l’inspiration de la bible dans le manuscrit 24 1886 · publie un livre intitulé seventh-day...

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Campus adventiste du Salève Faculté adventiste de théologie L’inspiration de la Bible dans le manuscrit 24 1886. Mise en miroir entre Calvin Stowe et Ellen White. Mémoire Présenté en vue de l’obtention du Master en théologie adventiste par Roberto MARQUES Directeur de recherche : Jean-Luc Rolland Assesseur : Roland Meyer Collonges-sous-Salève Mai 2015

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Campus adventiste du Salève Faculté adventiste de théologie

L’inspiration de la Bible dans le

manuscrit 24 1886. Mise en miroir entre Calvin Stowe et Ellen White.

Mémoire Présenté en vue de l’obtention

du Master en théologie adventiste

par Roberto MARQUES

Directeur de recherche : Jean-Luc Rolland

Assesseur : Roland Meyer

Collonges-sous-Salève

Mai 2015

1

Remerciements

Gostaria de aproveitar esta oportunidade por agradecer algumas pessoas pelo

seu contributo na redacção deste trabalho.

Em primeiro lugar, ao meu director de tese, Jean-Luc Rolland, pelo seu

empenho e paciência. Embora tenha ainda uma longa caminhada diante de

mim, aprendi muito com o seu rigor e pensamento crítico.

Da mesma forma gostaria de agradecer as pessoas que, duma forma ou de

outra, corrigiram o meu texto. O meu muito obrigado à Marina Payet, ao Gabriel

Samperio e ao Jean-Jacques Henriot.

Agradeço também à minha família, amigos e colegas que sempre me

encorajaram. No entanto, tenho de fazer uma menção especial à minha noiva,

Catarina, pela sua paciência a ouvir os meus desabafos e cujo incentivo foi

fundamental nos momentos mais difíceis.

Por último louvo a Deus, por me ensinar a cada dia a andar humildemente com

Ele.

2

Introduction Générale

Depuis 18891, la question de l’empreinte littéraire d’Ellen White est

soulevée de manière cyclique en utilisant de façon répétée les mêmes textes –

entre autres les textes de : W.J. Conybeare et J.S. Howson2, de Calvin E.

Stowe3. C'est précisément sur la question de l’empreinte littéraire d’Ellen White

par rapport à Stowe que se trouve la problématique de notre travail. Les textes

en question sont le manuscrit 24 de 18864, intitulé Objections to the Bible,

d’Ellen White, publié dans sa totalité dans le livre Messages Choisies5, dans un

sous-chapitre portant le même titre, et le premier chapitre du livre Origin and

History of the Books of the Bible, de Stowe6.

Ces deux textes traitant de la question de l’inspiration biblique sont

utilisés comme un exemple de l’empreinte littéraire d’Ellen White. Dans un

article, William S. Peterson7 affirme qu'elle possède une «dette théologique»

par rapport aux idées de Stowe qui défendait une influence «subjective» de la

Bible8 : «Madame White, dans ce cas, s’approprie des idées et non seulement

des informations historiques9 ». En réaction à ce dernier document, un travail

non publié est rédigé en 1979 par David Neff10, qui tient la position inverse :

Ellen White ne s’était pas approprié les idées de Calvin Stowe puisque, sur

certains aspects, ils proposaient des notions différentes11. Plus récemment,

Alberto Timm12 a travaillé sur cette même question et, dans son article, il se

1 En 1889, Dudley Canright, ancien pasteur de l’église adventiste et proche du couple White, publie un livre intitulé Seventh-day Adventism Renounced dans lequel il remet en question la notion de l’inspiration d’Ellen White en s’appuyant sur l’accusation de plagiat et de l’emprunt littéraire. 2 Ces deux écrivains chrétiens ont écrit un livre sur le contexte historique et culturel dans lequel

Paul a écrit ses épitres. La question de l’emprunt littéraire se pose par rapport au livre Sketches from the life of Paul qu’Ellen White a publié en 1883. 3 Théologien américain du XIX

e siècle.

4 Désormais nous utiliserons le terme « manuscrit 24 » pour désigner ce document.

5 Ellen WHITE, Messages Choisies, vol 1, Dammarie les Lys, Vie et Santé, 2002, p. 21-24.

6 Calvin STOWE, Origin and History of the Books the Bible, Both the Canonical and Apocryphal,

Hartford, Hartford Publishing Company, 1868. 7 William PETERSON, « Ellen White's Literary Indebtedness », Spectrum 3 (1971/4), p. 73-84. 8 Selon Stowe, l’inspiration biblique était un processus par lequel le divin et l’humain ont

coopéré pour produire la Bible. Ainsi qu’il en est de Christ, la Bible est pleinement divine et pleinement humaine. Nous allons, dans la continuité de ce mémoire, présenter sa pensée plus en détail. 9 Idem., p. 78.

10 NEFF David, Ellen White's alleged Literary and Theological indebtedness to Calvin Stowe,

s.l.,s.éd.,1979. 11

Idem, p.19, 12

Alberto TIMM, « Divine Accomodation and Cultural Conditioning of the Inspired Writings »,

3

base sur la position de Neff pour défendre une inspiration dans laquelle Ellen

White « voulait tout simplement dire que Dieu ne choisit pas les mots

spécifiques utilisés dans la Bible13 ». En d’autres termes, les pensées sont

divines, mais les paroles étaient choisies par les auteurs bibliques.

Cette question reste un sujet pertinent pour aujourd'hui, en raison de ses

implications dans la discussion sur l'inspiration en général et, en particulier,

autour de l'inspiration d'Ellen White dans l'église adventiste. S’il est vrai qu’elle

utilise des sources «humaines» cela diminue-t-il l’autorité du ministère d’Ellen

White ?

L’analyse comparative entre le manuscrit 24 et le livre Origin and History

reste essentielle pour nous permettre d’approfondir cette question. Elle se

concentre sur la comparaison de ces deux ouvrages au niveau des mots et

expressions utilisés, sur ses structures et particulièrement sur les idées et

notions communiquées.

C’est aussi au niveau des concepts que nous faisons un recoupement

avec les principaux penseurs et leur approche sur ce sujet à leur époque du

protestantisme. De la même façon, nous allons comparer le manuscrit 24 avec

les notions défendues parmi les adventistes au moment de sa rédaction. Ces

deux comparaisons nous permettront de constater s’il y avait une originalité

dans les propos de Calvin Stowe et d’Ellen White ou si leur notion faisait déjà

partie de leur contexte théologique.

Les principales sources utilisées sont donc le manuscrit 24 et le livre

Origin and History, que nous avons déjà mentionné. Néanmoins, nous allons

aussi utiliser d’autres écrits publiés par Ellen White, qu’il s’agisse de livres ou

encore d’articles divers. La plupart des sources des autres auteurs adventistes

sont tirés des articles d’archives des magazines Review and Herald et Signes

of Times14. De la même façon, nous avons utilisé comme source primaire les

Journal of the Adventist Theological Society 19 (2008/1-2), p. 164. 13

Alberto TIMM, « Divine Accomodation and Cultural Conditioning of the Inspired Writings », p. 165. 14

Ces deux journaux adventistes sont l’une des principales sources de matériel adventiste publié à cette époque. Ces archives sont disponibles, au moment de la rédaction de ce mémoire, dans le site de la Conférence Générale de l’Eglise adventiste. http://documents.adventistarchives.org/default.aspx

4

ouvrages de certains auteurs du XIXe siècle. Cette démarche nous a permis de

proposer une contextualisation théologique du débat sur l’inspiration jusqu’à

l’année 1885, avant la rédaction du manuscrit 2415. Les sources secondaires

n’ont été utilisées que pour fournir des informations et des éléments utiles à la

contextualisation historique du matériel traité.

Notre mémoire est divisé en trois parties qui nous permettront de

répondre à notre problématique. La première partie examinera les positions

défendues parmi le protestantisme américain du XIXe siècle. De cette façon,

nous pourrons comprendre le contexte religieux sur l’inspiration biblique dans

lequel le manuscrit 24 et Origin and History est apparu. Cette première analyse

nous permettra également de mettre en lumière quelques tensions entre toutes

ces conceptions différentes et proposera une comparaison plus en détail des

ouvrages d’Ellen White et de Calvin Stowe. Dans la seconde partie, nous allons

étudier ce qu’Ellen White avait déjà écrit sur cette thématique avant 1885. Nous

allons également relever les notions défendues sur l’inspiration biblique à cette

époque parmi les adventistes et terminer notre réflexion sur une introduction à

l’ouvrage de Calvin Stowe. La dernière partie de notre mémoire sera consacrée

à une analyse comparative des documents d’Ellen White et de Calvin Stowe et

à réfléchir sur les implications de nos résultats.

15

Une observation du manuscrit original nous a permis de constater que la date de rédaction n’est pas 1886, comme sa désignation officielle pouvait le suggérer, mais en 1885.

5

I - La notion d’inspiration de la Bible dans le protestantisme

anglophone du XIXᵉ siècle

6

A. Introduction

Cette première partie a pour objectif de présenter différentes approches

au sujet de l’inspiration biblique qui faisait partie du contexte religieux d’Ellen

White et de Calvin Stowe. Pour atteindre ce but, nous allons analyser deux

approches, notamment : Orthodoxe de Genève et le Séminaire de Princeton.

Nous étudierons également d’autres penseurs comme : Charles Briggs, Samuel

Coleridge et Friedrich Schleiermacher. Cette présentation nous permettra avoir

une vision synthétique du sujet traité et, dans la troisième partie, nous aidera à

positionner Ellen White et Calvin Stowe par rapport à leurs contemporains.

Cependant, et avant d’aller plus loin, il est nécessaire de noter que cette

présentation n’englobe pas tout le XIXe siècle mais s’articule jusqu’à l’année

1885, moment de la rédaction du manuscrit 24 d’Ellen White, qui est l’objet de

notre recherche. De la même façon, le choix de ces auteurs est sélectif et ne

prétend pas à être exhaustif. Cette liste est basée sur leur prépondérance pour

notre sujet. Ils sont présentés en plusieurs ouvrages historiques sur la théologie

et sur l’interprétation biblique au XIXe siècle16.

Parmi les auteurs choisis, nous sommes conscient que, pour certains

d’entre eux, l’ensemble de ces ouvrages ne seront pas traités dans notre

travail. Cette option est due au fait qu’une étude plus approfondie sur la

question sortirait du cadre de notre problématique, spécifiquement orientée sur

Ellen White et Calvin Stowe, et qu’elle est également liée aux contraintes de

l’espace disponible pour ce travail. Le choix des ouvrages est basé sur deux

raisons : en premier lieu parce que le document choisi reste représentatif de la

pensée de l’auteur17 et ainsi donc, le reste de son corpus littéraire n’ajoute pas

d’autres éléments pertinents pour notre travail. En deuxième lieu, parce que les

autres textes sortent de notre cadre temporel, c’est-à-dire entre 1800 et 1885.

16

Dans le but d’établir une liste des auteurs du XIXe siècle, nous avons pris pour référence les

ouvrages suivants : Karl BARTH, La Théologie protestante au dix-neuvième siècle. Préhistoire et histoire, trad. Lore JEANNERET, Paris/Genève, Librairie protestante/ Labor et Fides, 1969 ; Donald MCKIM (éd.), Historical Handbook of Major Biblical Interpreters, Downers Grove, Intervarsity Press, 1998 ; Frederic FARRAR, History of Interpretation. Eight Lectures Preached Before the University of Oxford in the Year MDCCCLXXXV, London, Macmillan and Co, 1886; Peter VAN BEMMELEN, Issues in Biblical Inspiration.Sanday and Warfield, Andrews University Seminar Dissertation Series 13, Berrien Springs, Andrews University Press, 1987. 17

Cette représentativité est aussi définie en employant les mêmes ouvrages de référence que nous avons utilisé pour établir la liste des auteurs de référence sur l’inspiration au XIX

e siècle.

7

Même si, comme nous l’avons déjà noté, notre objectif premier pour

cette partie n’est pas une présentation exhaustive, il est nécessaire de noter

que le débat sur l’inspiration biblique n’a pas débuté au XIXe siècle mais aux

siècles précédents avec des problématiques relatives aux concepts de

l’interprétation biblique de l’époque18. Au moment de la Réforme, les

théologiens protestants et catholiques étaient tout à fait d’accord au sujet de la

nature et de l’inspiration de la Bible : une conception verbale de la Bible où

même les mots utilisés étaient choisis par Dieu. Le rôle des auteurs humains

était considéré comme très secondaire et même accessoire dans tout le

processus19.

Nous voyons déjà, dans cette conception de l’inspiration20, une position

traditionnelle qui est restée dominante jusqu’à la deuxième moitié du XVIIᵉ

siècle21 quand un changement de paradigme s’est développé en ce qui

concerne la nature même de la Bible. Elle va commencer à être regardée non

pas comme un témoignage religieux, mais comme une représentation

historique du passé.

18

Plusieurs raisons peuvent être liées à la réflexion au sujet de l’inspiration de la Bible. Le siècle des lumières a permis l’apparition d’un nouveau regard sur l’Ancien et le Nouveau Testament. L’esprit scientifique et critique de l’époque pousse plusieurs individus à réfléchir sur l’origine, l’historicité et la nature du texte lui-même. Peter VAN BEMMELEN, Issues in Biblical Inspiration. Sanday and Warfield, Andrews University Seminar Dissertation Series 13, Berrien Springs, Andrews University Press, 1987, p. 56. 19

Richard Muller, professeur de l’histoire de la théologie distingué surtout dans l’étude de la période de la Reforme, l’affirme de façon catégorique : « Malgré l’intensité du débat sur la relation entre l’autorité biblique et ecclésiale de la Reforme, il n’y a pratiquement pas eu de désaccord entre protestants et catholiques à propos de l’inspiration du texte et de l’identification de Dieu comme auteur principal, et au sujet des prophètes et des apôtres comme auteurs secondaires du texte, en se basant dans l’analogie de la dictée. La plupart des théologiens et exégètes de l’époque supposaient que les prophètes et les apôtres parlaient avec leurs propres paroles et leur propre contexte historique mais que les mots et, bien plus important encore, le sens de ces mots étaient garantis par l’Esprit Saint comme la parole de Dieu. » Richard MULLER, «Biblical interpretation in the 16

th & 17

th centuries», Donald MCKIM (éd.), Historical

handbook of major biblical interpreters, Downers Grove, Intervarsity Press, 1998, p. 128. Sauf mention, toutes les citations d’ouvrages en anglais sont traduites par nos soins. 20

Il y a des auteurs qui nient que les Réformateurs avaient cette notion de l’inspiration biblique. C’est le cas de Werner JEANROND "History of Interpretation", in Anchor Bible Vol.3, David Noel FREEDMAN (éd.), New York, Doubleday, s/d, p. 438 et de Frederic FARRAR, Story of Interpretation, London, McMillan and Co, 1886, p. 339. Bien que la question reste ouverte et qu’une étude plus approfondie sur le sujet sortirait du cadre de ce mémoire, nous avons choisi d’adopter la position la plus consensuelle. 21

Richard MULLER, «Biblical interpretation in the 16th & 17

th centuries», p.140. John

WOODBRIDGE, Randal BALMER, Scripture and Truth, Grand Rapids, Baker Books, 1992, p. 225.

8

Ce changement a eu pour conséquence que la Bible était de plus en plus

«réexaminée à travers le prisme d’une nouvelle acuité historique et

empirique»22. Cette critique va déclencher l’apparition de points de vue tout à

fait divergents, comme par exemple l’inspiration partielle des écritures23. Au

XIXe siècle, le débat sur l’inspiration s’intensifie grâce à l’apport de facteurs

nouveaux24, notamment: la méthode historico-critique25, les nouvelles théories

scientifiques26 et la notion de progrès27 . Les courants et opinions présentés

dans les chapitres suivants nous montrerons jusqu’où cette diversité de

d’opinion sur l’inspiration a coexisté dans le monde religieux protestant

anglophone à cette époque.

B. Introduction à l’herméneutique orthodoxe de Genève

Dans le cadre que nous avons présenté, l'approche des théologiens

européens28 qui va débuter en 1817, est au plus près des positions

22

Gerald SHEPPARD, «Biblical interpretation in the 18th & 19

th centuries», in Daniel REID (éd.),

Dictionary of Christianity in America, Downers Grove, Intervarsity Press, 1990, p. 264. 23

Peter VAN BEMMELEN, Issues in Biblical Inspiration, p. 56. 24

Ibid., p. 58-70. 25

La méthode historico-critique est une méthode d’exégèse qui commence à se développer à cette époque et qui tente, de façon scientifique, d’étudier l’origine historique, le texte, la composition et la transmission de la Bible. Dans le XIX

e siècle, plusieurs érudits bibliques vont

remettre en question les faits historiques présents dans la Bible et baser ces événements bibliques sur des présupposés surnaturels. Kurt PETERSON, «Higher Criticism», in Brenda BRASHER (éd.), Encyclopedia of Fundamentalism, New York/London, Routledge, 2001, p. 220-222. 26

Parmi les théories scientifiques qui ont le plus apporté au débat, il y a la théorie géologique de l’uniformitarisme et la théorie de l’évolution. En 1830, Charles Lyell publie son livre Principles of Geology, dans lequel il propose que tous les processus géologiques observables aujourd’hui se sont toujours développés au même rythme et de la même manière. Cette pensée implique donc que les changements sur la surface de la terre se sont développés dans l’ordre de millions d’années. L’Origine des espèces apparaît en 1859, dans livre où Charles Darwin (1809-1882), scientifique anglais, défend l’hypothèse de la «modification des espèces par la sélection naturelle». Cette théorie qui, par la suite, prendra le nom d’"évolutionnisme", affirme que chaque être vivant est le résultat d’un processus évolutif qui l’amène de la simplicité à la complexité et à être de plus en plus adapté à son environnement. Ces deux visions remettront en question l’histoire biblique de la création et seront une source de conflit dans le milieu religieux. Florence DANIEL, «Actualisme/Catastrophisme, sciences de la Terre», in Bernard COUVELAIRE (éd.), François DEMAY (éd.), Dictionnaire des Idées, Encyclopaedia Universalis, 2005, p. 22-23. Jean GAYON, Armand de RICQLÈS, «Évolutionnisme, biologie», in Dictionnaire des Idées, p. 271-275. 27

Cette notion est présentée comme un concept philosophique général par Herbert Spencer (1820-1903), philosophe anglais qui en fera une application dans le domaine de la biologie dans le travail de Charles Darwin. Egalement appelé évolutionnisme philosophique, cette vision affirme que tous les domaines de la vie humaine, qu'il s'agisse de connaissances techniques, scientifiques ou même morales, croissent à chaque génération. L’humanité se perfectionne au fil de temps, en passant du plus simple au plus complexe. Hubert FAES, «Évolutionnisme, philosophie», in Dictionnaire des Idées, p. 275-276. 28

Même si ce courant de pensée sur l’inspiration de la Bible ne se limite pas géographiquement à la ville de Genève. Robert Haldane visite cette ville en 1816 dans un objectif missionnaire.

9

traditionnelles protestantes au sujet de l’inspiration. Parmi eux, deux noms ont

eu un rôle majeur29 dans la défense de leur point de vue face aux

questionnements que nous avons déjà mentionné : Robert Haldane et Louis

Gaussen.

Robert Haldane

Haldane était un théologien et évangéliste écossais qui a eu une œuvre

remarquable dans l’organisation d’un effort d’évangélisation des îles

britanniques. Il a également eu un parcours important dans le continent,

principalement à Genève et à Montauban. En 1816, il a publié un ouvrage dans

lequel il traitait de la question de l’inspiration biblique.

Pour cet auteur, l’inspiration de la Bible ne se résume pas aux idées ou

aux concepts présentés, mais elle se manifeste aussi dans les mots utilisés :

«Une écriture inspirée par Dieu implique, dans sa propre expression, que les

paroles sont les paroles de Dieu»30. Haldane n’accepte pas une notion "par

degrés", selon laquelle certaines parties de la Bible sont plus inspirées que

d’autres, dans le sens où elles possèdent une nature plus divine que d’autres.

Haldane défend l’idée que la Parole de Dieu est véritablement «dictée par

Dieu»31. Autrement dit, la Bible ne peut être appelée « Parole de Dieu » que si

elle est dictée par Dieu lui-même et que s’Il a personnellement choisi les mots

utilisés. C’est, aux yeux de Robert Haldane, la seule façon de garantir la fidélité

du message transmis.

