les géosynthétiques pour l'étanchéité des ouvrages

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5 es Rencontres Géosynthétiques Francophones 2003 / 2004 Les géosynthétiques pour l'étanchéité des ouvrages hydrauliques et des voies de circulation J-P. Benneton - Ministère de l'Equipement, CETE - LRPC - Lyon - France H. Girard - Cemagref, groupement de Bordeaux, ORH - Cestas - France Résumé Ce document présente une synthèse des communications publiées lors de la 7 ème Conférence Internationale sur les Géosynthétiques dans le domaine de l'étanchéité des ouvrages hydrauliques et des voies de circulation routières et ferroviaires. L'objectif est, à partir de cette synthèse, d'attirer l'attention des lecteurs sur les points essentiels à respecter pour une bonne utilisation et un bon comportement des géosynthétiques utilisés en étanchéité. La présentation est abordée par types d'ouvrages et centrée sur les matériaux d'étanchéité mais sans oublier que ces matériaux sont inclus dans un dispositif d'étanchéité et qu'il s'agit de dimensionner l'ensemble du dispositif (support, drainage, étanchéité géosynthétique, protection éventuelle). Mots clés : 7 ème ICG, géomembranes, géosynthétiques bentonitiques, étanchéité, ouvrages hydrauliques, voies de circulation, bassins routiers. Abstract (Geosynthetics for Waterproofing Hydraulic Structures, Roads and Railways) This document presents a summary of the papers published on the occasion of the 7 th International Conference on Geosynthetics in the field of waterproofing for hydraulic structures, roadways and railway lines. The aim of this summary is to draw the attention of readers to the essential points to be observed to ensure that geosynthetic liners are used and behave correctly. The presentation is organised by type of structure and focuses on the waterproofing materials, but without forgetting that these materials are a part of a waterproofing system and that it is necessary to design that system as a whole: base, drainage, geosynthetic liner, protection if necessary. Key-Words : 7 th ICG, geomembranes, geosynthetic clay liners, waterproofing, hydraulic structures, roads, railways, roadside basins. 181

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5es Rencontres Géosynthétiques Francophones 2003 / 2004

Les géosynthétiques pour l'étanchéité des ouvrages hydrauliques et des voies de circulation

J-P. Benneton - Ministère de l'Equipement, CETE - LRPC - Lyon - France H. Girard - Cemagref, groupement de Bordeaux, ORH - Cestas - France

Résumé

Ce document présente une synthèse des communications publiées lors de la 7ème Conférence Internationale sur les Géosynthétiques dans le domaine de l'étanchéité des ouvrages hydrauliques et des voies de circulation routières et ferroviaires. L'objectif est, à partir de cette synthèse, d'attirer l'attention des lecteurs sur les points essentiels à respecter pour une bonne utilisation et un bon comportement des géosynthétiques utilisés en étanchéité. La présentation est abordée par types d'ouvrages et centrée sur les matériaux d'étanchéité mais sans oublier que ces matériaux sont inclus dans un dispositif d'étanchéité et qu'il s'agit de dimensionner l'ensemble du dispositif (support, drainage, étanchéité géosynthétique, protection éventuelle).

Mots clés : 7ème ICG, géomembranes, géosynthétiques bentonitiques, étanchéité, ouvrages hydrauliques, voies de circulation, bassins routiers.

Abstract (Geosynthetics for Waterproofing Hydraulic Structures, Roads and Railways)

This document presents a summary of the papers published on the occasion of the 7th International Conference on Geosynthetics in the field of waterproofing for hydraulic structures, roadways and railway lines. The aim of this summary is to draw the attention of readers to the essential points to be observed to ensure that geosynthetic liners are used and behave correctly. The presentation is organised by type of structure and focuses on the waterproofing materials, but without forgetting that these materials are a part of a waterproofing system and that it is necessary to design that system as a whole: base, drainage, geosynthetic liner, protection if necessary.

Key-Words : 7th ICG, geomembranes, geosynthetic clay liners, waterproofing, hydraulic structures, roads, railways, roadside basins.

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1. Introduction : ouvrages et matériaux

1.1. Généralités Ce document concerne l'utilisation des géomembranes et des géosynthétiques bentonitiques pour l'étanchéité des ouvrages hydrauliques et l'étanchéité sous les voies de circulation. Depuis maintenant plus de 30 ans, les géomembranes sont utilisées avec succès comme matériau d'étanchéité pour la construction ou la réhabilitation d'un grand nombre de types d'ouvrages tels que barrages, bassins, canaux, plate-formes routières et ferroviaires, … Les bassins incluent différents types d'ouvrages à finalités diverses, en particulier les bassins routiers, de lagunage, d'irrigation, d'eau potable, à incendie, paysagers, piscicoles, pour neige artificielle, de stockage d'eaux brutes et de décantation pour l'industrie, …). Pour ces ouvrages, l'utilisation des géosynthétiques bentonitiques est plus récente. Malgré le caractère novateur qu'elles peuvent encore parfois conserver auprès des utilisateurs, les géomembranes constituent maintenant des solutions à part entière, techniquement et économiquement compétitives, et non plus des solutions variantes à des solutions plus anciennes telles que béton de ciment, béton bitumineux, tapis argileux compactés ou injections. Comme ces solutions, les étanchéités par géomembrane sont des solutions techniques qui nécessitent d'être bien conçues, bien réalisées, bien contrôlées et bien suivies en service L'objectif du présent document est, en s'appuyant sur les communications écrites présentées à la 7ème Conférence Internationale sur les Géosynthétiques [7 ICG - Nice 2002], sur les innovations proposées lors de cette Conférence et sur notre expérience, d'attirer l'attention des lecteurs sur les points essentiels à respecter pour une bonne utilisation et un bon comportement des géomembranes et des géosynthétiques bentonitiques utilisés en barrière d'étanchéité dans les ouvrages hydrauliques et les voies de circulation ; sinon des défaillances peuvent survenir, défaillances qui seront abordées au paragraphe "6". Le document est organisé par types d'ouvrages et centré sur les matériaux géosynthétiques d'étanchéité ; mais il faut garder à l'esprit que ces matériaux sont inclus dans un dispositif d'étanchéité et qu'il s'agit de dimensionner l'ensemble du dispositif (support, drainage, étanchéité géosynthétique, protection éventuelle). Comme nous le verrons dans les exemples présentés, le dispositif d'étanchéité comporte généralement, outre le matériau d'étanchéité, des matériaux granulaires éventuellement liés et différents géotextiles et produits apparentés pour assurer des fonctions de drainage, filtration, anti-poinçonnement, renforcement et "mise en conteneur". L'étanchéité est réalisée par différents types de géomembranes (PVC-P, Bitume, PP-F, EPDM, PEHD,…- les différents sigles et abréviations sont explicités au paragraphe 1.2) et de géosynthétiques bentonitiques. L'ensemble des géosynthétiques fait l'objet d'une présentation générale dans ces 5èmes Rencontres Géosynthétiques Francophones et les propriétés de ces matériaux ne seront donc pas rappelées ici, à l'exception de propriétés spécifiquement en rapport avec les ouvrages hydrauliques. Nous rappelons seulement que ces matériaux sont des matériaux techniques dont les caractéristiques diffèrent et qui doivent être choisis et dimensionnés en fonction de chaque utilisation. Ces matériaux ont fait l'objet, par le Comité Français des Géosynthétiques (CFG), des "Recommandations Générales pour la Réalisation d'Etanchéité par Géomembranes [CFG, 1991] et par Géosynthétiques Bentonitiques [CFG, 1998]". Les communications de la 7ème ICG traitent pour la plupart, sur ce sujet d'ouvrages hydrauliques importants (barrages, grands réservoirs,…) ; ces publications peuvent cependant apporter des informations qui peuvent être utilement reprises et adaptées aux ouvrages courants que constituent les nombreux bassins étanchés par géosynthétiques en France.

