le monde elafonissos 14 juin 2014

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Samedi 14 juin 2014 - 70 e année - N˚21587 - 3,80 ¤ - France métropolitaine - www.lemonde.fr --- Fondateur : Hubert Beuve-Méry I l faut savoir sortir d’une situation de blocage, sur- tout quand elle conduit dans une impasse ubues- que. Avec pragmatisme, c’est ce que viennent de faire les minis- tres de l’environnement des vingt-huit Etats membres de l’Union européenne. Jeudi 12 juin, ils ont trouvé un compromis sur la réglementa- tion européenne portant sur l’autorisation de mise en culture d’organismes génétique- ment modifiés (OGM). La déci- sion ne mettra pas fin à la guerre qui oppose partisans et oppo- sants des OGM, qui s’affrontent en Europe depuis une quinzaine d’années. Au moins permet-elle un armistice. Grosso modo, Bruxelles conti- nuera d’être compétente pour autoriser ou non la culture de tels produits sur le sol de l’Union européenne. Mais, c’est la nouveauté, les Etats membres auront le droit de refuser qu’ils soient cultivés sur tout ou par- tie de leur sol. Ainsi, les pays réfractaires à toute culture de plantes génétiquement modi- fiées – en particulier la France, l’Autriche et la Hongrie – pour- ront s’y opposer sans risquer d’être désavoués par la justice. A l’inverse, les pays qui y sont favo- rables, en pratique (Espagne, Portugal…) ou en théorie (Royau- me-Uni), pourront les cultiver. Ainsi s’achève une guérilla juridique qui tournait au pata- quès, voire au ridicule. La France ne cessait d’invoquer des clauses de sauvegarde ou prétextait la nécessité de nouvelles études scientifiques pour demander la suspension de ces cultures. Elle voyait, logiquement, ces déci- sions sans fondement juridique sérieux cassées par le Conseil d’Etat. A Bruxelles, les Etats mem- bres se livraient à des jeux d’al- liances et de renvois d’ascenseur pour faire et défaire des minori- tés de blocage permettant ou non l’autorisation d’OGM. Ce petit manège est fini. La décision des Vingt-Huit permet de prendre en compte les réticen- ces nationales et préserve l’édifi- ce communautaire, fondé sur le droit, et qui ne peut perdurer que si chacun le respecte. En outre, elle préserve la traçabilité des OGM. Enfin, elle va permettre de décrisper l’analyse des deman- des d’homologation. Au grand dam, d’ailleurs, des défenseurs de l’environnement, qui crai- gnent une accélération des autori- sations de cultures OGM. Sur le papier, ce choix est contraire aux principes commu- nautaires. A l’heure où les Bri- tanniques demandent que soient rendues aux Etats des compétences, les Européens renoncent, de fait, à fédéraliser un type de décision qui relève clairement d’une compétence européenne. Si l’on veut préser- ver le marché unique et la libre circulation des produits à tra- vers l’Union, il est logique que ces produits soient, comme les médicaments, autorisés ou non au niveau communautaire. Ce compromis n’est donc pas guidé par le principe de subsidia- rité, qui veut que les décisions qui peuvent l’être soient prises au niveau local. Il obéit à des contingences politiques. Quel que soit le bien-fondé des argu- ments des uns et des autres, un certain nombre de pays, notam- ment la France, ne veulent pas des OGM, qui inquiètent leur population. Cette contrainte l’a emporté sur les principes. A l’heure de la montée des populismes, l’Union européen- ne est dans une situation trop grave, elle est trop contestée par ceux qui déplorent son inef- ficacité à lutter contre le chôma- ge et la crise économique pour s’arc-bouter sur la question des OGM. p cultiver tomates ou courgettes à la recherche de la convivialité LE PARI FOU DES JARDINS PARTAGÉS DES SOLDES SOLDE OFFREZ-VOUS LE CONFORT TEMPUR ® À PRIX DE RÊVE ! SOLDES à partir du 25 juin 2014 REVENDEUR TEMPUR® AGRÉÉ TEMPUR ® , Pour un sommeil plus réparateur que jamais RIVE DROITE (12 e ) 60 cours de Vincennes, 01 43 41 80 93, M° Nation. RIVE GAUCHE (15 e ) 66 rue de la Convention, 01 40 59 02 10, 7j/7, M° Boucicaut, P. gratuit. www. topper.fr BÉNÉFICIEZ DE CES OFFRES À PARIS : ÉDITORIAL « Pourquoi je ne veux pas de Juncker », par David Cameron Dans une tribune au Monde, le premier ministre britannique explique son opposition à la candidature de M. Juncker à la présidence de la Commission. LIRE PAGE 17 14 JUIN JOURNÉE MONDIALE DES DONNEURS DE SANG BNP Paribas a violé l’embargo américain malgré les mises en garde OGM : le compromis préférable au pataquès DÉBATS BRÉSIL 2014 Paul Pogba, la future star ? Baudouin Prot et Michel Pébereau, en mai 2011. ERIC PIERMONT/AFP LE MAGAZINE DU « MONDE » UNIQUEMENT EN FRANCE MÉTROPOLITAINE, EN BELGIQUE ET AU LUXEMBOURG UK price £ 1,80 t La justice américaine exige de fortes sanctions contre BNP Paribas, qui a violé l’embargo des Etats-Unis contre l’Iran, le Soudan et Cuba t Dès 2006, ses dirigeants, M. Pébereau et M. Prot, ont été mis en garde sur l’Iran par le sous-secrétaire au Trésor de George Bush t Trois expertises de 2006 ont averti la banque des risques qu’elle prenait en poursuivant ses transactions en dollars, même hors des Etats-Unis t La banque a poursuivi des transactions avec le Soudan. Elle risque 10 milliards de dollars d’amende, ainsi que de perdre son accès au dollar t BNP Paribas a annoncé le départ d’un de ses dirigeants, Georges Chodron de Courcel. Washington veut d’autres têtes CAHIER ÉCO P. 2-3 a Le milieu de terrain de la Juventus de Turin dispute sa première Coupe du monde avec la France. A 21 ans, il incarne le nouvel état d’esprit des Bleus SUPPLÉMENT Algérie 180 DA, Allemagne 2,40 ¤, Andorre 2,20 ¤, Autriche 2,50 ¤, Belgique 3,80 ¤, Cameroun 1 800 F CFA, Canada 4,50 $, Côte d’Ivoire 1 800 F CFA, Croatie 19,50 Kn, Danemark 30 KRD, Espagne 2,30 ¤, Finlande 3,80 ¤, Gabon 1 800 F CFA, Grande-Bretagne 1,80 £, Grèce 2,40 ¤, Guadeloupe-Martinique 2,20 ¤, Guyane 2,50 ¤, Hongrie 950 HUF, Irlande 2,40 ¤, Italie 2,40 ¤, Liban 6500 LBP, Luxembourg 3,80 ¤, Malte 2,50 ¤, Maroc 12 DH, Norvège 28 KRN, Pays-Bas 2,40 ¤, Portugal cont. 2,30 ¤, La Réunion 2,20 ¤, Sénégal 1 800 F CFA, Slovénie 2,50 ¤, Saint-Martin 2,50 ¤, Suède 35 KRS, Suisse 3,40 CHF, TOM Avion 450 XPF, Tunisie 2,40 DT, Turquie 9 TL, USA 4,50 $, Afrique CFA autres 1 800 F CFA

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Les plages grecques d’Elafonissos,petit paradis mis en vente par l’Etatp.6

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Page 1: Le Monde Elafonissos 14 Juin 2014

Samedi 14 juin 2014 - 70e année - N˚21587 - 3,80 ¤ - Francemétropolitaine - www.lemonde.fr --- Fondateur :Hubert Beuve-Méry

Il faut savoir sortir d’unesituation de blocage, sur-tout quand elle conduitdans une impasse ubues-

que. Avec pragmatisme, c’est ceque viennent de faire les minis-tres de l’environnement desvingt-huit Etats membres del’Union européenne.

Jeudi 12 juin, ils ont trouvéuncompromis sur la réglementa-tion européenne portant surl’autorisation de mise encultured’organismesgénétique-ment modifiés (OGM). La déci-

sionnemettrapas finà laguerrequi oppose partisans et oppo-sants des OGM, qui s’affrontentenEuropedepuisunequinzained’années. Aumoins permet-elleun armistice.

Grossomodo,Bruxellesconti-nuera d’être compétente pourautoriser ou non la culture detels produits sur le sol del’Union européenne. Mais, c’estlanouveauté, lesEtatsmembresauront le droit de refuser qu’ilssoient cultivés sur tout ou par-tie de leur sol. Ainsi, les paysréfractaires à toute culture deplantes génétiquement modi-fiées – en particulier la France,l’Autriche et la Hongrie – pour-

ront s’y opposer sans risquerd’êtredésavouéspar la justice. Al’inverse, lespaysquiysontfavo-rables, en pratique (Espagne,Portugal…)ouenthéorie (Royau-me-Uni), pourront les cultiver.

Ainsi s’achève une guérillajuridique qui tournait au pata-quès, voire au ridicule. La Francenecessait d’invoquerdes clausesde sauvegarde ou prétextait lanécessité de nouvelles étudesscientifiques pour demander lasuspension de ces cultures. Ellevoyait, logiquement, ces déci-sions sans fondement juridiquesérieux cassées par le Conseild’Etat.ABruxelles, lesEtatsmem-bres se livraient à des jeux d’al-liances et de renvois d’ascenseurpour faire et défaire desminori-tés de blocage permettant ounon l’autorisationd’OGM.

Ce petit manège est fini. Ladécision des Vingt-Huit permetdeprendreencomptelesréticen-ces nationales et préserve l’édifi-ce communautaire, fondé sur ledroit,etquinepeutperdurerquesi chacun le respecte. En outre,elle préserve la traçabilité desOGM. Enfin, elle va permettre dedécrisper l’analyse des deman-des d’homologation. Au granddam, d’ailleurs, des défenseursde l’environnement, qui crai-gnentuneaccélérationdesautori-sationsde culturesOGM.

Sur le papier, ce choix estcontraireauxprincipescommu-nautaires. A l’heure où les Bri-tanniques demandent quesoient rendues aux Etats descompétences, les Européensrenoncent, de fait, à fédéraliserun type de décision qui relèveclairement d’une compétenceeuropéenne. Si l’on veut préser-ver le marché unique et la librecirculation des produits à tra-vers l’Union, il est logique queces produits soient, comme lesmédicaments, autorisés ou nonau niveau communautaire.

Ce compromis n’est donc pasguidépar leprincipedesubsidia-rité, qui veut que les décisionsqui peuvent l’être soient prisesau niveau local. Il obéit à descontingences politiques. Quelque soit le bien-fondé des argu-ments des uns et des autres, uncertain nombre de pays, notam-ment la France, ne veulent pasdes OGM, qui inquiètent leurpopulation. Cette contrainte l’aemporté sur les principes.

A l’heure de la montée despopulismes, l’Union européen-ne est dans une situation tropgrave, elle est trop contestéeparceuxquidéplorent son inef-ficacitéà lutter contre le chôma-ge et la crise économique pours’arc-bouter sur la question desOGM.p

cultiver tomatesou courgettes à la recherchede la convivialité

LE PARI FOU DES JARDINSPARTAGÉS

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RIVE GAUCHE (15e)66 rue de la Convention, 01 40 59 02 10, 7j/7,

M° Boucicaut, P. gratuit. www. topper.fr

BÉNÉFICIEZ DE CES OFFRES À PARIS :

ÉDITORIAL

«Pourquoi jeneveuxpasdeJuncker»,parDavidCameronDansune tribune auMonde,le premierministre britanniqueexplique sonopposition à lacandidature deM. Juncker à laprésidencede la Commission.LIREPAGE 17

14JUIN

JOURNÉE MONDIALEDES DONNEURSDE SANG

BNPParibasaviolél’embargoaméricainmalgrélesmisesengarde

OGM:lecompromispréférableaupataquèsDÉBATS

BRÉSIL 2014PaulPogba,la future star?

BaudouinProtetMichel Pébereau,

enmai 2011.ERIC PIERMONT/AFP

LEMAGAZINEDU«MONDE»UNIQUEMENTENFRANCEMÉTROPOLITAINE, ENBELGIQUEETAULUXEMBOURG

UKprice£1,80

tLa justice américaineexigede fortes sanctionscontreBNPParibas,qui aviolé l’embargodesEtats-Unis contre l’Iran,le SoudanetCuba

tDès2006, sesdirigeants,M.PébereauetM.Prot, ont étémisengarde sur l’Iranpar le sous-secrétaire auTrésordeGeorgeBush

tTrois expertises de2006ontaverti la banquedes risquesqu’elleprenaitenpoursuivant sestransactionsendollars,mêmehorsdesEtats-Unis

tLabanqueapoursuivides transactionsavecle Soudan. Elle risque10milliardsdedollarsd’amende, ainsi quedeperdre sonaccès audollar

tBNPParibasa annoncéledépartd’unde sesdirigeants,GeorgesChodrondeCourcel.Washingtonveutd’autrestêtesCAHIER ÉCOP. 2-3

a Lemilieu de terrainde la Juventus de Turindispute sa premièreCoupe dumondeavec la France. A 21 ans,il incarne le nouvelétat d’esprit des BleusSUPPLÉMENT

Algérie 180 DA,Allemagne 2,40 ¤, Andorre 2,20 ¤,Autriche 2,50 ¤, Belgique 3,80 ¤, Cameroun 1 800 F CFA, Canada 4,50 $, Côte d’Ivoire 1 800 F CFA, Croatie 19,50 Kn, Danemark 30 KRD, Espagne 2,30 ¤, Finlande 3,80 ¤, Gabon 1 800 F CFA, Grande-Bretagne 1,80 £,Grèce 2,40 ¤, Guadeloupe-Martinique 2,20 ¤, Guyane 2,50 ¤, Hongrie 950 HUF, Irlande 2,40 ¤,Italie 2,40 ¤, Liban 6500 LBP, Luxembourg 3,80 ¤,Malte 2,50 ¤,Maroc 12 DH,Norvège 28 KRN, Pays-Bas 2,40 ¤, Portugal cont. 2,30 ¤, La Réunion 2,20 ¤, Sénégal 1 800 F CFA, Slovénie 2,50 ¤, Saint-Martin 2,50 ¤, Suède 35 KRS,Suisse 3,40 CHF, TOMAvion 450 XPF, Tunisie 2,40 DT, Turquie 9 TL,USA 4,50 $, Afrique CFA autres 1 800 F CFA

Page 2: Le Monde Elafonissos 14 Juin 2014

international

100 km

ARABIESAOUDITE

TURQUIE

L IB.

KOWEÏT

IRAN

SYRIE

IRAK

JORDANIE

Bassora

Mossoul

KirkoukBaiji

BagdadFalloujaRamadi

TikritDjalaoula

Saadiyah

ANBAR

NIN IVE

SALAHEDDINE

D IYALA

Tigre

Euphrate

GolfeArabo-persique

Villes contrôlées par l’EIILProvinces avec présencedjihadiste

WashingtonCorrespondante

L es Etats-Unis vont-ils se réen-gager en Irak ? Deux ans etdemi après avoir annoncé en

fanfareledépartdestroupesaméri-caines, Barack Obama n’a exclu«aucune option», jeudi 12 juin,pourrépondreàl’avancéedesdjiha-distes en direction de Bagdad. Leprésident américain, qui ne cessede proclamer que la page des guer-res est tournée, s’est une nouvellefois retrouvé brusquementconfronté aux conséquences de lapolitiquede sonprédécesseur.

L’avancéedesforcesdel’Etatisla-mique en Irak et au Levant (EIIL) aplongé M.Obama dans un nou-veau dilemme sur la conduite àtenirfaceàunesituationd’urgenceoù il est difficile de distinguer les«bons». Mais, s’il n’a pas vouluintervenir en Syrie dans ce qui estdevenuuneguerreparprocurationentrechiiteset sunnites,M.Obama

semble avoir décidé d’une attitudedifférentefaceàlamenacededésin-tégration de l’Irak. Voudrait-il s’endésintéresser, d’ailleurs, que lahaussedesprixdupétrole le ramè-nerait auxréalités.

Intervenantdans lebureauOva-le, en marge d’une rencontre avecle premier ministre australien,Tony Abbott, le président améri-caina été interrogé sur lademandedupremierministre irakien,NouriAl-Maliki, d’un soutien aérien auxtroupes irakiennes en débandadeaprès la chute de Mossoul, ladeuxième ville du pays. « Je n’ex-clus rien, a-t-il répondu. L’Irak vaavoirbesoindeplusd’aidedelapartdesEtats-Unisetde lacommunautéinternationale. Notre équipe desécurité nationale étudie toutes lesoptions. » M.Obama a soulignéqu’il y a «un enjeu» pour les Etats-Unis à «assurer que ces djihadistesne s’installent pas de façon perma-nente en Irak, ou en Syried’ailleurs». Une demande précé-dente deM.Maliki avait essuyé unrefusde laMaisonBlanche.

Unpeuplus tard, le Pentagoneaconfirmé que rien n’était exclu, eneffet, sauf l’envoide troupesausol.Les huit années de guerre ont faitplus de 4400 morts américainspour un coût de 800milliards dedollars (590milliards d’euros). Per-sonnen’imaginerait revoir des sol-dats américains à Fallouja ou àTikrit,saufdansunemissiondegui-dage de drones. Le vice-présidentJoe Biden, qui est chargé de la ges-tiondesrelationsavec legouverne-ment chiite de Bagdad, a appeléNouri Al-Maliki pour lui faire

savoir que les Etats-Unis sont«prêts à accélérer et intensifier leursoutien». Lorsqu’il était candidat àla Maison Blanche, M.Biden avaitété critiqué pour avoir suggéré lapartition de l’Irak en décem-bre 2006. Depuis la prise deKirkouk par les Kurdes, dans lenord du pays, l’idée est réapparuedans lesmédias américains.

Les républicains ont fait pleu-voir un déluge de critiques surBarackObama,àqui il a étérappelésadéclarationdu14décembre2011,façonmissionaccomplie: lesEtats-

Unis laissent derrière eux un Irak«souverain, stable et autosuffi-sant». Depuis dix ans, l’Irak est lenœud de divergences irréconcilia-bles entre ceux qui étaient favora-bles à l’invasion et veulent, in fine,«gagner», quel que soit le tempsnécessaire, et ceux qui estimentque les Etats-Unis ont assez donné.Ceux-là trouvent queM.Maliki, enrefusant de partager le pouvoiraveclessunnites,acreusésapropretombe. «Pourquoi faudrait-il enco-re sauver Maliki?», a interrogé unancienofficier surCNN.

Les «faucons» reprochent sur-toutàM.Obamaden’avoirpasréus-si à négocier un accord de sécuritéqui aurait permis à un contingentde quelque 10000 Américains derester sur place, après le retrait du18décembre 2011, pour assurer desmissions antiterroristes commecelle qui aurait pu faire échec, pen-sent-ils, à l’opération actuelle del’EIIL. Mais M.Obama avait prisacte du refus du chef du gouverne-mentirakiendegarantir l’immuni-té des forces américaines et il avaitdéclaré la présence des Etats-Unisen Irak terminée. «A l’heure qu’ilest, Maliki doit regretter cetteerreur», a dit John Negroponte,ancienambassadeuràBagdad.

Cinglant, le speakerduCongrès,John Boehner, après avoir affirméque lamenaceétaitprévisibleetce«depuisdesmois», a lancé:«Main-tenant, les djihadistes sont à150kmdeBagdad.Etquefait lepré-sident? Il fait la sieste.»

JohnMcCain a pris la parole auSénat. «Si j’ai l’air en colère, a-t-ilprécisé, c’est parce que je suis encolère. Ce quenous avons construitest en train de s’effondrer. » Levieux sénateur républicain, hérosde laguerreduVietnam,est l’unceceux qui avaient plaidé très tôtpour le surge (l’envoi de renforts)de 2006, et pour qu’on laisse le

tempsauxrenfortsde faireeffet. Ila appelé Barack Obama à rempla-cer toute son équipe de sécuriténationale, y compris le chef d’état-major des armées, et à rappeler legénéral David Petraeus. «L’EIILs’est emparéde492millionsdedol-lars à la banque centrale de Mos-soul, a-t-il fulminé. C’est devenu laplus riche organisation terroristede l’Histoire.»

Les «faucons» sont persuadésque tout cela aurait pu être évité,avec une petite force résiduellemais queBarackObamaa choisi leretrait complet pour des raisonsélectorales. John McCain a «sup-plié» son ancien rival de revoir sadécision sur le retrait d’Afghanis-tan. « Les Afghans n’ont pas decapacités aériennes. S’il vous plaît,

conservezunepetiteforceenAfgha-nistan!» Les spécialistes de politi-que étrangère a reproché au prési-dent d’avoir, par son inaction enSyrie, créé un vide qui a profité àl’EIIL. Certains experts ont plaidépour des frappes aériennes contreles troupes qui avanceraient surBagdad, à lamanièrede l’opérationfranco-américaine qui avait per-mis de sanctuariser Benghazi, enLibye. Mais les démocrates se sontmontrésplus circonspects.

ChefdefiledémocrateàlaCham-bredesreprésentants,NancyPelosis’est déclarée opposée à des bom-bardements.«Et quoi, après?, s’est-elle interrogée. C’est la politiqueerronéequinousamenéssurceche-min il y aonzeans.»p

Corine Lesnes

LACÉRÉMONIEmarquant le pre-mier anniversaire de l’électiondeHassanRohani, organisée jeudi12juin, auministère de l’intérieur,à Téhéran, aurait duré plus long-temps si la situation en Irakn’avait forcéM.Rohani à écourtersa présence. Le président iranien atoutdemêmepris le tempsdedes-siner un tableaupessimiste de lasituationdes autres pays de larégion. «Pourquoi il n’y a pas decalme en Syrie? Pourquoi cesconflits et ces tueries en Irak?»,s’est-il désolé, soulignant dumêmecoup la stabilité de l’Iran.

Sansdonner de précision surles actions envisagées par son gou-vernement,M.Rohani s’est bornéà annoncer qu’il ne tolérait pas«cette violence et ces tueries» et

que l’Iran, protecteur des chiitesde la région, se battrait «contre leterrorisme et le radicalisme»dessunnites de l’Etat islamique enIrak et au Levant (EIIL).

Depuismercredi, les autoritésiraniennes ontmultiplié les décla-rations de soutien augouverne-ment irakiendupremierministrechiite, Nouri Al-Maliki, allié pro-che de Téhéran. Leministre desaffaires étrangères,MohammadJavad Zarif, a ainsi téléphoné àsonhomologue irakien,HoshyarZebari, le 11 juin, pour l’assurer deson soutien, et a réclaméune«réponse internationale» à lamenace.

La République islamique, quin’a eude cesse de critiquer l’aideoccidentale aux rebelles syriens,

se voit offrir unbonprétextepour critiquerune fois deplus l’ac-tion despuissances occidentales.«Les événements récents dans larégion, notamment en Irak, sont lefruit de l’ingérencemilitaire desEtats-Unis et des gouvernementsoccidentaux», a ainsi déclaré unhaut commandant desGardiensde la révolution,Hossein Salami.

«Terrorisme idéologique»La prise de conscience du dan-

ger que représentent les djihadis-tes d’EIIL offre à l’Iran une occa-sion rêvée de revenir au premierplan sur la scène diplomatique.Mais elle réveille également untraumatisme qui n’est jamaistrès loin, celui de la guerre Iran-Irak (1980-1988). La peur du

retour d’une domination sunnitesur Bagdad réveille cet antagonis-me éteint depuis une décennie, etinquiète les Iraniens de toutbord. «A aucunmoment, la sécuri-té de l’Iran et la stabilité de larégion n’ont été autantmenacéespar le terrorisme idéologique,s’alarme ainsi le journal réforma-teur Sharhvand, qui relève que«le radicalisme religieux et sectai-re est aujourd’hui à la frontièreiranienne».

Denombreux internautes par-tagent cette peur de la contagionet vont jusqu’à évoquerunepossi-ble invasion de djihadistes sunni-tes en Iran. «Même si nousne som-mespas d’accord avec les activitésdes gardiens de la révolution, nousirons nous battre à leurs côtés si

besoin», écrit sur sa page Face-bookMohammadqui a pourtantpeud’affinités avec les durs enRépublique islamique.

L’atteinte à l’intégrité dupaysn’est pas la seule source d’inquié-tudeparmi les Iraniens.Dans unelettre ouverte publiée le 12 juin,plusieurs oulémas de la ville sain-te deQomontmis en gardecontre «toute atteinte auxmauso-lées des imams» en Irak. En effet,près de la ville de Samarra, aunordde Bagdad, se trouvent deuxlieux saints du chiisme,menacéspar les djihadistes.

Même si l’armée comme leschefs des gardiens de la révolu-tion assurent que l’Iran ne courtaucun risque, lesmesures de sécu-rité ont été renforcées à la frontiè-

re avec l’Irak. Par ailleurs, la pré-sence sur le sol irakiendeGhas-semSoleimani, commandant desforcesAl-Qods, l’unité d’élite desgardiensde la révolution, attestéepar plusieurs sources, traduit l’in-quiétudede Téhéran.

Certains analystes proposentque toutes les parties qui ont desintérêts communs,mettent leursdivergencesde côté face à lamena-ce créée par la progressiondes dji-hadistes. Ironie du sort : pour lapremière fois depuis 1979, l’Iranet les Etats-Unis – qui ont tenudespourparlers bilatéraux officielssur le nucléaire, du9 au 10juin, àGenève – se retrouvent placésdans lemême camp, face aumêmeennemi.p

GhazalGolshiri

«Si j’ai l’airencolère,c’estparcequejesuisencolère.Cequenousavonsconstruitestentraindes’effondrer»

JohnMcCain

Ladécompositiondel’Iraktétanisel’AmériqueBarackObamachercheuneréponseà l’avancéedesdjihadistesde l’EIIL,deuxansetdemiaprès ledépartdesGI’s

L’Irans’inquiètedelamenacedjihadistesurBagdadetles lieuxsaintschiites

Des affrontements avaient lieuvendredi 13 juin entre l’arméeirakienne et des insurgés quitentaient de se diriger versBakouba, la capitale de la provin-ce de Diyala, voisine de celle deBagdad. Le vice-gouverneur deDiyala Fourat Al-Tamimi a indi-qué de son côté que les forceskurdes des Peshmergas avaientle contrôle des secteurs deSaadiyah et Jalawla, au nord-est

de Bakouba, après le retrait del’armée.Craignant un assaut djihadistecontre Kirkouk, dans le nord del’Irak, les forces kurdes en ontprofité pour prendre le contrôletotal de cette ville pétrolièreque se disputent depuis desannées la région autonome duKurdistan et le gouvernementcentral, ainsi que d’autres zonesdisputées.

Image captée sur un site djihadistemontrant des combattants de l’EIIL, le 11 juin. HO/AFP

Combats dans la province deDiyala

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Page 3: Le Monde Elafonissos 14 Juin 2014

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Gautier

Philanthropereconnaissant

Au décès de son parrain en 2006, Pierre-Hervé Gautierdécide de créer la fondation Robert Abdesselam en sa mémoireà partir d’un legs versé à la Fondation de France. D’originefranco-kabile, Robert Abdesselam a été à la fois un grandchampion de tennis, un brillant avocat et un député engagé,après une très belle guerre. « Bob » avait un lien privilégiéavec son filleul Pierre-Hervé Gautier, qu’il appelait « mon fils ».

Le legs aaussi permisde créer laFondation René Lacoste. Lesdeux fondations interviennent notamment en faveur del’éducation par le sport pour les enfants défavorisés à traversles valeurs de l’engagement, du goût de l’effort, du respect desrègles.En France, en partenariat avec les Apprentis d’Auteuil, uneécole de tennis a été créée à partir d’un foyer d’enfants pouratteindre une ampleur nationale : 400 jeunes jouent une foispar semaine et se rencontrent lors d’un tournoi inter-régional.Au Burundi, avec Sport Sans Frontières, des enfants trèsfragilisés bénéficient d’une formation dite « playdagogie » àpartir d’activités sportives transmettant des messages éducatifssur le paludisme, le sida ou le planning familial.Pour Pierre-Hervé Gautier, chaque action est « un îlot deréponse dans un océan de besoins » mais le talent et l’engage-ment des porteurs de projets sont essentiels. C’est ceux quisont « sur le terrain », tels des sportifs, que le philanthropeveut saluer.

Fondation de France :le cadre idéal de votre philanthropiewww.fondationdefrance.org

Point de contrôle près de Jalalabad, à l’est deKaboul, jeudi 12 juin, deux jours avant le second tour de l’élection présidentielle. RAHMAT GUL/AP

KaboulEnvoyé spécial

L e long des avenues encom-brées et poussiéreuses deKaboul, on ne peut pas les

manquer. D’énormes panneauxontétérecouvertsdanslanuitd’af-fiches annonçant les derniers ral-liementsà l’undesdeuxcandidatsen licepour le secondtour, samedi14juin, de l’élection présidentielleafghane. Abdullah Abdullah etAshraf Ghani, respectivementanciens ministres des affairesétrangèresetdesfinancesduprési-dent sortant, Hamid Karzaï, s’af-frontent pour devenir chef d’unEtat qui s’apprête à recouvrer sasouveraineté.

