les coniques : une source de situations d’enseignement...

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LeS cOniQueS : une SOurce De SiTuATiOnS D’enSeignemenT-ApprenTiSSAge Au cOLLÈge eT Au LYcÉe 1 herinaina Elysé raJaonariManana, andré ToTohaSina irEMi MaDagaSCar ToUrnES Dominique irem de La rEUnion REPERES - IREM. N° 110 - janvier 2018 à tous les acteurs de l’éducation d’œuvrer pour une éducation de qualité, une convention sur l’édu- cation nationale s’est tenue à antananarivo, en octobre 2014, durant laquelle les partici- pants- dont nous avons fait partie- ont propo- sé des réponses à la question : Comment mettre en œuvre une éducation « inclusive, accessible et de qualité pour tous » dans le contexte mal- gache et mondialisé actuel ? Même si les actes de cette convention ne sont pas encore disponibles, nous pensons que la qualité de l’enseignement en général et des mathématiques en particulier doit afficher le même défi que l’Unesco (2011) veut relever : la formation d’enseignants qualifiés capables de mettre en œuvre un enseignement-apprentis- i. — introduction À Madagascar, le nombre d’élèves qui optent pour la série C, que nous appellerons série scientifique, diminue d’année en année. Le taux moyen de réussite au baccalauréat scien- tifique est environ de 40%. Environ 8% des can- didats au baccalauréat optent pour la série scientifique. Le même constat se voit aussi dans l’examen du brevet d’étude du premier cycle (BEPC) qui sanctionne la fin du collège. En effet, sur deux années consécutives, nous avons conduit une étude de la réussite des élèves et, chaque année, sur 1500 copies d’examen de mathématique, 5.3% ont obtenu des notes supé- rieures ou égales à 30/60 parmi des notes qui varient de 01.5/60 à 59/60. afin d’apporter un souffle nouveau au système éducatif malaga- sy et tracer les voies et moyens qui permettraient 37 résumé : Cet article relate les résultats des expériences menées dans des classes de Madagascar et de la réunion. il propose des activités possibles et faisables pour introduire les coniques dès le début du collège et rapporte l’importance de l’enseignement des coniques pour développer des compétences élèves et pour apporter un changement de l’image (négative) que ces derniers se font en général des mathématiques, de leur enseignement et de ceux qui les enseignent.

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LeS cOniQueS : une SOurce De SiTuATiOnS

D’enSeignemenT-ApprenTiSSAge Au cOLLÈge eT Au LYcÉe

1

herinaina Elysé raJaonariManana, andré ToTohaSina

irEMi MaDagaSCar 

ToUrnES Dominiqueirem de La rEUnion

REPERES - IREM. N° 110 - janvier 2018

à tous les acteurs de l’éducation d’œuvrer pourune éducation de qualité, une convention sur l’édu-cation nationale s’est tenue à antananarivo,en octobre 2014, durant laquelle les partici-pants- dont nous avons fait partie- ont propo-sé des réponses à la question : Comment mettreen œuvre une éducation « inclusive, accessibleet de qualité pour tous » dans le contexte mal-gache et mondialisé actuel ?

Même si les actes de cette convention nesont pas encore disponibles, nous pensons quela qualité de l’enseignement en général et desmathématiques en particulier doit afficher lemême défi que l’Unesco (2011) veut relever :la formation d’enseignants qualifiés capables demettre en œuvre un enseignement-apprentis-

i. — introduction

À Madagascar, le nombre d’élèves quioptent pour la série C, que nous appellerons sériescientifique, diminue d’année en année. Letaux moyen de réussite au baccalauréat scien-tifique est environ de 40%. Environ 8% des can-didats au baccalauréat optent pour la sériescientifique. Le même constat se voit aussidans l’examen du brevet d’étude du premier cycle(BEPC) qui sanctionne la fin du collège. En effet,sur deux années consécutives, nous avonsconduit une étude de la réussite des élèves et,chaque année, sur 1500 copies d’examen demathématique, 5.3% ont obtenu des notes supé-rieures ou égales à 30/60 parmi des notes quivarient de 01.5/60 à 59/60. afin d’apporter unsouffle nouveau au système éducatif malaga-sy et tracer les voies et moyens qui permettraient

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résumé : Cet article relate les résultats des expériences menées dans des classes de Madagascaret de la réunion. il propose des activités possibles et faisables pour introduire les coniques dèsle début du collège et rapporte l’importance de l’enseignement des coniques pour développer descompétences élèves et pour apporter un changement de l’image (négative) que ces derniers sefont en général des mathématiques, de leur enseignement et de ceux qui les enseignent.

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des sciences, et quelque fois de façon inat-tendue. De plus l’enseignement de la géométrieentraîne les élèves au raisonnement mathé-matique, c’est à dire à un mélange de rai-sonnement déductif et d’imagination induc-tive, activé par une manipulation familière desimages. De ce fait elle prépare les élèves à abor-der d’autres théories mathématiques. »

Comme un enseignement scientifique pourtous sous-entend un enseignement mathématiquepour tous, l’enseignement de la géométrie estainsi un terrain de prédilection pour l’initiationmathématique. Et nous donnerons ci-après desraisons pour lesquelles notre choix s’est portésur le thème des coniques.

ii. — Pourquoi les coniques ?

ii.1 rappels historiques

historiquement, les coniques, comme adit rinCon (2011), ont toujours fasciné lesmathématiciens aussi bien grecs qu’arabes tantpour leurs applications en optique, en astro-nomie et dans le domaine militaire que pour leurintérêt mathématique propre. Leur étude a faitl’objet de plusieurs traités, entre autres le trai-té sur les coniques en huit livres d’apolloniusde Perge (262-190 av. J.-C.), et a donné nais-sance à des machines à construire, dont beau-coup sont relatées dans l’ouvrage  Les construc-tions mathématiques avec des instruments etdes gestes  (Barbin,  2014), ou à détruire, àl’instar de la légende des miroirs ardents lorsdu siège de Syracuse vers l’année 213 av. J.-C. (Walbank, 1970, p.62).

L’apparition des coniques remonterait versle 5ème siècle avant notre ère. C’est dans l’aca-démie, une école créée par le philosophe Pla-ton, où l’on trouvait à l’entrée l’inscription« nul n’entre ici s’il n’est géomètre  », queMenechme, un disciple de Platon, dans ses

sage stimulant, de faire en sorte que les élèvesen aient une image plus positive qu’ils se sen-tent capables de réussir, de casser le cloison-nement entre les différents domaines et de pra-tiquer l’interdisciplinarité.

il nous apparait alors urgent de montrer quel’activité mathématique est en fait :

« une activité humaine aux multiples facettes,très loin des stéréotypes qui lui sont attachésdans la culture commune et qu’elle fait ren-contrer différents contenus aux élèves :poser des problèmes ou les reformuler pourles rendre accessibles à un travail mathé-matique, modéliser, explorer, conjecturer, expé-rimenter, représenter et formuler en déve-loppant des langages spécifiques, argumenteret prouver, développer des méthodes, élaborerdes concepts et les relier au sein d’espacesstructurés, échanger et communiquer  »(Unesco, 2011, p.11).

