l'organisation de la relation au coeur du soin infirmier

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Ivan DELAIR Promotion 2011/2014 IFSI SAVERNE Page 1 DELAIR Ivan Promotion 2011-2014 L’ORGANISATION DE LA RELATION AU COEUR DU SOIN INFIRMIER Travail écrit de fin d’études en vue de l’obtention du diplôme d’état infirmier Centre Hospitalier St Catherine – IFSI de Saverne 19 Côte de Saverne 67700 SAVERNE

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Ivan DELAIR – Promotion 2011/2014 – IFSI SAVERNE

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DELAIR Ivan

Promotion 2011-2014

L’ORGANISATION

DE LA RELATION

AU COEUR DU SOIN

INFIRMIER

Travail écrit de fin d’études

en vue de l’obtention du diplôme d’état infirmier

Centre Hospitalier St Catherine – IFSI de Saverne

19 Côte de Saverne 67700 SAVERNE

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REMERCIEMENTS

Je remercie toutes les personnes qui m’ont soutenu durant ma formation et

dans la rédaction de ce mémoire de fin d’étude.

Je remercie tout particulièrement mon épouse Patricia et ma fille Emma ainsi

que mes parents et mon frère qui m’ont encouragé pendant ces trois années de

formation.

Je souhaite également remercier ma référente de suivi pédagogique et

directrice de mémoire, Isabelle BAYLE, qui m’a guidé dans mon cheminement

professionnel et dans la rédaction de ce mémoire de fin d’étude.

Merci également aux cadres formatrices de l’IFSI de Saverne et aux

intervenants extérieurs pour leurs enseignements. Merci à Laurence SCHWOOB

pour la relecture du mémoire et pour tous les bons conseils. Merci aussi à Sylvie

THOLE qui m’a fait découvrir le métier d’infirmier.

Merci à mes camarades de promotion avec qui j’ai partagé des moments forts.

Merci aussi aux professionnels de santé que j’ai rencontrés lors de mes stages

et qui m’ont permis de me construire professionnellement.

Enfin, merci à mes amis qui ont su m’accompagner dans mon projet d’étude

en soins infirmiers.

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Ivan DELAIR – Promotion 2011/2014 – IFSI SAVERNE

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« Je me suis trompé sur le sens de notre métier, sur le sens de l’acte médical. La médecine, la vraie, celle

du Bien, n’est jamais la simple pratique d’actes techniques froids sur des êtres insensibles. Elle est

d’abord et avant tout compassion, amour, écoute de cet être malade, elle est réconfort.

Elle est, comment te dire… Elle est d’abord don de soi, don volontaire, quotidien, parce que ce don, cet

amour est la seule bonne réponse, le seul vrai barrage à la souffrance, à la peur, à la solitude de la

maladie. La prouesse technologique, scientifique ne trouve son sens que si elle reconnaît l’autre, le

patient, comme la seule, la vraie raison de l’acte médical »

Michael BISHOP, « lettre à David »1

1 KHAYAT David. Le coffre des âmes. Paris : éditions X O, 2002, 280p

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TABLE DES MATIERES

Introduction page 6

1. L’objet de ma recherche : page 7

1.1 Questionnement page 7

1.2 Question de départ page 7

1.3 Cadre conceptuel page 7

1.3.1 Soins infirmiers page 8

1.3.2 La relation page 10

1.3.3 L’organisation page 15

1.4 Mon hypothèse de recherche page 15

2. Mon outil d’investigation page 16

2.1 Mes objectifs page 16

2.2 Choix de mon outil d’enquête page 16

2.3 Choix de la population page 16

2.4 Structure du guide d’entretien page 16

2.5 Limites de l’enquête page 17

3. Analyse page 18

3.1 Analyse des entretiens page 18

3.1.1 L’impact du sexe du soignant dans la relation

page 18

3.1.2 La place de la relation

Page 20

3.1.3 Les soins techniques et la relation

Page 21

3.1.4 Des exemples illustrant l’importance de la relation

Page 22

3.1.5 Les éléments clefs de l’organisation

Page 23

3.2 Conclusion de l’enquête page 23

Conclusion page 25

Bibliographie page 27

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Annexes

- Annexe I : l’article R 4311-2 du décret n°2004-802 du 29 juillet 2004 relatif

à la profession d’infirmier ou d’infirmière

- Annexe II : Schéma de l’intersubjectivité chez Gabriel Marcel

- Annexe III : Guide d’entretien

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Introduction :

Mes différents stages effectués dans le cadre de ma formation en soins infirmiers à

l’institut de formation en soins infirmiers de Saverne m’ont fait découvrir un

nouveau monde. En effet, après dix ans en tant que chargé de clientèle dans le milieu

bancaire, j’ai décidé de changer d’horizon et de me tourner vers les soins infirmiers.

En effet, je n’arrivais plus à donner du sens à ce que je faisais. Par conséquent, après

deux stages de découverte du métier d’infirmier, j’ai tout de suite été attiré par les

dimensions humaines et techniques des soins infirmiers. J’ai alors franchi le pas et

j’ai particulièrement perçu ces dimensions humaines et techniques lors de deux

situations vécues en stages.

La première situation marquante s’est déroulée en chirurgie au semestre deux. La

deuxième situation s’est tenue en psychiatrie dans un hôpital de jour au semestre

trois.

Durant mon stage en chirurgie digestive, j’ai pris en charge une femme

gastrostomisée, âgée de quatre-vingts ans. Elle présentait une aphasie et une démence

avancée. Pour compliquer la situation, elle était en isolement septique car un

prélèvement avait révélé la présence d’une bactérie multi résistante dans les selles.

Le port de matériel de protection était obligatoire. Compte tenu du contexte

infectieux, je devais concentrer tous les soins et les limiter dans le temps afin

d’optimiser ma présence dans sa chambre. J’exécutais mes soins techniques selon les

protocoles du service en essayant de réduire au maximum mon temps de présence.

Mais au fil des jours, je me suis rendu compte que la patiente mangeait de moins en

moins et était triste par le manque de contact. J’étais partagé entre deux sentiments :

le sentiment d’avoir bien progressé dans mon apprentissage de gestes techniques et le

sentiment de n’avoir pas répondu favorablement aux messages que la patiente

m’envoyait. Les jours suivants, j’ai compris qu’il fallait que je me concentre

davantage sur les soins relationnels même si l’exigence des soins techniques

s’imposait. En privilégiant les contacts visuels et tactiles, j’ai pu constater que la

patiente avait retrouvé son appétit.

L’autre situation s’est déroulée dans un service psychiatrique d’hôpital de jour. Un

matin, j’ai eu l’opportunité d’effectuer une injection en intramusculaire d’un

médicament antipsychotique à action prolongée pour un patient schizophrène de

trente ans.

Aux côtés de son infirmière référente, j’avais participé aux entretiens infirmiers de

suivi psychiatrique. Je connaissais bien ce patient, mais je ne maitrisais pas le geste

technique. J’étais paniqué à l’idée de lui faire mal car je n’avais jamais effectué

d’injection intramusculaire auparavant.

Accompagné par l’infirmière, j’ai exécuté le soin avec beaucoup d’hésitation et

surtout j’avais complètement oublié de communiquer avec le patient tellement j’étais

absorbé par mon protocole. Heureusement, l’infirmière qui m’accompagnait avait

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maintenu le contact avec le patient. Après le soin, l’infirmière m’a fait part de ses

remarques. Elle m’a tout d’abord rassuré en me disant que c’était normal de ne pas

maitriser le protocole à la première injection, mais elle a souligné l’importance du

soin relationnel durant cette injection. Au fil des jours, le protocole d’injection

n’avait plus de secret pour moi. J’étais alors rassuré puisque je maitrisais bien le

geste technique. Par conséquent, j’ai pu me concentrer sur cette dimension

relationnelle et humaine de ce soin technique.

Mes stages suivants m’ont amené à réfléchir davantage sur la place des soins

relationnels et techniques dans la prise en charge infirmière.

1.L’objet de ma recherche :

1.1. Mon Questionnement :

En effet, à la suite de ces expériences, je me suis alors posé plusieurs questions :

- Dans quelle mesure la dimension relationnelle s’intègre-t-elle dans le soin

technique ?

- Comment l’infirmier doit s’organiser pour intégrer la technicité et le

relationnel dans ses soins ?

- En quoi un soin technique peut-il être une menace dans la prise de contact

avec le patient ? Et inversement, en quoi un soin technique peut-il être une

opportunité pour rentrer en contact avec le patient ?

- Est-ce que le soin technique ne nous éloigne pas dans certains cas de la

relation avec le patient ?

- Quelle place donne l’infirmier aux soins relationnels dans l’exécution des

soins techniques ?