Certes, l’histoire retiendra quec’est la première fois en Afghanis-tan qu’une passation de pouvoirse fait sans violence majeure etquedeuxprésidents élus se succè-dent,mêmesi la frauderesteenco-re un vrai sujet, selon les deuxcamps. Elle retiendra aussi que2014 est, pour l’Afghanistan, l’an-née charnière qui met fin à treizeansd’uneprésencemilitaire inter-nationale, dont les résultats sontencore discutés et dont les paysoccidentaux et les opinions sesont désintéressés au profitd’autres théâtres de tensions.

Au-delà de ces considérationset malgré les attentats, des signesmodestes mais encourageantssont apparus au cours de cettecampagne. Les gigantesquesencarts publicitaires, où figurentles visages des soutiens glanés par

les candidats, ne sont pas anodins.Ilsmarquent une amorce de «pro-fondchangementde ladémocratieafghane», selonM.Ghani, passantnotamment par le délitement dece qui structure encore la société :les clans, les tribus et les famillespolitiques.

Mercredimatin, audernier jourde la campagne officielle, au quar-tier général deM.Abdullah, trans-forméenbunker, troisdélégationssont venues, une à une, afficherpubliquement leur soutien, lorsd’une cérémonie en présence desmédias locaux.

La première à se présenter avaitsoutenu, aupremier tour, le 5avril,la liste de Qutbuddin Hilal, le gen-dre de Gulbuddin Hekmatyar, ledirigeant du Hezb-e-Islami, ledeuxièmegroupeinsurgéaprès lestalibans. Si son chef a choisi AshrafGhani, ses principaux alliés sont làaujourd’hui pour dire qu’ils ontchoisi M.Abdullah. «Qutbuddinpeut partir avec son fusil, il estseul», lanceunreligieuxaumicro.

Ces divorces ont été légion, enparticulier dans les familles lesplus influentes du pays, à com-mencer par celle du présidentKarzaï. Mercredi après-midi, dansla grande enceinte de la Loya Jirga,digne d’un palais, où se tiennentnormalement les séances de l’as-semblée nationale des notables etchefs tribaux, deux de ses frères,Mahmoud et Jamil Karzaï, célè-brentengrandepompe leur rallie-ment à M.Abdullah. Derrière eux,des centaines de partisans venusdes provinces de Kandahar, de

ParwanetdeKaboul s’agitentavecleurpetit drapeauauxcouleursdel’Afghanistan.Lesdeuxfrèresrejoi-gnent ainsi Zalmaï Rassoul, unancienministre des affaires étran-gères, arrivé en troisièmepositiondupremier tour.

Trois jours plus tôt, QayumKarzaï,autrefrèreduprésident, lui-même candidat avant de se désis-ter pour la liste de Zalmaï Rassoul,avait annoncé qu’il ralliait le campd’Ashraf Ghani. Les conseillersd’Hamid Karzaï se sont égalementrépartis sur les deux listes, contrai-rement aux règles claniques trèsancrées dans l’organisation socialede cepayspauvre et rural.

LafamilleducommandantMas-soud, chef tadjik duPanchir, hérosde la guerre contre les Soviétiqueset les talibans, tué en septem-bre 2001 par Al-Qaida, et dontM.Abdullah fut l’un des porte-parole, n’échappe pas à ce phéno-mène. Ses frères, Zia Massoud,ancien vice-président, soutientM.Ghani et AhmadWaliMassoudapris parti pour son adversaire.

«Ces divisions selon d’autres cri-tères que des fidélités traditionnel-les marquent un pas vers uneculture démocratique qui n’existaitpasavant,onnepourraplusgouver-nercommeavantetavec lesmêmespersonnes», relève aussi le porte-parole deM.Abdullah,Mujib Rahi-mi. Lemême porte-parole s’agace-ra néanmoins, mercredi soir, aucours de la conférence de pressefinale de son candidat en présencede l’ensemble des ralliés. Lors du

discours de M.Abdullah, les sou-tiens de la dernière heure, quil’avaient souvent attaqué dure-ment pendant la campagne, fai-saient, un à un, glisser ostensible-ment, devant la salle pleine, despapierssursonpupitrepourluirap-peler qu’il avait oublié de les citer.«Les motivations ne sont pas tou-joursquepolitiquesmais lespaysensituationdepost-conflitnepeuventévoluer que dans l’unité la plus lar-ge», soutientM.Rahimi.

La volonté des deux finalistesderefuser toutenégociation, com-me la vie politique afghane en estfriande,maisquirendraitobsolètele second tour, a aussi frappé lesesprits. «Nous préférons le vote dupeuple aux accords secrets», a lan-cé, mercredi soir, M.Ghani quiavait, lui, préféré, pour clore sacampagne, le décor plus feutré del’auditoriumdu lycée français Isti-qlal, à Kaboul.

Vendredi, dans sa résidence,d’où l’on voit l’ancien palais royalde Darulaman, en périphérie deKaboul, il précise :«Il yavaitavantunpeuple qui suivaitaveuglémentdes puissants qui parlaient à des

sujets,onvoitmaintenantapparaî-tre un public qui demande descomptes après avoir été traumati-sé par la violence et les échecs despériodes communiste, moudjahi-din et des talibans ; une conscienceindividuelle a émergé.»

Par ailleurs, les deux candidatsont insisté sur la nécessité de fairereculer la fraude et ont demandé àlaCommissionélectoraleindépen-dante de «faire son travail» dansles casoù lecomportementde l’ar-méeet de lapolice a pu faire crain-dre qu’elles n’interfèrent dans leprocessus. «L’armée afghane doitrester impartiale », demandeM.Ghani, qui se plaint du partipris d’un chef de brigade, jeudi,dans la province de Khost et decommandants locaux de policefavorables àM.Abdullah.

Quelques points ont tout demême opposé les deux hommes.M.Abdullah a refusé les deuxdébatssurlareligionetsurl’écono-mie proposés par son adversaire,qui s’en est gaussé. Enfin, si, offi-ciellement, les deux finalistesentendent combattre la corrup-

tion, M.Ghani, l’ex-ministre desfinances, qui fut aussi économisteà la Banque mondiale, note quesonconcurrentn’a rienàproposersur la réforme du système bancai-reafghandéstabilisépar lescanda-le de la Kabul Bank, principal éta-blissement financier dupaysdansles années 2000. «Plusieurs de sessoutiens, dont Mahmoud Karzaï,sont, de plus, impliqués dans cetteaffaire», dit-il.

En réponse, M. Abdullah adénoncé les attaques ethniquesd’AbdulRachidDostom,ex-chefdeguerre ouzbek très controversépour ces exactions, et vice-prési-dentdeM.Ghani.Maislesdivergen-ces entre les deux candidats, qui sesont tout demêmeménagés, n’ontpas entamé leur souhait commund’entraîner leur pays vers cetteautre culture démocratique. Unevolonté perçue avec philosophiepar un analyste politique desNations unies, à Kaboul: «Il reste àvoir, si aumomentdemettre le bul-letin dans l’urne, les vieux réflexesnevontpas reprendre ledessus.»p

Jacques Follorou

Entretien

KaboulEnvoyé spécial

AbdullahAbdullah, arrivé en têtedupremier tour de l’élection pré-sidentielle, a dirigé la diplomatieafghane sous la présidence d’Ha-midKarzaï. Il fut l’un desporte-parole du défunt commandantAhmedChahMassoud, chefemblématiquede la régionduPanchir dans le nord-est dupays.Vous avez fait l’objet, le 7 juin,d’un attentat taliban qui a faitdouzemorts,mais vous appelezaudialogue avec ceux qui veu-lent vous tuer et bloquer le pro-cessus électoral. N’est-ce pasun paradoxe?

Il faut d’abordprotéger lespopulations de cettemenace.Ensuite, il faut donner unnou-veau souffle auprocessus de paixengagé avec les talibans. On s’estcontenté de figures rhétoriques etdepromesses et riende concretn’a été réalisé. La visionn’était

pas claire et aucune directionn’était tracée par le précédent gou-vernement.Existe-t-il d’autre issue qu’unretour des talibans pour quel’Afghanistan retrouve la paix?

La réintégration est une choseetmassacrer des gens en est uneautre. Il faut trouver un équilibre.Lamajorité des Afghans rejette

cette violence et l’onne construitrien sur de la pure idéologie.L’Etat doit, de toutes lesmanières,se renforcer. Lancerunvrai dialo-gueneveut pas dire abandonnerses principes. Onverra bien s’il ensort quelque chose.Si vous êtes élu, qu’attendez-

vous de la relation, aujourd’huitrès dégradée, avec les Etats-Unis?

Il existe en effet beaucoupdeméfiance.Nous devons remettreà plat l’ensemble denotre rela-tion avecWashington et rebâtirunpartenariat. Nous avons eubesoin des Etats-Unis, ils nous ontaidés,mais nous devons aussiaborder les problèmes à traversun réel dialogue et non par lerecours à des slogans.HamidKarzaï, le président sor-tant, parle de «guerre psycholo-gique» des Etats-Unis contrel’Afghanistan. Cette véhémenceest-elle justifiée?

Non, je crois qu’il s’agit avanttout de raisonspersonnelles liéesaux rapports qu’il a pu avoir avecles représentants américains.Quels ont été ses succès et seséchecs durant ses deuxman-dats?

Il a réussi à préserver l’intégritédu territoire afghanet a garanti laliberté d’expression.Mais les cen-taines demillions de dollars

déversés, chaque année, par lacommunauté internationale, demanière inédite, n’ont pas atteintleur but initial. Son échec est totalface à la corruption et à la fraude.Pensez-vous revoir, si vous êtesélu, les relations avec le Pakis-tan, dont le gouvernement deM.Karzaï a souvent vu lamainderrière les attaques commisessur le sol afghan, y compris der-rière celle qui vous a visé?

Il y a en effet de nombreuxdéfis devant nous avec notre voi-sinpakistanais. Onpeut dire queles trois années qui ont suivi lachute des talibans, le Pakistan,dirigépar le général PervezMus-harraf, a jouéundouble jeu avecles talibans.

Ensuite, ces derniers se sontpeuà peu autonomisés, y com-pris au Pakistan, on vient encorede le voir avec l’attaque contrel’aéroport deKarachi.Mais, là aus-si, une chance est à saisir pour fai-re bouger les lignes denotrepoliti-que étrangère avec Islamabad.p

Propos recueillis par J.Fo.

«Les menaces sont plus nom-breuses et plus sérieuses pour lesecond tour de l’élection prési-dentielle que pour le premier», aindiqué,mardi 10 juin, un officielduministère de l’intérieurafghan. Ce risque a conduit lesdeux candidats, AbdullahAbdul-lah et Ashraf Ghani, à réduire«au minimum» le nombre demeetings et de déplacements.Le 7juin,M.Abdullah a été visépar un attentat qui a fait douzemorts, dont troismembres de sagarde rapprochée. Les autorités

deKaboul et les principalesreprésentations internationalesdans la capitale ont égalementtiré les conséquences de ce dia-gnostic. Le gouvernement a déci-dé de fermer les écoles du 10 au15juin et a déclaré le 14juin jourchômépour permettre aux per-sonnes de voter et de réduire lesrisques. Les personnels del’ONUsont consignés dans toutle pays du jeudi au dimanche.Les ambassades, les ONGet lesentreprises occidentales appli-quent des règles identiques.

AbdullahAbdullah:«Faceàlacorruptionetàlafraude,l’échecd’HamidKarzaïesttotal»

«Laréintégrationdestalibansest

unechose,massacrerdesgensenestuneautre. Il fauttrouver

unéquilibre»

C’estlapremièrefoisqu’unepassation

depouvoirsefaitsansviolencemajeureetquedeuxprésidentsélussesuccèdent

Mesures de sécuritémaximales enAfghanistan

Kaboulseprépareàunsecondtourprésidentiel,décisifpourlesortdupaysAbdullahAbdullahetAshrafGhanis’affrontentàlaveilledudépartdestroupesaméricaines

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Page 4: Le Monde Elafonissos 14 Juin 2014

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Les sept élus duparti anti-euro,Alternative pour l’Allemagne, auParlement européen, vont rejoin-dre le groupe deConservateurset réformistes européens (ECR),animé par les tories britanni-ques. «Nous nous réjouissonsd’être accueillis au sein du grou-pe ECR et remercions tous ceuxqui ont participé aux trèsconstructives et amicales discus-sions préparatoires, expliqueBernd Lucke, le porte-parole duparti. La réussite de cette inté-

gration est aussi un succèscontre tous ceux qui ont exercéd’intenses pressions sur lesdéputés du groupe afin d’empê-cher la reconnaissance de l’AFDpour des raisons de politiqueintérieure», a-t-il ajouté.Ce ralliement risque de tendreles relations entre la chancelièreallemande, AngelaMerkel, et lepremierministre britannique,DavidCameron, qui s’opposentsur le choix de Jean-Claude Junc-ker à la tête de la Commission.

Reportage

Donetsk (Ukraine)Envoyé spécial

V adim «Kerch» reçoit dansun véhicule de sport deluxe, une prise de guerre.

«Désolé pour l’odeur de sang, s’ex-cuse-t-il lorsquel’onmonteàbord.J’aitransporténosblessés.»Cecom-mandant de la «République popu-laire» de Donetsk, lieutenant du«ministredeladéfense»séparatis-teIgorStrelkov,nousemmènevisi-ter son quartier général.

Il roule lentement à travers lacour du siège du SBU, les servicesde sécurité intérieure ukrainiens,occupépar lesséparatistes, etdanscelle d’une caserne de pompiersattenante. Ses hommes ont dressédes barrages en chicanes dans lesruelles, disposé des gardes lourde-ment armés sur les toits. Une cen-tainedemilicienstraînentdanslescours.Onfumeàlafindujoursousun dôme orthodoxe ajouré à pla-ques de métal doré. «Le prêtrevient tous les mardis. Tout est enordre», dit Kerch.

Le commandant, voix de sten-tor et tête de pierre, a régalé cetaprès-midi d’un agneau grillé desmercenaires tchétchènes: il est debonnehumeur. Ilnousentraîneausiègede laUnicreditBankattenan-te.Passéunsasdesécurité,ons’en-fonce dans de longs couloirs à pei-ne éclairés pour rejoindre un petitconseildeguerre,dansunsalondedirection à canapésde cuir.

Il y a làMikhaïl «Verin», fonda-teur de l’Armée russe orthodoxe,un groupemontant qui a combat-tu l’armée ukrainienne le 26maiautourde l’aéroportdeDonetsk, etMikhaïl«Tip»,auxbicepssoigneu-sement sculptés à la fonte, qui ditêtre un ancien colonel du SBU àKiev. «Nous nettoyons le territoiredes criminels et des pillards. Nousinstaurons l’ordre dans la Républi-que populaire de Donetsk», ditVerin. Deux femmes servent lecognac.

Alors que les bandes armées semultiplient dans le Donbass, quel’anarchie gagne la capitale régio-nale, ces commandants sont occu-pés à former une véritable forcemilitaire, seule autorisée par la«République» àporter les armes àDonetsk. Ils collaborent avec deuxautres groupes : le bataillon Vos-tok («Est »), responsable de « lasécuritéde l’Etat» selonKerch, et legroupeOplot, chargéde la sécuritéintérieure. Vostok dispose d’envi-ron 400hommes. Oplot compte

quelques centaines de soldats aumieux. Lesmembresde cet ancien«fight club» adeptes de combatsen cages se sont militarisés àDonetsk après s’être illustrés com-me casseurs de manifestants auMaïdan, à Kiev. L’armée : nul neconnaît ses effectifs.

Aucundecesgroupesn’adegra-des : il n’y a que des chefs et destroupiers, aux côtés desquels unenuéedemercenairesvenusdeRus-sie joue un rôle prépondérant.

A ces troupes, il faut ajouter cel-les de Slaviansk, à 110km au nord,où est basé Igor Strelkov. Les com-battants s’y concentrent depuisdeux mois. L’armée ukrainiennebombardequotidiennementlavil-leetsesfaubourgs.L’eau, l’électrici-té, les communications téléphoni-ques y sont largement coupées.Les commandants deDonetskpei-nent à joindre leur chef.

Verin, dit « le cinquième»,jeunehomme souriant auxavant-brastatouésdeflammes,était ilyapeu propriétaire d’un fast-food àMoscou. Il combat à Donetsk «parsolidarité» avec les russophonesduDonbass,dontsafemmeestori-

ginaire, et pourdéfendre«la gran-deur»dumonde orthodoxe russe.Il tient son surnom de son ancienfief, le cinquièmeétagedusiègedel’administration régionale, desinistre réputation. Il a reconnu yavoirdétenuetinterrogédesoppo-sants. Certains ont affirmé y avoirété battus et torturés.

L’ailemilitairedes séparatistesafini par vider ce bâtiment de sesoccupants le 29mai. Elle prenaitainsiledessussurlesreprésentantspolitiques autoproclamés qui enavaient fait leur siège et qui incar-naient la rébellion depuis le moisd’avril. Jeudi12juin,unvanapparte-nant, selon un porte-parole de la

Républiquepopulaire,àDenisPou-chiline, «président du Parlement»de Donetsk, a explosé sur son par-vis. Dimanche, l’un de ses adjointsavait été abattu enplein centre-vil-le. Depuis lundi soir, on est égale-mentsansnouvellesdumaireauto-proclamé de la ville de Slaviansk,Viatcheslav Ponomarev. L’agencerusse Itar-Tass a avancé, citant unesourcemilitaire séparatiste anony-me, qu’il avait été emprisonné surordred’Igor Strelkov.

«Notre premier gouvernementn’était pas apte à nous unifier et àfaire grandir la République, ditKerch.Mais avec le temps, des per-sonnalités fortes se sont imposéesdans la foule. Depuis deux à troissemaines, je vois qu’unordre émer-ge du chaos.»

Kerchet sescamaradesagissentsous l’autoritéduRusseAlexandreBorodaï, le premier ministre de laRépubliquepopulaire.Cethommeaffable, ancien rédacteur de Zav-tra, journal «rouge brun» (com-munisteetultranationaliste), a étéle conseiller en communicationd’unmécèneorthodoxeprocheduKremlin,KonstantinMalofeev. Il a

opéré en Crimée, discrètement,aux côtés des autorités prorussesmises en place la veille de l’inva-sionmilitaire de la péninsule.

Les médias russes ont désignéaumoisd’avril sonami IgorStrelk-ov comme le chef militaire desinsurgés. Lui aussi a participé àl’opération de Crimée. Kiev etl’Union européenne affirmentqu’il appartient au GRU, les servi-ces secrets de l’armée russe. Il adéclaré y avoir servi. Selon l’ONGMémorial, il s’est rendu coupabled’exactions contre des civilsdurant la deuxième guerre deTchétchénie (1999-2009).

Ce personnage étonne par sesaspects fantasques :onpeut levoirdans des photographies publiéesparle journalKomsomolskayaPra-vda participant à des reconstitu-tions de batailles historiques, encuirassedecenturionromain,visa-ge rougi au soleil.

Laprise de contrôlemilitaire deDonetsk par ces deux hommessemble marquer une volonté dereprise en main de la région parMoscou. Si le Kremlin souhaiteconclure un accord avec le nou-

veau président ukrainien PetroPorochenko, il lui faut mettre del’ordredans lechaosduDonbass.Atout le moins qu’il s’y assure unechaînede commandement fiable.

Cependant, il est possible queStrelkov et Baradaïmènent désor-mais une guerre à l’aveugle, enattendant des nouvelles de leurssponsors. Ils ont la légèreté d’opé-rer à visage découvert. Ils parais-sentisolés,alorsquelaRussieareti-ré les trois quarts des 40000sol-dats qu’elle avait massés depuisdeuxmois à la frontière.

Jeudi, M.Porochenko a évoquéson plan pour pacifier l’Est lors deconversations par téléphone avecVladimir Poutine, Angela Merkelet le vice-président américain, Joe

Biden. Lors de sa conversationavec le président russe, il a égale-ment dénoncé l’entrée de troistanks sur le territoire ukrainien.

Samedi 7 juin, lors de son dis-cours inaugural, Petro Porochen-koavait offert l’amnistieauxsépa-ratistes qui n’auraient pas de sangsur lesmains, et refusé toutenégo-ciation«avec lesbandits»qui tien-nent le Donbass. Il a annoncél’ouverture de corridors humani-tairespourlescivils, laissantouver-te la perspective d’une opérationmilitaire de plus grande ampleur.

Les commandants de Donetskévoquent à peine cette bataille quis’annonce.Ilssontoccupésàs’assu-rer la loyauté de leurs troupes.«Ces dernières vingt-quatre heu-res, nous avons capturé vingt etunhommes à travers la région quiportent nos uniformes, et que noussoupçonnons d’être en réalité desmembres de la garde nationaleukrainienne», disait, le 1er juin,Alexandre Zakharchenko, 38ans,le chef d’Oplot.

Cet ancien mineur aux yeuxbleus délavés, au souriremauvais,qui porte au côté un holster conte-nant un pistolet Makarov et à laceinture un Nagant belge, affir-mait que ces prisonniers avaientété confiés à la police et peut-êtrelibérés dans l’heure. «On ne peutpaslesfusiller,sinonnousprovoque-rionsune véritable guerre civile .»p

Louis Imbert

RomeCorrespondant

P ouvait-il en aller autre-ment?LesmilitantsduMou-vements 5 étoiles (M5S) ins-

crits sur le blog de Beppe Grillon’avaient pas d’autre possibilitéquede faire adhérer leurs dix-septparlementaires européens augroupe Europe libertés démocra-tie(ELD),oùsedistinguel’europho-be britannique Nigel Farage. Priésde choisir entre ELD, les Conserva-teurs et réformistes européens

(ECR) et les non-inscrits, les29584votants de ce scrutin enligne ont choisi à 78% le groupeELD.

Il est vrai qu’avant de cliquer ilsont eu droit à un petit film d’ani-mation démontrant les avantagesde telle ou telle affiliation et, aucontraire, les désavantages de sié-ger parmi les non-inscrits : pas depostes à responsabilité, pas d’ar-gent,pasdevisibilité.Bref, lamisè-re.Mêmeunenfantde 5ans auraitpu faire la différence. D’autantqu’un petit astérisque précisait :

«Si lechoixarrivéentêteest impos-sible [les non-inscrits], c’est celuiarrivé en seconde position qui seraretenu.»Pour faire bonnemesure,le site Beppegrillo.it proposait àses visiteurs un entretien, réalisépar le journal Il Fatto Quotidiano,considéré comme lemédia le plusprocheduMouvement, avecNigelFarage, que BeppeGrillo a rencon-tré le 29mai à Bruxelles. A le lire,aucundoute l’affaire était faite.

Question: « Jeudi les activistesvoteront sur l’alliance avec votregroupe. Qu’en pensez-vous ? »

Réponse : « J’espère qu’ils dirontoui parce que nous avons beau-coup de points en commun. Nouscroyonsdans ladémocratie directeet dénonçons les dommages crééspar Bruxelles. » Question : «Vousavez déjà rencontré Beppe Grillo,que pouvez-vous faire ensemble?»Réponse : « Il m’a étonné en tantqu’homme. En politique, j’ai ren-contré beaucoup de personnesennuyeuses et grises. Grillo est leurantithèse.»L’anciencomiquede lacôte ligure, il est vrai, avait trouvésonhôte «spirituel».

Les différences culturelles etidéologiques entre le UKIP et leM5S sont habilement gommées.«Sur quelques points, nous ne pen-sons pas la même chose, admetNigelFarage.Maisnousnousenten-dons sur les principes généraux,comme le pouvoir de l’individu, lesdommages causés par Bruxellessur la démocratie et les nations. »«Cen’estpasunmariage,maisuneunion libre», a conclu le leader del’UKIP, dont une vidéo accompa-gnait cette présentation danslaquelle il apparaît aussi bien raséet cravatéqueBeppeGrilloestbar-bu et débraillé.

Dénonciation de l’ententeDe cette façon, le très ancien

comique reprend d’une main cequ’il offre de l’autre. Alors que cesréférendums sur Internet ne luiavaientpas tousété favorables, il acette fois verrouillé efficacementla consultation en la présentantcomme la ratification d’un accorddéjà conclu. Mais l’«union libre»aurapeut-êtredumalàseconcréti-ser, car pour l’instant Nigel Faragen’estpassûrdeconserversongrou-pe,malgré le ralliement duM5S. Il

doitavoirdesdéputésdeseptpaysdifférents.

Avant cette consultation, plu-sieursvoix,parmilesparlementai-res du M5S, s’étaient élevées pourdénoncer cette entente en coursde finalisation. « Pourquoi leUKIP?, avait écrit la députée Giu-lia Sarti. Sa campagnem’a dégoû-téeencoreplusquecelledeLePen.»Un autre élu parlait d’un leader«misogyne, xénophobe et homo-phobe». Un autre d’un «fraudeurfinancier». Après la consultation,l’eurodéputé IgnazioCorrao a aus-sitôtexpliqué:«Nous serons libresdans le groupe et sur beaucoup depoints, nous voterons avec lesVerts.»

Où va le Mouvement 5 étoiles?Allié à la droite extrême à Stras-bourg, il gagne avec la gauche auxélections municipales. Pendantque Beppe Grillo et Nigel Farages’échangeaient des risettes àBruxelles, Filippo Nogarin, candi-dat du M5S, s’est fait élire diman-che 8juin à la mairie de Livourneen faisant alliance avec la gaucheradicale et divers mouvementscitoyens…p

Philippe Ridet

L’étrange«unionlibre»entreBeppeGrilloetNigelFarageauParlementeuropéenLadécisiondesmilitantsgrillonistesdes’allieravec leseurophobesbritanniquespose laquestionde lastratégieduMouvements5étoiles

Danscesgroupes,iln’yaquedeschefsetdestroupiers,auxcôtésdesquelsunenuéedemercenairesvenusdeRussie joueunrôleprépondérant

SileKremlinsouhaiteconclureunaccordavecleprésident

ukrainien,illuifautmettredel’ordredanslechaosduDonbass

Des combattants pro-russes à unpoint de contrôle de Sloviansk dans la régiondeDonetsk, jeudi 12 juin. EVGENIYMALOLETKA/AP

Le parti anti-euro allemand s’allie avec les tories

ADonetsk, leschefsdeguerreprennentlepassurlespolitiquesLesmilicesséparatistesde l’estde l’Ukraineorganisent leurdéfense faceàKievqui refusedenégocier, toutenproposant l’amnistie

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international

BanguiEnvoyé spécial

C ent vingt gendarmes entreillis dépareillés s’agitentsur le gravier mouillé de la

place d’armes Martin-Lingoupou.Vraies clés de bras, fausses disper-sions de manifestants, interven-tion rapide avec des fusils et despistolets de bois bleus. Devant latribune ministérielle, les agentss’efforcent de démontrer qu’aprèshuit semaines de stage, ils sontaptes à « la gestion démocratiquedes foules».

La formation a été dispenséepar une société française, Gallice,sur fonds privés. «Un peu moinsd’unmilliond’eurospour former etrééquiper en partie environ280policiers et gendarmes», préci-se FrédéricGallois, un ancien com-mandantduGIGNreconverti dansla sécuritéprivée.

Niel Telecom, propriété de Lau-rentFoucher,unhommed’affairesproche de Claude Guéant, est l’undesprincipauxbailleursdel’opéra-tion. Sous embargo des Nationsunies, laRépubliquecentrafricainen’apasledroitd’importerdumaté-rielmilitairemaisune«tolérance»a été accordée pour les forces del’ordre.

Alors que la sécurisation dupays a étédéléguéeaux forces afri-caines de la Misca et françaises de«Sangaris», en trop faible nombrepourremplirpleinementcettemis-sion, et que l’armée centrafricaine

est tenue à l’écart du processus, cequi provoque une grogne inquié-tante des soldats, policiers et gen-darmes sont désormais priés dereprendre leurs activités, même silesmoyens font défaut et que leursens de l’éthique est sujet à cau-tion. « Je dispose de près de 3900hommesmais ils ne sont pas équi-pés. Pour l’instant, nous n’avonsque 14véhicules octroyés par lesNations unies. Nous ne vivons quepar les aides de la communautéinternationale. Les agents revien-nent pour toucher leur solde mais

pour relancer les activités, il fau-drait qu’ils ramènent les armesqu’ils dissimulent encore», expli-queleministredelasécuritépubli-que, Denis Wangao Kizimale, der-rière ses épais verres fumés.

Cetteindigencematérielle, ilsuf-fitdeserendredansles locauxdeladirection des services de la policejudiciaire pour la mesurer. Danssongrandbureautoutvide, lecolo-nel Jean-Pierre Ngbo-Toubaketeraconte que «les forces internatio-nales nous demandent de nouscontenter de monter des procédu-

resmaispasd’allerchercher lesban-dits». «De toute façon, avec deuxfusils et cinq matraques, nous nepouvons rien face à des malfratsbien armés. » Ses services, ajoutel’officier,ontété toutd’abordpilléspar les ex-rebelles à majoritémusulmane de la Séléka, quiavaient pris le pouvoir enmars2013, puis cambriolés dans lanuit du 25avril. «Regardez, il nenous reste qu’un seul ordinateurdonné par le ministère de la jus-tice», se désole le colonel Ngbo-Toubakete.

