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Lorenzaccio Musset Livret pédagogique correspondant au livre élève n° 23 établi par Véronique Le Quintrec, agrégée de Lettres modernes, professeur en lycée

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Page 1: Lorenzaccio - BIBLIO - HACHETTE · Texte C: Extrait de La Confession d’un enfant du siècle de Musset (pp. 90-91). ... Étude d’un mouvement littéraire et culturel du XIXe siècle

Lorenzaccio

Musset

L i v r e t p é d a g o g i q u ecorrespondant au livre élève n° 23

établi par Véronique Le Quintrec,agrégée de Lettres modernes,

professeur en lycée

Page 2: Lorenzaccio - BIBLIO - HACHETTE · Texte C: Extrait de La Confession d’un enfant du siècle de Musset (pp. 90-91). ... Étude d’un mouvement littéraire et culturel du XIXe siècle

Sommaire – 2

S O M M A I R E

A V A N T - P R O P O S . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 3

T A B L E D E S C O R P U S . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 4

RÉ P O N S E S A U X Q U E S T I O N S . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 5

Bilan de première lecture (p.�236) ...................................................................................................................................................................5

Acte I, scène 2 (pp.�15 à 22) .............................................................................................................................................................................6! Lecture analytique de l’extrait (pp.�23-24) .................................................................................................................................6! Lectures croisées et travaux d’écriture (pp.�25 à 36) ..................................................................................................................8

Acte II, scène 4 (pp.�75 à 83) ..........................................................................................................................................................................12! Lecture analytique de l’extrait (pp.�84 à 86) .............................................................................................................................12! Lectures croisées et travaux d’écriture (pp.�87 à 95) ................................................................................................................14

Acte III, scène�2 (pp.�111 à 114).....................................................................................................................................................................18! Lecture analytique de l’extrait (pp.�115 à 117).........................................................................................................................18! Lectures croisées et travaux d’écriture (pp.�118 à 125) ............................................................................................................20

Acte III, scène 3 (pp.�126 à 145).....................................................................................................................................................................25! Lecture analytique de l’extrait (pp.�146-147) ...........................................................................................................................25! Lectures croisées et travaux d’écriture (pp.�148 à 154) ............................................................................................................27

Acte IV, scène 11 (pp.�194 à 197)...................................................................................................................................................................30! Lecture analytique de la scène (pp.�198-199) ...........................................................................................................................30! Lectures croisées et travaux d’écriture (pp.�200 à 212) ............................................................................................................32

C O M P L É M E N T S A U X L E C T U R E S D ’ I M A G E S . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 37

C O M P L É M E N T À L A L E C T U R E A N A L Y T I Q U E ( P . 1 15) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 42

B I B L I O G R A P H I E , D I S C O G R A P H I E , F I L M O G R A P H I E C O M P L É M E N T A I R E S . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 44

Tous droits de traduction, de représentation et d’adaptation réservés pour tous pays.© Hachette Livre, 2004.43, quai de Grenelle, 75905 Paris Cedex 15.www.hachette-education.com

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Lorenzaccio – 3

A V A N T - P R O P O S

Les programmes de français au lycée sont ambitieux. Pour les mettre en œuvre, il est demandé à lafois de conduire des lectures qui éclairent les différents objets d’étude au programme et, par ceslectures, de préparer les élèves aux techniques de l’épreuve écrite (lecture efficace d’un corpus detextes, analyse d’une ou deux questions préliminaires, techniques du commentaire, de la dissertation,de l’argumentation contextualisée, de l’imitation…).Ainsi, l’étude d’une même œuvre peut répondre à plusieurs objectifs. Lorenzaccio, en l’occurrence,permet d’étudier le romantisme –�son esthétique, ses héros…�–, d’aborder le discours dramatique et lareprésentation théâtrale, et de mettre en perspective l’engagement politique au théâtre, tout ens’exerçant à divers travaux d’écriture…Dans ce contexte, il nous a semblé opportun de concevoir une nouvelle collection d’œuvresclassiques, Bibliolycée, qui puisse à la fois�:–�motiver les élèves en leur offrant une nouvelle présentation du texte, moderne et aérée, qui facilitela lecture de l’œuvre grâce à des notes claires et quelques repères fondamentaux�;–�vous aider à mettre en œuvre les programmes et à préparer les élèves aux travaux d’écriture.Cette double perspective a présidé aux choix suivants�:•�Le texte de l’œuvre est annoté très précisément, en bas de page, afin d’en favoriser la pleinecompréhension.•�Il est accompagné de documents iconographiques visant à rendre la lecture attrayante etenrichissante, la plupart des reproductions pouvant donner lieu à une exploitation en classe,notamment au travers des lectures d’images proposées dans les questionnaires des corpus.•�En fin d’ouvrage, le «�Dossier Bibliolycée�» propose des études synthétiques et des tableaux quidonnent à l’élève les repères indispensables�: biographie de l’auteur, contexte historique, liens del’œuvre avec son époque, genres et registres du texte…• Enfin, chaque Bibliolycée offre un appareil pédagogique destiné à faciliter l’analyse de l’œuvreintégrale en classe. Présenté sur des pages de couleur bleue afin de ne pas nuire à la cohérence dutexte (sur fond blanc), il comprend�:–�Un bilan de première lecture qui peut être proposé à la classe après un parcours cursif de l’œuvre. Ilse compose de questions courtes qui permettent de s’assurer que les élèves ont bien saisi le sensgénéral de l’œuvre.–�Des questionnaires raisonnés en accompagnement des extraits les plus représentatifs de l’œuvre�:l’élève est invité à observer et à analyser le passage. On pourra procéder en classe à une correction duquestionnaire, ou interroger les élèves pour construire avec eux l’analyse du texte.–�Des corpus de textes (accompagnés le plus souvent d’un document iconographique) pour éclairerchacun des extraits ayant fait l’objet d’un questionnaire�; ces corpus sont suivis d’un questionnaired’analyse des textes (et éventuellement de lecture d’image) et de travaux d’écriture pouvant constituerun entraînement à l’épreuve écrite du bac. Ils peuvent aussi figurer, pour la classe de Première, sur le«�descriptif des lectures et activités�» à titre de groupement de textes en rapport avec un objet d’étudeou de documents complémentaires.Nous espérons ainsi que la collection Bibliolycée sera, pour vous et vos élèves, un outil de travailefficace, favorisant le plaisir de la lecture et la réflexion.

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Table des corpus – 4

T A B L E D E S C O R P U S

Corpus Composition du corpus Objet(s) d’étudeet niveau(x)

Compléments auxtravaux d’écriture destinésaux séries technologiques

Esthétique classique,esthétique romantique(p.�25)

Texte A�: Extrait de la scène�2 de l’acte�I deLorenzaccio de Musset (p.�16, l.�121, à p.�19, l.�206).Texte B�: Extrait de la préface de Bérénice deJean Racine (pp. 25-27).Texte C�: Extrait de Bérénice de Jean Racine(pp. 27-29).Texte D�: Extrait de Ruy Blas de Victor Hugo(p.�30).Texte E�: Extrait de la préface de Cromwell deVictor Hugo (pp.�30-32).Document 1�: Mise en scène de Ruy Blas (p.�33).Document 2�: Mise en scène de Bérénice (p.�34).

Le théâtre(Première et Seconde)

Question préliminaireD’après l’ensemble des documentsproposés, montrez l’importance dudécor au théâtre. De quelles manièresdifférentes peut-il être suggéré�?

CommentaireQuelle représentation la scène donne-t-elle à voir�?

Le biographiqueen éclats(p.�87)

Texte A�: Extrait de la scène�4 de l’acte�II deLorenzaccio de Musset (p.�75, l.�407, à p.�77, l. 458).Texte B�: Extrait de La Nuit de décembre deMusset (pp. 87-90).Document�: Illustration pour La Nuit dedécembre par Eugène-Louis Lami (p.�90).Texte C�: Extrait de La Confession d’un enfantdu siècle de Musset (pp. 90-91).Texte D�: Extrait de Musset de FranckLestringant (pp. 91-93).

Le biographique(Première)

Question préliminaireRésumez en une phrase l’éclairage (untrait de personnalité de l’écrivain et, lecas échéant, une tentative d’explication)que chacun de ces documents donne dela vie de Musset.

CommentaireDe quelle manière se manifeste laprésence du double�?

Le théâtre�:«�une tribune�»(p.�118)

Texte A�: Extrait de la scène�2 de l’acte�III deLorenzaccio de Musset (p.�112, l.�108, à p.�114,l. 178).Texte B�: Extrait de Ruy Blas de Victor Hugo(pp. 118-120).Texte C�: Extrait d’Antigone de Jean Anouilh(pp. 120-121).Document�: Mise en scène de Lorenzaccio parFrancis Huster (p.�122).Texte complémentaire�: Extrait de La Confessiond’un enfant du siècle de Musset (pp. 123-124).

Le théâtre(Première et Seconde)Convaincre, persuader,délibérer(Première)

Question préliminaireCaractérisez rapidement les stratégiesargumentatives dans chacun des textesproposés.

CommentaireDe quelle manière le gouvernement est-il remis en cause par Ruy Blas�?

Le héros romantique�:seul contre tous(p.�148)

Texte A�: Extrait de la scène�3 de l’acte�III deLorenzaccio de Musset (p.�143, l. 630, à p.�144,l. 669).Texte B�: Extrait de René de Chateaubriand(pp. 148-149)Texte C�: Extrait d’Oberman de Senancour (p.�150).Document�: Le Voyageur au-dessus de la merde nuages de Caspar David Friedrich (p.�151).Texte D�: Extrait d’Hernani de Victor Hugo(pp. 152-153).

Étude d’un mouvementlittéraire et cultureldu XIXe siècle(Seconde)

Question préliminaireClassez les caractéristiques du hérosromantique, telles qu’elles apparaissentdans les documents proposés.

CommentaireQuels sont les procédés d’expression del’ardeur romantique�?

Les réécrituresd’un meurtre(p.�200)

Texte A�: Scène�11 de l’acte�IV de Lorenzacciode Musset (pp. 194-197).Texte B�: Extrait d’Une conspiration en 1537 deGeorge Sand (pp. 200-203).Texte C�: Extrait de La Storia Fiorentina deBenedetto Varchi (pp. 203-204).Texte D�: Extrait de L’Heptaméron deMarguerite de Navarre (pp. 205-207).Texte E�: Extrait d’Une année à Florenced’Alexandre Dumas (pp. 207-209).Document�: Mise en scène de Lorenzaccio parGeorges Lavaudant (p.�210).

Les réécritures(Première)

Question préliminaireRelevez constantes et variations, d’untexte à l’autre, dans l’évocation desprincipales étapes du meurtre. Leschangements modifient-ils le registredes textes�? et le sens de l’événementrapporté�?

CommentaireVous étudierez, entre autres, l’art durécit.

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Lorenzaccio – 5

R É P O N S E S A U X Q U E S T I O N S

B i l a n d e p r e m i è r e l e c t u r e ( p . � 2 3 6 )

!�L’action de Lorenzaccio se passe à Florence en 1537. Le pouvoir officiel est représenté par Alexandrede Médicis (1510-1537), arrivé à Florence en 1532, après la capitulation de la ville en 1530. LesFlorentins, poussés par les grandes familles républicaines, ont essayé de se soulever mais ont étéviolemment réprimés. Le duc Alexandre recourt aux moyens attestés par Varchi�: arbitraire,encouragement à la délation (assurée notamment par Lorenzo de Médicis), terreur, bannissement."�Alexandre gouverne sous la double influence du pape Clément�VII et de Charles Quint qui se sontentendus pour le placer sur le trône. Florence est, en effet, un lourd enjeu dans la lutte qui oppose, enItalie, Charles Quint et le roi de France, François�Ier. La garnison allemande occupe la ville.#�Lorenzaccio est le favori du duc Alexandre. Il est son «�entremetteur�» (I, 4), celui qui lui fournit sesplaisirs. Il joue aussi le rôle d’espion�: «�Tout ce que je sais de ces damnés bannis, de tous ces républicainsentêtés qui complotent autour de moi, c’est par Lorenzo que je le sais�», dit Alexandre à la scène�4 de l’acte�I.$�Le personnage de Philippe Strozzi représente l’idéal républicain. Il est la figure du patriarchevertueux. Après la mort de sa fille, Louise, et l’arrestation de son fils, Pierre, il souhaite mener larévolte des grandes familles florentines contre Alexandre�: «�il y a à Florence quatre-vingts palais, et dechacun d’eux sortira une troupe pareille à la nôtre quand la liberté y frappera�» (III, 7).%�La Marquise de Cibo souhaite que le Duc gouverne de manière sage et modérée. Elle croitpouvoir le réformer en devenant sa maîtresse et en profitant de cette occasion pour lui faire lamorale�: en vain (III, 6).&�À la scène�1 de l’acte�I, on voit Alexandre attendre une jeune fille qu’il a achetée. Il n’hésite pas àdédommager avec condescendance le frère de celle-ci, Maffio, qui croit encore à l’honnêteté duDuc�: «�Si le duc ne sait pas que sa ville est une forêt pleine de bandits, pleine d’empoisonneurs et de fillesdéshonorées, en voilà un qui le lui dira.�»Par ailleurs, il pratique aussi une justice expéditive. Quand Salviati vient se plaindre des Strozzi quiont voulu venger l’offense faite à leur sœur, le Duc répond�: «�les meurtriers passeront la nuit en prison, eton les pendra demain matin�» (II, 7).' et (�C’est Lorenzaccio, à la scène�4 de l’acte�II, qui prononce ces mots. Il s’adresse à sa mère,Marie, et à sa tante, Catherine. C’est une manière de faire tomber, devant ces femmes qui lui sontchères, son masque de courtisan corrompu et d’annoncer que le «�Lorenzino d’autrefois�» n’est pas toutà fait mort.)�L’histoire romaine sert de modèle. Un parallèle est établi entre Tarquin et Alexandre, mais, surtout,Lorenzaccio souhaite être un nouveau Brutus, c’est-à-dire quelqu’un qui délivre sa patrie du tyran.Utiliser des modèles antiques est une manière, pour Musset, de s’inscrire dans la continuité de latragédie classique.*+�La ville de Florence n’est pas tant évoquée par les décors dans les didascalies que par lesconversations des personnages. Tous, des marchands à la Marquise de Cibo, clament leur amour pourcette ville. Plus que l’architecture de la ville, c’est son atmosphère qui est suggérée�: ses bals, soncarnaval, ses foires, le chahut des écoliers, les vêtements des nobles (cf.�I, 2, en particulier).*,�Lorenzaccio révèle explicitement à Philippe son projet de meurtre dans la grande scène�3 del’acte�III�: «�Je suis en effet précieux pour vous, car je tuerai Alexandre.�»*-�Les mobiles de Lorenzaccio sont exposés dans cette même scène, et particulièrement dans la célèbretirade�: «�Tu me demandes pourquoi je tue Alexandre�?�» Il tue Alexandre pour renouer avec sa puretéperdue, pour retrouver sa vertu. C’est une quête identitaire et un acte expiatoire. Mais il a aussi pourdessein de sauver sa patrie et d’éliminer le mal de la collectivité. Enfin, il commet ce meurtre par«�orgueil�» car il méprise les hommes.*.�Lorenzaccio prépare le régicide, d’une part, en dérobant la cotte de mailles du Duc (II, 6) et,d’autre part, en s’entraînant aux armes avec Scoronconcolo (III, 1)�; enfin, en promettant à Alexandreun rendez-vous galant avec Catherine, il piège le Duc (IV, 1).

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Réponses aux questions – 6

*/�Le crime a lieu dans la chambre de Lorenzo (IV, 11). C’est là qu’est convenu le prétendu rendez-vous avec Catherine�: «�Dans ma chambre, seigneur�; je ferai mettre des rideaux blancs à mon lit et un pot deréséda sur ma table�» (IV, 2).*0�Lorenzo se réfugie dans la république de Venise après avoir commis le crime.*1�Sa tête est mise à prix (V, 2) et, alors que, de manière suicidaire, il sort se promener dans la ville, ilest tué lâchement («�Un homme était caché derrière la porte, qui l’a frappé par-derrière comme il sortait�») etson corps «�pouss[é] dans la lagune�» (V, 8).*2�Alexandre est remplacé par Côme de Médicis, ce «�planteur de choux�», avait dit Lorenzaccio. Il faitle serment d’obéir à Charles Quint (V, 9).*3�La foule rassemblée se réjouit.*4�L’acte de Lorenzaccio n’aura servi à rien et le peuple reste éternellement une victime consentante.

A c t e I , s c è n e 2 ( p p . � 1 5 à 2 2 )

! Lecture analytique de l’extrait (pp.�23-24)!�Images�: «�les murailles de tous ces palais-là�» (l.�143), «�une bonne maison bien bâtie�», «�tous ces grandspalais�» (l.�178), trois occurrences de «�colonnes�» (l.�179-180, 188), «�une vieille voûte bien cimentée�»(l.�181-182). Toutes ces images évoquent la solidité et la force de Florence, de même que l’égalité(l.�180) comme valeur de la ville. Mais un changement radical s’est produit avec «�le pape et l’empereurCharles�» (l.�185) et bien sûr le Duc. Les images qui caractérisent alors la ville sont négatives�: la«�brèche�» (l.�186), la fragilité du «�clocher�» (l.�189) et le mépris de «�la Citadelle�» (l.�194) –�«�maudittrou�», «�pâté informe fait de boue et de crachat�»�–, domaine de l’étranger. À travers la métaphore filée del’architecture est illustrée l’évolution de la ville de Florence."�Les espaces privés sont évoqués à travers les expressions suivantes�: «�dans son lit bien tranquille, avecun coin de ses rideaux retroussé�» (l.�128-129), «�le lit de nos filles�» (l.�204-205). Les espaces publics sontplus nombreux dans le texte�: «�le palais�» (l.�130), «�les murailles�» (l.�136), «�ma boutique�» (l.�148),«�Montolivet�» (l.�167), «�messe�» (l.�174). On remarque la variété des lieux et des milieux sociaux. Lescoutumes sont évoquées par le pèlerinage et la foire, la vie quotidienne par la boutique et l’imageintime du lit. La fonction de ces lieux est double�: réalisme et critique de la dépravation d’Alexandre.Ils contribuent à rendre compte de l’atmosphère florentine.#�Les étoffes tiennent une grande place dans le texte�: «�rideaux�» (l.�129), «�mes étoffes�», «�mes bellesétoffes du Bon Dieu�» (l.�132), «�une pièce de velours�» (l.�149), «�une aune de velours brodé�» (l.�166). Ellesévoquent la prospérité économique de Florence et suggèrent un monde de raffinement et de luxe.Elles ont à voir avec le théâtre («�rideaux�») et plus généralement avec la fête et la sensualité�; ellescontribuent à peindre l’atmosphère florentine de manière naturelle car les étoffes sont lapréoccupation du Marchand qui en parle donc naturellement dans son discours.$�À la ligne 127, il est fait allusion à «�ces fêtes-là�», caractérisées par la «�lumière�», la «�danse�», le«�vin�», les «�amusements�». Elles renvoient à un monde de plaisirs et de légèreté. Quant aux fêtestraditionnelles (le «�carnaval�», le «�pèlerinage�» et la «�foire�» qui l’accompagne), elles ont à voir à la foisavec le divertissement et avec la piété.%�Le «�maudit ballon�» (l.�165) ou encore la précision de l’«�aune de velours brodé�» (l.�166) constituentdes «�effets de réel�».&�Florence est vue comme un lieu de plaisirs�: plaisirs des nobles avec les fêtes, le vin, les filles. LeMarchand évoque aussi «�des amusements de plusieurs sortes�»�: «�la danse, le cheval, le jeu de paume et tantd’autres�» (l.�139-140). Les plaisirs du peuple sont aussi les fêtes traditionnelles (cf.�question�4) et unplaisir voyeur qui consiste à regarder les fêtes des nobles (l.�129). Le vin est également prisé maiscomme juste réconfort d’un labeur (l.�150-154). Florence est un lieu où règnent la sensualité et ladouceur de vivre, mais la démesure et la dépravation ont gagné la noblesse (l.�154-155�: «�tonneauxsans vergogne�»�; l.�156�: «�en s’abrutissant jusqu’à la bête féroce�»), qui se caractérise aussi par le mépris desautres (l. 135-136�: «�qu’on frotte sur les murailles avec le moins de regret�» et l.�159-160). Bref, à Florence,la fête tourne mal.