Pendant cette visite, il fera plusieurs rencontres avec de jeunes étudiants genevois de théologie. Leur principal sujet de discussion était axé sur l’Epitre aux Romains. Cette visite revêtra une grande importance pour le nouveau mouvement revivaliste à Genève au XVIII siècle. Herman DE GOLTZ, Genève religieuse aux dix-neuvième siècle. Ou tableau des faits qui, depuis 1815, ont accompagné dans cette ville le développement de l’individualisme ecclésiastique du Réveil mis en regard de l’ancien système théocratique de l’Eglise de Calvin, trad. C. MALAN-SILLEM, Genève/ Bale, Henri Georg, 1862, p. 147. Version original. 29

Haldane et Gaussen auront une relation très proche même après leur rencontre à Genève. Ils se sont mutuellement écrits et, à propos d’un voyage de Gaussen vers l’Ecosse, ils ont pris divers rendez-vous. L’ouvrage de Gaussen aura une grande influence, grâce à la forte circulation de son ouvrage. Quelques citations apparaissent même dans les publications adventistes. Nous aborderons ce sujet dans le chapitre suivant. Alexander HALDANE, Memoirs of the Lives of Robert Haldane of Airthrey and of his Brother James Alexander Haldane, London, Alexander Macintosh, p. 558. Peter VAN BEMMELEN, Issues in Biblical Inspiration, p. 77. 30

Robert HALDANE, The Evidence and Authority of Divine Revelation. Being a View of the Testimony of the Law and the Prophets to the Messiah, with the Subsequent Testimonies, 3 édition, Hamilton Adams Co, London, 1839, p. 119. 31

Ibid., p. 207.

10

Notre auteur n’essaie pas d’expliquer le processus par lequel l’Esprit

Saint a travaillé avec les humains; cela reste pour lui un mystère32. Pourtant, il

propose à ses lecteurs quelques pistes. Dans l’acte de l’inspiration, Dieu prend

en compte la personnalité et le caractère individuel de chaque auteur alors que

dans le processus de dictée des messages, il utilisait les mots, les expressions

et le style propre à l’écrivain : «L’Esprit Saint pouvait dicter ses propres paroles

de telle façon qu'elles étaient aussi prononcées avec compréhension, dans

leurs termes »33.

Il considère incontestablement que, malgré cette appropriation du

langage individuel de chaque écrivain dans la rédaction de la Bible, elle reste

pleinement parole de Dieu : « […] parce que les mots ont été écrits par les

Prophètes et Apôtres, cela n’empêche pas qu’ils soient les paroles de Dieu»34.

C’est dans cette mesure aussi qu’elle est en même temps absolument divine et

absolument humaine.

Haldane nuance la notion d’une dictée divine en ajoutant que Dieu aurait

choisi certains mots dans le lexique individuel de l’auteur pour transmettre son

message. Dans cette conception de l’inspiration, l’autorité de la Bible dépend

complètement de cette notion, à savoir que Dieu choisit personnellement les

paroles utilisées. Gaussen, fortement influencé par Haldane, poussera cette

pensée plus loin encore.

Louis Gaussen

Gaussen, né à Genève, était pasteur, éducateur et professeur. Il est

devenu l'un des plus importants moteurs d’un mouvement revivaliste à Genève,

au sein duquel il a développé tout son ministère. Il a eu un impact considérable

à son époque, grâce à son livre intitulé Théopneustie ou la pleine inspiration

des Saintes Ecritures. Ce succès s'est étendu jusqu'aux Etats-Unis 35. En effet,

32

Robert HALDANE, The Evidence and Authority of Divine Revelation, p. 208. 33

Ibid., p. 214. 34

Ibid., p. 212. 35

Entre les années 1841 et 1896, son livre sera traduit et republié à 13 reprises aux Etats-Unis.

11

c’est dans ce pays que cet ouvrage aura le plus de répercussions, notamment

auprès du séminaire de Princeton36.

Dans cet ouvrage, l'auteur proclame que l’action du Saint-Esprit agit

toujours sur les écrits sacrés et jamais sur les scribes qui ont pour seule

fonction d’être des outils à la disposition de Dieu :

«[…]cette opération miraculeuse de l'Esprit Saint n'eut pas pour objet les écrivains sacrés, qui n'en furent que les instruments, et qui durent passer bientôt ; mais elle eut pour objet les livres saints eux-mêmes, qui furent destinés à révéler de siècle en siècle à l'Église les conseils de Dieu, et qui ne passeront jamais.»

37

La Bible possède une valeur parce que la participation humaine, dans sa

composition, a été complètement soumise à l’action de Dieu. Cela n’implique

pas un processus mécanique comme une espèce de «dictée divine». Dans une

lettre, il l’affirme : «C’est le fait de l’inspiration plénière des Ecritures qui m’est

cher et sacré, tandis que le mode m’en est inconnu et indifférent, parce qu’il

n’est pas révélé.»38 Comme pour Haldane, Gaussen défend l'idée que le

processus de l’inspiration ne peut être expliqué39. Alors, même si ce sont des

hommes qui parlent pour Dieu, le message est sacré parce que c’est Dieu qui

contrôle tout:

« Et si c'est toujours la parole de l'homme, puisque ce sont toujours des hommes qui la profèrent, c'est aussi toujours la parole de Dieu, parce que c'est Dieu qui les surveille, qui les emploie et qui les guide.

»40

Néanmoins, cette action n’anéantit pas la personnalité des écrivains en

question. En effet, Dieu agit de façon à soulever ces tempéraments

individuels41. C’est pour cela que le message est dans le même temps

pleinement humain et pleinement divin : « tous les versets, sans exception, sont

36

Dès la première publication en anglais, les critiques littéraires ont été très positives. Notons également que Benjamin Warfield, l'un des professeurs de théologie du Séminaire de Princeton aux États-Unis, l’a utilisé de manière régulière comme source de ses propres écrits sur l’inspiration. Dans le XX siècle, il sera aussi influent dans la rédaction de la section sur l’inspiration de la Bible dans The Fundamentals, ouvrage de référence du mouvement fondamentaliste, mouvement conservateur américain qui a commencé à se former au début du XX

e siècle. Pour plus d’informations sur l’influence de l’ouvrage de Gaussen, voir: Kenneth

STEWART, A Bombshell of a Book. Gaussen’s Theopneustia and its Influence on Subsequent Evangelical Theology, Evangelical Quarterly 75 (2003/03), p.215-237. 37

Louis GAUSSEN, Théopneustie ou la pleine inspiration des Saintes Ecritures, Paris, L-R-Delay, 1840, p. 3. L'ensemble des citations de Gaussen est dans sa version originale. 38

Louis GAUSSEN, La véritable doctrine de M. Gaussen sur l’inspiration des doctrines, Genève, Imprimerie P. Richter, 1917, p. 3. 39

Ibid., p. 3. 40

Ibid., p. 4. 41

Ibid., p. 4.

12

de l'homme; et tous les versets, sans exception, sont de Dieu; soit qu'il parle

directement en son nom, soit qu'il emploie toute la personnalité de l'écrivain

sacré.»42

C’est à cause de ce contrôle strict de la part de Dieu sur le processus de

formation et de transmission de la Bible, que nous pouvons affirmer que la Bible

ne contient pas d’erreurs quelles qu’elles soient43. Gaussen l'affirme en ces

termes:

«La théopneustie est la puissance mystérieuse exercée par l’Esprit de Dieu sur les

auteurs de la sainte Écriture, pour la leur faire écrire, pour les guider jusque dans l’emploi des paroles dont ils ont fait usage, et pour les préserver ainsi de toute erreur.»

44

Gaussen reprend d'ailleurs les mêmes idées de base qu'Haldane: une

inspiration verbale de la Bible dans laquelle le processus n’est pas expliqué.

Cette absence de justification de la manière dont le Saint-Esprit agissait avec

les humains, devient encore plus frappante lorsque l'on en approfondit leurs

notions. Haldane et Gaussen ont, pour objectif, non pas d'explorer le

phénomène de l’inspiration biblique, mais de défendre, selon eux, l’autorité de

la Bible. La valeur de la Bible advient de son inerrance, quelle que soit la nature

de ses affirmations et peu importe le sujet. Par conséquent, une inspiration

verbale est le seul moyen de garantir cette absence d’erreur; les auteurs

humains étant uniquement un moyen pour attendre le but final de transcrire

parfaitement la pensé divine en langage humaine. Comme nous l'avons déjà

remarqué, cette approche influencera fortement le Séminaire de Princeton.

C. L’approche du Séminaire de Princeton

Le Séminaire de Théologie de Princeton, créé en 1812 aux Etats-Unis, a

joué un rôle majeur dans le développement théologique américain45. Les

générations successives de professeurs auront un rôle très important dans la

défense de la vision orthodoxe reformée au sujet de l'inspiration biblique46.

Cette orientation orthodoxe réformée, basée sur les principes de la philosophie

42

Louis GAUSSEN, Théopneustie, p. 9,12,13. 43

Ibid., p. 16. 44

Ibid., p. 305. 45

William RIGENBERG, «Princeton University», in Daniel REID (éd.), in Dictionary of Christianity in America, Downers Grove, Intervarsity Press, 1990, p. 942-943. 46

Andrew HOFFECKER, «Princeton Theology», in Dictionary of Christianity in America, p. 941-942.

13

Scotish Realism47, apportait la confiance nécessaire à ses défenseurs pour

faire face aux positions théologiques les plus complexes et les plus érudites,

quelques fois les plus radicales aussi, de l’Europe. Le premier ouvrage que

nous allons étudier est la Systematic Theology de Charles Hodge, devenu

ouvrage de référence de l’orthodoxie reformée américaine48. Le deuxième

l’article est Inspiration écrit par Archibald Hodge - fils de Charles Hodge - et par

Benjamin Warfield, qui reste une contribution classique de leur point de vue49.

Charles Hodge

Charles Hodge est un nom qui, aujourd’hui même, reste connu dans les

milieux conservateurs américains à cause de l'influence de cet homme dans le

développement du département de théologie de Princeton. Entre 1826 et 1828,

il part pour l'Europe où il prendra connaissance des derniers développements

théologiques pour mieux défendre les positions conservatrices de Princeton50.

En 1857, il publie le premier volume de sa Systematic Theology, un ouvrage sur

la Théologie Systématique, dans lequel il détaille, entre autres, sa pensé au

sujet de l’inspiration.

L’inspiration biblique reste, selon Hodge, un processus exclusivement

surnaturel51 à travers lequel Dieu utilise les prophètes comme des

intermédiaires pour communiquer parfaitement avec les hommes52 ; En effet : «

L’objectif ou concept de l’inspiration est de garantir l’infaillibilité de

l’enseignement»53 . Pour garantir cette souveraineté : «les organes de Dieu

47

Il s’agit d’un courant philosophique du XVIII siècle qui a fortement influencé la pensée protestante américaine du XIX siècle. Cette pensée considérait que, même les personnes ordinaires, pouvaient atteindre une compréhension précise du monde réel à travers une étude empirique de ce monde et en utilisant des méthodes d'induction. Elle défendait aussi l'idée que tout être humain possède une connaissance intuitive de certains principes moraux. Richard POINTER, «Scottish Realism», in Dictionary of Christianity in America, p. 1061. 48

Ernest Sandeen affirme que c’est dans cet ouvrage que la théologie du Séminaire de Princeton est présentée dans sa forme la plus complète. Pour plus d’information, voir : Ernest SANDEEN, «The Princeton Theologie. One Source of Biblical Literalism in American Protestantism», Church History 31 (1962/3), p. 308. 49

L’importance de cet article est renforcée par le professeur de théologie John Battle : «cet article est devenu la « définition » de la doctrine de Princeton sur l’inspiration. John BATTLE, «Charles Hodge, Inspiration, Textual Criticism, and the Princeton Doctrine of Scripture», Western Reformed Seminary Journal 4 (1997/2), 28-41. 50

Andrew HOFFECKER, «Hodge, Charles (1797-1878) », in Dictionary of Christianity in America, p. 537-538. 51

Charles HODGE, Systematic Theology, 1 vol., 1 éd (1871), Grand Rapids, WM. B. Eerdmans Publishing Co., 1940, p. 168. 52

Ibid., p. 154. 53

Charles HODGE, Systematic Theology, 5 vol., p. 155.

14

dans la communication de sa volonté ont été contrôlés par Lui dans les mots

qu'ils utilisaient.»54

Cependant cette usage par Dieu ne limite pas les capacités des

hommes. Ce n’est pas un processus mécanique par lequel Dieu se limite à

dicter, mais il s’agit par contre de l’idée de prendre en compte les capacités et

caractéristiques individuelles du prophète :

« L’Eglise n’a jamais défendu ce qui a été stigmatisé comme la théorie de l’inspiration

mécanique. […] De plus, comme l’inspiration n’impliquait pas la suspension ou la

suppression des facultés humaines, de la même façon elle n’interférait pas avec le libre

exercice des caractéristiques mentales distinctives de l’individu. […] Il (Dieu) utilise des

hommes comme ses organes, chacun selon ses dons et capacités particulières. […] Il

n’y aucune raison de croire que l’opération de l’Esprit dans l’inspiration s’était révélée

dans la conscience des écrivains sacrés. De la même manière, ses opérations pour la

sanctification ne se révèlent pas dans la conscience du Chrétien. Les auteurs inspirés

ont écrit dans la plénitude de leurs propres pensées et sentiments, et ont employé le

langage et les modes d’expression qui leur était le plus naturel et approprié.

Néanmoins, ils parlaient ainsi qu’ils étaient guidés par l’Esprit Saint, et leurs paroles

étaient ses paroles.55

»

L’autorité divine des auteurs bibliques se reflète sur l’ensemble de

l’enseignement qu’ils présentent dans la Bible, les domaines théologiques et

religieux bien-sûr, mais aussi tout autre domaine où les prophètes enseignent.

En effet, les prophètes « sont infaillibles seulement comme professeurs, et

quand ils agissent comme porte-parole de Dieu56.» Dans ce cas, l’inspiration

englobe tous les mots qu’ils utilisent57.

Même si Charles Hodge possède une position très proche des courants

de Genève, il est facile de mettre en évidence une grande divergence. Selon

lui, la Bible n’est pas inerrante, ainsi que l’approche de Genève le concevait.

Cette dernière défendait la totale absence d’erreurs dans la Bible, alors que

Hodge émettait l’idée que l’inerrance provenait uniquement lorsque les

prophètes prononçaient leurs enseignements. Cette prépondérance donnée à

l’infaillibilité des auteurs bibliques uniquement dans leur rôle professoral reste

54

Charles HODGE, Systematic Theology, 5 vol., p. 137. 55

Ibid., p. 157. 56

Ibid., p. 165, Cf. p. 155, 154, 163, 169 57

Ibid., p. 164.

15

une nuance importante de sa pensée. J’aimerais mentionner enfin que Hodge

essaie de mettre en évidence l’aspect de la soumission volontaire et active des

auteurs à l’action du Saint-Esprit. Cette emphase est due aux critiques faites à

leur encontre, relevant qu’ils n’étaient que des machines utilisées par Dieu.

Archibald Hodge et Benjamin Warfield

Archibald Hodge et Benjamin Warfield était deux professeurs en

théologie de Princeton qui ont co rédigé un article important dans la conception

actuelle de l’inspiration verbale de la Bible58. En effet, la position présentée

dans cet article sera accepté en 189259 comme position officielle de l’Eglise

presbytérienne60.

Dans cet article, Hodge et Warfield défendaient l’idée que nous devrions

faire une distinction entre les écrits originaux - ceux que sont sortis de la plume

des auteurs - et les traductions courantes de la Bible, qui ont été corrompues à

cause de leur processus de transmission au fil du temps. Ce sont ces écrits

originaux qui méritaient, pour nos auteurs, la plus grande estime : « Elle ne

contient pas la parole de Dieu, elle est la parole de Dieu »61. L’inspiration : « ou

la surintendance de Dieu sur les écrivains dans tout le processus de l’écriture,

qui n’aura comme conséquence que l'infaillibilité absolue du registre dans

lequel la révélation, une fois générée, apparaîtra dans l’écrit original.»62 C’est à

cause de cette infaillibilité que :

« Néanmoins la foi historique de l’Eglise a toujours été, que toutes les affirmations de

l’écriture, quelles qu’elles soient : qu’il s’agisse de la doctrine spirituelle, de droit ou de fait

physique ou historique, ou encore du principe psychologique ou philosophique, sont sans

aucune erreur lorsque le ipsissima verba des écrits originaux sont déterminés et interprétés

dans leur sens naturel envisagé. […] et la précision, d'autre part, qui assure une déclaration

58

Benjamin Warfield sera l’un des savants qui écrira pour The Fundamentals, un ouvrage en 12 volumes qui fera débuter le mouvement fondamentaliste. Un tiers des articles qui appartenait à cet ouvrage défendait la vision traditionnelle de la Bible, notamment le concept de l’inerrance biblique. George MARSDEN, «Fundamentals, The», in Dictionary of Christianity in America, p. 468-469. 59

Andrew HOFFECKER, «Hodge, (A)rchibald (A)lexander (1823-1886) », in Dictionary of Christianity in America, p. 536-537. 60

L’Eglise presbytérienne des Etats-Unis est une dénomination qui a eu son origine en 1706. Tout au long de son histoire, elle a été une entité puissante dans le contexte religieux de ce pays. Louis WEEKS, « Presbyterian Church (U.S.A) », in Dictionary of Christianity in America, p. 931-932. 61

Archibald HODGE, Benjamin WARFIELD, « Inspiration », The Presbyterian Review (1881/6), p. 237. 62

Ibid.,p. 226.

16

correcte des faits ou des principes affirmés. C’est cette précision et elle seule, par opposition à

l'exactitude, que la doctrine de l'église soutient, sans exception, pour toute affirmation du texte

original de l'Écriture.»63

Néanmoins, avec cette notion, la Bible reste le produit d’une coopération

entre Dieu et l’homme où apparaissent les caractéristiques, les expériences et

les capacités individuelles de chaque auteur humain. En effet, «chaque auteur

a été mis dans une partie spécifique de l’ensemble de l’ouvrage pour lequel lui

seul était adapté de par ses capacités d’origine, d’éducation, d’information

particulière, et de sa position providentielle.»64 Les auteurs vont encore plus loin

dans leur démarche en affirmant que : «Chaque écrivain sacré était formé par

Dieu d’une manière spéciale, formé, doté, instruit, providentiellement

conditionné, et équipé d’une connaissance naturelle, surnaturelle ou

spirituellement transmise, afin que lui, et lui seul, puisse librement produire la

partie qui lui était attribuée.»65

Même s’ils pensent que les auteurs bibliques étaient choisis et

conditionnés par Dieu durant tout le processus, ils ont participé librement,

activement et de manière consciente66. Pour mieux expliquer cette apparente

incohérence, Hodge et Warfield utilisaient comme illustration l’instinct animal.

Même s’il existe des différences, nous pouvons voir là aussi, de quelle manière

Dieu suscite des activités spontanées qui amène le sujet d’une forme irrésistible

à un objectif prédéterminé, sans que ce sujet en comprenne la raison, et sans

que Dieu n’interfère ni sur les attributs individuels ni sur sa liberté de choix67.

Ainsi que nous venons de le constater, Archibald Hodge et Benjamin

Warfield proposent quelques nuances par rapport à leurs prédécesseurs.

Premièrement, et à l’opposé de Charles Hodge qui défend l’infaillibilité biblique

dans ce qu’elle enseigne, ils défendent l’infaillibilité des écrits originaux.

Deuxièmement, leur avis est que le processus de l’inspiration peut se faire par

des moyens naturels ce qui, pour Charles Hodge, était inadmissible.

63

Archibald HODGE, Benjamin WARFIELD, « Inspiration », p. 237-238. 64

Ibid., p. 229. 65

Ibid., p. 230. 66

Ibid., p. 231. 67

Ibid., p. 228.

17

Malgré l’importance de ce courant, surtout pour la pensée de l’orthodoxie

reformée de la fin du XIXe et du début du XXe siècle, il n’est pas resté

monolithique. Par rapport à l’herméneutique orthodoxe réformé de Genève,

même si ces deux pensées ont des différences superficielles, elles sont en

accord sur une inspiration verbale et inerrante de la Bible. Ce regard sur la

Bible du Séminaire de Princeton fera naître une grande opposition au sein de

l’Eglise presbytérienne des Etats-Unis sous la plume du théologien Charles

Briggs, auteur que l’on abordera dans le chapitre qui suit.

D. Charles Briggs

Charles Briggs était un auteur très controversé de la fin du XIX siècle au

sein de l’Eglise presbytérienne à cause de sa défense de la méthode historico-

critique et de sa critique sur l’orthodoxie de la théologie de Princeton. Lors d’un

discours public qu’il a réalisé en 1891, un procès d’hérésie a été tenu contre lui,

à la fin duquel il sera suspendu du corps pastoral presbytérien et mis à l’écart

de l’Union Theological Seminary - école dans laquelle il a enseigné - de l’Eglise

presbytérienne. Ce procès sera principalement basé sur son opinion sur

l’inspiration biblique et son autorité68.