Dans cette tentative de remiseen routede la chaînepénale, la jus-ticeestelleaussienphasederenais-sance. Dans l’immense salle du tri-bunal de grande instance de Ban-gui, de présumésdélinquants sontjugéspourdesvolsd’ordinateursàla Caisse nationale de sécuritésociale, de motos, de tôles ondu-lées,desoutragesàmagistrat,dansdes audiences correctionnelles deflagrantsdélits.

Le petit banditisme au quoti-dien est sur les bancs, mais pas lesgrands criminels, auteurs ou com-manditairesdesexactionscommi-sesdepuis la fin 2012.

«On me dit qu’il faut juger lesSéléka mais ils sont tous partisescortéspar les forces internationa-les. Pour les milices anti-balaka [àmajorité chrétienne, anti-musulmans], nous ne jugeons queles individus isolés. On ne peut pass’en prendre aux groupes qui peu-vent venir nous attaquer jusqu’au

tribunal. Il y a trop de menaces etnous ne sommes pas invulnéra-bles», reconnaît Ghislain Grésen-guet, leprocureurdelaRépubliquedupays, pistolet à la ceinture.

De fait, les dossiers criminels,les massacres comme les assassi-nats ciblés, sont en souffrance, car,selon M.Grésenguet, « les magis-trats attendent d’avoir une visionclaire de ce qu’il faut faire». « Il y adesdiscourscontradictoires.Lepou-voirpolitiquenousditqu’il faut lut-ter contre l’impunité, mais enmême temps, il dit qu’il faut ouvrirle dialogue.»

«Nous vivonsdans une insécuri-té totale. Les priorités sont diffuseset jedouteque lajustice fassepartiedes priorités», ajoute un juge souscouvert d’anonymat.

Si elle se félicite notamment delaréouvertured’untribunalenpro-

vince,àBouar,grâceà laprotectiondes forces étrangères, la garde dessceaux, Isabelle Gaudeuille, admetsans détour que l’institution dontellea lachargeestencoreconvales-cente.«Lesgensontpeurdes repré-sailles, alors ils ne déposent pasplainte. Les policiers et les gendar-mes ne peuvent se rendre dans cer-tains quartiers pour mener desinterpellations.Letempsde lamaintendue semble terminé, mais lesgros poissons ne sont pas dans lanasse,d’autantquelorsquel’onlan-ce des mandats d’arrêt contre eux,ils disparaissent avec la complicitédes forces de l’ordre», dit la minis-tre. Ne disposant ni des moyensd’enquête ni de poursuites, lesautorités centrafricaines ont saisila Courpénale internationale.

Lamaison centrale deNgaragbaest aujourd’hui le seul établisse-

mentpénitentiaire fonctionnel dupays. Les 303 détenus, selon le der-nier décompte, se partagent entredes blocs dénommés «MaisonBlanche» pour les personnalités,«Couloir » ou « Irak » pour lesautres.Nombred’entreeuxseplai-gnentd’avoirétéjetéslàdepuisplu-sieursmois sansmandat dedépôt.

Enmars, quelques joursaprès la« réfection» de la prison, onzechefs anti-balaka se sont fait label-le. Depuis le 31mai, douze autresprisonniers manquent à l’appel.Pour escalader les murs d’encein-te, les fugitifs ont utilisé les portesdes toilettes. Le mirador étaitdésert. Le régisseur des lieux, lecommandant Barnabé Konzelo,reconnaît que ces évasionsn’auraient pas été possibles «sansla complicité des gardes».p

Cyril Bensimon

«Avecdeuxfusilsetcinqmatraques,

nousnepouvonsrienfaceàdesmalfrats

bienarmés»Le colonel Ngbo-Toubakete

L’EtatcentrafricainrestesansmoyensfaceauxmilicesLes forcesde l’ordre, sous-équipéeset craignant les représailles,neparviennentpasàmettre finà l’anarchie régnantàBangui

Dansune cellule de la prisonde Bangui, le 5 juin. JÉRÔME DELAY/AP POUR «LE MONDE»

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Page 6: Le Monde Elafonissos 14 Juin 2014

Reportage

Elafonissos (Grèce)Envoyée spéciale

C e matin de juin, sur le portgrec d’Elafonissos, une peti-te îleausudduPéloponnèse,

règne une agitation inhabituelle.Dansun joyeuxchaos,unedizainede familles – tous âges confon-dus–embarquentsurquelquescaï-ques colorés, ces bateauxde pêchetraditionnels encore utilisés danslesîlesgrecques.Direction, lesmer-veilleuses plages jumelles deSimos et Sarakinikos, situées à5kilomètres au sudde l’île.

Des kilomètres de sable fin, dedunes,deforêtetdeseauxturquoi-se si claires qu’elles donnent ausite un faux air de Caraïbes. Unpetit trésor exotique jalousementpréservépar les 1500habitants del’île, qui mènent aujourd’hui uneguerre ouverte au projet de ventede « leurs » plages décidé par legouvernement grec.

Unedemi-heuredetraversée,etles bateaux arrivent, à grands ren-forts de sirènes et de fumigènes,dans la baie de Simos. Premier àdébarquer, Stavros Deliyiannis,conseiller scientifique de la mai-rie, entreprend d’expliquer auxcentaines de touristes présents lesraisons de cette manifestationvenant troubler leur baignade.

«Toute la zone est classée Natu-ra2000, leréseaueuropéendesitesnaturels reconnus pour leur gran-devaleurpatrimonialedufaitde lafaune et la flore exceptionnellesqu’ils contiennent», précise ainsile jeune homme. «L’Etat veut ven-dre ce paradis pour construire deshôtels.»Une«hérésie»,unedémar-che « obscène », une « grosseerreur», commentent la plupartdes touristes interrogés, qui, tous,affirment avoir choisi cette île jus-tementpour ses plagesnaturelles.

«C’est ce qui fait notre différen-ce, et donc notre succès», confirme

le maire, Panayiotis Psaromatis.«Si, demain, de gros complexeshôteliers ou des villas privatives semultiplient sur ces plages quenousavonschoisidegarder leplusviergepossible, alors ces touristes parti-ront.»

Enaoût, auplus fortde la saisontouristique, la population explose,passant de 1500 à 6000 person-nes. Mis à part un camping pou-vanthébergerjusqu’à1500person-nes, implantésurlaplagedeSaraki-nikos, le gros des structures d’ac-cueil – les vingt-cinq hôtels, la cin-quantaine de chambres d’hôtesainsi que les tavernes et magasinsde souvenirs – se concentre del’autrecôtédel’île,auport.«C’est lechoix de développement que nousavons collectivement adopté pourpréserver notre plage, et aujour-d’hui, au nom du remboursementdeladettegrecque,onnousimpose-rait de vendre notre trésor?», résu-me le maire, pourtant proche desconservateurs aupouvoir.

Le 14novembre 2013, la déci-sion 2283/2013, publiée au Journalofficiel grec, a transféré la proprié-té de ces plages auTaiped, le fondsgrec chargé de vendre et valoriserles biens publics grecs dans lecadre du large plan de privatisa-tion exigé par les créanciers de laGrèce pour faire entrer de l’argentdans les caisses de l’Etat, et partici-per ainsi au remboursement des240milliards d’euros de prêtsalloués aupaysdepuis 2011.

Le catalogue du Taiped, consul-table sur Internet, propose claire-ment à la vente, photos alléchan-tesà l’appui, 175000mètrescarrésde terrain sur le site de Simos sousle numéro de lot ABK 382. Projetsde développement suggérés :construction d’hôtels ou de villasprivatives. Sans qu’aucune étudeenvironnementaleoumêmed’im-pactéconomiquen’aitété réalisée,ou en tout cas renduepublique.

LeTaipedn’apas réponduànosdemandes d’entretien, mais a

déclaré, dans un communiqué,qu’iln’avanceraitpassansprendreen compte les objections localesdes habitants d’Elafonissos. «LeTaiped ne nous a aucunement ras-surés. Il ne nousa jamais consultés,n’apas réponduà la lettre officiellequeje leuraienvoyéeetn’apasreti-rélelotdesoncatalogue,alorspour-quoidevrions-nous lecroire?», s’in-quiète Panayiotis Psaromatis. « Jene suispas contre lesprivatisationsdans l’absolu, mais certainementpas des plages, où qu’elles se trou-vent enGrèce», ajoute-t-il.

Prèsd’unecentained’autrester-rains – aux abords des plus bellesplagesdupays – sont en effet tom-bés dans le giron du Taiped ennovembre2013. Il s’agit des îles deNaxos, Rhodes, Leucade, Limnosoude la Crète.

La Grèce compte près de15000kilomètres de côtes encorerelativement peu exploitées, au

regard de ce qui a pu se produiresur la Costa Brava espagnole, parexemple.Et legouvernementgrec,soucieuxde relancer l’activité éco-nomique après sept ans de réces-sion, entend bien mettre à profitce potentiel.

Car le tourisme, qui représenteprèsde 17%duPIB, estuneactivitéen pleine croissance en Grèce. Si2013 fut une année record avecprès de 20millions de visiteurs,2014 s’annonce encore meilleure,et les professionnels du secteurs’attendent à dépasser les 21mil-lionsde touristes. «L’objectif, pourle gouvernement, est désormaisd’arriver à lever les restrictions qui

encadrent légalement l’exploita-tion des terrains côtiers qu’il a misen vente par le biais du Taipedafinde multiplier l’offre touristiquerapidement», explique GeorgesChasiotis, responsable des affairesjuridiques au sein de l’associationpour la protection de l’environne-mentWWF.

En avril, le ministère grec del’économie a en effet présenté unprojetde loimodifiantdemanièresubstantielle la loi littoral. Dans saformeactuelle, ceprojet supprimetoutes les restrictions existantessur la superficie maximale desconcessions de plage comme desbars, des parasols et des chaiseslongues, tout en levant le droit delibre accès à la côte pour le public.

Les mesures proposées visentégalement à faciliter des construc-tionspermanentes sur lesplages àdesfinscommerciales, toutenper-mettant aux entreprises de payerdes amendes pour légaliser desconstructions non autorisées.«Concrètement, cette loi entraînela privatisation des plages», affir-meM.Chasiotis.«Ilvadevenirplussimple pour un investisseur deconstruire un hôtel ou des villasavec un espace privatif allant jus-qu’à 10mètres de lamer, alors quela loi actuelle l’oblige à respecterune distance minimale de50mètres. Peut-onencoreparlerdelibre accès à la plage lorsqu’il reste-ra seulement une bande de10mètres pour poser sa serviettedevantdegigantesques infrastruc-tures hôtelières?», s’interroge cetardent défenseur du principe dulibre accès aux plages, inscrit dansla Constitution grecque.

Devant le tollé soulevé par sonprojet de loi – un mouvement depétitions est notamment très actifsur Internet –, legouvernement l’atemporairement gelé. Mais, auministère de l’économie, on affir-me que cette loi sera bien présen-tée devant le Parlement, sans enpréciser la date.

A Elafonissos, Nikos, l’électri-cienduvillage,auregardaussi lim-pide que les eaux de Simos, résu-me joliment l’engagement de sonvillage : «Le développement doitavoir des limites : on ne peut pastout bétonner. Le crabe doit pou-voir sortir de l’eau. Ainsi que la tor-tue. Et moi, je dois pouvoirme bai-gner sans payer. On doit partageret respecter cette nature dont nousne sommes que des locataires tem-poraires.»p

AdéaGuillot

international& planète

Unprojetdeloisupprimetouteslesrestrictionsexistantes

surlasuperficiemaximaledes

concessionsdeplage

100 km

Mer Egée

MerIonienne

Mer de Crète

G R È C E

BULGARIE

TURQUIE

ALB.

MACÉDOINE

Athènes

Crète

Leucade

Naxos

Limnos

Rhodes

Elafonissos

ColombieLa paix,enjeu du second tourde la présidentielleBOGOTA. Le second tour del’électionprésidentielle enColombie va se convertir,dimanche 15 juin, en réfé-rendumsur le processusdepaix avec la guérillaentre le chef de l’Etat, JuanManuel Santos, etOscarIvanZuluaga.M.Santos, aucoude à coude avec sonrival dans les sondages, adramatisé l’enjeudu scru-tin: «La fin du conflit ou unconflit sans fin.» – (AFP.)

JamaïqueLa possessiondemarijuanadépénaliséeKINGSTON. Legouverne-ment jamaïcain adécidé,vendredi 13juin, dedépéna-liser lapossessiondepeti-tesquantitésdemarijuana,rejoignant ainsi lespaysquiontassoupli leur législa-tion. – (Reuters.)

LaHayeCorrespondance

T rois ans après son arresta-tion dans sa résidence d’Abi-djan en avril 2011, Laurent

Gbagbo est désormais fixé sur lesort qui l’attend dans les prochai-nes années. Les juges de la Courpénale internationale (CPI) ontdonné leur feu vert, jeudi 12 juin, àla tenue d’un procès contre l’ex-présidentivoirien,désormaisaccu-sé de crimes contre l’humanité. Ildevrafaire faceàquatrechefsd’ac-cusation pour lesmeurtres, tenta-tives demeurtre, viols et persécu-tions infligés par ses forces auxpartisans de son rival, AlassaneOuattara.

Lesviolencespostélectorales enCôte d’Ivoire, fin 2010 et début2011, avaient fait plus de3000mortsselonl’ONU.Pourl’ac-cusation, les crimes ont été com-mis par les forces armées et lesmilices, dont les jeunes patriotesdeCharlesBléGoudé.Poursuivi luiaussi par la Cour, le charismatiquemiliciena rejoint sonmentordansla prison de Scheveningen, dans labanlieuedeLaHaye, enmars.Avecd’autres, dont l’épousede l’ex-pré-sident ivoirien, Simone Gbagbo –elle aussi incriminée par le procu-reur, mais toujours incarcérée enCôte d’Ivoire –, Laurent Gbagboauraitmis enœuvreunplandesti-né à le maintenir au pouvoir partous les moyens. C’est la thèse del’accusation.

Refusantleverdictdelacommu-nauté internationale donnant lavictoire de l’élection de novem-bre2010 à AlassaneOuattara, Lau-rent Gbagbo avait retourné lesstructuresdel’Etatcontresesoppo-sants. Face aux juges de LaHaye, ilrevendique toujours la victoire, etses partisans crient au complot.

Il y a un an, Laurent Gbagbo

étaitsortivainqueurd’unepremiè-re bataille devant la justice. Lesjuges avaient demandé au procu-reur de revoir sa copie. Ils dénon-çaient un dossier trop faible, ali-mentéde rapportsd’ONGetd’arti-cles de presse. Rien ne permettantde conduireunprocès solide.

«Approche partiale»L’accusation, qui avait bénéfi-

cié d’une bonne coopération de laCôte d’Ivoire et de la France danssesenquêtes, adonceuunanpourrevoir sa thèse et livrer aux juges22000pages de pièces à convic-tion, appuyées par 108 déposi-tions de témoins. Les juges luiavaient aussi demandé d’inclureau dossier les actions des oppo-sants à l’ex-chefd’Etat. Commes’ilcraignaitd’affaiblirsathèsecontreLaurentGbagbo, leprocureurn’yaconsenti qu’à reculons, signalant,en quelques pages déposées enannexe de son dossier, les actionsdesForcesnouvellesdeGuillaumeSoro, actuel président de l’Assem-blée nationale de Côte d’Ivoire.

Accusé de livrer une justice devainqueurs dans le dossier ivoi-rien comme dans les autres affai-resqu’ilconduit, leprocureurassu-re depuis trois ans qu’il enquêtesurlescrimescommispar lesparti-sans d’Alassane Ouattara. Maisaucund’entreeuxn’est incarcéréàLaHaye ouenCôte d’Ivoire.

«L’approche partiale de la CPI acontrarié lesvictimesdecrimespré-sumés commis par les forces pro-Ouattara et a sapé la crédibilité dela Cour en Côte d’Ivoire», estimeParam-Preet Singh, de HumanRights Watch. Il faudra encoreattendreplusieursmois avantquelaCPInesedécideàouvrir sonpre-mierprocèscontreunancienprési-dent. Un procès qui devrait durerplusieurs années. p

StéphanieMaupas

TerritoiresPlus de90plagessur des dizaines d’îleset enGrèce continentale.

InfrastructuresDes dizaines deports et demarinas, dont cellesd’Hydra ou d’Epidaure. Trente-sept aéroports régionaux, dontceuxdeThessalonique, Santoriniou encoreMykonos.Desdizaines de propriétés immo-

bilières de l’Etat grec.

Entreprises Les compagnies deseauxde la ville d’Athènes (Eidap)et deThessalonique (Eyath).Hellenic Petroleum, la compagniede raffinage et dedistributiondupétrole.DEPA, la compagnienatio-nale d’importation et de distribu-tionde gaznaturel. La compagnieferroviaire nationale Trainose.

La plage de Simos, sur l’île d’Elafonissos, au sud duPéloponnèse, est à vendre. PETER EASTLAND/AGEFOTOSTOCK

Lesplagesgrecquesd’Elafonissos,petitparadismisenventeparl’EtatLegouvernementprivatisepourrembourser sadetteet s’apprêteàmodifier la loi littoral

THAÏLANDE

Ungouvernementintérimaired’iciàseptembreBANGKOK. La junte thaïlandaisemettraenplace d’ici à septembreungouvernement intérimairepour superviserdes réformesquidoiventmeneràdesélections, a annoncé sonchef, vendredi13juin. Legénéral PrayutChan-Ocha, qui apris lepouvoirparuncoupd’Etat le 22mai, n’apasprécisé si cegouvernement seraitcomposédecivils oudemilitaires.«Nemedemandezpasqui ils[lesmembres dugouvernement] sont oud’où ils viennent», a-t-ilajouté. Il n’apas excludedevenirpremierministre lui-même.Depuis leputsch, l’arméea limité les libertés en interdisant lesmanifestations, arrêtantdes opposants, censurant lesmédias etmaintenant temporairementendétentiondes centainesdeper-sonnalitéspolitiques, journalistesouuniversitaires. Prayut aexcludesélections avantaumoinsunan, pourpermettredemet-treenplacedes réformespolitiques, selon luinécessairespourmettreun termeàdesannéesde troublespolitiques. p –(AFP.)

LaurentGbagboserajugépourcrimescontrel’humanitéLesviolencespostélectoralesenCôted’Ivoire,en2010-2011, avaient faitplusde3000morts

Un vaste catalogue debiens publics sur lemarché

6 0123Samedi 14 juin 2014

Page 7: Le Monde Elafonissos 14 Juin 2014

PARIS ST-BARTHÉLÉMY CANNES

RALPHLAUREN.COM/SOFTRICKY

Page 8: Le Monde Elafonissos 14 Juin 2014

france

L a politique de François Hol-lande en matière de ressour-ces humaines n’en finit pas

d’étonner.Aprèsque leprésidentaproposé, mercredi 11 juin, le nomde Jacques Toubon pour succéderà Dominique Baudis, disparu enavril, au poste de Défenseur desdroits, une vive émotion a gagnéson propre camp, où le choix decettefiguredeladroitechiraquien-ne et conservatrice a surpris. Jus-qu’à Christiane Taubira. La gardedes sceaux avait proposé plu-sieursnomsauprésident : lasocio-logue Dominique Schnapper oul’ancien député européen centris-te Jean-Louis Bourlanges. Maisl’Elysée, où l’on songeait égale-ment à deux anciensministres deNicolas Sarkozy, le sénateur cen-tristeduRhône,MichelMercier, etRoselyne Bachelot, a donc fait lechoixdeM.Toubon.

M.Hollandeaurait-ilpris lepar-ti de s’inspirer de l’ouverture à laSarkozy, qu’il dénonçait à l’épo-que avec force ? Son équipe seretranche derrière l’impartialitéprésidentielle : «Le chef de l’Etat atrouvé naturel de nommer quel-qu’unde lamêmefamillepolitiqueque Dominique Baudis. Qu’aurait-on dit si on avait nomméun socia-liste?» Il y avait cependant, peut-être, un justemilieu. Car saproprefamille a fortement renâclédevant le symbole incarné par cepilier duRPR.

En 1981, M.Toubon faisait cer-tes partie, avec Philippe Séguin etJacquesChirac, des seize députésqui avaient voté l’article premierde la loi abolissant la peine demort. Mais il s’était prononcécontre l’ensemble du texte. Gardedes sceaux, entouré d’un cabinettrèspolitisé, iln’avaitpasfaitmon-tre d’égards particuliers quant àl’indépendanceduparquet.LeSyn-

dicat de la magistrature (SM, gau-che) s’est, sans tarder, fendu d’unacerbe communiqué : «Nommerune personnalité qui s’est illustréeen votant contre la dépénalisationde l’homosexualité, en proposant,alors qu’il était ministre de la jus-tice en 1995, l’amnistie des infrac-tions commises par les comman-dos anti-IVG, ou encore (…) en fai-sant affréter un hélicoptère à larecherche du procureur d’Evry jus-que dans l’Himalaya (…), ne peutêtre sérieusement envisagé.»

Plusieurs parlementaires socia-listesde la jeunegénérationsesontémusducoupprésidentiel.L’entou-rage du président, lui, insiste sur« l’équilibre » qu’apporterait lechoix simultané d’Adeline Hazan,ancienne magistrate, ex-mairesocialiste de Reims et proche deMartine Aubry, pour le poste decontrôleurgénéral desprisons.

«Enmatière de nominations, leprésident donne une prime à lacompétence et à l’expérience »,assure l’Elysée, qui souligne le

renouvellement du « top 5 desambassades»,mercredi en conseildesministres,autraversd’unmou-vement de personnalités plutôtclassées à droite, voire franche-ment chiraquiennes. GérardAraud, ambassadeur auprès desNations unies, se voit nommé àWashington, alors que FrançoisDelattre fait le mouvementinverse. Maurice Gourdault-Mon-tagne, ancien directeur de cabinetd’Alain Juppé puis conseiller deM.Chirac à l’Elysée, est nommé à

Pékin ; Philippe Etienne, anciendirecteur de cabinet de BernardKouchner, à Berlin ; et CatherineColonna, ancienne ministre deM.Chirac, à Rome.

Maispourquoitantdediploma-tie à l’égard de la Chiraquie? «Cesont des gens compétents. Il n’y apas de dogmatisme, pas de spoilsystem. Cela correspond à unevolontéduprésidentderassemblerau-delà des clivages partisans»,assure l’Elysée. Voilà qui ne rassu-reguèresonproprecamp,enplein

doute, où l’on redoute une formede dépolitisation. « C’est laconstructiond’unmondemeilleur,soupire un conseiller ministériel.Gauche, droite, tous ensemble.»

Même agrémenté du contre-poids que représente AdelineHazan, le choixde JacquesToubonpasse mal. «C’est la méthode Hol-lande, constate un magistratconsterné. On compense une pre-mière faute politique par unedeuxième.OnnommeJacquesTou-bon et, pour faire bonne mesure,uneamiepolitique,AdelineHazan,battueau suffrageuniversel etpré-sidenteduSyndicatde lamagistra-ture de 1986 à 1989.»

Lesdeuxpropositionsprésiden-tielles sont désormais entre lesmains des commissions des loisde l’Assemblée nationale et duSénat, qui auditionneront les can-didats. Jean-Jacques Urvoas, prési-dent de la première, entend nom-mer rapidement un rapporteurissu de l’opposition et chargé dequestionner les candidats.

«Peumechautque JacquesTou-bonaitounonvoté l’abolitionde lapeine de mort en 1981, ce n’est pasun critère suffisant, défendM.Urvoas. En revanche, il a étédéputé européen, et s’il y a un lieuoù sont défendues les libertés fon-damentales, c’est bien là. Or j’igno-re tout des votes de M.Toubon auParlement européen. Le Rappor-teurnousapporteratouscesrensei-gnements.» Ceux-ci seront com-muniqués aux députés et renduspublicsavant l’auditiondeM.Tou-bon, le 2 juillet.p

DavidRevault d’Allonnes

JacquesToubona«faitvaloirsesétatsdeservice»auchefdel’Etat

FrançoisHollandeaurait-ilpris leparti

des’inspirerdel’ouvertureàlaSarkozy,qu’il

dénonçaitàl’époque?

Défenseurdesdroits: lechoixdel’ElyséepassemalLaproposition, le 11 juin,dunomdeJacquesToubonpoursuccéderàDominiqueBaudisasurpris

Jacques Toubon, à Paris, le 12 juin. FRÉDÉRIC STUCIN POUR «LE MONDE»

SANOMINATIONn’est pas encorevalidée qu’elle suscite déjà unevive controverse. Jacques Toubon,72 ans, devrait, dans les prochai-nes semaines, succéder àDomini-queBaudis auposte deDéfenseurdes droits. Contrairement à sonprédécesseur décédé le 10avril,l’ancienministre de la culture(1993-1995), ex-garde des sceaux(1995-1997) des gouvernementsd’EdouardBalladur et d’Alain Jup-pé, ne fait pas l’unanimité. Ren-duepubliquepar l’Elyséemercre-di 11 juin, cette proposition deFrançoisHollande aprovoqué stu-peur et irritation.

A gauche, plusieurs responsa-bles et parlementaires socialistesn’ontpas dissimulé leur désappro-bation. L’annonce «adumal àpas-ser» a indiqué YannGalut, député(PS) du Cher, tandis que son collè-gue, Alexis Bachelay, élu desHauts-de-Seine, a invité lesmem-

bres des commissions des loisappelés à se prononcer dans lesprochaines semaines sur cettenomination, «à rejeter cette pro-position».

Même réactiond’hostilité de lapart du Syndicat de lamagistratu-requi dénonce dansun communi-quéquelques-unes des positionsdéfendues au cours de sa carrièrepar ce prochede Jacques Chirac. Etde rappeler que cet ancien secré-taire général duRPR (1984-1988)s’est «illustré en votant contre ladépénalisationde l’homosexuali-té» en 1982 ou qu’il avait défendul’amnistie des commandos anti-IVGen 1995.

Pis, l’année suivante JacquesToubon, alorsministre de la jus-tice, avait affrété unhélicoptèrelancé à la rechercheduprocureurd’Evry, LaurentDavenas, qui effec-tuait une randonnéedans l’Hima-laya. Lemagistrat venait d’ouvrir

une information judiciaire contreXavière Tiberi et le gouverne-ment comptait bien le faire reve-nir sur sa décision afin d’empê-cher la justice d’enquêter surl’épouse de Jean Tiberi, suspectéededétournements de fondspublics.

Mandat uniqueCréée en 2008, la fonctionde

défenseur desDroits regroupe lesmissionsdumédiateur de la Répu-blique, duDéfenseur des droitsdes enfants et de laHauteAutori-té de lutte contre les discrimina-tions et pour l’égalité (Halde). Elles’exerce enununiquemandatnon renouvelable de six ans. LeDéfenseur des droits s’intéresseauxdomaines qui touchent la pro-tection sociale, il joueun rôle demédiateur dans les litiges entreles administrés et les servicespublics. Il est également chargé de

veiller au respect de la déontolo-gie des forces de l’ordre. Si sonrôle consiste surtout à alerter lesautorités, il peut aussi témoigneren faveur de justiciables devantles tribunauxou formuler desrecommandations auxpouvoirspublics.

«Défendre les droits, c’est assu-rer l’égalité des droits», estime Jac-ques Toubon, qui aurait postuléspontanément il y a unmois etdemi dans une lettre adressé auchef de l’Etat, en «faisant valoirses états de service». «Ce sont desamis proches de François Hollan-de quim’ont suggéré de le faire»,a-t-il confié auMonde. Pour l’heu-re et tant que les parlementairesn’ont pas validé le choix présiden-tiel,M.Toubon refuse de s’expri-mer sur cette nomination.

Toutefois, le conseiller d’Etathonoraire qui préside actuelle-ment la Cité nationale de l’histoi-

re de l’immigration àParis nemas-quepas sa satisfaction. A l’en croi-re, il a reçu « les félicitations de Jac-ques Chirac» avec lequel il dîne«de temps en temps» et quil’aurait appelé dès jeudi.

Adroite, il n’y a pas eude réac-tion. C’est que depuisune quinzai-ned’années, l’anciendéputé RPRdeParis, n’occupeplus de respon-sabilité de premier plan. Son der-niermandat électoral de députéeuropéen, a pris fin en 2009. Com-me il le confie lui-même, «depuisque j’ai quitté le Parlement euro-péen, je suis devenuune sorte d’ex-pert d’expérience». A l’UMP, il siè-ge à la commission de la hauteautorité – instance duparti char-géede veiller aubon déroulementdes élections internes – aux côtésd’autres anciensministres dedroi-te, fonctiondont il démissionneradès l’annonce de sa nomination.p

Yves Bordenave

8 0123Samedi 14 juin 2014

Page 9: Le Monde Elafonissos 14 Juin 2014

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E n difficulté depuis sa défaiteaux municipales, AdelineHazann’aurapasséquepeude

temps au purgatoire. François Hol-lande a proposé le nom de l’ancien-ne maire socialiste devenueconseillère municipale de Reims(Marne) pour succéder à Jean-MarieDelarueaupostedecontrôleurgéné-ral des lieux de privation de liberté.«C’est un poste passionnant et cetteproposition m’honore, assure-t-elleauMonde.Celacorrespondàmespré-occupationssur lesdroits fondamen-taux, les droits individuels et à monexpérience personnelle.» MmeHazandoit désormais obtenir l’aval descommissions des lois des deuxassemblées.

