le traitement comptable des marges arrière dans le secteur ... · pdf filele plan...

63
Page 1 sur 63 Le traitement comptable des marges arrière dans le secteur de la grande distribution par Jeanne Depond Septembre 2012 SOUS LA DIRECTION DE Monsieur Wolfgang DICK, Professeur, Titulaire de la Chaire Financial Reporting ESSEC-KPMG

Upload: hakhuong

Post on 05-Feb-2018

217 views

Category:

Documents


0 download

TRANSCRIPT

Page 1: Le traitement comptable des marges arrière dans le secteur ... · PDF filele Plan omptable Généal, n’opèent pas de distinction particulière des marges arrière selon leur

Chaire Financial Reporting ESSEC-KPMG

Jeanne Depond

Page 1 sur 63

Le traitement comptable des marges arrière

dans le secteur de la grande distribution

par

Jeanne Depond

Septembre 2012

SOUS LA DIRECTION DE

Monsieur Wolfgang DICK, Professeur, Titulaire de la Chaire Financial Reporting ESSEC-KPMG

Page 2: Le traitement comptable des marges arrière dans le secteur ... · PDF filele Plan omptable Généal, n’opèent pas de distinction particulière des marges arrière selon leur

Chaire Financial Reporting ESSEC-KPMG

Jeanne Depond

Page 2 sur 63

Remerciements

La réalisation de ce mémoire a été possible grâce à l’encadrement et à la contribution de

nombreuses personnes que je tenais à remercier tout particulièrement.

En premier lieu, je tiens à remercier Monsieur Wolfang DICK, responsable de la chaire Financial

Reporting ESSEC – KPMG et tuteur de mon mémoire, pour ses conseils sur la méthodologie à adopter

dans la réalisation d’un tel travail et sur les démarches à entreprendre en termes de recherche

d’informations et de contacts et pour son suivi régulier de mon travail.

Je remercie également Monsieur Bertrand DESBARRIERES, associé chez KPMG, qui m’a dédié de son

temps sur la compréhension des enregistrements comptables et m’a accompagnée dans la veille sur

l’évolution de la norme IAS 18.

Je suis, par ailleurs, très reconnaissante vis-à-vis de Madame Aïda FAIVRE, du groupe Carrefour, pour

son implication dans le suivi de mes travaux, pour ses conseils et sa disponibilité.

J’adresse également mes remerciements à Monsieur Daniel TIXIER, Professeur titulaire de la Chaire

Produits de Grande Consommation, qui a accepté d’échanger avec moi et qui m’a permis de prendre

de la hauteur et du recul sur mon sujet.

Merci également à Monsieur Peter WALTON, directeur des IFRS de la Chaire Financial Reporting

ESSEC – KPMG, et à Monsieur Paul ANDRE, directeur de la recherche de la Chaire Financial Reporting

ESSEC – KPMG pour nous avoir apporté une année riche d’enseignements.

Je tiens aussi à remercier Madame Elisabeth GOZDIK, assistante de la Chaire Financial Reporting

ESSEC – KPMG, qui s’est toujours montrée disponible et réactive pour toutes les questions et

problèmes logistiques que j’ai pu rencontrer.

Enfin, merci à mes parents pour leur soutien permanent et la relecture du mémoire.

Page 3: Le traitement comptable des marges arrière dans le secteur ... · PDF filele Plan omptable Généal, n’opèent pas de distinction particulière des marges arrière selon leur

Chaire Financial Reporting ESSEC-KPMG

Jeanne Depond

Page 3 sur 63

Table des matières

Remerciements ................................................................................................................. 2

Table des matières ............................................................................................................ 3

Introduction ..................................................................................................................... 5

Partie A : Les marges arrière : symbole d’un rapport de force déséquilibré entre industriels

et grande distribution ....................................................................................................... 7

I- Les spécificités de la grande distribution française ..................................................................... 7

a. Le modèle de revenu des grands distributeurs ....................................................................... 8

b. Les conséquences du modèle français .................................................................................... 9

II- Un renforcement progressif de la pression commerciale ........................................................... 9

a. Le mouvement de concentration du secteur de détail ......................................................... 10

b. Le développement des marques distributeurs ..................................................................... 12

III- Une réglementation aux effets pervers ................................................................................ 15

a. La réglementation des négociations commerciales : de Galland à Dutreil .......................... 15

b. La remise en cause de la loi Galland...................................................................................... 17

c. Vers une baisse globale des prix au détail : La loi de modernisation de l’économie ............ 19

Partie B: Les marges arrière : prestations de services ou dégradation tarifaire ? .............. 22

I- Les composantes de la marge arrière ....................................................................................... 22

a. Distinction marge avant / marge arrière ............................................................................... 22

b. La nature des coopérations commerciales............................................................................ 23

II- Les contrats « producteurs-distributeurs » ............................................................................... 24

a. Les primes ponctuelles .......................................................................................................... 24

b. Les primes récurrentes .......................................................................................................... 26

c. Du déréférencement au refus de vente ................................................................................ 26

III- Les marges arrière au cœur de la négociation commerciale ................................................ 27

a. Le pouvoir du linéaire ............................................................................................................ 28

b. La tarification des marges arrière.......................................................................................... 28

Partie C : Analyse du traitement comptable des marges arrière et mises en perspective .. 30

I- Traitement comptable des marges arrière selon le référentiel français .................................. 30

a. Les principes de comptabilisation ......................................................................................... 30

b. Les incidences sur les états financiers ................................................................................... 31

II- Traitement comptable des marges arrière selon les normes IFRS ............................................ 33

Page 4: Le traitement comptable des marges arrière dans le secteur ... · PDF filele Plan omptable Généal, n’opèent pas de distinction particulière des marges arrière selon leur

Chaire Financial Reporting ESSEC-KPMG

Jeanne Depond

Page 4 sur 63

a. Le principe de primauté de la substance sur la forme .......................................................... 33

b. L’IAS 2, relative aux stocks .................................................................................................... 34

c. L’IAS 18, relative aux produits des activités ordinaires ......................................................... 35

II- Etude de cas : impacts des marges arrière selon le référentiel choisi ...................................... 37

a. Evaluation des stocks ............................................................................................................ 37

b. Enregistrement des coopérations commerciales .................................................................. 43

III- Mises en perspective ............................................................................................................. 45

a. Proposition d’une grille d’analyse ......................................................................................... 45

b. Projet de réforme de la norme IAS 18 ................................................................................... 47

Conclusion ...................................................................................................................... 48

Glossaire......................................................................................................................... 49

Liste de figures ................................................................................................................ 51

Bibliographie .................................................................................................................. 52

Annexes .......................................................................................................................... 55

Page 5: Le traitement comptable des marges arrière dans le secteur ... · PDF filele Plan omptable Généal, n’opèent pas de distinction particulière des marges arrière selon leur

Chaire Financial Reporting ESSEC-KPMG

Jeanne Depond

Page 5 sur 63

Introduction

« Le pouvoir d’achat reste la principale préoccupation des Français. Et ceux-ci considèrent

que les enseignes de grande distribution sont celles qui font le plus pour défendre leur porte-

monnaie ». La conclusion du baromètre IPSOS, rendue public le 14 avril 2012, classe ainsi trois

enseignes de grande distribution parmi les enseignes préférées des consommateurs. Les prix des

biens de consommation courante restent donc parmi les paramètres essentiels qui déterminent le

niveau de pouvoir d’achat des Français et la confiance accordée au gouvernement en place.

Cependant, d’après diverses études commandées par les pouvoirs publics, il ressort que la cause

principale de la hausse des prix de détail est l’inadaptation des réglementations qui régissent les

négociations commerciales entre les distributeurs et les producteurs. En effet, elles sont en décalage

avec les réalités du modèle économique et des attentes des différentes parties. Les distributeurs

sont ainsi pointés du doigt par les pouvoirs publics, ainsi que les journalistes et l’opinion publique du

fait de leurs pratiques « abusives » et du pouvoir qu’ils exercent sur les petits producteurs.

La pratique qui fait essentiellement débat reste les marges arrière. Elles sont apparues dans les

années 1990 et régissent depuis les négociations commerciales entre distributeurs et producteurs.

Elles sont définies par le « club Adélard » comme « des budgets reversés par les fournisseurs aux

grands distributeurs généralement en fin d’année. Ces budgets ont théoriquement pour raison d’être

une rémunération par le fournisseur de la dynamique commerciale que lui apporte l’enseigne ».

Autrement dit, il s’agit de remises versées en fin d’année, en fonction du chiffre d’affaires généré par

la marque, en contrepartie de services rendus par les grands distributeurs destinés à promouvoir les

produits par diverses mises en avant. Leur répercussion sur le prix de vente a été rendue impossible

en 1996 par la loi Galland et ont provoqué, ainsi, l’érosion du pouvoir d’achat des consommateurs.

En réalité, pour maintenir des prix de vente compétitifs tout en s’assurant une marge satisfaisante,

les enseignes de grande distribution ont négocié des marges arrière de plus en plus importantes.

Ainsi, en 2006, le niveau moyen des marges arrière a atteint 37% du prix des produits de marque

vendus par les enseignes de grande distribution. Ces marges arrière font d’autant plus débat qu’elles

ne donnent pas toujours lieu à des prestations de service réelles et identifiables.

Le problème réside alors dans la traduction de ces marges arrière dans les états financiers. En effet,

si certaines prestations, telles que les mises en avant, par exemple, favorisent indéniablement le

développement des ventes des industriels, d’autres, en revanche, s’assimilent davantage à une

charge supplémentaire qui leur est imposée. En effet, la présentation des états financiers diffère

selon le référentiel comptable choisi dans la mesure où les normes comptables françaises, régies par

le Plan Comptable Général, n’opèrent pas de distinction particulière des marges arrière selon leur

substance économique mais privilégie davantage une qualification juridique des opérations

contrairement aux normes internationales, régies par les IFRS.

Les marges arrière restent, cependant, une exception française. Dès lors, les normes IFRS ne

prévoient pas de traitement comptable particulier pour cette pratique. Cependant, le cadre

conceptuel des normes européennes, qui promeut la primauté de la substance sur la forme, donne

Page 6: Le traitement comptable des marges arrière dans le secteur ... · PDF filele Plan omptable Généal, n’opèent pas de distinction particulière des marges arrière selon leur

Chaire Financial Reporting ESSEC-KPMG

Jeanne Depond

Page 6 sur 63

suffisamment d’indications pour uniformiser le traitement comptable des marges arrière et traduire

leur réalité économique.

Le thème des marges arrière reste donc pleinement d’actualité compte tenu des évolutions

économiques, législatives et comptables récentes concernant le secteur de la grande distribution et

illustre les différences de philosophie entre normes françaises et européennes ainsi que les

conséquences logiques dans la présentation des états financiers.

Problématique

Notre problématique s’articule autour de trois axes :

- Quelle est la genèse de l’actuel rapport de force déséquilibré entre distributeurs et

producteurs ?

- En quoi les caractéristiques propres des marges arrière rendent leur traitement comptable

spécifique et problématique ?

- Quels sont les enjeux de la révision des normes comptables internationales et quelles

solutions peuvent être apportées pour délivrer une image fidèle des états financiers ?

Méthodologie

La finalité de ce mémoire n’est pas de prendre part aux débats actuels sur les rapports conflictuels

entre les grands distributeurs et les producteurs. Il s’agit, plutôt, de dresser un bilan des normes

comptables, économiques et législatives qui régissent les négociations commerciales, et plus

particulièrement les marges arrière, ainsi que d’apporter des pistes de réflexion sur les solutions à

apporter pour délivrer une image fidèle des états financiers.

Ainsi, la trajectoire de nos travaux a été conduite en trois phases :

Nous avons tout d’abord réalisé un travail approfondi de recherches sur l’évolution des rapports

commerciaux entre distributeurs et producteurs (Partie I). Ces recherches préliminaires ont été

nourries d’articles de presse, de lectures diverses et d’entretiens avec des professionnels à même de

me faire part de leur expertise et de leur ressenti à ce sujet. Compte tenu de la complexité des

rapports commerciaux et de l’ampleur des polémiques qui les accompagnent, nous avons attaché

une importance toute particulière à la compréhension des enjeux et des conséquences des

différentes évolutions économiques et législatives pour chaque partie afin de rester le plus objectif

possible.

Page 7: Le traitement comptable des marges arrière dans le secteur ... · PDF filele Plan omptable Généal, n’opèent pas de distinction particulière des marges arrière selon leur

Chaire Financial Reporting ESSEC-KPMG

Jeanne Depond

Page 7 sur 63

Nous avons ensuite défini la notion même de marges arrière ainsi que ses caractéristiques propres

afin de matérialiser les ambivalences de cette pratique commerciale qui prennent tout leur sens lors

de leur traitement comptable. (Partie II)

Enfin, nous avons consacré la dernière partie de ce mémoire (Partie III) au traitement comptable

propre des marges arrière, en distinguant normes françaises et normes européennes ainsi que leurs

différents impacts dans la présentation des états financiers. Une illustration concrète ainsi que des

mises en perspective viendront illustrer l’étude théorique des normes comptables.

Partie A : Les marges arrière : symbole d’un rapport de force

déséquilibré entre industriels et grande distribution

Le phénomène des marges arrière ne touche pas uniquement une entreprise mais

l’ensemble d’un secteur, à savoir la grande distribution. Si l’objectif premier des grands distributeurs

était de proposer aux consommateurs une large gamme de produits au meilleur prix, une récente

étude publiée par Morgan Stanley, déclare que la France est devenue le pays le plus cher d’Europe

avec des prix 15% supérieurs à ceux exercés en Allemagne. Les grands distributeurs sont souvent

considérés comme les responsables de cet état de fait à cause de marges trop élevées et des

négociations déséquilibrées avec les producteurs.

Cette première partie a pour objectif de dresser un bilan des rapports commerciaux entre

producteurs et distributeurs afin de mieux comprendre la situation réelle actuelle.

I- Les spécificités de la grande distribution française

Au lendemain de la guerre, la distribution s’est construite autour d’un modèle de petits

commerces locaux et indépendants. Les faibles moyens mis en œuvre dans l’optimisation des

moyens de transport, des espaces de stockage et de la gestion des ventes ont conduit à la

construction d’un modèle de revenu basé sur la maximisation de la marge unitaire. Cependant,

l’émergence de la « distribution moderne », dans les années 1950-1960, a fait naître un nouveau

modèle de revenu, donnant davantage de poids aux négociations commerciales.

Page 8: Le traitement comptable des marges arrière dans le secteur ... · PDF filele Plan omptable Généal, n’opèent pas de distinction particulière des marges arrière selon leur

Chaire Financial Reporting ESSEC-KPMG

Jeanne Depond

Page 8 sur 63

a. Le modèle de revenu des grands distributeurs

La grande distribution telle qu’elle est connue aujourd’hui s’est développée en érigeant le

concept de « discount », alors en totale opposition avec la philosophie du commerce traditionnel qui

réalisait des bénéfices par un effet de marge.

L’objectif actuel des distributeurs est en effet de maximiser le volume des ventes afin d’avoir un

pouvoir de négociation important avec les fournisseurs et d’obtenir de meilleures conditions de

vente. Le modèle de revenu actuel est donc basé sur l’effet volume et non plus sur l’effet marge.

Ce modèle de revenu permet également aux enseignes de grande distribution d’avoir une situation

financière saine, caractérisée par un BFR négatif, comme le schématise le dessin ci-dessous.

- Stock : la durée de détention des stocks est faible (moins de 30 jours) et stable. La puissance de la

grande distribution réside en effet dans sa gestion des stocks qui lui permet de garantir un faible coût

de stockage. La mise en place, en 1990, du logiciel d’échange de données informatiques EDI permet

au fournisseur de réapprovisionner le magasin en cas de faible stock de ses produits.

- Créances clients : elles sont quasi-inexistantes dans la grande distribution car les particuliers payent

majoritairement au comptant.

- Crédit fournisseur : selon les fournisseurs, le délai de paiement accordé aux enseignes est compris

entre 60 et 120 jours. Carrefour a ainsi 5,5 fois plus de dettes fournisseurs que de créances

commerciales en 2011.

Cette situation, sans commune mesure avec les autres industries, permet aux enseignes de grande

distribution d’avoir un besoin en fonds de roulement négatif (5,7 milliards d’euros pour Carrefour en

2011) et de financer les immobilisations et les éléments d’exploitation ou de dégager des produits

financiers en plaçant l’excédent de trésorerie ainsi engendré. De ce fait, l’apport nécessaire en

capitaux propres est faible et le taux de rentabilité : bénéfice net/capitaux propres peut atteindre

300% en grande distribution malgré les faibles marges engendrées.

BFR = Stock + Créances – Dettes fournisseurs

<0

Page 9: Le traitement comptable des marges arrière dans le secteur ... · PDF filele Plan omptable Généal, n’opèent pas de distinction particulière des marges arrière selon leur

Chaire Financial Reporting ESSEC-KPMG

Jeanne Depond

Page 9 sur 63

b. Les conséquences du modèle français

Le modèle de revenu adopté par la grande distribution, basé sur une rotation rapide des

stocks, n’est viable que si les volumes de vente sont importants. Les grandes enseignes de

distribution ont dès lors toutes axé leur stratégie de communication sur l’attractivité-prix pour attirer

des clients et donc atteindre leur objectif de volume de commandes.

Les marges dégagées par les enseignes sont donc très faibles et les fournisseurs sont amenés à

réexaminer leurs conditions commerciales pour conserver leur partenariat. Ainsi, les fournisseurs

devront accorder des remises de tarif (marge avant) aux enseignes pour leur assurer une marge

satisfaisante et participer aux campagnes publicitaires des enseignes en tant que faire-valoir afin de

gagner en notoriété auprès de leur clientèle (marge arrière).

Le modèle de revenu de la grande distribution est donc à l’origine des marges arrière dénoncées par

les industriels. Nous verrons, par la suite, que les marges arrière ont également été renforcées par les

diverses réglementations mises en place par le législateur. Cependant d’autres stratégies

commerciales ont également été mises en place depuis afin de renforcer la puissance d’achat des

enseignes.

