à éviter de nuire aux membres d’un groupe minoritaire créé par la corporation;

- Les constituantes de la société1 (Welling, aux pp 94 et s);o Externes → qui sont confrontés au fait de la SPA? Est-ce que la SPA est

responsable envers d’autres entités et dans quelle mesure? Public;

E.g. responsabilité de protection de l’environnement; publicité de la constitution de la corporation et de l’identité des membres du CA;

Généralement, on essaye d’encourager une vision de la gestion corporative qui prend en compte les intérêts plus larges de la société, et non seulement les intérêts financiers des actionnaires;

Couronne, législateur, fonctionnaire; Modification des différentes lois applicables aux SPA,

régulations ou droit supplétif. Employés de la SPA;

1 NB : AT parle de « constituantes » mais le terme est mal choisi – il s’agit plutôt des entités qui sont influencées par une SPA donnée et, plus généralement, avec qui une SPA peut entrer en relation.

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Les administrateurs qui agissent à ce titre ne seront pas tenus responsables individuellement dans la mesure où ils ont agi dans le cadre de leur fonction;

Exception : Administrateurs sont personnellement responsables du salaire des employés (selon certaines conditions) non-payés depuis les 6 derniers mois (art 119, al 1 LCSA)

Créanciers de la SPA; Considérés à part de la constitution corporative; Certaines lois canadiennes aménagent des structures pour

les procédures en réclamations de créances ou de titres de créances;

o Internes o Les groupes internes (qui sont des personnes juridiques à part de l’entité

corporative) détermine comment la corporation agit et gère son activité entrepreneuriale.

Actionnaires : Investissent des fonds; élisent les membres du CA; mais

pas impliqués dans les décisions de gestion régulière de l’entreprise;

Actionnaire (même unique) ≠ propriétaire (une corporation étant dotée de la personnalité juridique, elle ne peut être « possédée »; on parle de propriétaires économiques, mais pas légaux); mais les actionnaires jouent un rôle plus important que celui de simple créanciers (e.g. accès à l’information, droit de regard et droit de vote sur un certain nombre de décision);

Le droit des actionnaires sont déterminés dans les statuts (dans la description des capitals-actions) – généralement en lien avec le nombre d’actions détenus;

o Droit de vote; droit de partage du reliquat; dividende (mais la déclaration et l’émission de dividendes est un pouvoir réservés aux administrateurs).

Les devoirs/responsabilités des actionnaires sont pratiquement inexistants, mais ils bénéficient d’un certain nombre de protection;

o Ils ne peuvent pas émettre des actions non-payées; à partir du moment que l’actionnaire a payé pour les actions émises, l’actionnaire n’a de responsabilité que pour l’argent déboursé pour l’achat des actions;

Administrateurs/dirigeants Les administrateurs sont élus par l’Assemblée des

actionnaires et agissent en collégialité via le CA; Les dirigeants ne sont pas élus, ils sont délégués par le

CA pour agir selon les directives de ce dernier; ils agissent

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individuellement, en principe. Les dirigeants peuvent aussi déléguer leurs pouvoirs à des sous-dirigeants.

Les dirigeants gèrent les opérations quotidiennes de la corporation dans les limites des buts fixés par le conseil d’administration.

o La relation de pouvoir est un peu renversée dans le cas des grosses corporations.

o La constitution de la SPA et mode d’attribution des pouvoirs (Welling, aux pp 102 et s)

La loi et, le cas échéant, les statuts (constitution de la SPA) puis les règlements, vont déterminer la façon dont les pouvoirs seront exercés au sein de la SPA;

Voir Hollinger inc. c. Hollinger International Inc  : à moins de disposition à l’effet contraire, les droits de gestion journalière appartiennent au CA et n’ont pas à faire l’objet d’approbation de la part des actionnaires, même si l’un deux est majoritaire;

o Exception : les demandeurs (Hollinger, principal actionnaire) entreprennent un recours pour empêcher les administrateurs de Hollinger International de liquider les biens de la compagnie. Conformément à la loi (maintenant art 189, al 3 LCSA), le CA doit obtenir l’accord des actionnaires si le CA prend la décision de vendre tout ou une partie substantielle des actifs de la corporation. Puisqu’il s’agit d’une décision extraordinaire, cela fait exception au cours normal des affaires et justifie l’implication des actionnaires.

Les statuts/règlements pourront instaurer des mesures de redressement (pour des violations passées ou présentes des obligations inscrites à la Constitution) lorsque cela est requis; autrement, la loi y pourvoit de manière générale aux arts 143, 247 LCSA et aux arts 133, 460 LSAQ.

Canadian Jorex Ltd v 477749 Alberta Ltd (1991) – Alberta, CA

Faits : Les actionnaires veulent convoquer une assemblée extraordinaire (voir art 143 LCSA). Le CA a convoqué une Assemblée extraordinaire mais a par la suite annulé l’avis de convocation. Question : est-ce que le CA a le pouvoir d’annuler la convocation? Quels sont les pouvoirs du CA?Décision : oui.Analyse :Le CA a des pouvoirs résiduels. Le CA peut annuler une convocation. Le pouvoir spécifique confié aux actionnaires est de demander au CA de convoquer une AE, mais cela n’enlève pas le droit du CA d’administrer tous les autres pouvoirs qui n’ont pas été accordés aux actionnaires. Le droit de révocation constitue donc un pouvoir résiduel qui demeure sous l’autorité du CA dans ce cas-ci.

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Ratio : le CA détient tous les pouvoirs (résiduels) qui ne sont pas spécifiquement octroyés aux actionnaires. NB : pour que la règle de la majorité s’applique, il faut que la loi l’ait prévu (art 102, al 1) LCSA); autrement, l’art 102 LCSA confère légalement au CA d’une société par action les pouvoirs résiduels de gérer les affaires de la corporation. NB : le modèle anglais, au contraire, n’accorde pas de pouvoirs résiduels au CA – leurs pouvoirs est circonscrits à ce qui est explicitement mentionné dans la constitution et les régulations de la corporation.

Roles v 366972 Saskatchewan Ltd (1992) – Saskatchewan, CA

Fait: R fait une demande pour consultation des livres comptables alors qu’il est administrateur. La société lui refuse. R porte sa requête devant les tribunaux. Le tribunal rejette sa demande (probablement en confondant états financiers et livres comptables). Sa demande est portée en appel. Or, entre temps, R est destitué de son rôle d’administrateur (il n’est qu’un simple actionnaire).Question : est-ce que R a un droit de consultation des livres comptables? Alors qu’il était administrateur, oui. Le droit ne s’étend pas au-delà du mandat de l’administrateur.Analyse :Les livres comptables sont accessibles aux administrateurs, mais pas aux actionnaires. Justification fondée sur des considérations d’ordre public. L’actionnaire ne pouvant pas s’impliquer dans l’administration, il n’y a donc pas d’intérêt à ce qu’un ancien administrateur ait accès aux livres comptables. Que contiennent les livres comptables?

- Position financière détaillée (créances/actifs);- Registres d’actifs/passifs;- Registres des entrées et sorties, + causes;

États financiers?- Bilan- États des comptes- Mais beaucoup plus général, et ne permet pas d’évaluer l’état financier à

n’importe quel moment – photo de l’état financier de la société à un moment donné;

Notes contextuelles: en regard de leur droit à l’information, les actionnaires ont accès aux statuts constitutifs, aux règlements de la SPA, aux résolutions de l’assemblée annuelle (des actionnaires) et aux états financiers (art 20(1) LCSA), mais PAS aux résolutions/procès-verbaux du CA, ni aux livres comptables (accessibles aux administrateurs – art 20(2) LCSA).

Typologie des différentes sociétés possédant la personnalité morale – revue historique(Welling, aux pp 111 et s)

1. Les corporations à charte

- Compagnie de la Baie d’Hudson; ce type de véhicule n’est plus utilisé.

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- Créé par prérogative royale et s’organisait via des lettres patentes (charte – dispositions publiques que tout le monde peut consulter, émise par le pouvoir exécutif); des règlements venaient compléter les documents constitutifs.

o La charte constitue le document constitutif de la corporation, mais ce sont généralement les règlements qui établissent plus précisément les droits et obligations des groupes internes.

o Les procédures de redressement sont régulées par le droit supplétif.- Il existe encore des corporations à charte au Canada (certaines universités),

mais plus d’entreprises d’affaire fonctionnant sous ce modèle.

2. Les corporations constituées par une loi spéciale du Parlement

- Aujourd’hui, il s’agit de corporations à but non-lucratif seulement;- La principale différence entre la compagnie à charte et cette corporation est la

source de pouvoir : il s’agit du pouvoir législatif et non exécutif, comme dans le cas de la corporation à charte.

- L’équivalent des statuts se trouve dans la loi constitutive (qui donne parfois des indications précises sur le contenus des règlements), mais il faut prévoir les dispositions particulières dans les règlements;

3. Les corporations constituées par lettres patentes

- Il s’agit de l’ancien modèle de la SPA, mais plutôt que des statuts constitutifs, ce type d’organisation est régi par des lettres patentes (aussi appelées « chartes ») et par la loi habilitante. Il est aussi possible de prévoir des règlements.

o Dépendant de la volonté des représentants du gouvernement à délivrer les documents d’incorporation.

o La loi habilitante régule également la création des règlements, mais elle ne prévoit pas de mécanismes de redressement particuliers.

- La création de ce type de véhicule est à la discrétion du pouvoir gouvernemental, en principe, bien que la loi permettant de les constituer soit une loi générale.

- L’Île-du-Prince-Édouard propose encore ce type de structure;

4. Les contractarian companies ou compagnies de droit anglais

- À l’origine constituées sur le modèle des partnerships, ces compagnies ont fini par acquérir le statut de personne morale (confirmé dans Salomon v. Salomon);

- Géré par des statuts (memorandum of association & articles of constitutions, les équivalents fonctionnels des constitutions et des règlements, respectivement).

- Les statuts constituent en quelque sorte un contrat entre les actionnaires et la compagnie, ce qui rend ces derniers titulaires des pouvoirs résiduels.

- Les actionnaires sont en principe la source de tous les pouvoir de la constitution corporative – et c’est les actionnaires qui jouissent des pouvoirs résiduels (plutôt que le CA, comme dans Jorex).

- La Nouvelle-Écosse et la Colombie-Britannique proposent encore ce type de structure;

5. La SAP fondée sur la notion de séparation des pouvoirs

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- Modèle en vigueur en vertu de la LCSA et LSAQ, lequel s’inspire du modèle américain;

- Le document fondamental dans ce type d’organisation : les statuts constitutifs (art 6 LCSA et art 5 LSAQ); il est possible de compléter les statuts dans les règlements.

- Ce modèle adopte l’approche managériale, soit celle voulant que les pouvoirs de gestion soient séparés des pouvoirs de supervision confiés spécifiquement aux actionnaires.

- Voir l’art 6 LCSA pour les critères gouvernant l’acte constitutif de la SPA.- Statuts de la SPA :

o Au provincial, les statuts sont remplis par les fondateurs et l’acte constitutif est émis par le Registraire; au fédéral, les statuts sont remplis par les fondateurs et l’acte constitutif émis par le Directeur des corporations;

o Les statuts sont difficiles à modifier (requiert l’approbation aux 2/3 des actionnaires, voir art 173 LCSA et art 241 LSAQ);

o Toute SPA exerçant des activités au Québec doit être immatriculée (même si enregistré au fédéral);

o Pour être considéré comme exerçant des activités, la simple possession d’une adresse suffit (voir art 25 LPLE);

o Cette obligation existe tant pour les SPA fédérales (art 21, 5/ LPLE) que pour les SPA provinciales (art 21, 4/, 31 LPLE);

- Autre type de gestion de la SPA – le CUA :o Si les actionnaires décident, à l’unanimité, de mettre en place une

convention unanime d’actionnaires (CUA), il est possible pour les actionnaires de s’approprier soit un ou tous les pouvoirs normalement dévolus exclusivement au CA (adoption de règlements, la déclaration de dividendes, etc.) – voir art 146 LCSA et art 213 et s LSAQ).

o Les actionnaires auront à partir de ce moment les mêmes responsabilités que supportaient normalement les administrateurs; CA fantôme;

o Au provincial, il est possible d’abolir le CA, mais pas au fédéral – les administrateurs sont encore virtuellement administrateurs du CA.

o Déplace le fardeau décisionnel mais aussi l’approche décisionnelle et la méthode de gestion.

o CUA (acte prévu par la loi) à distinguer de la convention d’actionnaire, qui constitue un acte contractuel portant sur l’organisation des droits de vote et sur les modalités de revente des actions. Il peut néanmoins y avoir superposition des deux conventions – mais ce ne sont pas les mêmes outils.

- L’acte constitutif pourvoit des mécanismes de redressement assez précis.

Procédures de règlement des différends  

- Les SPA fondées sur la notion de séparation des pouvoirs présentent finalement l’avantage de prévoir des mesures de redressement en cas de manquement de la SPA elle-même ou de son CA vis-à-vis des actionnaires ou même vis-à-vis d’autres constituantes – voir art 247 LCSA.

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- Plus particulièrement, les lois régissant ce type de SPA vont comporter une disposition encadrant une « ordonnance de se conformer » qui pourra être invoquée par un actionnaire/créancier (similaire à une action croisée), qui permet à un actionnaire de faire valoir le droit de la corporation qui échouerait à l’invoquer lui-même, si le fait de ne pas invoquer ce droit cause préjudice à l’actionnaire.

B. Les effets de l’attribution de la personnalité morale à la SPA1. Qu’est-ce qu’une corporation ou SPA?(Welling, aux pp 127 et s)

- La corporation résulte d’une fiction juridique, celle de la personnalité dite morale (voir Bouchard);

- Seul l’État a le pouvoir de créer une telle personnalité juridique en vertu de la théorie de la fiction (opposée à la théorie de la réalité), présente en CVL, notamment en droit français.

2. Les fondements théoriques de la personnalité morale- La SPA est plus que la somme de ses constituantes : elle possède la capacité de

contracter, de posséder des biens et d’assumer des responsabilités en lien avec ses capacités.

- Décision phare : Salomon v. Salomon

Salomon v Salomon (1897) UK – HL

Faits : S constitue une corporation en vertu de la loi; les actionnaires de la société, pour se conformer à la loi, étaient au nombre de 7, 6 possédant des actions et S. La corporation contracte des débentures consenties par Salomon (créances garanties – donc il est créancier prioritaire). Quelques années plus tard, société en situation d’insolvabilité. Salomon réclame sa créance en priorité sur les autres créanciers de sa société. Les autres créanciers contestent, alléguant qu’il est actionnaire et qu’il ne peut pas être créancier de sa propre compagnie.Question : est-ce que Salomon peut être son propre créancier?Décision : pratiquement oui, car la corporation est une personne légale à part entière, même si entièrement contrôlée par Salomon lui-même.Analyse : La loi a créé une personnalité morale qui possède un patrimoine distinct. La personnalité morale crée un cloisonnement des patrimoines respectifs alors il est indifférent de savoir si Salomon était le principal actionnaire de la société lorsqu’est venu le temps de savoir si la créance de Salomon était prioritaire.

NB : Créanciers prioritaires → créanciers ordinaires → actionnaires (qui récoltent ce qui reste – le « reliquat »);

3. Les conséquences de la personnalité morale (Welling, aux pp 133 et s)

- La SPA ne peut pas agir seule : par conséquent, ses actes seront ceux de son CA (administrateurs/directors) et de ses dirigeants (officers – en l’occurrence, son CEO);

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- Il est parfois nécessaire d’imposer des limites entre le fondateur de la personne morale (ou ses constituantes) et la personne morale. Ce genre de question s’est posée en matière d’intérêt assurable.

The state of mind of these managers is the state of mind of the company and is treated by the law as such. … Whether their intention is the company’s intention depends on the nature of the matter under consideration, the relative position of

the officer or agent and the other relevant facts and circumstances of the case

Lord Denning, (Engineering) Co. v. Graham and Sons (1956) – UK, CA.

The acts of a company’s… directors, managers, secretary, and so forth, functioning within the scope of their authority, are the company’s act.

Daimler Co. v. Continental Tyre and Rubber Co. (1956) – UK, HL

Macaura v. Northern Assurance co. – 1925 (UK – HL)

Faits: M a les droits sur un immeuble, mais transfère le reste de la propriété à sa corporation, dont les droits sur le bois de la terre. Un feu de forêt ravage le bois. M réclame un dédommagement de son assurance, prise à son nom.Question : Est-ce que M peut réclamer l’assurance sur une propriété possédée par sa SPA?Décision : Non.Analyse :En apparence, bien que la seule personne qui ait eu un intérêt dans le bien détruit soit M (la SPA détenant le bien détruit ne comptant que quelques actionnaires dont M), M ne peut pas prendre une assurance sur des biens appartenant à un tiers, soit l’entité légale. M n’était pas habilité, en sa qualité d’actionnaire, à un droit sur la terre, car l’actionnaire n’a pas un droit sur les actifs, mais plutôt sur les profits de la corporation et n’a donc qu’un intérêt partagé dans la valeur des actifs. L’étendue de son intérêt assurable dépend de la mesure dans laquelle sa part des reliquats serait amoindrie du fait de la perte de cet actif – ce qui est impossible. Partant, sa requête échoue.Ratio : l’actionnaire n’est pas propriétaire des actifs, même si l’actionnaire possède une grande partie des parts de la corporation. Partant, il n’a pas de droit de propriété dans les actifs de la corporation, ni le droit corollaire de l’intérêt assurable.

Kosmopoulos v. Constitution Insurance of Canada (1983) – Ont, CA & SCC (1987)

Faits : K, immigrant parlant peu l’anglais, pense exploiter son entreprise lui-même alors qu’en fait, les activités de celle-ci ont été transférées à une SPA. Question : Est-ce que ce transfert est suffisant pour dénier l’intérêt assurable dans les biens de la SPA, mais assurés au nom de K?Décision : Non.Analyse :K est actionnaire unique, ce qui distingue cette situation de la situation dans Macaura. Le fait d’être actionnaire unique signifie que l’actionnaire possède une certitude morale de retirer un avantage de cet actif, ce qui est suffisant pour justifier un intérêt assurable. Ratio : on étend la notion d’intérêt assurable, plutôt que de lever le voile corporatif.

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AT : il y a en fait une levée de voile, mais on le justifie autrement. Il est incertain si ce précédent s’appliquerait pour des actionnaires minoritaires par exemple.

Lee v. Lee’s Air Farming Ltd. (1961) – NZ

Faits: un employé d’une société unipersonnelle, constituée, gérée et dont les actions émises appartiennent à l’employé, réclame des bénéfices en vertu d’une loi sur les accidents de travail.Question : Est-ce qu’un individu, unique constituant de la SPA, peut s’employer lui-même et constituer validement une relation d’employeur/employé?Décision : oui.AnalysePuisque la SPA a une personnalité morale distincte (Salomon), la SPA et l’employé sont deux personnes différentes et on n’est donc pas dans une situation où quelqu’un s’emploie lui-même. NB : À contraster avec Thorne, dans le cas d’un partnership qui ne jouit pas de la personnalité morale.

4. Le déni de la personnalité morale  : la levée du voile corporatif(Welling, aux pp 143 et s)

- La notion de personnalité morale fait parfois l’objet d’abus de la part de ses constituantes, ce qui peut dans certains cas justifier la levée du voile corporatif → il arrive que le véhicule corporatif soit utilisé pour dissimuler des actes économiquement discutables ou antisociaux, comme la fraude ou la sous-capitalisation en vue d’échapper aux créanciers. Dans ces cas, on peut tenir les administrateurs et les directeurs individuellement responsables, en ignorant l’existence de la personne corporative.

- Les cas de levée de voile sont cependant restreints, les tribunaux exigeant une entorse flagrante à la justice : l’utilisation de la SPA comme simple agent des actionnaires ou une SPA qui n’est qu’un « sham, cloak or alter ego »; 2 conditions (voir Transamerican Life Insurance co. of Canada v. Canada Life Assurance Company, 1999, Ont – SC) :

1. Contrôle total par un tiers/défendeur (il faut démontrer plus que la propriété, mais montrer que la corporation ne fonctionne en fait pas indépendamment et est complètement soumise à la volonté de sa constituante);

2. Fraude/comportement avoisinant la fraude et qui conduit à priver les demandeurs de leurs droits;

Rotman, Fiduciary Law (2005) – Welling, aux pp 145 et s

L’incorporation entraîne la rupture de toutes connections légales entre les actionnaires, d’une part, et les actifs, obligations et droits dans la corporation. En ce sens, une corporation n’est pas, théoriquement, l’alter ego d’un actionnaire – soit-il unique. Comment réconcilier cette vision avec des situations où les administrateurs/directeurs ont des comportements incompatibles avec l’intérêt de la corporation (et de ses

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actionnaires), et où des personnes de bonne foi pourraient se voir privées d’un recours contre ses individus du fait que l’incorporation protège les actionnaires d’une éventuelle responsabilité financière envers des tiers?On a proposé de lever le voile corporatif dans des situations où il y aurait une atteinte flagrante à la justice – par exemple, dans le cas où une corporation serait créée avec comme intention expresse de commettre des actes répréhensibles ou illégaux ou encore si la corporation n’est qu’une simple marionnette aux mains d’un constituant. Or, une telle rigidité dans la justification de la percée du voile corporatif implique qu’on ne pourrait lever le voile dans des situations en apparence moins scabreuses – par exemple, une corporation constituée uniquement à des fins de planifications fiscales, mais sans intention d’entreprise d’affaire.On constate que la difficulté reliée à la percée du voile corporatif consiste en ce que si une telle démarche peut correspondre à des objectifs larges de justice, ce résultat n’est possible qu’en pervertissant la notion d’incorporation.

- Les situations justifiant la levée du voile en CML :1. Une injustice – en s’appuyant sur la notion de fair play, mais fortement

contestée.2. La création d’une SPA pour des motifs vils (on parle d’instrumentalisation

de la SPA);3. Un obiter dicta, puisque cela n’entraîne pas d’impacts sauf dans les

décisions suivantes.- Les situations justifiant la levée du voile en CVL → art 317 CcQ

1. Lorsque la personnalité juridique distincte d’une société est invoquée par quelqu’un à l’encontre d’une personne de bonne foi, dès lors que la personnalité juridique distincte d’une société est invoquée dans le but de masquer la fraude, l’abus de droit ou une contravention à une règle intéressant l’ordre public.

Cela permet de rendre inopposable la personnalité morale de la société envers les tiers lorsque les circonstances le permettent.

Lanoue c Labatt (1999) – QC, CA

Faits : Lanoue possède un bar (actionnaire à 95%) et achète à crédit pour 47K$ de bière à Labatt. Labatt est inquiet de sa créance; Lanoue commence à rembourser. En décembre, Lanoue passe une commande à Molson; le bar de Lanoue ferme, mais cache la bière achetée à Molson pour feindre la non-réception. Molson intente un recours contre le bar et contre Lanoue personnellement; Labatt intente de son côté un recours similaire.Question : est-ce que la responsabilité personnelle d’un administrateur peut être retenue dans ces circonstances?Décision : oui.AnalyseConditions de levée du voile en CVL :1. L’administrateur et actionnaire majoritaire s’est porté caution d’une obligation K de la compagnie (2333 et s CcQ);2. Il a lui-même commis une faute entraînant sa responsabilité extracontractuelle (fausses représentations, documents falsifiés ou faute autonome en marge de ses

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fonctions, art 1457 CcQ);3. Il a activement participé à une faute extracontractuelle de la compagnie (présomption si administrateur unique) – (art 1457, 1526 CcQ);4. Il a utilisé la compagnie comme écran pour tenter de camoufler le fait qu’il a commis une fraude/abus de droit ou qu’il a contrevenu à une règle intéressant l’ordre public; l’acte apparemment légitime de la compagnie revêt, parce que c’est lui qui la contrôle et bénéficie de cet acte, un caractère frauduleux, abusif ou contraire à l’ordre public (art 317 CcQ);

5. Des solutions jurisprudentielles aux problèmes posés par la personnalité morale(Welling, aux pp 160 et s)

i) L’incitation au bris de contrat- La violation d’un droit perpétrée en toute connaissance de cause constitue une

cause d’action; on viole un droit notamment lorsqu’on interfère avec une relation contractuelle reconnue par la loi s’il n’existe pas de justification suffisante pour cette interférence (Quinn v. Leathem, (1901) – UK, AC)

- En CML, il n’est pas acceptable de participer/inciter à un bris de contrat même si on n’est pas partie à l’obligation contractuelle – cela constitue un tort;

- En CVL, similaire, mais rarement appliqué.

Garbutt Business College Ltd v Henderson Secretarial School Ltd (1939) – Alb, CA

Faits: H, ancien employé de G, avait signé une convention de non-concurrence. H fonde une SPA, école de secrétariat, qui l’emploie, et offre des services visés par la clause de non-concurrence.Question : Est-ce que la SPA est visée par la clause de non-concurrence?Décision : NonAnalyseH, comme individu, est reconnu avoir violé la clause de non-concurrence validement inscrite à son contrat. Or, H et sa corporation sont deux personnes morales différentes et la corporation n’était pas liée par la clause de non-concurrence. Ceci étant dit, la SPA a encouragé H à briser son contrat avec G, donc la SPA peut être condamnée en torts. La corporation savait qu’en employant H, on l’induisait en toute connaissance de cause à briser son contrat avec G. La démonstration de l’intention n’a pas à aller plus loin que la preuve que le défendeur connaissait la position du contractant. Tous les jours où H était employé de sa corporation, il était encouragé et payé pour briser son contrat avec G, et ce, en toute connaissance de cause du défendant.

Einhorn v Westmount Investments Ltd (1969) – Sask, QB

Faits: 2 sociétés sont complètement contrôlés par les 3 mêmes actionnaires. WI fait affaire avec E. E réclame sa commission pour la vente de la propriété. Or, WI (société 1) est insolvable, et tous les actifs ont été transférés dans la société 2.Question : Est-ce que E a un recours contre les administrateurs?? Décision : Oui.Analyse :Les parties à un contrat ont un droit à ce que les obligations contractées soient

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satisfaites et il y a violation de ce droit lorsqu’une partie ou un tiers encourage une partie à briser ce contrat ou l’incite à se dérober à ses obligations (Lumley v. Gye). 3 éléments nécessaires pour une incitation à un bris de contrat :

1. Interférence de la part du tiers, qui encourage à ne pas performer l’obligation; l’interférence injustifiée ne se limite pas à l’acte même de la violation, elle s’étend à des cas où un tiers entrave la performance du contrat.2. Cette implication doit être intentionnelle (la personne doit connaître l’existence de l’obligation contractuelle); et3. Cette implication doit être directe.

Des individus reconnus responsables d’une faute extra-contractuelle intentionnelle ne devraient pas pouvoir échapper à leur responsabilité du seul fait qu’ils se drapent du voile corporatif. Dans ce cas-ci, les éléments sont prima facie présents, donc le recours est autorisé (WI intentait une action pour absence de cause – son recours échoue).

McFadden v 481782 Ontario Ltd (1984) – Ont, HC

Faits : M a un contrat d’emploi avec PMAI; suite à la vente de cette dernière, le contrat est transféré à PMAC. PMAC est ensuite revendue à PMAI, qui met alors prématurément fin au contrat d’emploi de M. M réclame le solde de son contrat d’emploi. Lors de la revente à PMAI, les actionnaires se sont distribué les actifs, et PMAI est insolvable.Question : est-ce que M a un recours contre les actionnaires? Y a-t-il eu incitation au bris de contrat de PMAI?Décision : oui, oui.Analyse :Le paiement qui a été fait aux actionnaires n’était pas dans l’intérêt de la société. Si on n’agit pas dans l’intérêt de la société, on peut présumer qu’il y a eu incitation à briser le contrat. Si la rupture du contrat avait pu être justifiée (ce qui n’est pas en cause ici), vider les actifs de la société n’était pas dans l’intérêt de la société. Un bris de contrat peut être justifié, mais seulement s’il est fait de bonne foi, dans l’intérêt de la société :Si un servant agit de bonne foi, dans les limites que son pouvoir lui confère, et cause un bris de contrat, celui-ci ne serait pas personnellement responsable d’une action en responsabilité extra-contractuelle. Or, si le servant agit de mauvaise foi, il est présumé responsable dans la mesure où il a cessé d’agir dans l’intérêt de la corporation. Une incitation à une violation d’un droit est justifiée et n’entraîne pas la responsabilité personnelle de l’acteur quand cette incitation est considérée comme un devoir de la compagnie. Ratio : lorsque l’administrateur commet une faute et que cette action va à l’encontre de l’intérêt de la société, la responsabilité personnelle des administrateurs est engagée, mais non celle de la corporation.

369413 Alberta Ltd. v Pocklington (2000) – Alb, CA

Faits: P possède des sociétés, dont Gainers, dont l’un des créanciers est le gouvernement provincial. Une journée avant qu’on ne procède au démantèlement de Gainers, P transfère les biens importants de Gainers dans une de ses sociétés, dont il est l’unique actionnaire, pour une somme dérisoire.

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Question : Est-ce que P a commis une incitation à un bris de contrat?Décision : Oui. Analyse :7 éléments :

- Existence d’un K;- Le K doit être connu du défendeur;- Bris de K par l’une des parties contractantes;- Incitation au bris de K par le défendeur; - Intention du défendeur de causer le bris de K (voir à la p 173 pour plus de

détails);- Absence de motif légitime (justification comme dans McFadden) (voir à la p

176 pour plus de détails);- Existence de dommages;

P refuse de s’informer pour savoir si le transfert pourrait être interprété comme un bris de contrat. Cela est suffisant pour prouver l’intention de causer un bris de K. Est-ce que P avait des motifs légitimes d’agir (ce qui réchapperait la transaction)? La somme dérisoire contre laquelle sont échangés les biens indique que la décision n’a pas été prise dans l’intérêt de la société.

AGDA Systems International inc v Valcom Ltd (1999) – Ont, CA

Faits : AGDA fait une soumission pour des services correctionnels au niveau fédéral. Certains employés d’AGDA étaient formés pour travailler sous ce contrat. V fait également une soumission, et fait une offre aux employés d’AGDA qu’advenant que V obtiennne le contrat, les employés d’AGDA pourront travailler sous V. AGDA intente un recours contre V et 3 de ses dirigeants pour incitation au bris de K. Question : Est-ce qu’AGDA a un recours personnel contre les dirigeants/administrateurs de V?Décision :Analyse :On doit donner une certaine flexibilité aux constituantes d’une SPA pour qu’ils puissent agir dans l’intérêt de la société. Or, ici on poursuit la SPA et son CA (donc ≠ Salomon où l’on poursuivait Salomon à titre d’actionnaire). Existe-t-il cependant une cause indépendante d’action contre les dirigeants et les administrateurs?Ici, pas de lien entre les administrateurs et AGDA, ni entre V et AGDA. Or, les administrateurs de V ont agi dans l’intérêt de V, bien qu’en bris de ses obligations. Au Canada, le fait qu’il y ait une relation contractuelle n’empêche pas un recours extra-contractuel pour une faute distincte (Said v. Butt); cependant, on empêche un double recours lorsqu’en situation contractuelle, le cocontractant commet une faute extra-contractuelle qui constitue également un bris de contrat. Or, dans le cas ici, il n’y a pas de contrat mais deux fautes extra-contractuelle distinctes, d’où la possibilité de deux recours.Ratio : étant donné que la SPA agit à travers des humains, il est toujours possible que la responsabilité de ceux-ci soit retenue en tort, quel que soit le contexte, sauf pour l’exception émise dans Said v Butt.Relire

CVL :

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Illustration d’une faute d’omission donnant lieu à un recours extracontractuel en droit civil.

Une faute simple suffit pour que la responsabilité personnelle des administrateurs soient mise en cause.

Johnson c Arcand (2002) – Qc, CS

Fait : recours en diffamation de J contre deux stations de radio et les membres de leur CA. Les deux stations de radio (SPA) sont condamnées en responsabilité extracontractuelle. Analyse : Les deux SPA sont reconnues responsables en vertu de 1457 CcQ. Or, seul le CA de Cogeco est condamné pour omission, mais pas celui de Métromédia : la Cour dénote une différence au niveau du comportement de chacun d’eux, notamment au niveau de l’exercice des pouvoirs dans l’intérêt de la société et au niveau de la quête d’information. Le CA de Métromédia a cessé la diffusion des propos libelleux suite aux plaintes. Ratio : la responsabilité personnelle des administrateurs peut être retenue lorsqu’une faute simple est commise.

ii) L’incitation au breach of trust- Un bris d’obligation fiduciaire peut avoir lieu sans que le fiduciaire commette une

faute. - Deux types de responsabilité secondaire peuvent émerger d’un bris d’obligation

fiduciaire :o « Knowing receipt of trust property »: si un tiers acquiert une propriété

d’une fiducie par le biais du fiduciaire et que cette transaction cause un bris de l’obligation fiduciaire due au bénéficiaire, le tiers doit retourner la propriété à moins qu’il ne démontre qu’il était un acheteur de bonne foi et qu’il n’était pas aux faits de la situation de droit du bénéficiaire en lien avec la propriété.

o « Knowing assistance in a fraudulent or dishonest breach of trust » : la responsabilité d’un tiers peut être mise en cause advenant que (a) le bris de l’obligation fiduciaire par le fiduciaire était frauduleuse ou malhonnête ; et que (b) le tiers était au fait du caractère frauduleux des opérations du fiduciaire.

