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JOURNAL DES FRANÇAIS À L’ÉTRANGER Les opportunités d'emploi et d'affaires sont nombreuses en Pologne et la France est au deuxième rang des investisseurs étrangers. Enquête au cœur des entreprises et témoignages de Français qui vivent dans le pays pour comprendre les raisons d'un tel engouement. LE GRAND DOSSIER Pologne, le temps du renouveau ! © Mark and Anna Photography C Cracovie.

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JOURNAL DES FRANÇAIS À L’ÉTRANGER

Les opportunités d'emploi et d'affaires sont nombreuses en Pologne et la France est au deuxième rang des investisseurs étrangers. Enquête au cœur des entreprises et témoignages de Français qui vivent dans le pays pour comprendre les raisons d'un tel engouement.

LE GRAND DOSSIER

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IIIJOURNAL DES FRANÇAIS À L’ÉTRANGER

Pour prendre le pouls de Var-sovie, il suffit de se rendre le samedi matin sur les bords réaménagés de la Vistule, le

fleuve qui traverse la ville. Sous un so-leil printanier, on y croisera joggeurs, cyclistes ou promeneurs à chiens. D’autres se prélassent sur les chaises longues installées en terrasse de cafés branchés servant de généreux brunchs. Varsovie est une ville à la page et une capitale à taille humaine. Malgré ses deux millions d’habitants et sa grande superficie, il règne ici une atmosphère détendue et on s’y déplace de jour comme de nuit en toute sécurité. Les transports en commun, en particulier les tramways, irriguent la moindre rue

et la circulation est fluide sur les boule-vards XXL. Autre avantage   : le coût de la vie est faible. On mange au restau-rant pour moins de dix euros  ! Varsovie est aussi une ville verte. Si les barres d’immeubles sautent d’abord aux yeux, la ville regorge également d’espaces verts, pour certains des lieux chargés d’une histoire tourmentée. La Pologne vit ses Trente Glorieuses. Avec un chô-mage résiduel (3,5%), une économie au beau fixe depuis quinze ans (la crise de 2008 est presque passée inaperçue ici), et une hausse moyenne des salaires de 7  % chaque année, l’ancien satellite de Moscou marche sur l’eau.

DOSSIER POLOGNE

Cap à l’Est ! Alors que la croissance montre des signes d’essoufflement en Europe de l’Ouest, la Pologne ne connaît pas la crise ! Avec une croissance soutenue depuis son entrée dans l’Union européenne il y a quinze ans, un dynamisme record et un chômage inexistant dans les grandes villes, le pays a de quoi séduire les Français en quête de mobilité internationale.

REPORTAGE

Bienvenue au pays du plein-emploi

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AVEC UN CHÔMAGERÉSIDUEL DE 3,5% ET UNEÉCONOMIE AU BEAU FIXE

DEPUIS QUINZE ANS,L A POLOGNE VIT SESTRENTE GLORIEUSES.

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Des soutiens européens importantsLe pays a adhéré à l’Union européenne le 1er mai 2004. Cette adhésion lui a permis de bénéficier de très nom-breuses subventions au point de de-venir le pays le mieux doté en fonds européens pour la période 2014-2020. De son côté, le gouvernement a choisi de soutenir la consommation en attri-buant aux foyers les plus pauvres une allocation de 115 euros dès le premier enfant. Avec un salaire minimum de 502 euros, un revenu moyen dans le secteur privé de 954 euros et un pou-voir d’achat par habitant de 6  399 eu-ros, le pays à de quoi attirer les chefs d’entreprises étrangers. Mais attention aux impairs, prévient l’auteure Miroslava Hristova  : «  Chez vous, en Europe de l’Est… » est une phrase maladroite lorsque l’on s’adresse à un interlocuteur polonais ! «  Cela rappelle l’appartenance historique du pays à l’an-cien bloc de l’Est. Or, c’est de l’Europe occidentale que le pays souhaite se rap-procher aujourd’hui, et les habitants ne veulent généralement plus être assimilés à ce passé.  » Car la jeunesse est passée ici et, en un éclair, du communisme pur et dur à l’économie libérale. « Cette génération a connu l’époque soviétique et a pris de plein fouet l’ouverture de mar-ché », témoigne Édouard Chassaing, ar-chitecte d’intérieur à Varsovie.

Des circuits de décision plus courtsRésultat  : bien formés, les jeunes Po-lonais lorgnent désormais de plus en plus vers l’Allemagne ou l’Angleterre.

IV JOURNAL DES FRANÇAIS À L’ÉTRANGER

DOSSIER POLOGNE

UN MARIAGE COMMERCIAL QUI DUREAprès l’Allemagne et avant les États-Unis, la France est le deuxième investisseur étranger en Pologne. Plus de 1 300 sociétés tricolores y sont enregistrées, la plupart depuis la vague de privatisations des années 90. Autant dire que les échanges ne datent pas d’hier !La valeur cumulée des investissements français en Pologne avoisine les 18 milliards d’euros. Les sociétés à capitaux français ont créé plus de 250 000 emplois dans le pays. « Depuis le début des années 90, la France est l’un des investisseurs étrangers les plus importants en Pologne, détaille Monika Constant, directrice générale de la CCI France Pologne. Les sociétés françaises sont présentes dans presque tous les secteurs de l’éco-nomie : de l’industrie jusqu’au commerce et aux services. » Le commerce (notamment le marché des pièces détachées) se taille la part du lion avec 31% du PIB devant l’industrie manufacturière à 29%. Suivent classiquement l’énergie, la construction, l’immobilier, la fi-nance et l’assurance et l’hébergement et la restauration. En 2017, la Pologne a de nouveau enregistré un excédent de son commerce extérieur de 15,1 milliards de zlotys (3,5 milliards d’euros). Par rapport à 2016, les exportations ont augmenté de 10,6% et les importations de 7,9%. Le scénario devrait être semblable cette année. La France exporte en Pologne es-sentiellement des voitures, des produits chimiques et cosmétiques, ainsi que des machines pour l’industrie et l’agriculture. « De plus en plus souvent, les sociétés françaises veulent travailler directement avec le client final, principalement dans le secteur industriel », explique Lilla Bacha, responsable de l’appui aux entreprises à la Chambre de commerce et d’industrie France-Pologne (CCIFP). Des conditions attractives supplémentaires (notamment des exemptions d’impôt) incitent les investisseurs français à créer des sociétés ou des coentreprises dans l’une des quatorze zones franches créées dans le pays.

LA POLOGNE SOUS TOUTESSES FACETTESVous voulez en savoir plus sur la géographie du pays, les lieux incontournables à visiter au sein de ses seize voïvodies (divisions administratives, équivalent des Régions en France), découvrir les principales villes du pays en détail, obtenir des renseignements sur les transports, la santé, les Polonais cé-lèbres, et même l’histoire de la création de l’hymne national ? Le site de site de l’Office national polonais de tourisme est une par-faite entrée en matière pour le visiteur. D. B.

