les barrages electrifiesfidaitlemcen.org/les barbeles des lignes challe et morice...les barrages...

21
Les barrages électrifiés Lignes Challes et Morice Extraits des ouvrages de Belahsen-Bali : -héros anonymes de la Wilaya 5 zone 1 -une famille ordinaire dans la tourmente Tlemcen :avril 2012

Upload: others

Post on 07-Nov-2020

9 views

Category:

Documents


0 download

TRANSCRIPT

Page 1: LES BARRAGES ELECTRIFIESfidaitlemcen.org/les barbeles des lignes Challe et Morice...Les barrages électrifiés Lignes Challes et Morice Extraits des ouvrages de Belahsen-Bali : -héros

Les barrages électrifiés

Lignes Challes et Morice

Extraits des ouvrages de Belahsen-Bali :

-héros anonymes de la Wilaya 5 zone 1

-une famille ordinaire dans la tourmente

Tlemcen :avril 2012

Page 2: LES BARRAGES ELECTRIFIESfidaitlemcen.org/les barbeles des lignes Challe et Morice...Les barrages électrifiés Lignes Challes et Morice Extraits des ouvrages de Belahsen-Bali : -héros

La ligne Morice

Une « herse » (véhicule armé) patrouillant le long du barrage

entre Port-Say et Gabriel, frontière marocaine.

Un historien de guerre disait :

« La première guerre mondiale s’est caractérisée, au plan tactique, par le

développement sans précédent de l’obstacle barbelé sur le champ de bataille.

Pourtant, ce redoutable fil de fer, inventé par l’Américain Joseph Glidden en 1873,

avait déjà connu un exemple opérationnel durant la guerre des boers, tandis que, plus tard, les

Italiens de Cyrénaïque cherchaient à isoler la Libye de l’Egypte par une ligne de barbelés tirée

de Bardia à Al-Djaboud, sur plus de deux cent cinquante kilomètres dans le désert.

C’est sur la base de ce même concept d’isolement du champ de bataille, sous toutes les

formes de celle-ci, que va être édifiée la fameuse Ligne Morice en Algérie »1.

1 Colonel Jacques Vernet, Docteur en Histoire, in Guerre d’Algérie Magasine n°01.

Page 3: LES BARRAGES ELECTRIFIESfidaitlemcen.org/les barbeles des lignes Challe et Morice...Les barrages électrifiés Lignes Challes et Morice Extraits des ouvrages de Belahsen-Bali : -héros

HISTORIQUE DES BARRAGES MINES-ELECTRIFIES DES

FRONTIERES

EST-OUEST DE L’ALGERIE

(Extraits de « Les barrages de la mort 1957-1959 ,le front oublié »

de Amar Boudjelal, Colonel de l’ANP a la retraite)

De 1954 a 1962, le gouvernement Français s’est inspiré de la fameuse Ligne Maginot

pour installer les lignes et barrages minés électrifiés sur les frontières Est-Ouest de l’Algérie.

Le projet, initialement présenté par le ministre de la défense de l’époque, Mr Morice,est passé

plus tard à la postérité sous les noms de Lignes Morice et Challe.

1-Première phase des grands chantiers des lignes minées électrifiées fin1957 eut lieu

le lancement des chantiers à l’Est et à l’Ouest, à partir des zones Nord et Sud, la jonction se

faisant au fur et à mesure de l’achèvement des travaux, qui nécessitèrent d ‘énormes moyens

financiers :

Implantation des poteaux métalliques sur des blocs de béton.

Minage des terrains.

Mise en place des fils barbelés.

Electrification et mise en place des postes et appareils de contrôle.

Pour ce qui est de la longueur totale des lignes installées, elle peut se calculer en

milliers de kilomètres, la largeur du réseau variant de 8 à 12 mètres truffé de mines posées en

quinconce selon une densité d’une centaine sur 150 mètres carrés.

Le tout renforcé par des miradors, de l’artillerie lourde, des P.C opérationnels et des

camps fortifiés, sans oublier les talus hauts de plusieurs mètres élevés dans le but de protéger

les installations militaires.