Air Canada c M&L Travel (1993) – Ont, SCC

Faits : AC vend des billets d’avion par le biais de M&L. Le contrat stipule que M&L doit déposer les fonds reçus en échange de la vente dans un compte dans une fiducie corporative. Or, M&L dépose l’argent dans son compte courant et suite à des difficultés financières, se trouve en impossibilité de rendre son dû à AC.Question : Est-ce que les administrateurs de M&L ont commis une incitation à violer l’obligation fiduciaire de M&L (et peuvent-ils être tenus personnellement responsables)?Décision : oui.Analyse :

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Majorité (Iacobucci J.) : L’entente entre AC et M&L a effectivement créé une fiducie. Pour trouver qu’une fiducie a été créée, trois certitudes doivent être établies : 1/ certitude d’intention; 2/ certitude de la matière; et 3/ certitude du sujet. L’intention est évidente du fait du langage utilisé au contrat. Les fonds amassés grâce à la vente de billets constituent la matière et AC est le sujet bénéficiaire de la fiducie. Une fiducie a bel et bien été créée. Ceci étant dit, M&L est indubitablement en violation de ses obligations fiduciaires. La question qui demeure est de déterminer si les administrateurs sont personnellement responsables. Il n’est pas possible de considérer que les dirigeants aient pris la place du fiduciaire. Or, il est possible de mettre de l’avant leur participation dans cette affaire. Pour faire la preuve de la participation, il faut avoir eu connaissance du bris des conditions du trust. Considérant la petite taille de la SPA, les deux éléments sont plus faciles à prouver :

- Le bris de l’obligation fiduciaire par le fiduciaire était malhonnête ou frauduleux;

o « une prise de risque au détriment des droits d’un autre, où celui qui prend le risque sait ne pas être en droit de le faire »

- Le tiers devait avoir connaissance de cette fraude ou opération malhonnête (un comportement téméraire ou un aveuglement volontaire suffisent à établir l’élément de connaissance).

o Dans une fiducie créée par contrat, la question de savoir si le tiers était au fait des obligations créées dépend de sa familiarité ou de son implication dans le contrat.

Dans le cas en appel, M&L savait que l’argent déposé en fiducie pour AC n’était pas disponible pour l’usage général de M&L. En plaçant l’argent d’AC dans son compte courant, M&L a pris le risque de ne pas pouvoir satisfaire son obligation envers AC et ce, au détriment de celle-ci, tout en sachant qu’elle n’était pas en droit de prendre une telle décision. Partant, la violation de l’obligation fiduciaire était frauduleuse.Or, comme l’administrateur était en charge du fond en question, il est évident qu’il était au fait du bris de l’obligation fiduciaire – et comme il a lui-même pris la décision de placer les fonds dans un autre compte, il est directement responsable de la violation. NB : dans le cas de SPA de petite envergure, il sera généralement plus facile de faire la démonstration que l’administrateur était au fait de l’opération frauduleuse puisque le CA est généralement assez au fait des opérations quotidiennes de la corporation. Dissidence (McLachlin J.) : La seule question sur laquelle la minorité est en dissidence porte sur l’élément de connaissance. Est-ce que la connaissance de l’opération frauduleuse doit être subjective (la connaissance effective du défendeur) ou objective (établie en fonction du standard de la personne raisonnable)? Dans les cas où il y a aveuglement volontaire, le standard subjectif plus élevé s’applique – mais la question reste ouverte pour d’autres cas.Aussi, le fait que le fiduciaire ou le tiers ait profité de la violation de l’obligation fiduciaire a parfois milité en faveur de la responsabilité du tiers. Or, la question reste ouverte de savoir s’il s’agit d’un élément nécessaire pour trouver un tiers responsable lorsqu’il n’y a pas de profit personnel.

Transamerica Life Insurance Co of Canada v Canada Life Assurance Co (1996) – Ont, CS

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Faits : T concède des prêts hypothécaires qui sont arrangés par les services de CMLS. Plusieurs de ces prêts se sont trouvés en défaut et T reproche à CMLS de ne pas avoir procédé diligemment, lui causant des pertes financières substantielles. T poursuit la société mère de CMLS, CLA, pour incitation au bris d’obligations fiduciaires.Question : Est-ce que CLA a incité CMLS à briser ses obligations fiduciaires?Analyse :Percée du voile corporatifDans un premier temps, la Cour refuse de percer le voile corporatif. Kosmopoulos et deux autres jugements qui confirment celui-ci affirment qu’il n’est pas possible de percer le voile corporatif en l’absence de manœuvres frauduleuses ou malhonnêtes (Salomon). Dans le cas de société mère, la société filiale ne sera pas traitée comme l’alter ego de la société mère sauf si la société filiale est complètement contrôlée par la société mère et n’est rien de plus qu’un véhicule utilisée par celle-ci pour éviter la responsabilité. Le principe de l’alter ego est employé pour prévenir des comportements avoisinant la fraude. Deux exceptions pour lever le voile : 1/ s’il existe un mandat entre les deux corporations; 2/ lorsque la percée est permise par voie législative;Sinon, il doit y avoir 1/ contrôle complet (+ que la seule propriété); 2/ comportement avoisinant la fraude;Aucun de ces deux éléments n’est identifiable dans le cas présent. Accessoire à une violation d’une obligation fiduciaireCLA ne pouvait pas avoir connaissance de la société filiale CMLS. CMLS s’occupait indépendamment de CLA des prêts hypothécaires; ils avaient des sièges sociaux et des comptes en banque distincts. Le deuxième élément d’intention malhonnête fait défaut. L’incitation (knowing assistance) au bris d’obligations fiduciaires n’est pas retenue parce que les deux sociétés, bien que liées, n’avaient pas de liens étroits et il était impossible de démontrer que CLA avait connaissance de cette fraude. Ratio : le tiers doit avoir connaissance du bris de l’obligation fiduciaire pour être responsable.

iii) La sous-capitalisation de la SPALorsqu’on investit dans une SPA, l’argent fournit par les actionnaires constitue le capital propre de la SPA. Ce capital constitue une garantie pour les créanciers et c’est seulement après que les créanciers aient été satisfaits que les actionnaires peuvent retrouver leur mise de fond.

Dans le contexte d’une SPA sous-capitalisée, il est possible que les créanciers ne soient pas en mesure d’être remboursés.

Déf/sous-capitalisation/ situation d’une corporation initialement créée avec un taux d’endettement anormalement élevé. En pratique, cela peut résulter du fait que les fonds initiaux sont empruntés plutôt qu’injectés par des actionnaires.

En droit canadien et québécois, il est tout à fait envisageable de constituer une SPA dotée d’une capital propre qui ne soit que nominal. Mais est-ce que le simple fait d’être sous-capitalisé devrait permettre à un tribunal de mettre de côté

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la personnalité morale dans des cas qui le justifient? Il est peu probable que le seul fait de la sous-capitalisation soit suffisant pour percer le voile corporatif.

Deux cas :

SPA → Contractant

SPA → Tiers victime d’une faute

Walkovsky v Carlton (1966) – US, CA

Faits: W est blessé dans un accident impliquant un taxi, dont C est le propriétaire. C est propriétaire de plusieurs taxis a fractionné son entreprise en de nombreuses entités et n’a souscrit qu’au minimum d’assurance requis. Une de ces entités a causé un dommage physique à W. W intente un recours contre C, constituant de l’ensemble de ces entités.Question : Est-ce que W a un recours contre C?Analyse :Majorité : W plaide la fraude, mais la cour écarte catégoriquement ce recours. La cour soumet que puisque la corporation est sous-capitalisée, il pourrait peut-être y avoir-là un recours pour incitation au bris de contrat. Or, comme ce recours n’a pas été soulevé, le recours de W doit échouer. La majorité invite la législature à statuer sur les obligations minimales d’assurance. Dissidence : Les corporations de C étaient intentionnellement sous-capitalisés afin d’éviter la responsabilité extra-contractuelle, hautement prévisible dans une entreprise de taxi. Le fait de s’incorporer sans s’assurer d’une base nécessaire pour satisfaire ses obligations à l’égard de ses créditeurs constitue un abus du voile corporatif et devrait justifier sa percée.

Henry Browne & Sons Ltd v Smith (1964) – UK, QB

Faits : HB produit des outils d’aide à la navigation qu’elle vend à Ocean Charter (OC), par le biais de S, administrateur unique de OC, qui possède un yacht. Or, OC ne possède pour tout capital propre que deux actions d’une valeur de deux dollars. OC échoue à rembourser HB.Question : Est-ce que HB a un recours contre S?Analyse :Non, S n’est pas en relation avec HB. Le seul recours que HB possède est contre OC et la sous-capitalisation ne semble pas être un motif suffisant pour rendre l’actionnaire unique personnellement responsable.

Il faut garder en tête que la sous-capitalisation n’est pas une faute en soi : c’est un des effets de la responsabilité limitée.

6. La notion d’intérêt de la société(Welling, aux pp 206 et s)

- Une société sert de véhicule d’investissement qui protège les investisseurs d’une éventuelle responsabilité financière, comme c’est le

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cas pour les propriétaires uniques ou les associés d’une société de personne. Alors que dans le cas des corporations à but lucratif, l’objectif est de créer des profits, la question demeure de savoir pour le bénéfice de qui ces profits doivent être recherchés.

Rotman, Fiduciary Law (2005) – Welling aux pp 207 et s

Dans les années 30, un débat fait rage au sujet de l’étendue et de la fin des pouvoirs corporatifs des administrateurs et directeurs d’une corporation. Berle et Dodd en sont les principaux acteurs :

- Berle : les bénéficiaires exclusifs des devoirs fiduciaires du CA sont les actionnaires.

- Dodd : les devoirs fiduciaires auxquels est obligée la direction d’une corporation visent à protéger les intérêts de chacune des constituantes de la corporation, y compris les intérêts des actionnaires, mais également les intérêts des employés et les intérêts sociaux plus larges. Les gestionnaires corporatifs sont les gardiens de tous les intérêts possiblement affectés par la corporation, plutôt que les serviteurs des intérêts propriétaires de la corporation. Cette idée de constituante au sens large peut inclure les actionnaires, les créanciers obligataires, les créanciers non-prioritaires, les employés et des intérêts sociaux au sens large, tel que subsumé sous la notion de responsabilité sociale corporative.

Cette division reflète à plusieurs égards la division entre les tenants du contractualisme et ses opposants.

- Contractualisme : la forme corporative consiste en un réseau de contrats entre des acteurs intéressés (administrateurs, directeurs, gestionnaires, actionnaires, créditeurs, employés) et les intérêts de ces acteurs doivent être hiérarchisés en fonction de leur intérêt propriétaire – d’où l’idée que l’intérêt des actionnaires, puisqu’ils récoltent le reliquat et les profits, doit être maximiser dans la réalisation du devoir fiduciaire.

- Anti-contractualisme : les actionnaires ne sont pas les propriétaires d’une corporation et il est illogique de classer les intérêts selon un soi-disant intérêt propriétaire. Les devoirs fiduciaires sont une façon de s’assurer que les administrateurs et les directeurs sont fidèles aux intérêts de la corporation. En retour, cela implique que les intérêts de toutes les parties prenantes doivent être pris en considération.

- En vertu des lois tant fédérales que provinciales, le bénéficiaire des devoirs de loyauté et de prudence/diligence est la société. Concrètement, qu’est-ce que ça veut dire?

- Un débat a eu lieu entre Adolf A. Berle et E. Merrick Dodd dans les années 1930: si pour Berle, l’intérêt de la société devait être associé à l’intérêt de ses actionnaires (Greenlagh v. Ardene Cinemas Ltd., (1951) CA) ; Dodd affirmait que l’intérêt de la SPA se devait d’être celui non seulement de ses actionnaires, mais aussi de ses employés, voire, du public en général (Peoples v. Wise).

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- On parle encore aujourd’hui de primauté des actionnaires (shareholders) en opposition à la théorie des parties prenantes (stakeholders) et le débat oppose toujours ceux qui appuient la théorie contractuelle de la SPA, où les actionnaires sont perçus comme les créanciers résiduels de la firme et en vertu de laquelle on préconise une approche fondée sur le contrat, et ceux qui favorisent plutôt une approche communautariste, où les intérêts des différentes constituantes de la firme (i.e. les employés) doivent être pris en compte.

- La primauté des actionnaires, dans le cadre de la théorie du réseau de contrats :

• La SPA y est perçue comme un enchevêtrement de contrats (au sens économique du terme) entre les propriétaires de différentes ressources;

• On met donc de l’avant le contrat comme mode de répartition des richesses et des responsabilités, la loi intervenant à titre supplétif;

• Dans ce contexte, les actionnaires y sont perçus comme les créanciers résiduels de la firme, compte tenu de leur «rémunération» variable, étant les seuls à avoir un intérêt dans la maximisation des profits et à la satisfaction de leurs obligations;

• L’avantage de cette approche est que la mission est claire pour les gestionnaires et il devient plus facile de déterminer s’ils ont agi dans l’intérêt de la corporation; néanmoins, il peut être ardu de cerner l’intérêt des actionnaires (à court ou long terme, etc.) – voir Dodge.

- La primauté de la communauté (approche communautariste – approche canadienne) :

• Les intérêts des différentes constituantes (actionnaires, créanciers, employés et consommateurs) de la firme doivent/peuvent être pris en compte, notamment en lien avec l’exécution des contrats les liant à la société;

• Cette approche requiert une « reformulation des objectifs de la firme, celle de la maximisation de la SPA dans son ensemble »; on devra dorénavant parler de « valeur partenariale »;

• Des mesures de protections législatives peuvent être établies à cet effet.

Dodge v Ford Motor Co. (1919) – US, Michigan Supreme Court

Faits: D exige que lui soit versé un dividende, ce qui lui est refusé au prétexte que FM souhaite plutôt investir dans sa société afin de produire de meilleures voitures à prix

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moindre. Question : est-ce que D, en tant qu’actionnaire, a un droit de regard sur la distribution des profits? Est-ce que le CA a agi dans le meilleur intérêt de la corporation?Décision : oui; non.Analyse :Considérant les revenus annuels et les pratiques passées de FMC, le refus de déclarer et de payer des dividendes semble être arbitraire et outrepasse le pouvoir du CA. Le CA a un devoir de justifier ses décisions en pareilles circonstances. Or, les décisions managériales, en cherchant à diminuer la valeur de vente par unité de voiture, ne visent pas à rendre la corporation plus profitable. La conséquence immédiate d’une telle décision est de réduire la valeur des parts des actionnaires et leur retour sur investissement. Le CA ne devrait pas confondre les devoirs que les actionnaires majoritaires endossent envers le public en général et les devoirs fiduciaires qui sont dus aux actionnaires minoritaires. Une SPA est organisée et portée en vue de maximiser les profits des actionnaires. Les pouvoirs des gestionnaires doivent être mis au service de cette fin. On ne peut pas gérer sa société en fonction des intérêts du public, mais plutôt en fonction des actionnaires. Ceci dit, la Cour reconnaît qu’il n’est pas de son ressort d’évaluer la compétence en termes de gestion des dirigeants. Une certaine réserve doit être exercée à l’égard des détails quotidiens de gestion, dont les salaires, les nombres d’heures rémunérées, et les conditions sous lesquelles le travail sera accompli, de même que le prix de revente des véhicules. La Cour contraint FMC à distribuer une partie seulement de ses profits en dividendes à ses actionnaires en accord avec leur devoir fiduciaire, mais elle laisse à FM la flexibilité de gérer le reste selon ses vues.Ratio : L’intérêt de la société se fonde sur la théorie de la primauté des actionnaires.NB : généralement, les Cours n’interviennent pas pour évaluer la gestion des dirigeants.Cette décision constitue l’état du droit jusqu’à la décision Peoples.

Rotman, Fiduciary law (2005) – Welling, aux pp 212 et s

Quelles sont les contradictions dans l’approche de la primauté des actionnaires adoptée par la Cour suprême du Michigan dans Dodge v. Ford Motor co ?

- La Cour détermine que l’intérêt d’une corporation consiste à maximiser les profits de ses actionnaires et, partant, que le judiciaire peut interférer avec les décisions d’affaires où la maximisation des profits n’est pas la motivation première des gestionnaires ;

- Or, bien qu’elle contraint FMC à distribuer une partie de ses profits à ses actionnaires, la Cour n’interfère pas avec le plan d’affaire de remodélisation des infrastructures de FMC, parce que de tels plans doivent être faits en considération l’intérêt à long terme de la corporation et la compétition ;

- Par ailleurs, même si le réinvestissement direct des profits n’était pas à l’avantage premier des actionnaires, on ne peut pas non plus dire que FMC a complètement ignoré leurs intérêts, surtout à long terme. [Discussion de la décision d’affaire de FMC] ;

- Or, le fait que la Cour, dans cette décision, affirme que les juges ne sont pas des experts en gestion corporative aurait dû mener, logiquement, à la conclusion que les juges auraient dû faire preuve de déférence quant à la décision de FMC, considérant qu’elle était somme toute raisonnable compte tenu de l’étendue de l’intérêt des actionnaires.

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- Ceci étant dit, en laissant le bénéfice du doute à FMC sur son plan d’affaire, ce cas montre que malgré la primauté des intérêts des actionnaires, on ne peut faire abstraction du besoin de planification à long terme nécessaire à la prospérité d’une corporation. Or, cette planification peut bénéficier à des parties prenantes autres que les actionnaires.

Shlensky v Wrigley (1968) – US,

Faits : S est actionnaire de la corporation Chicago National League Baseball et estime que la décision de sa société de ne pas faire jouer la ligue en soirée nuit aux profits de la SPA et, conséquemment, lui nuit en sa qualité d’actionnaire. W, actionnaire principal et dirigeant, allègue que cela n’est pas souhaitable pour ne pas favoriser la détérioration du quartier des environs du stade et nuire aux intérêts à long terme de la corporation.Question : Est-ce que le devoir fiduciaire que doit la SPA à S justifie que W soit contraint de modifier ses décisions de gestion? Est-ce que la cour peut interférer avec une décision d’affaires contrevenant aux intérêts des actionnaires s’il n’y a ni fraude, ni illégalité, ni conflit d’intérêt de la part du CA?Décision : Non.Analyse :Le tribunal refuse de s’immiscer dans la gestion, même si la décision peut paraître mauvaise. À défaut de fraude, d’illégalité ou de conflit d’intérêt ou de comportements s’en approchant, la Cour n’interviendra pas.Ratio : l’intérêt de la société, même selon la primauté des actionnaires, peut être compris différemment par le CA et les actionnaires (court/long terme; risque; etc.)

Peoples Department Stores inc v Wise (2004) – CSC, Ont.

Faits: Les frères W sont actionnaires uniques de PDS. W stores décide d’implémenter une nouvelle politique d’approvisionnement commun, selon laquelle PDS devrait placer toutes les commandes nécessaires à son fonctionnement et à celui de W. PDS est donc débiteur de toutes les créances de W, alors que W gardent tous les profits, en permettant à W d’emprunter à un taux avantageux alors qu’il était en difficulté financière. PDS et W font faillite 1 an plus tard et les créanciers de W sont privilégiés au détriment de ceux de PDS. Le syndic de faillite de PDS intente un recours contre les frères W, en leur qualité d’administrateurs de PDS, pour le compte des créanciers non-prioritaires de PDS. Question : Est-ce que W a agi dans l’intérêt de la corporation conformément à l’art 122(1)(a) de la LCSA?Décision : Analyse :Le tribunal évalue la notion d’intérêt de la société dans le contexte du devoir de loyauté. La notion d’intérêt de la corporation ne se réduit pas aux meilleurs intérêts des actionnaires, mais doit inclure ceux d’autres constituantes, comme ses employés, la communauté, etc. Le meilleur intérêt de la société signifie la maximisation de la valeur économique de la corporation. Il est donc tout à fait possible de prendre en compte les intérêts de ces constituantes (créanciers) lors d’une prise de décision, même au détriment des actionnaires, spécialement lorsque la stabilité financière de la corporation se précarise. En effet, c’est à ce moment que les intérêts des actionnaires

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diffèreront radicalement de ceux des créanciers, puisqu’en cas de faillite, le CA de la corporation sera remplacé par un syndic de faillite dont la tâche est d’administrer les actifs de la corporation aux bénéfices des créanciers. Cela signifie qu’en cas de faillite, le reliquat des actionnaires se précarise. Accessoirement, la Cour met au repos la notion de priorité des intérêts des créanciers en cas d’insolvabilité de la société : les devoirs des dirigeants/administrateurs restent les mêmes, le but étant de faire de la SPA une « meilleure société », même si un tel principe est difficilement exprimable en des termes plus concrets étant donné que les circonstances sont toujours changeantes.Ratio : Confirmation de la théorie des parties prenantes.NB : AT nous dit que la décision est un peu ambiguë, mais qu’elle reconnaît peut-être plus justement la réalité de la gestion d’affaire, qui doit balancer plusieurs intérêts parfois conflictuels.

BCE inc v 1976 Debenturesholders (2008) – CSC, Ont.

Faits: Acquisition risquée. Augmentation du ratio d’endettement de BCE qui favorisait les actionnaires de BCE, mais pas une minorité d’actionnaires détenteurs de débentures (dont la valeur de leur débenture diminuait de 20%). Les détenteurs de débentures contestent la décision en alléguant que le CA a favorisé l’intérêt de ses actionnaires au détriment de ses créanciers. Question : Est-ce que le CA de BCE a agi conformément à ses devoirs fiduciaires envers ses créanciers en prenant une décision qui diminuait la valeur des débentures de Bell?Décision : oui.Analyse :Le devoir fiduciaire corporatif est large et doit s’apprécier contextuellement, sans se limiter à une évaluation à cours termes des intérêts des parties. En appréciant un tel devoir, la Cour doit faire preuve de déférence : la règle du jugement d’affaire impose une déférence judiciaire tant que la décision constitue une des alternatives raisonnables dans les circonstances. Le tribunal considère que BCE avait fait preuve de diligence dans sa démarche, même s’il s’agissait d’une opération plus risquée. Les intérêts de la SPA peuvent être assimilés comme étant les meilleurs intérêts des actionnaires, mais aussi des créanciers, employés, dirigeants, des consommateurs, du gouvernement, de l’environnement, etc. Dans ce contexte, il aurait été possible de prendre en compte les difficultés imposées par la transaction aux détenteurs de débentures. Or, dans le contexte financier de BCE, le tribunal juge que cette décision était nécessaire pour la survie de la société. En somme, les administrateurs ont un devoir de diligence envers la corporation, non envers les parties prenantes, lorsque leurs intérêts entrent en conflit. La règle fondamentale, en ce qui concerne la détermination de l’objet de devoir des administrateurs, est qu’elle ne peut être exprimée à travers des règles de priorité particulières, mais est plutôt fonction d’un jugement en matière d’affaires. NB: les compétences du tribunal sont plus larges dans un recours pour abus et les critères sont légèrement différents. Ratio : on confirme la primauté des parties prenantes, mais le fait qu’on favorise les actionnaires n’est pas suffisant pour retenir la responsabilité du CA.

Rotman, Fiduciary Law (2005) – Welling, aux pp 225 et s

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En focalisant sur les intérêts des actionnaires au détriment d’autres parties prenantes, la théorie de la primauté des actionnaires est problématique en cela qu’elle introduit un biais dans l’appréciation des devoirs fiduciaires des administrateurs et directeurs d’une corporation et ce, au détriment même de considération d’efficience. Par définition, la corporation est une entité distincte de ses actionnaires et peut vraisemblablement avoir des intérêts différents de certains ou même de tous ses actionnaires. En ce sens, les actionnaires ne sont les bénéficiaires d’un devoir fiduciaire qu’indirectement, puisque le devoir fiduciaire est dû à la corporation en soi.

Exercice

1. Sous le CcBC, c’était nécessaire d’être reconnu comme une personnalité juridique sinon il ne peut y avoir du patrimoine sans maître. Il fallait donc trouver une issue de secours à la négation de la personnalité juridique – la personnalité incomplète. Et, donc dans Allard, le patrimoine était caractérisé de propriété indivis – ce qui implique l’accord de tous les associés dès qu’on gère le patrimoine. Or, avec le CcQ, en acceptant la théorie autonomiste du patrimoine, les SENC et SEC n’ont pas besoin de se voir reconnaître la personnalité juridique pour être titulaire d’un patrimoine. Patrimoine d’affectation ou division? Selon Bouchard, pas d’affectation parce que sinon le patrimoine serait étanche, ce qui n’est pas le cas pour les sociétés.En CML, ce n’Est pas important que la société de personnes ne possède pas la personnalité morale. Cela se traduit en une responsabilité des membres vis-à-vis des tiers. La société de personnes lie l’ensemble de ses associés (voir arts 21, 24 Loi SENC). Autonomie : mais il y a quand même un patrimoine collectif en CML pour des raisons pratiques. Sauf que cette autonomie n’est pas aussi importante qu’en droit civil. En droit civil, un tiers doit d’abord intenter un recours contre le patrimoine de la société et elle peut intenter contre les associés seulement si la société est insolvable. 2. a) Éléments : selon 2186 CcQ → 2 personnes ou + (oui); affectio societatis (la plupart du temps, s’il y a apport et partage des profits, on peut inférer une intention de coopérer, mais elle permet d’éliminer la relation employé/employeur; ici, il y a relation égalitaire); apport (oui → camion, travail); partage des bénéfices (oui → profit partagé); la jurisprudence rajoute un élément : l’exploitation d’une activité économique. b) Déclaration en immatriculation – délais de 60 jours sinon déclarés comme société en participation (avec des conséquences particulières sur la responsabilité des associés) – voir 2189 CcQ; art 32 sur la Loi sur la publicité légale.c) Pénélope est rémunérée en fonction des consommateurs, par commission, mais elle semble avoir le statut d’employée. Le fait qu’elle obtienne une part des profits ne signifie pas nécessairement qu’elle est associée. d) Oui – pas besoin de démontrer l’apport, exploitation de l’entreprise = très large, très facile; en vue des bénéfices, c’est le cas ici.e) Déclaration d’immatriculation en vertu de la Loi sur les noms commerciaux, mais la sanction est moins importante – peut avoir un impact sur la capacité d’ester en justice + amende;f) On peut recevoir une commission sans être associé – art 3, al 3, b Loi SENC Ontario. Peut-être plus ambigu, compte tenu qu’on n’a pas besoin de démontrer l’apport, mais la loi est un bon indicateur que la commission n’est pas suffisant pour en faire une associée. Elle semble ne pas avoir autant de pouvoir décisionnel – donc il semble y avoir subordination. Non-participation aux bénéfices globaux.

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g) On ne peut pas utiliser les biens de la société autrement que pour son intérêt; art 2208 CcQ et 21(1) Loi SENC Ontarienne. En parallèle, devoir de loyauté//devoir fiduciaire qui viennent prohiber ce genre de comportement. h) En CVL, le garagiste et Paul sont liés, mais le garagiste a le choix d’aller contre la société. Art 2220 CcQ. Même si on pouvait argumenter que Paul était en dehors de ses fonctions lorsqu’il a utilisé la camionnette, mais on a voulu augmenter les recours contre le tiers, et le fait qu’il répare la camionnette peut être dans l’intérêt de la société. En CML, il faut avoir engagé la société pour la lier. Dans la mesure où Paul a signé en son nom personnel, art 7 Loi SENC. Donc le garagiste n’a pas de recours contre Pierre.i) en CML, le simple fait qu’un associé se retire met fin au contrat de société; en CVL, un associé peut décider se retirer mais il peut être remplacé par un autre, permettant que la société continue à exister. Procédure de sauvegarde : art 2232 CcQ – un peu plus stable qu’en CML.

C. Conventions entre actionnaires

Crête & Rousseau, aux pp 599 et s

1. Convention entre actionnaires Elle permet de déroger/suppléer à la loi et modifier les principes généraux de l’administration d’une SPA (e.g. la règle de la majorité, principe d’émission d’action non restreint, principe de la libre circulation des actions);

Raisons d’être 

- Absence de devoirs des actionnaires entre eux ou envers la société;• Alors que les administrateurs ont un devoir de prudence, de bonne

foi et de loyauté (art 122(1) LCSA), les actionnaires interagissent avec la société en fonction de leurs intérêts personnels.

• Ils peuvent cependant restreindre leur latitude vis-à-vis cette absence de devoirs, par ex en limitant leur liberté de vendre ou de détenir des actions ou en encadrant leur liberté de voter qui est fonction du type d’actions détenues.

- Absence de contrôle des actionnaires sur l’administration de la société;• À partir du moment où on délègue la gestion de la société à des

administrateurs, les actionnaires n’ont plus de contrôle sur les affaires générales de la société;

• Cette situation sera particulièrement courante dans les PME où certains des actionnaires gèrent aussi la société en tant que dirigeant ou membres du CA;

- Absence de coordination des actionnaires qui ne détiennent pas la majorité;

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• Il est possible que des actionnaires minoritaires obtiennent plus de poids en jumelant leurs droit de vote : la convention permet d’encadrer les termes d’une entente dans cette optique;

Principaux objectifs 

- Maintenir la proportionnalité de la détention d’actions entre les actionnaires;

• Cet objectif peut aussi être atteint par une mention aux statuts;• On y réfère comme étant le droit de préemption;

- Faire en sorte que la société reste un émetteur fermé;• On peut prévoir des restrictions sur le transfert des actions en

assujettissant le transfert des actions à une autorisation du CA;• Cet objectif peut aussi être atteint par une mention aux statuts;

- Prévoir un marché de revente des actions;• Les actions d’un émetteur fermé ne sont pas nécessairement

faciles à vendre pour leur propriétaire, en raison des difficultés d’estimer leur valeur réelle (par opposition à un émetteur assujetti dont les cotes sont publiées);

• En prévoyant un marché de revente, on peut au moins planifier cette étape plus efficacement et identifier les acheteurs à l’avance;

- Protéger l’investissement des minoritaires• Cet objectif est corrélé au précédent, en ce que la part d’un

minoritaire est encore plus difficile à évaluer et à vendre que celle d’un actionnaire ordinaire et peut requérir des aménagements spécifiques;

• On peut aussi vouloir donner des droits spécifiques aux actionnaires minoritaires, par ex, une obligation de rachat par les majoritaires dans des circonstances spécifiques;

- Déterminer à l’avance certaines questions administratives• Ceci peut être fait en engageant à l’avance le vote des actionnaires

soit dans le cadre de la convention ordinaire, pour des pouvoirs relevant des actionnaires, soit dans le cadre de la convention unanime (néanmoins assujettie aux devoirs des art 119 LSAQ et art 122(1) LCSA) pour des actes relevant normalement du CA.

Droit applicable

- Validité • Les conventions qui portent sur les pouvoirs des actionnaires sont

toujours régies par le droit commun;• Il s’agit en effet d’un simple contrat entre des actionnaires;• Voir Bergeron c. Ringuet (1960) – CSC, QC : généralement, par

contrat, les actionnaires peuvent lier leur propre conduite (droit de vote, transfert de propriété des actions, etc.), mais ne peuvent pas

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restreindre les pouvoirs des administrateurs; une telle convention n’a pas à être unanime – voir art 145.1 LCSA;

• Les actionnaires peuvent validement faire une convention non contraire à l’ordre public relativement à la détention, au transfert et à la votation de leurs actions;

• Les actionnaires ne peuvent pas engager à l’avance leur vote en tant qu’administrateurs;

• Les conventions entre administrateurs relatives à des matières relevant de leur gestion seront nulles;

- Opposabilité - Principales clauses des conventions d’actionnaires → 2 types généraux :

la convention d’achat-vente et la convention de vote;

Clause d’achat-vente → Règles régissant la propriété des actions

(Rousseau & Crête, §1393 et s)

• Il faut assurer deux conditions :• Interdire le transfert des actions sauf entre parties liées ou

sauf conformément à la convention (ce qui permettra de faire de la SPA un émetteur fermé au sens de la loi);

• Rendre tout transfert conditionnel à l’acceptation de la convention par le nouvel actionnaire;

- Droit de préemption  : règles visant le maintien de la proportion d’actions détenues par chaque actionnaire (ou droit de préemption)

• Le droit de préemption ne liera la société que s’il est prévu dans les statuts (art 55 LSAQ et art 28 LCSA);

• Peut être conféré dans les statuts (cela liera la société et régulera l’émission d’actions) ou les conventions;

• Droit de premier refus  : règles visant les situations où un tiers voudrait acquérir des actions (ou pacte de préférence); l’offre doit être la même que celle proposée par le tiers;

• Ce type de clause permet aux actionnaires liés par la convention d’avoir préséance sur l’offre faite de bonne foi par un tiers et d’agir selon les termes de cette offre;

• L’offre émane d’un tiers, et doit être refusée par le bénéficiaire pour être vendue par un tiers;

• Indice d’une offre de bonne foi :• Écrite sans conditions;• Par un tiers non lié à l’offrant;• Pour la totalité ou une partie des actions;• Payable au comptant;

• Seul le refus de l’offre telle quelle pourra permettre l’achat par le tiers; le prix et la quantité sont

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déterminés par l’offre d’achat faite par le tiers (voir Zink c. Graybec Immobilier inc);

• Droit de première offre  : règles visant les situations où l’un des actionnaires voudrait se départir de ses actions (variation du droit de premier refus);

• Offre déclenchée par le vendeur, avant qu’il n’y ait un acheteur potentiel; l’offre émane du vendeur, doit être refusé par le bénéficiaire pour être vendue à un tiers;

• Clause plus ou moins utile ou applicable selon l’existence d’une disparité au niveau des moyens financiers du côté des actionnaires : ce type de clause ne constitue en effet pas une garantie qu’il n’y aura pas dilution du pouvoir des actionnaires;

• Si une telle disparité existe ou est envisagée, on devra prévoir d’autres types de limites, par ex, de ne pas émettre des actions sans l’accord de tous les actionnaires, de faire acheter des actions émises mais non achetées par les autres actionnaires au pro-rata, etc.