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1.2. Quelques abréviations - CSPE : Polyéthylène chlorosulfoné - DEG : Dispositif d'Etanchéité par Géosynthétique - EPDM : Ethylène Propylène Diène Monomère - GMB : Géomembrane - GSB : Géosynthétique bentonitique - GTX : Géotextile - LLDPE : "Linear Low-Density Polyethylene" (peu utilisé en France actuellement) - PEHD : Polyéthylène Haute Densité - PP-F : Polypropylène Flexible - PVC-P : Polychlorure de Vinyle Plastifié - TPO : "Thermoplastic Polyolefine"

2. Les barrages L'utilisation des géomembranes dans le domaine des barrages est ancienne : la première utilisation remonte à 1959, pour la réhabilitation du barrage en enrochements de CONTRADA-SABETTA (Italie), de 32,5 m de hauteur. Depuis cette date, cette solution a été fréquemment utilisée pour étancher ou réhabiliter de très nombreux barrages, qu'ils soient en enrochements, en remblai (sols grossiers) ou en béton ; un groupe de travail de la Commission Internationale des Grands Barrages rédige actuellement un nouveau bulletin sur l'utilisation des géomembranes dans ces ouvrages et a dressé un inventaire de ces utilisations [Lefranc et al, 2002]. Cet inventaire fait apparaître que des barrages de plus en plus hauts sont maintenant étanchés à l'aide de géomembranes, avec des hauteurs atteignant 90 m pour le barrage en remblai de BOVILLA (Albanie) et 190 m pour le barrage en béton de MIEL (Colombie).

Figure 1 - Vue générale du barrage durant la réalisation du Dispositif d'étanchéité par Géomembrane [Gautier et al., 7 ICG]

L'utilisation des géomembranes dans les barrages ne sera pas développée dans ce document orienté vers les ouvrages hydrauliques en général ; il s'agit seulement de rappeler au lecteur cette utilisation dans des ouvrages importants et techniques qui démontre les capacités de la solution "géomembrane". Une bibliographie importante est disponible sur le sujet parmi laquelle peuvent être cités les actes du colloque commun CFG - CFGB (2002) et de la 7ème ICG. Durant la 7ème ICG à NICE, la session spéciale consacrée aux géosynthétiques dans les barrages (volume 3, pp. 969 - 994) s'est appuyée sur 6 communications écrites dont on retiendra notamment, concernant l'étanchéité, la présentation détaillée de la conception, de la réalisation et du contrôle pour 2 barrages en enrochements avec utilisation :

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- d'une géomembrane bitumineuse pour un barrage neuf de 40 m de hauteur [Gautier et al., 7 ICG, p. 975] ,

- d'une géomembrane en PVC-P pour la réhabilitation d'un barrage de 53 m de haut étanché initialement par une couche d'enrobé bitumineux [Scuero et Vaschetti., 7 ICG, p. 987].

A noter que ces 2 types de géomembranes sont de loin les plus utilisés pour l'étanchéité des barrages. Les 2 articles explicitent les avantages techniques et économiques qui ont conduit au choix de la solution "Géomembrane". La communication sur le barrage d'AUBRAC [Girard et al., 7 ICG, p. 709], non rattachée à la session spéciale, peut être mentionnée ici mais elle sera analysée dans le paragraphe 3.2, car elle traite uniquement de la durabilité de la géomembrane PVC-P utilisée ; la durabilité de cette géomembrane est comparée à celle de géomembranes utilisées dans des bassins routiers. On retiendra également la présentation de cas moins courants avec un exemple de réhabilitation de l'étanchéité de barrages en béton à l'aide d'un matériau à base de polyuréthane projeté in situ en plusieurs couches et adhérent au parement sur toute sa surface [Scherrer et al., 7 ICG, p. 983] et un exemple d'utilisation d'un géocomposite d'étanchéité placé au contact du noyau interne d'un barrage en enrochements [Tao et al., 7 ICG, p. 991]. Bien que la présente synthèse n'intègre pas les essais, la communication de Lambert [7 ICG, p. 1391] peut être citée ici : elle concerne le poinçonnement hydraulique des géomembranes et s'applique donc tout spécialement aux barrages et aux grands bassins. Les essais réalisés montrent une corrélation entre les résultats des essais de poinçonnement statique et de traction bi-axiale et ceux des essais de poinçonnement hydraulique ; ce résultat montre que les deux premiers tests peuvent être utilisés pour prévoir le comportement et la résistance des géomembranes soumises à un poinçonnement hydraulique.

3. Infrastructures de transport : bassins, fossés et plates-formes

3.1. Généralités La prise en compte de la protection des ressources en eau au droit des infrastructures de transport est généralisée à tous les projets importants depuis quelques années. Elle consiste à faire la collecte et le traitement des eaux pluviales et surtout la rétention des déversements accidentels de produits chimiques. Des barrières d’étanchéité sont donc mises en place sous la plate-forme, au niveau des cunettes et fossés latéraux de transfert des eaux et des bassins de rétention et de traitement. Dans le cas d’infrastructures routières, au niveau de la chaussée l’imperméabilité du complexe de chaussée en béton bitumineux est généralement considérée comme suffisante et la barrière étanche ne règne que sous le terre plein central (s’il n’est pas revêtu) et sous les accotements. On peut dans certains cas être amenés à protéger des bas de talus dans des zones en déblais et l’ensemble du talus d’une zone en remblai. Ces barrières d’étanchéité peuvent être conçues soit à partir de matériaux naturels du site peu perméables et éventuellement traités, soit, ce qui est le cas le plus fréquent, par un dispositif d’étanchéité à base de géosynthétique (DEG). Le Guide Technique SETRA/LCPC (2002) décrit la problématique de ce type d’étanchéité, les différents types de DEG utilisables, les dispositions constructives spécifiques à chaque type d’ouvrage, les spécifications relatives aux produits utilisés - géotextiles et géomembranes - et à leurs soudures, et l’organisation des contrôles.

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Actuellement au droit des chaussées les géomembranes les plus utilisées (accotements, fossés) sont les géomembranes bitumineuses car leur nature chimique facilite grandement leur intégration dans les matériaux bitumineux des couches de chaussées adjacentes. Au niveau des bassins, les géomembranes PP-F, PEHD, PVC-P, bitumineuses, sont utilisées ; on souhaite généralement une résistance aux hydrocarbures (contact de 3 jours tel que prévu dans le guide SETRA-LCPC), la résistance des soudures des géomembranes EPDM est insuffisante et les géomembranes bitumineuses doivent être traitées spécialement (film de protection au droit des soudures) alors que les géomembranes classiques PVC et PP-F et a fortiori PEHD conviennent. Pour faciliter l’exploitation de l’ouvrage et améliorer la durabilité, il est quasi systématique en fond de bassin, de protéger la géomembrane par une couche granulaire ; la protection par une couche identique en talus (souvent terre végétale) permet une forte protection contre le vieillissement climatique et l’intégration paysagère dans le site et elle est fortement conseillée ; elle nécessite entre géomembrane et couche de protection, la mise en place d’un ou plusieurs géosynthétiques dont le dimensionnement à la fois mécanique et hydraulique doit être soigné ; cette protection, toujours effectuée dans les fossés, ne l’est pas systématiquement dans les bassins pour des raisons de coût.

Figure 2 - Vue générale d'un bassin et mise en œuvre de la géomembrane [Calas et al., 7 ICG] Les communications de la 7ème ICG analysées ci-après dans le paragraphe "3.2" relatent dans un cadre routier ou ferroviaire, la protection de l’environnement par des DEG, réalisés parfois, en solution variante par rapport au projet initial conçu à partir de matériaux d’étanchéité naturels (argiles) ou en béton ; une communication mentionne l’intérêt d’une double étanchéité géomembrane/GSB (avec contact total), une autre souligne les précautions à prendre pour le choix d’une géomembrane PVC-P exposée (sans protection).