En prenant spécialement la géométrie,domaine dans lequel se situe le sujet de notrerecherche, son enseignement aurait au moins deuxavantages par rapport au développement de lacapacité intellectuelle de l’homme selon Bkouche(1997, p.54) :

« – tout d’abord, l’apprentissage de la géo-métrie construit chez l’enfant l’intelligibili-té ou la compréhension du monde sensible,ainsi que celle de l’intuition géométrique ;

– ensuite, la géométrie est riche d’applicationsultérieures dans d’autres domaines de lascience. »

Des intérêts que Brousseau (2000, p.2)confirme en disant que :

« La géométrie intervient, par ses objets, parses énoncés, par ses méthodes, et par lesreprésentations qu’elle propose dans de trèsnombreuses branches des mathématiques et

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recherches sur la section de cône, aurait décou-vert vers 350 av. J.-C. les courbes coniquescomme étant les sections de cône par un planperpendiculaire à une génératrice.

La section dépendait donc de l’angle au som-met du cône :

— si l’angle au sommet était aigu, les géomètresgrecs appelaient la section oxytome (ellip-se) ;

— si l’angle au sommet était droit, ils appe-laient la section orthotome (parabole) ;

— si l’angle au sommet était obtus, ils appe-laient la section amblytome (hyperbole).

Mais ce n’est que plus tard (vers 210 av.J.-C.) qu’apollonius a défini les coniquescomme intersection d’un cône par un plan,sans que celui-ci soit nécessairement perpen-diculaire à une génératrice. apollonius distinguetrois cas, selon que le plan sécant :

— coupe deux génératrices (la section est uneantobole),

— est parallèle à une génératrice (la sectionest une parabole),

— est parallèle à deux génératrices et ne passepas par le sommet (la section est une cour-be à deux branches : l’hyperbole).

L’origine des noms des trois courbesconiques revient à apollonius qui, en utilisantla méthode pythagoricienne de l’applicationdes aires (Euclide, 1819, p.167-173), était arri-vé aux propriétés fondamentales des sectionsconiques exprimées comme des égalités entreaires que nous écririons actuellement:

— y² = px pour la parabole (parabole signifieapplication, donc idée de comparaison)

— y² = px+p/ax² pour l’hyperbole (hyperbo-le signifie dépassement, une idée de jeterau-dessus)

— y² = px – p/ax² pour l’antobole (ou ellipsequi signifie défaillant, une idée d’insuffi-sance).

Dans ces égalités, y désigne l’ordonnéed’un point de la section conique, x son abs-cisse, p est la mesure d’un segment qu’apol-lonius appelait « côté droit » ou « latus rec-tum » et a la longueur du grand axe ou de l’axetransverse.

Les deux grands problèmes que sont laduplication du cube et la trisection de l’angleet dont la résolution nécessitent l’utilisationdes sections coniques sont classés dans les pro-blèmes solides par les géomètres grecs.

Si après Pappus (4ème après J.C.), lesétudes sur les sections coniques n’ont pasbeaucoup avancé chez les grecs, (Coolidge, 1968,p.26), il n’en est pas de même chez les arabes.En effet, les frères Banû Mûsâ (Muhammad,ca. 873 ; ahmed et al-hassan, 9ème s.) se sontintéressés très tôt à l’étude des sections coniqueset ont écrit un traité dont le titre est : Traité dela figure arrondie et allongée (Bouzari, 2015,p.43). La version arabe des Coniques fut consti-tuée grâce à leurs apports en lemmes et pro-positions, et la théorie des sections coniques occu-pa une place centrale dans les mathématiquesarabes. Des applications des courbes coniquesfurent trouvées par al-Khayyâm  (m. 1131),comme la construction de l’ennéagone régulieret la théorie géométrique des équations algébriquesde degré inférieur ou égal à trois. Par les tra-cés de coniques, il détermine le nombre des racinesréelles et les évalue approximativement. (Bou-zari, 2015, p.46).

au 17ème siècle, un intérêt majeur pour lessections coniques est apparu en Europe. Cecis’est manifesté par les nombreuses œuvres(Coolidge, 1968, p.32-66) des mathématiciensde cette époque. Si actuellement, nombreux

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sont les enseignants qui n’associent les courbesconiques qu’à la forme quadratique des courbesdu second degré :

ax² + 2Bxy + Cy² + 2Dx + 2Ey + F = 0

où a, B, C, D, E, F sont des réels tels que (a, B,C) ≠ (0,0,0). Signalons que le traitementalgébrique des sections coniques a été développépar rené Descartes (1596-1650), Pierre deFermat (1601-1665) et Leonhard Euler(1707-1783).

ii.2. Des raisons du choix

ii.2.1. Des défis à relever

notre choix est dicté par le souci de rele-ver deux défis sur l’enseignement-apprentissagedes mathématiques à Madagascar.

Le premier défi à relever est de donnerune image plus positive des mathématiques etdes mathématiciens à la société. nous devonsmontrer que les mathématiques contribuent audéveloppement de l’individu et de la sociétéen prenant part à la résolution des problèmesqui nous préoccupent à l’aide d’outils techno-logiques appropriés. Pour cela elles doivents’ouvrir à toutes les disciplines et vaincre le cloi-sonnement qui existe en leur sein même.

Le second défi est l’évolution des pra-tiques d’enseignement. actuellement, l’ensei-gnement dispensé à l’école est peu stimulantd’après les enquêtes et les observations quenous avons faites. Former des enseignants qua-lifiés, capables de faire face à l’imprévu etd’aider les élèves à créer des liens entre lesconnaissances dispensées à l’école et cequ’ils voient dans leur vie quotidienne, estun grand challenge.

Passons brièvement en revue le systèmede formation initiale et continue, puis le pro-

gramme scolaire de mathématiques à Mada-gascar.

ii.2.1.1. Le système de formation initiale et continue à Madagascar.

À Madagascar, le système éducatif est detype 5-4-3. Le cycle primaire, dénommé EF1ou éducation Fondamentale du premier cycle,dure 5 ans ; le cycle collège dénommé EF2 ouéducation Fondamentale du deuxième cycle,dure 4 ans ; enfin, le cycle lycée dure 3 ans.

Le document de travail de la Banque mon-diale dans le secteur éducation rapporte qu’àMadagascar,

« la qualité de l’enseignement en général etl’enseignement secondaire en particulier estmédiocre et cette situation s’explique par lemanque de matériel didactique, mais aussi etsurtout par le manque de qualification des ensei-gnants. En 2004, seuls 20 % des professeursdes collèges et 33 % des professeurs deslycées possèdent les diplômes d’enseignementrequis» (ramanantoanina, 2008, p.xv).

C’est-à-dire au moins le diplôme Bac+2 pourle collège et Bac+3 pour le lycée.