• Il faut aussi s’assurer de ne pas, par ces clauses, paralyser les activités de financement de la SPA (voir clause de préemption);

• Clause de sortie conjointe   : règles visant les situations où un tiers voudrait acquérir des actions lui donnant un bloc majoritaire;

• Ce type de clause donne un droit d’entraînement de leurs actions à l’encontre d’un tiers acquéreur d’un bloc majoritaire (tag-along) ou, au contraire, oblige les actionnaires restants à vendre leurs actions au tiers (drag-along); le tiers s’engage à acquérir, du même coup, les titres détenus par le ou les minoritaires selon les mêmes modalités offertes à la majorité – les minoritaires disposent d’une option de vente qui leur permet de quitter la société en même temps que le majoritaire

• L’actionnaire vendeur doit imposer cette condition au tiers acheteur en vertu de la convention;

• Clause relative à l’actionnariat  : règles visant la situation où un actionnaire serait rendu incapable ou décèderait;

• Obligation de vendre ou option d’achat (souvent assortie d’une obligation d’acheter), à la survenance du décès ou de l’incapacité;

• En général, il s’agit d’une promesse bilatérale conditionnelle (soumise à la réalisation du décès/incapacité), de manière à ce que l’actionnaire restant soit obligé d’acheter;

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• S’il s’agit par contre d’un actionnaire fondateur, on peut plutôt prévoir la nomination d’un mandataire à l’invalide pour la durée de l‘invalidité (sur le modèle du mandat d’inaptitude);

• L’achat sera souvent financé par une assurance-vie ou assurance-invalidité;

• Clause en cas de faute d’un actionnaire  : règles visant la situation où un actionnaire contreviendrait à ses obligations;

• Cette clause impose une obligation de vendre en cas de survenance d’un ou des évènements précis, par ex, la saisie des actions, la faillite de l’actionnaire, une contravention à la convention ou une fraude : cela déclenche le mécanisme d’offre forcée ipso facto.

• Le prix sera déterminé à rabais en cas de faute (voir par ex Ringuet c. Bergeron) : il est possible que ce type de clause (au rabais) ne soit pas valide en cas de faillite vis-à-vis du syndic : en tout cas, un prix en-dessous de la juste valeur serait probablement contraire à l’ordre public.

• Clause en cas de conflit ( shotgun )  : règles visant à régir les situations où les actionnaires d’une société ne s’entendent plus;

• Ce type de clause souhaite apporter une réponse au problème de la détermination de la valeur des actions dans un contexte conflictuel;

• L’initiateur de l’offre pourra se faire faire la même contre-offre et sera obligé de l’accepter, ce qui encourage les offres raisonnables;

• L’utilisation de ce type de clause est assez rare puisqu’elle présente de gros risques financiers, spécifiquement dans les cas où un actionnaire en situation financière précaire est dans une posture inégale;

• Ce type de clause est recommandable seulement dans les cas où les coactionnaires disposent de moyens comparables, sont de calibre comparable au sein de la SPA et possèdent le même nombre d’actions;

• La clause shotgun est sujette à une interprétation restrictive;

Dans toutes les conventions d’achat-vente, il faut prévoir un mécanisme pour déterminer le prix d’achat des actions;

- La clause peut prévoir soit un prix déterminé pour les actions, ou prévoir un moyen de déterminer le prix;

- On doit aussi prévoir un délai fixe pour accepter l’offre;- On doit aussi mentionner que l’offre sera faite au prorata de la détention

d’actions, sauf si un actionnaire refuse d’acheter.

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Conventions de vote   : règles régissant l’exercice du droit de vote des actionnaires et l’élection des administrateurs

(Rousseau & Crête, §1384 et s)

- Ces clauses peuvent permettre de protéger les intérêts des actionnaires;- Ces clauses sont autorisées par la loi, même pour une partie seulement

des actionnaires (pas d’article au provincial, 145.1 LCSA : la LCSA est plus claire à cet effet…).

- Les actionnaires restent néanmoins tenus des obligations générales de bonne foi, d’agir de façon raisonnable et d’éviter les abus

• Pooling agreement (convention d’entiercement) : • Selon cette entente, on transfère les actions à un

mandataire-dépositaire : il remet un certificat d’entiercement aux actionnaires, lequel représente leurs actions.

• Le mandataire-dépositaire votera aux assemblées selon les directives des actionnaires (ça peut être, par exemple, 75% d’entre eux) et versera les dividendes ou autres gratifications liés à la détention d’actions aux actionnaires.

• Voting trust (entente dite de « contrôle du fiduciaire »)• Il s’agit d’une entente en vertu de laquelle un groupe

d’actionnaires se concerte afin d’obtenir un bloc de contrôle.• On transfère juridiquement des biens, ici des actions

appartenant aux constituants, à un patrimoine fiduciaire (au Québec, une fiducie d’utilité privée 1275 CcQ).

• Le fiduciaire administrera alors les droits de vote en groupe à sa discrétion, mais toujours dans l’intérêt des actionnaires.

• Pour des exemples, on pourra voir Regroupement des marchands actionnaires inc. c. Métro (2006) – QC, CS ; Birks c. Birks (1983) – QC, CA ;

2. Modèle alternative de gouvernance : convention unanime des actionnaires (Rousseau & Crête, § 1329 et s)

Objectif

- Restreindre les pouvoirs du CA et les confier à l’assemblée des actionnaires qui prendra alors les décisions normalement réservées au CA dans le cadre d’une assemblée d’actionnaires et selon les règles d’une assemblée d’actionnaires;

- Dans la mesure où les actionnaires agissent dans le contexte d’une assemblée d’actionnaires, certaines des règles applicable aux administrateurs de la société par actions, notamment celle (énoncée dans Ringuet) à l’effet qu’un administrateur ne peut pas lier sa discrétion à

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l’avance, sont mises de côté: un actionnaire peut encore lier sa discrétion à l’avance lorsqu’il agit comme un CA.

- Par opp au modèle traditionnel fondé sur le principe de la séparation entre le contrôle et l’investissement (CA possède la compétence exclusive de gestion/supervision des affaires de la société; le droit de regard des actionnaires se limite à l’exercice au pouvoir d’élire les administrateurs + approuver le règlement intérieur & changements structurels importants); esp. dans le contexte de large SPA;

- Dans le cadre de petite SPA, cette séparation peut s’avérer problématique là où des actionnaires siègent sur le CA et où leur participation est limitée : l’art 146 LCSA et art 213 LSAQ permettent aux actionnaires de conclure une CUA retirant/restreignant les pouvoirs du CA; et permettant de modifier la répartition entre les administrateurs et les actionnaires;

- Def/CUA/ - LCSA : convention écrite conclue par tous les actionnaires soit entre eux, soit avec des tiers, restreignant les pouvoirs des administrateurs de gérer les activités commerciales/affaires internes de la société ou d’en surveiller la gestion; problème avec la définition →

• Selon cette def, n’inclut pas les conventions, même factuellement unanime, portant sur la propriété des actions (e.g. droit de premier refus; options d’achat/vente d’actions);

• Conséquence → les règles d’opposabilité applicables à la CUA sont différentes de celles applicables aux autres types de convention (normalement les mêmes règles d’opposabilité que pour les contrats)

- ≠ Def/CUA – LSAQ → voir plutôt LSAQ, ch 7, s 3 : similaire à la LCSA, inclut également la déclaration écrite par l’actionnaire unique qui vise la restriction des pouvoirs du CA de gérer les activités/affaires de la société et surveiller sa gestion; problème avec la définition →

• ≠ consistent tout au long de la LSAQ → art 7 LSAQ prévoie qu’une CUA peut augmenter le nombre de voix nécessaires à l’adoption de certaines mesures par les administrateurs/actionnaires; or, cette disposition ne consiste pas en une restriction des pouvoirs du CA;

- En somme, l’objet de la CUA est ambigu, tant dans la LCSA que dans la LSAQ;

- Si une convention entre tous les actionnaires vient prendre des pouvoirs au CA pour les donner aux actionnaires, c’est une convention unanime, quel que soit le nom qu’on lui donne. Il y a différentes façons de retirer les pouvoirs au CA:

1. Retirer tous les pouvoirs au CA et les faire exercer par les actionnaires. Dans ce cas, il faut savoir que le CA peut être aboli au Québec → art 216 al. 3 LSAQ: il n’en est pas de même au fédéral.

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2. Donner instruction au CA de poser certains gestes ou interdire au CA de les poser ;

3. Soumettre l’adoption de décisions à l’approbation d’un ou de plusieurs actionnaires, ou même d’un tiers (voir arts 112, 213 LSAQ et 102(1), 122 (2) et 146(1) et (5) LCSA); - Par ex, lorsque la société est à ses débuts ou en situation

financière précaire, les actionnaires voudront rassurer les investisseurs en leur laissant quelque chose s’avoisinant à un droit de regard sur la gestion ;

4. Soumettre l’adoption de décisions du CA à une majorité spéciale des actionnaires. Attention : pour Martel, une CUA qui ne vient que hausser les majorités requises par les actionnaires ne constitue pas un transfert de pouvoirs, bien que cela reste une CUA. Dans cette situation, l’avantage probable est de lier les tiers acquéreurs ou souscripteurs contrairement à ce qui se produirait en vertu d’une simple convention (arts 7, 218 LSAQ & 6(3), 146(3) LCSA), mais l’opposabilité de la convention sera un peu différente.

Dans les cas 1 à 3, il faut publier l’existence de la CUA tant au fédéral qu’au provincial (art 215 LSAQ & art 35(6) LPLE);

- Pour une CUA qui ne fait que rehausser les majorités, ce type de convention ne serait pas assujettie à la LPLE : 215 LSAQ et 35(6) LPLE : il faut, selon la loi sur la publicité, que la CUA restreigne ou enlève des pouvoirs au CA, on ne parle pas seulement d’une approbation.

- À noter que la déclaration de la LPLE a un but informatif et ne rend pas les clauses de la CUA opposable aux tiers, sauf dans un cas bien précis: la LPLE demande de nommer les actionnaires en charge lorsque le CA n’a plus de pouvoirs : 33 al. 2 (2) LPLE, ceci est opposable aux tiers, par l’effet de 98 (6) LPLE.

Par ailleurs, on peut vouloir ne récupérer qu’une partie des pouvoirs des administrateurs, par ex :

- La fixation de la rémunération des administrateurs/dirigeants (en principe, laissée à la discrétion du CA – art 117 LSAQ & art 125 LCSA);

- La nomination des dirigeants (attention : peut faire l’objet de certains aménagements aux statuts sans passer par la CUA, voir arts 116, 118 LSAQ & art 121 LCSA)- La convention peut exiger la nomination de certaines personnes

en particuliers;- L’adoption de résolutions du CA peut être assujettie à l’approbation

des actionnaires ou d’un tiers (art 220 LSAQ & art 146(6) LCSA)

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Personnes visées par la CUA (§1342 et s)

La CUA s’applique à toute SPA;

Condition de validité 

- Tous les actionnaires doivent être partis à la convention (ḿ ceux qui n’ont pas de droit de vote); inclut la déclaration de l’actionnaire unique (art 146(2) LCSA & art 213 al. 2 LSAQ); les tiers peuvent intervenir (e.g. créancier) (art 146(1) LCSA; art 213 al.1 LSAQ); en pratique, seules les petites SPA peuvent s’en prévaloir;

- Art 216 LSAQ impose d’inscrire la CUA au Registraire des entreprises aux noms de ceux qui assument ces pouvoirs (permet aux créanciers d’identifier les actionnaires/tiers qui assument les obligations de la SPA);

- La CUA doit être écrite : s’il y a un actionnaire unique, il peut faire une déclaration écrite;

Obligations et responsabilités (§1352 et s)

Effet du transfert/partage des pouvoirs

- Les obligations des administrateurs sont transférés aux actionnaires (art 146(5) LCSA & art 214 LSAQ);

- Lorsqu’en vigueur, les CUA ont pour effet de décharger les administrateurs de leurs pouvoirs et de leurs responsabilités et de transférer celles-ci aux actionnaires.

- Quid de la responsabilité des actionnaires sans droit de vote mais néanmoins parties à la convention 

• La LCSA fournit une piste de réponse à 146(5) LCSA.- L’imputabilité des personnes serait fonction des pouvoirs attribués à

celles-ci par convention.- Question : lorsque la CUA transfère tous les pouvoirs aux actionnaires,

est-ce que la responsabilité incombe à tous les actionnaires ou seulement à ceux qui exercent les fonctions d’administrateurs?

• Règle générale : l’imputabilité des personnes est fxn de l’attribution prévue dans la convention (les actionnaires dépourvus de tout pouvoir décisionnel sont exclus du champ d’application de cette disposition);

- Question : lorsque la CUA assujettit les décisions du CA à l’approbation des actionnaires, est-ce que la responsabilité incombe aux actionnaires dont l’approbation est requise?

• Martel : oui, puisqu’elles disposent du pouvoir de décider si oui ou non les résolutions adoptées par les administrateurs entreront en vigueur.

• C&R : plus compliqué → art 146(5) LCSA & art 214 LSAQ édictent que les obligations sont dévolues aux personnes à qui est

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« conféré le pouvoir » - ici, il s’agit d’une compétence partagée. Ceci dit, le CA joue un rôle crucial dans le processus décisionnel (travail de conception, d’analyse, d’évaluation) et tout bien considéré, ils devraient assumer les obligations qui se rattachent à l’exercice de ces pouvoirs. Est-ce que l’approbation nécessaire des actionnaires devrait entraîner une responsabilité aussi importante? L’approbation a pour effet de lier la société à l’égard des diverses parties prenantes; mais il peut être ardu de déterminer le part de responsabilité portée lorsque les actionnaires n’interviennent qu’à l’égard de certains pouvoirs spécifiques.

- Généralement, les personnes chargées d’exercer les pouvoirs d’administration sont tenues de respecter les devoirs généraux de prudence, diligence et de bonne foi; en cas de faute → peut engager leur responsabilité personnelle (arts 118, 239, 241, 247 LCSA & arts 156, 287 LSAQ);

• Piste de réponse : l’objectif d’une CUA est de permettre aux actionnaires de façonner les termes de leur association afin de protéger leurs intérêts respectifs afin de mieux rendre compte de la spécificité des sociétés composées d’un nombre restreint d’actionnaires. Une application stricte du devoir de loyauté empièterait sur cette spécificité.

- La LSAQ fait cette distinction à 214 : elle mentionne que les responsabilités sont dévolues à ceux qui ont les pouvoirs.

Exercice des pouvoirs

Devoir d’indépendance → art 146 (6) LCSA & art 220 LSAQ : les actionnaires peuvent lier à l’avance leur discrétion lorsqu’ils exercent les pouvoirs des administrateurs aux termes d’une CUA; cela ne contrevient pas au devoir d’indépendance puisque la CUA constitue une exemption du principe d’indépendance.

- Il s’agissait d’un sujet auparavant débattu dans la doctrine à cause de l’impact du devoir de loyauté des administrateurs vis-à-vis de la SPA : normalement, il est impossible de lier son vote à l’avance dans la mesure où l’on doit respecter l’intérêt de la SPA, mais on l’autorise en cas de CUA.

Devoir de loyauté → si les actionnaires exercent les pouvoirs d’administration, doivent-ils agir dans le seul intérêt de la société ou dans leur intérêt personnel?

- La question de l’application des autres volets du devoir de loyauté aux actionnaires reste ouverte. Dans la mesure où l’objectif de la CUA est d’écarter le modèle traditionnel de gouvernance, afin de mieux rendre

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compte de la spécificité des SPA composées d’un nombre restreint d’actionnaires, il conviendrait de rendre moins onéreux ce devoir.

- Cela étant, il restera toujours possible d’appliquer les principes prévus à 450 ss LSAQ et 241 LCSA si, par son administration via une CUA, un actionnaire majoritaire abuse de ses droit vis-à-vis un actionnaire minoritaire. 

- Dans une optique de prudence, on peut présumer que les actionnaires administrateurs se verront appliquer l’ensemble des devoirs des administrateurs, au minimum la prudence et la diligence dans leur gestion de la SPA et même les devoirs de loyauté, mis à part celui qui impose de ne pas se lier à l’avance.

Fin de la CUA

- Art 214 LSAQ impose un devoir d’information (inscription au registraire) afin d’aviser les tiers de l’existence & fin de la CUA;

Portée de la CUA (§1344 et s)

Exemple:

- Imposer des modalités spécifiées pour la gestion de la SPA (e.g. obligation d’émettre des dividendes en fxn d’une part déterminée des profits annuels);

- Imposer des modalités de règlement des différends;- Rapatrier entre leurs mains une partie des pouvoirs du CA et régir

l’exercice de leurs droits de vote (art 146 (1), (5) LCSA & art 220 LSAQ); - Assujettir la mise en vigueur de certaines résolutions du CA à

l’approbation des actionnaires/tiers;- Établir la proportion de vote requis pour approuver une résolution pour

protéger les actionnaires minoritaires;- Droit de veto des actionnaires ou droit d’autorisation préalable;

L’art 216 LSAQ permet aux actionnaires d’une CUA de ne pas constituer de CA (≠ LCSA);

Statut de la CUA

- Duha Printers (Western) Ltd. c. Canada (1998) CSC – « la CUA est une créature hybride du droit des sociétés, en partie contractuelle et qui tient en partie d’un acte constitutif »;

- La convention permet d’établir les règles de régie interne et de lier les administrateurs, dirigeants, actionnaires futurs même si ces personnes ne sont pas partie à l’entente;

Opposabilité de la CUA (§1365 et s)

Actionnaires présents

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- Le statut particulier de la CUA déroge au principe de l’effet relatif des contrats → les administrateurs/dirigeants/futurs actionnaires (ḿ si non signataires de la CUA) sont liés par la convention (arts 49 (8), 146 (4) LCSA; arts 66, 218 LSAQ & art 1440 CcQ); toute personne devenant actionnaire postérieurement à la CUA est réputée partie à la convention;

- Le caractère dérogatoire de la CUA au plan de son opposabilité ne vaut qu’au regard des clauses de la convention qui restreignent/retirent les pouvoirs des administrateurs (les autres objets seront régis par d’autres dispositions législatives et par le droit commun) – voir Lelanc c. Fertek inc. (2000) QCCS;

- Les présomptions visant à protéger les tiers de bonne foi pourront s’appliquer lorsque les administrateurs/actionnaires/tiers agissant au nom de la société contreviennent à l’une des dispositions de la CUA.

- On se rappelle que la CUA est publiée au Registre (35(6) LPLE) ainsi que le nom des actionnaires s’étant arrogé tous les pouvoirs du CA (33 al. 2 (2) LPLE) : cet aspect - et cet aspect seulement - de la déclaration est opposable aux tiers en vertu de 98 (6) LPLE, le reste n’est divulgué qu’à titre informatif (par ex, le contenu de la convention) ;

- Les administrateurs, les dirigeants, la société ainsi que les actionnaires futurs (s’ils en ont été avisés) sont liés par la CUA:

• LSAQ: 112: CA, 460: société, 218: acquéreurs (délai 30 jours); • LCSA: 122(2) CA, 247: société, 146 (3), (4) (délai 30 jours):

acquéreurs

Actionnaires futures

- LA CUA déclenche un régime par lequel le nouvel actionnaire est réputé partie à la convention unanime, sauf s’il démontre, dans un délai déterminé après l’acquisition, qu’il n’en avait pas connaissance ;

- Au provincial, l’acquéreur d’actions est réputé partie à la CUA : s’il n’en avait pas connaissance, il dispose de 30 jours pour faire annuler le contrat par lequel il est devenu actionnaire (art 218 LSAQ : présomption liée à l’absence d’une mention sur le certificat d’actions/avis de la non-connaissance de l’acquérant) ;

- Au fédéral, le régime est sensiblement identique, si ce n’est que l’actionnaire non informé peut annuler unilatéralement le contrat (art 49(8), 146(3), (4) LCSA) ;

- Par contre, l’effet relatif des contrats trouvera application pour des clauses qui ne concernent pas ce qui est prévu dans une CUA (par ex, des dispositions d’achat/vente d’actions) : ces clauses resteront inopposables aux tiers ;

- L’effet relatif des contrats s’applique aussi aux tiers qui concluent une transaction avec la SPA : les tiers ne sont pas supposés connaître la teneur de la CUA (art 12 LSAQ & art 17 LCSA). Il ne faut pas oublier la

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règle de l’indoor management qui prévoit que les tiers peuvent présumer que les administrateurs ont le pouvoir de poser des actes, sauf s’ils avaient connaissance du contraire.

Conventions relatives au droit de vote par l’actionnaire (§1376 et s)

- Art 24(3) LCSA & art 47 LSAQ : droit de vote conféré de plein droit à son titulaire à moins de dispositions contraire prévue dans les statuts; selon la règle de la majorité;

- Grâce à une CUA, les membres régissent l’exercice de leur droit de vote à l’égard de certaines ou de l’ensemble des décisions qui relèvent de la compétence de l’assemblée des actionnaires (art 220 LSAQ & 145.1 LCSA; Bergeron c. Ringuet (1960) – CSC, QC);

- Contrairement aux administrateurs (devoir de loyauté/indépendance), les actionnaires peuvent régir leur droit de vote d’une manière prédéterminée dans une convention; cependant ils doivent l’exercer avec diligence, loyauté et bonne foi dans le meilleur intérêt de la société; la convention peut

• désigner une personne que les actionnaires signataires éliront comme administrateur;

• prévoir la nomination d’actionnaires comme dirigeants;• établir les conditions pour l’exercice du droit de regard de la

destitution/remplacement des administrateurs;

Clause d’unanimité et de majorités spéciales

- La CUA peut exiger le vote unanime sur certaines questions ou augmenter la proportion requise pour faire passer une décision;

- En termes d’analyse économique, cela octroie dans les faits un droit de veto aux actionnaires minoritaires;

- Art 7 LSAQ & art 6 (3) LCSA permettent expressément d’augmenter le nombre de voix nécessaires à l’adoption de certaines mesures, soit dans les statuts, soit dans les CUA;

Régime simplifié au Québec

- La LSAQ a innové en mettant de l’avant un régime simplifié sous l’art 217 LSAQ : un actionnaire unique peut mettre en place une CUA par déclaration écrite, le déclarer conformément à l’art 216 LSAQ, ce qui lui permet de se passer de CA, de règlements intérieurs : toutes les décisions peuvent être prises par résolution écrite et tout acte est réputé autorisé;

Limites aux pouvoirs des administrateurs, imposées par les statuts

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- Il semble possible (malgré l’absence d’une jurisprudence concluante) de confier certains pouvoirs de gestion normalement dévolus au CA aux actionnaires et ce, sans passer par la CUA, à travers les statuts.

LSAQ LCSAAchat/Rachat d’actions 93 34–36Déclarations de dividendes

103 NA

Adoption/modification règlements

113 103

Nomination des dirigeants

6, 116 121

Fixation de la rémunération du CA

6, 117 125

Pouvoirs d’emprunt/hypothèque

6, 115 189 (1), (2)

Émission d’actions 6, 52 25 (1)- Or, cette approche est critiquée par la doctrine (Martel) compte tenu que

cette façon de faire vient dupliquer celle de la CUA et transférant certains pouvoirs aux actionnaires, mais par le biais des statuts : ainsi, on pourrait théoriquement obtenir une partie des résultats par une CUA (requérant l’unanimité) en passant par une approbation aux deux tiers des actionnaires (requise pour une modification des statuts);

- En tout état de cause, une mention aux statuts aura un impact sur toute la société puisqu’elle est liée par ses statuts (art 160 LSAQ & 16(2), 247 LCSA); Ibid pour la CUA;

- Une mention aux statuts n’aura pas d’effets directs sur les tiers, ceux-ci étant protégés par les présomptions prévues dans la loi (12-14 LSA, 16-18 LCSA).

- Il en est de même pour la CUA: seule la portion publiée au Registre est opposable aux tiers (voir supra).

- Par contre, une limite aux transferts prévue dans les statuts aura un effet sur d’éventuels tiers acheteurs ayant contrevenu à cette restriction, si une mention a été faite sur les actions de l’existence d’une telle restriction: 49 (8) a) LCSA qui prévoit qu’une mention doit être faite sur les certificats pour être opposable. Pour la LSA, on se réfère à la Loi sur les transferts de valeurs mobilières, art. 37 et 85(5): une mention aux certificats d’actions qui émane de l’émetteur est en effet opposable aux tiers dans la mesure prévue par la loi.

- Les tiers devenus actionnaires seront par ailleurs liés par les statuts de la société comme actionnaires et il en sera de même pour les acquéreurs d’actions d’une société ayant conclu une CUA.

Limites aux pouvoirs des administrateurs, imposées par les règlements

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- Les règlements, bien que de nature contractuelle, lient la société par actions et ses constituantes (313 CcQ). Il n’en est pas de même pour les tiers pour les raisons précédemment exposées.

- S’il est possible de prévoir dans les statuts tout ce que la loi permet de prévoir par règlement (6 LSAQ et 6(2) LCSA), le contraire n’est pas vrai: on ne peut pas prévoir tout ce qui pourrait normalement être mentionné aux statuts dans les règlements. Lorsque la loi prévoit que des éléments doivent se retrouver aux statuts (par exemple, ce qui se trouve à l’article 5 LSA et 6 LCSA), ce qui soumet l’opération à des contraintes formelles plus importantes, on ne pourra pas les inclure dans les règlements.

- La hiérarchie normative en droit des sociétés est la suivante:

Loi habilitante (LSAQ; LCSA) → Statuts/CUA → Règlements → Résolutions du CA;

- En tant que contrat entre des tiers à la SPA, la simple convention d’actionnaires n’a pas vraiment sa place dans une telle hiérarchie.

D. Financement de la société(Welling, aux pp 569 et s; Crête & Rousseau, aux pp 227 et s)

1. DéfinitionsLa SPA peut solliciter des investissements selon deux grandes approches :

- Capital-emprunt – financement par dette, émission de titres de créances (debt securities);

- Capital propre : émission d’actions (equity securities);• Peut être compris comme un genre de créance, dans la mesure où

l’actionnaire est un créancier résiduel, mais il y a une distinction conceptuelle néanmoins;

• La relation entre la corporation et le détenteur de titres de créances se termine lorsque la SPA le rembourse; la relation entre la corporation et le détenteur d’actions est sensée continuer indéfiniment;

- Sous la nouvelle loi, les corporations ne sont pas restreintes dans leur capacité d’emprunt – voir art 15 LCSA.

Capital-actions (share capital)

Def/capital-actions/ les actions constituent la propriété de la société; elles permettent d’exercer certains droits à l’exclusion des autres personnes.

- Les actions ne donnent pas de droit sur la propriété de la SPA, mais des droits dans la gestion de la société.

- La loi permet aux SPA d’organiser leur capital-actions selon leurs besoins (art 6 LCSA & art 5 LSAQ);

- Les administrateurs possèdent, règle générale, le pouvoir d’émettre de nouvelles actions (art 25(1) LCSA & 52 LSAQ);

Capital autorisé

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Def/capital autorisé/ il s’agit d’un capital décrit dans l’acte constitutif de la SPA; le capital autorisé constitue la limite prévue d’émission du capital-actions et que la société ne peut donc pas dépasser;

- On parle des catégories d’actions décrites aux statuts;• Un changement à l’acte constitutif (ce qui inclut la description du capital-

actions) requiert une modification des statuts par résolution spéciale, voir par catégorie : il est cependant loisible au CA, qui en a la capacité, d’émettre des actions selon les termes prévus dans les statuts sans solliciter aucune autorisation de la part des actionnaires (art 25(1) LCSA & art 52 LSAQ);

• La présence d’un capital autorisé peut servir à éviter la dilution des intérêts des actionnaires fondateurs en limitant la discrétion du CA qui ne pourra pas émettre de nouvelles actions au-delà de la limite permise;

• Les articles 6 (1)(c)(i) LCSA et art 44 LSAQ viennent encadrer la création des différentes catégories;

• Le capital autorisé est une énumération des différentes catégories d’actions pouvant potentiellement être émises, celles que la société est autorisée à émettre; l ’émission des actions est un acte survenant après et qui relève du conseil d’administration, en principe.

Capital souscrit

Def/capital souscrit/ portion du capital autorisé qui a fait l’objet d’une offre de souscription par un tiers : la vente d’actions est une opération qui se décline en 3 actes :

• La souscription;• L’acceptation de la souscription par l’émetteur (SPA);• L’émission des actions;

Le capital souscrit a franchi la première étape (souscription);

Capital émis

Def/capital émis/ partie du capital souscrit que la SPA a accepté de vendre et qui a été émise : il s’agit donc de l’action qui franchi les 3 étapes de la vente d’actions;

Capital versé/payé

Def/capital versé/payé/ capital émis et payé à la SPA. En vertu de la loi provinciale, il est possible d’avoir des actions non entièrement libérées → on les paiera lors d’appels de versements ou en application d’un contrat  (arts 53, 75 LSAQ).

- La LSAQ et la LCSA prévoient la possibilité de payer les actions, soit en argent, soit en biens/services rendus (art 54 LSAQ & art 25(3), (4) LCSA))

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- Dès lors que l’on émet des actions pour lesquelles on reçoit paiement, il faut inscrire ce paiement dans le compte approprié, ce qui relève des administrateurs (arts 68 et s LSAQ & 26 LCSA):

- Compte de capital déclaré   : pour les SPA constituées sous la LCSA (art 26 LCSA)

La société doit tenir un compte capital déclaré pour chaque catégorie d’actions : on y verse le montant total reçu en contrepartie des actions émises, mais en tenant compte des différentes catégories.

- Compte de capital-actions émis et payé : pour les SPA provinciales (art 68 LSAQ);Le montant inscrit dans un compte de capital émis et payé peut être inférieur au montant apparaissant au compte de capital émis: ce compte ne sera utile que lorsque des actions non entièrement payées ont été émises (arts 54, 55 LSAQ).

Actions à valeur nominale

- Si les actions ont une valeur nominale (43 LSAQ), le montant versé au compte (capital émis et versé) ne peut pas excéder cette valeur. Le surplus ira sous la rubrique surplus d’apport au bilan.

- Une action ne peut pas non plus être émise pour moins que sa valeur nominale (à escompte) (art 52 al. 2 LSAQ) et les statuts devront être modifiés à cette fin, ce qui nécessite une majorité spéciale des voix des actionnaires (arts 240–245 LSAQ);

- La loi fédérale n’autorise pas les actions à valeur nominale (art 24 (1) LCSA); le CA détermine le prix des actions au moment de l’émission en tenant compte de la juste valeur de celles-ci. Plus de flexibilité pour le CA;

- Même sans valeur nominale, une émission d’actions doit être au prix de sa valeur marchande : une émission d’actions à prix plus bas que leur valeur réelle constituerait une dilution de capital compte tenu du fait que les bénéfices non répartis sont la propriété de tous les actionnaires (art 52 LCSA). Le CA peut émettre une action à un prix excédant la valeur nominale, mais l’excès doit être inclus dans le surplus d’apport.

2. Création de différentes catégories au sein du capital-actions(C&R, §539 et s)

i) Remarques générales - Le capital propre est une créance subordonnée aux créances du passif; par

ordre de liquidité : créances court-terme → créances long-terme → capital propre;

o Le capital propre devra être remboursé aux actionnaires lorsqu’on met fin à la société, puisque les actionnaires ont acheté des actions pour les fins de la société;

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- La loi permet à la SPA de diviser son capital-actions comme elle l’entend à condition de respecter certaines règles de base, prévues notamment à l’art 24(3) LCSA, arts 47–49 LSAQ.

- Les actions comportent en principe 3 droits: vote (pouvoir de contrôle), dividende (droit de partage des profits) et reliquat (droit de partage des actifs en cas de liquidation): ces trois droit doivent être présents dans au moins une des catégories d’actions.

o Il existe d’autres droits (e.g. droit à l’information) qui découle des dispositions législatives (art 20(1) LCSA);

- On aura souvent des actions dites ordinaires (common shares) et des actions dites privilégiées (preferred shares), mais il ne s’agit que de conventions; on ne retrouve pas ces appellations dans la loi.

o Ordinaires → possèdent généralement les 3 droits de bases;o Privilégiés → souvent sans droit de vote et avec un dividende

prioritaire;- Dans l’hypothèse où l’acte constitutif prévoit plus d’une catégorie d’actions,

les rédacteurs des statuts doivent s’assurer que chacun des droits fondamentaux mentionnés précédemment soit attribué à l’une ou l’autre des catégories, mais sans pour autant être tenus de les rattacher aux actions de la même catégorie;

- Les présomptions d’égalité sont plus lourdes au QC qu’au fédéral :o Toute action comporte ces 3 droits à moins d’une disposition contraire

dans l’acte constitutif qui exclut l’un de ces droits;o Si l’un des droits de base n’est afférent à aucune action émise, toute

restriction quant à ce droit est sans effet tant qu’une autre action émise ne comporte pas le droit sujet à cette restriction (art 48(2) LSAQ);

R v McClurg (1990) – CSC, CAF (Sask)

Faits : M et ses associés sont actionnaires et administrateurs d’une SPA. Leurs femmes respectives sont les seules autres actionnaires. Le capital-actions de la SPA se compose de 3 classes d’actions : M possède des actions de la Classe A; sa femme des actions de la Classe B. La SPA déclare des dividendes, et selon une clause de déclaration discrétionnaire par classe d’actions, n’en émet que pour la Classe B. Le ministère du Revenue conteste cette opération.Question : Est-ce que la possibilité de distribuer un dividende à la discrétion des administrateurs par le biais d’une clause de dividende discrétionnaire constitue un exercice légitime de la liberté contractuelle des fondateurs de la SPA?Décision : oui.Analyse :La Cour focalise sur la capacité conférée aux SPA de mettre en place des catégories d’actions afin de mettre en échec la règle de base voulant que toutes les actions possèdent les mêmes droits à recevoir des dividendes sauf si le statut de la corporation spécifie d’autres modalités. Il y a une présomption d’égalité des droits attachés aux actions, mais qui est réfuté lorsqu’une SPA divise son capital-actions en plusieurs classes auxquelles sont attachés des droits différents. Le principe étant que

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les droits des actionnaires sont liés aux actions elles-mêmes et non au statut d’actionnaire. L’utilisation de catégorie d’actions est reconnue par la loi comme étant une façon de déroger au principe d’égalité. Le ministère avance que la clause discrétionnaire ne crée pas des catégories d’actions qui brisent le principe d’égalité. Or, la Cour considère qu’une résolution du CA, si suffisamment spécifique, constitue un exercice légitime de la discrétion du CA de réfuter le principe d’égalité de distribution des dividendes. La clause discrétionnaire crée des différences de droits entre les catégories et cela est suffisant pour réfuter la présomption.Ratio : Il y a présomption d’égalité dans la distribution des dividendes, mais cette présomption peut être réfutée en démontrant qu’il y a une différence factuelle entre les droits relatifs à chaque catégorie.