• Pour en savoir plus : www.pologne.travel/frContact : Office national polonais de tourisme, 10, rue Saint-Augustin. 75002 Paris C Poznan.

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VJOURNAL DES FRANÇAIS À L’ÉTRANGER

Le pays manque de bras mais le gou-vernement nationaliste et conserva-teur ne laisse pas entrer qui veut. Pour l’instant, un million d’Ukrainiens (sur 38 millions d’habitants en Pologne) ont été accueillis ainsi que, plus exo-tique, des… Tibétains et des Bangla-dais, notamment comme chauffeurs de VTC pour Über. Car tous les grands groupes internationaux sont présents ici, à commencer par ceux du CAC 40 français dans les secteurs de l’énergie (Veolia, Total…), du transport, de l’hô-tellerie (Accor) ou de la distribution (Auchan, Carrefour).Dans les télécoms, Orange Pologne in-vestit dans la fibre optique et l’Internet haut débit. D’ici l’an prochain, près de cinq millions de foyers, soit 40% du pays, seront raccordés. Côté ambiance de travail, «  on ressent beaucoup moins la pression de la hiérarchie qu’en France, insiste Omar Adnani, expatrié sur le chantier naval de Gdansk depuis 2015. Le circuit de décision est plus court et plus rapide que dans un service d’une entreprise française où l’inertie est plus grande. Il en résulte une grande autono-mie et les contours de la fonction sont plus évolutifs au quotidien.  » À un peu plus de deux heures d’avion de Paris, la Pologne est en tout cas le parfait compromis entre un nouveau cadre dé-paysant sans être trop loin de chez soi, avec la possibilité de faire l’aller-retour en France pendant le week-end pour voir sa famille et ses amis ! A

L’INSTITUT FRANÇAIS DE POLOGNE,UNE PASSERELLE ENTRE DEUX CULTURESLes Instituts français sont au nombre de 98 aux quatre coins du monde. Leur vocation est de promouvoir la culture française en cultivant des liens avec les cultures étrangères. Leurs domaines d’action concernent aussi bien les activités artistiques que les échanges intellectuels et culturels, ainsi que différentes formes de coopération linguistique. Zoom sur l’Institut français de Pologne, animé par une équipe de professionnels polonais et français dans la capitale, Varsovie, et à Cracovie, au sud du pays. L’Institut français de Pologne, établissement français de coopération et d’action culturelle relève de l’autorité de l’ambassadeur de France en Pologne. Il bénéficie de dotations du ministère français des Affaires étrangères et du soutien de son opérateur pour l’action culturelle extérieure. Ses activités recouvrent de nombreux domaines. Il dispense des cours de langue française, à Varsovie comme à Cracovie. Il est d’ailleurs le premier centre d’enseignement du français en Pologne avec une équipe de trente enseignants qualifiés. Il organise également des formations d’enseignants, soutient le développement de projets péri-scolaires (concours et festivals, rencontres entre élèves et artistes francophones). Sa médiathèque, présente également dans les deux villes, est un important centre de ressources et de documentation multimédia, avec un fonds documentaire de 20 000 livres (17 300 à Cracovie), CD, DVD et titres de presse. On peut citer également l’organisation de nombreux événement chaque année au titre de la coopération culturelle entre les deux pays, un soutien aux professionnels du livre polonais désireux de s’investir dans le domaine du livre français en langue originale ou en traduction polonaise, l’organisation de débats dans le domaine des sciences sociales et humaines, ou encore des actions de coopération universitaire et scientifique. D. B.

• Pour en savoir plus : www.institutfrancais.pl/frContact Varsovie : ul. Widok 12 - 00-023 Warszawa. Tél. : 22.505.98.18/28.Contact Cracovie : ul. Stolarska 15 - 31-043 Kraków. Tél. : 12.424.53.50.

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À l’instar de l’UFE (Union des Français de l’étranger) ou de Varsovie Accueil, plusieurs associations se chargent de l’accompagnement et de l’animation de la communauté française dans le pays, forte de plus 10 000 à 12 000 personnes.

ASSOCIATIONS

Les Français de Pologneentre de bonnes mains

On ne parle plus d’expatriation mais de mobilité internatio-nale. Les profils ont changé. « Les entreprises françaises

“polonisent” leur encadrement, explique Éric Salvat, président de l’UFE Pologne depuis novembre 2015. Ceux qui ont été envoyés en Pologne comme expatriés choisissent souvent de rester, soit en tant qu’employés en contrat local, soit pour monter leur entreprise. C’est très facile ici, la réglementation converge vers les standards européens et les besoins en capitaux ne sont pas très importants. Le problème, c’est de durer dans le temps  !  » À 58 ans, le Français sait de quoi il parle. Diplômé de l’école de manage-ment (EM) de Lyon, il débarque à Lodz, la deuxième ville de Pologne, en 1997, pour développer un réseau national de cinémas multiplexes pour Pathé. Trois ans plus tard, il monte sa propre société, «  Axia Digital  ». Il propose à ses clients (tous les grands noms in-ternationaux de la distribution) de les accompagner dans la transformation digitale de leurs points de vente. Les solutions proposées sont toutes issues des technologies françaises.

Comme des champignonsBeaucoup de jeunes Français viennent travailler en Pologne dans les «   BPO  », les services sous-traités de comptabili-té ou les centres d’appels. Ces nomades numériques 3.0 papillonnent. «   Ils ont moins d’engagement vis-à-vis des asso-ciations traditionnelles, constate-t-on

à l’UFE. Ils viennent à nos événements mais pas systématiquement et pas seule-ment. Ils gardent un lien avec nous mais ne prennent pas forcément d’adhésion.  » D’autres montent leur start-up. À Var-sovie, les espaces de coworking poussent comme des champignons dans les vieux buildings du centre. « C’est plus facile de

monter une société de service qu’une in-dustrie, reconnaît Éric Salvat, mais nous avons aussi quelques exemples de Français qui ont démarré il y a une dizaine d’années et emploient aujourd’hui 1  000 personnes, voire plus.   » L’autre élément à avoir en tête lorsqu’on crée son entreprise ici, c’est l’histoire matriarcale de la Pologne. «  La place de la femme y est très impor-tante, rappelle le Français. Dans la socié-té polonaise, c’est elle qui a la charge mo-rale de la famille. Dans la majorité des cas, elle travaille et se charge à la fois de l’édu-cation des enfants. Son rôle est très impor-tant. Dans l’entreprise, il est même parfois plus important que celui des hommes. Les femmes polonaises incarnent des valeurs fortes de fiabilité et de stabilité. » Du coup, la parité n’est pas un sujet ici.

