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ÉCOLE DU LOUVRE Marina GROSS-HOY L’Introduction d’un discours au sein de l’exposition Le cas des audioguides et applications mobiles Mémoire de recherche (2 de année de 2 e cycle) en muséologie présenté sous la direction de M me Marie-Clarté O’NEILL Septembre 2014 Le contenu de ce mémoire est publié sous la licence Creative Commons CC BY NC ND

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Ce mémoire de recherche porte sur les audioguides et les applications qui permettent d’introduire un discours pour le visiteur, au sein des expositions temporaires. Le travail réalisé consiste en une analyse de ces outils dans trois expositions temporaires : « Le printemps de la Renaissance » au Musée du Louvre, « Désir et Volupté à l’époque Victorienne » au Musée Jacquemart-André, et « La Renaissance et le Rêve » au Musée du Luxembourg. L’objectif est d’étudier comment les objectifs fixés pour ces outils influencent leur production, comment leurs contenus sont présentés, quel est le rôle de ces dispositifs dans la communication de l’exposition, et de savoir si ces outils atteignent ou non leurs objectifs.

TRANSCRIPT

  • COLE DU LOUVRE

    Marina GROSS-HOY

    LIntroduction dun discours au sein de lexposition

    Le cas des audioguides et applications mobiles

    Mmoire de recherche (2de anne de 2e cycle)

    en musologie prsent sous la direction

    de Mme Marie-Clart ONEILL

    Septembre 2014

    Le contenu de ce mmoire est publi sous la licence Creative Commons

    CC BY NC ND

  • 2

    LINTRODUCTION DUN DISCOURS AU SEIN DE LEXPOSITION : LE CAS DES AUDIOGUIDES ET APPLICATIONS MOBILES

  • 3

    COLE DU LOUVRE Mmoire de recherche

    en musologie Septembre 2014

    LINTRODUCTION DUN DISCOURS AU SEIN DE LEXPOSITION :

    LE CAS DES AUDIOGUIDES ET APPLICATIONS MOBILES par Marina Gross-Hoy

    RESUME

    Ce mmoire de recherche porte sur les audioguides et les applications qui

    permettent dintroduire un discours pour le visiteur, au sein des expositions

    temporaires. Le travail ralis consiste en une analyse de ces outils dans trois

    expositions temporaires : Le printemps de la Renaissance au Muse du Louvre,

    Dsir et Volupt lpoque Victorienne au Muse Jacquemart-Andr, et La

    Renaissance et le Rve au Muse du Luxembourg. Lobjectif est dtudier

    comment les objectifs fixs pour ces outils influencent leur production, comment

    leurs contenus sont prsents, quel est le rle de ces dispositifs dans la

    communication de lexposition, et de savoir si ces outils atteignent ou non leurs

    objectifs.

    MOTS-CLES Applications mobiles

    Audioguides

    Expositions temporaires

    Muse Jacquemart-Andr

    Muse du Louvre

    Muse du Luxembourg

    Mdiation culturelle

    Entretiens

  • 4

    Remerciements

    Je souhaite ddier ce travail la mmoire dAlice.

    Je remercie toutes les personnes qui ont rendu possible ce mmoire de

    recherche :

    Madame Marie-Clart ONeill, chercheuse en musologie associe lUniversit

    de Montral, charge d'enseignement l'Ecole du Louvre et l'Institut national du

    patrimoine, dlgue aux "Meilleures pratiques en ducation musale" au sein du

    bureau ICOM CECA, ainsi que Madame Marina-Pia Vitali, sous-directrice de la

    mdiation dans les salles au Muse du Louvre et Madame Colette Dufresne-Tass,

    professeur titulaire l'Universit de Montral, dlgue la recherche l'ICOM

    CECA, pour leurs aperus de la mthodologie, leur disponibilit et leurs conseils ;

    Monsieur Nicolas Sainte Fare Garnot, conservateur du Muse Jacquemart-Andr

    et commissaire de lexposition Dsirs et Volupt lpoque Victorienne , Monsieur

    Marc Bormand, conservateur en chef au dpartement des Sculptures du Muse du

    Louvre et commissaire de lexposition Le printemps de la Renaissance , Madame

    Juliette Le Taillandier de Gabory, responsable du dveloppement des publics et de la

    programmation culturelle au Muse du Luxembourg, Madame Aude Gobet, charge

    de programmation au Service ducation au Muse du Louvre et Madame Graldine

    Gauvin, directrice de production des outils multimdias et musographie chez

    Sycomore, pour leur accueil et les entretiens qui m'ont t accords ;

    Madame Sverine Muller pour une relecture attentive de ce document pour la

    langue ;

    Madame Melissa Gross et Monsieur Mathias Labeyrie pour leur soutien et leurs

    encouragements.

    Et Michael DePasquale

  • 5

    Sommaire

    REMERCIEMENTS ......................................................................................................................................... 4

    AVANT-PROPOS ............................................................................................................................................ 6

    INTRODUCTION .............................................................................................................................................. 7

    CHAPITRE 1: CADRE DE LA RECHERCHE ............................................................................................ 9

    I. PRESENTATION DES TECHNOLOGIES PORTATIVES DANS LES MUSEES ..................... 9 A. Bref historique de la prsence des audioguides et applications mobiles dans les muses ............. 10 B. Ltat actuel des audioguides et applications mobiles dans les muses ............................................. 12

    1. Objectifs et publics ................................................................................................................................... 12 2. Contenus et services ............................................................................................................................... 14 3. Impact sur la visite ................................................................................................................................... 19

    II. LE PARTI PRIS DE LA RECHERCHE ......................................................................................... 23

    CHAPITRE 2: LA METHODOLOGIE DE LA RECHERCHE ................................................................. 25

    I. CHOIX ET CONCEPTION DE LOUTIL DANALYSE ................................................................. 25

    CHAPITRE 3: PRESENTATION ET ANALYSE DES ETUDES DE CAS ........................................... 37

    I. MUSEE JACQUEMART-ANDRE : DESIRS ET VOLUPTE ................................................ 37 A. Le contexte de loutil : Prsentation de lexposition ................................................................................ 37 B. Les objectifs pour les contenus audio et leur production ....................................................................... 43 C. Le dispositif rsultant ................................................................................................................................... 46 D. Loutil dans lespace : les relations avec les autres lments de lexposition .................................... 54 E. Synthse de lanalyse .................................................................................................................................. 68

    II. MUSEE DU LOUVRE : LE PRINTEMPS DE LA RENAISSANCE .................................... 72 A. Le contexte de loutil : Prsentation de lexposition ................................................................................ 72 B. Les objectifs fixs pour les contenus audio et leur production .............................................................. 80 C. Le dispositif rsultant ................................................................................................................................... 83 D. Loutil dans lespace : les relations avec les autres lments de lexposition .................................... 93 E. Synthse de lanalyse ................................................................................................................................ 108

    III. MUSEE DU LUXEMBOURG : LA RENAISSANCE ET LE REVE .................................. 111 A. Le contexte de loutil : Prsentation de lexposition .............................................................................. 111 B. Les objectifs fixs pour les contenus audio et leur production ............................................................ 117 C. Le dispositif rsultant ................................................................................................................................. 119 D. Loutil dans lespace : les relations avec les autres lments de lexposition .................................. 128 E. Synthse de lanalyse ................................................................................................................................ 141

    CHAPITRE 4: SYNTHESE DES RESULTATS ...................................................................................... 143

    I. CONCEPTION ................................................................................................................................. 143 II. RAPPORTS AVEC LEXPOSITION ............................................................................................ 145 III. EDUCATION .................................................................................................................................. 149

    CONCLUSION ............................................................................................................................................. 154

    BIBLIOGRAPHIE ......................................................................................................................................... 155

  • 6

    Avant-propos

    Depuis trois ans, mon intrt sest port sur lexprience du visiteur au cours de sa

    visite du muse. Il mimporte particulirement de comprendre comment les muses

    communiquent un contenu leurs visiteurs et comment ensuite ces derniers

    comprennent ce message.

    Ma recherche de premire anne de deuxime cycle lEcole du Louvre

    comprenait une analyse structurelle et une tude dimpact de lexposition Fra

    Angelico et les matres de la lumire au Muse Jacquemart-Andr. Le but tait de

    dterminer si les objectifs fixs par le conservateur du Muse pour lexposition

    taient compris par le visiteur et comment ces messages taient communiqus.

    Quarante-cinq visiteurs de lexposition ont particip cette tude sous la forme

    dentretiens, ainsi que deux exercices danalyse visuelle.

    Le mmoire de recherche ralis au cours de cette anne se focalise non pas sur

    lexprience du visiteur, mais sur un seul outil, parmi la multitude des outils de

    communication prsents au sein dun muse. Il vise tudier les audioguides et les

    applications mobiles proposes par les muses dans le cadre de leurs expositions

    temporaires. Je suis passionne par le potentiel de ces dispositifs de mdiation dans

    les muses car ils peuvent idalement faciliter une interaction approfondie entre le

    visiteur et les uvres. Ils prsentent une opportunit unique pour duquer le regard

    et stimuler limagination du visiteur.

  • 7

    Introduction

    Comment dfinir les dispositifs portatifs numriques ? Selon la Direction des

    muses de France, laudioguide est un outil individuel sonore daide la visite qui

    permet aux visiteurs de recevoir des complments dinformation sur les uvres

    exposes et le btiment lors de lexposition permanente ou temporaire du

    muse . Mais les technologies actuelles permettent aux muses de proposer des

    offres qui dpassent la forme classique des audioguides comme les guides

    multimdia ou les applications mobiles, par exemple. Ces outils ne sont plus

    seulement sonores, mais ils peuvent aussi proposer des images, des textes, des

    vidos et mme des jeux interactifs. Toutes ces nouvelles technologies partagent les

    qualits dtre mobiles, numriques et personnelles1.

    Le muse, selon le Conseil international des muses, acquiert, conserve, tudie,

    expose et transmet le patrimoine matriel et immatriel de lhumanit et de son

    environnement des fins d'tudes, d'ducation et de dlectation2 . Lexprience du

    visiteur est un lment inhrent au muse. Les nouvelles technologies permettent

    aux muses dimaginer la cration de nouvelles expriences de visite et denrichir

    celles qui sont dj familires3, dans le but de chercher atteindre ces objectifs si

    fondamentaux.