Notre académicien a écrit un article69 en réponse à celui de Hodge et

Warfield que nous venons d’étudier, dans lequel il reprend une majeure partie

de leurs idées mais développe une position relativement différente par rapport à

la l’inspiration verbale70. Pour Briggs, il est nécessaire de faire une distinction

entre une inspiration pleine et une inspiration verbale, en d’autres termes, il est

possible de croire à une inspiration totale de la Bible sans pourtant accepter la

notion d’inspiration verbale71.

68

Bradley LONGFIELD, «Briggs, Charles Augustus (1841-1913) », in Dictionary of Christianity in America, p. 188. 69

Cet article reprend et résume les idées qu’il avait déjà présentées dans son livre Biblical Study consacré à des conseils sur l’étude la Bible. Pour appuyer cette Remarque, voir : Charles BRIGGS, Biblical Study. Its Principal Methods and History Together with a Catalogue of Books of Reference, New York, Charles Scribner’s Sons, 1883, p. 261. Cf. Charles BRIGGS, « Critical theories of the sacred scriptures in relation to their inspiration », The Presbyterian Review 2 (1881/7), p. 551. 70

Charles BRIGGS, « Critical theories of the sacred scriptures in relation to their inspiration », p. 551. 71

Ibid., p. 551.

18

L’«assurance dans l’autorité absolue de la Parole de Dieu»72 reste

quelque chose d’essentiel pour Briggs qui défend que les écrits originaux ne

contiennent pas d’erreurs, à l’exception de quelques inexactitudes

circonstancielles qui : «ne troublent pas l’infaillibilité des contenus sur la foi ou

sur les événements historiques ni sur les institutions dont ils sont

inséparables.»73

Cet auteur note pourtant une différence entre le sens du texte, qui est

essentiel pour lui, et les mots et lettres utilisés qui sont le moyen ou le « corps »

de la Bible, et donc secondaires : « L’écriture est comme le corps d’un homme,

dans lequel quelques composants existent dans le seul but de préserver le

reste, il peut être blessé sans pour autant produire la mort : le sens est l’âme de

l’écriture, et les lettres n’en sont que le corps ou le véhicule »74. La forme de la

Bible, c’est à dire les lettres, les paroles, la logique et la grammaire, ne sont que

des instruments utilisés pour transmettre le message divin75.

Penser autrement, c’est affirmer que la parole de Dieu ne nous est pas

accessible aujourd’hui, puisqu’il est impossible d’accéder aux sens originel76.

Ainsi, pour Briggs, c’est une incohérence de croire à une inspiration verbale qui

nous sépare de la parole de Dieu, et qui nie le fait que nous pouvons expliquer

exactement la même pensée de plusieurs façons différentes77. L’acte de

l’inspiration se concentre sur la pensée : « Sans doute que l’Esprit saint était

présent pendant tous les travaux des auteurs, faisant que ses énergies rentrent

dans l’exercice de leurs facultés, en les augmentant, en les dirigeant, de façon

à assurer une expression, sans aucune erreur, de la pensée conçue par

Dieu.»78

Comme les extraits de Briggs nous le montrent, il s’oppose très

fortement à la notion de l’inspiration verbale de la Bible et à toutes ses

implications. Selon lui, l’inspiration se centre sur la pensée de l’auteur et non

72

Charles BRIGGS, « Critical theories of the sacred scriptures in relation to their inspiration », p. 550. 73

Ibid., p. 552. 74

Ibid., p. 552. 75

Ibid., p. 553. 76

Ibid., p. 574. 77

Ibid., p. 572. 78

Ibid., p. 574

19

pas sur les mots qu’il dit ou écrit. Même s’il reprend la même idée de

l’infaillibilité des écrits originaux que soutient le Séminaire de Princeton, il

défend que cette infaillibilité n’est présente que dans le sens voulu par l’auteur

biblique.

E. Samuel Coleridge

Poète, théologien, philosophe, dramaturge, et détenant bien d’autres

titres encore, Samuel Coleridge reste une figure marquante de son époque.

Grâce à ses œuvres littéraires, il devient l’un des responsables principaux non

seulement d’un changement culturel, mais également d’un réveil du sentiment

religieux en Angleterre, son pays d’origine79.

En 1840, six ans après son décès, son éditeur publie un ouvrage basé

sur des lettres écrites par Coleridge intitulé Confessions of an Inquiring Spirit

dans lequel il s’oppose très fortement à l’inspiration verbale de la Bible : « la

doctrine en question se transforme immédiatement dans une tête de Mammon

colossal, un passage creux pour une voix, qui se moque des voix de plusieurs

hommes, et qui parle en leur nom, et pourtant elle ne reste qu’une seule voix

[…] »80 .

Par opposition à une inspiration verbale, il propose l’idée que c’est

l’esprit de la Bible qui est pleinement inspiré et infaillible, et non les mots

utilisés : « […] c’est l’esprit de la Bible, qui est infaillible et absolu, et non ces

phrases et paroles séparées […]»81.

Bien que la Bible possède une origine divine, elle est aussi le fruit de la

connaissance humaine de l’époque à laquelle elle a été rédigée82. Il n’est pas

concevable que la pensée et les discours de Dieu puissent être parfaitement

traduits à travers un langage humain : « comme si le sens de Dieu pouvait si

clairement et judicieusement être exprimé comme les propres paroles de

79

Paul ROZENBERG, « COLERIDGE (Samuel Taylor) 1772-1834», in Peter BAUMBERGER, Climatologie-Cytologie, vol. 6 de Encyclopaedia Universalis, Paris, Encyclopaedia Univesalis, 1993, p.83-84. 80

Samuel COLERIDGE, Confessions of an inquiring spirit, London, William Pickering, 1840, p. 32. 81

Ibid., p. 73. 82

Ibid., p. 83.

20

Dieu.»83 Pour Coleridge, Dieu ne peut être enfermé dans des paroles

humaines ; La Bible nous dirige vers l’objet de notre adoration, elle n’est pas

l’objet de cette adoration.

La Bible est le fruit de la coopération entre Dieu et l’homme. Des

hommes et des femmes imparfaits, mais qui aspirent à faire le bien84. Malgré

leur imperfection ils possèdent la compréhension nécessaire à notre salut85,

connaissance qu’ils ont laissé par écrit dans la Bible. Tous les éléments

présents dans la Bible qui ne contribuent pas à cette représentation ne sont pas

infaillibles86.

Il est intéressant qu’un savant des lettres, un poète et dramaturge

s’oppose si fortement à une inspiration verbale de la Bible. La dichotomie qu’il

présente entre les mots et l’esprit de la Bible soulève une conception de

l’inspiration qui agit sur la pensée humaine, dans un esprit de coopération entre

Dieu et l’homme.

F. Friedrich Schleiermacher

Cet homme est un théologien et philosophe allemand qui aura un rôle

fondamental dans le développement de l’herméneutique. Toutefois son action

ne se limitera pas seulement à cette discipline mais il sera un pionnier dans

plusieurs domaines de la théologie. L’une des caractéristiques de son travail est

l’emphase donnée au sentiment en tant que centre de l’être humain et par la

suite, de la religion, notamment le sentiment de complète dépendance de

Dieu87.

Avant d’expliquer la notion que Schleiermacher avait sur l’inspiration

divine de la Bible, il est important de noter quelques facteurs importants de son

regard sur les livres bibliques. Pour lui, l’Ancien Testament possède, par

rapport au Nouveau Testament, un rôle et une autorité clairement inférieur. Il ne

mérite sa place dans la Bible que grâce aux citations et mentions faites dans le

83

Samuel COLERIDGE, Confessions of an inquiring spirit, p. 57. 84

Ibid., p. 55. 85

Ibid., p. 82. 86

Ibid., p. 83. 87

Dietz LANGE, «SCHLEIERMACHER, Friedrich Daniel Ernst (1768-1834)», in Pierre GISEL (éd.), Lucie KAENNEL (éd.), Encyclopédie du protestantisme, Paris/Genève, Cerf/ Labor et Fides, 1995, p. 1419-1420.

21

Nouveau Testament tirées de l’Ancien Testament, et aux connections

historiques entre le culte chrétien et la synagogue juive88.

La révélation de Dieu est essentiellement faite à travers la personne du

Christ, toute autre révélation est dépendante de celui-ci. Ainsi toute l’activité

officielle des apôtres inspirés par l’Esprit-saint, dépend de cette révélation

primordiale : «Ainsi, l'expression orale et écrite des Apôtres comme amenées

par l'Esprit était simplement une communication avec une origine dans la

révélation divine du Christ. »89 Une révélation qui s’est présentée dans les

expériences qu’ils ont vécues avec le Christ, ses discours, sa vie90. Toutes

révélations postérieures, inspirées, se développent naturellement à partir de cet

événement essentiel : le ministère de Jésus.

« […] Christ Lui-même doit être le don divin originel de tout ce que les Saintes Écritures contiennent, pas dans les détails isolés, à titre d'inspiration, mais comme un seul don indivisible de connaissance à partir de laquelle les détails évoluent organiquement. Ainsi les discours et écrits des Apôtres inspirés par l'Esprit étaient tout simplement une communication basée sur la révélation divine dans le Christ. »

91

Pourtant, cette inspiration ne se limite pas à la rédaction des livres

bibliques ; au contraire, l’autorité et l’influence de ces ouvrages surgissent de

l’autorité et de l’inspiration divine présente dans leur vie d’apôtres du Christ. Les

livres sont l’un des fruits de la présence de l’Esprit saint agissant sur les

Apôtres eux-mêmes, alors que certains croyants ont d’autres fruits grâce à la

même action du Saint-Esprit :

« Ainsi l’inspiration particulière des Apôtres n’est pas quelque chose qui se limite exclusivement aux livres du Nouveau Testament. Ces livres partagent de cette inspiration qui, dans un sens plus étroit, conditionné par la compréhension pleine et pure de la chrétienté par les Apôtres, couvre l’ensemble des activités officielles de son ministère.»

92

En réalité, il n’existe pas de distinction entre l’inspiration des auteurs

bibliques et l’inspiration que chaque croyant expérimente93. L’inspiration de

l’individu humain par L’Esprit saint, qui l’anime et le régénère, produit des fruits

dans sa vie94. C’est cette dynamique qu’il nomme inspiration ; L’inspiration

88

Friedrich SCHLEIRMACHER, The Christian faith, s. l., T&T Clark, 1999, p. 608. 89

Ibid., p. 598. 90

Ibid., p. 600. 91

Ibid., p. 598. 92

Ibid., p. 599. 93

Ibid., 598, Cf. 560. 94

Ibid., p. 560,569.

22

biblique n’appartient pas à une catégorie séparée de l’inspiration. Au contraire,

la composition des livres bibliques s’insère dans la vie inspirée que les apôtres

ont vécue. Débattre des détails qui marquent la séparation entre l’élément

humain et l’élément divin de la Bible ne sert à rien pour le croyant95.

Le travail de Schleiermacher reste difficile à classer face aux autres

auteurs présentés dans cette partie. Cette difficulté advient du mépris de

l’Ancien Testament et du rôle unique donné au ministère du Christ comme

révélation divine. Il présente aussi l’inspiration biblique comme soumise à

l’action de l’Esprit saint dans l’Eglise ; Cette notion de Schleiermacher est

capitale parce que, contrairement aux autres auteurs étudiés, il ne se concentre

pas sur la définition de l’inspiration, mais au contraire il étudie en étudie le sens,

ainsi qu’il apparaît dans la Bible. Cette réflexion l’amène également à

développer la notion de la canonicité des livres bibliques. Tous ces éléments

restent des caractéristiques importantes de son approche au sujet de

l’inspiration, et le distingue des autres auteurs96.

G. Conclusion

Par rapport aux auteurs étudiés, la proximité entre les deux courants

orthodoxes de Genève et de Princeton sur une inspiration verbale et inerrante

de la Bible, est évident. Malgré l’influence de cette notion de l’inspiration

biblique dans le milieu protestant américain du XIXe siècle, elle a été opposée à

d’autres penseurs religieux parmi lesquels nous avons mis en évidence les plus

prépondérants. Après une observation attentive des positions des différents

auteurs, nous avons pu discerner les principaux points de tension entre eux,

notamment : l’inspiration du contenu, le point focal de l’inspiration et le mode

d’inspiration.

Par rapport au premier élément, l’inspiration du contenu, il reste à

préciser quelles informations de la Bible sont inspirées? Cette question est très

95

Friedrich SCHLEIRMACHER, The Christian faith, p.600. 96

Il est nécessaire de noter la proximité d’un théologien américain, Horace Bushnell, des positions défendues par Coleridge et Schleiermacher. Lui aussi soutenait l’imprécision des langages humains et l’idée que le langage imagé de la Bible devait être valorisé. Les tentatives d’exposer logiquement les vérités et textes bibliques sont nécessaires mais très limités. Les auteurs restreignaient la richesse et l’expressivité de la Bible. En effet, le langage imagé est le seul qui puisse le plus fidèlement transmettre les vérités bibliques. Pour plus d’informations, voir : Donald CROSBY, Horace Bushnell’s Theory of Langage. In the Contexte of Other Nineteenth- Century Philosophies of Langage, The Hague, Mouton, 1975, p. 41-45.

23

liée à celle de l’autorité de la Bible parce que la plupart des auteurs ne font pas

une distinction entre inspiration et autorité biblique. La majorité de ces auteurs

s’est concentrée sur cet unique aspect de l’inspiration. Autrement dit, en

développent leur pensée sur ce sujet, ils se sont contentés d’en définir ce qui

est normatif dans la Bible. Quelques auteurs affirment que seuls les sujets

théologiques sont inspirés, d’autres défendent l’idée qu’ils ne sont pas tous

inspirés. Enfin d’autres auteurs encore ont écrit que la Bible ne contient aucune

erreur, que le sujet soit théologique ou qu’il ne le soit pas.

Le deuxième aspect de l’inspiration, source de divergence entre les

auteurs étudiés, en est le point focal. Cet élément concerne le but de l’action du

Saint-Esprit, c’est-à-dire quel est le destinataire de cette opération. Une fois

encore, nous trouvons un clivage très net entre les courants orthodoxes qui

défendaient que cette action se trouvait dans le choix-même des paroles

utilisées et d’autres auteurs comme Briggs, qui affirmaient que l’action de

l’Esprit saint agissait sur la pensée mais pas sur les mots. Schleiermacher, pour

sa part, défendait que l’Esprit saint n’inspirait ni les paroles ni les pensées, mais

la personne elle-même.

Le troisième point de tension, le mode de l’inspiration, examine de quelle

manière l’inspiration s’effectue. En d’autres termes, de quelle façon le Saint-

Esprit a influencé les auteurs bibliques. Cet aspect de l’inspiration était le moins

développé parmi tous les éléments de ce sujet. Les auteurs orthodoxes étaient

partagés à ce propos. Certains affirmaient que c’était un mystère inexplicable,

d’autres en parlaient très brièvement et dans le seul but d’affirmer que n’était

pas à travers d’un processus «mécanique». Enfin quelques rares auteurs tels

que Schleiermacher ont exploré cette question plus en profondeur, disant que

le Saint-Esprit agissait sur les auteurs bibliques de la même façon qu’il agissait

sur tous les croyants dans leur vie concrète.

Comme nous venons de le voir, les principales conceptions sur

l’inspiration biblique aux XIXe se basaient surtout sur les aspects de l’inspiration

du contenu et sur le point focal de l’inspiration. Elles concernaient les

interrogations suivantes: l’inspiration était-elle verbale ou pas? Quels domaines

théologiques ou scientifiques étaient concernés? Cette même influence était-

24

elle inerrante? Les auteurs développaient très peu le mode par lequel l’Esprit

saint agissait avec les auteurs humains de la Bible.

Par rapport à notre problématique, cette étude nous a permis d’établir les

trois aspects de l’inspiration sur lesquels notre analyse des écrits d'Ellen White

et de Calvin Stowe doit être faite. Cela nous permettra non seulement de

trouver plus facilement des similitudes et des différences entre ces deux

auteurs mais aussi de les positionner plus aisément par rapport au débat

théologique sur l’inspiration biblique que nous venons d’étudier. Un des aspects

que nous devons approfondir d’avantage c’est de déterminer si Ellen White ou

Calvin Stowe ont approfondi l’aspect du mode de l’inspiration, élément le plus

négligé dans les pensées des auteurs étudiés. De cette façon, nous pouvons

éclaircir quelles ont été leur contribution individuelle pour ce débat sur

l’inspiration biblique au XIXe siècle.

Après avoir établi ce cadre théologique pour notre recherche, il est

nécessaire d'étudier l'aspect littéraire et historique de chacun des écrits dans

lesquels Ellen White et Calvin Stowe s’insèrent. De cette façon, nous pourrons

plus facilement comprendre et saisir leur pensée et probablement appréhender

les emphases données.

25

II – Contexte historique et littéraire des ouvrages de Calvin Stowe

et d’Ellen White

26

A. Introduction

Après une première partie centrée sur le contexte théologique au XIXe

siècle par rapport à l’inspiration biblique, il est maintenant nécessaire de nous

approcher d’Ellen White et de Calvin Stowe. Afin d’atteindre cet objectif, il nous

faut répondre à un certain nombre de questions qui auront une grande influence

dans la compréhension du manuscrit 24 et dans sa relation avec le livre Origin

and History.

Premièrement, il est impératif d’étudier ce qu’Ellen White avait écrit au

sujet de l’inspiration biblique avant 1885. Cela nous permettra de découvrir sa

conception sur ce thème avant sa lecture de Calvin Stowe et d’évaluer de

quelle façon cette étude pourrait ou pas, avoir une influence sur la pensée

qu’Ellen White présente dans son manuscrit.

Deuxièmement, nous sommes intéressés par les évènements qui ont pu

influencer la pensée d’Ellen White et par les conditions dans lesquelles elle a

rédigé son manuscrit. Ces éléments, concernant sa vie et l’Eglise Adventiste,

seront fondamentaux pour approfondir les nuances de sa pensée et pour établir

l’objectif de la rédaction du manuscrit 24.

Troisièmement, il est important par rapport à Calvin Stowe, de connaître

l’ensemble de son livre pour comprendre en détail sa vision de l’inspiration et

saisir de quelle manière cette notion s’articule avec le reste de son ouvrage.

Cette étape valorisera notre comparaison entre son livre et le manuscrit 24,

puisque nous aurons alors une idée plus claire des possibles relations entre sa

pensée et celle d’Ellen White.

Par rapport à ces divers objectifs que nous venons d’établir, notons que

cette partie se divisera en deux chapitres. Le premier concernera Ellen White

dans lequel nous procéderons à une recherche et à une analyse des textes qui

présentent sa vision de l’inspiration de la Bible avant 1885. Nous verrons

également certains éléments biographiques et historiques au sujet de la vie

d’Ellen White et de l’Eglise Adventiste. Le second chapitre sera dédié à Calvin

Stowe. Nous proposerons un résumé de son ouvrage et une analyse de sa

pensée sur l’inspiration biblique. Ce chapitre au sujet de ce dernier auteur

n’aura pas la même importance que celui d’Ellen White en raison de l’absence

27

d’éléments biographiques suffisants; Après une recherche détaillée sur sa vie,

nous n’avons pas obtenu de détails pertinents pour le contexte historique de

son ouvrage.

B. Contexte historique et littéraire du manuscrit 24 1885

La notion de l’inspiration biblique dans les œuvres d’Ellen White avant 1885

Jusqu’en 1885, Ellen White avait déjà accumulé une grande quantité

d’écrits, principalement des livres et des articles de presse. Pour cette raison, il

nous était nécessaire de vérifier si elle avait déjà abordé le sujet de l’inspiration

de la Bible et, dans ce cas, quelle était sa pensée avant la rédaction du

manuscrit 24.

Dans le but de trouver des textes pertinents de notre auteur avant 1885,

nous avons utilisé deux moyens. Le premier était de recueillir tous les textes

d’Ellen White empruntés par différents auteurs adventistes qui analysent son

regard sur l’inspiration. A partir de cette liste, nous avons trié ces textes à la

lumière de deux critères : la date de publication, avant 1885, et un

développement clair du thème de l’inspiration de la Bible. Une fois cette

procédure achevée, nous n’avons obtenu aucun résultat significatif pour notre

recherche, notamment parce que les textes utilisés par ces auteurs antérieurs à

1886 ne parlaient pas de l’inspiration biblique mais traitaient de l’inspiration du

Saint-Esprit dans le ministère d’Ellen White97.