Comme « Les enseignants sont le maillonclé de toute évolution positive et durable des sys-tèmes éducatifs  » (UnESCo, 2011, p.27),qu’en est-il de leur formation initiale et conti-nue à Madagascar ?

Le système de formation initiale à Mada-gascar est assuré par deux établissements  :l’inFP 1 et les EnS 2. L’inFP a la charge de laformation initiale des enseignants du primaire,des professeurs de collège et des conseillers péda-gogiques de l’enseignement primaire. Les EnS,au nombre de quatre, ont la charge de former

1 institut national de Formation Pédagogique.2 Ecole normale Supérieure

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les enseignants des lycées (trois EnS), et l’écolenormale supérieure de l’enseignement tech-nique (EnSET) d’antsiranana forme les ensei-gnants des lycées techniques et professionnels.

La formation continue dans le domaineprimaire et collège est aussi une attributionde l’inFP. Les recrutements pour la formationà l’inFP et ses centres régionaux (CrinFP) sefont sur concours parmi les bacheliers. Lesformations continues sont programmées durantles pauses scolaires des enseignants. Ce sontsoit des formations in situ où les formateurs rejoi-gnent les établissements pour observer etconseiller les enseignants, soit des séances deformation mutuelle entre les enseignants pouréchanger et trouver ensemble des solutionsaux éventuels problèmes rencontrés dans l’ensei-gnement/ apprentissage. L’inFP projette ladiffusion de documents d’autoformation pourque les enseignants puissent réactualiser leursconnaissances académiques.

Les étudiants formés dans les EnS etEnSET sont recrutés par voie de concoursaprès le Bac et suivent des formations pendant5 ans, mais avec le système LMD mis en placeau sein des universités de Madagascar, ils peu-vent enseigner directement après la licence oucontinuer jusqu’au master. actuellement, laformation continue des enseignants des lycéesn’est pas encore bien structurée, les réunionsentre les professeurs d’une même discipline sefont au sein de leur établissement et sont axéesgénéralement sur la répartition semestrielledu programme de chaque niveau (seconde,première, terminale).

En tant qu’enseignant dans des lycées, for-mateur d’enseignants de mathématiques descollèges et de conseillers pédagogiques du pri-maire à l’inFP depuis de nombreuses années,il nous parait intéressant de faire état des repré-sentations que les enseignants de mathéma-

tiques ont de leur métier. notre vécu en côtoyantles enseignants des collèges et des lycées nouspermet de décrire une des réponses à cettequestion : c’est un travail comme tout autre. Endébut de carrière, il y a un gros travail de pré-paration qui s’inspire, en grande partie, descours de professeurs chevronnés ou encore deleurs propres cours quand ils étaient collégiensou lycéens. Ensuite, cela devient généralementde la routine : on reprend les cours et les exer-cices des années précédentes.

L’enseignement des mathématiques est alorsune éternelle répétition, et pour le professeur etpour les élèves  : des leçons à apprendre parcœur, des méthodes à appliquer sur des exercicesstéréotypés, des démarches à reproduire en clas-se et à l’examen. Des pratiques pédagogiques dustyle transmissif durant lesquelles les élèves nefont généralement qu’accepter ce que le pro-fesseur dicte et donne. Des professeurs qui ne tien-nent pas, ou ne veulent pas tenir compte desreprésentations que leurs élèves ont des savoirsqu’ils veulent faire acquérir. ne nous étonnonspas alors si les élèves ne sont pas motivés, carils ne se sentent pas partie prenante dans laconstruction de leur savoir. Cette attitude a deseffets néfastes sur leur niveau en mathématiques.Pour les professeurs, la faute revient toujours auxélèves en disant que ces derniers n’apprennentpas leurs leçons, ne font pas les exercices qu’onleur propose et n’ont aucun raisonnement logique.

Par ce constat, ces professeurs avouent,sans doute inconsciemment, leur propre échecdans l’acte d’enseigner.

En effet, un des objectifs de l’éducationmathématique n’est-il pas de permettre auxélèves d’exercer à leur niveau les moyens de lapensée mathématique que sont l’abstraction, lagénéralisation, le raisonnement logique et la preu-ve, la symbolisation mathématique, et d’encomprendre la puissance ? (UnESCo, 2011, p.16).

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ii.2.1.2. Le programme scolaire de mathématiques à Madagascar

En mathématiques, le programme envigueur est celui de 1996 dont le contenu estcalqué en grande partie sur le programmefrançais de ce temps. il est présenté sousforme de tableau à trois colonnes. La pre-mière colonne précise les objectifs spéci-fiques (dans les domaines  : savoir, savoir-faire, savoir-être) à atteindre pour une notiondéterminée ; la deuxième colonne indique lescontenus à enseigner ; des observations pourdes contenus ou des démarches pour l’ensei-gnement-apprentissage constituent la troisiè-me colonne. Les aménagements, lorsqu’il yen a, se limitent en général à la suppressionou à la circonscription de certains intitulés ounotions.

La révision des programmes et des méthodesd’enseignement-apprentissage en mathéma-tiques est alors un besoin urgent car il existe unvaste fossé entre ce qui est prescrit et ce qui estréellement mis en œuvre (ramanantoanina,2008, p.73). nous pensons que la qualité de laformation des enseignants y est pour beau-coup : ces derniers ne sont pas formés pour lamise en œuvre du programme, outre le manquede manuel et matériel didactique.

Concernant la partie dévolue à la géomé-trie, elle est en général traitée en dernier parles professeurs, qui aiment bien commencerpar l’algèbre et l’analyse. Sur 150 élèves de laclasse de seconde du Lycée rabearivelo, doncceux qui viennent de finir les années du collè-ge, 133 pensent que la géométrie est essentiel-lement analytique. D’ailleurs, il ne peut pasen être autrement, car les professeurs ont apprisla géométrie analytiquement, les sujets d’exa-men au brevet sont essentiellement analytiques,et rares, voire inexistantes, sont les formationsen géométrie synthétique dont les professeurs

ont pu bénéficier. Par suite, il n’est pas surprenantque les enseignants éprouvent des difficultés pourenseigner à leurs élèves ce qu’eux-mêmes n’ontpas appris.

nous allons maintenant exposer les rai-sons pour lesquelles nous avons choisi lesconiques comme thème de notre expérimenta-tion didactique.

ii.2.2. Une notion dans le programme scolaire malagasy

L’étude des coniques figure dans la partiegéométrie du programme scolaire malagasy(MEn, 1999) et elle doit être traitée en classeterminale scientifique. Le contenu du pro-gramme sur les coniques est le suivant :

« Les coniques : - Définition géométrique :bifocale, foyer et directrice. - Equation car-tésienne réduite des coniques propres. - Equa-tions paramétriques d’une ellipse, d’une para-bole. - Tangente en un point d’une conique.- régionnement d’un plan par une conique. »

La logique du programme serait de défi-nir géométriquement les coniques par foyer-directrice et excentricité, puis de donner unedéfinition bifocale des coniques à centre.C’est seulement après que viendraient leséquations cartésiennes, paramétriques et lestangentes. ainsi une approche géométrique desconiques comme lieu de points suivie del’étude des expressions analytiques des courbesconiques correspondrait à la démarche chro-nologique suggérée dans le programme sco-laire. Cependant, le manque de formation desenseignants en géométrie ne leur permet pasd’assumer convenablement cette approchegéométrique. Cette lacune dans la formationétait mise en exergue lors de la correction del’épreuve de mathématiques au baccalauréat

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scientifique de 2012, dans laquelle une cen-taine de professeurs de mathématiques de larégion d’antananarivo ont débattu sur la per-tinence de la question : « Déduire la nature dela courbe Γ formée par l’ensemble des pointsM du plan vérifiant 2MF 2 = Mh 2 où F est unpoint fixe n’appartenant pas à une droite don-née D, et h le projeté orthogonal de M sur D ».