    Lavenir du numrique est un sujet dactualit dans les muses. En 2013,

    Bloomberg Philanthropies a effectu un don de quinze millions de dollars cinq

    institutions culturelles amricaines, savoir le Metropolitan Museum of Art, le

    Museum of Modern Art, le Jardin botanique de New York, le Guggenheim Museum et

    lArt Institute of Chicago, pour amliorer laccueil numrique de leurs visiteurs, en

    particulier travers le remplacement des audioguides traditionnels par de nouveaux

    outils mobiles utilisant des technologies de pointe4. Le Metropolitan Museum of Art a

    recrut en 2013 son premier directeur des activits numriques. Les rflexions sur

    les offres numriques sont au premier plan dans les muses aux Etats-Unis comme

    en Europe.

    1TALLON Loc Digital technologies and the museum experience: handheld guides and other media, AltaMira

    Press, 2008, p. xviii. 2 Site Web de lICOM : http://archives.icom.museum/definition_fr.html 3 BRADBURNE James M, Foreward dans Digital technologies and the museum experience : handheld

    guides and other media, 2008, p. ix. 4 Site Web du Bloomberg Philanthropies : http://www.bloomberg.org/program/arts/digital-engagement/

  • 8

    Si le discours communiqu par lexposition travers les objets a dj t le sujet

    de nombreuses publications, notamment de Jean Davallon, le rle du contenu des

    outils numriques dans la visite musale mrite la mme attention. Il serait dommage

    que les muses exercent un contrle strict sur les lments classiques des

    expositions comme la musographie-scnographie, les crits sur les murs, les

    vitrines, mais beaucoup moins sur les nouvelles technologies, avec qui interagit

    pourtant une grande proportion des visiteurs5.

    Lobjectif de ce mmoire est de proposer des cas pratiques dvaluation des

    contenus des nouvelles technologies en tant que discours introduits au sein de

    lexposition.

    Dans un premier temps les publications et des exemples concrets dtudes

    ralises sur ces outils sont prsents dans le but de dfinir le cadre de la recherche

    et de proposer un aperu de ltat actuel de lutilisation de ces technologies dans les

    muses. La mthodologie de recherche et les outils choisis pour cette tude sont

    ensuite exposs. Trois tudes de cas approfondies doutils numriques et leurs

    contenus sont prsentes pour analyser thoriquement leur rle dans les

    expositions. Enfin, les rsultats obtenus sont examins pour en retirer des enjeux

    concernant les contenus audio dans les muses.

    5 TALLON Loc Digital technologies and the museum experience: handheld guides and other media, p. xx.

  • 9

    CHAPITRE 1: CADRE DE LA RECHERCHE

    I. PRESENTATION DES TECHNOLOGIES PORTATIVES DANS LES MUSEES

    La quantit de recherche rigoureuse, accessible et publie sur les technologies

    portatives dans les muses est relativement maigre6. Cela est partiellement d au fait

    que les technologies elles-mmes ne sont apparues que dans les annes 1950. Une

    raison supplmentaire ce manque des ressources disponibles est que les

    producteurs initiaux des technologies portatives taient des entreprises

    commerciales, et non des muses. Dans cet environnement comptitif, le partage

    des rsultats dtudes aurait pu avoir des consquences ngatives sur le

    dveloppement de lactivit de ces entreprises7. Dans le contexte actuel, les tudes

    universitaires sur ces technologies ont ouvert le champ de la recherche et les

    muses rejoignent ce mouvement dchange dides et de connaissances8. Les

    publications et travaux portant sur la visite commente par les contenus audio

    peuvent tre classs dans les catgories suivantes9 :

    Les crits concernant les technologies ;

    Les crits proposant des conseils sur la cration des contenus audio ;

    Les crits sur la place des contenus audio dans les muses ;

    Les crits sur lapprciation des systmes.

    Ces travaux, ainsi que des exemples doutils actuellement proposs dans les

    muses, seront examins.

    6 TALLON Loc Digital technologies and the museum experience: handheld guides and other media, p. xix. 7 Ibid. 8 Ibid, p. xxi. 9 GAVAUD Anne Sophie, Expriences et attentes des utilisateurs de l'audioguide adulte du muse Cond

    Chantilly. Mmoire d'tude : Paris, Ecole du Louvre : sous la direction de Marie Clart O'Neill, Charlotte Drah, Claire O'Neill : 2008, p. 17-19.

  • 10

    A. Bref historique de la prsence des audioguides et applications mobiles dans les muses

    1. Audioguides Les dispositifs ont subi beaucoup dvolutions et dinnovations depuis leur arrive

    en 1952, par exemple10 :

    La premire technologie portative utilise dans un muse est apparue en

    1952 au Stedelijk Museum Amsterdam sous la forme de visites

    ambulatoires ondes courtes11. Le visiteur navait pas besoin de choisir

    quel commentaire couter, le dispositif permettait simplement de saisir les

    ondes courtes du contenu audio quand le visiteur tait proximit, le

    fonctionnement tait proche de celui dune radio.

    Dans les annes 1970 dans huit villes nord-amricaines, un dispositif

    proche dun Walkman Sony contenant des pistes audio prenregistrs a t

    propos au cours de lexposition Treasures of Tutankhamen , et a t

    utilis par plus d trois millions de visiteurs ;

    En 1993, le Muse du Louvre a propos un outil numrique pour ses

    collections permanentes o les visiteurs pouvaient accder aux contenus

    audio dans lordre de leur choix ;

    LExperience Music Project Seattle a t pionnire en 1998 en proposant

    un dispositif portatif multimdia pour la visite du muse.

    Loc Tallon et Kevin Walker12, Clotilde Dup13 et Elise Tardy14, parmi dautres,

    dressent plus profondment dans leurs publications lhistorique des systmes

    daudioguidage et les diffrentes technologies actuelles des audioguides.

    10 TALLON Loc Digital technologies and the museum experience : handheld guides and other media, p. xiv. 11 En anglais : Short-Wave Ambulatory Lectures. 12 TALLON Loic et WALKER Kevin, Digital Technologies and the Museum Experience: Handheld Guides and

    Other Media, 2008. 13 DUPE Clothilde, L'Audioguide comme outil de construction de sens : tude de l'impact de l'audioguide de

    l'exposition "La grande parade, portrait de l'artiste clown" sur les visiteurs frquents. Mmoire de recherche : Paris, Ecole du Louvre : sous la direction de Marie Clart O'Neill, Colette Dufresne Tass : 2005.

    14 TARDY Elise, Audioguide : le patrimoine en toute libert : Centre national de ressources du tourisme et du patrimoine rural, 2006.

  • 11

    Laudioguide est actuellement un outil prsent dans une majorit des grands et

    petits muses travers le monde15. Il rend les collections permanentes et les

    expositions temporaires accessibles aux publics qui ne bnficient pas totalement

    des autres outils daides la visite, parmi eux se trouvent les visiteurs prfrant

    couter plutt que lire des informations, les visiteurs trangers, les malvoyants ou les

    enfants.

    2. Applications mobiles La croissance de la possession de Smartphones a eu un impact sur les muses et

    leurs offres de mdiation. Quand les visiteurs sont venus au muse avec les

    premiers tlphones portables la fin des annes 1990, les institutions culturelles

    taient hostiles cette technologie16. Lutilisation des tlphones portables a t

    dcourage, voire interdite.

    Aujourdhui lattitude des muses envers ces appareils est plus positive. Les

    institutions culturelles commencent saisir cette opportunit en termes de mdiation,

    en offrant une large gamme dapplications mobiles avec des contenus ddis.

    Les applications mobiles sont des logiciels que lon tlcharge sur des

    plateformes uniques chaque systme dexploitation. Elles consistent en un logiciel

    qui nest pas prsent sur le tlphone au moment de lachat, que lon choisit de

    tlcharger ultrieurement via une connexion internet ou tlphonique17 . Elles

    permettent laccs des contenus et des services.

    La proportion de personnes qui possdent un tlphone portable ayant des

    capacits qui dpassent les simples fonctions tlphoniques devient de plus en plus

    importante. En France, lAutorit de Rgulation des Communications lectroniques

    et des Postes (ARCEP) a estim au premier semestre 2014 quune personne sur

    deux en France utilise des services disponibles sur les rseaux mobiles de troisime

    gnration (3G), un pourcentage qui augmente tous les ans18. Selon une tude de

    public du Victoria & Albert Museum Londres en 2012, le nombre de visiteurs

    15 WETTERLUND Kris et SAYRE Scott, 2009 Art Museum Education Programs Survey. Mars-Avril, 2009.

    http://www.museum-ed.org/wp-content/uploads/2010/08/2009medprogsurvey.pdf 16 DEHON Cllia, Le tlphone portable, nouvel outil de mdiation culturelle dans les institutions musales

    franaises. Mmoire de Master 1 Conception et direction de projets culturels : Paris, Universit de Paris 3 Sorbonne Nouvelle : sous la direction de Mme Ccile Camart : 2011, p. 18-22.

    17 Ibid., p. 31. 18 Observatoire trimestriel des marchs de communications lectroniques en France, 1e trimestre 2014,

    rsultats dfinitifs, Les actes de lARCEP, juillet 2014, p.19.

  • 12

    possdant un Smartphone a augment de 137% depuis 201019, et environ un quart

    des visiteurs qui navaient pas un Smartphone cette date ont dclar vouloir en

    acheter un dans lanne qui suivait.

    Dans ltude intitule Museums & Mobile Survey20 ralise en 2013, enqute

    portant sur les stratgies en termes de technologies mobiles de 551 muses et

    institutions culturelles aux Etats-Unis, au Canada et en Europe, la majorit des

    participants (68%) offraient des applications mobiles, ou avaient le projet de

    dvelopper une application dans lanne qui suivait. Dans le contexte actuel, offrir

    une application mobile donne au muse un aspect moderne et dynamique21 , en

    faisant de lapplication un outil marketing.

    B. Ltat actuel des audioguides et applications mobiles dans les muses

    Selon ltude intitule Art Museum Education Programs Survey, une enqute

    portant sur une centaine de muses dart amricains en 2009, plus de la moiti des

    muses dart proposaient cette date une visite commente via un dispositif portatif

    ou sur un tlphone portable22. Les rsultats de ltude estiment que ces outils sont

    utiliss par plus que trente-cinq millions de visiteurs chaque anne23. Ces dispositifs

    sont trs prsents dans le contexte musal et mritent donc dtre analyss.