II- Un renforcement progressif de la pression commerciale

Les volumes traités en grande distribution permettent donc aux enseignes d’obtenir des

conditions d’achat plus favorables que les autres canaux de distribution. Cependant, d’autres

facteurs participent également au renforcement de leur « puissance d’achat » comme défini par

l’Autorité de la concurrence. Ainsi, « la puissance d'achat se mène à partir de critères multiples. […]

Parmi ceux-ci, figurent les conditions dans lesquelles sont négociés les achats (fonctionnement des

centrales d’achat), les caractéristiques des enseignes, les limites des surfaces de vente, le

comportement des consommateurs, le degré de développement des MDD, leur positionnement par

rapport aux marques nationales ainsi que le processus d'intégration verticale. » (Avis n°97A04 du

21/01/97 – « Relatif à diverses questions portant sur la concurrence de la distribution »)

Nous étudierons dans cette partie l’impact des principaux facteurs cités par l’Autorité de la

concurrence, à savoir le mouvement de concentration du secteur, le développement des marques

distributeurs ainsi que les caractéristiques des enseignes marquées par une ouverture à

l’internationale.

Page 10: Le traitement comptable des marges arrière dans le secteur ... · PDF filele Plan omptable Généal, n’opèent pas de distinction particulière des marges arrière selon leur

Chaire Financial Reporting ESSEC-KPMG

Jeanne Depond

Page 10 sur 63

10 principaux groupesPart de marché

en 1993

Leclerc 14,7%

Intermarché 14,6%

Carrefour 12,6%

Promodès 10,2%

Casino 7,6%

Sous-total des cinq premiers 59,7%

Auchan 6,9%

Docks de France 5,6%

Système U 5,4%

Cora 4,4%

Comptoirs modernes 2,7%

TOTAL 84,7%

Source: Nielsen

a. Le mouvement de concentration du secteur de détail

Les centrales d’achat sont apparues dans les années 1980 et rassemblaient, à l’époque, des

enseignes parfois concurrentes. Leur objectif était de centraliser les achats de l’ensemble des

hypermarchés et supermarchés qui portent leurs enseignes afin de profiter d’un effet volume et

d’obtenir les meilleures conditions commerciales possibles. Ces « super centrales d’achat » sont

cependant dissoutes, en 1986, après décision de l’Autorité de la Concurrence.

Cependant, malgré cette décision du législateur, le panorama de la grande distribution française a

continué d’évoluer et a subi de profonds changements dans les années 1990. Si en 1993 les cinq

principaux groupes détenaient près de 60% du marché, ils en détiennent plus de 90% en 2009

(Figures 1 et 2).

En effet, en 1996, Auchan rachète Docks de France suite à une OPA (Offre Publique d’Achat). En

1998, Carrefour réalise également une OPA sur Comptoirs modernes puis une OPE (Offre Publique

d’Echanges) avec Promodès en 2000. Des rapprochements stratégiques ont également lieu comme la

création d’une centrale commune d’achat entre Casino et Cora en 1999. Cette vague de

regroupements fait suite à la loi Raffarin, applicable en 1997, qui oblige les grands distributeurs à

demander une autorisation pour toute nouvelle ouverture ou extension de surface de magasin. Ainsi,

faute de pouvoir étendre leur réseau de magasins, les enseignes ont dû procéder à une croissance

externe via des acquisitions pour continuer à se développer.

Figure 1 : Parts de marché des dix principales centrales d’achat en 1993

Page 11: Le traitement comptable des marges arrière dans le secteur ... · PDF filele Plan omptable Généal, n’opèent pas de distinction particulière des marges arrière selon leur

Chaire Financial Reporting ESSEC-KPMG

Jeanne Depond

Page 11 sur 63

Groupe 1993 2009

Leclerc 8,8% 17,5%

Carrefour 7,5% 16,1%

Casino 4,5% 11,2%

Intermarché 8,7% 9,2%

Auchan 4,1% 7,5%

TOTAL 33,7% 61,4%

Source: Nielsen

5 principaux groupesPart de marché

en 2009

Leclerc + Système U 26,0%

Carrefour (+ Promodès + Comptoirs Modernes) 23,9%

Casino + Cora 16,6%

Intermarché 13,6%

Auchan (+ Docks de France) 11,1%

TOTAL 91,2%

Source: TNS Worldpanel

Figure 2 : Parts de marché des cinq principales centrales d’achat

La conséquence directe de ces regroupements est un renforcement de la puissance d’achat des

distributeurs. En effet, un faible nombre de firmes en aval implique des débouchés limités pour les

producteurs. Parallèlement à ce phénomène, la part de la grande distribution dans la distribution

alimentaire est passée de 59,7% en 1993 à 67,3% en 2009. Ainsi, alors que les cinq premiers

distributeurs représentaient 33,7% des débouchés de la distribution alimentaire en 1993, ils en

totalisent 61,4% en 2009 (Figure 3).

Figure 3 : Evolution des cinq principales centrales d’achat en termes de débouchés dans le

secteur alimentaire : 1993 / 2009

Le regroupement des achats, rendu possible par les centrales d’achat, permet donc aux enseignes de

négocier les meilleures conditions commerciales possibles auprès des industriels grâce à des volumes

d’achat accrus. L'Ilec (Institut de liaison et d'études des industries de consommation) qui représente

les marques de grande consommation, a donc demandé, dans le cadre de la réforme de la loi Galland

en 2005, d'interdire la constitution de centrales d'achat et de limiter la concentration des enseignes

de grande distribution par région. Pour l'Ilec, « la cause des dérèglements actuels faussant le

fonctionnement du marché réside dans l'explosion de la puissance d'achat de la grande

Page 12: Le traitement comptable des marges arrière dans le secteur ... · PDF filele Plan omptable Généal, n’opèent pas de distinction particulière des marges arrière selon leur

Chaire Financial Reporting ESSEC-KPMG

Jeanne Depond

Page 12 sur 63

distribution ». Aussi, il demande « l'interdiction de la constitution de centrales d'achat, de

référencement ou de vente de services, ayant pour but de massifier les achats ».

Outre le mouvement de concentration du secteur du détail via les centrales d’achat, les enseignes

ont également développé les MDD (Marques De Distribution) pour renforcer leur pouvoir vis-à-vis

des industriels.

b. Le développement des marques distributeurs

La loi sur les NRE (Nouvelles Régulations Economiques) du 15 mai 2001 définit précisément la

marque de distributeur dans l’article 62 : «Est considéré comme produit vendu sous marque

distributeur le produit dont les caractéristiques ont été définies par l’entreprise ou le groupe

d’entreprises qui en assure la vente au détail et qui est le propriétaire de la marque sous laquelle il

est vendu ».

La première MDD (Marque De Distributeur) apparaît en 1901 avec Casino qui commercialise des

produits de première nécessité au nom de la marque afin d’assurer une continuité dans

l’approvisionnement par une intégration verticale vers l’amont et une politique de qualité. Monoprix

lance sa propre marque « premier prix » en 1928 sur des produits courants. Mais c’est Carrefour qui

lancera le concept actuel de MDD avec la campagne publicitaire « 50 articles aussi bons, moins

chers ».

Les MDD ont depuis pris de l’ampleur dans de plus en plus d’enseignes et de rayons. Les parts de

marchés en volume des MDD en France sont en effet passées de 12,8% en 1993 à 31% en 2009. Les

taux de pénétration des MDD par produits sont donnés par la figure 4. A noter que les MDD sont peu

développés dans le secteur « hygiène et beauté » et « boissons alcoolisées ». En effet, les

consommateurs semblent accorder davantage de confiance dans les marques nationales pour des

produits liés à la santé. Pour pallier ce manque de « capital confiance » les distributeurs vont utiliser

des marques réservées (ex : Veuve Emile pour les champagnes Auchan) pour que les consommateurs

ne fassent pas le rapprochement avec la marque distributeur. Les produits MDD sont donc des

produits peu impliquants, à travers lesquels le consommateur ne cherche pas de différentiation

sociale.

Page 13: Le traitement comptable des marges arrière dans le secteur ... · PDF filele Plan omptable Généal, n’opèent pas de distinction particulière des marges arrière selon leur

Chaire Financial Reporting ESSEC-KPMG

Jeanne Depond

Page 13 sur 63

Source: Nielsen / Origine: distributeurs

Source: Nielsen / Origine: distributeurs

Figure 4 : Parts de marché des MDD par rayon en 2012

La figure 5 ci-après présente quant à elle la répartition des parts de marché de MDD par enseigne.

Casino se distingue largement avec 43% des ventes sous marques de distributeurs contre seulement

23,2% pour Monoprix.

Figure 5 : Parts de marché des MDD par enseigne en 2009

Cette politique de développement des MDD répond à divers objectifs :

- Améliorer la compétitivité de l’offre : les produits MDD dégagent une marge plus élevée car

ils ne supportent pas certains coûts majeurs comme la R&D ou la publicité

Page 14: Le traitement comptable des marges arrière dans le secteur ... · PDF filele Plan omptable Généal, n’opèent pas de distinction particulière des marges arrière selon leur

Chaire Financial Reporting ESSEC-KPMG

Jeanne Depond

Page 14 sur 63

- Différencier l’offre marchande grâce à l’exclusivité des produits pour fidéliser la clientèle.

Selon une étude LSA, « plus d’un tiers des consommateurs se déclarent fidèles aux marques

enseigne, même à un prix équivalent aux marques nationales, ce qui confirme l’existence

d’un lien plus fort que le prix ».

- Concurrencer les marques nationales et ainsi accroître le pouvoir de négociation

Si la rédaction du cahier des charges ainsi que la commercialisation du produit MDD est à la charge

de l’enseigne, sa production est sous-traitée par des marques nationales, qui participent, alors, au

renforcement de la pression commerciale. Leurs attentes sont multiples :

- Assurer le référencement de leurs produits en linéaire

- Bénéficier de rendements d’échelle en augmentant la capacité de production de leurs usines

- S’assurer des débouchés plus vastes en participant à l’effort d’internationalisation des grands

distributeurs sans supporter les coûts de développement associés

- Profiter de leur collaboration avec les enseignes pour diminuer les obstacles au

référencement de leurs produits vendus sous marque nationale

Grâce au développement des MDD, les producteurs ont pu développer de nouvelles sources de

revenus et s’assurer des débouchés plus vastes. Les enseignes ont, quant à elles, réussi à

concurrencer les marques nationales et à fidéliser leur clientèle grâce à leur propre marque.

Cependant, le développement des MDD a également permis aux enseignes de bénéficier d’une

puissance d’achat accrue car, à surface de vente égale, le risque d’éviction s’agrandit. Dès lors, outre

les primes de référencement de plus en plus élevées, les industriels doivent proposer des produits

toujours plus innovants et accompagnés d’efforts marketing importants. Ces relations commerciales

toujours plus âpres ont, par exemple, contraint Corah, fournisseur exclusif de Marks & Spencer, à

déposer le bilan (voir annexe 1).

Le mouvement de concentration des centrales d’achat ainsi que le développement des marques

distributeurs ont permis aux enseignes de grande distribution d’acquérir une grande puissance

d’achat et d’avoir des moyens de pression sur les producteurs dans les négociations commerciales.

Face à ces rapports déséquilibrés, les pouvoirs publics ont tenté de voter des lois protégeant les

producteurs et encadrant les pratiques commerciales comme les marges arrière. Cependant, ces lois

se sont souvent montrées inefficaces car elles ne correspondaient pas au modèle économique de la

grande distribution.

Page 15: Le traitement comptable des marges arrière dans le secteur ... · PDF filele Plan omptable Généal, n’opèent pas de distinction particulière des marges arrière selon leur

Chaire Financial Reporting ESSEC-KPMG

Jeanne Depond

Page 15 sur 63

III- Une réglementation aux effets pervers

En France, les relations entre les distributeurs et les producteurs sont complexes et relèvent,

à la fois, du droit commercial et du droit à la concurrence. Le législateur a, à de nombreuses reprises,

voté des lois permettant de rétablir l’équilibre des relations commerciales, dans un souci d’efficacité

économique. Nous étudierons, dans cette partie, les lois les plus significatives qui ont eu un fort

impact dans le traitement des marges arrière. Ce fut ainsi le cas de la loi Galland puis de la circulaire

Dutreil et de la loi de modernisation de l’économie.

a. La réglementation des négociations commerciales : de Galland à

Dutreil

Les fondements de la réglementation des relations commerciales entre distributeurs et

producteurs remontent à l’ordonnance de 1986 relative à la liberté des prix et de la concurrence.

Cependant, cette ordonnance ne protégeait pas les industriels de la puissance d’achat des enseignes,

ni de leurs pratiques discriminatoires. Dès lors, le législateur s’est lancé dans un processus de refonte

de l’encadrement de la concurrence qui a donné lieu à la loi du 1er juillet 1996 sur l’équilibre et la

loyauté des relations commerciales, dite loi Galland. Cette loi comporte ainsi différents chapitres

dont les principaux sont :

– La transparence tarifaire et l’interdiction de revente à perte

– L’interdiction des prix abusivement bas

– L’autorisation de refus de vente

– La réglementation des primes de référencement

L’interdiction de revente à perte est très certainement l’article le plus significatif de cette loi dans la

mesure où il a modifié en profondeur les relations commerciales entre distributeur et producteur et

a eu des effets importants sur l’évolution des prix à la consommation.

Articles 10 et 11 de la loi Galland sur le seuil de revente à perte

L’interdiction de la revente à perte est en application depuis 1963 mais a été précisée dans

l’ordonnance de 1986. Depuis cette date, il est ainsi interdit pour un distributeur de vendre en

dessous de son prix d’achat unitaire. Les divergences entre producteurs et distributeurs concernent

généralement les politiques tarifaires dans la mesure où les distributeurs sont souvent amenés à

pratiquer des prix très bas sur les produits de consommation courante pour se distinguer de la

Page 16: Le traitement comptable des marges arrière dans le secteur ... · PDF filele Plan omptable Généal, n’opèent pas de distinction particulière des marges arrière selon leur

Chaire Financial Reporting ESSEC-KPMG

Jeanne Depond

Page 16 sur 63

concurrence. Ces prix, dits d’appel, sont très mal perçus par les industriels qui devaient ainsi baisser

leur prix de vente.

L’estimation du prix réel d’achat est rendue difficile par les nombreuses remises annexes accordées

par les distributeurs. L’ordonnance de 1986 (article 32) indiquait alors que « […] le prix d’achat

effectif est présumé être le prix porté sur la facture d’achat, majoré des taxes sur le chiffre d’affaires,

des taxes spécifiques afférentes à cette revente et, le cas échéant, du prix du transport. » Dans son

ancienne rédaction, le prix d’achat effectif était ainsi « présumé » être le prix figurant sur la facture,

laissant ainsi beaucoup de liberté aux distributeurs.

La loi Galland (voir annexe 2) s’est donc efforcée de donner une définition précise du prix d’achat

effectif et donc du seuil de revente à perte. « Le prix d’achat effectif est le prix unitaire figurant sur la

facture majoré des taxes sur le chiffre d’affaires, des taxes spécifiques afférentes à cette revente et du

prix du transport. » (article 10). Ainsi, depuis 1997, le prix d’achat est réduit au prix figurant sur la

facture dont on ne déduit aucune remise qui serait acquise en fin d’année. Est également ajouté

l’article 11 spécifiant que « la facture doit mentionner […] toute réduction de prix acquise à la date de

la vente ou de la prestation de service et directement liée à cette opération de vente ou de prestation

de service. » Ainsi seules les marges formellement acquises lors de la facturation sont transférables

au consommateur final.

La Loi NRE, relative aux nouvelles régulations économiques

La loi NRE du 15 mai 2001 (loi n° 2001-420) est venue apporter des modifications sur le cadre

réglementaire de la grande distribution. Cette loi vise à « moraliser les pratiques commerciales » et à

renforcer le pouvoir des producteurs en leur apportant des moyens d’action pour faire disparaître les

fausses coopérations commerciales, c’est-à-dire celles qui ne donnent pas lieu à des prestations de

service identifiables.

En particulier, la loi NRE interdit la pratique des « corbeilles de la mariée », c’est-à-dire demander

aux industriels une contribution financière lors de la rénovation d’un point de vente. Cet article

s’inscrit dans une volonté plus large du législateur, à savoir protéger les producteurs des

« coopérations mortes », c’est-à-dire des contributions financières qui ne donnent lieu à aucune

prestation de service identifiable.

Les députés ont également souhaité protéger les PME, plus particulièrement les fournisseurs de

marques de distributeur en leur accordant un délai de préavis en cas de déréférencement deux fois

supérieur à celui octroyé aux marques d'industriels ainsi qu’un nouveau cadre juridique concernant

les situations de dépendance économique. Ainsi, la part d’un distributeur dans le chiffre d’affaires

d’un producteur ne doit pas excéder 22%. Dès lors, les possibilités d'accompagnement de la

croissance des enseignes, y compris à l'étranger, se réduisent.

Page 17: Le traitement comptable des marges arrière dans le secteur ... · PDF filele Plan omptable Généal, n’opèent pas de distinction particulière des marges arrière selon leur

Chaire Financial Reporting ESSEC-KPMG

Jeanne Depond

Page 17 sur 63

La circulaire Dutreil du 16 mai 2003

Suite au relatif échec de la loi NRE, la circulaire Dutreil a été rédigée et mise en application le 16 mai

2003 afin de préciser le cadre juridique des négociations commerciales entre fournisseurs et

distributeurs, notamment concernant les réductions de prix hors facture. Plus généralement, les

règles de forme ainsi que les types de pratiques abusives et discriminatoires, pouvant être

rencontrés lors des négociations commerciales, sont décrits et légiférés.

La circulaire Dutreil légitime, ainsi, la différenciation tarifaire liée aux délais de règlement et à

l’escompte pour paiement anticipé et confirme l’autorisation de refus de vendre évoquée dans la loi

Galland du 1e juillet 1996. La circulaire rappelle également que les négociations commerciales entre

un fournisseur et ses différents clients doivent s’inscrire dans un cadre général de transparence

tarifaire et de non-discrimination.

