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Le Temps - 8 mai 2009 AVENUE ST PAUL 2B 1004 LAUSANNE +41 79 372 20 95 [email protected] www.2bcompany.ch Tout le monde, un jour ou l’autre, marche sur une merde de chien. Plus rarement, l’aven- ture se termine par une chute. Mais jamais ou presque, cette chute entraîne une dégringo- lade psychologique, un puits sans fond. Pour Simone, hé- roïne (absente) de Simone, two, three, four, oui. Marasme scatologique au Théâtre 2.21? Non. L’univers de François Gremaud n’est pas glauque, mais acidulé, décalé. En témoignent les costumes colorés, les plantes vertes et les assiettes cassées. Ce Fribour- geois formé en Belgique a une conviction, déjà développée dans My Way, premier spectacle salué: la vie tient plus à l’aléa- toire qu’à une ligne que l’on peut soi-même tracer. D’où sa passion pour les inventaires fantasques, les listes loufoques et le jeu sur les probabilités. Mieux vaut rire de ce hasard qui fait et défait notre destinée… De ce texte, Simone, two, three, four, le comédien Pierre Mifsud a immédiatement relevé «la sensibilité et la capacité à dire par la bande le tragique de l’existence». Pull et pantalon bleu ciel, ton sur ton beauf à souhait, cet habitué des specta- cles à contre-courant incarne Jean-Claude. Un fou de chiffres qui compte en mètres la lon- gueur de spaghettis mangés par l’oncle Denis avant qu’il ne s’écroule raide mort. Sa vie, la vie des autres, Jean-Claude les résume avec des plots, empilés en équilibre précaire. Plus sérieusement, confie-t-il avec son regard inquiétant, l’homme aux plots piste les raisons qui ont mené Simone à la dépression. Un exercice de reconstitution qui vaut plus pour les sujets à l’œuvre que pour l’objet de leur attention. Car l’enquêteur n’est pas seul. A ses côtés, Martine (Catherine Büchi), ex-scout et championne de voltige, ventile à chaque mise sous pression. Et Alejan- dra, beauté née à Bogota (Léa Polhammer), affiche une séré- nité inversement proportion- nelle à la somme de coups durs essuyés. Pour les trois, un por- trait éclaté, livré par bribes, par moments clés. Fatigante, cette dispersion? Par moments, oui. Dans My Way, il y avait sans doute plus de profondeur et d’émotion. Mais le charme de l’impromptu poétique demeure. Comme demeurent la folle inventivité et l’idée que chacun gère à sa manière et avec ses moyens, la versatilité du destin. Marie-Pierre Genecand Simone, two, three, four , jusqu’au 17 mai, au Th. 2.21, à Lausanne, loc. 021/311 65 14, www.theatre221.ch, 1h 10 Critique: «Simone, two, three, four», au Théâtre 2.21, à Lausanne Des plots pour une vie en chute libre

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Page 1: Le Temps 8 mai 2009 critique - 2bcompany.ch · Le Temps - 8 mai 2009 AVENUE ST PAUL 2B 1004 LAUSANNE +41 79 372 20 95 info@2bcompany.ch Culture LeTemps 30 Vendredi8mai2009 é Muséesgenevois

Le Temps - 8 mai 2009

AVENUE ST PAUL 2B1004 LAUSANNE+41 79 372 20 [email protected]

Culture Le TempsVendredi 8mai 200930

Culture&Société Musées genevois: un audit dévastateur

Départ Le rapport demandé par la Ville pour sortir de la crise les Musées d’art et d’histoire pointe unmanagement«à la fois flou et indécis, mais aussi arbitraire et non participatif». Cäsar Menz quitte son poste de directeurLisbeth Koutchoumoff

L’audit sur les Musées d’art etd’histoire de Genève a été rendu pu-blic hier. Commandé par la Ville à lasociété française Eurologiques, cerapport révèle au grand jour unecrise qui envenimerait les rapportsde travail depuis plusieurs annéesdéjà et empêcherait le démarragevéritable d’un grand projet de réno-vation. Ses conclusions s’avèrenttrès dures.

Les personnels des musées enquestion (le Musée d’art et d’his-toire lui-même et ses «filiales», leMusée Rath, le Cabinet des estam-pes, le Musée Ariana, le Musée del’horlogerie et de l’émaillerie, laMaison Tavel) ont découvert les te-nants du document dès le matin etappris du même coup par la bou-che de Patrice Mugny, conseiller ad-ministratif en charge de la culture,le départ immédiat de Cäsar Menz,directeur en place depuis 1994 etdont la mise à la retraite était pré-vue pour fin 2010. Le magistrat aprécisé que ce départ avancé résul-tait d’une proposition énoncée parl’intéressé lui-même en décembre2008.