    1. Objectifs et publics Les contenus audio ne peuvent pas rpondre aux besoins de chaque personne,

    en grande partie parce que les visiteurs interagissent diffremment avec les outils

    19 Understanding the Mobile V&A Visitor, Automne 2012, Fusion Research & Analytics LLC et Frankly,

    Green + Webb Ltd, p. 6, http://www.vam.ac.uk/__data/assets/pdf_file/0009/231975/V-and-A-Mobile-Visitor-Survey-Report-FINAL-16-Jan-.pdf?utm_source=vam.ac.uk&utm_medium=link&utm_content=msrtxt&utm_campaign=blg

    20 TALLON Loc, Mobile Strategy in 2013: an analysis of the annual Museums and Mobile Survey. Mars, 2013. http://www.museumsmobile.com/about/survey/

    21 DEHON Cllia, Le tlphone portable, nouvel outil de mdiation culturelle dans les institutions musales franaises, 2011, p. 20.

    22 WETTERLUND Kris et SAYRE Scott, 2009 Art Museum Education Programs Survey. Mars-Avril, 2009. http://www.museum-ed.org/wp-content/uploads/2010/08/2009medprogsurvey.pdf

    23 TELLIS Chris, Multimedia Handhelds : One Device, Many Audiences, in Museums and the Web 2004 : Proceedings, ed David BEARMAN et Jennifer TRANT (Toronto : Archives and Museums Informatics, 2004), www.archimuse.com/mw2004/papers/tellis/tellis.html

  • 13

    proposs. Il faut donc crer une varit dapproches diffrentes permettant dinteragir

    avec lexposition24.

    Dans lenqute Museums & Mobile Survey de 2013, lobjectif le plus souvent

    donn par les muses pour la cration dapplications mobiles tait daider le visiteur

    simpliquer dans le muse, et le moins souvent donn de dgager des bnfices25.

    Les publics cibls sont les visiteurs qui cherchent vivre une exprience plus

    approfondie et les jeunes adultes entre 18-35 ans. Et mme si les technologies

    changeaient beaucoup dun muse lautre, lenqute suggre que les objectifs des

    muses pour ces outils de mdiation restaient les mmes.

    La grande tendance qui prvaut la cration dune majorit des outils portatifs

    dans les muses est de rendre les collections accessibles aux publics qui ne se

    servent pas des autres aides la visite autonome, pour des raisons de handicap,

    dge ou de culture. Les outils et les contenus sont conus pour des publics

    spcifiques, il ny pas une approche unique pour tous les visiteurs. Cela a pour effet

    de rendre une collection accessible un public qui nest pas vis par les autres outils

    de mdiation, ou damliorer lexprience des publics qui ont des besoins ou des

    intrts spcifiques. En offrant des outils ddis des visiteurs diffrents, les

    muses dclarent que tout visiteur est le bienvenu dans leurs galeries.

    a. Les publics cibls

    Le grand public reprsente le destinataire le plus souvent cibl par ceux qui

    conoivent ou qui proposent des audioguides26 . Et cela comprend le public

    touristique tranger, qui utilise les offres audio dans les versions traduites. Par

    exemple lapplication mobile du Museum of Modern Art New York, propose une

    liste comprenant toutes les uvres et les artistes prsents dans la collection, ainsi

    quune base de donnes du vocabulaire de lhistoire de lart. Cet lment montre que

    le muse reconnat le besoin de certains visiteurs de bnficier dun outil de

    comprhension pour les termes techniques, et que le muse sintresse aussi

    laccessibilit intellectuelle des personnes loignes de la culture.

    24 TALLON Loc Digital technologies and the museum experience: handheld guides and other media, p. xxi. 25 TALLON Loc, Mobile Strategy in 2013: an analysis of the annual Museums and Mobile Survey. Mars, 2013.

    http://www.museumsmobile.com/about/survey/ 26 DUPE Clothilde, L'Audioguide comme outil de construction de sens : tude de l'impact de l'audioguide de

    l'exposition "La grande parade, portrait de l'artiste clown" sur les visiteurs frquents, 2005.

  • 14

    Le jeune public est aussi cibl par les contenus adapts. Par exemple, pour

    lexposition temporaire Abu Dhabi de la collection du futur Louvre Abu Dhabi, une

    application a t propose avec un parcours ddi aux enfants. Dans lexposition,

    les enfants ont pu jouer, rpondre des nigmes et accder des commentaires

    crs pour eux. Les jeunes publics ont besoin dune offre conue pour leur niveau de

    comprhension et leur capacit apprendre.

    Le public en situation de handicap bnficie aussi de contenus ddis. Le Muse

    de la civilisation Qubec propose par exemple deux applications, dont une pour la

    collection permanente en langue des signes qubcoise (LSQ), avec trente vidos

    signes en LSQ. Lapplication du Guggenheim Museum offre un parcours guid avec

    des descriptions visuelles pour les malvoyants, les textes crits de chaque

    commentaire audio, les sous-titres pour les vidos, et la possibilit d'agrandir les

    textes. Plus quune innovation originale, cette tendance aider les visiteurs en

    situation de handicap profiter de leur visite, est un enjeu trs important de la

    mdiation. Ces outils facilitent la comprhension des uvres par un public plus

    large, et ils offrent aux institutions un moyen de communiquer avec des visiteurs en

    rpondant mieux leurs besoins.

    2. Contenus et services

    a. Les contenus

    Laudioguide traditionnel propose des contenus simples: des commentaires audio

    et parfois des textes et des photographies. Ces contenus peuvent prendre la forme

    de notices lues par un comdien, ou, comme au Muse des Beaux-Arts de Lyon,

    dune offre plus large avec des extraits de musique, des lectures de textes littraires,

    des interviews du commissaire, par exemple. Les contenus peuvent tre crs pour

    tre couts dans un ordre spcifique ou alatoirement.

    Il existe beaucoup dapplications mobiles dans les muses qui fonctionnent

    comme les audioguides traditionnels, ayant les mmes capacits et contenus mais

    sur un outil diffrent. Par exemple, l'application pour lexposition temporaire La

    Naissance dun muse au Muse du Louvre a propos les mmes commentaires

    audio et images que le guide multimdia. Il existe videmment des diffrences entre

    les deux dispositifs, lapplication propose par exemple plus de manires diffrentes

  • 15

    daccder aux commentaires que laudioguide. Mais en principe ils jouent un rle

    semblable pour le visiteur en termes de contenu.

    Avec les avances de la technologie, les guides multimdia et les applications

    mobiles peuvent aussi offrir des contenus multimdias : des commentaires audio,

    des textes et des photographies, mais aussi des vidos, des cartes interactives, de la

    ralit augmente, des jeux, ainsi que des services aux utilisateurs tels que la

    golocalisation et le commerce mobile.

    Un exemple dune application enrichie avec des contenus multimdias est celle de

    lexposition Creatures of Light en 2012 prsente lAmerican Museum of

    Natural History New York. Lapplication, divise en chapitres qui refltent les

    sections de lexposition, proposait des animations interactives, des galeries de

    photographies, des vidos ainsi quune bande-son. Le design et le graphisme taient

    dune bonne qualit. Cet outil accompagnait le visiteur tout au long de sa visite, mais

    il a aussi t conu comme un souvenir de la visite ou un outil permettant ensuite de

    la prolonger.

    Lapplication pour lexposition Chinas Terracotta Warriors: The First Emperors

    Legacy prsente en 2013 lAsian Art Museum San Francisco a inclus de la

    ralit augmente. En scannant le pictogramme dun tlphone portable, le visiteur

    voyait une reprsentation 3D sur son cran. Il pouvait bouger le tlphone portable

    pour voir limage sous des angles diffrents. Le rsultat pouvait ensuite tre

    photographi et partag sur les rseaux sociaux. Cet outil permettait au visiteur de

    simpliquer dans lexposition en crant ses propres images, et rendait linteraction

    avec les uvres trs ludique.

    Lobjectif principal dans la cration des contenus de lapplication ddie la

    collection permanente du Rijksmuseum Amsterdam est d'utiliser les contenus

    multimdias pour aider le visiteur dans son observation des uvres, parfois sous un

    angle diffrent27. Les compositions audio crent une ambiance et accompagnent le

    visiteur dans son voyage dans lespace du Muse, en allant dune uvre une

    autre. Les vidos qui sont souvent associes aux uvres proposent des sons et des

    animations pour les rendre vivantes et accessibles. La carte interactive permet

    lutilisateur de la manipuler pour situer les uvres chaque tage et dans chaque

    galerie. Ces fonctionnalits vont plus loin que les approches traditionnelles pour

    27 Site web du Rijksmuseum : https://www.rijksmuseum.nl/en/whats-on/guided-tours/multimediatour

  • 16

    aborder des uvres dans le contexte musal, en mettant laccent sur limagination,

    lambiance et le plaisir.

    Ces contenus multimdias offrent une exprience de visite trs riche au visiteur,

    travers une approche diffrente de lobservation et de la comprhension des uvres.

    b. Les services

    Plusieurs guides multimdias et applications mobiles proposent des services en

    plus de leurs contenus, afin de permettre une meilleure appropriation des uvres et

    des institutions culturelles. Ces services peuvent faciliter la visite et mme

    lencourager. Ils comprennent laccs aux rseaux sociaux, le commerce mobile et la

    vente des billets dentre, la golocalisation, la personnalisation, les donnes push

    , les agendas, la gestion des visiteurs, par exemple.

    Lapplication du Muse Guggenheim New York propose une offre de plusieurs

    services. Elle comprend des commentaires audio pour effectuer des visites guides

    de la collection permanente et des expositions temporaires, ces contenus changent

    selon lexposition qui est prsente dans le Muse. Lagenda est aussi renouvel

    automatiquement chaque semaine. Les visiteurs peuvent acheter leurs billets

    dentre, et les adhrents du Muse peuvent utiliser lapplication comme une carte

    de fidlit au lieu de venir avec leur propre carte pour entrer. Les utilisateurs sont

    mme invits faire un don l'institution via lapplication. Cette application est

    gratuite, un fait qui indique que linstitution la considre comme une partie importante

    de lexprience de visite. Avec un seul outil, le visiteur peut accder plusieurs

    services sur un dispositif bien pens et attirant. La trs haute qualit de lapplication

    reflte la qualit de linstitution quelle reprsente.