International Power co v McMaster University & Montreal Trust co (1946) – CSC, Ont.

Faits: Une catégorie préférentielle a une priorité sur la déclaration de dividende de 7% par année, avant que les détenteurs d’actions ordinaires puissent être satisfaits. Lorsque la compagnie se dissout, elle déclare des dividendes plus grandes qu’à l’ordinaire mais ne distribue que le 7% usuel aux actionnaires préférentiels, puis le reste aux actionnaires ordinaires. Les actionnaires préférentiels contestent.Question: Est-ce que le principe d’égalité s’applique dans les situations où les actionnaires ordinaires reçoivent une part des dividendes plus grandes que la part attribuée aux actionnaires préférentiels?Décision : Non, la déclaration de priorité s’interprète comme une restriction sur le montant arrêté – les actionnaires prioritaires n’ont pas de droit sur le reste des dividendes car le principe d’égalité a été réfuté.Analyse:L’appellation des actions « privilégiées » n’est pas à proprement parler pertinente et la règle supplétive de base est la règle d’égalité des actions. Pour autant, on y affirme que compte tenu de la rédaction des statuts, les dividendes prévus pour les actions privilégiées constituent la totalité des dividendes auxquels les détenteurs préférentiels auront droit. Ceci dit, la conclusion à laquelle on en arrive par rapport aux mêmes actions dites privilégiées diffère quant au partage du reliquat   : on y applique la règle de l’égalité, conformément au libellé des statuts, encore une fois. La règle de l’égalité est une présomption qui s’applique à chaque droit relatif aux catégories d’actions et à moins d’une mention dans les statuts, les droits sont jugés égaux.Ratio : la présomption d’égalité est évacuée pour un droit particulier lorsque des règles supplétives lui sont attribuées; les actions préférentielles dans le partage d’un dividende sont présumées être dépourvues du droit de participer au-delà de la préférence qui leur est accordée – caractère exhaustif du droit préférentiel; la présomption d’égalité revient lorsqu’on sort de ce qui est explicitement mentionné aux statuts (par opp UK);

ii) Le droit de vote- Les différences dans le capital-actions ne se manifestent pas uniquement au

niveau de la distribution des dividendes: il est aussi possible, comme on l’a

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vu dans McClurg, de créer une ou plusieurs catégories d’actions sans droit de vote, voire, de créer une ou des catégories multi-votantes.

- Il faut se rappeler que les droits doivent se rattacher aux actions et non aux actionnaires.

- L’effet combiné des arts 6(1)(c)(i), 24(4) & 140(1) LCSA établit qu’au moins une classe d’actionnaires doit avoir le droit de vote dans toutes les circonstances et que tous les actionnaires ont le même droit de vote s’il n’existe qu’une catégorie d’actions. Partant, si une corporation veut créer une catégorie d’actions sans droit de vote, ce point doit être explicite dans ses statuts.

• Sous la LCSA, 2 présomptions ;

• Toutes les actions comportent les trois droits fondamentaux de manière égale; s’applique lorsque le capital-actions est composé seulement d’une catégorie d’actions;

• Toute action confère le droit de vote à moins d’une disposition contraire prévue dans l’acte constitutif; (art 140(1) LCSA)

- Il est aussi important de souligner que le droit de vote au sein d’une société peut s’exprimer par le biais de procurations (proxies), contrairement à ce qui se passe dans une élection ordinaire: le régime du vote par procuration est encadré par la LCSA au chapitre XIII.

Bowater Canadian Ltd v R. L. Crain inc. (1987) – CA, Ont

On ne peut pas avoir des inégalités en termes de droits attachés à une même catégorie d’actions. Les droits prévus dans la description du capital-actions se rattachent aux actions et non à leurs détenteurs : il a été jugé contraire à la loi de faire une différence entre des détenteurs d’une même catégorie d’actions en terme de nombre de votes. Ratio : la présomption d’égalité s’applique à l’intérieur d’une catégorie d’actions.

Canadian Express Ltd v Blair (1989) – HC, Ont

Fait: Action en contestation d’élection (voir art 145(1) LCSA & art 454 LSAQ); il y est question des pouvoirs concédés aux détenteurs de droit de vote par procuration dans les formulaires de procuration émis par la SPA. La SPA avait distribué des formulaires de procuration afin d’appuyer la candidature d’un administrateur.Analyse :Le problème est en fait d'avoir utilisé un formulaire de procuration émanant de la SPA, d'avoir biffé le nom du représentant suggéré et de l'avoir remplacé par un autre qui a refusé d'aller dans le sens suggéré dans le formulaire: pour la cour, le formulaire est devenu un formulaire de procuration pur et simple. Le but poursuivi dans cette décision était de favoriser la «démocratie» chez les actionnaires, quelle que soit la

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procédure.Ratio : il est possible de voter par procuration.

iii) Le droit aux dividendesLa déclaration du dividende relève de la discrétion du CA, sauf mention à l’effet contraire dans les statuts (au QC seulement, art 103 LSAQ) ou d’une CUA (au fédéral, seul véhicule);

- Les corporations ne sont pas tenues de déclarer des dividendes. - Une fois déclaré, le dividende représente une dette qui apparaît dans le

passif à court terme de la SPA;- Un dividende distribué aux actionnaires = revenus que génère le capital

investi dans l’entreprise; cependant, contrairement aux détenteurs de créances qui peuvent exiger le paiement des intérêts aux échéances convenues, les actionnaires ne peuvent faire valoir leur droit de recevoir un dividende qu’au moment où le conseil d’administration décide d’en déclarer. La déclaration a pour effet de conférer aux actionnaires une créance mobilière qui leur permet de réclamer le paiement du dividende selon la quotité et les modalités prévues dans l’acte constitutif et dans le contrat de souscription.

R v McClurg (1990) – CSC, CAF (Sask)

Faits : Est discutée la capacité discrétionnaire du CA de la SPA à déclarer des dividendes. Question : Est-ce que la possibilité de distribuer un dividende à la discrétion des administrateurs par le biais d’une clause de dividende discrétionnaire constitue un exercice légitime de la liberté contractuelle des fondateurs de la SPA?Analyse :Pour la Cour, le fait que des droits soient conditionnels ne change pas leur nature : de toute façon, la déclaration du dividende relève en principe de la discrétion du CA et l’interprétation de la Cour suggère qu’il lui serait loisible de changer d’avis une fois cette déclaration faite.Cela étant, la déclaration du dividende doit être dans l’intérêt de la SPA, dans le contexte particulier où l’on considère ceux-ci comme des « cadeaux » aux actionnaires, et ne doit pas mettre en péril la solvabilité de la corporation, en plus de satisfaire le devoir de loyauté envers la corporation.La Cour considère que bien que les décisions de déclarer les dividendes et de les allouer aient généralement lieu en même temps, il n’est pas impossible de le faire séparément.Ratio : la déclaration de dividendes constitue un des pouvoirs discrétionnaires du CA.

Bond v Barrow Haematite Steel Co (1902) – HC, UK

Faits : les actionnaires détenteurs d’actions privilégiés souhaitent contraindre la SPA à déclarer un dividende alors que le CA refuse de le faire. Les actionnaires privilégiés ont une action préférentielle de 8%, mais malgré les profits de la SPA, celle-ci a jugé qu’il était préférable de ne pas déclarer de dividendes.Question : Est-ce que le CA a le droit de ne pas déclarer de dividendes et est-ce que

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les actionnaires ont un droit à recevoir des dividendes chaque année en fonction des profits amassés?Décision : Oui, non.Analyse : Les demandeurs soutiennent que les actions privilégiées doivent recevoir les dividendes prévus contractuellement : cet argument est rejeté par la Cour. Celle-ci établit plutôt que les actionnaires n’ont aucun droit aux dividendes tant que le CA n’a pas déterminé qu’il était dans l’intérêt de la compagnie de déclarer des dividendes. Un autre argument porte sur l’utilisation du mot « intérêt » au lieu de « dividende » dans la description du capital-actions : la Cour considère qu’il s’agit d’une distraction du rédacteur et refuse l’argument aussi. Le terme « intérêt » n’est clairement pas adéquat pour désigner le retour auquel un actionnaire a droit relativement aux actions payées à termes – on utilise plutôt le terme de dividende pour désigner la part de profit auquel un actionnaire a droit.Ratio : les actionnaires (même privilégiés) n’ont pas un droit à la déclaration de dividendes même si la SPA a fait des profits.

L’incidence de la règle de maintien du capital

- Les fonds reçus par la SPA constituent le gage commun des créanciers;- Dans cette mesure, le droit de la SPA de déclarer des dividendes est

limité par des contraintes de solvabilité à court terme et parfois, à plus long terme : il s’agit des tests de solvabilité;

- Art 42 LCSA : la société ne peut déclarer ni verser de dividende s’il existe des motifs raisonnables de croire que –

a) ou bien elle ne peut, ou ne pourrait de ce fait, acquitter son passif à échéance;

b) ou bien la valeur de réalisation de son actif serait, de ce fait, inférieure au total de son passif et de son capital déclaré;

- Au QC, seulement le test de solvabilité (a) (art 104 LSAQ);

On veut s’assurer que la société a suffisamment de liquidité pour ne pas mettre en péril la satisfaction de ses obligations envers ses créanciers. Donc les dividendes sont émis à la discrétion du CA, mais soumis à cette règle.

iv) Le droit au rachatLa règle de CML statue qu’une société ne peut pas racheter ses propres actions, dans la mesure où cela ne respecte pas la règle de maintien du capital (Trevor v Whitworth);

La loi prévoit cependant des aménagements particuliers qui viennent limiter l’impact de la règle de CML en autorisant l’achat OU le rachat (droit prévu dans la description du capital-actions – condition associée à la description des actions) des actions par la SPA;

Le test de base pour l’achat – voir art 34 LCSA :

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- La société peut acheter ou autrement acquérir des actions qu’elle a émises; la société ne peut faire aucun paiement en vue d’acheter/acquérir autrement des actions qu’elle a émises s’il existe des motifs raisonnables de croire que

a) ou bien elle ne peut, ou ne pourrait de ce fait, acquitter son passif à échéance;

b) ou bien la valeur de réalisation de son actif serait, de ce fait, inférieure au total de son passif et de son capital déclaré;

C’est donc essentiellement la règle du maintien du capital.

v) Le droit au partage du reliquat- La question de déterminer si un droit préférentiel au partage donne droit à

une part résiduelle de celui-ci dépendra de l’interprétation des statuts;- Westfair foods v. Watt (1997) – CA, Alberta : catégorie d’action avec

dividendes résiduels et catégorie d’actions avec dividendes fixes. Depuis plusieurs années, on distribuait des dividendes d’un montant assez stable. Après un moment, on a commencé à distribuer de très gros dividendes. Le montant fixe a été distribué aux détenteurs de dividendes fixes, mais le solde (important) a été distribué aux détenteurs de dividendes résiduels. Les détenteurs de dividendes fixes ont contesté : ce n’est pas un droit des actionnaires de préserver un montant du partage du reliquat. Dilapider ce qui pourrait être le reliquat n’est donc pas une faute de la société. Pas de « droit à l’attente raisonnable au reliquat » ni à la préservation du reliquat.

In Re the Isle of Thanet Electricity Supply Co. (1950) – UK, CA

Lorsqu’on interprète les articles relatifs aux droits de partage des profits, à savoir les droits aux dividendes et au reliquat, les mêmes principes s’appliquent (présomption d’égalité). Aussi, lorsqu’une disposition établit des droits relatifs au partage des profits attachés à une catégorie d’actions, ces droits sont présumés exhaustifs.

vi) L’incidence des sériesIl est aussi possible de subdiviser les catégories en séries;

- La principale différence entre les séries et les catégories est que les premières peuvent être créées par le CA;

- Séries doivent être prévues au capital-actions quand même, mais pas besoin de modifier les statuts (requérant l’approbation des 2/3 des actionnaires);

- Les administrateurs vont créer les séries et émettre les actions;- Il existe cependant des contraintes au niveau de la création de ces séries,

lesquelles sont énoncées aux articles 27 LCSA & art 45, 50 LSAQ;o On ne peut pas créer un dividende préférentiel; la priorité est

accordée aux séries déjà établies; ni au niveau du remboursement;o Il faut notifier les actionnaires (le directeur);

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vii) Le transfert des actions- Le principe de base est que les actions sont librement transférables;- Les transactions d’actions faites au QC sont assujetties à la Loi sur le

transfert de valeurs mobilières et l’obtention de titres intermédiés;- Pour autant, les actions des sociétés qui souhaitent rester des émetteurs

fermés devront faire l’objet de restrictions quant à leur transfert, le plus souvent sujettes à l’approbation du CA : cette approche a été jugée valable dans la décision Edmonton Country Club Ltd v. Case (1974) – CSC, Ont.

Edmonton Country Club Ltd v. Case (1974) – CSC, Ont.

Question: Est-ce que la clause selon laquelle le transfert des actions doit être approuvé par la majorité du CA est une clause valide ?Analyse :Majorité : oui → ce genre de clause est valide lorsqu’elle est inscrite dans les statuts de la corporation et utilisée de bonne foi ;Dissidence : non → il s’agit d’une clause arbitraire. Même si la clause est d’origine contractuelle, les actions sont des instances particulières de la propriété et ne doivent pas être indûment soumises à des restrictions quant à leur transfert.

III. Constitution et organisation de la SPAA. Processus d’incorporation(Welling, aux pp 279 et s)

1. L’enregistrement- Les fondateurs soumettent une demande à l’autorité compétente; si

l’application est conforme, l’autorité émet un certificat d’incorporation qui marque la naissance de la corporation ;

o Art 9 LCSA : une corporation naît à la date indiquée sur son certificat d’incorporation (≈ certificat de naissance);

o Les fondateurs doivent préparer des statuts (précisant les droits/restrictions aux actions de chq catégorie si plus d’une catégorie d’actions), signés, avant de les transmettre à l’autorité réglementaire désignée par la loi choisie (art 9 LSAQ & art 7 LCSA)

C.P.W. Valve and Instrument LTD v Scott (1978) – CA, Alb

Faits: Litige quant à la date d’incorporation d’une SPA – le certificat d’incorporation indique le 15 juin 1971, mais des témoins affirment que le Directeur a modifié la date réelle d’émission du document.Question : Est-ce que la compagnie peut être liée pour des obligations contractées avant que son incorporation n’apparaisse au registre, même si l’obligation est contractée après la date inscrite au certificat d’incorporation ?Décision : Non.Analyse :Dissidence : La question en dispute dépend de savoir si les termes de l’accord de

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distribution étaient satisfaits de manière à ce que l’obligation conditionnelle soit exigible. Le 15 juin, des ordres avaient été émis à l’intention de CPW ; or il est clair que la SPA était lié par cet ordre même si son incorporation réelle n’a pas eu lieu avant le 16, puisqu’à partir du moment où la compagnie est enregistrée, le souscripteur est considéré comme un corps corporatif, capable d’exercer toutes les fonctions d’une compagnie incorporée. Donc, même si la SPA n’a effectivement pas été placée au registre, elle était liée.Majorité : Compte tenu de la non-existence dans les faits de la SPA, il lui est impossible de remplir la condition et ne peut prétendre au contrat. La présomption d’existence à la date mentionnée n’est pas utile dans la mesure où elle n’a pas vraiment produit un certificat.

2. La constitution corporative : exigences minimales- Art 6 LCSA : critères à remplir → nom, adresse du siège social, nombre

d’administrateurs, détails de la structure d’actions (art 5(8) LSAQ) ; o Structure d’actions :

Catégories et nombre maximal d’actions autorisée à émettre et : En cas de pluralité des catégories, les droits, privilèges,

conditions et restrictions dont est assortie chacune d’elles; En cas d’émission d’une catégorie d’actions par séries,

l’autorisation accordée aux administrateurs permettant de fixer le nombre et désignation des actions de chaque série que de déterminer les droits, privilèges, conditions et restrictions dont les actions sont assorties;

Les restrictions imposées à l’émission/transfert/droit de propriété des actions ;

Nombre précis, ou sous réserve de l’art 107 a) les nombres minimal/maximal de ses administrateurs ;

Les limites imposées à son activité commerciale

3. Prorogation : Émigration et immigration corporative- La prorogation est la procédure par laquelle une corporation incorporée

dans une juridiction émigre dans une autre.- L’effet de la prorogation agit comme s’il y avait eu dissolution de la

corporation dans la juridiction mère simultanément suivie de sa réincorporation dans la nouvelle juridiction;

- Critère : art 187(1) LCSA → une corporation cherchant à immigrer doit être autorisée par les lois de la juridiction où elle cherche à s’incorporer et sa loi d’origine doit aussi l’autoriser.

4. Fusion : regroupement corporatif- Arts 181–186 LCSA : 2 corporations ou plus peuvent s’amalgamer et

continuer en tant qu’une seule corporation;o Les anciennes corporations cessent d’exister en tant qu’entités

distinctes et seule une corporation demeure;o Doit être enregistrée de nouveau par un certificat de fusion;

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o Condition de la fusion   : les deux sociétés fusionnantes doivent être constituées en vertu de la même loi ;

B. Le nom corporatifAux pp 286 et s.

- Régulé par le droit commun relatifs aux marques enregistrées (trademarks) et au droit commun portant sur l’usurpation d’appellation;

- Autres critères :o Le nom corporatif doit inclure indiquant une description de la nature

de la corporation (co. inc. ou ltd.);o Le nom doit être distinctif et ne doit pas être trompeur ou obscène.o QC : LPLE et Charte de la Langue française (art 68 CLF);

C. Contrats préconstitutifsAux pp 288 et s.

- Puisqu’une corporation n’existe qu’à partir de son incorporation (date inscrite au certificat), il est impossible pour un tiers de contracter avec la corporation avant cette date.

- Il existe cependant des arrangements possibles   :o « Pre-incorporation transactions », plutôt qu’un contrat (qui

constitue un accord entre deux personnes) – la question est de savoir si les deux parties ou la corporation avaient eu l’intention de se lier.

1. CML- Un K requiert 2 parties; avant d’être incorporée, une corporation ne peut

donc pas être partie à un K;- De plus, les parties doivent s’accorder sur les termes fondamentaux du K,

notamment les parties : si A considère que le K est entre A et la corporation, alors que O considère que le K est entre A et O, il n’y a pas d’accord.

- Partant, avant la date d’incorporation, s’il doit y avoir un K, ce doit être entre A et O (qui sont donc chacun personnellement responsables) et cela doit être clair dans l’entente – le représentant agissant pour et au nom de la SPA pourrait normalement être lié, à moins d’avoir exprimé la volonté contraire.

Kelner v Baxter (1866) – UK, CP

Faits : B gère un hôtel et K vend du vin; B veut s’incorporer mais avant la date de l’incorporation, B signe un contrat de distribution au nom de la corporation. B est devenu insolvable et K poursuit B.Question : Est-ce que B est personnellement responsable ?Décision : oui.Analyse :

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Puisque B avait utilisé les mots « proposée » avant la désignation de sa corporation, la question est de savoir si le contrat est frappé d’ambiguïté et empêche B d’y être lié. Il doit y avoir 2 parties à un contrat, et les droits et obligations créés par ce biais ne peuvent pas être transférés à un tiers qui n’était pas en condition d’être lié au moment où le contrat fut signé. Or, il était clair pour les deux parties au contrat que l’incorporation allait être soutenue; le paiement n’était pas conditionnel à ce que la corporation soit fondée à une date postérieure. Partant, puisque B n’avait pas d’agent qui aurait autrement pu être lié par ce contrat, B est personnellement responsable. Si la compagnie ne devait pas être formée, il était raisonnable pour K de croire que c’est B qui paierait. On doit présumer que les parties au contrat croyaient que les signataires seraient personnellement responsables.Compte tenu du libellé du contrat et dans le contexte particulier de cette affaire, puisque le signataire s’est engagé en tant qu’agent en sachant que son principal n’existait pas, il est considéré comme ayant voulu s’engager personnellement.Ratio : Lorsqu’une partie agit en son nom, mais agit comme l’agent d’une autre personne, elle peut être tenue responsable d’un bris de contrat.NB : les droits ainsi créés ne sont pas transférables à la SPA : il faudrait un nouveau contrat pour ce faire.

2 courants de pensée :

- Lorsque le tiers et l’agent savent tous les deux que la société est en gestation, il y a une présomption que l’agent a voulu s’engager personnellement; ou

- Welling est plus prudent : à chaque fois, l’agent n’accepte pas forcément et il faut donc montrer qu’il y avait volonté de se lier- ce qu’il dit que la Cour fait en regardant les circonstances du contrat.

Black v Smallwood (1966) – Australia, HC

Faits : S et al croyaient que leur corporation était incorporée et ont acheté un terrain au nom de la compagnie, en tant qu’administrateurs de la compagnie. La compagnie n’avait en fait pas été incorporée. Question : est-ce que les personnes contractant (de bonne foi) à titre d’administrateurs d’une compagnie non-incorporée sont individuellement responsables des obligations contractées?Décision : Non.Analyse : La différence avec Kelner v. Baxter était que B n’avait pas conclu l’entente en tant qu’administrateur. Or, dans le cas en dispute, S agissait à titre d’agent. La distinction doit être faite entre un acte fait par une personne en son nom et un acte fait par un autre en son nom. Même si la distinction n’est pas satisfaisante dans le cas d’une entité corporative, il faut néanmoins préserver la fiction. Le document signé par S ne se voulait pas être un contrat signé par S en tant qu’agent (un acte fait par un autre au nom de la compagnie), mais en tant qu’administrateur (un acte fait par une personne en son propre nom). S n’avait pas l’intention de se lier personnellement.Ratio : On ne peut être tenu responsable personnellement lorsqu’on contracte pour la société qu’on croit existante.

« Non seulement A n’est pas responsable contractuellement lorsque A et O se sont mépris sur l’existence de la corporation, mais A n’a pas de droit à la réalisation de l’obligation contractée » – Newborne v. Sensolid (Great Britain) Ltd (1954) – UK, CA.

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2. Tentatives de réformes législativesAux pp 293 et s.

Deux tentatives de réforme :

- Imposer une responsabilité contractuelle à A lorsqu’il n’y a pas de contrat valide en droit ;

- Permettre à une corporation d’adopter des transactions précédant l’incorporation, en faisant de la corporation une partie au contrat, ce qui permet d’excuser A.

- Pratiquement, la loi vient créer un contrat juridiquement inexistant, ce qui n’est pas sans poser des questions d’ordre constitutionnel, notamment pour la LCSA.

- Cet article permet aussi, par l’insertion d’une clause clairement à cet effet, de mettre le signataire du contrat préconstitutif à l’abri de toute responsabilité : il faut cependant que la clause soit claire.

- Ici, le terme de contrat désigne plutôt transaction ; nouvelle définition statutaire (qui ne désigne pas le contrat de CML ni de CVL, puisqu’il y a un cocontractant inexistant…).

Szecket v Huang (1998) – CA, Ont

Faits : H propose à S de mettre en marché une technologie élaborée par S. L’accord signé impliquait S, en son nom, et H, agissant au nom de la compagnie à être incorporée. La transaction n’a jamais été complétée. S poursuit pour bris de contrat et H nie pouvoir être tenu responsable.Question : Est-ce que H peut être tenu individuellement responsable ?Analyse :La preuve montre que H croyait et avait pour intention de contracter au nom de la compagnie à incorporer. Lorsqu’une corporation n’est pas incorporée et que le contrat n’est pas performé, la responsabilité pour violation de l’accord de pré-incorporation dépend de l’application de l’art 21 OBCA (Ontario) qui a remplacé le droit commun . On parle d’un contrat de fait législatif. Le droit commun devait déterminer si les parties avaient eu l’intention d’engager la responsabilité individuelle de H (dans un contrat au sens traditionnel du terme), mais cela n’est plus nécessaire avec les nouvelles dispositions législatives.Ratio : art 21 OBCA (voir art 14 LCSA) – en cas de défaut de constituer une SPA, la responsabilité personnelle de l’agent sera retenue.

1294918 Ontario Ltd v 1310210 Ontario Inc (2002) – CA, Ont

Le schème législatif remplaçant le droit commun relativement aux contrats préconstitutifs clarifie la confusion qui existait en CML. La Cour accepte que l’art 21 OBCA permette que soit mise de côté l’exigence d’avoir 2 parties à un contrat : on crée une sorte de « contrat de par l’effet de la loi » et on met de côté la définition légale traditionnelle du mot « contrat ».La Cour explique aussi l’effet d’une clause excluant clairement la responsabilité du signataire : elle accepte ici que la clause libère le signataire par les mots « [signataire] in trust for a company to be incorporated and not in his personnal capacity »

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3. CVL

- La position traditionnelle de CVL est semblable à celle de CML : pas possible de passer un K avec une partie qui n’existe pas et il est impossible de devenir partie à un K qui existe déjà;

- Art 319-320 CcQ- Cependant, les articles pertinents du CcQ s’appliquent à tout contrat (écrit ou

verbal) contrairement à ce qui est prévu dans la LCSA (seulement écrit);- Aussi, le CcQ ne prévoit pas spécifiquement la libération du promoteur en cas de

ratification (lorsque la société qui vient à exister devient la partie au contrat – contrat de fait législatif); Par contre, la décision Société sylvicole de l’Outaouais c. Rasmussen (2005) – CA, QC a déclaré que la ratification permettait la substitution de débiteurs, tout en préservant le contrat initial.

- Art 319 CcQ : la personne morale peut ratifier l’acte accompli pour elle avant sa constitution; elle est alors substituée à la personne qui a agi pour elle.

- La ratification n’opère pas novation; la personne qui a agi a, dès lors, les mêmes droits et est soumise aux mêmes obligations qu’un mandataire à l’égard de la personne morale.

IV. Régimes de responsabilité de la sociétéA. Deux théoriesTrois angles de la responsabilité :

- Personnelle (par le biais de la responsabilité extra-contractuelle ou contractuelle);

- En agissant au nom de quelqu’un d’autre (mandataire) : o Si l’agent agit conformément à son mandat, le principal est lié

(consensuel);o Si l’agent commet une faute dans l’exercice de ses fonctions d’agent (en

dehors de son mandat), Le principal peut être responsable du fait d’autrui (non-

consensuel); 2 conditions : 1/ relation employeur-employé (SPA & fautif) ; 2/ la

faute est commise dans l’exécution des fonctions.

Deux théories de la responsabilité :

- Identification du cerveau opérant dans les circonstances de la faute : le cerveau opérant est identifié à celui de la corporation et la corporation est tenue responsable (corporate mind).

- Les individus agissent comme des agents corporatifs qui sont responsables dans certaines circonstances (agency)

B. Crime et responsabilité extra-contractuelleAux pp 228 et s.

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- Par le mécanisme de la responsabilité du fait d’autrui dans le domaine de la responsabilité extra-contractuelle, il est moins crucial d’examiner l’activité corporative comme telle;

- Mais dans les situations où la responsabilité du fait d’autrui ne s’appliquent pas (comme c’est le cas pour la responsabilité criminelle), on ne peut passer à côté de l’analyse comportementale de l’activité corporative, surtout s’il faut établir la mens rea (état d’esprit coupable ayant fait agir la SPA).

i. Le test de CMLEnjeu: établir que l’esprit criminel d’un individu peut être identifié à l’esprit corporatif dans ces circonstances.

The «   Rhone   » v The «   Peter A.B. Widener   » (1993) – CSC, Ont.

Faits: le navire PABW a percuté le R et causé des pertes, alors sous les commandes du capitaine K, employé par la corporation Great Lakes Towing Co. GLT veut limiter sa responsabilité en invoquant une disposition législative qui établit que le propriétaire du navire peut limiter sa responsabilité si le dommage fut causé sans la faute du propriétaire.Question : Est-ce que la faute de K peut être identifié à la personne de GLT?Décision : Non.Analyse :La faute personnelle se distingue de la responsabilité du fait d’autrui : la dernière désigne la faute de quelqu’un qui rend la compagnie responsable du fait que ses actions sont les actions mêmes de la compagnie. Dans le cas d’une corporation, il faut déterminer si les actes d’un individu particulier dont la responsabilité est en cause devraient être attribués à la corporation. L’intention de la corporation peut être dérivée de ses administrateurs et agents, dépendamment de la nature de la situation et de l’enjeu en considération, de même que leur position relative dans la corporation. Sous la théorie de l’identité, la corporation peut avoir plus d’un esprit directeur. Le focus de l’enquête doit donc déterminer si l’individu en cause s’était vu déléguer l’autorité exécutive gouvernante de la compagnie dans le cadre de ses fonctions. La cour doit déterminer qui possédait le pouvoir de décider dans la sphère pertinente à la situation en cause dans le cadre des activités corporatives. Bien que la négligence d’un capitaine ne constitue pas une faute propre au propriétaire du navire, il est maintenant établi que la corporation conserve une part de la responsabilité dans la supervision de ses employés. Il faut alors déterminer si le propriétaire a agi comme un propriétaire raisonnable dans la gestion et le contrôle de ses opérations maritimes. Or, la question en cause ici n’est pas de savoir si GLT a brisé son devoir de supervision, mais plutôt de savoir si les fautes du capitaine peuvent être identifiées à la personne de GLT, du fait de sa position dans la hiérarchie corporative de GLT. Est-ce que la personne ayant commis la faute déterminait les grandes orientations de la SPA dans ce secteur particulier ou si elle se contentait de les appliquer ? Or, en considérant les pouvoirs et les fonctions du capitaine, il est évident qu’il n’était pas un esprit directeur de la compagnie. Bien qu’il s’était vu déléguer certaines fonctions, les fonctions qu’il occupait n’était pas suffisante pour en faire un esprit directeur de la compagnie. Ratio : Pour que les actes d’une personne soient identifiés à ceux de l’entreprise, il faut que la personne soit un esprit gouvernant ou directeur de la corporation.Il faut

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que la SPA ait commis personnellement un acte répréhensible dans la situation.NB : cette décision, bien que relevant du tort, applique le concept de mens rea au directing mind and will de la société puisque la loi a mis de côté la responsabilité pour le fait d’autrui.« the key factor which distinguishes directing minds from normal employees is the capacity to exercise decision-making authority on matters of corporate policy, rather than merely to give effect to such policy on an operational basis ».Dans Tesco Supermarkets v Nattrass [1972] HL, un gérant n’est pas une âme dirigeante. À contrario, R v Canadian Dredge and Dock Ltd [1985] CSC, la notion d’âme dirigeante y est plus flexible : il peut y avoir plus d’un cerveaux au sein de la SPA chacun couvrant un secteur particulier.

ii. Responsabilité criminelle : infraction avec mens reaAux pp 234 et s.

- Dans une décision de la CSC, la Cour a établi que l’esprit directeur de la compagnie n’était pas limité à ceux qui sont les plus haut-placés dans la hiérarchie corporative. Il faut déterminer qui avait le pouvoir décisionnel dans une instance particulière.

- Théorie de l’identité : il y a mens rea corporative si la personne qui a commis l’acte est possède la mens rea ‘est’ la SPA.

- Il n’est pas nécessaire que l’acte ait été posé dans le cours des fonctions, mais seulement qu’il se soit produit à l’intérieur des pouvoirs généraux confiés à la personne, ce qui peut inclure des actes prohibés (voir R v Waterloo Mercury Sales Ltd [1974] Alb). Il cependant nécessaire que l’acte profite au moins partiellement à la SPA pour retenir sa responsabilité (R v. Canadian Dredge and Dock Ltd [1985] SCR)

iii. Responsabilité criminelle : infraction sans mens reaPour faire une due diligence defence le défendeur aura le fardeau de prouver qu’il ou elle n’a pas été négligent. Dans le cas d’une SPA, il faudra faire la démonstration que l’âme dirigeante de la SPA et dont les actes sont ceux de la SPA elle-même (directing mind and will) n’a pas été négligente.

R v Fitzpatrick’s Fuel Ltd (2000) – CS, NF

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Faits: FF possédait une licence pour vendre de l’alcool. FF est chargé de vente à un mineur. Patrick Fitzgerald est le seul actionnaire, directeur et administrateur. Il avait 2 employés travaillant souvent sans supervision.Question : Est-ce que FF peut être considérée comme fautive ?Décision : Oui.Analyse :Est-ce que FF peut être considérée coupable malgré la diligence de son seul administrateur ? La Couronne allègue que oui, en fondant son analyse sur la théorie de l’identification. La doctrine de l’identification fusionne le CA, l’administrateur gestionnaire, le surintendant, le gestionnaire ou quiconque s’est vu déléguer l’autorité exécutive gouvernante de la corporation afin que la conduite d’un de ses composantes soit attribuée à la corporation. Ici, (1) l’employé opérait dans la sphère des activités qui lui était assignée; (2) il ne le faisait pas en fraude de la corporation; et (3) ses actions ont résulté au moins en partie en un bénéfice de la compagnie. Même si on pousse le concept d’esprit directeur un peu loin, l’employé était tout de même responsable de l’activité qui a conduit au crime. Même s’il peut être douteux de retenir la responsabilité de la compagnie qui a été autrement diligente et ne pouvait pas vraiment en faire davantage, il s’agit du risque des affaires et la corporation est responsable de ses employés et doit les choisir avec soin.Ratio : NB : le régime applicable est celui de la responsabilité stricte : il ne faut prouver que l’actus reus.NB2 : S’écarte de The Rhone, où le test de l’âme dirigeante impliquait que la personne responsable devait avoir une autorité gouvernante sur les affaires et opérations de la corporation. Fitzpatrick ne retient pas le test ici. Cela dit, puisqu’il n’y avait pas de mens rea à prouver, il est immatériel de déterminer si la SPA avait une intention répréhensible et, conséquemment, si l’employé est identifiable à la SPA.

