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L’entretien semi-dirigé du Psychologue et du
Sociologue
en recherche qualitative
Méthodologie de la recherche qualitative dans le domaine de la santé
Séminaire 28 & 30 septembre 2015 (Besançon et Dijon)
Florence Mathieu-Nicot & Aurélie Godard
Docteure en psychologie clinique et psychopathologique Docteure en sociologie -démographie
Psychologue clinicienne Ingénieure de recherche clinique
Mail : [email protected] Mail : [email protected]
Définitions « l’action d’échanger des paroles avec une ou plusieurs personnes »
L’entretien peut être considéré comme un « dialogue provoqué »
- Dialogue : Dans la majorité des cas, il s’agit d’une situation à deux et seulement à deux, même si on peut assister à des pratiques d’entretien en groupe
- Provoqué : Il ne naît pas du hasard et relève d’une autre finalité que le simple plaisir des interlocuteurs. => Il vise essentiellement un quête d’informations sur un objet.
L’entretien remplit plusieurs fonctions
Un mise en relation de 2 personnes
L’entretien est une interrelation qui a lieu dans un espace
interlocutoire (ghiglione, 1987). Il s’instaure à un niveau d’égalité entre les deux personnes en cause même s’il y a un interviewer et un interviewé
Un échange d’information entre 2 interlocuteurs
Ce n’est que dans la mesure où le sujet croit en la valeur de cet
échange qu’il apportera un maximum d’informations.
L’entretien et les notions voisines
Entretien & entrevue : tout entretien suppose une entrevu mais toute entrevu n’entraîne pas obligatoirement un entretien
Entretien & conversation : la différence réside dans le fait que « la conversation est toujours un échange d’informations, d’idées et d’opinions. Dans l’entretien, il y a toujours une personne qui dirige et l’autre qui est orientée.
Entretien & dialogue : l’entretien va au-delà en ce sens qu’il est essentiellement recherche d’informations.
Entretien & discours : Il arrive que l’entretien soit pour celui qui
doit en principe écouter l’autre et l’accueil, une occasion de discourir seul.
Principes liés à l’entretien (1)
Choisir l’entretien, c’est choisir d’établir un contact direct avec les personnes pour récolter des informations. C’est le phénomène d’interaction qui est privilégié.
C’est un moment de parole durant lequel l’interviewer extrait une information d’un interviewé sur des actions passées, des savoirs sociaux, sur ses valeurs, normes, représentations…
L’information a été expérimentée, absorbée par l’interviewé qui la restitue durant l’entretien avec déformation : orientation, interprétation par rapport à son expérience => la subjectivité est l’une des propriétés des entretiens.
Principes liés à l’entretien (2)
Dans l’entretien, il s’agit de donner la parole à l’autre.
Dans l’entretien, on ne se contente pas de réponse ponctuelles, mais de « réponses-discours ».
C’est une technique qui est dite qualitative.
A partir de l’entretien, les faits psychologiques et sociaux sont supposés pouvoir être appréhendés et compris à travers les représentation véhiculées par la parole, à travers l’expérience de l’individu.
Intérêt de l’entretien
Aujourd’hui, l’entretien est une technique à part entière, à la fois sur la méthode, sur l’analyse des résultats et sur les fondements théoriques.
Ce qui fait l’intérêt de l’entretien, c’est la souplesse de la méthode, l’adaptabilité au sujet, l’évaluation de la motivation, de l’implication de l’interviewé.
Les compétences de l’interviewer et de l’interviewé (1)
Dans l’entretien, l’information extraite par l’interviewer suppose de la part de ce dernier une activité :
- d’analyse
- D’interprétation
- Relationnelle
La recherche d’entretien repose sur la confiance entre l’interviewé et l’interviewer, sur l’interrelation. Il faut savoir écouter l’autre, le respecter.
Les compétences de l’interviewer et de l’interviewé (2)
Les attitudes et techniques facilitant l’expression dans la communication interindividuelle et dans la relation thérapeutique:
Accueil, début du premier entretien, prise de contact
Respect et condition positive inconditionnelle ou acceptation inconditionnelle
Empathie
Authenticité
Neutralité bienveillante
Ecoute active ou marques d’écoutes
Disponibilité
Non-directivité
Facteurs qui permettent de classer les entretiens
Le degré de liberté dans l’entretien
- Beaucoup / peu de questions
- Questions ouvertes/ questions fermées
Le niveau de profondeur
- Un niveau de liberté plus grand entrainera des réponses plus riches et complexes
- Un niveau de liberté plus réduit produira des réponses précises et univoques
Les différents types d’entretiens (1)
L’entretien directif :
- Fortement structuré
- un ensemble de questions ouvertes
- uniformisé dans la forme et l’ordre des questions posées.