Lamajoritésocialiste,quisaluelescompétencesdecettefidèledeMarti-neAubry, devrait entériner sansmallanomination.«C’estunchoixformi-dable, elle fera parfaitement le job»,assure le député PS Christophe Bor-gel. Mais Mme Hazan va devoir trou-ver ses marques dans ce fauteuilinconfortable, modelé depuis 2008parM.Delarue, soncharismatiqueetuniqueprédécesseur.

Elle ne correspond pas à son por-trait-robot. A la différence de celui-ci, énarque et conseiller d’Etat, elleest une magistrate chevronnée, quiacommencésacarrièreen1980com-me juge d’application des peines àChâlons-en-Champagne. Qualitéqui cesse d’en être une dans lemilieu pénitentiaire, où les jugessont peu appréciés. Deuxième diffi-culté :sonengagementpolitique.De1986à 1989,MmeHazandirige leSyn-dicat de la magistrature (gauche).Unecapeanciennequidevraitnéan-moins lui valoir, près de trente ansplus tard, l’inimitié du syndicat

ennemi, l’Union syndicale de lamagistrature (majoritaire). En 1995,AdelineHazanestdevenuespécialis-tedesquestionsdesociétéetd’immi-gration au secrétariat national duPS– elle est aujourd’hui chargée desdroits des femmes et de la parité –,avant d’entrer auministère de l’em-ploiaucabinetdecellequideviendrasagrandeamie,MartineAubry.

Elleestélueen1999députéeeuro-péenne, reconduite en 2004. Dans lemêmetemps,elletenteavecténacitéde s’implanter à Reims. Elle échoueauxlégislativesde1997etauxmuni-cipales de 2001, mais finit en 2008par s’emparer de la mairie. Ce par-cours sert aujourd’hui d’argument à

la droite. «J’émets des réserves sur lecaractère politique, pour ne pas diremilitant, de cette nomination», criti-queainsi Jean-FrédéricPoisson, vice-présidentUMPdelacommissiondeslois de l’Assembléenationale.

«Impartial et indépendant»AdelineHazan, qui va démission-

ner de ses mandats, balaie ces dou-tes : «Ce ne sera pas un problème. Jesuis de gauche, certes, mais il n’y arien d’indécent à avoir été maire etdéputée européenne. Le contrôleurdes prisons est impartial et indépen-dant du pouvoir politique. J’entendspréservercela.»L’indépendancedelafonctionserasongranddéfi. Pas tant

par rapport au pouvoir que vis-à-visde l’envahissant Défenseur desdroits, qui a failli absorber le contrô-leur des prisons. La carrure deM.Delarue l’avait jusqu’à présentempêché, il avait même profité desonaura pour élargir enmai ses pré-rogatives. Mais un changement demajorité pourrait relancer le débaten 2017. Adeline Hazan a trois anspour se rendre indispensable.p

Nicolas Chapuis

AdelineHazan, le 30mars, à Reims. MARLENE AWAAD/IP3 POUR «LE MONDE»

AdelineHazan,futurecontrôleusedesprisonsdéjàsoussurveillanceFrançoisHollandeachoisi l’ex-mairesocialistedeReimspoursuccéderà Jean-MarieDelarue F ootball et politique font par-

fois bonménage. C’est leconstat qui a poussé, en ces

jours d’ouverture de la Coupedumonde, FrançoisHollande àrecruterNathalie Iannetta,42ans, journaliste à Canal+depuis près de vingt ans. A char-gepour cette spécialiste dubal-lon rond, qui sera nomméedansles prochains jours à l’Elyséeconseillère jeunesse et sports enremplacementde l’ancien judokaThierry Rey, qui rejoindra pour sapart l’inspectiongénérale de lajeunesse et des sports, d’apporterunpeudepercussion à l’équipeprésidentielle.

Cela ne s’invente pas:MmeIan-netta a rencontré FrançoisHollan-de… le 20avril 2002, à la veille del’éliminationde Lionel Jospin aupremier tour de la présidentielle.C’était auparcAndré-Citroën,lors d’unemanifestationde sou-tien à Pierre Lescure, tout justedébarquéde la présidencedeCanal+. La discussion, bien sûr,avait tourné autour du foot.Entre le supporteur de l’ASMonaco et l’inconditionnelle dela Juventus de Turin, le courantpasse. D’autant que le présidentet la journaliste ont, outre leuramourdu football, unpoint com-mun: ils nepratiquent jamais lemoindre sport. «Çaarrive àdesgens très bien. C’estmon côtéChurchill», assure auMondeMme Iannetta.

C’est, plus récemment, lors dediscussions sur la préparationdel’Euro 2016, que germe l’idéed’une collaboration. «Il sait quec’est un vecteur très importantd’unpoint de vue politique, écono-

mique et social, un rendez-vouspour lamodernisation dupays»,explique-t-elle. Le présidentmisedéjà sur l’impact de cette compéti-tionpour réveiller unpays dépri-mé. Et, peut-être, pour tenter deredresser sa cote de popularité,dont nul ne sait à quel niveau ellese situera alors, à quelquesmoisde la présidentielle.

Langue de boisNovice en politique,Mme Ian-

netta n’a jamais été nimilitanteni élue, «à part déléguée de clas-se»,mais assure avoir voté pourle candidatHollande à la primai-re PS en 2011. Au sujet de sonnou-veaupatron, elle présente l’avan-tage depouvoir déjàmanier lalanguede bois avec le brio d’unfootballeur professionnel : «Il estsolide en défense, organise biensonmilieu et aime le beau jeu»,récite-t-elle. Des «éléments de lan-gage» qui détonnent avec ceuxutiliséshabituellement dans lestaff deM.Hollande.

Sonentréesur le terrainély-séen,dans le cadred’un remanie-mentplus largede l’équipeprési-dentielle, correspondaussi à lavolontédemettre enavantunstaff rajeuni, féminisé etquelquepeu«désénarquisé».Quantaumoment, politiquementdélicat,Mme Ianetta s’en tire ànouveauparunemétaphore footballistique:«Justement.Quandvousprenez3-0à l’aller àdomicile, il faut toutdonnerà l’extérieur pour le retour.Là, il y adenouveaux titulaires. Etonn’en estqu’à lami-temps.»Onattendradonc, pour juger, le coupdesifflet final.p

D. R. A.

Jean-MarieDelarue:«Cequejen’excusepas,c’estlarésignationdespouvoirspublics»

QuandFrançoisHollandefaitsonmercatoàCanal+

Entretien

Jean-MarieDelarue, 69ans, a ache-vé, vendredi 13 juin, sonmandatde six ans de contrôleur généraldes lieuxdeprivationde liberté. Ila, avec ses 35 contrôleurs – 27 équi-valents temps plein – visité toutesles prisons françaises, tous les cen-tres éducatifs fermés, tous les cen-tres de rétention, des dizaines delocauxde garde à vue et d’hôpi-tauxpsychiatriques. Il est le seul,en France, à avoir jamais fait untel travail de terrain, et agacé nom-bredeministres,mais dans le res-pect et l’estime générale. Queva-t-il devenir? Il n’en sait «stricte-ment rien» et reste disponiblepour la République, «mais si onnemepropose rien, commediraitle général Alcazar, je n’en ferai pasune jaunisse», plaisante leconseiller d’Etat.Quel bilan faites-vous de ces sixannées?

C’est auxpersonnes privées deliberté et auxpersonnels de le fai-re.Moi, j’ai fait ce que j’ai pu, avecdes collaborateurs formidables.Est-ce que ça a servi à quelque cho-se? Cen’est pas àmoi de le dire. Ils’agissait d’abord d’êtreuntémoinde ces lieux obscurs, deces lieuxque personneneconnaît, un témoinqui puissedire, «non ce n’est pas la prisonquatre étoiles», et les commissa-riats, quandon ypasse unenuit,on en ressort traumatisé. Untémoinqui puisse dire : «Les per-sonnels, dans beaucoupd’en-droits, ont une vie de chien.»

Est-ceque cetobjectif a étéatteint? En tout cas, surun site quis’appelle cglpl.fr, il y a 10000pagesdevisitesd’établissements àladispositionde tous les citoyens.J’avaisdemandéàmescontrôleursd’êtredes«quasi-ethnologues», de

témoignerde la façon laplusneu-trepossiblede cequ’ils voyaient.

Mondeuxièmeobjectif, c’étaitd’être pédagogue.Montrer que laprisonn’est pas forcément cequ’on a en tête. J’ai essayé de pen-ser la privation de liberté, demon-trer le décrochage entre l’évolu-tion de la délinquance et le nom-brede personnes détenues, parcequ’il n’y a quedes liens indirectsentre ces deuxnotions.

Le troisièmeobjectif, imposépar la loi, était de constituer uneinstancede recourspour lesper-sonnesprivéesde liberté. Ellessont au fonddu trou, leurparoleest totalementdévalorisée.Nousrépondons systématiquement àtous les courriers, près de4200par an, endes termes assezneufspouruneadministration.Onaessayéde régler les difficultés, etde redonner auxpersonnes déte-nuesouauxmaladesmentauxunedignité, enprenantau sérieuxcequ’ellesnous disent. Cene sontpasdes lettres indifférentes, ceuxquinousécrivent engagent leurvie. La seule réserveque je fais,c’est la craintede représailles de lapartde l’administration, qui resteun frein considérablepour lesgensquinous écrivent.Et vos relations avec les adminis-trations?

Maquatrièmepréoccupation,c’était en effet de suggérer cer-tains facteurs d’évolution. Le suc-cès est inégal. Nous avons euuncertain écho: je pense enparticu-lier auxdirecteurs d’établisse-ments hospitaliers ou pénitentiai-res qui sont, pour la plupart, desgens formidables.

Avec les pouvoirs publics, c’estnettementplus compliqué. Leministère de l’intérieurnous asouvent fait des réponses languedebois – il n’est pire sourd que

celui qui ne veut pas entendre. Jevoudrais dire à l’administrationqu’onpeutméconnaître la réalité,mais pas trop longtemps.

Je suis prêt à excuser lemau-vais état d’un établissement, lasurcharge des personnels, les ges-tes d’énervement.Mais ce que jen’excusepas, c’est la résignationdespouvoirs publics, leur désir dene rien faire, voire de dissimuler.Nousn’avons pas été assez bonspour contraindre l’administra-tion à affronter la réalité.Votre arme ultime n’est que lapublication d’un avis au «Jour-nal officiel»…

Je n’ai qu’unpouvoir de recom-mandation. Je n’ai jamais souhai-té avoir un pouvoir d’injonction.J’ai demandéqu’on autorise lestéléphones portables enprison: sij’enjoignais l’administration de lefaire, soit elle s’emploierait à sabo-ter cenouveau droit, soit elle ne leferait pas et je serais ridicule. Jepréfère convaincre l’administra-tion que c’est sonpropre intérêtpour apaiser une détentionpassa-blement agitée.

Il est vrai qu’en face, il y a undésir de ne pas compromettre descultures professionnelles, de nepasheurter de plein fouet desorganisations syndicales.Mais jem’attendais à beaucoupplus derésistance: la plupart des gensnousont ouvert la porte en touteliberté, il faut leur en savoir gré. Ily a des résistances qui sont trèsclaires,mais il y a des élans formi-dables. J’ai essayé d’aller unpeuplus loin. Le 26mai, une loi a amé-lioré nos prérogatives. Je terminemonmandat avec desmoyensaccrus, pour quemon successeurpuisse trouver l’appartement ran-gé en arrivant.p

Propos recueillispar Franck Johannès

Page 10: Le Monde Elafonissos 14 Juin 2014

Auministère de l’éducationnationale, le 24avril. MARLENE AWAAD/IP3 POUR «LE MONDE»

R ue de Grenelle, chaque jourapporte son lot de turbulen-ces. Benoît Hamon est-il

dépassé par les événements? Lun-di 9 juin, le président du Conseilsupérieur des programmes (CSP),Alain Boissinot, remet sa démis-sion, laissant le chantier des pro-grammesde lamaternelle aucollè-ge, l’enseignementdelamorale laï-que et d’autres pans majeurs de larefondationde l’école.

Mardi, la guerre républicains-pédagogues – un vieux débat quitraverse l’école – repartdeplusbel-leavec lapublicationdusoclecom-mun. La définition de ce que toutjeune doit savoir à 16 ans réveillel’opposition entre partisans d’uncollège proche du lycée et défen-seurs d’une super-école primaire.Bien malin qui dira de quel côtépenche le ministre de l’éducation,BenoîtHamon,qui«subitcesévéne-ments sans les dominer», expliqueunhaut fonctionnaire.

Jeudi, ça continue:M.Hamonseconcentresur les rythmesscolaires– son pensum –, pour annoncerque seules 5,9% des municipalitéssouhaitent mettre en œuvre uneversion assouplie de la réforme. Lemêmejour,laManifpourtousorga-nise sa soirée de «décryptage» desABCD de l’égalité. Le silence duministre sur ce sujet et l’attente durapport d’évaluation laissent lavoielibreauxopposantsàuneédu-cation à l’égalité filles-garçons.C’est déjà cette «peur des vagues»,selon unmembre de l’administra-tion, qui avait conduitM.Hamonàrepousser larentréed’un jourpouréviteruneprérentrée finaoût.

Depuis son arrivée Rue de Gre-nelle, M.Hamon cherche ses mar-ques et pare au plus pressé sansdonner un cap. Le départ du prési-dent du CSP est aussi problémati-que pour le ministre que celui dudirecteurdel’enseignementscolai-

re, Jean-Paul Delahaye, le 30avril,pour s’éviter de présenter le décretHamon sur les rythmes. Trop éloi-gnédelaréformeinitialepourqu’ilpuisse l’endosser. Ces démissions,leministrene les apasvuesvenir.

A quand un Benoît Hamon encostume de ministre et non endémineur de dossiers? La réponseva d’autant moins de soi que lesdéboires deM.Hamon ne sont pasqued’ordreministériel.

En faisant le choix d’intégrer legouvernement deManuel Valls aulendemaindeladéfaitedesmunici-

pales, il s’est aliéné une partie deses soutiens au PS, y compris auseindesonproprecourantUnmon-de d’avance, classé à l’aile gauche.La plupart de sesmembres étaientopposés à l’entrée de M.Hamondansl’équipeValls,jugéetropsocia-le-libérale. Mais passer d’un postemineur de ministre délégué à laconsommation et à l’économiesociale et solidaire dans l’anciengouvernement Ayrault à celui deministre de l’éducation, de l’ensei-gnement supérieur et de la recher-che, numéro quatre dans l’ordre

protocolaire, était une promotiontropbellepour la refuser.

Qu’importe qu’Henri Emma-nuelli, cofondateur d’Un monded’avance avec lui en 2008, lui enveuille particulièrement. «Henriest furieux contre Benoît, il estimequ’il s’est vendu et qu’il a eu uneréaction de gosse qui veut son jou-jouministériel», confie un prochedudéputé des Landes.

Censé incarner une caution degauche dans le gouvernement,M.Hamonestconfrontéàundivor-ce avec ses ex-camarades de cou-

rant.«Ilnetientplusses troupesquilui reprochent d’avoir capitulé»,analyse un responsable socialiste.Des députés issus d’Un monded’avance se sont abstenus lors duvote finavril dupacte de responsa-bilité.Et tousontsigné«l’appeldes100», qui réclame une réorienta-tionéconomique et sociale.

«Nous voulons changer lapoliti-que du gouvernement, alors queBenoît, enacceptantd’êtreministredeValls,validecettepolitique»,esti-meledéputé(PS,Paris)PascalCher-kiquirésumed’uneformuleladéri-

ve des continents: «Benoît est tou-jours membre de notre courant,mais nous ne sommes plus le cou-rantduministreHamon.»

L’intéressé assume parfaite-ment le «gentlemen agreement»qu’il a passé avecM.Valls. «Je n’aiaucunproblèmeàmettre lesmainsdans le cambouis, je travaille pourque le gouvernement réussisse et jene vais pas m’inventer des querel-les avec le premierministre pour leplaisir de mes amis », expliqueM.Hamon auMonde. Il y a encore

quelques mois, l’ancien porte-parole du PS critiquait pourtant lapolitiquede l’offre,désormais ilnedit mot contre la baisse de 41mil-liards d’euros d’impôts et de char-ges pour les entreprises prévuedans le pacte de responsabilité.«La politique économique a ététranchée, les Français veulent desrésultats», répond-il simplement.

M.Hamon souligne que le pland’économies de 50milliards d’eu-ros «épargne l’éducation».Maissescamaradesdecourant–avecles-quels il a déjeuné après les euro-péennes – pensent qu’il ne pourrapas «rester indéfiniment dans sabulle», selon ledéputé (PS, Françaisde l’étranger) Pouria Amirshahi. Leministre semble avoir fait le pariinverse : ne pas sortir du rang etmettre pour l’instant en sommeiltout destin personnel. Comme il ledit, «si à la fin, on se plante, ce seraun échec collectif. Il n’y aura pas desalut personnel possible, je serai undindoncomme lesautres».p

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LaVille deParis, où lamise enœuvredesnouveaux rythmesscolaires avait suscité une fortecontestationen2013, a annoncé,jeudi 12juin, quatre«axes d’amé-lioration»à l’occasiond’un«comitéde suivi de la réforme».Il s’agit de renforcer la coordina-tionentre enseignants, anima-teurs et associations, d’amélio-rer les formations,mais surtout

de revoir les rythmes à l’écolematernelle, point noir de la réfor-me.Un audit confié au cabinetindépendant ICCaconclu,concernant l’impact de la réfor-mesur les enfants enmaternelle,que les déplacements sont par-fois«complexes»dans des«locaux inadaptés» etque lesanimateursne sont pas toujoursassez«spécialisés».

Poursescamaradesdecourant,M.Hamon

nepourrapas«resterdanssabulle»

«Lesmairesrefusantlaréformepeuventêtresuspendus»Questionsà…ValériePiau, avocateendroitde l’éducation

Les«anti-gender»fontmonterlapressioncontrelesABCD

Paris va «aménager» les rythmes enmaternelle

BenoîtHamon,unministreentredeuxcostumesLeministrede l’éducationtardeàs’affirmersursesdossiers, aprèss’êtrecoupédesessoutiensde l’ailegaucheduPSenralliantManuelValls

SelonChristian Schoettl, maireNouveauCentre de Janvry(Essonne), près de4000 com-munes ont délibéré en conseilmunicipal contre une applica-tion de la réforme des rythmesscolaires en 2014. Tiendront-elles le cap jusqu’à la rentrée?

YLesmédias ontinsisté, ces derniè-res semaines, sur

unvent d’opposition qui souffledans différentes régions... En réali-té, c’est un coupdepoker qui esten train de se jouer. Desmairesont délibéré en conseilmunicipaloupris un arrêté pour rejeter ledécret du 24 janvier 2013.Maiss’ils considèrent que ce texte est«anticonstitutionnel », la logiquevoudrait qu’ils saisissent leConseil d’Etat : c’est à cette instan-ce, et à elle seule, d’apprécier la

légalité du «décret Peillon ». Pourl’heure, c’est plutôt commes’ilscherchaient à faire pressionpourobtenir unmoratoire.Des requêtes ont bien été dépo-sées auConseil d’Etat...

LeConseil d’Etat a reçu, àmaconnaissance, quatre requêtes surle fondpour annuler le décret.Pourdeuxd’entre elles, émanantd’une associationdeparents d’élè-ves et du syndicat SUD-Education,examinées le 11 juin, le rapporteurpublic a préconisé de rejeter lesmotifs invoqués. La décision estattendue. Les deux autres requê-tes, déposées par des élus, sont encours d’instruction. Dans l’hypo-thèse où les demandeurs obtien-draient gain de cause et que leConseil d’Etat déclarerait illégal ledécret, lesmaires n’auraient plusà appliquer la réforme.

BenoîtHamonamis engarde, le12 juin sur France Info, lesmairesquene pas appliquer la réformeen septembre leur vaudraitd’être«condamnés».Quels ris-ques encourent les élus?

Les sanctions sont de quatreordres. Lemaire et ses adjointspeuvent être suspendus par arrê-téministérielmotivé pour unedurée qui n’excède pas unmois.Ce fut le cas deNoëlMamère,mai-re EELVdeBègles (Gironde), en2004pour avoirmarié un couplehomosexuel alors que la loi n’exis-tait pas. Son objectif n’était pas siéloignéde la publicité recherchéeaujourd’hui par lesmaires hosti-les à la réformedes rythmes.

Deuxième sanction: la révoca-tionpar décret pris en conseil desministres. Prendre desmesuresdestinées à faire échec à l’exécu-

tion de la loi pour une personnedépositaire de l’autorité publiqueest aussi passible de sanctionspénales, pouvant aller jusqu’àcinq ans d’emprisonnement –et75000euros d’amende. Enfin,une jurisprudence accorde auxparents d’élèves une indemnisa-tion de l’Etat pourmanquement–si, par exemple, des enseignantsabsentsne sont pas remplacés.Dans le cas des rythmes scolaires,les parents d’élèves pourraientaussi intenter une action indemni-taire si l’école restait fermée lemercredi, pour le préjudice résul-tant de l’atteinte à la scolarité desenfants.p

Propos recueillisparMatteaBattaglia

f Sur Lemonde.frLire l’intégralité de l’entretien

ALORSQUE leministre de l’éduca-tion, BenoîtHamon, n’a pourl’heure rendu aucun arbitrage ausujet des ABCDde l’égalité, lecampdes «antis» occupe le ter-rain. Cette fois, ni dans la rue nidevant les écoles,mais dans la sal-le de conférences d’unhôtel pari-sien. Jeudi 12 juin, laManif pourtous et le collectif de parentsVigi-Gender ont organisé une «soiréedécryptage»des ABCD – ce pro-grammeexpérimenté auprimai-re et destiné à lutter contre les sté-réotypes sexués.

A trois semaines de la fin desclasses, les détracteurs de cet outilpédagogique, accuséd’être le vec-teur d’une supposée «théorie dugenre», entendent peser sur ladécision duministre de poursui-vre ounon le dispositif. Officielle-ment,M.Hamon attend les résul-tats d’une évaluation. Il s’agit sur-

tout de trouver une issue dans cedossierminépar un andepolémi-ques. «Plusieurs déclarations lais-sent entendre que les ABCD serontreconduits, et cela nous inquiète»,a déclaré Ludovine de LaRochère,la présidente de laManif pourtous, en introductionde la soirée.

«Le sujet est grave»Dans la salle, les quelque 200

auditeurs semblent d’embléeconquis. Ils sont pour beaucoupbénévoles, adhérents oudona-teurs de laManif pour tous, et ontdéfilé ensemble, en 2013, contre lemariagehomosexuel. Sur la scè-ne, cinq «experts» – deuxphiloso-phes, une juriste, unpédopsychia-tre et une sexologue. Aucun ensei-gnant duprimaire. L’éducationnationale n’est invitée à la soiréequepar le biais d’ungrand écran,sur lequel sont diffusés des entre-

tiens avec des «théoriciens desABCD»provoquant tantôt la stu-peur, tantôt des rires.

Tour à tour, les intervenantsont étalé leurs arguments «anti-ABCD». Le philosophe ThibaudCollin est venumettre en douteune «vision asexuée de l’êtrehumain», tandis que le pédopsy-chiatre Christian Flavigny adénoncéunprogramme «perni-cieux»qui «brouille lamatura-tiondes enfants». Dansun autreregistre, la juristeAnne-Marie LePourhiet a questionné le droitd’ungouvernement, «dans unedémocratie libérale, demener untel formatage des enfants».

«Le sujet est grave», a avertiEsther Pivet, coordinatrice desVigiGender, dont le collectif, quiserait présent dans «environ lamoitié des départements», s’estdonnépourmission d’«informer

sur lamanière dont l’indifférencia-tion sexuelle est diffusée à l’école».

Ces «anti-gender»ne sont pasles seuls à se faire entendre. Le12juin, Frigide Barjot, ancienneégérie de laManif pour tous,désormais présidente du collectifL’Avenir pour tous, a sollicité unrendez-vousauministèrede l’édu-cation.

Et alors qu’il ne faisait plus par-ler de lui depuis avril, lemouve-ment des Journées de retrait del’école – lancé par Farida Belghoul,prochedemouvances d’extrêmedroite –, annonce vouloir se struc-turer en fédération de parentsd’élèves. Elle s’appellerait «fédéra-tionautonomede parents d’élèvescourageux» et viserait notam-ment à «résister» à «l’idéologiedugenre à l’école». La pression estmontée d’un cran.p

Aurélie Collas

10 0123Samedi 14 juin 2014

Page 11: Le Monde Elafonissos 14 Juin 2014

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AffairedeKarachi:sixrenvoisencorrectionnelleLes juges RenaudVanRuymbeke et Roger Le Loire ont signé, jeu-di 12 juin, l’ordonnance renvoyant devant le tribunal correction-nel les principauxprotagonistes duvolet financier de l’affaireKarachi. Six personnes comparaîtront – principalement pour«abus de biens sociaux, complicité et recel» : les deuxhommesd’affaires Ziad Takieddine et Abdul RahmanEl-Assir, l’ancienconseiller auministère dubudget deNicolas Sarkozy ThierryGaubert, le directeur du cabinet d’EdouardBalladur àMatignonNicolas Bazire, l’ex-conseiller de François Léotard à la défenseRenaudDonnedieudeVabres, et enfin l’ancien PDGde la bran-che internationale de la direction des constructions navales(DCN-I) DominiqueCastellan. Les juges ont enquêté près de qua-tre ans sur les dessous de contrats d’armement passés dans lesannées 1990 et dont la véritable finalité aurait été un finance-ment politique occulte.p Fabrice Lhomme etGérardDavet

Alcoolisme Lebaclofène sera rembourséUnarrêté instituant le remboursement dubaclofènepour traiterla dépendance à l’alcool est paru au Journal officiel vendredi13juin, a annoncé leministère de la santé. Sa prescription estautorisée depuis le 14mars pour traiter l’alcoolismedans lecadre d’une recommandation d’utilisation temporaire. (–AFP.)

637 748C’est, en euros, lemontant de la réévaluationdes recettes de l’im-pôt de solidarité sur la fortune prévues en 2014. Elles devraientatteindre 5,3milliards d’euros grâce, notamment, aux régularisa-tionsd’avoirs nondéclarés et à la flambée de la Bourse.

S limane Bousanna espéraitquel’établissementqu’ildiri-geserait leprochainsur la lis-

te clairseméedes collèges et lycéesmusulmanssouscontratd’associa-tionavecl’Etat.L’Institutdeforma-tiondeSaint-Quentin-en-Yvelines(IFSQY) devra attendre. Le rectoratde Versailles a refusé au seul éta-blissement musulman de la plusgrande académie de France derejoindrelepetitmondedu«privésous contrat », laissant ensei-gnants et parents «sous le choc».Et, au-delà de son «énorme décep-tion», M.Bousanna met en gardeles pouvoirs publics contre le ris-quedevoir l’enseignementmusul-manéchapper à tout contrôle.

«Nous avons reçu la lettre derefus, en avril, le jour même oùnotre député, Benoît Hamon, estdevenuministredel’éducation,s’ef-force de plaisanter le responsabledu collège. Le recteur nous y assu-rait que, “faute de moyens”, notredemande était rejetée.» Le contratd’associationprévoit,notamment,le paiement des salaires des ensei-gnants par l’Etat. Sollicités à plu-sieurs reprises, le rectorat et leministère n’ont pas donné suite ànos demandes. «Un recours admi-nistratif ayant été déposé [finmai]parlecollège, l’affaireestencours»,nousa-t-on simplement indiqué.

Lancé timidement à la rentrée2009 avec deux classes de 6e et 5e

comptant14et 15élèves, l’établisse-ment installé dans un ancien bâti-ment des impôts, à Montigny-le-Bretonneux, accueille 100 élèvesdetouslesniveauxducollège,enca-drés par quinze enseignants àtemps partiel. Elèves et enseignan-tespeuventyporter levoile islami-que et suivent le programme del’éducation nationale, augmentéd’enseignementreligieux.L’établis-sement conserve, comme ailleursdans l’enseignement confession-nel, son«caractèrepropre».

Cette implantation s’inscritdans le développement de l’ensei-gnement privé musulman: quel-

que trente projets sont plus oumoins avancés en France. Unevingtaine d’établissements privésmusulmans scolarisent 2000 élè-ves. Dans l’enseignement catholi-que, 9 000 établissementsaccueillent2millionsd’élèves, tan-

dis que pour la communauté jui-ve, 280 écoles, collèges et lycéesscolarisent environ 30000élèves.