Solution législative

Le Code criminel est venu élargir la notion de directing mind and will de la common law en spécifiant la définition à donner à « cadre supérieur » qui est plus large que celle de common law: en effet, on inclut dorénavant non seulement la personne élaborant les grandes orientation de la SPA, mais aussi celles en charge de les appliquer.

D’autre part, le libellé de la loi permet de tenir un cadre responsable même s’il n’a pas commis l’acte, à condition qu’il possède le bon état d’esprit (négligence ou intention) : en common law, il était parfois difficile de faire la démonstration d’un état d’esprit négligent chez une seule personne au sein de la SPA.

Enfin, la loi envisage la possibilité d’un acte commis à plusieurs.

Art 2 CC: « agent » - s’agissant d’une organisation, tout administrateur, associé, employé, membre, mandataire ou entrepreneur de celle-ci« cadre supérieur » - agent jouant un rôle important dans l’élaboration des orientations de l’organisation visée ou assurant la gestion d’un important domaine d’activités de celle-ci, y compris, dans le cas d’une personne morale, l’administrateur, le premier dirigeant, ou le directeur financier.

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Art 22.2 CC : S’agissant d’une infraction dont la poursuite exige la preuve d’un élément moral autre que la négligence, toute organisation est conisdérée comme y ayant participé lorsque, avec l’intention, même partielle, de lui en faire tirer parti, l’un de ses cadres supérieurs, selon le cas

a. Participe à l’infraction dans le cadres de ses fonctions ;b. Étant dans l’état d’esprit requis par la définition de l’infraction, fait en sorte, dans le cadre

de ses attributions, qu’un agent de l’organisation accomplisse le fait – action/omission – constituant l’élément matériel de l’infraction ;

c. Sachant qu’un tel agent participe à l’infraction omet de prendre les mesures voulues pour l’en empêcher.

iv. CVL Le droit civil n’est pas vraiment concerné par le droit criminel ou administratif.

Ainsi, pour ce qui est de l’application de la responsabilité criminelle à la SPA, il semble que l’on trouve appui sur la jurisprudence de common law.

Autrement, la responsabilité en matière extra contractuelle se fonde sur 1457 CcQ : dans la mesure où une faute extracontractuelle est commise, une faute simple suffit à retenir la responsabilité de la société ; au niveau des administrateurs ou dirigeants de la SPA, ils seront tenus responsables du moment qu’ils ont participé à la faute (voir supra).

C. La responsabilité contractuelle de la SPA vis-à-vis des tiersWelling, 243 et s.

La société peut présenter des limites par rapport à sa capacité de contracter. Ces limites peuvent émaner :

o De la loi,o Des statuts (ou autres documents constitutifs).

Le fait de ne pas avoir, selon les statuts, la capacité de poser certains gestes ne signifie pas qu’il est forcément impossible de les poser.

i. Limites émanant des statuts constitutifs Il existe deux approches au Canada, selon le type de société créée :

o Celle de Bonanza Creek Gold Mining Co. v The King [1916] – Ont, où les sociétés de common law (par lettres patentes, à charte) se voient attribuer les pouvoirs normalement possédés par les personnes naturelles: ces SPA peuvent poser des actes en dehors des objets de la SPA sans que ces actes ne deviennent invalides même si des actions peuvent être entreprises à cet égard; la seule limite est celle imposée par une restriction dans la loi même (statutory restriction).

o Celle de Ashbury Railway Carriages & Iron Co. v Riche [1875], qui est à l’effet que les sociétés de type anglais (contractuelle, par mémoire de conventions) n’ont que les pouvoirs qui leurs sont accordés par la loi ou par leurs statuts; pour ces sociétés, un acte en dehors des objets est donc invalide (ultra vires), ce qui vient annuler le contrat passé en contravention des statuts. Avant l’abolitation de la doctrine des pouvoirs ultra vires, il est à noter que la conclusion d’Ashbury a été celle retenue pour les sociétés créées par statuts constitutifs, soit les sociétés que nous connaissons.

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o La doctrine des compétences ultra vires fut légalement abolie pour les corporations créées sous la Loi des sociétés par actions dans la plupart des juridictions canadiennes

Communities Economic Development Fund v Canadian Pickles Corp (1991) – Manitoba, SCC

La SPA agissant comme prêteuse est une société statutaire, donc créée par loi spéciale, qui ne possède, en common law, que les droits qu’on lui a conféré soit de par la loi, soit de par ses statuts.Cela étant, dans la loi spéciale, on a voulu lui donner les pouvoirs d’une société de common law (par lettres patentes, à charte) c’est-à-dire, les pouvoirs d’une personne naturelle, ce qui est spécifié.Par ailleurs, la loi générale sur les sociétés par actions du Manitoba s’appliquait à cette société et prévoyait la même présomption que celle de l’art15 LCSA.Par contre, on précisait, dans la loi spéciale, qu’aucun prêt contraire aux objets prévus par la loi ne devait être fait. Sachant que la loi spéciale avait préséance sur la loi générale en cas de conflit, on a finalement invalidé le prêt (et la caution). Malgré une tendance générale vers l’abolition de la doctrine des compétences ultra vires, la Cour considère le cas particulier de l’appel, à savoir une corporation créée par loi spéciale dans l’intérêt public. Ici, la doctrine est nécessaire pour protéger l’intérêt public et que les corporations créées par cette loi ne devraient pas pouvoir agir en dehors du mandat qui leur a été donné. Un acte ultra vires est un acte impossible à accomplir pour la SPA, qui est donc nul et non avenu.Ratio : une activité de la SPA qui va au-delà de ses compétences est nulle et non avenue et ne la lie pas.

Art 15 LCSA : (1) La société a, sous réserve des autres dispositions de la présente loi, la capacité d’une personne physique et les droits, pouvoirs et privilèges de celle-ci. (2) La société peut exercer ses activités commerciales partout au Canada.

1. Constructive notice Parallèlement à la notion d’acte ultra vires, on a développé la notion de

constructive notice, laquelle est à l’effet que les documents publics sont présumés connus des tiers

Dans cette mesure, on vient interdire au tiers (par le mécanisme de l’estoppel), de nier sa connaissance du contenu de documents publics, ce qui inclut les statuts constitutifs et les mémoires de convention.

Un dérivé de la règle de constructive notice est la règle de l’indoor management. En vertu de cette règle, on ne peut appliquer la règle de l’ estoppel au contenu des règlements internes.

Pour autant, parfois, les statuts feront référence à ces règlements ou politiques internes. Dans ces cas :

o On parlera soit de conditional permission   : sans effet sur les tiers.o Ou de conditional prohibition   : sans effet sur les tiers, mais on y

mentionne que le tiers doit prendre connaissance des règlements internes

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Voir Royal British Bank v. Turquand, (1856) UK et Alma Fur Trading Co. Re: Bank of US v. Ross, [1932] SCC.

Re Jon Beauforte (London) Ltd. (1953) – UK

Une SPA avait été constituée en ayant comme objet la confection de vêtements féminins et avait éventuellement changé d’orientation (la SPA fabriquait des panneaux en bois).Cette nouvelle orientation ne figurait pas dans les statuts, mais était indiquée sur la papeterie de la SPA : on a considéré que dans la mesure où le tiers savait que le produit fourni l’était aux fins d’un objet ultra-vires, le contrat passé pour cette SPA était nul.La Cour semble laisser supposer que la conclusion aurait pu être différente si le tiers n’avait pas connu l’usage du bien vendu.

La solution de la LCSA : voir arts 15–18 LCSA et 12 à 15 LSAQ

Les problèmes malgré la LCSA

Le problème du partage des compétences au niveau constitutionnel fait parfois surface dans les cas où l’autorité législative n’est pas compétente pour conférer certaines capacités à la SPA.

Pour autant, cette question n’a pas fait l’objet de grands débats : Alberta Government Telephones v CRTC [1989] SCC.

D. La responsabilité contractuelle de la SPA   : le rôle des agents Welling, aux pp 253 et s

1. La notion d’actual authority (pouvoir réel) On analyse la responsabilité contractuelle de la société au travers du prisme des

principes de l’agency. Actual authority signifie le mandat, les pouvoirs accordés à l’agent par le

principal. Voir dans Freeman and Lockyer (a Firm) v. Buckhurst Park Properties (Mangal) Ltd. (1964) – UK :

o « An actual authority is the legal relationship between principal and agent to which they alone are parties. Its scope is to be ascertained by applying ordinary principles of construction of contracts »

Un tel contrat peut aussi résulter d’une ratification, dans les cas où l’agent a outrepassé ses pouvoirs et où l’on reconnaît rétroactivement un mandat à l’agent. On peut aussi donner plus de pouvoirs à l’agent par interprétation contractuelle ou par une analyse factuelle.

La SPA peut aussi limiter les pouvoirs de l’agent :o En prévoyant des limites à la capacité de la SPA dans ses statuts ou

dans la loi (voir supra  : on est dans le domaine de l’ultra-vires);

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o En prévoyant des limites aux pouvoirs des agents dans les statuts (voir supra  : on peut se trouver dans le domaine du constructive notice);

o En prévoyant des limites contractuelles aux pouvoirs des agents : dans ce cas, les tiers ne sont pas concernés.

En common law, le fardeau de preuve des cocontractants de la SPA a été facilité par la notion de « ostensible authority   » (voir infra).

La question de l’autorité réelle de l’agent tournera autour de la détermination de savoir si la SPA avait bel et bien autorisé l’agent à agir pour elle : si l’agent avait l’actual authority.

L’autorité peut résulter d’une de trois situations :o Soit d’une autorisation expresseo Soit d’une autorisation impliciteo Soit rétroactivement, par ratification (il ne doit pas y avoir un undisclosed

principal) ou par adoption. Si le tiers réussit à démontrer une « actual authority » de la part de l’agent, alors

ce pour quoi celui-ci aura contracté liera la SPA (et non l’agent).

2. La notion d’ostensible authority (pouvoirs apparents) La règle de l’ostensible authority (des pouvoirs apparents) a été consolidée dans

la décision Freeman and Lockyer (a Firm) v Buckhurst Park Properties (Mangal) Ltd. (1964) UK.

Pour la doctrine, il s’agit d’une règle de preuve, laquelle empêchera la SPA de prouver qu’il n’y avait pas de relation d’agence (par le mécanisme de l’estoppel).

Dans cette décision, on a déclaré que la question fondamentale dans un cas impliquant une relation d’agency était de déterminer quels pouvoirs pouvaient être attribués à l’agent par le tiers en vertu de la loi :

o « An “apparent” or “ostensible” authority […] is a legal relationship between the principal and the contractor created by a representation, made by the principal to the contractor, intended to be and in fact acted upon by the contractor, that the agent has authority to enter on behalf of the principal into a contract of a kind within the scope of the «apparent» authority, so as to render the principal liable to perform any obligations imposed upon him by such contract. […] The representation, when acted on by the contractor by entering into a contract with the agent, operates as an estoppel, preventing the principal from asserting that he is not bound by the contract. It is irrelevant whether the agent had actual authority to enter into the contract.».

Pour résumer, la notion d’ostensible authority doit prendre appui sur 4 éléments :o «une représentation faite au cocontractant selon laquelle l’agent avait

l’autorité de contracter au nom du principal »;o que cette représentation a été faite par une personne avec un pouvoir

réel ;o le cocontractant s’est fondé sur cette représentation pour accepter le

contrat;

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o les statuts de la SPA (constructive notice & ultra vires) n’empêchait pas la SPA de contracter ce genre d’obligations ou de déléguer un pouvoir à un agent.

Def/mandat/ le mandat désigne la relation entre deux personnes dont l’une, l’agent, est considérée en droit comme la représentante de l’autre, le principal, de manière à pouvoir modifier la situation juridique du principal vis-à-vis des tiers.

Schwartz v Maritime Life Assurance Co. (1997) – IPE – CA

Cette décision traite de la notion d’ostensible authority.Un certain M. Rideout, contrôlant la SPA George Rideout and Associates Ltd (GRA), s’est présenté comme agent de la Maritime Life Assurance Co (MLA) Co. à un M. Schwartz qui lui a confié des fonds à investir dans la MLA.GRA et MLA avaient préalablement conclu, en 1971, un « General Agency Agreement », avec Rideout comme sous-agent; il ne s’agissait pas d’un contrat exclusif.Le premier investissement (Triflex) a eu lieu en 1979. En 1984, un second investissement a été suggéré et les fonds ont été avancés par chèque à GRA.La police a cependant mis du temps à être livrée à M. Schwartz, de nombreuses excuses ont été fournies, et finalement, un document comportant de nombreuses incohérences a été fourni à Schwartz vers 1984-85.À partir de mi-1986, Schwartz commence à douter de Rideout/GRA et demande à ses comptables de vérifier l’état de ses investissements auprès de MLA : on lui répond que la somme de 1984 n’a pas été remise à MLA et que la police soumise n’avait pas été émise à Schwartz mais à quelqu’un d’autre.En première instance, on affirme que Schwartz et GRA sont liés comme agent/principal. Par contre, le tribunal est d’avis qu’à la lecture du contrat liant GRA et MLA, il appert que GRA n’avait pas d’« actual authority », ni d’« ostensible authority », puisque MLA n’a jamais fait de représentations à cet effet, le contact de Schwartz étant Rideout.Parmi les arguments présentés à la Cour d’appel, Schwartz allègue que

• Vers la mi 1970, Rideout était d’abord un employé puis un agent de MLA, ce qui constitue une forme de représentation vis-à-vis des tiers ;

• Rideout a toujours détenu une apparent authority vis-à-vis des tiers agissant à l’intérieur de cette autorité apparente.

Pour la Cour, l’existence d’une relation d’agence dépend des pouvoirs réellement conférés par le principal, mais aussi des circonstances qui entourent leur relation.Le contrat d’agence peut en effet être mis en place formellement, mais aussi par inférence des faits (on parle alors d’agency by estoppel), laquelle doit s’inférer de la conduite du principal).La Cour commence par préciser que les relations entre GRA et MLA ont été gouvernées d’abord par contrat:

– Deux contrats d’emploi, en 1976 et 1978;– Des contrats d’agence à partir de 1978, reconduit en 1983.

Aucun de ces contrats n’autorisait Rideout/GRA à vendre des polices d’assurance-vie (MLA devait les approuver avant qu’ils ne prennent effet), ce qui laisse supposer que Rideout/GRA ne disposait que des pouvoirs restreints.Il ne peut donc être question d’actual authority dans ce contexte.Il reste possible pour Schwartz de faire la démonstration que les gestes du principal

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(MLA) permettaient de lui laisser croire que Rideout/GRA possédait effectivement cette autorité, malgré les termes clairs du contrat d’agence.Pour la Cour, la première question à se poser est celle de déterminer si Rideout/GRA a déjà laissé entendre qu’il pouvait lier MLA: pour les deux instances, Rideout/GRA se présentait strictement comme courtier en investissements et les polices étaient acheminées directement aux investisseurs, ce qui permet à la Cour de déterminer que MLA n’a pas pu laisser croire que Rideout/GRA agissait comme son agent par rapport aux transactions sous étude sauf une :

– Celle de 1978, où à la suite de l’investissement de 100 000 $ de Schwartz, un reçu avait été émis sur du papier à lettre de MLA: pour la Cour, ceci permet de faire présumer à Schwartz qu’il y a effectivement un lien d’agence entre Rideout/GRA et MLA en 1979-80;

– Pour la Cour, ce statut de 1978-80 est suffisant pour avoir permis à Schwartz de penser que Rideout/GRA était toujours l’agent de MLA, ce qui lui donne l’ostensible authority: en effet, personne ne l’a jamais informé du changement et comme en 1979, on aurait fait jouer l’estoppel contre MLA par rapport au contrat d’agence, il était encore possible de le faire en 1984.

La dissidence pose la question différemment: elle tente de déterminer pour qui Rideout agissait lorsqu’il détenait l’argent à investir. Pour la dissidence, l’argent était détenu par Rideout au nom de Schwartz dans le but de se procurer une police d’assurance: c’est donc Schwartz qui avait des droits sur cet argent tant que celui-ci n’était pas investi chez MLA, c’est donc Schwartz, en tant que propriétaire des fonds, qui doit en subir la perte.La dissidence discute ensuite de la notion d’ostensible principal par rapport à la création d’une apparent authority: dans la mesure où Schwartz avait retenu les services des GRA/Rideout afin de négocier à son compte, il ne pouvait pas penser que GRA/Rideout était l’agent de MLA.

Canadian Laboratory Supplies v Engelhard Industries of Canada Ltd (1979) – SCC

Dans cette décision, une conversation avec un autre représentant de la SPA (un employé qui est aussi le purchasing agent de la SPA, Snook) indique au tiers que la personne responsable de certains achats est Cook (qui n’est que vendeur, pas acheteur), ce qui vient créer, selon la Cour, un ostensible authority.Dans cette affaire, on met de l’avant une règle applicable en droit des sociétés, celle de l’indoor management rule; cette règle est à l’effet que les tiers ne sont pas «tenus» de connaître les procédures internes de la SPA. Cette règle est supposée mettre un frein à l’application de la théorie du constructive notice, mais ne semble pas facile à appliquer… Par ailleurs, cette décision s’appuie aussi sur ce que l’on a vu précédemment : la représentation par une personne compétente au sein de l’entreprise à l‘effet qu’un agent peut lier celle-ci empêche une preuve à l’effet contraire.Parfois, la représentation par le principal quant à l’agent peut provenir de l’agent lui-même, mais il faut des circonstances particulières.Ratio : l’indoor management rule met un frein à ce que l’on demande du plaintif en termes de connaissance ; le fait qu’une personne dans la société lui donne cette information est suffisante.

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E. La responsabilité contractuelle   : le CcQ et la notion d’ apparent authority

• Art 2163 CcQ : Celui qui a laissé croire qu'une personne était son mandataire est tenu, comme s'il y avait eu mandat, envers le tiers qui a contracté de bonne foi avec celle-ci, à moins qu'il n'ait pris des mesures appropriées pour prévenir l'erreur dans des circonstances qui la rendaient prévisible.

V. Gouvernance de la SPAA. Concepts fondamentaux et enjeuxWelling, aux pp 303 et s.

- Les sociétés sont gouvernées par le CA (sauf convention à l’effet contraire) ;- La plupart des CA délèguent certains de leurs pouvoirs à des dirigeants ;- Fractionnement de l’actionnariat et diversification des portefeuilles actionnaires

moins impliqués dans les affaires de la SPA – C&R, 311- En CML, on a eu plutôt tendance à mettre l’accent sur le rôle du CA et laisser les

dirigeants dans l’ombre ; cette approche est discutable compte tenu de l’importance que peuvent avoir les dirigeants, particulièrement dans les SPA d’envergure ; il faut alors que le CA redouble de vigilance

o Pensons aussi à Salomon ; CA – 1 dirigeant, qui est aussi le seul actionnaire. Le cas d’une société unipersonnelle.

o On applique alors le régime de responsabilité propre à son titre (si le contexte le fait agir en tant qu’actionnaire ou dirigeant) ;

o Rapport Dickerson : on exige plus de prudence et de diligence de la part des administrateurs quant à la surveillance des dirigeants (on laisse de côté un peu l’idée que la responsabilité serait proportionnelle au degré d’implication de l’administrateur).

- La LSAQ renvoie au CcQ quant au régime des dirigeants et administrateurs, leur conférant le statut de mandataire de la SPA (art 327, 328 CcQ);

- Au niveau sémantique, il sera parfois difficile de définir les personnes faisant partie du management  : le contexte devra servir de guide.

- Les dirigeants jouent un rôle central, mais sont négligés sur le plan législatif : leur statut d’employé de la SPA vient expliquer ce fait.

o Le contrat est donc souvent plus révélateur sur leur rôle que la loi ;- D’autre part, il n’est pas obligatoire que la SPA possède des dirigeants, mais il

est (presque toujours) nécessaire de posséder au moins un administrateur.- En outre, dans la mesure où un administrateur peut aussi agir comme dirigeant,

les risques de confusion sont plus nombreux.- Pour Berle et Means, il y a séparation entre les droits de propriété et les pouvoirs

au sein des SPA, ce qui peut générer des problèmes. En effet, ces auteurs ont identifié trois fonctions nécessaires à la poursuite d’activités économiques :

o Détenir/posséder/contrôler les biens nécessaires à l’exploitation de l’entreprise

o Exercer des pouvoirs de gestion relativement à l’exploitation de l’entreprise

o Agir pour et au nom de l’entreprise

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- Si autrefois ces différents rôles étaient endossés par une seule et même personne, ou une famille, la SPA moderne cloisonne ces différentes fonctions, parfois au détriment d’incitatifs économiques

- L’extrait de l’article se trouvant dans le manuel met au rancart les idées traditionnelles sur le rôle du CA, notamment :

o Celui d’établir des lignes directrices, des stratégies commerciales et des politiques

o Celui de poser des questions précises aux membres de la direction quant aux orientations et aux choix faits, d’agir comme superviseur

o Celui de choisir la présidente du CA.- Les années suivant Berle et Means ainsi que Mace ont vu l’émergence de deux

phénomènes, l’un de fusions/acquisitions et l’autre, d’investisseurs institutionnels ( institutional shareholders ) ce qui est venu changer la donne en générant d’autres incitatifs. (Mace, 304 et s).

o Impose un certain critère de performance au CA des SPA;o Une SPA qui possède un CA et qui est un émetteur assujetti (actions

cotées en bourse), qui serait mal gérée, ses actions vont diminuer. Beaucoup d’actionnaires vont vouloir vendre leurs actions, plus la valeur de l’action va baisser. Dans ces cas, les risques que le CA soit remplacé sont plus grands, puisqu’un acheteur potentiel pourrait reprendre toutes les actions et décider de reprendre la SPA en main en remplaçant le CA.

o Un dialogue se crée entre les actionnaires et le CA, ce qui fait qu’il y a un surveillant de plus. Le CA surveille les dirigeants, mais les actionnaires surveillent le CA (C&R, 324-326). Dans la mesure où les actionnaires jouent un rôle plus actif en ayant le pouvoir de vendre leurs actions, on vient générer des incitatifs supplémentaires pour rendre la gestion de la SPA plus efficace, venant ainsi un peu contrer les critiques de Berle et Means.

- Les constituantes, dans leur rôle d’agent/mandataire seront vraisemblablement affectées de coûts d’agence (les administrateurs/dirigeants agissant comme agents des actionnaires), concept utilisé en analyse économique du droit, qui ne se préoccupe pas des implications légales de cette dénomination (C&R, 317)

- Les coûts d’agences peuvent être limités/contrôlés par la loi, par des mécanismes du marché (marché de l’emploi, marché des capitaux…) et par des « directives » (par ex. de l’OCDE, des Bourses…) permettant plus de souplesse dans la gestion des risques.

- Suite à de nombreux scandales financiers aux É-U, on a adopté des règles contraignantes (SOX, par exemple), et l’exemple américain a été (partiellement) suivi au Canada.

o Obligation de mentionner si on ne suit pas certaines directives et fournir une explication ;

- Il importe de rappeler une différence conceptuelle entre la société de droit anglais (par mémoires de convention, contractual) et celle fondée sur la division de pouvoirs : si les pouvoirs du CA sont résiduels pour la seconde, il n’en est en principe pas de même pour la première (les pouvoirs sont conférés par l’assemblée des actionnaires et ce sont les actionnaires qui ont les pouvoirs

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résiduels), bien que la loi et la rédaction des statuts aient généralement fait en sorte de modifier cette situation.

- Voir cependant : Barron v. Potter, [1914] UK- Ainsi, il est devenu possible d’affirmer que les seuls pouvoirs accordés aux

actionnaires sont ceux qui l’ont été expressément, le reste revenant au CA.

1. Qualifications- Pour ce qui est des dirigeants, leurs pouvoirs sont limités par l’étendue de la

délégation du CA.- Les administrateurs se voient imposer des standards minimaux quant à leur

compétence (105 (1) LCSA, 327 CcQ ; 108 LSAQ).- Au Canada, une obligation de résidence est imposée à une partie des membres

du CA (art 105(3) LCSA).- Quant aux dirigeants, on requiert qu’ils soient pleinement capables (121 LCSA).- Que se passe-t-il si ces conditions ne sont pas respectées? On verra notamment

18 LCSA.o Vient créer des présomptions de validité des actes posés par les

administrateurs/dirigeants ;

Morris c Kanssen (1946) – UK, HL

Deux personnes prétendent qu’un administrateur a été élu au CA (composé de 2 personnes) lors d’une assemblée de celui-ci, ce qui en fait n’a jamais eu lieu. Par la suite, on émet des actions au « nouveau membre » du CA, actions qui sont ensuite utilisées afin de confirmer la nomination du nouveau membre.Le membre absent du CA conteste l’émission d’actions, et le nouveau membre affirme que les gestes posés par lui étaient néanmoins valides.Le juge fait une distinction entre :

Une nomination invalide ; et Pas de nomination.

Pour le juge, dans le second cas, la loi ne peut pas venir valider a posteriori les actes posés. Il y a eu usurpation de fonction et non simple erreur procédurale.Ratio : en situation d’usurpation de pouvoir, les présomptions légales ne s’appliquent pas.Disposition législative en cause : similaire à 116 LCSA.

Olivier v Elliott (1960) – Alberta, SC

Lors d’une assemblée du CA, on procède au remplacement de 4 membres sur 5, mais en ne respectant pas la procédure habituelle (la majorité des administrateurs n’étaient pas présents pour établir le quorum de l’assemblée). En démissionnant en bloc et en élisant en bloc, on ne pouvait pas avoir quorum de 3 membres du CA à l’assemblée. Dans cette mesure, soit les administrateurs démissionnaires ne pouvaient plus élire un nouveau CA, soit le nouveau CA était illégal parce que supérieur à la limite de 7 administrateurs permise par les documents constitutifs.La question telle que présentée par le juge est de déterminer si les administrateurs remplaçants ont été correctement élus   : nonPar contre, ils sont devenus des administrateurs de facto et ont agi comme tels: dans cette mesure, la loi vient valider leurs actes et par conséquent, la nomination de deux nouveaux administrateurs était valide . Mais ils ont été démis de leur fonction et

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l’élection doit être refaite.Ratio : le fait qu’on n’ait pas usurpé la fonction, mais qu’il y ait eu une procédure défectueuse, rend les actes posés par les administrateurs valides du fait des présomptions établies par la loi.

Art 18 LCSA :

La société ne peut opposer aux personnes qui ont traité avec elle les prétentions suivantes :

(b) les personnes nommées dans la dernière liste ou le dernier avis envoyé au directeur respectivement aux termes des arts 106–13 ne sont pas ses administrateurs ;(d) la personne qu’elle a présentée comme l’un de ses administrateurs dirigeants ou mandataires n’a pas été régulièrement nommée ou n’a pas l’autorité nécessaire pour exercer les attributions découlant normalement soit du poste, soit de l’activité commerciale de la société ;(e) un document émanant régulièrement de l’un de ses administrateurs, dirigeants ou mandataires n’est ni valable ni authentique.

Art 328 CcQ : Les actes des administrateurs ou des autres dirigeants ne peuvent être annulés pour le seul motif que ces derniers étaient inhabiles ou que leur désignation était irrégulière

Art 111 LCSA :NB : on ne peut pas procéder à une telle élection si un administrateur a été nommé par un droit relatif à une catégorie particulière d’actions.

2. Élection et nomination des administrateurs Le nombre minimal d’administrateurs dans un CA est d’un (0 au Québec), mais

pour les SPA qui ont le statut d’émetteur assujetti, ce nombre passe à 3 (102(2) LCSA  et art 106 LSAQ).

On commence par nommer le ou les administrateurs dans une liste afférente aux statuts constitutifs et ensuite, lorsque l’on a des actionnaires, ont peut procéder à l’élection du CA (106(1) LCSA et 107, 110 LSAQ).

Les actionnaires peuvent aussi avoir un rôle plus direct quant à la nomination des administrateurs: voir notamment 137(4) LCSA.

o Voir Canadian Express v Blair (supra chap. II) où la capacité à nommer directement un candidat lors de l’assemblée générale n’a pas été remise en question.

On peut aussi moduler l’exercice des droits de vote : le vote peut être par catégorie ou cumulatif.

o Vote cumulatif : permet de cumuler tous les votes en fonction du nombre d’actions détenues et donc d’allouer à un candidat plus de votes que si on votait en fonction du nombre d’actions détenus pour chaque candidat. (art 107 LCSA ; 111 LSAQ)

Les actionnaires peuvent aussi procéder à la destitution des administrateurs (109 LCSA ; 144 LSAQ): s’il s’agit d’un administrateur élu par une catégorie,

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c’est cette catégorie seule qui possède le pouvoirs de destitution. Il est possible que des problèmes surgissent dans les cas où un administrateur est aussi dirigeant au niveau de la rupture du lien d’emploi.

Shuttleworth v Cox Bros & Co, [1927] et Shindler v Northern Raincoat, [1960] ;

Arts 106–107, 124–125, 137(4) LCSA ;

Bowater Canadian Ltd. v. R.L. Crain Inc. supra, chap par rapport à Bushell v Faith.

Le salaire des administrateurs, le cas échéant (en principe non-rémunéré), est fixé par ceux-ci selon la loi (art 125 LCSA et 117 LSAQ), celui des dirigeants, par le CA aussi ;

Finalement, le CA peut bénéficier d’assurance(art 162 LSAQ) ou être indemnisé (art 124-125 LCSA ; art 159-162 LSAQ) – voir Blair v Consolidated Enfield Corp [1995] CSC.

Bennett v Bennett Environmental Inc. (2009) – Ontario, CA

Faits : BEI se voit octroyer un contrat de décontamination en juin 2003, le contrat est remis en question dès septembre pour sûr, mais BEI fait défaut d’en informer le public avant juillet 2004. Peu après cette annonce, les actions de BEI perdent 50% de leur valeur.Bennett, PDG de BEI au moment des faits, a négocié un règlement avec l’OSC, reconnaissant une faute (serious misconduct), mais liant cette faute à une croyance sincère que le contrat était malgré tout valable, croyance sincère qu’il croit appuyé par son choix de recevoir des actions de la SPA plutôt qu’un salaire et un refus de vendre ses actions malgré les conseils de son conseiller financier.Question :Est-ce que B a droit à une indemnisation en vertu de 124(1) LCSA, ce que BEI lui refuse au motif de l’application de 124(3) LCSA aux faits de l’espèce.Selon la Cour   :

• L’appréciation des faits a lieu au moment où ils sont survenus;• Le fardeau de prouver que l’administrateur ou le dirigeant n’a pas droit à

l’indemnisation incombe à la SPA qui refuse d’indemniser pour absence de bonne foi ou pas de motifs de croire en la légalité de la conduite sous étude : la bonne foi se présume;

• Test à la fois objectif et subjectif (va à l’encontre de Peoples).Art 124 LCSA

3. Nomination des dirigeants La nomination des dirigeants n’est pas encadrée par les lois en matière de SPA

(art 121 LCSA et 116 LSAQ) Pour autant, elle a fait l’objet de directives dans le rapport Dey, notamment quant

à la création de comités de nomination, d’évaluation et de formation des dirigeants.

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B. Devoirs des dirigeants et administrateurs Les principes généraux venant régir les devoirs des administrateurs et dirigeants

se trouvent dans les lois en matière de SPA et tirent leur origine de la common law et de l’equity.

En droit civil, ces principes peuvent être assimilés aux règles en matière de responsabilité contractuelle et extracontractuelle et dans la loi.