    Lapplication MCA Insight du Museum of Contemporary Art Australia Sydney

    propose une carte interactive pour aider les visiteurs trouver les uvres situes

    proximit en utilisant la golocalisation. Le Museum of Old and New Art en Tasmanie

    utilise cette technologie en lieu et place des cartels sur les murs. LArt Institute de

    Chicago utilise une golocalisation qui fonctionne avec le Wi-Fi pour donner aux

    visiteurs des directions dtailles pour aller dune uvre une autre. Ces services

    crent une visite personnalise o le visiteur peut grer sa propre exprience.

    Au Denver Art Museum, le visiteur la possibilit dutiliser lapplication

    DAM_SCOUT pour lire des codes QR situs prs des uvres slectionnes pour

  • 17

    accder des contenus. Si les contenus lui plaisent, il peut les partager sur

    Facebook et Twitter, ou les envoyer par ml. Pour son exposition Van Cleef &

    Arpels , le Muse des Arts dcoratifs Paris a propos une application qui offrait la

    possibilit de partager sur les rseaux sociaux, mais aussi un livre dor numrique o

    le visiteur pouvait voir les commentaires sur les uvres crits par les visiteurs

    prcdents. Avec ces outils, le visiteur devient un outil du marketing du muse, en

    publiant des informations sur les rseaux sociaux.

    Les outils portatifs peuvent aussi tre ludiques. Les National Galleries of Scotland

    proposent une application qui sappelle ArtHunter qui invite le visiteur chasser les

    uvres. Chaque mois, une slection duvres autour dune thmatique dans des

    muses cossais est publie dans lapplication. Pendant la visite des muses, les

    visiteurs saisissent une des uvres pour accder aux contenus associs. Il faut

    visiter plusieurs muses pour trouver toutes les uvres. En Ecosse encore, le

    National Museum of Scotland a cr une application qui est un jeu : Capture the

    Museum. Dans le Muse, les visiteurs s'identifient comme rouge ou bleu, pour une

    session de jeu de trente minutes avec un maximum de cinquante participants. Les

    deux quipes essaient de conqurir le plus grand nombre de territoires dans

    cette bataille en rpondant correctement aux nigmes sur les uvres. Ces deux

    propositions dapplications offrent une nouvelle approche pour dcouvrir les

    collections. Le visiteur qui pense quil na peut-tre pas sa place dans le muse est

    invit y jouer et samuser. En offrant des jeux, ces institutions indiquent quelles

    sont ouvertes aux publics qui ont des intrts varis.

    Les services offerts par les applications mobiles des muses facilitent la visite et

    rendent plus accessibles les institutions des publics divers. Les professionnels

    deviennent plus cratifs avec leurs propositions qui utilisent les nouvelles capacits

    offertes par ces technologies.

    c. Au-del de laudioguide traditionnel

    Une grande tendance actuellement prsente dans les muses est de ne pas

    seulement crer un audioguide sous forme mobile, mais de dvelopper des

    expriences qui vont au-del de laudioguide traditionnel, travers les contenus

    multimdias et les services.

  • 18

    Les muses dveloppent actuellement des stratgies pour lvolution de leurs

    politiques numriques dans lavenir. Par exemple, ltude intitule Tate Digital

    Strategy 201315: Digital as a Dimension of Everything28 a t publi en avril 2013

    par John Stack, le responsable de la transformation numrique au Tate. Dans ce

    document, M. Stack propose une liste de principes fondamentaux guidant la cration

    des outils numriques au sein du Tate, qui sont apprcier et comprendre lart,

    participer, penser, explorer les contenus plus approfondis et se renseigner. Pour

    respecter ces principes, le Tate doit privilgier une approche qui est centre sur les

    publics et les connaissances, value et amliore rgulirement, bien conue et

    structure, ouverte et partageable, diffuse travers des plateformes multiples, et

    dcentralise travers lorganisation. Le projet vise proposer dans les galeries des

    technologies numriques qui transformeront les expriences des visiteurs grce un

    accs universel au Wi-Fi, un site web adapt pour usage sur les tlphones

    portables, et des mdiateurs in-situ forms pour aider les visiteurs utiliser ces

    technologies. Dans le futur des muses, les technologies, le personnel, la

    scnographie et les uvres seront troitement lis. M Stack dveloppe dans ce

    rapport sa vision dune approche holistique aux nouvelles technologies, telle quil

    souhaiterait la voir applique au sein de linstitution Tate.

    Un exemple de muse qui propose des contenus numriques sous la forme dun

    cosystme est le Cleveland Museum of Art. Avec lapplication ArtLens, le visiteur

    peut accder aux contenus de la collection permanente et de certaines expositions

    temporaires, que ce soit au muse ou chez lui la maison. Il peut scanner certaines

    uvres dans les galeries avec son tlphone portable pour obtenir des contenus

    additionnels, et il peut profiter de la golocalisation dans les salles. Avant la visite, le

    visiteur peut crer ses propres parcours de visites, quil peut par la suite partager

    avec les autres visiteurs ou ses connaissances. Il est aussi possible daccder une

    liste, renouvele frquemment, des dix uvres plus slectionnes par les visiteurs

    comme tant leur prfre, ainsi quaux listes des conservateurs. Le Muse propose

    galement le plus grand cran multitouche aux Etats-Unis (douze mtres de

    longueur) qui sappelle Gallery One. Cet cran intgre lart, la technologie et la

    mdiation, en montrant les uvres de la collection qui peuvent tre manipules par

    28 STACK John, Tate Digital Strategy 201315: Digital as a Dimension of Everything, Tate Papers Issue 19,

    24 avril 2013, http://www.tate.org.uk/research/publications/tatepapers/tatedigitalstrategy201315digitaldimensioneverything

  • 19

    les visiteurs. Les utilisateurs peuvent connecter leurs tlphones portables lcran

    pour accder aux contenus sur ces uvres et crer une visite personnalise. Le

    Cleveland Museum of Art propose une offre doutils de mdiation qui est innovante,

    participative et intelligente. Le dispositif portatif nest pas isol, mais il interagit avec

    les uvres, le grand cran et les autres visiteurs. Le Wi-Fi est disponible dans le

    muse pour faciliter lusage de ce dispositif.

    3. Impact sur la visite

    La recherche actuelle sur ces outils se concentre sur la fonctionnalit et le type de

    contenus des technologies portables, vues comme moyens de comprendre et

    enrichir lexprience du visiteur29. Les nouvelles technologies enrichissent la visite du

    muse, et les consquences de cela sont examines.

    a. Avant et aprs la visite

    Dans un premier temps, il sagit de savoir quand les visiteurs utilisent loutil

    portatif, ce qui est trs important dans un contexte o les muses cherchent aider

    les visiteurs soit prparer soit prolonger leur visite. Les audioguides traditionnels

    et certaines applications, comme le DAM_SCOUT du Denver Museum of Art, ne sont

    utilisables que dans les salles du Muse. Ce type doutils naide donc pas prparer

    ou prolonger lexprience musale. Dautres applications peuvent tre tlcharges

    avant de venir dans les muses, les visiteurs peuvent ainsi parcourir les contenus

    comme les commentaires et les informations pratiques, pour dcider sils souhaitent

    venir effectuer une visite, ou comment organiser leur visite.

    Plusieurs muses proposent galement des moyens de prolonger la visite. Les

    visiteurs du Museum of Contemporary Art Australia peuvent entrer leur adresse ml

    dans lapplication MCA Insight pour recevoir plus de contenus sur les uvres quils

    ont marques comme leurs prfres, ainsi quun sommaire de leur visite. Les

    utilisateurs de lapplication du Rijksmuseum Amsterdam ont loption de la relier

    leur compte Rijksstudio, un atelier numrique, pour dcouvrir et jouer avec 125 000

    uvres de la collection. Au lieu dtre uniquement une aide la visite, les outils

    peuvent tre des ambassadeurs du muse dans la vie quotidienne des visiteurs.

    29 TALLON Loc Digital technologies and the museum experience: handheld guides and other media, p. xxi.

  • 20

    b. Les autres lments de lexposition

    Les outils sont aussi conus pour tre utiliss au cours dune visite dans un

    espace dexposition, espace qui communique dj un discours au visiteur30. La

    question suivante se pose : est-ce que les contenus audio ajoutent ou nuisent la

    capacit de produire un discours dans le muse31 ? Quels sont les rapports avec les

    autres lments dexposition ?

    Les rapports entre lutilisation des contenus audio et la lecture des textes sont

    divers. Lutilisation des contenus audio semble limiter un peu la lecture des textes in

    situ32 mais les textes peuvent aussi tre une rassurance par rapport aux lments

    peu prcis qui sont mentionnes [dans les contenus audio] 33 . En outre, le visiteur

    peut tre frustr si les contenus des deux formes de mdiation ne sont pas lis ou

    quand une uvre expose nest pas commente par loutil audio34. Lexprience du

    visiteur en rapport avec ces formes de mdiation est un lment important

    considrer dans la production des outils de mdiation.

    Le contexte physique de lespace doit tre aussi pris en compte : les muses ont

    des approches trs diffrentes concernant lorganisation de lespace, et les systmes

    de contenus audio doivent tre conus pour leurs destinations spcifiques qui posent

    des dfis divers35.

    c. Apprentissage et participation

    Une question de recherche fondamentale est limpact de lutilisation de loutil

    portatif sur lapprentissage et lobservation des objets dans lespace dexposition. Elle

    peut se poser en ces termes : est-ce que les contenus audio aident le visiteur

    comprendre et regarder les uvres, ou sont-ils une distraction qui empche une

    interaction ?

    30 DAVALLON Jean, Claquemurer, pour ainsi dire, tout lunivers: La mise en exposition. Paris: Editions du

    Centre Georges Pompidou, 1986, p. 204. 31 BRADBURNE James M, Foreward dans Digital technologies and the museum experience : handheld

    guides and other media, 2008, p. xi. 32 BLUMEFELD Zo. Evaluation de laudioguide des collections canadiennes du Muse des Beaux-Arts du

    Canada. 1998. P. 55. 33 BERA Marie-Pierre, DESHAYES Sophie. Les audioguides du muse dArt et dHistoire du Judasme et du

    muse des Arts asiatiques de Nice. 1999. P. 55 34 GAMMON Ben et BURCH Alexandra, Designing Mobile Digital Experiences dans Digital technologies

    and the museum experience: handheld guides and other media, 2008, p. 51. 35 Ibid.

