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L’Islam agressé C’est au cours de la réunion d’Aix la Chapelle en 1748 que fut décidée la mainmise de l’Europe sur le monde musulman. Il n’y eut ni partage de territoire, ni reconnaissance de zones d’influence. Tout au plus, l’idée que les régions turcomanes seraient de l’apanage de la Russie. L’Angleterre et la France se partageant le reste. La première était occupée par la mainmise sur l’Inde et la seconde se considérait comme l’héritière de Rome et la fille aînée de l’Eglise. Mais toutes deux visaient avant tout l’Egypte. La riche vallée du Nil était la convoitise de tous. Comme toujours entre bandits, l’accord était loin d’être parfait. Chamil au Caucase combattra les Russes qui avaient envahi son pays. Il sera discrètement soutenu par les Franco-anglais, jusqu’à ce que les Russes, à la Paix de Paris s’engagent à ne pas pousser jusqu’aux Dardanelles. Route des Indes oblige. Une fois cet engagement pris, Chamil sera lâché et les Russes le feront prisonnier. Mais il faut reconnaître que les Romanoff n’ont pas été avec lui vils et mesquins comme le furent les Bourbons avec Abd El Kader. Chamil a été une des plus noble figures de son temps. En 1865 on demande à un homme politique français : « Quels sont, à votre avis, les plus grands hommes vivants ? » Il répondit : « hélas, ce sont deux musulmans, Abd El Kader et Chamil ». Plus tard, en 1890, Ahmadou Bamba continuera le djihad en Afrique face aux armées françaises. Il utilisera les mêmes méthodes que Chamil, et donnera comme lui le nom de « Mouridines » à ses troupes.

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LIslam agress

Cest au cours de la runion dAix la Chapelle en 1748 que fut dcide la mainmise de lEurope sur le monde musulman. Il ny eut ni partage de territoire, ni reconnaissance de zones dinfluence. Tout au plus, lide que les rgions turcomanes seraient de lapanage de la Russie. LAngleterre et la France se partageant le reste. La premire tait occupe par la mainmise sur lInde et la seconde se considrait comme lhritire de Rome et la fille ane de lEglise. Mais toutes deux visaient avant tout lEgypte. La riche valle du Nil tait la convoitise de tous. Comme toujours entre bandits, laccord tait loin dtre parfait.

Chamil au Caucase combattra les Russes qui avaient envahi son pays. Il sera discrtement soutenu par les Franco-anglais, jusqu ce que les Russes, la Paix de Paris sengagent ne pas pousser jusquaux Dardanelles. Route des Indes oblige. Une fois cet engagement pris, Chamil sera lch et les Russes le feront prisonnier. Mais il faut reconnatre que les Romanoff nont pas t avec lui vils et mesquins comme le furent les Bourbons avec Abd El Kader.

Chamil a t une des plus noble figures de son temps. En 1865 on demande un homme politique franais : Quels sont, votre avis, les plus grands hommes vivants ? Il rpondit : hlas, ce sont deux musulmans, Abd El Kader et Chamil .

Plus tard, en 1890, Ahmadou Bamba continuera le djihad en Afrique face aux armes franaises. Il utilisera les mmes mthodes que Chamil, et donnera comme lui le nom de Mouridines ses troupes.

En 1798, Bonaparte envahira lEgypte et la Palestine et smera la dsolation en ces pays. Il ordonnera ses officiers de ne pas fusiller les milliers de prisonniers, mais de leur couper la tte avec la hache pour conomiser les balles . Aucune tude srieuse na t faite sur les crimes commis par son arme en territoires arabes. Au contraire, il en est de pauvres imbciles qui ont voulu en faire un musulman. Bonaparte na t ni Chrtien ni Musulman, il tait athe.

Cest partir de 1830 que commena la mainmise continue de lEurope sur le monde musulman, avec le dbarquement des Franais en Algrie.

LAngleterre encouragera Abd El Kader jusqu ce que les Franais sengagent ne pas occuper le Maroc Nord face Gibraltar. Les Anglais sengageront eux aussi ne pas occuper le Maroc du Nord, et cest ainsi que cette portion du territoire du Maghreb sera attribue lEspagne. Et, afin quune ventuelle entente de lEspagne, soit avec la France, soit avec lAngleterre ne soit pas efficace, le point stratgique, cest--dire Tanger, sera internationalis. Ainsi, ni la France, ni lAngleterre ntait matresse absolue de lentre de la Mditerrane.

Le but des Franais tait de faire du Nord de lAfrique un pays Latino-chrtien et de la Mditerrane Occidentale une Mare-Nostrum. Ils ont calcul quaprs avoir russi dans le centre, cest--dire en Algrie, ils pourraient continuer lopration lEst comme lOuest. Pour atteindre leur but, il leur fallait exterminer une grande partie des populations, refouler le reste au Sahara, et remplacer le tout par un apport de LATINS: Franais, Espagnols, Italiens etc.

On ira jusqu arraisonner un bateau dmigrants allant en Amrique et obliger ses passagers dbarquer en Algrie. Il sagissait, en bref, de faire au Maghreb ce que les Anglais avaient fait dans le Nord de lAmrique, o dailleurs on avait envoy une mission pour tudier la manire de faire. Tous les moyens furent employs. Incendies des rcoltes, massacre de populations sans dfense, expropriation des terres, asphyxie de tribus entires rfugies dans des grottes, cantonnement dautres tribus sur des surfaces ne permettant pas la survie. On essaya lalcoolisme, qui avait dcim les peaux rouges et l, les Maghrbins furent sauvs par lIslam. La France avait mis sur pieds la plus grande expdition jamais ralise ce temps. Une arme de quarante mille hommes au dpart qui sera de cent-vingt mille, dix ans aprs. Cette arme ne recevait aucun ravitaillement de France. Il lui fallait vivre sur lhabitant. Pendant prs de trente ans, ce ne fut que pillage de rserves de crales et de fourrages et confiscation de troupeaux. Ce qui ne pouvait tre emport, tait soit brl soit abattu sur place. On propagea le haschich.

