le prince de montparnasse

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Sam Cambio & Thomas Zorn, en préparation de l'expo EnsaPC/YGrec.

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LE PRINCE DE MONTPARNASSE – WORK IN PROGRESS Le Prince de Montparnasse est un reporter et écrivain français né en 1946 à Marseille – autodidacte, « fils de lui-même »… Il est toujours reporter mais la poésie s’est imposée à lui. Début des années 70. Milieu des années 80. Montparnasse du Soir au Matin et du Matin au Soir. Celles et ceux qui avaient de l’argent mêlés à celles et ceux qui n’en avaient pas. La fête était perpétuelle. Puis chez les uns et les autres, à toutes forces, la fête folle du jouir. Ou la généreuse hospitalité. Jacques Bianco (Bianco est le nom d’un village de Calabre – Italie), nom de plume SAM CAMBIO est le premier reporter du quotidien Libération à avoir reçu une distinction honorifique en 1975 lors de la mort de Joséphine Baker – une plume d’argent de l’Argus de la presse et de la publicité. THOMAS DORN, photographe allemand et Sam Cambio, poète français, s’associent pour exprimer aujourd’hui l’atmosphère mythique du quartier Montparnasse à Paris. La Poésie et la Photographie accompagnent le reportage dans les lieux où se sont croisés des créatrices, des créateurs (en diverses matières…) du monde entier. Seront donc obligatoirement revisités La Coupole, La Closerie des Lilas, Le Select, Le Rosebud, La Rotonde, Le Dôme et à nouveau rencontrés les rescapés de l’époque choisie – l’après ’68 –, parfois dans leurs lieux d’habitations actuels.

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Montparnasse - Bienvenüe

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Boulevard Raspail

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Aline Arrouze au Select

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Jean-Charles Rosier au Select

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Le Select

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Le Rosebud

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Le Rosebud

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Rue de la Gaité

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La Closerie des Lilas

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Boulevard du Montparnasse

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Goa

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Cimetière du Montparnasse

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Régine Cuzin aux Trois Bornes

Elle ne veut pas que je l’appelle “ Ex… “

mais Compagne de Route et elle m’a avoué :

“ Le plus beau compliment que tu m’as fait

c’est de me dire que j’étais une paysanne “.

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Alain Blondel rue de Fontarabie

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Musée du Montparnasse

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L’APRÈS – 68Chansons de Geste

à Gérard Dupuy, mon premier ami à Paris,rencontré en 1971

RÉVOLUTIONJolie, jolie salopeLe coup n’est pas gratuitTu aimes les perles et les diamantsLa mousse au chocolatEt le Grand Toboggan

Nous, Toi, Moi nous voulons le bleu du ciel. C’est facile. Il est en nous et nous nousreconnaissons au premier regard, nous nous devinons dans nos façons de marcher.Tu es accoudé au comptoir mon ami que je ne connais pas et je cherche le Bar LeTonneau. Il n’existe pas à l’endroit indiqué. Tu me dis : « Le Tonneau, c’est moi ».Nous en mettons en perce tout de suite et je trouve, fauché, au sol, un billet debanque aux pieds de Anne que tu me présentes un soir. Et tu m’emmènes à uncours de Roland Barthes où il écrit au tableau le vrai nom de la primevère (ouétait-ce la marguerite ?…) mais qu’importe ! symboles, lettres, traits, points, sons, levrai nom de la fleur fait un mètre de long.Il ne s’agit pour nous que de rien d’autre que de baiser, de baiser, de baiser dansun seul baiser partout, encore, immédiatement. La Politique, c’est hurler que nousvoulons tout être : l’immigré leader d’une grève de la faim de sans-papiers quenous présentons aux élections présidentielles ; le taulard évadé qui se teint enblond pour ne pas qu’on le reconnaisse et l’on ne voit plus que lui dans la rue ; lapute inconnue, la femme prostituée, qui t’offre son lit à l’aube pour que tu tereposes gratuitement de tes déglingueries et qui s’en va faire des passes dans lachambre mitoyenne et qui te donne rendez-vous pour le soir.