Les différents types de mines étaient de redoutables engins de mort difficilement

détectables et placés aux lieux supposés de passage des moudjahidines.

Un contrôle rigoureux était exercé sur les réseaux électrifiés de franchissement, ce qui

permettait l’intervention immédiate et efficace de l’aviation et de l’artillerie, qui pilonnaient

impitoyablement les brèches ouvertes avec de faibles moyens (cisailles, bangalores, T.NT)

par les commandos spécialisés de l’ALN.

2-Les risques encourus par les djounoud :

Les redoutables moyens mis en place par l’armée Française ne laissaient plus aux

combattants de l’ALN que le choix de leur mort :griller sur le réseau électrifié, sauter sur une

mine, être déchiquetés par des éclats d’obus ou des balles de 12,7 tirées par les mitrailleuses

des avions…les années 1958-59 furent catastrophiques pour les commandos de l’ALN, dont

80 pour cent périrent dans des tentatives de passage inexorablement vouées à l’échec.

3-Les jardins de l’enfer :

De larges zones interdites semées d’embuches diaboliques, de mines échelonnées en

profondeur sur trois étages, d’obus piégés dont l’allumage était commandé par de simples fils

de fer, pieux d’apparence inoffensive reliés à des charges explosives habilement dissimulées,

et enfin des mines éclairantes déclenchées par un allumeur de mine anti-personnel.

Page 4: LES BARRAGES ELECTRIFIESfidaitlemcen.org/les barbeles des lignes Challe et Morice...Les barrages électrifiés Lignes Challes et Morice Extraits des ouvrages de Belahsen-Bali : -héros

La mine éclairante bondissante, à parachute, est munie d’une charge propulsive qui lui

permet de s’élever à une centaine de mètres, hauteur à laquelle la charge éclairante s’allume et

le parachute se déplie,sa durée d’éclairage est d’une minute sur un rayon maximum de 300

mètres.

Il y’avait aussi les chevalets métalliques garnis de barbelés et branchés sur un courant

de 6000 Volts. Sans oublier les ingénieux enchevêtrements de mines, que les combattants de

l’ALN avaient baptisés<<Les Champs Elysées>>,et qui explosaient en série au plus léger

frôlement d’un piquet métallique…

4-Après l’indépendance, les mines continuèrent à tuer :

Les mines continuèrent à tuer le long des frontières, augmentant le nombre de victimes

de la guerre d’indépendance. Des enfants, des femmes, des vieillards innocents, mais aussi

des djounoud, sous officiers et officiers des unités de déminage de l’A.N .P que j’ai eu

l’honneur de commander. Beaucoup sont morts au cours de cette noble mission, et d’autres,

amputés, sont restés handicapés à vie.

Les mines les plus grosses, bondissantes anti-groupes et obus piégés ,sont celles dont

l’action est la plus limitée dans le temps, en raison de leur emballage périssable et de la

détérioration de leur système de mise à feu. Par contre les mines anti-personnel, avec leur

emballage plastique, sont quasiment éternelles et peuvent tuer des dizaines d’années après.

Lorsque l’armée française s’est retirée en 1962 , elle ne s’est pas inquiétée de remettre

aux autorités militaires algériennes les plans des zones minées avec les emplacements des

pièges explosifs, qui couvraient les deux cotés du barrage électrifié. De plus, la terre est

vivante. Les imperceptibles secousses sismiques, les crues, les fortes pluies, les affaissements

et autres phénomènes naturels ont fait que nombre de mines se sont déplacées, continuant à

semer la mort là ou l’on s’y attend le moins…

Page 5: LES BARRAGES ELECTRIFIESfidaitlemcen.org/les barbeles des lignes Challe et Morice...Les barrages électrifiés Lignes Challes et Morice Extraits des ouvrages de Belahsen-Bali : -héros
Page 6: LES BARRAGES ELECTRIFIESfidaitlemcen.org/les barbeles des lignes Challe et Morice...Les barrages électrifiés Lignes Challes et Morice Extraits des ouvrages de Belahsen-Bali : -héros