1.2 Question de départ :

Finalement, après de multiples réflexions ma question de départ est : quelle place le

personnel infirmier donne-t-il à ses soins relationnels et techniques dans son

organisation quotidienne ?

1.3 Le cadre conceptuel :

En me basant sur ma question de départ, trois concepts ressortent naturellement :

les soins infirmiers, la relation et l’organisation

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1.3.1. Les soins infirmiers :

Au niveau législatif :

Au niveau législatif, les soins infirmiers sont définis par l’article R 4311-2 du décret

n°2004-802 du 29 juillet 2004 relatif à la profession d’infirmier ou d’infirmière (cf

Annexe I). Ce décret dit que : « les soins infirmiers, préventifs, curatifs ou palliatifs,

intègrent qualité technique et qualité des relations avec le malade. ». Les soins

infirmiers intègrent non seulement une dimension de « qualité technique » mais aussi

une dimension tournée vers la « qualité des relations avec le malade».

Ce point législatif permet de comprendre que la loi formalise le fait que les soins

infirmiers possèdent intrinsèquement une qualité tant technique que relationnelle.

Selon le dictionnaire des soins infirmiers2 : « les soins infirmiers correspondent à

l’ensemble de connaissances, de compétences et de techniques relatives à la

conception et à la mise en œuvre d’actes de soins infirmiers. Ils contribuent à

répondre aux besoins de santé d’une personne et/ou d’une collectivité et font l’objet

de la discipline enseignée au personnel infirmier ». Le dictionnaire des soins

infirmiers confirme que les soins infirmiers sont liés à des savoirs et à des savoirs-

faire. Je pense que ce mélange entre savoirs et savoir-faire est le cœur des soins

infirmiers. Le but est de répondre « aux besoins de santé d’une personne ou d’une

collectivité ». Par conséquent le personnel infirmier doit être à l’écoute de ces

besoins de santé.

Les soins techniques :

D’après le dictionnaire des soins infirmiers, les soins techniques sont : « des actes de

soins infirmiers effectués selon des procédures spécifiques et impliquant l’usage de

produits et/ou de matériels appropriés ». Le décret n°2002-194 du 11 février 2002

relatif aux actes professionnels et à l’exercice de la profession d’infirmier et

d’infirmière précise les actes relevant de la compétence infirmière. Ces actes

requièrent donc une habileté, une dextérité ainsi qu’une base de connaissances. Nous

retrouvons bien dans cette définition cette dualité du soin infirmier qui demande des

savoirs mais aussi des savoir-faire.

Les soins relationnels :

Selon le dictionnaire des soins infirmiers, les soins relationnels se définissent par

les : « interventions verbales et/ou non verbales visant à établir une communication

en vue d’apporter aide et soutien psychologiques à une personne ou à un groupe ».

Les soins relationnels se réalisent grâce à la communication. Le verbe communiquer

vient du latin comunicare qui veut dire être en relation, s’associer et partager. Cette

communication peut être verbale ou non verbale adaptée à la personne soignée dans

le cadre de son projet de soin. Je l’ai personnellement constaté lors de mes deux

situations et particulièrement dans la deuxième situation en psychiatrie.

2 Dictionnaire des soins infirmiers et de la profession infirmière, 3ème édition, AMIEC Recherche, Paris :

MASSON, 2005, page 274

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La notion de « prendre soin » :

La notion de « prendre soin » est inhérente aux soins infirmiers. Des nombreux

auteurs se sont penchés sur la notion de « Prendre soin ». Notamment, Marie

Françoise COLLIERE a apporté en 1982 dans son livre « Promouvoir la vie » sa

réflexion sur les théories de soins infirmiers en se basant notamment sur les « notes »

de Florence Nightingale et la notion de « besoin » propre à Virginia Henderson. Elle

apporte sa vision en disant que : « identifier les soins infirmiers, c’est s’interroger

sur ce qui les caractérise, sur ce qui fonde leur identité » à savoir que les soins ne

peuvent pas être fondés sur : « des caractéristiques uniformes, des constantes ou

théories à appliquer de façon stéréotypée »3. Elle rajoute qu’il faut bien discerner la

nature des soins, selon qu’ils soient des soins coutumiers et habituels (care) et les

soins de réparation (cure).

De plus, Walter HESBEEN a lui clarifié la notion de prendre soin en rappelant : « les

petites choses » constitutives du soin infirmier malgré la place prise par les gestes

techniques4 sont l’essence même des soins infirmiers. Il rajoute que les soins

infirmiers sont : « vastes, flous, peu systématiques et peu spectaculaires et qu’il est

difficile de les décrire de manière exhaustive »5. J’apprécie particulièrement les

points de vue de Walter HESBEEN et de Françoise COLLIERE. Ils montrent bien

que les soins infirmiers sont la somme de « petites choses » « peu

spectaculaires » non uniformes et qu’il est impossible de standardiser les soins

infirmiers tellement ils sont propres à chaque soignant et adaptés à chaque patient.

Notion de « Qualité des soins »

Hannu VUORI, médecin et chercheur finlandais, dans sa publication à l’organisation

mondiale de la santé en 1984, pose quatre questions pour élaborer sa définition de la

qualité des soins6 :

o La qualité pour qui ?

o La qualité définie par qui ?

o Destinée à quoi ?

o De quelle qualité s’agit-il ? ,

Pour lui, la qualité des soins repose sur ces quatre questions. Finalement, même si

cette définition date de quasiment trente ans, elle reste d’actualité.

Walter HESBEEN a écrit plus récemment dans son livre intitulé « La qualité du soin

infirmier » qu’il est difficile de qualifier le soin infirmier sur des critères mesurables

car cela tendrait à avoir une approche réductrice créant un leurre et en occultant

souvent la notion d’humanité dans le soin. Pour lui : « l’accueil, l’écoute, la

disponibilité et la créativité des soignants, combinés à leurs connaissances de nature

scientifique et habiletés techniques, y apparaissent comme les déterminants

essentiels d’un soin de qualité ». Enfin, il détermine les sept facteurs constituant la

3 COLLIERE Marie Françoise. Promouvoir la vie. Paris : Editions InterEditions MASSON, 1982, p391 4 HESBEEN Walter. Prendre soin à l’hôpital. Paris : MASSON, 1997, page 45 5 HESBEEN Walter. La qualité du soin infirmier. 2ème édition, Paris : MASSON, 1998, 2002, page 39 6 VUORI Hannu. L'Assurance de la qualité des prestations de santé. Bureau européen de l'OMS, Copenhague,

1984

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qualité des soins7. Il explique qu’à l’image d’une chaine où chaque maillon est

important, les sept déterminants sont les suivants :

o les aspects politiques et économiques

o l’organisation concrète des structures

o les réflexions philosophiques et connaissances techniques et

scientifiques

o la formation des professionnels

o le comportement et la compétence des acteurs

o la personne soignée et ses proches

o les méthodes de recueil d’informations sur les pratiques et aux

démarches d’évaluation

Nous nous rendons compte au travers de Walter HESBEEN que finalement ces

fondamentaux du soin infirmier datent de seulement une quinzaine d’année et que la

conceptualisation de la qualité des soins infirmiers est relativement récente. De mon

point de vue, cela laisse encore entrevoir de belles opportunités dans la recherche en

soins infirmiers pour les années à venir.

1.3.2. La relation :

La relation est un concept fondamental dans les sciences infirmières. Beaucoup

d’auteurs ont théorisé la relation dans les soins infirmiers. Cette relation entre deux

individus, un soignant et un soigné, se fait au travers de la communication définie

précédemment. Je vous exposerai la définition de la relation, celle de la notion de

soignant-soigné, celle de l’intersubjectivité liée à la relation et je terminerai par la

relation entre le soignant et les proches du patient. J’aurai pu inclure à ce plan la

relation au sein de l’équipe soignante, mais je pense que ce sujet est tellement vaste

qu’il aurait pu faire l’objet à lui tout seul d’un sujet de mémoire de fin d’étude.

La relation :

La définition du dictionnaire Petit Robert indique que la relation est : « une liaison

entre couples d’éléments qui ont un rapport, une connexion ou une corrélation8 ».