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Lorenzaccio – 7

'�Le peuple est voyeur ou victime.(�Les cibles de la satire sont, d’une part, les nobles, dont le Duc, et, d’autre part, la présence étrangère(les Allemands et le pape).)�«�Polissons�» (l.�123, aussi affectueux que péjoratif), «�tonneaux sans vergogne�» (l.�155), «�godelureauxde la Cour�» (l.�155) désignent la jeunesse noble, l’entourage du Duc. La domination étrangère estévoquée par «�deux architectes mal avisés�» (l.�184), «�des rats dans un fromage�» (l.�195). Quant au Duclui-même, c’est un «�bâtard�» (l.�202), «�une moitié de Médicis, un butor�» (l.�203), un «�garçon boucher ou[un] valet de charrue�» (l.�204). On remarque que le registre de l’animalité est utilisé à deux reprises�:ces hommes se conduisent comme des bêtes.*+�Les reproches sont adressés aux seigneurs, d’une part�: on leur reproche de ne pas payer leurs dettes(l.�134�: «�Il en danse plus d’une qui n’est pas payée�»), de mépriser le peuple et de n’avoir pas descrupules (l.�135-136, 142, 159-160), d’être des ivrognes (l.�146, 154-155). D’autre part, les reprochestouchent aussi la manière dont est gouvernée Florence�: la présence de la domination étrangère(l.�185), le fait que les Médicis soient son relais (l.�187-190). L’Orfèvre donne une image dégradée dessoldats allemands (l.�196-197�: «�tout en jouant aux dés et en buvant leur vin aigrelet�»). L’alliance avecl’étranger au mépris de ce que pense le peuple est également stigmatisée (l.�198-199�: «�Les famillesflorentines ont beau crier, le peuple et les marchands ont beau dire�»)�; on dénonce aussi l’incompétence duDuc (l.�203-204�: «�un butor que le Ciel avait fait pour être garçon boucher ou valet de charrue�») et, demanière implicite, la forte imposition�: «�et encore le paye-t-on pour cela�» (l.�205-206).*,�L’image qui qualifie la Florence d’avant est «�une bonne maison bien bâtie�» (l.�178) –�ce qui connoteà la fois la solidité et la stabilité mais aussi l’idée de famille et de solidarité.*-�On remarque de nombreuses images dévalorisantes�:–�le poison�: «�champignon de malheur�» (l.�190), «�excroissance vénéneuse�» (l.�200-201)�;–�la monstruosité�: «�la tête trop lourde et une jambe de moins�» (l.�192)�;–�les immondices�: «�boue�», «�crachat�» (l.�194)�;–�l’animalité�: «�rats�» (l.�195), «�butor�» (l.�203)�;–�la trivialité et la vulgarité�: «�garçon boucher ou valet de charrue�» (l.�204).Æ�Florence est donc en proie au mal, à la corruption, à la souillure et à la mort.*.�Les allusions historiques sont celles faites à Charles Quint et aux Médicis. Le drame romantiqueemprunte ses sujets à l’histoire moderne.*/�Il s’agit d’un dialogue entre deux commerçants, c’est donc naturellement que l’argent entre dansleurs préoccupations�: ils évoquent les lieux de vente («�boutique�», «�foire�»), le prix des marchandises(«�une cinquantaine de florins�»), le profit (l.�172�: «�et qui fait gagner les marchands plus que tous les autresjours de l’année�»), les dettes des seigneurs (l.�134), les impôts (l.�205).*0�Dans le texte, apparaissent le «�Marchand�» et l’«�Orfèvre�», qui ont la parole, mais aussi les seigneursdont les plus jeunes (les «�godelureaux de la Cour�»), les «�grandes familles florentines�», le Duc, les soldatsde la «�garnison�», les républicains dont Philippe Strozzi, un jeune homme, Pierre Strozzi, les «�bonnesdames�» (l.�173) et les «�filles�» du peuple (l.�205). C’est donc une vision très complète de la sociétéflorentine qui est donnée à voir.*1�Le drame romantique ne se limite pas à la représentation d’une classe sociale. Il met le peuple enscène dans un spectacle total.*2�Le Marchand fait preuve de bienveillance et de peu d’esprit critique. Les marques de jugement sontmélioratives�: «�me réjouissent le cœur�» (l.�123), «�belle gaillarde�» (l.�125), «�heureux garçon�» (l.�125-126),«�C’est une famille bien florentine�» (l.�126), «�ces fêtes-là me font plaisir à moi�» (l.�127-128), «�ces braves etloyaux seigneurs�» (l.�133), «�La Cour est une belle chose�» (l.�175). Il représente l’attachement traditionneldu peuple à la noblesse. Peut-être obéit-il aussi à un intérêt économique�?Le père Mondella –�l’Orfèvre�– se caractérise par son esprit critique, qui contraste avec la naïveté deson interlocuteur, et sa lucidité. Il prononce une violente charge contre les puissants qui gouvernentde manière corrompue. Il incarne le respect des valeurs traditionnelles�: l’honnêteté (l.�153), le travail,la famille (l.�154), la religion (l.�157).*3�La prise en compte du destinataire passe par l’utilisation de la 2e�personne («�vous�»), de l’apostrophe(quatre occurrences de «�père Mondella�» et cinq de «�voisin�»), de l’impératif (l.�148�: «�Entrez donc dansma boutique�»�; l.�176-177�: «�voyez-vous�») et de tournures interrogatives (l.�140, 167, 191).

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Réponses aux questions – 8

*4�On relève dans le texte beaucoup de présents de vérité générale qui s’appliquent soit au quotidien,soit au gouvernement. Par exemple�: «�où le plaisir ne coûte rien, la jeunesse n’a rien à perdre�» (l.�121-122), «�Un verre de vin est de bon conseil�» (l.�147), «�La Cour est une belle chose�» (l.�175). Ces présentssont le reflet de la sagesse populaire.5+�D’une manière plus générale, cette scène se fait l’écho d’une certaine sagesse populaire car elledonne la parole au peuple, aux boutiquiers. Leur vision des choses est concrète et se mesure en termesd’étoffes et d’argent. Les personnages se fondent sur des constats et sont aptes à saisir l’outrance et leslimites à ne pas dépasser. Ils dénoncent les abus et défendent les valeurs simples et évidentes comme lafamille, l’honnêteté, le travail, le respect d’un gouvernement légitime.

! Lectures croisées et travaux d’écriture (pp.�25 à 36)

Examen des textes et des images!�Le mot qui revient est «�simplicité�» ou «�simple�» dont on relève neuf occurrences. Il rappellel’esthétique classique de la sobriété, au nom de la vraisemblance et pour faciliter la compréhension duspectateur."�Racine anticipe le reproche d’une pièce trop simple et sans créativité de manière très moderne�:«�Toute l’invention consiste à faire quelque chose de rien�» (cf.�Flaubert dans une lettre à Louise Colet du16�janvier 1852�: «�Le style étant à lui tout seul une manière absolue de voir les choses�»).#�La phrase «�et dont la trentième représentation a été aussi suivie que la première�» montre de manièreexplicite que la préface de Bérénice a été écrite après que la pièce a été représentée.$�«�Rome�» est citée deux fois, vaguement personnifiée�; les «�Romains�» apparaissent une fois. Lecontexte reste donc très évasif et il est difficile de se le représenter.%�La scène 5 de l’acte IV de Bérénice est une scène de rupture d’autant plus déchirante que les deuxpersonnages s’aiment encore et sacrifient leur amour sur l’autel de la raison d’État, cédant à unefatalité non pas divine mais humaine. Les champs lexicaux des sentiments peuvent se classer suivant letableau ci-dessous�:

DOULEUR ABSENCE / RUPTURE AMOUR

«�cruel�», «�infidèle�», «�mot cruel�»,«�affreux�», «�souffrirons-nous�»,«�l’ingrat�», «�triste renommée�»,«�condamnée�», «�les pleurs deBérénice�», «�éternels chagrins�», «�quevous me déchirez�», «�vous pleurez�»

«�absence éternelle�», «�et pour jamais,adieu�», «�me séparent de vous�»,anaphore de «�sans que�», «�absence�»,«�séparer�»

«�mille serments�», «�amour�», «�vousétiez aimée�», «�heureux hyménée�»,«�vous pouvez tout�», «�je n’y résistepoint�», «�Je sens ma faiblesse�»,«�appas�», «�il vous aime�»

&�Les exemples sont accumulés dans le premier paragraphe de l’extrait de la préface de Cromwell. Ilssont là pour convaincre le lecteur du bien-fondé de la thèse soutenue, en lui rappelant des épisodeshistoriques qu’il connaît forcément et qu’il pourra se représenter. Ils parlent à l’imagination.'�L’art doit faire revivre l’histoire s’il s’agit d’un drame�: il montrera alors aussi bien les actionsextérieures des hommes que leurs tourments intérieurs. La définition que donne Victor Hugo de lapoésie revient à son étymologie�: créer.(�Dans le texte�D, les éléments de couleur locale concernent l’ameublement («�ameublement magnifiquedans le goût demi-flamand du temps de Philippe IV�», «�immenses rideaux�», «�une table�», «�un fauteuil�», «�cequ’il faut pour écrire�»), l’architecture intérieure («�le salon de Danaé�», «�une grande fenêtre à châssis dorés età petits carreaux�», «�un pan coupé�», «�une porte basse�», «�une grande cloison vitrée à châssis dorés�», «�largeporte également vitrée�», «�longue galerie�», «�cloison vitrée�») et les vêtements («�velours noir�», «�costume decour du temps de Charles II�», «�La Toison d’or au cou�», «�l’habillement noir […]. Sans épée�»).)�Dans la mise en scène de Ruy Blas, les indicateurs temporels sont nombreux�: ils sont conformes àce qui est indiqué dans la didascalie initiale. En revanche, dans la mise en scène de Bérénice, les seulsindicateurs temporels sont les vêtements de Titus�; Bérénice, avec sa robe collante, ses cheveuxdénoués et sa frange, évoque nettement les années 1980. Quant au décor, d’une extrême sobriété, ilne contient aucune référence historique.

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Lorenzaccio – 9

Travaux d’écriture

Question préliminaireLe décor a d’abord une fonction référentielle�: il sert à situer l’action dans un lieu et une époque. Ledrame romantique a beaucoup utilisé le décor dans ce sens. Il a évidemment une fonction esthétique,mais peut aussi donner des indications sur le déroulement de l’intrigue ou les relations entretenues parles différents personnages. Enfin, il peut parfois avoir une fonction symbolique. Les tragédies classiquesse jouent avec un décor réduit au strict minimum, laissant au texte un libre champ pour s’exprimer.Leur message se veut intemporel. Le décor peut être suggéré soit par le discours des personnages, soitpar les didascalies. Dans le drame romantique, les didascalies sont le plus souvent longues etnombreuses, tandis qu’elles sont presque totalement absentes de la tragédie classique.

CommentaireOn utilisera, pour ce commentaire, les réponses proposées pour la lecture analytique. Les sous-partiespourront être les suivantes�:

1.�Une évocation de la villeA.�Une peinture de FlorenceB.�L’atmosphère de la villeC.�Une ville de plaisirs

2.�La satire d’un monde corrompuA.�Les cibles de la satireB.�Les moyens de la satire

3.�La voix du peupleA.�Un kaléidoscope de la population florentineB.�Les marchands�: deux points de vue opposésC.�Une certaine sagesse populaire

Dissertation

IntroductionLa formule de Victor Hugo participe d’une définition du drame romantique. Elle est donc très datéeet l’art n’a pas toujours fonctionné sans «�règles ni modèles�». Peut-il d’ailleurs véritablement s’enaffranchir�?

1.�La nécessité des règles et des modèlesA.�Le modèle comme «�garant�»Jusqu’à la querelle des Anciens et des Modernes, le problème de l’originalité ne se posait pas. Nonseulement on pouvait imiter, mais on le devait. Les modèles antiques étant des garants, un détour pareux était nécessaire pour donner à l’œuvre d’art de la valeur. Ainsi le titre complet des Caractères de LaBruyère est-il Les Caractères imités du Grec Théophraste.B.�Les règles�: une codification signifianteLes règles concernent particulièrement la poésie et la tragédie, genres considérés comme les plusnobles dans la hiérarchie classique. Les respecter, c’est prouver que l’on sait s’intégrer dans unestructure particulière, exigeante, contraignante, mais censée produire de la beauté et de l’harmonie, et,dans le cas de la tragédie classique, de la vraisemblance. Respecter l’unité de temps, par exemple, c’estfaire «�coller�», autant que faire se peut, le temps de l’action au temps de la représentation, garantie dela vraisemblance pour les classiques. Ainsi l’action de Bérénice se déroule-t-elle en quatre heures�: unrecord�!C.�Les limites des règles et des modèlesSi les règles ont été créées en fonction d’une conception idéalisée du réel, il n’en reste pas moinsqu’appliquées mécaniquement, elles se réduisent à de simples recettes qui n’ont rien à voir avec les

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Réponses aux questions – 10

intuitions d’un véritable artiste. Ainsi, les œuvres du post-classicisme sont figées dans le respect derègles auxquelles on ne sait plus donner vie.Transition. Il est donc nécessaire de savoir s’affranchir des règles.

2.�Une nécessaire originalitéA.�Aujourd’hui, du reste, l’art est nécessairement associé à l’innovationUne œuvre d’art sera jugée digne de ce nom seulement si elle crée un univers, un langage, destechniques. Ainsi des révolutions successives en peinture au XXe�siècle.B.�L’affranchissementLes romantiques ont voulu se libérer de toutes les règles classiques et ont eu à ce sujet une positionradicale. Tout détruire pour bâtir un art nouveau qui correspondrait à une société nouvelle.C.�Une inspiration personnelleL’artiste, dans son œuvre, laisse toujours parler une sensibilité, une histoire qui lui appartiennent enpropre, sinon il n’est qu’un exécutant, un excellent faussaire, mais il ne crée pas une œuvre. Chaqueartiste a sa manière qui ne saurait se réduire au respect de règles, à l’imitation d’un modèle. La «�patte�»d’un écrivain est d’ailleurs tellement marquée qu’il peut être pastiché (cf. les Pastiches de Proust).

3.�Les règles et les modèles comme supports d’une création originaleA.�Le modèle comme repoussoirFaire table rase des règles, c’est encore s’en servir comme référence, ne serait-ce que comme contre-modèle. Si Hernani fait scandale lors des premières représentations, c’est avant tout parce qu’onmesure les écarts avec les règles que la pièce ne suit pas.B.�Des modèles fécondsPar ailleurs, règles et modèles peuvent être féconds et stimuler l’inspiration par des contraintes. Quel’on pense à la longévité et à la diversité du sonnet. Nombreuses sont les œuvres qui s’inspirent d’uneautre, se situent dans une tradition pour mieux la renouveler. Ainsi, par exemple, «�Le PontMirabeau�» d’Apollinaire trouve-t-il son inspiration lyrique et la structure du distique dans unechanson de toile du Moyen Âge «�Gaiete et Oriour�».C.�Une appropriation personnelleRespecter des règles, suivre un modèle n’empêchent pas la création personnelle, au contraire. LaFontaine s’inspire de fables de l’Antiquité mais les enrichit et les transforme considérablement. D’autrepart, un artiste a besoin de connaître une tradition pour se situer par rapport à elle et, le cas échéant,s’en détourner. Picasso a d’abord été un peintre figuratif�; le voyage en Italie est un parcours obligépour un apprenti peintre qui doit se familiariser avec les grands maîtres de la Renaissance.

ConclusionIl est bien difficile, comme le fait Victor Hugo, d’affirmer qu’«�il n’y a ni règle ni modèle�» car, si c’estl’écart par rapport à une tradition, ou du moins l’interprétation personnelle de cette tradition, qui faitla valeur d’une œuvre, la règle ou le modèle constitue le repère qui inscrit l’œuvre dans une culture.

Écriture d’inventionSujet traité par Armelle Toulhoat, élève de Seconde 10 au lycée Montesquieu d’Herblay (95).La scène se passe dans un château en province. C’est la nuit du 4�août 1789. Dans le château, le comte et lacomtesse d’Aubervilliers se sont réfugiés dans un petit salon, au premier étage. C’est une pièce chaleureuse etéclairée par un lustre en cristal accroché au plafond. Un feu brûle dans l’âtre, faisant courir des ombres sur le visagedu Comte qui se tient debout, immobile devant la cheminée. La pièce est décorée de grandes tapisseriesreprésentant des scènes de la mythologie grecque et dont les couleurs sont légèrement passées. Sur le mur en face dela cheminée, il y a un tableau en pied de l’ancêtre du Comte. Le mur à gauche de l’âtre s’ouvre sur de hautesfenêtres, grandes ouvertes, laissant entrer de l’air frais dans la pièce étouffante. Dehors, il fait nuit noire. Ondistingue au loin des lueurs rougeâtres qui montrent, hélas�! que d’autres châteaux sont en train de partir enfumée. Au centre de la pièce, la Comtesse est allongée sur un sofa et s’évente avec un éventail de couleur violette.La pendule sonne dix heures. Au-dehors, de nombreux cris se font entendre.LE COMTE, se mettant à tourner en rond.Seigneur�! Quelle idée avons-nous eue de nous installer en province�?!

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LA COMTESSEAllons, mon ami, ne vous torturez point l’esprit. Lorsque notre roi vous a fait le privilège de nous

offrir ces terres en même temps que votre titre, vous auriez été bien en peine de refuser.LE COMTEVoyez où cela nous mène�! Nous sommes sur le point d’être grillés vifs au cas où vous ne l’auriez

point remarqué�!LA COMTESSEMais, mon ami, nous n’y sommes pas encore�!LE COMTEVentrebleu�! Quelle diablerie que cette folie des esprits faibles�!LA COMTESSE, s’étirant avec volupté.Ah�! Je vous en prie, mon ami, ne jurez pas, je déteste cela�!LE COMTEVraiment, madame�! Parfois, vous avez le don de m’exaspérer. Ouvrez les yeux, bon sang�! Nous

devons fuir au plus vite et nous réfugier à Paris.LA COMTESSE, haussant les sourcils.Ouvrez plutôt les vôtres, Charles�! À Paris, vraiment�? Mais, mon pauvre ami, la peur de mourir vous

fait perdre la tête�! La situation à Paris est bien pire qu’ici�! Ne saviez-vous pas que l’Hôtel de Villeet la Bastille sont depuis longtemps aux mains du petit peuple�? À Paris�! Je préfère encore fuir enAngleterre�! Et d’ailleurs, j’ai demandé la femme de chambre, Suzanne, pour préparer quelquesbagages. Elle ne devrait plus tarder. Plutôt qu’à Paris, il faut nous rendre à Versailles, sous laprotection du roi.

LE COMTE, poussant un gros soupir.Vous avez peut-être raison. J’en profiterais pour faire remarquer au roi que ces terres sont certes riches

mais peut-être un tantinet bruyantes… je dirais…LA COMTESSE, lui jetant un regard courroucé.N’ironisez pas�! Ça n’est pas le moment�!On frappe à la porte et la femme de chambre entre.LA COMTESSE, avec une moue de reproche.Ah�! Suzanne�! Enfin vous voilà�! Vous en avez mis du temps�! Voilà une heure que je vous ai

sonnée�!SUZANNEOh�! À peine, madame, juste cinq minutes.LA COMTESSE, interloquée.Bah�! Voyons, Suzanne�! Je ne vous permets pas (voyant que Suzanne s’apprête à parler). Taisez-vous�!

Allez plutôt préparer les malles de voyage pour monsieur le comte et moi. Et dites à Hubert depréparer la voiture�!

À ce moment, Hubert entre en trombe dans la pièce, tandis qu’au-dehors les cris se font soudain assourdissants.HUBERT, affolé.Monsieur�! Monsieur�! Oh�! c’est une catastrophe�! Ah�! Monsieur, vite�! c’est une catastrophe�! Ah�!

Mon Dieu�!LE COMTEHé bien, Hé bien, Hubert�! Parlez�! Que se passe-t-il�?HUBERT, les yeux agrandis par la peur.Les paysans, monsieur, les paysans�! ils sont là�! devant les grilles�! Avec des fourches, des couteaux, des

haches, des faux, et… et… Oh�! Seigneur�! et des flambeaux, monsieur�!Les trois autres sont muets de stupeur. Il y a un silence consterné.LA COMTESSE, très pâle.Seigneur, Marie, Joseph, ayez pitié de nos âmes�!Au-dehors les grilles cèdent.