On entreprit systmatiquement la dculturation. Sur la centaine de mosques-coles Alger ville, on ne laisse que quatre aux musulmans. Les autres furent soit transformes en glises, en curies, en hpitaux, en dpts, soit dtruites tout simplement. La premire dcision des occupants a t de dclarer biens de ltat franais, tous les Waqf dAlgrie. Tout ce que les Algriens avaient amass pendant des sicles pour lentretien de leur religion et de leur culture fut vol par cette dcision. Ltat franais se substituera aux autorits religieuses musulmanes et nommera les Imams. Vers 1910, il ny aura plus que six Imams margeant aux Waqf. Les affaires religieuses seront du ressort dune commission spciale dont le dernier prsident, en 1940, tait Michel le juif. Malgr sa situation matrielle catastrophique, le peuple algrien voudra construire de nouvelles mosques-coles pour ntre pas la merci du conqurant pour ce qui est du domaine spirituel. Ladministration franaise prendra dinnombrables dcisions pour len empcher. Lautorisation de construire exigera tellement de papiers que lorsquon obtient le dernier, le premier est prim. On interdira louverture de toute cole coranique moins de six kilomtres dune cole franaise. Dans toutes les localits, les franais ouvriront des coles rserves leurs fils et l o il ny avait pas de population franaise, on ouvrira une classe pour la forme. Comme dans le nord du pays les villages ne sont pas trop loigns les uns des autres, il tait devenu impossible douvrir une cole coranique. Les quelques coles ouvertes dans les douars taient semi clandestines. De plus, dans les coles, il tait absolument interdit de faire autre chose que dapprendre le Coran aux enfants. Dans le cas o lenseignant donne des notions de grammaire, lautorisation lui tait retire ; ne parlons pas dhistoire ou dducation religieuse, cela pouvait conduire en prison.

Cette autorisation tait personnelle et pour un lieu dtermin. Et cest ainsi quen Algrie, ou la population en 1830 savait lire et crire en arabe 90 %, il ny avait pas un sicle aprs 1 % dans cette situation.

Lenseignement du franais a t prodigu partir de 1900 seulement et na pas touch 5 % de la population, et ce jusqu 1945.

Vers 1924 des Ulamas, qui creront plus tard lAssociation des Ulamas dAlgrie , fonderont des mdersas sous limpulsion de Ben Badis. Que sest-il pass ? Le colonialisme tait-il devenu subitement un ange pour laisser faire ? Non ! Ben Badis avait tout simplement averti discrtement ladministration franaise quil avait suffisamment damis en Egypte pour faire mener une campagne pour la fermeture des coles franaises dans ce pays. Ladministration savait que lon ne fait pas en vain appel la fibre islamique du peuple gyptien. Plus tard, cette solidarit islamique, par une campagne de TALTIF qui commence Fez et sera reprise jusquen Indonsie, obligera le gouvernement franais revenir sur le Dahir Berbre, Dahir qui devait mettre une grande partie du peuple marocain sous juridiction franaise pour son statut personnel au lieu de la juridiction islamique. En 1947 se cre Alger les Editions algriennes en Nahdha avec pour but ldition et limportation de livres arabes. Ladministration franaise lui refusera toute licence dimportation. En 1949, un journal de Tunis sempare de laffaire et signale ce refus. Zayyat le reprend et en fait un article dans la Rissala' et demande au gouvernement gyptien dinterdire lentre en Egypte des livres et revues franaises. Il nen fallait pas plus pour que les Franais accordent des licences dimportation ; au compte-gouttes, il est vrai. Ces trois exemples nous montrent ce que peut faire la solidarit. Imaginons-la dans des domaines capitaux. Nous avons bien le droit de rver, non ?

Depuis 1830, une campagne anti-islamique est mene en France et en Occident et elle continue, avec plus de perfidie. Des milliers douvrages ont t crits sur lIslam et le monde arabe. Pas un qui ne soit un tissu de mensonge, de haine et de mauvaise foi. Le sommet sera atteint en Algrie par Louis Bertrand et Beyrouth par Lammens.

Louis Bertrand marquera toute une gnration dcrivains franais. Il sera un matre incontest pour une notable partie de lintelligence franaise. Il sera lu membre de lAcadmie franaise et pendant quarante ans, pas un seul crivain franais nosera le contredire. Au contraire, il sera la fiert de toute une gnration de Franais. Sa doctrine tait simple : dtruire ce quil y a darabe et de musulman au Maghreb et le remplacer par un apport latin catholique. Il crira l-dessus plusieurs ouvrages, comme: Le sang des races , ou Devant lIslam .

Nous donnons ci-dessous des chantillons de sa littrature:

Rptons-le encore, parce que cest lhumble vrit, loriental et en particulier le musulman est notre ennemi . Loriental est notre ennemi et ne peut tre que notre ennemi . Regardez les orientaux bien en face, dans les yeux : ce sont nos ennemis . Remarquez quil cite loriental en gnral et le musulman en particulier, car il nest pas tendre, non plus pour larabe chrtien. Voici ce quil en pense: Le chrtien a largent, la ruse, lhabilit de la rsistance, le secret de durer, et il est plus intelligent. Quil ne nous aime gure, au fond, quil soit un mdiocre soldat de la civilisation, cest bien possible . Quand L. Bertrand dit : Il ne nous aime gure , entendez par l : Je ne laime gure . En effet, les chrtiens dOccident ne pardonnent pas aux glises dOrient de navoir pas pous leur point de vue sur lIslam. A travers lHistoire, les glises dOrient ont vcu, en gnral, en bonne intelligence avec lIslam. Pour avoir une ide des relations des glises dOrient avec lIslam, nous donnons ci-dessous un extrait du livre : instructions paternelles , du Patriarche Anthime, titulaire du sige de Jrusalem, Grec Orthodoxe, ce livre a t publi vers 1770 : Le dmon a suscit pour la perte des Saints une nouvelle hrsie, jentends lhrsie latine, do sont sortis, comme autant de rameaux, les Luthriens, les Calvinistes, les Evanglistes, et dautres sectes sans nombre. Aussi, convient-il que nous, Chrtiens de prdilection, nous admirions la souveraine bont du Dieu pour nous. Voyez quelles choses merveilleuses a prpar le Seigneur, infini dans sa misricorde, comme dans sa sagesse, afin de conserver sans tache notre foi sainte et Orthodoxe. Il a suscit la puissante domination des Ottomans, la place de lEmpire Romain, pour nous protger contre lhrsie, pour tenir en bride les nations de lOccident et dfendre son glise dOrient .