Un caractère lié à la dépendance peut être ajouté et symbolisé par le fait que le

patient peut être alité ou assis et que l’infirmier se tient habituellement à son chevet

en position debout. Dr David Khayat, cancérologue, parle d’un « rapport

perpendiculaire9». Je tiens particulièrement à souligner ce « rapport

perpendiculaire ». Selon moi, cette disposition dans l’espace de soin peut modifier

fondamentalement la relation. A l’image d’une pièce de théâtre, la verticalité du

soignant impose une distribution préétablie des rôles. Cela peut être accentué par le

fait que selon son degré d’autonomie, le patient dépend de l’infirmier pour ses gestes

7 HESBEEN Walter. La qualité du soin infirmier. 2ème édition, Paris : MASSON, 1998, 2002, page 60 8 Dictionnaire Petit Robert. Paris : Les éditions LE ROBERT, 1985 p2171 9 KHAYAT David. De larmes et de sang. Paris : Editions Odile Jacob, 2013, page 61

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du quotidien. Ma première situation en est bien l’illustration. De mon point de vue,

l’infirmier doit tenir compte dans ses soins de cette relation asymétrique pour qu’elle

soit vécue le mieux possible par le patient.

La notion de soignant-soigné :

Le verbe soigner vient du latin soniare qui veut dire « s’occuper de » et « prendre

soin ». D’après le dictionnaire Petit Larousse, soigner signifie : « procurer les soins

nécessaires à la guérison de quelqu’un ». De plus, il rajoute que soigner correspond

aussi à : « avoir soin de s’en occuper (quelqu’un ou quelque chose) ». Cette dernière

notion est pour moi fondamentale car soigner ne veut pas toujours dire guérir.

La notion de soignant-soigné est la base de la relation en soins infirmiers car elle fixe

les rôles de chacun.

D’un côté, nous avons le soigné que nous appelons habituellement un patient.

D’après le Petit Larousse, le patient est une personne qui consulte un médecin10.

Même si le mot patient est issu de l’adjectif patient qui se caractérise par une certaine

passivité, le patient est aujourd’hui souvent acteur de son projet de soin. Il a un rôle

actif dans la relation soignant-soigné. J’ai constaté au cours de mes stages que

certains établissements de santé n’hésitent d’ailleurs plus à utiliser le mot clients

pour désigner les patients, avec les droits et devoirs que cela impose de la part des

deux parties.

De l’autre côté, nous avons le soignant qui est un professionnel de la santé et qui a

pour rôle de prendre en soin la personne soignée, mais « prendre en soin » au sens

que Walter HESBEEN l’a défini c’est à dire la prise en soin est « un art […] qui

réussit à combiner des éléments de connaissance, d’habileté, de savoir-être,

d’intuition qui vont permettre de venir en aide 11» au soigné. D’après le dictionnaire

Petit Larousse, le soignant est : « une personne qui donne des soins, en particulier

quand elle n’est pas médecin ». Le soigné est : « une personne qui manifeste le soin

de sa personne12 ». Le fait qu’il soit dit que le soigné « manifeste » le soin veut dire

que le rôle du soignant sera d’identifier et de décrypter les manifestations du soigné

pour une relation soignant-soigné efficace.

D’après le dictionnaire encyclopédique des soins infirmiers, la relation soignant-

soigné est : « l’interaction entre deux personnes se trouvant dans une situation de

soins renouvelée par ce qu’elle offre d’inconnu, de complexe et d’imprévisible. Elle

est le fondement de la prise en charge globale du patient » 13.

Laure MARMILLAUD a décrit l’influence de la relation sur le soin du patient. Elle

dit qu’il faut d’abord approcher et « rencontrer » la personne soignée14. Alexandre

10 Dictionnaire Petit Larousse. Paris : Les éditions LAROUSSE, 1999, p1870 11 HESBEEN Walter, Prendre soin à l’hôpital. Paris, MASSON, 1997, page 35 12 Dictionnaire Petit Larousse. Paris : Les éditions LAROUSSE, 1999, p1870 13 Dictionnaire des soins infirmiers et de la profession infirmière, 3ème édition, AMIEC Recherche, Paris :

MASSON, 2005, page 235 14 MARMILLAUD Laure. Soigner, un choix d’humanité. Paris : Vuibert, 2007, p124

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MANOUKIAN raisonne de la même manière en disant « A ce moment-là s’effectue

ce que nous pouvons nommer une véritable rencontre »15.

Pour moi aussi, le point de départ de la relation est avant tout la rencontre entre deux

personnes qui vont vivre ensemble une situation de soin, avec tout ce que cela

suppose en évènements imprévisibles. Dans mon expérience professionnelle

bancaire, j’avais remarqué au même titre que Laure MARMILLAUD que cette notion

de rencontre et de découverte de l’autre était un préalable à une relation de qualité. Je

considérais chaque nouveau client comme une véritable découverte humaine.

Louis MALABEUF a identifié qu’il y avait quatre étapes dans la relation soignant-

soigné : « la relation sociale de civilité, la relation fonctionnelle, la relation d’aide et

enfin la relation d’aide thérapeutique ». De son côté, Hildegard PEPLAU, dans

« Relations interpersonnelles en soins infirmiers »16 a aussi démontré dès 1952 que la

relation dite du : « give-and-take » donne un caractère actif de la relation infirmière-

client17. L’infirmière ne remplit pas uniquement son rôle infirmier sur prescription

médicale, mais elle a aussi un rôle propre à exercer auprès du patient. De plus, le

patient n’est pas forcément passif face aux soins, il peut avoir un rôle de coopération

active avec l’infirmière. Je pense que cette double dynamique est fondamentale dans

la réussite de la relation dans les soins infirmiers. Nous avons vu précédemment que

la relation soignant/soigné est asymétrique au niveau du placement dans l’espace et

par les rôles de chacun rappelés par les codes vestimentaires. Mais pour que la

relation soit optimale, l’infirmier doit s’atteler à créer une relation plutôt symétrique

avec le soigné. Même si encore une fois chacun a son rôle, il est important de

rappeler qu’il s’agit d’une relation d’humain à humain. Cette dualité entre symétrie et

asymétrie est à prendre en considération dans le cadre infirmier. Avant d’être

médecin, Dr David KHAYAT a été, durant sa jeunesse, un soigné. Cela l’a marqué.

Cela a fait de lui un cancérologue « humain » que nous connaissons aujourd’hui.

D’ailleurs, ce côté humain, le soignant s’en rend parfois compte le jour où il devient

à son tour soigné et attend une relation équilibrée avec le soignant, finalement

comme n’importe quel soigné.

Pour aller plus loin dans la notion de soignant-soigné, il me paraît personnellement

important d’aborder la notion d’ « humanitude » crée par Yves GINESTE et Rosette

MARESCOTTI. L’humanitude est une méthode essentiellement utilisée en gériatrie

basée sur quatre principes18 :

o La parole : elle doit annoncer et expliquer chaque geste

o Le toucher : il s'agit de transformer le "toucher utilitaire" en

"toucher tendresse"

o Le regard : il doit s'échanger face à face, les yeux dans les

yeux, à hauteur du visage

15 MANOUKIAN Alexandre. La relation soignant-soigné. 3ème édition, Rueil-Malmaison : Editions LAMARRE,

2008, p223 16 PEPLAU Hildegard. Relations interpersonnelles en soins infirmiers. (Traduction de l'édition américaine de

1988 par Anne Pietrasik), Paris : InterEditions, 1995 17 Le terme client est le terme habituel pour désigner le patient dans les pays anglosaxons 18 GINESTE Yves, Jérôme PELLISSIER. Humanitude – Comprendre la vieillesse, prendre soin des Hommes

vieux. Paris : Editions Armand Colin, 2007, p320

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o La verticalité : la verticalité est l'une des caractéristiques qui

nous distingue des animaux, d'où l'importance de lever la

personne. Pour Yves Gineste, une personne âgée correctement

accompagnée peut et doit vivre debout.

Au travers de cette méthode qui a fait ses preuves notamment auprès de patients

atteints de la maladie d’Alzheimer19, nous voyons bien que la notion de verticalité

que je vous ai énoncée grâce à Dr KHAYAT est ici transposée au patient. Le patient

retrouve alors un rôle « vertical » face au soignant. La relation soignant-soigné

devient alors équilibrée avec un regard yeux dans les yeux et finalement les soins

infirmiers deviennent naturellement plus faciles à réaliser.

Durant mon expérience professionnelle précédente, j’avais déjà observé que la

distribution des rôles dans l’espace avait un impact sur la qualité de la relation avec

mes clients. J’avais noté que par exemple ma relation était meilleure lorsque je

recevais mon client autour d’une table ronde plutôt que derrière mon bureau. En

effet, le fait d’accueillir mon client autour d’une table ronde me permettait d’être

physiquement presque côte à côte avec mon client plutôt que d’être face à lui. Cela

peut paraître étonnant, mais être côte à côte à la même table plutôt qu’être en face de

quelqu’un derrière un bureau modifie les rapports humains. Durant mes stages en

soins infirmiers, j’ai retrouvé ce lien entre l’organisation dans l’espace et la qualité

de la relation soignant-soigné. J’ai toujours fait attention à mon positionnement dans

l’espace du soigné, par exemple en évitant de tourner le dos au patient ou en me

baissant pour pouvoir lui parler les yeux dans les yeux. Ma sensibilité naturelle à

cette organisation dans l’espace m’a certainement permis d’avoir une qualité de

relation avec les patients.