  • 21

    Les muses cherchent des nouveaux moyens de connecter des visiteurs, des

    ides et des uvres36. Lapprentissage qui se passe dans un muse est unique :

    Quest-ce qutre actif dans un muse dart ? Cest, face une uvre, la regarder,

    cest--dire lexplorer visuellement ; cest ragir motionnellement, exprimer ses

    prfrences ou jugements et analyser les motifs de ses prfrences ; cest replacer

    luvre dans un courant artistique et la comparer avec dautres uvres37 .

    Il y a une volont de la part des visiteurs davoir des informations sur les uvres

    ainsi que sur lorganisation des ensembles duvres quils regardent38. Les tudes

    montrent que les informations fournies par les parcours audio enrichissent

    lexprience musale, surtout pour les uvres qui sont difficiles comprendre, ce

    qui indique que ces informations constituent une base pour savoir comment regarder

    et comprendre luvre39.

    Lutilisation de plusieurs sens en mme temps est un principe important

    dapprentissage qui augmente la mmorisation des informations40. Ainsi les donnes

    prliminaires confirment que les parcours multimdia lorsque ceux-ci sont aussi

    multi-sensoriels, facilitent une tude approfondie et une analyse critique des objets41.

    Un enjeu important est de savoir comment les contenus audio focalisent lattention

    des visiteurs. Les informations fournies par ces contenus peuvent guident lattention

    des visiteurs vers certains aspects dune uvre, le visiteur peut donc de ce fait

    ignorer dautres aspects42.

    John Falk et Lynn Dierking proposent un modle contextuel de lapprentissage

    dans les muses, o lapprentissage est le produit des interactions entre les

    contextes personnels, socio-conomiques et physiques du visiteur43. Dans le cas des

    technologies dans les muses, pour optimiser lapprentissage, les outils doivent

    construire du sens partir des expriences et connaissances pralables des

    36 FILIPPINI-FANTONI Silvia et BOWEN Jonathan, Designing Mobile Digital Experiences dans Digital

    technologies and the museum experience : handheld guides and other media, 2008, p. 81-82. 37 GOTTESDIENER Hana, La Lecture des textes dans les muses dart dans Textes et publics dans les

    muses, Lyon : Presses universitaires, 1992, p. 75. 38 SMITH Jeffrey K. et TINIO Pablo P.L., Audibly Engaged : Talking the Walk dans Digital technologies

    and the museum experience : handheld guides and other media, 2008, p. 75-76. 39 Ibid. 40 FILIPPINI-FANTONI Silvia et BOWEN Jonathan, Designing Mobile Digital Experiences , dans Digital

    technologies and the museum experience : handheld guides and other media, 2008, p. 81-82. 41 Ibid. 42 SMITH Jeffrey K. et TINIO Pablo P.L., Audibly Engaged : Talking the Walk , dans Digital technologies

    and the museum experience : handheld guides and other media, 2008, p. 66-67 43 FALK John H. et DIERKING Lynn D., Enhancing Visitor Interaction and Learning with Mobile

    Technologies dans Digital technologies and the museum experience: handheld guides and other media, p. 21.

  • 22

    visiteurs, les connecter leur cercle social et appuyer directement leurs motivations

    la visite et leurs intrts avant, pendant et aprs la visite44.

    Un mouvement important dans le monde musal actuel vise crer des

    institutions plus participatives, ce qui est li la question pose par Duncan

    Cameron : le muse, un temple ou un forum45 ? La Nouvelle musologie, fonde

    en partie sur les ides dfendues dans cet ouvrage, place les publics au centre de

    ses proccupations et met fin lunique primat des collections46 , en faisant du

    muse un lieu dchanges. Dans The Participatory Museum47, Nina Simon affirme

    que les techniques pour rendre les muses plus participatifs sont trs importantes

    pour promouvoir lapprentissage, le plaisir et lexploration chez le visiteur.

    Certains professionnels craignent que les contenus audio simplifient lactivit de

    la visite, la rduisent une collecte dinformations48 . Mais les tudes montrent que

    les outils numriques portatifs captent lattention du visiteur et augmentent sa

    capacit interagir avec les objets49.

    Les outils participatifs permettent aux visiteurs dindiquer leurs uvres prfres,

    de partager des contenus sur les rseaux sociaux, et de crer leur propre parcours

    dans les collections. Ils peuvent tre des extensions des projets participatifs de

    l'institution. Ces programmes interactifs et la possibilit de choisir quels contenus

    couter, proposent un point dentre pour les visiteurs rticents, qui peut offrir un

    changement fondamental dans la nature de la visite en encourageant un plus haut

    niveau dengagement personnel50.

    44 FALK John H. et DIERKING Lynn D., Enhancing Visitor Interaction and Learning with Mobile

    Technologies , dans Digital technologies and the museum experience: handheld guides and other media, p. 28. 45 CAMERON Duncan, Le muse : temple ou forum ? dans Vagues : une anthologie de la nouvelle

    musologie, sous la direction dAndr Desvalls, vol. 1, PUL, Lyon, 1992. 46 DEHON Cllia, Le tlphone portable, nouvel outil de mdiation culturelle dans les institutions musales

    franaises, 2011, p. 16-17. 47 SIMON Nina. The Participatory Museum. Santa Cruz: Museum 2.0, 2010. 48 DESHAYES Sophie. Audioguides et muses , dans La lettre de lOCIM, n 79, 2002, p. 25. 49 GAMMON Ben et BURCH Alexandra, Designing Mobile Digital Experiences , p. 40. 50 GREEVES Margaret, Help at Hand : Working with Handheld Guides prsent Help at Hand : Working

    with Handheld Guides Conference, London, Juin 2006.

  • 23

    II. LE PARTI PRIS DE LA RECHERCHE

    Ce mmoire de recherche se concentre sur le rle des contenus audio dans la

    construction de sens pendant la visite de lespace musal.

    En offrant un audioguide ou une application mobile ses visiteurs, le muse

    ajoute un niveau de sens au message dj communiqu par lexposition. Ces outils

    numriques se trouvent au milieu du discours structur par les crits in situ,

    laccrochage des uvres, la musographie-scnographie. En raison de leur nature

    autoritaire, les outils audio sont proposs par le muse lui-mme, ces dispositifs

    mritent dtre analyss comme des lments lgitimes de la communication de

    lexposition.

    Jean Davallon propose une dfinition de lexposition. Selon lui, lexposition

    dsigne la fois lacte de prsenter des objets au public et le lieu dans lequel se

    passe cette prsentation51. Si lexposition vise tre un mdium qui transmet un

    discours au visiteur, sa musographie-scnographie agit comme lcriture de sens

    dans un espace52 . Les objets, qui perdent leurs significations dorigine dans le

    contexte de lexposition, deviennent les lments dun ensemble. Le rapport entre les

    objets, lorganisation spatiale et les crits qui font partie intgrante de la mise en

    scne, sont les producteurs de sens. Donc, pour comprendre comment loutil

    numrique fonctionne dans lespace dans ce contexte, les lments de

    communication de lexposition sont prendre en compte.

    Mme si laspect technologique du dispositif peut avoir une influence sur

    lexprience du visiteur dans lespace dexposition, ce mmoire se concentre sur les

    contenus proposs par ces outils, notamment audio. Les technologies et les autres

    contenus, notamment les images, sont prises en compte de manire moins

    importante. Les contenus produits et prsents comprennent le discours scientifique

    que le muse choisit de mettre en avant.

    Comme cet outil de mdiation est un moyen relativement rcent pour les muses

    de communiquer avec leurs visiteurs, il faut ltudier pour voir si les contenus se sont

    inscrits dans la ligne du discours global de linstitution qui les propose. Existe-il des

    pratiques dexcellence dans leur production ? Comment les contenus sont-ils

    51 DAVALLON, Jean, Claquemurer, pour ainsi dire, tout lunivers: La mise en exposition, 1986, p. 204. 52 ONEILL Marie-Clart, & DUFRESNE-TASSE Colette, Augmenter notre comprhension de limpact de la

    musographie sur les visiteurs , Culture et Muses, 16, 2010, p. 239.

  • 24

    prsents et structurs pour aider leurs utilisateurs observer et comprendre les

    objets exposs ? Quels sont les rapports entre les contenus de loutil et ceux des

    crits sur les murs, de la musographie-scnographie, des autres aides la visite

    autonome ? Les contenus audio crent-ils un outil daide la visite autonome ou un

    complment aux crits dans les salles ?

    Ce travail actuel se concentre sur la premire tape dans la vie de ces contenus,

    cest--dire les objectifs des producteurs et la place de loutil dans lespace.

    Lutilisation et la rception par le visiteur ne figurent pas dans le cadre de cette

    recherche.

  • 25

    CHAPITRE 2: LA METHODOLOGIE DE LA RECHERCHE

    I. CHOIX ET CONCEPTION DE LOUTIL DANALYSE Ce travail porte sur le rle des contenus audio au sein de lespace musal. Pour

    bien rpondre aux questions de dpart, il a t considr pertinent dtudier des

    tudes de cas concrets de contenus audio dans un espace dexposition, pour en

    retirer des thmatiques. Ces tudes de cas ont t trs dtailles pour comprendre

    au mieux les enjeux de la production de sens et le rle de cet outil dans le muse.

    A. La dfinition des paramtres pour la constitution de lchantillon

    Le premier lment quil sagissait de dterminer dans cette recherche tait le type

    despaces tudier. Afin de faciliter ltude du rapport entre les contenus audio et le

    discours communiqu par lespace musal, les expositions temporaires, avec leurs

    parcours trs bien dfinis, ont t le cadre de cette recherche. Alors que les

    collections permanentes des muses peuvent gnralement tre visites

    alatoirement, les expositions temporaires ont au contraire tendance avoir un

    parcours de visit bien dfini avec un discours qui se construit au fil de la

    progression du visiteur.

    Il a donc t dcid de choisir des expositions temporaires, et ce en fonction de

    divers critres. Pour des raisons lies aux contraintes pratiques, il a t choisi de se

    limiter aux expositions dbutant partir de lautomne 2013 dans les muses Paris.