La détermination de la nature de Γ, quin’est autre qu’une ellipse de foyer F et d’excen-

tricité , mais que beaucoup de professeurs

ne savaient pas reconnaitre, a pris une bonnepartie du temps dévolu à la commission d’har-monisation de la correction.

il est encore temps, à la veille d’une réfor-me du programme scolaire malagasy, de sen-sibiliser les concepteurs de programme surl’importance de la géométrie qui figure enco-re dans le programme actuel mais qui, parmanque de formation des enseignants tend àêtre négligée, voire supprimée. relever ledéfi d’assurer une formation initiale et conti-nue des enseignants de mathématiques engéométrie, d’abord au sein des CrinFP et desEnS, puis par des informations-formations dansle cadre de groupes irem, serait alors la tâchecruciale de tous les formateurs en mathéma-tique à Madagascar.

Signalons qu’en France, l’étude des coniquesne figure plus au programme du lycée. Trga-lova (1995), dans sa thèse, met en évidence lesproblèmes relatifs à leur enseignement en invo-quant : un manque d’outils géométriques à dis-position des enseignants, outils qui leur per-mettraient de faire une étude profonde de leurspropriétés géométriques ; une insuffisance deformation des enseignants pour faire apprendreles coniques ; une difficulté, voire une impos-sibilité, de la construction de la connaissance

1

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géométrique de cette notion par les élèves à caused’une approche analytique précoce. Elle pro-pose alors l’utilisation d’un logiciel de géo-métrie dynamique, Cabri-géomètre, pour contour-ner ces problèmes.

ii.2.3. Des intérêts didactiques

ii.2.3.1. Coniques : interface entre plan, solide et espace

Le contenu de l’enseignement-apprentis-sage des coniques, du fait qu’elles sont descourbes qui jouent le rôle d’interface entreplan, solide et espace, cadre bien avec la psy-chologie de la géométrie comme l’a soulignéMorris (1987, p.83) :

« nous considérons comme essentiel le faitqu’un élève apprenne les propriétés de l’espa-ce où il vit et qu’il perçoit par ses sens, en par-ticulier le toucher et la vue. La base del’apprentissage doit donc être l’expérience tiréed’activités pré-mathématiques (jeux avec desmodèles, constructions, etc.) ainsi que d’acti-vités mathématiques (dessin, établissement deplans, tris, etc.). »

Partant d’un article sur une introductionprécoce de l’enseignement des coniques(Totohasina, 2008), notre recherche voudraitmettre en évidence l’intérêt didactique deleur étude en combinant les deux géométriesque sont la géométrie synthétique et la géo-métrie analytique. nous allons essayer dechanger la conception qui a pris et continueà prendre beaucoup d’ampleur chez nosélèves, vision selon laquelle la géométrie serésume à des calculs sur les coordonnées, etest donc purement analytique.

Les coniques, vues comme section de l’objetsolide qu’est le cône, font appel à la fois àl’étude des solides (donc de l’espace) et à l’étude

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des courbes planes (donc du plan). Par rotationautour de leur axe focal ou non focal, les coniquesnon dégénérées engendrent les quadriques de réfé-rences : l’ellipsoïde, l’hyperboloïde à une ou àdeux nappes, le paraboloïde elliptique.

ii.2.3.2. Coniques : pour combler des lacunes.

De par les multiples activités que l’on peutconcevoir, les élèves des collèges et lycéespeuvent acquérir des savoirs et savoir-faire engéométrie synthétique. En effet, dès la créationde l’algèbre par Mohammed al-Khwarizmi(vers 780-vers 850) et son utilisation par Des-cartes (1596-1650) pour résoudre des pro-blèmes géométriques, l’algébrisation de la géo-métrie ou la géométrie analytique a pris tellementde place que, actuellement, il nous est habitueld’entendre des enseignants se plaindre de la fai-blesse de leurs élèves dans les séances deconstruction avec des matériels classiques degéométrie. nous pensons qu’à force de tropvouloir, nous arrivons à ne rien avoir. À vou-loir trop démontrer par la méthode algébrique,nos élèves perçoivent les mathématiques commeune discipline excessivement abstraite, ce quinuit fortement à leur motivation et à l’image qu’ilsse font des mathématiques et des mathémati-ciens. C’est une des raisons qui poussent bonnombre d’élèves à s’orienter vers un ensei-gnement plus axé vers la littérature, et un fac-teur de la diminution du taux de réussite aux exa-mens du bac scientifique.

Combien de fois voyons-nous des cours degéométrie sans figures et combien de nos élèvesn’ont pas recours à un petit dessin ou un sché-ma d’illustration quand on leur demande dedémontrer une proposition en géométrie, enanalyse ou en algèbre ?

généralement, l’homme aime le connu, lefamilier, sans vouloir pour autant se condam-

ner à vivre dans la routine. nous pensons qu’ilen est de même dans un apprentissage : il esttoujours réconfortant pour un apprenant de seretrouver devant des situations, des notions oudes objets qui lui sont familiers ou concrets. Eneffet, ayant confiance en lui-même, ces situa-tions- didactiques ou adidactiques - l’encoura-gent à aller toujours de l’avant, car il sait qu’ilpeut toujours se référer à des choses qui lui sontdéjà connues, et par suite, il est presque sûr dene pas se perdre. Cependant, un élève qui n’aque « le plan » comme support concret, auraitcertainement des difficultés pour résoudre desproblèmes autres que « les problèmes plans ».Et s’il n’a pas de connaissances sur « le soli-de », il ne sera certainement pas apte à résoudredes « problèmes solides  ». Faisons alors ensorte que nos élèves aient l’habitude de sereprésenter par des dessins ou des schémas lesproblèmes qu’ils doivent résoudre. Essayons,autant que possible, de donner à nos élèves lachance de raisonner en s’appuyant sur desnotions concrètes et de relier les savoirs à deschoses simples qu’ils peuvent voir et percevoir,en leur faisant manipuler, autant que faire se peut,des instruments.