Sur lepapier, l’IFSQYest l’undesrares collèges musulmans à affi-cher cinqannées d’existence, prin-cipale condition pour obtenir lecontrat d’association avec l’Etat etrejoindre ainsi les lycées AverroèsdeLilleetAlKindideDécines (Rhô-ne). «Les inspecteurs qui ont visitéle collège en janvier ont donné unavis favorable. Ils ont inspecté lesouvrages, les cahiers, lesemploisdutemps, les contrôles de connaissan-ce, les locaux, et la commission deconcertation s’est prononcée favo-rablement», assure M.Bousanna,quipréciseentretenir«detrèsbonsrapports avec le rectorat» depuis2009. Rienne leur aurait été dit depossibles insuffisances pédagogi-quesouéthiques.

Pour autant, l’argument finan-cier ne tient pas, selonM.Bousan-na. «Pour l’an prochain, le rectoratdisposait pour les nouveauxcontrats de 2 642 heures de crédits,ce qui correspond à 146,76 tempspleins. Notre demande représente8,31 temps pleins, soit 5,7% de cevolume. Quant aux crédits consa-crés au “forfait d’externat”[contribution des collectivitéslocales], ils sontde44millionsd’eu-ros. Notre demande correspond àune subvention de moins de

100000 euros, soit 0,22%.» Dansl’académie, 133 000 élèves de328 établissements privés bénéfi-cient déjà de subventions de l’Etatet des collectivités. Faute de finan-cementpublic, lesfamillesde l’IFS-QY déboursent 3 500 euros par anet par enfant.

Ladécisionrectorale laisse«per-plexe»M.Bousanna. Et, s’il se refu-seàcrieraucomplotouaux«mau-vaises intentions», il dénonce une« iniquité ». Dans la lettre qu’il aadressée à M.Hamon, le 26mai, ilprévient:«Lesentimentdediscrimi-nationque ressent parfois légitime-ment la communauté musulmanene doit pas trouver de terreau dansles décisions des pouvoirs publics»,allusionàl’octroiducontratd’asso-ciation à des classes d’établisse-ments catholiques voisins, «déjàlargementpourvus enmoyens».

«La plupart des établissementsmusulmans veulent être associés àl’Etat»,ditM.Bousanna.«Nousvou-

lons un contrôle sur nos ensei-gnants, nos cours. Si on nous refusele contrat, d’autresmodèles vont semettreenplace,desécolescomplète-ment fermées, et l’Etat en verra lesconséquences dans quelquesannées», lance-t-il, en référenceaux établissements hors contrat,oùlesenseignementssontdavanta-ge alignés sur les convictions reli-gieusesque sur le programmeoffi-ciel.«Sionleurfermelesportesde laRépublique, on prend le risque demettre des établissements au bande la République. Sans finance-ment, il est impossibledetenir long-temps lesprogrammes.»

Enmars,uneFédérationnationa-le de l’enseignement musulman aété créée pour aider ces établisse-mentsàobtenirlecontratd’associa-tion avec l’Etat. Le responsable del’IFSQY attend, lui, la décision de lacommission de recours. Aucunedatene lui aété communiquée.p

Stéphanie Le Bars

A9h20, larapporteuregénéralefrappeàBercy

Dansl’académie,133 000élèvesde328établissementsprivésbénéficientdesubventions,maisaucunmusulman

Uncollègemusulman«souslechoc»aprèslerefusdel’EtatdeleprendresouscontratLerectoratdeVersailles invoquedesraisons financièrespour justifier sadécision

M ercredi 11 juin, en com-missiondes finances, larapporteure générale

(PS) du budget, Valérie Rabault,avait interpellé le secrétaired’Etat chargé dubudget, Chris-tian Eckert. La députée souhaitaitque leministère transmette à lacommission les données précisessur lesménages concernés par lesmesuresprévues dans le projetde loi de finances rectificative(PLFR) et sur les contribuablesaffectés par les diversesmesuresfiscales sur les revenus de 2013.

En clair, que les simulationsréaliséespar Bercy sur le systèmeMésange (Modèle économétriquede simulation etd’analyse généra-le de l’économie) soientmises àla dispositiondesparlementai-res. Réponse emberlificotée dusecrétaire d’Etat : «Même si,aujourd’hui, on a de grands ordi-nateurs, tout ça a ses limites. On aquelques éléments, j’essaierai devous répondre de la façon la plusprécise. Ce n’est pas de la réten-tiond’informations.»

MmeRabault ne s’est pas satis-faite de cette non-réponse. Jeudi,à 9h20, elle s’est présentée à l’ac-cueil de Bercy.Usant des pou-voirs que lui confère l’article57de la loi organique relative auxlois de finances, la rapporteure,organigrammeduministère enmain et accompagnée d’un admi-nistrateurde la commission, ademandé à être conduite vers lesbureaux susceptibles de détenirles informations souhaitées. Par

courtoisie, elle avait prévenu leministre de son arrivée unquartd’heure avant.

Ladémarche est inhabituelle.JérômeCahuzac, lorsqu’il occu-pait les fonctionsde rapporteurgénéral, avait usé de ces prérogati-vesmais pour vérifier…des dos-siers fiscaux. Le seul précédentremonte à 1999, lorsqueDidierMigaud, rapporteur général de lacommissiondes finances de l’As-semblée, avait voulu se faire com-muniquer parBercy des docu-ments aumoment de l’affaire dela «cagnotte». Leministre, alors,s’appelait Laurent Fabius.

MaturitéAutantdire que, pour l’admi-

nistrationdeBercy, la surprise aété de taille. Prévenuepar ses ser-vices, la directrice adjointe duTré-sor, SandrineDuchêne, a rappli-quédare-dare. Les deux femmesse connaissent bien, elles ont tra-vaillé ensemble sur le program-meéconomique du candidatHol-lande. «Nous avons eu une discus-sionpassionnante», indique ladéputée, qui est repartie avec lesélémentsd’information qu’ellesouhaitait. Il ne lui reste plusqu’à les éplucher avant l’examenen commission,mercredi18, duPLFR. «Pourquoi les parlementai-res ne disposeraient-ils pas desdonnées de l’administration?,insiste la rapporteure générale.C’est une question dematurité dela démocratie.»p

PatrickRoger

110123Samedi 14 juin 2014

Page 12: Le Monde Elafonissos 14 Juin 2014

Béziers (Hérault)Envoyé spécial

Q u’ya-t-ildechangédanslaviedes Biterrois depuis qu’ilsont élu Robert Ménard? Le

chômage bat toujours des records,le centre-ville se meurt toujoursautant.Même le lingependencoreaux fenêtres, en dépit de l’arrêtémunicipal du nouveau maire éluavec le soutien du Front nationaldont toute lapresseaparlé.Malgrécela, Jackie (qui n’a accepté dedon-ner que sonprénom), venue profi-ter de la douceur de cette find’après-mididejuinavecsescama-rades retraités sur les allées Paul-Riquet, est formelle : «C’est pluspropre,etmaintenant jepeuxvenirici l’esprit tranquille.»

Unevoiture depolice est postéeen permanence sur les «allées», etles SDF qui squattaient avec leurschiens les marches du théâtre ontété délogés. D’ici quelques mois,lespoliciersmunicipauxdevraientrecevoir les renforts de dix agentssupplémentaires, travailler toutela nuit, puis être armés. «Mais sinous sommes plus ici, c’est quenoussommesmoinsdanslesautresquartiers», ne cachent pas deuxagents enpatrouille.

Qu’importe. L’essentiel est dedonner l’impression que le centre-ville, qui s’est paupérisé etghettoïsécesdernièresannéesavec

l’arrivéedepopulationsimmigréesdans des logements dégradés, estde nouveau fréquentable. Si l’on yajoute la baisse de 4% des impôtslocaux, payés ici par moins de lamoitié des habitants, l’on com-prendpourquoiM.Ménardbénéfi-cie, deux mois après son élection,d’unvéritable étatdegrâce.

L’ancien président de Reporterssans frontières jubile :«Je crois queles Biterrois sont contents.On n’ajamais autant parlé de Béziersqu’en ce moment. Malgré votreidéologiedominante, vousavezdescôtés positifs : au moins les genssavent que Béziers existe», lâcheceluiqui,presquechaquesemaine,annonceunenouvellemesurecise-lée pour faire le «buzz»: interdic-tion auxmoins de 13 ans de resterseuls dans les rues après 23heures,interdictiondesparabolesetdulin-geauxfenêtresdanslecentrehisto-rique,propositiond’offrirdesblou-ses auxécoliers…

Mais, en parallèle, M.Ménardcoupe dans les dépenses.400000 euros destinés à financerla réforme des rythmes scolairesontétésupprimés,lebudgetducen-tre d’action sociale (CCAS) a étédiminuéde5%, alorsqu’unebaissesimilaire avait déjà été décidée parl’équipe précédente. «Nous avonstrouvéunmoyendefaire laréformedesrythmespour50000euros,et leCCAS avait un surplus dont il

n’avaitplusbesoin. Iln’yauraaucu-ne baisse des prestations», prometM.Ménard. Il a toutefois décidé deréserver lesgarderiesdumatinauxseuls enfants dont les parents tra-vaillentetdepriverd’aidessocialeslespersonnesquineserendentpasaux convocations des «commis-sionsde rappelà l’ordre», instancesdestinées à sermonner les auteursde menues incivilités. «Vous nepouvez pas mépriser la puissancepublique tout en lui demandant del’aide», défend-il.

Le personnel communal a reçupourconsignedelimiter lesdépen-ses et les heures supplémentaires.

Elles ne sont pas un «dû», procla-me le nouveau journal municipal,calqué sur la maquette d’untabloïd. «Il y avait bien quelquesabus,maiscen’étaitpas lamajoritédes cas. Cela laisseplanerune suspi-cion malsaine», s’inquiète YvanVialettes, élu CGT de la ville, quiassure que sa base est «très inquiè-te». Le débarquement dudirecteurde la police municipale au lende-main de l’élection de M.Ménard aétéfaitde«manièretotalementillé-gale», juge M.Vialettes. «Il a faitune politique totalement contraireàceque jeveuxmettreenplace», sejustifie lemaire.

Pour l’heure, ces mesures nesemblent guère émouvoir l’électo-rat de M.Ménard. A Béziers, lesbénéficiaires d’aides sociales sontmajoritairement immigrés ouissus de l’immigration. Les proposracistes sont exprimés de plus enplus ouvertement. A l’image de cebénévole des Restos du cœur, quin’hésite pas à s’épancher sur sesbénéficiaires : « Jusqu’à 90% demusulmans, qui ne travaillent paset viennent juste bénéficier desaidessociales.SanscompterlesRou-mains…» Un peu partout, il suffitde tendre son stylo pour entendredes remarques similaires. «Depuisqu’il est élu, il y a une catégorie degens qui pensent qu’ils peuventl’ouvrir, ils se lâchent un peu», s’in-quièteAiméCouquet, lechefdefiledes communistesde laville.

Auvudupedigreedesdeuxplusproches collaborateurs du maire,André-Yves Beck et ChristophePacotte,passéspar leBloc identitai-re, les Biterrois issus de l’immigra-tion pourraient avoir de quoi s’in-quiéter. «Personnellement, je nevois pas beaucoup de changementset je n’ai pas trop peur,même si j’aiune voisine qui s’inquiète et quiparle de partir», affirme Dounya,qui n’a pas voulu donner sonnom.Cette Franco-Marocaine de 27 ans,venue s’inscrire aux Restos ducœur, nemet «plus que des petitesserviettes»à sécher auxfenêtres.

M.Ménard se prévaut toujoursde l’ambiguïté de sa liste, seule-ment «soutenue» par le FN, et deses collaborateurs aux parcoursvariés. Un de ses chargés de mis-sion est socialiste. Et l’ancien«M.Météo» de TF1 et ancien com-

muniste Michel Cardoze a acceptérécemment de le conseiller «béné-volement»pourlacréationd’unfes-tival autour du vin. Au Monde,M.Cardoze explique désormais«avoir été un peu naïf». «Si j’avaissu le tam-tam que ça allait déclen-cher, y compris parmi mes amis,j’auraispeut-êtreprisuneautredéci-sion»,assure-t-il,enrefusantcepen-dant de dire clairement s’il compteounonstoppersesactivitéspour lamairiedeBéziers.

M.Ménard a aussi réussi à s’en-tendreavecl’UMPlocalepourgou-verner l’agglomération, aprèsavoir échoué à en prendre seul laprésidence. Basée sur une réparti-tiondespostes,cetteententeatou-tefois laissé de côté la question duprogramme, alors que l’emploi,compétence de l’agglomération,est la première préoccupation desBiterrois. «Je mise sur le tourisme.Je rencontre beaucoup de chefsd’entreprise», promet M.Ménard.Ses opposants l’attendent au tour-nant. « Il y a une hypermédiatisa-tionde toutes sesmesures.Mais aufond, jusqu’ici, il n’y a rien qui achangé à Béziers sur ces ques-tions», juge Jean-Michel Du Plaa,conseillermunicipal socialiste.p

Jean-Baptiste Chastand

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Pourl’heure,lesmesuresprises

parlenouveaumairenesemblentguère

émouvoirsonélectorat

AiméCouquet,70ans, leaderisoléd’uneoppositionatoneNÉ «presque enmême temps queleDébarquement», AiméCouqueta une vision claire du rôle quedoit tenir un communiste dans laplus grosse ville à avoir basculé àl’extrêmedroite auxmunicipales.« Je combats frontalement RobertMénard. Si on ne combat pas sesidées tout de suite, ça peut prendredans l’esprit des gens», lâche cechef de file historique duPCFlocal. A 70 ans, ce fringant retraitéau crâne raséne cachepas une cer-taine excitation: «Jemebattaisdéjà contre euxà la fac de droit deMontpellier.»

Le 23mars, la liste Front de gau-che deM.Couquet a obtenu àpei-ne6%des voix,mais il a pu décro-cher un siège de conseiller enfusionnant avec le PS au secondtour. En tant quedoyen, il a dirigéle tumultueuxpremier conseil

municipal de lamandature. Paréd’une cravate rouge, il a prononcéundiscours qui amarqué lesesprits, entonnantmême LeChant des partisans. «Ménard atoujours été anticommuniste.Nousn’avons jamais eu decontacts intéressants entre nous»,assureAiméCouquet, qui a connulenouveaumaire dans les années1980, quand celui-ci était encorejournaliste.

Désormais, il utilise son expé-rience d’anciendirecteur généraldes services pourmener une gué-rilla juridique contreM.Ménard.Il a par exemple écrit au sous-pré-fet pour lui demander d’interve-nir contre trois décisions qu’iljuge illégales : la baisse dubudgetdu centre communal d’actionsociale en cours d’année, la limita-tion de l’accès aux garderies du

matin aux seuls enfants dont lesparents travaillent et lamise à dis-position sans convention d’unefemmedeménage de la ville aucommissariat de la police nationa-le. Il a aussi organisé une – petite –manifestation contre l’arrêté surle linge aux fenêtres.

BrasierLe combat deM.Couquet est

d’autant plus visible que le restede l’opposition observe pour l’ins-tant avec prudence les débuts deRobertMénard. «J’attends que lemaire présente des projetsconcrets pourmepositionner»,explique Elie Aboud, le chef del’UMP locale, qui aœuvré pour fai-re rentrerM.Ménarddans l’exécu-tif de l’agglomération. «Le systè-meMénard, c’est lemêmequeSarkozy. Il prendun arrêté, et le

tempsmêmeque vous réagissiez,il est déjà passé à lamesure suivan-te», avancede son côté le socialis-te Jean-Michel DuPlaa pour expli-quer sa retenue. «Si on réagit àchaquearrêté deMénard, oncontribue à alimenter le brasier.»

AiméCouquet, lui, condamnecette attitude. «Lapressenenous apasattenduspourmettreMénardsur le devantde la scène. Il ne ferajamaisde grosses fautes, c’est pourçaqu’il ne fautpas le laisser tran-quille et le prendre de front pourdémontrer à la populationqu’ilcacheune idéologie xénophobe etrelativementantidémocratique»,martèle-t-il. De son côté, RobertMénard tranche: «Il faut queM.Couquet existe, il existe commeça.Mais c’est pas très important,M. Couquet.»p

J.-B.C.

france

Le 11juin, comme tous lesmercredis après-midi, RobertMénard reçoit les citoyensde Béziers. JULIEN GOLDSTEIN/GETTY IMAGES POUR «LE MONDE»

PauEnvoyée spéciale

C ’est ça, la différence entre uncolloque sur la fin de vie etun procès criminel : la

confrontation nue, saisissante,entreunmédecin assis dans le boxdes accusés et le fils de l’une despatientes qu’il est accusé d’avoir

empoisonnées pour hâter leurmort. Et soudain, c’est tout uneatmosphèrequisefaitpesante.Jeu-di 12 juin, la courd’assisesdesPyré-nées-Atlantiques, àPau, examinaitle premier des sept décès attribuésà l’ancien docteur Nicolas Bonne-maison.

Elle s’appelait Françoise Ira-muno,elleavait faitunegravechu-te. Transportée au service desurgences de l’hôpital de Bayonnele 5avril 2011, l’octogénaire étaitarrivéedansuncomaprofond, vic-time d’une hémorragie cérébrale.Leneurochirurgien qui l’avait exa-minée avait estimé qu’une inter-vention était impossible et avaitprévenu son fils unique, Pierre,que samère était en fin de vie. Unsecond médecin avait confirmé lediagnostic, et Mme Iramuno avaitété hospitalisée provisoirementdans le service du docteur Bonne-maison.

Le lendemain, lors de la passa-tion des consignes sur le suivi des

patients entre l’équipedumatinetcelle de l’après-midi, le médecins’était étonné que la vieille damesoit encore en vie. A l’infirmier quiluiexpliquaitquesonétatétaitsta-tionnaire, Nicolas Bonnemaisonavait répondu en plaisantant qu’ilétait prêt à parier du chocolat que,le soir, elle ne serait plus là.

InjectionDans l’après-midi, une jeune

aide-soignante s’était rendue auchevet de la patiente. «Elle étaitcomateuse,mais çaallait. Elle avaitle faciès détendu, elle ne semblaitpas douloureuse», raconte-t-elle àla barre. Peu de temps après cettevisite, alors qu’elle se trouvait avecune infirmière dans la salle de gar-de, elles avaient vu le docteur Bon-nemaison ouvrir la pharmacie duservice. «On l’a entendu casser uneampoule, il estallédans lachambredeMme Iramuno, puis il est reparti»,raconte l’infirmière, entendueaus-si commetémoin.

Quelques minutes plus tard, lescope donne l’alerte d’un dérègle-ment brutal du rythme cardiaque.Les deux femmes se précipitentdans la chambre et constatent queMme Iramuno est en train de mou-rir. L’infirmière aperçoit le docteurBonnemaison dans le couloir. «Jeluiaiditquecettedégradationrapi-de ne me semblait pas naturelle. Ilm’a répondu : “Elle a dû ressai-gner.” »D’une voix dure, elle ajou-te : «Pour moi, il n’y a eu aucunaccompagnement. Le docteur Bon-nemaison a pris la décision seul. Aaucun moment, il n’a demandé àl’équipedesoinspalliatifsd’interve-nir.C’estcontradictoireavecunepri-se en chargede findevie.»

Le président se tourne vers l’ac-cusé.«Quellessontlesinformationsquivousontdéterminéàprocéderàune injection d’Hypnovel sur lapatiente?» Nicolas Bonnemaisonselancedansunexposésurtouslessignes cliniques qui permettentd’évaluer l’aggravation de l’état

d’un patient en fin de vie. Le prési-dent le coupe. «A quel momentavez-vous effectué ces tests?

–Dans lamatinée.– Tout seul?–Oui.– Et pourquoi cette sédation

dans l’après-midi?– Parce qu’il y avait un risque de

souffrancepsychique.– Vous dites “risque”. Vous prati-

quez leprincipedeprécaution?»Ilrevientàlajeuneaide-soignan-

te : «Quand vous entrez dans lachambre, vous constatez que lapatiente est agitée. Que faites-vous?

– Je lui tiens lamain.– Jusqu’à la fin?–Oui.– Et le docteur Bonnemaison

n’est pas là?–Non.»Le président appelle à la barre

Pierre Iramuno. C’est un solidegaillard de 61 ans, qui parle d’unevoixcalme. Il confirmeavoirdit au

neurochirurgien qui avait exami-né sa mère qu’il ne voulait pasd’acharnement thérapeutique.

«Dans votre esprit, que signifiel’arrêtdel’acharnementthérapeuti-que? lui demande leprésident.

– C’est ne pas pratiquer d’acteschirurgicauxoumédicaux inutiles.

–Vousa-t-onparléd’injections?–Non. Jamais. Personne.–Qu’attendez-vousdeceprocès?– Je ne sais pas. Comprendre,

peut-être.–Que répondez-vous à cela,

M.Bonnemaison?»NicolasBonnemaisonsepenche

vers lemicro. Les deuxhommes sefont face.

« Je suis bouleversé. Je considé-rais de mon devoir de vous proté-ger.

– Ce que j’aurais voulu, c’est quevous m’en parliez et qu’on décideensemble. Ce que vous avez fait, jel’aurais compris, si vous me l’aviezexpliqué.»p

PascaleRobert-Diard

ABéziers,RobertMénardassoitsonpouvoirDeuxmoisaprès sonélection, lemaired’extrêmedroitebénéficied’unétatdegrâce

«Cequej’auraisvoulu,c’estquevousm’enparliez,etqu’ondécideensemble»Jeudi 12 juin, lacourd’assisesdePauexaminait lepremierdesseptdécèsattribuésà l’ancienmédecinurgentisteNicolasBonnemaison

12 0123Samedi 14 juin 2014

Page 13: Le Monde Elafonissos 14 Juin 2014

culture

Rencontre

D e la fosse aux derniersrangs du balcon, le publicdel’Olympia,àParis, se lève

et acclame l’arrivée de JimmyPage. «Thank you Olympia, mer-ci…»Souriant, leguitariste,compo-siteur, producteur et âme de LedZeppelin s’installe, le 21mai, dansla soirée, sur la scène de la salle où,le 10octobre 1969, le groupe avaitdonnéunconcert«de feu, commu-nion entre lesmembres du groupe,lepublic, l’instant», commeilnousle confiait quelques heures plustôt.

Jimmy Page est à l’Olympiapour présenter quelques extraitsd’inéditsqui accompagnent la réé-dition des albums studio de ce quiaura été, dans les années 1970, l’undes groupes de rock les plus célè-bres au monde. Et qui, depuis saséparation après la mort du bat-teur John Bonham (1948-1980),continuede faire référence.

La campagne de réédition dupatrimoinedeLedZeppelin,super-visée par Jimmy Page, a débuté le2juin. Première vague: Led Zeppe-lin,avecsapochettequireprésentel’accident du dirigeable Hin-denburg, le 6mai 1937; Led Zeppe-lin II, la silhouette dudirigeable enfond d’une photographie détour-née d’un groupe de soldats del’aviationallemande lors de la pre-mièreguerremondiale;LedZeppe-lin III, ses motifs psychédéliquesmêlésdegravuresd’avions,dediri-geables, de portraits des musi-ciens, Page, Bonham, le chanteurRobert Plant et le bassiste et cla-viériste JohnPaul Jones.

Pour chacun, plusieurs présen-tations sont commercialisées.Album CD et 33-tours vinyle sim-ple, double CD et 33-tours vinyledit «deluxe»avecunrecueild’iné-dits intitulé «companion disc»,fichiersnumériques sur les plates-formes légales de téléchargementet coffrets dit « super deluxe»avec, outre les CD et 33-tours, unépais livre de photographies –façonnage, reproduction, qualitédu papier au plus haut niveau – etcode pour télécharger les fichiersnumériques en haute résolution.Les cinq autres albums en studiodurant l’activité du groupe et l’al-bum posthume Coda, sorti en1982, devrait paraître de la mêmemanièredansunepériodededeuxans.Toutaétéremasteriséauxnor-mes technologiques actuelles, àpartir des bandes originales.

Les trois premiers albums deLed Zeppelin sont les témoins del’envolvers lagloiredugroupebri-tannique. Page, d’abord avec lesYardbirds – où ont œuvré deuxautres guitaristes de poids, EricClaptonetJeffBeck–,etsescamara-des transforment le blues du deltaduMississippi enunélanpuissantet rageurqui va prendre le nomdehard-rock. Autre influence, celledu folk, dans le creuset des musi-ques des cultures celtes. S’y ajouteun goût pour l’expérimentationsonore, y compris sur la voix dePlant. Disques et concerts fusion-nentceséléments.SignéparAtlan-tic, la compagniephonographiqueaméricaine, peu après les séancesd’enregistrement de son premieralbum en septembre et octo-bre1968, Led Zeppelin va dominerle son et l’imaginaire du rock desannées 1970.

Lors de cette présentation àl’Olympia, Page n’est pas venuavec une guitare. Après la diffu-sion des morceaux sur le systèmede sonorisation de la salle, enmême temps que la projection dedocuments figurantdans les livresqui accompagnent les coffrets, et

d’extraits de films, il répond à unesérie de questions sélectionnées àl’avance. Rien ne dépasse. Pas derappeld’épisodesdouteuxdel’his-toire du groupe, ceux qui ont faitsa légende sombre : l’alcool et ladrogue pour tenir le coup – oujustepasser le temps– lorsdetour-nées harassantes, les filles commedes poupées jetables, l’entouragemenaçant et violent mené par lemanager Peter Grant… un quoti-dien commun à de nombreuxgroupesmais qui chez Led Zeppe-lin serait plus fou, incontrôlable,dangereux.

Cesaspects-là, JimmyPagen’estpaslàpourenparler.Danslacham-bred’hôteloù il reçoitpeuavantsaparticipation à la soirée de lance-ment à l’Olympia, il a beau être unpeu affaibli par un refroidisse-ment, son regard ne laisse place àaucun doute lorsqu’il déclare «cesrééditions sont l’occasionde rappe-ler une histoire de musique. C’esttout.» L’occasion aussi de redirequi est le patron. JimmyPage, fon-dateur du groupe, son producteur–«j’aiproduit tous lesalbumset lesséances d’enregistrement à l’épo-que. Mes choix, mes décisionsétaient OK pour les autres à cemoment-là. C’est toujours le cas»–,celuiquienestdevenulamémoireet l’archiviste.

C’est après la parution ennovembre2012, de CelebrationDay, CD et DVD du concert du10décembre 2007 à l’O2 Arena deLondres,quiavaitvulestroismem-bres survivants du groupe rejouerensembleavec Jason, le filsde JohnBonham à la batterie – 20millionsde demandes pour 20000 placespossibles–quePageacommencéàtravailler sur leprojetde réédition.«C’était d’abord quelque chose depersonnel, l’inventairedemesarchi-ves. En commençant par mes pre-miers essais, quand j’étais adoles-cent, que je vivais chezmes parents[né en 1944, Jimmy Page a fait sesdébuts vers l’âge de 16 ans, avantdedevenirmusicienprofessionnelaudébutde l’année 1963].Celam’aamené vers les Yardbirds, puis LedZeppelin.C’est àcemomentque j’aieu l’idée des companiondiscs.»

Mais avant ce qui est pour lesamateurs du groupe la grandeaffaire de ces rééditions, qu’en est-il du son? Pour ces nouvelles édi-tions, iladel’ampleur,dugrain,unrelief,etn’apasétégonflépourson-ner artificiellement fort et puis-sant, comme cela peut arriver.«Tous les cinq ans, il y a de nouvel-les lubies et manières d’écouter lamusique. La technologie suit cela.Mon propos est de rester dans lacouleur sonore des vinyles origi-naux pour tous les formats. Le CD,

le Blu-ray audio, les fichiers en télé-chargement, etc. Mais tout cela enhaute résolution. Plein de groupesannoncent la remasterisation deleur catalogue. Donc je n’ai rieninventé, mais cela a été fait minu-tieusementetenprofondeur, cequin’estpastoujourslecas.»Etunnou-veau mixage à cette occasion ?«Non. C’est le mix stéréo d’origine.Avec les oreilles de l’époque et celuiquel’histoirearetenu.Cedontnousétions fiers. Alors pourquoi mettreunpeuplus de guitare, unpeuplusde grosse caisse, accentuer un effetsur la voix, atténuer ceci ou cela?»

Pour le «companion disc», pasplus de révisions historiques. Si lepremieralbumestaccompagnédelaprestation à l’Olympia en 1969–une apocalypse de tension et d’ur-gence rendue dans toute sa gloire–, les albums suivants ne propo-sent pas de concerts. En revanche,en suivant le même ordre que ledéroulé des albums, la sélectionconsiste essentiellement en roughmix (mixage rudimentaire, avantl’ajout d’effets, d’instruments) etalternatemix (mixagedifférent deceluipublié).Etquelquestitresiné-dits ou préfigurant une futurechanson.