Si les relations entre les glises dOrient et lIslam taient telles, cela tient ce que ces glises nont pas t noyautes. Un juif converti au Maronisme, par exemple, ne sera mme pas cur la montagne. Tandis quen Occident, Catholique ou Protestant, la mainmise a t efficace. Un juif converti lge de dix-sept ans se trouve actuellement Archevque de Paris. Il peut officier au-dessus du tombeau de Saint Louis. Un cur franais, pas bte, aprs avoir baptis un juif, a laiss cette expression: Cela fait peut-tre un chrtien de plus, mais certainement pas un juif de moins . Ceci les glises dOrient le savent et cest pour cela que leur noyautage na pas t possible.

Mais revenons L. Bertrand. Il se voulait disciple de Lavigerie et reprenait souvent dans ses crits ce programme de son matre : Nous devons faire de la terre algrienne le berceau dune grande nation, gnreuse, chrtienne, dune autre France, en un mot fille et sur de la ntre . Tout a t fait pour cela, mais, ils font des calculs et Allah est le meilleur des calculateurs .

Au cours de la guerre 1914-1948, les Musulmans avaient laiss un demi-million de morts sur les champs de bataille au service de la France. Comment en 1926 L. Bertrand leur rendit-il hommage ? Voici ce quil en dit : Le pire cest que nous navons pas pu nous dfendre tout seuls. Nous avons fait appel au Barbare. De lInde jusquau Maroc et jusquau Soudan, des noirs et des jaunes sont venus renforcer nos effectifs, endosser nos uniformes et empoigner nos fusils. Or, la plupart de ces soldats de fortune taient des musulmans. Ainsi, nous avons arm lIslam et sans le savoir, nous lavons arm contre nous . Oui ! Les cinq cents mille morts pour sauver la France, Monsieur Bertrand les hassait. Il ne sest pas trouv un crivain, un homme politique, un officier, un ancien combattant franais pour slever contre cette ingratitude envers ceux qui sont morts pour eux.

L. Bertrand ntait pas un petit crivain. De son temps, il tait lun des plus lus en France. Son ide dune Afrique latino-chrtienne tait adopte avec plus ou moins de passion, par toute lintelligence franaise.

Bien aprs sa mort, en 1940, il continuera marquer la mentalit franaise jusqu Camus ou lO.A.S. Lamour que portait Camus au village de Tipaza ntait pas fortuit. A lest comme louest dAlger, il y a des dizaines de localits au bord de la mer. Nombre dentre elles sont plus belles et plus agrables que Tipaza. Mais Tipaza avait ceci de particulier, cest que des vestiges romains existaient encore en ville, quelle avait un petit port dpoque et quaucun arabe ny habitait. Pour lui, vivre Tipaza ctait vivre en Maurtanie Csarienne et prendre un bain de latinit. Le rve ! Que lon ne simagine pas que les thses de Bertrand lui soient personnelles. De lextrme droite lextrme gauche, sur ce qui concerne les Arabes, les Franais taient daccord sur le fond. Voici une rsolution vote par le Congrs socialiste en 1902 : la mesure la plus urgente est dobliger tous les indignes ne parler que la langue franaise, y compris dans le culte musulman, dinterdire la parution de livres, journaux et affiches en arabe, de fermer les coles religieuses islamiques et en matire dinstruction, de nenvisager quun enseignement absolument professionnel, et non linstruction suprieure, qui ne peut qutre nuisible pour lindigne . On pouvait lire dans le journal La lutte sociale , organe du Parti communiste franais en Algrie, du 7 Mai 1921, le passage suivant : Les Indignes de lAfrique du Nord sont composs en majeure partie dArabes rfractaires lvolution, sociale, intellectuelle et morale . Dans le Cheminot Algrien , organe du syndicat CGTU, cest--dire communiste du 1er Avril 1928, on trouve ce passage : lindigne est un ingrat ; il est fourbe, sournois, sale, voleur, lui faire du bien, cest donner de la confiture un cochon ; lui faire du mal, cest lui apprendre se soumettre et se civiliser. Comme on le voit, lattitude de la gauche tait plus haineuse que celle de la droite. Nous avons cit Louis Bertrand comme exemple. Quand il sagissait de lIslam ou des Arabes, presque tous les crivains de lOccident et surtout les Franais, navaient que de la haine. Ds son enfance, le franais lcole, tait conditionn. Les premires leons dhistoire, lui apprendront que Charles Martel Poitiers, a sauv lEurope de la barbarie musulmane . Puis plus tard, en histoire comme en gographie, on lui parlera de LEmpire franais . Si bien que chaque petit Franais se sent un peu empereur, et se gonfle dorgueil. Il ne manque pourtant pas desprits clairs en Occident. Il leur arrive de slever contre cette mentalit, mais cest toujours individuellement, comme pour avoir la conscience tranquille. Et pourtant, nous ne disons pas une entente, mais simplement une comprhension, une estime rciproque entre les Musulmans et les Occidentaux seraient bnfiques aux deux et lhumanit.

Jusqu ce jour, il ny a pas eu un dialogue, mais des soliloques sans suite. Les quelques rencontres rassemblaient des chrtiens, qui souvent navaient rien de chrtien et qui ne reprsentaient que leurs personnes, et des musulmans souvent la solde dun pays occidental, qui eux non plus, ne pouvaient absolument rien et devaient savoir o ne pas mettre les pieds.