Sentiment de communautéEn Pologne, l’UFE a plusieurs cordes à son arc. Tout d’abord l’UFE Pologne est composée d’un bureau de sept per-sonnes dont une majorité résident en Pologne depuis plusieurs années. L’as-sociation propose d’abord une informa-tion dans le domaine juridique, fiscal, patrimonial, santé, retraite, décès, ma-

VI JOURNAL DES FRANÇAIS À L’ÉTRANGER

DOSSIER POLOGNE

HÉLÈNE FERRER,UNE FEMME D’EXTÉRIEURHélène Ferrer a plongé dans le bain de l’ex-patriation il y a plus de vingt ans. À l’époque, la Française et son mari sont en poste à Paris depuis quelques années mais démissionnent tous les deux en même temps pour partir voir du pays. « On en a eu marre ! », se sou-vient-elle. L’aventure commence au Chili où son conjoint trouve sans problème un job dans une grande entreprise. Avec un ancien copain de promo de son école de commerce, Hélène Ferrer fonde, elle, une petite agence de com-munication, « Un, deux, trois, soleil ». Suivra le Venezuela où elle lève le pied pour s’occuper de ses quatre enfants en bas âge. Elle trouve tout de même le temps de s’occuper de la communication et de l’événementiel pour

« Caracas Accueil ». Viendra ensuite un pre-mier passage en Pologne où elle anime des ateliers artistiques dans les écoles et travaille pour le lycée français. Hélène Ferrer fonde en-suite à Varsovie une petite librairie française, « L’enfant livre ». Puis la famille part vivre trois ans à Prague, en République tchèque. Dès son arrivée, elle est embauchée comme salariée du club sportif et culturel auprès de Lycée français de Prague, une véritable PME, char-gée des événements et des activités extrasco-laires du lycée. Puis fin 2017, c’est le retour en Pologne. Son mari est aujourd’hui n° 2 de la multinationale française Veolia ici. « Dans chaque pays où nous avons vécu, j’ai toujours cherché à travailler, explique-t-elle, comme bénévole, salariée ou entrepreneur. J’ai besoin d’être utile, d’avoir des contacts extérieurs. J’aime par-dessus tout monter des projets. »

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SEULEMENT AU NIVEAUNATIONAL, MAIS

AUSSI MONDIAL. ȃRIC SALVAT

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VIIJOURNAL DES FRANÇAIS À L’ÉTRANGER

riage, divorce… Elle met un point d’hon-neur à apporter une réponse à chaque demande, de la plus courante à la plus pointue. «  Dans certains cas, explique Éric Salvat, nous faisons intervenir des experts et nous chargeons d’assurer l’inter-face avec le demandeur.  » L’UFE a égale-ment un rôle d’animation en cherchant à créer un sentiment de communauté au sein des Français de l’étranger. «  Le ré-seau y est une composante essentielle, non seulement au niveau national mais aus-si mondial », lance le président. Enfin, grâce à leur carte de membre, les adhé-rents bénéficient d’offres commerciales et de réductions auprès des partenaires de l’UFE. En conséquence, le nombre de membres a triplé depuis 2015, grâce no-tamment à la création d’antennes dans les grandes villes du pays. L’objectif est

d’atteindre 300 membres l’an prochain. Car sur un territoire comparable à l’Es-pagne, la particularité de la Pologne est que les Français, et les étrangers en général, se sont installés autant à Var-sovie qu’en province, dans des centres économiques importants comme Cra-covie, Poznan ou Gdansk. «  Le problème, analyse Éric Salvat, c’est que le seul moyen de les toucher, c’est d’ouvrir des représentations régionales de l’UFE dans ces villes-là. Pour cela, il faut trouver des leaders et des offres intéressantes pour ces compatriotes, souvent moins écoutés que dans la capitale.  » A

Écrire à Éric Salvat : [email protected]

FEMMES, FEMMES, FEMMES…Changement de décor à Varsovie Accueil. L’association fait partie de la Fiafe, la Fédération des accueils francophones dans le monde. Elle s’occupe d’accueil-lir, d’informer et d’animer la population française et francophone de Varsovie. Elle comprend environ 180 familles adhé-rentes (soit environ 750 adhérents au to-tal) pour l’année 2018-2019, avec environ 15 nationalités représentées. Le bureau, désormais présidé par Hélène Ferrer (lire portait p. VI) est composé de 12 membres, tous bénévoles et toutes des femmes ! Il est organisé en plusieurs départements : communication, événements, activités, visites culturelles, les enfants, les ados et les seniors. « Les activités enfants et ados marchent très bien, constate la Fran-çaise, comme le laser game, le paintball ou l’aviron. Nous avons ouvert cette année des cours de cuisine du monde, un club œnologie pour femmes. L’an prochain, nous essayerons de développer les activités sportives, et peut-être une chorale. » Les adhérents sont principa-lement des conjointes d’expatriés. « Ce sont des femmes qui ont souvent aban-donné leur job en France pour suivre leur mari, détaille Hélène Ferrer. Il y a aussi quelques hommes qui suivent et en pro-fitent pour s’occuper des enfants. Ils sont contents de faire une pause. » Le profil des Français de Pologne a changé. Le pays voit de plus en plus débarquer des jeunes couples, embauchés en contrat lo-cal et qui doivent travailler tous les deux pour subvenir à leurs besoins. Vu que Varsovie est une ville facile à vivre, ils se débrouillent par eux-mêmes et passent sous les radars de l’association. « Il faut trouver un nouveau mode de fonctionne-ment pour essayer d’attirer ces nouvelles populations, avance Hélène Ferrer, par exemple en leur proposant une aide pour monter leur société ou commencer à se faire un réseau en Pologne. Il faut plus et mieux communiquer, et développer des partenariats commerciaux et institution-nels avec les forces présentes dans le pays. » Varsovie Accueil met déjà à la disposition de ses adhérents un guide de bonnes adresses disponible en ligne et en version papier.

C Éric Salvat.

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Le fleuron français de l’hôtellerie vient d’augmenter sa participation dans le groupe Orbis, propriétaire des établissements qu’il exploite depuis la Pologne dans les pays de l’ancien bloc de l’Est. Accor possède désormais 85,8% de la société polonaise. Dopé par la croissance de la région, à l’image de l’oie bernache de son logo, le sixième groupe hôtelier mondial se sent pousser des ailes.