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Réponses aux questions – 12

A c t e I I , s c è n e 4 ( p p . � 7 5 à 8 3 )

! Lecture analytique de l’extrait (pp.�84 à 86)!�Les didascalies sont au début de la scène et mettent en place une situation qui ne changera pas.L’atmosphère paisible de la scène repose sur cette stabilité. Le lieu est familial�: le «�palais des Soderini�».De plus, les trois personnages sont «�assis�» –�ce qui est propice à la conversation. Le «�livre�» confirmel’ambiance studieuse."�Le rêve baigne dans un clair obscur�: la «�nuit obscure�» (l.�437), complétée par le vêtement «�noir�»(l.�441) de l’homme, est faiblement éclairée par la «�lampe�» (l.�434 et 444), dont on remarque qu’elleest «�loin�» (l.�434) de Marie. Cette atmosphère, un peu inquiétante, est donc propice à la rêverie.Mais elle est aussi symbolique car l’opposition du jour et de la nuit révèle la dualité de Lorenzaccio,dont la mère rêve qu’il redevienne son «�Lorenzino d’autrefois�» (l.�445), comme «�aux jours de [son]enfance�» (l.�436).#�Cette scène contraste avec le milieu dans lequel évolue habituellement Lorenzaccio�: atmosphèrefamiliale, calme, paix, foi en un Lorenzo meilleur.$�Jusqu’au récit du rêve, la parole est distribuée équitablement entre les trois personnages –�ce quicontribue à l’harmonie dégagée par la scène. Le rêve occupe la seule tirade de l’extrait et met enlumière le rôle décisif de la mère du héros. Par ce récit, elle donne vie une seconde fois à Lorenzo.Après cette tirade, Catherine s’efface (elle ne prend plus la parole qu’une seule fois) pour laisser placeà un dialogue décisif entre la mère et le fils�: Lorenzaccio prend un engagement.L’affection que les personnages éprouvent les uns pour les autres est rendue par les adjectifs possessifset par les diminutifs hypocoristiques�: «�Ma Cattina�» (l.�411), «�Mon enfant�» (l.�431), «�monLorenzino�» (l.�436 et 445), «�Renzo�» (l.�442). Par ailleurs, Lorenzaccio avoue de manière expliciteson affection pour les deux femmes�: «�Je vous estime, vous et elle. Hors de là, le monde me fait horreur�»(l.�429-430). L’inquiétude de Catherine (l.�455) trahit aussi l’affection qu’elle a pour son neveu.%�«�Tes livres latins�» (l.�412) / «�Celui-ci n’est point en latin�» (l.�413)�; «�C’est l’histoire romaine�» (l.�414)/ «�Je suis très fort sur l’histoire romaine�» (l.�415)�; «�Sais-tu le rêve […]�?�» (l.�431) / «�Quel rêve�?�»(l.�432)�; «�Vous l’avez vu�?�» (l.�446) / «�Comme je te vois�» (l.�447)�; «�ce matin en rentrant�» (l.�449) /«�Et il s’en est allé quand je suis rentré�?�» (l.�450-451). Ce procédé s’appelle une «�stichomythie�»�: lesrépliques s’enchaînent rapidement, rebondissent sur les mêmes mots et montrent la continuité de lapensée d’un personnage à l’autre. C’est une manière de suggérer le lien entre les trois personnages.&�«�Ma mère�» (l.�410 et 456), «�votre mère et votre sœur�» (l.�428), «�mon enfant�» (l.�431). On peutajouter, bien que cela ne concerne pas les personnages en scène, «�Tarquin le fils�» (l.�416) et «�petitesfilles�» (l.�420). Le champ lexical des relations familiales est assez important dans la scène. Il montre laforce des liens qui unissent les personnages. On remarquera l’indulgence et la bienveillance desfemmes envers Lorenzaccio et le respect de ce dernier à leur égard. Ce regard sur le héros est tout àfait inhabituel dans la pièce. Dans la sphère de l’intime, il apparaît comme tout à fait récupérable –�cequi apporte un éclairage nouveau sur le personnage et laisse entrevoir la fin du drame.'�Le personnage qui occupe le plus la parole est Marie car elle prononce la seule tirade de l’extrait.C’est elle qui, par son rêve, profère une sorte de révélation�: Lorenzaccio pourrait redevenir le«�Lorenzino d’autrefois�» (l.�445).(�Les confidences de Lorenzaccio sont sollicitées par des questions de la part des femmes (l.�422, 427-428, 455), puis les questions changent de camp et, après le récit du rêve, c’est Lorenzaccio quiinterroge sa mère, comme pour tenter de déchiffrer le rêve et d’y voir un signe. La confidence prendla forme du récit intime du rêve mais aussi de l’aveu affectueux de la part de Lorenzo (l.�429-430) ouencore de la promesse mystérieuse (l.�456-458).)�Le discours de l’intimité s’exprime, dans un récit, à la 1re�personne. Le moment évoqué est unmoment de solitude (l.�434), un état de demi-veille (l.�433), la nuit (l.�437). Marie convoque dessouvenirs�: «�Je songeais aux jours où j’étais heureuse, aux jours de ton enfance�» (l.�435-436). Elle évoque, parle discours direct, ses inquiétudes et ses regrets de mère�(l.�437-438�: «�Il ne rentrera qu’au jour, lui quipassait autrefois les nuits à travailler�»), sa douleur aussi (l.�438-439�: «�Mes yeux se remplissaient de larmes�»).La tirade nous apprend que Lorenzaccio a eu un autre visage, celui d’un jeune homme studieux(l.�438�: «�qui passait autrefois les nuits à travailler�»�; l.�444-445�: «�il a ouvert son livre�»). Marie vit dans la

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nostalgie de cette période heureuse et –�le rêve nous l’apprend�– attend un changement de la part deson fils. Lorenzaccio va commettre le meurtre en partie pour renouer avec la pureté d’autrefois et,peut-être, ce faisant, ne pas décevoir sa mère.*+�L’imparfait sert à préciser le contexte (l.�433-434), il évoque une action qui dure (l.�435-436). Onpeut penser que les lignes�439-440 renvoient à des actions qui se répètent. L’ensemble de cesimparfaits prépare l’action de premier plan, rapportée au passé composé. Le passé composé est préféréau passé simple car il est plus naturel dans une conversation, et puis l’action, rapportée au passécomposé, n’apparaît pas coupée du moment présent. Tout se passe comme si le rêve avait laissé surMarie des impressions qui ne s’estompent pas�: en le racontant, elle revit le rêve. Ce temps permetd’effacer la frontière entre le passé et le présent.Ce rêve éveillé relève de l’hallucination. Le récit de ce rêve provoque une grande émotion chezLorenzaccio qui se traduit par des questions brèves et précises, par des tremblements (l.�435) et parune promesse en forme de défi, faite spontanément, sous le choc de la révélation.Le récit de Marie joue un rôle de catalyseur dans le cheminement intérieur du jeune homme. Il metsans doute fin à ses doutes et l’oriente définitivement vers le meurtre rédempteur.*,�Les indicateurs temporels, dans la tirade de Marie, renvoient au passé de Lorenzo, par opposition auprésent de débauche et de dépravation du jeune homme�: «�aux�jours où j’étais heureuse, aux jours de tonenfance�» (l.�435-436), «�autrefois�» (l.�438 et 445).«�Tout d’un coup�» (l.�440) annonce l’action qui vient rompre l’atmosphère paisible décrite au début dela tirade.La dualité de Lorenzo n’est pas seulement l’ambiguïté présente du personnage, elle relève d’une netteévolution dans le temps�: il y a le Lorenzo d’avant et le Lorenzo d’aujourd’hui. Cette opposition est,du reste, traduite par la manière de le nommer�: «�Lorenzino�» est devenu «�Lorenzaccio�». À l’affectiona succédé le mépris.*-�La lecture que Lorenzaccio fait de l’histoire de Tarquin et de Lucrèce appartient au registreironique�: «�c’est un conte de fées�» (l.�418), «�Brutus était un fou, un monomane�» (l.�418-419), «�Tarquinétait un duc plein de sagesse�» (l.�419-420). Le procédé utilisé est celui de l’antiphrase, laquelle devientfranchement de la provocation par l’euphémisme qui clôt la réplique�: «�qui allait voir en pantoufles si lespetites filles dormaient bien�» (l.�420-421). Le cynisme de Lorenzo atteint son comble quand ilcommente l’attitude de Lucrèce�: «�Elle s’est donné le plaisir du péché et la gloire du trépas�» (l.�423-424).La suite du commentaire est également très tendancieuse�: le suicide de Lucrèce apparaît comme unesorte de redoublement du viol, vu comme une source de plaisir (l.�425-426�: «�elle s’est fourré biengentiment son petit couteau dans le ventre�»).La parodie consiste ici à transformer «�une histoire de sang�» (l.�417) en «�conte de fées�» (l.�418)�: lelexique devient alors mélioratif («�sagesse�», «�bien�») et évoque un monde enchanté et rassurant(«�pantoufles�», «�petites filles�», «�dormaient�», «�gentiment�»�; même le «�couteau�» est «�petit�»).*.�Ces relevés éclairent la facette la plus odieuse de Lorenzaccio et illustrent une perversitéostensiblement affichée.*/�Lorenzaccio révèle ce qu’il est vraiment au fond de lui quand il avoue que «�le monde [lui] faithorreur�» (l.�429-430). Le cynisme de Lorenzaccio est, en vérité, l’expression du désespoir.*0�Le rêve de Marie confirme cet aspect du personnage en révélant sa pureté passée.*1�Le «�spectre�» représente un Lorenzo mort maintenant mais, comme dans Hamlet, il révèle une véritédéterminante pour la suite de la pièce. Il a l’«�air mélancolique�» (l.�452) car il pleure le Lorenzo d’autrefois.*2�La dernière phrase de l’extrait, bien qu’elle reste énigmatique, annonce un coup de théâtre (l.�458�:«�quelque chose qui l’étonnera�»). Le spectre illustre le dédoublement du personnage et le conflitintérieur. La tournure «�mon spectre�» est d’ailleurs révélatrice.*3�Tarquin est clairement assimilé à Alexandre. Lorenzaccio dit même de Tarquin qu’il était un«�duc�», commettant une erreur puisqu’il s’agit, en vérité, d’un roi. Quant à Lorenzo, il s’identifie aurégicide Brutus (l’identification est explicite à la scène�3 de l’acte�III). On peut penser que, s’ildemande fiévreusement à Catherine la lecture de l’histoire du héros romain (l.�454), c’est pourconfirmer sa décision de tuer Alexandre. De plus, la manière dont Lorenzaccio rend compte de la finde Lucrèce (l.�423�: «�Elle s’est donné le plaisir du péché et la gloire du trépas�») évoque la trajectoire deLorenzaccio. Tarquin, présenté par antiphrase de manière élogieuse, illustre les tentations négatives du

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Réponses aux questions – 14

héros dont le modèle de Brutus va illustrer la rédemption. Au bout du compte, c’est Lucrèce, quiincarne, dans la bouche de Lorenzaccio, une héroïne féminine ambiguë, qui pourrait bien rendrecompte de la complexité du jeune homme, de toutes ses facettes, y compris de sa féminité.*4�En tuant Alexandre, Lorenzaccio retrouvera son unité. En commettant un acte viril et politique (lerégicide), il délivrera sa ville du tyran et se délivrera lui-même des tentations du vice. Ainsi, ilredeviendra le «�Lorenzino d’autrefois�» et retrouvera la pureté perdue.

! Lectures croisées et travaux d’écriture (pp.�87 à 95)

Examen des textes et de l’imageLes six premières questions ont été traitées par Vincent Makary, élève de Seconde 10, en 2003-2004, au lycéeMontesquieu d’Herblay (95).!�Les dix premières strophes du poème sont construites par couple et selon un schéma répétitif. Eneffet, nous pouvons regrouper les sizains deux par deux. Chaque groupe est formé d’un premier sizainprésentant l’âge auquel le poète a vu son double vêtu de noir et d’un second sizain dans lequel ildonne plus de détails sur le personnage.•�Sizains impairs (1, 3, 5, 7, 9)Chaque premier vers des sizains impairs commence par un indicateur temporel�: v.�1�: «�Du temps quej’étais écolier�»�; v.�13�: «�Comme j’allais avoir quinze ans�»�; v.�25�: «�À l’âge où l’on croit à l’amour�»�;v.�37�: «�À l’âge où l’on est libertin�»�; v.�49�: «�Un an après, il était nuit�».Chacun de ces vers désigne une période de la vie du poète. Les deuxième et troisième vers précisentce que faisait le poète au moment de la rencontre et à quel endroit il se trouvait.V.�2-3�: «�Je restais un soir à veiller / Dans notre salle solitaire.�»V.�14-15�: «�Je marchais un jour à pas lents, / Dans un bois, sur une bruyère.�»V. 26-27�: «�J’étais seul dans ma chambre un jour / Pleurant ma première misère.�»V. 38-39�: «�Pour boire un toast en un festin / Un jour je soulevai mon verre.�»V. 50-51�: «�J’étais à genoux près du lit / Où venait de mourir mon père.�»Nous retrouvons la même structure�: «�je�» + verbe à l’imparfait + compléments divers + complémentde lieu. Le complément de temps reste toujours assez vague et répétitif�: «�un jour�» ou «�un soir�». Lequatrième vers du sizain reprend à chaque fois la périphrase verbale «�vint s’asseoir�», en modifiantseulement les lieux�: «�Devant ma table�» (v.�4), «�Au pied d’un arbre�» (v.�16), «�Au coin du feu�» (v.�28),«�En face de moi�» (v.�40), «�Au chevet du lit�» (v.�52).Au cinquième vers de ces sizains, le poète présente, à chaque fois, un personnage vêtu de noir�: v.�5�:«�Un pauvre enfant vêtu de noir�»�; v.�17�: «�Un jeune homme vêtu de noir�»�; v.�29�: «�Un étranger vêtu denoir�»�; v.�41�: «�Un convive vêtu de noir�»�; v.�53�: «�Un orphelin vêtu de noir�».Le dernier vers est une sorte de refrain qui revient cinq fois aux vers�6, 18, 30, 42, 54�: «�Qui me ressemblaitcomme un frère�». On a l’impression que la coïncidence est mécanique et qu’elle ne doit rien au hasard.•�Sizains pairs (2, 4, 6, 8, 10)Musset y raconte les actions du personnage vêtu de noir et s’efforce de le décrire. Tantôt il décrit sonair ou une partie de sa personne (v.�7�: «�Son visage était triste et beau�»�; v.�31�: «�Il était morne etsoucieux�»�; v.�46�: «�Son bras maigre�»�; v.�55�: «�Ses yeux étaient noyés de pleurs�»), tantôt il précise lesobjets que tient le double. Dans le deuxième sizain, il se contente de se pencher sur le livre du poète(v.�9�: «�Dans mon livre ouvert il vint lire�»)�; dans le quatrième, il tient «�un luth�» et «�un bouquetd’églantine�» (v.�20-21)�; dans le sixième, il porte «�un glaive�» (v.�33)�; dans le huitième, «�un haillon depourpre en lambeau�» (v.�44) et «�Sur sa tête un myrte stérile�» (v.�45). Le dixième sizain reprend cesobjets�: «�son luth à terre�», «�sa pourpre�», «�son glaive�» (v.�58-60) en y ajoutant une couronne d’épine(v.�57) qui fait penser à celle du Christ.À travers ces répétitions, le poète veut nous montrer que son double lui apparaît à différents momentsde sa vie. Il cherche à retracer les moments importants pour lui en insistant sur le fait que son doubleévolue comme lui�: il est d’abord un enfant studieux (comme Lorenzo), puis un jeune hommeamateur de poésie, ensuite un amoureux éconduit avant de devenir libertin, et enfin un orphelin. Surle plan poétique, les répétitions et les structures identiques rythment le poème et lui donnent uneossature. Le refrain des sizains impairs nous fait penser également à une chanson mélancolique.

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Lorenzaccio – 15

"�Le double du poète est toujours vêtu de noir (v.�5, 17, 29, 41, 53), symbole de tristesse et de deuil. Il neparle jamais et se présente comme un spectateur muet du poète. Au début, il se penche sur sa main (v.�10).Lors de sa deuxième apparition, il lui fait «�un salut d’ami�» (v.�22) et lui montre «�du doigt la colline�» (v.�24).Il paraît assez présent et amical et indique au locuteur ce qu’il doit faire. La troisième fois, il souffre ensilence avec le poète et se contente de pousser un soupir avant de «�s’évanouir comme un rêve�» (v.�36). Laquatrième fois, il trinque avec le poète et «�son bras maigre�» (v.�46) annonce la «�main débile�» du narrateur(v.�48). Enfin, il pleure à côté de Musset orphelin et ressemble au Christ avant sa passion.Les objets décrits sont tous symboliques et représentatifs des différentes périodes de la vie de Musset�:le «�livre�» (v.�9) symbolise son goût pour les études et la littérature�; le «�luth�» et le «�bouquetd’églantine�» (v.�21) représentent son amour pour la poésie�; le «�glaive�» (v.�33) est le symbole de lasouffrance�; le «�verre�» (v.�39) celui de la débauche et de l’ivrognerie�; le «�haillon de pourpre�» (v.�44)représente sa corruption physique et morale�; tandis que le «�myrte stérile�» (v.�45), désignant la plantede Vénus, fait allusion à ses amours de débauché et à sa maladie. À la fin, le double porte unecouronne d’épine (v.�57) et les restes de son manteau de pourpre, comme le Christ. Il est au comblede la souffrance�; la pourpre ne renvoie plus à la gloire ni à la royauté mais au sang�: le glaive s’estenfoncé dans sa poitrine. Son luth gît à terre (v.�58) –�ce qui signifie qu’il a perdu son goût pour lapoésie et peut-être son talent de poète.#�Les indicateurs temporels proprement dits, ainsi que le champ lexical du temps, comprennent les motssuivants�: «�alors�» (deux occurrences), «�derrière eux�», «�devant eux�», «�le siècle présent�», le «�passé�» (deuxoccurrences), «�l’avenir�» (deux occurrences), «�le présent�», le «�crépuscule�», «�ni la nuit ni le jour�». Mussetprésente les jeunes gens de sa génération pris entre le passé et l’avenir. Il oppose clairement le passé deruines que représente l’absolutisme en utilisant le champ lexical de la destruction�: «�détruit�», «�s’agitantsur ses ruines�», «�tous ses fossiles�» à l’avenir plus radieux symbolisé par la métaphore de la lumière («�lespremières clartés�»). Entre les deux, le présent ressemble à «�une mer houleuse et pleine de naufrages�». L’auteuraffirme que les jeunes de son époque rejettent le passé pour choisir l’avenir�: «�du passé ils n’en voulaientplus […] l’avenir, ils l’aimaient�». Il compare également le présent à un crépuscule, à mi-chemin entre lanuit et le jour, un monstre angoissant et effrayant�: «�ce spectre moitié momie et moitié fœtus�».Musset emploie trois temps de l’indicatif différents�:–�l’imparfait qui décrit une situation qui dure encore («�partageaient�», «�s’offrait�», «�se présentait�»,«�voulaient�», «�aimaient�», «�était�», «�attendaient�», «�restait�»)�;–�le passé simple qui souligne les actions de premier plan («�fallut�», «�trouvèrent�», «�entra�»)�;–�on remarque encore de nombreux sauts dans le présent («�sépare�», «�est�», «�ressemble�») quirenvoient à une vérité générale ou à un présent d’énonciation, commentaire du narrateur�: «�Je ne saisquoi�», «�car la foi en rien ne se donne�».$�Le texte C comprend plusieurs images�:–�celle de la ruine («�détruit�», «�ruines�», «�fossiles�», «�débris�») qualifie le passé de la génération de Musset, àsavoir l’Ancien Régime, la monarchie absolue de droit divin qui a sombré au moment de la Révolution�;–�celle de la lumière («�l’aurore d’un immense horizon�», «�les premières clartés de l’avenir�») désigne l’espoird’un avenir plus heureux qui aurait pu s’offrir aux jeunes de cette époque�;–�Musset compare la différence entre ce passé et cet avenir à «�l’océan qui sépare le vieux continent de lajeune Amérique�» et emploie tout un champ lexical de la mer�: «�vague�», «�flottant�», «�mer houleuse etpleine de naufrages�», «�traversée�», «�voile�», «�navire�». Le présent apparaît inquiétant et dangereux. Onne sait quand il débouchera sur une situation nouvelle�;–�Musset utilise également l’image de la «�semence�» pour désigner l’avenir. C’est une métaphorepositive qui souligne l’idée d’espérance�;–�le poète évoque l’histoire mythique de Pygmalion qui sculpta une statue dont il tomba amoureux. Lesjeunes sont comparés à Pygmalion et l’avenir à la statue Galatée. Ils attendent que l’avenir prenne vie�;–�«�l’esprit du siècle�» est enfin représenté sous la forme d’un «�ange du crépuscule, […] assis sur un sac dechaux plein d’ossements, […] spectre moitié momie et moitié fœtus�». La momie évoque le passé en ruine etle fœtus le présent en gestation.%�Franck Lestringant s’efforce d’être objectif. Nous le déduisons d’un certain nombre d’éléments du texte�:–�il précise la date du mardi 13 août 1839, date d’une entrevue entre Musset et sa «�marraine�»,Mme�Jaubert�;–�il cite le nom de Paul de Musset, frère d’Alfred, qui a évoqué cette entrevue, puis celui d’Émile Henriot,biographe du poète, qui suggère que ce soir-là Musset a révélé son terrible secret à sa marraine�;

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Réponses aux questions – 16

–�Lestringant ne prend pas vraiment parti�: «�Vraie ou fausse confidence�», il préfère citer les mots queMme Jaubert confia au frère du poète�;–�il utilise, avec prudence, des modalisateurs pour interpréter la fameuse «�révélation�» du poète�:«�pouvait�», «�on pouvait supposer�», «�paraît�», «�pour une part�», le verbe songer, les conditionnels«�serait�», «�il faudrait voir�», «�s’expliquerait�», «�découlerait�»�;–�il prend de la distance aussi bien par rapport à Paul de Musset, qui estime que George Sand serait lacause de tous les malheurs d’Alfred, que par rapport à Émile Henriot, qui met tout sur le compte del’épilepsie en raison d’une phrase de George Sand portant sur l’«�épilepsie intellectuelle�» de Musset�;–�il ne propose sa propre interprétation qu’à la fin du texte�: Musset souffrait d’une maladie sexuelleincurable. L’alcool et les aventures représentaient une sorte de «�suicide lent�».&�Le champ lexical de la souffrance et de la honte comprend les mots�: «�éprouvante�», «�confessionnavrante�», «�noyer son supplice�», «�pathétique�», «�des soupirs et des larmes�», «�un immense désespoir�», «�unaveu d’impuissance�», «�en confessant le péché d’ivrognerie�», «�vice�», «�un mal […] plus grave�», «�une douleurincurable et mortelle�», «�une maladie honteuse�», «�la blessure morale�», «�ce mal secret�», «�maladie�», «�souffrit�»,«�un mal plus pernicieux�», «�ce mal invétéré�», «�l’inoculation du germe fatal�», «�la fusion du plaisir et du crime�»,«�un imaginaire sadique�», «�traumatisme�», «�la tare charnelle�», «�les convulsions de la chair�».À la lecture de ce texte, la souffrance de Musset paraît aussi bien physique que morale. D’après FranckLestringant, le mal-être de Musset viendrait principalement de la maladie incurable qu’il attrapa danssa jeunesse. Il y aurait une cause physique –�la maladie elle-même�– et morale –�la honte d’avoirattrapé un tel mal.'�Dans l’illustration de La Nuit de décembre par Eugène-Louis Lami, on remarque chez le poète, assis àdroite de l’image, l’expression de la souffrance. Accablé, il a les épaules baissées et se tient la tête dansla main. Douleur, angoisse, réflexion semblent le caractériser. Dans la diagonale –�du fou�?�–, en hautà gauche, le double vêtu de noir, dans une attitude qui fait écho à celle du poète. Par terre, le luthabandonné de la poésie et, sur le lit, un mort, sans doute le père de Musset. L’illustration reprenddonc de nombreux éléments de la vie de Musset, et en particulier de La Nuit de décembre, notammentle thème du double, récurrent dans l’œuvre de Musset.(�L’atmosphère de la scène est lugubre et inquiétante, en particulier grâce à deux procédés�: le flou crééà la fois par des drapés de tissus et par l’utilisation des traits plutôt que de surfaces entièrement colorées.Par ailleurs, le clair-obscur qui illumine le lit mortuaire renforce l’atmosphère presque surnaturelle.

Travaux d’écriture

Question préliminaireL’extrait de La Nuit de décembre souligne l’obsession du double qui semble un trait autobiographique(dernière strophe citée) et met l’accent sur les multiples souffrances du poète�: après une jeunessestudieuse, douleur d’amour, débauche, faiblesse physique, perte du père, doute quant à l’inspirationpoétique. Le document iconographique illustre fidèlement un certain nombre de thèmes du poème(présence du double, expérience de la souffrance et de la mort, défaite de la poésie). La Confessiond’un enfant du siècle avance des causes historiques à cette souffrance�: elle est celle de toute unegénération, prisonnière d’un monde où elle ne trouve pas sa place, d’un présent indécidable, entre lesdébris d’un système périmé et un avenir qui a du mal à se dessiner. La biographie de FranckLestringant donne un éclairage moderne, érudit et psychanalytique à la souffrance du poète�:alcoolisme, rapport névrotique aux femmes, tout s’expliquerait par la syphilis, contractée précocementet dont il mourra («�le désir de rejouer cette scène première où la découverte de la jouissance et l’inoculation dugerme fatal se produisirent dans le même instant�»).