«J’ai écoutédes centaines d’heu-res de bandes. Je vous le redis : c’estmoi qui ai produit et supervisé tou-tes lesséancesd’enregistrementdesalbums de Led Zeppelin. Je saisdoncmieuxquepersonnecequi estbon ou pas. Je sais ce qui a unevaleur musicale. Certains groupesvont vous mettre cinq ou six ver-sions d’un même morceau. Il mesemble plus pertinent qu’il y ait unchoix.»DoncleroughmixdeWho-le Lotta Love ou de Heartbreakerqui est présenté est «lemeilleur, leplus intéressant» ; pareil pour l’al-ternate de Immigrant Song ou deCelebration Day. Parole de JimmyPage.

«Peu de choses, mais la quintes-sence», insiste-t-il. Et,grinçant:«Jesais ce qui traîne sur les pirates [ilcircule depuis des années des cof-frets non autorisés débordant deprises différentes d’un mêmemorceau]. Franchement, c’est de lamerde, vouspourrez les jeter.»QueLedZeppelin figuredans lehautdela listedes groupesde rock les pluspiratés n’a jamais été considéré

avec bonhomie par le groupe oupar sonmanager.

Robert Plant, John Paul Jones etlefilsdeJohnBonhamont-ilsparti-cipé aux choix des inédits? «Non.Ils savaient que je ferais les bonschoix, que je serais attentifà rendrelemeilleurdugroupe, pasqu’àmesparties de guitare. Tout lemonde a

vu le résultat final.Nousn’enavonspas encore parlé.» Page se lève etl’ange qui passe discrètementemporte alors avec lui la rituellequestionsurunepossiblereforma-tion de Led Zeppelin, à la manièred’un événement spécial commelors de l’hommage au patron d’At-lantic, Ahmet Ertegun (1923-2006)

et sa fondation pour l’éducation,lorsdu concert de 2007à l’O2. p

Sylvain Siclier

Led Zeppelin, Led Zeppelin II,Led Zeppelin III, rééditions des albumsoriginaux, augmentés d’inédits en CD,33-tours vinyle et coffretsAtlantic-Swan Song/Warner Music.

«Cesrééditionssontl’occasionderappeler

unehistoiredemusique.C’esttout»

«J’aisupervisétouteslesséances

d’enregistrementdesalbums. Jesaisdoncmieuxquepersonnecequiestbonoupas»

JimmyPageretroussesesmanchesLemythiqueguitaristeanglaisa superviséavecminutie la rééditiondes troispremiersalbumsdeLedZeppelin

JimmyPage, en concert avec Led Zeppelin, en janvier 1975, à Bruxelles. JEAN-PIERRE LELOIR/LE BAR FLORÉAL

130123Samedi 14 juin 2014

Page 14: Le Monde Elafonissos 14 Juin 2014

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À L’IRCAMConférences, démonstrations,performances, films, visite des espaceset rencontres avec les chercheurs.

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Événement associé à Futur en Seine.Avec le soutien de la Sacem.

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Arts

Metz

L ’exposition « Formes sim-ples» au Centre Pompidou-Metz, qui a lieu jusqu’au

5novembre, se saisit d’une ques-tion qui captive les archéologues,leshistoriensdel’art, lesanthropo-logues, les ethnologues, les physi-ciens, les philosophes et – naturel-lement – les artistes : quelles ontété les premières formes crééesparl’homme?Etaient-ellesgéomé-triques et, si elles l’étaient, d’unegéométrie plutôt ronde ou plutôtanguleuse? Etaient-elles symboli-ques et, dans ce cas, leur symboli-que était-elle cosmique, sexuelle,ou les deux ensemble?

Depuis leXIXesiècle,nombreuxsont les ouvrages qui ont présentéleursraisonnementset leurspreu-ves. Les unes étaient prises dansl’observation de cultures dites«primitives». Les autres se fon-daient sur des considérationsmatérielles. L’invention de la van-nerie allait-ellenécessairement depair avec l’entrecroisement àangle droit ? Celle de la poterieétait-elle inséparable de la cour-be?Nepouvait-on imaginerque lavue de certaines espèces animalesaurait suggéré l’ovale – les pois-sons–oula lignesinueuse–lesser-pents ? La Lune suffirait-elle àexpliquer l’apparitiondu cercle?

Entre ces hypothèses, Jean deLoisy, commissaire de «Formessimples», ne prend pas parti. Son

desseinn’estpasdedécrirelagenè-sedesformes,maisplutôtdemon-trer,d’unepart,quedesformesdif-férentessontapparuesunpeupar-tout, selon différents modes decréation. Et, d’autre part, que ces«formes simples» traversent lesépoques – avec une densité parti-culière au XXe siècle, du côté deDada, du surréalisme et de l’abs-traction. Giacometti, Arp et Bran-cusi sont les principaux auteursde cette réapparition.

L’exposition emprunte à desfonds variés, du Musée du quaiBranly à Paris au Musée d’art

moderne de New York, de celuid’Archéologie nationale de Saint-Germain-en-Laye à la Tate GallerydeLondres,duMuséede lapêcheàConcarneau (Finistère) à la Fonda-tion Arp à Clamart (Hauts-de-Sei-ne)… Dans ce genre d’exercice, quisuppose une curiosité étendue etl’art de la confrontation, Jean deLoisy est très à son aise. Il l’avaitdéjàprouvéen2012avec«Lesmaî-tres du désordre» auQuai Branly.

Ne cherchant pas à atteindreune impossible exhaustivité, ilorganise des proximités qui sejouent de la chronologie et de la

géographie. Ainsi, sous le signe ducercle, réunit-il François Kupka(1871-1957), Lee Ufan, Olafur Elias-son, les clichés astronomiques etl’Egypte ancienne. Bien d’autresœuvres auraient été possibles,mais celles-ci suffisent ample-mentàcélébrer lamajestédurondparfait. Lucio Fontana (1899-1968)et Barnett Newman (1905-1970)rappellent, eux, qu’au début futaussi la ligne droite, celle de l’inci-sion.

D’autres chapitres sont moinsprévisibles. Il est surprenant devoir réunis la machine à observerla trajectoire de la fumée de Etien-ne-Jules Marey (1830-1904), unehélice d’avion du temps desbiplans, une sculpture d’EtienneBeothy (1897-1961), unBoomerangaborigène et les oiseaux deConstantin Brancusi (1876-1957).

Cequ’ilsontencommun?L’air, lesflux, les mouvements ondulatoi-res ou tourbillonnants. D’autrescourbes ont une origine organi-que: ventre de la femme enceinte,seinsdes idolesdefertilité,plantesphalliques et bourgeonnantesphotographiéesparBlossfeld,fem-me violon des Cyclades, galetsramassés par Perriand, Le Corbu-sierouBrassaï.Augalbedecespier-res polies s’opposent les droites etles angles des cristaux, dont unerareté, lesmodèlescristallographi-ques répertoriés par Romé de L’Is-le à la fin duXVIIIesiècle.

Lesscienceset leurhistoiresontsous-jacentes à tous moments, cequi fait venir à l’esprit d’autresréférences.A l’hélicedesnaviresetdes avions aurait pu répondre cel-le de l’ADN. L’astronomie auraitpu servir davantage elle aussi et,évidemment, l’atomisme, qui atant marqué des artistes tels queKupka. Par penchant personnelsans doute, Jean de Loisy est alléplutôt du côté de la préhistoire etde l’ethnographie,de la«feuilledelaurier» solutréenne aux faucillesde silex égyptiennes.

Symboles cosmiques, dit-on. Ilse peut. D’autres interprétationsseraient possibles, jusqu’à celle, sisimple, du plaisir physique etvisuel que leurs auteurs auraientéprouvéenfaçonnantdanslapier-re tendre ces volumes parfaite-ment équilibrés. L’exposition nerésoutpascesquestions,probable-ment insolubles pour certaines :elle les pose, de très belle maniè-re.p

philippedagen

« Formes simples », Centre Pompidou-Metz, 1, parvis des Droits-de-l’Homme,Metz. Tél : 03-87-15-39-39. www.centre-pompidou-metz.fr. Jusqu’au 5novembre.

une exposition du ministère de la Défense et de la Bibliothèque nationale de France

Réservations Fnac www.fnac.com 0892 684 694 (0,34D ttc/mn)

les derniers jours de

l’ancien mondeété 14

François-Mitterrand Paris 13e

25 mars 3 août 2014 bnf.fr

MINISTÈREDE LA DÉFENSE

MINISTÈREDE LA CULTURE

ET DE LACOMMUNICATION

Lesrapprochementssejouent

delachronologieetdelagéographie

Pale d’une hélice de jet. Au fond, «L’Oiseau dans l’espace» de Brancusi (1936). RÉMI VILLAGGI/CENTRE POMPIDOU-METZ

Q ui présidera à la destinée delaSallePleyel?Ce lieucélèbrepour ses concerts symphoni-

quesdans le 8earrondissement estappelé à changer de vocation avecl’ouverture, en janvier2015, de laPhilharmoniedeParisàLaVillette.Aux cinq groupes – Lagardère,Vivendi, Vente-privee.com, Fima-lac, Morgane – intéressés par laconcession,vientdésormaiss’ajou-ter la candidature du producteurde spectacles et directeur de théâ-tres, Jean-MarcDumontet.«Ce lieua une histoire qui ne doit pas êtregalvaudée», explique le patron deBobino, du Point-Virgule, duGrand Point-Virgule et du ThéâtreAntoine (avec Laurent Ruquier).

Les 2400 places de la nouvellesalle philharmonique et les 1400du nouvel auditorium de RadioFrance obligent la Salle Pleyel(1900 places) à se «variétiser»,pour éviter le trop-plein de fau-teuils attribués à lamusique sym-phonique. Elle doit aussi passerdans lesmains d’un opérateur pri-vé. L’appel d’offres a été publié le22maiparlaCitédelamusique,éta-blissement public propriétaire dulieu. L’exploitation, concédéepourquinze ans, sera destinée à « lamusique populaire de qualité :variété, chanson, pop, rock, jazz,comédie musicale, one-man-show.Tout concert ou spectacle de musi-que classique, quelle qu’en soit laforme, est exclu». En outre, « lesmanifestationsàvocationcommer-ciale ne donnant pas lieu à billette-rie – congrès, conventions, soiréesprivées, lancements de produits,etc. – ne pourront pas excéder 40%du total de la programmation».Les offres doivent être déposéesavant le 30juin, lenomde l’exploi-tant seradonnéà l’automne.

L’entrepreneur Jean-MarcDumontetditvouloir«faireenten-dre une musique différente parmiles candidats, car une salle ce n’estni un caprice, ni une danseuse, niun outil de communication». Ilaffirme avoir «bondi» à la lecture,dans la presse, des déclarations dupatron du site Vente-privee.com.«Si nous achetons des salles, c’estd’abord parce que nous préféronsorchestrer ainsi la communicationde notre marque plutôt que depayer des publicités», expliquait

Jacques-AntoineGranjon.Faceaux«financiers»,M.Dumontetseposeengestionnaire et amateur depro-jets artistiques qui a su ressusciterles sallesqu’il a acquises, et fédérerla famille du théâtre pour fairerenaître, le 2 juin, la cérémonie desMolières.

C’est peu dire que le monde duspectacleparisienattiselaconvoiti-sedes industriels. LegroupeLagar-dère, qui possède 20% du Zénith,vient d’acquérir, après les Folies-Bergère, leCasinodeParis.Fimalac,holding fondée etdirigéeparMarcLadreit de Lacharrière, a acheté en2013leThéâtreComedia.Vente-pri-vee.com a repris le Théâtre de laMichodière après avoir acquis leThéâtredeParis. Toussont à l’affûtd’autres salles.

«Concerts-événements»DanscejeudeMonopoly,lebou-

limiquepatronde salles, program-mateurdeFabriceLuchiniauThéâ-treAntoine,producteurdel’humo-riste Alex Lutz ou de l’imitateurNicolas Canteloup, entend se posi-tionneràmi-cheminentreleshom-mesdel’artet lesindustriels. Pour-tant, en 2011, il s’était associé augroupeLagardèrepourracheter lesFolies-Bergère. Avant de céder sesparts, en 2013 : « Je me suis retiréparce que la logique d’un grandgroupe n’était pas lamienne, assu-re-t-il.Les sallesquimarchentetquiont une vraie ligne artistique sontincarnéespardeshommesquipren-nent des risques.»

CeBordelais, âgé de 48ans, vou-drait fairedePleyelun lieucapabled’accueillir des spectacles, maisaussi «des expositions, une biblio-thèque musicale» et de «favoriserles ponts entre pratiques amateuret professionnelle». Dans sa pro-grammation, il envisage «une for-te dimension jazz» et «des grandsconcerts-événements autour d’unartiste, pendant plusieurs jours,avec de l’acoustique et des masterclass». Mais ni comédies musica-les, ni one-man-show.

Laurent Bayle, directeur généralde la Cité de lamusique, de la SallePleyeletprésidentdelaPhilharmo-nie parlait, en 2012, d’«une sorted’Olympia cinq étoiles» pour résu-mer lanouvelledestinéedu lieu.p

SandrineBlanchard

DeVivendiàJean-MarcDumontet, laSallePleyelattiselesconvoitisesAvant la clôturedescandidatures, le 30juin,sixprojetsdereprisesontdéjàannoncés

AMetz, ladanseépuréedesronds,descourbesetdestraitsUneexpositioncaptivantesur les formessimplesutiliséespar l’hommedepuis lapréhistoire

14 0123Samedi 14 juin 2014

Page 15: Le Monde Elafonissos 14 Juin 2014

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DÉCOUVERTE

AU CARNET DU «MONDE»

Naissances

Yannette et Patrick,ses grands-parents,

ont la joie d’annoncer la naissance de

Alex LE GALLWAGNER,le 7 mai 2014,

chezTifenn et Hervé.

Alexis, Myrtille et Lila

sont heureux d’annoncer la naissance de

Margot,le 10 juin à Paris

Mariages

Olivier et Yannickse marient le 14 juin 2014, à Limoges.

Christelle, Marilou, M.-Christine, Gilles.

Paris, samedi 14 juin 2014,

Virginie,je t’aime

Pierre.

Décès

L’Entraide universitaire française,La Fondation entraide Hostater,

ont appris avec une grande tristessele décès de

Robert AUDOUSSET,qui fut longtemps leur trésorier, et dontla rigueur bienveillante a facilité l’aideà des générations d’étudiants réfugiéset d’étudiants défavorisés.

Tous ceux qui l’ont connu et appréciéà l’Entraide et à la Fondation s’associentà la douleur de sa famille.

Christiane,son épouse,

Françoise et Philippe,ses enfantset leurs conjoints,

Ses petits-enfants,

ont la tristesse de faire part du décès de

André BELLEMERE,professeur honoraire

à l’ENS de Saint-Cloud (Lyon)de 1955 à 1989,

membre de l’Association françaisede Lichenologie,

officierdans l’ordre des Palmes académiques,chevalier de l’ordre national du Mérite,

survenu le 2 juin 2014,dans sa quatre-vingt-septième année.

Ses obsèques ont été célébrées le samedi7 juin, dans l’intimité, à Auriac-l’Eglise(Cantal).

Monteils (Tarn-et-Garonne).

M. et Mme Jean-Marc Benteyn,M. et Mme Denis Benteyn,

ses fils et belles-filles,Ses petits-enfants,

ont la douleur de faire part du décès de

Mme Raymonde BENTEYN,née CROZET,

survenu à l’âge de soixante-dix-huit ans.

L’incinération aura lieu le lundi16 juin 2014, à 11 h 30, au crématoriumde Montauban.

Les visites sont possibles à la chambrefunéraire des pompes funèbres Daiguzon,1A, avenue de Lattre-de-Tassigny,à Caussade (Tarn-et-Garonne).

Ni fleurs ni couronnes ni plaques.

Anne Marie BERTHELET,née GRILLOT-THOMET,

nous a quittés à Cannes, le 5 juin 2014.

Puissent ceux qui l’ont connue ou aiméese souvenir...

Sa famille,Roger, Jean-Claude, Dominique,

Pacha.

Vienne (Autriche).Alger (Algérie).

Denise Derrough,son épouse,

Samir, Malik et Tarik,ses enfantset leurs conjointes,

Ses petits-enfants,Sa familleEt ses amis,

ont la tristesse de faire part du décès de

Mohamed DERROUGH,ancien cadre Sonatrach,

fonctionnaire internationalauprès de l’Organisation des Nations Unies

pour le développement industriel(ONUDI),

survenu le mercredi 11 juin 2014,à Vienne (Autriche).

Ses obsèques auront lieu à Cousance(Jura).

Famille Derrough,201, route de la Rélasse,39190 Cousance.

Amand ine , An to ine e t P i e r r eAigueperse,ses enfants,

Pascale Gutt,sa sœur,

Marie-Thérèse et Lucien Dubanchet,ses parents,

Toute sa familleAinsi que les collaborateurs

du groupe Le Monde,

ont la tristesse de faire part du décès de

Christine DUBANCHET,survenu le 11 juin 2014, à Paris.

La cérémonie religieuse sera célébréele mardi 17 juin, à 10 h 30, en l’égliseSaints-Cyrille-et-Méthode, 124, rue deBagnolet, Paris 20e.

Ni fleurs ni couronnes.Dons auprès de la Ligue contre le

cancer pour ceux qui le souhaitent.

Ostrohove.

Mme Anne Marie Fasquel-Vraux,son épouse,

Sylvain Fasquel et Valérie Dussaut,Nathalie et LaurentLengagne-Fasquel,

ses enfants,Louise, Margot, Clara, Nicolas,

ses petits-enfants,Ses beaux-frères, belles-sœurs,

neveux, niècesEt toute la famille,

ont la douleur de faire part du décès de

M. Michel FASQUEL,inspecteur d’académie honoraire,inspecteur pédagogique régional

de biochimie génie biologique honoraire,commandeur

dans l’ordre des Palmes académiques,

survenu à Boulogne-sur-Mer,le mardi 10 juin 2014,à l’âge de soixante-neuf ans.

Selon la volonté du défunt, son corpsa été incinéré.

Un dernier hommage lui a été rendule vendredi 13 juin, à 17 h 15,au crématorium Le Rivage de Saint-Martin-Boulogne.

Le présent avis tient lieu de faire-part.

18, résidence des Hêtres,Ostrohove,62280 Saint-Martin-Boulogne.

Marie-Barbe et Joe,Alphonse et Agathe,Bérénice,

ses enfants,Esther, Adèle, Hector,

ses petits-enfants,

ont la douleur de faire part du décès de

M. Bernard GIRARD,philosophe, consultant, écrivain,

survenu le 8 juin 2014, à Paris.

La cérémonie religieuse aura lieule lundi 16 juin, à 10 h 30, en l’égliseSaint-Thomas-d’Aquin, Paris 7e.

183, boulevard Saint-Germain,75007 Paris.

Marie-Cécile et Christian Veldeman,Françoise et Jean-Paul Gobled,Jean-Michel et Bernadette Glatigny

et leur fils, Jean-Raphaël,ses enfants et petit-fils,

ont la douleur de faire part du décès de

Michel GLATIGNY,professeur émérite

de l’université Lille III,

veuf de

Mme Cécile PIETTRE.

La cérémonie religieuse aura lieule lundi 16 juin 2014, à 10 h 30, en l’égliseSaint-Paul, boulevard Clémenceau,àMarcq-en-Barœul.

127, avenue du Docteur-Calmette,59700 Marcq-en-Barœul.

Paris,

Mme Renée Baron,sa sœur,

Michel et Kalthoum Laferrère,Dominique Laferrère,Anne Laferrère,

ses enfants,Manon et Selçuk Hartlap,Armand Laferrère,Aude et Nicolas Norbert-Papin,Aurélien et Claire Laferrère,Renaud et Frédérique Laferrère,Ada et Patrick Schneider,Anselme Gaillard,Adeline Gaillard,Malik et Anissa Laferrère,Julie Laferrère,

ses petits-enfants,Cybel, Sinan, Merih, Fleur, Louise,

Mahaut, Morgane, Juliette, Milo, Zakarya,ses arrière-petits-enfants,

font part du décès de

Mme Christiane LEMAîTRE,ancienne élève

de l’Ecole normale supérieure (Sèvres),professeur agrégée de Lettres classiques,

chevalierdans l’ordre des Palmes académiques,

chevalier dans l’ordre national du Mérite,

survenu le 10 juin 2014,à l’âge de quatre-vingt-quinze ans.

L’incinération aura lieu le 17 juin,au crématorium du cimetière du Père-Lachaise, Paris 20e.

Cet avis tient lieu de faire-part.

3, rue Saint-Ambroise,75011 Paris.

Mme Michel Perret,née Vonette Lahille,son épouse,

François et Marie-Ange Perret,Natalie et Jean-Baptiste Michel,Sophie et Jean-Marc Eggimann,

ses enfants,Capucine, Alexis, Adélie, Timothée,

Florentin, Mathis, Apolline, Marion,Florian, Hélène,ses petits-enfants,

Les familles Winter, Perret, Landry,Hug, Serin et Baron,

font part , dans l’espérance de larésurrection, du rappel à Dieu de

Michel PERRET,le jour de la Pentecôte.

La cérémonie religieuse aura lieule samedi 14 juin, à 10 h 30, en l’égliseNotre-Dame-du-Taur, à Réalmont (Tarn).

« Je suis le Chemin, la Vérité et la Vie ».

La familleEt ses amis

ont la douleur de faire part du décès de

Marc ULLMANN,journaliste,

survenu le 7 juin 2014.

Les obsèques ont eu lieu dans l’intimitéfamiliale et amicale.

Bernard Esambert,président d’honneur,

Alain de Vulpian,membre fondateur,

Jérôme Cazes,président,

Jean-Claude Hazeraprésident du comité d’orientation,

Le comité d’orientationEt le conseil d’administration

du Club des Vigilants,

saluent la mémoire de

Marc ULLMANN,créateur et chef d’orchestre

du Club des Vigilants.

Sa curiosité, son ouverture et sa visioncontinueront de nous aider.

Condoléances

La Société d’histoire de la Révolutionde 1848 et des révolutions du 19e siècle

très émue par la disparition de sonprésident d’honneur

Maurice AGULHON,président de 1975 à 1981,

s’associe à la douleur de sa famille et àcelle de tous ceux pour qui il restera à toutjamais un historien inoubliable.

Colloque

La LICRA(Ligue internationale contre le racisme

et l’antisémitisme)organise

le samedi 21 juin 2014,de 9 heures à 18 heures,à la Maison Heinrich Heine

de la Cité universitaire,27 C, boulevard Jourdan, Paris 14e,

Un colloque sur« Le génocide des Tutsis au Rwanda.

Les fantasmes, les faits »,

avec la participation des meilleursspécialistes du sujet.

Entrée libre.

Communication diverse

ISF :Déduisez 75 % du montant de votre donà la Fondation du patrimoine juif

de France pour participer à la constructiondu Centre européen

du judaïsme, Paris 17e.Tél. : 01 49 70 88 02,

[email protected] l’égide

de la Fondation du judaïsme français.

Page 16: Le Monde Elafonissos 14 Juin 2014

16 0123Samedi 14 juin 2014

0123 est édité par la Société éditrice du «Monde » SADurée de la société : 99 ans à compter du 15décembre 2000. Capital social : 94.610.348,70¤. Actionnaire principal : Le Monde Libre (SCS).Rédaction 80, boulevard Auguste-Blanqui, 75707Paris Cedex 13 Tél. : 01-57-28-20-00Abonnements par téléphone : de France 32-89 (0,34¤TTC/min) ; de l’étranger: (33) 1-76-26-32-89;par courrier électronique: [email protected]. Tarif 1 an : Francemétropolitaine : 399¤Courrierdes lecteurs: blog :http://mediateur.blog.lemonde.fr/; Parcourrier électronique:[email protected]édiateur:[email protected]: site d’information: www.lemonde.fr ; Finances : http://finance.lemonde.fr ; Emploi :www.talents.fr/ Immobilier :http://immo.lemonde.frDocumentation: http ://archives.lemonde.frCollection: LeMonde sur CD-ROM :CEDROM-SNI 01-44-82-66-40LeMondesurmicrofilms: 03-88-04-28-60

L ’état debéatitude footballisti-quede l’équipede «TeamToussaint»prenddespropor-

tions inquiétantes: jeudi 12juin, à8h30,Amandine Bégot, la copilo-te de la tranchematinale d’infor-mation sur i-Télé, annonçait quel’attitudenouvellement sympathi-quedes Bleusméritait d’être sur-nommée «leMondial du cœur».J’ai faillim’étrangler avec la biscot-te que j’avalais tandis que j’enten-dais cette incongruité.

Commepour contrebalancer celyrismeaveugle, que j’ai dénoncéici avant-hier,MarieColmant, lachroniqueuse culturelle de«TeamToussaint», aheureuse-mentvanté Pacifier Rio (2014), untrès beau filmdeGonzaloArijonque rediffusait justementArte,jeudi à 8h55, sur la vie des favelasdeRiode Janeiro. Ce documentai-re, que j’aurais peut-êtremanquésans cettementiondemaconsœur, est disponible sur le siteInternet de rediffusionArte +7.

Le cinéaste uruguayena enquê-té deuxans dans les favelas deRio,notamment celles qui ont été«pacifiées» par lamise enplacede l’unité depolice pacificatrice(UPP). Celle-ci a pris, depuis 2008,le relais de la police régulière, avecune attitudemoins offensive etplus à l’écoute despopulations.Chose incroyable, son responsableest… anthropologue.

Arijon suit quelques témoins,commece jeune conducteur demoto-taxi dont le cousin était lecaïd d’un cartel de la droguequicontrôlait encore, voici peu, lafavela Babilonia –dont est origi-naire Luiz Inacio Lula da Silva, leprécédentprésident de la Républi-quebrésilienne –, située à quel-ques encabluresdes plages du

quartier huppédeCopacabana.Ce film subtil et exemplairene

donnepasdans l’angélisme. SiAri-jon souligne les redditions decaïdsdes cartels devenusbonssamaritains, il nemésestimepasles dommagesde ces opérations«mainspropres»policières eturbanistiques engagées envuedelaCoupede 2014 et des Jeuxolym-piquesde 2016.

Certes, onnettoie et on réhabili-te ces lieux avec vue imprenablesurRio. Ony installemêmeuntéléphérique.Mais, soupireunevieille habitante qui résiste à l’unede ces expropriations qui laissentbeaucoupd’habitants démunis etdéracinés, «il servira aux touristes,

pasà lapopulation», qui n’a pasde raisonsd’aller au centre deRio.

Le jeunemotard raconte que lesgangs chassésde Babiloniay sontrécemment revenus pourvengerlamort d’un caïd.Mais l’UPP, fai-blement armée, est depeudepoidsdevant lamenace lourde-ment arméede ces cartels quicontrôlent toujours l’essentiel desfavelas, notamment lesplus éloi-gnéesdu centre deRio.

Désignant le fameuxChrist sur-plombant la baie, le jeunehommedit: «Ils finiront par lui faire bais-ser les bras…Amoins qu’ils ne leplastiquent, comme ils ontmena-cé de le faire.»p

C’EST À VOIR | CHRONIQUEpar Renaud Machart

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Elisée100

TAÏWAN COPIEUSES PLUIES SUR LE SUD DU PAYS

En Europe12h TU

Un ciel plus variable s'établira sur lamoitié nord de la France jusqu'au nord duMassif Central et quelques averses ouorages sont attendus en cours de journée.Plus au sud, le soleil brillera en généraldavantage,mais des orages isoléséclateront l'après-midi de la région alpineà la Côte d'Azur et quelques aversestomberont au voisinage des Pyrénées. Lestempératures seront de saison ou chaudesdu nord au sud.

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Solution du n° 14 - 139HorizontalementI. Anticipation. II. Louve. Rieuse.III. Tungstène. Eg. IV. Ere. Arte.PSA.V. Rr. Trirème.VI.Niçoise.Auer.VII. Atèle. Lux.VIII. Tulunides. Rc. IX. Ire.Noisette.X. Fermenterais.

Verticalement1. Alternatif. 2.Nourriture.3. Tune. Celer. 4. IVG. Tolu.5. Césarienne. 6. Tris. Ion.7. Prêtre. Dit. 8. Aînée. Lésé. 9. Tee.Mauser. 10. Iu. Peux. Ta. 11.Osés.Rti (tri). 12.Négatrices.

Philippe Dupuis

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1. Espèce de faucon. 2. Bien plusbelles que la réalité. 3.Dans levent. Suit nos achats de près.4. Pose des problèmes. Au centredu delta du Nil. 5. Vient de partir.Mettre en pièces. 6. Appréciémariné et salé. Un peu d’espoir.7. Entrées par les narines.8. Réservé aux proches. Sent venirles choses. Ami déglingué.9. Bonne en robe des champs.Pique et saute. 10. Aven en région.Indispensable dans l’escalade.11. Etaient six pour sa naissance.Plein d’ardeur. 12. Finissent parfaire de gros pavés sur les rayons.