LE BARRAGE DE BARBELES

A travers les monts de Asfour, Tlemcen, Sebdou et Sidi djilali, séparant l’Algérie du

Maroc, l’on distingue nettement un réseau de fils de fer barbelés se déroulant à l’infini : c’est

la fameuse ligne Pedron, du nom de son concepteur ; large d’une dizaine de mètres, elle a été

érigée pour faire échec au passage des éléments de l’ALN, et aussi pour couper toutes les

voies de ravitaillements et de repli. Cet obstacle électromécanique était une pièce maîtresse du

dispositif militaire français qui devait assurer l’étanchéité des frontières, privant ainsi la

révolution algérienne de ses ressources en armements et en hommes. Dans l’esprit des

stratèges français, ce bouclage était la solution parfaite pour faire obstacle à la guérilla, en la

privant de ses sources extérieures d’approvisionnement.

L’une des caractéristiques de cette guérilla était l’aptitude des moudjahidine à se

fondre dans une nature complice. Il fallait donc, pour l’armée française, mettre en place une

structure permanente, facile à construire et à modeler, et surtout capable de dissuader

l’ennemi, contrôler ses mouvements par les déplacements des troupes et par l’amélioration

des communications. Vu le rôle qui lui était dévolu, le barrage devenait un véritable champ

d’expérimentations technologiques, qui ira en s’améliorant tout au long du conflit, pour faire

face à un ennemi de plus en plus puissant et efficace.

Le long de la frontière, le relief est fortement contrasté, depuis la bordure maritime au

Nord, jusqu’à El Aricha, au Sud, sur environ 140 kilomètres. Près des deux tiers de ce

parcours sont plutôt escarpés. On y rencontre d’abord l’extrémité de la chaîne côtière des

Traras, plus au sud de la trouée de Maghnia, et le massif des Monts de Tlemcen qui, avec les

impressionnants monts de Mechamiche, culminent à près de 1600 m. On tombe ensuite

rapidement sur les avant-corps de la grande steppe des hauts plateaux, beaucoup plus sobres,

mais où l’altitude est toujours supérieure à mille mètres : c’est le territoire des communautés

pastorales qui nomadisent sur la « mer d’alfa ». Ces accidents géographiques influaient sur

l’agencement du barrage, bien différent du Nord au Sud.

Dans sa partie nord, qui longe d’assez près la frontière à environ 10 kilomètres, la

nature du terrain a permis de distendre le dispositif de surveillance et de le renforcer par des

postes très rapprochés d’artillerie. Par contre, sur les hauts plateaux, les postes vont s’espacer

et s’écarter de la frontière en direction du Sud-Est jusqu’à hauteur de Mecheria. A partir de ce

point, la haie barbelée protège aussi le grand axe reliant Oran à Bechar. Elle s’infléchit alors

en direction du Sud Ouest par Aїn Sefra, tout en longeant de nouveau la frontière algéro-

marocaine.

Malgré ce dispositif, les frontières restent perméables aux incursions de l’ALN, Qui

échappent à tous les systèmes de repérage et à toute possibilité d’interception. Ainsi, en

janvier 1957, un réseau électrifié est mis en service. Il comprend deux haies à quatre fils

conducteurs aménagées entre deux réseaux de barbelés d’une profondeur d’une dizaine de

mètres chacun. Ils sont renforcés de mines éclairantes qui permettent aux mortiers et à

l’artillerie d’intervenir en cas de besoin. Les moudjahidine effectuant quotidiennement des

coupures nocturnes dans le réseau, les premières mines antipersonnel y sont placées en mars

de la même année. Plus tard, le barrage reçut d’autres perfectionnements destinés à accroître

Page 7: LES BARRAGES ELECTRIFIESfidaitlemcen.org/les barbeles des lignes Challe et Morice...Les barrages électrifiés Lignes Challes et Morice Extraits des ouvrages de Belahsen-Bali : -héros

son efficience, tels les radars de guidage des avions en vol ou encore ceux de surveillance au

sol.