Si Louis Bertrand et dautres se sont chargs de conditionner lOccidental, Louis Lammens se chargera des chrtiens dOrient. Pendant quarante ans, cet homme, se disant prtre, va se dpenser pour faire har le musulman par le chrtien et, en raction de retour, le mme phnomne se produira chez le musulman. Soutenu par ladministration franaise Beyrouth, il se posera en chef incontest de lanti-Islam. Tout ce quil a crit nest quun tissu de mensonges. Certains simaginent quil tait dou dune grande rudition, avec tous les titres de livres quil donne en rfrence. Ces livres, il ne les a pas lus, mais on les a lus pour lui. Il ne se gne pas pour traduire sa manire afin que le texte confirme ce quil veut. Pour lui, sil y a eu un semblant de civilisation musulmane, ce ntait pas luvre de lIslam, mais des Omeyyades. La tradition islamique? Lune des plus grandes supercheries de lHistoire .

Le Messager dAllah surnomm : Al Amine . Un homme loyal du septime sicle, pourrait bien tre pour nous un coquin . Le changement de la qibla ? Muhammad tait sous linfluence dune nvrose, de crises hystriques. Son caractre nerveux, les tares hrditaires de sa famille, son enfance abandonne, les privations quil avait subies, permettent de croire quil y avait en lui, des vices de constitution, un manque dquilibre qui eut pour rsultat le dveloppement exagr de certains sens, les plus grossiers .

Les Mdinois offrent un repas aux mouhajirines et gorgent deux moutons. Le Messager dAllah, pour ne pas montrer une prfrence lun des donateurs sur lautre, gote une bouche de chaque paule des moutons, Lammens part en guerre contre : Ce prtendu ascte qui dvore deux paules de moutons lui seul . Puis dans un autre livre, il renchrit et dit : Cet homme capable de dvorer la file trois gigots de mouton et dy joindre tout le contenu dun couffin de dattes . Il conclut parlant de la mort du Messager : il revint sa nature primitive, si profondment sensuelle. Epaissi, engourdi par les jouissances matrielles, guett par lapoplexie, ce Salomon au petit pied ne quittera plus son srail et la cour de sa demeure qu de rares intervalles. Dsireux de jouir, aprs tant dannes de lutte, il sabandonna au courant... et se trouvait hors dtat de voir plus loin, labus des plaisirs ayant bris tous les ressorts de son nergie .

Ali ? Lauteur de Nahj el Balagh ntait, pour Lammens, quun homme mpris cause de son physique dsavantageux et de son esprit compltement born .

Omar ? Ce ntait quun peureux, un assez pauvre soldat .

Fatima ? Un laideron disgraci par la nature, maigrelette, pleurarde, Inintelligente quaucun prtendant ne se prsentait pour lpouser et Mohamed la impos Ali, comme pouse, pour sen dbarrasser .

Le deuxime rle de Lammens tait de fournir aux orientalistes de la documentation et une rfrence. Pendant un demi-sicle, ils vont lutiliser, tous ou presque tous. Cest . peine si quelques-uns dentre eux sont alls dire : Il y a peut-tre une exagration chez Lammens . Mais le contredire ou le condamner, pas un. Lide matresse de Lammens, il lexprime par cette phrase, dans son livre Le berceau de lIslam : Pourquoi le Coran est-il venu brusquement interrompre la douce influence de lEvangile sur les fils du dsert !

Voyons maintenant ce qui se serait pass, si le Coran ntait pas venu interrompre cette influence . LArabie serait devenue chrtienne, et videmment copte. Les Arabes de la presqule avaient de solides relations avec lEthiopie. Elle serait reste ce que reste ce dernier pays. Lhumanit aurait aujourdhui accumul huit sicles de retard. A Byzance, on serait encore aujourdhui discuter du sexe des anges. A Rome, les Galiles seront condamns et les Borgia seront toujours papes.

Dautres orientalistes ont crit autant dinsanits que Lammens ; Goldziher, Snouck Hurgronge ou Margohouth, mais ce qui distingue Lammens, cest quil tait prtre ; cest que, ce quil publiait avait limprimatur du Vatican. Voil ce qui est grave.En France, les tudes darabe nont commenc quassez tard. Dans les autres pays dEurope, elles ont commenc plus tard encore. Au dbut on tudiait le Coran partir de traductions latines. Traductions toujours errones. Tout a commenc vers la fin du XII sicle. Ceux qui sintressaient ces tudes taient peu nombreux. Ce fut surtout des religieux qui cherchaient travers des monstruosits dans le livre des Musulmans, puisque pour eux, ctaient la religion du diable .

La premire traduction de larabe au latin est de Grard de Crmone au 12e sicle. Puis ce fut le dominicain Albert le Grand qui habill en Arabe , explique la philosophie rationnelle Paris. Le moine Michel Scot tait Tolde en 1217 et il fit, lui aussi des traductions. De mme que le Franciscain Roger Bacon et le dominicain Raymond Lulle au 13e sicle.

Le concile gnra1 des glises, tenu Vienne en1311, recommande la cration dinstitutions Rome, Paris, Oxford et Salamanque, pour ltude de lhbreux, de larabe et du chalden. Cette recommandation naura pas de suite puis parut la traduction latine du Coran par Pierre le Vnrable de Cluny. Evidemment, cette traduction, avec commentaire, sil vous plait, navait, rien voir avec le Coran.

En 1530, Franois 1er fonde le co1lge de France avec une chaire de grec et une chaire dhbreu. Comme on le voit, il ntait pas encore question darabe ; On ntudiait, lpoque, que ce qui pouvait avoir des rapports avec le christianisme. Cinquante ans plus tard, Henri 3 cre une chaire darabe an collge de France. Quatre-vingt-deux ans aprs, cest dire en 1689, on saperut que cette chaire navait donn aucun rsultat, et on dcida denvoyer plutt six jeunes gens faire des tudes en arabe chez les Capucins Constantinople. Cinquante ans plus tard, on saperut que les six taient tous des Armniens et quaucun deux ntait revenu. On dcida alors denvoyer non plus six, mais dix, tous de parents franais.