I.Distribue et protège autourd’elle. II. Est aujourd’hui devenuTokyo. Lourdement chargés.III.Nous a entraînés dans les brasd'Un homme et une femme.Elimines brutalement. IV. PoèmesduMoyen Age. Poursuit sansrelâche.V. Point dans l’eau.Accompagne crêpes et galettes.Ville aux bulles d’or.VI. Cambriez.Le faux est bien vrai.VII.Ouvrel’isoloir. Toujours facile à prendre.Blonde de Belgique.VIII.Avancées féminines. Quittât le sol.IX. Abris légers. Encore à l’église,etmaintenant à l’écran.X. Toujours un peu raides.

Vendredi13juinTF1

20.50 Football.Coupe du monde 2014 (1er tour, groupe B) :Espagne - Pays-Bas. En direct.23.05 Qui veut épouser mon fils?Episode 8. Télé-réalité (105min)U.

FRANCE2

20.47 Boulevard du Palais.Série. Notre enfantU. La Ballade du penduU.0.00 La Parenthèse inattendue.Magazine. Invités : Franz-Olivier Giesbert,Marie Bochet, Jeff Panacloc (110min).

FRANCE3

20.45 Faut pas rêver.Népal, aux portes de l’Himalaya. Magazine.22.35 Frères d’armes. Addi Ba.22.40Météo, Soir 3.23.10Docs interdits - Sarajevo.Des enfants dans la guerre (55min).

CANAL+

20.55 JoséphineFilm Agnès Obadia. Avec Marilou Berry, MehdiNebbou, Bérengère Krief (Fr., 2013, audiovision).22.20 Paris à tout prixFilm Reem Kherici. Avec Reem Kherici, TarekBoudali, Cécile Cassel (Fr., 2013, audiovision).23.50 Le Petit Journal (25min).

FRANCE5

20.40Onn’est pas quedes cobayes!Les cobayes s’envolent. 21.35 Peut-on tirerune flèche comme Robin des Bois ?...22.30 C dans l’air. Magazine.23.40 Les 100 lieux qu’il faut voir.Quercy. Documentaire (2014).0.30Qui a tué Jaurès?Documentaire. Philippe Tourancheau (90min).

ARTE

20.50 Cœur léger, cœur lourd.Téléfilm. Markus Imboden. Avec Henry Hübchen,Martina Gedeck (Suisse, 2013).22.20Monroe. Série (saison 1, 1 à 3/6).0.45Court-circuit.Spécial Festival d’Annecy (55min).

M6

20.50 Bones.Série. La Carotte (saison 9, 18/24)U ; SanscontrefaçonU. Justice divineV (saison 6, 10et 11/23) ; Os troubles. Morts au combatU(saison 1, 20 et 21/22). Avec Emily Deschanel.1.10New Girl.Série. Esprits féconds. Le Supplice de labaignoire (saison 2, 9 et 10/25, inédit, 55min).

Samedi14juinTF1

20.55 La Chanson de l’année.Invités : London Grammar, Cris Cab, Mika, Tal...23.40 Football.Coupe du monde 2014 (1er tour, groupe D) :Angleterre - Italie. En direct (135min).

FRANCE2

20.45 Les Années bonne humeur.Invités : Sabrina, Las Ketchup, M Pokora, Tal...23.00Automobilisme.Les 24 Heures du Mans 2014. La course. En direct.23.10On n’est pas couché.Talk-show (180min).

FRANCE3

20.45 Le 7e Juré.Téléfilm. Edouard Niermans. Avec Jean-PierreDarroussin, Isabelle Habiague (Fr., 2007)U.22.15Météo, Soir 3.22.40 Inspecteur Barnaby.Série. Le Blues de l’assassinU.0.15Appassionata. « Le Requiem»,de Verdi. Par l’Orchestre de la Scala (105min).

CANAL+

20.55 LaMarquedes anges:MiserereFilm Sylvain White. Avec Gérard Depardieu,JoeyStarr, Rüdiger Vogler (Fr., 2013, audio.)V.22.40 L’Ombre de la loi.Téléfilm. Christian Alvart. Avec Til Schweiger,Fahri Yardim (Allemagne, 2013, 90min)V.

FRANCE5

20.35 Echappées belles.Côte d’Azur, l’échappée bleue. Magazine.22.05 L’Ecosse, miroir du temps.Documentaire. Pierre Brouwers (2007).23.00 Tous en Seine.Un fleuve au cœur de Paris. Documentaire.23.50 Dans les coulissesdu Festival de Cannes (50min).

ARTE

20.50 L’Aventure humaine.Crimes à la cour des Médicis. [1 et 2/2].Intrigues et trahisons. Le Pouvoir d’une femme.22.35 Le Parfum. Une histoire de senteurs.23.30Donna Summer. Hot Stuff.0.25 Tracks. Magazine (45min).

M6

20.50 Hawaï 5-0.Série. Pe’epe’e Kanaka. Kupu’eu. Kupouli ’la(S4, ép., 20, 5 et 6/22)U ; La O Na Makuahine(saison 3, 1 et 2/24)U. Avec Alex O’Loughlin.1.10 Supernatural.Série (S5, 22/22 ; S8, 1/23, 100min)V.

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Toulouse(Occitane Imprimerie)

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Président : Louis DreyfusDirectrice générale :Corinne Mrejen

Lesjeux

Page 17: Le Monde Elafonissos 14 Juin 2014

décryptages

UnionparSelçuk

La situation en Irak ces derniersjours ne laisse pas d’être préoc-cupante. Le mouvement djiha-diste incarné par l’Etat islami-que en Irak et au Levant (EIIL),enSyrie,aengagéuneoffensive

qui, après la prise de Mossoul (nord),menace Bagdad et le gouvernement dupremierministre, Nouri Al-Maliki.

L’Irak n’a toujours retrouvé ni stabiliténi sécurité dix ans après l’interventionaméricaine de 2003, dont les conséquen-ces désastreuses apparaissent de plus enplus évidentes. Le proconsul américain,Paul Bremer, qui, en décidant, dès sa prisede fonctionsen2003,dedissoudre lepartiBaas et l’armée irakienne, forte à l’époquede400000hommes,aprisunelourderes-ponsabilité en détruisant les bases del’Etat irakien. Cette faute originelle n’ajamais été réparée, même si les succes-seursdeM.Bremerontpratiquédespoliti-ques plus habiles. Certes, les autorités ira-kiennes ont tenté de reconstruire unearméeavec l’appuiaméricain,quia fourniformateursetmatériels.Acôtéde l’armée,dominée dans son commandement pardes chiites, ont été créées par l’occupantaméricaindesmilices sunnites, lesSahwa,qui ont joué le rôle de forces supplétivespour contrer les « terroristes», surtoutsunnites. Ces milices fortes de 100000combattants devaient être à terme inté-gréesdans l’armée régulière, ce quin’a étéfait que partiellement. Ainsi, des milliersde combattants se sont retrouvés sansargent, mais avec des armes, après ledépart des Américains.

La responsabilité de la situationactuel-le vient aussi de la politique sectaire dupremierministre,Nouri Al-Maliki, dont ladérive autoritaire est critiquée, y comprisdans son propre camp. La révision de laConstitution de 2005, réclamée par lessunnites, n’a toujours pas été entreprise.Malgré lapressionaméricainepour inclu-re dans le jeu politique les sunnites, touslespostes importantsontété confiés àdesministres ou responsables chiites. Dans larépartition des principales institutions,les sunnites ne disposent que de la prési-denceduParlementdeplusenplusmargi-nalisé. Encore convient-il de préciser que,depuis 2011, plusieurs hauts responsablessunnites, notamment le vice-président,Tareq Al-Hachemi, ont été poursuivispour «terrorisme» ou «trahison». Cettepolitique d’exclusion explique que lessunnitesaientboycotté lesélections légis-latives du 30avril. Il y a une rupture com-plèteentrelacommunautésunniteet l’ac-tuel chef de gouvernement.

Enfin, la guerre civile en Syrie ne pou-vaitpas être sansconséquences en Irak. Levidepolitiquecréépar lerégimedeBacharAl-Assaddans lapartienord-est de laSyrieaattiré lesdjihadistesdetoutesprovenan-ces, notamment ceux de l’EIIL. Le prési-dentsyrienalaissésedéveloppercesmou-vements pour mieux renforcer son argu-mentationetfairecroirequelechoixpourle peuple syrien était entre les « terroris-tes» et la stabilité qu’il entend incarner.Mais les affrontements de l’EIIL avec desgroupes djihadistes (Front Al-Nosra) aconduit une grande partie de ses combat-tants à délaisser une partie du territoiresyrien et à se replier en Irak.

Mais quel danger représente l’Etat isla-mique? Les informations concernant cemouvement d’un nouveau type sont peuprécises et souvent sujettes à caution. Ilreprésenterait un total de 10000à15000combattants répartis sur l’est de laSyrie et le nord-ouest de l’Irak. Héritierd’«Al-Qaida au pays des deux fleuves», ils’est constitué après la mort de son chefAl-Zarqaouienagrégeantdesélémentsdis-parates : rescapés de l’armée irakienne,anciens membres des Sahwa bénéficiantdelabienveillancedecertainestribussun-nitesquiont rompuavecBagdad.Respon-sable de la plupart des attentats anti-chii-

tes en Irak et actif en Syrie, ses actionsmeurtrières et violentes se sont dévelop-pées à partir de 2011. Si la direction et l’en-cadrement sont irakiens, avec Abou BakrAl-Baghdadi à sa tête, il a enrôlé de nom-breux djihadistes étrangers venant duMoyen-Orientoud’AfriqueduNord,maisaussi des Caucasiens. Plusieurs milliersd’Européens (Belges, Français et Britanni-ques) auraient rejoint ce mouvement,dont la brutalité efficace fascine lesapprentis djihadistes. Si sa mission à ter-me est bien l’instauration du califat, l’ob-jectif premier est, avec desméthodes bru-tales, ladéstabilisationdupouvoir chiiteàBagdad, jugé illégitime et constitué de«mécréants». Il bénéficie de ressourcesimportantes, provenant de riches dona-teursduGolfe,etdetraficsentoutgenre. Ildispose également d’armes volées danslesbasesmilitairesouparfoisvenduesparl’armée régulière. Leur puissance vientdes faiblesses de l’armée peu motivée etdésorganisée, plus que de leur nombre,car lerapportdeforce leurestdéfavorable.L’EIIL seprésenteainsi commeunmouve-ment rival d’Al-Qaida avec lequel il rivali-se en brutalité.

L’avancée des forces de l’EIIL contribueà accélérer le phénomène de fragmenta-tion de l’Irak, avec un Kurdistan qua-si indépendant dans les faits et un payssunnite hors contrôle de Bagdad. La créa-tion d’un véritable «djihadistan» abouti-rait à la présence d’un vivier de combat-tants capables de mener, à partir de cettebase, desopérations dans les paysvoisins.Il constitue aussiunemenacepour l’Euro-pe qui doit faire face à une autre menacedjihadiste sur son flanc sud enAfrique.

Legouvernement irakiena toutefois lesmoyens de réagir. Il est vrai que la confu-sionqui règneàBagdad, où leparti dupre-mier ministre n’a pas une majorité suffi-santepourgouverneretdoitsetrouverdesalliéspour formerunecoalition,ne facilitepas la prise de décisions rapides et claires.Laformationdugouvernementtarde:uneépreuve de force est en cours entre NouriAl-Maliki et ses opposants, sunnites maisaussi chiites. La solutionest d’abordpoliti-que etpassepar la formationd’ungouver-nementqui intègredespersonnalités sun-nites représentatives. Faute de quoi, le ris-quedeguerre civile est réel. La solutionestaussi militaire : les autorités disposent deforces spéciales et demilices chiites, com-me le Hezbollah irakien, qui ont lesmoyensde combattre un ennemi dispara-te et moins nombreux. Paradoxalement,ces événements peuvent accroître l’in-fluence de l’Iran, déjà forte, qui fera toutpour éviter que le gouvernement échappeauxchiitesetreviennedanslesmainsd’unrégime sunnite, donc hostile. La forceAl-Qodsdes gardiensde la révolution, déjàsur place, peut jouer un rôle importantdansladéfensedurégime.Ducôtéocciden-tal, lamargedemanœuvreestfaible,comp-te tenu des réticences américaines à sereplongerdans le bourbier irakien.

Cesfaitsconfirmentquelesconflitsasy-métriquessegénéralisentdansunMoyen-Orient en pleine tourmente. L’embarrasdes puissances extérieures est évident,qu’il s’agisse des Etats-Unis, de l’Europe,de laRussieoudelaChine,dont lesmusul-mans sont influencés par cette évolution.Un intérêt communexiste etpeut-êtreunterrain d’entente. Cette situation dange-reuse appelle une action concertée de lapart de la communauté internationale,dont la sécurité peut être affectée. LeConseil de sécurité est un forum appro-prié pour définir une stratégie. La France,quiauneexpériencede lutte contre le ter-rorisme, peut être une force de proposi-tion écoutée dans ce domaine.p

DavidCameronPremierministre du Royaume-Uni

Irak:uneactionconcertéeetinternationales’imposeL’interventionde2003estresponsabledelasituation

PourbiendesEuropéens, lagrandequestionaujourd’hui est de savoir qui va remporterla Coupe dumonde de football. Ils ne sontqu’une petite minorité à suivre le débatsur la présidence de la Commission euro-péenne.Or il s’agit làd’unenjeuqui touche

au cœur de la façon dont l’Union européenne (UE)prend ses décisions, à l’impératif du respect de sesrègles et au type de rapport qui convient entre lesnations européennes et les institutions de l’UE.

Les électeurs ont envoyé un message clair lors duscrutin européen de mai. Ils sont désabusés par lafaçon dont fonctionne l’Europe. Ils exigent qu’ellechange afin qu’elle se concentre sur les questions quicomptentpoureux: lacroissanceetl’emploi.Et ilsveu-lent que l’Europe les aide, plutôt qu’elle leur dise cequ’ils doivent faire.

C’est ce que lamontée des partis hostiles à l’Europea fait apparaître clairement, avec la poussée de l’abs-tentiondans laplupartdespayset labaissedusoutienaux groupes politiques les plus importants au Parle-ment européen. La question qui se pose désormaisaux gouvernants est celle-ci : comment répondre à cemessage? Les résultats du scrutin de mai devraientconstituer un signal d’alarme pour eux. C’est l’avenirde l’Union qui est en jeu. Il lui faut soit changer, soitaccepter de continuer sur la voie dudéclin.

La position du Royaume-Uni est claire : nous vou-lons la réussitede l’UE.Pourdéfendre la liberté, lapaixet la démocratie à travers notre continent et pour sti-muler la prospérité. Telle est la tâche centrale de l’UEaujourd’hui. Et cela passepar uneUnionplus ouverte,davantagetournéevers l’extérieur, plus soupleetpluscompétitive. Il y faut aussi un leadership ambitieux –despersonnalitésprêtesàtenircomptedespréoccupa-tionsdesélecteursetà faire faceauxdéfisauxquelsestconfrontée l’Europe.

La première mise à l’épreuve est la désignation duprochain président de la Commission européenne.Selon les traitéseuropéens, telsqueratifiéspar lesPar-lements nationaux, c’est aux chefs de gouvernementde l’UEqu’il revientdeproposer le candidat à la têtedela Commission européenne – quoiqu’ils doivent« tenir compte» du résultat des élections au Parle-ment. Lesdéputés européens seprononcentensuite, àbulletinsecret, surcettecandidature.Telleest laprocé-durelimpideconsacréeparletraitédeLisbonne,auter-me d’une négociation tortueuse sur le bon équilibreentre Etats-nations et Parlement européen.

Or certains membres du Parlement européen ontinventé une nouvelle procédure par laquelle ils cher-chent à la fois à choisir et à élire le candidat. Chacundesgrandsgroupesparlementairesaprésentésa«têtede liste» pendant la campagne électorale, et il s’estentenduencoulisseavec lesautrespours’allier et sou-tenir, après le scrutin, la tête de liste du parti lemieuxreprésenté. Cette conception n’a jamais été débattuepar leConseileuropéen,ellen’apasfait l’objetdenégo-ciations entre institutions européennes et n’a jamaisété ratifiée par les Parlements nationaux. Et pourtant,lespartisansdes têtesde liste fontvaloir que le scrutina eu lieu, que les Européens ont choisi Jean-ClaudeJuncker pour présider la Commission et qu’il seraitantidémocratiqueque lesgouvernants élusde chaque

pays désignent quelqu’un d’autre. Ce n’est pas s’enprendreàM.Juncker,personnalitépolitiqueeuropéen-ne expérimentée, que de dire que tout cela ne faitaucun sens. Lamajorité des Européens n’a pas partici-péà l’électionauParlementeuropéen.Le tauxdeparti-cipation a baissé dans la plupart des Etats membres.M.Junckern’a figuré suraucunbulletindevote.MêmeenAllemagne,où l’idéede la«têtede liste»aété lepluslargement popularisée, seuls 15% des électeurssavaient queM.Juncker était candidat à la présidencede laCommission. Celui-ci ne s’est pas rendudans cer-tains Etatsmembres. Ceux qui ont voté l’ont fait pourchoisir leur député européen et non le président de laCommission.M. Junckerne s’est présenténulle part etn’a été élu par personne. Affirmer le contraire seraitprofondémentdommageablepour l’Europeetcelafra-giliserait, au lieude la renforcer, la légitimitédémocra-tique européenne.

Cela déplacerait par ailleurs le pouvoir au détri-ment des gouvernements nationaux sans l’approba-tion des électeurs. Dans la réalité pratique, cela empê-cheraitpourtoujoursunpremierministreouunprési-dent en exercice de prendre la tête de la Commissioneuropéenne–cequi limiteraitartificiellementlevivierde talents au moment précis où l’on a besoin desmeilleurs parmi les meilleurs. Et cela donnerait à la

Commission européenne une dimension politique –avec les risques contre lesquels M.Giscard d’Estaingavait mis en garde voici plus d’une dizaine d’années :unetelleprocédurerendraitplusdifficileà laCommis-sion «d’incarner l’impartialité et le bien commun del’Union».

Nombreuxsontceuxchezquicetteprisedepouvoiren sous-main suscite de profondes appréhensions. Etil ne faudrait pas céder sur ce sujet alors que cela crée-rait undangereuxprécédent pour l’avenir.

Nousdevonsnous concentrer sur la recherchede lameilleure candidature possible. Quelqu’un qui sachecommentonréforme,commentonstimulelacroissan-ce et on crée des emplois, et quelqu’un qui admetteque les besoins de l’Europe peuvent être servis aumieux par des interventions à l’échelle nationale. Unbon intermédiaire inspirant confiance. Le Royaume-Uni a la réputation de défendre la démocratie et de sebattre pour faire valoir son intérêt national.Or il s’agiten l’occurrence de se battre pour faire valoir l’intérêtde l’Europe et les trois grands partis politiques duRoyaume-Uni sont à l’unisson sur ce sujet.

Le moment est maintenant venu pour les gouver-nants élus de chaque pays d’Europe d’avoir le couragede leurs convictions en défendant la place qui est laleur dans l’UE et ce qui est bon pour son avenir. Lemoment est maintenant venu de proposer un candi-datquivaconvaincrelesélecteurseuropéensquenousallons répondre à leurs préoccupations.

Lesévénementsrécentsnousrappellent le lourdtri-butquelespaysd’Europeontpayédansleur luttepourla liberté et la démocratie. Nous avons beaucoup pro-gressé dans les décennies qui ont suivi, en respectantnos différences, en suivant les règles, en traçantpatiemmentensemblenosavancées communes,dansl’esprit européen. C’est ainsi que nous devons conti-nuer à travailler. p

Lapolitiquesectairedupremierministre,

NouriAl-Maliki,dontladériveautoritaireestcritiquée,ycomprisdanssoncamp,porte

aussiuneresponsabilitédanslasituationactuelle

DenisBauchardAncien ambassadeur en Jordanie(1989-1993), conseiller spécial

pour leMoyen-Orient à l’Institutfrançais des relations internationales

Ceuxquiontvotél’ontfaitpourchoisirleurdéputéeuropéen

etnonleprésidentdelaCommission

M.Junckern’aétééluparpersonne

170123Samedi 14 juin 2014

Page 18: Le Monde Elafonissos 14 Juin 2014

D euxsévèresdéfaites électo-rales, l’une enmars, l’autreenmai, auronteu raisondu

pactede responsabilité dans sadimensionsymbolique.Au lieudusursautnational voulupar Fran-çoisHollande, le 14janvier, autourde la compétitivité et duredresse-ment, onassiste audélitementnational: chaqueacteur s’ingénieà se caricaturer lui-mêmedans lejeusi français de ladéfausse géné-ralisée.

Alorsquedeuxprojets de loidefinances rectificative tententdemettreenœuvrecequi aétéannoncé, lepatronat fait la finebouche.Quand ilne crachepas car-rémentdans la soupe, commeGeoffroyRouxdeBézieux, le vice-présidentduMedef, qui a récem-mentqualifiéde«supercherie com-plète» lesquelque40milliardsd’eurosd’allégementsde chargesdestinésauxentreprises.

LaCFDT, la seule centrale syndi-caleavec laCFTCàavoir osé semouillerdans lepacte, refusedejouer les kamikazes. A laprochaineprovocationpatronale, elle quitte-ra lenavire. Les autres syndicatsassistent enspectateurs à la jouteenguettant lemoindre conflitsocial – cheminots, taxis, intermit-tentsduspectacle –quipourraleurpermettrede se refaireunesanté sur ledosdugouvernement.

Sur la scènepolitique, cen’estpasmieux. Les centristes, quivoyaientd’unbonœil l’aggiorna-mentoéconomiqueduprésident,ne sontplusdisposés à l’aider.«Vous, jene saispas,maismoi j’aibeaucoupdemal àyvoir clair»,lanceFrançoisBayrou, le patronduMoDem, enpointant lesbaissesd’impôts en faveurdesménagesmodestes, pasprévues aupro-grammeet ajoutées inextremispourcontenir la fronde socialiste.

Car c’est biende ce côtéque sesitue lenœudprincipal : unepar-

tiede la gaucheest entréeen séces-sion. Ellene se reconnaîtpasdanslapolitiqueéconomiquedugou-vernement. Elle rendFrançoisHol-lande responsabledugigantesqueplansocial qui a affecté les élussocialistes et les salariés employésparcesélusau lendemaindudésas-tredesmunicipales.

Pour sauver cequipeut l’êtreencoreet redevenirdegauche, elleréclamedes inflexions, veutmarier l’offre et lademande, leredressementet la justice sociale,laproduction et la redistribution,alorsque lesdonnéesobjectives–faiblessedesmargesdes entrepri-seset déficit public chronique–interdisent ce jeud’équilibriste.

NomméàMatignonpourdéfen-drecoûtequecoûte lepactede res-ponsabilité,ManuelVallsuse sa

popularitéànégocierpiedàpiedavecdes troupes rebelles. Leprési-dent, lui, se tait, car saparole estcomplètementdévaluée.Mais ilagit encoulissepour sauver cequipeut l’êtreencore, recevant acteurssociauxet politiquespour tenterde les convaincrequ’auboutde l’ef-fort viendra le réconfort. Lepactede responsabilité, quidevait êtreunsursaut, estdevenuuncompro-misdésespérément laborieux, lesymboled’une impuissanceà sedépasser, un résuméde la tragédiefrançaise.p

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ANALYSEparMichelNoblecourtEditorialiste

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02-mai 31. JÉRÔME BOSCH, Le Jardin des délices09-mai 32. REMBRANDT, Boeuf écorché16-mai 33. MASACCIO, Adam et Eve chassés du Paradis23-mai 34. JACQUES LOUIS DAVID, Marat assassiné30-mai 35. DUCCIO DI BUONINSEGNA, Maestà06-juin 36. EGON SCHIELE, Autoportrait13-juin 37. JAN VAN EYCK, Vierge au chancelier Rolin20-juin 38. FRA ANGELICO, L’Annonciation27-juin 39. JEAN-ANTOINE WATTEAU, Gilles04-juil. 40. TITIEN, Amour sacré et amour profane

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Inclus un tiragegrand format de l’œuvre

Le volume n°37Vierge au chancelier Rolinde Jan Van Eyckdès vendredi 13 juin

Laurent Berger a toutes les raisons deseréjouirducongrèsdesonorganisa-tion, qui s’est tenu du 2 au 6 juin àMarseille.Dansunpaysagepolitiqueet syndical plutôt sinistré, la CFDT aaffiché sa bonne santé et sa cohéren-

ce. Le fait est suffisamment rarepourêtre souli-gné. Et son secrétaire général a emporté haut lamain toutes les épreuves de son premier exa-men de passage: un quitus de 85,88% – contre86,8% pour son prédécesseur, François Chérè-que, au congrès de Tours en 2010 –, une résolu-tion votée à 87,24% (10,3points de plus qu’en2010). Cerise sur le gâteau,M.Berger a été rééluau bureau national, avec le score soviétique de98,31% (3 points de plus que M.Chérèque),lequel l’a ensuite confirmé à l’unanimité dansses fonctions de «patron»de la CFDT.

Mais le «bonheur» affiché par M.Berger ris-qued’être de courte durée. Si les débats deMar-seille ont fait entendre peu de désaccords de lapart desmilitants, ils ont fait place àdes doutesetàdes interrogationssur lacapacitéde laCFDTà engranger des résultats. Si l’opposition inter-ne a disparu, il subsisteunbloc critique, autour

de 35%, qui s’est fait entendre à travers desamendements dans le débat sur la résolution.«Latâcheest rudemaiselle estbelle», a soulignéM.Bergerdanssondiscoursdeclôture,enobser-vant que «lesmois qui viennent continueront àêtredifficiles»etque«l’actionsyndicaleet ledia-logue social doivent produire des résultats, desdroits et des avancées concrètes pour tous».

Enclair, pour le secrétairegénéralde laCFDT,c’est maintenant que les difficultés commen-cent. Pour illustrer sa situation, il a usé d’unemétaphore, en confiant que son syndicat est« tout le temps sur une ligne de crête »,c’est-à-dire sur la ligne de points hauts d’unrelief séparant deux versants opposés ou deuxabîmes… Cette position fragile, la CFDT devral’assumer face à trois massifs, plutôt délabrés,unsyndical,unpatronaletungouvernemental.

Il y a un an, lorsqu’un arrêté ministériel, endate du 30mai2013, a fixé la liste des organisa-tionssyndicales représentatives, enfonctiondeleuraudience auxélectionsprofessionnelles, laCFDT s’est doublement réjouie. Avec 29,71%,elle talonnait laCGT (30,63%)et, surtout, lepôleréformiste qu’elle constituait avec la CFTC et laCFE-CGC était clairementmajoritaire (51,09%).Aelle seule, elle frôlait les30%nécessairespourla validation d’un accord interprofessionnel, laCGTetFO(48,91%àellesdeux)n’atteignantpasleseuil requisde50%pour faire jouer leurdroitd’opposition.

Mais le pôle réformiste n’a chanté qu’un été.

Pour la CFDT, la CFTC est un partenaire fiablemais faible, tant des interrogations subsistentsursasurviedanslesbranchesprofessionnelleslors du prochain verdict de représentativité, en2017.Fidèlealliée, l’UNSAn’estpasreprésentati-ve. Quant à la CFE-CGC, embarquée dans unestratégie brouillonne, qui l’a conduite à retirersa signature sur le pacte de responsabilité enreprésailles à l’accordqu’elle a refusé sur l’assu-rance-chômage,elle faitbandeàpartet envientàqualifier la CFDTde «syndicat officiel»…

«Discours catastrophistes»La quasi-glaciation des relations entre la

CFDT et la CGT pèse aussi lourdement. Quandelles agissent de concert, elles se complètent,dans une parfaite répartition des rôles, et leuraction est plus efficace. S’il a fustigé «la suren-chère des bons mots» et « les discours toujoursplus catastrophistes» de certains syndicats quine font «le jeu que des extrêmes, de droite com-medegauche»,M.Bergern’apasattaquéfronta-lement la CGT àMarseille. La faiblesse de celle-ci,toujoursempêtréedanssesdissensionsinter-neset souventhors jeu, luipermetd’espérer luiravir la première place en 2017.Mais, dans l’im-médiat, c’est unhandicappour la CFDT.

Avec lepatronat, l’heureestaubrasde fer surtous les sujets, de la pénibilité aux seuilssociaux, et d’abord sur le pacte de responsabili-té. En le signant, et en acceptant de facto unebaisse des charges pour les entreprises et des

économies dans les dépenses de l’Etat, M.Ber-ger a pris un risquepolitique. Il lui faut démon-trer que ce compromis donne des fruits. «Il estgrand temps de passer à la vitesse supérieure»,a-t-il déclaré, mardi 10juin, après un entretienavecFrançoisHollande,enréclamant«desrésul-tats tangibles sur l’emploi», avant la conférencesociale des 7 et 8juillet. Reçu à son tour par lechef de l’Etat, jeudi, Pierre Gattaz, présidentd’unMedef oùdeux lignes – libérale et sociale –s’affrontent, a aussi plaidé l’urgence,mais pour«avoir une visibilité à trois ans des trajectoiresdebaisse du coût du travail et de la fiscalité».