La notion d’intersubjectivité, préalable à la relation :

La notion d’intersubjectivité peut paraître vague de prime abord. Selon le

dictionnaire Petit Larousse, l’intersubjectivité correspond à une communication entre

les consciences individuelles impliquant échange et réciprocité20. Je tenais à vous

faire part des récents travaux en recherches infirmières de la part de Chantal Verdon,

infirmière québécoise. Elle a travaillé sur l’intersubjectivité de la relation

soignant/soigné. Dans sa thèse21 intitulée « La nature, les conditions et limites de la

relation soignant/soigné selon la notion d’intersubjectivité de Gabriel MARCEL22 »,

elle explique le lien entre la relation et la notion d’intersubjectivité. Chantal

VERDON a soutenu sa thèse en août 2012 à la faculté de Laval au Québec et précise

que « l'idée même de relation ne peut être pensée et conçue sans celle de

l'intersubjectivité; celle-ci est un préalable nécessaire à toute relation [...] L'analyse

de la pensée de Gabriel Marcel sur l'intersubjectivité offre un regard véritablement

19 Successful Aging Database, Evaluation de la méthodologie de soin Gineste-Marescotti, dite « humanitude »,

lors de formations in situ. Actes Colloques, Paris, 2008, p8 20 Dictionnaire Petit Larousse. Paris : Les éditions LAROUSSE, 1999, p1870 21 VERDON Chantal. Thèse intitulée La nature, les conditions et les limites de la relation infirmières/soigné

selon la notion d’intersubjectivité chez Gabriel MARCEL. Université de Laval, Québec, août 2012. 22 Gabriel MARCEL (1889-1973) est un philosophe du courant existentiel.

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intéressant pour mieux comprendre et situer la relation d'humain à humain, puis plus

spécifiquement celle entre une infirmière et la personne soignée.». On y retrouve la

notion de symétrie liée à la rencontre de deux êtres humains.

En effet, Gabriel MARCEL définit l’intersubjectivité comme le précurseur de toute

relation c’est à dire un préalable à toute relation23. Il dit que cela se fait en trois

temps, tout d’abord la présence d’un lien entre deux personnes, puis un passage du

soi vers l’autre et enfin une communion entre les personnes (cf schéma Annexe II).

Le fait que deux personnes se nourrissent l’une et l’autre de leurs échanges

caractérise une véritable relation et la distingue d’un simple contact ou d’une banale

rencontre. L’approche de Gabriel MARCEL et l’analyse de Chantal VERDON m’ont

énormément plu car elles mettent l’accent sur le fait qu’il faut passer par « le soi »

avant de pouvoir aller vers l’autre. Nous pourrions poursuivre notre réflexion vers la

notion de juste distance thérapeutique qui revêt alors toute son utilité au travers des

notions de transfert et de contre transfert propres à Sigmud FREUD puis développées

en France par Michel Neyraut24. La distance thérapeutique est le positionnement du

soignant par rapport au patient. Pour que la relation soit durablement équilibrée, le

soignant doit gérer le fait qu’il peut être associé par le patient à un proche ou un

membre de sa famille (transfert) et qu’il peut avoir des réactions de défense face à ce

phénomène (contre-transfert). La connaissance de soi est une première étape pour se

préparer à ajuster cette distance thérapeutique et par conséquent obtenir une relation

équilibrée.

En résumé, nous ne rencontrons l’autre que si nous passons par nous-même c’est-à-

dire par notre vécu et nos expériences passées. Il est donc essentiel pour le personnel

infirmier que nous sommes d’avoir un rapport équilibré et durable avec soi pour

pouvoir créer une relation équilibré avec le soigné.

Ce point précis est pour moi très important car je suis convaincu qu’un soignant qui

n’est pas relativement équilibré dans sa propre vie ne peut pas durablement soigner

les autres.

La relation soignant-proches :

La relation du soignant avec les proches du patient n’est finalement pas uniquement

une relation bipartite « proches-soignant ». Elle est plutôt triangulaire puisque c’est

au travers du patient que le soignant est en contact avec les proches. Les proches sont

constitués des membres de la famille, d’amis du patient et de connaissances. Selon,

le dictionnaire Petit Larousse, la famille est : « un ensemble formé par le père, la

mère et les enfants». Cette définition paraît néanmoins limitative dans notre cadre

infirmier car elle n’intègre pas les autres membres de la famille tels que les grands

parents, les petits enfants et les autres degrés de parenté.

Les amis sont d’après le dictionnaire Petit Larousse, « des personnes pour lesquelles

on a de l’amitié, de l’affection, ou avec lesquelles on a des affinités ». Les

connaissances sont simplement « des personnes que l’on connaît »25.

23 MARCEL Gabriel. Etre et avoir, Paris : éditions Aubier, 1935, p357 24 NEYRAIULT Michel. Le transfert : étude psychanalytique. Paris : PUF, 1974, p281 25 Dictionnaire Petit Larousse. Paris : Les éditions LAROUSSE, 1999, p1870

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La relation avec les proches que nous venons de définir est fondamentale. Autant

dans certains cas, elle peut être une ressource dans la prise en soin du patient, autant

dans d’autres cas, elle peut freiner voire nuire au projet de soin du patient. J’ai

personnellement vécu les deux types de situations. Dans un exemple précis, le

discours des soignants n’était pas accepté par le patient et la famille est alors devenue

le relais auprès du patient pour expliquer le sens des soins réalisés. Dans un autre cas,

j’ai vécu la pesanteur qu’un membre de la famille pouvait avoir sur l’équipe

soignante. Le patient comprenait bien la situation et acceptait les soins mais un

membre de sa famille harcelait l’équipe soignante car il était dans le déni de la

maladie et ne comprenait pas le sens des soins. Ce type de situation peut alors nuire à

la prise en soin du patient.

Dans le cadre de la relation avec les proches, le soignant doit alors tenir son rôle de

soignant sans jugement, mais avec objectivité et disponibilité.

1.3.3.L’organisation :

Ces dernières années, le système de santé a vécu de profondes transformations dans

son organisation. La loi Hôpital Patient Santé Territoires du 21 juillet 200926 et les

actuelles contraintes budgétaires subies dans un contexte de crise économique ont

profondément remodelé l’organisation des soins infirmiers.

L’organisation est au cœur du soin ou plutôt des soins. L’organisation est définie par

le dictionnaire Petit Robert par une « coordination des activités et des tâches en vue

d’améliorer les conditions de travail27 ». Pour mieux recadrer cette définition dans

un contexte infirmier, j’étendrai l’idée définie par la loi du 4 mars 2002 qui précise

qu’il s’agit de contribuer, avec les usagers, à développer la prévention, garantir l'égal

accès de chaque personne aux soins nécessités par son état de santé et assurer la

continuité des soins et la meilleure sécurité sanitaire possible28.

En résumé, l’organisation des soins est la coordination des activités de soins

infirmiers en vue de la continuité et de la qualité des soins.

1.4. Mon hypothèse de recherche :

En me basant sur mon questionnement, ma question de départ et sur mon cadre

conceptuel, mon hypothèse de recherche est la suivante : si la relation est au cœur

des soins infirmiers, alors la prise en charge infirmière sera optimale.

26 http://www.sante.gouv.fr/la-loi-hopital-patients-sante-et-territoires.html 27 Dictionnaire Petit Robert. Paris : Les éditions LE ROBERT, 1985 p2171 28 Article L 1110-1 de la loi du 4 mars 2002

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2.Mon outil d’investigation :

2.1.Objectifs :

L’objectif de mon enquête était de rencontrer sur le terrain des infirmières et des

infirmiers. Mes questions avaient pour but de les faire réfléchir sur la manière dont

ils vivent au quotidien la relation avec les patients dans les soins infirmiers. Au vu

des regards différents que j’allais découvrir, le but était de mesurer comment les

professionnels conçoivent cette relation soigné/soignant.

2.2 Choix de l’outil :

Compte tenu de l’aspect relationnel de mon sujet d’étude, je ne pouvais que

privilégier des entretiens semi directifs. J’ai décidé de me limiter à sept entretiens

semi-directifs afin de pouvoir analyser ces entretiens dans de bonnes conditions.

2.3.Choix de la population :

Je me suis donné pour objectif d’avoir le regard le plus large possible pour mon

investigation. Par conséquent, j’ai opté pour rencontrer d’une part quatre infirmières

et d’autre part trois infirmiers. Le regard des uns viendra compléter voire opposer

celui des autres, ce qui apportera une richesse à mon analyse.