CommentaireProposition de plan.

1.�L’organisation du récitA.�Une organisation chronologique nette•�De nombreuses indications temporelles.•�Une alternance imparfait�/�passé simple.•�Le rythme du récit�: octosyllabes + grand nombre de strophes (un rythme narratif rapide).

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B.�Des contextes variés•�Scènes d’extérieur et scènes d’intérieur.•�Des situations théâtralisées.C.�Un récit à deux personnages•�Le locuteur est le personnage principal�: récit à caractère autobiographique (présence du «�je�»,parallélismes avec la vie de Musset).•�Un double qui fonctionne précisément comme un redoublement du «�je�».

2.�L’expression du doubleA.�Une présence systématiqueAu point de vue de la versification, le motif du double est renforcé par la construction symétrique desstrophes et par la présence d’un refrain qui souligne l’idée d’un retour mécanique.B.�Les constantes dans la représentation du double•�Il est toujours vêtu de manière identique.•�Il établit avec le poète une relation affective qui passe souvent par un contact physique.C.�Le «�statut�» du doubleLa présence du double inscrit le poème dans le genre fantastique. «�Vision�», hallucination�? En toutcas, il s’agit d’un thème récurrent, voire obsédant chez Musset.

3.�Comment interpréter le poème�?A.�Le double, miroir du «�je�»Vieillissement, communauté de sentiments et de situations avec le poète.B.�Les fonctions symboliques du double•�Une allégorie de la poésie.•�Une figure christique du sacrifice.C.�Comment interpréter cette figure du double�?•�Une image de la conscience de Musset�?•�Une image de la solitude du poète.

DissertationProposition de plan.

1.�L’écriture autobiographique est souvent l’expression d’une douleurA.�L’écrivain peut écrire pour se libérer d’un poids trop lourd•�Nombreux aveux, depuis Les Confessions, dans l’écriture autobiographique.•�Il peut s’agir aussi d’un passé difficile, de scènes traumatisantes que l’écriture autobiographique vaexorciser.B.�L’écrivain peut reprendre les rênes de sa vieCar l’écriture autobiographique, en faisant le bilan d’une vie, en en ordonnant les événements,permet d’en reprendre le contrôle, d’accepter ses souffrances (l’œuvre d’Annie Ernaux fonctionne decette manière, en particulier La Place).C.�L’expression idéale de la douleurL’écriture autobiographique, plus que toute autre, sans doute, permet d’exprimer la difficulté de vivre,les angoisses, les craintes, les souffrances inhérentes à la condition humaine. En témoignent notammentles formes d’écriture autobiographique au jour le jour comme le journal intime ou la lettre. C’estparticulièrement vrai quand l’écrivain est confronté à un grave malheur comme la maladie. Cf.�les récitsbouleversants d’Hervé Guibert sur le sida�: À l’ami qui ne m’a pas sauvé la vie, Le Protocole compassionnel.

2.�À quelles motivations autres peut répondre l’écriture autobiographique�?A.�L’écriture autobiographique comme témoignageSi l’on a joué un rôle important sur la scène de l’histoire, on peut avoir envie de donner sa vision desfaits et des hommes (genre des mémoires�; par exemple, les savoureux et vivants mémoires du cardinalde Retz). Mais il arrive aussi que des gens modestes veuillent témoigner de métiers disparus ou de

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traditions perdues (récits de vie). Ces récits autobiographiques constituent de précieux témoignages(ex.�: La Soupe aux herbes sauvages d’Émilie Carles).B.�La recherche d’explications, la quête d’un sensPartir à la quête de soi et essayer de ressaisir ses émotions et ses sentiments permet de mieux secomprendre. Sartre, dans Les Mots, fait la genèse de sa vocation d’écrivain.C.�Faire partager son expérience et sa vision du mondeL’écrivain, en écrivant un texte autobiographique, peut vouloir transmettre sa vision du monde etdonner une leçon de vie, orienter le lecteur en fonction de son expérience propre. On peut penser àMontaigne dans les Essais.

3.�La fécondité littéraire de la douleurA.�La tradition lyriqueLa tradition littéraire contient de nombreux thèmes douloureux�: la fuite du temps, la douleurd’aimer, l’exil, etc. Ces thèmes sont universels, rencontrent l’expérience de tous et fondent le lyrisme,en particulier en poésie. Mais il n’y a pas vraiment de littérature du bonheur�: tous les grands textescontiennent leur part d’ombre et de souffrance. Quand Colette célèbre la nature dans La Maison deClaudine, pointent nettement la nostalgie du passé et le regret d’un paradis à jamais perdu. «�On ne faitpas de littérature avec de bons sentiments�», écrit Gide.B.�Des émotions extrêmesLes grandes douleurs ou les souffrances quotidiennes permettent l’émergence de sentimentssuffisamment forts pour être dignes d’être écrits. C’est souvent sous le choc d’un événementdouloureux que les auteurs écrivent leurs plus beaux textes�: pensons à des œuvres aussi différentesque Rhénanes d’Apollinaire ou Si c’est un homme de Primo Levi. «�Frappe-toi le cœur�! C’est là qu’est legénie�», conseille Musset.C.�La sublimation de la douleur par l’écritureC’est une des fonctions de l’écriture de transformer la douleur en émotion esthétique et donc de latransfigurer. C’est un moyen aussi de rendre immortel un être cher (Les Contemplations de VictorHugo ou Le Livre de ma mère d’Albert Cohen). Si la douleur est assurément une source d’inspiration,l’écriture est une consolation.

Écriture d’inventionOn valorisera évidemment le respect de la forme dialoguée, si possible mise en contexte. On noteraaussi positivement la diversité de la réflexion, sa progression, la qualité de l’argumentation, le recours àdes exemples, à des modèles, si possible empruntés à la littérature. Le dialogue devrait prendre encompte les angoisses propres à l’adolescence.

A c t e I I I , s c è n e � 2 ( p p . � 1 1 1 à 1 1 4 )

! Lecture analytique de l’extrait (pp.�115 à 117)!�Première partie�: le désaccord (l.�108 à 163) –�l.�108 à 150�: stratégies politiques générales�; l.�151 à163�: accélération, courtes répliques, projet politique à court terme. Seconde partie�: brutalretournement de situation�; Philippe se rallie à la cause de son fils (l.�164 à la fin)."�On relève dans l’extrait de nombreuses phrases interrogatives qui permettent un véritable échangeentre le père et le fils. Dans le discours didactique de Philippe, nombreuses sont les questionsrhétoriques, mais il y a aussi de vraies questions, en particulier dans l’échange rapide entre les deuxhommes, qui fait changer d’avis le père. En témoigne la ligne�151�: «�Où en viendrez-vous�? réponds-moi.�»#�Les répliques de Pierre sont, le plus souvent, courtes et ont une valeur informative. La dernièreréplique du jeune homme est, cependant, un peu plus longue et lyrique. Quant à Philippe, il prononceplusieurs tirades. En tant que patriarche, il fait la leçon et fait partager le fruit de son expérience.$�Le sentiment paternel de Philippe s’exprime par l’adjectif possessif et le rappel de sa paternité(l.�134-135�: «�Ne suis-je pas le père de ma Louise […]�?�»�; l.�165 et 172�: «�mes enfants�», «�monenfant�»). Il s’exprime également à travers la métaphore de «�l’aigle�» et des «�aiglons�» (l.�164-165).

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%�Philippe rejoint la révolte menée par son fils autant par idéalisme politique que par sentimentpaternel.&�Dans la première partie du texte, Pierre pousse son père à la révolte, lui fait la leçon, argumente�:verbe devoir (l.�139), questions rhétoriques (l.�145-149), présent de vérité générale (l.�149). Le jeunehomme rappelle donc son père à son devoir, le ton est sentencieux. À la fin de la scène, quandPhilippe se rallie à l’action de son fils, ce dernier exprime de l’émotion, du respect («�Nous baiserons lebas de votre robe.Vous êtes notre patriarche�»), de la tendresse («�vieux jardinier de Florence�»). Le ton estalors lyrique.'�La métaphore «�Savez-vous compter sur vos doigts�?�» évoque un apprentissage enfantin. Avant lepassage à l’abstraction (calcul mental). On peut proposer deux sens pour cette métaphore�: les jeunesgens, autour de Pierre, échafaudent de grands projets sans connaître les premières bases de lapolitique�; ou bien c’est une manière de mettre l’accent sur leur méconnaissance de la situationconcrète de la ville, de la vie réelle.(�Philippe utilise le pronom pluriel de 2e�personne («�Vous�») quand il s’adresse, à travers Pierre, àtoute la jeunesse florentine prête à le suivre (l.�115�: «�Ô enfants�»)�. Il utilise «�tu�» ainsi que desimpératifs de 2e�personne du singulier quand il s’adresse seulement à son fils (l.�172�: «�mon enfant�»).Philippe se pose donc à la fois en père aimant et en patriarche de toute la jeunesse.)�Philippe reproche à Pierre d’avoir agi légèrement (l.�114-115�: «�rien d’arrêté�? pas de plan�? pas demesures prises�?�»). Il lui reproche donc son manque de responsabilité politique. Le champ lexical estcelui des plaisirs légers�: «�jouer�» (l.�115), «�en faisant des armes�» (l.�121), «�un verre de vin d’Espagne�»,«�cheval�» (l.�122), «�mascarade�» (l.�123), «�jouer aux dés�» (l.�141).*+�Le texte insiste à plusieurs reprises sur l’âge de Philippe (l.�117�: «�ont blanchi des milliers de têtes�»).On relève également cinq occurrences du verbe savoir dans les propos de Philippe et les expressionsqui suivent sont explicites�: «�le vieil aigle�» (l.�164), «�vous qui avez la force que j’ai perdue�» (l.�166), «�lejeune Philippe, laissez-le avoir vieilli pour vous�» (l.�167), «�cette tête grise�» (l.�170-171), «�vieux jardinier deFlorence�» (l.�176-177). Ainsi Philippe représente-t-il la sagesse, liée traditionnellement à l’âge.*,�On relève dans les propos de Philippe quatre anaphores de «�savez-vous�» (l.�123, 127, 129-130),ainsi que «�sais-tu�» (l.�136) et «�savent�» (l.�137). Bien évidemment, l’utilisation de ce verbe renvoie àl’acquis, à l’expérience, au vécu, donc au passé. On remarque que Pierre s’empare ensuite du verbe(l.�139, 147)�: le savoir est en train de changer de mains. Si Philippe est un modèle, Pierre représentel’avenir, et on assiste, dans cette scène, à une passation de pouvoir entre deux générations.*-�Dès la deuxième réplique qu’il prononce, Philippe porte un regard distancié sur ce que lui ditPierre et passe du particulier au général. Il s’adresse à un destinataire collectif (le pluriel «�enfants�»),puis évoque des entités abstraites�: «�la vie�», «�la mort�», «�la Providence�», «�l’homme�», «�le bonheur�»,«�Dieu de justice�». Il utilise aussi le pluriel généralisant («�des questions�», «�des idées�», «�des projets�») etse réfère à des valeurs hautement symboliques («�république�», «�artisan�», «�laboureur�», «�citoyen�»,«�royaume�»). Philippe élargit donc le problème posé par son fils et passe immédiatement à une visionde politique générale presque philosophique.*.�Le vocabulaire religieux apparaît à travers les mots «�Providence�», «�Dieu de justice�», «�Dieu�».Philippe est un juste qui se place sous le regard de Dieu.*/�Le verbe agir revient plusieurs fois pour évoquer le projet de Pierre (l.�159, 162, 168). On relèveégalement des verbes d’action (l.�154-155�: «�vous aurez renversé […] que voulez-vous mettre à laplace�?�»�; l.�159�: «�décidé�»�; l.�160�: «�couper les jarrets�»). Tandis que les verbes aller, venir, emmenersuggèrent le mouvement. On l’a vu dans les questions précédentes, Philippe représente le discours dela sagesse et de l’expérience, de la mise à distance et de la réflexion. Les « flambeaux�» (l.�148) et «�lesnuits sans dormir�» (l.�149) sont des images de la méditation. Mais cette réflexion est stérile si elle n’estpas suivie par l’action.*0�Le principal ressort qui pousse Pierre à l’action est la haine des Médicis (l.109-110�: «�[nous] neportons pas le bâtard dans nos entrailles�»�; l.�152�: «�Les Médicis sont une peste�»).*1�C’est l’amour de Florence («�les meurtriers de Florence�», «�vieux jardinier de Florence�») qui explique, aumoins en partie, la haine qu’il voue aux Médicis. On remarque que, d’un point de vue symbolique,par ses parentés sonores avec «�fleur�» et avec «�France�», le nom de Florence évoque une image à lafois féminine et patriotique. À ce titre, elle peut cristalliser bien des désirs pour le jeune homme.

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Réponses aux questions – 20

*2�Le projet de Pierre s’exprime, dès la première réplique, par une litote, encore plus frappante quel’expression directe de la haine. Mais on relève, également, de nombreuses métaphores (l.�112-113,128, 152-153, 158, 160 et, de la ligne 175 à la fin, la métaphore filée du jardinage) qui traduisentl’enthousiasme du jeune homme et donnent un ton lyrique à ses propos. Il se peut aussi que le filsveuille s’approprier le langage du père.*3�La plupart des répliques de Philippe appartiennent au registre lyrique. Des effets emphatiques sontproduits par�:–�des répétitions�: «�Ô enfants, enfants�!�» (l.�115)�;–�de nombreuses questions rhétoriques�;–�de nombreuses modalités exclamatives�;–�de multiples métaphores (il n’est peut-être pas nécessaire de demander aux élèves de toutes lesrelever car elles sont très nombreuses)�;–�des accumulations (l.�123-126)�;–�des anaphores.*4�Philippe élargit son propos politique vers la philosophie et même la métaphysique en évoquant desnotions abstraites (la vie, la mort, le bonheur). Il évoque aussi le problème du mal�: «�des projets que laProvidence elle-même regarde en silence et avec terreur�» (l.�118-119). L’image des «�grains de sable�» renvoieà la petitesse de l’homme et «�blanchi des milliers de têtes�» à son éphémère passage sur Terre. Lesquestions de Philippe, de plus, restent souvent sans réponse.5+�Philippe a un idéal politique qui passe par les notions de république et de citoyen. Il est attaché à laliberté et au bonheur des hommes. Les notions d’honneur, de liberté et d’amour de la patrie sontégalement importantes pour lui. En vérité, il y a une véritable filiation idéologique entre le père et lefils, comme le souligne, du reste, Pierre�: «�Ne vous ai-je pas entendu cent fois dire ce que nous disons�?�»(l.�145-146).

! Lectures croisées et travaux d’écriture (pp.�118 à 125)

Examen des textes et de l’image!�Ruy Blas met en accusation le pouvoir corrompu en apostrophant les ministres (v.�1-3). On trouveaussi l’utilisation de l’antiphrase (v.�1-2), d’une mordante ironie et qui a aussi l’avantage de ramenerles ministres à leur devoir. L’accumulation des pertes et des menaces constitue une violente chargecontre le pouvoir en place."�Le rappel de la grandeur passée de l’Espagne appartient au registre épique�: les accumulations, lesnoms propres, l’évocation de territoires infinis («�cinq mille lieues / De côtes�») vont dans ce sens. Demême que la présence d’un ennemi très puissant�: «�Du ponant jusques à l’orient, / L’Europe, qui voushait, vous regarde en riant�» (v.�18-19).#�Ruy Blas, par cette tirade, est un héros à part entière car il maîtrise la parole longuement et avecbrio. Il impressionne autant par son éloquence que par ses qualités morales�: loyauté, couragepolitique, générosité, désir de justice.$�Les marques de l’énonciation dans le discours de Créon sont nombreuses. Il y a de multiplesmarques de la présence du destinataire car il veut convaincre sa nièce�: apostrophe («�toi aussi, petiteidiote�»), impératif («�Essaie de comprendre�»), questions rhétoriques («�Crois-tu […]�?�», «�Tu imagines unmonde où […]�?, «�Est-ce que tu le comprends, cela�?�»), pronoms de 2e�personne («�toi�», «�tu�»). Le «�je�»et le «�moi�» sont assez discrets et Créon préfère, avec une certaine finesse, faire ses leçons à la3e�personne, un peu comme des paraboles, sans doute pour éviter de heurter Antigone de front.%�La stratégie argumentative de Créon passe par des récits à la 3e�personne, généraux et qui doiventservir de leçon. Les phrases sont courtes, les images sont simples, familières et se veulent émouvantes.L’éloquence passe par des répétitions («�Cela n’a pas de nom�», «�Il n’a plus de nom�», «�tu n’as plus denom�», etc.). Le flot de paroles et les répétitions peuvent viser à hypnotiser Antigone, à endormir saconscience critique.&�Francis Huster, jouant Lorenzaccio, opte pour une attitude déterminée�: le bras qui va frapper estlevé, l’épée fermement maintenue par une main crispée sur le fourreau. Le visage est grave et

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Lorenzaccio – 21

concentré�: regard fixe et mâchoire serrée. On sent le héros prêt à agir, même si une certainemélancolie se dégage aussi du regard.'�Musset reproche aux «�antagonistes du Christ�» d’avoir ôté aux plus pauvres l’espérance d’un mondemeilleur dans l’au-delà. En faisant douter le peuple de l’existence de Dieu, on lui a enlevé sonmeilleur secours. Son désespoir actuel vient de là�: vaincu sur Terre, il sait désormais qu’il le sera aussiau Ciel.(�Cet extrait de La Confession d’un enfant du siècle est théâtral car il s’agit d’un discours qui s’adresse àun destinataire apostrophé («�messieurs les politiques�», «�Ô raisonneurs sublimes�»), interpellé par desquestions rhétoriques et mis en accusation par le pronom de 2e�personne. À l’intérieur de ce discourssont enchâssés d’autres discours («�tu prends patience�», «�Toi qui m’opprimes, tu n’es qu’un homme�», etc.)qui rendent le récit, par lequel passe ce réquisitoire, très vivant. Par ailleurs, un certain lyrisme,produit par des structures symétriques et des anaphores, par exemple, incite à déclamer le texte.

Travaux d’écriture

Question préliminaireLe jeune héros romantique a recours aux procédés du lyrisme�; enthousiaste et bouillonnant, iln’hésite pas à user d’une parole amplifiée (métaphores grandiloquentes, accumulations). Il se laisse,comme Ruy Blas, griser par le pouvoir des mots (énumération de noms propres). La parole peut aussidevenir accusatrice par les adresses au destinataire (apostrophes et questions rhétoriques, enparticulier). Quant à Antigone, elle parle peu. Sa révolte s’exprime par la protestation verbale («�Je neveux pas�», «�Je suis là pour vous dire non�») ou physique («�secoue la tête�»). Le mépris d’Antigone pourCréon passe également par l’ironie�: «�Quel rêve, hein, pour un roi, des bêtes�!�» Pour étoffer la réponse,on réutilisera certains éléments de réponses aux questions précédentes, ainsi que le commentaire quisuit.

Commentaire

IntroductionL’acte III porte le nom du héros. C’est le triomphe de Ruy Blas qui s’est parfaitement identifié à DonCésar et à son rôle de grand d’Espagne�; c’est aussi le nœud du drame et l’acte de tous les possibles. Letexte étudié –�le plus long monologue de la pièce�– constitue le sommet lyrique et épique du dramehistorique.Situation du texte�: sur le plan sentimental, la reine est amoureuse du faux Don César qui, sur le planpolitique, a pris une place prépondérante. Malgré de l’estime et la reconnaissance de sa probité, laconduite de Ruy Blas provoque curiosité et jalousie de la part des courtisans avides qui se partagentsans scrupule l’Espagne au moment où paraît le héros.

1.�Une remise en cause éloquente des ministresCette célèbre tirade constitue un morceau de bravoure caractéristique de l’art de Victor Hugo quitransmet ses dons d’éloquence à son héros.A.�L’accusation et ses procédés•�La mise en cause des ministres frappe par son agressivité. Ruy Blas apparaît ici comme un justicierqui laisse éclater son indignation par�:–�de violentes apostrophes�: «�messieurs�»�;–�le redoublement de l’antiphrase�: «�Ô ministres intègres�! / Conseillers vertueux�» (v.�4-5)�;–�la dislocation du vers�1 qui laisse percer l’indignation.•�Des images triviales («�Bon appétit�», «�Serviteurs qui pillez la maison�», «�Fossoyeurs�») qui disqualifientl’attitude des ministres.•�L’abondance des marques de la présence du destinataire�: onze occurrences du pronom et cinqadjectifs possessifs.•�Des injonctions à l’impératif�: «�Soyez�» (v.�8), «�voyez�» (v.�10 et 18).•�Une question rhétorique�: «�Quel remède à cela�?�» (v.�30).

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Réponses aux questions – 22

B.�La dénonciation d’un pouvoir corrompuPris à partie violemment par le discours de Ruy Blas, les dirigeants corrompus sont entraînés dans unprocessus de culpabilisation, renforcé par le fait que Ruy Blas surgisse brutalement et les surprenne enflagrant délit de complot. Complot dans lequel se lisent�:–�la malhonnêteté�: Ruy Blas assimile l’action des ministres à du vol («�pillez�», «�emplir votre poche�»,«�voler�»)�; pires que des voleurs, ce sont des assassins («�Fossoyeurs�»)�;–�une avidité et une cupidité féroces, matérialisées par l’image de la dévoration (v.�1), le champ lexicalde l’appât du gain (v.�3�: «�pillez�»�; v.�7�: «�remplir votre poche�»)�;–�l’absence de sentiment patriotique qui semble réfugié dans le seul Ruy Blas, pourtant homme dupeuple�;–�une indifférence à l’égard du sort du pays aggravée par une certaine lâcheté (v.�13�: «�sanscombattre�»)�; malgré leur connaissance de la situation (v.�27�: «�Vous le savez�»), les ministres restentimpassibles�;–�ce qui leur vaut l’implacable rappel de leur dignité perdue qui fait écho à la décadence de l’Espagne.Aux vers 36 et 37, la débauche des grands contraste avec «�le peuple misérable�». Les antiphrases lesrappellent à leur devoir�: «�ministres intègres�», «�conseillers vertueux�», «�servir�», «�serviteur�»�;–�une attitude dénuée de vergogne�: «�Vous n’avez pas honte�» (v.�4), «�ayez quelque pudeur�» (v.�10).Æ Un portrait collectif impitoyable, servi par une éloquence efficace qui traduit la réelle indignationde Ruy Blas, homme du peuple devant la curée d’un pays, organisée par ceux qui en ont la charge.