3.2. Analyse des communications de la 7ème ICG Dans la communication de Coppinger et al. (2002), pour une autoroute en Irlande passant en tranchée dans une nappe aquifère (niveau 1,5 m à 3,25 m au-dessus de l’autoroute) sur 200 000 m², on utilise une association, couche d’argile compactée/géomembrane ; à noter que dans cet ouvrage, le passage de l’eau va du bas vers le haut. Le projeteur a été amené à choisir entre trois types de DEG ; du haut vers le bas : - solution de base : argile 1 m/GSB/GMB (PVC 1,5 mm ou LLDPE 2 mm)/GTX

(1000 g/m²)/couche granulaire 10/40 mm complétée par couche de surface 0/10 mm, - en solution variante : argile 1 m/GMB bitume 4,8 mm/couche granulaire (idem précédente). Les critères de choix retenus sont la résistance à l’endommagement (planches d’essais sur site) lors de la mise en oeuvre de la couche d’argile (l’argile comporte des blocs jusqu’à 100 mm) et l’évaluation (théorique) du niveau d’étanchéité de la géomembrane.

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Les résultats des planches d'essais ont montré que pour éviter l’endommagement des géomembranes polymères, on a dû limiter le compactage de l’argile (sans vibration) et leur associer un GSB. Dans le cas des géomembranes bitumineuses, on peut éviter l’emploi du géotextile et du GSB tout en pratiquant un bon compactage assurant perméabilité faible de l’argile et bon contact argile/géomembrane. Pour l’évaluation théorique du passage de l’eau à travers le DEG, il est rappelé qu’à travers la géomembrane le transfert est régi par un phénomène de diffusion [Rowe, 1998] et non de perméabilité classique (selon DARCY), par le nombre de défauts (percements) dans la géomembrane et également par la qualité du contact entre géomembrane et sol sus jacent peu perméable : - les débits calculés liés à la diffusion sont : 0,004 l/m²/an pour PEHD, 0,65 pour le PVC de

1,5 mm et 0,05 pour le bitume (pour LLDPE, non connu mais a priori plus fort que PEHD) ; - pour les débits dus aux défauts de la géomembrane, les auteurs rappellent les propositions de

Giroud (1997) : le nombre de défauts a plus d’importance que leur taille ; pour un défaut de diamètre 2 mm et une hauteur d’eau de 3,5 m, le débit est de 1,45.10-7 m3/s pour PVC et LLDPE (avec GSB associée) et 2,02 x 10-7 m3/s pour le bitume (avec 60 cm d’argile associée). On rappelle que statistiquement (du moins pour les étanchéités PEHD de Centres de Stockage de Déchets -CSD) les défauts ne proviennent pas de la fabrication de la géomembrane mais pour 25 % de son installation (20 % soudure et 5 % endommagement), 70 % étant liés à un endommagement mécanique lors de la mise en place de la couche de sol au-dessus (même si mise en oeuvre sans compactage) et 5 % à la mise en service. Avec un bon contrôle qualité, on peut s’attendre à 5 défauts par hectare à l’installation et 14 durant la mise en place du sol sus-jacent (soit un total de 19/ha). Ceci a été ramené à 2 défauts (au lieu de 14) dans le cas du PVC et du LLDPE car il y a une protection par le couple GTX/GSB et le même nombre pour le bitume ; quant à l’installation, pour le bitume le nombre de défauts attendu est ramené de 5 à 1 (plus facile à souder). Soit un total de 7 défauts par ha pour la solution polymérique et 3 pour la bitumineuse. Ce qui correspond à un débit de fuite évalué de 4,5 l/an/m² pour la solution polymérique et 2,7 pour la solution bitumineuse, ce qui rend négligeable les débits de diffusion évalués précédemment.

C’est la solution bitumineuse qui a été retenue puisqu’elle nécessite à performance équivalente l’installation d’un seul géosynthétique au lieu de trois. Cette communication nous inspire deux commentaires : - communication très intéressante pour l’aspect pédagogique des calculs de débits de fuite et le

rappel que l’essentiel de ceux-ci se fait par les défauts et que la qualité du contact entre la géomembrane et son support est primordiale ;

- l’évaluation du nombre de défauts prévisibles pour la géomembrane bitumineuse se fait à partir de données statistiques, essentiellement établies comme l’indique l’auteur, à partir de CSD avec géomembrane PEHD, ce qui peut être discuté.

La communication de Calas et al. (2002) décrit les travaux d'étanchéité réalisés sur l’autoroute A 20 entre Cahors et Souillac pour la protection de l’environnement dans une zone karstique écologiquement sensible. Le Maître d’Ouvrage précise bien sa politique en matière de protection de l’environnement. L’étanchéité des fossés et cunettes latéraux de collecte des eaux sur 22 km est effectuée par géomembrane bitumineuse élastomère et celle des 27 bassins de traitement par géomembrane PEHD (1,5 mm) retenue pour son inertie chimique ; la géomembrane bitumineuse est classique

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(épaisseur : 3 mm) ainsi que sa soudure à la flamme ; la variante "élastomère" a été choisie pour sa souplesse à basse température (- 20° C) mieux adaptée au site et à la saison de travaux que la version "bitume oxydé" ; le type bitumineux a été retenu, entre autres raisons, pour sa facilité de raccordement (par soudure à la flamme) sur différents supports bétons bitumineux (chaussées) et béton de ciment (tuyaux de drainage). Dans les fossés, la géomembrane en largeur 1 à 4 m est déroulée directement sur support 0/20 mm avec simple soudure transversale d’about (tous les 100 mètres) à une vitesse de 500 mètres par jour ; la largeur est définie en fonction du profil de la route et du niveau de sensibilité du site ; en site sensible, elle remonte en talus à 1,5 m au-dessus du fil d’eau ; sur ces dernières zones, la géomembrane est recouverte d’un géocomposite pour retenir les 15 cm de terre végétale de couverture (pentes jusqu’à 1/1) ; ailleurs, elle est recouverte du granulat 0/20 mm utilisé en surface de la couche de base de la chaussée. Dans les bassins : sur les talus, en couverture de la géomembrane PEHD, un géocomposite tridimensionnel sur géogrille retient le sol de couverture (10 cm) qui est stabilisé également par un géocontaineur ; un géotextile (300 g/m²) anti-poinçonnant est mis en oeuvre sous et sur la géomembrane ; en fond de bassin 30 cm de sol de couverture sont disposés. Dans la communication de Garcin et al. (2002), plutôt consacrée aux CSD et à la stabilité sur pente de leurs couvertures, un exemple de conception d'une protection des talus d'un bassin routier est exposé. En effet, par souci d'intégration dans le paysage et de protection de la géomembrane, ces talus comportent de plus en plus fréquemment une couche de terre végétale enherbée dont la stabilité doit être assurée sans transmettre d'efforts à la géomembrane ; l'exemple présenté montre que cette approche conduit à utiliser des géosynthétiques drainants, filtrants et de renforcement. Des calculs sont proposés pour dimensionner les géosynthétiques de renforcement et les tranchées d'ancrage. Dans la communication de Langley et al. (2002), il est décrit la protection contre les venues d’eau météoriques des fondations argileuses hautement plastiques et avec présence de sulfates d’une infrastructure ferroviaire aux USA. Après enlèvement des voies, ballast et sous-ballast et traitement de l’argile à la chaux, on met en place une géomembrane bitumineuse ; celle-ci est classique (bitume oxydé, épaisseur : 5,6 mm) ; la face sablée a été placée au contact de l’argile pour améliorer la résistance au glissement, sans géotextile inférieur ; la soudure à la flamme est classique et le contrôle effectué aux ultras-sons. Le sous-ballast (granularité, nature et épaisseur non mentionnées) est placé directement sur la géomembrane sans géotextile de protection. En commentaire, nous attirons l'attention du lecteur sur le fait qu'il n’y a pas eu d’essai en place d’endommagement permettant de justifier l’absence de géotextile de protection sur la géomembrane, avant la mise en place du sous-ballast. La Communication de Morfeldt et Odemark (2002) se rapporte aussi à la construction d’une voie ferrée ; elle décrit un dispositif d’étanchéité/drainage à base de géomembrane PEHD et de GSB pour la protection de l’environnement (ressource en eau du sous-sol). Dans cet ouvrage en tranchée une solution par DEG a été retenue à la place du cuvelage en béton sur 1500 m (soit 60 000 m²) ; le complexe étanchéité/drainage comprend une géomembrane PEHD