SUCCESS STORY

Une tour de contrôle en Europe de l’Est pour Accor

Depuis son vaste bureau au quatrième étage du vaisseau amiral aux larges couloirs et piliers porteurs d’Orbis, dans

le centre de Varsovie, Gilles Clavié se félicite d’avoir réussi avec ses équipes à supprimer les doubles portes capi-tonnées inspirées de l’ancienne Union soviétique et tout autre signe sta-tutaire. Lui qui ne rêve que des open spaces connectés de ses futurs locaux, à Złote Tarasy, le gigantesque com-plexe de commerces, de bureaux et de divertissements de plus de 200  000 m² sorti de terre dans le quartier de Śród-mieście, symbole de la modernité de Varsovie, de l’autre côté du Palais de la culture et de la science. De l’im-meuble actuel, coiffé d’un énorme globe terrestre métallique, le Français a la main sur les 134 hôtels (et 4 500 salariés) que possède Orbis, des pays baltes au Balkans en passant par la Hongrie et la République tchèque, soit en tout treize pays. Accor est pour Or-bis à la fois l’actionnaire principal et le partenaire stratégique. Porté par son succès, le groupe a ouvert 12 hô-tels l’an dernier et plus de 47 sont dans

VIII JOURNAL DES FRANÇAIS À L’ÉTRANGER

DOSSIER POLOGNE

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GILLES CLAVIÉ, UN DIRECTEUR TOUCHE-À-TOUTAprès des études comptables et financières à Versailles, Gilles Clavié entame sa carrière dans le monde industriel dans le secteur de la consolidation financière pour le groupe agroalimentaire Eridania Beghin-Say (Ducros, Vahiné, Lesieur…). En 2001, il bascule chez Accor, d’abord comme contrôleur financier en France, avant qu’on ne lui propose il y a neuf ans la Pologne. « Le but était de revoir tout le process avec les équipes d’Orbis, raconte le Français âgé de 49 ans. C’était à l’époque une ancienne entreprise d’État qui se développait sur plusieurs activités (transports, casino, agences de voyages, etc.) et qu’il fallait dynamiser et rendre innovante. Elle a été cotée en 1997 et en 2000 le groupe Accor est arrivé au départ dans le capital avec 20% de participation. De fil en aiguille, j’ai touché de plus en plus le terrain opérationnel. C’est quelque chose aujourd’hui qui me réjouit. »

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IXJOURNAL DES FRANÇAIS À L’ÉTRANGER

le « pipeline » pour cette année et pour 2020, notamment au Monténégro, en Moldavie et en Estonie où Accor est encore absent. «  En dix ans, nous sommes passés d’un taux de remplissage moyen dans nos hôtels de 52% à près de 75% aujourd’hui, témoigne Gilles Cla-vié. Les clients business ne sont plus que 60% contre 80% en 2009. Ils ont été com-plétés par une clientèle loisirs grâce à la hausse du pouvoir d’achat, l’améliora-tion des infrastructures dans les trans-ports et l’amélioration de l’image de la Pologne grâce à des événements comme l’Euro de football 2012. »

Des offres de services élargiesLa croissance des pays dans la région oscille autour de +3,6%. Du coup, en Po-logne, Accor doit faire à de nombreux défis comme recruter et fidéliser un personnel particulièrement sollicité  : «  Il a fallu s’adapter aux nouvelles géné-rations venant sur le marché, explique M. Clavié. Nous nous sommes digitalisés et nous recrutons désormais une partie de nos talents sur les réseaux sociaux, en fonction de leurs passions, par exemple. On préférera mettre en face de nos clients un serveur qui soit aussi musicien ou chanteur, et qui puisse se produire dans nos hôtels. Ça attire et ça fidélise les sa-lariés. Orbis a d'ailleurs été reconnu “best employer” en 2018 et 2019.»L’autre enjeu pour le groupe créé par Gérard Pélisson tient en six lettres : Airbnb, ou comment faire face aux nouveaux usages auxquels répond la plateforme de location de logements entre particuliers. « Cela nous a permis de nous remettre en cause, reconnaît le Français. Nous avons développé tout un écosystème d’offres en dehors du séjour  : conciergerie, location de résidence, spec-tacles, restaurants… Dans nos hôtels, nous avons agrandi les espaces communs et arrêté de séparer la réception du res-taurant ou du bar. Il y a beaucoup plus de mobilité. C’est nous qui allons vers le client pour répondre à une question, faire son check in/out ou lui apporter un verre, sans qu’il ait à se déplacer jusqu’au bar. Nous allons également développer les espaces de coworking, et nous utili-sons au maximum les outils numériques comme les smartphones. »

Adresse exclusiveDe nouvelles marques d’Accor pour-raient ainsi faire leur apparition à

Varsovie comme «  Tribe  » (concept li-festyle déjà lancé en Australie). À l’autre bout de la chaîne, Accor a ouvert à l’été 2018 à Varsovie son «  flagship  », le Raf-fles, un hôtel d’exception à deux pas du palais présidentiel. Grâce au rachat de la marque l’an dernier, les clients d’Accor profitent donc désormais d’une adresse exclusive au cœur de la plus grande place de la capitale. Le Raffles Europejski Warsaw n’est que le troi-sième hôtel de la marque en Europe

après Paris et Istanbul, c’est dire l’im-portance de cet établissement pour le groupe. Quant à la parité chez Accor, ce n’est pas un vœu pieux ici  : dans une société matriarcale comme la Pologne, 44% des «  general managers  » sont des femmes. Aujourd'hui, Gilles Clavié et son équipe travaillent à l'optimisation et l'ajustement de la stratégie d'Orbis compte tenu du remplacement récent de Accor dans son capital. Une nouvelle ère se prépare. A

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Aller travailler à l’étranger, était-ce un désir ou une opportunité ?Mon choix de carrière à l’ international correspond à une envie permanente de découvrir de nouveaux horizons professionnels et personnels. L’oppor-tunité s’est présentée en 1997 et je n’ai pas hésité un seul instant à quitter la France pour tenter cette aventure. La mobilité reste une philosophie.

En quoi le groupe Accor a-t-il favorisé votre carrière ?Accor est l’élément déclencheur, ma-jeur et incontournable dans mon choix de l’international. Plusieurs opportu-nités se sont offertes à moi en dehors du groupe tout au long de ces années, mais à l’évidence les valeurs d’Accor ont toujours coïncidé avec les miennes, rai-son principale pour laquelle je continue de me projeter avec eux.

Quels souvenirs garderez-vous de vos années à Varsovie ?Ici, il n’y a pas de place pour l’à peu

près. Il faut toujours anticiper sur le business et mener des actions pé-rennes pour réussir les objectifs fixés. La Pologne est un pays qui regorge de talents et représente une valeur sûre pour Accor avec des ambitions de crois-sance toujours fortes. Quant à la vie à Varsovie, mon épouse et moi avons passé des moments magnifiques qui resteront marqués dans nos mémoires.

Lui écrire : [email protected]

De formation littéraire puis diplômé d’une école hôtelière à Lille, le Français entre dans le groupe Accor en 1988. Après ses débuts au Sofitel Lille Métropole, comme simple réceptionniste, il quitte la France pour la Belgique où il dirigera plusieurs hôtels à Bruxelles puis Namur. Viendra l’Afrique : le Sofitel de Bamako, au Mali, puis le Burkina Faso et le Sénégal. En 2012, il rentre en Europe pour l’ouverture du Novotel de Sofia en Bulgarie, avant d’être nommé quatre ans plus tard à la tête du Novotel Varsovie, un paquebot de 742 chambres.