2.�Un tableau de l’Espagne décadenteL’accusation des ministres est étayée d’un tableau à la fois lucide et lyrique du pays, tableau qui doitpermettre une prise de conscience.A.�Le rappel de la grandeur passéeIl passe par une vaste fresque (juste du point de vue historique mais qui ne dit rien au spectateur) présentéecomme telle par des verbes de perception visuelle (v.�10�: «�voyez, regardez�»). Mais c’est aussi une fresquesonore par l’évocation des noms propres à la puissance exotique et poétique�: jeu sur la longueur des motsavec le formidable «�Fernambouc�» ou l’exotique «�Goa�», tandis que «�les Montagnes bleues�» suggèrent lerêve. L’effet de puissance est aussi créé par l’énumération qui accumule les possessions et par leredoublement du «�et�» au vers�17. Il faudrait aussi relever l’utilisation de l’enjambement aux vers�16-17 quisemble étirer encore la longueur des côtes. Enfin, la grandeur du pays est formulée en un vers majestueuxet solennel (le vers�11) qui repose sur deux hendiadys et un effet de symétrie.B.�Une situation critique•�La politique intérieure�:–�un royaume exsangue�: formule frappante et familière (v.�12�: «�Tout s’en va�»), champ lexical de la perteet de la déchéance (v.�8�: «�pays qui tombe�»�; v.�13 et 33�: «�perdu�»�; v.�29�: «�perd�»). Les pertes se comptenten territoires, en biens matériels (v.�33�: «�trois cents vaisseaux, sans compter les galères�»), en argent (v.�30-31)et en hommes (v.�31�: «�L’État est épuisé de troupes�»). La population est réduite à la misère. L’éloquencepasse par des hyperboles�: «�charge énorme�», «�peuple misérable�», «�A sué quatre cent trente millions d’or�!�»�;–�un roi caractérisé par l’absence –�politique et, dans l’ensemble de la pièce, sentimentale (v.�20). Deplus, la succession n’est pas assurée (v.�1083 de la pièce).Æ L’Espagne est donc pourrie de l’intérieur. En pleine déchéance, elle apparaît comme une proiefacile pour les ennemis (notons l’homonymie des rimes aux v.�8-9).•�La politique extérieure (l’Espagne est dans une situation de danger)�:–�omniprésence des ennemis, présentés de manière métonymique par leurs territoires�; le danger vientdonc de toute part (v.�18�: l’Espagne est encerclée «�Du ponant jusques à l’orient�») et le conflit provientde la lutte pour un empire territorial�;–�trahison des alliés (v.�1080 de la pièce)�;–�mise en place d’une stratégie offensive de la part des ennemis�: «�attend�» (v.�25), «�guette�» (v.�26)�;on dépèce la proie avant qu’elle ne soit prise (v.�21).–�le pays est à la fois affaibli et ridicule�: l’appel à un sursaut d’orgueil est implicite.C.�Une sombre vision de l’avenirRuy Blas donne ici une leçon de perspective politique et fait preuve de sens de l’observation et delucidité. Les données qu’il avance sont précises, chiffrées�: «�Trois cents vaisseaux�» (v.�33), «�cent trentemillions d’or�» (v.�39), «�j’en ai fait le compte�» (v.�35).

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Le tableau de l’Espagne est fait au passé composé (analyse «�à chaud�» d’un passé proche) et le présentqui évoque l’attitude des pays voisins a une valeur de futur proche. Ruy Blas pressent la menace et ala certitude du déclin. Fort de ses certitudes, il fait une démonstration magistrale (deux occurrences de«�donc�» aux v.�4 et 6, et «�il ne faut�» au v.�22).Æ Le ton de la tirade est sans réplique�: Ruy Blas a une vision lucide du présent et se présente commeun visionnaire.

3.�L’apogée du hérosDans cette scène, Ruy Blas est au sommet de sa gloire. Emblématique du héros romantique, il sedévoile tout en démasquant.A.�La confrontation de l’individu et du mondeSolitude du héros. Certes, son rôle est glorieux, mais il est seul contre tous. Son pouvoir n’estqu’illusoire�; il n’est qu’un laquais, grand d’Espagne par usurpation et seulement pour un momentencore. Il n’existe que par la parole, et encore une parole usurpée. Ruy Blas représente le courage etl’honnêteté politique mais est le seul de son espèce. La deuxième didascalie pose la confrontation del’homme et du monde, thème romantique par excellence.B.�La révélation de Ruy BlasDans cette scène, Ruy Blas est révélé au moins autant qu’il révèle. Il révèle la corruption desministres, le tableau de la décadence présente de l’Espagne, la vision de l’avenir sombre du pays. Maiscelui qui dévoile et démasque est lui-même dévoilé et, dans une certaine mesure, démasqué�: quel estce grand d’Espagne qui n’agit pas comme ceux de sa caste�? Son intervention est présentée comme uncoup de théâtre (cf.�les didascalies initiales�: «�survenant�», «�silence de surprise�»). Son attitude est celled’un meneur qui défie�: «�les regardant en face�». Il monopolise la parole, et le royaume semble luiappartenir au même titre qu’aux ministres en place (deux occurrences de «�nous�» aux v.�12 et 32).Æ On peut parler ici de triple énonciation�: Ruy Blas s’adresse aux ministres qu’il conduit à ladémission, à la reine qu’il séduit, aux spectateurs qu’il convainc. C’est le moment où l’adéquationentre l’individu et le rôle qu’il doit jouer est parfaite.C.�L’idéal politique�: Ruy Blas, porte-parole d’HugoRuy Blas se sert de la salle des ministres comme d’une tribune et fait preuve d’une éloquencerévolutionnaire, à la manière de Mirabeau. Héros en pleine lumière, il peut devenir le porte-parole del’idéal politique de Victor Hugo�:–�on relève son investissement personnel dans la gestion du pays (personnification de l’Espagne etvocabulaire affectif), son honnêteté absolue et son amour de la patrie�;–�la grandeur de l’État, soutenue par un vaste empire colonial, est mise en avant�;–�apparaît, en filigrane, le souhait d’un roi puissant et juste, auquel s’assimile toute une nation�;–�mais, surtout, il s’agit là d’un plaidoyer en faveur du peuple, présenté de manière élogieuse(anaphores des v.�35 et 38).

ConclusionUne tirade remarquable par la précision et la véracité du tableau historique et par l’émotion qu’ellesuscite, mais ce n’est pas l’essentiel ici. On a là l’illustration du «�souffle hugolien�» dont on a souventparlé�: force des invectives, puissance évocatrice des images, virulence de la satire annoncent déjàl’engagement des Châtiments. Ruy Blas a été écrit à une période de la vie d’Hugo où il rêvait d’unecarrière politique. Il semble avoir prêté à son héros ses propres aspirations.Mais, ici, le combat n’est encore que littéraire et la puissance de la parole bien vaine, prononcée parun laquais qui n’a ni droit ni pouvoir en face de grands qui ferment leurs oreilles.Æ La scène illustre la vanité de la parole parlementaire, simple leurre en cette monarchie censitaire.

Dissertation

1.�Le théâtre�: avant tout un divertissementA.�Un spectacleLe théâtre est d’abord un spectacle où le texte joue certes un rôle important mais n’est pas le seul.Ainsi, la commedia dell’arte travaille-t-elle sur des improvisations, et les masques, les costumes, les jeuxde scène doivent procurer du plaisir.

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Réponses aux questions – 24

B.�S’évaderCar le théâtre doit avant tout permettre au public d’oublier un temps la réalité (c’est donc tout lecontraire d’une visée politique)�: qu’il vienne au théâtre pour rire, pour épouser les souffrancespassionnées des héros tragiques, pour voyager dans l’histoire avec les drames romantiques, lespectateur, le temps de la représentation, s’évade.C.�Les moyens artistiquesAinsi, le théâtre a recours à différents moyens artistiques pour porter le texte. Outre la nécessairepuissance de séduction du texte dit, on jouera sur la dimension visuelle�: décors (parfois confiés à degrands peintres), costumes (qui ont pu être imaginés par de grands couturiers) et jeux de lumière. Lethéâtre ne se prive pas non plus de la musique pour envoûter le spectateur. Dès lors, il peut êtretentant, mais aussi hasardeux, de se servir de la puissance de séduction du théâtre pour faire passer desidées.

2.�La dimension politique du théâtreA.�Une tribuneLa scène de théâtre s’apparente à une tribune et est particulièrement apte à faire passer un message demanière immédiate aux spectateurs qui sont comme un reflet de la société. La double énonciationfonctionne alors pleinement�: davantage qu’aux personnages en scène, c’est au public que s’adresse letexte. À lui de juger, de réagir. De plus, la forme dialoguée, héritière du dialogue philosophique, estparticulièrement adaptée à l’argumentation.B.�Un moyen de lutteAinsi, le théâtre est-il un moyen de lutte. Il peut ridiculiser le pouvoir, comme Les Acharniensd’Aristophane ou Ubu roi de Jarry. Les attaques peuvent être indirectes comme dans Le Tartuffe, oùMolière attaque violemment la Compagnie du Saint-Sacrement à travers le personnage éponyme. Lethéâtre contemporain peut se permettre d’être plus direct�; ainsi, certaines pièces de Brechtrenforcent-elles le message à l’aide de banderoles explicites.C.�L’utilisation politique du théâtre est risquéeLe texte, s’il est trop explicite, court le risque de la censure (Dom Juan de Molière a été interdit aprèsquelques représentations). Il court aussi le risque d’une interprétation erronée. Dans Antigoned’Anouilh, par exemple, qui a donné lieu à des interprétations très diverses, faut-il faire d’un seulpersonnage (Antigone ou Créon) le porte-parole de l’auteur�?

3.�L’art théâtral au service du messageA.�Assurer la pérennité de l’œuvreIl va de soi qu’une pièce essentiellement didactique sera peu théâtrale et ne passera pas à la postérité.La pièce doit être suffisamment souple et aborder des sujets facilement transposables pourpouvoir durer. Le message politique, s’il est trop restreint et porté par un texte trop austère, sepérime vite. Une œuvre de propagande n’est jamais une réussite. Ainsi, le théâtre de Sartre est-il, parexemple, déjà vieilli, tandis que celui de Shakespeare est toujours incroyablement vivant et plastique.L’aspect littéraire du texte passe donc avant son message politique.B.�Le texte au service du messageLa qualité de l’écriture, la maîtrise dans la conduite de l’action, la profondeur d’un personnageassurent le succès d’une pièce et la possibilité, pour elle, de véhiculer un message. Beaucoup despectateurs se reconnaîtront dans les tourments intérieurs de Lorenzaccio ou dans l’idéalisme del’Antigone d’Anouilh, si réaliste, si vivante, tandis qu’ils resteront davantage extérieurs aux héroshugoliens, pleins de panache et d’humanité, certes, mais un peu artificiels et superficiels, malgrétout.

ConclusionOutre la qualité du texte, il va de soi que la mise en scène a un très fort pouvoir de conviction. Lescénographe imaginera décors et trouvailles originales pour séduire le public qui adhérera d’autantplus aisément au message proposé par le texte.

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Lorenzaccio – 25

Écriture d’inventionLe sujet permet de revenir sur les notions, importantes en argumentation, de réquisitoire et deplaidoyer. Car c’est d’un sujet ouvertement argumentatif qu’il s’agit ici. Il conviendra de classer lesarguments selon un plan analytique traditionnel�: causes�/�conséquences�/�remèdes. On pourraaccepter aussi un exposé des faits.On valorisera particulièrement les copies des élèves qui auront essayé d’imiter le style de Musset. Laquestion�8 de l’examen des textes a dû permettre d’analyser rapidement les caractéristiques stylistiquesles plus marquantes du texte.

A c t e I I I , s c è n e 3 ( p p . � 1 2 6 à 1 4 5 )

! Lecture analytique de l’extrait (pp.�146-147)!�La première phrase de l’extrait est interrogative. Elle sert à introduire la tirade qui est une réponse àcette question initiale."�Dans la première partie du monologue, ce sont les phrases interrogatives qui dominent. Ce n’estqu’un enchaînement de questions jusqu’à la ligne�641. Ces questions sont toujours adressées àPhilippe et lancent le mécanisme du dévoilement.#�On relève vingt-cinq occurrences du pronom «�je�», treize du pronom «�me�», deux de «�moi�» etune autre de «�moi-même�». Enfin, il y a onze occurrences de l’adjectif possessif de 1re�personne. La1re�personne est donc omniprésente –�ce qui n’est pas étonnant dans ce monologue lyrique oùLorenzo tente d’expliquer sa nature profonde. C’est aussi une caractéristique du héros romantique dese mettre au centre du monde et au centre du discours.$�Lorenzaccio dénonce le règne de l’apparence en s’en prenant à la lâcheté des républicains (l.�651-652). Il stigmatise aussi la vanité des discours, à l’aide d’un vocabulaire très dépréciatif�: «�brailler enplein vent le bavardage humain�» (l.�654), «�satisfaire leur gosier et vider leur sac à paroles�» (l.�659). Mais lehéros lui-même est prisonnier de sa propre apparence et, par ces révélations à Philippe, il retire sonmasque avant de passer à une action qui ne laissera plus de doute sur ce qu’il est vraiment. Il veutmontrer à Philippe que la piste républicaine n’est pas une solution pour se débarrasser d’Alexandre.%�La vie de Lorenzaccio apparaît comme une «�énigme�» car, après une adolescence studieuse etvertueuse, que rappelle sa mère à la scène�6 de l’acte�I, il a sombré dans la débauche et le cynisme. Ilest le pourvoyeur sans scrupule des plaisirs d’Alexandre et malmène le jeune peintre Tebaldeo.Pourquoi ce changement�? Et Lorenzaccio est-il tout à fait en accord avec son nouveau personnage�?Le mot «�abîme�» utilisé par Philippe (l.�629) au sujet de la destinée de Lorenzo a déjà été employé parMarie (I, 6, l.�739). Le héros explique ici sa vertigineuse descente aux Enfers.&�Philippe est pris en compte par de multiples questions qui le prennent à partie. Lorenzo utilisesouvent le procédé de l’anaphore�: «�veux-tu�» (l.�631-632, 634, 641), «�Songes-tu�» (l.�636-637) maisaussi «�Crois-tu�» (l.�639), «�comprends-tu�» (l.�645), «�vois-tu�» (l.�648). Ces questions se trouvent dans lapremière partie de l’extrait, où Philippe joue le rôle de confident car Lorenzo n’attend pas de lui devéritables questions ni de véritables réponses. Le vieil homme sage est surtout le prétexte àl’épanchement du moi.'�Les images sont nombreuses et témoignent d’un effort pour rendre claire une personnalité trèscomplexe et opaque pour son entourage (première partie du texte car ensuite les images ont d’autresfonctions). Elles insistent à la fois sur un Lorenzo pur qui ne veut pas mourir (l.�632�: «�spectre�»�;l.�633�: «�squelette�»�; l.�634�: «�l’ombre de moi-même�») et sur la fragilité du lien qui unit encore leLorenzo d’aujourd’hui au Lorenzo d’autrefois (l.�635�: «�le seul fil�»�; l.�638-639�: «�le seul brind’herbe�»).(�Le champ lexical de la mort�:–�le suicide�: «�que je m’empoisonne, ou que je saute dans l’Arno�» (l.�631-632)�;–�le macabre�: «�spectre�» (l.�632), «�squelette�» (l.�633), «�la tombe d’Alexandre�» (l.�658)�;–�le meurtre d’Alexandre�: «�ce meurtre�» (l.�636), «�mon meurtre�» (l.�646), «�je tue Alexandre�» (l.�656),«�le soufflet de mon épée marqué en traits de sang�» (l.�663-664), «�Ma vie entière est au bout de ma dague�»(l.�665-666), «�frapper�» (l.�667)�;

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Réponses aux questions – 26

–�les images�: «�mourir en silence l’énigme de ma vie�» (l.�641), «�empoisonne le pain que je mâche�» (l.�650-651)�;–�le crime en général�: «�m’assommer�» (l.�653)�;–�la révolte sanguinaire�: «�nettoyer leurs piques�» (l.�662).Ce champ lexical est omniprésent parce que le problème central pour Lorenzaccio, et pour tout lemonde dans l’ensemble de la pièce, est de se débarrasser d’Alexandre. Lorenzo choisit la voie radicaledu meurtre. De plus, il s’agit de faire renaître un Lorenzo qui est mort. S’enfoncer dans le vice sanschercher à retrouver la vertu passée serait pour le personnage éponyme une sorte de suicide.)�Le meurtre d’Alexandre permet à Lorenzaccio de renouer avec son « cœur d’autrefois�» (l.�636), sa«�vertu�» (l.�637) dont on suppose qu’ils correspondent à la vraie nature du jeune homme. Le meurtrea donc un caractère rédempteur.*+�La principale contradiction de Lorenzo est son goût pour la vertu (l.�636-637�: «�tout ce qui me restede ma vertu�») en opposition à sa vie de débauche (l.�644-645�: «�j’aime le vin, le jeu et les filles�»). Lejeune homme formule explicitement ses contradictions�: «�Crois-tu donc que je n’aie plus d’orgueil, parceque je n’ai plus de honte�?�» (l.�639-640). On remarque aussi l’opposition entre «�vice�» (l.�643) et«�vertu�» (l.�642). C’est en raison de ces contradictions que Lorenzo est une «�énigme�» et qu’il risquede rester incompris (l.�660), comme tous les héros romantiques.*,�L’une des principales motivations de Lorenzo est évidemment de commettre le meurtred’Alexandre dans un souci de rédemption personnelle. Mais précisément l’effet ne peut êtrerédempteur du point de vue individuel que s’il a un sens pour la société. C’est en délivrant Florencedu mal que Lorenzo deviendra un héros vertueux. Idéal collectif et idéal individuel sont doncinséparables. Le jeune homme exprime nettement ce besoin de reconnaissance collective�: «�il faut quele monde sache un peu qui je suis et qui il est�» (l.�654-655)�; il compte bien faire parler de lui (l.�661�: «�jeleur ferai tailler leurs plumes�»), laisser une trace (l.�665�: «�il ne me plaît pas qu’ils m’oublient�»). Il se voitcomme un justicier, comme le montre clairement l’image du «�tribunal�» à la ligne�669.*-�Lorenzo se fait peu d’illusions sur les conséquences de son geste. Il n’est pas sûr que le meurtred’Alexandre soit suivi d’une révolte populaire qui ferait de Florence une véritable républiquedémocratique. Le scepticisme de Lorenzaccio s’exprime à travers les expressions suivantes�: «�qu’ilsagissent ou n’agissent pas�» (l.�660), «�je leur ferai tailler leurs plumes si je ne leur fais pas nettoyer leurs piques�»(l.�661-662), «�je jette la nature à pile ou face sur la tombe d’Alexandre�» (l.�667-668).*.�Lorenzo méprise les hommes. Il dénonce leur lâcheté (l.�651-652�: «�des lâches sans nom�»�; l.�652-653�: «�pour se dispenser de m’assommer�»), y compris celle des républicains qui, pourtant, se posent enmodèle. Il dit même à Philippe qu’il ne «�ferai[t] pas�» (l.�647) le meurtre d’Alexandre. Il méprise aussileur vanité�: des discours mais pas d’action (l.�654�: «�brailler en plein vent le bavardage humain�»�; l.�659�:«�satisfaire leur gosier et vider leur sac à paroles�»). Il déteste leur haine (l.�650�: «�exécration�»�; l.�652�:«�m’accablent d’injures�»). Il fait part de sa lassitude (l.�653�: «�J’en ai assez�») et donne une leçon (l.�653�:«�comme ils le devraient�»). Il a une volonté de pouvoir et de domination sur les autres hommes�: «�dansdeux jours les hommes comparaîtront devant le tribunal de ma volonté�» (l.�668-669).*/�Lorenzaccio est lui-même méprisé (l.�648-649�: «�me couvrent de boue et d’infamie�»�; l.�651�:«�conspué�») par les autres hommes. Il est l’objet de médisances (l.�649�: «�les oreilles me tintent�»), dehaine (l.�650�: «�l’exécration des hommes�»), de curiosité malsaine (l.�657-658). Les relations du héros etdes hommes relèvent donc du malentendu puisqu’il n’est pas, en vérité, ce que les autres croient. Il sedémarque des autres hommes car il n’a pas leur bassesse. Sa supériorité s’exprime par son passage àl’action.*0�On remarque que le mot «�meurtre�» est répété trois fois. C’est le thème central du monologue. Il ya aussi de nombreuses structures binaires qui reposent sur des répétitions de mots�: «�Si tu honores�»(l.�645) / «�tu honores�» (l.�646)�; «�qui je suis�» / «�qui il est�» (l.�655)�; «�qu’ils agissent ou n’agissent pas�»(l.�660)�; «�j’aurai dit aussi ce que j’ai à dire�» (l.�661)�; «�je leur ferai […] si je ne leur fais pas�» (l.�661-662).Par ailleurs, une figure de répétition revient à de multiples reprises�: c’est l’anaphore. On a déjà relevéles questions anaphoriques du début du texte, on peut y ajouter l’anaphore de «�j’en ai assez�» (l.�651et 653) et de «�voilà assez longtemps�» (l.�647 et 649). Il s’agit là d’un procédé d’insistance qui traduit ladétermination du héros et participe au registre lyrique du texte.