    Pour limiter les variables qui peuvent influencer les diffrences entre les contenus

    audio de chaque institution, comme les enjeux de leur cration, plusieurs choix ont

    t faits pour essayer de trouver des muses et des expositions temporaires

    comparables. Il a donc t tabli que les muses retenus devaient exposer une

    collection de Beaux-Arts, et que les expositions prsentes devaient tre

    thmatiques plutt que monographiques. Linstitution elle-mme devait proposer un

    dispositif portatif avec des contenus audio, cest--dire un audioguide et/ou une

  • 26

    application mobile. Le public cibl sont les visiteurs adultes, en excluant les

    personnes en situation de handicap visuel ou auditif qui bnficient souvent de

    dispositifs de mdiation adapts leurs besoins spcifiques. Ce dernier critre exclut

    galement les outils spcifiquement conus pour les enfants et les adolescents.

    B. Le choix des expositions temporaires

    Sur la cinquantaine dexpositions prsentes Paris pendant la priode

    slectionne, une dizaine proposait un outil portatif numrique. Les sept expositions

    thmatiques qui pouvaient tre incluses dans ce travail sont les suivantes :

    Kanak au muse du quai Branly

    Les Etrusques au muse Maillol

    Le Surralisme et l'objet au Centre Pompidou

    Masculin/Masculin au muse dOrsay

    Dsirs et volupt l'poque victorienne au muse Jacquemart-Andr

    La Renaissance et le rve au muse du Luxembourg

    Le Printemps de la Renaissance au muse du Louvre

    Pour des raisons de faisabilit et pour assurer des analyses en profondeur,

    seulement trois expositions ont t slectionnes parmi celles-ci. Les deux

    premires, Kanak et Les Etrusques ont t limines en raison de leur

    approche ethnographique. Les expositions temporaires au Centre Pompidou et au

    muse dOrsay proposaient leurs contenus audio uniquement sous forme

    daudioguide et non en application mobile ; elles nont donc pas t choisies afin

    dassurer que ce fait nait pas dinfluence sur les contenus eux-mmes.

    Ainsi les trois muses figurant dans lchantillon sont :

    Dsirs et volupt l'poque victorienne au muse Jacquemart-Andr

    La Renaissance et le rve au muse du Luxembourg

    Le Printemps de la Renaissance au muse du Louvre.

  • 27

    Ces expositions temporaires ont t prsentes dans des institutions de taille et

    de statut varis, avec des approches distinctes concernant leurs contenus audio, qui

    ont t produits par trois prestataires diffrents.

    C. La ncessit dun outil composite

    La question du rle du dispositif portatif numrique dans lexposition temporaire et

    son fonctionnement est complexe, elle ncessite donc un outil tout aussi complexe

    pour la rsoudre. Les contenus audio de ces trois expositions ont t tudis de la

    manire suivante pour retirer les grands axes de rflexion de cette recherche :

    Quels sont les objectifs des commissaires et des mdiateurs pour les

    contenus audio ?

    Quels types de contenu ? Quels publics viss ? Quels rapports viss

    avec les autres outils daides la visite autonome (les crits sur les

    murs, la musographie-scnographie, les livrets) ?

    OUTILS: crits des commissaires, entretiens avec les professionnels

    associs aux expositions

    Comment les objectifs fixs pour les contenus audio influencent-ils leur

    production?

    Quel est le niveau dinformations vis ? Quels rapports avec la

    production des autres aides la visite ? Qui travaille sur quoi et

    pendant combien de temps ?

    OUTILS: entretiens avec les professionnels des muses et les

    prestataires

    Comment les contenus audio rsultants fonctionnent-ils ?

    Comment ces contenus prsentent-ils les uvres aux visiteurs? Quels

    rapports avec les autres aides la visite autonome ? Quel message est

    transmis et comment ? Quels publics en profitent ?

    OUTILS: grille danalyse

  • 28

    Comment les contenus audio rsultants refltent (ou non) les objectifs fixs

    pour cet outil et pour lexposition elle-mme ?

    Quels sont les rapports entre les objectifs constats pour loutil et

    lanalyse des contenus audio ?

    OUTILS: grille danalyse, entretiens avec les professionnels des

    muses

    Loutil composite pour ce travail est donc ax sur des entretiens avec les

    professionnels qui ont cr les contenus audio, une grille danalyse des contenus

    audio adapte cette recherche, ainsi que des analyses des crits des

    commissaires notamment dans le catalogue, et des expositions pour comprendre

    leur fonctionnement et le discours quelles vhiculent.

    1. Les entretiens

    Les professionnels des muses et les prestataires associs ont t interviews

    pour mieux comprendre les objectifs fixs lors de la cration des outils. Il leur a

    galement t demand de donner des prcisions quant la mthode et le

    processus de production des contenus audio. Les rponses de ces professionnels

    ont t tudies afin de dterminer comment la vision du commissaire concernant

    lexposition peut influencer les contenus audio et leur place au sein de lexposition.

    Six personnes ont t interroges dans le cadre de ces entretiens. Pour

    lexposition Dsirs et Volupt lpoque Victorienne , Monsieur Nicolas Sainte

    Fare Garnot, conservateur du Muse Jacquemart-Andr et commissaire de

    lexposition a accord une interview, ainsi que Madame Graldine Gauvin, directrice

    de production des outils multimdias et musographie chez Sycomore, lentreprise

    responsable de la production des contenus audio. Pour lexposition Le printemps

    de la Renaissance , Monsieur Marc Bormand, conservateur en chef au dpartement

    des Sculptures du muse du Louvre et commissaire de lexposition a t consult,

    ainsi que Madame Marina-Pia Vitali, sous-directrice de la mdiation dans les salles

    au muse du Louvre, et Aude Gobet, charge de programmation au Service

    ducation au muse du Louvre. Pour lexposition La Renaissance et le rve ,

    Madame Juliette Le Taillandier de Gabory, responsable du dveloppement des

  • 29

    publics et de la programmation culturelle au muse du Luxembourg, a accord un

    entretien.

    Les questions poses aux professionnels sont rparties en quatre catgories : les

    objectifs de lexposition, les objectifs du dispositif portatif numrique, la production

    des contenus audio, et l'outil rsultant (Voir Annexes II - A et B).

    a. Les objectifs de lexposition

    Les questions portant sur les objectifs de lexposition sont importantes parce

    quelles permettent dtablir le contexte dans lequel les contenus audio ont t

    produits. Cette premire catgorie vise comprendre le discours que le commissaire

    souhaite communiquer aux visiteurs et les publics qui sont cibls par lexposition.

    Quels taient les objectifs de lexposition ?

    Qui tait le public vis de lexposition ?

    b. Les objectifs du dispositif portatif numrique

    Les objectifs des contenus audio sont aussi abords par des questions dans les

    entretiens. Les questions les plus importantes cherchent savoir pourquoi le muse

    propose un audioguide ou une application mobile, et quoi peuvent servir de tels

    outils. Ces questions permettent dtablir quelle est la place du dispositif au sein de

    linstitution. Il sagit ensuite de savoir quel est le rle de loutil audio dans lexposition,

    ainsi que celui des outils crits, et quels sont les publics cibls par chacun de ces

    outils de mdiation. Les rponses ces questions sont importantes pour dterminer,

    en tudiant le dispositif rsultant, si les objectifs assigns cet outil de mdiation

    sont atteints.

    Pourquoi faites-vous un audioguide et/ou une application ? A quoi peut servir

    un audioguide et une application ?

    Quel est le rle des contenus audio dans lexposition? Et celui des crits sur

    les murs ?

    Quel est votre cible de public pour les contenus audio ? Pour les textes ?

  • 30

    c. La production des contenus audio

    La production des contenus audio est un lment essentiel examiner pour

    comprendre comment les objectifs fixs pour le dispositif influencent sa conception et

    par consquence loutil rsultant. Dans ce groupe de question il a donc t demand

    aux professionnels dindiquer quel moment les contenus audio sont conus et

    combien de temps est pris pour leur ralisation. La mme question a t pose

    concernant les textes sur les murs. Plusieurs thmes ont ensuite t abords comme

    les dmarches et les personnes responsables de la slection des uvres (combien

    et lesquelles), la dure des commentaires, les choix des narrateurs et de la musique,

    les partis pris stylistique de la prsentation des uvres, pour la rdaction et la

    production des contenus. Des questions ont t poses sur la constitution de

    lquipe projet de faon savoir qui travaille sur quels lments de la mdiation, si

    les mmes personnes ont travaill sur les contenus audio, les crits sur les murs et

    les aides la visite autonome, et si ces personnes sont les mmes pour chaque

    exposition. Une question visait prciser quelle relation entre les crits et les

    contenus audio tait recherche, et si cela avait une influence sur le processus de

    production. Il a t demand aux professionnels de prciser quel niveau

    dinformation ils ont vis dans les contenus audio et comment cela est contrl au

    cours du processus de production. Enfin une dernire question a vis dterminer

    sil existe des pratiques dexcellence dans le domaine de la production des outils

    audio.

    Quels sont les dmarches pour la production de contenus ? A quel moment

    pensez-vous laudioguide/application et combien de temps prenez-vous

    pour la prparation, l'enregistrement, etc. ? Comment le choix des uvres

    incluses dans laudioguide/application (combien et lesquelles) est-il fait ? Et

    par qui ?

    Concernant lquipe du projet, qui travaille sur quels lments de la

    mdiation (les mmes personnes ont-elles travaill sur

    laudioguide/application, les panneaux, le livret) ? Est-ce que ces

    personnes sont les mmes pour chaque exposition ?

  • 31

    Comment est-ce que vous avez prvu la relation entre les textes,

    laudioguide/application et les autres outils daides la visite autonome

    (complmentaires ou indpendants) ? Comment est-ce que cela influence

    leur production ?

    Quel est le niveau dinformations vis pour le contenu numrique?

    Comment est-il assur ?

    Existe-il des best practices (pratiques dexcellence) pour la production?

    Concernant le contenu des commentaires audios, quel est le parti pris pour

    le style de la prsentation des uvres ?

    d. L'outil rsultant

    Les questions poses sur le dispositif rsultant relvent plutt de lordre pratique,

    notamment : pour qui loutil est-il gratuit et pourquoi, quels publics utilisent les

    contenus audio dans lexposition, et quels ont t les publics de lexposition. Les

    rponses ces dernires interrogations aident comprendre si les publics viss

    correspondent bien aux visiteurs ayant rellement utilis loutil.