Malgré la volonté du législateur d’encadrer plus strictement les coopérations commerciales pour

empêcher les pratiques déloyales, les distributeurs, tout comme les industriels, s’accordent à dire

que les lois votées par le législateur doivent laisser une place au dialogue entre les parties et ne pas

imposer des règles strictes qui pourraient aller à l’encontre des attentes des producteurs et freiner

leur croissance. Malgré la volonté réelle du législateur de réglementer les pratiques commerciales et

de baisser globalement les prix de vente au détail, ces derniers n’ont cessé d’augmenter depuis 1999.

Un processus de remise en cause progressive de la loi Galland a donc été enclenché.

b. La remise en cause de la loi Galland

En 2004, le Président de la République Nicolas Sarkozy, lance une vaste campagne de

réduction des prix pour le consommateur. Les producteurs et distributeurs s’engagent alors à baisser

de 2% en moyenne les prix d’environ 2500 produits de grandes marques dans les secteurs

alimentaire, hygiène-beauté et entretien ménager. Cependant, malgré cet accord, les prix de près de

80% des produits restent inchangés. Le ministre de l’économie commande alors un rapport qui

analyse les lois existantes et ses effets réels sur l’économie.

Les effets induits de la loi Galland

Comme vu précédemment, la loi Galland limite la part des remises que les distributeurs peuvent

répercuter au consommateur final, dans la mesure où seules les marges avant rentrent en compte

dans le calcul du seuil de revente à perte. Les distributeurs ont donc intérêt à augmenter la part des

remises rétroactives, au détriment des remises accordées sur facture car elles ne peuvent pas être

détectées par la concurrence. Ainsi, la part moyenne des marges arrière dans le prix final est passée

Page 18: Le traitement comptable des marges arrière dans le secteur ... · PDF filele Plan omptable Généal, n’opèent pas de distinction particulière des marges arrière selon leur

Chaire Financial Reporting ESSEC-KPMG

Jeanne Depond

Page 18 sur 63

de 22% en 1998 à 32% en 2003. Ces nouvelles techniques de négociation commerciale ont été

soulignées par le rapport Canivet, commandé par le Ministère de l’Economie, des Finances et de

l’Industrie : « Il reste que, progressivement s’est opéré un déplacement par les entreprises de la

négociation commerciale du prix de vente facturé tel qu’il résulte de l’application des conditions

générales de vente vers les réductions de prix hors facture et la coopération commerciale, cet

ensemble constituant ce qu’il est convenu d’appeler « la marge arrière » ».

Ainsi, en empêchant les distributeurs de répercuter l’ensemble des remises sur le prix final, le seuil

de revente à perte est fixée à un niveau anormalement élevé. Compte tenu que les conditions

générales de vente proposées par les producteurs ne peuvent pas être discriminatoires et que les

distributeurs ne peuvent pas vendre à un prix inférieur au seuil de revente à perte, ces derniers ont

l’assurance que leurs concurrents ne pourront pas proposer un prix de vente plus bas que le leur. La

concurrence se trouve ainsi affaiblie et les prix de détail augmentent. Le rapport Canivet souligne

ainsi que la loi Galland a favorisé les comportements anticoncurrentiels, non pas à cause de

l’existence des marges arrière mais en empêchant les distributeurs de les répercuter sur les prix de

vente.

La recommandation finale du rapport est donc de ramener le seuil de revente à perte au niveau du

prix dit « triple net », c’est-à-dire net de marges arrière afin de faire bénéficier aux consommateurs

d’une réelle diminution des prix et de permettre aux grands distributeurs de concurrencer les hard-

discounts.

La loi Dutreil II du 2 août 2005

La loi Dutreil II (Loi n° 2005-882) est votée le 2 août 2005 et s’inspire fortement des

recommandations établies par le rapport Canivet. Elle autorise en effet la déduction d’une partie des

marges arrière du prix d’achat au fournisseur. Cependant, afin de réduire le risque d’une guerre des

prix en France qui pourrait être néfaste aux entreprises, le rapport Canivet suggère que la

déréglementation soit progressive et encadrée par les pouvoirs publics.

Ainsi, le distributeur peut déduire du prix d’achat :

Au 1e janvier 2006, la part des marges arrière excédant 20% du prix

Au 1e janvier 2007, la part des marges arrière excédant 15% du prix

Au 1e mars 2008, l’ensemble des marges arrière

L’évolution de la prise en compte des marges arrière dans le calcul du prix de revente à perte est

résumée dans le tableau ci-dessous :

Page 19: Le traitement comptable des marges arrière dans le secteur ... · PDF filele Plan omptable Généal, n’opèent pas de distinction particulière des marges arrière selon leur

Chaire Financial Reporting ESSEC-KPMG

Jeanne Depond

Page 19 sur 63

Hypothèse: les marges arrières représentent 35% du prix net facturé

1997 à 2005 1e janvier 2006 1e janvier 2007 1e mars 2008

Prix d'achat 100 100 100 100

Marges arrière 35% 35% 35% 35%

Part déductible 0 15 20 35

Seuil de revente à perte 100 85 80 65

Source: INSEE - rapport Loi Galland

Figure 6 : Mécanismes de déduction des marges arrière de 1997 à 2008

La lutte contre la hausse des prix à la consommation a conduit les pouvoirs publics à suivre les

recommandations du rapport Canivet et à permettre aux industriels d’inclure les marges arrière dans

le calcul du seuil de revente à perte. Cette loi devait permettre aux consommateurs de profiter de la

part croissante des marges arrière dans le prix net facturé et aux distributeurs de concurrencer plus

efficacement les hard discounts. Cette loi a eu des effets immédiats dans la mesure où, d’après les

estimations effectuées par l’INSEE, elle aurait permis une diminution d’environ un point entre 2004

et 2005 (Figure 7).

c. Vers une baisse globale des prix au détail : La loi de modernisation de

l’économie

Dès 2005, la loi Dutreil a abaissé le seuil de revente à perte. La loi de modernisation de

l’économie, ou LME (Loi n°2008-776), basée sur les recommandations du rapport Attali, cherche à

« stimuler la croissance et les énergies (l'emploi), en levant les blocages structurels et règlementaires

que connaît l’économie de la France ».

La LME, votée le 4 août 2008 comporte trois grands volets :

- La relance de la concurrence

- Le renforcement de l’attractivité du territoire

- L’amélioration du financement de l’économie

Concernant la grande distribution, elle a systématisé la logique mise en place dans la loi Dutreil II:

- En abaissant le seuil de revente à perte au niveau de prix de vente trois fois nets du

fournisseur

Page 20: Le traitement comptable des marges arrière dans le secteur ... · PDF filele Plan omptable Généal, n’opèent pas de distinction particulière des marges arrière selon leur

Chaire Financial Reporting ESSEC-KPMG

Jeanne Depond

Page 20 sur 63

- En permettant une discrimination entre clients, autorisant donc une plus grande liberté de

négociation des conditions particulières de ventes

- En obligeant les commerçants à faire figurer les prestations commerciales dans leur plan

d’affaires annuel signé avec le fournisseur

- En sanctionnant lourdement les prestations commerciales facturées sans contrepartie réelle

Elle a également établi de nouvelles règles concernant l’extension des surfaces de vente, en relevant

de 300 m² à 1000 m² le seuil de déclenchement de la procédure d'autorisation d'ouverture de

magasins, afin d’accentuer la concurrence entre les enseignes de grande distribution, mise à mal par

la loi Galland.

Ainsi, suite à l’adoption de la LME et risquant désormais de provoquer des contentieux, les marges

arrière ont fortement été réduites, entraînant une baisse globale des prix (Figure 7).

Figure 7: Inflation des prix de détail et des prix de grande consommation depuis 1999

Source : INSEE

Page 21: Le traitement comptable des marges arrière dans le secteur ... · PDF filele Plan omptable Généal, n’opèent pas de distinction particulière des marges arrière selon leur

Chaire Financial Reporting ESSEC-KPMG

Jeanne Depond

Page 21 sur 63

Du côté des fournisseurs, cette baisse de prix s’est traduite par une baisse sensiblement égale de leur

chiffre d’affaires en valeur et de leurs charges puisque les distributeurs leur ont facturé moins de

prestations commerciales. Concernant la grande distribution, de façon symétrique, le chiffre

d’affaires et les achats ont également diminué en valeur bien qu’en réalité, l’évolution des ventes

reste identique.

Les sanctions attribuées aux enseignes de grande distribution en cas de fausses coopérations

commerciales sont réelles et importantes, comme en témoigne le procès contre Carrefour de 2009.

En effet, Carrefour a été condamné (le 14 octobre 2009 puis confirmé le 9 mars 2012) par la cour

d'appel de Paris à payer une amende de 2 millions d'euros et à restituer 17 autres millions perçus

au titre des "marges arrière". La cour d'appel de Paris a en effet jugé que le groupe français de

distribution avait "obtenu, en application des accords de partenariat conclus" en 2005-2006 avec 16

fournisseurs "des rémunérations manifestement disproportionnées au regard des services rendus ou

ne correspondant à aucun service commercial effectivement rendu".

La loi de modernisation de l’économie s’inscrit ainsi dans un processus de régulation des

négociations commerciales par le législateur. Afin de relancer la concurrence et renforcer

l’attractivité du territoire, les pouvoirs publics ont profondément remis en cause les fondements des

lois Galland et Raffarin de 1996 qui visaient à limiter les extensions de surface de vente. Cette loi,

tout comme les précédentes, a créé des polémiques chez les industriels, en particulier les PME, qui

craignaient que la libéralisation progressive des négociations commerciales renforce la puissance

d’achat et les moyens de pression des grands distributeurs.

Depuis 1986 et la loi Galland, le législateur s’est peu à peu impliqué dans les négociations

commerciales entre distributeurs et producteurs. Si la volonté première des pouvoirs publics était de

protéger les petits producteurs contre les pratiques abusives des distributeurs, les lois ont été depuis

révisées et marquent une volonté de libéralisation des pratiques commerciales. Ainsi, les pouvoirs

publics souhaitent lutter contre « la vie chère » et diminuer les prix de détail. Cependant, comme le

montre la figure 7 , les prix à la consommation sont fortement liés à des évènements extérieurs,

comme les crises économiques ou les cours des matières premières. Dès lors, malgré les nombreuses

lois votées depuis la loi Galland, le niveau des prix n’a pas diminué depuis 1999.

Page 22: Le traitement comptable des marges arrière dans le secteur ... · PDF filele Plan omptable Généal, n’opèent pas de distinction particulière des marges arrière selon leur

Chaire Financial Reporting ESSEC-KPMG

Jeanne Depond

Page 22 sur 63

Tarif du fournisseur: 100

Remise sur factures: 10 Marge avant

Prix unitaire facturé: 90 Dégradation tarifaire

Remises hors facture: 10 Marge arrière

Prix net des produits: 80

Coopération commerciale: 20

Partie B: Les marges arrière : prestations de services ou dégradation

tarifaire ?

Les négociations commerciales entre distributeurs et producteurs s’inscrivent dans un cadre

général complexe qui relève à la fois des cadres juridique, économique et commercial. Depuis les

années 1950, les rapports commerciaux ont ainsi évolué mais restent toujours conflictuels et

déséquilibrés. Malgré les nombreuses tentatives du législateur d’imposer un encadrement strict aux

négociations commerciales, les parties prenantes ont toujours réussi à contourner les règles et à

trouver de nouvelles voies de développement. Les marges arrière ont, en particulier, fait l’objet de

nombreuses réformes mais restent, à ce jour, au cœur des négociations commerciales.

Cette partie a pour objectif d’étudier les caractéristiques propres des marges arrière afin de mieux

comprendre leur ambivalence, à l’origine des différences de traitement comptable, selon le

référentiel choisi.

I- Les composantes de la marge arrière

Les négociations commerciales portent sur deux aspects distincts, à savoir la marge avant et

la marge arrière. Le traitement comptable des marges avant ne posent pas de difficultés, c’est

pourquoi notre étude se concentre davantage sur les marges arrière.

a. Distinction marge avant / marge arrière

La marge avant correspond à la différence entre le prix de vente au consommateur et le prix

unitaire facturé par le fournisseur, tandis que la marge arrière est « la différence entre le prix net

facturé par le fournisseur et le prix réellement payé par le distributeur, tel que résultant des

réductions de prix conditionnelles et des accords de coopération commerciale ».

Le prix net facturé aux enseignes est défini comme suit :

Page 23: Le traitement comptable des marges arrière dans le secteur ... · PDF filele Plan omptable Généal, n’opèent pas de distinction particulière des marges arrière selon leur

Chaire Financial Reporting ESSEC-KPMG

Jeanne Depond

Page 23 sur 63

Source: Ilec

Les remises sur factures correspondent généralement aux remises quantitatives liées au volume

d’achat considéré ou aux remises de fonction. Les marges avant ont fait l’objet de régulations lors de

la loi Galland et fixent le seuil de revente à perte. Ainsi, dans l’exemple ci-dessus, l’enseigne de

grande distribution ne pourra pas vendre le produit en dessous du prix net facturé soit 90.

En supprimant le droit d’alignement, la loi Galland a permis de donner une lisibilité parfaite au prix.

En effet, si une enseigne pratique un prix moins élevé qu’une autre, cela signifie qu’elle a obtenu de

meilleures conditions commerciales via une marge avant plus importante. Dès lors, les concurrents

exigeront les mêmes tarifs auprès des industriels. Les marges arrière, étant plus opaques, permettent

ainsi à l’enseigne de conserver une marge satisfaisante et à l’industriel de continuer à pratiquer des

traitements discriminatoires.

Ainsi, les marges arrière sont en augmentation croissante comme le montre le graphique ci-dessous :

Figure 8 : Evolution du taux de marges arrière depuis 1998

Les marges arrière sont donc au cœur des négociations commerciales et ont pris, depuis la loi

Galland, une importance primordiale. Les marges arrière sont généralement liées à des coopérations

commerciales de différentes natures.

b. La nature des coopérations commerciales

Les coopérations commerciales relèvent, généralement, de deux catégories spécifiques, à

savoir le dynamisme commercial pour l’industriel ou la participation aux coûts administratifs de

l’enseigne.

Page 24: Le traitement comptable des marges arrière dans le secteur ... · PDF filele Plan omptable Généal, n’opèent pas de distinction particulière des marges arrière selon leur

Chaire Financial Reporting ESSEC-KPMG

Jeanne Depond

Page 24 sur 63

Les prestations qui relèvent de la dynamique commerciale peuvent porter sur le lancement de

nouveaux produits ou les mises avant ou têtes de gondole qui permettent d’exposer les produits

dans des endroits stratégiques du magasin.

D’autres prestations relèvent davantage de la participation aux coûts administratifs de l’enseigne

mais vont également permettre une meilleure gestion des coûts logistiques de l’industriel. Il peut en

effet s’agir de la simplification de la transmission des informations sur les commandes par le biais de

l’EDI (« Electronic Data Interchange ») qui assure une liaison directe par ordinateur entre le

distributeur et le fournisseur.

La pratique des marges arrière n’est donc pas répréhensible car elle donne lieu à des prestations de

service utiles pour l’industriel. Le problème réside davantage dans l’incapacité des industriels à

refuser ces pratiques sous peine de ne pas conclure l’accord de négociation ainsi que la tarification

de ces prestations, déconnectée de leur valeur réelle.

II- Les contrats « producteurs-distributeurs »

Afin d’assurer le dynamisme des produits vendus en linéaire, les enseignes de grande

distribution peuvent être amenées à proposer des services en contrepartie d’une rémunération,

appelée prime. Ces prestations sont diverses et nous étudierons, dans cette partie, les prestations les

plus courantes qui revêtent deux formes, à savoir « les primes ponctuelles » et « les primes

récurrentes ». Davantage que de simples services proposés aux industriels, ces prestations prennent

la forme de moyens de pression supplémentaires et peuvent conduire à un déréférencement en cas

de refus de l’industriel.

a. Les primes ponctuelles

Les primes ponctuelles désignent les sommes versées aux distributeurs en compensation de

prestations exceptionnelles et donc non récurrentes. Les primes ponctuelles les plus courantes sont

les primes de référencement ainsi que les primes liées aux ouvertures de magasin.

Les primes de référencement

Il en revient au grand distributeur de décider de commercialiser de nouveaux produits et donc

d’accepter de les référencer en linéaires.

Cependant, les lois successives visant à restreindre les extensions de surface de vente ont rendu les

linéaires rares. Les industriels sont donc amenés à rémunérer le distributeur pour profiter de cette

ressource et/ou pour compenser le risque pris par le distributeur en cas de référencement d’un

Page 25: Le traitement comptable des marges arrière dans le secteur ... · PDF filele Plan omptable Généal, n’opèent pas de distinction particulière des marges arrière selon leur

Chaire Financial Reporting ESSEC-KPMG

Jeanne Depond

Page 25 sur 63

nouveau produit. D’autre part, lors du référencement de nouvelles références, le distributeur devra

engager des dépenses logistiques, telles que l’intégration dans les fichiers, la tarification… Il est donc

demandé aux industriels de participer aux frais via des « primes de référencement ».

Le montant de ces primes est variable et dépend des produits considérés. En effet, il sera basé sur les

prévisions de chiffres d’affaires, sur la notoriété de l’industriel et sur le nombre de grandes surfaces

dans lesquelles sera référencé le produit. Par exemple, selon C. Jacquiau, référencer cinq tablettes de

chocolat dans 1500 supermarchés et 200 hypermarchés donnera lieu à une prime de référencement

de près de 2 millions d’euros.

Ces primes de référencement sont très élevées à cause de la puissance d’achat du distributeur. En

effet, si le distributeur a effectivement besoin de marques fortes pour attirer et fidéliser sa clientèle,

le risque de perdre un client, faute de référencement, est faible car les produits de substitution sont

très développés. En revanche, l’industriel se doit d’être référencé dans un maximum de magasins

possibles pour accroître sa notoriété.

Le législateur est intervenu à plusieurs reprises afin de réguler la situation. La loi Galland a ainsi

inscrit ce principe de menace de déréférencement dans la loi de 1996, interdisant ainsi : « d'obtenir

ou de tenter d'obtenir, sous la menace d'une rupture brutale des relations commerciales, des prix, des

délais de paiement, des modalités de vente ou des conditions de coopération commerciale

manifestement dérogatoires aux conditions générales de vente ». Cette loi se révèle cependant

inefficace dans la mesure où elle ignore le fonctionnement même des réseaux de distribution. En

effet, l’entreprise qui négocie les conditions d’achat (centrales d’achat) est souvent différente de

celle qui achète et revend (centrales de référencement). Ces dernières ne sont en effet pas habilitées

à négocier les volumes d’achat et sont uniquement rémunérées par les primes de référencement.