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Lorenzaccio – 27

*1�Les verbes d’action dont Lorenzaccio est le sujet sont très nombreux et marqués par la violence�:«�je tue�» (l.�630 et 656), «�je m’empoisonne�», «�je saute dans l’Arno�» (l.�631), «�en frappant�» (l.�632), «�jem’arrache�», (l.�634), «�je glisse�» (l.�637), «�j’aie pu cramponner�» (l.�639), «�je leur ferai tailler leurs plumes�»(l.�661-662), «�frapper�», «�je jette la nature�» (l.�667). La tirade, en même temps qu’elle révèle unepersonnalité, révèle un projet. Lorenzaccio est un héros romantique qui donne un sens à ses rêves parle passage à l’acte.*2�Le temps qui domine très largement est le présent de l’indicatif�: il est utilisé pour le momentprésent, bien sûr, mais aussi pour le passé qui se prolonge jusqu’au moment de l’énonciation (l.�637�:«�je glisse depuis deux ans�») ou pour anticiper un futur imminent (l.�667-668�: «�je jette la naturehumaine à pile ou face sur la tombe d’Alexandre�»). À la fin du texte, le présent alterne avec le futur del’indicatif�: le jeune homme se projette entièrement dans l’acte qu’il va commettre. Présent et futur nefont plus qu’un�: ils rachètent un passé qui n’est évoqué que pour son incidence sur le momentprésent.*3�La «�vertu�» est, au sens propre, la «�force,�» le «�courage�». C’est une caractéristique virile (parentéentre vir et virtu). Dans le texte, elle a aussi le sens moderne de «�pureté�». Mais tout se confond pourLorenzaccio�: retrouver la pureté perdue tout en montrant qu’il est un homme (lui qui s’est évanoui àla vue d’une épée à l’acte�I).*4�Lorenzaccio agit aussi par orgueil et volonté de puissance (voir question�13). Le héros romantiquese sent supérieur aux autres hommes. Quand il passe à l’action, il fait une démonstration de cettesupériorité. Le passage de la bassesse à l’héroïsme est une source de jouissance pour le jeune homme.5+�L’exaltation de Lorenzaccio se traduit d’abord par le monologue. Accaparer la parole, c’estdémontrer un pouvoir, ne serait-il que rhétorique. Les questions oratoires qui s’enchaînent et lesanaphores témoignent du lyrisme du héros qui se grise de ses propres mots. Il faut encore ajouter lesimages, plus ou moins heureuses, mais qui traduisent une volonté d’expressivité. L’utilisation dusubjonctif à partir de la ligne�660 exprime sa volonté de puissance et sa désinvolture à l’égard desautres hommes. On peut penser que l’image finale relève de la mégalomanie.

! Lectures croisées et travaux d’écriture (pp.�148 à 154)

Examen des textes et de l’image!�On remarque, dans le texte de Chateaubriand, l’omniprésence de la 1re�personne. Sont exprimés lessentiments («�j’entrai avec ravissement�», «�enchanté�», «�tourmenté�»), les rêves («�j’aurais voulu être un de cesguerriers�»), les habitudes («�Le jour, je m’égarais�»), les angoisses («Un secret instinct me tourmentait�») etmême un complaisant autoportrait («�le visage enflammé, le vent sifflant dans ma chevelure�»). Maisl’utilisation, à plusieurs reprises, du présent de vérité générale, de tournures ayant une valeurgénéralisante («�on�», «�notre cœur�», «�l’homme�», «�Homme�») et de la métaphore musicale donne auxsentiments décrits une valeur universelle. Exemples�: «�Les sons que rendent les passions dans le vide d’uncœur solitaire ressemblent au murmure que les vents et les eaux font entendre dans le silence d’un désert�»�; «�danstout pays le chant naturel de l’homme est triste lors même qu’il exprime le bonheur�»�; «�Notre cœur est uninstrument incomplet, une lyre où il manque des cordes�»."�Plusieurs éléments permettent de qualifier cette page de prose poétique�: l’abondance des images,les rythmes binaires («�Tantôt […] tantôt�») ou ternaires («�enchanté, tourmenté, et comme possédé par ledémon de mon cœur�»), ou encore fondés sur une énumération qu’amplifie la présence presquesystématique d’une relative à l’intérieur de chacun des membres de la phrase («�une feuille séchée […] oùle jonc flétri murmurait�»). La prose de Chateaubriand est musicale, d’autant que l’auteur joue aussi surles sonorités comme, par exemple, l’harmonie imitative des sifflantes dans la phrase suivante�: «�Lessons que rendent les passions dans le vide d’un cœur solitaire ressemblent au murmure que les vents et les eauxfont entendre dans le silence d’un désert.�» L’utilisation de pluriels poétiques nimbe le texte d’un flou quitraduit la rêverie et éveille l’imagination�: «�ces régions inconnues que ton cœur demande�», «�orages désirés�»,«�les espaces d’une autre vie�». L’évocation de la nature, de la musique, des sentiments mélancoliquesconstitue des thèmes lyriques universels.

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Réponses aux questions – 28

On peut demander aux élèves un commentaire composé de cette page de Chateaubriand. On pourra proposer alorsle plan suivant�:

1.�Le décor de la rêverie romantiqueA.�Un nécessaire isolementB.�Une nature tourmentéeC.�Le goût de l’infini

2.�Une peinture du héros romantiqueA.�Une peinture en mouvementB.�La primauté du sentimentC.�L’angoisse et les tourments

3.�Une vision universelle de l’hommeA.�Une quête universelleB.�Une tentative pour cerner l’essence de l’être humainC.�L’appel de la mort#�L’expression de la privation passe par�:–�l’image du vide�: «�En vain�», «�vaines�», «�inutile�», «�inutiles�», «�le vide�», «�vide intolérable�»,«�vainement�»�;–�la frustration�: «�tout me manque�»�;–�la négation�: «�je n’ai rien obtenu�», «�je ne possède rien�», «�nulle intimité�», «�il ne vint pas�», «�ils ne sontplus�», «�je n’entends pas�», «�sans me ranimer�»�;–�l’illusion�: «�leur ombre�», «�les fantômes�», «�ombres errantes�», «�cent formes pâles et gigantesques�»�;–�l’image de la disparition�: «�consume�», «�fuient, s’abîment�», «�la nuit du tombeau�».De plus, l’utilisation des temps du passé souligne de manière nostalgique le sentiment de perte(«�sentiments des jeunes années�! qu’êtes-vous devenus�?�»).Les sentiments de frustration, d’ennui, de vide et de solitude sont constitutifs du malaise romantique.$�Dans le texte C, les sentiments du narrateur n’épousent pas le renouvellement de la nature, il n’y apas d’accord entre le rythme de l’homme et celui de la nature�: «�Les mois changent, les années sesuccèdent […] je reste le même�»�; «�Le printemps vint pour la nature, il ne vint pas pour moi�»�; «�Saisonheureuse�! Les beaux jours me sont inutiles, les douces nuits me sont amères�».Le sentiment de la beauté de la nature et la jouissance qu’elle procure appartiennent à un tempsrévolu�: «�Paix des ombrages […] qu’êtes-vous devenus�?�»Au contraire, dans le texte B, cette jouissance de la nature est bien vivace�: «�on […] jouit�» du«�murmure que le vent et les eaux font entendre dans le silence d’un désert�». René «�entr[e] avec ravissementdans le mois des tempêtes�». Contrairement à Oberman, l’accord de René avec la nature est total�: la«�roche écartée�», l’«�étang désert�», «�le clocher solitaire�» renvoient à la propre solitude du narrateur. Lanature est source d’émotion esthétique et support à la rêverie�: «�souvent j’ai suivi des yeux les oiseaux depassage qui volaient au-dessus de ma tête. Je me figurais les bords ignorés, les climats lointains où ils se rendent�».%�La célèbre tirade d’Hernani est rendue très vivante par l’alternance de monologue (v.�1-8 etseconde partie du v.�19 jusqu’à la fin) et de dialogue, marquée par des adresses directes à Doña Sol, ledestinataire (v.�9-19 et v.�30-31, utilisation de la 2e�personne et apostrophe au v.�10). La jeune fille estprise à témoin d’une destinée fatale que le héros analyse devant elle. Dans un effort d’introspection, ils’efforce de définir sa personnalité, mélange de malédiction (v.�2�: «�je porte malheur à tout ce quim’entoure�!�»�; v.�21�: «�Une âme de malheur faite avec des ténèbres�!�»�; v.�29�: «�Malheur à qui metouche�!�») et de dynamisme vital (v.�19�: «�Je suis une force qui va�»)�: un être qui ne maîtrise pas sondestin (v.�20�: «�Agent aveugle et sourd de mystères funèbres�») et dont la chute est inévitable (v.�26�:«�Marche�! et l’abîme est profond�»). Le récit prend place du vers�3 au vers�7. Il a pour fonction dejustifier, en l’illustrant, l’analyse qu’Hernani fait de sa personnalité. Par ailleurs, il donne au texte unsouffle épique qui n’est pas sans rappeler La Chanson de Roland (v.�5-6).&�La tirade appartient au registre lyrique par l’expression de l’émotion à travers les nombreusesmodalités exclamatives (dont trois occurrences de «�Oh�!�» en début de vers). On relève aussi la valeurpoétique des noms propres énumérés dans une série nominale (v.�1�: «�Monts d’Aragon�! Galice�!Estramadoure�!�»), les répétitions emphatiques («�C’étaient les plus vaillants de la vaillante Espagne�»�; «�ils

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Lorenzaccio – 29

sont tous tombés dans la montagne, / Tous sur le dos couchés�»�; «�Je descends, je descends�»), les rythmesbinaires (v.�28�:�«�Tout se brise, tout meurt�») ou ternaires («�prends le duc, prends l’enfer, prends le roi�!�»),les enjambements qui traduisent l’émotion et l’exaltation (par exemple, v.�17-18), les métaphores(v.�21, 26), les questions rhétoriques (v.�22).'�Le personnage a une position centrale dans le tableau. Juché sur un rocher, il domine un vastepanorama. Une telle attitude est conforme à la place que le héros romantique pense occuper dans lemonde�: supérieur à la masse, il est au centre d’une démarche introspective. Vu de dos, il sembletourner le dos au monde des hommes pour mieux embrasser la nature.(�Le paysage de montagnes évoque les hauteurs dans lesquelles se plaît le héros romantique. Le vastepanorama et le ciel suggèrent l’aspiration à l’infini qui caractérise la quête romantique. La naturetourmentée (pics, roches, nuages en mouvement) fonctionne comme un miroir de la personnalité deshéros. Cf.�les «�Compléments aux lectures d’images�» (p.�40).

Travaux d’écriture

Question préliminaireOn utilisera, pour traiter cette question, les réponses aux questions précédentes, en particulier en ce qui concernel’étude du document iconographique (questions�7 et 8).Le héros romantique se caractérise par la solitude («�un cœur solitaire�», «�nulle intimité n’a consolé mesennuis�», «�seul, perdu�», «�Je n’ai plus un ami qui de moi se souvienne�»), l’ennui («�l’ennui consume madurée dans un long silence�»), la frustration («�Notre cœur est un instrument incomplet�», «�tout me manque�»),le désir d’évasion qui se nourrit de la rêverie. Sa trajectoire est marquée par l’échec («�Je descends, jedescends, et jamais ne m’arrête�»). Il peut avoir partie liée avec le malheur, comme Hernani. Il aspire àl’infini, voire à la mort («�attends que le vent de la mort se lève�», «�je cherche à commencer avec tranquillité lanuit du tombeau�»). Son rapport aux autres hommes est contrarié�: qu’il les méprise ou leur tourne ledos. Il a le sentiment de leur être supérieur. Comme Lorenzaccio, il peut désirer commettre un actehéroïque, salvateur, qui lui assure aussi la reconnaissance des autres hommes. La nature lui semble unrefuge en fonctionnant comme un miroir du moi («�j’entrai avec ravissement dans le mois des tempêtes�»).Enfin, il analyse sa personnalité et ses sentiments dans un effort d’introspection permanent sans pourautant trouver toujours la juste expression («�Mais comment exprimer cette foule de sensations fugitives[…]�?�», «�on ne peut les peindre�»)�: les émotions romantiques sont si fortes et si complexes qu’elles sontindicibles.

CommentaireOn se borne à donner un plan car on réutilisera ici les réponses aux questions de lecture analytique.

1.�Le dévoilement du personnageA.�La mise en scène de la révélation (prise en compte du destinataire, questions)B.�«�L’énigme d’une vie�»C.�L’exaltation du héros

2.�Les motivations d’un meurtre paradoxalA.�Un acte identitaire et idéalisteB.�Le mépris des hommesC.�Un acte orgueilleux

DissertationLe sujet n’est pas très problématique�: on attendra donc de l’élève qu’il fasse des recherches d’histoirelittéraire et lise une tragédie classique et une pièce du XXe�siècle.

1.�Le héros romantiqueOn reprendra les données vues à travers les questions précédentes, que l’on organisera, par exemple,de la manière suivante�:

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Réponses aux questions – 30

A.�Un héros solitaireB.�Un héros insatisfaitC.�La double aspiration à la gloire et à la mort

2.�D’autres formes d’héroïsmeA.�Le héros tragique•�Un personnage en crise.•�Un être en proie à la passion.•�Un personnage soumis à la fatalité.B.�Le héros moderne�: un antihéros•�Un être ordinaire.•�Un héros malgré lui.•�Il est souvent porteur d’un message engagé.

3.�Les points communs des hérosA.�Ils expriment un idéalB.�Ils s’efforcent de le vivre de manière absolue ou du moins sans renoncement pour l’antihérosC.�Ils représentent un type d’humanité auquel on peut, toute proportion gardée, s’identifier

Écriture d’inventionLe sujet impose plusieurs contraintes formelles�: le genre épistolaire et l’utilisation du registre lyrique–�ce qui permet de vérifier que l’élève s’est approprié les caractéristiques de ce registre. Pour le reste,l’élève a la plus grande liberté, mais on attendra une démarche d’introspection qui utilise unvocabulaire précis et une argumentation.

A c t e I V , s c è n e 1 1 ( p p . � 1 9 4 à 1 9 7 )

! Lecture analytique de la scène (pp.�198-199)!�La scène se divise en trois parties�:–�du début à la ligne�632, c’est la préparation du crime�;–�des lignes�633 à 647, c’est le crime, très rapidement mené (l.�641-644) entre un aparté du Duc(l.�633-640) et le constat de la blessure de Lorenzo (l.�645-647)�;–�de la ligne�648 à la fin�: après le crime. Lorenzo savoure l’instant, tandis que Scoronconcolo préparela fuite."�On ne trouve pas de mention des blessures faites au Duc. La réaction de ce dernier (la morsure)n’est connue qu’après coup. Dans le texte de George Sand, on voit l’appréhension du héros, puis lesdifférents coups portés à Alexandre sont précisés avec un luxe de détails, ainsi que les réactions deLorenzo qui se fait aider de Scoronconcolo. Varchi, comme Dumas, précise égalementscrupuleusement la nature de la blessure dont est victime le Duc, ainsi que les différentes étapes ducrime. Marguerite de Navarre, quant à elle, insiste davantage sur le face-à-face entre Lorenzo et leDuc.#�Le drame romantique n’hésite pas à mettre le meurtre en scène, tandis que le théâtre classique, quidoit respecter la règle de bienséance, s’interdit de faire couler le sang sur scène. Le meurtre de Pyrrhuspar Oreste, par exemple, fait l’objet d’un récit.$�Le traitement dramatique que Musset fait du crime est épuré, stylisé�; l’accent est mis davantage surles sentiments du héros que sur les détails sanglants du crime. Si le meurtre a bien lieu sur scène,Musset n’en tire pas d’effets faciles. En ce sens, on peut penser que le traitement de ce meurtreemprunte à la fois à la manière romantique et à l’esthétique classique.%�On remarque qu’il y a plusieurs entrées et sorties de personnages à l’intérieur de la scène –�ce quiest une caractéristique du théâtre romantique en opposition au théâtre classique où à chaque sortie ouentrée de personnage correspond une nouvelle scène. C’est d’abord Lorenzo qui sort. Cette sortie est

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Lorenzaccio – 31

justifiée�: il va chercher sa tante. Cela permet de laisser Alexandre seul en scène et d’entendreconfirmer, par sa bouche même, sa grossièreté. L’entrée de Lorenzo est tout de suite significative pourle lecteur comme pour le spectateur car la didascalie indique qu’il «�rentre l’épée à la main�» (l.�640).L’entrée de Scoronconcolo, plus tardive, permet qu’il n’y ait pas d’ambiguïté�: c’est bien Lorenzo,seul, qui a commis le meurtre. De plus, la présence du «�sbire�» sur scène correspond à une nécessitédramatique�: Lorenzo a un confident à ses sentiments. La velléité de sortie (l.�661) de Scoronconcoloajoute au suspense en confirmant que le héros court un danger.&�Le Duc se montre très affectueux avec Lorenzo, utilisant des hypocoristiques (l.�619�: «�mignon�» oul.�642�: «�Renzo�»)�; il affiche avec lui une grande complicité (l.�624�: «�Tu sais que�»). Pourtant, quelquesquestions laissent entrevoir une certaine méfiance, voire une inquiétude de la part d’Alexandre�: «�qu’est-ce que tu fais donc�?�» (l.�619) ou «�pourquoi as-tu fait demander des chevaux de poste à l’évêque de Marzi�?�»(l.�626-628). Il faut dire que le Duc a été mis en garde, à plusieurs reprises –�en particulier par leCardinal Cibo�–, contre Lorenzaccio. Cependant, c’est l’affection et la confiance qui dominent, commele montre le fait qu’il se couche sans méfiance en attendant le retour du jeune homme.'�Lorenzo s’emploie à rassurer Alexandre en lui expliquant avec un luxe de détails les raisons de sesgestes. Il se montre même protecteur en donnant au Duc un conseil�: «�Il est bon d’avoir toujours unearme sous la main�» (l.�621-622). Bien sûr, cette attitude est stratégique car le héros, dans le mêmetemps, prépare le crime comme le souligne la didascalie (l.�622-623)�: «�Il entortille le baudrier de manièreà empêcher l’épée de sortir du fourreau�».(�Lorenzo est le seul à savoir l’action qu’il va commettre�; bien évidemment, le Duc ne s’y attend pas(l.�642�: «�C’est toi, Renzo�?�») et Scoronconcolo ne sait pas non plus qui est la victime de Lorenzo�:«�Ah�! mon Dieu, c’est le duc de Florence�!�» (l.�648). La scène joue donc sur un double effet de surprisequi met particulièrement en valeur le caractère solitaire de l’acte de Lorenzo.)�L’aparté est celui du Duc, des lignes�633 à 639. Il permet, d’une part, de créer un contraste entre leplaisir que se promet le Duc et le crime dont il va être victime. D’autre part, il confirme la grossièretéet la goujaterie du personnage. Jamais, dans la pièce, le personnage n’est vu sous un joursympathique�; même au moment de mourir, il apparaît comme un personnage grotesque, une sorted’ogre (l.�636�: «�j’ai soupé comme trois moines�») qui serait risible s’il n’était pas aussi dangereux.Un autre aparté, clairement désigné comme tel (l.�660�: «�à part�»), montre l’étonnement deScoronconcolo devant l’attitude de son maître. Le «�sbire�» a l’esprit pratique et veut se sauver�: il necomprend pas les épanchements de Lorenzo.*+�Le lieu du meurtre est la chambre de Lorenzo. Cela est présenté comme une nécessitépsychologique�: Catherine ne se laisserait pas entraîner n’importe où. Mais, de manière plus profonde,c’est pour Lorenzo le lieu de l’intimité. Tuer le Duc dans sa chambre est un acte symbolique pour lejeune homme. On remarquera qu’il a, à plusieurs reprises, assimilé ce meurtre à ses noces. Le corps àcorps des deux hommes, sur lequel insistent les autres textes, et surtout la morsure «�au doigt�», «�baguesanglante, inestimable diamant�» (l.�647), confirment cette lecture de la scène. Bien qu’il s’agisse du meurtred’un tyran, on a davantage l’impression que, par ce meurtre, se règle en privé une affaire privée.*,�La morsure au doigt est immédiatement assimilée par Lorenzo à une «�bague sanglante�», un «�inestimablediamant�» (l.�647). Cette marque que le jeune homme «�garder[a] jusqu’à la mort�» (l.�646-647) est commel’alliance reçue pour un mariage. En tout cas, ce meurtre scelle le destin de Lorenzaccio.*-�L’épée que pose le Duc est le signe qu’il abdique sa virilité comme pour la transmettre àLorenzaccio qui «�rentre l’épée à la main�» (l.�640). L’épée lui permet de tuer le Duc, acte viril. Parailleurs, l’assimilation de l’épée, tout comme «�la clef�» (l.�663), au sexe masculin est attestée dans denombreux textes. Et Lorenzo fait usage de ces objets dans sa chambre où on ne l’a jamais vu conduireaucune fille.*.�Le registre du texte après le meurtre est lyrique. Les phrases exclamatives, renforcées par le vocatif«�ô�», expriment la béatitude de Lorenzo et son attendrissement devant la nature.*/�Cette phrase est un oxymore. «�Navré�» renvoie à la fois à la blessure physique et à un sentimentdouloureux. La «�joie�» de Lorenzo provient de la satisfaction d’avoir commis l’acte qu’il souhaitait etd’être ainsi redevenu lui-même. Mais le prix à payer pour cette reconquête est lourd�: meurtre,trahison et risque de mort. C’est ainsi que l’oxymore exprime les sentiments mélangés du jeunehomme.