1. Le devoir de soin, de diligence et de compétence En vertu de la common law, le seuil à franchir pour remplir le devoir des

administrateurs est plutôt bas : dans In re City Equitable Fire Insurance Co. [1925] UK., le tribunal a énoncé les règles applicables:

o i) « a director need not exhibit a greater degree of skill than may reasonably be expected from a person of his knowledge and experience [devoir subjectif de compétencce, modifié aujourd’hui dans Peoples];

o ii) a director is not liable for errors in business judgment, as his primary function is to use his own particular talents in advocating corporate risk taking; and

o iii) a director is not bound to give continuous attention to the affairs of the corporation. In the absence of grounds for suspicion, he is fully justified in trusting corporate officials to be honest. Lla loi a considérablement modifié cet élément. »

Art 119, 121, 122, 123 LCSA

Soper v Canada (1997) – Fédéral, CA

Une SPA avait été déclarée faillie, mais certaines de ses déductions sur le salaire n’avaient pas été payées au Ministère du Revenu : les administrateurs encourent une responsabilité personnelle dans ce cas, sauf s’ils font la démonstration d’avoir respecté leurs devoirs de prudence et de diligence (ceux de 122 (1) b) LCSA).La CA fédérale avait mis de l’avant un standard dit objectif-subjectif dans l’évaluation des devoirs des administrateurs : l’administrateur est jugé par rapport à une personne raisonnable (standard objectif), mais dans le contexte de ses caractéristiques individuelles (standard subjectif).De plus, cela signifie que l’administrateur doit porter une attention continue à la SPA, mais il doit néanmoins agir comme le ferait une personne raisonnable, ce qui permet de rehausser le seuil dans certains cas, ou de la rabaisser dans d’autres, selon les compétences de l’administrateur. L’administrateur doit assister aux réunions du CA lorsque cela est raisonnablement possible, mais il n’est pas non plus raisonnable de s’attendre à ce qu’il assiste à chacune des réunions. Faire de son mieux ne sera pas suffisant, ni alléguer son honnêteté.Ainsi, plutôt que de traiter les administrateurs comme s’il s’agissait d’un groupe homogène de professionnels dont la conduite devrait être gouvernée selon un standard unique et fixe, on reconnaît que le standard de diligence doit prendre en compte les compétences singulières et les antécédents de l’administrateur, de même que les pratiques corporatives relatives à l’organisation, aux ressources, usages.Ratio : la norme de prudence est partiellement objective (personne raisonnable), et partiellement subjective, en ce que la personne raisonnable est définie en fonction des connaissances et de l’expérience de l’intéressé concerne les compétences et les pratiques corporatives ;

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NB : Renversé par Peoples

Peoples Department Stores v Wise (2004) SCC

Faits : Pour réaliser des économies d’échelle, les administrateurs de W et de P cimentent les opérations. Cela crée plusieurs problèmes qui mèneront en partie à la faillite des deux compagnies. La politique avait cependant établi une séparation des créances qui faisait en sorte que P absorbait une importante partie des créances de W. Ces créances n’ont pas pu être satisfaites après la faillite. Les créanciers de P se pouvoient d’un recours contre les administrateurs.Question : est-ce que les administrateurs ont un devoir de diligence envers les créditeurs de la SPA ? Un devoir fiduciaire ? Le cas échéant, a-t-il été satisfait ?Décision : Oui, non, oui.Analyse :L’art 102 (1) LCSA prévoit que les administrateurs doivent gérer et/ou superviser la gestion des affaires de la société. L’art 121 LCSA prévoit que les administrateurs peuvent nommer des directeurs et leur déléguer certains pouvoirs de gestions. L’art 122 LCSA établit les devoirs dûs par les administrateurs et les directeurs : a) devoir d’agir avec intégrité + bonne foi dans le meilleur intérêt de la société (devoir fiduciaire/loyauté) ; b) devoir d’agir avec soin, diligence et compétence (standard personne raisonnable en pareilles circonstances) (devoir de diligence) ;1. Devoir de diligencePas de recours par la LCSA pour les créanciers-> CcQ devient le droit supplétif. Les administrateurs peuvent être tenus responsables personnellement contractuellement s’ils ont garanti la créance (art 1458 CcQ) (non) ou extra-contractuellement de par leur faute personnelle (art 1457 CcQ). Dans les mots de la provision (autrui), les créanciers sont implicitement inclus. En appui, l’art 122 (1)(b) (contrairement à l’alinéa (a) qui dirige le devoir de loyauté à l’endroit de la corporation) prévoit un devoir accordé de façon libérale, sans spécifier à qui il doit être rendu. Le CcQ, en notant le standard de conduite, fait référence à la loi, qui doit être respectée de manière à ne pas causer de préjudice à autrui. Historiquement, le standard de diligence requis par la LCSA était subjectif et faible – A et D devaient éviter la négligence grave dans les affaires de la SPA + étaient jugés en fonction de leurs compétences et expériences particulières. Le rapport Dickerson propose une réforme vers le standard objectif de la personne raisonnable puisque la common law est trop permissive. Plutôt, la LCSA accepte mais introduit un élément circonstanciel (¬ subjectif] : personne raisonnable dans des circonstances comparables (n’a donc pas à voir avec l’expérience de l’administrateur – C&R, 399). Décrit comme étant un standard objectif & subjectif dans Soper, il s’agit d’une confusion: la LCSA impose un devoir de diligence selon un standard objectif prenant en considérant les faits de l’affaire (plutôt que les motivations particulières de l’administrateurs, ce qui s’avèrera être le point focal du devoir de loyauté).Bien que les faits de l’affaire doivent être considérés dans l’approche contextuelle, la règle du jugement d’affaire s’applique. Si les administrateurs peuvent montrer que la décision était raisonnable dans les circonstances, compte tenu des faits à leur disposition au moment de prendre la décision, la Cour ne substituera pas son jugement à celui du CA, en déférence à son expertise d’affaires (Maple Leaf Foods v Schneider Corp [1998] Ont). Pour établir une faute, il faut prouver que les administrateurs ont agi :(i) en violation de leur devoir diligence ; (ii) causant un préjudice au demandeur. Pour

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évaluer si l’administrateur a violé son devoir de diligence, la Cour déterminera à la lumière des faits s’il a agi de manière prudente, sur une base raisonnablement informée.

Finalement, la Cour met de côté l’argument fondé sur l’art 123 LCSA, laquelle permet de se fonder sur les rapports d’experts: elle considère que Clément n’est pas un expert au sens de la LCSA (pas comptable, pas supervisé par un ordre professionnel et pas d’assurance professionnelle).Ratio : le devoir de diligence rendu sous l’art 122 (1)(b) est évalué selon un standard objectif mais contextuel (contra Soper).NB : il s’agit d’une décision fondée en partie sur le droit supplétif du CcQ. La CML est généralement plus réticente à reconnaître un devoir de diligence.

Suite à Peoples, la LSAQ a précisé les bénéficiaires du devoir de prudence et de diligence en spécifiant que ceux-ci, tout comme le devoir de loyauté, était dû à la SPA (voir art 119 LSAQ).

Art 322 CcQ : l’administrateur doit agir avec prudence et diligence (ø évalué contextuellement) ; il doit aussi agir avec honnêteté et loyauté dans l’intérêt de la personne morale.

- C&R 398-399 souligne la possibilité ou le tournant éventuel au Québec de prendre l’administrateur raisonnable plutôt que le standard de la personne raisonnable pour interprêté l’art 119 LSAQ, conformément à l’art 1457 CcQ qui impose un standard différent aux professionnels.

- En général, le devoir de diligence inclus (C&R, 403 et s): o L’obligation de se renseigner (voir les défenses disponibles à l’art 123(5)

LCSA et art 121, 158 LSAQ) Se renseigner adéquatement en obtenant toute l’information

nécessaire ; Peut inclure le devoir d’assister aux réunions du CA ; Consultation de documents/personnes compétentes

Consulter les dirigeants, experts/professionnels ; états financiers)

Il faut prouver s’être fié de bonne foi à ces rapports Administrateur peut se désolidariser d’une décision en faisant

consigner sa dissidence au PV (art 123 LCSA et 139 LSAQ)o L’obligation de surveillance et de contrôle sur les dirigeants et autres

représentant de la société (art 102(1) LCSA) Individuelle : surveiller les dirigeants Institutionnelle : mettre en place des dispositifs de contrôles

internes pour assurer une collecte fiable d’informations (voir Johnson c Arcand)

Hercules Management Ltd v Ernst & Toung (1997) SCC   ; Houle v BCN (1990) SCC

La common law est plus réticente à reconnaître un devoir de diligence que le droit civil.

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Dans Hercules, on a refusé la compensation pour baisse de la valeur des actions de la part des vérificateurs d’une SPA ayant fait un travail bâclé en niant l’existence d’un devoir de diligence des vérificateurs dus aux actionnaires. Par contre, dans Houle (Qc), la Cour a accepté de compenser les actionnaires pour perte de valeur de leurs actions, ce qui a été aussi appliqué dans Bank of Montreal v. Bail Ltée, (1992) SCC (Qc), où l’on a déterminé qu’une faute contractuelle peut générer un recours extracontractuel si des dommages économiques ont été subis par un tiers.

2. D’autres sources spécifiques de responsabilité Dans certains cas, si un administrateur approuve une résolution allant à

l’encontre de la loi, il se pourrait que sa responsabilité personnelle soit retenue. Par ex :

o Un rachat d’actions par la SPA ; (art 158 LSAQ et 118 LCSA)o Une déclaration de dividendes ; (art 158 LSAQ et 118 LCSA)o Les salaires des employés (dans certaines juridictions seulement) (art

119 LCSA et art 154 LSAQ)o Obligation de fournir des renseignements au vérificateurs (art 170, 171

LCSA)

C. Le devoir de loyauté ou devoir fiduciaire(Welling aux pp 335 et s.)

Art 122(1)(a) LCSA, art 119 LSAQ, art 322–324 CcQ

Les devoirs fiduciaires trouvent leur origine dans les trusts, où les trustees devaient agir dans le meilleur intérêt du trust: on a suivi cette logique par analogie d’abord pour les administrateurs, ensuite pour les dirigeants.

Def/relation fiduciaire : relation qui, lorsqu’une faute est commise, permet d’intenter un recours à la fois contre le fiduciaire et contre le bénéficiaire.

Pas une définition opératoire et pas très pratique. Aussi, une relation fiduciaire n’implique pas par inférence que les principes de devoir fiduciaire s’appliquent.

L’extrait de l’article de Sealy, présenté dans le manuel, nous met en garde contre une application automatique de tous les principes applicables aux trusts dans les situations impliquant un fiduciaire, et nous amène à nous demander quelle est la nature des devoirs fiduciaires des administrateurs/dirigeants.

o La SPA implique une prise de risque, pas le trust. o Attention aux situations de bare trustee.o Notion de devoir fiduciaire adaptée à la formule de la SPA donc.

La décision Peoples a tenté de clarifier le contenu de l’obligation fiduciaire des administrateurs. Selon cette décision, le point focal des tribunaux sera l’intention subjective des dirigeants/administrateurs dans l’analyse du respect du devoir fiduciaire statutaire (devoir de loyauté).

À la lecture de la jurisprudence, il paraît clair que les administrateurs/dirigeants, dans l’exercice de leur devoir fiduciaire statutaire, ne peuvent se mettre dans une situation où leur intérêt propre est en conflit avec l’intérêt de la SPA (la

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bénéficiaire) ou avec l’intérêt d’un autre bénéficiaire et ne peuvent non plus tirer profit de leur position: il s’agit des règles no-profit et no-conflict.

Deux théories concurrentes viennent encadrer le devoir de loyauté dû à la SPA (voir supra) – (C&R, 417 et s)

o La théorie traditionnelle de la primauté des actionnaires veut que l’intérêt de la SPA soit assimilé à celui de ses actionnaires (pour que les actionnaires puissent avoir des dividendes ou retours en argent, il faut que toutes les autres créances soient satisfaites. Le statut de créanciers résiduels des actionnaires assurent que lorsque les actionnaires sont satisfaits, tous les autres créanciers le sont également). Or, certains abus ont été commis en application de cette approche, interprétation de la notion d’horizon, notions de conflits verticaux/horizontaux.

Conflits verticaux : abus de patrimoine par les administrateurs (art 323, 325 CcQ et art 120 LCSA) – impertinent de savoir si on privilégie les actionnaires par opposition aux parties prenantes, le conflit oppose l’administrateur vs le reste de la société ;

Conflits horizontaux : conflit entre les intérêts des parties prenantes ; ici il est important d’avoir une règle pour départager les conflits ;

o La théorie des parties prenantes, laquelle est à l’effet que les intérêts de la SPA sont ceux de l’ensemble de ses parties constituantes (des difficultés existent en termes d’application pratique, notamment quant à la mesure – autre que financière – de la «valeur» de l’entreprise et de la définition à donner aux devoirs des administrateurs…).

Le test mis en place afin de vérifier si le devoir de loyauté était respecté a d’abord été celui de la croyance honnête de l’administrateur (donc subjective) qu’il agissait dans l’intérêt de la SPA, mais cette approche a vu un volet objectif se rajouter: celui des motifs raisonnables pour justifier la prise de décision dans le meilleur intérêt de la SPA (voir Tech).

Peoples Department Stores inc (Trustee of) v Wise (2004)

La Cour affirme d’abord que la dénomination de «devoir de loyauté» serait peut-être plus appropriée pour définir l’obligation fiduciaire, [surtout dans un contexte de droit civil].Ainsi, on parlera de «devoir fiduciaire statutaire» dans la décision. Prend son origine dans art 102 LCSA.Le devoir de loyauté [et les autres devoirs] s’appliquent non seulement aux administrateurs, mais également aux directeurs «senior», ce que confirme la loi. (Canadian Aero Services Ltd. c. O’Malley (1974) SCC ; art 122(1) LCSA) ;La Cour cite une décision venant définir le concept de fiduciary duty en common law, cette fois dans le contexte d’enfants à la charge du gouvernement, et spécifie que ces devoirs varieront en fonction de la relation entre la partie à qui est imposée le devoir et celle qui en bénéficie. La Cour marque aussi la différence entre la négligence et l’abus de confiance. Dans le deuxième cas, il faut avoir fait passer ses intérêts propres avant ceux de celui ou celle pour qui il agit à titre de fiduciaire; or, la négligence n’équivaut pas forcément à un manque de loyauté (voir Lac Minerals v International Corona Resources (1989) SCC)  ;

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Le devoir fiduciaire des administrateurs ou des dirigeants a une large portée: il peut même donner ouverture à réparation lorsque la société n’aurait pas pu profiter d’une occasion obtenue par le biais d’un abus de pouvoirs de la part de l’un des ses administrateurs/dirigeants bien qu’il y ait des exceptions.Dans les faits de l’affaire, la Cour estime que le fait que le tribunal de première instance n’ait pas pu identifier des actes frauduleux ou malhonnêtes de la part des administrateurs vient rendre une condamnation pour manquement aux devoirs fiduciaires impossible: en effet, la Cour souligne que la nouvelle politique n’avait pour but que de rendre Peoples et Wise de «meilleures entreprises»: (voir 820099 Ontario Inc. v Harold E. Ballard Ltd. (1991) OnSC).La Cour souligne le rôle central que jouera l’intention des administrateurs dans la détermination d’un manquement au devoir de loyauté (obiter)Le contenu du devoir de loyauté est résumé de la façon suivante:

Agir honnêtement vis-à-vis de la SPA; Agir de bonne foi vis-à-vis de la SPA Éviter les conflits d’intérêts, même entre deux bénéficiaires et ceux

avec les biens de la SPA (potentiels ou réels) (no conflict); (voir Canson Entreprises Ltd. v. Boughton & Co. (1991) SCC ; 324 CcQ).

Éviter d’abuser de sa position afin d’en tirer un intérêt personnel (no profit);

Préserver la confidentialité des informations obtenues dans le cadre des fonctions de l’administrateur.La Cour vient également préciser qui est le bénéficiaires des devoirs des administrateurs: il s’agit de la SPA, donc en principe, de la maximisation de sa valeur.Pour autant, la Cour ouvre la porte à la considération d’intérêts concurrents dans la gestion de la SPA: elle précise cependant que les administrateurs ne verront pas leur devoir de loyauté modifié en cas de situation «proche de l’insolvabilité»: le devoir reste toujours le même, soit agir honnêtement et de bonne foi afin de permettre à la SPA d’être une meilleure entreprise.La Cour souligne qu’il est loisible aux différentes constituantes de s’appuyer sur d’autres recours lorsque leurs intérêts sont bafoués, notamment le recours pour abus en vertu de 241 LCSA, et les recours particuliers.Dans la mesure où les droits des créanciers peuvent prendre plus de place lorsque la SPA se retrouve en situation proche de l’insolvabilité, cela pourrait facilement justifier la qualification de «plaignant» au sens de 238 ou 239 de la LCSA pour ceux-ci.Ultimement, la Cour considère que les créanciers ne sont pas bénéficiaires des devoirs de loyauté des administrateurs en vertu de la loi, sans compter que ce devoir a été respecté par les administrateurs de Peoples.Ratio : la théorie de la primauté des actionnaires est mise au rancart (confirmé par BCE) ; l’intérêt de la société est un concept large et contextuel, et vise les intérêts à long terme. Les administrateurs ne peuvent plus être guidés strictements par le critère de la maximisation de la valeur pour les actionnaires mais doivent plutôt chercher à maximiser la valeur de l’entreprise, ce qui peut passer par un choix lorsque la compagnie est en voix d’être insolvable. La Cour refuse de considérer que les intérêts des créanciers deviennent prépondérants lorsque la société est au bord de l’insolvabilité, cependant.

Les différentes facettes du devoir de loyauté1) Respect de la finalité des pouvoirs2) Intérêt de la SPA

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3) Protection du patrimoine4) Indépendance5) Considérations connexes

1) Révision judiciaire de l’exercice des pouvoirs par le CA/finalité- On traite ici de la notion du proper purpose, c’est-à-dire le fait d’utiliser un

pouvoir normalement dévolu au CA à des fins impropres.- L’analyse du respect de ce devoir présente deux courants, le premier plus

restrictif, et le second, plus libéral.1. Le premier évalue le devoir en fonction du contenu du pouvoir délégué (C&R,

430): On analyse d’abord le «contenu» du pouvoir exercé, sa finalité; Puis, on vérifie si la décision se situe à l’intérieur de cette finalité.

On verra Cramphorn, mais aussi Howard Smith, laquelle se situe dans le même courant, mais est d’application plus large puisqu’elle «agrandit» la « destination du pouvoir ».

En droit québécois, Beauchamp v Contenants Sanitaires CS Inc. (1979) QCSC.

Problème : comment déterminer si les administrateurs ont agi dans un but légitime, dans l’intérêt de la société ? La critique de cette approche est que l’on doit se contenter d’une simple déclaration de bonne foi.

2. Le second courant est tiré de Teck (infra) et focalise sur le but poursuivi par les administrateurs dans leur prise de décision. L’évaluation porte donc davantage sur la nature de l’obligation fiduciaire. Ce type d’analyse demande d’abord la bonne foi des administrateurs; Mais aussi une justification fondée sur des motifs raisonnables; Ce qui viendra exiger que la cour fasse la différence entre les motifs

principaux et les motifs collatéraux Voir à contrario Exco Corp v Nova Scotia and Loans co (1987) NSSC

qui exige l’absence de motifs collatéraux ; En droit québécois : Bergeron c Bergeron-Faucher QCCA où la notion

de détournement de pouvoir permettrait aussi de se passer du proper purpose ;

Hogg v Camphorn Ltd (1967) UK

Dans cette décision, il est question d’une émission d’actions à des actionnaires amis afin d’éviter une prise de pouvoir par le truchement d’une OPA.Il n’est pas contesté que le CA a agi de bonne foi, mais avec un objectif spécifique, autre que celui de générer du capital pour la SPA.Or, il ne relève pas du CA de se servir du pouvoir d’émettre des actions afin de modifier l’exercice des droits par la majorité de ses actionnaires.Ainsi, le tribunal vient émettre une ordonnance empêchant l’exercice des droits de vote par les détenteurs des actions émises à des fins impropres.Il faut noter ici que la Cour qualifie le pouvoir d’émettre des actions comme un pouvoir fiduciaire, ici exercé à des fins impropres.

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Teck Corp v Millar (1972) BCSC

Une SPA (Afton) est en processus de négociation avec différentes personnes: son CA estime que de passer un contrat avec deux cocontractants potentiels (Canex et Placer), servirait mieux les intérêts de la SPA que de se voir faire l’objet d’une prise de contrôle par l’autre (Teck), ce dernier possédant déjà un bloc majoritaire d’actions d’Afton.Le CA propose donc, en parallèle avec le contrat avec Canex et al., d’émettre des nouvelles actions de la SPA à Canex, afin d’empêcher l’OPA par Teck (à la connaissance alléguée de Canex): on allègue donc un improper purpose dans le but d’invalider l’émission, puisque celle-ci chercher à diluer la majorité.Pour la Cour, il ne s’agit pas d’un acte ultra-vires, mais plutôt d’un abus de pouvoirs.La règle de base est que les administrateurs doivent agir de bonne foi et dans le meilleur intérêt de la SPA.Il est par conséquent contestable d’émettre des actions dans le but de préserver la majorité des membres du CA à l’assemblée des actionnaires. Ici, par contre, T ne conteste pas la possibilité que l’émission ait pu être faite dans le meilleur intérêt de la SPA, mais on souhaite cependant que la Cour déclare qu’une telle émission est interdite, compte tenu du précédent de Hogg v. Cramphorn.Le tribunal soulève un autre courant jurisprudentiel, soit celui de Re Smith & Fawcett Ltd. (1942) UK, qui préconise la protection des intérêts de la SPA comme guide fondamental de conduite pour les administrateurs. Or, suivre aveuglément Hogg pourrait aller à l’encontre de l’intérêt de la SPA.Au Canada, bien que le courant mis de l’avant par Hogg ait été suivi, il existe aussi un autre courant (voir Spooner v Spooner Oils Ltd (1936) qui a accepté que l’on puisse modifier une majorité dans l’intérêt de la SPA).Ainsi, le juge commence par expliquer quels sont les intérêts à privilégier dans la SPA: ceux-ci incluent l’intérêt des actionnaires, mais peut aussi comprendre les intérêts des employés, de créanciers, voire de la communauté.En contexte de prise de contrôle, il peut donc être loisible au CA de voir qui tente de s’approprier le contrôle et pourquoi, et tenter de contrer une prise de contrôle estimée nocive pour les intérêts de la SPA.La Cour, après une étude des faits, tente de départager ce qu’elle appelle le motif primaire et les motifs subsidiaires: pour la Cour, il est possible de considérer que le but du CA était d’obtenir le meilleur contrat possible avant que la société ne vive un changement de contrôle, et, de la même manière, d’empêcher Teck d’obtenir ce contrat pour elle-même par le truchement d’une prise de contrôle.Le fait que le principal actionnaire, Teck, ne soit pas d’accord n’avait pas d’importance pour le CA.Ratio : l’administrateur doit agir de bonne foi et avoir des raisons suffisantes pour appuyer sa décision.

2) Le conflit d’intérêts La SPA agit par ses agents/mandataires. Dans ce contexte, il est interdit aux agents/mandataires de se trouver dans une situation où leur intérêt vient en conflit ou pourrait venir en conflit avec celui de la SPA, que le contrat soit équitable ou non. (voir art 323, 324 CcQ).

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Cette règle est donc plus contraignante que celle imposant de privilégier les intérêts de la SPA: elle interdit d’emblée toute forme de conflit sans autre issue possible. Advenant un conflit d’intérêt, le fiduciaire ne peut pas même essayer de prouver qu’il agissait dans l’intérêt de la SPA. La règle prophylactique est donc plus contraignante que le devoir qu’elle cherche à protéger.

Northwest Transportation v Beatty (1887) Ont JCPC

La plupart des actionnaires d’une SPA intentent une action contre la SPA et cinq de ses actionnaires qui étaient aussi membres du CA au moment des faits.Une transaction est au cœur du litige: elle implique la vente d’un bien appartenant préalablement à l’un des administrateurs à la SPA.La Cour commence par énoncer deux principes de base: Les actionnaires sont libres d’exercer leurs droits de vote comme ils l’entendent

(même en cas de conflit d’intérêt); Les administrateurs doivent exercer leurs droit de vote dans l’intérêt de la SPA. Il est possible d’approuver une transaction en contexte de conflit d’intérêt, mais il

faut que la transaction soit approuvée validement et qu’elle soit par ailleurs légale, non frauduleuse et non abusive vis-à-vis des autres actionnaires minoritaires.

Dans cette affaire, la SPA avait besoin de l’objet de la transaction (un bateau) et le prix était raisonnable (ce qui est admis).On a approuvé la transaction le 10 février lors du CA en présence du propriétaire du bateau et l’on a approuvé cette décision le 16 février lors de l’assemblée des actionnaires en présence du propriétaire, aussi détenteur d’actions.Les plaignants contestent la validité de l’assemblée des actionnaires.Selon le tribunal, l’achat était une pure question de gestion et l’approbation par les actionnaires est venue validement corriger le défaut quant au conflit d’intérêt.

NB : À distinguer d’avec Cook v. Deeks par rapport à la ratification: impossible lorsque la transaction implique la prise de contrôle de propriété corporative (en l’occurrence, une opportunité contractuelle). Dans Northwest, on achetait (sortir du patrimoine) alors que dans Cook, on s’approprie une partie du patrimoine.

Art 324 et ss CcQ, art 120 LCSA, et arts 122–125, 127, 131–133 LSAQ

La réforme statutaire canadienne cherche à corriger l’inflexibilité d’une telle règle. La solution a consisté à établir une procédure de routine dans lequel le potentiel conflit d’intérêt peut être divulgué et, dans le cas de conflits des administrateurs, où l’on récuse le droit de vote des administrateurs en ce qui a trait aux décisions liées au conflit.

Art 120 LCSA oblige à :

1. Divulguer la nature et l’étendue du conflit d’intérêt ;2. Ne pas voter (dans le cas des administrateurs) sur les résolutions relatives

au contrat en cause ;3. Ces contrats sont alors non-annulables (non-voidable) et la responsabilité de

l’administrateur ne peut être retenue si les procédures ont été correctement suivies ;

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3) Protection du patrimoine : l’appropriation de biens, d’informations ou d’occasion d’affaires

Le Code civil protège le patrimoine de la SPA par le truchement de 323 CcQ:

«L'administrateur ne peut confondre les biens de la personne morale avec les siens; il ne peut utiliser, à son profit ou au profit d'un tiers, les biens de la personne morale ou l'information qu'il obtient en raison de ses fonctions, à moins qu'il ne soit autorisé à le faire par les membres de la personne morale.»

Voir aussi art 325-326 CcQ ; art 122-133 LSAQ

À cet égard, Canadian Aero Services Ltd. C. O’Malley (infra) peut servir d’exemple.

La règle s’appliquant aux conflits d’intérêts est contraignante et son application stricte (voir Aberdeen Railway Co. v Blaikie Bros. (1854) UK: il est interdit de passer un contrat en contexte de conflit d’intérêt, que celui-ci soit avantageux ou non pour la SPA: la règle est définie comme prophylactic c-à-d incontournable…), mais doit parfois céder le pas à des considérations pratiques, comme le démontre l’exemple tiré de Bray v. Ford (1896) services légaux fournis par un membre du CA contre rémunération).

Cette règle a aussi permis de développer un courant jurisprudentiel applicable aux occasions d’affaires (i.e., une situation où il n’y a pas comme tel de contrat): Cook v Deeks (1916) Ont JCPC et où la décision du CA a été approuvée par l’assemblée des actionnaires (voir North West).

La décision Boardman v. Phipps (1967) UK est aussi un exemple utile, où l’on a par ailleurs appliqué les notions de l’enrichissement sans cause aux administrateurs fautifs.

Cook v. Deeks: «transfert» d’un contrat de la SPA à une SPA nouvellement formée: on parle de misappropriation d’une opportunité d’affaires de la SPA

Regal (Hastings) Ltd. v Gulliver (1942) UK

Regal a formé une filiale (Amalgamated) dans le but de profiter d’opportunités d’affaires. Cependant, le manque de liquidités d’Amalgamated inquiétant ses cocontractants (parce que sous-capitalisée), les membres du CA de Regal ont accepté de se porter acquéreurs d’actions d’Amalgamated, ainsi que des tiers.Les actions des deux SPA ont par la suite été vendues (à profit), mais les nouveaux acquéreurs de Regal contestent le gain de capital des administrateurs. Or, Regal n’aurait pas pu profiter de l’offre car n’avait plus de capital à ce moment.La Cour, s’appuyant sur Keech v Sandford (1726) UK et Ex p. James (1803) UK, écarte toute considération extérieure quant à l’évaluation du respect des devoirs fiduciaires. Ici, la Cour estime qu’il y a eu profit, et que les biens acquis puis vendus afin de générer ce profit l’ont été grâce à la position au CA des administrateurs.Ceux-ci sont donc tenus de rendre les profits à la SPA, exception faite du membre du CA qui a vendu les action à des tiers et de l’avocat de la SPA.La Cour note cependant que la transaction aurait pu être approuvée lors d’une assemblée d’actionnaires, mais cela n’a pas été fait.Ratio : le devoir de loyauté empêche l’administrateur de se placer dans une position

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où son intérêt pécuniaire et son devoir entre en conflit.

Peso Silver Mines Ltd. v Cropper (1966) SCC

Une SPA s’est vue offrir un terrain par Dickson et a refusé l’offre par son CA (cette SPA recevait plusieurs offres par mois).Par la suite, Cropper, l’un des membres du CA, a acquis la propriété en question avec d’autres personnes.On lui demande donc de rendre les profits générés par cette acquisition.La Cour note cependant que la décision du CA a été prise de bonne foi et dans l’intérêt de la SPA, et qu’aucune information confidentielle n’a été transmise à ce moment, ni que la connaissance de l’offre résultait de la fonction de l’administrateur, et que l’offre avait été oubliée par Cropper.Puis, citant l’obiter de Regal, la Cour rejette la demande.

Gravino c Enerchem Transport inc (2008) QCCA

Gravino et Carson sont des ex-administrateurs d’Énerchem (1990-96). Zaremba est un employé senior de la même SPA.Ils décident de s’en retirer en février 1996 comme actionnaires et comme dirigeants en juin de la même année.Durant les années passées à l’emploi d’Énerchem, Gravino et Carson ont négocié avec Ultramar, locataire de pétroliers, pour obtenir la sous-location de ces pétroliers détenus par Rigel, société allemande : une des conditions pour qu’Ultramar sous loue les pétroliers est que les sous-locataires concluent un contrat de transport avec Shell. Plus tard, Shell octroie le contrat de transport à Petro-Nav, société formée par Gravino et al. et Ultramar sous-loue donc ses navires à Petro-Nav.La Cour s’appuie sur les articles 6, 7, 321-323, 1375, 2088, 2138 et 2146 CcQ pour fonder sa décision et met en doute l’application des notions de devoir de loyauté à l’affaire, tout en réalisant une étude des principes de celle-ci.On invoque la violation du devoir de loyauté des parties (322, 323 CcQ) : «vol» d’une occasion d’affaires.La Cour commence par souligner que le fait que l’on ait le droit de faire concurrence à l’entreprise ne vient pas faire en sorte que l’on puisse le faire d’une façon déloyale.Puis, se fondant sur la trame factuelle, la Cour décrète qu’il n’y a pas eu ici «détournement d’une occasion d’affaires en cours de réalisation» par Petro-Nav.Le principal argument de la Cour est le temps écoulé entre la démission de Gravino et Carson (juin 1996) et le contrat intervenu entre Ultramar et Petro-Nav (février 1997) : la CA invoque un «critère général de proximité» et la notion d’occasion d’affaires à maturité par rapport à une simple piste.Parmi les éléments mis de l’avant par la Cour : 

Le délai entre la contrat passé avec Ultramar par Petro-Nav et le départ de Gravino et al. de chez Énerchem : la cour considère qu’il s’agit d’un délai matériellement important.

L’intensité du conflit entre les intérêts de l’administrateur de la SPA: ici, on note la différence entre les deux approches d’affaires : On sollicite Rigel chez Énerchem afin de convaincre Rigel de lui louer les

pétroliers (le propriétaire des pétroliers); On sollicite Shell chez Petro-Nav (nouvelle SPA de Gravino) afin de

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trouver quelque chose à transporter dans les pétroliers sous-loués et ainsi, de faire en sorte que Ultramar sous-loue les pétroliers en question.

En tout état de cause, il y avait une différence matérielle compte tenu de l’écoulement du temps qui rendait les 2 approches différentes.

La cour met l’accent sur la quiddité des occasions d’affaires et considère que Petro-Nav n’a pas illégalement mis la main sur une occasion d’affaires de Énerchem.NB   : l’opportunité est mature lorsqu’il y a une quiddité. L’occasion d’affaires doit avoir un niveau de spécificité tel qu’elle est presque autonome.« avant de conclure à l’existence d’un détournement au sens de l’art 323 CcQ, il importe d’identifier quelque chose de plus précis qu’une simple piste à exploiter ou qu’une hypothèse de travail connue de ceux qui ont l’expérience du marché en cause. Bien entendu, l’information visée par l’Art 323 CcQ, ce peut être notamment l’occasion d’affaires en voie de réalisation ». « Une occasion d’affaires doit être plus qu’un concept ou qu’une simple piste et elle n’est en voie de réalisation que lorsqu’elle met en jeu un intérêt prioritaire de la compagnie, digne de la protection des tribunaux ».

Canadian Aero Services Ltd v O’Malley (1974) SCC

Cette décision implique 2 dirigeants au service de CanAero.Ces deux administrateur/dirigeants sont impliqués et négocient avec des tiers à la SPA dans le cadre du «projet de Guyane» à partir de 1961.Une bonne partie du travail de O’Malley et Zarzycki consiste à chercher des contrats de cette nature. À cette fin, des démarches sont financées par Can Aéro, notamment:

o Des séjours en Guyane;o Des relevés techniques sont préparés;

Après problème de financement, les affaires reprennent en 1965; on fait un nouveau séjour en Guyane en 1965 et on procède à une Préparation de projet en 1965;Puis, démission de O’Malley et Zarzycki en 1966, et création de la société Terra Surveys par O’Malley, Zarzycki et un autre (en août 1966); cette nouvelle SPA arrive avec un projet très détaillé (manifestant une grande connaissance de la Guyane, malgré le fait que des employés de Terra Surveys n’y soient jamais allés) et complet dès septembre 1966; finalement, Terra obtient le contrat.O’Malley et Zarzicki étaient liés par des liens fiduciaires; donc, devaient faire montre de loyauté et éviter les conflits d’intérêts. Ainsi, le fait de s’approprier le contrat de Guyane était une appropriation d’un bien ou d’un avantage commercial appartenant à Can Aero, particulièrement dans la mesure où les deux personnes visées avaient participé aux négociations. Dans la mesure où l’on a réalisé un profit aux dépens de CanAero, on doit rendre compte (la cour semble penser que même si le profit n’avait pas été aux dépens de CanAero, on aurait probablement quand même dû rendre compte). L’aspect projet mature y est peut-être pour quelque chose dans cette décision.

Le devoir de confidentialité

Il s’agit d’une manifestation du devoir de protéger le patrimoine. Néanmoins, ce devoir reste flou dans ses contours, puisqu’il est parfois à

l’avantage de la SPA de divulguer des informations confidentielles, ce qui vient

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empêcher la mise en place d’un devoir clair quant aux informations confidentielles.

Au minimum, Crête et Rousseau suggère qu’il relèvera du CA de gérer la divulgation de l’information.

De l’autre côté du miroir, les administrateurs peuvent aussi être confrontés à l’obligation de renseigner la SPA sur des sujets dont ils ont connaissance, dans des cas où cette information peut avoir une incidence sur les affaires de la SPA.

o Voir PWA Corp. v Gemini Group Automated Distribution (1993) OntCA.

Voir C&R aux pp 465-470

1. S’il existe un conflit d’intérêt et que le fiduciaire a obtenu l’information de par sa position, alors il doit rendre compte;

2. S’il existe un conflit d’intérêt potentiel et que le fiduciaire a obtenu l’information de par sa position, il doit rendre compte (Boardman v Phipps);

3. S’il n’existe pas de conflit d’intérêt et que le fiduciaire n’a pas obtenu l’information de par sa position, alors il ne doit pas rendre compte (Peso Silver Mines).