Pourtant, même cet équipement de très haute sensibilité s’avérera inefficace à contrer

les passages des unités combattantes, spécialement entraînées dans ce but, et dont la fréquence

ira en augmentant jusqu’en avril 1958. En effet dans les régions au relief accidenté, ce réseau

de surveillance s’avéra assez peu performant. Il démontra par contre sa pleine efficacité dans

les zones plates ou désertiques où il permettait d’alerter longtemps à l’avance les unités

d’interception. Malgré cela, elles arrivaient le plus souvent trop tard, ne trouvant que le vide

en face d’elles. Encore une fois, la clôture électrifiée va être améliorée : la tension va être

redressée à 2500 V le jour et 5000 V la nuit, ce qui permettra la localisation instantanée de

toute coupure. Cette grille foudroyante bordée de barbelés est doublée à faible distance d’un

lacis de pré alerte miné. Toute la nuit, de puissants projecteurs restent allumés, et

sporadiquement, des phares D.C.A d’une portée supérieure à quatorze kilomètres projettent

leurs faisceaux lumineux dans le no man’s land qui longe la frontière. A la moindre alerte,

l’artillerie tire des obus éclairants tandis que des avions «lucioles » larguent leurs bombes à

effet identique.

Dès octobre 1957, des procédures encore plus sévères sont établies, concernant les

mesures de veille : institution de patrouilles mobiles dans les zones d’ombre, balayages de

projecteurs de part et d’autre des barbelés à intervalles irréguliers, postes de contrôle, toutes

mesures destinées à augmenter l’efficacité dans la définition des armes d’appui(artillerie), le

choix des véhicules et les moyens de liaison, ainsi que la désignation des gradés de quart, des

guetteurs et autres personnels d’intervention. En février 1958, seront instituées les « zones

interdites » le long de la frontière. Des douars entiers seront rasés et leurs occupants déportés,

parqués dans des « villages de regroupement », misérables ghettos ceinturés de barbelés et de

postes de contrôle. Cette opération avait pour objectif de couper la révolution de ses bases

populaires.

Dès les débuts, les forces de l’ALN s’efforceront de causer le maximum de dommages

au barrage, aux unités qui le défendaient et aux systèmes de surveillance de toutes sortes. De

nombreux commandos spécialisés seront formés à des techniques de franchissement mises au

point et corrigées progressivement. L’on s’efforcera en même temps de démythifier le barrage

dans l’esprit des djounoud. Ils seront soumis de jour comme de nuit à des exercices

d’observation et de reconnaissance des obstacles, et seront associés à des actions nocturnes de

sabotage et à des opérations de franchissement, d’abord sur des éléments reconstitués, puis sur

des barrières réelles, afin de les accoutumer et les préparer aux traversées du réseau barbelé.

Page 8: LES BARRAGES ELECTRIFIESfidaitlemcen.org/les barbeles des lignes Challe et Morice...Les barrages électrifiés Lignes Challes et Morice Extraits des ouvrages de Belahsen-Bali : -héros

Mise en place des barbelés en 1957 à la frontière Marocaine

Confrontés aux difficultés grandissantes, certains responsables militaires de l’ALN

avaient reproché à Krim Belkacem, alors chef du département de guerre, d’avoir sous-estimé

le danger de ce rideau mortel. De même, le commandement avait été pris au dépourvu par la

création du no man’s land et des zones interdites le long de la frontière. L’accélération des

travaux de ces ouvrages, auxquels furent employés des prisonniers militaires et civils, a posé

d’insurmontables problèmes au commandement de l’ALN.

Les éclaireurs ont enduré les pires souffrances et payé un lourd tribut pour franchir cet

obstacle, et leurs cadavres accrochés aux barbelés électrifiés affectaient sérieusement le moral

des combattants. Diverses stratégies de franchissement ont été expérimentées en vain, les

Katibate échouant le plus souvent dans leurs tentatives de franchissement en force, au prix de

très grosses pertes en vies humaines. Ces échecs successifs portaient de durs coups à

l’enthousiasme des combattants, et contribuaient à créer un malaise et des crises larvées dans

les rangs de l’armée et de ses instances de commandement.