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texturée (1,5 mm) (en haut) et un GSB (4,8 kg/m²) (en bas) avec entre les deux une couche granulaire de contrôle/drainage en gravier 0/20 mm sur 30 cm d’épaisseur ; le GSB est placé sur une couche de sable de 10 cm ; sur 500 m on a seulement la GMB PEHD (30 000 m²) ; des puits d’accès au réseau de drainage (Ø 350 mm) sont placés tous les 60 mètres La position du GSB dans l’ouvrage, sous PEHD, nécessitait une pré-hydratation ; initialement prévue manuellement par arrosage, celle-ci s’est en fait réalisée naturellement par les précipitations pendant la phase de construction jusqu’à l’installation de la géomembrane HDPE sus-jacente ; des contrôles ont été faits pour vérifier la totale hydratation du GSB. Un contrôle régulier des flux drainés est effectué. En commentaire du rapporteur, une question : il n’est pas précisé si la pré-hydratation du GSB se fait après pose de la couche granulaire sus-jacente (on peut supposer que oui). Dans la Communication de Girard et al. (2002) est examinée la durabilité de géomembranes PVC-P utilisées dans des ouvrages hydrauliques à partir de retours d’expérience. Une pathologie anormalement précoce de certaines géomembranes PVC-P, exposées aux UV, sur des ouvrages hydrauliques, ont amené les auteurs à faire une étude bibliographique et un examen approfondi de divers ouvrages. Des indicateurs de vieillissement ont été recherchés et dans la mesure du possible, la nature et les causes des mécanismes de dégradation en cours, afin de pouvoir définir des recommandations pour le choix des produits. Des investigations ont été effectuées sur quatre bassins de recueil d’eaux pluviales routières dans la région lyonnaise d’un volume de 1 000 à 30 000 m3 et sur un barrage en Aubrac. Pour ces ouvrages, la géomembrane PVC-P âgée de 5 à 15 ans est exposée ou non aux UV et immergée ou non ; Au total, 13 prélèvements ont fait l’objet d’essais et d’analyses. Dans le cas du barrage, les prélèvements ont été effectués sur des zones témoins prévues à cet effet. Sur site on effectue des observations visuelles relatives à la fonction étanchéité (fissuration, percement) et en laboratoire des analyses chimiques (pourcentage de plastifiant), physico-chimiques (masse volumique, température de transition vitreuse) et mécaniques (caractéristiques en traction directe). L’analyse de quelques références bibliographiques permet d’élargir la réflexion. A noter que les bassins routiers ne sont remplis d’eau (hauteur maximum 2 à 4 mètres) que par temps de pluie ; le barrage d’Aubrac a une hauteur d'eau quasi permanente de 15 mètres. Il est observé : - une pathologie au jeune âge sur des bassins routiers : sur des géomembranes d’épaisseur 1,2 à

1,5 mm, exposées sur deux des quatre ouvrages, on note au bout de quelques années seulement, un fort retrait dimensionnel associé à une rigidification du produit. Ceci se traduit par des fissurations soit linéaires le long de soudures, soit sous forme d’étoiles en parties courantes et par des arrachements ou déchirures au droit des fixations sur ouvrages béton. Dans ces zones la fonction étanchéité n’est évidemment plus assurée et avec les effets du vent, par temps froid, la surface des zones dégradées augmente vite jusqu’à concerner plusieurs mètres carrés. Pour ces ouvrages dont la géomembrane n’a pas de structure de protection, on observe du fait du retrait au droit du raccordement fond/talus que la géomembrane n’est plus en contact avec le sol

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support (jusqu’à 30 cm d’espace en fonction de la température), ce qui est très gênant pour l’exploitant.

Figure 3 - Exemple de déchirure en étoile [Girard et al., 7 ICG] Les zones les plus affectées par le retrait et la fissuration sont les zones exposées en permanence au rayonnement UV ; sur les échantillons correspondants, on constate une forte perte de plastifiant (pourcentage résiduel : 20 à 23 %, pour une teneur initiale généralement de 35 %), une forte perte de souplesse à basse température (température de transition vitreuse qui passe d’un état initial de -35°C à -4° C), un raidissement important du matériau à température ambiante (l’élongation à la rupture passe de 270 % (environ) à 180-200 % et la résistance à 15 % de déformation peut doubler.

On est en présence de deux mécanismes parallèles de vieillissement bien connus, dégradation du polymère PVC par le rayonnement UV et perte du plastifiant. - des ouvrages ayant un comportement satisfaisant : au barrage d’Aubrac, le comportement à

14 ans d’âge, est très satisfaisant ; la géomembrane est toujours protégée des UV et les pertes de plastifiants sont faibles (le pourcentage reste supérieur à 30 % que le matériau soit immergé ou non), ainsi que les variations des caractéristiques mécaniques (traction et essais d’éclatométrie). Les pertes de plastifiant semblent sensiblement plus fortes dans la zone supérieure non immergée et avec développement de végétation. Sur un des quatre ouvrages routiers, on constate quelques fissurations et une perte de plastifiant dans la géomembrane mais cela peut sembler normal compte-tenu de son âge (15 ans) et de l’absence de protection. Dans la bibliographie, Cazzuffi (1997) puis Fayoux (2000) relatent des utilisations de géomembranes PVC-P en barrages de montagne et en bassins, exposées aux UV, qui présentent des pertes de plastifiant conduisant à des teneurs résiduelles respectivement de 30 % et de 24 à 27 % et qui ont une fonctionnalité satisfaisante pour un âge de 10 à 18 ans.

La composition chimique d’une géomembrane PVC-P est complexe et la durabilité dépend de nombreux facteurs : nature du polymère, stabilisants thermiques et UV, nature du plastifiant, processus de fabrication. Dans cette communication, on note qu’il y a des exemples d’ouvrages où le comportement en durabilité des géomembranes même exposées est satisfaisant et d’autres médiocres ; il y a donc des produits de qualités très inégales ou des mauvaises adéquations entre un produit donné et les conditions de service, ce qui pose un problème au projeteur pour le choix du produit. Les auteurs conseillent d’utiliser des géomembranes certifiées ASQUAL (organisme certificateur, site web : www.asqual.com) pour lesquelles, en plus de la fiabilité que procure de manière générale

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le processus de certification, le règlement impose aux produits une résistance aux UV. La perte de plastifiant pour les géomembranes PVC est un phénomène connu ; Benneton (1994) a montré sur des essais d’immersion de 10 ans en laboratoire que les géomembranes PVC-P commercialisées avaient des comportements très différents et a préconisé au niveau de la qualification des produits, un essai d’immersion accéléré (10 j à 60° C). Dans cette communication, on a noté que la perte de plastifiant est plutôt plus forte en zone non immergée, probablement à cause de la température de service plus élevée. Dans le Guide Technique SETRA/LCPC(2002), cet essai est pris en compte, ainsi que le comportement à la chaleur.