En tenant compte du thème de mon sujet d’étude mais aussi de mon expérience lors

de mes stages précédents, j’ai choisi les services suivants :

EHPAD : une infirmière et un infirmier

Chirurgie : une infirmière

Rééducation fonctionnelle : une infirmière et un infirmier

Psychiatrie : une infirmière

Médecine : un infirmier

2.4 Structure du guide d’entretien :

Afin de poser le cadre de mon travail de fin d’étude, mon hypothèse de recherche est

rappelée aux professionnels infirmiers dès le début de mon guide d’entretien (cf

Annexe III). J’ai construit mon guide d’entretien sur la base de 5 questions.

La première question concerne la prise en soin en fonction du sexe.

Question n°1 : « Le fait que vous soyez une femme infirmière ou un homme

infirmier, en quoi cela modifie-t-il votre relation soignant-soigné ? »

Mon but est d’identifier dans quelle mesure la relation soignant/soigné diffère en

fonction du sexe du soignant.

Ma deuxième question rentre davantage dans le vif du sujet de mon hypothèse de

recherche.

Question n°2 : « A quelle place mettez-vous la relation dans les soins infirmiers ? »

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Le but de cette question est d’identifier à quelle place les infirmières et infirmiers

mettent la relation dans les soins infirmiers.

Ma troisième question fait un lien entre la relation et les soins techniques.

Question n°3 : « Pour vous, en quoi la relation peut être déterminante dans les soins

techniques ? »

Le but de cette question est d’évaluer en quoi la relation est un point clef du soin

technique.

Ma quatrième question demande aux professionnels de me préciser des exemples où

la relation a permis de mieux prendre en soin le patient.

Question n°4 : « Avez-vous des exemples où la relation vous a permis une meilleure

prise en soin ? »

Le but de cette question est d’illustrer les propos des professionnels par des exemples

concrets où la relation dans les soins a été déterminante.

Ma dernière question est centrée sur l’organisation des soins.

Question n°5 : « Pour vous, quels sont les éléments importants de l’organisation des

soins infirmiers ? »

Le but de cette question est de connaître les points importants dans l’organisation des

soins infirmiers et de voir si spontanément la relation y trouve une place.

2.5 Limites de l’enquête :

J’ai dû faire face à la difficulté d’organiser mes rendez-vous dans les plannings des

équipes infirmières. J’ai essayé d’optimiser mon temps en regroupant mes entretiens

lorsque j’avais deux entretiens à faire dans le même service (EHPAD et Service de

rééducation). Mais cela n’a pas toujours été possible (EHPAD).

De plus, j’avais initialement prévu d’interroger deux infirmiers en psychiatrie, une

infirmière en pneumologie et un infirmier aux urgences. Or le lieu de mon stage du

semestre cinq se trouvait très éloigné du Centre Hospitalier de Saverne. J’ai dû me

limiter à un seul entretien en psychiatrie au lieu de deux. Ensuite, j’ai dû remplacer

l’entretien en pneumologie par un entretien avec un infirmier de médecine travaillant

à proximité de mon stage. Enfin, pour compléter mes sept entretiens, j’ai effectué

deux entretiens auprès de deux professionnels infirmiers issus du centre de

rééducation fonctionnelle, lieu où j’ai effectué mon dernier stage et secteur où je

souhaiterai travailler par la suite.

Au global, l’équilibre de quatre infirmières et trois infirmiers ainsi que la diversité de

lieux d’exercice professionnels étaient préservés.

Volontairement, je n’ai pas choisi d’interroger d’infirmière puéricultrice car la

relation est spécifique avec les enfants.

Cette enquête sur le terrain m’a permis de mesurer la diversité mais aussi les

similitudes des thèmes abordées par les sept professionnels infirmiers interrogés.

C’est l’objet de l’analyse qui suit.

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3. L’analyse :

3.1 Analyse des entretiens

Dans le but de synthétiser et d’analyser toutes les informations recueillies lors des

sept entretiens semi-directifs, j’ai regroupé les données dans un tableau récapitulatif

regroupant les réponses, question par question.

3.1.1 L’impact du sexe du soignant dans la relation

Question n°1 : le fait que vous soyez une femme infirmière ou un homme

infirmier, en quoi cela modifie-t-il votre relation soignant/soigné ?

Dans un premier temps, quatre professionnels dont deux hommes et deux femmes

m’ont fait part de l’image « maternante » de la femme infirmière mais aussi de

l’image « sécurisante » de l’homme infirmier. Nous nous rendons bien compte que

les clichés universels de la femme « maternante » et de l’homme « sécurisant »

persistent même dans un contexte de soin infirmier. De plus, un infirmier m’a fait

remarquer que souvent l’infirmier est confondu avec le médecin car aux yeux des

patients l’image que renvoie un homme habillé d’une blouse blanche ne peut être

qu’un médecin. Je dois dire que cela m’est effectivement déjà arrivé en stage que je

sois confondu avec un médecin ou un interne du service. Finalement, il faut se

rappeler que si nous étions à leur place nous aurions pu faire la même erreur. Je

regarde cela plutôt comme une opportunité de rentrer en contact avec le patient et de

détendre l’atmosphère. Le fait que les hommes infirmiers soient minoritaires face à

une majorité de femmes infirmières n’aide pas à éviter cette confusion. J’ai

personnellement la conviction que ce déséquilibre se réduira petit à petit dans les

années à venir, même s’il y a encore du chemin à faire. En résumé, certes il y a des

clichés qui persistent mais l’image est plutôt positive car « maternante » ou

« sécurisante ». Mais ces réponses ne répondent pas au fait de savoir si le sexe du

soignant modifie la relation avec le soigné.

Même si une infirmière m’a dit qu’elle est très attachée par exemple au fait de mettre

des boucles d’oreille pour marquer sa féminité et que cela pouvait changer la relation

avec les patients. Elle m’a expliqué que cela lui permettait aussi de se distinguer

visuellement de ses collègues et de casser l’uniformisation vestimentaire imposé par

son lieu de travail. Dans son établissement, toute l’équipe soignante, du médecin à

l’agent hospitalier, porte le même vêtement de travail sans aucun signe distinctif de

couleur. Seuls son nom et sa fonction apparaissent sur la blouse. Grâce à sa

coquetterie, elle est reconnue par les patients. Elle m’a affirmé que cela constituait un

premier pas vers une relation avec le soigné. Le fait d’être perçue comme une

infirmière « féminine » peut apporter un plus dans la relation.

Cependant, il est intéressant de remarquer que dans cette question numéro un, seul un

homme infirmier sur les trois adhère spontanément à l’idée que le sexe du soignant

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Ivan DELAIR – Promotion 2011/2014 – IFSI SAVERNE

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n’a pas d’impact sur la relation. Les deux autres ont été confrontés à des refus de soin

de la part de patientes plutôt très âgées au motif qu’ils soient des hommes (toilette

intime). Un infirmier a néanmoins tempéré ces propos en disant qu’il a remarqué

qu’avec le temps ce type de situation diminue. En effet, il a précisé que lorsqu’il a

commencé sa carrière d’infirmier en 1996, il avait beaucoup plus de refus de soin de

la part de femmes âgées qu’aujourd’hui. Les mentalités ont donc évolué.

En réalité, la majorité, à savoir quatre soignants infirmiers dont trois femmes et un

homme m’ont affirmé spontanément que le sexe du soignant ne modifie pas la

relation avec le soigné. Une majorité d’infirmières ont complété leurs réponses en

disant que ce sont les qualités soignantes qui modifient la relation.

Les professionnels infirmiers que j’ai rencontrés m’ont bien précisé que les qualités

intrinsèques du soignant sont déterminantes dans la relation. En résumé, j’ai noté

dans leurs propos que pour eux c’est un mélange de savoirs, de savoir-être et de

savoir-faire. Pour reprendre les termes utilisés par Rémi ADAM et Isabelle BAYLE,

cadres formateurs, dans leur ouvrage intitulé « Le tutorat infirmier », nous pourrions

regrouper ces notions par le « savoir y faire29 ». Cela implique que le professionnel

infirmier s’adapte à toutes les situations rencontrées en mobilisant l’ensemble de ses

ressources théoriques, pratiques et humaines. Cette idée nous amène naturellement à

la notion de compétence, effectivement bien indépendante du sexe du soignant. Le

nouveau référentiel de formation en soins infirmiers30 qui a été mis en place depuis le

31 juillet 2009 se base sur dix compétences infirmières que l’étudiant doit acquérir

au cours de ses trois années de formation. Sans l’exprimer en des termes précis, les

professionnels infirmiers que j’ai interrogés sont finalement en phase avec ce

référentiel de formation infirmière. Quatre ans après son introduction, nous

constatons que l’intégration de ce nouveau référentiel auprès des professionnels

infirmiers se fait bel et bien sans qu’ils en prennent finalement la pleine mesure. De

son côté, Sandra BELLIER31 considère que la compétence se fait toujours en lien

avec l’activité, c’est-à-dire dans l’action. Comme me l’ont fait remarquer de manière

pertinente les professionnels infirmiers interrogés et comme l’indiquent les auteurs

cités auparavant, « pour être compétent, il faut mobiliser un ensemble de ressources

telles que nos connaissances théoriques, pratiques, mais également notre vécu et

notre expérience de vie. Nous agissons en fonction de la personne que nous

sommes 32». Nous pourrions clôturer toutes ces réflexions en citant Walter

HESBEEN et ses huit qualités requises dans la construction des liens de confiance

avec le soigné. Il parle de chaleur, d’écoute, de disponibilité, de simplicité,

d’humilité, d’authenticité, d’humour et de compassion33.