Page 9: LES BARRAGES ELECTRIFIESfidaitlemcen.org/les barbeles des lignes Challe et Morice...Les barrages électrifiés Lignes Challes et Morice Extraits des ouvrages de Belahsen-Bali : -héros

DANS LES BARBELES

"داخله مفقود، وخارجه مزيود"

« Celui qui entame une traversée du réseau de barbelés est considéré comme mort, et

il ne renaît qu’une fois cette traversée réussie »

Le stage de formation dont j’avais bénéficié à la ferme Belhadj, située à Berkane,

m’avait appris, en théorie, uniquement comment effectuer une traversée sur la ligne barbelée.

Une autre épreuve m’attendait : je devais faire passer des camarades, mais cette fois, à travers

un réseau réel de barbelés minés.

C’est ainsi qu’en novembre 1957, Kaïd Ahmed, alias Capitaine Slimane, me chargea

de faire passer le chef de zone Abdelouahab et son escorte, à travers le point de passage piégé,

entre Figuig et Béni-Ounif. Un réseau de barbelés et un terrain semé de mines distants de 5

km de la ville chérifienne, séparaient les deux localités. Deux heures avant le départ vers

l’Algérie, une équipe de surveillance fut installée à différents points stratégiques du parcours.

Les moussebiline cumulaient diverses fonctions : gardiens, agents de liaison, agents de

renseignements, etc… Un mot de passe fut communiqué juste avant le départ. Le parcours de

Figuig à la ligne barbelée se déroula sans incident et dura un peu plus d’une heure. A ce

moment, ma montre indiquait 22 H 46. La lune, à son second quartier, permettait une

excellente visibilité. Les djounoud se camouflèrent, à 200 m de l’obstacle et attendirent,

pendant que deux groupes de trois, désignés par avance se positionnaient de chaque coté de la

piste, à environ 400 mètres. Ils étaient chargés de placer 2 mines à pression antichar à droite et

à gauche pour assure nos arrières lors du retrait.

C’était à moi de jouer. Délesté de mon fusil belge et de ma djellaba, je ne gardais qu’un

pistolet de 9mm, une grenade quadrillée anglaise et une baïonnette. J’entamais une lente et

prudente progression, abordant le champ de mines jusqu’à un mètre de la ligne, suivi de deux

stagiaires munis de cisailles. Nous avancions à la queue leu leu, pliés en deux. J’auscultais

soigneusement le sol à l’aide de la baïonnette, mettant les pieds là où elle ne rencontrait

aucune résistance, suivi par les stagiaires qui posaient leurs pieds exactement dans l’empreinte

des miens. Mètre après mètre, je déblayais le terrain pour arriver aux barbelés, m’assurant

qu’aucune mine n’était disposée à l’entrée du passage.

Arrivés au premier rang de barbelés, c’était la phase de cisaillement, durant laquelle j’étais

assisté par les stagiaires : d’abord, maintenir des deux cotés le fil de fer à l’aide de pinces

isolantes avant de le sectionner. Ensuite, le fil sectionné doit être détendu et accroché à un

autre fil, en évitant surtout son retour en force qui aurait eu pour effet de déclencher les mines

bondissantes et les fusées éclairantes placées à la base de chaque piquet. Ce qui aurait eu pour

effet de signaler notre présence et notre position avec précision.

Page 10: LES BARRAGES ELECTRIFIESfidaitlemcen.org/les barbeles des lignes Challe et Morice...Les barrages électrifiés Lignes Challes et Morice Extraits des ouvrages de Belahsen-Bali : -héros

Stagiaires à l’œuvre dans les barbelés

Une victime des barbelés

Page 11: LES BARRAGES ELECTRIFIESfidaitlemcen.org/les barbeles des lignes Challe et Morice...Les barrages électrifiés Lignes Challes et Morice Extraits des ouvrages de Belahsen-Bali : -héros

Je devais répéter cette opération de fil en fil, jusqu’au fil sous tension, les stagiaires

me passant les outils à chaque étape .