Partenaire privilégié d’un pouvoir impopu-laire, M.Berger, qui a durci le ton dans son rap-port d’activité, sait qu’il a beaucoup à perdred’une telle proximité si, une fois encore, il n’ob-tientpasderésultats.AMarseille, ilabienmesu-ré laprisede risquesde son«syndicalismed’en-gagement» : «Devrions-nous attendre que lepatronat comprenne l’intérêt du dialoguesocial?Attendrequel’ensembledumondesyndi-calsoitdevenuréformiste?Attendreque leprési-dentde laRépubliquesoitpopulaireet lamajori-té parlementaire unie et acquise à nos posi-tions? (…)Non, l’urgencesocialenesauraitatten-dre.»Cohérente, laCFDT jouegros. Si lepactederesponsabilitécapote, ceseraunéchecpourellemais,parricochet, toutlesyndicalisme,passeu-lement réformiste, en subira les effets. p

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POLITIQUE | CHRONIQUEpar Françoise Fressoz

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Barack etMichelleObama, à pied sur Pennsylvania Avenue,mardi 20 janvier, se dirigent vers laMaisonBlanche. DOUGMILLS/POOL/REUTERSa Les carnets d’une chanteuse.Angélique Kidjo, née au Bénin, a chantéaux Etats-Unis pendant la campagnedeBarackObamaen2008, et de nouveaupendant les festivités de l’investiture,du 18 au 20 janvier. Pour LeMonde, elleraconte : les cérémonies, les rencontres– elle a croisé l’actrice Lauren Bacall,le chanteur Harry Belafonte… et l’écono-

miste Alan Greenspan. Une questionla taraude : qu’est-ce que cet événementva changer pour l’Afrique ? Page 3

a Le grand jour. Les cérémonies ;la liesse ; lesambitionsd’unrassembleur ;la première décision de la nouvelleadministration: la suspensionpendant cent vingt jours des audiencesde Guantanamo.Pages 6-7 et l’éditorialpage 2

a It’stheeconomy... Il faudraà lanou-velle équipe beaucoup d’imaginationpour sortir de la tourmente financièreet économique qui secoue la planète.Breakingviewspage 13

a Feuille de route.« La grandeurn’est jamais un dû. Elle doit se mériter. (…)Avec espoir et vertu, bravons une foisde plus les courants glacials et enduronsles tempêtesà venir. »Traduction intégraledu discours inaugural du 44eprésidentdes Etats-Unis. Page 18aBourbier irakien.Barack Obamaa promis de retirer toutes les troupesde combat américaines d’Irak d’iciàmai 2010. Trop rapide, estiment leshautsgradésde l’armée.Enquêtepage 19

GAZA

ENVOYÉSPÉCIAL

D ans les rues de Jabaliya, lesenfants ont trouvé un nou-veau divertissement. Ils col-lectionnent les éclats d’obus et demissiles. Ils déterrent du sable desmorceaux d’une fibre compactequi s’enflamment immédiatementau contact de l’air et qu’ils tententdifficilement d’éteindre avec leurspieds. « C’est du phosphore. Regar-dez comme ça brûle. »Surlesmursdecetterue,destra-cesnoirâtressontvisibles.Lesbom-bes ont projeté partout ce produitchimique qui a incendié une petitefabrique de papier. « C’est la pre-mièrefoisque jevoiscelaaprès trente-huit ans d’occupation israélienne »,s’exclame Mohammed Abed Rab-bo. Dans son costume trois pièces,cette figure du quartier porte ledeuil. Six membres de sa familleont été fauchés par une bombedevant un magasin, le 10 janvier.Ils étaient venus s’approvisionnerpendant les trois heures de trêvedécrétées par Israël pour permet-tre auxGazaouis de souffler.Le cratère de la bombe est tou-jours là. Des éclats ont constellé lemur et le rideau métallique de la

boutique. Le père de la septièmevictime, âgée de 16 ans, ne décolè-re pas. « Dites bien aux dirigeantsdes nations occidentales que ces septinnocents sont morts pour rien.Qu’ici, il n’y a jamais eu de tirs deroquettes. Que c’est un acte crimi-nel. Que les Israéliens nous en don-nent la preuve, puisqu’ils sur-veillent tout depuis le ciel », enrageRehbi Hussein Heid. Entre sesmains, il tient une feuille depapier avec tous les noms desmortsetdesblessés, ainsi que leurâge, qu’il énumère à plusieursreprises, comme pour se persua-der qu’ils sont bienmorts.MichelBôle-RichardLire la suite page 5et Débats page 17

Ruines, pleurs et deuil :dans Gaza dévastée

WASHINGTONCORRESPONDANTE

D evant la foule la plus considérablequi ait jamais été réunie sur le Mallnational de Washington, BarackObama a prononcé, mardi 20 janvier, undiscours d’investiture presquemodeste. Aforce d’invoquer Abraham Lincoln,Martin Luther King ou John Kennedy, ilavait lui même placé la barre très haut. Lediscoursne passera probablement pas à lapostérité, mais il fera date pour ce qu’il a

montré.Unenouvellegénération s’est ins-tallée à la tête de l’Amérique. Une ère detransformation a commencé.Des rives du Pacifique à celles de l’At-lantique, toute l’Amérique s’est arrêtéesur le moment qu’elle était en train devivre : l’accession au poste de comman-dant en chef des armées, responsable del’armenucléaire,d’un jeunesénateurafri-cain-américain de 47 ans.

Lire la suite page 6Corine LesnesEducation

L’avenir deXavier Darcos«Mission terminée » :le ministre de l’éducationne cache pas qu’il seconsidérera bientôt endisponibilité pour d’autrestâches. L’historiende l’éducation ClaudeLelièvre expliquecomment la rupture s’estfaite entre les enseignantset Xavier Darcos. Page 10

AutomobileFiat : objectifChryslerAu bord de la failliteil y a quelques semaines,l’Américain Chryslernégocie l’entrée duconstructeur italien Fiatdans son capital, à hauteurde 35 %. L’Italie se réjouitde cette bonne nouvellepour l’économie nationale.Chrysler, de son côté, auraaccès à une technologieplus innovante. Page 12

BonusLes banquiersont cédéNicolas Sarkozy a obtenudes dirigeants des banquesfrançaises qu’ils renoncentà la « part variablede leur rémunération ».En contrepartie,les banques pourrontbénéficier d’une aidede l’Etat de 10,5 milliardsd’euros. Montantéquivalent à celle accordéefin 2008. Page 14

EditionBarthes,la polémiqueLa parutionde deux textes inéditsde Roland Barthes,mort en 1980, enflammele cercle de ses disciples.Le demi-frère del’écrivain, qui en a autoriséla publication, essuieles foudres de l’ancienéditeur de Barthes,François Wahl.Page 20

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18 0123Samedi 14 juin 2014

Page 19: Le Monde Elafonissos 14 Juin 2014

reportage

Assosa (Ethiopie)Envoyée spéciale

Le 4×4 démarre en trombe. Unépais nuage de poussière voileun instant le faisceau des pha-res. Une main sur le volant,l’autre réprimant un bâille-ment, Semegnew Bekele pour-

rait faire le trajet les yeux fermés. Cela faittrois ans que l’ingénieur emprunte cetteroute, de jour comme de nuit. «Des gensordinaires sont en train de construire unprojet extraordinaire», lâche-t-il. Ceprojet,c’est le barrage Renaissance, en Ethiopie.Dans la région nord-ouest du pays, à qua-treheuresdepistede laville d’Assosa, toutprès de la frontière soudanaise, plus de8500ouvrierset ingénieursérigent leplusgrandbarrageduNil.

Lechantierestbiengardé.Lescordesten-dues à l’entrée des trois postes de contrôlene s’abaissent que pour les véhiculesmunis d’une autorisation officielle. Amesure que les kilomètres filent au comp-teur, le bruit des pelleteuses devient per-ceptible.Puisapparaîtlechantier,gigantes-que, sesmilliersde tonnesd’agrégatset sessurfaces bétonnées qui tapissent la valléede Guba, cernée demontagnes sèches. Lescentaines de familles de pêcheurs du peu-plegumuz,quivivaient làd’unaffluentduNil, ontétédéplacéesdeplusieursdizainesdekilomètres.Laplaceestlibrepourlacen-trale hydroélectrique, qui deviendra, en2017, la plus importante d’Afrique. A cejour, seul un tiers est déjà construit.

Semegnew Bekele, de la compagnienationale d’électricité EEPCo, a déjà deuxbarragesderrière lui, sur la rivièreOmo,ausud-ouest. A chaque question, il répondpar une avalanche de chiffres : Renaissan-ce, c’estunmonstrede 1780mètresde lon-gueur, 145mètres dehauteur, un réservoird’une étendue de 1874km² qui devraitcontenir 70milliardsdem³d’eau. Lesseizeturbines devraient produire 6000mégawatts d’électricité. De quoi répondreaux nouveaux besoins de l’Ethiopie,deuxième pays le plus peuplé d’Afrique,avecun tauxde croissanceduPIB estiméà10,5%par ances cinqdernières années.

Pour Semegnew Bekele, le compte àrebours est inexorable. Il ne lui reste quetrois anspourdonner corps à ce colossedebéton. « Je n’ai pas l’impression d’être unepersonne particulière,dit-il. Je suis juste un

ingénieur qui coordonne le projet. » Car lafigure tutélaire du barrage, c’est MélèsZenawi, l’ancien premier ministre, qui adirigé le pays d’une poigne de fer pendantplus de deux décennies. La renaissance dupays était son obsession. L’ouvrage seraconstruitcoûtequecoûte,avait-ilannoncéen posant la première pierre, en avril2011,avantdemourir l’année suivante.

Considéré comme un autocrate mépri-sant les droits humains par de nombreu-ses organisations internationales commeAmnesty International et Human RightsWatch, il a néanmoins su jouer de la fibrenationaliste de ses compatriotes pour lesmobilisersurdesthèmescommeleredres-sementéconomiqueetunplanquinquen-naldecroissanceetdedéveloppementlan-cé en 2010, dont le barrage est un despiliers.

Notre ingénieurdonnemaintenantuneinterview à la chaîne gouvernementaleECTV. Le sourire est figé, le discours bienrodé.«Nousmenonsceprojetpourcombat-tre notre ennemi commun: la pauvreté…»,dit-il. A la longue, il a fini par devenir unevedette nationale. A 500 kilomètres de là,dans la capitale, Addis-Abeba, tout lemon-de connaît Semegnew Bekele. Les imagesdu chantier passent en boucle à la télévi-sion, comme pour rassurer les Ethiopiens,quiseserrentlaceinturepourfinancerunepartiedubarrage.

L’ouvrage est estimé à 80milliards debirrs, soit 3milliards d’euros. Comme lepaysn’apasreçudefinancements interna-tionaux, le gouvernement invite sesadmi-nistrésàsouscrireàdesbonsduTrésorqueles fonctionnaires sont obligés d’acheter.Les entreprises, elles, proposent à leursemployésde renoncer àunmoisde salaireparan en faveurdeRenaissance.

Le font-ils de plein gré? Difficile à dire,dans un pays où l’information est stricte-ment contrôlée. «Nous avons donné notreaccord. Nous voulons contribuer au déve-loppement !», affirme dans un café de lacapitale Birhanu Libsework, 25 ans,employédebanque.«Noussommesprêtsànoussacrifierpouravoirunemeilleurequa-lité de vie, plus d’énergie», lance pour sapartGenetGetachew,professeured’amha-rique.Mèrecélibataire,elleaidesafilleàfai-re ses devoirs à la lueur d’une bougie lorsdes coupures de courant, très fréquentes àAddis-Abeba. «Le gouvernement ne doitpas se disperser dans mille projets, maiscelui-là est nécessaire», tempère YeshiNegash (nommodifié à sa demande), doc-torante en sociologie.

Pour le barrage, le gouvernement adéjàrécolté plus de 7milliards de birrs, soit

260millions d’euros, dont plus d’un tiersen provenance de la diaspora. «C’est unequestion de fierté nationale, pas une pres-sion, assureDaniel Berhane. Et quand bienmême,notreculturecollectivistenouspous-seànous soumettreauchoixduplusgrandnombre.» La trentaine, les dents jauniespar la nicotine, cet avocat anime HornAffairs, un groupe Facebook de 6000per-sonnes. Il y aborde les sujets qui fâchentcomme l’homosexualité, la corruption oula liberté de la presse. Mais pas questionpour luidemettre endoute lanécessitédubarrage.

L’Ethiopie se rêve en tigre africain.«Nous en avons fini avec le syndromede ladépendance», assure Zadig Abrha, direc-teur de l’organisation chargée de récolterles fondspourRenaissance. «Nous souhai-tonsreconquérirnotregloirepassée», ajou-te-t-il en invoquant les splendeursd’AxoumetdeLalibela,cesroyaumesabys-sinsanciensencomparaisondesquels,dit-il, les Empires romain et perse étaient desjoueursde secondezone.

Sur la colline surplombant le chantier,une vingtaine de touristes éthiopiens sor-tent d’un autobus, brandissant déjà leur

appareil photo. Ils sont policiers dans larégiond’Amhara, aunord, etontobtenu leprivilège d’une visite guidée. «Ce barrageest le nôtre, chaque citoyenmet sa pierre àl’édifice en donnant de son argent ou de saforce de travail», sourit l’ingénieur Seme-gnewBekele.

Le soleil est au zénith, la températuredépasse les 45degrés. Sur lebordde la rou-te, lesouvrierséthiopiensvontetviennentdans leur combinaison rouge floquée Sali-ni Costruttori, du nom de l’entreprise ita-liennequi construit le barrage.

La ronde des camions-citernes et desbétonnièressoulèvedescumulusdepous-sière. A 1500kilomètres en aval du fleuve,les autorités égyptiennes ne décolèrentpas et ont évoqué la nécessité de partir enguerre. En vertu de deux traités signés en1929 et en 1959, l’Egypte estime avoir desdroits historiques sur le Nil, dont le débitsera affecté par le barrage éthiopien. Cestextes signés avec laGrande-Bretagneet leSoudan lui accordent deux tiers des res-sources en eau ainsi qu’un droit de vetosur tout projet envisagé sur le plus longfleuvedumonde.

«Ces traités sont désormais obsolètes,nous avons le droit de construire ce barra-ge», tranche, imperturbable, AlemayehuTegenu, le ministre éthiopien de l’eau, del’énergieetdel’irrigation.Sonbureaud’Ad-dis-Abeba est dominé par un portrait deMélès Zenawi le poing brandi. «Pendantlongtemps,nousn’avons tiréaucunbénéfi-cedenotre fleuve», dit-il.

Ce temps est désormais révolu. Moha-med Ghoneim, représentant égyptien à

l’Union africaine, n’est pas d’accord.«Impossiblederéaliserunprojetd’unetelleenverguresansétudesd’impactenvironne-mental pour connaître les conséquencessurlespaysenaval.»Al’ambassaded’Egyp-teàAddis-Abeba, cediplomate spécule surles scénarios catastrophes : accumulationdesselsdanslessols,désertificationdester-res en aval, interruption de l’écoulementdufleuve,voirerupturedubarrage.«LeNilest une source vitale pour les 80millionsd’Egyptiens», ajoute-t-il d’unevoix grave.

En 2012, un an après le début de laconstruction, Addis-Abeba a demandé àun comité composé d’experts éthiopiens,égyptiens, soudanais et internationauxdefaire une étude sur les conséquenceshumaines et environnementales du pro-jet. Leur rapport, rendu en mai2013, esti-me que d’autres études doivent êtremenées. Pour les Ethiopiens, il en est horsde question : ils considèrent avoir assezperdu de temps. Les Egyptiens, eux, exi-gentundeuxièmecomité d’experts.

J ennifer Veilleux, géographe spécialisteà l’université d’Oregon des conflits por-tant sur leseaux transfrontalières, sem-

ble leurdonner raison.«Iln’yapasd’infor-mationprécisesurlespertesenvironnemen-tales et les conséquences sociales d’un telouvrage», dit-elle. Réponse des Ethio-piens: «Nous construirons ce barrage coû-te que coûte», martèle le porte-parole duministredesaffairesétrangères,DinaMuf-ti.Malgré plusieurs réunions à Khartoum,les négociations entre l’Ethiopie et l’Egyp-te sont aupointmort. La nuit tombe sur lechantier. Dans les lotissements de la villeéphémère construite au début des tra-vaux, plusieurs milliers de travailleurss’endorment pendant que ceux de la rota-tion suivante jouent au foot en attendantde reprendre le travail.

Dansquelquesannées, lavalléedeGubaseranoyéeparleseaux.«Cettezonedevien-dra une destination touristique», espèreSemegnew Bekele. Qu’en sera-t-il du peu-plegumuz,déplacépar les travaux?Seme-gnew Bekele, les yeux cernés, ordonne decouperl’enregistrement.«Nousnoussacri-fions tous pour notre pays, dit-il. Cela noussemblenaturel.» p

Lecolossed’AbyssinieHuitmille ouvrierset ingénieurs travaillentsur le chantierdu «monstre» long deplusde 1,7 kmet haut de 145m.TIKSANEGERI/REUTERS ; JIRO OSE REDUX/REA

«Nousmenonsceprojetpourcombattre

notreennemicommun:lapauvreté…»SemegnewBekele

ingénieur

Depuis2011,lesEthiopiens

construisentcequiseraleplusgrand

barrageduNil,baptisé

«Renaissance».Promessedeprospérité,

ceprojetgrandioseest largement

approuvéparlapopulationmaisfaitcraindredestensions

avecl’Egypte

EmelineWuilbercq

190123Samedi 14 juin 2014

Page 20: Le Monde Elafonissos 14 Juin 2014

Société éditrice du«Monde»SAPrésident dudirectoire, directeur de la publication Louis DreyfusDirecteur du«Monde»,membredu directoireGilles vanKoteDirecteur des rédactions Jérôme FenoglioDirectricedéléguée à l’organisationdes rédactions Françoise TovoDirecteurs adjoints des rédactions LucBronner, ArnaudLeparmentier, Cécile PrieurDirecteurs éditoriauxGérardCourtois, Alain Frachon, Sylvie KauffmannRédactrice en chef de «MLemagazine duMonde»Marie-Pierre LannelongueRédacteurs en chef,responsable de la rédactionnumérique Vincent Fagot, NabilWakimRédacteurs en chef et chefs de services ChristopheAyad (International), ThomasWieder (France),VirginieMalingre (Economie), AurélianoTonet (Culture)

Rédacteurs en chef «développement éditorial» Julien Laroche-Joubert (Projets),Didier Pourquery (Diversifications, Evénements, Partenariats)Chefd’éditionChristianMassolDirecteur artistiqueAris PapathéodorouPhotographieNicolas JimenezInfographieEric BéziatMédiateurPascal GalinierSecrétaire générale du groupeCatherine JolySecrétaire générale de la rédactionChristine LagetConseil de surveillancePierre Bergé, président

C ela fait trenteansquedesvoix– le compo-siteurPierreBoulez en tête – réclament àParisune sallede concert dignede ce

nom.Dignede cellesqu’on trouveàBerlin, Lon-dresouRome. Cette salle, quipose l’orchestreaucentre et le public autour, ouvrira le 14jan-vier2015auparcde LaVillette, dans le 19e arron-dissement.Ouvrir sera lameilleure façond’oublierque cebâtimentdecaractère, conçupar JeanNouvel, a vacillé sousunepluiede faus-sesnotes: gestationpénible, longsmoisd’inter-ruptionde travaux, sévèresdérapagesdans lecoût, Etat etVilledeParis qui vont se cha-mailler sur la répartitiondes 18millionsd’eu-rosàpayer chaqueannéepourcontribuer à fai-re tourner lamachine,mécènesplutôt timides.A l’arrivéeunbâtiment à381millionsd’eurosque l’onne ferait plusaujourd’hui, dansuneFranceenpleinmarasme.

Mais cevaisseaumusical est là, autant letransformerensuccès. Enattendant, unenou-vellepolémique surgit. Alorsquedans lemétrod’élégantesaffiches invitent lepublic à s’abon-nerà laPhilharmonie,unappeld’offres est lan-cépour loueruneautre salleparisienne, celledePleyel. Le cahierdes chargespréciseque«laprogrammationexclut tout concert demusique

classique». Cequin’estpas anodin, quandonsaitquePleyel estdepuis 1927unhaut lieudesmélomanes.Quel lienentre lesdeuxévéne-ments? Tout simple: la Philharmonie et ses2400places remplaceraPleyel et ses 1900pla-ces. Cesdeux sallesdépendent eneffetde lamêmeentité, laCitéde lamusique.Donc l’Etatn’estpas loin. Pleyel sera louée àpartir de jan-vier àunentrepreneurqui la transformera sansdouteensalle rocket chanson.

Les animateursde laPhilharmonieneveu-lentpasvoir leurprojet, ambitieuxmais fragi-le, parasitéparuneautre «maison» leurappar-tenant.Car 2400places, il faudra les remplir!D’autantquedeuxautres salles vontvoir lejour, cette foisdans l’Ouestparisien: celle deRadioFrance (1400places) ennovembre, etuneautre sur l’île Seguin (1100places) en 2016.

Lamort annoncéeduclassiqueàPleyel pro-voquedes larmes. Le compositeur LaurentPetit-girarddéplore sur le siteduHuffingtonPost, le21mai, la find’un«lieumythique chargéd’his-toire». C’est vrai,maisPleyel adéjàaccueilli desconcertsdeSylvieVartan, EtienneDaho,AlainBashung, LouReedouPatti Smith.Des combatsdeboxeaussi... D’autres invoquentuneatteinteà«la libertéartistique».Mais l’offremusicale à

Paris restera riche. Et, par lepassé, onasuffi-samment reprochéà l’Etatde financerdes insti-tutionsqui semarchaient sur les piedspournepas le saluerquand il fait leménage.

Plus intéressante est la bataille dequartiersetdepublic qui se jouederrière cettepolémi-que. LaPhilharmonie estplantéeportedePan-tin; Pleyel rueduFaubourg-Saint-Honoré, àdeuxpasde l’Etoile. Le fande classique fera-t-ill’effortdequitter sesbelles avenuespour allervers leNord-Est, loinde son logementetde sontravail? Réponsede l’économistePhilippeHer-lin sur sonblog: oui si c’est pour écouter l’Or-chestredeBerlin,maisnonpourdes forma-tionsmoinsprestigieuses.

«Lebon tempo»Il est vrai quedepuisdesdécennies, l’opéra

et le classique sontdominéspar ceprofil : unspectateurâgé, aisé, conservateuret habitué.RobertMarchenoir ledit autrement sur leblogdePhilippeHerlin:«Lamusique classique estunart élitiste, et il en ira toujoursainsi.»

LaurentBayle estpersuadéducontraire, etcela compte car il a les cartes enmain:direc-teurde laCitéde lamusique, dePleyel etprési-dentde laPhilharmonie. «Rajeunir et élargir lepublic est vital et c’est pour celaquenousallonsdans le 19earrondissement, dit-il.Dans toutes lesgrandesvilles dumonde, le classique estdeplusenplusdéconnectéde la société, avecdes ruptu-resphénoménales degénérations.Ondoit sortirdubunkerdesquartiers riches oualors on risqueladégénérescence, lamort lente autourdumêmerépertoireavecunpublicde 70ans.»N’a-t-il pas l’impressionde trahir sonmonde?«Oui,mais c’estpour le sauver.»Tout celadit

d’un toncalmequidoit en agacerplusd’un. PasétonnantqueLaurentBayleprennedes coups.Il décidepour laPhilharmoniedepasser ledébutdes concertsde 20heures à20h30afinque les actifs aient le tempsd’arriver,maisonluidit que c’estunhoraire trop tardif. Il crée950placesdeparkinget il entendquecen’estpasassez. Il créedesnavettespour ramener lepublic aucentredeParis après le concert, et onlesqualifiede trucpour riches.

Bref, sonpari n’estpas gagné.Mais LaurentBayleadesatoutspour attirer les 25-40ans.D’abord, sonprogrammede270concerts, plu-tôt savanten semaine,populaire leweek-end.Acôtéd’orchestres et solistes prestigieux, ilinvitedes figures commeMoriarty, JacquesHigelin, IbrahimMaalouf,OxmoPuccino, BradMehldau. Il a récupéré l’expositionDavidBowiequi a triomphéàLondres, en 2013. Ilmul-tiplie les ateliersmusicauxpour les jeunes. Lestarifsdes concerts seront 20%moins chersqu’àPleyel. Il compte sur l’architecture«provocan-te»de JeanNouvel. Il ditque le publicpourraacheterundisqueouun livre, déjeuner, flânerdans leparc. Premier indice: en trois semaines,5000personnes se sontabonnéespour30000placesvendues.«Nous sommesdans lebontem-po», dit LaurentBayle, qui auragagné sonparis’il arrive à transformer le site en lieudevie.

Restequ’onn’a jamais vuunsecteur culturelautant renâcler alorsqu’on luioffreunéquipe-mentultra-performant. Il s’étaitpassé lamêmechoseavant l’ouvertureduCentrePompidou.p

[email protected]

Lire aussi nos informations page 14

CULTURE | CHRONIQUEpar Michel Guerrin

Pleyelestmorte,vive laPhilharmonie!

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LE FAN DECLASSIQUEFERA-T-ILL’EFFORTDE QUITTERSES BELLESAVENUES

POUR ALLERVERS L’ESTPARISIEN?

4 hommes.UNe hIsToIRe VRAIe hoRs DU CommUN.

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DesAmérindiensveulentdébaptiserlesRedskins

pTirage duMondedaté vendredi 13 juin 2014 : 312 595 exemplaires. 2

S ’ils étaient aussi efficaces surle terrainquedans leur résis-tanceà changerdenom, les

Redskins seraient championsdelaLiguede football américain.Mais rienà faire:malgré l’insis-tanceduprésidentdes Etats-Unis,de 50sénateurs et de lamajoritédes tribus indiennes, les «Peauxrouges»deWashington refusentde troquer leurnomcontreuneappellationplusneutre.

Pourdesoreilles étrangères,«redskins»pourrait paraître inof-fensif. Pour lesAmérindiens,«Peaux rouges» ranime lamémoiredes annéesde larmes etde lutte contre les colonsblancs.C’estun terme injurieux. Les acti-vistes s’offusquent du logoduclub–unprofil d’Indiende bandedessinée, les cheveuxnoirs etlongs, le nezdroit – et de lamas-cotte affubléedeplumes, qui ridi-culiseà leurs yeux laparure tradi-tionnelle.

Sourde oreilleLeclub, qui porte lenom

depuis 1932, estaujourd’hui lapro-priétéd’un investisseur immobi-lier,Daniel Snyder, qui a fait fortu-nedans lespanneauxpublicitai-res. Le self-mademilliardaire affir-meque lenomest, au contraire,unhommage à lavaillancedesAmérindiens et il n’entendpas lemodifier.«Jamais», a-t-il répon-duauquotidienUSAToday. «Etvouspouvez l’imprimer enmajus-cules.»

Cene serait pourtantpasunepremière. L’histoire du sport amé-ricainest ponctuéede révisions,notammentparmi les équipesuniversitaires.MaisDaniel Sny-der fait valoirqu’il n’y apasunani-mité chez les Indiens eux-mêmes,et il a réussi àmettreune tribudesoncôté.

Unprocès courtdepuis 1992. Lapressionvientde s’accroître sur

l’équipedeWashingtonet laNational Football League (NFL)depuis la chutedupropriétaire del’équipedebasket-ball des LosAngelesClippers,DonaldSterling,saisi en flagrant délit de remar-que raciste. Lanation californien-nedesYochaDeheWintuna finan-céunclippublicitairequi a étédif-fusé le 10juinpendant la finaledebasketde laNBA. Lavidéo, produi-tepar la Conférencenationaledestribus (National CongressofAme-rican Indians), fait la liste desnomsque les Indiens revendi-quent: «Tecumseh», «Geroni-mo»…Desqualificatifs: «indomp-tables», «patriotes», «laisséspour compte».«Il y aunmotqueles Indiensneprononcent pas»,poursuit le clip. Sur l’écran appa-raît le casquedesRedskins, avec lelogostéréotypé.

Soixante-quinzeassociationsindiennes, représentant 2mil-lionsdepersonnes, ont écrit auxjoueursde la liguepour les sensi-biliser à cenomqui«n’honorepasles gensde couleur». Le commis-sairede laNFLa jusqu’à présentfait la sourdeoreille. Côté résul-tats, l’équipe a fini dernièreouavant-dernièreduchampionnatdans sept desdixdernières sai-sons.

Lesassociationsont l’intentiond’interpellerBarackObama lorsde savisite enpays indienvendre-di 13 juin. Il sera le premierprési-dent en exercice àvisiterune tri-bu– les SiouxdeStandingRock,dans leDakotaduNord–depuisBill Clinton, en 1999. Candidat, lesénateurafro-américainavait ren-duvisite auxCrowduMontana,en2008. Ceux-ci l’avaient formel-lement«adopté» et lui avaientdonnéunnom– traditionnel,celui-là: «BarackBlackEagle».L’aiglenoir.p

Corine Lesnes(Washington, correspondante)

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