En effet, celui qui tient en main un instru-ment détient une connaissance mathématiqueplus ou moins élaborée (Barbin, 2014, p.x). Sinous réduisons les supports concrets de nosélèves, ils se représenteront les mathématiquescomme une matière qui n’a aucun lien avec laréalité. alors, l’essence même de cette disciplineest remise en cause car la naissance d’unenotion y est toujours précédée d’un besoin derésoudre un problème « concret ». Une solutiontrouvée est alors une prémisse de la construc-tion des mathématiques, mais pas son applica-tion (ibid., p.xiv). nous ne sommes pas contrel’algébrisation, un outil très puissant d’abs-traction, mais nous voulons trouver le justemilieu pour que nos élèves appuient leur réflexionsur des objets qu’ils peuvent voir, toucher, etc.,

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c’est-à-dire correspondant au premier niveau dansla taxonomie de van hiele (1988, p.5).

Parmi nos élèves, beaucoup ne vont pas fairedes mathématiques très poussées. ils ont alorsbesoin de les voir comme un outil pratiquepour répondre aux besoins de leur vie quotidienne.La géométrie est l’un des moyens pour y par-venir car « la géométrie ne consiste pas à décri-re ce qu’on voit mais à établir ce qui doit êtrevu » (Brousseau, 2000, p.9). L’étude desconiques, de par les multiples registres (géo-métrique, algébrique, transformations, métrique,analytique, calculatoire, etc.) qu’on peut y uti-liser, offrirait une vue transversale et verticaledes mathématiques, et apporterait une nouvel-le façon de concevoir la relation des mathé-matiques avec les autres matières et entre sespropres composantes.

ii.2.3.3.Coniques : aide à la formation en démonstration mathématique

Une autre raison pour laquelle notre choixa porté sur le thème des coniques est le fait que« leurs constructions mettent en jeu de nombreusesfigures géométriques premières, basées sur desdroites et des cercles. Et pour l’accessibilité auxdémonstrations portant sur des propriétésmétriques qui les caractérisent » (rincon, 2011,p.8). Les figures géométriques aideraient alorsmieux les élèves dans l’apprentissage et c’estpeut-être une des raisons pour lesquelles nousvoyons des manuels ou des enseignants quimettent des figures ou formes (carrées, rondes,triangulaires…) à la place des lettres incon-nues dans les résolutions des équations du pre-mier degré. En manipulant ces courbes, un rai-sonnement « visio-déductif »- comme Brousseaul’a qualifié -, puis déductif, et finalement mathé-matique se développerait chez les élèves. En lesabordant selon une approche géométrique, oncultiverait chez les élèves des habitudes d’espritcomme l’envie constante de poser et résoudre

les problèmes, de chercher des modèles, denoter des liens et par-dessus tout de prouver desconjectures (French, 2004, p.3) 

ii.2.3.4. Coniques : initiation à l’utilisation des TiCE

En ce qui concerne les TiCE, le thèmeconique se prête favorablement à l’usage de latechnologie comme support à l’enseignementdes mathématiques, car même si la technolo-gie en elle-même ne garantit pas la réussite enmathématiques, son intégration dans l’ensei-gnement constitue une aide et un support pourla connaissance (rincon, 2011, p.33). À part lavisualisation, le travail dans des environne-ments informatiques dynamiques permet auxélèves d’apprendre et d’expérimenter. À traversdes activités de construction portant sur cethème, les élèves, en utilisant un logiciel de géo-métrie dynamique, voient l’intérêt et l’utilité desavancées technologiques dans l’enseignement-apprentissage :

« Le fait de pouvoir construire de façon assezprécise et, en un temps raisonnable, desfigures de qualité est de nature à aider puis-samment à la formation de concepts, notam-ment en dégageant les propriétés qui justifientles constructions » (Cazzaro et al, 2001,p.103, cité dans rincon, 2011, p.34-35)

ii.2.3.5.Coniques : donner de la place à l’histoire des mathématiques

Une dernière raison est l’importance ouencore la place de l’histoire dans l’enseignement-apprentissage des mathématiques. nous citonsjuste deux arguments qui justifient l’intérêtdidactique de l’histoire des mathématiquesdans l’enseignement-apprentissage de cettematière  : «  le professeur peut y trouver uneriche source d’inspiration pour concevoir desactivités motivantes à tous les niveaux » (Tour-

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nès, 2012, p. 2). C’est d’ailleurs grâce à l’étudehistorique des coniques que nous avons pu éla-borer des activités pour chaque classe du col-lège et du lycée.

Et selon l’Unesco (2011, p.54), «il estimportant de pouvoir analyser le présent etpenser le futur à la lumière d’un regard histo-rique, qu’il s’agisse ici d’histoire des mathé-matiques ou d’histoire de l’éducation».

iii. — Protocole de recherches et analyses a priori

iii.1. Les classes de l’expérimentation

Les classes à Madagascar et à la réunion,dans lesquelles nous avons mené des expéri-mentations similaires, seront mentionnées danscet article afin de permettre une étude compa-rative. En tout, cinq classes de sixième dont troisà la réunion, quatre classes de cinquième dontdeux à la réunion et trois classes de seconde

au lycée Jean Joseph rabearivelo de Mada-gascar, ont participé à notre expérimentation.Le nombre d’élèves concernés est de 530, dont126 à la réunion.

Les deux établissements réunionnais quinous ont accueillis pour les expérimentationssont le collège émile-hugot de Saint-Denis etle collège La Marine de Saint-Joseph. PourMadagascar, le collège d’enseignement géné-ral d’antehiroka, situé à environ 12 km de lacapitale et le lycée rabearivelo ont bien voulucoopérer avec nous.

À la réunion, une séance de cours dure entre1 heure et 1 heure 30 minutes, rarement 2heures, alors qu’à Madagascar, c’est l’inver-se : une séance se fait le plus souvent en 2 heureset rarement en 1 heure. ainsi, les séancesd’expérimentation ont duré au total 3 heuresà la réunion et 4 heures à Madagascar.  Letableau ci-dessous donne les répartitions desclasses ainsi que les effectifs et les profes-seurs responsables.

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iii.2. Les activités et les objectifs

Pour les activités, choisies comme milieuet situation d’apprentissage, nous avons opté pourcelles qui permettent aux élèves de manipuleret de voir. Les activités sont alors de trois types.

iii.2.1. Des activités de manipulation

Les activités ont pour objectifs de :

— faire voir des formes coniques aux élèves ;

— faire trouver par les élèves des formesconiques dans leur quotidien.

Les activités de manipulation consistent àfaire passer la lumière d’une lampe LED à tra-vers le trou d’un classeur et de décrire, selonles positions d’un écran placé en dessous du trou,les formes des contours de la lumière projetée.après l’inventaire des formes trouvées avecleur nom respectif, les élèves auront à chercherdes formes coniques dans leur quotidien. Cesactivités sont prévues pour durer 20 minutes.

iii.2.2. Des activités de construction papier-crayon

Les buts de ces activités sont de renforcerles compétences des élèves dans le traçage des

activités de manipulation : 

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droites, des segments, des droites perpendicu-laires, des cercles, des médiatrices en construi-sant des coniques propres.