- L’individu doit se situer dans le cadre de référence déterminé par l’entretien.
- exige une bonne connaissance du domaine étudié et de la population étudiée.
- est pratiqué pour vérifier un problème déterminé lors d’une enquête.
Les différents types d’entretiens (2)
L’entretien non directif :
Ce type d’entretien appelé encore « non standardisé », « non structuré » ou « libre » permet d’atteindre des niveaux plus profonds d’opinions et d’attitudes car la technique laisse un maximum de liberté au sujet.
Les différents types d’entretiens (3)
L’entretien semi-directif : - ni totalement fermé, ni totalement ouvert. - Le plus fréquent en recherche - Les thèmes à aborder sont fixés à l’avance. Mais l’ordre et la forme de
présentation des thèmes sont libres. Le chercheur (dans le cadre d’une étude par exemple) : - dispose d’une série de questions-guides relativement ouvertes à propos
desquels il veut obtenir une information. - ne pose pas forcement toutes les questions dans l’ordre prévu initialement. Il
laisse venir le plus possible l’interviewé pour qu’il puisse parler selon une logique qui lui convient.
- pose les questions que si l’interviewé ne les a pas abordé de lui-même.
Les différents types d’entretiens (4)
L’entretien semi-directif comprend différentes phases :
Le guide d’entretien : liste ordonnée de thèmes nécessaires pour répondre
à la question de recherche.
La démarche de l’entretien : - lancement du thème et présentation
- Première question : maximum ouverte
- Retour au guide d’entretien pour les relances
Stratégie d’intervention facilitant le discours : LA RELANCE
C’est une stratégie de discours, principalement de paraphrase. Lors d’une
relance, on reprend le discours antérieur du sujet en lui demandant de le
compléter.
Plusieurs types de relances :
- Faire reformuler au sujet ce qu’il a lui-même dit auparavant
- reformuler soi-même ce qui a été dit par le sujet
- demander un complément de la part du sujet
La manière dont on communique influence le déroulement de l’entretien, il est
donc nécessaire de ne pas confondre communication et langage, car on
peut très bien parler sans pour autant communiquer
Autres façons de communiquer :
- Gestes / Mimiques
- Intonations de voix (Mmmh…)
Exemple d’entretien – le contexte (1)
Contexte : une étude sur les décisions d’arrêt de traitement.
Interviewé : le patient
Patient : « je ne sais pas. C’est le médecin qui décide. J’ai essayé d’en parler avec lui mais [silence] c’est un médecin [sourire] [silence long]»
Exemple d’entretien – la relance (2)
- Oui ce n’est pas facile de parler avec les médecins.
- Et quand vous en parlez avec lui, qu’est-ce qu’il vous dit?
- Et vous vous en pensez quoi?
- Vous avez essayé d’en parler avec lui….
Etre vigilent à la nature de la relation
La relation de confiance :. Le sujet doit être à l’aise, savoir
que l’entretien est un moment privilégié, pour qu’il puisse
exprimer sa souffrance, ses problèmes et ses différences
Le respect de la personne : on n’est pas là pour juger, on doit
respecter le contenu du discours, ce qui peut par ailleurs aider à
créer un climat de confiance.
L’empathie : Il faut essayer de comprendre l’attitude, les
comportements ou les émotions de la personne. Cette capacité
est largement sollicitée dans l’entretien clinique puisqu’il faut
comprendre ce qui est dit et le sens que cela a pour le sujet
La projection : consiste à attribuer à l’autre des sentiments,
émotions, attitudes que l’on refuse en soi-même
Aspects psychologiques de l’entretien
Du côté de l’interviewé
1) Des facteurs positifs encouragent la bonne démarche de l’entretien :
- Le volontariat
- Le désir d’influencer
- Le besoin de parler
2) Des mécanismes de défense possibles :
- La fuite
- La rationalisation
- La projection
- L’identification
- Le refoulement
- L’oubli
- Les formations réactionnelles
- Le retournement de l’agressivité sur soi
Du côté de l’interviewer Une attitude adéquat suppose :
- La qualité de l’accueil
- être centré sur ce qui est vécu par le sujet
- S’intéresser à la personne
- Respecter le sujet et lui manifester sa considération
- faciliter la communication
Retranscription de l’entretien (1)
l’analyse rigoureuse des entretiens n’est possible que si le contenu de leur enregistrement fait l’objet d’une transcription écrite.