Le second moyen que nous avons utilisé pour découvrir des textes à

analyser était le moteur de recherche inclus dans l’Ellen G. White Writings

Complete Published Edition 2007. Ce cd-rom possède tous les écrits

disponibles d’Ellen White; nous avons néanmoins exclus les compilations. En

parcourant cet outil, nous avons isolé quelques termes spécifiques liés à notre

97

Voici la liste des auteurs sur lesquels nous nous sommes basés : Roy GRAHAM, Ellen White. Co-Founder of the Seventh-day Adventist Church, American University Studies 7, New York, Peter Lang, 1986, p. 140-169. Herbert DOUGLASS, Messenger of the Lord. The Prophetic Ministry of Ellen G. White, Nampa, Pacific Press, 1998, p. 417-423. Gerard DAMSTEEGT, «The Inspiration of Scripture in the Writings of Ellen G. White», Journal of the Adventist Theological Society 5 (1994/1), p.155-179. Raoul DEDEREN, « Ellen White’s Doctrine of Scripture », supplement de Ministry, 1977, p. 24f-24j. Jud LAKE, Ellen White Under Fire. Identifying the Mistaker of her Critics, Boise, Pacific Press, 2010, p. 106-120, James BURRY, An Investigation to Determine Ellen White’s Concepts of Revelation, Inspiration, “the Spirit of Prophecy”, and Her Claims About the Origin, Production and Authority of Her Writings, Ann Arbor, UMI, 1991, p. 33-54.

28

thématique, notamment: inspiration, inspired, inspire, dictation, dictate ; ce qui

nous a donné une liste totale de 2'267 textes. Avec les critères précédemment

usités, il ne restait plus qu’un texte correspondant à nos recherches : le premier

chapitre, Bible Biographies, du volume 4 de la série Testemony for the Church.

Bible Biographies

Dans ce texte, Ellen White défendait l’idée que les personnages

bibliques avec leurs histoires étaient véridiques. Le fait que nous puissions y lire

leurs défauts et faiblesses pouvait être considéré comme un argument en

faveur de l’inspiration divine de la Bible :

« Les auteurs inspirés n’ont pas témoigné des mensonges, avec la peur que les pages de l’histoire sacrée allaient être obscurcies par la présence de faiblesses et de fautes humaines. Les scribes de Dieu ont écrit étant dictés par le Saint-Esprit. Ils ne possédaient eux-mêmes aucun contrôle sur le travail réalisé. Ils ont écrit l’histoire littérale, et des faits durs et interdits ont été révélés pour des raisons que nous, esprits limités, ne pouvons pas pleinement comprendre. (…) C’est un fait prouvé qu'il est humainement impossible de raconter impartialement l’histoire d’un contemporain et il s'avère tout aussi difficile de narrer, sans dévier de la vérité exacte, l’histoire d’une personne ou d’un peuple dont nous connaissons les faits. L’esprit humain est tellement sensible aux préjugés qu'il est pratiquement impossible de traiter un sujet impartialement. (…) Mais l’onction divine

98, soulevée au-dessus de la faillibilité

humaine, raconte l’histoire simple et vraie.99

»

L’aspect important de ce texte vient de l’utilisation du terme «dicté» pour

décrire le procédé de l’inspiration biblique. Ellen White ajoute encore que les

auteurs bibliques n’avaient «aucun contrôle sur le travail réalisé.» Pour arriver à

saisir sa pensée, il est nécessaire non seulement de préciser le sens du mot

«dicté» mais également de définir de quelle manière le Saint-Esprit a contrôlé

les auteurs de la rédaction de la Bible.

Pour clarifier quel était l’usage courant du terme «dicté» à l'époque de

notre auteur, nous avons utilisé le dictionnaire de Webster100, qui présente trois

sens différents pour ce mot : Premièrement: dire avec autorité ou prononcer un

ordre, un commandement ou une direction ; Deuxièmement: ordonner ou

instruire ce qui doit être dit ou écrit ; Troisièmement: suggérer, admonester ou

diriger par une impulsion sur l'esprit. Le choix sur quel le sens du terme qui sera

98

Plus tard, ce texte sera retravaillé et présenté sous la forme d’un article et, à ce moment-là, l’expression «onction divine» sera changée par «inspiration». Ellen WHITE, «Bible Biographies», Review and Herald 55 (1880/4), p. 49. 99

Ellen WHITE, Testimony for the Church, vol. 26, Oakland, The Pacific Press, 1876, p. 5- 6. 100

Noah WEBSTER, Chaucey GOODRICH, An American Dictionary of the English Language, Springfield, George and Charles Merriam, 1861, p. 361.

29

le plus appropriée va dépendre du contexte de l’expression. Par conséquent,

notre analyse des textes doit se baser sur ces trois options.

Pour arriver à une conclusion définitive sur l’usage du mot «dicté» et sur

lequel des sens elle donne à ce terme dans notre texte, nous devons

comprendre pour quelle raison les auteurs n’avaient «aucun contrôle sur le

travail réalisé». C’est dans la suite du texte qu’Ellen White explique comment

cette absence de contrôle se reflétait dans la rédaction de la Bible. En effet, de

l'avis de notre auteur, c’est une impossibilité pour l’humain de raconter de

manière pleinement objective les récits de la Bible. Pourtant ces derniers

semblent justement présenter cette caractéristique : «Mais l’onction divine,

soulevée au-dessus de la faillibilité humaine, raconte l’histoire simple et vraie.»

Dans la suite du texte, Ellen White affirme que ses propres écrits sont

semblables à ceux de la Bible dans la mesure où : « Dans sa providence le

Seigneur a décidé d’enseigner et avertir son peuple de plusieurs façons. Par un

commandement direct, par les écritures sacrées et par l’esprit de prophétie Il

leur a fait savoir sa volonté. Mon travail a été de parler simplement des fautes

et erreurs du peuple de Dieu. »101 A l'instar des auteurs bibliques : « J’ai

fidèlement mit devant eux leurs offenses et le moyen de les régler, selon les

instructions102 du Saint-Esprit. »103

Ainsi donc, le contrôle du Saint-Esprit ne se reflète pas seulement sur les

idées mais se révèle également dans la rédaction des textes sacrés, afin de

garantir que tous les faits sont présentés dans le texte. Quand nous lisons que

même les choses inconnues ou cachées104 sont révélées dans la Bible, cela

implique, de la part des auteurs bibliques, une démarche différente de celle

d’un simple historien. Le Saint-Esprit, par une action surnaturelle, a le rôle de

montrer aux auteurs bibliques ce dont ils n'avaient pas accès par des moyens

naturels. Les auteurs divins n’avaient pas le contrôle sur ce qui devait ou pas

apparaître dans la Bible ; elle raconte l’histoire vraie et complète.

101

Ellen WHITE, Testimony for the Church, vol. 26, p. 11. 102

Dans le texte original en anglais, l’auteur utilise le mot dictates. 103

Ellen WHITE, Testimony for the Church, vol. 26, p. 14. 104

Ibid., p. 10.

30

Nous pouvons donc conclure que le processus de l’inspiration biblique

décrit dans Bible Biographies est un processus dans lequel les auteurs sont

sous le contrôle du Saint-Esprit qui les emmène au-delà de leurs capacités

naturelles. Avec, quelques fois, des informations transmises par un moyen

surnaturel de la part de Dieu, leur objectif était de raconter objectivement et

véritablement l’histoire biblique. Ainsi, le mot «dicté» n’a pas une incidence sur

les paroles utilisées mais sur les événements racontés.

Conclusion

L’enquête que nous avons menée pour découvrir la pensée d’Ellen White

sur l’inspiration de la Bible ne nous a fourni qu’un seule texte utile à notre

recherche. Dans ce dernier, elle décrit le processus de l’inspiration par le mot

«dicté». Notre analyse nous a montré que l’action du Saint-Esprit implique un

contrôle strict sur les auteurs bibliques. Néanmoins, ce contrôle agissait sur la

rédaction des événements décrits, sur la fidélité des choses racontées et non

pas sur les paroles utilisées. De plus, rien dans le contexte de ce document ne

nous amène à conclure que ce contrôle était aussi présent dans le choix des

mots. Cependant, il nous est difficile d'imaginer comment garantir ce contrôle

sur la véracité absolue des événements sans qu'il n'existe aucun rapport sur les

mots choisis pour les raconter.

Même si ce texte reste pertinent sur la manière dont Ellen White utilise

«dicté» et l’expression «aucun contrôle sur le travail réalisé», pour exprimer sa

pensée, il ne nous permet pas d’avoir une notion claire sur l’inspiration biblique.

De la même façon, ce texte mis à part, nous n’en avons pas d’autres dans

lesquel elle explique et développe sa pensée sur notre sujet. Par conséquent,

nous ne pouvons pas préciser quelle était sa vision sur l’inspiration biblique

avant la rédaction du fameux manuscrit 24 de 1885.

Le fait que nous n’ayons pas une image claire de sa pensée avant 1885

ne nous permettra pas d’évaluer en détail de quelle manière Calvin Stowe a pu

l’influencer sur ce sujet. Néanmoins, nous avons pu constater que le manuscrit

24 est le premier texte d’Ellen White dans lequel elle traite de ce thème de

manière beaucoup plus détaillée. Ce fait valorise donc davantage son

importance par rapport aux autres textes relatifs à ce thème.

31

Le contexte historique du Manuscrit 24

L’absence de textes qui traitent de l’inspiration biblique avant 1886 nous

amène à être plus sensibles encore au contexte historique de ce manuscrit ;

des événements qui ont marqué la vie d’Ellen White mais aussi le vécu de

l’Eglise adventiste à cette époque. Nous allons étudier spécifiquement les

années 1883-88 et prendre en considération les événements et les conditions

qui ont influencé sa rédaction. Pour répondre à cette question, il est nécessaire

de nous replonger dans la période 1883-88, époque marquée par la discussion,

au sein de l’Eglise adventiste, sur l’inspiration biblique.

En 1883, la décision prise par la Conférence Générale de rééditer, avec

des corrections, la collection Testimony for the Church d’Ellen White provoque

un temps de réflexion entre les principaux responsables de l’Eglise de l’époque.

L’année 1888 est marquée par la publication d’une nouvelle édition de la

Tragédie des siècles, ouvrage retravaillé pendant les années précédentes.

L’importance de cet événement pour notre problématique vient de l’ajout d’une

introduction qui reste le premier texte publié par Ellen White dans lequel elle

traite la question de l’inspiration biblique de manière aussi détaillée.

Cependant, avant d’étudier cette période, il nous est nécessaire de

comprendre quelle était la notion de l’inspiration biblique défendue par la

majorité des membres de l’Eglise adventiste avant l’année 1883. Ainsi, nous

pourrons plus aisément comprendre les enjeux de la décision prise par la

Conférence Générale, les répercussions que cette décision aura dans les

années suivantes mais également l’importance du manuscrit 24 en contraste

avec cet arrière-plan.

Les conceptions sur l’inspiration de la Bible parmi les Adventistes avant 1883

Le seul livre adventiste publié durant cette période et abordant la

question de l’inspiration biblique était un livre écrit par le pasteur adventiste

Moses Hull, The Bible from Heaven, en 1863. En 1878 il sera amélioré et publié

à nouveau en collaboration avec l'auteur Dudley Canright, lui aussi pasteur

32

adventiste105. L’objectif de ce livre était de répondre aux objections des non

chrétiens sur la Bible.

Dans ce livre, Canright ne présente pas sa vision sur l’inspiration de

façon systématique, mais quelques citations nous permettent de conclure de

l’importance des mots dans sa conception : « c’est un fait indiscutable que notre

Bible est traduite directement à partir de paroles originales qui ont été écrites

par le moyen de l’inspiration.» Nous pouvons donc conclure, à partir de cette

affirmation de l’auteur, que les traductions sont fiables, non parce qu’elles ont

traduit la pensée de l’auteur biblique, mais parce qu’elles ont été traduites

directement des mots originaux. Dans un autre texte notre auteur déclare:

« Alors quelle est la volonté de Dieu en ce qui nous concerne ? Qu’est-ce qui lui est agréable ? (…) Comment pouvons-nous apprendre sur ces sujets si importants ? Nous devons avoir une révélation directe de Dieu qui répondra à toutes ces questions. De cette façon il peut nous dire clairement sa volonté, et nous déclarer notre devoir et notre destinée. Sans cela, nous sommes complètement dans l'ignorance. (…) Seuls quelques mots venus directement du ciel peuvent tranquilliser notre conscience sur ces choses

106.»

Un des points remarquable dans ce texte, à part l’emphase sur les mots

qui étaient déjà présents dans le texte antérieur, c’est cette notion de la Bible

venant « directement du ciel ».Pour Canright seul un texte ayant Dieu comme

auteur unique, donc une inspiration verbale, est suffisant pour répondre aux

besoins de l’Humanité107.

Un autre moyen au travers duquel les adventistes ont montré leur

opinion était le Review and Herald. Une recherche sur les archives de cette

revue108 nous a permis de constater quelques résultats intéressants.

L’utilisation d' «inspiration» comme terme de recherche a donné une quantité

ingérable de textes à étudier. Par conséquent, nous avons utilisé les termes «

thought inspiration », « verbal inspiration» et «biblical inspiration». En ce qui

concerne le terme «thought inspiration», il n’apparait qu’à partir de 1928. Les

105

Nous n’avons pas eu l’occasion de trouver un original de Hull, c’est pour cela que nous présentons seulement des citations de l’ouvrage de Canright. 106

Dudley CANRIGHT, The Bible from Heaven. A Summary of Plain Arguments for the Bible and Christianity, Battle Creek, Seventh-Day Adventist Publishing Association, 1878, p. 57. 107

Quelques années plus tard, en 1888, il publie un ouvrage où il renonce l’adventisme. Parmi les critiques qu’il fait se trouve son opposition au ministère d’Ellen White. Cette opposition est due à sa conception verbale de l’inspiration. Nous allons étudier cet ouvrage plus en détail un peu plus loin. 108

Cette recherche a été réalisée en utilisant le moteur de recherche disponible sur le site hébergeant les archives : http://docs.adventistarchives.org/documents.asp?CatID=27.

33

résultats pour les deux autres termes seront présentés plus loin. Par exemple :

en 1879 un auteur affirme : « Ce que Job, David, Esaïe et tous les prophètes

ont témoigné sur la résurrection n’est pas simplement leur propre langage mais

cela a été dicté par le Saint-Esprit et écrit pour notre instruction»109. Un auteur

anonyme en 1881, critique un adversaire de l’inspiration verbale de la Bible110.

De la même manière en 1882, Charles Lewis écrit : «c’est difficile (…) de

comprendre comment les auteurs d’un livre pouvaient être inspirés mais pas le

livre lui-même. Sans doute, il affirme là, qu’il ne croit pas à l’inspiration

verbale.»111

Dans la même lignée, dans la revue The Signs of the Times en 1880,

une republication d’un article apparu à l'origine dans le Christian Union - un

journal religieux sans dénomination - nous trouvons : « Ils (les auteurs

bibliques) ont été inspirés de façon différente d’une inspiration avec des

pensées sacrées, motivations et actions que le Saint-Esprit met dans l’âme du

croyant.» Toutes ces affirmations nous montrent une prédominance, au sein de

la communauté adventiste, de l’inspiration verbale de la Bible112.

Entre 1844 et 1883, les pionniers adventistes n’étaient pas concernés

par une notion précise de l’inspiration même s’ils ont eu besoin de défendre et

de renforcer l’autorité biblique par quelques affirmations. Néanmoins, l’Eglise

dans sa globalité, avait une vision infaillible de la Bible dans laquelle

l’inspiration empêchait la présence d’erreurs et de contradictions113.

109

Charles STONE, «The Ressurection», Review and Herald 54 (1879/4), p. 25. 110

s.a., «The New Version», Review and Herald 58 (1881/1), p. 9. 111

Charles LEWIS, «Mr. Beecher’s Latest Sensation» Review and Herald 59 (1882/4), p. 692-693 112

De la même façon, Alberto Timm affirme : « Que les Adventistes du Septième Jour regardaient les Écritures comme infaillibles est évident par la publication, sans critique, dans la Review and Herald des portions de textes des auteurs non adventistes qui défendaient cette vision.» Parmi les auteurs republiés nous trouvons Louis Gaussen et son ouvrage Theopneustia qui, comme nous l’avons déjà étudié, défendait une inspiration verbale de la Bible. Gilbert Valentine, lui aussi, affirmait que l’ensemble de la communauté adventiste, pendant la période que nous étudions, défendait, à quelques exceptions près, une inspiration verbale de la Bible. Pour plus d’informations, voir : Alberto TIMM, «A History of Seventh-day Adventist Views on Biblical and Prophetic Inspiration (1844-2000)», p. 486-542. Gilbert VALENTINE, W.W. Prescott. Forgotten Giant of Adventism’s Second Generation, Hagerstown, Review and Herald, 2005, p. 282. 113

Alberto TIMM, «A History of Seventh-day Adventist Views on Biblical and Prophetic Inspiration (1844-2000)», p.488. Timm remarque l’utilisation des citations de plusieurs auteurs qui défendaient cette notion dans la Review & Herald comme base de cette affirmation. Un des

34

Les années 1883-88

À partir de l’année 1883, les plus grandes crises vécues dans

l’adventisme de cette époque sont très étroitement liées aux notions de

l’inspiration, non seulement biblique, mais aussi dans l’application faite de cette

vision au sujet du ministère prophétique d’Ellen White.

En effet, ces années sont marquées par deux travaux de révision sur des

ouvrages d’Ellen White, où le langage sera corrigé. Le premier concerne la

révision des Testimonies114 qui sera introduite officiellement par la Conférence

Générale avec une déclaration de l’Eglise au sujet de l’inspiration. Cette

révision a engendré d’énormes problèmes pour ceux qui croyaient à une

inspiration verbale de la Bible et a engagé par la suite une discussion sur la

nature de l’inspiration.

La deuxième crise s’inscrit dans la révision du livre The Great

Controversy. La deuxième édition sera publiée en 1888, avec une introduction

qui est le premier texte publié par Ellen White dans lequel elle développe le

thème de la nature de l’inspiration et qui reste aujourd’hui encore une des

affirmations classiques sur ce sujet.

La révision des Testimonies

Une des crises vécues dans l’adventisme concerne la décision de la

révision d’une série d’ouvrages d’Ellen White appelés Testimonies à l’occasion

de la nécessité d’une réédition. Cette décision, prise en novembre 1883, verra

une grande contestation naître dans l’Eglise adventiste. Cette résolution affirme

que :

«Considérant que plusieurs de ces Testimonies ont été écrits dans des circonstances très défavorables, l’auteur étant en période de grande anxiété et de travail pour optimiser ses capacités critiques et ses compétences grammaticales. De plus, ils ont été publiés précipitamment telle célérité faisant que des imperfections sont passées sans être corrigées ; et –

Considérant que, nous croyons que la lumière donnée par Dieu à ses serviteurs se fait par l’illumination de l’esprit, en communiquant ainsi des pensées, et non (sauf rares

auteurs cité, Louis Gaussen, analysé dans notre première partie, est caractérisé par une inspiration verbale. 114

Le Testemonies est une collection d’ouvrages publiés par Ellen White constituée de lettres, d’articles, de prédications, de visions et d’autres textes destinés aux membres de l’Eglise adventiste. Pour plus d’informations, voir : George KNIGHT, «Ellen G. White’s Writtings» in Denis FORTIN (éd.), Jerry MOON (éd.), The Ellen G. White Encyclopedia, Hagerstown, Review and Herald, 2013, p. 126-129.

35

exceptions) les propres mots avec lesquels les idées devaient être exprimés ; pour ces raisons –

Résolu, la republication de ces volumes avec les changements linguistiques afin d’enlever ces imperfections, dans la mesure du possible, sans changer d’aucune manière la pensée de l’auteur.

115»

Comme dans le milieu adventiste l’inspiration biblique était étroitement

liée à l’inspiration du ministère d’Ellen White, cette décision apportera de graves

conséquences à qui défendait une influence verbale de la Bible. Le fait est que,

dans cette résolution, la Conférence Générale défendait l’action de Dieu qui se

concentrait sur les pensées en admettant même l’existence des erreurs

grammaticales. Ces affirmations étaient problématiques par ce qu’elles

attachaient l’autorité divine aux paroles inspirées de la Bible. Comme nous

l’avons vu dans l’inspiration verbale, l’autorité biblique advient du fait que c’est

Dieu lui-même qui choisit les mots pour garantir une parfaite transmission de sa

pensée. Ainsi, l’autorité d’Ellen White était due au même contrôle, de la part de

Dieu, sur ce qu’elle écrivait ou disait. Cette admission des erreurs dans les

écrits d’Ellen White les amenaient à réfléchir de la même façon sur de possibles

erreurs grammaticales dans la Bible. Cette dernière vision semblait être

impossible parce que c’était Dieu qui, personnellement, avait choisi les mots, et

Dieu ne commet pas des fautes.