Vincent Dujardin, directeur général de l’hôtel Novotel Varsovie Centrum

ENTRETIEN

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X JOURNAL DES FRANÇAIS À L’ÉTRANGER

DOSSIER POLOGNE

Fin 2010, la Pologne s’est alliée à Airbus (à l’époque EADS) pour ouvrir à Varsovie un laboratoire de recherche inédit par son statut, qui associe l’avionneur européen à l’Université polonaise. Près de neuf ans plus tard, la joint-venture dirigée par un jeune Français a trouvé sa trajectoire... et la bonne orbite.

SUCCESS STORY

Une future grande nation spatiale ?

Ne cherchez pas de salle blanche, de pas de lancement ou de piste d’essai. Astri Polska, ne construit ici ni satellite, ni fu-

sée, ni avion ! la filiale d’Airbus Défense et Espace a deux activités en Pologne, détaille Alexandre Szalkiewicz, direc-teur des opérations et financier : «  Nous développons à la fois des équipements pour tester les satellites au sol et fournissons au marché polonais des images satelli-taires, en particulier dans les domaines de l’électronique embarquée, l’ingénierie des matériaux, de l’observation de la Terre, de la navigation et des communications, mais aussi de la gestion des crises et des catastrophes. Le spatial permet également de développer des compétences en ma-tière d’urbanisme, d’agriculture, ou mili-taires.  » Astri Polska est un exemple de coopération franco-polonaise inédite, mariant, à parts égales, une entreprise et un centre de recherche académique. Il diffère du modèle classique en Eu-rope, où prévalent les coopérations pri-vé-privé ou public-public. Comme les autres entreprises présentes ici, la so-ciété peine à garder ses collaborateurs. «  Notre chance, analyse le Français, c’est que nous évoluons dans un secteur qui fait rêver. Nos salariés sont des passionnés et quand ils travaillent sur des sondes qui iront sur Jupiter ou des satellites météo, ils restent. Nous avons aussi un esprit familial dans l’entreprise. Ce sont les pro-grammeurs qui sont les plus recherchés en Pologne, et donc les plus difficiles à fidé-liser  !   » Ce n’est pas encore l’Allemagne ou les États-Unis, mais la Pologne com-mence à avoir des ambitions dans le spatial. Le pays est entré en 2012 dans l’Agence spatiale européenne, certes avec une contribution limitée  : 35 mil-lions d’euros sur un budget total de 4 milliards, alors que la France fournit près d’un milliard  ! Mais le marché se développe à peu près tous les ans.

Un univers de mordusNé à Lille, Alexandre Szalkiewicz a d’abord suivi une formation scienti-fique (bac S) avant d’intégrer l’école

d’ingénieur Isae Supaero à Toulouse. Le jeune homme a aussi étudié un se-mestre à l’Imperial College de Londres, toujours dans l’aéronautique. «  J’ai vrai-ment découvert cet univers et ses “mordus” en entrant en école d’ingénieur, se sou-vient-il. J’ai très vite été impressionné par la conquête spatiale et les missions scien-tifiques et d’observation. Aujourd’hui, je suis toujours fasciné par ce domaine, notamment pour sa complexité et l’antici-pation qu’il nécessite, et par ce qu’il nous apporte dans la vie de tous les jours.  » De retour en France, il complète ensuite son cursus par un master en finances et ingénierie financière à Paris-Dauphine. Le Français s’envole alors à Astana, au Kazakhstan, pour deux ans de V.I.E (vo-

lontariat international en entreprise), déjà dans une filiale d’Airbus Défense et Espace  : «  Partir à l’étranger était plu-tôt une opportunité. Ma compagne et moi nous ne souhaitions pas forcément à quitter la France, mais nous cherchions de nouvelles aventures professionnelles et nous sommes très mobiles.  » De retour au siège de l’avionneur eu-ropéen à Toulouse, grâce à sa double compétence, Alexandre Szalkiewicz devient contrôleur filiale et analyste en fusion-acquisition. Il travaille en-suite trois ans au département audit avant la Pologne en octobre 2017. À 34 ans, il dirige donc une équipe de 70 per-sonnes, en majorité des Polonais. Son épouse a trouvé du travail à Varsovie en quelques semaines. Il faut dire que son profil – spécialisé dans les applica-tions logicielles informatiques – fait partie des professions les plus recher-chées par les nombreuses entreprises IT (technologies de l’information) pré-sentes en Pologne.

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« NOUS ÉVOLUONSDANS UN SECTEUR QUI

FAIT RÊVER, ET NOSSALARIÉS SONT DES

PASSIONNÉS. »ALEXANDRE SZALKIEWICZ

C Alexandre Szalkiewicz.

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XIJOURNAL DES FRANÇAIS À L’ÉTRANGER

La Pologne a beau avoir accueilli la COP24 fin 2018, il n’est pas évident pour autant de lui faire tourner la page du tout-charbon, qui fournit plus de 80% de l’électricité. Présent en Pologne depuis plus de vingt ans, le groupe français accompagne les autorités vers une transition écologique qui avance à petits pas. Veolia doit aussi composer avec une pénurie de main-d’œuvre, récurrente ici depuis des années.

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Veolia veut promouvoir l’énergie verte

La grande fierté de Frédéric Faroche, c’est le réseau de chaleur de Varso-vie et ses 1  500  km de tuyaux d’eau chaude que les ingénieurs maison

ont réussi à rendre intelligent. «  On l’a équipé de capteurs dans tous les points de livraison et d’instruments de pilotage à distance, afin de perdre le moins d’énergie possible dans le pompage et le transport, détaille le directeur pays de Veolia en Pologne. On a réglé d’abord le problème des fuites puis on a géolocalisé et ratio-nalisé l’emploi des brigades chargées des opérations de maintenance.  » Résultat  : 13 millions d’euros d’investissement et l’économie chaque année de la dépense énergétique d’une ville de 60  000 habi-tants  ! Moins d’énergie, c’est moins de charbon consommé et moins de CO2 et autres particules rejetées dans l’atmos-phère. C’est du jamais vu pour un réseau de cette taille, le plus important en Eu-rope après Moscou. Le groupe a d’ailleurs été primé et récompensé pour ce projet. L’idée est de dupliquer cette réussite dans d’autres pays du monde. Veolia dessert au total trois millions de personnes en Pologne. «  Nous devons être capables de capter des sources d’éner-gie jusqu’alors non utilisées comme celle produite par les data centers (centres de données informatiques, ndlr) ou la cha-leur fatale de certains process industriels, prévoit Frédéric Faroche. Il faut aussi améliorer la performance des bâtiments, gros consommateurs d’énergie.   » Ainsi, de-puis 2016, la fonderie du site Volkswagen de Poznan alimente le réseau de la ville grâce à la chaleur dégagée par la produc-tion d’air comprimé. Veolia Pologne est un actif majeur du groupe pour son sec-teur énergie puisqu’elle représente 20% du total de l’activité dans le monde.