ÉLANPartirPour ne plus finir

Pour n’importe où, où nous attendent les surprises de la route aux joies et auxdrames.Nos morts, nos mortes sont en nous, pires qu’en nos mémoires.Ils nous étouffent. Et si nous les avions trahis ?Il s’agit de l’Époque de rire en chansons. Tout est dit.Tout est écrit. Il n’y a plus d’âge.

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Juvénile vieillardAux extrêmes d’avanceLa raison des fousEmpêche toute sagesse

La ville nous est égale à la campagne étoilée. Nous marchons. Les buissons dansles rues se transforment en feuille d’or et, lovés les uns contre les autres, un seulsouffle nous entraîne à nos pertes inconnues, vers l’infini du plus profond de nous.Un seul objectif : je suis tous les autres. La houle de la création vient se fracasserdans nos cœurs aux mille couleurs. Et, quand je dis Mille, je suis modeste, car jesais voir la sève multicolore qui monte dans la tige d’une fleur où l’eau, enmyriades, crée des bulles toujours recréées. Tu es bulle, Femme, et t’éclate,m’inondant de toutes tes humeurs.

Et puis il y a ToiMa distraiteTes mensonges tant certainsNuit, Jour, Après-MidiLe Plaisir est une Mélodie

Et toi, Homme, tu t’abandonnes aux furies de ta joie quels qu’en soient les risqueset les responsabilités.

S olitaireE ntrepriseD éplorableU sageC olèreT enaceE nthousiasteU tileR age

La grève est jolie. Pour le prototype du chômeur méridional que je suis, puisque jepouvais, si je le voulais – juste avant 68 – trouver du travail en 1/2 heure.

Nous croyons, sans y penser, que tout est possible – que, sans le dire, noussavons que nous voulons tout.Que tout est là, à notre portée, ignorant les traîtres futurs ou en place. Je neregrette rien. La question se pose et fait battre mon cœur disponible. Pour toutrecommencer. Nous sommes en attente. Prêts.

Agir comme la fleur qui pousseAgir comme la douceur de la mousseAgir comme une brute pour finir en douceur

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Agir comme une femme nue s’élevant de la boueAgir pour que l’instant clair soit un nouveau matin

Là, nous n’attendions pas. Attendre c’était mourir. Périr avec le meilleur de nousqui n’a jamais rien changé aux structures de l’univers tout entier.

Et que nous importait, rue Henri Barbusse, que sous les canapés et le lit king-sizeoù nous étions vautrés, les poches vides, silencieux, il y avaient des Picasso, desBraque, des Mirò dédicacés, signés, puisque seule nous importait la respiration denos cœurs entremêlés…Il y a le rire. Pas le rire fracassant de l’impuissance avouée, mais le rire étincelantde la fraternelle complicité qui nous fait avancer, immobiles fussions-nous, vers lavivace éternité.

L’Histoire nous appartientElle veut être nôtreLa refuser c’est humilier GavrocheTout ce qui nous tient