3.3. Enseignements - commentaires Pour de grands chantiers, il est rappelé l’importance de réaliser des planches d’essais pour évaluer la résistance à l’endommagement à la mise en oeuvre et optimiser le DEG et/ou les modalités de mise en oeuvre des couches de protection (CFG, 2003). Pour les géomembranes bitumineuses, les auteurs des communications concernées ont noté la facilité de mise en oeuvre qui devrait conduire, a priori, à un nombre plus réduit de défauts mais des statistiques équivalentes à celles disponibles pour le PEHD seraient utiles ; ces auteurs soulignent également leur facilité de raccordement à divers matériaux présents en travaux routiers : bétons bitumineux et béton de ciment. Cependant si on recherche une résistance aux hydrocarbures (déversement accidentel), il est préférable comme l’indique le Guide SETRA-LCPC (2002) d’utiliser soit une géomembrane bitumineuse spécialement traitée au joint soit une géomembrane de synthèse (PEHD, PVC, PP). Des planches d’essais ont montré une bonne résistance au poinçonnement de géomembranes bitumineuses, mais il est risqué de supprimer les géotextiles anti-poinçonnement en particulier entre géomembrane et couche granulaire du fait du possible percement différé observé sur certains ouvrages. Pour limiter les débits de fuite au travers du défaut ponctuel d’une géomembrane, un bon contact avec le support (sols fins) est important. Un plissement moindre facilite ce contact dans le cas d’une géomembrane bitumineuse. Ceci repose la problématique de l’utilisation ou non d'un géotextile sous-jacent ; la pertinence de l'emploi de ce géotextile est fonction, en particulier, de la perméabilité du support et de son agressivité. Le PVC-P présente des comportements au vieillissement très variables, de très bons à médiocres ; ceci est lié aux conditions d’exposition mais également au produit : une attention particulière doit être apportée au choix de celui-ci (certification ASQUAL, recommandations du Guide SETRA/LCPC). Pour le suivi de la durabilité sur ouvrages, il est souhaitable de développer la mise en place de zones témoins, comme dans l'exemple du barrage d'AUBRAC, qui permettent de prélever facilement des échantillons au fur et à mesure de la vie de l'ouvrage ; cette pratique n'est pas très onéreuse et permet d'obtenir de riches enseignements sur la durabilité des géosynthétiques utilisés sans perturber le fonctionnement de l'ouvrage.

4. Réservoirs et bassins hydrauliques

4.1. Généralités De nombreux types de réservoirs et de bassins font appel à des géosynthétiques pour assurer leur étanchéité (cf. paragraphe 1) et de nombreuses caractéristiques de leur étanchéité sont communes ; celles-ci ont pu être abordées dans le paragraphe 3 ou pourront être traitées à la fin de la présente communication.

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Il s'agit de présenter ici les caractéristiques spécifiques des différents types de réservoirs et de bassins hydrauliques, tout particulièrement les aspects développés durant la 7ème ICG, à l'exclusion des bassins routiers qui sont traités au chapitre 3 consacré aux infrastructures de transport.

4.2. Bassins d'irrigation

4.2.1 Analyse des communications à la 7ème ICG Deux communications ont abordé ce domaine des réserves d'eau pour l'irrigation durant la 7 ICG. Natsuka et al. (2002) ont traité un aspect spécifique puisque concernant les possibilités d'utilisation d'un matériau, un géosynthétique bentonitique (GSB) pré-hydraté et compressé, pour ce type d'ouvrage. Les essais de perméabilité présentés ont l'intérêt d'avoir été réalisés non seulement pour caractériser les parties courantes mais aussi les zones de recouvrement des lés et les zones de contact horizontales et verticales avec des surfaces en béton ; un coefficient de perméabilité apparent (ka), incluant les zones de recouvrement, est proposé et une valeur maximale de 10-11 m/s est donnée pour ce coefficient ka du matériau testé à partir des essais réalisés. Le deuxième aspect étudié en vue de l'utilisation de ce GSB dans les bassins pour l'irrigation est sa stabilité sur pente, des pentes plus raides permettant bien entendu d'augmenter le volume d'eau stockée ; des essais de cisaillement ont été réalisés pour les différentes interfaces et un abaque est fourni, indiquant que, dans le cas général, pour l'interface la moins résistante (bentonite), une couche de 20 cm de sol et un coefficient de sécurité égal à 3, la pente ne doit pas être supérieure à 10°. Les auteurs ajoutent qu'un calcul de stabilité doit être conduit pour chaque ouvrage en prenant en compte l'ensemble des paramètres. Dans la deuxième communication, Leiro et al. (2002) ont présenté les performances de différents types de géomembranes synthétiques utilisées depuis de nombreuses années dans des bassins espagnols pour l'irrigation. L'intérêt de cette étude réside dans le fait qu'elle concerne des ouvrages souvent importants, étanchés au moyen de géomembranes non revêtues, dans des régions soumises à un ensoleillement important. Ses résultats montrent en particulier que : - pour les PVC-P, les pertes en plastifiant peuvent être importantes sans que les auteurs ne

signalent des comportements non satisfaisants ; - à 6 ans de vieillissement (exposé), la perte de déformation à la rupture est d'environ 20 à 25 %

pour le PVC et les polyoléfines et de 40 % pour l'EPDM.

4.2.2 Enseignements et commentaires Des ouvrages de ce type sont fréquemment réalisés en France pour l'irrigation. De tailles plus modestes, il s'agit de bassins pour lesquels l'aspect économique est souvent primordial, en tout cas la pression économique est généralement plus importante que pour des ouvrages de même taille construits à des fins environmentales par exemple. Néanmoins, les maîtres d'ouvrage et d'œuvre ne doivent pas perdre de vue, que même pour ces ouvrages, la prise en compte des recommandations techniques reste indispensable pour atteindre la durée de vie attendue de l'ouvrage. Pour ces bassins, la géomembrane est généralement non recouverte par une couche de protection ; dans ce cas, l'expérience espagnole montre qu'une durabilité acceptable, malgré un vieillissement significatif, peut être obtenue, sous réserve de choisir une géomembrane d'épaisseur suffisante, résistante aux UV et adaptée aux conditions du site. En effet, on peut faire l'hypothèse que, dans les ouvrages espagnols présentés, le comportement reste acceptable car les géomembranes sont peu sollicitées avec en particulier des hivers doux et des surfaces exposées faibles en hiver. On peut regretter que les auteurs n'aient pas plus développé et commenté les résultats de leur importante étude. Concernant ces ouvrages et pour compléter les informations sur la durabilité, l'exemple publié

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récemment par Fayoux (2002) peut être rappelé : il concerne le bassin de BARLOVENTO aux Canaries étanché en 1991-1992 par une géomembrane en PVC-P (capacité : 5,5 millions de m3 ; superficie : 250 000 m2 ; profondeur maximale étanchée : 27 m). Outre la teneur en plastifiant qui reste de 29,4% après 9 ans dans la zone de couronnement la plus exposée, un élément important à noter pour cet ouvrage est le dispositif adopté pour la tenue au vent de la géomembrane sur les talus atteignant jusqu'à 70 m de rampant : il s'agit de 4 tranchées d'ancrage subhorizontales au niveau desquelles la géomembrane a été coupée et soudée ; le comportement de ces soudures est satisfaisant après avoir subi des épisodes de tempête, bassin vide. Par ailleurs, la conception de l'étanchéité des bassins d'irrigation courants devra être tout particulièrement attentive à : - la nature et à la qualité du support qui ne devra pas être trop agressif (risques de

poinçonnement) et permettre si nécessaire le drainage des eaux et des gaz ; - la tenue au vent ; - la stabilité sur pente, notamment dans le cas des géosynthétiques bentonitiques qui nécessitent

une couche de confinement, comme le montre la publication japonaise.

4.3. Bassins de stockage avec couverture flottante

4.3.1 Généralités et analyse de la communication à la 7ème ICG Sadlier et Taylor (2002) présentent des développements récents de géomembranes en polyéthylène utilisées comme couvertures flottantes. Ils rappellent tout d'abord le cadre général de cette utilisation. Les couvertures flottantes en géomembrane sont utilisées sur les bassins notamment en stockage d'eau potable pour éviter toute contamination, en stockage de solutions chimiques pour éviter leur dilution et en protection de l'environnement pour éviter les émanations de gaz et/ou d'odeurs. La couverture flottante devant suivre les variations du niveau de liquide dans le bassin, sa surface doit s'adapter à ces variations ; ceci se traduit par une surface excédentaire lorsque le bassin est plein, surface qui est localisée dans des plis contrôlés par un dispositif basé par exemple sur des lignes de lests placées dans une tranchée et de flotteurs. Afin de résister au vent, la géomembrane de couverture est fixée en crête des talus. Des dispositifs d'évacuation des eaux de pluie sur la géomembrane et des gaz en dessous doivent être mis en place. Afin de répondre aux variations de surface, les géomembranes utilisées en couverture doivent présenter un faible module et posséder des résistances suffisantes en traction généralement obtenues par renforcement ; pour ce type d'aménagement fréquent aux Etats Unis, l'Hypalon a été le plus utilisé (CSPE) avec, plus récemment l'utilisation de Polypropylène renforcé (PP-R). Les auteurs mentionnent également des solutions "mixtes" avec l'utilisation de géomembranes PEHD dans les parties planes associées à des géomembranes CSPE ou PVC renforcées pour les zones où une bonne flexibilité est nécessaire ; mais les raccordements de ces matériaux ont constitué un point faible. Pour palier cet inconvénient, les auteurs proposent l'utilisation d'une nouvelle solution "mixte" comportant une membrane TPO renforcée (Oléfine thermoplastique souple à faible module) pour les zones soumises à de nombreuses sollicitations en flexion (tranchées lestées) et une géomembrane en LLDPE pour les autres zones ; l'intérêt mis en avant par les auteurs est la bonne soudabilité des deux matériaux. En outre, pour assurer une durabilité supérieure à 20 ans, les deux membranes sont fabriquées avec adjonction d'une couche supérieure stabilisée contre les UV.