Centre de formationL’autre enjeu, pour le groupe français, c’est donc d’inciter le gouvernement à réduire son utilisation des énergies

fossiles. «  D’ici l’an prochain, le pays de-vrait être en capacité de produire 18% d’énergies renouvelables, grâce à l’éolien et à la biomasse essentiellement  », assure M. Faroche. Mission délicate quand on sait que le secteur du charbon, notam-ment l’extraction, emploie aujourd’hui 100  000 personnes en Pologne. À plus long terme, sur le traitement des dé-chets, le défi sera de maximiser leur va-lorisation en privilégiant leur recyclage. Enfin, sur l’eau, il s’agira d’améliorer l’ef-ficacité des installations en recherchant des synergies avec d’autres activités. Aujourd’hui, la Pologne est en situation de plein-emploi, avec une croissance solide. Avec ses 4  500 salariés à renouve-

ler régulièrement et 1,33 milliard d’eu-ros de chiffre d’affaires dans les réseaux de chaleur de 45 villes, Veolia, comme les autres acteurs, peine à recruter. Sur-tout si les travailleurs arrivés d’Ukraine continuent de filer vers l’Allemagne où les conditions de vie et les salaires sont meilleurs. Présent depuis la grande vague de privatisations des années 90, le groupe français finance déjà deux classes à l’Université et ne compte pas s’arrêter là  : «  Nous avons prévu d’ouvrir cette année à Varsovie notre propre centre de formation aux métiers traditionnels de mécanicien et d’électricien, deux profes-sions délaissées par les jeunes au profit de l’informatique par exemple, explique M. Faroche. Nous devons embaucher 200 à 250 personnes dans ces métiers-là chaque année, et être proactifs pour les trouver. » Veolia mise aussi sur la polyvalence, comme en France, alors qu’en Pologne les filières sont organisées «    en silo    », sans vraie flexibilité ni possibilité d’évo-lution d’un métier à l’autre.

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« NOUS DEVONS ÊTRECAPABLES DE CAPTER

DES SOURCES D'ÉNERGIEJUSQU'ALORS NON

UTILISÉES. »FRÉDÉRIC FAROCHE

C Frédéric Faroche.

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XII JOURNAL DES FRANÇAIS À L’ÉTRANGER

DOSSIER POLOGNE

Après Miami et Rabat, le n°1 français du soutien scolaire a choisi Varsovie pour ouvrir son troisième centre à l’étranger. Animé par Pascale Lê-Pimont, en plus des petits Français, il ambitionne de surfer sur la soif d’ouverture des Polonais sur l’international pour recruter de nouveaux élèves.

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Acadomia : un accompagnement scolaire sur-mesure

Qu’ils vivent à Cracovie, Gdansk, Lodz, et même à Varsovie, beaucoup de Français de Po-logne se sont cassé les dents

à rechercher un professeur francophone pour assurer des cours particuliers. C’est notamment ce manque que veut pallier Pascale Lê-Pimont avec Acadomia. «  Le système français est très élitiste et les en-fants ont vraiment besoin d’avoir les meil-leurs dossiers possibles pour le baccalauréat et les concours, argumente-t-elle. Nous pro-posons aussi de l’orientation et de l’informa-tion pour que les jeunes choisissent le meil-leur parcours adapté à leurs désirs et leur niveau. Vu le nombre de cursus possibles, c’est très compliqué de trouver sa voie.    » Pa-radoxalement, le n°1 du soutien scolaire en France surfe également sur le succès du Lycée français de Varsovie. Depuis quelques années, il est pris d’assaut par les familles polonaises qui veulent offrir à leurs enfants un enseignement ouvert sur l’international pour les préparer à l’avenir, malgré le tarif élevé de l’inscription. «   En à peine cinq ans, observe Mme Lê-Pimont, la courbe s’est inversée  : en 2014, on avait 33% de Français inscrits et 22% de Polonais. Aujourd’hui, c’est 24% de Français et 38% de Polonais. Cela ne va pas sans créer quelques difficultés. Les enseignants doivent mainte-nir le niveau de la classe en s’adaptant à ces élèves moins bons en français, car ce n’est pas une langue facile à apprendre.   » L’autre raison de l’engouement pour ces écoles étrangères, c’est que le système d’enseignement vient de changer en Po-logne. «  Jusqu’à présent, il était similaire à la France, explique Mme Lê-Pimont. Dé-sormais, on est revenu en arrière. Un pan entier de l’enseignement a été supprimé, toute la partie collège a disparu. On a allon-gé le primaire puis les élèves sont dirigés en fonction de leur niveau soit vers des forma-tions professionnelles, soit vers un parcours supérieur, mais où il y a peu de places. Aca-domia ne remplace pas les programmes du lycée mais vient en complément de ce cursus, à travers une aide aux devoirs,

des cours particuliers ou collectifs en face à face avec un professeur ou par webcam sur Internet. Les cours sont facturés en moyenne 30 euros de l’heure. Après les États-Unis et le Maroc, la Pologne est le troisième pays étranger où l’organisme a ouvert un centre. «  En plus de ses solutions d’accompagnement en présentiel, nous y proposons des stages de révision pendant les vacances ou les week-ends, explique la Française, et aussi des cours de langue de tous niveaux avec des préparations aux cer-tifications TOEIC et TOEFL.   »

Plusieurs cordes à son arcNée à Marseille, Pascale Lê-Pimont na-vigue depuis plus de vingt ans entre la France et l’étranger. Titulaire d’un MBA

passé au Canada, consultante en straté-gie, notamment chez Ernst & Young, elle a accompagné de nombreux porteurs de projets et d’entrepreneurs. Mère de deux enfants, mariée à un cadre de chez Total qu’elle a suivi au fil de ses expatriations, elle s’est aussi essayée à d’autres métiers comme les relations presse et la commu-nication pour Accor en Italie, ou l’édition avec un magazine pour Budapest Accueil, lors de son passage en Hongrie. En Po-logne, en plus d’Acadomia, la Française a lancé un site Internet, «    ConnectHer  » destiné à accompagner les conjoints d’ex-patriés. Vice-présidente de l’UFE, elle met en garde    : créer son entreprise en Pologne réclame de s’armer de patience. «  J’ai dû attendre quatre mois pour que le tribunal de commerce valide les statuts d’Acadomia Pologne, simplement parce que le juge ne reconnaissait pas la mention “épouse” sur mon passeport après mon nom de jeune fille   !   » Passionnée de photo, de design intérieur, de tennis ou de couture, la Française a désormais pour projet d’étendre l’offre d’Acadomia au public polonais en plus des francophones.