À la suite de cette décision, l’opposition de ceux qui croyaient à une

inspiration verbale a freiné le travail de republication116. Une lettre envoyée par

Ellen White à Uriah Smith, en février 1884, nous montre jusqu’à quel point le

problème avait entraîné des dégâts : « On a reçu l’information de Battle Creek

que le travail fait sur les Testimonies n’est pas bien accepté. […] Je ne peux

pas voir cette situation de la même façon que mes frères la voient. Je pense

115

s.a., « General Conference Proceedings », Review and Herald 60 (1883/47), p. 741-742. 116

Pour plus d’informations sur l’opposition à la révision des Testemonies, voir : Allen THOMPSON, Inspiration. Hard Questions Honest Answers, Hagerstown, Review and Herald, 1991, p.273-276 . Jerry MOON, W.C.White and Ellen White. The Relationship Between the Prophet and Her Son, Andrews University Seminary Doctoral Dissertation Series 19, Berrien Springs, Andrews University Press, 1993, p. 122- 129. Denis FORTIN, «Testemonies for the Church (PPPA, RHPA, 1885-1909)», in Denis FORTIN (éd.), Jerry MOON (éd.), The Ellen G. White Encyclopedia, Hagerstown, Review and Herald, 2013, p. 1212-1214.

36

que les changements amélioreront le livre. Si nos ennemis en profitent, qu’ils le

fassent.117»

Ces tensions que nous venons de décrire, auront pour conséquence de

révéler différents courants de pensées dans l’Eglise adventiste sur l’inspiration

biblique. Quelques-uns défendaient d'un côté une vision verbale de l’inspiration

comme nous l’avons déjà pointé. Ce groupe s’est immédiatement opposé à la

révision des ouvrages d’Ellen White. De l’autre côté, un groupe - George Butler

à sa tête- soutenait une inspiration par degrés dans la Bible et dans le ministère

d’Ellen White118.

C’est en opposition avec la notion de l’influence verbale de la Bible qu’il

va publier, en 1884, une série d’articles qui défendra une notion d’inspiration

«par degrés» :

« Dieu n’a pas toujours inspiré les hommes de la même façon, d’où les degrés, mais il a diversifié ses méthodes.[…] Si ces positions sont correctes, c’est évident qu’il y a des degrés d’inspiration variés ; c’est-à-dire, que le Seigneur a donné à quelques-uns des auteurs de la Bible beaucoup plus de lumière qu’à d’autres, et ce, de manière plus directe donc plus claire

119»

Ce que Butler défend dans ces articles c’est une hiérarchie, parmi les

textes bibliques, de portion de textes qui devait posséder plus d’autorité que

d’autres à cause de cette gradation de l’inspiration. Cette pensée devait,

forcément, s’appliquer au ministère d’Ellen White :

« Nous croyons aussi que Dieu nous donne de la lumière à notre époque au travers de l’esprit de prophétie parmi son peuple. Nous croyons que les mêmes caractéristiques lui sont attribuées comme pour ceux qui avaient des visions anciennes. (…) Nous trouvons aussi la même nécessité de faire très attention à ne pas négliger les lumières importantes ni d’arriver à des conclusions erronées

120.»

117

Ellen WHITE, Selected Messages, vol. 3, Hagerstown, Review and Herald, 1980, p. 96-98; tiré de la lettre 11, 1884. 118

En 1883, Uriah Smith était convaincu que les écrits d’Ellen White étaient un exemple de cette inspiration. Ils n’auraient pas tous le même degré d’inspiration ou d’autorité. A cause de l'affirmation de cet homme en lien avec les articles de George Butler qui apparaissent en 1884 et le fait que tous les deux étaient très proches, il semble probable qu’il y ait un lien entre ces deux événements d’autant plus que Smith et Butler seront les leaders de la faction de l’adventisme qui opposera Ellen White à la Conférence Générale de 1888. Pour en savoir plus, voir : Frank HASEL, «Inspiration, Degrees of», in The Ellen G. White Encyclopedia, p. 895-897. Emmet VANDE VERE, Rugged Heart. The Story of George I. Butler, Nashville, Southern Publishing Association, 1979, p. 62-67. 119

George BUTLER, « Inspiration », Advent Review and Sabbath Herald, 61 (1884/3), p. 41. 120

George BUTLER, «Inspiration.- NO. 10», Advent Review and Sabbath Herald, 61 (1884/23), p. 361-362.

37

Un petit article, dans la Review and Herald, remarque que les documents

de Butler sur l’inspiration sont une bénédiction pour la précision de ce point de

la foi adventiste121. La position défendue par Butler dans ses articles aura une

grande répercussion dans les années qui suivent la publication de ses

documents122.

La révision du The Great Controversy

Entre 1885 et 1887, Ellen White fera un voyage en Europe dans le but

d’aider l’effort d’évangélisation engagé depuis 1864. Pendant cette période, elle

aura l’opportunité de faire des conférences, de prodiguer des conseils et d’aider

l’organisation de l’Eglise adventiste en Europe123. Elle aura également le

privilège de travailler sur une nouvelle version du volume 4 de la série The

Spirit of Prophecy. Cette version retravaillée sortira en 1888 avec le nom The

Great Controversy, faisant partie d’une nouvelle série d’ouvrages appelés

Conflict of the Ages124.

Cette version comportera un ajout très important par rapport aux éditions

précédentes. Ellen White profitera de cette occasion pour rédiger une

introduction, écrite en mai 1888 tout de suite après sa rentrée d’Europe, dans

laquelle elle développera sa pensée sur l’inspiration biblique125. Ce point est

important par rapport à notre manuscrit 24 parce que, même s’il a été écrit par

Ellen White en 1885, il ne sera publié qu’en 1954 dans le premier volume des

Messages Choisis.

L’importance de ce texte face aux positions avancées dans le milieu

adventiste de cette époque ne doit pas être atténuée. Au contraire des autres

adventistes, Ellen White défend dans l’introduction du Great Controversy que :

«Par le Saint-Esprit, l’être infini a illuminé le cœur de ses serviteurs. Il leur a

donné des songes, des visions, des symboles et des images tout en leur

121

s.a., s.t., Advent Review and Sabbath Herald, 61 (1884/10), p. 160. 122

George KNIGHT, Angry Saints. Tensions and Possibilities in the Adventist Struggle Over Righteousness by Faith, Hagerstown, Review and Herald, 1989, p. 85-89. 123

Daniel HEINZ, «Europe», in The Ellen G. White Encyclopedia, p. 810-813. 124

Denis FORTIN, «Great Controversy Between Christ and Satan, The», in The Ellen G. White Encyclopedia, 2013, p. 847-850. 125

Herbert DOUGLASS, Messenger of the Lord, p. 446-449.

38

laissant la liberté d’exprimer la vérité dans leur propre langue126.» Comme nous

pouvons le remarquer, Ellen White défend une action de Dieu qui n’agit pas sur

les mots choisis par l’auteur. La Bible est comparable à Jésus, dans sa double

nature, « où la vérité s’exprime dans le langage des hommes et nous offre une

union étroite de la divinité avec l’humanité127». Dans ce processus, un auteur

biblique a été « spécialement frappé par l’aspect du sujet se rapportant à son

expérience ou à sa capacité de compréhension128». Nous venons de le voir

pour Ellen White comme pour la rédaction de la Bible, l’auteur biblique participe

activement à la réflexion et à la compréhension des sujets traités et non

uniquement dans le choix des mots. Même si Dieu a une capacité bien

supérieure aux auteurs bibliques pour exposer ses vérités, elles restent

confiées à des «vases de terre», unis par une unité intérieure.

D’un côté, Ellen White préserve le caractère pleinement divin et donc

autoritaire de toute la Bible, en opposition à la notion défendue par George

Butler. De l’autre, elle défend aussi le caractère pleinement humain de cette

même Bible, en valorisant les contributions individuelles des différents auteurs

humains; des hommes qui ont apporté leur participation personnelle à

l’ensemble de la Bible.

Conclusion

Après ce premier chapitre dédié à la contextualisation du manuscrit 24

de 1885 écrit par Ellen White, nous avons pu constater que la plus grande

partie de la communauté adventiste défendait une inspiration verbale de la

Bible avant 1883. Dans cette même année, avec la décision de corriger les

erreurs grammaticales des Testemonies, basée sur une notion de l’inspiration

qui agit sur les pensées, l’Eglise adventiste commence à discuter la nature de

l’inspiration divine. Cependant, les implications de ce débat par rapport à la

Bible et au ministère d’Ellen White, amèneront Georges Butler, président de la

Conférence Générale, à proposer une nouvelle notion «par degrés».

126

Ellen WHITE, La Tragédie des Siècles, 8e éd. (1

re éd. 1926), Dammarie les Lys, Éditions Vie

et Santé,1983, p. 10. 127

Ellen WHITE, La Tragédie des Siècles, p. 10. 128

Ibid., p. 11.

39

Depuis le début de son ministère, Ellen White reste en silence dans ses

publications par rapport à ce sujet, même durant cette période de tensions au

sein de l’Eglise adventiste. C’est seulement en 1888, avec l’introduction du The

Great Controversy, qu’elle publie le premier texte dans lequel elle développe sa

pensée sur l’inspiration biblique en se démarquant des notions du milieu

adventiste. En effet, c’est dans ce même contexte que le manuscrit 24 est écrit

par Ellen White, au moment de ce débat sur l’inspiration biblique, mais avant la

publication du The Great Controversy. Ce point doit davantage valoriser le

manuscrit 24, d’autant plus qu’avant sa rédaction, nous n’avons pas d'autres

écrits d’Ellen White qui traitent de ce sujet si profondément.

C. Introduction à l’ouvrage de Calvin Stowe

Calvin Stowe était un théologien, professeur et éducateur américain.

Hormis ces aspects professionnels, nous n’avons pas de point pertinent le

concernant et en lien avec notre problématique de l’inspiration biblique. Nous

n’avons pas non plus d’éléments à présenter pour compléter le contexte

historique de son ouvrage comme nous l’avons fait pour Ellen White.

Il est cependant nécessaire de poser le contexte littéraire de ses idées

par rapport à l’ensemble de son livre et, en particulier, du premier chapitre.

C’est cette présentation de l’ouvrage qui nous permettra d’analyser comment

ses pensées sur l’inspiration biblique s’articulent avec le reste de son œuvre.

Aperçu générale du livre

Une analyse de l’ouvrage de Calvin Stowe au niveau de sa structure

nous a permis de constater qu’il se divise en deux grandes parties. La première

est constituée par les quatre premiers chapitres dans lesquels il établit les

principes de base pour le reste de son ouvrage comme : la nature de la Bible,

les évidences qui prouvent la véracité de la Bible et les biographies d’anciens

témoins qu’il utilisera dans le reste de son ouvrage. Dans la deuxième partie,

du chapitre cinq au chapitre quatorze, il présente les différents livres du

Nouveau Testament et les évidences de leur véracité en opposition aux livres

apocryphes en démontrant pour quelles raisons ils ne méritaient pas de faire

partie du canon biblique. Dans cette structure, nous ne sommes concernés que

40

par le premier chapitre de son livre qui traite spécifiquement de la question de

la nature et de l’inspiration de la Bible.

Stowe affirme dans sa préface que le livre possède un double objectif :

d’un côté il prétend démontrer et vérifier l’authenticité des livres du Nouveau

Testament et, de l’autre, il prétend dévaloriser les prétentions des livres

apocryphes à intégrer le canon du Nouveau Testament.

La manière qu’il utilise pour atteindre ses objectifs se base sur la

vérification de la chaîne de témoins qui justifie l'autorité et l'origine des auteurs

apostoliques. Par contre, dans le cas des livres apocryphes, leur absence du

canon biblique se trouve dans la vérification d'au moins un des critères

suivants: ils n’ont pas une origine apostolique, il est prouvé qu’ils sont une

falsification ou qu’ils aient été écrits par un auteur qui n’avait pas une autorité

apostolique.

Même si ce n’est pas le seul ouvrage portant cet objectif, il se distingue

des autres du fait que son public est composé par des laïques et des pasteurs

d’Eglises intéressés par ce sujet. Pour cette raison, Stowe s’est efforcé de

rédiger l’ouvrage dans un langage simple, clair et adapté à la société de son

époque.

Résumé du premier chapitre

Le premier chapitre a pour titre: « The common popular objections to the

Bible at the present day. What the Bible is not, what it is, and how to use it ».

Son objectif est d’établir la nature de la Bible en redéfinissant les concepts

initiaux de ceux qui veulent lire et étudier la Bible et, dans le même temps,

répondre aux objections communes des critiques.

Pour atteindre son objectif, Stowe présente huit éléments parmi lesquels

quelques-uns se centrent sur l’inspiration des livres bibliques. En premier lieu, il

commence par expliquer que la valeur de la Bible est due au plan du salut

présenté dans ses pages. Le pouvoir de la Bible se présente quand elle n’est

41

pas utilisée comme une relique mais lorsqu'elle s'inscrit dans un processus

dynamique avec les valeurs qu’elle présente129.

En deuxième lieu, il émet l'idée que la Bible était écrite durant une

longue période de temps, par plusieurs personnes, avec différents styles de

rédaction. C’est pour cette raison qu’elle dénote d'une harmonie extérieure très

faible130. Néanmoins, la véritable unité biblique se trouve dans le domaine

spirituel. Une uniformité qui est le résultat d’une idée générale : la rencontre

entre Dieu et l’homme131. Cette «idée», qui est le plan du salut pour toute

l’humanité, traverse toute l’écriture et permet d’harmoniser les diverses

rédactions en transformant les différentes parties de la Bible en un ouvrage

unique, où l’ensemble est plus grand que la somme de ses composants132.

Ainsi, la Bible détient son autorité de l’authentification de l’ensemble et non pas

de chaque partie individuelle133.

En troisième lieu, notre auteur présente le problème inhérent aux

langages humains qui sont naturellement imparfaits et limités : « La Bible n’a

pas été donnée dans un langage céleste ou surnaturel. (…) Mais chaque

langage humain est, de par sa propre nature, un langage imparfait »134.Il

continue en précisant que cette défectuosité est démontrée dans la pluralité de

sens qu’un mot peut avoir. Ainsi, chaque personne donne à chaque parole sa

couleur particulière, fruit de son éducation, de son tempérament, de ses modes

et de ses pensées135. Même si, pour des raisons pratiques, le langage humain

est suffisamment fonctionnel pour un usage courant136, quelques fois il est

difficile de comprendre pleinement le message biblique : «(…) présuppositions,

préjugés et inclinations personnelles contribuent à confondre l’esprit humain

dans sa lecture de la Bible137».

Ces constats nous amènent au point suivant qui suggère que la Bible

n’est pas le produit de Dieu comme auteur ou éditeur : « La Bible n’est pas un

129

Calvin STOWE, Origin and history of the books of the Bible, p. 11. 130

Ibid., p 14. 131

Ibid., p. 13. 132

.Ibid., p. 14. 133

Ibid., p. 15. 134

Ibid., p. 15. 135

Ibid., p. 17. 136

Ibid., p. 17. 137

Ibid., p. 18.

42

exemple de la capacité de Dieu comme auteur en nous montrant son mode de

penser, ni son raisonnement, ni sa rhétorique, ni son style de narration

historique.138 » En effet, l’action du Saint-Esprit agit sur l’homme et non pas sur

ses paroles ou ses pensées. L’auteur biblique «non de sa propre initiative mais

sur l’impulsion divine a créé certaines idées qu’il a exprimé en utilisant certaines

paroles139». Il y a dans la Bible une coopération étroite entre le divin et l’humain

et c’est cette coopération qui nous permet de dire que la Bible est la parole de

Dieu140. La plupart des objections à la Bible, peuvent être expliquées par une

culture différente de la nôtre et par l’existence du mal. Et même si la Bible

présente des sentiments et des attitudes moins nobles de la part des hommes

« saints », elle ne les présente pas comme des modèles à suivre, bien au

contraire. La révélation est progressive à tous les niveaux de la vie humaine,

elle chemine vers la maturité141.

En revenant sur les concepts de base pour l’étude de la Bible, notre

auteur défend dans son cinquième point, que la Bible n’est pas un traité

systématique et structuré, mais qu'elle s’ajuste à tous les siècles et à tous les

publics. Cette adaptation est présente précisément parce qu’il manque une

planification structurée. Elle fait appel à ce qui est le plus naturel de notre

existence : nos émotions142.

Sixièmement, Stowe explique comment la Bible arrive à avoir toute

l’humanité comme public cible. Même si elle est le fruit d’une époque très

spécifique, la Bible réussit à dépasser ces limitations et à présenter les grands

principes qui sont communs à toute l’humanité en s’exprimant d’une façon

assez simple pour une compréhension universelle : « c’est remarquable comme

la Bible aborde des aspects locaux et temporaires tout comme elle saisit les

grandes principes de vie qui sont communs à la nature humaine143».

Le septième point énonce l'idée que la Bible ne possède pas toutes les

réponses à nos questions essentielles mais qu'elle fait néanmoins appel à notre

138

Calvin STOWE, Origin and history of the books of the Bible, p. 18. 139

Ibid., p. 19. 140

Ibid., p. 18. 141

Ibid., p. 21. 142

Ibid., p. 22. 143

Ibid., p. 24.

43

foi en présentant Dieu comme quelqu’un digne de confiance à cause de sa

bonté, de sa sagesse et de son pouvoir. Cette foi doit exister avec les doutes et

non parce qu’ils n’existent pas : «Nous pouvons toujours avoir la foi mais la

connaissance n’est quelques fois pas disponible 144».

Dans le dernier point présenté, Stowe déclare que le seul objectif de la

Bible est de montrer le plan du salut, « comment échapper au mal dans lequel

nous sommes plongés et être plutôt réunis dans la paix et la joie avec Dieu145».

La Bible n’a pas été et n’est pas conçue comme un traité scientifique. Même si

elle fait référence à des phénomènes scientifiques, une confrontation entre la

Bible et la science n’est pas possible parce que la Bible n’a pas la prétention

d’être une référence scientifique « Ne cherchez pas dans la Bible ce qu’il n’a

pas mis »146. Notre compréhension de la Bible n’est pas uniforme, en raison de

sa complexité147. Nous pouvons approfondir cette connaissance avec l’étude, la

révérence et la prière148.

Cette présentation des idées de Stowe sur l’inspiration biblique dans

l’ensemble de son œuvre nous montre qu’elle n’est pas systématique de ses

pensées sur le sujet. Son objectif est de démontrer l’authenticité de la Bible au

plus grand nombre possible et, c’est dans ce sens que notre auteur développe

sa notion sur l’inspiration biblique, ce, afin d’argumenter contre quelques

objections faites à la Bible. De la même façon, nous pouvons conclure que

nous ne sommes concernés que par le premier chapitre de son livre. C’est ici

qu’il développe ces notions sur l’inspiration biblique et c’est ce chapitre que

nous devons analyser et comparer au manuscrit 24.

Il est intéressant de remarquer que Calvin Stowe et Ellen White se

rapprochent dans l’utilisation d’un langage simple et accessible, ainsi que dans

l’absence d’une présentation systématique de leur pensée par rapport à

l’inspiration biblique, bien que les deux ouvrages possèdent des objectifs tout à

fait différents. En effet le texte d'Ellen White se distingue de celui de Stowe

144

Calvin STOWE, Origin and history of the books of the Bible, p. 25. 145

Ibid., p. 29. 146

Ibid., p. 32. 147

Ibid., p. 35. 148

Ibid., p. 37.

44

dans la mesure où son texte faisait partie de son journal personnel. L’ouvrage

de Calvin Stowe, quant à lui, était un livre publié.

D. Conclusion

Comme les résultats de notre recherche nous l’ont montré, avant la

rédaction du manuscrit 24 en 1885, il y avait une absence d'ouvrages dans

lesquels Ellen White développait sa pensée sur l’inspiration biblique. Nous

avons trouvé un texte intéressant mais qui reste très insuffisant pour arriver à

une réponse satisfaisante sur sa compréhension de la Bible. Par conséquent, le

manuscrit 24 doit être mis en évidence, comme premier texte écrit par Ellen

White sur le sujet, même s’il n'a été publié qu’après son décès.

La période dans laquelle elle rédigeait le manuscrit 24, l’Eglise adventiste

discutait sur la nature de l’inspiration et sur ses implications. En 1888, notre

auteur publiait son premier texte sur l’inspiration biblique dans lequel elle

prenait une position qui contrastait avec les notions présentes dans le milieu

adventiste de l’époque. Par rapport aux analyses que nous avons faites, nous

pouvons nous poser la question de la relation entre le manuscrit et l’introduction

de The Great Controversy en 1888.