En 1797 est fond 1Ecole Spciale des langues orientales vivantes. En 1800, Sylvestre de Saci en prend la direction. Dans cette cole, limportance premire est accorde , lhbreu, non seulement parce que la directeur est juif, mais aussi, parce que les Juifs, aprs la rvolution, tenaient le haut pav en France, et les gens dglise tenaient lhbreu pour comprendre lancien testament. La deuxime langue on importance tait le turc ; la plus grande partie du monde musulman, lpoque, dpendait de Constantinople, et ctait dans cette ville que se traitaient les affaires concernant lIslam. La troisime langue tait le persan : les grands crivains allemands avaient fait connatre la posie persane, et dans le monde des lettres on ne jurait que par Saadi et Hafiz. La quatrime langue tait larabe ; cette langue lpoque, noffrait aucun dbouch qui voulait lapprendre.

Lcole des langues orientales va ouvrir ses portes aux trangers. Cest ainsi que les Allemands Fleicher, Weil, Kosegarter et Flugel, viendront sy former, avec le bavarois Muller, le Sudois Torengerg, lItalien Peyron, le Genevois Humbert et lEspagnol Gayangos. Sur la demande du tsar, cette cole enverra certains de ses lves crs linstitut oriental de Saint Petersbourg. Elle crera aussi lcole hongroise dorientalisme, dominante juive, avec leur tte Goldziher. Sylvestre de Saci avait donn un certain lustre cette cole. Aprs sa mort, en 1838, lcole priclita. Parmi les premiers lves qui sortiront de cette cole, nous trouvons Champollion, Chizi, Abel, Remusat, Saint Martin, Quatremre, Jaubert. Plus tard sortiront Reinaud, Caussin de Perceval, de Slane, Fresnel, Kazimirski, Bdillot, Langlois, Renan, Bresnier, Cherbonneau.

Revenons 1796. Bonaparte dbarque on Egypte. Il na pu emmener avec lui que neuf traducteurs, avec leur tte Venture de Paradis, qui sera remplac , Sa mort Akka, par Jaubert. On saperut que sur les neuf interprtes quil avait emmens avec lui, deux seulement taient valables, Bonaparte dcida den former sur place, avec des autochtones qui, eux connaissaient larabe. Il recruta pour cela dans le milieu juif et chrtien, ceux qui avaient fait plus ou moins des tudes de franais. Il les intgra dans les units de mamelouks. Plusieurs dentre eux embarqueront avec larme franaise, lorsquelle quittera lEgypte.

Lorsquen 1830 les Franais dcident dattaquer Alger, ils ne pouvaient, on raflant les fonds de tiroirs, mettre la disposition de leur arme que cinq traducteurs valables, dont un Syrien, le pre Zaccar, et un Juif, ancien colonel de Mameluk, Jacob Habaibi, et dix-huit autres dun niveau quelconque. Les dix-huit taient composs de six Juifs, six anciens mameluks et six Franais.

En 1832, sur les cinq valables, il ne restera en place quun seul, le pre Zaccar. Les autres quitteront Alger, dus de navoir pas trouv ce dont ils rvaient. Ils sattendaient vivre une vie de pacha, et ils se trouvrent dans une situation toute autre. Dans Alger, mme ils ntaient pas on scurit. Quant sloigner de cinq kilomtres de la ville, il ne fallait pas y penser, moins dtre deux mille et daccepter le risque den laisser quelques-uns sur le tapis. Les attaques contre Alger, malheureusement non coordonnes, taient continuelles. Souvent la ville ntait pas ravitaille en frais et il fallait se rabattre sur le biscuit de guerre et les salaisons. Cela sans compter la haine et le mpris visibles sur les visages de presque tous les Musulmans. La peur rgnait, et tous ceux qui pouvaient rentr en France le firent.

En 1833, faisant le bilan des moyens humains dont elle disposait, larme franaise saperut quelle navait quun seul traducteur crivant en franais et en arabe, le pre Zaccar. Il y avait vingt traducteurs qui ne savaient crire que le franais et un qui ne savait crire que larabe. Il y avait un autre traducteur comptent, le Syrien Abdellah Al Hasbouni, mais il avait t nomm consul auprs de lEmir Abd El Kader Mascara.

Paris ne pouvant accder en rien la demande de son arme, lautorisa recruter comme bon lui semblait. Le recrutement se fit travers toute la Mditerrane et mme plus loin. Il ne se fit ni sur diplmes il ny en avait pas, ni sur concours personne, ntait mme de le faire passer, mais sur simple recommandation dune personnalit franaise. Alors convergea vers Alger tout aventurier sachant baragouiner un peu larabe et un peu de franais. Sans compter que pour avoir la recommandation, il fallait avoir rendu des services .

DEgypte viendront des anciens mameluks comme Pharaon et ses deux fils, Salippe, Makarius, Monty Vathan et Adellah. De Syrie, une dizaine : les deux frres Accar, les trois Roussemu, Bramemscha etc. De Grce : Dimitry, Nazo, Nicfort. De Malte : They, Thuma, et Bogo. De Bulgarie : Mayer Joseph. De Cayenne : Urbain IsmaelThomas. De Gibraltar : Abi Tebel, Levy Issao et El Bas Salomon. De Tanger : Sehousbor et Pinto. Du Liban : Chidiak Jean et Chihab Mahmoud. De Palestine : Payan, Julien et Gandolphe. De Tunis : Lombard, Aubin et Barans. De Bavire : Federman. De Prusse : Goert. DItalie : Bottari Canapas. De Sardaigne : Baxu. DAngleterre : Seignette. De Grce : Debonnemain et Calendini. De Chypre : Rey. DEspagne : Balestro. DAllemagne : Muller etc. DAlgrie on recrutera 21 Juifs : les trois frres Abucaya, Taboni, Daninos, Amar, Teboul, etc. De France, ne viendront que quatre dont un sera clbre : Lon Roche. Plus tard dIrlande viendra De Slane, qui sera suivi du Franais Quatremre et dautres qui nont pas fait parler deux.

En 1845, ils seront une centaine et cest avec ce monde que va commencer ltude de la langue arabe en France. Ils seront la base de dpart de lcole orientaliste franaise.