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«LES ENFANTS ONTBESOIN D'AVOIR LES

MEILLEURS DOSSIERSPOSSIBLES POUR LEBACCALAURÉAT ETLES CONCOURS. »PASCALE LÊ-PIMONT

C Pascale Lê-Pimont.

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XIIIJOURNAL DES FRANÇAIS À L’ÉTRANGER

De retour à Varsovie comme directeur général du groupe de prêt-à-porter Promod, Charles-André Keene retrouve la Pologne plus de dix ans après son premier passage. Le Français constate combien le pays de ses débuts s’est transformé.

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Un pays métamorphosé

Pas de vitrine clinquante, pas de néons aguicheurs. Le quartier général de Promod à Varsovie, ce sont des bureaux dans un im-

meuble anonyme du centre-ville. À peine quelques affiches aux murs de l’open space nous rappellent-elles que nous sommes au siège de l’enseigne française de prêt-à-porter. D’ici, Charles-André Keene dirige et développe une vaste zone qui va de la République tchèque à la Slovaquie en pas-sant par la Hongrie et la Russie. Promod y possède au total 80 magasins, dont la moitié en Pologne. La marque emploie 250 personnes dans le pays et y distribue la même collection que dans le reste de l’Europe, mis à part quelques produits adaptés aux hivers rigoureux    ! Le Français est de retour à Varsovie de-puis trois ans, après avoir ouvert en 1998 le premier hypermarché Carrefour de Pologne. «  C’est un pays méconnaissable, constate-t-il, mais qui va dans le bon sens. Il y a vingt ans, on voyait son poten-tiel énorme, aujourd’hui on est complète-ment dedans et on constate qu’il a de la marge pour rattraper les pays d’Europe de l’Ouest qui, eux, sont plutôt sur le déclin.   » Depuis quinze ans, la croissance ne se dé-ment pas en Pologne. Résultat, Promod, comme les autres employeurs, peine à recruter et à fidéliser. «     Les jeunes Polo-nais sont très doués en langues, détaille Charles-André Keene, ils les apprennent dès le plus jeune âge, ayant bien compris que le polonais n’était pas la plus utile pour faire carrière à l’étranger  ! Ils ont envie de partir mais pas à n’importe quel prix. La période du plombier polonais émigré en France, en Grande-Bretagne ou en Alle-magne, c’est terminé. Maintenant, ce sont des cadres qui s’expatrient. » Présent dans une cinquantaine de pays avec un millier de magasins, Promod s’est installé en Po-logne en 1999. La même année, la marque, fondée en 1975 par Francis-Charles Pollet, ouvrait son premier site de e-commerce, alors qu’Internet était encore balbutiant.

S’adapter à la demandeLe mode de consommation a aussi changé en Pologne. Depuis mars 2018,

le parti nationaliste PiS au pouvoir a dé-cidé d’interdire progressivement dans tout le pays l’ouverture des magasins le dimanche, au nom du sacro-saint repos dominical. «  On est passé d’une époque où les Polonais travaillaient sept jours sur sept pour espérer gagner plus à une période où les loisirs, le sport et la vie familiale ont acquis une grande impor-tance, avance le Français. Les grandes zones commerciales en dehors des villes, où l’on partait pour la journée en famille faire ses courses, un passage au cinéma, voire chez Ikea, c’est un peu fini.  » Comme en France, de petits supermarchés de proximité ont poussé comme des cham-pignons dans les rues de Varsovie. À la place de la grande expédition du week-end, on vient y faire ses courses en cinq

minutes tous les jours. Et Promod a dû s’adapter à la demande de ses salariés d’arriver au travail tôt le matin pour être libéré en milieu d’après-midi et profiter ainsi d’un maximum de temps libre. Parisien, formé en école de com-merce, Charles-André Keene, 49 ans, a effectué toute sa carrière dans la distri-bution. D’abord chez Carrefour comme chef de rayon textile, déjà, à Fontaine-bleau pendant quatre ans. Puis viendra la première aventure polonaise pendant sept ans et son arrivée chez Promod, à Moscou d’abord pendant huit ans, puis le retour en Pologne aujourd’hui. Père de deux enfants, membre de la CCI fran-co-polonaise, le Français vit en famille à Varsovie  : «   C’est un pays où on se sent bien, une vie facile au quotidien et une ville à taille humaine. Le niveau d’insé-curité est très bas. Et surtout, ce n’est plus du tout l’image qu’on avait de ces pays de l’Est où il n’y avait pas grand-chose à faire et qui étaient gris. Il y a beaucoup d’acti-vités, on a la chance d’être en Europe et de pouvoir aller très vite dans tel ou tel pays. Il reste seulement le gris de l’hiver…  »

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« C'EST UN PAYS OÙ ONSE SENT BIEN, AVEC UNE

VIE FACILE AU QUOTIDIENET UNE VILLE À TAILLE

HUMAINE. »CHARLES-ANDRÉ KEENE

C Charles-André Keene.

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XIV JOURNAL DES FRANÇAIS À L’ÉTRANGER

DOSSIER POLOGNE

Vous souhaitez vous installer à Varsovie, Cracovie ou Gdansk ? La Pologne est un marché de près de 40 millions d’habitants que convoitent de nombreux investisseurs étrangers, mais qu’il convient d’aborder bien accompagné.

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Mazars Pologne : jamais sans mon conseiller !

Mazars, organisation indé-pendante d’audit, de conseil et de services aux entre-prises, a ouvert son premier

bureau à Varsovie en 1992. Depuis, le ca-binet s’est également développé aussi à Cracovie et compte aujourd’hui près de 250 collaborateurs. « Historiquement, juste après la chute du communisme, nous nous sommes implantés en Pologne pour accompagner dans leurs premiers inves-tissements les sociétés françaises cotées au CAC40, détaille Michel Kiviatkowski, associé gérant chez Mazars Pologne. Au-jourd’hui, notre portefeuille clients s’est fortement diversifié, il inclut désormais des sociétés allemandes, anglaises, améri-caines ou encore chinoises. » Le cabinet a notamment créé en Pologne une équipe dédiée, « French Desk », animée par des experts parlant couramment français. Ils proposent leurs services aussi bien aux sociétés françaises projetant de dé-marrer une activité ou de développer leur activité en Pologne, qu’aux entre-prises polonaises qui souhaitent s’im-planter en France. Outre les grands groupes, la société collabore de plus en plus avec les ETI et PME ayant une exposition interna-tionale. « En Pologne, nous sommes actifs dans les secteurs de l’industrie (automo-bile, aérospatial et défense, pétrole et gaz…), des services (télécommunications, transport et logistique, luxe ou distribu-tion…), en passant par la banque et l’as-surance », énumère M. Kiviatkowski. Car la Pologne est aujourd’hui l’une des destinations les plus prisées par les in-vestissements directs à l’étranger (IDE). Le pays est devenu le premier marché en termes de population, mais aussi de pouvoir d’achat en Europe centrale, constituant ainsi un débouché commer-cial stratégique pour toute entreprise. «  Toutefois, met en garde M. Kiviatkows-ki, le marché local se caractérise par une forte pression sur les prix, une concurrence croissante entre les acteurs locaux et in-

ternationaux, ainsi que par un contexte administratif relativement contraignant comparé à certains autres pays.  »

Fiscalité attractive Les enveloppes de fonds européens (150 milliards d’euros entre 2000 et 2020, ndlr) contribuent fortement au développe-ment de la Pologne, permettant une amélioration des infrastructures de transport ou encore le renforcement de l’innovation au sein des PME. C’est d’ail-leurs le seul État de l’Union européenne à ne pas avoir connu de récession lors de la crise de 2008-2010. L’économie polo-naise dispose de nombreux atouts  : une fiscalité attractive avec un taux d’impôt sur les sociétés à 19%, un marché du tra-vail flexible et un solide réseau bancaire.