Ainsi, des difficultés d’application sont apparues suite à la loi et les primes de référencement restent,

à ce jour, toujours utilisées par les distributeurs et régulièrement dénoncées par les industriels et les

politiques comme Jean-Yves Le Déaut, qui a déclaré en 2001 : « Nous avons mis en évidence nombre

de pratiques économiquement nuisibles et juridiquement inacceptables. […] La concurrence est une

idée directrice, pas davantage. Elle n’est en fait jamais réalisée dans la vie des affaires. C’est pourquoi

le législateur doit intervenir. En ce sens, la régulation voulue par le gouvernement [… est] la condition

d’un bon fonctionnement du marché. »

Les ouvertures et extensions de magasins

L’agrandissement d’une surface de vente ou l’ouverture d’un nouveau magasin va permettre à

l’industriel d’être référencé dans plus de magasins ou de proposer une gamme plus étendue de

produits. Ainsi, l’industriel peut espérer un accroissement de son chiffre d’affaires lors des

ouvertures ou extensions de magasin.

Afin de financer les travaux et les coûts logistiques qui en découlent, les enseignes de grande

distribution peuvent donc être amenées à exiger une prime dont le montant dépendra

essentiellement du nombre de mètre carré de surface nouvelle.

Page 26: Le traitement comptable des marges arrière dans le secteur ... · PDF filele Plan omptable Généal, n’opèent pas de distinction particulière des marges arrière selon leur

Chaire Financial Reporting ESSEC-KPMG

Jeanne Depond

Page 26 sur 63

b. Les primes récurrentes

Les primes récurrentes sont des prestations de service qui sont organisées de façon régulière

et sont reconduites tous les ans. La plupart des prestations considérées ont un caractère publicitaire

et peuvent être :

– la promotion en magasins, généralement des « têtes de gondole »

– la diffusion de messages publicitaires dans la bande sonore diffusée en magasin

– la présence de la marque dans les catalogues et prospectus

– la location d’un emplacement commercial et publicitaire

La tarification ainsi que les négociations commerciales sont gardées confidentielles afin que la

concurrence n’ait pas accès aux informations. Cependant, la tarification de ces prestations de

services correspond généralement à un pourcentage de chiffre d’affaires réalisé par le fournisseur.

Ainsi, le distributeur n’est pas contraint sur le nombre de prestations à pourvoir et peut toucher des

commissions conséquentes si l’opération a accru substantiellement le chiffre d’affaires du

fournisseur. Ce mode de tarification est souvent accompagné d’un taux garanti qui protège

l’industriel en cas de chiffre d’affaires inférieur à celui qui a été budgété. En effet, dans un tel cas de

figure, l’industriel devra simplement payer un montant forfaitaire déterminé à l’avance, qui peut

cependant aller du simple au quintuple selon l’opération et le fournisseur considérés.

Les grands distributeurs réalisent des marges très faibles dans la mesure où, pour fidéliser leur

clientèle, ils doivent vendre les marchandises pratiquement au prix coûtant. Dès lors, pour couvrir

leurs frais et pour satisfaire les actionnaires, les enseignes de grande distribution doivent négocier

avec les fournisseurs pour obtenir des remises et des primes conséquentes en contrepartie de

services rendus. Cependant, la puissance d’achat des enseignes de grande distribution et la

multiplication de certaines pratiques peuvent, à long terme, modifier les structures de marchés. En

effet, les nombreuses primes exigées par les grands distributeurs peuvent conduire à la fragilisation

du secteur amont et à une concentration des producteurs d’autant plus que les industriels peuvent

être menacés de déréférencement en cas de refus de paiement de ces primes.

c. Du déréférencement au refus de vente

Suite au développement des primes de référencement, les modalités de rupture ainsi que les

refus de vente ont été encadrés par le législateur pour éviter tout abus de la part des enseignes de

grande distribution. L’article 56 de la loi relative aux Nouvelles Régulations Economiques interdit en

effet « d'obtenir ou de tenter d'obtenir, sous la menace d'une rupture brutale totale ou partielle des

Page 27: Le traitement comptable des marges arrière dans le secteur ... · PDF filele Plan omptable Généal, n’opèent pas de distinction particulière des marges arrière selon leur

Chaire Financial Reporting ESSEC-KPMG

Jeanne Depond

Page 27 sur 63

relations commerciales, des conditions manifestement abusives concernant les prix, les délais de

paiement, les modalités de vente ou les services ne relevant pas des obligations d'achat et de vente. »

(voir article complet en annexe 3).

La notion de « refus de vente » a été instaurée dans les années 1950 lorsque le législateur a voté une

loi obligeant les industriels à livrer les nouveaux supermarchés afin de favoriser cette nouvelle forme

de distribution favorable en termes d’efficacité économique. En 1996, la loi Galland a modifié les

rapports entre producteur et distributeur en supprimant l’article 36-2 de la loi, qui interdisait le refus

de vente. Les industriels étaient ainsi autorisés à refuser une vente à un distributeur. Cette

modification de loi devait permettre d’équilibrer les relations producteur-distributeur dans un souci

d’efficacité économique. Cependant, de nombreuses conditions accompagnent cet article le rendant

ainsi obsolète. En effet, pour appliquer le refus de vente, les industriels ne doivent pas :

– Conclure d’accords d’entente avec d’autres distributeurs (article 7)

– Etre en position dominante (article 8)

– Pratiquer des traitements discriminatoires entre les distributeurs (article 36-1)

Ainsi, le distributeur possède de nombreuses possibilités de recours, en cas de refus de vente d’un

producteur. L’amélioration de la position d’un producteur dans une négociation avec un distributeur

reste donc marginale, malgré cette réforme de la loi Galland de 1986. En revanche, la suppression de

l’interdiction de vente peut handicaper les petits producteurs si un distributeur souhaite conclure un

accord exclusif avec certains d’entre eux. En effet, les distributeurs ont désormais une forte

puissance d’achat qui leur permet de faire pression sur les industriels afin qu’ils ne servent pas

d’autres canaux de distribution. Ainsi, les petits producteurs se verraient contraints de vendre leurs

produits qu’à un seul distributeur et ils se retrouveraient ainsi dans une position de dépendance

économique (voir « Le cas de Corah, fournisseur de Marks & Spencer en annexe 1).

III- Les marges arrière au cœur de la négociation commerciale

Les marges arrière représentent, aujourd’hui, l’exemple même du pouvoir exercé par les

distributeurs sur les industriels. Cette pratique est d’autant plus controversée que l’industriel

manque de solutions de substitution et reste soumis au pouvoir du linéaire. Ainsi, les distributeurs

qui gardent la main mise sur les linéaires, peuvent exiger des tarifs déconnectés de la valeur réelle

des prestations proposées.

Page 28: Le traitement comptable des marges arrière dans le secteur ... · PDF filele Plan omptable Généal, n’opèent pas de distinction particulière des marges arrière selon leur

Chaire Financial Reporting ESSEC-KPMG

Jeanne Depond

Page 28 sur 63

a. Le pouvoir du linéaire

Grâce aux progrès des nouvelles technologies, la circulation de l’information s’accélère. Dès

lors, grâce à Internet et au bouche-à-oreille, la qualité des produits est plus facilement connue mais

aussi plus facilement remise en cause. La fluidité de l’information renforce ainsi la concurrence entre

les marques et la tentation de reporter son achat vers des produits de substitution. Ainsi, la

prolifération des marques, des produits et des points de contact du consommateur avec l’offre le

rend « zappeur » et plus enclin à alterner les marques.

La clé de succès d’une marque réside alors dans la fidélisation de la clientèle ainsi que dans la

compréhension voire l’anticipation de ses besoins. Cependant, les conditions de commercialisation,

l’environnement des produits et l’entourage dont bénéficie le produit en matière de personnel ou de

services, ne dépendent pas du fournisseur. Dans une telle configuration, le poids de la marque bien

que nécessaire, reste peu efficace face au poids du linéaire.

En effet, le consommateur consacre de moins en moins de temps à la réflexion préalable à l’acte

d’achat. Ainsi, selon une étude publiée par la LSA, « le client ne consacre pas plus de six secondes à

l’achat d’une lessive et pas plus d’une minute et demi dans le rayon charcuterie libre-service ». Dès

lors, selon O. Gérardon, « la place consacrée à un produit ou une marque devient une variable

prépondérante de la performance du produit ». Seules les enseignes ont dès lors un contact direct

avec le consommateur et peuvent favoriser une marque ou un produit en particulier grâce à son

emplacement en linéaire et ainsi maximiser les ventes.

Le pouvoir du linéaire renforce ainsi le pouvoir des enseignes dans les négociations commerciales et

les industriels sont contraints d’accepter de rémunérer les enseignes en échange de l’assurance que

leurs produits seront correctement mis en valeur en rayon.

b. La tarification des marges arrière

Les marges arrière, comme vu précédemment, sont au cœur de la négociation commerciale

car elles permettent aux industriels d’avoir un pouvoir sur le positionnement de leurs produits en

linéaire et ainsi maximiser les ventes. Ce processus de négociation est cependant opaque et ne

répond à aucune réelle logique de tarification, ce qui est d’ailleurs dénoncé par les industriels.

Parmi les prestations de service facturées les plus chères, figurent les têtes de gondole, c’est-à-dire

les bouts de rayon très visibles par le consommateur. Viennent ensuite les apparitions dans les

catalogues édités par les enseignes de grande distribution. Ces deux prestations de service peuvent

facilement faire l’objet d’une « tarification en valeur » qui consiste à quantifier avec précision le

nombre d’opérations qui doivent être réalisées dans l’année.

Cependant, la tarification actuelle de rigueur est calculée à partir du pourcentage du chiffre d’affaires

attendu par le fournisseur. Cette pratique a été mise en place en 2008 lors de l’embellie de

Page 29: Le traitement comptable des marges arrière dans le secteur ... · PDF filele Plan omptable Généal, n’opèent pas de distinction particulière des marges arrière selon leur

Chaire Financial Reporting ESSEC-KPMG

Jeanne Depond

Page 29 sur 63

l’économie française qui a permis aux industriels d’atteindre des chiffres d’affaire supérieurs à leurs

attentes. Les enseignes de grande distribution ont alors demandé un pourcentage sur les chiffres

d’affaires et ont ainsi obtenu des bonus significatifs. La tarification «taux» est souvent accompagnée

de taux garantis qui protègent les industriels en cas de chiffre d’affaires réalisé inférieur à celui

budgété.

Cependant, quel que soit le type de contrat, la facturation des prestations échappe dans une large

mesure aux faits générateurs censés déclencher la prise de revenu. En effet, le calendrier de

facturation est totalement déconnecté du moment de la réalisation des prestations. Lors de ces

contrats « valeur », un étalement trimestriel des paiements est en effet convenu lors des

négociations commerciales et ne correspond pas forcément à la réalité des exécutions des

prestations de service. Quant aux contrats « taux », des acomptes trimestriels sont établis d’après le

chiffre d’affaires budgété et une régulation a éventuellement lieu en fin d’année en fonction des

ventes réelles du fournisseur.

La tarification des marges arrière reste obscure car elle est, la plupart du temps, décorrélée de toute

logique de « juste valeur ». La puissance d’achat des grands distributeurs leur permet d’imposer aux

industriels leurs règles de négociation et d’appliquer ainsi des marges arrière parfois peu justifiées.

La pratique des marges arrière peut être créatrice de valeur pour les industriels mais leur caractère

disproportionné fait débat. Au niveau de leur traitement comptable, l’absence de fait générateur de

prise de revenu ainsi que la notion biaisée de « juste valeur » amènent à nous interroger sur les

principes comptables à adopter, les incidences sur les comptes et sur les modifications éventuelles à

adopter dans le référentiel IFRS. Ces problématiques seront abordées dans la dernière partie du

mémoire.

Page 30: Le traitement comptable des marges arrière dans le secteur ... · PDF filele Plan omptable Généal, n’opèent pas de distinction particulière des marges arrière selon leur

Chaire Financial Reporting ESSEC-KPMG

Jeanne Depond

Page 30 sur 63

Partie C : Analyse du traitement comptable des marges arrière

et mises en perspective

Les marges arrière sont une pratique controversée dans la mesure où elles ne donnent pas

toujours lieu à des prestations de service identifiables. Cette ambivalence peut donc avoir un impact

significatif dans la présentation des états financiers dans la mesure où les normes comptables

françaises se basent sur la réalité juridique des transactions tandis que les normes IFRS s’appuient

sur la substance économique.

Cette partie portera ainsi sur le traitement comptable des marges arrière, selon les deux référentiels

en usage.

I- Traitement comptable des marges arrière selon le référentiel français

Certains grands distributeurs, comme E. Leclerc, ne sont pas côtés en bourse et n’ont pas

pour obligation de publier leurs états financiers en IFRS. Il est donc important d’étudier le traitement

comptable des marges arrière selon le plan comptable général bien que les grands groupes, même

non côtés, adoptent de plus en plus les normes internationales.

a. Les principes de comptabilisation

Les principes comptables français distinguent :

- Les éléments constitutifs d’une réduction du prix d’acquisition des marchandises (rabais,

remises et ristournes)

- Les prestations de services

La distinction se mesure grâce à une analyse juridique des contrats qui lient le distributeur à

l’industriel.

Les rabais et ristournes

Les rabais, les remises et les ristournes sont considérés par le plan comptable général comme des

réductions du prix d’acquisition des biens. Les modalités ainsi que le montant de ces avantages

doivent être mentionnés dans les conditions générales de vente.

Page 31: Le traitement comptable des marges arrière dans le secteur ... · PDF filele Plan omptable Généal, n’opèent pas de distinction particulière des marges arrière selon leur

Chaire Financial Reporting ESSEC-KPMG

Jeanne Depond

Page 31 sur 63

Le plan comptable général distingue :

- Les réductions immédiates : elles sont accordées sur facture et viennent directement

s’imputer sur les ventes (dans les comptes du fournisseur) ou sur les achats (dans les

comptes du distributeur) à leur valeur nette.

- Les ristournes hors facture (ristournes conditionnelles) : elles sont enregistrées dans le

compte 709 « rabais, remises, ristournes accordées par l’entreprise » pour le fournisseur et

dans le 609 « rabais, remises, ristournes obtenues sur l’achat » pour le distributeur.

Les ristournes sont comptabilisées au fur et à mesure de l’exercice et des ventes réalisées par

l’industriel. A la clôture de l’exercice, celui-ci doit estimer les reliquats dus au titre des ristournes

conditionnelles obtenues par le distributeur. Quant au distributeur, il doit intégrer les ristournes hors

facture dans la valorisation des stocks.

Les coopérations commerciales

Les coopérations commerciales ont été définies par la Cour de Cassation comme « un contrat de

prestation de service dont le contenu et la rémunération sont définis d'un commun accord entre un

fournisseur et un distributeur. »

Selon le Plan comptable général, elles sont enregistrées :

- Chez le fournisseur, dans un compte de charges « autres services extérieurs » et plus

spécifiquement dans un sous compte correspondant à la nature exacte des prestations

réalisées

- Chez le distributeur, dans un compte de produit et plus spécifiquement dans le compte 708

« autres produits annexes » dans la mesure où ces prestations de services ne constituent pas

l’activité principale du distributeur. Les coûts de mise en œuvre des prestations doivent être,

quant à eux, enregistrés dans les comptes de charge correspondants.

Les coopérations commerciales, contrairement aux rabais et ristournes, ne sont pas considérées

comme des réductions du prix d’acquisition des biens et n’apparaissent donc pas dans la valorisation

des stocks du distributeur.

b. Les incidences sur les états financiers

Les marges arrière ont des impacts directs sur les états financiers et en particulier sur

l’enregistrement des produits, l’évaluation du chiffre d’affaires et l’évaluation des stocks.

Page 32: Le traitement comptable des marges arrière dans le secteur ... · PDF filele Plan omptable Généal, n’opèent pas de distinction particulière des marges arrière selon leur

Chaire Financial Reporting ESSEC-KPMG

Jeanne Depond

Page 32 sur 63

L’enregistrement des produits

Comme étudié précédemment, la coopération commerciale doit être enregistrée dans le compte 708

du distributeur « autres produits des activités annexes ».

Cette norme comptable soulève toutefois quelques interrogations :

- Les marges arrière sont enregistrées en tant qu’ « autres produits » dans la mesure où elles

ne constituent pas le cœur de métier du distributeur. Cependant, les marges arrière

constituent, aujourd’hui, une part non négligeable du chiffre d’affaires, à savoir 37% du prix

facturé. Cependant, malgré la migration des négociations de l’avant vers l’arrière et donc un

déplacement des agrégats comptables, les traitements comptables associés n’ont pas été

modifiés.

- Les produits sont censés être enregistrés au fur et à mesure de leur réalisation. Cependant, à

l’exception de certains services, comme les catalogues ou les opérations de fidélisation, les

faits générateurs des prestations de service ne sont pas clairement identifiables. Cette

situation soulève donc la question du caractère adéquat de la comptabilisation des produits

dès lors qu’aucune contrepartie n’a été donnée. Cependant, si un accord lie les deux parties,

il peut être considéré que la totalité des marges arrière et des coopérations commerciales

est due, à la différence près des écarts éventuels entre le chiffre d’affaires budgété et le

chiffre d’affaires réel.

L’évaluation du chiffre d’affaires

Le traitement comptable des rabais, remises et ristournes étudié ci-dessus conduit à une

présentation en valeur nette du chiffre d’affaires pour le fournisseur et du coût d’achat des

marchandises pour le distributeur. La coopération commerciale, considérée comme prestation de

service annexe, n’entre pas en considération dans le calcul des ventes et des achats.