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Réponses aux questions – 32

*0�Les allusions à la nature sont nombreuses. L’émotion de Lorenzo devant sa beauté rappelle l’enfantet l’adolescent proches de la nature qu’il a été et confirme ainsi qu’il a bien reconquis son identité. Deplus, la plénitude de la nature correspond à la plénitude du moment pour le héros. Ce type decorrespondance est fréquent chez les romantiques.*1�Certaines images laissent présager la mort du héros. C’est le cas de «�cœur navré de joie�» (l.�650),d’«�éternel repos�» (l.�656) et de la remarque de Scoronconcolo�: «�Le vent va glacer sur votre visage la sueurqui en découle.�»*2�Lorenzo apparaît, dans cette scène, comme un héros romantique car il fait preuve d’exaltation�:attendrissement enthousiaste devant la beauté de la nature, emphase (l.�647). Scoronconcolo lui-même,pourtant peu psychologue, note l’euphorie du héros�: «�Son âme se dilate singulièrement�» (l.�660).*3�Lorenzaccio ne laisse pas d’indices particuliers, mais, dans la mesure où le meurtre a lieu dans sachambre et où il en emporte la clef et prend la fuite, il n’y aura pas grand doute sur l’identité dumeurtrier.*4�Même les voisins ne réagissent pas au «�tapage�» (l.�667) car Lorenzaccio a pris soin de s’entraîneraux armes avec Scoronconcolo dans cette même chambre. Ce meurtre reste discret et rapidementtraité par Musset car ce qui compte surtout, c’est le cheminement intérieur du héros qui l’a mené à lecommettre. Du point de vue politique, les conséquences du meurtre sont plus importantes que lemeurtre lui-même�: les Florentins sauront-ils saisir leur chance�?5+�À la fin de la scène, les interventions de Scoronconcolo constituent un contrepoint réaliste auxenvolées lyriques de Lorenzaccio. Alors que ce dernier prend son temps pour savourer l’instant enaccord avec la beauté de la nature, son serviteur lui rappelle la nécessité de la fuite�: «�Sauvons-nous�»(l.�652), «�Venez, seigneur�» (l.�658), «�Quant à moi, je prendrai les devants�» (l.�661). Il prend égalementconscience de la gravité du meurtre (l.�648�: «�Ah�! mon Dieu, c’est le duc de Florence�!�») et s’inquièted’éventuels témoins (l.�664-665�: «�Pourvu que les voisins n’aient rien entendu�!�»). L’acte héroïque esttraité comme un acte banal par Scoronconcolo. Pas d’émotion déplacée mais plutôt des dispositions àprendre au plus vite pour sauver sa vie.

! Lectures croisées et travaux d’écriture (pp.�200 à 212)

Examen des textes et de l’image!�Dans le texte B, les didascalies ont un rôle de premier plan pour rendre compte du meurtre. Ellessont très nombreuses et précisent la nature des coups portés et les réactions du Duc. Elles insistent surle côté visuel de la scène, tandis que les propos échangés ne sont qu’un commentaire de l’action."�Le lexique de l’animalité est utilisé pour qualifier le Duc�: «�rugissant�», «�Le damné bondit comme unepanthère�», «�tu mords comme un chien enragé�», «�ce chien furieux�», «�Saignons-le comme un pourceau�», «�Sadernière convulsion l’a fait bondir comme un crapaud�», «�ce taureau sauvage a soutenu un rude assaut�». Celexique se justifie par le mépris que Lorenzo a à l’égard d’Alexandre�: il n’est pas digne d’appartenir àl’humanité, c’est un monstre, comme le montre la courte oraison funèbre prononcée par le héros�:«�Maintenant, grand duc de Florence, bâtard du pape, gendre de Charles�V, tyran, despote, infâme, fanfaron,impudique Alexandre de Médicis, bonsoir pour la dernière fois.�» Les animaux choisis sont d’ailleursdévalorisants (le «�pourceau�», le «�crapaud�») mais soulignent aussi la force physique d’Alexandre(«�panthère�», «�taureau sauvage�») et son courage au combat («�chien enragé�», «�chien furieux�»). Le Duc,véritable brute, a été un adversaire aussi monstrueux que difficile.#�Le chroniqueur a un souci d’exactitude, en particulier lorsqu’il donne de nombreuses précisionsanatomiques pour montrer le caractère «�mortel�» de la «�blessure�» (l.�4-9). La configuration de lachambre et le rôle des objets sont également minutieusement étudiés (l.�11-12). Les gestes sontprécisés (l.�14-16 et 18) et les propos rapportés (l.�2 et 16). Aucun détail n’est oublié (l.�33) et Varchis’efforce de reconstituer la chronologie du meurtre (l.�22�: «�d’abord�»�; l.�23�: «�enfin�»�; l.�25�: «�aprèssa mort�»). Le chroniqueur essaie aussi d’avoir un point de vue objectif et de rendre hommage aucourage du Duc (l.�30-31). Il se risque à des explications psychologiques tant en ce qui concerneLorenzo qu’en ce qui concerne le Duc (l.�34-41), mais elles sont avancées avec prudence�: «�On asupposé�» (l.�34). Il s’agit donc d’un récit qui se veut à la fois documenté, précis et objectif.

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$�Dans le texte�D, les indicateurs temporels sont nombreux�; il y a d’abord les «�deux jours�» quiséparent la rencontre du Duc et de Catherine, puis le soir du crime où les différents moments sontdistingués («�il veid approcher la nuict tant désirée�», «�se retira de bonne heure�», «�A l’heure�», «�quant�»). Lasuccession des faits après le crime est précisée par «�alors�» et «�quant�».Du point de vue de la vitesse narrative, le moment du crime est dilaté en une scène, encadrée pardeux sommaires qui rendent compte de ce qui s’est passé les deux jours avant le crime et de la fuite.L’installation du gentilhomme en Turquie fait l’objet d’une ellipse. On notera aussi une prolepse quiannonce la fin du récit�: «�mais, en lieu de veoir celle dont il esperoit la conservation de sa vie, va veoir laprecipitation de sa mort�» (l.�27).L’alternance imparfait�/�passé simple est classique dans le récit. On notera cependant, ici, le très grandnombre de verbes au passé simple qui souligne l’accumulation des actions de premier plan.%�Dans le texte�D, six passages de discours direct rendent le récit très vivant. Ils interviennent à desmoments importants de l’action sur lesquels ils mettent l’accent�:–�le gentilhomme promet au Duc de lui offrir la femme qu’il convoite (mise en place du piège)�;–�il s’assure de l’aide d’un serviteur (préparation du crime)�; échange de deux répliques�;–�la réaction du Duc voyant qu’il est trahi�;–�une longue réplique argumentative du serviteur qui engage le meurtrier à se sauver sans commettred’autres crimes�;–�une dernière réplique assez longue du jeune homme où il justifie auprès de l’évêque la demande dechevaux.Ces passages au style direct sont là pour souligner la tension dramatique.&�Le récit de Dumas est très détaillé, n’omettant aucun détail sanglant. Le premier paragraphe,constitué, d’une part, d’un dialogue entre Lorenzo et son «�sbire�», puis du récit du premier coupporté à Alexandre, est une scène. Ensuite, la vitesse se ralentit encore dans une scène qui est presqueune pause descriptive qui rend compte des derniers soubresauts du Duc et des derniers coups portés.Les moments qui suivent le crime font l’objet d’une nouvelle scène, tandis que la fuite des deuxhommes (à partir de «�Alors Lorenzo et Scoronconcolo�») est traitée sur le mode du sommaire. Le passagedu crime est méthodiquement détaillé, disséqué, pourrait-on dire�; en témoignent les multiplesindicateurs temporels qui soulignent le souci d’exhaustivité du narrateur.'�La photographie de scène met l’accent sur la morsure au doigt. C’est un détail qui revient dans lesdifférentes versions du crime. Il a une fonction informative (Alexandre s’est courageusement battu) etsymbolique (Lorenzaccio portera la trace de ce combat et la morsure –�le texte de Musset insiste surcet aspect�– est comme un anneau nuptial). Noces de sang pour ce héros peu fait pour le bonheur.D’un point de vue théâtral, ce détail est très visuel, et c’est ce qu’exploite Georges Lavaudant. Encontemplant son doigt, presque avec incrédulité, Lorenzaccio semble prendre la mesure de l’acte qu’ilvient de commettre. Quant au Duc, tout indique qu’il est déjà mort�: sa posture, renversé sur le dos,la tête rejetée en arrière, les yeux clos et la bouche ouverte. Lorenzo domine le Duc et la situation�:mais pour combien de temps�? la blessure au doigt semble indiquer qu’il ne sortira pas indemne del’aventure. C’est ce dont le héros semble prendre conscience avec une certaine stupeur.

Travaux d’écriture

Question préliminaireConstantes dans les documents�:•�La préparation du meurtre.•�Le prétexte de Catherine = piège.•�Le lieu�: la chambre de Lorenzo.•�Le déroulement du meurtre�:–�Le Duc est couché.–�Un premier coup est frappé.–�La morsure au doigt.–�Un autre coup est frappé.•�La présence de Scoronconcolo.•�Découverte par Scoronconcolo de l’identité de la victime.•�Le Duc est remis dans son lit puis abandonné.

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•�Lorenzo fait une pause à la fenêtre et se réjouit de l’acte qu’il a commis.•�La fuite grâce à des chevaux de poste sous le prétexte d’un frère malade.

DOCUMENTS VARIANTES

Texte A�: Lorenzaccio •�Propos d’Alexandre sur les femmes.•�Exaltation de Lorenzo face à la nature. Accord du moi et du monde.•�Traitement elliptique.•�Insistance sur le registre lyrique.

Texte B�: Une conspiration en 1537 •�Propos d’Alexandre sur les femmes.•�Multiples détails sanglants.•�Oraison funèbre de Lorenzo.•�Exaltation de Lorenzo, en particulier face à la nature.•�Texte à mi-chemin entre réalisme et romantisme.

Texte C�: La Storia Fiorentina •�Pas d’épisode préparant le meurtre mais cependant allusion àCatherine à la fin du texte (l.�36).•�Très nombreux détails sanglants.•�Communion avec la nature traitée de manière très rapide.•�Allusion aux témoins.•�Ellipse de l’épisode de la fuite.•�Un récit qui se veut objectif et informatif en donnant un luxe dedétails et en avançant des hypothèses d’interprétation.

Texte D�: L’Heptaméron •�Des analyses psychologiques.•�Des commentaires du narrateur.•�La fuite en Turquie.•�Un récit détaillé et vivant qui met l’accent sur la psychologie despersonnages.

Texte E�: Une année à Florence •�Complaisance dans les détails sanglants et macabres.•�Une chronologie minutieuse qui se réfère à Varchi.•�Allusion aux témoins.•�Un récit réaliste et romanesque à la fois qui ne lésine sur aucun effet,volontiers grandiloquent («�une cicatrice éternelle�»).

L’éclairage sur le meurtre varie d’un texte à l’autre, même si les constantes sont nombreuses.Beaucoup de textes insistent sur la sauvagerie du meurtre qui garantit d’efficaces effets littéraires,tandis que d’autres mettent l’accent sur la personnalité de Lorenzaccio et sur ses impressions.Scoronconcolo est tantôt laissé dans l’ombre, tantôt c’est lui qui porte le coup fatal. On soulignesouvent le courage dont Alexandre fait preuve –�ce qui le réhabilite quelque peu tout en valorisant lejeune meurtrier. Le meurtre est toujours traité comme un fait divers et jamais son enjeu politiquen’est vraiment mis en lumière (seul L’Heptaméron y fait allusion).

Commentaire

1. L’organisation du récitA.�La structure du récit�: les étapes d’un meurtre préméditéB.�Un récit vivant•�Variété des vitesses narratives.•�Utilisation du discours direct.

2. Le mélange des registres�: un récit terrifiant et amusantA. Un récit d’horreur•�Un crime et une trahison (cf.�l.�31).•�Des détails sanglants + la folie meurtrière du jeune homme (détail que l’on trouve seulement dans letexte de Marguerite de Navarre).B.�L’humour•�Utilisation de zeugmas (l.�25�: «�ouvrit son rideau et ses oeilz�»�; l.�29�: «�denué d’armes et non de cueur�»),de litotes («�s’il n’en faisoit autant à cinq ou six de ceulx qui estoient les prochains du duc�»).•�Des situations cocasses�: «�lequel, trouvant le duc et son maistre si liez ensemble qu’il ne savait lequel choisir,les tira tous deux par les piedz�» (l.�36).

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3. La voix du conteurA.�Un regard féminin•�Des détails concernant la toilette du Duc (l.�11) ou l’ordre de la chambre (l.�13-14).•�L’importance du sentiment amoureux (l.�24 et 26).•�La vertu des femmes en question�: «�celle qu’il avoit estimée invincible�» (l.�9-10), «�celle qui n’entrera pasen ceste chambre sans rougir�» (l.�14-15).B.�Des analyses psychologiquesÀ plusieurs reprises, la narratrice avance des explications psychologiques (l.�5, 34, 53-54).C.�Une leçon morale•�Une fin heureuse�: l’action commise par le gentilhomme est juste�: «�par la mort duquel il pensait mettreen liberté la chose publique�» (l.�42-43). Il guérit donc de ses blessures et fuit sans être inquiété.•�L’éloge de la mesure et de la raison par la voix du serviteur « ne hardy ne fol�» (l.�47).•�Idée que l’amour fait commettre des folies�: «�luy promectoit tout ce qu’il luy sçauroit demander�» (l.�6).

Dissertation

1. La réécriture d’un texte ou d’un mythe contient forcément une part de répétitionA.�Il y a de grands thèmes universels, des topoï, auxquels chaque artiste se trouve confronté•�C’est le cas de tous les grands thèmes lyriques qui font partie de la condition humaine. Comment nepas se répéter quand on parle des joies et des souffrances de l’amour�? de l’angoisse du temps quipasse�?•�Les thèmes engagés sont aussi toujours les mêmes et restent éternellement d’actualité�: la lutte pourla liberté, la tolérance, contre l’exclusion sont des combats qu’il ne faut jamais cesser de mener.B. L’écrivain peut reprendre une histoire déjà écrite et déjà connue•�Ce qui va faire l’intérêt du nouveau texte n’est donc pas le déroulement de cette histoire.•�En effet, l’intrigue est donnée d’avance –�ce qui réduit la tension dramatique du texte. Pourtant leXXe�siècle, en particulier, a repris au théâtre de nombreux mythes antiques et a réussi à les revivifier.C.�Les personnages aussi sont donnés d’avancePourtant, la part d’invention de l’écrivain n’est pas moindre car il va s’efforcer de donner auxpersonnages un caractère attachant�: ainsi, l’Antigone d’Anouilh nous semble-t-elle plus proche denous et plus émouvante que l’Antigone de Sophocle. La réécriture est donc un défi car il va falloircaptiver le lecteur par le traitement novateur d’une histoire qu’il connaît déjà.

2. L’originalité d’une réécritureA.�La réécriture peut modifier le regard porté sur les personnages en fonction de l’époque ou de la sensibilitépersonnelle de l’écrivainLe Lorenzo de Médicis de Musset est porteur des angoisses et de certains traits de la personnalité deMusset. Le personnage de Jeanne d’Arc a fait aussi l’objet de nombreux textes, de Bernard Shaw àBrecht, en passant par Péguy ou Claudel. Héroïne tantôt de la droite ou de la gauche, la jeune fille estsuffisamment plastique pour se prêter à toutes les entreprises littéraires où il est question d’idéal et depureté.B.�Ainsi, le sens de l’histoire racontée peut-il être modifié, adapté�; le message devient universelLe personnage d’Antigone, tel qu’il est traité par Anouilh, peut être compris comme une apologie dela Résistance, et le personnage de Lorenzaccio, qui a pourtant vécu au XVIe�siècle, se transforme demanière très convaincante en héros romantique.C.�La réécriture devient l’occasion d’un exercice de style�: comment faire entendre sa propre voix à travers un textedéjà connu�?Et c’est bien l’enjeu majeur pour un écrivain que de parvenir à créer son propre langage et son propreunivers. Le texte n’est que prétexte. Molière, en créant son Dom Juan, reprend bien l’histoire del’Espagnol Tirso de Molina mais crée un texte baroque et personnel qui trouve à la fois des échos dansl’actualité de Molière et analyse un type humain universel.

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Réponses aux questions – 36

3. La richesse de l’intertextualitéA.�Des récits qui se complètentIl est toujours intéressant de comparer et de confronter les divers traitements d’un thème. Le lecteuraime retrouver une histoire qu’il connaît et en savourer les variantes. Porté par une intrigue qu’il n’aplus à découvrir, il sera d’autant plus attentif à l’originalité de l’œuvre et à son style. Récemment, LaJeune Fille à la perle de Tracy Chevalier a connu un grand succès en proposant une histoire autour ducélèbre tableau de Vermeer.B.�La palette des émotions humainesUn même thème, traité par des auteurs différents et à des époques diverses, permet de percevoirl’infinie variété des sentiments, leurs nuances changeantes mais aussi la profonde unité de l’humanité.Que la passion ait les traits de Phèdre ou ceux de Renée dans La Curée d’Émile Zola, elle n’en gardepas moins sa puissance de fascination et d’émotion, même si les deux héroïnes sont très différentes.C.�La mobilité des mythesUn mythe peut circuler d’un art à un autre. C’est particulièrement vrai pour les mythes antiques,traités en peinture, en sculpture ou en littérature. Mais c’est aussi le cas de Dom Juan dont la versionde Mozart est aussi admirable que celle de Molière. Quel plaisir pour l’esprit et pour le goût que desœuvres qui se répondent�! Chacun pourra y trouver des échos qui lui sont propres et se créer sapropre anthologie.

Écriture d’inventionL’élève pourra s’inspirer du tableau récapitulatif des constantes et des variantes et opérer ses propreschoix. À son gré, il pourra s’attarder sur la personnalité de Lorenzo ou sur celle d’Alexandre. Commedans le texte de Marguerite de Navarre, le récit ou le dialogue pourra donner lieu à une discrète leçonmorale.S’il choisit le récit, on attend que l’élève utilise les techniques du récit (jeu sur les points de vue, lesvitesses narratives, utilisation cohérente de la chronologie). Ce peut être un utile exercice de révisionen début d’année.

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Lorenzaccio – 37

C O M P L É M E N T SA U X L E C T U R E S D ’ I M A G E S

! Portrait de Musset par Eugène-Louis Lami (p.�4)L’auteurEugène-Louis Lami (1800-1890) a laissé de délicates compositions décrivant la vie quotidienne à Parissous la monarchie constitutionnelle et le Second Empire. Il illustra également de nombreux livrescomme Manon Lescaut ou Gil Blas.

L’œuvreIl s’agit d’un dessin de trois quarts dos. On remarque l’élégance du jeune dandy et sa pause étudiée, lechapeau haut de forme à la main et la main gauche derrière le dos. Le visage, dont on distingueclairement le noble profil, exprime la gravité.

Travaux proposés–�Lisez la biographie de Musset (pp.�238-244). Quels rapprochements pouvez-vous faire entre ceportrait et certains éléments de la vie de Musset.–�Cherchez d’autres portraits de Musset, à différents âges de sa vie. Classez-les chronologiquement etcommentez-les.

! Affiche pour Lorenzaccio avec Sarah Bernhardt par Mucha (p.�5)L’auteurAlfons Maria Mucha (1860-1939) est un peintre et affichiste tchécoslovaque. Il est l’affichiste de SarahBernhardt (Lorenzaccio, 1896�; Médée, 1898�; L’Aiglon, 1900) et plusieurs entreprises commercialesfirent appel à ses services («�Job�», «�la Bénédictine�», etc.). Ses œuvres font une large place auxarabesques et aux lignes florales (style «�nouille�»). Les jeunes femmes créées par Mucha sont sicaractéristiques qu’on les appelle « les Muchettes�».

L’œuvreL’affiche est en hauteur, comme souvent. Elle s’inspire, pour son format allongé, du style japonisanten vogue à l’époque. Des inscriptions encadrent le dessin central�: en haut, le titre de l’œuvre�; en bas,le lieu de la représentation�; à gauche, le nom de l’actrice principale�; et à droite, l’année en chiffresromains. On remarque la présence de courbes (arche, arabesques en fond, contorsions du corps) quidonnent beaucoup de sensualité à l’ensemble.Le personnage de Lorenzaccio est vêtu de noir et porte plusieurs objets symboliques�: l’épée à laceinture et le livre. La pause songeuse, une main sur la bouche, semble indiquer les incertitudes duhéros. Le personnage, masse sombre, se détache sur un fond clair aux fins dessins aériens.

Travaux proposés–�Étudiez la composition de l’ensemble.–�Quels traits de la personnalité et de l’action du héros sont particulièrement mis en valeur�?

! Caricature de Louis-Philippe, lithographie de Deshayes (p.�10)L’œuvreLouis-Philippe est représenté au centre, assis à terre, donc en position de défaite –�ce que confirmel’aspect négligé de sa tenue et de sa coiffure. Sont mis en évidence son ventre rebondi (signed’opulence bourgeoise) et sa cupidité (mains aux doigts avides et sac d’or).L’affiche du Roi s’abuse (parodie de la pièce Le Roi s’amuse de Hugo), les instruments de musique et lecommentaire de la caricature assimilent le gouvernement de Louis-Philippe à un spectacle.

Travaux proposés–�Quels détails montrent qu’il s’agit d’une caricature�?–�Qui sont les personnages représentés�? (Demandez de l’aide à votre professeur d’histoire.)