On passe d’un contenu verbal recueilli oralement à un support écrit. => ne va pas de soi.
=> opération complexe, comparable à celle d’un traducteur plutôt qu’à celle d’un copiste.
Elle relève de la responsabilité de l’évaluateur. Comme tout travail de traduction, la transcription des entretiens peut «coller» plus ou moins au discours original, depuis la transcription intégrale jusqu’à divers degrés de la transcription élaborée.
Retranscription de l’entretien (2)
La transcription intégrale :
Elle reprend la totalité des informations verbales, para-verbales et non verbales émanant de l’interviewé et de l’interviewer
- Le discours verbal : la totalité des énoncés sont repris mot à mot dans
l’ordre de leur énonciation. Sont respectées les répétitions, les incorrections et toutes les marques souvent relachées du langage oral.
- Les informations paraverbales et non-verbales : Les traits non linguistiques d’accompagnement du dire figurent dans la transcription intégrale. Ces gestes et mimiques divers participent à l’expression subjective de sentiments, opinions, jugements que la personne garde, consciemment ou inconsciemment.
Analyse qualitative du discours (1)
En sciences Humaines et Sociales, la méthode des entretiens est le plus souvent associée à l’analyse dites de « contenu ».
Les principes de l’analyse de contenu : - l’analyse de contenu est une activité courante, voire vitale pour le sujet dans son
environnement. => Etre en relation avec son environnement, c’est y chercher des interprétations (donner du sens)
- Face à ce corpus, le chercheur va tenter d’identifier ce qui relève effectivement de ce
qu’il étudie. Pour cela, il doit procéder à une analyse de contenu. - Technique de recherche qui a pour objet une description objective, systématique du
contenu manifeste de la communication. - Il existe plusieurs méthodes d’analyse permettant l’observation des fréquences, des
relations entre différents éléments, d’effectuer des comparaisons entre plusieurs corpus ou entre plusieurs méthodes.
Analyse qualitative du discours : décrire le corpus (2)
Analyse descriptive - Quels sont les thèmes
dominants ?
- Comment s’associent-t-ils ?
- A quel moment apparaissent-t-ils ?
- Comment le sujet s’exprime ?
Interprétation / contenu latent
- Quels sont les liens entre la représentation et l’émotion ?
- Comment les mécanismes de défense interfèrent avec le discours ?
- Quelles sont les stratégies argumentatives du sujet ?
Analyse qualitative du discours : interpréter le contenu (3)
Comment les thèmes abordés par les interviewés éclairent la question d’étude?
Part de subjectivité
Analyse dans le cadre des théories existantes.
Travail disciplinaire ou interdisciplinaire
Analyse qualitative du discours : le regard du sociologue
L’analyse de contenu recherche les points de tension, d’interrelation, de perception du vécu social
Mise en perspective avec les théories publiés
L’analyse de contenu du discours en Psychologie (1)
Le terme « contenu » désigne l’information transmise à travers le discours
2 types de contenu : - le contenu manifeste (opinions, croyances…on s’intéresse
aux thèmes les plus souvent abordés, mots clés…) - le contenu latent (les non-dits, l’absence de certain thèmes,
silences…) Ces notions de contenu sont empruntées à la psychologie
freudienne
L’analyse de contenu du discours en Psychologie (2)
Pour Mucchielli, 1991, analyser le contenu d’un document, c’est « rechercher les informations qui s’y trouvent, dégager le sens ou les sens de ce qui y est présenté, formuler, classer tout ce que contient ce document ou cette communication »
L’objectif de l’analyse de contenu est donc d’être attentif et de se pencher
sur : les préférences thématiques, la position idéologique, l’attitude, les représentations…
C’est lorsque l'individu aborde son histoire, ses origines, ses filiations et ses alliances, les évènements marquants de sa vie, ses préoccupations idéologiques, ses croyances… que sa vision du monde ainsi que ses représentations apparaissent petit à petit
Toutes ces informations, qui constituent "l'être au monde" du sujet, vont être notre
matériel d’étude