29 ADAM Rémi, BAYLE Isabelle. Le tutorat infirmier. Paris : De Boeck Estem, 2012, page 20 30 Arrêté du 31 juillet 2009 relatif au diplôme d’Etat d’infirmier 31 BELLIER Sandra. Compétences en action. Paris : éditions Liaisons, 1999, p246 32 ADAM Rémi, BAYLE Isabelle. Le tutorat infirmier. Paris : De Boeck Estem, 2012, page 15 33 HESBEEN Walter. Prendre soin à l’hôpital. Paris : éditions MASSON, 1997, page 99

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Peu importe notre sexe finalement, notre vécu, nos expériences de vie, nos

connaissances et nos compétences sont les éléments importants qui seront le socle de

la relation avec le patient.

3.1.2 La place de la relation

Question n°2 : à quelle place mettez-vous la relation dans les soins infirmiers ?

Six professionnels infirmiers sur sept m’ont répondu que la relation est à la première

place dans leurs soins infirmiers. Ils m’ont dit que la relation est au cœur du soin. Cet

échange soignant/soigné construit le soin. Il va apporter beaucoup dans le

déroulement et dans la qualité du soin. La relation va permettre de créer une relation

de confiance, engendrer un consentement puis permettre la participation du patient

aux soins. La relation détermine la qualité du soin infirmier. Une infirmière a

complété sa réponse en me disant qu’elle constate que malheureusement dans

certains services, la relation avec le soigné est aujourd’hui délaissée au profit de la

technicité. Cela permet aux soignants de « se cacher » derrière quelque chose de

rationnel et quantifiable. J’en déduis que cela est certainement le travers dans lequel

il faut éviter de tomber. En effet, la relation soignant/soigné n’est pas quantifiable et

difficilement valorisable. Aujourd’hui nous sommes dans un contexte de

rationalisation des moyens financiers hospitaliers en lien avec la tarification à l’acte.

La difficulté est donc d’effectuer les soins infirmiers en combinant l’aspect chiffré

des actes infirmiers et en investissant en même temps l’aspect humain de la relation

qui reste au cœur du soin. La dimension humaine est au cœur de notre métier.

Chantal Verdon rappelle dans sa thèse que « de par la nature du travail infirmier,

[…] nous sommes des humains qui soignent des autres êtres humains ». Pour

exprimer cette dualité dans le soin infirmier, Jean WATSON34 a proposé de son côté

de distinguer les soins infirmiers en deux familles, l’essence des soins infirmiers et

l’accessoire des soins infirmiers. L’essence des soins infirmiers est la démarche

interpersonnelle entre l’infirmier et le patient. L’aspect humain est l’essence même

des soins infirmiers. L’accessoire des soins infirmiers est l’ensemble des techniques

et protocoles utilisés par l’infirmier. Walter HESBEEN complète cette approche de

Jean WATSON en disant que « la centration du travail infirmier sur la tâche à

effectuer est, en fait, une centration sur l’accessoire et il lui manque sa dimension

essentielle, celle pour laquelle il faut de véritables professionnels, celle du sens que

prennent toutes ces tâches pour une personne donnée 35».

En résumé, mes entretiens ainsi que mes lectures m’ont confirmé que les soins

infirmiers présentent une dualité entre un aspect humain et un aspect technique. Le

but ultime est d’éviter cette dualité mais apporter une complicité entre la relation et

la technicité.

34 WATSON Jean.. Nursing : the philosophy and science of caring. Boston : édition Littele Brow, 1979 35 HESBEEN Walter. Prendre soin à l’hôpital. Paris : éditions MASSON, 1997, page 63

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3.1.3 Les soins techniques et la relation

Question n°3 : pour vous, en quoi la relation peut être déterminante dans les

soins techniques ?

La majorité des professionnels infirmiers m’ont affirmé que la relation est

incontournable et déterminante dans le soin technique. Certains ont rajouté que nous

avons un rôle sur prescription et un rôle propre qui nous permettent une prise en soin

holistique. La relation détermine la qualité du soin technique. En effet, un infirmier

m’a dit qu’un patient qui a compris le sens du soin technique sera détendu et rassuré.

Un autre infirmier et une infirmière m’ont dit qu’il fallait créer un lien avant de

réaliser le soin technique. Le patient sera alors confiant dans le déroulement du soin.

Ils m’ont confirmé que certes la technicité est importante mais qu’elle passe au

second plan. Ils ont rajouté que la bonne maîtrise de la technicité permettait

justement de se concentrer sur la relation et de réussir son soin de manière globale.

Une infirmière a remarqué que l’apprentissage des soins techniques empêche souvent

les étudiants de maintenir une relation avec le patient. Trop concentré sur les gestes

techniques, l’étudiant oublie parfois le patient. J’en ai fait personnellement

l’expérience dans ma deuxième situation. Une autre infirmière m’a dit aussi que

notre rôle de soignant était de tout faire pour que le patient soit acteur de ses soins et

de son projet de soin.

En résumé, si le professionnel infirmier maîtrise la technicité, s’il crée un lien avec le

patient et lui explique le sens de son soin technique, alors le patient devient acteur de

son projet de soin et le soin est logiquement réussi. Nous retrouvons ici les idées

défendues par Hildegard PEPLAU et qui précise dans sa théorie du « give-and-take »

que cette double dynamique soignant/soigné est fondamentale dans la réussite du

soin.

Le soin technique est avant tout un soin. Il doit intégrer, comme tous les autres soins,

la relation.

Une infirmière a rajouté une remarque intéressante à cette question en disant que

finalement dans la réalité le but n’est pas d’avoir un soin optimal mais plutôt un soin

optimisé. En effet, la notion de soin optimisé tient compte de la réalité du terrain

pour réaliser le soin alors que le soin optimal est une notion d’absolu ou de

perfection qui dans la réalité n’existe pas. Finalement, la remarque de cette infirmière

m’a permis d’affiner ma réflexion et ajuster mon hypothèse de recherche avec cette

nuance : si la relation est au cœur des soins infirmiers, alors la prise en charge

infirmière sera optimisée voire optimale.

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3.1.4 Des exemples illustrant l’importance de la relation

Question n°4 : avez-vous des exemples où la relation vous a permis une

meilleure prise en charge infirmière ?

Chacun des professionnels infirmiers m’ont donné un exemple. Mais deux exemples

me paraissent les plus significatifs. Le premier cas émane d’un infirmier travaillant

en médecine. Il s’agissait d’une patiente en soins palliatifs. Sa fille, très vindicative,

ne comprenait pas le contexte de soins palliatifs de sa maman. Elle ne comprenait pas

l’abstention chirurgicale pour « sauver sa mère ». L’infirmier a alors pris le temps de

discuter avec la fille et lui expliquer les choix thérapeutiques de l’équipe soignante. Il

a expliqué le sens des soins pratiqués pour sa mère. La patiente est décédée. La fille a

finalement été très reconnaissante de la prise en soin de sa maman et a remercié

l’infirmier d’avoir pris le temps de tout lui expliquer.

Le deuxième exemple s’est passé en psychiatrie. L’infirmière m’a relaté la visite du

domicile d’un patient schizophrène. Le patient refusait cette visite à domicile. En

effet, une visite à domicile est intrusive et peut être interprété comme un viol de

l’intimité du patient. L’infirmière m’a expliqué que cette visite à domicile avait un

sens thérapeutique et était inscrite dans le cadre d’un projet de soin adapté au patient.

L’infirmière a construit petit à petit une relation de confiance avec le patient pour

ensuite réussir à obtenir le consentement du patient et surtout l’adhésion au projet de

soin. La relation a été déterminante dans la prise en soin du patient et a permis de

débloquer l’impasse du projet de soin.