La migration des négociations commerciales de l’avant vers l’arrière, suite à la loi Galland, ont

conduit à une hausse des prix des produits et donc à un gonflement du chiffre d’affaires nominal

pour le fournisseur. Cet effet inflationniste est favorable à l’industriel car il contribue,

statistiquement, à doper la croissance de ses ventes. Pour le distributeur, ce sont les coûts de

promotion qui apparaîtront élevés.

L’évaluation des stocks

Chez le fournisseur, les remises sont déduites directement du chiffre d’affaires et les coûts des

prestations de service exécutées par le distributeur sont enregistrés en charges. Par conséquent, les

marges arrière n’ont aucun impact dans l’évaluation des stocks des fournisseurs.

Chez le distributeur, les stocks de marchandises sont enregistrés à leur coût d’acquisition. A la clôture

de l’exercice, le coût d’entrée de la marchandise doit être comparé à sa valeur d’inventaire et la plus

Page 33: Le traitement comptable des marges arrière dans le secteur ... · PDF filele Plan omptable Généal, n’opèent pas de distinction particulière des marges arrière selon leur

Chaire Financial Reporting ESSEC-KPMG

Jeanne Depond

Page 33 sur 63

faible des deux valeurs ainsi obtenue sera retenue. A noter que le coût d’acquisition doit être minoré

des remises déduites sur facture. Les ristournes différées, comptabilisées dans le compte 609, seront

également prises en compte dans la valorisation des stocks.

Mécaniquement, la valeur des stocks tient compte des ristournes sur facture tout au long de l’année,

les entrées de marchandises étant comptabilisées à leur valeur nette. Les ristournes différées

donnent lieu à un « abattement des stocks » calculé à la clôture de l’exercice. Il s’agit de minorer les

stocks de la quote-part des ristournes différées qui leur revient.

Seules les coopérations commerciales, considérées par le Plan comptable général comme des

activités annexes, sont exclues de l’évaluation des stocks. Ainsi, la migration des négociations

commerciales de l’avant vers l’arrière aboutit ici à survaloriser les stocks des distributeurs de la

dégradation tarifaire qui n’est pas prise en compte lors de l’évaluation.

Les principes comptables français sont fondés sur la réalité juridique des transactions et ne prennent

donc pas en compte la notion de « coopération morte », pourtant très actuelle. Bien que les marges

arrière soient une spécificité française, les normes comptables internationales ont mis en place des

cadres conceptuels permettant un traitement comptable des marges arrière plus fidèle à la réalité

des transactions.

II- Traitement comptable des marges arrière selon les normes IFRS

Depuis 2005, les entreprises cotées ont pour obligation de publier leurs états financiers selon

les normes internationales. Cette partie a pour vocation d’étudier les normes IFRS et IAS utilisées

dans le traitement comptable des marges arrière. Ainsi, la philosophie comptable préconisée par les

IFRS, ainsi que les normes IAS 2 relative aux stocks et IAS 18 relative aux produits des activités

ordinaires seront étudiées.

a. Le principe de primauté de la substance sur la forme

Le principe de prééminence de la substance des opérations sur la forme qu’elles prennent est

posé dans le cadre conceptuel des IAS. Ce principe apparaît comme un des éléments fondateurs des

normes IAS et l’un des attributs de fiabilité des états financiers considérée comme une

caractéristique qualitative au même titre que l’intelligibilité, la pertinence et la comparabilité.

Le paragraphe 35 du cadre conceptuel des IAS énonce en effet que l'information, pour publier une

image fidèle des transactions et autres événements qu'elle vise à présenter, doit traduire la réalité

économique de ces derniers et non pas seulement leur forme juridique (texte complet en annexe 4).

Page 34: Le traitement comptable des marges arrière dans le secteur ... · PDF filele Plan omptable Généal, n’opèent pas de distinction particulière des marges arrière selon leur

Chaire Financial Reporting ESSEC-KPMG

Jeanne Depond

Page 34 sur 63

Ce qui ressort de ce principe est:

– La qualification juridique des évènements est insuffisante pour comprendre les ressorts

économiques d’une transaction et ainsi permettre une présentation fidèle des états

financiers. Les transactions doivent ainsi être analysées selon un contexte économique

donné.

– Une analyse économique « au plus près de la transaction » est nécessaire dans la mesure où

une simple qualification générique ne peut traduire des réalités potentiellement différentes

selon les contrats.

Ce principe de primauté de la substance sur la forme a d’importantes conséquences sur le traitement

comptable des marges arrière. En effet, si les marges arrière peuvent être créatrices de valeur pour

les industriels, elles sont remises en cause lorsqu’elles ne donnent lieu à aucune prestation de service

identifiable. Cette deuxième fraction de la coopération commerciale, dite « coopération morte », est

qualifiée différemment dans le cadre conceptuel des IFRS. En effet, dans ce cas, la coopération

commerciale correspond à une réduction du prix d’achat, et non une prestation de service et

correspond donc davantage à la réalité économique de la transaction.

L’IAS 2 relative aux stocks et l’IAS 18 relative aux produits des activités ordinaires, sont les textes qui

serviront de support à l’étude de l’approche comptable en IAS/IFRS, fondée sur la réalité

économique des marges arrière.

b. L’IAS 2 relative aux stocks

Comme évoqué précédemment, dans le cas du fournisseur, les remises sont déduites

directement du chiffre d’affaires et les coûts des prestations de service fournies par le distributeur

sont enregistrés en charges. Les marges arrière n’ont donc aucun impact sur la valorisation des

stocks des industriels. La norme IAS 2 ne concernera donc que les stocks du distributeur.

Le paragraphe 7 de la norme IAS, relative aux stocks, fixe ainsi les règles de valorisation des stocks

selon lesquelles : « le coût des stocks doit comprendre tous les coûts d’acquisition, coûts de

transformation et autres coûts encourus pour amener les stocks à l’endroit et dans l’état où ils se

trouvent ».

Le paragraphe 8 précise, quant à lui, la notion de coût d’acquisition : « les coûts d’acquisition des

stocks comprennent le prix d’achat, les droits de douane et autres taxes (autres que les taxes

ultérieurement récupérables pour l’entreprise auprès des administrations fiscales), ainsi que les frais

de transport, de manutention et autres coûts directement attribuables à l’acquisition des produits

finis, des matières premières et des services. Les rabais commerciaux, remises et autres éléments

similaires sont déduits pour déterminer les coûts d’acquisition. »

Page 35: Le traitement comptable des marges arrière dans le secteur ... · PDF filele Plan omptable Généal, n’opèent pas de distinction particulière des marges arrière selon leur

Chaire Financial Reporting ESSEC-KPMG

Jeanne Depond

Page 35 sur 63

Selon le référentiel IAS/IFRS, le coût d’acquisition des stocks intègre donc :

– Des éléments « directement attribuables à l’acquisition des produits finis » : ceci induit une

relation de causalité entre l’acte d’achat et la naissance des coûts. C’est, par exemple, le cas

des prestations de service effectuées dans le cadre des coopérations commerciales, qui sont

généralement liées à l’acte d’achat et dont les modalités (tarification, produit considéré,

durée de l’opération) sont précisées dans l’accord qui lie le distributeur à l’industriel.

– D’ « autres éléments similaires [aux rabais commerciaux et remises]» : ces éléments doivent

être déduits de la valeur des stocks. Tout comme les rabais et remises, ces « autres

éléments » doivent correspondre à des réductions de prix sans contrepartie autre que l’acte

d’achat. Ils peuvent donc être assimilés aux sommes que le fournisseur reverse ou auxquelles

il renonce pour conclure l’acte d’achat. Les normes IFRS / IAS prévoient donc également le

traitement comptable des dégradations tarifaires.

Dans le cas précis des marges arrière, le cadre conceptuel des IFRS, en particulier la norme IAS 2,

relative aux stocks, prévoit que :

– Même si les coopérations commerciales sont qualifiées juridiquement de prestations de

service, elles doivent faire l’objet d’une analyse économique approfondie

– Les coopérations commerciales, assimilables à une dégradation tarifaire car elles ne donnent

pas lieu à une prestation de service clairement identifiable, doivent être prises en compte

dans la valorisation des stocks des distributeurs. Ainsi, elles viendront réduire le coût

d’acquisition des marchandises et donc minorer la valeur des stocks à la clôture de l’exercice.

c. L’IAS 18, relative aux produits des activités ordinaires

Le problème soulevé par l’application de cette norme n’est pas lié à la reconnaissance des

revenus en tant que telle, mais davantage sur la détermination du chiffre d’affaires du fournisseur et,

plus précisément, sur les modalités de prise en compte des coopérations commerciales.

Les paragraphes 9 et 10 de l’IAS 18, relative aux produits des activités ordinaires, soulignent leur

mode d’évaluation :

– Paragraphe 9 : « les produits des activités ordinaires doivent être évalués à la juste valeur de

la contrepartie reçue ou à recevoir. »

– Paragraphe 10 : « Le montant des produits des activités ordinaires provenant d'une

transaction est en général déterminé par accord entre l'entité et l'acheteur ou l'utilisateur de

Page 36: Le traitement comptable des marges arrière dans le secteur ... · PDF filele Plan omptable Généal, n’opèent pas de distinction particulière des marges arrière selon leur

Chaire Financial Reporting ESSEC-KPMG

Jeanne Depond

Page 36 sur 63

l'actif. Ce montant est évalué à la juste valeur de la contrepartie reçue ou à recevoir en tenant

compte du montant de toute remise commerciale ou rabais pour quantités consenti par

l'entité.»

Dès lors, les coopérations commerciales, dites « mortes », c’est-à-dire qui ne donnent lieu à aucune

prestation de service identifiable, doit donc venir en réduction du chiffre d’affaires, en tant que

« remise commerciale ou rabais pour quantités consenti par l’entreprise ».

Comme étudié précédemment, les coopérations commerciales, assimilées à des dégradations

tarifaires, représentent une part non négligeable des coopérations commerciales. Ainsi, l’effet sur les

comptes des industriels de la norme IAS 18 est notable.

La norme a également des conséquences sur le traitement comptable des coopérations

commerciales pour le distributeur. En effet selon le paragraphe 20 : « Lorsque le résultat d'une

transaction faisant intervenir une prestation de services peut être estimé de façon fiable, le produit

des activités ordinaires associé à cette transaction doit être comptabilisé en fonction du degré

d'avancement de la transaction à la date de clôture. Le résultat d'une transaction peut être estimé de

façon fiable lorsqu'il aura été satisfait à l'ensemble des conditions suivantes:

– le montant des produits des activités ordinaires peut être évalué de façon fiable

– il est probable que les avantages économiques associés à la transaction iront à l'entité

– le degré d'avancement de la transaction à la date de clôture peut être évalué de façon fiable

– les coûts encourus pour la transaction et les coûts pour achever la transaction peuvent être

évalués de façon fiable. »

Cependant, compte tenu des caractéristiques propres des coopérations commerciales dites

« mortes », il est impossible de suivre le degré d’avancement de la transaction et aucun coût n’est

encouru pour leur réalisation. Il est donc prévu, dans le paragraphe 24, des méthodes annexes

permettant de mesurer le degré d’avancement de ce type de prestations, comme :

– L’examen des travaux effectués

– Les services rendus à la date considérée exprimés en pourcentage du total des services à

exécuter

– La proportion des coûts encourus à la date considérée par rapport au total des coûts estimés

de la transaction

Si ces méthodes annexes sont retenues, des outils de suivi doivent être mis en place pour être

capable de donner des estimations fiables.

Page 37: Le traitement comptable des marges arrière dans le secteur ... · PDF filele Plan omptable Généal, n’opèent pas de distinction particulière des marges arrière selon leur

Chaire Financial Reporting ESSEC-KPMG

Jeanne Depond

Page 37 sur 63

Dès lors, en cas de qualification de la coopération commerciale en prestation de services,

l’application stricte de la norme conduirait à n’enregistrer en revenus pour le distributeur que la

quote-part des coûts encourus pour la mise en œuvre de la prestation. Par ailleurs, selon le

paragraphe 25 de la norme, lorsque les services fournis au cours d’un exercice comptable sont

composés d’un nombre indéterminé d’opérations, il est préconisé d’enregistrer les revenus selon la

méthode linéaire sur la période, sauf si une autre méthode de comptabilisation est plus adaptée.

Enfin, selon le paragraphe 26, « lorsque le résultat d’une transaction faisant intervenir une prestation

de services ne peut être estimé de façon fiable, le produit des activités ordinaires ne doit être

comptabilisé qu’à hauteur des charges comptabilisées qui sont recouvrables. »

Les deux approches IFRS et PCG divergent donc sur le traitement comptable des marges arrière et,

pour les sociétés non cotées, qui ne sont pas obligées de publier leurs états financiers selon les

normes IFRS, le choix entre les deux approches revient à la direction de l’entreprise.

II- Etude de cas : impacts des marges arrière selon le référentiel choisi

Que ce soit dans le référentiel français ou européen avec les IFRS, l’impact du traitement

comptable des marges arrière dans les états financiers a surtout lieu dans l’évaluation des stocks

ainsi que dans l’estimation des revenus. En ce qui concerne l’évaluation des stocks, la principale

différence entre les normes comptables françaises et les IFRS se situe dans le traitement des remises

différées et des coopérations commerciales. En ce qui concerne l’estimation des revenus, la

différence se situe dans le traitement des marges arrière qui ne donnent lieu à aucune prestation

commerciale identifiable. Dans cette partie, nous prendrons donc des exemples concrets et chiffrés

afin d’évaluer l’impact des marges arrière dans les états financiers selon le référentiel choisi.

a. Evaluation des stocks

Les entreprises cotées ont pour obligation de publier leurs comptes selon le référentiel IFRS.

Cependant, dans le cas des entreprises non cotées, le choix de référentiel dépend de la décision de la

direction.

Selon le référentiel choisi, les stocks peuvent ainsi être évalués :

– Suivant la méthode du prix d’achat effectif, selon le référentiel français

Page 38: Le traitement comptable des marges arrière dans le secteur ... · PDF filele Plan omptable Généal, n’opèent pas de distinction particulière des marges arrière selon leur

Chaire Financial Reporting ESSEC-KPMG

Jeanne Depond

Page 38 sur 63

Taux En euros

Prix de vente (en euros) 10

Réductions sur facture

Remise sur quantité 1,5% 0,15

Remise pour frais de stockage 3% 0,3

Avances remises de fin d'année 3% 0,3

TOTAL 7,50% 9,25

– Suivant la méthode du prix « triple net », basée sur le principe de primauté de la substance

sur la forme propre au référentiel IFRS

L’évaluation des stocks selon la méthode du prix d’achat effectif implique la prise en compte de :

– Les rabais, ristournes, remises sont déduits du prix d’achat

– Les recettes des coopérations commerciales sont enregistrées en produits financiers, en

dehors de l’évaluation des stocks

L’évaluation des stocks suivant la méthode d’évaluation « triple net » oblige, en revanche, à prendre

en compte tous les éléments directement attribuables à l’acquisition, comme vu précédemment.

Exemple chiffré

Comme étudié précédemment, les coopérations commerciales, tout comme les ristournes sont

considérées comme directement attribuables à l’acquisition. Ceci constitue la principale divergence

entre les principes comptables français et international.

Nous essayerons d’illustrer ci-dessous ces différentes philosophies comptables en étudiant, dans les

deux cas, l’impact des marges arrière dans le résultat d’exploitation.

A noter que l’étude portera sur une seule référence afin de simplifier l’explication et la rendre plus

compréhensible. Conformément aux nouvelles réglementations et plus précisément à la loi de

modernisation de l’économie, nous considérons, dans cette étude, que les prestations commerciales

sont réelles et facturées à leur juste prix.

Figure 9 : Calcul du prix net facturé

Le prix net facturé sera donc de 9,25 euros.

Page 39: Le traitement comptable des marges arrière dans le secteur ... · PDF filele Plan omptable Généal, n’opèent pas de distinction particulière des marges arrière selon leur

Chaire Financial Reporting ESSEC-KPMG

Jeanne Depond

Page 39 sur 63

Têtes de gondole 40 000

Apparition catalogues 10 000

Total coopérations commerciales 50 000

Montant des achats budgétés 500 000

Part des coopérations commerciales 10%

Pour effectuer le calcul du prix net facturé, nous avons déduit certaines ristournes sur facture,

notamment :

– La remise sur quantité, évaluée à 1,5%. Selon le volume acheté par le grand

distributeur, l’industriel peut accorder des ristournes plus ou moins importantes

– La remise pour frais de stockage, évaluée à 3%. Il s’agit de la participation aux frais de

stockage qui dépend essentiellement du volume concerné et de la nature des produits

– Les avances sur remises de fin d’année, évaluées à 3%. Il est supposé que le taux de remises

de fin d’année est de 8%, dont 5% représentent une ristourne conditionnelle volume,

obtenue en fonction d’un certain volume d’achat sur l’année. Des avances de remises de fin

d’année peuvent être accordées en fonction du volume d’achat négocié et du poids du grand

distributeur concerné dans les négociations commerciales.

Une fois l’ensemble des ristournes conditionnelles déduites, le prix net net s’élève donc à (10-0,15-

0,3)*0,92 soit 8,75 euros.

Figure 10 : Part des coopérations commerciales

La part des coopérations commerciales s’élève donc à 10%. Il est spécifié que l’ensemble des

coopérations commerciales, conformément à la législation en cours, donne lieu à des prestations de

service réelles et identifiables.

Les coopérations commerciales sont négociées en début d’année mais sont payées par l’industriel

trimestriellement, quelles que soient les dates effectives des prestations de service. Ici, les

versements trimestriels s’élèveront à 12 500 €.

Page 40: Le traitement comptable des marges arrière dans le secteur ... · PDF filele Plan omptable Généal, n’opèent pas de distinction particulière des marges arrière selon leur

Chaire Financial Reporting ESSEC-KPMG

Jeanne Depond

Page 40 sur 63

Période Achats Ventes Stock final

du 01/01/N au 30/06/N 25 000 23 000 2 000

du 01/07/N au 31/12/N 35 000 27 000 8 000

du 01/01/N+1 au 31/12/N+1 - 10 000 -

Figure 11 : Calcul du prix triple net

Prix de vente 10,00 €

Prix net

Remise sur quantité 1,50% 0,15 €

Remise pour frais de stockage 3% 0,30 €

Sous-total 9,55 €

Prix net net

Remise de fin d'année 8% 0,76 €

Sous-total 8,79 €

Prix triple net

Coopérations commerciales 10% 0,88 €

TOTAL 7,91 €

Nous supposons que le distributeur décide de vendre le produit 9,3 €, la loi en vigueur lui interdisant

de revendre à perte.