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Figure 4 - Vue d'un bassin avec couverture flottante en cours d'achèvement [Sadlier et Taylor, 7 ICG] Trois exemples de la technique proposée sont donnés : deux bassins d'eau potable (Australie et Nouvelle Zélande, construction en 2000) et un bassin de traitement (Californie, construction en 1998 - protection contre les odeurs). Cette communication montre que le développement d'un nouveau matériau a permis de réaliser des couvertures flottantes "mixtes" avec des géomembranes adaptées aux différentes sollicitations rencontrées (zones courantes et zones à surfaces évolutives).

4.3.2 Enseignements et commentaires Cette technique est peu utilisée en France. Néanmoins, elle peut s'avérer économiquement intéressante par exemple en remplacement d'ouvrages en béton ainsi qu'en témoignent Tisserand et al. (1995) : ils décrivent en détail le cas du réservoir d'eau potable de ROGLIANO (10 000 m2) réalisé avec succès en Corse en 1994 par l'OEHC (Office d'Equipement Hydraulique de la Corse). Un deuxième bassin de ce type réalisé à ERSA par l'OEHC en 2001 (6 000 m2) est présenté par Fayoux et Ferand (2002), parallèlement à deux bassins industriels, également équipés d'une couverture flottante. Ces quatre bassins réalisés en France possèdent une couverture en PVC renforcé. Dans le cas de l'eau potable, les géomembranes placées à son contact doivent posséder une attestation de conformité sanitaire (ACS) ; à ce sujet, on pourra prendre connaissance du récent article de Pellarin et Kadir (2003) qui font une synthèse sur le système des ACS françaises concernant les matériaux au contact des eaux destinées à la consommation humaine.

4.4. Bassins de Station de Transfert d’Energie par Pompage (STEP)

4.4.1 Généralités et analyse de la communications à la 7ème ICG Takimoto et al. (2002) rendent compte des procédures de mise en œuvre et du comportement d’une géomembrane EPDM utilisée pour l’étanchéité du bassin supérieur de la station de transfert d’énergie par pompage de YAMBARU placée en bordure de l’Océan Pacifique et utilisant l’eau de mer. Ce type d’aménagement nécessite des bassins importants qui sont soumis à des sollicitations particulières, en particulier à des cycles vidange/remplissage très rapides et aux effets du vent (bassin vide). Le bassin de Yambaru a les caractéristiques principales suivantes : volume stocké = 560 000 m3 ; pente des talus = 1/2,5 ; hauteur des talus = 25 m ; longueur maximum des talus = 74 m, avec une risberme intermédiaire ; premières études en 1987 et mise en service de l'aménagement en 1999. La conception du dispositif d’étanchéité de ce bassin, qui a fait l’objet d’un article à la 6ème ICG, a conduit au choix du dispositif suivant : couche support (transition-drainage eau et air) de 50 cm d’épaisseur en grave 0/20 mm, géotextile non-tissé anti-poinçonnant (800 g/m2) et

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géomembrane EPDM (2 mm) ; la géomembrane étant non recouverte, elle est soigneusement ancrée à des éléments en béton partiellement préfabriqués mis en œuvre avant la couche support granulaire. Il convient de noter que ces choix s’appuient sur des études préliminaires spécifiques importantes permises notamment par la durée de conception de cet aménagement innovant. Ainsi, la géomembrane présélectionnée a fait l’objet de tests d’exposition à proximité du site pour confirmer notamment sa résistance aux bactéries, à l’eau de mer et aux dépôts d’organismes marins ; cette géomembrane a été fabriquée spécifiquement pour cet ouvrage avec notamment dans sa formulation, étant donné son utilisation exposée, un pourcentage d’EPDM supérieur à 70 % destiné à améliorer sa résistance à l’ozone. Les dispositifs en béton, qui servent à l'ancrage et au raccordement des lés de géomembrane et au drainage grâce aux deux collecteurs incorporés, constituent un autre élément essentiel de la conception de cet ouvrage ; il s'agit d'éléments préfabriqués en forme de "U" de 2,00 m de long placés dans la couche support dans le sens de la pente (un seul dispositif horizontal au niveau de la risberme intermédiaire) et espacés de 8,50 m sur les pentes et 17 m au fond. Les lés de géomembrane préparés en usine à ces dimensions sont joints sur site au niveau des blocs, les joints étant disposés dans le "U" qui est ensuite empli de béton ; puis ce dispositif est recouvert par une bande de géomembrane collée à la géomembrane principale au moyen d'un ruban adhésif en caoutchouc butyl vulcanisé. Ces ancrages avaient fait l'objet d'études expérimentales préalables consistant en un gonflement de la géomembrane fixée sur ses 4 bords et d'une simulation par la méthode des éléments finis.

Figure 5 - Vue générale de l'aménagement [Takimoto et al., 7 ICG] Les auteurs décrivent en détail les procédures de mises en œuvre des différents éléments du dispositif d'étanchéité et accordent une grande importance au contrôle qualité effectué (matériaux et réalisation) en donnant les tests pratiqués, leur fréquence et les résultats obtenus. Le premier remplissage a eu lieu en 1998, les travaux d'étanchéité ayant été terminés en 1996. Il faut souligner que le bassin a été soumis à des typhons ayant entraîné des soulèvements de la géomembrane jusqu'à 1,50 m. Le dispositif d'auscultation n'a pas mis en évidence de fuites à travers la géomembrane à la date de la publication. La géomembrane a été inspectée visuellement 4 fois entre juin 1999 et octobre 2000. A partir de la mise en service de la station, le dépôt d'une couche de limon a été constaté ainsi qu'un développement d'algues puis l'apparition de coquillages fixés sur la géomembrane, de plus en plus nombreux (photo dans la communication). La géomembrane ne paraît pas avoir souffert de cette prolifération d'algues et de coquillages mais pose le problème du déplacement des contrôleurs et d'engins sur les coquillages qui nécessiteront des précautions spéciales. Enfin des résultats d'essais sur des échantillons témoins de la géomembrane prélevés entre

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décembre 1996 et janvier 2000 sont présentés ; ils montrent que la résistance à la rupture en traction a diminué très lentement alors que l'élongation à la rupture a chuté beaucoup plus vite (environ 35 % en relatif, correspondant à une valeur résiduelle de l'ordre de 300 %). Cette valeur est homogène avec les valeurs relevées pour d'autres sites au Japon ; à partir de l'ensemble de ces valeurs, une extrapolation est proposée par les auteurs qui, en prenant en compte des tassements différentiels pouvant atteindre 100 % et des élongations dues aux vents évaluées au maximum à 57 %, conduit à une durée de vie de la géomembrane estimée à 40 ans, estimation basée sur une déformation résiduelle à la rupture de 100 %.