    2. La grille danalyse Les commentaires audio ont t tudis avec laide dune grille danalyse (voir

    Annexe III - A) adapte de celle de Colette Dufresne-Tass pour les expositions

    temporaires et inspire par le travail de Sophie Deshayes en 2002 pour le

    Dpartement des Publics de la Direction des Muses de France53. Cette grille

    adapte vise donner des critres permettant danalyser les contenus audio dune

    exposition dans le but davoir une vision globale du dispositif propos. Puis les

    diffrents outils analyss ont t compars entre eux.

    La grille examine les gnralits de loutil, comme le dispositif physique et la dure

    des commentaires, la structure interne du contenu des commentaires et les relations

    avec les autres lments de lexposition, tels que les uvres, la musographie-

    scnographie et les crits sur les murs.

    53 DESHAYES, Sophie, Les audioguides, outils de mdiation dans les muses , Rapport dtude

    commandit par le dpartement des publics de la Direction des muses de France, dcembre 2002.

  • 32

    a. Prsentation de loutil

    Les contenus audio sont conus pour exister dans un contexte spcifique. Ils sont

    proposs sur un dispositif adapt avec un systme ddi pour les louer ou les

    tlcharger. Il est important de prendre en compte cette ralit pour comprendre

    lexprience cre par la runion de ces lments.

    Les contenus audio sont dabord prsents travers les dispositifs sur lesquels ils

    sont disponibles, notamment les audioguides et les applications mobiles. Pour

    chaque dispositif, les donnes suivantes ont t examines :

    Quel est le support ?

    Est-il clairement indiqu o le louer ou le tlcharger ? Le Wi-Fi est-il

    disponible ?

    Est-il clairement indiqu comment lutiliser ?

    Est-il facile manipuler ? Comment fonctionne-t-il ?

    Les textes/photographies (sil y en a) sont-ils faciles dchiffrer ?

    Quel est le prix ?

    Quelles sont les langues proposes ?

    Quelles sont les dures des commentaires ?

    Les dispositifs sur lesquels les contenus audio sont installs ont ensuite t

    dcrits et compars entre eux. Enfin, une tude des signes graphiques qui indiquent

    aux visiteurs quel moment de leur parcours couter les commentaires a t

    ralise, en prenant en compte lordre des commentaires et la clart du parcours.

    b. Structure interne du contenu des commentaires

    Ce volet porte sur la structure elle-mme du contenu audio, les partis pris choisis

    concernant lapproche des uvres et la place du visiteur qui utilise cet outil de

    mdiation. La structure des commentaires prend en compte plusieurs lments. Le

    premier est combien dides, ou approches gnrales pour traiter luvre, sont

    abordes dans chaque commentaire. Une ide peut tre le sujet reprsent dans

    un tableau ou son traitement, un lment biographique concernant un artiste ou un

    collectionneur, le contexte culturel de luvre, un mouvement artistique, ou encore

    les influences littraires ou artistique de luvre. Les types dides, ainsi que le

  • 33

    nombre dides abordes dans chaque commentaire, ont t analyss. Ces

    lments revtent un intrt tout particulier car ils permettent danalyser la faon dont

    luvre est prsente au visiteur et comment le discours des contenus audio est

    construit.

    Un second ensemble dlments prendre en compte dans la structure des

    commentaires sont les techniques de communication employes. Ce sont les

    techniques utilises dans les commentaires pour faciliter la communication du

    contenu de lexposition au visiteur, pour maintenir lintrt du visiteur pour le contenu,

    et pour assurer la comprhension et la synthse54. Lanalyse des techniques prend

    en compte les types de contenus inclus dans les plus grandes ides , savoir les

    descriptions visuelles, lidentification du sujet et la signification de liconographie, les

    lments biographiques sur lartiste, le contexte de la cration de luvre et sa

    rception, le processus de restauration, etc. Les techniques peuvent aussi

    comprendre des lments de communication, comme le ton du texte, les voix des

    narrateurs, la musique, les citations, les questions poses, la situation du visiteur

    dans lespace de lexposition. Ces lments permettent de mettre jour la structure

    interne des contenus audio. Les techniques de communication sont ensuite

    analyses pour voir si elles permettent datteindre les objectifs qui ont t fixs pour

    loutil.

    La place du visiteur au sein des commentaires a t prise en compte. On a

    cherch rpondre aux questions suivantes : le visiteur est-il impliqu dans les

    commentaires, est-ce que le narrateur sadresse lui directement, quel niveau ?

    Les lments sont-ils fournis pour stimuler limagination chez le visiteur ? Les

    connaissances pr requises exiges de la part du visiteur sont aussi examines pour

    comprendre qui est le visiteur vis par les contenus audio. Le visiteur est-il suppos

    dj connaitre les mouvements artistiques, la terminologie employe en histoire de

    lart ou les dates cls de lhistoire des civilisations ? Doit-il se souvenir des lments

    abords dans une section prcdente de lexposition ? Les rponses ces questions

    permettent dapporter un clairage sur linteraction entre loutil et son public.

    54 DUFRESNE-TASSE Colette, Grille danalyse dexposition.

  • 34

    c. Relations avec les autres lments de lexposition

    Les contenus audio sont couts dans un contexte musal spcifique qui

    communique dj un discours aux visiteurs. Le rapport entre les uvres,

    lorganisation spatiale et les crits, qui font partie intgrante de la mise en scne,

    sont les producteurs de sens au sein de lexposition. Quand les contenus audio y

    sont ajouts, la cohrence avec le discours de lexposition devrait tre assure

    formant une relation troite et pertinente entre ses composantes55 . En examinant

    les relations entre loutil audio et les autres lments de lexposition, on cherche

    obtenir une vision plus claire de son rle spcifique.

    Les uvres

    Les commentaires ont t tudis afin de dterminer sils prsentent leurs

    discours par le biais des uvres, ou si les commentaires servent dappui ce que

    lon fait dire aux objets56 . La question principale tant de savoir si lusage de ce

    dispositif vient concurrencer lobservation des objets eux-mmes. Lanalyse vise

    savoir si les uvres sont traites comme le sujet en soi du commentaire, ou comme

    une simple illustration dun propos plus gnral.

    Un autre aspect des contenus audio important prendre en compte est la manire

    dont ils encouragent lobservation de luvre. Il sagit donc danalyser la construction

    du commentaire et sa ligne ditoriale ; cest--dire, la progression du propos

    concernant luvre et le contexte de luvre, afin de voir comment les commentaires

    encadrent lobjet. Le commentaire commence-t-il par prsenter un dtail de luvre

    ou le contexte de sa cration, par exemple ? Combien de fois est-ce que le

    commentaire prsente un rapprochement entre luvre et son contexte ? Il faut aussi

    prendre en compte dans quelle mesure les lments visuels sont abords dans les

    commentaires.

    Il est important dtudier si des preuves visuelles concernant les arguments

    prsents dans les commentaires sont fournies. Si les commentaires mentionnent

    des faits sans prsenter des dtails de luvre ou une image de rfrence, le visiteur

    doit sappuyer sur son propre bagage culturel ou accepter lautorit des concepteurs

    55 Ibid. 56 Ibid.

  • 35

    de loutil. Les preuves visuelles donnent le pouvoir au visiteur de dcider lui-mme si

    les conclusions des commentaires sont justes ou non.

    Enfin cette tude a pris en compte la quantit duvres commentes par rapport

    celles qui sont exposes. On a cherch savoir si les commentaires audio portant

    sur un nombre duvres limit, aident aussi les visiteurs observer et comprendre

    les uvres qui ne sont pas commentes directement.

    La musographie-scnographie

    La musographie-scnographie, qui communique un discours au visiteur, a t

    examine en relation au parcours cr par les contenus audio. Son analyse a t

    effectue partir des critres proposs par K. McLean : lenvironnement de

    lexposition, la justesse des mdias, la clart de lorganisation et lefficacit gnrale

    de la communication57. La musographie-scnographie a t examine afin de voir

    quelles uvres sont mises en valeur, et de dterminer si ces mmes objets sont

    galement comments par des contenus audio.

    La circulation dans les salles a t compare au parcours de visite propos par

    lordre des commentaires. Il est important de prendre en compte cet aspect pour voir

    sil existe une cohrence ou une tension entre la musographie-scnographie et

    lutilisation de loutil. Le dploiement des uvres commentes est aussi considr

    pour vrifier quil y a une distribution are des objets dans lespace.

    Les uvres commentes sont localises de faon voir si chaque visiteur peut

    accder un espace confortable devant lobjet, mme dans les moments de forte

    affluence.

    Les crits

    Les uvres mises en valeur par les crits sur les murs ont t examines afin de

    voir si elles sont aussi commentes dans les contenus audio. Une uvre peut tre

    mise en valeur en ayant soit un texte ddi, comme un cartel dvelopp, soit en

    tant mentionne dans un panneau de section ou un panneau thmatique, par

    exemple.

    Les contenus des crits sur les murs et des commentaires audio ont t compars

    pour vrifier sil existe des chevauchements dinformations. Cette dmarche vise 57 McLEAN, Kathleen, Looking at exhibitions: One approach to criticism dans Planning for people in

    museum exhibitions. Ann Arbor, MI: Association of Science-Technology, 1993, p.163-166

  • 36

    comprendre quelle est la relation entre les textes crits et les commentaires audio, et

    tablir sil y a une cohrence et sils ne se contredisent pas.

    La comparaison des contenus a ensuite t analyse pour tudier les diffrences

    qui existent entre une exprience de visite o le visiteur a utilis uniquement les

    outils de mdiation crite dans lexposition, et une exprience de visite o les

    commentaires audio ont t couts. On a cherch savoir ici, si le visiteur obtient

    plus dinformations sur le contenu de lexposition en coutant les commentaires, ou

    sil passe ct dinformations en ne lisant pas les crits. Les expriences

    proposes par chaque forme de mdiation ont donc t examines.

    Ces lments permettent de considrer le degr dautonomie des contenus audio.

    Est-ce quils fonctionnent indpendamment des outils de mdiation crite ou sont-ils

    dpendants de ces textes ? Quel est le niveau de complmentarit ou de

    redondance entre ces deux formes de mdiation ?