A ce moment, je pouvais soit creuser un boyau sous la ligne, soit couper les barbelés.

Dans le deuxième cas, je devais au préalable placer les deux pinces isolantes avant de cisailler

le fil, évitant ainsi la coupure de courant qui aurait signalé notre présence au poste militaire

voisin.

L’opération se répète de fil en fil jusqu’au deuxième rang de barbelés, et la même

procédure est entamée. Chaque mine repérée hors du passage déjà signalé est marquée par un

brin de coton au fur et à mesure de la progression.

Je continue ainsi jusqu’à l’arrivée en territoire algérien, et je signale notre présence

aux djounoud par le mot de passe répété selon les instructions à trois reprises. Nos hommes

arrivent alors en file indienne et entament calmement la traversée du terrain balisé et sécurisé

par nos soins, suivant à la lettre les consignes pour éviter toute erreur qui pourrait être lourde

de conséquence.

A titre d’exemple, lors de la traversée d’un boyau creusé sous la ligne de haute

tension, un moussebel , au lieu de continuer à ramper au plus près de du sol, leva brusquement

la tête, heurtant du visage le fil le plus bas. La puissante décharge électrique de 3000 volte qui

suivit le souda littéralement aux barbelés, auxquels il resta accroché sans que nous puissions

rien faire pour le détacher. Il nous fut même impossible de lui desserrer les mâchoires.

Au cours de ces missions, et à chaque passage, je récupère de 20 à 25 mines à pression

que je dévisse au fur et à mesure, séparant l’allumeur du détonateur que je conserve dans les

poches de ma vareuse. Ensuite, je place la mine nue, c’est-à-dire désamorcée, dans la musette

que je porte, accrochée à mes épaules. Dans ma fonction, je n’ai droit qu’à une erreur : celle

qui me coûtera la vie. Bien sûr, la peur m’accompagne à chaque passage mais j’arrive à la

surmonter en récitant, à chaque fois, une prière composée de : « Au nom de Dieu, le Clément

et le Miséricordieux, il n’y a de Dieu que Dieu et Mohammed est Son Envoyé » et enfin, le

verset du Trône. Cela me permettait de retrouver ma sérénité. Lors d’une permission, ma mère

m’avait confié un talisman et ma jeune sœur, dans son amour naïf, avait écrit sur une feuille

de son cahier d’écolière des amulettes dont je ne me suis jamais séparé.

La nécessité faisant loi, j’en arrivais à faire preuve d’une très grande ingéniosité dans

la fabrication de mines artisanales anti-char, en utilisant des pièces de mines personnelles à

encrier insérées dans des petites caisses en bois. Leur système de mise à feu était déclenché

par le poids du véhicule qui les écrasait.

En plus de la formation, c’est dans la pratique que j’ai perfectionné mon métier de

démineur. Au cours de mes différentes traversées, j’ai eu deux incidents. Le premier eut lieu

au cours de l’une de mes premières missions: Le stagiaire qui m’accompagnait laissa le fil

sectionné se détendre brutalement, dégoupillant au passage une mine bondissante. Je fus

légèrement blessé au pied gauche alors que le stagiaire Abdelhaq fut gravement atteint.

Comme nous n’étions qu’à la première rangée de barbelés, nous pûmes nous replier avant

l’arrivée d’une « herse ». Lors de ce qui devait être ma dernière mission, alors que j’avais

ouvert le passage, un vieux moussebbel s’accrocha la djellaba. Essayant de se dégager, il tira

brusquement sur le barbelé qui fit dégoupiller deux mines bondissantes et une fusée

éclairante. Le signal fut ainsi donné au poste militaire et trois minutes après, des sunlights

éclairants s’allumèrent et de puissants projecteurs furent orientés vers nous. Immédiatement

Page 12: LES BARRAGES ELECTRIFIESfidaitlemcen.org/les barbeles des lignes Challe et Morice...Les barrages électrifiés Lignes Challes et Morice Extraits des ouvrages de Belahsen-Bali : -héros

une pluie d’obus de mortier s’abattit sur nos positions, tuant un djoundi et blessant deux civils

laissés sur place. Trois autres civils et moi-même avons été touchés par des éclats. Le

sifflement des balles et les explosions des obus faisaient un vacarme assourdissant. Blessé au

tibia de ma jambe droite, je fus transporté par mes deux stagiaires jusqu’au territoire marocain

où je fus hospitalisé pendant plus de deux mois.