Ces activités, au nombre de quatre, sontextraites de celles proposées par nourby et Morel(2005) à des élèves des collèges de la réunionet reflètent bien la progression du mode et dela structure de pensée géométrique selonhiele (1988, p.3)  : d’abord une structureconcrète globale par des opérations d’identi-fication, de nomination, de comparaison etd’opération sur des figures géométriques  ;ensuite une structure géométrique visuelle pardes analyses des figures, des éléments qui lescomposent ainsi que les relations logiquesexistantes entre ces éléments  pour dégager

des propriétés et les interrelations entre ces pro-priétés ; enfin une structure abstraite en prou-vant par des raisonnements déductifs des théo-rèmes et en établissant des liens entre cesthéorèmes et les symboles.

Les constructions tangentielles de laparabole (Lebossé et héméry, 1968, p.346),de l’ellipse (ibid., p.280-281) et de l’hyper-bole (ibid., p.315), sous-tendent ces activi-tés. nous avons choisi délibérément cesquatre exercices car les compétences misesen jeu relèvent de l’usage par les élèves desinstruments usuels de géométrie et parceque les formes obtenues sont des courbesqu’ils ont déjà vues lors des activités pré-cédentes de manipulation.

activités papier crayon :

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il est clair que, pour créer des exercices ana-logues, il suffit de prendre une autre valeur durayon du cercle principal, et/ou un point S plusou moins éloigné du centre du cercle principal,si l’on veut que l’ellipse soit plus ou moinsaplatie et l’hyperbole plus ou moins ouverte. Etprendre un point S plus ou moins éloigné de ladroite (d) si l’on veut que la parabole soit plusou moins ouverte.

La première de ces quatre activités prendraenviron 25 minutes et sera traitée juste après lesactivités d’expérimentation, les trois autres pren-dront chacune une vingtaine de minutes.

iii.2.3. Des activités faisant appel à la manipulation d’un logiciel de géométrie dynamique

Dans ces activités, les objectifs sont :

— d’initier les élèves au logiciel de géométriedynamique : geogebra ;

— de familiariser les élèves avec le logiciel ;

— de faire voir des intérêts de l’usage de latechnologie dans l’enseignement-appren-tissage de la géométrie.

Pour ce faire, notre stratégie est de placerles élèves dans une situation d’enseignement-apprentissage où seul l’outil utilisé est nou-veau pour eux ; mais le milieu, les exercices etconsignes leur sont familiers, afin de mieuxréussir l’acte d’enseignement- apprentissage(en réduisant les variables didactiques intéres-santes). Les élèves auront alors à manipuler lelogiciel de géométrie dynamique par l’inter-médiaire des mêmes activités que dans l’envi-ronnement papier-crayon.

iii.3. Les analyses a priori

nous allons faire les analyses a priori selonles trois types d’activités.

iii.3.1. activités de manipulation

Les activités vont intéresser les élèves carrares sont les séances de mathématiques danslesquelles on manipule des objets autres que lesoutils scolaires.

Les élèves travailleront en groupe et leprofesseur pourra donc privilégier un typed’enseignement associatif.

ils verront et sauront décrire les formesde l’ellipse et de l’hyperbole, mais ne verrontpas la parabole. Cependant leur vocabulairesera enrichi.

ils trouveront facilement des exemples descourbes coniques dans leur quotidien, et percevrontpar eux-mêmes que des formes qu’ils côtoientpeuvent être des formes mathématiques quiont fait l’objet de plusieurs siècles de rechercheset que les mathématiques se rencontrent dansla vie de tous les jours. Une autre vision de notrediscipline en découlera.

iii.3.2. activités de construction papier crayon

Ce sont des activités qui privilégieront lesmanipulations. Des automatismes et une plusgrande dextérité seront acquis quant à l’utili-sation des matériels scolaires de géométrie.

Les élèves vont participer pleinement et ver-ront que des notions simples permettent d’obte-nir des belles figures.

Comme les constructions se font indivi-duellement, ils vont se sentir responsables deleur production et s’appliqueront davantage.

Les élèves vont comparer leur productionavec celle de leur camarade et ils pourront

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éventuellement discuter afin de trouver la bonneconstruction en cas de désaccord.

Par le fait qu’ils peuvent placer le point Sn’importe où dans les activités 1, 2 et 4 pour obte-nir une construction correcte (en effet, toutes lesconstructions seront les mêmes à une rotationprès), ils réaliseront qu’ils peuvent prendre desinitiatives en mathématiques. Le professeur nesera plus celui qui dicte et/ou celui qui impose.

C’est une occasion de maîtriser des construc-tions et notions de base comme : point, droite,segment, cercle, médiatrice, distance, du mêmecôté d’une droite et de constater eux-mêmes qu’ilspeuvent aboutir à de bonnes productions.

L’image que les élèves se font d’eux-mêmes changera, ainsi que l’image qu’ils se fontdes mathématiques. ils pourront penser : « Jesuis capable de faire de bonnes choses en mathset je me rends compte que les maths ne sont pasréservées à quelques élèves privilégiés».

Le professeur aura le temps d’encadrer sesélèves pendant les constructions, de voir leurslacunes, d’encourager les initiatives : il sera unaccompagnateur dans la construction des savoirsélèves, et non celui qui détient et qui donne tout.

iii.3.3. activités TiCE, manipulation geogebra

À Madagascar, le lycée J.-J. rabeariveloest choisi pour les activités TiCE, car c’estl’un des rares établissements qui possèdent desalles informatiques. Les élèves ont donc faitles activités de manipulation et de constructionpapier-crayon avant de manipuler pour la pre-mière fois le logiciel de géométrie dynamique.ils auront certainement des appréhensionsdevant les ordinateurs et a fortiori dans la mani-pulation de geogebra.

À la réunion, l’intégration des TiC figu-re dans le programme scolaire, donc il n’y aurapas trop de problèmes pour manipuler geo-gebra. Les élèves percevront par eux-mêmesles avantages et intérêts de l’usage de la tech-nologie dans l’enseignement-apprentissage desmathématiques.

Un type d’enseignement associatif seramis en place par le professeur à travers le tra-vail de groupe. En effet, soit par l’emplacementcontigu des machines, soit par leur insuffisan-ce, les élèves doivent s’associer pour faire lesactivités et auront la possibilité de comparer leursproductions ou de demander de l’aide à leursvoisins.

À Madagascar, ce sera l’occasion pour leprofesseur d’emmener pour la première foisses élèves dans la salle d’informatique. Bien quele lycée possède des salles informatiques, cer-tains professeurs de mathématiques ne saventpas quelles activités faire avec les ordinateurs.

iv. — Les résultats et analyses a posteriori

La première séance se divise en deux par-ties : une première partie qui porte sur la mani-pulation de matériels utilisant une lampe, uneplaque trouée et un écran afin de voir lescontours des lumières projetées faisant appa-raître des figures rondes des coniques propres,comme nous les voyons sur les photos de lapage ci-contre.