A la mme priode se constituait en Algrie, Sidi Bel Abbs exactement un nouveau corps darme qui prendra le nom de Lgion trangre . Lcole orientaliste est la sur jumelle de la Lgion trangre. Elles sont nes en mme temps, sur le mme sol, dans les mmes conditions de recrutement, pour le besoin et avec le mme patron, savoir larme colonialiste franaise. Elles disparatront en mme temps et pour la mme cause : elles sont devenues inutiles avec lindpendance des pays du Maghreb. Elles auront vcu dans la mme atmosphre. Pour les militaires franais, le lgionnaire ntait quun repris de justice, un vad du bagne, un sans patrie . Pour luniversitaire, les orientalistes, ne sont que les intellectuels du fourbi, du bakchich, du mchoui et de la fantasia. Luniversitaire franais ne fraternisera jamais avec les orientalistes

Jetons un coup dil sur cette centaine dindividus qui vont faire connatra, partir de 1845, non seulement la France, mais toute lEurope moins lAngleterre, ce quest la langue arabe et ce quest lIslam. Une trentaine sur les cent sont des juifs, une quarantaine viendront de vingt-deux pays diffrents et une trentaine sont franais. Mais, trs vite une vingtaine de franais quitteront ce corps. Une dizaine va sengager dans larme active et une dizaine donnera sa dmission. (Ces derniers quitteront lAlgrie et lorientalisme, dgots par ce milieu. Parmi eux, (Gauthier et Bourcet, lves de lcole des langues orientales, dans leur lettre de dmission ne se gneront pas pour dire : quils taient dgoutts de se voir donner pour collgues des individus mprisables . a ne devait pas sentir bien bon, pour que vingt jeunes sur trente, qui avaient abandonn leur pays pour une carrire, qui staient expatris, lchent tout dun coup.

Plus tard, cette quipe sera renforce par les Baussier, Kazimirski, Cherbonneau, Fagnan et De Slane. Ils donneront un peu plus de niveau aux travaux les sortant du grossier et du vulgaire. Mais ils ne pourront changer la mentalit, car la souche sur laquelle ils vont se greffer, est de la plus sale espce. Ce ne sera pas eux qui vont influencer cette cole, cest elle qui va dteindre sur eux et elle portera ses tares congnitales jusqu la fin.

En 1860, le systme sera rorganis et le travail rparti. Paris soccupera de donner des rudiments darabe, de conditionner le futur orientaliste et surtout dliminer ceux qui, par leur manire de penser, ne seront pas aptes fournir le travail que lon attend deux. Paris soccupera de la dcantation et du tri, Alger on se chargera, de faire les travaux pratiques. Cest l, loin de latmosphre parisienne avec ses ides de libert, de justices et de droit, que lorientaliste sera faonn. Cest dans un milieu domin par le racisme, le passe-droit et le mpris de lhomme, quil donnera les fruits que lon attend de lui. Chaque plante a besoin dun climat spcial pour spanouir. De plus, en chargeant Alger du travail le plus gros, on dchargerait Paris des dpenses que cela occasionne, le contribuable franais demande des comptes et pourrait tiquer, tandis que ladministration algrienne na de comptes rendre personne.

On recrutera, au compte-goutte, quelques indignes au Maghreb. Souvent consciemment, rarement inconsciemment, ils serviront dantennes au systme et ils plaideront toujours, auprs des leurs, la supriorit de lhomme occidental sur le musulman. Leur champ daction sera quelques intellectuels et les hommes de religion, les seuls, qui lpoque, taient jugs potentiellement dangereux.

A la fin du 19e sicle, lAlgrie et la Tunisie tant entirement occupes, vint le tour du Maroc. Cest sur ce pays que va se porter le gros de leffort. On crera la mission scientifique au Maroc , avec sa revue : La revue du monde musulman . Ctait lapothose des orientalistes. Pour eux lIslam na pas cinquante ans vivre. Le maraboutisme qui tait un danger, ne lest plus au contraire, il est devenu le meilleur atout entre les mains des colonialistes. Les anciens chefs de confrrie ou de zaoua, qui taient des hommes de valeur, seront morts et remplacs par leur progniture, que lon a pris soin de dvoyer. Jouisseurs et alcooliques, ils seront la docilit mme avec ladministration. Tels fils de cheikhs de zaoua dont le pre quittait prcipitamment le village pour ne pas voir un roumi , lorsque la vigile lui en annonce larrive, sera un pilier des bars dAlger. Pour plus de sret on crera mme de nouvelles confrries comme El Amaria. Le Chatelier, directeur de la Revue du monde musulman , pourra crire en juin 1914, dans une introduction sur Lammens, ce qui suit : le pre Lammens nous montre par son savant rquisitoire contre lIslam, tout ce quon peut tirer de la mthode. Il reprend, dans la forme la plus moderne, lancienne lutte du christianisme absolu contre lIslam condamn, ladversaire touche des paules. Aucun doute, la victoire de la vraie religion contre la fausse religion est complte .. (Vraie religion, pour Le Chatelier cest le christianisme). Comme on le voit, le directeur de cette revue est viscralement antimusulman. Son bras droit, lpoque tait Massignon, membre du comit de rdaction de la revue.

Puis viendra la Premire Guerre mondiale. Les musulmans, tous les musulmans du monde, vont tre manipuls dune faon telle que leur comportement sera la plus grande honte de leur histoire. Ils en subissent les squelles jusqu ce jour. Les orientalistes allemands arriveront mettre derrire leur pays une partie du monde musulman. Les orientalistes anglo-franais mettront lautre partie avec eux, et on assistera une guerre o des musulmans tueront dautres musulmans, ou se feront tuer, pour le bnfice de ceux qui sont leurs ennemis. Les Musulmans y laisseront plus dun million de morts, sans compter la perte de lindpendance pour des pays qui taient plus ou moins libres. Les Anglo-franais auront gagn la guerre. Ils en profiteront pour se partager le territoire de lIslam et pour lamputer dune partie au bnfice des Juifs. Si les Allemands avaient gagn la guerre, ils auraient agi de la mme manire envers le monde musulman. Encore, si les ntres avaient agi comme mercenaires, mme pas ! Le mercenaire exige de fortes sommes. Il joue sa vie contre de largent comptant. Les Musulmans se sont contents de promesses, comme ai les Europens avaient une parole.