Les obstacles extraordinaires de la Ligne Morice n’ont jamais empêché l’ALN de

traverser les frontières dans les deux sens, bien que nos pertes fussent parfois très lourdes.

Lors de mon passage à la VIIIème zone, sous le pseudonyme l’instructeur Réda, j’ai formé

plus de deux cents djounoud sur le réseau barbelé et ses obstacles. Après plusieurs années,

c’est avec une grande émotion que j’ai retrouvé d’anciens élèves ainsi que les lieux de mes

passages lors de la commémoration de la mort du Colonel Lotfi à Béchar le 27 mars 2008.

Page 13: LES BARRAGES ELECTRIFIESfidaitlemcen.org/les barbeles des lignes Challe et Morice...Les barrages électrifiés Lignes Challes et Morice Extraits des ouvrages de Belahsen-Bali : -héros

Liste des stagiaires démineurs

Nom et Prénoms Grade Région Nom et Prénoms Grade Région

OKBA Mohamed Aspirant 3 LAZRAGUE

Ahmed

Chef de

groupe 2

BENYAKHLEF

Lazrag

Chef de

Section 1

BENAROUSSI

Aissa

Chef de

groupe 4

BEGGA Omar

Ben Said

Chef de

groupe 1

BENYEKHLEF

Mohamed

Chef de

groupe 4

BELLAHCENE

Mohamed

Chef de

groupe 1

BEN MOUSSA

Abdou

Guide

frontières 4

STAIBIB Ghoti Chef de

groupe 2

ALLOUSSE

BenMohamed

Guide

frontières 4

BADAOUI

Boudjamaa

Guide

frontières 3

BENAISSA

Kamel

Guide

frontières 2

M’HAMDI

Abdelkader Djoundi 1

BENAMARA

Hocine

Guide

frontières 1

STADJI Ahmed Djoundi 2 ZOUICHA

Ahmed Djoundi 1

BACHIR

Mustapha Djoundi 1

BELLAHCENE

Mohamed Djoundi 1

SENOUCI

Miloud Djoundi 1

LARADJI

Mohamed Djoundi 1

AFFI Benaouda Djoundi 2 SBILI Djoundi 1

Page 14: LES BARRAGES ELECTRIFIESfidaitlemcen.org/les barbeles des lignes Challe et Morice...Les barrages électrifiés Lignes Challes et Morice Extraits des ouvrages de Belahsen-Bali : -héros

Abdelkader

BELBACHIR

Boucetta Djoundi 1

BEKRI

Benkhetou Djoundi 2

MOKHTARI

Mohamed Djoundi 1

HAMMAD

Mohamed Djoundi 1

SEGAT Sofiane Djoundi 1 LARABI Ahmed Djoundi 2

SEBAH

Abderrahmane Djoundi 2 SEBAA Ahmed Djoundi 1

CHERGUI

Lakhdar Djoundi 1

BELKHEIR

Abdelkader Djoundi 1

KHATOU

Abdelkader Djoundi 2 BENSALIM Ali

Chef

Merkez 1

BENYAKOUB

Kaddour Djoundi 1 SEBAA Boutkhil

N.

Stagiaire 1

BEN EDDI

Boufeldja

Chef de

Section 1

KHOLKHAL

Said

N.

Stagiaire 1

LATRACHE

Mohamed Djoundi 1 KAZI Larbi Djoundi 1

MEZIANE

Boukhalfa

N.