Le rapport d’audit rappelle enpréambule que ces quinze derniè-res années ont été marquées parplusieurs réformes qui se sont tou-tes soldées par des échecs (en1996-1997, en 2004-2006, puistrois fois ces trois dernières an-nées). Autant de tentatives, mala-droitement menées, qui n’ont faitque renforcer le climat délétère quisévirait parmi le personnel et aug-menter encore le fossé devenu pa-tent, selon les auditeurs, entre leséquipes et leur direction.

Le management «à la fois flou etindécis mais aussi arbitraire et nonparticipatif» est prioritairementpointé, tout comme le «déficit degouvernance politique, anesthésiéepar l’apparente exception cultu-relle du domaine des musées».

L’épaisseur de cette crise au longcours aurait dû pousser l’encadre-ment des musées à faire appel à l’ar-bitrage politique bien plus tôt. Aulieu de quoi, les tensions et la démo-bilisation générale auraient atteintun «degré alarmant».

Et jamais, au cours de ces années,selon l’audit encore, les véritablesblocages n’auraient été diagnosti-qués. Le modèle muséal encyclopé-dique, tout d’abord, «à des annéeslumière des acquis de l’Histoire cul-turelle telle qu’on la pratiqueaujourd’hui»; un «fonctionnementféodal», ensuite, reposant sur desdépartements thématiques «trèscloisonnés et peu enclins à la trans-versalités», un «schéma culturel éli-tiste». Plus loin, les auditeurs glis-sent que la résistance aux réformesdes pratiques internes est «un dessymptômes les plus courants d’ar-chaïsme des musées européens».

Le budget global des musées enjeu et leurs effectifs sont ensuite ob-servés de près pour nourrir la cons-tatation suivante: moyens et per-sonnels correspondent à ceux d’unmusée de rang plus international etde niveau d’attractivité de 3 à 8 fois

supérieur. Les moyens humains etfinanciers ne sont proportionnés niaux collections, ni au volume actuelde production. Enfin, le déséquili-bre est patent entre «la maisonmère», qui draine la plupart desfonds, et les filiales. S’ajoute à celaun déficit de notoriété extérieurede l’institution. Enfin, le projet derénovation porté par la directionactuelle, autour du projet d’agran-dissement de l’architecte Jean Nou-vel, ne bénéficierait pas de l’adhé-sion des équipes du musée.

Cäsar Menz répond par écrit àces critiques en quinze points argu-mentés. Le premier grief, selon ledirecteur sur le départ, est l’absencede proposition alternative concrètepour l’avenir de l’institution. L’auditse borne, selon lui, à une «critiqueaussi excessive qu’injustifiée»; «cescritiques se basent sur des juge-ments de valeurs et manquent de

fondements objectifs». Cäsar Menzdéfend aussi le Projet Jean Nouvelcomme une base pertinente pour lefutur. Il rappelle aussi la fréquenta-tion du Musée d’art et d’histoire, quile place parmi les plus fréquentésde Suisse.

Le nouveau directeur a éténommé hier, mais son nom ne seraconnu qu’à la fin du mois. Il entreraen fonction le 1er octobre. L’intérimsera assuré par Boris Drahusak, co-directeur du Département de la cul-ture de la Ville. Quatre personnali-tés accompagneront le nouveaudirecteur dans sa tâche de réforme:Guy-Olivier Segond, ancien prési-dent du Conseil d’Etat, Ruth Drei-fuss, ancienne présidente de la Con-fédération, Jacques Robert,syndicaliste, et Pascal Grenier, di-recteur de l’Institut d’histoire del’art et muséologie de l’Universitéde Neuchâtel.

Le Musée d’art et d’histoire de Genève (ci-dessus) réunit sous son aile plusieurs autres institutions comme le Musée Rath, le Cabinet des estampes,le Musée Ariana, le Musée de l’horlogerie et de l’émaillerie et la Maison Tavel. GENÈVE, 8 SEPTEMBRE 2008

Ces quinze dernièresannées ont étémarquées par desréformes qui se sontsoldées par des échecs

Chanson

En tournée acoustique, Jean-LouisMurat fait une pauseà Thônex pour présenterson nouvel album, Tristan.(20h30, salle des fêtes)

ConcertLe groupe de rock suisseChar-lotte Parfois enflamme la scènedu club la Parenthèse à Nyon.(21h30, Grand-Rue 22b.Rens. 022/362 75 56)

SpectacleLe Funambule propose jusqu’àdimanche5 sens,un spectaclemusical mis en scène par AntonyMettler. (20h15, Quai des Alpes,Nyon. Rés. 022/361 70 34et www.funambule.ch)

PoésieLe château de Corcelles-sur-Cha-vornay se prête à un hommage aupoète orientalOmarKhayyâm,avec notamment le comédienClaude Thébert et la chanteuseStéphanie Riondel.(20h30, entrée libre)