En 1920 commencent les annes fastes pour lOccident, surtout pour les Anglais et les Franais. Tout ce qui valait la peine dtre conquis le sera. Pas une mouche ne peut se poser sans autorisation de lun des deux pays. Le gnral Gouraud, pourra venir donner un coup de pied au tombeau de Salah Eddine Al Ayyoubi et sexclamer : Saladin nous voici ! . La presse mondiale reprendra cette expression. Il ny avait plus qu maintenir la situation telle quelle tait. Larme aura son rle, les orientalistes le leur.

Mais, au Maghreb, dans le Rif marocain, ils auront faire un imprvu. Abdelkrim El Khattabi, le grand Abdel Karim, va leur faire passer des sueurs froides dans le dos pendant cinq ans. Il mettra larme espagnole on droute. Larme franaise viendra la rescousse avec quatre cent mille hommes, sous les ordres du Marchal Ptain. Les orientalistes seront appels apporter leur concours. Ils seront parpills travers tout le monde musulman pour discrditer Abdel Karim on utilisant leurs amis et largent. Cest ainsi quaucune aide musulmane ne parviendra aux combattants du Rif. Mme les produits des qutes disparatront encours de route, sans laisser traces. Lintox et tous les moyens psychologiques seront utiliss par les orientalistes, avec leur tte leur lve, devenu matre : Lyautey, pour dcourager et dmoraliser les tribus du Rif. Vaincu par deux grandes armes occidentales, fortes elles deux de 800.000 hommes, AbdelKarim dposera les armes. Entre temps, il aura rendu la jeunesse musulmane de lpoque lespoir et au monde musulman une dignit.

Mais Allah ne veut pas que les mcrants teignent Sa lumire avec leur bouche . La mme anne, 1928, celui qui l-bas, au fond du Nedj guerroyait et que lon ne dsignait que comme un chef de bande de bdouins, Abdelaziz Ibn Soud, allait librer le Hedjaz de limpuret et rtablir la loi dAllah Mekka et Mdina, au moment o elle nallait plus tre applique Istanbul. Pour le priver de ressources, les Franais interdiront le plerinage leurs ressortissants musulmans pendant huit ans. Mais Allah, dans une situation identique ne nous avait-il pas dit Si vous craignez une baisse de revenus, Allah vous enrichira ! (Attawba 28).

Puis vint la Deuxime Guerre mondiale. Cette fois-ci, en gnral les Musulmans ne marcheront pas. Au Maroc et on Tunisie, le service militaire obligatoire nexistait pas. En Algrie, o il tait obligatoire, les Franais, sur le conseil des spcialistes ont prfr ne pas appeler les jeunes Algriens sous les drapeaux. On ne leur faisait pas confiance. La monte du nationalisme les a mis en garde. Dans les trois pays, on recruta sur engagement volontaire. Qui sest engag ? Celui qui voyait lhorizon bouch, celui que la misre et le chmage poussaient bout. En sengageant il tait sr dtre habill, de recevoir rgulirement sa gamelle de soupe, en plus lespoir quune fois la guerre termine, il aura un emploi rserv de cad, garde champtre ou garde barrire. Il savait quil pouvait y laisser la vie, mais cette vie ne valait pas la peine dtre vcue. A la fin de la guerre, ils furent dmobiliss, avec un coup de pied. Tu as servi, jai pay, nous sommes quittes. Rien nest plus impudique que dentendre certains dentre eux dire : nous avons aid librer lEurope du Nazisme . Si tu sais librer, libre-toi toi-mme. Il est encore plus malheureux de lire dans des crits, manant de patriotes que les anciens combattante de 1914-1918, avaient connu la libert, le droit et la justice pendant leur sjour en France, ont contribu au rveil du nationalisme leur retour . Premirement ils nont connu ni la libert ni le droit, ni la justice ; ils nont connu que les lieux de dbauche et lalcool. Deuximement, ils ont t toute leur vie les laquais du colonialisme. Leur organisation, Dar el Askri qui existait dans toutes les villes du Maghreb, tait le nid du mouchardage et le plus efficace systme de dculturation.

Portant sur des burnous ou des vestes triques leur dcoration, ils taient de toutes les manifestations colonialistes et ce jusquaux indpendances des trois pays.

En 1943, les spcialistes recommandent la dposition du Bey Moncef. Il avait une notion de la dignit et un amour de son peuple qui nallaient pas avec la politique des colonialistes.

En 1954, les orientalistes feront le rassemblement de tout ce quils avalent comme laquais dans le Maghreb arabe: chefs de confrries, chefs de tribus, fqihs en peau de lapin pour leur faire dposer Sa Majest Mohamed V. Seul Massignon, ayant tir leon de la dposition de Son Altesse Moncef Bey, sera contre cette entreprise. Devenu vieux, il ne sera pas cout. Il avait remarqu quaprs la dposition du Bey, le peuple tunisien tait devenu plus combatif, mieux organis et plus uni. Les quelques intellectuels sur qui comptaient les Franais, se sont dmontiss deux-mmes, et le peuple tunisien qui leur donnait auparavant une certaine considration, sest mis les mpriser. Massignon avait vu juste.

Cest ainsi que ce qui ntait, avant la dposition de Sa Majest Mohamed V, que des ruisseaux, allait devenir un torrent qui emportera le systme colonialiste. Ni les chefs de tribus, de confrries, ni les fqihs la noix, ni larme colonialiste narriveront lendiguer.

Le 1er Novembre 1954, cest le peuple algrien qui entreprend sa guerre de libration. Cette fois on fera appel, non seulement aux orientalistes, mais galement aux ethnologues et aux sociologues. Lon verra reprendre du service les anciens spcialistes des affaires musulmanes de Tunisie comme du Maroc, sous la direction du gnral Parlange, ce grand criminel, qui partout o il passa, a laiss un charnier de femmes et denfants. On en dcouvre encore, et rien nest aussi bouleversant que de tomber sur le squelette dune femme serrant dans ses bras le squelette dun enfant.