Une autre infirmière m’a fait part d’un contre-exemple intéressant. Elle a dû faire un

soin technique à un patient qui avait dépassé les limites du raisonnable dans ses

propos. Elle ne pouvait pas passer le relais à sa collègue qui était absente. Mais elle a

effectué le soin même si la relation était (inter)rompue. Par cet exemple, elle m’a

démontré que même si la relation n’est pas toujours équilibrée voire rompue, le soin

effectué ne sera pas un « mauvais » soin. Elle a rajouté qu’elle a fait ce soin

technique comme pour un autre patient même si elle a avoué n’avoir pas été à l’aise

durant le soin.

Cette enquête m’a confirmé qu’effectivement certains contextes de soin nécessitent

un investissement plus approfondi dans la relation pour réaliser le soin dans de

bonnes conditions. Cependant, je me suis aussi rendu compte avec le contre-exemple

que cela n’est pas toujours vrai et dans certains cas il faut mettre la relation de côté et

se concentrer sur l’acte technique infirmier. La relation peut être déterminante dans

un soin mais parfois si la relation est rompue, le soin devra être réalisé comme il se

doit.

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Ivan DELAIR – Promotion 2011/2014 – IFSI SAVERNE

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3.1.5 Les éléments clefs de l’organisation des soins :

Question n°5 : quels sont les éléments importants de l’organisation des soins

infirmiers ?

Trois idées ressortent spontanément lors des entretiens semi-directifs. La première

idée est la planification des soins qui a été citée quatre fois par deux hommes et deux

femmes. La seconde est la coordination et l’anticipation des soins avec les collègues

citées quatre fois par deux hommes et deux femmes. Enfin, la notion de maitrise des

informations liées aux transmissions et aux dossiers des patients apparaît comme un

point important citée trois fois par deux femmes et un homme.

Je constate que quel que soit le sexe du professionnel infirmier, les éléments de

l’organisation des soins sont les mêmes. De plus, nous nous rendons compte que la

relation n’est pas inscrite formellement dans l’organisation des soins. Cela peut

s’expliquer par le fait que la relation n’est pas quantifiable. Nous ne pouvons pas

objectiver la relation dans l’organisation des soins. On retrouve cette idée auprès de

Walter HESBEEN qui parle d’un « art infirmier 36». Les infirmiers sont donc des

« artistes ». Ils doivent combiner les contraintes de l’organisation des soins et

l’aspect humain du soin qui n’est pas quantifiable.

Néanmoins, nous constatons que les professionnels infirmiers ont une vision globale

similaire de l’organisation des soins même si la relation n’y figure pas.

3.2 Conclusion de l’enquête sur le terrain :

Même si mon choix d’interroger trois infirmiers et quatre infirmières n’est pas à

l’image de la répartition réelle homme/femme dans la population totale infirmière,

elle aura eu le mérite de donner l’opportunité aux hommes infirmiers, souvent

discrets, de s’exprimer davantage.

Finalement, nous nous sommes rendons compte que la majorité des professionnels

infirmiers qu’elle soit homme ou femme partage la même vision de la relation basée

sur les compétences du soignant.

Les compétences sont le résultat d’une bonne alchimie entre des savoirs, un savoir-

être, du savoir-faire, un vécu personnel et des expériences passées. Ce sont ces

compétences qui créeront la relation soignant/soigné. Les professionnels infirmiers

mettent la relation à la première place de leurs missions infirmières. Nous nous

sommes ensuite aperçus que la relation est la clef de réussite des soins techniques, à

condition bien sûr que la technicité soit maîtrisée.

Le contre-exemple d’une infirmière nous permet de comprendre que parfois même

en l’absence d’une relation équilibrée, le personnel infirmier effectue le soin

36 HESBEEN Walter. Prendre soin à l’hôpital. Paris : éditions MASSON, 1997, page 95

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Ivan DELAIR – Promotion 2011/2014 – IFSI SAVERNE

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technique comme il se doit. Enfin, même si les professionnels infirmiers mettent la

relation à la première place de leurs préoccupations quotidiennes, nous avons bien

noté que la relation n’est pas intégrée dans l’organisation des soins puisqu’elle n’est

ni quantifiable, ni planifiable.

De plus, nous avons bien vu que la notion de soin optimal était plutôt absolue et qu’il

était nécessaire de nuancer cette notion vers un soin optimisé ancré dans la réalité.

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Ivan DELAIR – Promotion 2011/2014 – IFSI SAVERNE

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Conclusion

Au fil de mon enquête, j’ai modifié mon hypothèse de recherche en rajoutant la

notion de soin optimisé davantage en phase avec la réalité. Finalement, si la relation

est au cœur des soins infirmiers, alors la prise en charge infirmière sera

optimisée.

L’analyse des sept entretiens semi-directifs pointe l’importance de la relation dans la

qualité des soins infirmiers. Les idées apportées par les professionnels infirmiers sont

finalement tout à fait en adéquation avec l’analyse de la littérature en soins infirmiers

exposée précédemment. La relation représente donc clairement un cadre favorisant la

réussite et la qualité du soin infirmier.

Néanmoins, nous nous devons de rester prudents puisque certains soins, notamment

techniques, sont effectués alors que la relation est limitée à sa portion congrue voire

inexistante. La relation n’est donc pas un élément contributeur unique à la prise en

charge infirmière optimale. Au travers des exemples fournis par les professionnels, la

relation contribue énormément à une prise en soin optimisée lorsqu’elle est présente.

Mais elle n’est pas exclusive.

Au travers de ce mémoire de fin d’étude, nous avons pu découvrir également que les

professionnels infirmiers prônent, de manière implicite, l’approche des soins

infirmiers par les compétences. Ceci est tout à fait conforme à l’actuel référentiel de

la formation infirmière.

Cette enquête a confirmé aussi l’intégrité et l’abnégation des professionnels

infirmiers puisqu’ils mettent tout en œuvre pour effectuer un soin technique de

qualité même si la relation est dégradée. Ce point précis mériterait d’être approfondi

et pourrai faire l’objet d’un prochain travail de recherche.

La réalisation de ce mémoire a été ponctuée de moments de doutes et d’incertitudes.

Cependant, j’ai finalement eu beaucoup de plaisir à poser sur le papier mon

questionnement professionnel.

Ce mémoire de fin d’étude m’a aussi permis de confirmer mon positionnement

professionnel face à la réalité et aux exigences du terrain.

Ce travail de recherche n’est pas un mémoire de fin d’étude mais plutôt un mémoire

de début de carrière infirmière. Pour moi, ce n’est pas un aboutissement mais c’est

plutôt le point de départ de mes réflexions infirmières. En effet, il va constituer la

base de mes réflexions futures d’infirmier.

A l’image de mon mandat de délégué des étudiants de ma promotion, ce mémoire de

fin d’étude a confirmé aussi ma volonté de m’impliquer dans le futur, dans une

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Ivan DELAIR – Promotion 2011/2014 – IFSI SAVERNE

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humble mesure, à l’évolution de la profession infirmière au travers de débats voire

même peut être de projets en recherche infirmière. Ce travail de recherche m’a donné

le goût de confronter ma vision des soins avec d’autres professionnels infirmiers.

Cela m’amène à me poser la question suivante : Au vu de tous les éléments que nous

avons pu récolter, comment va évoluer dans le futur la relation au sein des soins

infirmiers ?

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Ivan DELAIR – Promotion 2011/2014 – IFSI SAVERNE

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Références Bibliographiques

DICTIONNAIRES Dictionnaire des soins infirmiers et de la profession infirmière, 3ème édition, AMIEC Recherche, Paris :

MASSON, 2005, p334

Dictionnaire Petit Larousse. Paris : Les éditions LAROUSSE, 1999, p1870

Dictionnaire Petit Robert. Paris : Les éditions LE ROBERT, 1985 p2171

LIVRES ADAM Rémi, BAYLE Isabelle. Le tutorat infirmier. Paris : De Boeck Estem, 2012, p117

BELLIER Sandra. Compétences en action. Paris : éditions Liaisons, 1999, p246

COLLIERE Marie Françoise. Promouvoir la vie. Paris : Editions InterEditions MASSON, 1982, p391

GINESTE Yves, Jérôme PELLISSIER. Humanitude – Comprendre la vieillesse, prendre soin des Hommes vieux.