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Compléments aux lectures d’images – 38

–�Relisez «�La France de 1830�» (pp.�245-249) et mettez cette caricature en relation avec les élémentshistoriques.–�Commentez la légende�: «�La farce est jouée, comptons la recette.�»

! Mise en scène de Ruy Blas par Pierre Dux (p.�33)Le metteur en scèneNé en 1908 et déclaré à la mairie sous le nom de Martin, Pierre Dux est le fils d’une actrice de laComédie-Française et d’un acteur de boulevard. Tout le destine donc au théâtre, mais ce milieu luisemble «�mystérieux, intimidant, inquiétant�». Adolescent, il se veut écrivain, ou bien ingénieuragronome, ou médecin de campagne. Le destin en décida autrement, lors d’une représentation àAnvers d’une pièce dont sa mère était la vedette et dans laquelle il remplaça au pied levé un comédienmalade. En 1927, il se présente au concours d’entrée au Conservatoire, y interprétant deux scènes deFigaro. Il est reçu le premier�; ensuite, il obtient, en finale, le Premier Prix. Pierre Dux entre auThéâtre-Français (Comédie-Française) en 1929, où il interprète, entre autres, le rôle de Figaro dansLe Barbier de Séville et crée le rôle de l’Annoncier du Soulier de satin de Claudel. Avec son ami FernandLedoux (sociétaire depuis 1931), il sera également à l’origine de réformes de cette institution.Pierre Dux s’essaye ensuite, avec succès, à la mise en scène, avec Le Légataire universel de Regnard. Onlui doit également, entre autres, Ruy Blas de Victor Hugo (1937) et La Reine morte de Montherlant(1942). Mobilisé dès la déclaration de guerre, il subit la débâcle et revient à la Comédie-Française,dans un Paris sous occupation. Partisan déterminé du général de Gaulle, il fait néanmoins partie desrares qui ont la chance de tourner des films et monter des pièces. En 1945, déçu que les réformesn’aient pas abouti et que le ministre n’ait pas daigné répondre au rapport qu’il lui avait adressé, PierreDux donne sa démission. Mais la Maison ne veut pas le laisser partir�; une commission de réformes estdésignée, dont il devient membre.D’une activité débordante, Pierre Dux sera un comédien et un metteur en scène à succès, une vedettede cinéma et de télévision, chef de troupe au Théâtre de Paris, administrateur de la Comédie-Française (1970-1979), directeur du Théâtre National de l’Odéon (1971-1977), mais aussi unprécurseur, en accueillant, dans la seconde salle qu’il fait ajouter à l’Odéon, la nouvelle génération(Roger Planchon, Patrice Chéreau, Marcel Maréchal, Franco Zeffirelli, Giorgio Strehler), en y faisantjouer les œuvres de Dubillard, de Billetdoux et d’Andrée Chédid, et en faisant entrer à l’Odéon Le roise meurt d’Eugène Ionesco et au répertoire En attendant Godot de Samuel Beckett.Pierre Dux, qui aimait à répéter ces mots de son maître Jules Truffier�: «�Le découragement est du tempsperdu�», est décédé en 1990.

La mise en scèneSe reporter à la réponse à la question�9 du premier groupement de textes (p.�8).

Travaux proposés–�Commentez le décor et les costumes. Vous semblent-ils conformes aux indications données parHugo dans la pièce�?–�Quelle(s) fonction(s) remplissent-ils�?–�Cherchez une autre photographie d’une mise en scène de Ruy Blas plus récente. Comparez-les.

! Mise en scène de Bérénice par Klaus Michael Grüber (p.�34)Le metteur en scèneKlaus Michael Grüber met en scène Bérénice à l’occasion du Festival d’automne de Paris, le1er�décembre 1984. Cultivant l’art du dépouillement, il s’efforce, lors de cette création, de restituer lasimplicité de la langue de Racine et son intensité émotionnelle. «�J’ai appris qu’on peut pleurer enalexandrins�», déclarera-t-il.

La mise en scèneSe reporter à la réponse à la question�9 du premier groupement de textes (p.�8).

Travaux proposés–�Imaginez un autre décor pour Bérénice de Racine. Justifiez vos choix.–�Commentez l’attitude des personnages et la distance qui les sépare.

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Lorenzaccio – 39

! Le duc et Lorenzo par Charles Martin (p.�83)L’œuvreIl s’agit d’un dessin en couleurs des années 1940, représentant l’étrange couple formé par Alexandre etLorenzaccio. On remarque que l’accent est mis sur la puissance et la virilité du Duc, au premier plan,en tenue claire, bras et jambes écartés, dans une attitude de conquérant. Lorenzaccio apparaît ausecond plan, forme frêle, tout de noir vêtu.

Travaux proposés–�D’après ce dessin, quelles relations entretiennent les deux hommes�? Vous semblent-elles conformesà ce que Musset a voulu laisser supposer�?–�Mettez en relation la représentation du Duc avec les textes proposés dans le cinquième corpus(pp.�200-209). Quelle impression d’ensemble se dégage�?

! Illustration pour La Nuit de décembre par Eugène-Louis Lami (p.�90)L’œuvreIl s’agit d’une aquarelle, conservée au château de Malmaison et faisant partie d’une série réalisée parEugène-Louis Lami pour les Nuits de Musset.Pour le commentaire du document, on se reportera aux réponses aux questions�7 et 8 du deuxièmegroupement de textes (p.�16).

Travaux proposés–�Cherchez le texte des quatre Nuits de Musset et les illustrations de Lami qui leur correspondent.Aidez-vous de ces documents pour dégager de grands thèmes romantiques.–�À travers ces documents, et dans le cadre de l’objet d’étude sur la poésie, relevez les vers quiillustrent la condition du poète.

! Mise en scène de Lorenzaccio par Françoise Maimone (p.�106)La mise en scèneDans cette mise en scène, Françoise Maimone renoue avec la tradition en faisant jouer le rôleéponyme par une femme. L’expressivité des comédiens justifie le commentaire d’Anne-CarolineJambaud�: «�Spectacle de chair, de frissons et de sentiments�» (p.�280).Voir les commentaires de cette mise en scène à la fin du Bibliolycée (p.�280).

Travaux proposés–�Commentez la position des corps et l’opposition des costumes.–�À votre avis, quel moment de la pièce cette photographie illustre-t-elle�? Justifiez votre réponse.

! Mise en scène de Lorenzaccio par Francis Huster (p.�122)La mise en scèneLa photographie confirme le commentaire de la mise en scène de Francis Huster, proposé parC.�Derouin et N.�Thévenin (pp.�278-279)�: le héros est vêtu à la mode romantique («�dandy […] enjabot�»). Il «�apparaît seul, drapé dans sa cape�» et interprète «�un Lorenzaccio sensible et halluciné�».Voir les commentaires de cette mise en scène à la fin du Bibliolycée (p.�278).Se reporter également à la réponse à la question�6 du troisième groupement de textes (p.�20).

Travaux proposés–�Étudiez les effets produits par les éclairages.–�Quelle image du héros donnent ses vêtements et ses accessoires�?

! Mise en scène de Lorenzaccio par Jean-Pierre Vincent (p.�145)La mise en scèneLa photographie de la mise en scène de Jean-Pierre Vincent permet d’avoir une idée du décordépouillé mis en place et de «�l’escalier en forme de gradins ou de promontoire�», mentionné par Virginie

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Compléments aux lectures d’images – 40

Lachaise (p.�282). On devine également les jeux de lumière�: «�un éclairage cru [à gauche] interrompt[…] une atmosphère de clair-obscur�» (p.�282).Voir les commentaires de cette mise en scène à la fin du Bibliolycée (p.�281).

Travaux proposés–�Qu’est-ce qu’apporte (ou enlève) la modernisation des costumes au sens de la pièce�?–�Commentez l’attitude des deux personnages.

! Caspar David Friedrich, Le Voyageur au-dessus de la mer de nuages (p.�151)L’auteurFriedrich est un peintre allemand (1774-1840). Proche de certains membres du premier mouvementromantique, il est fasciné par les paysages calmes et mélancoliques (comme ceux de l’île de Rügen), etaffiche un goût pour le mysticisme et le fantastique. Il est l’auteur de paysages qui montrent un senstragique de la nature.

L’œuvreSe reporter aux réponses aux questions�7 et 8 du quatrième groupement de textes (p.�29).

Travaux proposés–�Cherchez une autre œuvre de Friedrich dont vous montrerez le caractère fantastique.Il est possible d’exploiter le tableau de Friedrich en aide individualisée, de manière à faire revoir auxélèves certains procédés d’expression et certains registres�:–�on peut leur demander de trouver un champ lexical comportant dix noms, dix adjectifs, cinq verbeset cinq adverbes pouvant s’appliquer à ce que représente le tableau�;–�on leur suggérera aussi d’écrire une phrase contenant une figure d’opposition, une autre une figurede répétition et de trouver trois images (comparaison ou métaphore) en rapport avec le document�;–�les élèves pourront ensuite réutiliser ces travaux pour écrire un texte lyrique d’une dizaine de lignesqui exprime les impressions du personnage central�;–�enfin, on leur proposera de produire un texte ironique, soit du point de vue de ce mêmepersonnage, soit du point de vue d’un observateur du tableau de Friedrich.

! Mise en scène de Lorenzaccio par Jean Vilar (p.�196)La mise en scèneVoir les commentaires de cette mise en scène à la fin du Bibliolycée (p.�277).

Travaux proposés–�Commentez la position des mains et l’expression du visage de Lorenzaccio.–�En quoi cela illustre-t-il l’ambiguïté des relations entre les deux hommes�? Le visage d’Alexandreconfirme-t-il vos hypothèses�?

! Mise en scène de Lorenzaccio par Georges Lavaudant (p.�210)L’auteurGeorges Lavaudant est né en 1947. Au début des années 1970 et durant vingt années, à Grenoble, ildirige la troupe du Théâtre partisan, puis, en 1976, il devient le codirecteur du Centre dramatiquenational des Alpes et, en 1981, celui de la Maison de la culture de Grenoble. Devenu codirecteur duT.N.P. en 1986, il y met en scène Le Régent de Jean-Christophe Bailly (1987) et y poursuit sa démarchegrenobloise, faisant découvrir des auteurs contemporains en alternance avec des pièces classiques. On luidoit aussi quelques œuvres personnelles�: Les Iris, Terra incognita… Ses mises en scène ont vu le jour surles planches de théâtres très variés, à Grenoble, à Villeurbanne, à la Comédie-Française (Lorenzaccio), àl’Opéra de Paris (Roméo et Juliette de Gounod), et dans le monde entier (Mexico, Hanoi, Saint-Pétersbourg). En mars 1996, il est nommé directeur de l’Odéon/théâtre de l’Europe.

L’œuvreOn devine que l’«�éclat des costumes accuse la pâleur de ceux qui les portent�», comme le note Guy Rosa(p.�280).Se reporter à la réponse à la question�7 du dernier groupement de textes (p.�33).

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Lorenzaccio – 41

Travail proposéPhotocopiez la photographie en la centrant sur une feuille format A4 et prolongez les personnages etle décor à votre guise.

! George Sand par Alfred de Musset (p.�212)L’auteurMusset, très habile dessinateur, a laissé de nombreux dessins dont plusieurs de George Sand, samaîtresse.

L’œuvreLe dessin d’Alfred de Musset souligne l’aspect mystérieux de la femme aimée, représentée au centredu dessin�: visage à demi dissimulé, buste entouré de traits de crayon noirs, bras droit laissé dansl’ombre et silhouette de femme qui disparaît, de dos, à l’arrière-plan de la composition.Tout se passe comme si la partie droite du dessin, traitée avec un effet de perspective, mettait en scènela même femme que celle au premier plan et laissait présager sa fuite.On remarquera le caractère sombre de l’ensemble et de la femme, en particulier�: mèche de cheveuxnoirs, yeux noirs, épais sourcils bruns. Ces éléments sont caractéristiques de l’esthétique romantique.

Travaux proposés–�Faites des recherches sur George Sand et rédigez sa biographie en une quinzaine de lignes.–�Trouvez d’autres portraits de George Sand. Quelle image donnent-ils d’elle�?–�Quelles caractéristiques physiques l’éventail met-il en valeur�? Quelle image de la femme suggère-t-il�?–�Trouvez d’autres œuvres –�littéraires ou picturales�– représentant une femme à l’éventail. Quelle estla fonction symbolique et esthétique de cet objet�?

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Complément à la lecture analytique (p.�115) – 42

C O M P L É M E N TÀ L A L E C T U R E A N A L Y T I Q U E ( P . 1 1 5 )

Travail fait sur table, en deux heures, par Margot Riggi, élève de Seconde 10 au lycée Montesquieu en 2003-2004.

! La structure de l’extrait!�Pierre conserve d’un bout à l’autre de l’extrait son opinion irrévocable, à savoir sa décision d’agircontre Alexandre. C’est donc uniquement la position de Philippe qui évolue�: fermement opposé à sonfils au début, il cherche ensuite à le faire renoncer puis à en savoir plus sur l’action qu’il compte mener.Devant la ténacité et l’enthousiasme de son fils, il se laisse finalement convaincre�: «�Emmène-moi.�»"�De nombreuses phrases interrogatives permettent au dialogue d’avancer. Mais, tandis que certainesappellent réellement une réponse («�Ainsi donc�?�»), d’autres seraient plutôt des questions oratoires(«�Qu’ont donc fait à Dieu ces Pazzi�?�») qui, plus qu’au public ou à l’interlocuteur présent sur scène,sont posées au personnage lui-même, témoignant de ses interrogations face à la situation, voire de sonscepticisme.#�Seul Philippe a des tirades, d’ailleurs surtout placées dans la première partie de l’extrait. En effet, ilfait ici figure d’homme posé, qui a de l’expérience, privilégiant ainsi la réflexion à l’action spontanée�:Philippe est ainsi opposé à son fils, caractérisé par l’impulsivité de la jeunesse. La seconde partiecomporte surtout de courtes répliques�: Philippe se laisse entraîner dans l’action.$�Philippe essaie de protéger son fils contre une action pouvant s’avérer dangereuse�: il tente de leconvaincre d’y renoncer dans ses tirades. Mais ce sentiment paternel s’exprime de façon plus explicitedans sa dernière réplique où il se refuse d’abandonner ses «�aiglons�», cette «�brave et belle jeunesse�» dontil est fier.%�La fierté de reconnaître chez Pierre l’incarnation de sa jeunesse pousse Philippe à accepter l’actionmalgré lui�: il s’agit d’une passation de pouvoir symbolique. De plus, Philippe finit par déciderd’accompagner son fils�: peut-être un désir de le protéger�?&�Pierre adopte d’abord un ton sec et plein de reproches à l’égard de son père, ne parlant que très peu(«�vous qui savez aimer, vous devriez savoir haïr�»). Il paraît fermé au dialogue, avant de céder etd’accepter de répondre aux interrogations de son père. Son ton est toujours ferme mais, cependant,moins agressif («�Adieu, mon père, laissez-moi aller seul�»). Enfin, la décision de Philippe lui fait plaisir�: ilse sent soutenu dans sa démarche et ses paroles sont emplies de respect et d’admiration pour ce«�patriarche�».'�Cette métaphore fait tout d’abord référence à la jeunesse de Pierre. Il doit, comme les enfants, faireles choses dans le bon ordre (peut-être réfléchir avant d’agir)�; regarder la réalité, les choses évidentesen face avant d’échafauder des plans�: compter sur ses doigts avant de compter dans sa tête.

! La figure du patriarche(�Dans les répliques de Philippe, les pronoms personnels de 2e�personne sont nombreux et, engénéral, au pluriel. Cela montre qu’au-delà de son fils, Philippe se préoccupe de l’ensemble desrépublicains.)�Philippe emploie un vocabulaire dépréciatif�: «�rien�», «�sans�», toutes les négations de sa premièretirade, «�mascarade�», «�enfants�». Il reproche à son fils d’agir trop précipitamment, sans avoir réfléchi etpeut-être de prendre cette chose sérieuse comme un amusement.*+�Le texte insiste sur l’âge de Philippe�: «�vieil aigle�», «�vieilli�»… Lui-même regrette sa jeunesse qu’ilretrouve chez Pierre. Mais, surtout, il fait figure d’homme expérimenté, opposé à l’inconscience de lajeunesse.*,�On trouve de nombreuses occurrences du verbe savoir. Sous forme interrogative lorsqu’il s’agit dela jeunesse («�Savez-vous�», «�sais-tu�»…), sous forme déclarative et affirmative pour Philippe («�les pèressavent�»). À l’ignorance de cette jeunesse s’oppose la certitude de l’expérience�; ainsi Philippe est unexemple pour les jeunes Florentins.

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Lorenzaccio – 43

*-�Philippe quitte le cas précis qui est l’objet de la conversation pour aborder des notions plusabstraites et générales�: «�une république�» (utilisation du pronom indéfini), «�le bonheur�», «�la vie et lamort�» (idées abstraites et universelles).*.�Philippe utilise un vocabulaire religieux�: «�Dieu�», voire «�Dieu de justice�», «�Providence�»,«�offenser�», «�juste vengeance�». Il prend ainsi une référence universelle et sacrée pour appuyer sespropos. De plus, la pièce se situe au XVIe�siècle, époque où la religion était très ancrée dans les esprits�:ses paroles peuvent ainsi avoir plus de poids.

! Deux visions de la politique*/�Pierre et Philippe sont deux figures militantes antithétiques. Pierre est caractérisé par la fougue de lajeunesse, son enthousiasme, son énergie�: il parle peu et refuse d’argumenter plus longtemps sur lebien-fondé de son acte pour lequel il est bien déterminé. En revanche, son père demeure dans uneréflexion stérile traduite par plusieurs tirades. Hostile à l’action, il se laisse difficilement convaincre etaimerait plutôt combattre avec les mots et les idées.*0�Pierre s’oppose plutôt à la personne d’Alexandre, ce «�bâtard�», qu’à son statut. Son obsession est del’éliminer à tout prix pour assouvir une «�vengeance�» personnelle plutôt qu’accomplir une croisaderépublicaine contre le tyran (la seconde tirade de Philippe expose le désir de vengeance après l’affrontfait à Louise).*1�Florence apparaît tout de même dans ses motivations (deux occurrences). Si Pierre veut «�guérir�»Florence, c’est plus dans le but de faire plaisir à son père, son «�jardinier�» (dernière réplique del’extrait).*2�Pierre n’utilise que très peu de figures de rhétorique car il privilégie l’action aux longs discours. Ilentend convaincre son père plus par son attitude et sa détermination que par les mots. On trouve toutde même une apostrophe�: «�Vous qui savez aimer�».*3�Le discours de Philippe est constitué de nombreuses tirades oratoires où les figures de style sontomniprésentes�: anaphore («�Savez-vous�»), questions rhétoriques («�Qu’ont donc fait à Dieu cesPazzi�?�»), répétitions («�guérir, guérir�»), beaucoup de phrases exclamatives («�jouer avec la vie et lamort�!�»).*4�Philippe généralise ses propos au-delà du cas unique qui le préoccupe et aborde des sujetsintemporels (la vie et la mort). C’est un intellectuel, un penseur, un idéaliste. Il traite d’idées abstraitesavec des images concrètes (par exemple, l’allégorie de la Providence).5+�Philippe est le symbole des valeurs ancestrales (l’autorité, etc.). Il semble même parfois décalé, enretard sur son temps. Mais le père et le fils s’unissent autour des valeurs aristocratiques et guerrières del’honneur et de la virtus.

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Bibliographie, discographie, filmographie complémentaires – 44

B I B L I O G R A P H I E , D I S C O G R A P H I E ,F I L M O G R A P H I E C O M P L É M E N T A I R E S

!�BibliographieŒuvres de Musset–�Œuvres complètes, coll.�«�L’Intégrale�», éd. du Seuil, 1963 (un volume).–�Théâtre complet, coll.�«�Bibliothèque de la Pléiade�», Gallimard, 1990 (un volume).–�Lorenzaccio, coll.�«�Classiques Hachette�», Hachette Livre, 1991.–�Les Caprices de Marianne, coll.�«�Classiques Hachette�», Hachette Livre, 1999.–�On ne badine pas avec l’amour, coll.�«�Bibliolycée�», Hachette Livre, 2003.–�Musset, La Confession d’un enfant du siècle, coll.�«�Folio�», Gallimard, 1973.

Sur le contexte de l’œuvre–�Paul Bénichou, Les Mages romantiques, Gallimard, 1988.–�G. Bertier de Sauvigny, La Restauration, Flammarion, 1955.–�Jean Starobinski, Portrait de l’artiste en saltimbanque, coll.�«�Champs�», Flammarion, 1970.–�Paul van Tieghem, Le Romantisme dans la littérature européenne, Albin Michel, 1969.

Sur le genre–�Franck Laurent et Michel Vienes, Le Drame romantique, Hatier, 1996.–�Michel Lioure, Le Drame, coll.�«�U�», Armand Colin, 1963.–�«�Le drame romantique�», Rencontres nationales de dramaturgie du Havre, éd. des Quatre Vents, 1999(numéro spécial).–�Dramaturgies romantiques (sous la direction de Georges Zaragoza), Éditions universitaires de Dijon,1999 (numéro spécial).

Sur Lorenzaccio–�J. Bem «�Lorenzaccio entre l’histoire et le fantasme�», in Poétique, n°�44, 1980.–�Hassan el Nouty, «�L’esthétique de Lorenzaccio�», in Revue des sciences humaines, 1962.–�Bernard Masson, «�Lorenzaccio�» ou la Difficulté d’être, Archives des lettres modernes, n°�46, 1962.–�Bernard Masson, Musset et son Double�: lecture de «�Lorenzaccio�», Minard, 1978.–�Walter Moser, «�Lorenzaccio, le Carnaval et le Cardinal�», in Romantisme, n°�19, 1991.–�Cahiers Textuel�: «�Lorenzaccio�» (textes réunis par José-Luis Diaz), université de Paris�VII, 1991.

Sur l’auteur, sa vie et son œuvre–�Paul de Musset, Biographie d’Alfred de Musset�: sa vie et ses œuvres, 1877, repris dans Œuvres complètes,coll.�«�L’Intégrale�», éd. du Seuil, 1963.–�George Sand et Alfred de Musset, Le Roman de Venise (choix de lettres par José-Luis Diaz),coll.�«�Babel�», Actes Sud, 1999.–�Philippe van Tieghem, Musset, coll.�« Connaissances des lettres�», Hatier, 1969.

!�Discographie– Enregistrement intégral de Lorenzaccio au T.N.P. en 1952, mise en scène de Gérard Philipe et JeanVilar, interprétation de Lorenzo par Gérard Philipe, Audivis, coll. «�Vie du théâtre�», Hachette, 1996.

!�Filmographie– Les Enfants du siècle de Diane Kurys (1999), avec Benoît Magimel et Juliette Binoche (sur lesamours de Musset et George Sand).– Cellini de Giacomo Battiato (1991), avec Wadeck Stanczak, Ben Kingsley et Max von Sydow(évoque la période et la figure de l’artiste florentin).