  • 37

    CHAPITRE 3: PRESENTATION ET ANALYSE DES ETUDES DE CAS

    I. MUSEE JACQUEMART-ANDRE : DESIRS ET VOLUPTE A LEPOQUE VICTORIENNE

    A. Le contexte de loutil : Prsentation de lexposition

    1. Les dterminants Lexposition Dsirs et volupt lpoque victorienne sest droule au Muse

    Jacquemart-Andr du 13 septembre 2013 au 20 janvier 2014. Environ 130 000

    personnes ont visit cette exposition.

    Cette institution est un muse de lInstitut de France, gr par la socit

    Culturespaces depuis 199658. Le Muse est situ dans un htel particulier quHenri

    Parent a construit selon le dsir dEdouard Andr en 1875 sur le boulevard

    Haussmann Paris. La collection permanente comprend des lments divers allant

    de la peinture italienne, anglaise, franaise du XVIIIe sicle, flamande et hollandaise,

    de la sculpture, du mobilier et des objets dart. Les salles dexposition temporaires

    se trouvent au premier tage du Muse qui nest pas desservi par un ascenseur,

    elles ne sont donc pas accessibles aux personnes mobilit rduite59.

    Cette institution est ouverte tous les jours de 10h 18h, avec des nocturnes les

    lundis et samedis jusqu' 20h30 en priode d'exposition. Le plein tarif pour une

    entre est de 12 avec un tarif rduit 10.

    58 Site Web du Muse Jacquemart-Andr:

    http://www.musee-jacquemart-andre.com/fr/lorganisation-du-musee/le-delegataire 59 Site Web du Muse Jacquemart-Andr:

    http://www.musee-jacquemart-andre.com/fr/preparer-sa-visite/horaires-et-acces

  • 38

    2. Le contenu

    a. Du thme au message

    Les tableaux britanniques exposs dans cette exposition proviennent tous de la

    collection de Juan Antonio Prez Simn, un grand collectionneur mexicain dorigine

    espagnole (n en 1941). Vronique Gerard-Powell, commissaire gnrale de

    lexposition, a slectionn des uvres de cette collection en les groupant en

    plusieurs chapitres voquant les grandes aspirations des peintres britanniques, des

    annes 1860 la veille de la Premire Guerre mondiale60 . Cest la premire fois en

    France quune exposition prsente les uvres anglaises de cette priode61. Chaque

    uvre choisie touche ce qui semblait aux commissaires : tre le plus

    caractristique de cette priode, la fidlit la culture classique et lhommage la

    beaut fminine62 .

    Les commissaires ont dcid de suivre dans le parcours le fil conducteur de la

    collection de Prez Simn, pour qui la figure fminine et la manire dont les

    artistes la reprsente traduisent la quintessence de leurs aspirations esthtiques et

    de leur rve de beaut63 . Prez Simn considre que les thmes qui se trouvent

    dans ces uvres, savoir la femme, la beaut, la famille et lamour, touchent

    [ses] motions les plus profondes et [ses] intrts fondamentaux64 .

    Cette exposition vise donc montrer la passion dune poque pour la beaut

    fminine, tout en prsentant des uvres rassembles selon le got dun grand

    collectionneur du XXe sicle. Lenjeu de lexposition consiste alors montrer une

    priode spcifique dans lhistoire de lart anglais, vue travers le prisme du regard

    de ce collectionneur.

    Les huit sections de lexposition sont les suivantes (voir Figure 1) :

    1. Dsirs dAntique : Centre sur des uvres de Lawrence Alma-Tadema, cette section entame lexposition travers une rflexion sur la fascination de

    llite victorienne pour lAntiquit.

    60 BABELON Jean-Pierre Un versant mconnu de la collection Prez Simn, la peinture anglaise dans

    Dsirs et Volupt lpoque victorienne , Paris, Fonds Mercator, 2013, p. 13. 61 Cf. ANNEXE II H Entretien avec Nicolas SAINTE FARE GARNOT. 62 GERARD-POWELL Vronique, Juan Antonio Prez Simn et la peinture britannique dans Dsirs et

    Volupt lpoque victorienne , Paris, Fonds Mercator, 2013, p. 25. 63 MONNIER Bruno, Peindre des rves de beaut dans Dsirs et Volupt lpoque victorienne ,

    Paris, Fonds Mercator, 2013, p. 10. 64 PEREZ SIMON Juan Antonio, La peinture victorienne dans Dsirs et Volupt lpoque victorienne ,

    Paris, Fonds Mercator, 2013, p. 21.

  • 39

    2. Beauts classiques : Les artistes se consacrent une recherche de la perfection formelle travers des reprsentations de la femme, inspirs

    toujours par lAntiquit.

    3. Burne-Jones, muses et modles : Linspiration pour les artistes, dont Edward Burne-Jones, se trouve dans les visages des femmes, muses ou

    modles, dans leur entourage.

    4. Femmes fatales : Le thme de la femme fatale est frquent dans les uvres anglaises, notamment dans celles de John William Waterhouse.

    5. Hrones amoureuses : Les prraphalites sont inspirs par la littrature britannique, qui est elle fascine par le Moyen-ge, les lgendes arthuriennes

    par exemple.

    6. LHarmonie rve : Strudwick produit des peintures remplies des figures littraires ou allgoriques, avec les iconographies complexes et symboliques. 7. La Volupt du nu : Les artistes anglais de la seconde moiti du 19e sicle commencent produire des peintures qui reprsentent le nu.

    8. Le Culte de la beaut : Cette dernire section vise montrer comment les artistes de cette priode reprsentent la beaut fminine et la vie quotidienne.

    Les artistes montrent des femmes trs bien vtues dans des magnifiques

    dcors, parfois en plein rve, ce qui rappelle certaines uvres de posie.

    Figure 1 : Plan de lexposition au muse Jacquemart-Andr

  • 40

    b. Le type dapproche et de scnario

    Lapproche utilise est double : une approche esthtique enrichie dune approche

    scientifique65. La premire a pour objectif daider les visiteurs apprcier la beaut

    fminine et porter attention aux dtails dans les uvres. La seconde approche est

    caractrise par le fait que les commissaires de lexposition ont aussi cherch

    rendre compte des inspirations et du contexte des artistes de cette poque. Le

    droulement est thmatique.

    c. La nature des objets

    Cinquante uvres taient prsentes, dont celles de Lawrence Alma Tadema,

    Frederic Leighton, Edward Burne-Jones, Albert Moore et John Waterhouse. La

    majorit de ces tableaux, cest--dire quarante-trois, sont des huiles sur toile ou sur

    bois. Lexposition prsentait galement sept uvres appartenant aux arts

    graphiques : deux pastels sur papier, une sanguine sur papier sur carton, ainsi que

    quatre aquarelles sur papier, carton ou papier mont sur toile. Leur datation, de

    manire gnrale, stend de 1860 1916, la priode choisie par Vronique Gerard-

    Powell.

    d. La musographie-scnographie

    La mise en scne encourage lobservation des uvres travers labsence de

    mdias, lexception des textes. Le point central de chaque pice est luvre elle-

    mme.

    Huber Le Gall, un designer franais, crateur et sculpteur dart, a conu la

    musographie-scnographie comme un rappel de latmosphre des palais antiques

    et des boudoirs anglais, pour faire cho la force dcorative des tableaux

    prsents66 . Les murs de plusieurs salles sont peints en trompe-lil pour

    ressembler au marbre ou des rideaux, et plusieurs tapis ont des motifs dcoratifs.

    Le choix des couleurs pastels ou dautres qui voquent des pierres semi-prcieuses

    visent mettre les uvres prsentes en valeur (voir Figures 2 et 3).

    65 MERLEAU-PONTY C., & EZRATI J. J., Lexposition thorique et pratique, Paris: LHarmattan, 2005, p. 49-

    50. 66 Dossier de presse de lexposition:

    http://www.musee-jacquemart-andre.com/sites/default/files/dp1_desirs_et_volupte_au_musee_jacquemart-andre_0.pdf

  • 41

    Figures 2 et 3 : Photographies67 de la deuxime et troisime salle

    En entrant dans chaque salle, un lment attire lil du visiteur et lencourage la

    parcourir. Par exemple, dans la premire salle, le tableau Les Roses dHliogabale

    attire le visiteur avec sa grande taille et ses couleurs vives. La septime salle, quant

    elle, capte le visiteur par une srie duvres riches en couleur et en formes, qui

    invitent le visiteur sapprocher pour apprcier leurs dtails.

    Lclairage ne varie pas, sauf dans les troisime et sixime salles qui offrent une

    lumire plus faible. Lclairage encourage lobservation des uvres de diffrentes

    manires, par une lumire diffuse venant du plafond accompagne de spots dans

    une salle bien claire.

    e. Les crits

    Les textes des salles prennent plusieurs formes : la forme dune introduction pour

    chaque section (huit), de panneau informatif sur un personnage (six), de cartel

    simple (pour chaque uvre), de cartel dvelopp (un), de pome (un) et de

    chronologie (deux). Les panneaux de section comprennent un titre avec le thme de

    la salle et trois cinq paragraphes explicatifs. Les cartels simples des tableaux

    contiennent les informations permettant didentifier luvre (lartiste, ses dates de

    vie, le titre, la date et matriaux de luvre), ainsi quun numro qui donne un ordre

    au parcours de visite pour le visiteur (voir Figure 4). La taille de police pour les

    explications des uvres exige que le visiteur sapproche pour pouvoir les lire (voir

    Figure 5). Les textes sont prsents uniquement en franais.

    67 Site Web du Muse Jacquemart-Andr : http://www.musee-jacquemart-andre.com/fr/dossiers/desirs-volupte-lepoque-victorienne-2013?galerie=1

  • 42

    Figures 4 et 5 : Cartel simple et panneau de section dans la deuxime salle68

    f. Les aides la visite, en dehors des contenus audio

    Les aides la visite sont dfinies ici comme les dispositifs qui visent tre des

    supports utiliss pendant la visite de lexposition et qui sont disponibles tout

    moment pour le visiteur. Cette dfinition exclut le catalogue69 et les ditions hors-

    srie qui sont vendus dans la boutique la sortie du muse, ainsi que le film

    propos dans la salle des sculptures de la collection permanente o les