Concernant le calendrier des achats et des ventes, nous basons l’étude sur les hypothèses suivantes :

Figure 12 : Calendrier des achats et ventes

Nous étudierons les impacts des marges arrière sur le résultat d’exploitation au 30/06/et au 31/12/N.

Page 41: Le traitement comptable des marges arrière dans le secteur ... · PDF filele Plan omptable Généal, n’opèent pas de distinction particulière des marges arrière selon leur

Chaire Financial Reporting ESSEC-KPMG

Jeanne Depond

Page 41 sur 63

Méthode du prix d'achat effectifPrincipes comptables français

Méthode du prix triple netPrincipes comptables IFRS

Ventes213 900

(23 000 x 9,3)

213 900(23 000 x 9,3)

Achats231 250

(25 000 x 9,25)

231 250(25 000 x 9,25)

Ristournes * -11 562

(231 250 * 5%)

Stock initial - -

Stock final **18 500

(2 000 x 9,25)

15 820(2 000 x 7,91)

Coopération commerciale -23 125

(231 250 x 10%)

Marge commerciale 1 150 33 157

Taux de marge commerciale 0,5% 15,5%

Autres produits ***25 000

(12 500 * 2)

Résultat d'exploitation 26 150 33 157

Taux de marge 12,2% 15,5%

Figure 13 : Etats semestriels arrêtés au 30/06/N

* Il s’agit de la ristourne conditionnelle liée au volume d’achat, qui n’est pas pris en compte dans le

calcul du prix d’achat effectif, ici 5%. Etant donné que plus de 40% des achats de l’année ont été

effectués avant le 30/06/N, nous avons décidé de prendre en compte les ristournes conditionnelles

dans le calcul de la marge.

** La méthode du prix d’achat effectif impose de valoriser les stocks au prix facturé par le

fournisseur, tandis que la méthode des IFRS valorise les stocks au prix triple net.

*** La coopération commerciale est comptabilisée au fur et à mesure de la facturation selon les

normes comptables françaises tandis que la méthode des IFRS impose de tenir compte de

l’avancement des réalisations des prestations de services.

Page 42: Le traitement comptable des marges arrière dans le secteur ... · PDF filele Plan omptable Généal, n’opèent pas de distinction particulière des marges arrière selon leur

Chaire Financial Reporting ESSEC-KPMG

Jeanne Depond

Page 42 sur 63

Méthode du prix d'achat effectifPrincipes comptables français

Méthode du prix triple netPrincipes comptables IFRS

Ventes465 000

(50 000 x 9,3)

465 000(50 000 x 9,3)

Achats555 000

(60 000 x 9,25)

555 000(60 000 x 9,25)

Ristournes *27 750

(550 000 * 5%)

27 750(550 000 * 5%)

Stock initial - -

Stock final **70 320

(8 000 x 8,79)

63 280(8 000 x 7,91)

Coopération commerciale - 50 000

Marge commerciale 8 070 51 030

Taux de marge commerciale 1,7% 11,0%

Autres produits *** 50 000 -

Résultat d'exploitation 58 070 51 030

Taux de marge 12,5% 11,0%

Figure 14 : Etats annuels arrêtés au 31/12/N

* La ristourne conditionnelle est appliquée car on suppose que le volume critique négocié était

inférieur à 60 000.

** Le coût d’entrée, applicable dans la valorisation des stocks selon les principes comptables français,

passe de 9,25€ à 8,79€ grâce aux ristournes conditionnelles.

*** L’ensemble du budget des prestations commerciales est comptabilisé.

On observe ainsi que la rentabilité de l’exercice est supérieure avec la méthode du prix d’achat

effectif qu’avec la méthode du prix triple net (alors qu’il s’agissait du contraire dans les états

semestriels). Cette situation est due à la non répercussion des coopérations commerciales dans

l’évaluation du stock.

Ainsi, selon le référentiel comptable choisi, les impacts dans les états financiers diffèrent aussi bien

dans le compte de résultat que dans le bilan.

Page 43: Le traitement comptable des marges arrière dans le secteur ... · PDF filele Plan omptable Généal, n’opèent pas de distinction particulière des marges arrière selon leur

Chaire Financial Reporting ESSEC-KPMG

Jeanne Depond

Page 43 sur 63

Impacts sur le compte de résultat

Le référentiel comptable français ne prend pas en compte les coopérations commerciales dans le

calcul de la marge commerciale. La marge commerciale peut ainsi fluctuer entre 0,5% (au 30/06/N)

et 1,7% (au 31/12/N) sur la même période. Il est donc difficile d’estimer la rentabilité d’un produit,

tant elle diffère d’une période à l’autre.

Le référentiel comptable français ne prend pas non plus en compte les ristournes conditionnelles

dans le calcul du prix d’achat effectif, si elles ne sont pas acquises dès l’émission de la facture. Il en

résulte une différence dans le prix de revient entre l’arrêté semestriel et l’arrêté annuel. Ceci peut

également expliquer la sous-évaluation de la marge commerciale à l’arrêté semestriel. D’autre part,

dans le cas des « coopérations mortes », une dégradation du prix d’achat doit être envisagée mais

est rendue impossible par cette approche comptable.

En ce qui concerne la méthode du prix triple net, les coopérations commerciales sont considérées

comme des éléments venant en réduction du prix d’achat. Ainsi, le taux de marge commerciale

apparaît relativement stable. D’autre part, les ristournes conditionnelles sont intégrées dans le calcul

de la marge commerciale car leur probabilité de réalisation est élevée. Ainsi, les marges calculées

sont plus proches de la réalité et peuvent être plus facilement comparées d’une période à l’autre.

Impacts au niveau du bilan

Dans la méthode du prix d’achat effectif, le stock est évalué à 70 300 € contre 63 280 € avec la

méthode IFRS, soit une différence de 10%, représentant exactement le poids de la coopération

commerciale dans les achats. Cette différence peut être encore plus élevée dans la réalité et

représente le composant le plus important du bilan des enseignes de grande distribution.

Il en résulte que plus le poids des remises de fin d’année dans les coopérations commerciales sera

important, plus les stocks seront sous-évalués. Une baisse du résultat sera donc également à prévoir.

Dès lors, selon la structure de répartition entre remises de fin d’année et coopérations commerciales,

les comptes d’une entreprise différeront. Il est également très compliqué, voire impossible, de

comparer deux états financiers d’enseignes qui ont adopté des référentiels comptables différents.

b. Enregistrement des coopérations commerciales

La primauté de la substance sur la forme dans les normes comptables internationales oblige

les industriels, tout comme les distributeurs, qui publient leurs comptes en IFRS à distinguer les

coopérations commerciales des « coopérations mortes », qui sont considérées alors comme des

dégradations tarifaires. Dans le référentiel français, en effet, cette distinction n’est pas faite dans la

Page 44: Le traitement comptable des marges arrière dans le secteur ... · PDF filele Plan omptable Généal, n’opèent pas de distinction particulière des marges arrière selon leur

Chaire Financial Reporting ESSEC-KPMG

Jeanne Depond

Page 44 sur 63

mesure où les coopérations commerciales sont enregistrées au fur et à mesure dans « autres

produits annexes » dans le cas du distributeur.

Nous étudierons, dans cette partie, les impacts de l’application des normes IFRS pour l’industriel,

d’une part, et pour le distributeur, d’autre part.

Les conséquences pour l’industriel

La comptabilisation des coopérations commerciales, selon le référentiel IFRS nécessite une analyse

économique des opérations afin de distinguer les « coopérations mortes », considérées comme des

dégradations tarifaires des prestations de service.

Ainsi, la valeur réelle de la prestation de service, qui diffère du tarif demandé par le distributeur,

sera comptabilisée dans un sous compte de publicité, tandis que l’autre partie, considérée comme

dégradation tarifaire, sera enregistrée comme diminution de chiffre d’affaires dans le compte 709

« RRR accordés ». Dans tous les cas, les coopérations commerciales ne doivent pas être enregistrées

en exceptionnel car il s’agit d’opérations courantes.

Les budgets de coopération commerciale sont généralement négociés annuellement et enregistrés

dans les états financiers sur la base du pourcentage réalisé à la période considérée.

Les conséquences pour le distributeur

Le référentiel français ne fait pas de distinction entre les coopérations mortes et les « réelles »

prestations de service. Dès lors, l’état arrêté au 31/12/N selon le référentiel français sera équivalent

à la figure 14.

Selon le référentiel IFRS, le distributeur devra déduire du coût d’acquisition des marchandises (ici

555 000 selon la figure 14) le montant des « coopérations mortes ». La marge dégagée par les ventes

sera alors supérieure et plus fidèle et plus fidèle à la réalité. Le montant enregistré en « coopération

commerciale » ne correspondra alors qu’à la valeur réelle de la prestation de service. Enfin,

l’abattement des stocks à la clôture devra intégrer la quote-part de coopération morte non

consommée durant l’exercice.

Concernant l’enregistrement des recettes de coopération commerciale, l’IAS 18 stipule que le produit

associé à la prestation de service doit être comptabilisé en fonction du degré d’avancement de la

transaction à la période considérée. Un suivi analytique de l’avancement des prestations doit donc

être mis en place.

Impacts sur la présentation des états financiers.

Concernant les industriels, aucune différence notable n’est à soulever à propos des modalités de

présentation des états financiers entre les normes IFRS et les normes comptables françaises.

Page 45: Le traitement comptable des marges arrière dans le secteur ... · PDF filele Plan omptable Généal, n’opèent pas de distinction particulière des marges arrière selon leur

Chaire Financial Reporting ESSEC-KPMG

Jeanne Depond

Page 45 sur 63

Concernant les distributeurs, l’IAS 1 précise dans le paragraphe 29 : « tout élément significatif doit

faire l’objet d’une présentation séparée dans les états financiers ». Les prestations commerciales,

représentant une part importante du chiffre d’affaires des distributeurs, doivent ainsi faire l’objet

d’une ligne spécifique, distincte des ventes de marchandises (voir « note 1 : résultat d’exploitation »

du Groupe Casino en annexe 5). De même, les coûts encourus pour réaliser les prestations de service

doivent être précisés dans une ligne distincte des états financiers.

III- Mises en perspective

Beaucoup d’avancées sur la réglementation des marges arrière ont été faites depuis la loi

Galland en 1996. Cependant, malgré la loi de modernisation de l’économie de 2008, les marges

arrière restent en vigueur et leur tarification n’est pas encadrée. Pour pallier ce problème, une grille

d’analyse des prestations commerciales est à envisager. D’autre part, une réforme de l’IAS 18 relative

à la comptabilisation du chiffre d’affaires est en cours et permettra certainement de rendre les

pratiques commerciales plus transparentes.

a. Proposition d’une grille d’analyse

Le cadre conceptuel établi par les normes IFRS permet de comptabiliser les « coopérations

mortes » en tant que dégradation tarifaire. Le traitement comptable des marges arrière a, ainsi, été

étudié précédemment. Cependant une grille d’analyse des contrats et des prestations de service est

nécessaire afin de qualifier correctement les coopérations commerciales concernées.

Distinction entre coopération morte et prestation de service

L’industriel doit s’assurer, dès les négociations commerciales, qu’un suivi régulier des actions du

distributeur sera mis en place. D’autre part, une description détaillée des opérations devra être

établie dans le contrat afin d’apprécier la nature de la coopération commerciale. La présomption de

dégradation tarifaire existera dès lors que les dénominations génériques des prestations de service

ne comporteront pas de détails précis de mise en œuvre (valorisation des produits, implantation

dans le linéaire…) ou que le service correspondra à la valorisation d’un aspect de l’organisation de

l’enseigne qui existe indépendamment de la relation avec le fournisseur.

La tarification des services

La tarification des services proposés par les distributeurs doit également être encadrée afin de

déterminer précisément la valeur réelle de l’opération, nécessaire à l’établissement des états

Page 46: Le traitement comptable des marges arrière dans le secteur ... · PDF filele Plan omptable Généal, n’opèent pas de distinction particulière des marges arrière selon leur

Chaire Financial Reporting ESSEC-KPMG

Jeanne Depond

Page 46 sur 63

financiers sous le référentiel IFRS. Ainsi, il s’agit de déterminer la « juste valeur » du coût de la

prestation de services. Une analogie avec la position prise par le « Standing Interpretation

Committee » dans le SIC 31 consacrée aux transactions d’échanges concernant des prestations de

publicité. Il s’agissait en effet d’évaluer de façon fiable à la « juste valeur » des services de publicité

reçus.

D’après ce texte, la valeur vénale d’un service ne peut être appréciée que par référence à des ventes

normales.

Une vente est considérée comme normale si elle :

Implique un service semblable à d’autres services connus

Se produit fréquemment

Représente la majorité des transactions de même nature

Est payée en actifs monétaires ou autres actifs dont la juste valeur peut être mesurée

aisément

Dans le cadre des marges arrière, si la transaction peut être comparée à des transactions normales,

le coût retenu pour la prestation de services doit alors être la juste valeur de la transaction. La

différence entre cette valeur et le coût total doit être traitée comme dégradation tarifaire. Dans le

cas contraire, si la transaction n’est pas considérée comme normale, la valeur de la prestation de

services correspondra alors à la valeur payée pour la transaction.

Méthodes de suivi de l’avancement des prestations

Les méthodes de suivi de l’avancement des prestations doivent différer selon la nature des

prestations de service afin de répondre aux exigences de la norme IAS 18 :

Catalogues, opérations ponctuelles : examen des travaux exécutés

Opérations identifiables et limitées dans le temps (têtes de gondole) : services rendus à la

date considérée en % du total des services

Opérations difficilement identifiables unitairement (bornes coupons) : proportion des coûts

Actions ponctuelles identifiables : tarification en valeur

Une grille d’analyse des prestations de service est nécessaire pour uniformiser les méthodes de

traitement comptable des marges arrière. Elle doit être rendue officielle et obligatoire, sous réserve

que les deux parties concernés veulent et soient prêts à réglementer les pratiques commerciales, ce

qui n’a pas été le cas jusqu’ici. D’autre part, elle doit être élaborée conjointement entre les

distributeurs et les industriels afin qu’elle soit efficace et durable.

Page 47: Le traitement comptable des marges arrière dans le secteur ... · PDF filele Plan omptable Généal, n’opèent pas de distinction particulière des marges arrière selon leur

Chaire Financial Reporting ESSEC-KPMG

Jeanne Depond

Page 47 sur 63

b. Projet de réforme de la norme IAS 18

La norme IAS 18 sur la comptabilisation du chiffre d’affaires est, depuis 2010, rediscutée afin

de la rendre plus universelle.

En effet, le nouveau projet de norme a pour objectif de réconcilier les pratiques américaines (US

GAAP) et internationales, les principes comptables américains appliquant des concepts de

comptabilisation très larges ainsi que de nombreuses niches comptables sectorielles. L’objectif de

cette nouvelle norme est donc d’élaborer une norme unique de comptabilisation du chiffre

d’affaires, qui pourrait être utilisée dans des secteurs d’activité différents. L’IASB et le FASB

proposent ainsi que la comptabilisation d’un produit traduise « le transfert de biens ou de services à

un montant qui reflète la valeur de la contrepartie reçue ou que l’on s’attend à recevoir en échange

de ces biens ou services ». Ainsi, un produit est comptabilisé si le bien ou le service transféré au

client satisfait l’obligation de performance du contrat. Le fait générateur d’une vente serait ainsi le

transfert de contrôle, alors qu’il s’agit, actuellement, du transfert des risques et avantages.

Le projet de texte, ainsi défini, renforce significativement les pièces à fournir en annexe. En effet, les

informations diffusées sur le chiffre d’affaire doivent permettre aux clients de comprendre le

montant, l’échéance ainsi que les incertitudes liées aux produits et à leurs encaissements. Ainsi,

seront désormais obligatoires dans les annexes des états financiers :

- la nature des contrats et la décomposition du chiffre d’affaire

- la nature des obligations de performance

- la présentation des échéances des obligations de performance restant à satisfaire pour les

contrats ayant une échéance supérieure à un an.

Dans le cadre de la grande distribution et, plus spécifiquement du traitement comptable des marges

arrière, cette réforme de la norme IAS 18 aura un impact principalement sur les pièces à apporter en

annexe. En effet, le distributeur devra davantage de justificatifs sur la décomposition du chiffre

d’affaires et donc éventuellement sur la nature même des prestations de service. Il est donc

envisageable que cette réforme ait un impact signification sur la tarification des prestations de

service en la rendant plus transparente.

Page 48: Le traitement comptable des marges arrière dans le secteur ... · PDF filele Plan omptable Généal, n’opèent pas de distinction particulière des marges arrière selon leur

Chaire Financial Reporting ESSEC-KPMG

Jeanne Depond

Page 48 sur 63

Conclusion

Si les marges arrière ont été instaurées par la loi Galland de 1996, elles ont été renforcées

par les pratiques commerciales des grands distributeurs. En effet, la concentration du commerce de

détail ainsi que le développement des marques distributeurs n’ont fait qu’asseoir la puissance

d’achat des enseignes de distribution, leur permettant ainsi d’exercer des moyens de pression sur les

industriels.

Si les marges arrière donnent généralement lieu à des prestations de service identifiables et

bénéfiques pour l’industriel, elles font essentiellement débat à cause de leur tarification

déconnectée de la réalité. Ainsi, les experts estiment que les marges arrière représentent près de

30% du prix de vente au détail.

Afin de réglementer les pratiques commerciales, les pouvoirs publics ont voté une série de lois

permettant d’encadrer et de protéger les industriels, en particulier les petits producteurs.

Cependant, loin d’être efficaces, elles ont donné lieu à des pratiques anticoncurrentielles mises en

place pour contourner la réglementation. Les industriels, ainsi que les distributeurs, estiment, en

effet, que les lois votées par le législateur sont déconnectées de la réalité du marché et empêchent

les partis de maximiser l’efficacité économique. Les lois, notamment la loi de modernisation de

l’économie votée en 2008, montrent cependant une volonté du législateur de faire baisser

durablement les prix à la consommation.