Cela a eu des conséquences positives sur l’activité de fusions-acquisitions (M&A) dans le pays, analyse M. Kiviatkowski : «  Le volume des transactions enregistrées en Pologne s’établissait l’an dernier à plus de 5,7 milliards d’euros, le pays enregis-trant à lui seul 127 (soit 18%) des 701 tran-sactions de plus de 5 millions d’euros recen-sées dans les 21 pays de la région Europe centrale et orientale couverts par Mazars.  » Les investisseurs sont majoritairement originaires d’Europe de l’Ouest (France, Allemagne, Grande-Bretagne, Pays-Bas), des États-Unis et d’Asie (Chine). Les secteurs les plus concernés par ce type de transactions sont la production industrielle (automobile, aérospatial et défense), les services (transport et logis-tique, télécommunications) et la banque. À travers ses activités d’audit, de conseil financier, fiscal et en matière d’externa-lisation comptable, Mazars joue le rôle de facilitateur dans ces implantations  : «  Les entreprises ont besoin d’un conseil-ler qui leur permette à la fois d’être en conformité avec la législation locale et de répondre à leurs problématiques de déve-loppement  », détaille M. Kiviatkowski.

Lui écrire : [email protected]

C Michel Kiviatkowski.

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« LES ENTREPRISESONT BESOIN D'ÊTRECONSEILLÉES SUR LA

LÉGISLATION LOCALE ETLEURS PROBLÉMATIQUES

DE DÉVELOPPEMENT. »MICHEL KIVIATKOWSKI

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XVJOURNAL DES FRANÇAIS À L’ÉTRANGER

Cela fait bientôt vingt-cinq ans que le groupe français qui a vu le jour à Landerneau, dans le Finistère, est installé en Pologne. Visionnaire, Édouard Leclerc, le patriarche, avait eu du nez en voyant l’intérêt de ce marché aux portes de l’Europe. Aujourd’hui, tous les groupes de distribution sont présents et la concurrence est féroce.

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E. Leclerc Pologne : parole de pionnier

À l’époque, en 1995, c’était une des toutes premières enseignes de supermarchés

de Pologne. Leclerc dispose aujourd’hui d’un parc d’une cinquantaine de magasins dont une vingtaine d’hy-permarchés, tous situés en centre-ville, et d’une ving-taine de stations-service. L’enseigne emploie un peu plus de 5  000 salariés dans le pays. Ce sont les dirigeants historiques, Édouard Leclerc et son fils, qui, dès le début des années 1990, ont bien saisi tout le potentiel de dé-veloppement du pays. En Pologne, la challenger sur un marché préempté à 50% par les discounters (comme le groupe portugais Jeroni-mo Martins ou Lidl). « Le for-mat hypermarché n’est pas le plus répandu, détaille Anne Magré, directrice générale E. Leclerc Pologne, il y a beau-coup de magasins de proximité et de petits formats. Le marché de la grande distribution est très concurrentiel avec des acteurs internationaux (Carrefour, Auchan, Intermarché, Tesco, Lidl, Netto, Aldi...) et des enseignes locales souvent détenues par des fonds. Nous sommes tout petits sur le marché, mais nos magasins ont une position historique sur leurs sites.  »

Fermé le dimanchePendant vingt ans, la plupart des maga-sins et centres commerciaux ont ouvert chaque dimanche. Mais depuis mars 2018, les autorités polonaises obligent tous les commerces à rester fermés plu-sieurs dimanches par mois. Du coup, les habitudes des clients ont changé, sur-tout dans les grandes villes. « Les achats se répartissent sur le reste de la semaine, constate la Française, et cette nouvelle législation bénéficie aux sites marchands sur internet. La plupart des clients font

leurs achats fréquemment et en plus pe-tite quantité qu’en France. Ils privilégient les magasins de proximité extrêmement nombreux au pied des immeubles et dans tous les quartiers avec des horaires d’ou-verture très étendus, parfois 6h/23h.  » Leclerc s’adapte en allongeant les ho-raires, en multipliant les caisses auto-matiques et en développant lui aussi des sites marchands sur le web même si le modèle « click and collect » type « drive » est peu développé en Pologne pour l’ali-mentaire, les clients préférant être li-vrés à domicile. Les Polonais achètent beaucoup sur Internet, pas seulement

via des sites locaux, mais aussi sur Amazon ou sur la plateforme chinoise Alibaba. Ils n’ont pas peur de com-mander des produits à l’autre bout du monde si le prix est intéressant.

Le succès des produits d'innovationNée en Bretagne, ancienne élève de l’École normale su-périeure et de HEC, Anne Magré vit en Pologne depuis un peu plus de vingt ans. Après des débuts au dépar-tement marketing de L’Oréal pendant cinq ans en France, puis en Pologne, elle rejoint Leclerc au moment où son mari reprend une grande surface de l’enseigne à Var-sovie. «  Dans l’organisation de coopérative E. Leclerc, il est fréquent que les magasins soient dirigés par un couple  », explique-t-elle. Aujourd’hui, la Française est à son tour à la tête d’un hypermarché, à

Varsovie. En Pologne, le panier moyen est trois à quatre fois plus faible qu’en France. La croissance du pays permet de l’augmenter au fil des ans mais la concurrence est très forte. « La consom-mation augmente avec une appétence pour tous les produits d’innovation, à valeur ajoutée, bio, sans gluten, sans lac-tose, constate Mme Magré. On assiste à une montée des “bobos” dans les grandes villes. Les cuisines du monde se sont beaucoup développées.  » Ainsi, les pro-duits français ont la cote, surtout les vins, les fromages et l’épicerie mais ce sont des articles assez chers et moins « mass market » que les produits italiens par exemple. Ils ont aussi une image sophistiquée. La cuisine française est perçue comme plus difficile à mettre en œuvre. A

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C Michel Kiviatkowski.

C Anne Magré.

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« NOS MAGASINS ONT UNE POSITION HISTORIQUE

SUR LEURS SITES. »ANNE MAGRÉ

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