4. S’il existe un conflit d’intérêt potentiel et que le fiduciaire n’a pas obtenu l’information de par sa position, alors il ne doit pas rendre compte (Holder c. Holder [1968] UK ;

5. S’il existe un conflit d’intérêt et que le fiduciaire n’a pas obtenu l’information de par sa position, alors il doit rendre compte IDC c. Cooley, [1967] UK ;

6. S’il n’existe pas de conflit d’intérêt et que le fiduciaire a obtenu l’information de par sa position, alors il doit rendre compte : cette règle est probablement en existence pour empêcher la tentation chez les administrateurs/dirigeants.

4) Conflits de devoirs et de droits Un administrateur peut cumuler deux postes dans des CA, mais non dans des

CA de SPA en compétition.o London & Mashonaland Exploration Co. Ltd. v New Mashonaland

Exploration Co. (1891) UK, qui ne correspond plus à l’état du droit: Dans le cas où les SPA ne sont pas en compétition, il ne doit pas y avoir une

apparence de conflit non plus.o Bhullar v Bhullar (2003) BCCA : un administrateur peut siéger sur le CA

de deux SPA en compétition tant que les deux SPA y consentent. Le fait de faire profiter une SPA plutôt que de profiter soi-même de l’occasion ne

sera pas non plus une défense: Cook v Deeks (1876) et Regal Il est tout aussi clair qu’un administrateur ne pourra pas lier sa discrétion à

l’avance, que ce soit par contrat entre les membres du CA ou vis-à-vis d’un tiers, bien que le fait de lier la discrétion de la société à l’avance (et indirectement celle du CA), par ex. dans le contexte d’un contrat de prêt, soit acceptable.

o Fulham Football Club Ltd. v Cabra Estate plc [(1994) BCCA une fois la décision de se lier prise, le CA a épuisé sa discrétion.

Suivant la même logique, un administrateur qui est délégué par un groupe particulier d’actionnaires au CA ne jouit pas d’un statut spécial: Levy-Russel v. Tecmotiv (1994) OntCA; la seule solution en cas de conflit: la démission (voir aussi 820099 Ontario Inc. v Harold E. Ballard Ltd. (1991) – la rigueur d’une telle alternative est fonction de la rigueur imposée par le devoir de loyauté.

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En est-il de même lorsque les actionnaires agissent comme administrateurs par le truchement d’une CUA? Oui en common law: selon la loi: 146(6) LCSA.

- On peut cependant obtenir l’autorisation préalable des bénéficiaires de cette obligation, mais parfois, cette autorisation est impossible à obtenir.

5) Considérations connexesi. Propriété, obligations et opportunités

- Il est important de faire la différence entre le fait de posséder une chose et avoir des droits sur quelque chose.

- En droit civil, cette question n’est pas vraiment pertinente: un bris du devoir de loyauté ne générera qu’une obligation.

- Cette question sera importante lorsque viendra la temps de déterminer si on est en présence ou non d’un bris de devoir fiduciaire malgré une ratification par les actionnaires: voir Cook v Deeks (supra, où il est question d’appropriation de propriété) par rapport à North West v Beatty (supra, où il n’est pas question d’appropriation, mais d’un profit sur une vente faite à la SPA).

- Il sera aussi préférable dans certains cas de démontrer le détournement de biens, en ce qu’un détournement de biens donne des «droits de propriété» et non une simple «obligation» à la victime: dans Boardman v Phipps, l’on a qualifié les actes de l’administrateur comme étant du vol d’informations.

- Cette approche a cependant été rejetée dans Cadbury Schweppes Inc. . FBI foods Ltd. (1999) SCC: il est de plus en plus admis que la responsabilité pour bris de devoir fiduciaire ne dépend pas d’un détournement de biens.

- Les administrateurs, lorsqu’ils contreviennent à leurs devoirs fiduciaires, peuvent être tenus de rendre compte à la SPA, ce qui constitue une obligation.

- Cependant, dans ces cas, il a souvent été décidé que la propriété était détenue en fidéicommis: Keech v. Sandford, Boardman v. Phipps (supra).

o Par contre, on pourra voir Lister v Stubbs (1890) U où l’on a décidé que le bris des devoirs fiduciaires générait une obligation: cette approche a été suivie au Canada: Aetna Financial Services v. Feigelman (1985) SCC mais pas toujours: Soulos v Korkontzilas (1997) SCC où l’on a identifié 4 conditions nécessaires pour qu’il y ait effectivement présence d’un trust:

1. The defendant must have been under an equitable obligation, that is, an obligation of the type that courts of equity have enforced, in relation to the activities giving rise to the assets in his hands;

2. The assets in the hands of the defendant must be shown to have resulted from deemed or actual agency activities of the defendant in breach of his equitable obligation to the plaintiff;

3. The plaintiff must show a legitimate reason for seeking a proprietary remedy, either personal or related to he need to ensure that others like the defendant remain faithful to their duties and;

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4. There must be no factors which would render imposition of a constructive trust unjust in all the circumstances of the case, e.g, the interests of intervening creditors must be protected.

ii. Pouvoir de ratification par les actionnaires Il a longtemps été jugé utile de faire ratifier l’ensemble des décisions prises par le

CA afin de pardonner des violations aux devoirs du CA lors de l’assemblée générale des actionnaires.

Dans ce contexte, on parlait plus de «pardon» que de ratification au sens traditionnel de l’agency de la common law.

La «ratification» est disponible tant avant les faits qu’après, mais il est nécessaire d’avoir divulgué toute l’information pertinente pour que la ratification puisse être valablement faite.

La ratification génère cependant plusieurs questions:o Voir North West Transportation, Regal Hastings, Cook v Deeks, supra: la

ratification ne sera pas toujours efficace, selon les faits… Dans Bamford v Bamford (1970) OntCA, on est venu à la conclusion que si

l’assemblée des actionnaires était suffisamment informée, le pardon était possible et correctif.

Pour autant, est-il possible de donner le pouvoirs aux actionnaires de pardonner pour la SPA? Et est-il suffisant de permettre un pardon pour non respect des statuts par un simple vote majoritaire à 50% plus un? Voir Burland v Earle (1900) OntCA: unanimité requise dans ce cas, l’argument étant que les devoirs fiduciaires sont dus à tous les bénéficiaires et le non respect de la règle stricte doit être approuvé à l’unanimité.

Dans Hollinger International Ltd. v Black (2004) OntCA, on a interdit à un actionnaire majoritaire d’exercer un droit de modifier des règlements puisque ceci aurait créé une situation contraire à une entente préalable avec la SPA.

Les actionnaires peuvent par ailleurs intenter un recours au nom de la SPA en cas de violation des statuts constitutifs…

iii. Le cas particulier de situations impliquant un changement de contrôle Les OPA interviendront dans un contexte où la SPA est perçue comme étant mal

gérée (ce qui justifie le peu d’enthousiasme du CA en place vis-à-vis d’une telle opération…), ce qui explique la sous évaluation de ses actions: dans ce contexte, l’investisseur qui souhaite prendre le contrôle sera prêt à payer plus que la valeur à laquelle les actions sont transigées afin d’obtenir le contrôle et permettre à la SPA de réaliser pleinement son potentiel.

Les OPAs sont encadrées par les lois en matière de valeurs mobilières: des obligations de traitement égal, de seuil minimal sont notamment mises en place afin de favoriser un processus équitable et transparent.

Olympia & York Enterprises v Hiram Walker Resources Ltd (1986) OntCA

La décision cite Ampol comme précédent: elle précise que la nature du pouvoir exercé dans Ampol était l’émission d’actions, et que cette émission d’actions a été faite dans le but de diluer une majorité dans le contexte d’une OPA à titre de mécanisme de défense.Ici, la SPA a procédé à une transaction de vente d’actifs, laquelle lui a permis de faire

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racheter des actions afin de modifier la majorité des actionnaires.La question est donc d’abord de déterminer si le CA a agi dans son intérêt ou dans l’intérêt de la SPA et s’il a agi de bonne foi: la Cour s’appuie sur Teck : dès lors que la décision du CA a été prise de bonne foi et dans l’intérêt de la SPA, et en s’appuyant sur des motifs raisonnables, en l’occurrence, des rapports d’experts: dans ce cas, les conseillers financiers avaient conseillé à la SPA de procéder à la transaction dans l’intérêt des actionnaires: en effet, de l’avis de ceux-ci, l’offre hostile était trop basse.Dans ce contexte, le fardeau de preuve revient au plaignant, et il a échoué à démontrer la faute du CA

Revlon Inc v MacAndrews & Forbes Holdings Inc (1986) US

Selon cette décision, lorsqu’une SPA se retrouve in play, le rôle du CA n’est plus de protéger ses intérêts, mais de vendre les actions de la SPA au meilleur prix possible.Cette décision n’est cependant acceptée au Canada comme ayant force de loi: Maple Leaf Foods Inc. c. Schneider Corp (1998) OntCA.Toutefois, dans BCE, le CA croyait vraiment que la loi en vigueur était celle de Revlon et a donc agi en conséquence, i.e. en mettant les intérêts des actionnaires en priorité, au détriment des détenteurs de débentures.

Comité indépendant : un sous-comité du CA constitué d’administrateurs dits indépendants, n’occupant pas d’autres fonctions dans la corporation. E.g. déterminer le salaire des administrateurs et des directeurs ; prendre des décisions par rapport à une offre d’achat de la SPA.

Si la décision d’un comité indépendant est mise en cause, quel est le standard selon lequel une Cour devra traité la décision du comité ? S’agit-il d’un appel d’une décision de première instance ou une révision d’une décision d’un tribunal administratif ?

Brant Investments Ltd v Keeprite Inc (1991) – Ont CA

Faits : K devient l’actionnaire majoritaire d’une autre SPA suite à la recommandation de son comité indépendant, et finance cet achat en émettant des actions à ses actionnaires courants. Cette émission a été votée par résolution spéciale. BI, un actionnaire minoritaire, conteste l’achat et l’émission d’actions. Question : est-ce que le comité était suffisamment indépendant pour que la décision soit valide et est-ce que le comité a agi dans le meilleur intérêt de la corporation?Décision :oui et ouiAnalyse :Les administrateurs du CI n’étaient pas administrateurs ou directeurs de la compagnie ou d’une de ses filiales. Il n’y a donc pas d’apparence de conflit. BI contestent néanmoins la décision sur 4 bases : 1/ le CI n’a pas considéré d’alternatives, 2/ il n’avait pas de stratégie d’affaire justifiant la décision, 3/ le CI n’a pas attendu la décision des consultants et 4/ le CI n’a pas considéré l’avis des filiales de K. La Cour considère que la décision du CI était justifiée dans les circonstances.La Cour examine ensuite si le standard de révision de première instance était justifié. BI allègue qu’un standard de déférence n’est pas approprié lorsqu’on questionne le jugement même des personnes en pouvoir. Or, la Cour d’appel considère que le juge

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de première instance n’a pas erré. La décision du CI, même faite de manière honnête, doit être évaluée de manière objective en fonction des facteurs déterminés par l’art 241 LCSA. Cependant, cela ne veut pas dire que le juge doit substituer son jugement à celui du CI lorsque ces facteurs sont satisfaits.Ratio : lorsqu’une décision faite par un CI respecte en substance et en procédure l’art 241 LCSA, la Cour ne peut pas substituer son jugement à celui du comité.

VI. Participation des actionnaires au processus décisionnel – la règle de la majoritéDeux groupes distincts sont généralement appelés à prendre des décisions : le CA et l’assemblée des actionnaires. Il y a aussi toujours l’éventualité d’une CUA.

- Les actions ne sont pas un droit de propriété ; mais un bien meuble incorporel auquel la loi et les statuts confèrent un faisceau de droits ;

- Trois droits de base : droit de vote/dividende/reliquat ; pas nécessairement tous rattachés à la même action mais chacun des droits doit être attribué au moins une fois (art 48 LSAQ et art 24(3) LCSA) ; principe général : toutes les actions possèdent les trois.

Un des droits corrolaires au droit de vote est le droit d’assister aux assemblées des actionnaires, d’être avisé de la tenue d’un vote, veiller au bon fonctionnement des assemblées. Droit de vote des actionnaires n’a pas à être exercé dans l’intérêt de la société.

Barron v Potter (1914) UK : P allègue qu’il y a eu assemblée du CA alors qu’il coursait dans un taxi et qu’il criait par la fenêtre à l’autre directeur, qui l’ignorait. La Cour a statué qu’il ne s’agissait pas d’une assemblée du CA. Il n’est pas suffisant qu’un des administrateurs déclarent qu’il s’agit d’une assemblée pour que ça en soit une.

La notion de assemblée implique deux choses : 1/ qu’il y ait minimalement deux personnes ; 2/ qu’il y ait un objet à discuter.

1/ Historiquement, il aurait été impossible d’avoir une « assemblée » au sens de la loi dans les corporations unipersonnelles, mais des exceptions ont été ajoutées pour cette situation.

2/ Il doit y avoir une intention commune à se rencontrer (a common purpose) ; cette règle sert à empêcher un administrateur de changer l’objet de la assemblée après coup ou contre les protestations des autres administrateurs.

A. AdministrateursLa LCSA pose des règles générales concernant les assemblées du CA (voir arts 114, 117 LCSA), mais elles sont généralement supplémentées par la constitution de la SPA.

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B. Actionnaires1. Assemblée d’actionnairesa. Types d’assembléeRencontre annuelle (ordinaire) vs Rencontre spéciale (extraordinaire)

Voir arts 106(3), 109(1) LCSA.

Normalement, principaux objets respectifs de la recontre annuelle: élection du CA, approbation des règlements par les actionnaires, dévoilement du cadre financier de la SPA, nomination d’un vérificateur.

b. Nécessité d’avis3 enjeux : à qui ? temps requis ? information nécessaire fournie dans l’avis ?

Les actionnaires ayant un droit de vote ont un droit à être notifiés, tout comme les administrateurs et les vérificateurs (art 165 LSAQ et 135(1) LCSA). Qu’en est-il des actionnaires sans droit de vote ? Un cas ambigü, généralement non.

Garvie v Axmith (1961) – Ont SC

Faits : Une assemblée extraordinaire a été tenue, mais certains actionnaires n’ont pas reçu d’avis. Ils contestent les décision prisent durant cette assemblée.Question : Est-ce que les décisions sont nulles ?Décision : OuiAnalyse :Le défaut d’un avis adéquat est fatal pour la validité des décisions obtenues lors d’une assemblée.

Deux critères   :

Tous les sujets de décision doivent être identifiés dans l’avis ; Tous les sujets de décision doivent être suffisamment décrits pour pour

permettre aux actionnaires de former un jugement éclairé.

c. Lieux des assembléesNormalement les assemblées doivent être tenues dans le territoire où la corporation est incorporée. Exception : si la constitution le permet ou s’il y a consentement unanime à cet effet (art 132 LCSA).

Re Upper Canada Resources Ltd & Minister of Consumer and Commercial Relations (1978) – Ont SC

Faits : Décision contestée sur la base de la location de l’assemblée.Question : Est-ce que la décision est nulle compte tenu du fait que l’assemblée s’est tenue à Calgary, et non en Ontario ?Décision : Oui.Analyse : Les lettre patentes autorisaient la SPA à tenir des assemblées en dehors de la province Ontario. Or, avec l’entrée en vigueur de la LCSA, les SPA avaient une

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période de temps pour amender les règlements qui entraient en conflit avec la nouvelle loi. L’art 105(3) LCSA établit que les endroits précis des assemblées doivent être précisés dans les règlements. Or, bien que l’assemblée des actionnaires avaient approuvées que des assemblées soient tenues ailleurs, ils n’avaient pas précisé où. Tel que spécifié dans Re Dairy Corp of Canada (1934), le rôle du juge est de déterminer si les conditions législatives ont été rencontrées. Lorsqu’elles le sont, le juge doit déterminer si le résultat est juste et équitable.Or, ici, les conditions n’ont pas été remplies et ce serait aller à l’encontre d’un des principes de base du droit corporatif que de soutenir que la décision de l’assemblée aurait été la même si l’assemblée avait eu lieu à Toronto plutôt qu’à Calgary.

d. Vote lors d’une assemblée- Vote à main levée par défaut ; si un actionnaire en fait la demande, vote par scrutin secret (art 183 LSAQ et 141(1)(2) LCSA)

MacDougall v Gardiner (1875) – UK

Faits : La constitution de la SPA permet un vote par scrutin (en fonction des actions détenues et non des personnes) à la demande de 5 actionnaires. À l’ordre du jour d’une assemblée est question de la destitution de G. Avant que la motion soit votée, la séance est ajournée par un vote à main levée, malgré la demande de 5 actionnaires de procéder par scrutin, sous prétexte que cette disposition ne s’applique pas aux ajournements. Si la demande avait été accceptée, la motion d’ajournement aurait été défaite.Question : est-ce que la décision d’ajourner était valide ? est-ce que la Cour peut empêcher le CA de conclure des transactions futures ?Décision : oui, non.Analyse :Il n’appartient pas aux actionnaires d’exiger la tenue d’une assemblée conforme aux statuts ; ce droit devrait être exercé par la SPA.Question : mais comment est-ce que des actionnaires peuvent faire valoir une procédure lorsque le CA s’y oppose ? Que fait-on des devoirs de loyauté du CA ? action en abus

Pender v Lushington (1877) – UK

Faits : Les statuts de la SPA prévoient que les actionnaires ont droit à 1 vote pour chaque 10 actions détenues, jusqu’à concurrence de 100 votes. Afin de contrer cette limite, un actionnaire émet des actions de la SPA à un autre détenteur agissant en fidéicommis pour lui. La SPA s’oppose à cette façon de faire.Question : 1/Qui peut poursuivre dans cette situation ? 2/ Est-ce que la décision du président d’assemblée de refuser les votes est valide ?Décision : L’actionnaire et les autres détenteurs ; ouiAnalyse : Un titulaire de droits de propriété peut exercer ses droits comme il l’entend et donc la SPA doit accepter les votes. Par ailleurs, les demandeurs sont Pender en son nom propre, puisqu’il détient les titres de propriété et Pender comme représentant du groupe d’actionnaires ayant voté avec lui. La SPA comme telle ne devrait pas obtenir le statut de demanderesse, puisqu’un droit de vote est un droit personnel.

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e. La procurationLe mécanisme de procuration permet à un actionnaire d’autoriser quelqu’un d’autre d’exercer son droit de vote.

Traditionnellement, on nommait un membre de la direction comme mandataire, ce qui venait assurer une certaine stabilité dans la gestion, mais acrroissait l’isolement de la gestion des dirigeants/administrateurs.

Le Kimber Report est venu proposer une réglementation de l’exercice de ces droits, notamment quant à l’information requise pour les actionnaires et pour les personnes devant exercer les droits de vote pour le compte du détenteur inscrit: il faut laisser le choix de voter contre dans le formulaire.

Pour autant, l’élection des membres du CA et la nomination du vérificateur, considérés comme des éléments de routine, ne sont pas assujettis à ces règles: la direction de la SPA peut se limiter à une possibilité de voter pour un candidat (voire, plusieurs candidats à la fois) ou de s’abstenir de voter: la seule façon de voter contre est de se présenter à l’assemblée ou en préparant son propre formulaire de vote.

Voir art 148 (1) LCSA et 172 LSAQ

f. La propositionIl est coûteux pour les actionnaires de proposer des changements au CA de la SPA, mais en même temps, ces changements peuvent parfois avoir des effets positifs: pour cette raison, on a cru bon de les encourager, mais par des moyens moins onéreux qu’une sollicitation de procurations ( ?).

Il est possible pour les actionnaires de proposer des règlements 113 LSAQ, 103(5) LCSA et de proposer des administrateurs par le mécanisme de la proposition 198 LSAQ, 137(4) LCSA.

Il est aussi possible, au fédéral, de proposer des modifications aux statuts, voir art 175(1) LCSA, voire, de proposer la dissolution de la société (art 211 (1) LCSA).

On peut aussi faire des propositions d’ordre général; dans ce cas, cependant, elles ne seront probablement pas contraignantes pour la SPA.

Au provincial, ce droit n’existe que pour les SPA de plus de 50 actionnaires (arts 194 ss LSAQ).

On énonce la proposition dans la circulaire d’informations envoyée à tous les actionnaires (arts197 LSAQ, 137 (2) LCSA): ainsi c’est la SPA qui assume les coûts de cette intervention.

2. Assemblée annuelleModalités de convocations : arts 133 LCSA et 163 ss LSAQ ;

Les questions discutées lors d’assemblées annuelles sont les suivantes:o L’élection des administrateurs;o L’approbation des règlements;o L’approbation des états financiers;

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o La nomination du vérificateur

a. Élection des administrateurs Résolution simple (majorité simple) ; Rappel: le premier CA est nommé par les fondateurs (arts 8 LSAQ et 106 (1)

LCSA): ce n’est qu’une fois que des actionnaires existent qu’ils peuvent élire un CA par résolution ordinaire (arts 110 LSAQ et 106 (3) LCSA): ce sera fait à la première assemblée des actionnaires et lors des assemblées suivantes (arts 110 LSAQ et 106(3) LCSA), sauf stipulation contraire dans les statuts.

Le tribunal possède le pouvoir de réviser les résultats d’une élection (arts 454 ss LSAQ et 145 LCSA).

On peut aménager le droit de vote différemment: On peut donner le droit à une catégorie d’élire un administrateur (arts 144(2)

LSAQ et 109(2) LCSA), mais le devoir de loyauté empêche de considérer d’autres intérêts que ceux de la SPA (voir cependant en Alberta, art 122(4) ABCA);

o « In determining whether a particular transaction is in the best interests of the corporation, a director may give special, but not exclusive consideration to the interests of those who elected or appointed the director »

On peut autoriser un vote dit cumulatif (arts 111, 144(2) LSAQ et 107 LCSA), mais cette option est rarement choisie par les SPA (elle est obligatoire au Nouveau-Brunswick (65(1)).

On peut également s’entendre contractuellement quant à l’exercice des droits de vote.

b. Approbation des règlements Les administrateurs (le CA) ont le pouvoir d’adopter/de modifier les règlements

pour les affaires courantes de la SPA. Ces règlements entrent en vigueur dès leur adoption par le CA.   Lors de l’assemblée suivante, les règlements adoptés seront présentés pour

approbation par les actionnaires. À ce moment, les actionnaires pourront alors rectifier, modifier ou désapprouver les règlements adoptés durant l’année (arts 113(2) LSAQ et 103(2) LCSA).

L’assemblée annuelle est aussi l’occasion pour le CA de présenter les états financiers aux actionnaires.

c. Approbation des états financiersVoir ci-haut.

d. Nomination du vérificateur Le vérificateur est nommé par les actionnaires et est chargé de vérifier/préparer

les rapports financiers de la SPA (arts 231 LSAQ et 162(1) LCSA): ce rapport sera présenté à l’assemblée annuelle. Le vérificateur agit à titre de gatekeeper en principe.

Cependant, la plupart du temps, le vérificateur est proposé par le CA de la SPA: la nomination du vérificateur est considérée comme une question usuelle traitée aux assemblées.

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Il est possible de ne pas avoir de vérificateur, mais il faut que les actionnaires y consentent unanimement. (art 239 LSAQ et art 163(3) LCSA)

Le vérificateur doit être indépendant (art 161(1) LCSA). Il doit faire une vérification quant à des inexactitudes importantes, et pour ce faire, il a accès à toute l’information nécessaire.

Sur les responsabilités du vérificateur par rapport aux actionnaires, on pourra voir Hercules Management v Ernst & Young, supra, chapitre V et aussi Haig v Bamford (1977) SCC.

En principe, la responsabilité des vérificateurs et des autres fautifs sera solidaire.

3. Assemblée extraordinaireModalités de convocations : arts 143 LCSA et 207 ss LSAQ ;

Les actionnaires/tribunaux peuvent convoquer une assemblée lorsque requis (arts 143–144 LCSA).

Les questions discutées lors d’assemblées extraordinaires sont les suivantes:

La destitution des administrateurs; L’approbation des transactions présentant un conflit d’intérêts; Les modifications aux statuts; Certains changements spécifiques; La dissolution

a. La destitution des administrateurs On passera par un vote pour permettre la destitution ou la révocation des

administrateurs. La destitution prendra place lors d’une assemblée extraordinaire et non d’une

assemblée annuelle, voir arts 144 LSAQ et109 LCSA (les deux peuvent cependant avoir lieu en même temps).

L’assemblée extraordinaire est encadrée par les arts 207 ss LSAQ et 133, 143 LCSA.

En cas de vacance au CA, le principe est que les membres restants (constituant quorum) peuvent la combler, sans avoir recours aux actionnaires: il faut cependant faire attention aux vacances d’administrateurs élus par une catégorie (voir art 111(3) LCSA).

o Il est utile de noter qu’aux É-U, certains états ne permettent pas la destitution en cours de mandat.

b. L’approbation de transactions En conflit d’intérêt (voir chapitre V), les régimes présentent des différences dans

l’approche formelle. D’abord, l’administrateur doit se récuser et déclarer le conflit d’intérêt. Si cette

procédure n’est pas suivie, l’art 120(7.1) LCSA prévoie l’obligation de dévoiler aux actionnaires l’intérêt de l’administrateur et l’approbation du contrat par résolution spéciale des actionnaires. Par ailleurs, le contrat doit être jugée « raisonnable et juste » pour la SPA lorsqu’approuvé par les actionnaires – condition qui existe qu’il y ait divulgation ou pas du conflit d’intérêt (provision influencée par North-West Transportation v Beatty (1887) Ont).

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o Au Québec, on prévoit spécifiquement que si tous les administrateurs sont en conflit d’intérêt, alors seuls les actionnaires pourront approuver la transaction (art 129 LSAQ);

o Par ailleurs, s’il est vrai que la résolution venant approuver la transaction n’est qu’à la majorité des actionnaires ayant un droit de vote, les actionnaires en conflit d’intérêt n’ont pas le droit de voter (art 133 (1) LSAQ). L’approche diffère selon les provinces à ce niveau.

o Finalement, au Québec, on parle de l’«intérêt de la SPA»: est-ce plus exigeant que le standard de raisonnabilité et de justice mis en place de la LCSA?

c. Modification des statuts La modification des statuts est assujettie à l’approbation des actionnaires par

résolution spéciale: les statuts constituent la loi fondamentale de la SPA, il est normal que des changements aux statuts soient plutôt encadrés.

La modification des statuts requiert l’approbation des actionnaires, et cette approbation différera selon la loi en vigueur.

Les changements de statuts seront requis pour permettre un changement de nom, la création ou la modification de catégories d’actions… bref de tout ce qui se trouve dans les statuts à l’origine.

Procédure générale o Proposition de changement émanant du CA (arts 240, 241 LSAQ et173-

175 LCSA).o Approbation par vote des deux tiers (résolution spéciale (arts 2 LSAQ et 2

LCSA)) de l’assemblée des actionnaires, o Des statuts de modification sont ensuite émis (arts 243 LSAQ et 177 ss

LCSA).  Procédure particulière – changement affectant des catégories particulières

d’actionso LSAQ :il devra y avoir approbation par résolution spéciale par les

actionnaires de la catégorie visée (2/3 des voix au sein de cette catégorie) dès que, par l’effet de la modification permise à 241 LSAQ, les droits d’une catégorie d’actions sont affectés (on doit «porter atteinte» aux droits (art. 191 LSAQ). Cette disposition affecte les catégories dépourvues de droit de vote également .

o LCSA : l’art 176 LCSA définit les types de modifications qui constituent des atteintes aux droits des actionnaires et assujettit de telles modifications à une résolution spéciale (vote au 2/3) de la catégorie affectée et ce, même si les actions de cette catégorie ne possèdent normalement pas de droit de vote.

NB : La procédure générale continue de s’appliquer.

Lorsque cette situation se produit dans la SPA, il est possible que des actionnaires n’approuvent pas le changement, mais qu’ils le subissent néanmoins.

Dans un tel cas, il existe un dispositif dans la loi qui s’appelle la droit à la dissidence/au rachat (arts 190 LCSA et 372 ss LSAQ).

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d. L’approbation de la fusionFusion ordinaire

Lorsque deux SPA décident de se constituer en une seule société. Pour ce faire, on doit respecter plusieurs procédures : parmi ces procédures, on

doit aller solliciter l’approbation des actionnaires par vote.o  LSAQ : arts 278, 279 LSAQ: on doit approuver la fusion par résolution

spéciale des actionnaires de chaque société fusionnante. o Si l’on fait une modification aux statuts, il faudra l’approuver par résolution

spéciale (arts 240, 241 ss LSAQ), si on modifie une catégorie d’actions, il y aura vote par catégorie (art 191 LSAQ).

o LCSA : art 183 LCSA - vote par résolution spéciale et potentiellement par catégorie aux 2/3 prévu dans cet article directement. Toutes les actions, même sans droit de vote, peuvent se prononcer quant à l’approbation de la fusion (art 183 (3) LCSA): ce droit n’existe que sous la LCSA.

Souvent, lors d’une fusion, on passera par une procédure un peu particulière mais qui permet d’amalgamer l’ensemble des approbations requises en une seule (à condition d’avoir l’autorisation du tribunal) : il s’agit de la procédure d’arrangement (arts 414 ss LSAQ et192 LCSA).

Le droit au rachat/dissidence est disponible dans ce cas (arts 190 LCSA et 372 ss LSAQ), et ce même pour les actions sans droit de vote (art 375 LSAQ).

e. La vente d’actifs Doit correspondre à ce que la loi définit comme une telle vente (une aliénation

qui empêche la poursuite d’activités substantielles par la SPA/une vente de la quasi-totalité des actifs) : définie par la jurisprudence également au niveau de l’application du test. 

o LSAQ: La transaction devra être approuvée par résolution spéciale mais seulement par les actionnaires qui possèdent le droit de vote (arts 271-275, 272 LSAQ).

Cogeco : Le concept de quasi-totalité des biens désigne une vente

représentant 75% des actifs. Doit être soumise à l’approbation des actionnaires (critère quantitatif)

Si la vente constitue néanmoins une réorientation fondamentale touchant au cœur de l’entreprise, on consultera les actionnaires (critère qualitatif)

o LCSA : La transaction devra être approuvée par résolution spéciale de tous les actionnaires, même sans droit de vote (art 189 (3 à 8) LCSA).

Colwill : Évaluation qualitative : vente qui affecte

fondamentalement la nature de la compagnie Le droit au rachat/dissidence reste disponible dans ce cas (arts 190 LCSA et 372

ss LSAQ)

NB : voir COGECO.

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Voir C&R, à la p 566 et s pour la procédure d’arrangement (art 272, 273 LSAQ et art 189 (4) LCSA) – permet aux sociétés de réaliser des changements fondamentaux avec l’autorisation du tribunal lorsque les procédures claires, cohérentes et certaines de la loi ne sont pas en mesure d’accomoder l’opération envisagée.

2 conditions : 1/ société ne doit pas êter insolvable (LSAQ & LCSA) ; 2/ LCSA : SPA doit démontrer au tribunal qu’il lui est pratiquement impossible d’opérer ces changements par les procédures prévues par la loi ; LSAQ : la société doit soit démontrer l’insuffisance de la loi, soit établir que l’application de ses dispositions est difficilement réalisable ou trop onéreuse dans les circonstances.

f. La dissolution de la SPA Les actionnaires peuvent exiger la dissolution de la SPA (arts 211 LCSA et 308

ss LSAQ). La dissolution implique la lquidiation, encadrée par les lois corporatives (arts

207ss LCSA et 323ss LSAQ). Pour une dissolution volontaire, une approbation aux 2/3 des actions votantes

est requise (art 308 LSAQ). Au fédéral, toutes les actions auront droit de voter par rapport à cette approbation (arts 210(3), 211(3) LCSA).

C. Restrictions sur le droit de vote des actionnaires- Pas d’obligation particulière, ni vis-à-vis la SPA, ni la minorité.

Allen v Gold Reefs of West Africa [1900] UK

SPA où des actions sont émises sujettes à appel de versement (dorénavant interdit par la LCSA, possible en vertu de LSAQ). Les statuts de la SPA prévoyaient que les actions non entièrement payées faisaient l’objet d’une sûreté au bénéfice de la SPA; on souhaite changer les statuts afin d’étendre la sûreté à toutes les actions détenues par un actionnaires, que celles-ci aient été payées ou non.Des détenteurs d’actions s’opposent à cette modification, mais la cour la reconnaît comme valide.Le tribunal note au passage que les droits des actionnaires doivent être exercés de bonne foi au bénéfice de la SPA dans son entièreté.

Greenlagh v. Ardene Cinemas [1951] UK

La validité d’une résolution spéciale des actionnaires [pour approuver une modification aux statuts] est assujettie à deux conditions:

1. Il faut que la résolution ait été faite de bonne foi [l’approche est subjective, l’actionnaire doit croire être de bonne foi];

2. Dans l’intérêt de la «company as a whole», donc, ici, sans créer de discrimination entre ses différents actionnaires.

Ainsi, si une résolution vient approuver une mesure discriminatoire de manière désavantageuse pour les minoritaires, elle pourra être remise en question.

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VII. Protection des actionnaires minoritaires Les recours proposés par la loi ont différences fonctions :

o Curativeo Dissuasiveo Pédagogique

La grande acessibilité des recours a des bons et mauvais côtés.