Notre imagination perce la peau du Temps qui nous avale et tout nous semblepropice à l’Action. Y compris l’action de ne rien faire du tout si ce n’est mettre letemps au profit de nos corps, de nos esprits.Libres, enfin ! à trois sur l’Harley Davidson, saouls, en sens interdit, sans casques,sur le trottoir de la rue Delambre où l’agent de police nous dit : « Pour cette fois çava. Allez-y ».Libres, enfin ! partir avec quelques dollars sur la route fleurie en passant par l’Iran,le Pakistan, l’Afghanistan et nous retrouver à Goa, la fenêtre ouverte.Libres, enfin ! d’arpenter la Grande Ville, la Capitale, à pied, du Nord au Sud, duSud au Nord, sans compter nos pas pour nous chercher, sans rendez-vous, sûrs denous retrouver, sans moyens de se joindre. Une pensée pour M. Brun dans laTrilogie de Marcel Pagnol qui fait s’époustoufler de rire, incrédules, César et sescomplices lorsqu’il dit que des Canebière à Paris il y en a 30 !Libres, enfin ! de ne pas être en panne dans nos pauvres esprits peureux, cesmerveilleuses machines tout à coup enchantées d’être mises hors d’usage par lafougue qui nous enivre.Libres, enfin ! de passer du château classé aux caves sordides accompagnés par leplus pur enchantement et soudain la ferme, mortelle, Mélancolie. Ensembles, dansun incommensurable sommeil de Tendresse.Il y a l’envers du décor, des mises à distance, des K.O. In fine, flèche du Parthe, incauda venenum, une jeune aristocrate me dit : « C’est bon d’enculer une fille née àNeuilly ».Moi, d’origine non conforme en conformité avec les fêtes de l’après-guerre, duswing. Petit-fils de docker immigré italien et de son épouse italienne qui m’ont élevé— je n’ai jamais manqué de livres – né de père inconnu, « café au lait » dans unefamille blanche, seul Noir du quartier Notre-Dame (limite) à Marseille, à la mère« déchue des droits de mère » lorsque j’avais trois ans.

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Et, pour clore le tout, mon vrai nom est Bianco.Mais, il y a la rue Notre-Dame-des-Champs et Adriana qui me dit : « Il faut choisirentre la Révolution et la Ferrari ». Une tomate et un peu de sel nous faisaientl’après-midi et passaient la voir des artistes internationalement connus.Mais il y a les Ami(e)s. Philippe dit « Lannes » et la baronne Eliane en accords decaprices. Jane au 168 Bd du Montparnasse. Jane dont le premier reportage a étél’assassinat de Bugsy Siegel, fondateur de Las Vegas.Jane qui écrit : « Nous n’irons plus aux bals nègres » (les Indépendances) et quim’emmène voir « Moi, un Noir », film de son époux Jean Rouch. Je pleurevraiment facilement au cinéma. Quant à Cyrano de Bergerac, j’ai « le gonfle »tout du long comme l’on dit à Massilia et à la fin je suis en sanglots.Mais, il y a Aline, rue Campagne-Première, sur la porte de laquelle il y a écrit :« Seule la mort ne réclame aucune urgence ».Mais, il y a Jean-Charles, rue Campagne-Première aussi, de l’autre côté de la rue,où des dames africaines apportent d’énormes marmites pleines pour mieux nousinitier à la « Fête perpétuelle » en dansant le « Ventilateur ». C’est pas compliqué.Les mouvements très lents ou précipités des croupes envahissent l’Espace.Il y a Gérard, rue de la Gaîté, « où les femmes viennent en avalanche et s’offrentcomme un cadeau ».Il y a Sylvie dont le cœur tolérant, élégant, me soutient en souriant. Je suischômeur-SDF.C’est l’époque où Walter Jones qui va se suicider affirme que j’ai l’esprit qui « batla campagne ».Frapadingues nous le sommes. Certains rebondissent, d’autres sont blessés. Tous,toutes sont frappés.Tout bascule dans la sempiternelle conformité et le feuillage au front du poète estfané.

Reste l’autre, l’ailleursL’inconnu tout près d’iciLe Formidable appétit qui nous propulseConsentants, vers leur découverteL’éclaircie

Comme me l’a dit Bernard Lavilliers : « Tu es un rescapé ». C’était un jour oùj’allais vraiment pas très bien. Il a ajouté : « Restons calmes et buvons frais ».

Dans la brousse, la mémoire ramasse le fagot qui lui plaît (proverbe africain).C’est un vrai raccourci. Car il m’en faudrait des pages et des pages pour raconterces années bénies ou maudites par les déesses et les dieux de toutes cosmogonies.

Sam CambioParis, 18 mai 2013