Dans la troisième partie qui nous attend, non seulement nous devrons

comparer notre manuscrit 24 avec l’ouvrage de Calvin Stowe - ce qui nous

permettra de voir si Calvin Stowe a contribué ou non à un possible

développement de sa pensée - mais nous devrons également observer

comment ce manuscrit se positionne face au texte d’Ellen White publié en

1888. Il nous sera nécessaire d'analyser comment il se positionne dans le

débat adventiste sur l’inspiration biblique de cette période.

45

III – Comparaison et analyse entre les œuvres de Calvin Stowe et

Ellen White

46

A. Introduction

Après une première partie consacrée au cadre théologique dans lequel

nos auteurs étaient immergés, et une deuxième partie dédiée à quelques

éléments historiques et littéraires de leurs ouvrages, nous pouvons à présent

proposer une analyse sur leur notion de l’inspiration biblique. Cette troisième

partie a pour objectif primordial de préciser la pensée d’Ellen White dans le

manuscrit 24 afin de déterminer s’il existe une dépendance théologique en

rapport avec la pensée de Calvin Stowe. Si ce lien existe, nous aurons comme

but supplémentaire de l’évaluer en mettant en évidence les points de

convergence et de divergence entre eux.

Pour mener à bien la comparaison entre ces deux ouvrages, notre

troisième partie se divisera en deux chapitres. Le premier présentera les textes

et les comparera dans un cadre. Il proposera aussi une étude des similitudes et

des différences entre les deux écrits sur un plan littéraire, c’est-à-dire par

rapport aux mots et structures utilisés. Le deuxième chapitre concernera enfin

l’analyse des concepts théologiques présents dans les textes des auteurs, plus

spécifiquement en ce qui concerne l’inspiration biblique.

Avant d’aller plus loin, il est à noter que les deux rédactions étudiées ne

présentent pas la pensée des auteurs d’une façon définitive. Le manuscrit 24

faisait partie du journal personnel d’Ellen White ; il s’agissait donc un texte dans

son état brut. Ce détail est important parce que nous ne pouvons assurer qu’il

détenait la version finale de sa pensée sur le sujet de notre recherche. De la

même façon, nous devons prêter attention à Stowe : ce dernier ne parle de

l’inspiration biblique que dans l’introduction de son ouvrage. Par conséquent,

son objectif n’est pas de donner une présentation exhaustive du sujet ni d’en

expliquer tous les détails. Pour ces raisons, notre étude ne prétend pas être

une représentation définitive de leurs idées au sujet de l’inspiration biblique.

En ce qui concerne la relation entre les deux ouvrages, un effort a été

produit pour déterminer de quelle manière Ellen White a pu avoir accès à

l’ouvrage de Stowe. Le chercheur David Neff présente deux hypothèses pour

l’expliquer149 : soit Ellen White avait acquis cet ouvrage auparavant, ce qui reste

149

David NEFF, Ellen White’s Theological and Literary Indebtness to Calvin Stowe, p. 2.

47

plausible puisque ce livre faisait partie intégrante de sa bibliothèque personnelle

au moment de son décès ; soit elle a eu l’opportunité de lire Stowe grâce à la

bibliothèque de John Andrews en Europe150. À ces deux possibilités, nous

souhaiterions en présenter une troisième : parmi la correspondance qu’Ellen

White a entretenue pendant son séjour en Europe, elle mentionne qu’elle a pu

avoir accès à la bibliothèque personnelle d’Augustin Bourdeau151, un

missionnaire et pasteur adventiste. Il est intéressant de remarquer que cet

évangéliste était responsable de la mission en Italie, spécifiquement à Torre

Pellice, la même ville où Ellen White a écrit le manuscrit 24. Malgré de multiples

efforts, il ne nous a pas été possible de vérifier l’existence du livre de Stowe au

sein de cette bibliothèque personnelle ni d’avoir davantage d’éléments qui

permettraient de soutenir l’une des hypothèses de Neff qui expliquerait la façon

dont Ellen White aurait eu accès à l’ouvrage de Stowe.

Dans l’analyse que nous allons développer dans cette partie, deux outils

nous seront fort utiles : le premier est un cadre de comparaison. Ce dernier

présente les textes d’Ellen White et de Calvin Stowe et utilise différentes

couleurs dans le but de mettre visuellement en évidence les similitudes et les

différences entre eux, par rapport aux expressions et aux mots utilisés. Cette

approche nous permettra de remarquer plus aisément les éléments partagés

entre les deux ouvrages et d’analyser ces observations au premier sous-

chapitre. Deuxièmement, et après avoir noté l’emploi de quelques mots

importants différents de ceux de Stowe, nous allons utiliser un dictionnaire de

l’époque pour bien noter les différences et les nuances de choix d’Ellen White

en contraste avec les mots utilisés par Stowe.

B. Observation des textes

Objections to the Bible

«Il y a une grande variété d'esprits. Selon le niveau d'instruction et la formation intellectuelle, les mêmes mots font une impression différente. Il n'est pas facile à quelqu'un de communiquer à une personne de tempérament, d'éducation et d'habitudes mentales différents les pensées qui lui semblent claires et distinctes. Néanmoins cela peut suffire à une personne sincère et droite: les choses peuvent être exprimées avec assez de simplicité et de clarté pour tout usage pratique. Mais si l'on a affaire à quelqu'un de malhonnête, décidé à ne pas voir et comprendre la vérité, les paroles

150

John Andrews, pasteur adventiste, a été le premier missionnaire officiel de l’Eglise adventiste pour l’Europe. 151

Lettre 40, 1886.

48

dites seront détournées de leur sens naturel à l'avantage de l'individu. Celui-ci donnera une fausse interprétation aux paroles, dénaturera leur sens véritable, fera jouer sa propre imagination, puis se retranchera dans l'incrédulité, convaincu qu'on a cherché à le tromper.

Mes écrits ont subi un traitement analogue de la part de ceux qui désirent leur donner une fausse interprétation. Ils changent la vérité de Dieu en mensonge. Et tout comme ceux-ci traitent les écrits contenus dans mes articles et mes livres, les sceptiques et les incrédules traitent la Bible de la même manière. Ils la lisent bien décidés à la pervertir, à en faire une fausse application, à en détourner le sens. Ils affirment que l'on peut prouver tout ce que l'on veut par la Bible, que chaque secte se fait fort de prouver ses doctrines en invoquant son autorité, et que les doctrines les plus diverses peuvent être démontrées par la Bible.

La Bible a été écrite par des écrivains obligés de s'exprimer en un langage humain. C'étaient des hommes. Ils étaient inspirés par le Saint-Esprit. En raison de l'imperfection de l'intelligence humaine, ou de la perversité de l'esprit humain, toujours habile à s'évader loin de la vérité, il en est beaucoup qui lisent et comprennent la Bible conformément à leurs désirs. Ce n'est pas dans la Bible que se trouve la difficulté. Des politiciens discutent certaines lois constitutionnelles et en tirent des conclusions opposées.

Au lieu d'avoir été données aux hommes en une suite ininterrompue de déclarations, les Ecritures se sont enrichies pièce par pièce au cours de générations successives, chaque fois que la Providence divine jugeait utile de parler aux hommes en divers temps et en divers lieux. Les auteurs ont écrit selon qu'ils étaient mus par le Saint-Esprit. Il y a “d'abord le bouton, puis la fleur, ensuite le fruit”; “d'abord l'herbe, puis l'épi, puis le grain tout formé dans l'épi”. C'est exactement ce qui se passe en nous grâce à la Bible.

Les Ecritures ne manifestent pas toujours un ordre parfait ni une unité évidente. Les miracles du Christ ne sont pas relatés par ordre chronologique; ils sont présentés en rapport avec les circonstances qui ont commandé ce déploiement de puissance divine. Les vérités bibliques ressemblent à des perles cachées. Il s'agit de les chercher, de creuser le sol avec patience. Ceux qui s'arrêtent à la surface des Ecritures, n'en tirant qu'une connaissance superficielle qu'ils s'imaginent profonde, parlent des contradictions de la Bible et mettent en question son autorité. En revanche les cœurs qui vivent en harmonie avec la vérité et le devoir sonderont les Ecritures et seront prêts à recevoir des impressions divines. Une âme éclairée aperçoit une unité spirituelle, un long fil d'or courant à travers le tout; mais pour suivre ce précieux fil d'or il faut beaucoup de patience, de réflexion et de prière. D'âpres discussions au sujet de la Bible ont provoqué des recherches qui ont fait découvrir de précieux joyaux de vérité. Bien des larmes ont coulé, bien des prières ont été offertes, demandant au Seigneur de faire comprendre sa Parole.

La Bible ne nous a pas été donnée en un langage surhumain. Pour atteindre l'homme, Jésus a revêtu l'humanité. La Bible a dû être donnée en un langage humain. Or tout ce qui est humain est imparfait. Un mot peut avoir plusieurs significations; on ne trouve pas toujours un mot distinct pour exprimer une idée. La Bible se propose un but essentiellement pratique.

Les esprits portent des empreintes différentes. Tous ne comprennent pas de la même manière une expression ou une déclaration. Il en est qui comprennent les déclarations de l'Ecriture d'après leur mentalité et leurs désirs. Des idées arrêtées à l'avance, des préjugés, des passions contribuent puissamment à obscurcir l'entendement et à jeter la confusion dans l'esprit, même quand il s'agit de la lecture des Ecrits sacrés.

Les disciples qui se rendaient à Emmaüs avaient besoin d'être débarrassés de leurs fausses interprétations des Ecritures. Jésus chemina avec eux sans se faire connaître et leur parla en qualité d'homme. Commençant par Moïse et les prophètes, il

49

leur enseigna tout ce qui le concernait, montrant que sa vie, sa mission, ses souffrances et sa mort étaient conformes à ce que la Parole de Dieu avait prévu. Il leur ouvrit l'entendement et leur fit comprendre les Ecritures. Il lui fallut peu de temps pour remettre les choses au point et leur montrer l'unité et la véracité divine des Ecritures. Aujourd'hui les hommes ont bien besoin que leur entendement soit ouvert.

La Bible a été écrite par des hommes inspirés, mais ils n'ont pas employé un langage divin. Ils ont parlé le langage humain. Ce n'est pas Dieu qui a été l'écrivain. On dira souvent que telle expression ne sied pas à Dieu. Mais Dieu ne s'est pas exposé à notre jugement dans la Bible par des mots, de la logique ou de la rhétorique. Les écrivains de la Bible ont été les hommes de plume, non la plume même de Dieu.

Ce ne sont pas les mots de la Bible qui sont inspirés; ce sont les hommes. L'inspiration agit non pas sur les mots ou les expressions, mais sur l'auteur lui-même, à qui le Saint-Esprit communique des pensées. Quant aux mots, ils portent l'empreinte de l'individualité. L'Esprit divin se répand. Il s'unit à l'esprit de l'homme, si bien que les déclarations de l'homme sont la Parole de Dieu.

152»

The common popular objection to the Bible at the present day – What the

Bible is not, what it is, and how to use it.

«La Bible ne est pas une chaîne ininterrompue de livres, chapitres et versets, qui représente une série continue de paroles divines du début à la fin.

Ne cherchez pas une telle chose lors de votre lecture de la Bible, mais plutôt le contraire. Les écritures ont été données aux hommes peu à peu, au fil du temps, à la mesure que Dieu voyait les bonnes occasions - à plusieurs reprises et de plusieurs manières – c’est ce que dit la Bible d’elle-même; et pas tout à la fois, comme si vous devez avoir le bourgeon, les fleurs et les fruits, tous au même moment. L'analogie entre la nature et l’écriture, comme dans tout le reste, tient parfaitement. D'abord l'herbe, puis l'épi, et c’est après que le grain devient tout formé ; c’est ce que la Bible dit d’elle-même, et c’est bien cela que nous trouvons. Il y a peu d'unité extérieur dans la Bible, elle ne prétend pas à autre chose; vous ne devez nullement être secoués par les clameurs de ceux qui feraient de cette évidence une objection à l'autorité des Écritures. Ainsi, pourrait-on contester les miracles du Christ, et ajouter qu’ils ne sont pas données dans un ordre spécifique, en commençant avec le miracle le plus simple jusqu’au plus grand, ni avec un certain nombre de chaque type de miracle.

L’unité des écritures n’est pas externe, mais une unité interne, une unité spirituelle, l'unité d’une idée grandiose qui traverse l’ensemble, l’idée de réunir l’âme humaine avec Dieu, de qui elle a été si tristement séparé par le péché; à travers un processus continu de conflit et affliction.

153 »

«La Bible ne nous est pas donnée dans un langage céleste ou surhumain. Si cela avait été, elle n’aurait été d'aucune utilité pour nous, parce que chaque livre destiné pour les hommes doit lui être donnée dans le langage des hommes. Mais chaque langage humaine est, par nécessité et de sa propre nature, un langage imparfait. Aucun langage humain n’a un mot unique pour chaque idée distincte. Dans toute langue connue, le même mot est utilisé pour indiquer des choses différentes, et des mots différents sont utilisés pour indiquer la même chose. Dans tous les langages humains, chaque mot a plus d'un sens différent et chaque chose a généralement plus d'un nom.

154»

«Plus encore, les esprits humains sont différents dans les impressions qu'ils reçoivent du même mot; c’est sûr qu'un homme rarement donne à un autre, avec un

152

Ellen WHITE, Messages Choisies, vol 1, Dammarie les Lys, Vie et Santé, 2002, p.21-24 ; tiré du manuscrit 24, 1886. 153

Calvin Stowe, Origin and History, p.13 154

Calvin Stowe, Origin and History, p. 15

50

tempérament et éducation différentes, au travers du langage, exactement la même idée, avec la même forme et la même couleur, qui se trouve dans son propre esprit; Toutefois, si les hommes sont honnêtes et sensés, ils peuvent se rapprocher du sens voulu de l'autre, pour toutes questions pratiques.

Après, il y a l’objection que la Bible peut être utilisée pour tout dire et ne rien dire en même temps. C’est ce sur quoi toutes les sectes s’appuient : les doctrines les plus diverses peuvent être déduites. Ce malheur, elle le partage avec tout ce qui doit être exprimé dans un langage humain. Cette restriction est due à l’imperfection - défaut nécessaire du langage humain - et à la maladie et la perverse ingénuité de l’esprit humain. Ce n’est pas quelque chose de particulier à la Bible. Entendez deux avocats opposés qui soutiennent un point de la loi dans son application à un cas particulier. Écoutez deux politiciens contraires qui arguent en référence à la vraie intention d'une clause particulière dans la Constitution des Etats-Unis. N’y a-t-il pas là aussi une large place donnée à la diversité d'opinion et à l’opposition de raisonnement, comme dans l’interprétation d'un texte de l'Écriture, ou l'exactitude de n’importe quel point théologique? Pourtant, ces lois et les constitutions sont rédigées dans notre propre langue, en notre temps, tandis que la Bible nous est venue d'un autre siècle et en langues étrangères. Il suffit de penser que la Bible peut être comprise, et être si honnêtement étudiée, ainsi que toute constitution ou tout ensemble de lois peut être comprises. Ceci est suffisant à nos propos pratiques, et c’est pour des raisons pratiques que la Bible a été donnée.

Toutefois, préjugés et passions influencent abondamment et confondent les esprits des hommes quand ils lisent la Bible. Il ouvrit leurs compréhensions qu'ils pourraient comprendre les Écritures. Les hommes maintenant ont besoin d'avoir leur esprit ouvert

et rectifiés pour qu’ils puissent comprendre les Écritures.

IV. La Bible n’est pas un exemple de la compétence de Dieu comme écrivain, en nous montrant son mode de pensée, sa logique, sa rhétorique ou son style de narration historique. Combien de fois voyons-nous des hommes qui cherchant des passages isolés de l'Écriture, et en disant triomphalement que ces expressions sont indignes de Dieu, et qui ne pourraient pas être d’origine divine. Ces expressions sont maladroites, le mode de pensée est défectueux, illogique, de mauvais goût, le raisonnement n’est pas convaincant, le récit n’est pas fermement établi. Dieu ne se met pas à disposition pour un tel jugement dans la Bible, de même qu’avec la création, Il n’a pas promis que la Bible était toujours imprimée sur le meilleur des papier, avec le meilleur style et une parfaite absence d'erreurs typographiques, et qu'après son impression, les feuilles ne se seraient jamais déchirées, ni souillées, ni aucune de ses feuilles allez se perdre, ou que les apôtres et les prédicateurs doivent fréquemment être beau, avoir belle allure et possédant de beaux visages, sans aucune faute d’élocution. On doit toujours se rappeler que les auteurs de la Bible étaient « les écrivains de Dieu et non les stylos de Dieu ».

Ce ne sont pas les mots de la Bible qui ont été inspirés, ce ne sont pas les pensées de la Bible qui ont été inspirées; c’était les hommes qui étaient inspirés. L’inspiration n’agissait pas dans les mots de l’homme ni dans sa pensée, mais dans l’homme lui-même; De sorte qu’il, par sa propre spontanéité, sous l’impulsion du Saint-Esprit, conçoive certaines pensées et les exprime par certains mots, les paroles et les pensées reçoivent l’empreinte particulière de l’esprit humain qui les a conçues et exprimées, et lui appartiennent entièrement comme si l’inspiration n’avait pas eu de place La naissance et la nature du Christ offrent une illustration exacte. L'Enfant Jésus dans le sein de la Vierge, bien que né de Dieu sans un père humain, (comme il a été dit, «Le Saint-Esprit viendra sur toi et la puissance du Très-Haut te couvrira»), cet enfant vivait grâce à la vie de sa mère, il a grandi grâce aussi à sa mère. Participait de la nature de sa mère et était pleinement son enfant comme il aurait pu l’être si Joseph avait été son père, l'humain et le divin dans la jonction la plus intime et inséparable. C’est ce fait même de l'union combinée et inséparable de l'humain et le divin, qui constitue l'utilitaire, ce qui le rend adapté aux besoins des hommes, l'incarnation du Christ et le don des saintes écritures. L’inspiration est généralement une purification, une élévation et une intensification subjective de l’intellect humain, plutôt qu’une

51

suggestion et une communication objectives, bien que la suggestion et la communication ne soient pas exclues.

L’esprit divin est si diffus à travers l’esprit humain, et l’esprit humain si interpénétré par le divin, que pour l’instant les déclarations humaines sont la parole de Dieu.»

155

Cadre de comparaison entre les deux textes

Après ce regard sur les deux textes à étudier, nous allons maintenant

présenter un cadre qui nous permettra de comparer plus aisément les

documents d’Ellen White et de Calvin Stowe. La première colonne présente le

manuscrit 24 d’Ellen White tandis que la seconde expose les passages

correspondants que nous pouvons trouver dans le premier chapitre du livre de

Calvin Stowe. Ces deux colonnes sont organisées de façon à prévoir des

espaces supplémentaires afin de mettre en évidence les parties

correspondantes des deux textes côte à côte. Nous avons aussi utilisé des

différentes couleurs pour noter les divers degrés de proximité entre les textes,

dans l’usage des mots et des expressions, mais aussi des idées et des

concepts présentés :

Rouge - utilisation des mêmes mots importants dans la compréhension de la

pensée, ou utilisation verbatim des expressions ou des phrases.

Bleu – paraphrase stricte, où Ellen White change l’ordre des mots dans la

phrase, utilisation des synonymes ou des pluriels.

Jaune - paraphrase flexible où Ellen White transmet la même idée mais en

utilisant d’autres mots

Vert - simplification du matériel de Stowe

Gris – développement des idées de Stowe

Objections to the Bible Origin and History of the Books of the Bible

Human minds vary. The minds of different education and thought receive different impressions of the same words, and it is difficult for one mind to give to one of a «different temperament, education, and habits of thought by language exactly the same idea» as that which is clear and distinct in his own mind. Yet to honest

Moreover, human minds are unlike in the impressions which they receive from the same word; and it is certain that one man seldom gives to another, of «different temperament, education, and habits of thought, by language, exactly the same idea», with the same shape and color, as that which lies in his own mind; yet, if men are honest

155

Calvin Stowe, Origin and History, p. 17-19.

52

men, right-minded men, he can be so simple and plain as to convey his meaning for all practical purposes. If the man he communicates with is not honest and will not want to see and understand the truth, he will turn his words and language in everything to suit his own purposes. He will misconstrue his words, play upon his imagination, wrest them from their true meaning, and then entrench himself in unbelief, claiming that the sentiments are all wrong.

and right-minded they can come near enough to each other's meaning for all purposes of practical utility.

This is the way my writings are treated by those who wish to misunderstand and pervert them. They turn the truth of God into a lie. In the very same way that they treat the writings in my published articles and in my books, so do skeptics and infidels treat the Bible. They read it according to their desire to pervert, to misapply, to willfully wrest the utterances from their true meaning. They declare that the Bible can prove anything and everything, that every sect proves their doctrines right, and that the most diverse doctrines are proved from the Bible.