Ces pratiques commerciales ambivalentes doivent faire l’objet d’un traitement comptable spécifique

afin de les faire apparaître dans les états financiers dans un souci de transparence. Les normes

comptables françaises, encore utilisées à ce jour par certaines enseignes de grande distribution non

cotées, n’ont pas pris en compte ces nouvelles pratiques commerciales et n’imposent pas de

traitement comptable particulier aux dégradations tarifaires. Les normes internationales ont, quant à

elles, élaboré un cadre conceptuel permettant de traiter différemment les prestations de service

identifiables et les dégradations tarifaires, alors même que les marges arrière sont une exception

française. Ainsi, depuis l’instauration des normes IFRS, les entreprises cotées doivent faire apparaître

sur une ligne distincte les prestations de service dans un souci de transparence. Les stocks, ainsi que

les achats et le chiffre d’affaires seront également traités différemment afin de rendre les états

financiers plus fidèles à la réalité économique.

Malgré les diverses réglementations encadrant désormais les marges arrière, celles-ci restent

obscures. La norme IAS 18, relative à la présentation des produits des activités ordinaires, est

actuellement en discussion en vue d’une réforme prochaine. Cette probable réforme obligera ainsi

les grands distributeurs à fournir de plus amples informations concernant la tarification des

prestations de service. D’autre part, des accords entre distributeurs et industriels sur une grille

d’analyse des contrats de prestations de services permettraient de distinguer plus clairement les

prestations de service des dégradations tarifaires. Cependant, les distributeurs, tout comme les

industriels, ne sont probablement pas encore prêts à établir de telles règles dans les négociations

commerciales.

Page 49: Le traitement comptable des marges arrière dans le secteur ... · PDF filele Plan omptable Généal, n’opèent pas de distinction particulière des marges arrière selon leur

Chaire Financial Reporting ESSEC-KPMG

Jeanne Depond

Page 49 sur 63

Glossaire

BFR : Le besoin en Fonds de roulement (BFR) d'une entreprise est la somme de son BFR

d'exploitation et de son BFR hors exploitation. Le BFR d'exploitation représente le solde des emplois

et des Ressources d'exploitation (soit en simplifiant : Stocks + clients - fournisseurs). Il correspond à

l'argent gelé par l'entreprise pour financer son Cycle d'exploitation (ou sécrété par celui-ci lorsque ce

BFR est négatif).

Centrales d’achat : Une centrale d'achat est une structure gérant les achats de ses affiliés détaillants

ou grossistes. Cette négociation implique l'étude des produits, la recherche de fournisseurs, la

négociation des achats et, dans certains cas, les activités de répartition, d'organisation et de

documentation. Les services sont réservés à l'usage exclusif des adhérents de la centrale à laquelle ils

sont liés par un contrat d'une certaine durée.

Coopération commerciale : La coopération commerciale désigne l’ensemble des actions

commerciales et marketing menées et / ou financées conjointement entre un distributeur et un

fabricant fournisseur.

Déréférencement : Abandon (souvent brutal) par un distributeur d'une ou de plusieurs références

(produits) qu'il proposait jusqu'alors à ses clients. À la suite de négociations commerciales n'ayant

pas abouti, cet abandon peut parfois concerner tous les produits d'une marque ou d'un producteur.

Hard-discount : Un hard-discount ou maxidiscompte est un magasin libre-service à prédominance

alimentaire qui se caractérise par des prix en dessous de la moyenne, une petite surface de vente et

un assortiment de produits restreint (en moyenne de 600 m² pour moins de 1 000 produits).

IAS : International Accounting Standards ou IAS est le nom des anciennes normes comptables

internationales. Les normes comptables internationales développées à partir du 1 Avril 2001

s'appellent IFRS. Certaines IAS ont été remplacées par des IFRS, d'autres sont toujours en vigueur.

IFRS : Les IFRS (International Financial Reporting Standards) constituent le nouveau référentiel

comptable entré en vigueur le 1er janvier 2005 pour les groupes cotés et les entités entrant dans le

périmètre de ces groupes. Les normes IFRS, élaborées par l'IASB (International Accounting Standards

Board) ont été conçues comme un langage unique pour l'élaboration des comptes consolidés des

sociétés cotées. Elles sont supposées coller davantage à la réalité.

ILEC : Il s’agit de l'abréviation de « Institut de liaison et d'études des industries de consommation »,

une association professionnelle française fondé en 1959 et régie par la loi de 1901 qui réunit plus de

soixante-dix groupes industriels commercialisant des produits de marque de notoriété nationale et

internationale.

Linéaire : Il s’agit du rayonnage, ou par extension, l'espace de vente en libre-service où les produits

sont disposés.

Marge avant : La marge avant est la marge obtenue par différence entre le prix de vente

consommateur et le prix de vente facturé par le fournisseur.

Page 50: Le traitement comptable des marges arrière dans le secteur ... · PDF filele Plan omptable Généal, n’opèent pas de distinction particulière des marges arrière selon leur

Chaire Financial Reporting ESSEC-KPMG

Jeanne Depond

Page 50 sur 63

Marge arrière : Il s’agit des remises et autres réductions (généralement perçues a posteriori) qui ne

sont pas directement considérées dans le calcul du prix, mais qui participent à la marge totale du

distributeur. Elle constitue un avantage différé qui est généralement reversé en fin d'année.

OPA : Une offre publique d'achat (OPA) consiste pour son « initiateur » à proposer aux actionnaires

d'une société cotée (la « cible ») l'acquisition de la totalité des titres composant le capital de cette

dernière pendant une période déterminée et à un prix fixé et versé en espèces.

OPE : Contrairement à une offre publique d'achat (OPA), une offre publique d'échange (OPE) ne

donne pas lieu à un transfert de liquidités. L'offre publique d'échange consiste en effet à proposer

aux actionnaires d'une société cible d'acquérir des titres de la société initiatrice en échange des titres

de la société cible qu'ils détiennent, en fonction d'une certaine parité et pendant une période

déterminée.

PCG : Le plan comptable général définit l'ensemble des normes comptables françaises ainsi que les

règles de présentation des comptes, des rapports, bilans, comptes de résultat et annexes par les

entreprises industrielles et commerciales établies en France.

Prix net net : Le prix net-net est le prix net sur facture, moins les ristournes conditionnelles non

acquises lors de la vente.

Prix net net net ou « prix triple net » : Il s’agit du prix nets de rabais, ristournes et coopération

commerciale

Prime de référencement : Somme versée par un producteur à un distributeur pour que celui-ci

référence – ou améliore le référencement – le ou les produits du premier dans son magasin.

Référencement : Le référencement désigne le fait pour un industriel d’avoir un produit inclus dans

l’assortiment d’un ou plusieurs points de vente.

Revente à perte : La revente à perte est une pratique commerciale légalement interdite. Elle est

juridiquement constituée lorsqu’un distributeur vend un produit en dessous du seuil de revente à

perte, dénommé prix d’achat effectif.

Tête de gondole : La tête de gondole est l’emplacement situé en bout de rayon et donnant sur les

allées de circulation principales et pour certaines sur l’allée centrale. La mise en tête de gondole est

négociée entre le fournisseur et le distributeur et s’accompagne généralement d’une opération

promotionnelle et de la mise à disposition de mobilier de PLV.

Page 51: Le traitement comptable des marges arrière dans le secteur ... · PDF filele Plan omptable Généal, n’opèent pas de distinction particulière des marges arrière selon leur

Chaire Financial Reporting ESSEC-KPMG

Jeanne Depond

Page 51 sur 63

Liste de figures

Figure 1 : Parts de marché des dix principales centrales d’achat en 1993

Figure 2 : Parts de marché des cinq principales centrales d’achat

Figure 3 : Evolution des cinq principales centrales d’achat en termes de débouchés dans le secteur

alimentaire : 1993 / 2009

Figure 4 : Parts de marché des MDD par rayon en 2012

Figure 5 : Parts de marché des MDD par enseigne en 2009

Figure 6 : Mécanismes de déduction des marges arrière de 1997 à 2008

Figure 7: Inflation des prix de détail et des prix de grande consommation depuis 1999

Figure 8 : Evolution du taux de marges arrière depuis 1998

Figure 9 : Calcul du prix net facturé

Figure 10 : Part des coopérations commerciales

Figure 11 : Calcul du prix triple net

Figure 12 : Calendrier des achats et ventes

Figure 13 : Etats semestriels arrêtés au 30/06/N

Figure 14 : Etats annuels arrêtés au 31/12/N

Page 52: Le traitement comptable des marges arrière dans le secteur ... · PDF filele Plan omptable Généal, n’opèent pas de distinction particulière des marges arrière selon leur

Chaire Financial Reporting ESSEC-KPMG

Jeanne Depond

Page 52 sur 63

Bibliographie

TEXTES DE BASE

IAS 2 « Stocks » et IAS 18 « Produits des activités ordinaires » – www.iasb.org

SIC 31 "Produits des activités ordinaires - Opérations de troc impliquant des services de publicité

Ordonnance n°86-1243 du 1er décembre 1986 relative à la liberté des prix et de la concurrence

Loi n° 96-588 du 1er juillet 1996 sur la loyauté et l’équilibre des relations commerciales

Avis 97-A-04 du 21 janvier 1997 « Relatif à diverses questions portant sur la concentration de la

distribution » - Autorité de la Concurrence"

Loi n° 2008-776 du 4 août 2008 de modernisation de l'économie

CAHIERS DE RECHERCHE

BERGES-SENNOU F. et CAPRICE S. (2003), « Les rapports « producteurs-distributeurs » : Fondements

et implications de la puissance d’achat »

BOUTIN X. et GUERRERO G. (2008), « Loi Galland et prix à la consommation »

COLLA C. (2004), « Législation commerciale, marges arrière et concurrence par les prix dans la

distribution en France. Quels modèles d’explication ? »

COLLA C. (2004), « Concurrence, marges arrières et législation commerciale en France : les raisons

d’une dérive »

DELESALLE E. (2003), « IAS 2 “Stocks” comparé à la comptabilité et à la fiscalité françaises »

JENNY F. (2001), « La puissance d’achat, en question »

NAHON D. (1998), « L'impact de la loi Galland sur les rapports industrie/grande distribution »

PHILIPPE J. (1998), « La loi Galland : effets directs, effets induits »

ARTICLES

ESCAFFRE F. – Option Finance (2012), « Comptabilisation du chiffre d’affaires en IFRS »

DE BEAUMONT A. – ILEC (2001), « La régulation de l’entreprise dans la loi NRE : une réponse

française à la mondialisation »

DUFIL S. – Edubourse.fr (2008), « Comment reconnaître une société de la grande distribution ? »

La Tribune (2005), « Les industriels ne veulent plus de centrales d’achat »

LEBELLE A. – Le Parisien (2012), « La grande distribution a la côte auprès des Français »

LSA (2002), « La loi NRE n’a pas répondu aux attentes »

MISSONIER A. – Netpme.fr (2008), « La grande distribution et le projet de réforme de la loi Galland »

SALOMON M. – R.F.C. (2006), « Les marges arrières en IFRS »

Page 53: Le traitement comptable des marges arrière dans le secteur ... · PDF filele Plan omptable Généal, n’opèent pas de distinction particulière des marges arrière selon leur

Chaire Financial Reporting ESSEC-KPMG

Jeanne Depond

Page 53 sur 63

OUVRAGES

SIMON H., JACQUET F. et BARULT F. (2011), La stratégie prix, éditions Dunod

RAPPORTS DE RECHERCHE

Carrefour (2005), « Normes IFRS »

CMA Canada (2010), « Guide de transition aux IFRS »

Deloitte (2004), « La Distribution sera-t-elle prête pour le passage aux IFRS ? »

INSEE (2009), « L’impact de la réduction des marges arrière sur le chiffre d’affaires du commerce et la

correction des indices en volume »

Ministère de l’économie, des finances et de l’industrie (2004), Rapport Canivet « Restaurer la

concurrence par les prix - Les produits de grande consommation et les relations entre industrie et

commerce »

MEMOIRES

DUPAS P. (2010), « La grande distribution et les marques de distributeurs »

HIRSCH C. (2006), « L’audit des marges arrière chez les industriels de biens de grande

consommation »

MACARD O. (2003), « Les marges arrière dans la grande distribution : impact du passage au

référentiel IAS/IFRS pour les distributeurs et les industriels des produits de grande consommation »

SALOMON M. (2005), « Les marges arrière dans le secteur de la grande distribution – Evolution et

traitement comptable »

SOURCES D’INFORMATION

Organismes parlementaires, gouvernementaux et professionnels

Assemblée nationale : www.assemblee-nationale.fr

Bibliothique : www.bibliothique.com

Conseil de la concurrence : www.conseil-concurrence.fr

Direction Générale de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des fraudes :

www.finances.gouv/DGCCRF

Fédération, des Entreprises du Commerce et de la Distribution : www.fcd.asso.fr

Ilec : www.illec.fr

INSEE : www.insee.fr

Sénat : www.senat.fr

Presse

Page 54: Le traitement comptable des marges arrière dans le secteur ... · PDF filele Plan omptable Généal, n’opèent pas de distinction particulière des marges arrière selon leur

Chaire Financial Reporting ESSEC-KPMG

Jeanne Depond

Page 54 sur 63

Alternatives économiques : www.alternatives-economiques.fr

Les Echos : www.lesechos.fr

La Tribune : www.latribune.fr

LSA : www.lsa.fr

Journal Officiel : www.legifrance.gouv

Grande distribution et grande consommation

Auchan: www.groupe-auchan.fr

Carrefour: www.carrefour.fr

Danone: www.danone.com/fr

E.Leclerc: www.mouvement-leclerc.com, www.michel-edouard-leclerc.com

Groupe Casino: www.groupe-casino.fr

Intermarché: www.intermarche.com

Page 55: Le traitement comptable des marges arrière dans le secteur ... · PDF filele Plan omptable Généal, n’opèent pas de distinction particulière des marges arrière selon leur

Chaire Financial Reporting ESSEC-KPMG

Jeanne Depond

Page 55 sur 63

Annexes

Annexe 1 : Le cas de Corah, fournisseur de Marks & Spencer

Corah Ltd était une entreprise de moyenne taille qui fabriquait des chaussettes exclusivement pour la marque St Michael vendue dans les rayons de Marks & Spencer. Pendant près de 60 ans, l'entreprise ne traitait qu'avec Marks & Spencer, qui lui demandait la production d'autres biens comme des sous-vêtements de nuit. Corah élargissait donc l'éventail de sa production et les débouchés lui étaient assurés par une chaîne de magasins solides. Lors de la restructuration de l'industrie du textile, malgré les délocalisations, Marks & Spenser ne lâcha pas Corah mais fit pression sur les marges. Le producteur dépendait donc entièrement de la chaîne de magasins britanniques. Dès 1982, les pressions sur les coûts rendues nécessaires par les bas prix de gros que voulaient Marks & Spencer finirent par pousser l'entreprise Corah à la faillite en 1990.

Source: F. BERGES-SENNOU & S. CAPRICE

Annexe 2 : LOI n° 96-588 du 01/07/1996 sur la loyauté et l'équilibre des relations

commerciales

Art. 1er. - L'article 2 de l'ordonnance no 86-1243 du 1er décembre 1986 relative à la liberté des prix

et de la concurrence est ainsi modifié :

1o Au premier alinéa, les mots : « seize membres» sont remplacés par les mots : « dix-sept

membres» ;

2o Le troisième alinéa 1. est ainsi rédigé :

« 1. Huit membres ou anciens membres du Conseil d'Etat, de la Cour de cassation, de la Cour des

comptes ou des autres juridictions administratives ou judiciaires ;» ;

3o Le sixième alinéa est ainsi rédigé :

« Le président et les trois vice-présidents sont nommés, pour trois d'entre eux, parmi les membres

ou anciens membres du Conseil d'Etat, de la Cour de cassation ou de la Cour des comptes, et pour

l'un d'entre eux, parmi les catégories de personnalités mentionnées aux 2 et 3 ci-dessus.» ;

4o Au septième alinéa, les mots : « sept membres» sont remplacés par les mots : « huit membres».

Art. 2. - La seconde phrase du premier alinéa de l'article 4 de la même ordonnance est ainsi rédigée :

« La commission permanente est composée du président et des trois vice-présidents.»

Page 56: Le traitement comptable des marges arrière dans le secteur ... · PDF filele Plan omptable Généal, n’opèent pas de distinction particulière des marges arrière selon leur

Chaire Financial Reporting ESSEC-KPMG

Jeanne Depond

Page 56 sur 63

Art. 3. - Au début de la dernière phrase du troisième alinéa de l'article 10 de la même ordonnance,

après les mots : « Ces pratiques», sont insérés les mots : « , qui peuvent consister à organiser, pour

les produits agricoles ou d'origine agricole, sous une même marque ou enseigne, les volumes et la

qualité de production ainsi que la politique commerciale, y compris en convenant d'un prix de

cession commun,».

Art. 4. - Au début du dernier alinéa de l'article 10 de l'ordonnance no 86-1243 du 1er décembre 1986

précitée, après les mots : « certaines catégories d'accords», sont insérés les mots : « ou certains

accords».

Art. 5. - Il est inséré, après l'article 10 de la même ordonnance, un article 10-1 ainsi rédigé :

« Art. 10-1. - Sont prohibées les offres de prix ou pratiques de prix de vente aux consommateurs

abusivement bas par rapport aux coûts de production, de transformation et de commercialisation,

dès lors que ces offres ou pratiques ont pour objet ou peuvent avoir pour effet d'éliminer d'un

marché ou d'empêcher d'accéder à un marché une entreprise ou l'un de ses produits.

« Les coûts de commercialisation comportent également et impérativement tous les frais résultant

des obligations légales et réglementaires liées à la sécurité des produits.

« Ces dispositions ne sont pas applicables en cas de revente en l'état, à l'exception des

enregistrements sonores reproduits sur supports matériels.»

Art. 6. - Dans la première phrase du deuxième alinéa de l'article 11 de la même ordonnance, les mots

: « des articles 7 et 8» sont remplacés par les mots : « des articles 7, 8 ou 10-1».