Paris : Editions Armand Colin, 2007, p320

HESBEEN Walter. - Prendre soin à l’hôpital. Paris : MASSON, 1997, p195

- La qualité du soin infirmier. 2ème édition, Paris : MASSON, 1998, 2002, p208

KHAYAT David. -De larmes et de sang. Paris : Editions Odile Jacob, 2013, p253

-Le coffre des âmes. Paris : éditions X O, 2002, 280p

MARCEL Gabriel. Etre et avoir, Paris : éditions Aubier, 1935, p357

MARMILLAUD Laure. Soigner, un choix d’humanité. Paris : Vuibert, 2007, p124

MANOUKIAN Alexandre. La relation soignant-soigné. 3ème édition, Rueil-Malmaison : Editions LAMARRE,

2008, p223

NEYRAIULT Michel. Le transfert : étude psychanalytique. Paris : PUF, 1974, p281

PEPLAU Hildegard. Relations interpersonnelles en soins infirmiers. (Traduction de l'édition américaine de 1988

par Anne Pietrasik), InterEditions, Paris, France, 1995

WATSON Jean. Nursing : the philosophy ans science of caring. Boston : édition Littele Brow, 1979

REVUES BIGONI C. et MARCHAND P. Le soin relationnel, un modèle à questionner. SOINS, 2012, n°766, pp16-19

MALABOEUF Louis « La relation soignant/soignée : du discours au passage à l’acte » Soins

formation-pédagogie, encadrement, n°4, 1992

WEBER M.T. Concevoir et conduire un projet de soins infirmiers, Mettre en œuvre des actions à visée

diagnostic et thérapeutiques. SOINS, 2009, 736, pp59-60

TEXTES LEGISLATIFS Décret de compétence n°2004-802 du 29 juillet 2004 relatif à la profession d’infirmier ou d’infirmière.

Référentiels d’activités, Annexe I et II de l’arrêté du 31 juillet 2009 relatif au diplôme d’infirmier

Articles L4311-1 à L4311-29 du Code de la santé publique Partie législative – Professions de santé – Livre III:

auxiliaires médicaux – Titre 1er : Profession d’infirmier ou d’infirmière

Articles R4311-1 à R4311-15 du Code de la santé publique Partie réglementaire – Professions de santé – Livre

III: auxiliaires médicaux – Titre 1er : Profession d’infirmier ou d’infirmière

Article L 1110-1 de la loi du 4 mars 2002 du code de la santé publique

SITE INTERNET http://www.em-consulte.com consulté le 18/08/2013

http://www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do;jsessionid=09757F713A0A88B6E7367452343DE0B1.tpdjo12v_3?

cidTexte=LEGITEXT000005632253&dateTexte=20040807 consulté le 26/08/2013

http://www.sante.gouv.fr/la-loi-hopital-patients-sante-et-territoires.html consulté le 24/08/2013

DVD TAVERNIER Nils. Que reste-t-il de nos erreurs ?, Production Espace Ethique AP-HP, 2012, 42min

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Ivan DELAIR – Promotion 2011/2014 – IFSI SAVERNE

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LITTERATURE GRISE VERDON Chantal. Thèse intitulée La nature, les conditions et les limites de la relation infirmière/soigné selon la

notion d’intersubjectivité chez Gabriel MARCEL. Université de Laval, Québec, août 2012

VUORI Hannu. L'Assurance de la qualité des prestations de santé. Bureau européen de l'OMS, Copenhague,

1984

U.E 4.2 Soins Relationnels. Le dispositif d’annonce par Séverine VERY, psychologue au Centre Hospitalier de

Saverne, fév. 2013

Successful Aging Database, Evaluation de la méthodologie de soin Gineste-Marescotti, dite « humanitude », lors

de formations in situ. Actes Colloques, Paris, 2008, p8

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ANNEXES

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ANNEXE I

Article R. 4311-2

Décret n°2004-802 du 29 juillet 2004 relatif aux parties IV et V (dispositions

réglementaires) du code de la santé publique

Les soins infirmiers, préventifs, curatifs ou palliatifs, intègrent qualité technique et

qualité des relations avec le malade. Ils sont réalisés en tenant compte de l'évolution

des sciences et des techniques. Ils ont pour objet, dans le respect des droits de la

personne, dans le souci de son éducation à la santé et en tenant compte de la

personnalité de celle-ci dans ses composantes physiologique, psychologique,

économique, sociale et culturelle

1° De protéger, maintenir, restaurer et promouvoir la santé physique et mentale des

personnes ou l'autonomie de leurs fonctions vitales physiques et psychiques en vue

de favoriser leur maintien, leur insertion ou leur réinsertion dans leur cadre de vie

familial ou social ;

2° De concourir à la mise en place de méthodes et au recueil des informations utiles

aux autres professionnels, et notamment aux médecins pour poser leur diagnostic et

évaluer l'effet de leurs prescriptions ;

3° De participer à l'évaluation du degré de dépendance des personnes ;

4° De contribuer à la mise en oeuvre des traitements en participant à la surveillance

clinique et à l'application des prescriptions médicales contenues, le cas échéant, dans

des protocoles établis à l'initiative du ou des médecins prescripteurs ;

5° De participer à la prévention, à l'évaluation et au soulagement de la douleur et de

la détresse physique et psychique des personnes, particulièrement en fin de vie au

moyen des soins palliatifs, et d'accompagner, en tant que de besoin, leur entourage.

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ANNEXE II

L’intersubjectivité selon Gabriel MARCEL

INTERSUBJECTIVITE

Lien entre deux

personnes

Passage de soi vers

l’autre

Communion entre

les personnes

RELATION A L’AUTRE

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ANNEXE III

MON GUIDE D’ENTRETIEN

Rappel de mon hypothèse de recherche : si la relation est au cœur des soins

infirmiers, alors la prise en charge infirmière sera optimale.

Question n°1 :

Le fait que vous soyez une femme infirmière ou un homme infirmier, en quoi cela

modifie-t-il votre relation soignant-soigné ?

mots clés : relation soignant-soigné

Question n°2 :

A quelle place mettez-vous la relation dans les soins infirmiers ?

mots clés : relation et soins infirmiers

Question n°3 :

Pour vous, en quoi la relation peut être déterminante dans les soins techniques ?

mots clés : relation et soins techniques

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Ivan DELAIR – Promotion 2011/2014 – IFSI SAVERNE

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Question n°4 :

Avez-vous des exemples où la relation vous a permis une meilleure prise en charge ?

mots clés : relation et prise en charge

Question n°5 :

Pour vous, quels sont les éléments importants de l’organisation des soins infirmiers ?

mots clés : organisation et soins infirmiers

Question n°6 :

Avez-vous quelque chose à rajouter ?

mots clés : conclusion et ouverture

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Ivan DELAIR – Promotion 2011/2014 – IFSI SAVERNE

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DECLARATION SUR L’HONNEUR CONTRE LE PLAGIAT

Je soussigné, Ivan DELAIR:

Certifie qu’il s’agit d’un travail original et que toutes les sources utilisées ont été

indiquées dans leur totalité. Je certifie, de surcroît, que je n’ai ni recopié ni utilisé des

idées ou des formulations tirées d’un ouvrage, article ou mémoire, en version

imprimée ou électronique, sans mentionner précisément leur origine et que les

citations intégrales sont signalés entre guillemets.

Conformément à la loi, le non-respect de ces dispositions me rend passible de

poursuites devant la commission disciplinaire et les tribunaux de la République

Française.

Fait à Saverne le 15 septembre 2013

Signature

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Promotion 2011-2014 IFSI SAVERNE

Ivan DELAIR

L’ORGANISATION DE LA RELATION

AU CŒUR DU SOIN INFIRMIER

Résumé : Au travers de mes stages en soins infirmiers, j’ai constaté à quel point la

relation était fondamentale entre le professionnel infirmier et le patient dans les soins

infirmiers. Mon enquête s’est concentrée sur l’organisation de la relation

soignant/soigné. J’ai essayé de répondre à la question : si la relation est au cœur des

soins infirmiers, alors la prise en charge infirmière sera optimale. J’ai interviewé sept

professionnels infirmiers dans divers services. Cette enquête a confirmé que la

relation soignant/soigné était déterminante dans la réussite des soins même si elle

n’est pas exclusive. Le soin est la rencontre de deux êtres humains avant d’être une

rencontre entre un soignant et un soigné. J’ai découvert aussi que d’autres facteurs

peuvent permettre la réussite du soin infirmier même si la relation est dégradée ou

inexistante.

Abstract : Through out my nurse internship, I noticed how fundamental the

relationship between the nurse and the patient is. My research was focused on the

organisation of the relationship between the nurse and the patient. I tried to answer

the question : if the relationship is at the core of nursing practice, will the nursing

care be optimum. I interviewed seven nurses in various wards. This research

confirmed that the relationship between the nurse and the patient is decisive in the

success of nursing care even if it is not exclusive. Before a meeting between a nurse

and a patient, nursing is a meeting between two humans. I discovered as well that

many factors could contribute to the nursing care success, even if the relationship has

degraded or is non-existant.

Mots clés : soins infirmiers, prise en soin, relation soignant/soigné, organisation,

qualité du soin