Les lves de Massignon : Vincent Monteil, Germaine Tillon, Lucien Paye, les Servier etc. seront appels la rescousse. Ils formeront le brain-trust de Soustelle, gouverneur gnral de lAlgrie.

Le 20 Aot, jour anniversaire de la dposition de Sa Majest Mohamed V, Zirout Youcef avec les moujahidines du Nord constantinois, par une opration gniale, va mettre parterre tous leurs plans et tous leurs efforts. Il obligera les Franais se dmasquer et Soustelle, chef de tous ce monde, montrer son vrai visage au peuple algrien. Leur opium nayant pas servi, ils montreront le bton. Zirout crera le point de non-retour. Oui ! Zirout le fils du peuple, rduira , nant en une journe les plans et les stratagmes de ces messieurs sortis des grandes coles, spcialistes dun tas de disciplines, aids par des gnraux qui une fois runis totalisent la centaine dtoiles.

Beaucoup de Musulmans se laissent prendre et accordent une sympathie , des hommes qui ont pris des responsabilits dans le systme colonialiste, et qui, un moment dmissionnent, parce quils ne partagent plus lopinion de leur gouvernement. Ces hommes ont t daccord avec leur gouvernement sur le fond, cest--dire le maintien de la domination de leurs pays sur le Maghreb. Ils ont dmissionn cause de la manire, car ils taient conscients que cest ainsi que la France allait perdre sa domination du Maghreb. Sils condamnaient le bton, ils prconisaient lopium. Mais leur but tait le mme que celui du plus colonialiste des colonialistes, ils taient en dsaccord avec lui sur la manire, mais ils taient daccord sur le fond. Tietgen par exemple, qui tait la tte de la commission de sauvegarde des droits de lhomme en Algrie, a dmissionn. Mais quand ? Non pas quand il savait que dix Algriens taient morts sous la torture, non pas quand ils taient cent ni mille, ni cinq mille, mais quand le chiffre est arriv sept mille et que le sept millime ne sappelait pas Ahmed mais Maurice. Six-mille-neuf-cent-quatre-vingt-dix-neuf cadavres dAlgriens nont pas fait bouger Monsieur Teitgen mais le sept millime ntant plus un Ahmed, il sest aperu quil avait une conscience.

Il ny a aucune diffrence entre le ministre de lintrieur de lpoque, qui ordonne aux gendarmes de liquider les Moujahidines prisonniers, parce quils risquent de svader et de rejoindre le maquis, le lgionnaire qui loge une balle dans la tte dun jeune de quinze ans, pour ne pas lavoir contre lui dans deux ans , ou le para qui courageusement plante son poignard dans le cur dune femme arabe ; car elle ne peut enfanter que des fellaghas . Pour tous lArabe nest inoffensif que mort.

Cr pour le renseignement et la manipulation, lorientalisme ne pouvait faire que cela. Il na pas t cr pour la culture. Les belles lettres ntaient pas pour lui un but, mais un moyen pour sintroduire dans les milieux musulmans, pour y collecter le renseignement. Quel tait le chef dune arme colonialiste qui navait pas son orientaliste ? Lyautey, llve et le matre des orientalistes tait leur idole. Il tait pour la pntration pacifique , tout comme son lve Vincent Monteil, mais dans lautre sens. Il a fait couler le moins de sang, nous dira-t-on, cela ne lempche pas davoir ravi au Maroc sa souverainet

Avant de disparatre, la lgion trangre enfantera les parachutistes, et avant de disparatre, lorientalisme aura donn naissance la coopration et aux techniciens. Le regrett Docteur Khaldi, en 1963, en voyant dbarquer dans les pays du Maghreb ce flot de confrenciers et de cooprants avait vu juste en crivant : les chaires dorientalisme dafricanisme, de sinologie ou dhindouisme, ntaient que des laboratoires o slaborait la pense qui devait servir mietter, dsorienter, abtir pour mieux domestiquer les peuples arabe, africain, chinois ou hindou .

La libration des peuples dAfrique et dAsie, en relguant aux oubliettes de lhistoire les spcialistes et leur alchimie, va faire apparatre toute une floraison de techniciens . Plus loin, Khaldi nous dcrit ce technicien quil surnommait lindigniste , : il nest pas comme son prdcesseur lorientaliste un homme de chaire ou de laboratoire. Il opre sur le terrain, parcourt le pays, donne des confrences, des interviews, des consultations. Il prend contact avec les dirigeants, peu importe quils soient monarchistes, rvolutionnaires ou autocrates, Il ne nglige surtout pas la base. Il a des relations et souvent des complicits dans le pays o il se rend. Et il conclut : nos propres problmes doivent relever de nous-mmes, et si nous ny prenons garde, nous aurons bientt la surprise de voir des prdicateurs dun genre nouveau, jusque dans nos mosques .

En effet, quand les trois pays du Maghreb devinrent indpendants, ils se trouvrent face un besoin de techniciens angoissant. Ce ntait pas le systme colonialiste qui leur avait permis den former. Les trois pays donnrent la priorit lenseignement. Si lon pouvait, plus ou moins, se dbrouiller pour le primaire, il nen tait pas de mme pour le secondaire o les effectifs taient trs faibles, surtout que nombre de professeurs ont t utiliss dans les postes clef de ladministration. On se rabattit sur les pays arabes frres, et vite on saperut quils taient loin de pouvoir satisfaire la demande en quantit et surtout en comptence. Ils passaient leur temps faire lloge de leur pays respectifs et dblatrer sur les autres. Ils sont arrivs se rendre ridicules, mme auprs de leurs lves. Il est vrai quun petit nombre sauvera lhonneur et mit tout son cur louvrage.

On se tourna vers la France, seul pays susceptible de fournir des enseignants comptents et en nombre. Il est remarquer que les pays francophones, comme la Belgique, la Suisse, le Canada, se rcusrent. Il fallait laisser la chasse garde qui de droit, solidarit occidentale oblige.

LIslam agressPar Hadroug Mimouni Editions Enal 1990.