Stagiaire 1

DJELLAT

Brahim Djoundi 2

FELLAH

MESSAOUD Djoundi 2

RAHMANI

Abdelkader Djoundi 1

KHEBIZ Amara Chef de

groupe 4

BOUSOUAR

Ahmed Djoundi 1

HAMMADI

Kouider

Chef de

groupe 1 CHIB Mohamed Djoundi 1

DLIMI Tayeb Chef de

groupe 2

AMICHA

Benamar Djoundi 1

ZAHZOUH

Hamza

Chef de

groupe 2

BELGHIT

Abdelghani Djoundi 1

BENADIL

Djelloul Djoundi 1

BENMOKHTAR

Abdelghani Djoundi 1

ASSOUFI

Mohamed Djoundi 1

BENBAKHTI

Hamza Djoundi 1

TADJ Mohamed Djoundi 1 KHALID

Benkamel Djoundi 1

DIDI Moussa Djoundi 1 BENADDI

Boufeldja Djoundi 1

DIAB Mohamed Djoundi 1 FERHAT Amar Chef de

Section 4

Page 15: LES BARRAGES ELECTRIFIESfidaitlemcen.org/les barbeles des lignes Challe et Morice...Les barrages électrifiés Lignes Challes et Morice Extraits des ouvrages de Belahsen-Bali : -héros

SI-ALLAL Chef Cie

Timimoun 4

BOUAMARA

Abderrahmane

Djoundi 1

LARBI

Benbouziane N.Stagiaire 1

SELLES Ben

Dada

Djoundi 4

BENMOHAMED

Bachir N.Stagiaire 1

M’HAMED

BELARBI

Djoundi 1

BENMOHAMED

Tayeb

Djoundi 1

SAID OULD

AHMED

Djoundi 1

BENCHIKH

Abdelkader

Djoundi 1

BENSAID

Mohamed

Djoundi 4

SAID OUL

AISSA

Djoundi 4

DJAKANI

Mohamed

Djoundi 1

Ahmed Ould

MOUMEME

Djoundi 1

SELLEM

Benaissa

Djoundi 4

BENAISSA

AMAR

Djoundi 4

BENTALEB

M’Hamed

Djoundi 1

CHEIKH

Benamar

Djoundi 1

BENABDELLAH

Oul Salah

Djoundi 1

BENMOHAMED

Lakhdar

Djoundi 1

Mohamed Ouild

Belhadj

Guide

convoi 1

BENDINA Aek Djoundi 4

Page 16: LES BARRAGES ELECTRIFIESfidaitlemcen.org/les barbeles des lignes Challe et Morice...Les barrages électrifiés Lignes Challes et Morice Extraits des ouvrages de Belahsen-Bali : -héros

Ci-dessous les instructions reçues du commandement de la huitième zone relatives aux

obstacles des mines posés par l’armée française à travers le réseau des barbelés. Dès que l’on

recevait ces circulaires, nous devions communiquer l’information et les recommandations à

tous les élèves artificiers.

Page 17: LES BARRAGES ELECTRIFIESfidaitlemcen.org/les barbeles des lignes Challe et Morice...Les barrages électrifiés Lignes Challes et Morice Extraits des ouvrages de Belahsen-Bali : -héros
Page 18: LES BARRAGES ELECTRIFIESfidaitlemcen.org/les barbeles des lignes Challe et Morice...Les barrages électrifiés Lignes Challes et Morice Extraits des ouvrages de Belahsen-Bali : -héros
Page 19: LES BARRAGES ELECTRIFIESfidaitlemcen.org/les barbeles des lignes Challe et Morice...Les barrages électrifiés Lignes Challes et Morice Extraits des ouvrages de Belahsen-Bali : -héros
Page 20: LES BARRAGES ELECTRIFIESfidaitlemcen.org/les barbeles des lignes Challe et Morice...Les barrages électrifiés Lignes Challes et Morice Extraits des ouvrages de Belahsen-Bali : -héros
Page 21: LES BARRAGES ELECTRIFIESfidaitlemcen.org/les barbeles des lignes Challe et Morice...Les barrages électrifiés Lignes Challes et Morice Extraits des ouvrages de Belahsen-Bali : -héros