4.4.2 Enseignements et commentaires L'importance des études et des contrôles, en adéquation avec celle de l'ouvrage, et la qualité de leur description mérite d'être soulignée. Au niveau des choix techniques, celui d'adopter une géomembrane non revêtue conduit à un dispositif d'ancrage élaboré et il apparaît dans ce cas que la géomembrane peut être soumise à des efforts de traction élevés dus aux vents et être le siège d'un développement de différentes formes d'organismes marins, ce développement n'ayant pas entraîné d'endommagement à ce jour.

4.5. Autres types de bassins et réservoirs D'autres types de bassins et réservoirs étanchés fréquemment en France à l'aide de géosynthétiques n'ont pas fait l'objet de communications à la 7ème ICG. On peut citer les réserves à incendie, les réserves pour la production de neige artificielle, les bassins de lagunage, les bassins pour l'aquaculture, les bassins de loisirs et paysagers,… Pour chacun de ces types d'ouvrages, la plupart des recommandations générales et des enseignements apportés par la 7ème ICG s'appliquent ; néanmoins, des spécificités peuvent être à prendre en compte pour chacun d'entre eux, telles que, par exemple : - conditions d'accès (incendie, loisirs,…), - résistance au froid, agression par la glace (réserves pour la neige artificielle), - conditions sanitaires (aquaculture), - résistance chimique (certains lagunages - voir dans ce cas les bassins de stockage de déchets

liquides), - …

5. Canaux

5.1. Analyse des communications à la 7ème ICG Trois communications à la 7ème ICG sont consacrées aux canaux. Strobl et al. (2002) comparent dans leur communication les solutions "géomembranes de synthèse et bitumineuses" pour la réhabilitation de l'étanchéité de canaux de transport d'eau avec les solutions plus anciennes (bétons de ciment et bitumineux). A partir de plusieurs projets et plus particulièrement de l'expérience allemande, les aspects durabilité, risques, coûts et temps de construction sont analysés. La durabilité des solutions anciennes est évaluée à 50 ans alors que celle des géomembranes, y compris les soudures, est évaluée à 30 ans, en se référant également à la bibliographie [Faneli & Scuero, 1995] ; pour ce type de canaux où la géomembrane est non recouverte, une protection contre le vandalisme est conseillée en partie haute (treillis, enrochements au dessus d'une risberme). L'ordre de grandeur de l'économie réalisée avec la solution "géomembrane" est de 15 à 35 % ; la diminution de la rugosité des parois et l'interruption plus courte de service du canal doivent également être pris en compte. Concernant la conception, une méthode de calcul des ancrages est proposée et l'importance du drainage sous la géomembrane pour éviter les sous pressions lors des vidanges rapides est rappelée, généralement placée entre la géomembrane et l'ancienne structure d'étanchéité lorsqu'elle est conservée. Pour le contrôle de

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l'étanchéité de l'ouvrage réhabilité, une méthode nouvelle de mesure de température au moyen de fibres optiques est proposée en complément des méthodes habituelles (mesures de débits, piézomètres) ; cette méthode, d'un faible coût, permet de détecter d'éventuels écoulements [Aufleger et al., 2000].

Figure 6 - Réalisation de l'étanchéité d'un canal [Strobl et al., 7 ICG] Les trois cas présentés concernent trois différents types de géomembranes : PP-F, PVC-P, PEHD, dont les caractéristiques sont comparées et qui sont utilisées en fonction des spécifications propres à chaque ouvrage. Dans le cas de l'ALZKANAL, en Bavière, de section rectangulaire, la géomembrane est présentée comme la seule alternative. Dans la seconde communication, Turley et Goss (2002) décrivent la réhabilitation d'un tronçon du LLANGOLLEN Canal, canal navigable étanché il y a 200 ans avec de l'argile et non repris depuis sa construction. Pour remédier aux fuites constatées sur ce tronçon placé à flanc de colline, éviter toute détérioration de la digue et ainsi protéger les propriétés situées en dessous, les ingénieurs des Voies Navigables anglaises ont fait appel à une géomembrane en bitume oxydé de 4 mm d'épaisseur, pour les différentes raisons déjà évoquées au paragraphe 3 pour ce type de matériau ainsi que pour ses références en France. Une des rives du canal est constituée par un talus en terre alors que, côté habitations, un mur en béton a été réalisé pour renforcer la digue. La prise en compte des contraintes écologiques a entraîné le choix d'une protection en enrochements plutôt qu'en béton de façon à fournir un habitat pour les écrevisses notamment (de même, des trous ont été réservés dans le mur béton pour le passage de campagnols). Les critères de choix de la géomembrane ont notamment porté sur sa résistance au poinçonnement (enrochements en protection), sa facilité de raccordement aux ouvrages béton et la possibilité de contrôler l'ensemble des joints avec un appareil à ultrasons. Le DEG est finalement constitué de bas en haut par : une couche de 250 mm d'épaisseur de granulats concassés (Dmax=28mm), un GTX non tissé (750 g/m2), la GMB, un GTX (400 g/m2), une couche de 100 mm de granulats concassés et la couche d'enrochements (D=150/200 mm). Les deux géotextiles n'étaient pas considérés comme essentiels par le producteur, mais ils ont été spécifiés par le maître d'œuvre en particulier pour protéger la géomembrane en cas de nécessité de faire circuler un engin dans le lit du canal. L'installation et le contrôle sont classiques pour ce type d'ouvrage et de géomembrane. La troisième communication ayant trait aux canaux, de Fleisher (2002), se rapporte à un retour d'expérience de longue durée relatif à l'utilisation d'un GSB pour l'étanchéité d'un canal navigable. Il s'agissait d'assurer l'étanchéité d'un bief du canal HAVEL-ODER, en Allemagne, près de Berlin.

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Les travaux ont été réalisés en 1997. Le point important est la mise en place sous l'eau du GSB, sans interruption du trafic ; cette mise en œuvre, décrite par Heibaum (1999), a bien entendu nécessité des dispositions particulières, avec notamment, pour ce chantier, le remplacement de la couche de confinement par un géocomposite rempli de sable (2 GTX non tissés et 8 000 g/m2 de sable entre eux) et une attention particulière apportée aux recouvrements. Ceux-ci ont 80 cm de large et les vides du non tissé supérieur du GSB ont été remplis par 800 g/m2 de bentonite ; le GSB (4 200 g/m2 de bentonite) et le géocomposite rempli de sable sont enroulés ensemble mais décalés de 80 cm de façon à assurer une protection immédiate du GSB et des recouvrements. Une couche d'enrochements 150/450 mm, de 70 cm d'épaisseur, a été placée sur le géocomposite rempli de sable. Le raccordement de l'étanchéité par GSB aux palplanches qui constituent l'une des rives a fait l'objet d'une conception soignée : joints étanches pour les palplanches, réalisation d'un coin en sol traité, projection de mortier sur les enrochements. La communication rend essentiellement compte des mesures d'auscultation réalisées depuis la mise en place de l'étanchéité et de résultats sur des prélèvements du GSB. Le suivi de la nappe par des puits de mesure a montré, après une montée de celle ci au moment des travaux, un abaissement pour revenir au niveau initial environ 6 mois après la fin des travaux (le niveau du plan d'eau dans le canal est situé 3 m au dessus de celui de la nappe dans le terrain naturel). Comme dans la première communication sur les canaux, des mesures de température sont utilisées pour détecter des fuites éventuelles : mesures par capteurs de température placés dans un tube vertical et mesures en continu au moyen de fibres optiques. Un exemple de mesure est donné qui montre un comportement global satisfaisant mais fait également apparaître une anomalie correspondant à un faible écoulement au raccordement du GSB avec l'ancienne étanchéité argileuse du tronçon voisin. Outre ces mesures indirectes, des échantillons de GSB ont été prélevés en place durant l'été 2001 ; ils montrent que le GSB est visuellement en bon état. Un seul échantillon, prélevé au dessus du niveau normal des eaux, présente une perméabilité au dessus de la valeur prescrite ; celle-ci est attribuée à une diminution de l'épaisseur de la couche de bentonite résultant de la mise en œuvre des enrochements au dessus de l'eau, sans endommagement des géotextiles ; le placement des enrochements dans l'eau n'a pas entraîné de dégradation du GSB. De nouvelles spécifications de mise en œuvre des enrochements ont été élaborées à partir de ces observations. Une faible augmentation de la perméabilité est constatée en particulier pour les échantillons prélevés sous l'eau : elle peut être attribuée aux échanges d'ions sodium par des ions calcium mis en évidence par les analyses chimiques. En conclusion, ces résultats montrent un bon comportement de l'étanchéité de ce tronçon de canal assurée par un GSB mis en place sous l'eau.