La parabole n’est évidemment pas visiblecar il nous est difficile d’avoir la position de l’écranparallèle aux faisceaux de lumière. Et le pro-fesseur devrait signaler que c’est une partie del’hyperbole que l’on voit sur l’écran car une hyper-bole est la section plane d’une surface coniqueformée par deux cônes opposés par le sommetcomme l’a défini apollonius.

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À la fin de cette première partie, l’esquis-se des quatre courbes que l’on devrait obtenirest visualisée au tableau et le nom de chaquecourbe est donné.

Ce qui est commun à tous les élèves, sansdistinction d’âge ni de niveau, c’est le nomdonné à « l’ovale ». Mais chacun a sa façon denommer la branche d’hyperbole. À la réunion,le nom donné par tous les élèves à cette branche,sans aucune hésitation, est « forme montagne ».C’est certainement l’influence de l’environne-ment sur l’apprentissage, car le paysage quo-tidien des élèves réunionnais est la montagne.À Madagascar, les élèves ont du mal à trouverun nom à cette branche de l’hyperbole. au col-lège d’antehiroka, qui est un peu éloigné de laville et où des collines sont visibles, c’est la « col-line ». au lycée rabearivelo, aucun nom n’a étédonné ; on s’est contenté de « forme comme ça »(et on trace la forme).

après avoir fait tracer par les élèves les formesvues par expérimentation (cercle, puis ellipse,puis branche d’hyperbole), un professeur ademandé à ses élèves : «  quelle différence ya-t-il entre ces courbes ? » Un élève a répon-du « les deux sont fermées et l’autre ouverte ».Une question pertinente et une réponse intelli-gente, à notre avis ; c’était l’occasion parfaitepour introduire la courbe parabole  : courbelimite entre l’ellipse et l’hyperbole, obtenueau moment où les courbes fermées s’ouvrent pen-dant l’expérimentation. Malheureusement, le pro-fesseur a raté cette opportunité.

Dans la seconde partie, on a demandé auxélèves si les trois nouvelles courbes qu’ils vien-nent de découvrir et dont les esquisses sont autableau se rencontrent dans leur vécu. Ceci afind’attirer leur attention sur le fait que des courbesprésentes dans leur quotidien sont des objets mathé-matiques qui ont des noms savants et qui ont leurhistoire (que l’on verra un peu plus tard).

Des photos des contours des lumières projetéesmoyennant les matériels de l’expérimentation.

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Ce qui caractérise cette activité, c’est de lesamener à réfléchir sur leur quotidien, les fairerevenir sur terre si l’on peut dire. Leur faire voirqu’en cours de mathématiques, on n’est pasdéconnecté de la vie de tous les jours. Lesélèves, un peu surpris de la consigne, se sontmis à essayer de trouver des exemples de« formes coniques ». Le travail de groupe étantautomatique chez les apprenants en cas d’obs-tacles (car beaucoup ont du mal à trouver desexemples), dès qu’un élève a trouvé un exempleet que le professeur a encouragé à en trouverd’autres, l’inspirations devient contagieuse  :les uns ont décelé des exemples en classe,comme leur gomme (qui commence à prendredes formes rondes), le capuchon de leur stylo,la forme ronde dans les ciseaux (forme ellip-tique des trous où l’on fait entrer les doigts), leslunettes de leurs camarades de classe, etc.  ;d’autres ont pensé à des exemples à la maisoncomme la forme des assiettes, leur baignoire,les antennes paraboliques, les mortiers pourpiller le riz, etc.

Mais la grande différence entre les deuxpays réside surtout dans les sources des exemples.À la réunion, ils prennent d’abord des exemplesde leur classe et ensuite cherchent des exemplesailleurs, alors qu’à Madagascar ils choisissentsystématiquement des exemples en dehors del’école et de l’établissement. Ces constata-tions nous amèneraient à avancer comme hypo-thèse que les élèves malgaches, contrairementà leurs homologues réunionnais, conçoivent lemilieu de leur vie de tous les jours commeextérieur à l’école et à l’établissement, où ilspassent cependant la plus grande partie de leurtemps. C’est du, à notre avis, à la représenta-tion de l’école comme un lieu que l’on doit fré-quenter pour acquérir des connaissances conte-nues dans des programmes scolaires, mais quin’a pas de lien avec la vie de tous les jours situéeau dehors. Une image de l’école que tout édu-cateur devrait changer.

Des exemples de formes coniques que les élèves ont trouvés

La deuxième séance est réservée à des acti-vités crayon-papier qui consistent à tracer desperpendiculaires afin de voir apparaitre lesformes des coniques propres. Dans la premiè-re de ces activités, on fait tracer la parabole (lacourbe non visible lors de l’expérimentation)comme enveloppe de droites perpendiculaires.

Certains élèves ont trouvé la courbe aprèsune dizaine de perpendiculaires bien tracées endes points judicieusement placés. D’autres onten fait choisi des points d’un même côté de ladroite et il a fallu que le professeur leur suggèrede prendre des points régulièrement répartis

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sur la droite. D’autres encore ont tracé des« tronçons de droite » de telle sorte que la cour-be n’apparait pas. Mais beaucoup d’élèves ontdes difficultés pour tracer les perpendiculairesà cause de la contrainte sur la position de la droi-te (d) : « une droite (d) en bas de ta feuille »,imposée par l’énoncé qui les empêche de pro-longer le segment.

La manipulation de l’équerre serait la causeprincipale des difficultés rencontrées. nousavons alors mis par écrit (en encadré ci-dessous)les étapes à suivre pour manipuler l’équerre dansle traçage des perpendiculaires et aussi, par lamême occasion, des parallèles afin d’outiller leprofesseur dans les aides personnalisées qu’ilapportera à ses élèves durant les activités. il s’agitd’un algorithme d’utilisation de l’équerre quiest efficace pour toutes les activités. À Mada-gascar, par le fait que la géométrie est traitéedans une partie bien définie de l’horaire heb-domadaire – comme l’algèbre et l’analysed’ailleurs – et selon la répartition fixée par lesenseignants, beaucoup d’élèves n’ont pas de maté-

riels de géométrie, aussi nous avons fabriquédes équerres par pliage.

rappeler qu’une droite n’a ni commence-ment ni fin, donc doit remplir la feuille, estune phrase que les professeurs ne cessent de rap-peler car beaucoup d’élèves ont l’habitude detracer des portions de droite et c’est ce quenous voyons aussi dans nombreux manuels demathématique.