Here comes the in the objection that the Bible can be made to mean everything and anything, all sects build upon it, the most diverse doctrines are derived from it.

The writers of the Bible had to express their ideas in human language. It was written by human men. These men were inspired of the Holy Spirit. Because of the imperfections of human understanding of language, or the perversity of the human mind, ingenious in evading truth, many read and understand the Bible to please themselves. It is not that the difficulty is in the Bible. Opposing politicians argue points of law in the statute book, and take opposite views in their application and in these laws.

This infelicity it shares with everything else that has to be expressed in human language. This is owing to the imperfection, the necessary imperfection of human language, and to the infirmity and the perverse ingenuity also of the human mind. It is not anything peculiar to the Bible.

Hear two opposing lawyers argue a point of statute law in its application to a particular case. Hear two opposing politicians make their diverse arguments in reference to the true intent and force a particular clause in the United States Constitution.

The Scriptures were given to men, not in a continuous chain of unbroken utterances, but piece by piece through

The Bible is not one unbroken chain of books, chapters, and verse, representing one unbroken series of

53

successive generations,

as God in His providence saw a fitting opportunity to impress man «at sundry times and divers» places. Men wrote as they were moved upon by the Holy Ghost.

There is “first the bud, then the blossom, and next the fruit,” “first the blade, then the ear, after that the full corn in the ear.” This is exactly what the Bible utterances are to us.

divine utterances from beginning to end. Look for no such thing as this when reading the Bible, but rather the contrary. The scriptures were given to men piecemeal, throughout many ages, as God saw the right opportunities – «at sundry times and in divers» manners-

this is what the Bible says of itself; and not all at once, as if you must have bud, blossom and fruit, all in the same hour. The analogy here between nature and the word, as in everything else, holds perfectly. «First the blade, then the ear, and after that the full corn in the ear»; this is what the Bible says of itself, and is just what we find it to be.

There is not always perfect order or apparent unity in the Scriptures.

The miracles of Christ are not given in exact order, but are given just as the circumstances occurred, which called for this divine revealing of the power of Christ. The truths of the Bible are as pearls hidden. They must be searched, dug out by painstaking effort. Those who take only a surface view of the Scriptures will, with their superficial knowledge, which they think is very deep, talk of the contradictions of the Bible, and question the authority of the Scriptures. But those whose hearts are in harmony with truth and duty will search the Scriptures with a heart prepared to receive divine impressions. The illuminated soul sees a spiritual unity, one grand golden thread running through the whole, but it requires patience, thought, and prayer to trace out the precious golden thread. Sharp contentions over the Bible have led to investigation and revealed the precious jewels of truth. Many tears have been shed, many

There is but little of external unity in the Bible, it makes no pretensions to any such thing; you need not be at all shaken by the clamors of those who would make this obvious fact an objection to the authority of the scriptures. As well might it be objected to the miracles of Christ that they are not given in philosophical order, beginning with the less and going on to the greater, with just so many and only so many of each kind.

The unity of Scripture is not an external,

it is an internal, a spiritual unity, the unity of one grand idea running through the whole, the idea of reuniting the human soul to God, from whom it has been so sadly broken off by sin; and that too through a long continued process of sharp conflict and agonizing struggle.

54

prayers offered, that the Lord would open the understanding to His Word.

«The Bible is not given to us in» grand superhuman language. Jesus, in order to reach man where he is, took humanity. The Bible must be given «in the language of men».

Everything that is human is imperfect. Different meanings are expressed by the same word; there is not one word for each distinct idea. The Bible was given for practical purposes.

«The Bible is not given to us in» any celestial or superhuman language. If it had been it would have been of no use to us, for every book intended for men must be given to them «in the language of men». But every human language is of necessity, and from the very nature of the case, an imperfect language. No human language has exactly one word and only one for each distinct idea. In every known language the same word is used to indicate different things, and different words are used to indicate the same thing. In every human language each word has more than one meaning, and each thing has generally more than one name.

This much is sufficient for all practical purposes, and it is for practical purposes only that the Bible was given.

The stamps of minds are different. All do not understand expressions and statements alike. Some understand the statements of the Scriptures to suit their own particular minds and cases. Prepossessions, prejudices, and passions have a strong influence to darken the understanding and confuse the mind even in reading the words of Holy Writ.

Yet prepossessions, prejudices and passions come in so plentifully to darken and confuse men's minds, when they are reading the Bible.

The disciples traveling to Emmaus needed to be disentangled in their interpretation of the Scriptures. Jesus walked with them disguised, and as a man He talked with them. Beginning at Moses and the prophets He taught them in all things concerning Himself, that His life, His mission, His sufferings, His death were just as the Word of God had foretold. He opened their understanding that they might understand the Scriptures. How

He opened their understandings that they might understand the Scriptures.

55

quickly He straightened out the tangled ends and showed the unity and divine verity of the Scriptures. How much men in these times need their understanding opened.

Men in these times need to have their understandings both opened and straightened out, that they may understand the Scriptures.

The Bible is written by inspired men, but it is not God’s mode of thought and expression. It is that of humanity. God, as a writer, is not represented. Men will often say such an expression is not like God. But God has not put Himself in words, in logic, in rhetoric, on trial in the Bible.

«The writers of the Bible were God’s penmen», not His pen. Look at the different writers.

The Bible is not a specimen of God's skill as a writer, showing us God's mode of thought, giving us God's logic, and God's rhetoric, and God's style of historic narration. How often do we see men seeking out isolated passages of Scripture, and triumphantly saying that such expressions are unworthy of God, and could not have proceeded from Him. They are unskillful, the mode of thought is faulty, they are illogical, in bad taste, the reasoning is not conclusive, the narrative is liable to exception. God has not put himself on trial before us in that way in the Bible, any more than He has in the creation – any more than He has promised that the Bible shall always be printed for us on the best paper, with the best of type, and perfect freedom from typographical errors, and that after it is printed, it shall never be torn, nor soiled, nor any leaf lost: or that apostles and preachers shall be regularly handsome, men of fine forms and beautiful face, and faultless elocution. It is always to be remembered that «the writers of the Bible were “God's penmen», and not God's pens.”

«It is not the words of the Bible that are inspired»,

but the men «that were inspired. Inspiration acts not on the man’s words» or his expressions but on the man himself, who, under the influence of the Holy Ghost, is imbued with thoughts.

«It is not the words of the Bible that were inspired», it is not the thoughts of the bible that were inspired; it is the men who wrote the Bible «that were inspired. Inspiration acts not on the man's words», not on the man's thoughts, but on the man himself; so that he, by his own spontaneity, under the impulse of the Holy Ghost, conceives certain thoughts and gives utterance to them in certain words,

56

But the words receive the impress of the individual mind.

The divine mind is diffused. The divine mind and will is combined with the human mind and will; «thus the utterances of the man are the word of God.»

both the words and the thoughts receiving the peculiar impress of the mind which conceived and uttered them, and being in fact just as really his own, as they could have been if there had been no inspiration at all in the case. The birth and nature of Christ afford an exact illustration. The Holy Infant in the womb of the Virgin, though begotten of God directly without any human father, ( as it was said, the Holy Ghost shall come upon thee and the power of the highest shall overshadow thee),- this infant lived by his mother's life, and grew by the mother's growth, and partook of the mother's nature, and was just as much her child as he could have been if Joseph had been his father, the human and the divine in the most intimate and inseparable conjunction. It is this very fact of the commingled and inseparable union of the human and divine, which constitutes the utility, which makes out the adaptedness to the wants of men, both of the incarnation of Christ and of gift of the word. Inspiration generally is a purifying, and an elevation, and an intensification of the human intellect subjectively, rather than an objective suggestion and communication; though suggestion and communication are not excluded.

The Divine mind is, as it were, so diffused through the human, and the human mind is so interpenetrated with the Divine, that for the time being «the utterances of the man are the word of God.»

Les parallèles textuels

La lecture de ces deux textes nous a permis de constater qu’Ellen White

inverse, en deux cas, l’ordre de la structure de Stowe. Ses trois premiers

paragraphes sont en rapport avec la page 17 du livre de Stowe. Par contre, les

57

paragraphes 4 et 5 correspondent à la page 13, et le paragraphe 6 est proche

de la page 15. Le texte restant d’Ellen White suit de près l’ordre établi par

Stowe en reprenant les pages 18 et 19. Comme nous pouvons le constater,

cette nuance n’a pas une incidence particulière sur les idées présentées,

d’autant plus que dans l’ensemble, la proximité structurale des deux textes est

très claire156.

De la même façon, en observant ce cadre, nous notons une proximité

évidente entre ces deux documents sur les mots et les expressions utilisés. Le

cadre nous montre à quel point il y a très peu de phrases sans rapport direct

entre les deux auteurs : les parties non colorés dans notre cadre. Pourtant,

même ces éléments n’altèrent pas le sens du texte d’Ellen White de façon

significative par rapport à Calvin Stowe. Avant de nous plonger sur l’analyse de

ce cadre, il est important de noter la recherche menée par David Neff sur ce

sujet157. Parmi ses conclusions, il remarque que 68% du matériel littéraire du

manuscrit 24 se trouve dans l’ouvrage de Stowe et que 58% du manuscrit 24

est : «dominé par les mots et les expressions de Stowe.»158.

Sur les parties colorées en jaune dans le cadre, c’est-à-dire les

paraphrases flexibles, notons que même si quelques fois Ellen White utilise un

lexique différent, les idées transmises sont tout à fait proches de celles de

Stowe. Néanmoins, il nous paraît nécessaire d’observer plus en profondeur une

phrase en particulier dans laquelle elle utilise des mots différents de ceux de

Calvin Stowe et où David Neff voit un point de divergence très important entre

eux.

Changements importants

Le fait qu’Ellen White ait introduit des altérations par rapport à Calvin

Stowe dans les choix de quelques mots importants pour définir sa pensée,

mérite d’être étudié. Cela nous permettra d’établir si notre auteur diverge ou

pas, comme David Neff l’affirme, de la pensée de Stowe. Neff se base sur ces

156

David Neff défend la même idée dans son travail, à savoir qu’Ellen White utilise la structure de Stowe pour la rédaction du manuscrit 24. David NEFF, Ellen White’s Theological and Literary Indebtness to Calvin Stowe, s.l.,s.éd.,1979, p. 11. 157

David Neff présente une analyse très intéressante. Pour chaque phrase du manuscrit 24, il dénombre des mots qui sont dépendants de Stowe. Pour en savoir plus, voir : Ibid., p. 12. 158

Ibid., p. 11.

58

divergences pour appuyer l’idée que, dans la pensée d’Ellen White, l’homme

«ne contribue pas pour la révélation» et la différence essentielle entre sa

pensée et celle de Calvin Stowe est que ce dernier défend une position active

dans le processus de l’inspiration, tandis qu’Ellen White défend une position

passive : «L’homme ne conçoit pas les pensées révélées en lui-même, mais il

les reçoit de l’extérieur. De la même façon, il ajoute que pour Ellen White les

pensées inspirées ne sont pas «modifiées par l’esprit du prophète. Seuls les

mots, les manières de s’exprimer sont choisies et crées par le prophète159.» Ce

travail nous permettra aussi de mieux analyser leur pensée dans le chapitre

suivant.

Dans le manuscrit 24 nous pouvons lire : « L’inspiration n’agit pas sur les

mots de l’homme ni sur ses expressions, mais sur l’homme lui-même qui, sous

l’influence (influence) du Saint-Esprit, est imprégné (imbued) par des pensées.

Mais les paroles reçoivent les caractéristiques de l’esprit individuel» que nous

pouvons comparer avec le texte de Stowe : « L’inspiration n’agit pas sur les

mots de l’homme ni sur ses pensées, mais sur l’homme lui-même, de façon

que, par sa propre initiative, sous l’impulsion (impulse) du Saint-Esprit, il

conçoive (conceives) certains pensées et les prononce en utilisant certaines

paroles. Toutes deux - les paroles et les pensées - reçoivent les particularités

de l’esprit qui les a conçues et prononcées»160. Comme nous pouvons le

constater, Ellen White utilise influence plutôt qu’impulse et imbued plutôt que

conceives.

Pour analyser ces mots nous allons procéder de façon systématique : en

premier lieu, il nous faut comparer le sens donné par le dictionnaire et ensuite

analyser quel est la définition la plus adéquate pour chaque mot dans son

contexte littéraire spécifique. Cette démarche sera appliquée à la fois au deux

cas que nous venons de présenter.

Selon la définition du dictionnaire, le premier mot que nous allons

étudier, influence161, peut contenir plusieurs sens. Littéralement, il implique de

159

David Neff, Ellen White’s Theological and Literary Indebtness to Calvin Stowe, p. 19. 160

Calvin Stowe, Origin and History, p. 19. 161

Noah WEBSTER, Chaucey GOODRICH, An American Dictionary of the English Language, p. 603.

59

"faire couler" ou de "faire couler dans quelque chose". Ce terme peut faire

référence à des substances spirituelles ou autres, trop subtiles pour être

visibles. Généralement, il exprime un pouvoir qui agit d’une façon invisible avec

des conséquences perceptibles. Il peut également transmettre le pouvoir de

persuader quelqu’un par l’argumentation ou la motivation. Dans le domaine

religieux, ce mot peut être utilisé pour décrire l’action du pouvoir de Dieu dans

l’esprit humain. Dans le contexte de la phrase dans laquelle Ellen White utilise

ce terme, nous pouvons comprendre qu’il décrit le processus de l’inspiration.

Ellen White regarde ce processus comme un Dieu agissant, communiquant son

pouvoir divin dans l’être humain pour qu’il soit en mesure de rédiger la Bible.

De son côté, Stowe utilise le mot impulse162, défini premièrement par

"une force communiquée d’un corps à l’autre" ; deuxièmement par "une

influence qui agit sur l’esprit". Enfin, le terme impulse peut signifier "une

influence surnaturelle sur l’esprit". Dans notre contexte, ce mot présente

l’inspiration comme une action de Dieu qui pousse l’homme à concevoir des

pensées nouvelles et à les exprimer : «sous l’impulsion du Saint-Esprit, il

conçoit certaines pensées et les prononce en utilisant certaines paroles». En

effet, c’est ce pouvoir divin qui amorce la rédaction des textes bibliques et qui a

soutenu l’auteur durant tout le processus.

En comparant ces deux termes, nous arrivons à la conclusion que leurs

sens sont très proches. Les deux présentent un pouvoir, une action surnaturelle

sur l’esprit humain. Dieu, en agissant sur l’homme par le biais de l’inspiration,

est le premier responsable de la rédaction de la Bible. Les contextes des textes

étudiés ne nous donnent pas de raisons de penser qu'Ellen White voulait

présenter un autre sens que celui que présente Stowe.

Le deuxième mot, imbued163, est défini dans le dictionnaire par le terme

"imprégné", mais il soulève une action profonde. Notons également que dans

sa définition, l'auteur utilise les mots tinged164 et tinctured165. Ceux-ci nous

présentent l’idée d’être "imprégné avec quelque chose qui lui est étrange". Par

162

Noah WEBSTER, Chaucey GOODRICH, An American Dictionary of the English Language, p. 586. 163

Ibid., p. 578. 164

Ibid., p. 1155. 165

Ibid.

60

conséquent, grâce à l’usage du terme "imprégné" dans cette définition, nous

pouvons inclure dans le mot imbued le sens de la fécondation. Quand Ellen

White exprime : « (l’homme) sous l’influence du Saint-Esprit, est imbu de

pensées», elle veut transmettre l’idée que l’homme reçoit des pensées du

Saint-Esprit, quelque chose qui lui est étrange. Si l'on porte une analyse plus en

profondeur, nous pouvons également comprendre quelque part que l’esprit

humain est imprégné des pensées divines. Ainsi, il existe en un sens une

certaine passivité de la part de l’humain, réceptacle des pensées divines.

Néanmoins, cette passivité initiale entraîne une réaction: la rédaction de la

Bible en réponse à l’action de Dieu : «L’inspiration n’agit pas sur les mots de

l’homme ni sur ses expressions, mais sur l’homme lui-même.»

Cette notion de fécondation est importante parce que le mot

conceives166, utilisé par Stowe, a pour sens de "recevoir dans l’utérus et

procréer" ; de "créer quelque chose dans l’esprit" ; de "comprendre quelque

chose ; penser et réfléchir". Si l'on prend la phrase de Stowe : « sous

l’impulsion du Saint-Esprit, il conçoit certaines pensées et les prononce avec

certaines paroles», nous pouvons plus clairement en saisir le sens. Même si

Stowe note la capacité de l’homme de percevoir ou d'imaginer des choses, le

sens de recevoir dans son esprit l’impulsion divine, l’amène à créer des

pensées et des mots indispensables à la rédaction de la Bible. L’initiative et les

capacités créatives humaines restent dépendantes de l’action de Dieu sur l’être

humain. Comme pour Ellen White, Stowe nous dit que l’homme reçoit quelque

chose du Saint-Esprit, qu’il définit comme une impulsion divine. Cette réception

de la part de l’homme va mener au développement de certaines pensées et de

paroles particulières.

Une fois encore, les deux termes sont très proches et à nouveau le

contexte autour du mot ne nous permet pas de faire une distinction entre

l’usage qu'Ellen White donne au mot imbued et celui que Stowe donne à

conceives. A l'opposé de ce que David Neff affirmait, pour nos deux auteurs, il y

a une réception à l'intérieur de quelque chose en provenance de l'extérieur:

dans le cas particulier de Stowe une impulsion divine, tandis que pour Ellen

166

Noah WEBSTER, Chaucey GOODRICH, An American Dictionary of the English Language, p. 240.

61

White il s'agit de la réception des pensées divines. Lorsque l'on approche cette

notion du domaine de l’inspiration biblique, cela implique pour eux, que l’esprit

humain est imprégné par un élément divin. La précision d’Ellen White dans la

définition de cet élément comme étant des pensées divines sera très importante

par la suite alors que nous préciserons leur notion sur l’inspiration biblique.

Simplification ou développement du matériel de Stowe

Une des autres observations que nous pouvons faire grâce au cadre

présenté, est la présence de portions de texte dans lesquelles Ellen White

simplifie la pensée de Stowe - colorée en vert - ou à travers lesquelles elle

développe davantage certains des points spécifiques de l'argumentation de

Stowe - coloré en gris. Par exemple, le paragraphe suivant de Stowe : «

Écoutez deux avocats débattre au sujet d'un point de la loi et de son

application. Écoutez deux politiciens qui s’opposent en argumentant sur la vraie

intention et la force d’un point particulier de la Constitution des États-Unis.167»

réduit et simplifié par Ellen White dans le paragraphe suivant : « Politiciens et

opposants débattent de points de la loi et possèdent des points de vue opposés

sur l’application de ces lois. »

De la même façon, nous pouvons voir un autre exemple dans lequel elle

développe la pensée de Stowe, qui écrivait : « la maladie et l’ingénuité perverse

de l’esprit humain »168 en contraste avec le paragraphe du manuscrit 24 qui lui

correspond et dans lequel Ellen White va plus loin en disant : « la perversité de

l’esprit humain, astucieux à échapper à la vérité, plusieurs ne lisent et

n'interprètent la Bible que pour faire plaisir à leur propre personne.» Ce procédé

d’Ellen White, simplifiant ou développant certaines portions du texte de Stowe

et ajoutant des idées complémentaires, nous montre une analyse et une

rédaction active de sa part. Son manuscrit 24 semble être le fruit d’une étude

personnelle d’Ellen White du livre de Calvin Stowe et non seulement d'une

simple reproduction, d’autant que les deux documents présentent des profils

littéraires relativement différents. L'ouvrage de Calvin Stowe est un livre publié

tandis que celui d’Ellen White est tiré de son journal, il s'agit donc de ses notes

personnelles.

167

Calvin Stowe, Origin and History p. 17. 168

Ibid.

62

Conclusion

Après cette étude dédiée à l’observation de ces deux textes, nous

pouvons donc conclure que la majorité du texte d’Ellen White dépend de

l’ouvrage de Stowe sur un plan lexical mais également dans la structure

utilisée. Même sur certains mots différents qu’elle utilise et qui pourraient nous

conduire à penser qu'elle diverge de Stowe, ces termes possèdent pourtant un

sens très proche. Le contexte littéraire ne nous permet pas de supposer un

usage différent entre ses mots et celui de Stowe.