5.2. Enseignements et commentaires Les étanchéités géosynthétiques sont de plus en plus utilisées pour l'étanchéité des canaux que ce soit pour des canaux de navigation ou pour des canaux de transport d'eau. En France, les services de la navigation ont de plus en plus recours à ces matériaux pour des raisons techniques et économiques en remplacement des techniques plus anciennes telles que béton de ciment ou bitumineux et injections ou palplanches dans les digues ; par rapport à ces deux dernières techniques, les géosynthétiques ont souvent l'inconvénient de nécessiter la vidange du canal. Fagon et al. [1999] ont dressé un bilan de 10 ans d'utilisation des géosynthétiques pour la réhabilitation de canaux navigables en France. Les canaux de transport d'eau (irrigation, alimentation de centrales électriques,…) sont également de plus en plus souvent réhabilités par des techniques géosynthétiques mais dans ce cas, la géomembrane est généralement non revêtue, sous réserve que la vitesse du courant ne soit pas trop élevée.

6. Synthèse et conclusion Notre document ne donne pas de recommandations détaillées ; nous avons en effet choisi de proposer essentiellement une analyse des communications à la 7ème ICG et d'attirer l'attention du

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lecteur sur les points qui nous paraissent les plus importants plutôt que de reprendre des documents existants parmi lesquels nous rappelons la formation donnée lors des présentes 5èmes Rencontres Géosynthétiques et les trois documents généraux que nous avons cités dans le texte : Recommandations CFG (1991, 1998) et Guide technique SETRA-LCPC (2002). Notre synthèse s'appuie donc sur l'analyse des communications, après avoir présenté les principaux types de pathologies rencontrés et leurs causes. A l'exception d'une communication sur la durabilité, les 17 autres communications analysées consacrées à l'étanchéité des ouvrages hydrauliques et des voies de circulations ne font pas apparaître de pathologies ; ceci reflète la maturité de la technique d'étanchéité par géosynthétiques et le bon comportement général des ouvrages concernés. Néanmoins, ce constat ne doit pas faire oublier que des désordres existent et que des progrès peuvent encore être accomplis pour les éviter et améliorer la durabilité des dispositifs géosynthétiques. De notre expérience, les principales pathologies rencontrées dans les projets où l’étanchéité d’un ouvrage hydraulique est obtenue à partir de géosynthétiques peuvent se classer en trois groupes. Elles peuvent provenir d'une conception inadaptée : - sous pressions entraînant des bulles en fond d’ouvrage liées à un mauvais drainage gaz ou eau

sous la géomembrane, - percements dus à un poinçonnement immédiat lors de la mise en oeuvre ou différé en service et

lié à une mauvaise adéquation entre la résistance au poinçonnement du DEG et les contraintes de mise en oeuvre et de service (en particulier celles relatives à l’état du support et/ou des couches granulaires sus-jacents),

- glissements du DEG sur pente liés généralement à une reprise insuffisante des efforts dus au poids de la couche de sol sus-jacente et éventuellement à un mauvais drainage,

- raccordement à des ouvrages en béton, défaillants du fait d’un mode de raccordement inadapté ou d’un tassement du support au droit de l’ouvrage en béton.

Des défauts de mise en oeuvre peuvent se produire dans les différentes phases successives de réalisation, mais en particulier lors de l’exécution des soudures ; pour celles-ci la présence de personnel certifié ASQUAL, d’un Plan d’Assurance Qualité et d’un Contrôle de celui-ci permet de réduire grandement les risques. Enfin la durabilité physico-chimique de la géomembrane, en particulier liée au vieillissement climatique, peut être insuffisante. Cette durabilité n’est pas forcément facile à apprécier au niveau du projet et du choix de la famille de produit et du produit lui-même au sein d’une même famille, d’autant plus que la durée de vie dépend également du contexte du projet et des conditions de service. Les recherches en cours ainsi que les retours d’expérience permettent des progrès dans ce domaine ; une bonne adaptation de la nature de la géomembrane au projet, l’utilisation de produits certifiés ASQUAL et la mise en place de structure de protection (sol ou couche granulaire) chaque fois que c’est économiquement possible peuvent réduire grandement les risques. Ces principales pathologies dans l’usage des géosynthétiques utilisés pour l'étanchéité se rencontrent encore, bien que la connaissance de leurs causes et en parallèle la connaissance des dispositions à prendre pour y remédier progressent ; il reste à franchir l’obstacle technico-économique qui intervient dans certains projets, souvent les plus modestes, et qui peut défavoriser au niveau des choix du Maître d’Ouvrage les concepts les plus optimisés et les plus fiables. Il reste une marge de progrès qui passe par une meilleure information des différents intervenants, depuis les études jusqu'à la réalisation, le contrôle et le suivi des ouvrages.

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5es Rencontres Géosynthétiques Francophones 2003 / 2004

Cette meilleure information et une bonne diffusion des connaissances récentes sont des objectifs visés par des conférences comme la 7ème ICG et les 5èmes Rencontres Géosynthétiques. Dans ce but, il est intéressant de noter que les communications de la 7ème ICG analysées ici à propos des ouvrages hydrauliques abordent les points principaux de la conception et de la réalisation des dispositifs d'étanchéité par géosynthétiques dans ces ouvrages, et ceci malgré un recueil des contributions quelque peu aléatoire puisque lié aux propositions des auteurs à une conférence internationale. L'apport des communications de la 7ème ICG peut être succinctement résumé ainsi : − les principaux types d'ouvrages ont été traités ; − des exemples d'utilisation des différents types de matériaux ont été donnés ; on retiendra

plusieurs études visant à une sélection technique du matériau le plus adapté à l'usage concerné, confirmant que chaque matériau a ses domaines d'utilisation spécifiques ;

− la protection ou non des géomembranes, avec des exemples proposés pour les deux solutions, reste une question ouverte qui doit être étudiée au cas par cas ; la protection assure la tenue au vent, constitue une garantie contre les agressions mécaniques et confère une meilleure durabilité mais elle crée des risques de poinçonnement lors de sa mise en œuvre et d'instabilité du DEG, le coût est généralement plus élevé et il est plus difficile d'inspecter et de réparer la géomembrane ; dans le cas d'une géomembrane non revêtue, le coût des ancrages pour assurer la tenue au vent ne doit pas être sous estimé et la durabilité doit être évalué aussi soigneusement que possible ;

− la mise en place sous la géomembrane d'un géotextile ou d'une couche granulaire drainante augmente les risques de fuite comparé à la solution de la géomembrane placée au contact d'une couche argileuse mais l'interposition d'une couche perméable permet le contrôle de l'efficacité de l'étanchéité principale ; les deux solutions ont été mises en œuvre dans les exemples proposés ;

− le sujet de la stabilité sur pentes des couches de protection a été traitée plusieurs fois ; − la résistance au poinçonnement est également une question essentielle du dimensionnement des

DEG et on retiendra un exemple de planches d'essais d'endommagement in situ décrites en détail qui ont permis le choix du DEG définitif ;

− la durabilité physico-chimique est satisfaisante si on prend des précautions quant à l'adéquation entre la nature du produit et les conditions de service ;

− l'utilisation d'une couverture flottante a été présentée, solution qui devrait trouver des applications plus fréquentes en France ;

− enfin, il est conseillé au lecteur de consulter les différents thèmes traités à la 7ème ICG et en particulier celui des centres de stockage de déchets et celui des essais où il trouvera également des informations pertinentes pouvant être appliquées au domaine de l'étanchéité des ouvrages hydrauliques.

7. Bibliographie

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