Art. 7. - A la fin de la seconde phrase du premier alinéa de l'article 22 de la même ordonnance, les

mots : « qui peuvent dans les quinze jours demander le renvoi au conseil» sont supprimés.

Art. 8. - Dans la première phrase du deuxième alinéa de l'article 26 de la même ordonnance, les mots

: « aux articles 7 et 8» sont remplacés par les mots : « aux articles 7, 8 et 10-1».

Art. 9. - L'article 28 de la même ordonnance est ainsi rétabli :

« Art. 28. - Toute publicité à l'égard du consommateur, diffusée sur tout support ou visible de

l'extérieur du lieu de vente, mentionnant une réduction de prix ou un prix promotionnel sur les

produits alimentaires périssables doit préciser la nature et l'origine du ou des produits offerts et la

période pendant laquelle est maintenue l'offre proposée par l'annonceur.

« Toute infraction aux dispositions du premier alinéa est punie d'une amende de 100 000 F.

« Lorsque de telles opérations promotionnelles sont susceptibles, par leur ampleur ou leur

fréquence, de désorganiser les marchés, un arrêté interministériel ou, à défaut, préfectoral fixe, pour

les produits concernés, la périodicité et la durée de telles opérations.

« La cessation de la publicité réalisée dans des conditions non conformes aux dispositions du présent

article peut être ordonnée dans les conditions prévues à l'article L. 121-3 du code de la

consommation.»

Page 57: Le traitement comptable des marges arrière dans le secteur ... · PDF filele Plan omptable Généal, n’opèent pas de distinction particulière des marges arrière selon leur

Chaire Financial Reporting ESSEC-KPMG

Jeanne Depond

Page 57 sur 63

Art. 10. - I. - Au troisième alinéa de l'article 31 de la même ordonnance, les mots : « ainsi que tous

rabais, remises ou ristournes dont le principe est acquis et le montant chiffrable lors de la vente ou

de la prestation de services, quelle que soit leur date de règlement» sont remplacés par les mots : «

ainsi que toute réduction de prix acquise à la date de la vente ou de la prestation de services et

directement liée à cette opération de vente ou de prestation de services, à l'exclusion des escomptes

non prévus sur la facture».

II. - Le quatrième alinéa de l'article 31 de la même ordonnance est complété par une phrase ainsi

rédigée :

« Le règlement est réputé réalisé à la date à laquelle les fonds sont mis, par le client, à la disposition

du bénéficiaire ou de son subrogé.»

Art. 11. - I. - L'article 1er de la loi no 63-628 du 2 juillet 1963 de finances rectificative pour 1963

portant maintien de la stabilité économique et financière est abrogé. Les références à cet article

contenues dans des dispositions de nature législative sont remplacées par une référence à l'article 32

de l'ordonnance no 86-1243 du 1er décembre 1986 précitée.

II. - L'article 32 de la même ordonnance est ainsi rédigé :

« Art. 32. - I. - Le fait, pour tout commerçant, de revendre ou d'annoncer la revente d'un produit en

l'état à un prix inférieur à son prix d'achat effectif est puni de 500 000 F d'amende. Cette amende

peut être portée à la moitié des dépenses de publicité dans le cas où une annonce publicitaire,

quel qu'en soit le support, fait état d'un prix inférieur au prix d'achat effectif.

« Le prix d'achat effectif est le prix unitaire figurant sur la facture majoré des taxes sur le chiffre

d'affaires, des taxes spécifiques afférentes à cette revente et du prix du transport.

« Les personnes morales peuvent être déclarées pénalement responsables,

dans les conditions prévues par l'article 121-2 du code pénal, de l'infraction prévue au premier alinéa

du présent article.

« Les peines encourues par les personnes morales sont :

« 1o L'amende suivant les modalités prévues par l'article 131-38 du code pénal ;

« 2o La peine mentionnée au 9o de l'article 131-39 du même code.

« La cessation de l'annonce publicitaire peut être ordonnée dans les conditions prévues à l'article L.

121-3 du code de la consommation.

« II. - Les dispositions qui précèdent ne sont pas applicables :

« 1o Aux ventes volontaires ou forcées motivées par la cessation ou le changement d'une activité

commerciale :

« - aux produits dont la vente présente un caractère saisonnier marqué,

Page 58: Le traitement comptable des marges arrière dans le secteur ... · PDF filele Plan omptable Généal, n’opèent pas de distinction particulière des marges arrière selon leur

Chaire Financial Reporting ESSEC-KPMG

Jeanne Depond

Page 58 sur 63

pendant la période terminale de la saison des ventes et dans l'intervalle compris entre deux saisons

de vente ;

« - aux produits qui ne répondent plus à la demande générale en raison de l'évolution de la mode ou

de l'apparition de perfectionnements techniques ;

« - aux produits, aux caractéristiques identiques, dont le réapprovisionnement s'est effectué en

baisse, le prix effectif d'achat étant alors remplacé par le prix résultant de la nouvelle facture d'achat

;

« - aux produits alimentaires commercialisés dans un magasin d'une surface de vente de moins de

300 mètres carrés et aux produits non alimentaires commercialisés dans un magasin d'une surface de

moins de 1 000 mètres carrés, dont le prix de revente est aligné sur le prix légalement pratiqué pour

les mêmes produits par un autre commerçant dans la même zone d'activité ;

« 2o A condition que l'offre de prix réduit ne fasse pas l'objet d'une quelconque publicité ou annonce

à l'extérieur du point de vente aux produits périssables à partir du moment où ils sont menacés

d'altération rapide.

« III. - Les exceptions prévues au II ne font pas obstacle à l'application du 2 de l'article 189 et du 1 de

l'article 197 de la loi no 85-98 du 25 janvier 1985 relative au redressement et à la liquidation

judiciaires des entreprises.»

Art. 12. - Les trois derniers alinéas de l'article 33 de la même ordonnance sont remplacés par un

alinéa ainsi rédigé :

« La peine encourue par les personnes morales est l'amende, suivant les modalités prévues par

l'article 131-38 dudit code.»

Art. 13. - Dans le deuxième alinéa de l'article 35 de la même ordonnance,

après les mots : « produits alimentaires périssables», sont insérés les mots : « et de viandes

congelées ou surgelées, ainsi que de poissons surgelés».

Art. 14. - L'article 36 de la même ordonnance est ainsi modifié :

1o Les troisième et quatrième alinéas sont supprimés ;

2o Le cinquième alinéa est ainsi rédigé :

« 3. D'obtenir ou de tenter d'obtenir un avantage, condition préalable à la passation de commandes,

sans l'assortir d'un engagement écrit sur un volume d'achat proportionné et, le cas échéant, d'un

service demandé par le fournisseur et ayant fait l'objet d'un accord écrit ;» ;

3o Il est inséré, après le cinquième alinéa, trois alinéas ainsi rédigés :

« 4. D'obtenir ou de tenter d'obtenir, sous la menace d'une rupture brutale des relations

commerciales, des prix, des délais de paiement, des modalités de vente ou des conditions de

coopération commerciale manifestement dérogatoires aux conditions générales de vente ;

Page 59: Le traitement comptable des marges arrière dans le secteur ... · PDF filele Plan omptable Généal, n’opèent pas de distinction particulière des marges arrière selon leur

Chaire Financial Reporting ESSEC-KPMG

Jeanne Depond

Page 59 sur 63

« 5. De rompre brutalement, même partiellement, une relation commerciale établie, sans préavis

écrit tenant compte des relations commerciales antérieures ou des usages reconnus par des accords

interprofessionnels. Les dispositions précédentes ne font pas obstacle à la faculté de résiliation sans

préavis, en cas d'inexécution par l'autre partie de ses obligations ou de force majeure ;

« 6. De participer directement ou indirectement à la violation de l'interdiction de revente hors réseau

faite au distributeur lié par un accord de distribution sélective ou exclusive exempté au titre des

règles applicables du droit de la concurrence.»

Art. 15. - I. - Le premier alinéa de l'article 37 de la même ordonnance est supprimé.

II. - Il est inséré, dans le titre IV de la même ordonnance, un article 37-1 ainsi rédigé :

« Art. 37-1. - Il est interdit à toute personne d'offrir à la vente des produits ou de proposer des

services en utilisant, dans des conditions irrégulières, le domaine public de l'Etat, des collectivités

locales et de leurs établissements publics.

« Les infractions à l'interdiction mentionnée à l'alinéa précédent sont recherchées et constatées dans

les conditions définies par les articles 45 à 47 et 52.

« Les agents peuvent consigner, dans des locaux qu'ils déterminent et pendant une durée qui ne

peut être supérieure à un mois, les produits offerts à la vente et les biens ayant permis la vente des

produits ou l'offre de services.

« La consignation donne lieu à l'établissement immédiat d'un procès-verbal. Celui-ci comporte un

inventaire des biens et des marchandises consignés ainsi que la mention de leur valeur. Il est

communiqué dans les cinq jours de sa clôture au procureur de la République et à l'intéressé.

« La juridiction peut ordonner la confiscation des produits offerts à la vente et des biens ayant permis

la vente des produits ou l'offre de services. La juridiction peut condamner l'auteur de l'infraction à

verser au Trésor public une somme correspondant à la valeur des produits consignés, dans le cas où il

n'a pas été procédé à une saisie.» III. - Le Gouvernement déposera sur le bureau des assemblées

parlementaires, avant le 1er mars 1997, un rapport sur les activités exercées par les associations en

concurrence avec des commerçants, ainsi que sur les problèmes créés par cette concurrence. Ce

rapport présentera, le cas échéant, des propositions de nature à y remédier.

Art. 16. - L'article 55 de la même ordonnance est ainsi rédigé :

« Art. 55. - En cas de condamnation au titre des articles 31, 32, 34 et 35, la juridiction peut ordonner

que sa décision soit affichée ou diffusée dans les conditions prévues par l'article 131-10 du code

pénal.

« Lorsqu'une personne ayant fait l'objet, depuis moins de deux ans, d'une condamnation pour l'une

des infractions définies par les articles 28 et 31 à 35 commet la même infraction, le maximum de la

peine d'amende encourue est porté au double.

« Lorsqu'une personne morale ayant fait l'objet, depuis moins de deux ans, d'une condamnation

pour l'une des infractions définies par les articles 31 à 33 commet la même infraction, le taux

Page 60: Le traitement comptable des marges arrière dans le secteur ... · PDF filele Plan omptable Généal, n’opèent pas de distinction particulière des marges arrière selon leur

Chaire Financial Reporting ESSEC-KPMG

Jeanne Depond

Page 60 sur 63

maximum de la peine d'amende encourue est égal à dix fois celui applicable aux personnes physiques

pour cette infraction.»

Art. 17. - Les dispositions des articles 10, 11 et 13 entrent en vigueur le premier jour du sixième mois

suivant la date de promulgation de la présente loi.

Art. 18. - Le Gouvernement déposera sur le bureau des assemblées parlementaires, avant le 1er

octobre 1997, un rapport faisant le bilan des possibilités de coopération entre les entreprises du

secteur public et celles du secteur privé dans les différents domaines d'activités économiques et

sociales où elles sont en situation de concurrence.

Art. 19. - Le deuxième alinéa de l'article 121 de la loi no 85-98 du 25 janvier 1985 relative au

redressement et à la liquidation judiciaires des entreprises est complété par une phrase ainsi rédigée

« Nonobstant toute clause contraire, la clause de réserve de propriété est opposable à l'acheteur et

aux autres créanciers, à moins que les parties n'aient convenu par écrit de l'écarter ou de la

modifier.»

Art. 20. - Dans l'article 153-4 de la loi no 85-98 du 25 janvier 1985 relative au redressement et à la

liquidation judiciaires des entreprises, les mots : « , à l'exception de la dernière phrase du deuxième

alinéa de l'article 121» sont supprimés.

Les dispositions du présent article ne s'appliquent pas aux procédures en cours à la date d'entrée en

vigueur de la présente loi.

La présente loi sera exécutée comme loi de l'Etat.

Fait à Paris, le 1er juillet 1996.

Annexe 3 : Loi n° 2001-420 du 15 mai 2001 relative aux NRE - Article 56

L'article L. 442-6 du code de commerce est ainsi modifié :

1. Les 2., 3., 4. et 5. du I deviennent respectivement les 3., 4., 5. et 6. du I ;

2. Dans le I, il est rétabli un 2o ainsi rédigé :

« 2. a) D'obtenir ou de tenter d'obtenir d'un partenaire commercial un avantage quelconque ne

correspondant à aucun service commercial effectivement rendu ou manifestement disproportionné

au regard de la valeur du service rendu. Un tel avantage peut notamment consister en la

participation, non justifiée par un intérêt commun et sans contrepartie proportionnée, au

financement d'une opération d'animation commerciale, d'une acquisition ou d'un investissement, en

Page 61: Le traitement comptable des marges arrière dans le secteur ... · PDF filele Plan omptable Généal, n’opèent pas de distinction particulière des marges arrière selon leur

Chaire Financial Reporting ESSEC-KPMG

Jeanne Depond

Page 61 sur 63

particulier dans le cadre de la rénovation de magasins ou encore du rapprochement d'enseignes ou

de centrales de référencement ou d'achat ;

« b) D'abuser de la relation de dépendance dans laquelle il tient un partenaire ou de sa puissance

d'achat ou de vente en le soumettant à des conditions commerciales ou obligations injustifiées ; »

3. D'obtenir ou de tenter d'obtenir, sous la menace d'une rupture brutale totale ou partielle des

relations commerciales, des conditions manifestement abusives concernant les prix, les délais de

paiement, les modalités de vente ou les services ne relevant pas des obligations d'achat et de vente

4. Le 5. est ainsi rédigé :

« 5. De rompre brutalement, même partiellement, une relation commerciale établie, sans préavis

écrit tenant compte de la durée de la relation commerciale et respectant la durée minimale de

préavis déterminée, en référence aux usages du commerce, par des accords interprofessionnels.

Lorsque la relation commerciale porte sur la fourniture de produits sous marque de distributeur, la

durée minimale de préavis est double de celle qui serait applicable si le produit n'était pas fourni

sous marque de distributeur. A défaut de tels accords, des arrêtés du ministre chargé de l'économie

peuvent, pour chaque catégorie de produits, fixer, en tenant compte des usages du commerce, un

délai minimum de préavis et encadrer les conditions de rupture des relations commerciales,

notamment en fonction de leur durée. Les dispositions qui précèdent ne font pas obstacle à la faculté

de résiliation sans préavis, en cas d'inexécution par l'autre partie de ses obligations ou en cas de

force majeure ; »

5. Après le 6., il est inséré un 7. ainsi rédigé :

« 7. De soumettre un partenaire à des conditions de règlement manifestement abusives, compte

tenu des bonnes pratiques et usages commerciaux, et s'écartant au détriment du créancier, sans

raison objective, du délai indiqué au deuxième alinéa de l'article L. 441-6. » ;

6. Les II et III deviennent respectivement les III et IV ;

7. Il est rétabli un II ainsi rédigé :

II. - Sont nuls les clauses ou contrats prévoyant pour un producteur, un commerçant, un industriel ou

un artisan, la possibilité :

« a) De bénéficier rétroactivement de remises, de ristournes ou d'accords de coopération

commerciale ;

« b) D'obtenir le paiement d'un droit d'accès au référencement préalablement à la passation de

toute commande ;

« c) D'interdire au cocontractant la cession à des tiers des créances qu'il détient sur lui.

« L'annulation des clauses relatives au règlement entraîne l'application du délai indiqué au deuxième

alinéa de l'article L. 441-6, sauf si la juridiction saisie peut constater un accord sur des conditions

différentes qui soient équitables. » ;

Page 62: Le traitement comptable des marges arrière dans le secteur ... · PDF filele Plan omptable Généal, n’opèent pas de distinction particulière des marges arrière selon leur

Chaire Financial Reporting ESSEC-KPMG

Jeanne Depond

Page 62 sur 63

8. Le III est ainsi rédigé :

« III. - L'action est introduite devant la juridiction civile ou commerciale compétente par toute

personne justifiant d'un intérêt, par le ministère public, par le ministre chargé de l'économie ou par

le président du Conseil de la concurrence lorsque ce dernier constate, à l'occasion des affaires qui

relèvent de sa compétence, une pratique mentionnée au présent article.

« Lors de cette action, le ministre chargé de l'économie et le ministère public peuvent demander à la

juridiction saisie d'ordonner la cessation des pratiques mentionnées au présent article. Ils peuvent

aussi, pour toutes ces pratiques, faire constater la nullité des clauses ou contrats illicites, demander

la répétition de l'indu et le prononcé d'une amende civile dont le montant ne peut excéder 2 millions

d'euros. La réparation des préjudices subis peut également être demandée. » ;

9. Le IV est ainsi rédigé :

« IV. - Le juge des référés peut ordonner la cessation des pratiques discriminatoires ou abusives ou

toute autre mesure provisoire. »

Annexe 4 : Extrait du cadre conceptuel des IAS – Paragraphe 35

Si l’information doit présenter une image fidèle des transactions et autres événements qu’elle vise à

présenter, il est nécessaire qu’ils soient comptabilisés et présentés conformément à leur substance

et à leur réalité économique et non pas seulement selon leur forme juridique. La substance des

transactions et autres événements n’est pas toujours cohérente avec ce qui ressort du montage

juridique apparent. Par exemple, une entreprise peut céder un actif à un tiers, de telle façon que les

actes visent à conférer la propriété juridique à ce tiers. Néanmoins, des accords peuvent exister, qui

font en sorte que l’entreprise continue à bénéficier des avantages économiques futurs représentatifs

de cet actif. Dans de telles circonstances, la comptabilisation d’une vente ne donnerait pas une

image fidèle de la transaction qui a été conclue (si tant est qu’il y ait eu, en fait, une transaction).

Page 63: Le traitement comptable des marges arrière dans le secteur ... · PDF filele Plan omptable Généal, n’opèent pas de distinction particulière des marges arrière selon leur

Chaire Financial Reporting ESSEC-KPMG

Jeanne Depond

Page 63 sur 63

Annexe 5 : Extrait du rapport annuel du groupe Casino (2011)