Aujourd’hui

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présente

Location : Alhambra ¬ 0800 418 418Pt de la Machine ¬ 022 311 99 70Billetterie Grütli ¬ 022 418 35 55GenèveTourisme ¬ 022 909 70 00

www.caecilia.chGenève

Beethoven | Chostakovitch | Franck

Vendredi 8 mai | 20 h 30

Marie-Elisabeth HeckerMartin Helmchen

violoncelle

piano

Victoria Hall

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Calexico etOffspring àRockOz’ArènesUne quarantaine de concerts sont au menu du pro-chain Rock Oz’Arènes, du 12 au 15 août. La soiréed’ouverture, le mercredi, mettra à l’honneur SimplyRed et Roger Hodgson. La country-pop des Américainsde Calexico résonnera le jeudi dans les arènes, justeavant les Français de Tryo et le groupe de punk rockThe Offspring. La soirée du vendredi transformera lesarènes en dancefloor, avec notamment le DJ LaurentWolf. Samedi sera plus varié avec Grégoire, poètemélancolique, Madcon et Natalie Imbruglia.(ATS)

ProHelvetia soutient 30 auteursPro Helvetia soutient cette année 30 auteurs suisses, àtravers ses bourses littéraires d’un montant total de680 000 francs. Chacun recevra de 20 000 à30 000 francs pour s’assurer d’une indépendancefinancière. Parmi les lauréats figurent les auteursgenevois Nicolas Buri, Bessa Mytfiu, Sylvaine Marguieret Loretta Verna, ainsi que les Lausannois JacquesRoman et Anne-Frédérique Rochat, ou la Valaisanneétablie à Lausanne Noëlle Revaz. (ATS)

Brèves

ConcertsU Les défenseurs des consomma-teurs ont exigé des mesures pourlutter contre le marché noir lors degros concerts. Les organisateursproposent jeudi leur solution: desstades plus grands. Ils rejettent enrevanche l’idée que, lors de grosconcerts, les billets soient, en partievoire entièrement, mis en vente auguichet. (ATS)

FestivalU Le festival du film homosexuelPink Apple a fermé ses portesmercredi à Zurich sur une fréquen-tation record. Quelque 6500 spec-tateurs ont assisté en sept joursaux 90 courts et longs métragesproposés. Le jury du festival aprimé dimanche dernier le courtmétrage canadienThe Island. Il estrécompensé de 2000 francs. (ATS)

Tout lemonde, un jour oul’autre,marche sur unemerdede chien. Plus rarement, l’aven-ture se termine par une chute.Mais jamais ou presque, cettechute entraîne une dégringo-lade psychologique, un puitssans fond. Pour Simone, hé-roïne (absente) deSimone, two,three, four,oui.Marasme scatologique au

Théâtre 2.21? Non. L’univers deFrançois Gremaud n’est pasglauque,mais acidulé, décalé.En témoignent les costumescolorés, les plantes vertes et lesassiettes cassées. Ce Fribour-geois formé en Belgique a uneconviction, déjà développéedansMyWay, premier spectaclesalué: la vie tient plus à l’aléa-toire qu’à une ligne que l’onpeut soi-même tracer. D’où sapassion pour les inventairesfantasques, les listes loufoqueset le jeu sur les probabilités.Mieux vaut rire de ce hasardqui fait et défait notredestinée…De ce texte, Simone, two, three,

four, le comédien PierreMifsuda immédiatement relevé «lasensibilité et la capacité à direpar la bande le tragique del’existence». Pull et pantalonbleu ciel, ton sur ton beauf à

souhait, cet habitué des specta-cles à contre-courant incarneJean-Claude. Un foude chiffresqui compte enmètres la lon-gueur de spaghettismangés parl’oncleDenis avant qu’il nes’écroule raidemort. Sa vie, lavie des autres, Jean-Claude lesrésume avec des plots, empilésen équilibre précaire.Plus sérieusement, confie-t-il

avec son regard inquiétant,l’hommeauxplots piste lesraisons qui ontmené Simone àla dépression. Un exercice dereconstitution qui vaut pluspour les sujets à l’œuvre quepour l’objet de leur attention.Car l’enquêteur n’est pas seul. Ases côtés,Martine (CatherineBüchi), ex-scout et championnede voltige, ventile à chaquemise sous pression. Et Alejan-dra, beauté née à Bogota (LéaPolhammer), affiche une séré-nité inversement proportion-nelle à la sommede coups dursessuyés. Pour les trois, un por-trait éclaté, livré par bribes, parmoments clés.Fatigante, cette dispersion?

Parmoments, oui. DansMyWay,il y avait sans doute plus deprofondeur et d’émotion.Maisle charmede l’impromptupoétique demeure. Comme

demeurent la folle inventivitéet l’idée que chacun gère à samanière et avec sesmoyens, laversatilité dudestin.Marie-Pierre Genecand

Simone, two, three, four, jusqu’au17mai, au Th. 2.21, à Lausanne,loc. 021/311 65 14,www.theatre221.ch, 1h 10

Critique: «Simone, two, three, four», au Théâtre 2.21, à Lausanne

Des plots pour une vie en chute libre

CäsarMenz dirigeait les Muséesd’art et d’histoire depuis 1994.

DR