A. Une approche statutaire1. La qualité pour agir des plaignants

- La loi définit les plaignants de façon spécifique à l’art 238 LCSA et art 439 LSAQ afin d’encadrer légalement le droit de recours des plaignants (voir aussi 421, 454, 456, 458, 460-463 LSAQ).

o Le directeur peut intenter un recours au fédéral, mais pas dans toutes les juridictions.

o Les créanciers également- Bien que les principaux visés par ces dispositions législatives soient les

actionnaires minoritaires, le recours est ouvert à d’autres types de plaignants. Selon l’art 238 LCSA :

o Détenteur inscrit ou véritable propriétaire de valeurs mobilières d’une société ou de personnes morales du même groupe (def/valeur mobilière/ action de toute catégorie ou série ou titre de créance sur une société) ;

o Tout administrateur/dirigeant ancien/actuel d’une société ou personnes morales du même groupe ;

o Directeur o Toute autre personne qui a qualité selon le tribunal

Selon l’art 439 LSAQ :o Le détenteur inscrit/bénéficiaire de valeurs mobilières (def/valeur

mobilière/ action et, pour émetteur assujetti, débenture, obligation et billet négociables sur une bourse ou marché de capitaux) ; Contrairement à la LCSA qui ne fait pas de distinction entre les différents types de détenteurs de valeurs mobilières ; pas de mention des créanciers (mais recours possibles selon les circonstances en vertu de la clause discrétionnaire)

o Tout administrateur/dirigeant ancien/actuel d’une société ou personnes morales du même groupe ;

o Toute autre personne qui a qualité selon le tribunalSelon l’art 228(1) BCBCA

o Actionnaire ou autre personne qui a qualité selon le tribunalSelon l’art 239 ABCA

o Détenteur d’une sécurité ;o Administrateur ou directeur de la corporationo Créancier (sous conditions)o Toute autre personne qui a la qualité pour agir selon le tribunal

First Edmonton Place Ltd v 315888 Alberta Ltd (1988) – Alb QB

Faits : Le plaignant est locateur et a loué des bureaux à une société. La SPA en

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question est une coquille vide et le locateur veut poursuivre les trois actionnaires. Un bail a été signé avec la SPA pour une période de 10 ans, 18 mois de loyer gratuit et améliorations locatives de 115 000$ et a payé une somme d’environ 140 000$ à la SPA. Les avocats ont occupé les locaux, payé 3 mois et FEP n’avait pas fait signer de caution (négligence de garantie).Question : Est-ce que les locateurs ont le droit de se considérer comme plaignants dans le cadre d’un recours dérivé et d’un recours pour abus ?Décision :Oui, non.Analyse :Selon la Cour, le statut de plaignant pourra être accordé à un créancier si l’équité et la justice le permettent (selon art 239 (iv) ABCA – équivalent de art 238 (d) LCSA). Il s’agit moins d’une définition qu’une autorisation discrétionnaire de la Cour, lorsqu’une personne à qui fait défaut la qualité d’agir devrait néanmoins se la voir accorder pour des raisons d’équité. Cela signifie :

- Que le véhicule de la SPA a été utilisé pour comettre une fraude contre le plaignant ;

- Que le véhicule de la SPA a été utilisé pour commettre un abus à l’encontre du plaignant ;

Le tribunal refuse le statut de plaignant pour une action en abus :- FEP n’a pas le statut de créancier (pas détenteur de valeur mobilière) ;- Au moment des faits, le locateur n’était pas dans une situations de créancier

(créancier seulement lorsqu’un loyer est dû).Le tribunal accorde le statut de plaignant au locateur, mais seulement dans le cadre d’un recours dérivé (action oblique) en ce qu’il y aurait fraude de la part des trois avocats contre leur propre corporation.NB : Selon Welling, les créanciers ordinaires seraient exclus de la def/détenteurs valeurs mobilières/

B. L’action oblique en droit• Le principe de base en droit des SPA est toujours le même: seule la SPA

peut avoir un recours pour une faute commise à son égard: Foss v Harbottle (1843) UK: cependant, la LCSA (et les autres lois en matière de SPA) proposent dorénavant une procédure spécifique venant encadrer ce type de recours.

• En effet, la plupart des lois en matière de SPA autorisent le recours oblique contre la SPA à condition d’y avoir été autorisé par le tribunal.

• Ce droit vient permettre à des constituantes (ou des intervenantes) de la SPA de prendre fait et cause pour cette dernière contre un CA peu intéressé ou incapable d’agir.

• Parmi les questions que l’on peut se poser, l’une des premières sera de déterminer si le recours est celui de la SPA ou des actionnaires; il est assez difficile de répondre à cette question, comme on le verra.

– Pour déterminer quelle est la réponse à cette question, on se demandera si le dommage à l’actionnaire ne constitue qu’un dommage incident par rapport à celui causé à la SPA:

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essentiellement, est-ce le dommage ne s’est produit qu’à cause de celui fait à la SPA?

Farnham v Fingold (1973) – Ont CA

On allègue la violation de plusieurs droits dans ce dossier, mais certains sont proprement allégués dans le recours collectif engagé alors que d’autres devraient se trouver dans un recours intenté par la SPA. Selon la Cour, si un dommage est subi par la SPA, seule la SPA peut intenter ce recours.

Goldex Mines Ltd v Revill (1974) – Ont CA

En common law, lorsque vient le temps de déterminer si un droit appartient à la SPA ou à l’actionnaire, la question à poser est par rapport au dommage: s’agit-il d’un dommage vis-à-vis de l’actionnaire directement ou est-ce plutôt un dommage indirect, incident à un dommage causé à la SPA ?Dans cette action, les mêmes actes reprochés au CA d’une SPA sont néfastes tant pour la SPA que pour les actionnaires (de fausses informations ont été fournies dans une circulaire de sollicitation de procurations…), doit-on considérer qu’il s’agit d’une action oblique?Soit le dommage est contre les actionnaires, auquel cas on procédera par recours collectif, mais il s’agira d’un recours personnel des actionnaires.Soit le dommage est contre la SPA, auquel cas il faudra passer par l’action oblique et obtenir l’autorisation de la Cour, d’où le problème.Ici, on peut considérer que les membres du CA ont agi dans le sens de leur propre intérêt au détriment de ceux de la SPA mais aussi au détriment des intérêts des actionnaires en tant que groupe; il est cependant important de bien distinguer les recours afin de permettre aux défendeurs de préparer leur réponse.

Goldex met en lumière l’importance de bien séparer les recours personnels et les recours croisés. Par ailleurs, Goldex semble faire allusion à des obligations de loyauté de la majorité envers la minorité des actionnaires. Welling est suspicieux à cet égard.

1. Conditions de l’action obliqueSi le plaintif a la qualité pour agir, que doit-il faire pour que son recours soit entendu ? Vise à éviter les recours abusifs, futiles et vexatoires. Voir art 239 (2) LCSA :

• Le plaignant peut demander l’autorisation au tribunal soit d’intenter une action au nom et pour le compte d’une société ou de l’une de ses filiales, soit d’intervenir dans une action à laquelle est partie une telle personne morale ;

• Le plaignant doit convaincre le tribunal :

(a) Qu’il a donné avis de son intention de présenter la demande aux administrateurs de la société au cas où ils n’ont pas intenté d’action, mis fin, ou agi avec diligence (voir Armstrong – pas de formalité très

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stricte) (absence d’avis = fatale, voir Covia Canada Partnership v PWA [1993] Ont) – « demandeur doit démontrer qu’il a donné avis aux administrateurs de la société de son intention de soumettre cette demande au cas où ces derniers omettraient de la présenter ; (sous l’art 446 LSAQ, pas d’avis requis si tous les administrateurs sont désignés défendeurs)

- le contenu de l’avis envoyé par le demandeur doit exposer les motifs de sa contestation de manière suffisamment précise pour permettre au CA d’évaluer l’opportunité d’intenter une action (Bellman) ;

(b) Qu’il est de bonne foi (flou, présumé en CVL, art 2805 CcQ) 

(c) Qu’il est de l’intérêt de la SPA d’intenter l’action (selon Welling, on définit l’intérêt de la SPA selon l’approche de Peoples) ; agit comme une deuxième preuve de bonne foi (C&R, 683) ; le juge apprécie non pas en cherchant une certitude, mais une apparence d’intérêt (Bellman) ;

- Le juge doit se demander si l’intervention judiciaire sollicité a pour but, à sa face même, de prévenir ou réparer un préjudice causé à la société en assurant le respect des devoirs et obligations envers celle-ci et en favorisant l’imputabilité du conseil d’administration en vue de promouvoir la prospérité financière de cette dernière (C&R, 685)

- Pour répondre, le juge examine (C&R, 685 et s) :

- La nature des violations alléguées (e.g. actes illégaux posés au nom de la SPA, inexécution d’obligation K ou XK envers la SPA, manquement au devoir de prudence, diligence loyauté en vertu des art 120 LCSA et 119 LSAQ)

- L’opinion exprimée par un comité indépendant – relève de la règle de l’appréciation commerciale selon laquelle les tribunaux s’asbtiennent de substituer leur jugement à celui des administrateurs lorsque ceux-ci ont pris une décision de bonne foi et de manière informée en croyant agir honnêtement dans le meilleur intérêt de la société (voir Bellman, mais rejeté pour manque d’indépendance du comité indépendant).

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- Les effets préjudiciables du recours/chance de succès.

- Généralement accordé, fardeau de preuve relativement peu exigeant – seulement la preuve du mérite apparent. Dans cette détermination, le principe de proportionalité s’applique (bénéfices espérés du succès excèdent les effets contraires à l’intérêt de la société).

- Avantages : exécution directe d’obligations financières envers la société ; imputabilité accrue de la part de ses organes décisionnels causant un meilleur rendement ;

- Désavantages : frais judiciaires/extra-judiciaires ; temps consacrés au recours ; indemnités pour les administrateurs ; atteinte à la réputation ;

- Lorsque le plaignant remplit ces conditions, deux moyens peuvent faire échouer la demande : soit il existe un meilleur recours ; soit il s’agit d’un recours propre à l’actionnaire, et non à la SPA.

(Voir art 445, 449 LSAQ)

Armstrong v Gardner (1978) – Ont HC

Les affidavits à l’appui de la requête pour autorisation d’agir au nom de la SPA sont basés sur de l’information de seconde main et des croyances : compte tenu du fait qu’il s’agit d’une procédure interlocutoire et que les actionnaires minoritaires n’auront que très peu d’information disponible en principe, la Cour les accepte afin d’en venir à une décision. Aussi, en ce qui concerne la condition d’avoir fait ce qu’il fallait pour que la corporation intente elle-même l’action, le seul fait d’avoir mentionné (même de façon générale) à un administrateur est suffisant pour satisfaire à ce critère (Ontario).

Bellman v Western Approches Ltd (1981) – BC CA

Une lettre invoquant des manquements de la part du CA est envoyée: une enquête est demandée par la CA la SPA auprès de comptable et d’avocats, lesquels ne trouvent pas suffisamment de preuves pour que l’allégation soit jugée crédible.La Cour se penche donc sur le libellé de la disposition qui requiert que le tribunal ne donne l’autorisation de poursuivre que si la demande est dans l’intérêt de la SPA.Pour ce faire, la Cour prend appui sur la Common law.La Cour note que le comité indépendant qui a pris la décision ne l’était peut-être pas, puisque les administrateurs étaient en fait des administrateurs délégués (nominee).D’autre part, la Cour est d’avis que les administrateurs se sont fondés sur des rapports incomplets.Il suffit qu’il y ait une allégation raisonnable que le recours est intenté dans l’intérêt de la SPA pour que le recours soit accordé. La détermination de l’intérêt se fait durant le procès.

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On accorde donc l’autorisation de poursuivre au nom de la SPA.Cette décision a aussi spécifié qu’il était possible d’intenter un recours pour abus fondé sur les mêmes motifs.

2. Le rôle du comité indépendant  :• Une façon de prévenir les poursuites est de confier la décision de prendre

un recours légal à une comité indépendant du CA: la production du rapport de ce comité pourra servir à justifier la décision de la SPA, mais pourra aussi servir de défense si l’autorisation pour agir est accordée.

3. Procédure d’autorisation de l’action obliqueArt 240 LCSA :

- Le tribunal peut, suite aux actions ou interventions visées à l’article 239, rendre toute ordonnance qu’il estime pertinente et, notamment :

A. autoriser le plaignant ou toute autre personne à assurer la conduite de l’action;

B. donner des instructions sur la conduite de l’action;C. faire payer directement aux anciens ou actuels détenteurs de valeurs

mobilières, et non à la société ou sa filiale, les sommes mises à la charge d’un défendeur;

D. mettre à la charge de la société ou de sa filiale les honoraires légaux raisonnables supportés par le plaignant.

C. Ordonnance de se conformer- Bien que les statuts constitutifs soient protégés par la loi de différentes façons,

les actionnaires minoritaires ne disposent pas de recours de droit commun pour s’assurer que ceux-ci (et d’autres instruments de gestion de la SPA) soient respectés.

- La loi ne fait pas de différence entre un défaut important et un défaut mineur : tout manquement pourra justifier un recours en vertu de l’art 247 LCSA et 460 LSAQ.

D. Le recours pour abus1. Définition de l’abusFondé sur le concept souple de l’équité, le recours en cas d’abus confère au tribunal le pouvoir de redresser une situation d’injustice en tenant compte non seulement des droits explicitement reconnus, mais aussi des intérêts implicites des personnes protégées. Les tribunaux saisis d’une telle deamnde doivent tenir compte de la réalité commerciale, et non seulement de considération strictement juridique, dans la mesure où l’objectif est de rétablir la justice.

Art 241 LCSA : tout plaignant (voir art 238 LCSA) peut demander une ordonnance pour abus ; le tribunal peut par ordonnance redresser la situation provoqué par la société/personne morale de son groupe qui abuse des droits des 1/détenteurs de valeurs mobilières, 2/ créanciers, 3/ administrateurs ou

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dirigeants, ou se montre injuste à leur égard en leur portant préjudice ou en ne tenant pas compte de leurs intérêts :

a) soit en raison de son comportement (actes/résolutions du CA) ;

b) soit par la façon dont elle conduit ses activités ou affaires internes (gestion) ;

c) soit par la façon dont ses administrateurs exercent leurs pouvoirs (recours direct pour manquement aux devoirs)

Art 450 LSAQ est assez similaire, mais ne mentionne pas les créanciers.

Définition jurisprudentielle : défaut de probité ou d’équité dans la gestion des affaires de la société et qui porte préjudice à une partie de ses constituantes (Scottish Cooperative Wholesale Society v Meyer [1959] UK), mais peut être plus large lorsqu’on considère la deuxième partie de l’art 241 LCSA – ne pas considérer les intérêts des actionnaires n’est pas comme tel une forme d’abus, mais suffisant pour déclencher le mécanisme (Mason)

- Ne requiert pas la mauvaise foi (voir Brant Investments) ;

C&R aux pp 730 et s

- Un acte abusif peut prendre différentes formes :o Acte illégal, fraude (même si d’autres recours) (Journet);o Rémunération excessive (UPM Kymmene)o Opération importante

- Les situations suivantes peuvent être considérées comme des abus essentiellement dans les SPA à capital fermé (émetteur fermé) :

o Refus de distribuer des dividendeso Exclusion de la gestion des minoritaires (quant à la distribution des

primes, salaire, etc.) (Naneff, Ebrahimi)o Éviction d’un actionnaire (Ferguson,)o Refus de négocier le rachat des actions

- Dans les SPA publiques, la dynamique change grâce aux mécanismes marchands, ce qui inclut une plus grande liquidité des actions. Néanmoins, situations abusives peuvent survenir lors de prises de contrôle, ou transations importantes.

Re Ferguson and Imax Systems Corp. (1983) – Ont CA

Actionnaire allègue que le fait de forcer le rachat de ses actions par la SPA constituait un abus. Cette décision met de l’avant le concept d’attentes raisonnables et favorise une interprétation large de la notion d’abus.NB : histoire de divorce qui tourne mal, l’époux cherche à évincer l’épouse de l’entreprise.

Westfair Foods v Watt (1991) – Ont CA

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Faits : deux catégories d’actions : dividende fixe et résiduel. Normalement, SPA paye les dividendes fixes et conservaient les revenus pour le reliquat. La SPA a modifié son approche, payant un dividende important aux actionnaires résiduels. Les actionnaires aux dividendes fixes protestent en alléguant que cette décision les privera de leur droit au reliquat.Question : y a-t-il abus ? Est-ce que le droit au partage du reliquat est une attente raisonnable ?Décision : Oui, non.Analyse :La règle du recours pour abus constitue une entorse au principe de la majorité. Ebrahimi  : « there is room in company law for recognition of the fact that behind it, or amongst it, there are individuals with rrights, expectations and obligations inter se which are not necessarily submerged in the company structure ». Par ailleurs, suivant Keho, la Cour préconise une application large et libérale des principes en matière d’abus. La notion d’intérêt se définit en fonction de valeurs qui sont généralement largement acceptés. Il faut regarder les principes adoptés par la jurisprudence et les valeurs qui s’en dégagent, i.e. les administrateurs doivent prendre compte les intérêts de tous les actionnaires et le faire de façon équitable. Une attente raisonnable de profit, et non un simple désir, constitue un intérêt qui mérite la protection des tribunaux. Pour se faire, puisque l’implication dans une SPA constitue une obligation contractée volontairement, s’appuyer sur les mots et actions des parties qui auraient pu nourrir cette attente raisonnable. Il s’agit à ce point d’une analyse factuelle.Ratio : une attente raisonnable de profit doit être protégée.

Deluce Holdings v Air Canada (1992) – Ont

Faits : AC et DH sont actionnaires de Air Ontario, DH minoritaire. CUA pose certaines ententes, dont que les deux parties agiraient de bonne foi dans le meilleur intérêt d’AO et qu’AO serait gérée par un membre de la famille D. AC utilise son pouvoir majoritaire pour mettre fin au contrat d’emploi de D et racheter les actions minoritaires.Question : Y-a-t-il abus ?Décision : Procédure préliminaire – la demande est suffisamment fondée pour procéder.Analyse :Quelles étaient les attentes légitimes ? (Élément subjectif) Celles mentionnées dans la CUA. Pour déterminer ces attentes, la Cour se fonde sur la CUA et les PV du CA. Ici, dans la mesure où la fin du contrat d’emploi n’était pas dans l’intérêt d’AO mais plutôt dans l’intérêt d’AC, on peut y voir une possibilité d’abus. La Cour tente de marquer la différence entre le recours pour abus et d’autres types de recours : la notion d’intérêt et la notion d’attentes sont distinctes, la seconde étant plus large. Par ailleurs, seul l’intérêt d’Air Canada a été pris en considération, ce qui constitue un abus (élément objectif). Ratio : Pour déterminer s’il y a eu abus des droits d’un actionnaire, la Cour doit déterminer quelles étaient les attentes raisonnables de la personne, en fonction des arrangements qui existaient entre les personnes impliquées.

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Le terme abus implique une inégalité des pouvoirs de négociation, alors que le terme inéquitable connote l’idée d’une obligation d’agir équitablement et de manière impartiale dans l’exercise des pouvoirs dévolus (art 241 LCSA)

Platinum Wood Finishing [2009] – Ontario   : Les faits et ententes entre les parties (ici une CUA) serviront de guide aux tribunaux dans leur prise de décision.

Naneff   (voir infra)   : Le juge a toute la latitude nécessaire pour déterminer s’il existe ou non un abus, sauf que la règle de l’appréciation commerciale s’applique.

Brant Investment v Keeprite   : La preuve de mauvaise foi n’est pas nécessaire pour identifier un abus : il est possible que des actes soient par ailleurs légaux, mais constituent néanmoins un abus de par une analyse des faits qui tient compte du contexte et des attentes des parties.

Arthur v Signum Communication : exemple de considérations à prendre en compte pour identifier un abus :

- Pas de justification de la SPA pour expliquer l’acte posé ;- Manque de bonne foi de la part du CA/SPA- Traitement inégal des actionnaires au détriment des minoritaires- Manque d’information, transparence- Plan/projet visant à éliminer un actionnaire minoritaire

Krynen v Bugg (2003) – SCC

Faits : L’un des actionnaires exige le rachat de ses actions par les autres actionnaires. Or les règlements et la convention entre actionnaires ne le prévoient pas. Pas d’abus parce que pas d’attentes raisonnables. En l’absence d’une clause d’achat d’actions expressément prévue dans la convention d’actionnaires, on ne peut pas imposer cet achat. Liste de règles tirées de la jurisprudence :

1. La ligne directrice lorsque vient le temps de démontrer l’existence d’un abus est de déterminer quelles étaient les attentes raisonnables des parties (Ballard);

2. Le terme abus implique une inégalité de pouvoirs de négociation, alors que le terme injuste implique une obligation d’agir de façon équitable et impartiale: (Holdings);

3. Les mots «préjudice injuste» et «ne pas tenir compte des intérêts» exigent des tests moins rigoureux que les tests requis pour être en présence d’un abus (Mason);

4. Il n’est pas nécessaire de faire la preuve de mauvaise foi: (Sidaplex);5. S’il existe des attentes, mais qu’un contrat a «géré» celles-ci, le contrat

prévaudra;6. Les attentes raisonnables peuvent évoluer avec l’écoulement du temps

(Ballard) ;7. On peut appliquer la règle de l’appréciation commerciale lorsque l’on est

confronté à un abus (CW Shareholdings Inc. v WIC Ltd.(1998) – Ont). 3

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étapes :1) est-ce que la conduite était au-delà de ce qui peut être

considéré comme une décision d’affaires raisonnable- Comité indépendant ?- Consultation de conseillers externes indépendents- Obtention d’une approbation par majorité d’actionnaires indépendents SI NON :

2) est-ce que la conduite était conforme aux attentes de la partie plaignante

3) est-ce que la conduite a causé un dommage au plaignant?8. Il n’est pas nécessaire de démontrer un dommage : Sahota v Basra (1999) –

Ont. 9. Un congédiement sans cause n’est pas forcément abusif (voir Naneff).

BCE Inc v Détenteurs de débentures de 1976 (voir supra )

La Cour commence par reconnaître l’existence de 2 courants de jurisprudence:Une lecture stricte des différentes formes d’abus et un classement selon l’abus identifié (abus, préjudice inéquitable, non prise en compte des intérêts injustes) voir Diligenti. Selon la Cour, cette approche ne permet pas d’énoncer de principes généraux quant à ce qui constitue un abus.Une approche plus holistique quant aux principes généraux unit les différents aspects de la notion d’abus: Westfair, Ballard, First Edmonton Place. Pour la Cour, il est plus utile d’utiliser les deux approches concurremment.On doit d’abord identifier les attentes, puis déterminer si leur déception constitue un manquement au sens de l’art 241 LCSA. Pour ce faire, il faut considérer la réalité commerciale et non uniquement la loi. Il faut tenir compte du contexte.Ratio : 1. Y a-t-il une attente raisonnable ? Analyse objective, mais contextuelle. On prend en compte les actes juridiques et autres écrits (voir Krynen) ; nature de la SPA (capital fermé/familial – Ebrahimi  ; société ouverte, plus probable de se fonder sur les actes juridiques que dans les petites sociétés ou capital fermé) ; rapports entre les parties, usages et pratiques (e.g. Naneff) ; caractère réciproque et évolutif des attentes raisonnables (e.g. déclaration régulière de dividende jusqu’à un moment X, semble refléter les attentes réciproques – voir C&R, 716). Application de la règle de jugement d’affaire (Krynen, pt 7) 2. Est-ce que la violation de l’attente raisonnable constitue un abus ou cause un préjudice ? Abus (acte posé dans l’intention de nuire, de mauvaise foi, de manière excessive) > injuste (violation des attentes entraîne des effets injustes, même si de bonne foi).

2. Distinction avec l’action oblique- L’une des difficultés consistent à marquer la différence entre un recours

appartenant aux actionnaires et un recours appartenant à la SPA ;

First Edmonton Place Ltd. v 315888 Alberta Ltd

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Faits : 2 actes reprochés par FEP : avoir 1/ autorisé l’occupation des locaux loués par elle sans impose de loyers aux avocats ; 2/ distribué la somme d’argent reçue de FEP aux administrateurs. Traditionnellement, la règle de la majorité et de la personnalité corporative venait empêcher la plupart des recours par les actionnaires pour les manquements du CA vis-à-vis de la SPA. Les recours obliques et d’abus ont été mis en place pour équilibrer les différents intérêts en jeu dans la SPA, en donnant une discrétion assez large aux cours pour remédier à n’importe quelle situation corporative si elle est inéquitable. Le lien entre les recours pour abus/oblique : il y a un comportement fautif soit vis-à-vis des constituantes, soit vis-à-vis des la SPA.Abusif : vexatoire, hostile, injustifié ; injustement préjudiciable : préjudiciable et au détriment des droits et intérêts du demandeur causé par des actions injustes ; ne pas tenir compte des intérêts de manière injuste : ignorer, de manière injuste ou sans justification, les intérêts d’un groupe de constituants. Bien que FEP n’est pas considéré comme un créancier, le tribunal reconnaît qu’il y a un comportement avoisinant la fraude et que FEP a un intérêt sincère à promouvoir l’intérêt de la corporation. Ainsi, même s’il n’a pas le statut de plaintif des catégories identifiées, on reconnaît qu’il a un intérêt puisque la SPA lui doit maintenant de l’argent et qu’un recours gagnant lui permettra de recouvrir sa créance. Le recours pour abus échoue mais le tribunal accepte d’accorder le recours pour action oblique. NB : un propriétaire n’est pas un créancier vis-à-vis des loyers à venir tant qu’ils ne sont pas dûs. Ratio : Le dommage est fait à la SPA, et pas à FEP, en ce que son intérêt était inexistant au moment des faits allégués (d’où le recours en action oblique et l’échec de l’action pour abus).

Hercules Management v Ernst & Young (1997) – SCC

Faits : Des états financiers ont été mal préparés par les vérificateurs d’une SPA), ce qui aurait causé des dommages aux actionnaires de cette SPA.Question : Est-ce que les vérificateurs ont un devoir de prudence et de diligence vis-à-vis des actionnaires d’une SPA ?Décision : Non.Analyse : La Cour spécifie que le rapport du vérificateur est préparé pour les actionnaires en tant que groupe et non pour chacun d’entre eux personnellement, ce qui empêche de prétendre que le rapport aurait pu servir à un des actionnaires par rapport à son investissement: par rapport à cet usage, il n’est pas possible de prétendre que le vérificateur avait des devoirs.Le recours approprié aurait donc dû être une action oblique.Il semble donc que les tribunaux donnent une interprétation assez large de ce qui constitue un dommage à la SPA.Ratio : sans droit ou intérêt et dommage direct et particulier, il ne peut y avoir recours pour abus. Le dommage à la SPA est compris de façon très libérale.

3. Recours pour abus et devoirs fiduciaires- Il sera souvent difficile de ne pas considérer qu’il y a eu manquement au devoir

de loyauté lorsqu’un administrateur commet une faute affectant aussi les intérêts

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des actionnaires, ce qui rendait, en common law, le recours direct de ceux-ci difficile [Hercules étant un bon cas de figure].

- BCE a cependant confirmé que le fait d’avoir commis une faute vis-à-vis de la SPA n’empêchera pas un recours pour abus de la part de la partie lésée (C&R, 730)

4. Les ordonnances- Les ordonnances possibles en matières d’abus sont variées et multiples ;- Il revient aux tribunaux de moduler l’exercice de ces pouvoirs. Ceux-ci ne sont

d’ailleurs pas tenus de tenir compte des demandes de parties dans le choix d’une ordonnance.

- Le but est de corriger l’abus et non de punir les fautifs .

Naneff v Con-Crete Holdings Ltd (1993) – Ont

Faits : N constitue une SPA (familiale, petite société) qui a réussit à amasser un important capital. Par le biais d’un gel successoral, N a donné toutes les actions ordinaires à ses 2 enfants (A et B), mais a conservé des actions privilégiées avec droit de vote pour lui-même. Suite à un conflit familial, A est mis de côté de la gestion de la SPA et ne reçoit plus de salaire/dividende. Pour le tribunal, il s’agit d’un abus vis-à-vis d’A (pas contesté). Par contre, la première instance ordonne la vente forcée, en bloc de la SPA et c’est cette ordonnance qui fait l’objet d’un appel de la part de CCH.Analyse : Le principe général est que le tribunal d’appel ne devrait pas intervenir au niveau de la détermination des ordonnances ; ainsi, la CA ne devrait intervenir que pour corriger une injustice. Puisqu’il s’agit d’une injustice, le standard de révision est satisfait.La Cour remarque tout d’abord que la situation sous étude est celle d’une entreprise familiale, laquelle diffère d’une entreprise normale. Par ailleurs, la Cour remarque que l’ordonnance devra être faite en considération des intérêts d’Alex en tant qu’actionnaire seulement: voir Stone v Stonehurst Entreprises Ltd. (1987) – NB.La Cour d’appel, tout en reconnaissant l’abus, modifie l’ordonnance puisque celle-ci était estimée comme punitive alors qu’elle aurait dû être réparatrice: pour la cour, imposer au père fondateur de l’entreprise les mêmes conditions qu’au fils quant au rachat est injuste: on ordonne donc plutôt le rachat des actions du fils.

BCE Inc v Détenteurs de débentures

On identifie l’attente raisonnable par différents indices ; on n’exige pas que l’acte abusif soit contre la loi, mais il doit causer un dommage ; facteurs à prendre en compte :

- Pratiques commerciales dans le domaine ;- Type de SPA- Relations personnelles entre les constituantes- Pratiques antérieures- Mesures préventives- Représentations et accords ;- Résolution équitable des conflits (rehet de l’approche américaine de Revlon

duties)La Cour applique ici la 2e partie du test, soit la question de savoir si la violation des

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attentes raisonnables constitue un abus, un préjuice injuste ou un mépris des intérêts des plaignants. Une fois l’attente raisonnable démontrée, la cour devra démontrer que la déception de celle-ci constitue un abus, un préjudice ou une omission : pour la Cour ces différents types d’abus sont complémentaires plutôt que spécifiques. Ensemble, elles permettent d’expliquer ce qui est injuste ou inéquitable et s’entrecroisent parfois ou souvent.

- Dans ce cas, la cour n’arrive pas à identifier d’attentes légitimes pour les détenteurs de débentures.

- La Cour estime au contraire que les différentes communications émanant de la SPA niaient toute forme d’assurance aux détenteurs.

- Ici, on accorde la protection de la règle de l’appréciation commerciale à la SPA, [et le tribunal estime qu’il n’y a pas de manquement aux devoirs fiduciaires].

- La Cour considère également que les dirigeants de la SPA ont tenu compte des intérêts des détenteurs de débenture, ils n’on simplement pas voulu aller plus loin que de leur assurer ce qu’ils avaient promis dans le contrat de prêt. Il est d’ailleurs possible de penser que la SPA ne pouvait pas le faire.

- D’autre part, les pratiques commerciales contredisent les affirmations de détenteurs: en effet, il est courant que des transactions par emprunt créent un endettement important et il est normal que la cote de crédit des débentures fluctue et il est possible de prévoir des dispositions contractuelles à cet effet.

- Finalement, l’acceptation de l’offre était la meilleure option pour la SPA, la privatisation étant inévitable.

UPM-Kymmene (2002) – Ont

CA où des administrateurs travaillent comme représentants de quelques gros actionnaires. La SPA est en processus de restructuration, situation financière précaire. Berg se présente comme administrateur délégué (représentant les intérêts d’un actionnaire) pour aider la situation financière de la SPA. Il veut être nominé comme président du CA ;beaucoup de contacts, mais pas d’expérience dans les pates et papiers. Il se retrouve le 22 février 1999 à présenter un contrat projeté de rémunération le concernant. Or, la SPA n’a pas vraiment les moyens d’avoir une telle position (manque de liquidité). Le CA n’est donc pas ouvert mais propose de reconsidérer l’offre. Deuxième réunion (23 mars 1999) : rapport d’un comptable par rapport au projet de rémunération de B (fait sans connaissance précise de la situation générale de la SPA). Présenté au CA (dont plusieurs sont inexpérimentés, amis de B entre autres), approuve le contrat de rémunération. Deux administrateurs démissionnent (dont le chef du Comité de rémunération). Un des administrateurs s’oppose mais sa dissidence n’est pas inscrit au procès-verbal. Finalement, le K finit par être très désavantageux. Recours pour abus.Question : Est-ce que B a brisé son devoir de loyauté ? Manquement au devoir de prudence/diligence de la part du CA ?Peut-on sauver sur la base de l’appréciation commerciale ? Est-ce que le K était contre les intérêts des actionnaires de la SPA ? Est-ce que B a fait des fausses représentations/fraudes ?Analyse :Oui ; Oui ; Non ; oui ; Non1.Oui.2. Le rapport a été préparé sur la base des informations fragmentaires ; le devoir des

Droit des affaires/TalbotHiver 2016

administrateurs n’est pas seulement de commander un rapport, mais de le questionner. 3. Voir People. Lorsque les administrateurs se sont suffisamment informés et que la décision est raisonnable dans les circonstances, le tribunal se retire. 4. Déçoit les attentes raisonnables et légitimes des actionnaires.5. Il avait fourni des infos potentiellement nuisibles à son cas à la comptable.On reconnaît un manquement au devoir de loyauté de B et un manque de diligence de CA, l’ordonnance du tribunal est de mettre de côté le contrat de rémunération.

E. Les autres recoursi. La demande d’enquête (arts 229 LCSA & 421 LSAQ) ;- Les actionnaires n’ont pas accès aux procès-verbaux du CA ; si on suspecte des

activités douteusesii. La rectification des livres (arts 243 LCSA & 456 LSAQ) ;iii. Les interventions relatives aux assemblées et la contestation

d’élection/nomination (arts 145 LCSA & 454 LSAQ)iv. La dissolution/liquidation judiciaire (arts 213, 214 LCSA & 461–463 LSAQ)

- On pourra avoir une liquidation dans les cas suivants :o Impasse ;o SPA a perdu sa raison d’êtreo En cas de perte de confiance dans l’administrationo En cas de violation des attentes légitimes dans les cas

d’une SPA semblable à une société de personnes (Ebrahimi)

- Il faut cependant qu’il sa’gisse du seul recours possible (dernier recours) ;

- Il faut aussi que le demandeur soit sans blâme.