Le vocabulaire est enrichi par les mots :conique, parabole, ellipse, hyperbole, mais c’esttellement contextualisé par notre présence(surtout à Madagascar) que dès que le pro-fesseur demande la forme que l’on pourraitobtenir, ils répondent par conique, parabole,ellipse, hyperbole (l’effet météo comme ondit !!!), même si la question n’a rien à voiravec les coniques.

Pour ce qui est des courbes obtenues, lesélèves ont trouvé qu’elles sont jolies et belleset qu’ils sont surpris d’obtenir telles courbes par

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traçage de droites, une notion que nous pour-rions exploiter plus tard en première avec lesdérivations et tangentes.

Pour les activités 2 et 3, les élèves débu-tent à peine la construction qu’ils demandentdéjà si l’on va obtenir une courbe aussi jolie quela première. La compréhension de l’énoncéprend du temps pour les collégiens et pour lesélèves du lycée rabearivelo, comprendre l’énon-

cé signifie lire et traduire l’énoncé en franc-gasy3.Dans tous les cas, le contexte de travail engroupe a encouragé les élèves et leur a permisde se lancer des défis pour eux-mêmes afind’avoir les mêmes courbes ou de meilleurescourbes que leur camarade. Et poussé par leurprofesseur, ils se sont lancés des défis entre euxsur le nombre de points placés (donc sur lenombre de perpendiculaires tracées).

C’est l’occasion d’aider les élèves en dif-ficulté pour le traçage en mettant en œuvrela procédure, et de pratiquer une pédagogiedifférenciée. Les activités ont permis deconsolider les compétences dans la manipu-lation des instruments de géométrie. Elles dif-fèrent des exercices classiques où l’on faitfaire quelques traçages. ici, on réalise desconstructions pour bâtir, produire une figure(les élèves voient le fruit de leur travail sousla forme d’une œuvre).

L’activité 4 n’a pas été traitée car il ne res-tait pas suffisamment de temps pour le faire eten concertation avec le professeur, nous vou-lons que les élèves savourent la joie qu’ilséprouvent devant leurs « œuvres ».

Pour l’utilisation des TiCE, c’est une occa-sion d’apprendre et/ou de bien s’entrainer surl’usage du logiciel geogebra. À Madagascar,l’occasion est offerte aux enseignants de fairemanipuler un ordinateur et utiliser les fonctionsde bases du logiciel géogébra. Pour eux, utili-ser les fonctions «  trace » ou «  lieux » peutattendre. Mais à la réunion, où les élèvesconnaissent déjà ces opérations élémentaires, ilsétaient pressés d’avoir le «  truc » (fonctionslieu, trace, animation) du professeur qui permetd’obtenir la figure. La joie des élèves ayantréussi à tracer les courbes avec geogebra est plusque réconfortante pour eux et pour le professeur.

Des productions à la fin des activités papier-crayon

3 franc-gasy : français associé à du malagasy sans règlesclaires ni fixes

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À Madagascar, quelques-uns ont deman-dé s’ils peuvent aller en salle d’informa-tique pour s’exercer avec geogebra. Certainsmême ont demandé à avoir le logiciel (alorsqu’ils n’ont pas d’ordinateur !!! mais pourle futur, disent-ils).

Par un pur hasard, un des groupes d’élèvesa déplacé la position du point S de l’activité 3et a constaté que l’on retrouve l’ellipse del’activité 2. Tous se sont mis à déplacer le pointS et c’était la joie dans la salle informatique. noussommes intervenus auprès des professeurs endisant que pour les courbes coniques, on peutpasser de l’une à l’autre par une transformationque l’on appelle homographie harmonique.

Quant à l’animation de classe et la techniqued’enseignement-apprentissage, les jeunes pro-fesseurs ont vu qu’il y a d’autres façons d’ensei-gner, que c’est toujours bénéfique pour eux defavoriser l’autonomie, de solliciter la participation,de ne pas monopoliser le temps de parole, qu’ilspeuvent assumer pleinement leur tâche d’orga-nisateur de situations d’apprentissage, et d’éva-luer le savoir et savoir-faire de leurs élèvesquand ces derniers sont en activité.

v. — Conclusion et perspectives

Si la recherche du professeur a. Totoha-sina émet l’hypothèse d’une introduction desfigures coniques vers la fin du cycle collège ouen début du lycée, nous pensons qu’il est pos-sible de se familiariser avec ces courbes dès ledébut du collège à travers des activités de mani-pulation et de construction avec les instrumentsusuels de géométrie.

il y a certainement d’autres activités qui per-mettraient d’introduire les courbes coniques, maisnous pensons que l’utilisation de faisceaux delumière est adaptée au contexte malgache par

sa simplicité, donc facilement réalisable mêmedans les collèges les plus reculés de l’île.

Les activités ont aussi fait leurs preuves parl’implication et l’intérêt des élèves en classe.

Des productions élèves dans la manipulation du logiciel géogebra

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Ce fut l’occasion pour nous de mettre aupoint une procédure d’utilisation de l’équerrepour le traçage de la perpendiculaire à unedroite – ou plus précisément à un segment – pas-sant par un point donné, et par la même occa-sion une procédure d’utilisation de la règle etde l’équerre pour tracer des parallèles. En effet,nous avions déjà eu conscience du problèmeéprouvé par nos élèves et même nos élèves-pro-fesseurs des collèges durant les séances desimulation de classe quand nous étions ensei-gnant-formateur à l’inFP, mais nos analyses desdifficultés rencontrées par les apprenants n’étaientpas assez profondes pour pouvoir mettre par écritles démarches.

Ce fut aussi une occasion de se fabriquerune équerre par pliage et de se demander com-ment, avec un papier a4, obtenir une équerre

la plus grande possible et qui tienne (un côtédevra être formé de 4 feuilles).

Les activités offrent un moyen de prendreen main un logiciel de géométrie dyna-mique et de saisir l’avantage de l’outil infor-matique, rien que pour la rapidité et la pré-cision dans les figures par rapport au traçagepapier-crayon. Les situations didactiquesproposées par ces activités sont intéres-santes, car on peut agir dessus pour chan-ger les stratégies de solution. Par exemple,on ne donnerait pas la consigne mais lerésultat, c’est-à-dire les courbes obtenues pardes traçages mis en évidence, et on deman-derait aux élèves de trouver et de décrire lesdémarches pour y arriver ; les compétencesrédactionnelles et capacité d’analyse seraientfortement développées.

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a.1) Une enquête menée auprès de 150 élèves de la classe de seconde, pris au hasard dans unlycée de la ville d’antananarivo concernant leur avis aux questions :

1°) Pour vous, les mathématiques sont utiles dans la vie de tous les jours : oui non

2°) Les mathématiques sont destinées à une couche privilégiée de personne : oui non

3°) Les mathématiques sont trop abstraites car toujours des « x et y » : oui non

4°) En géométrie, il y a beaucoup de calcul des coordonnées : oui non

Tableau 1 :

Tableau 2 : Le tableau donnant les avis des élèves aux questions 2 ; 3 ; 4 selon leur réponse àla question 1.

ANNEXE Des statistiques :