Un deuxième élément important est la présence des portions du

manuscrit 24 qui n’ont pas de parallèle direct avec le texte de Stowe - dans le

cadre présenté, ils n’ont pas de couleur. Ces parcelles de texte sont originelles

d’Ellen White, mais elles s’insèrent de manière organique dans la structure de

Stowe. C’est-à-dire qu'elles présentent des idées qui ne changent pas

significativement la structure commune entre Ellen White et Calvin Stowe. Ces

indices nous montrent encore à quel point le manuscrit 24 a été le fruit d’une

réflexion personnelle d’Ellen White. Cette étude sur l’utilisation qu’Ellen White

fait des expressions et des paroles de Stowe nous conduit à présenter les

convergences et les divergences de leur pensée au sujet de l’inspiration.

C. Analyse de la pensée d'Ellen White et de Calvin Stowe

Après avoir établi sur quel plan le manuscrit 24 est dépendant de

l’ouvrage de Stowe au niveau littéraire, nous entrons à présent dans une étape

d’analyse de la pensée d’Ellen White et de celle de Calvin Stowe. Cette

démarche nous permettra de préciser leur relation et de saisir leur positionnent

sur l’inspiration biblique.

Dans le cadre de cette analyse, le chapitre précédant avec l’étude que

nous avons faite sur les mots importants des textes, joue un rôle majeur parce

qu’il nous permettra d'évaluer de manière plus fidèle les nuances ou

divergences de pensée de chacun de ces auteurs. Par ailleurs, nous allons

utiliser les points de tension que nous avions notés dans la première partie. Ces

points, c’est-à-dire : l’inspiration du contenu, le point focal de l’inspiration et le

mode d’inspiration ; nous permettront de mieux les positionner entre eux, mais

également dans le contexte spécifique du protestantisme américain du XIXe

63

siècle et, pour Ellen White, dans son milieu adventiste. C’est sur ces trois

principaux points que nous allons organiser ce chapitre. Pour chacun d’eux,

nous comparerons et analyserons les positions présentées par Ellen White et

Calvin Stowe.

L’inspiration du contenu

Cette notion, ainsi que nous l’avons déjà expliqué dans la première

partie, a pour objectif de définir quel type d’informations contenu dans la Bible

est inspiré. Il est important de rappeler que la plupart des auteurs étudiés dans

la première partie développent principalement leur pensée sur cet aspect. Ils

ont axé leur travail à définir dans la Bible ce qui était ou n'était pas inspiré. Les

auteurs réfléchissaient par exemple aux renseignements scientifiques que la

Bible présente et s'interrogeaient sur l'éventuelle vérité absolue de ces récits.

De la même façon, ils se sont questionnés entre autres sur les domaines de la

théologie et de l'histoire. Nous allons d'abord étudier la pensée de Calvin Stowe

et, par la suite, la comparer avec celle d’Ellen White.

Pour Calvin Stowe, la Bible n’est pas une représentation parfaite de la

pensée divine : «La Bible n’est pas un exemple de la compétence de Dieu

comme écrivain, en nous montrant son mode de pensée, sa logique, sa

rhétorique ou son style de narration historique.»169 Cela est dû au fait que,

d’une part, la révélation est progressive : « Les écritures ont été données aux

hommes peu à peu, au fil du temps, à la mesure que Dieu voyait les bonnes

occasions »170.

D’autre part, le langage humain est limité par sa propre nature et par la

nature des hommes : « Ce malheur elle (la Bible) le partage avec tout ce qui

doit être exprimé dans un langage humain. Cette restriction est due à

l’imperfection - défaut nécessaire du langage humain - et à la maladie et la

perverse ingénuité de l’esprit humain171». Stowe développe plus encore cette

aspect de l’imperfection du langage humain en ajoutant que : «La Bible ne nous

est pas donnée dans un langage céleste ou surhumain». C’est-à-dire que la

Bible ne pourrait jamais être une transcription parfaite de l’esprit divin parce que

169

Calvin Stowe, Origin and History, p. 18. 170

Ibid., p. 13. 171

Ibid., p. 17.

64

nous somme d'abord des êtres humains et nous n’avons pas cette capacité de

compréhension. Ensuite, les langues humaines sont trop limitées, trop

imprécises pour être capables de livrer de manière conforme une telle

communication. Ainsi, le fait « la Bible peut être utilisée pour tout dire et ne rien

dire en même temps» est une conséquence de la « perversité et de l'ingénuité

de l’esprit humain». L’humain, de sa propre volonté corrompt les

enseignements bibliques.

Malgré tout, la Bible reste pour Stowe, pleinement compréhensible dans

son application pratique : « Ceci est suffisant à nos propos pratiques, et c’est

pour des raisons pratiques que la Bible a été donnée.»172 Elle révèle d'autant

plus son caractère divin non dans une unité superficielle et externe, mais dans

une unité interne et spirituelle : « L’unité des écritures n’est pas externe, mais

une unité interne, une unité spirituelle, l'unité d’une idée grandiose qui traverse

l’ensemble, l’idée de réunir l’âme humaine avec Dieu»173.

De son côté, Ellen White défend comme Stowe, que la Bible reste claire

pour toutes les questions pratiques c’est-à-dire, l'ensemble des interrogations

qui concernent le salut de l’homme et son quotidien. Même si dans la Bible : «

Dieu comme auteur n’est pas représenté», dans le processus de rédaction de

la Bible, Dieu a progressivement révélé sa volonté. De la même façon, Ellen

White affirme également l’idée de l’imperfection du langage humain de Stowe: «

À cause des imperfections de la compréhension humaine du langage, où la

perversité de l’esprit humain, astucieux s'échapper de la vérité».

Ellen White propose aussi la même emphase sur les grandes limites des

langages humains : « Tout ce qui est humain est imparfait». Autrement dit: la

Bible comme ouvrage humain, reste toujours imparfaite dans la transmission

même des vérités divines. Nous pouvons donc constater qu’elle s’attache

davantage à la perversion de l’esprit humain à cause de son expérience

personnelle. Elle soulève aussi «l’unité spirituelle» de la Bible qui se base sur

vérité essentielle présente dans tous les livres bibliques.

172

Calvin Stowe, Origin and History, p. 18. 173

Ibid., p. 13.

65

Ainsi que nous venons de le noter, nos deux auteurs s'accordent dans

leur opposition à une inspiration verbale de la Bible. Même si la Bible reste

divine, elle n’est pas rédigée par Dieu. Puisque tout ce qui est humain est

imparfait, et puisque la Bible n’est pas une représentation parfaite des pensées

divines, nous ne pouvons dire qu’elle est infaillible, même dans la transmission

et la présentation de ses idées. Ellen White et Stowe ne précisent pas de quelle

manière cette imperfection se reflète dans l’autorité des informations contenues

par la Bible. L’emphase donnée par les auteurs s'articule autour du plan du

Salut, la grande idée centrale qui traverse la Bible et qui en est l'essence et le

message même.

La conception et l'argumentation de nos auteurs reste très proche de

Coleridge, surtout sur les limites du langage humain, en opposition aux

approches réformées qui défendaient une inspiration verbale de la Bible : « […]

c’est l’esprit de la Bible qui est infaillible et absolu, et non ces phrases et

paroles séparées […]»174.Or, Coleridge émet l'idée que l’esprit de la Bible est

infaillible tandis que Calvin Stowe et Ellen White affirment que la Bible reste

elle-même, en toutes choses, imparfaite. Ellen White s’oppose au groupe

adventiste qui défendait la notion d'inspiration biblique verbale. Cette similitude

entre Calvin Stowe et Ellen White, sera partagée également avec le second

aspect de l’inspiration que nous allons analyser maintenant.

La focalisation de l’inspiration

Notre deuxième aspect de l’inspiration est la focalisation de l’inspiration.

Comme nous l'avions déjà défini dans la première partie de notre recherche, ce

concept concerne l’objet de l’action du Saint-Esprit, c’est-à-dire: en quoi Dieu

agit-il dans le processus de l’inspiration? Les positions avancées dans la

première partie sont variées, c’est pour cette raison que cet aspect de

l’inspiration est l'un des points de tensions existant. Parmi les différentes visions

sur l’inspiration biblique, les défenseurs de la "focalisation" soutenaient que

Dieu agissait sur les paroles utilisées, sur les pensées de la personne ou

encore sur la personne elle-même.

174

Samuel COLERIDGE, Confessions of an inquiring spirit, p. 73.

66

Au sujet de cette focalisation, Calvin Stowe déclare très clairement dans

son livre que l’action du Saint-Esprit se fait sur l’homme lui-même : « ce ne sont

pas les paroles de la Bible qui ont été inspirées, ce ne sont pas les pensées de

la Bible qui ont été inspirées ; c’était les hommes qui étaient inspirés.

L’inspiration n’agissait pas dans les mots de l’homme ni dans sa pensée, mais

dans l’homme lui-même ». Stowe précisait sa pensée autour de l'idée que

l’inspiration n’agissait ni sur les paroles, en raison des limites du langage

humain, ni sur les pensées de l’homme.

En lien avec Calvin Stowe, Ellen White transmet une idée voisine: « Ce

ne sont pas les paroles de la Bible qui sont inspirées, mais les Hommes qui ont

été inspirés. L’inspiration n’agit pas dans les paroles de l’homme ni sur ses

expressions, mais sur l’homme lui-même.» Comme nous pouvons le

remarquer, elle affirme comme Stowe, que l’inspiration agit sur l’homme. Il est

vrai qu’elle ne spécifie pas, comme Stowe, que le Saint-Esprit n’agit pas sur les

pensées. Cette nuance est importante, nous le soulignerons plus tard. Le

centre de sa pensée reste très proche de celle de Stowe : le point focal de

l’inspiration, c’est l’homme. Même si elle ajoute cette nuance, nous devons

nous garder de penser qu’Ellen White défendait une position différente de

Stowe par rapport à la focalisation de l’inspiration. D’autant plus qu'elle précise

que :

« La Bible a été écrite par des hommes inspirés, mais ne montre pas ni le mode de penser ni d'expression de Dieu. C’est celui de l’humanité. Dieu comme auteur n’est pas représenté. (…) Mais Dieu ne s’est pas présenté pour être jugé dans les mots, ni la

logique, ni la rhétorique de la Bible».

Les pensées présentes dans la Bible ne sont pas celles de Dieu. Par

conséquent, même si Ellen White n’affirme pas, comme Stowe, qu’elles ne sont

pas inspirées, de la même façon elle ne nie pas qu’elles soient inspirées. C’est

dans le troisième aspect de l’inspiration, à savoir "comment Dieu agit sur

l’homme" que nous allons préciser la pensée d’Ellen White sur ce point. Calvin

Stowe et Ellen White restent néanmoins pleinement d’accord sur la proposition

de base qui défend que c’est l’homme qui est l’objet de l’action de Dieu.

Dans leur contexte théologique, ils s’approchent beaucoup de

Schleiermacher qui relève ce qui suit :

67

« Ainsi l’inspiration particulière des Apôtres n’est pas quelque chose qui se limite exclusivement aux livres du Nouveau Testament. Ces livres partagent cette inspiration qui, dans un sens plus étroit, conditionné par la compréhension pleine et pure de la chrétienté par les Apôtres, couvre l’ensemble des activités officielles de son ministère.»

175

A l'inverse de la plupart des autres auteurs qui défendait l’inspiration sur

les pensées ou l'inspiration sur les mots, Schleiermacher proposait, comme

Calvin Stowe et Ellen White, une action du Saint-Esprit exercée sur l’homme.

Une inspiration agissante sur l’homme entier et sur ses écrits comme le fruit

d’un vécu intime avec Dieu. Après avoir établi que ces deux auteurs défendent

que Dieu agit sur l’homme, il nous paraît nécessaire d'analyser comment cette

action est produite. Nous le découvrons à présent avec le troisième aspect de

l’inspiration.

Mode d’inspiration

Cet aspect concerne le mode utilisé par le Saint-Esprit pour agir auprès

des humains dans le processus de l’inspiration. En présentant le mode utilisé

pour interagir et influencer l’action des écrivains bibliques, Ellen White et Calvin

Stowe sont allés plus loin encore dans leur raisonnement que la plupart des

auteurs que nous avons étudié dans la première partie.

Calvin Stowe présente une image très intéressante pour expliquer sa

compréhension au sujet de ce mode d’inspiration. Il présente le Christ

pleinement humain et pleinement divin comme une analogie précise de la Bible.

De la même façon, la conception de Jésus offre un parallèle dans la conception

de la Bible : « De sorte qu’il, par sa propre spontanéité, sous l’impulsion du

Saint-Esprit, conçoive certaines pensées et les exprime par certains mots, les

paroles et les pensées reçoivent l’empreinte particulière de l’esprit humain qui

les a conçues et exprimées, et lui appartiennent entièrement comme si

l’inspiration n’avait pas eu de place.» Il précise davantage encore sa pensée en

ajoutant :

« L’inspiration est généralement une purification, une élévation et une intensification subjective de l’intellect humain, plutôt qu’une suggestion et une communication objectives, bien que la suggestion et la communication ne soient pas exclues. L’esprit divin est si diffus à travers l’esprit humain, et l’esprit humain si interpénétré par le divin, que pour l’instant les déclarations humaines sont la parole de Dieu.»

175

Friedrich SCHLEIRMACHER, The Christian faith, p. 599.

68

Ces déclarations, liées à l’analogie de Jésus nous montrent que Stowe

voit la Bible comme le fruit d’une vraie et pleine coopération entre le divin et

l’humain. Un partenariat où il n’y a pas de supérieur mais au sein duquel

chacun apporte sa contribution pour le résultat final.

C’est la conception de Jésus qui nous apporte la clé pour bien

comprendre la pensée de Stowe. Comme Marie a reçu une semence divine et

a porté Jésus pendant la période de gestation, ainsi les auteurs bibliques ont

reçu une semence divine qui a pris naissance dans leurs esprits et qui a fait

croître des pensées et des paroles. Ainsi que Jésus était biologiquement le fils

de Marie, même si issu d’une fertilisation divine, de la même manière, les

pensées et les paroles sont le fruit de l’auteur humain, bien qu'il ait été sous

impulsion divine.

À partir de cette notion de Stowe, on pourrait se questionner : Est-ce que

cette idée enlève le caractère divin de la Bible ? Selon notre auteur, il n'en est

rien, sauf si l'on est prêt à dire que Jésus n’était pas divin parce qu'il est né

d’une femme humaine. Il est vrai que Stowe définit l’inspiration comme un

processus généralement subjectif, subjectivité qui, selon ses dires, est conçue

par les auteurs humains à partir d’une action inexplicable de Dieu. Autrement

dit, les pensées et les paroles humaines sont partiales mais ont comme base la

réception de quelque chose de divin par l’auteur qui a mis en marche ce

processus. L'action ne s’arrête pourtant pas là, mais elle renforce d’avantage

tout le processus subjectif qui suit : «une purification, une élévation et une

intensification subjective de l’intellect humain».

Bien que, dans la pensée de Stowe il y ait prédominance de la

subjectivité de l’inspiration, il ne nie ni l’objectivité, ni la suggestion ni la

communication objective. Entre Dieu et l’homme existe une coopération

presque symbiotique dans l’inspiration. C’est cette collaboration qui conduit des

êtres humains à prononcer la parole de Dieu.

De son côté, Ellen White présente sa pensée de façon plus concise que

Calvin Stowe. Elle aussi défend la même coopération pour rédiger la Bible : «

sous l’influence du Saint-Esprit il est habité par des pensées. Mais les mots

reçoivent l’impression de l’esprit de l’individu. L’esprit divin est diffus. L’esprit et

69

la volonté divine sont combinés avec l’esprit et la volonté humaine, ainsi les

déclarations de l’homme sont la parole de Dieu.» Pour nos auteurs, la Bible est

le fruit d’un partenariat étroit entre Dieu et l’homme. C’est cette notion qui est au

centre de leur pensée, bien qu'Ellen White nuance la position de Stowe en

ajoutant que les auteurs bibliques sont « remplis de pensées ».

Si, pour Stowe, l’élément divin provoque la réflexion de l’auteur qui, aidé

par le Saint-Esprit va aboutir en pensées et en paroles, il n'en est pas de même

pour Ellen White. Cette dernière note que cet élément divin est aussi pensées,

mais comme elle l'affirme dans son texte : « (la bible) ne montre ni le mode de

penser ni le mode d'expression de Dieu». Cela implique qu’elle voit dans

l’inspiration une action de réflexion, de méditation et même de compréhension

de la part de l’auteur face à ces pensées divines avec lesquelles il est rempli.

La différence entre Ellen White et Calvin Stowe est qu’elle précise cet élément,

déclencheur du début de la réflexion, comme étant des pensées

communiquées objectivement. Néanmoins, tous deux s'accordent sur cette

réflexion personnelle comme une partie de l’inspiration.

De même que la «subjectivité» de Stowe est soumise à la notion

principale de la coopération, l’«objectivité» d'Ellen White est, elle aussi,

soumise à cette même coopération. Nous mettons en évidence cette précision

parce qu’elle nous semble très explicite quand elle dit que «les mots reçoivent

l’impression de l’esprit individuel.»

Calvin Stowe et Ellen White face à leurs contemporains

Après l’analyse de ces pensées par rapport aux trois aspects proposés,

nous arrivons à une notion de l’inspiration biblique qui est une coopération entre

Dieu et l’homme. Dans cette relation étroite qui les lie, c’est l’homme qui est le

centre de l’action de Dieu, le réceptacle non pas des mots ou des expressions

mais du pouvoir divin. C'est ce dernier que Calvin Stowe ne précise pas, mais

qu’Ellen White décrit comme des pensées qui amènent l’homme à méditer et à

réfléchir. Cette action, même si elle part de la propre spontanéité de l'individu,

n’est pas destituée d’aucune participation divine. Dieu a été présent dans tout le

processus de rédaction de la Bible, en augmentant et purifiant les capacités

naturelles de l’homme. Même si la Bible est imparfaite et ne peut reproduire

70

fidèlement la pensée divine, comme toute chose humaine d'ailleurs, elle reste

pourtant la parole de Dieu.

Cette notion, défendue par Ellen White dans son manuscrit 24, rejoint les

principaux thèmes qu’elle défendra dans l’introduction du The Great

Controversy, que nous avons analysé dans notre deuxième partie. Dans les

deux textes elle exprime l'idée d’une inspiration agissante sur l’homme, et non

pas une simple communication directe du Saint Esprit des pensées et des

paroles divines. L’action de Dieu sur l’auteur l’amène à réfléchir sur ce qui a été

révélé, il est nécessaire qu’il le comprenne et l’interprète. Les capacités et les

caractéristiques individuelles de l'individu vont influencer sa réceptivité et sa

réflexion sur la vérité divine. Cette démarche l’amènera à créer, toujours avec la

contribution de Dieu, des pensées et à les exprimer d’une façon personnelle.

Ces aspects communs nous montrent la proximité de ces deux textes sur les

concepts présentés. De la même façon, ils nous permettent de constater que,

au moment de la rédaction du manuscrit 24, Ellen White s'opposait déjà à

l’inspiration verbale et à l’inspiration «par degrés» proposés dans le débat

adventiste sur l’inspiration biblique des années 80. Nous pouvons observer

dans cette introduction de 1888 une maturité de la pensée d’Ellen White qui

n’est pas présente dans le manuscrit 24. Tandis que dans le manuscrit elle

affirme que les auteurs sont « habités par des pensées», l'ouvrage The Great

Controversy développe que «l’être infini a illuminé le cœur de ses serviteurs. Il

leur a donné des songes, des visions, des symboles».

Alors que sa position reste singulière face aux notions de l’inspiration

biblique adventiste de l’époque, Ellen White rejoint les idées de Calvin Stowe

face à ses contemporains protestants de l’époque. Même s'il existe un

rapprochement entre sa pensée et quelques auteurs de son temps, il se

distingue par la profondeur de sa réflexion sur ce sujet. C’est de façon très

claire que nos deux auteurs se démarquent par une conception verbale de

l’inspiration comme elle était présentée dans les approches orthodoxes. Ainsi

que le défend Coleridge, l’imperfection des langages humains rend improbable

l'hypothèse que la Bible puisse être une représentation infaillible de Dieu, non

seulement par rapport aux expressions et aux paroles utilisées, mais aussi en

ce qui concerne les pensées qu’elle présente. Contrairement à Briggs, Calvin

71

Stowe et Ellen White, soutiennent que les idées de la Bible ne sont pas une

transcription de la pensée divine. Schleiermacher le défendait : dans la

rédaction de la Bible, c’est l’homme qui est inspiré. C’est en effet sur l’auteur

que Dieu agit, dans sa vie, ses capacités et son esprit. La grande contribution

de Calvin Stowe et d’Ellen White concerne le mode de l’inspiration, aspect le

plus «méprisé» pour les auteurs que nous avons précédemment étudié. Même

si Schleiermacher touche brièvement à cette notion, il n’approfondit hélas pas

suffisamment sa pensée.

Calvin Stowe et Ellen White ne se limitent pas à affirmer ce que

l’inspiration n’est pas. Ils explorent la signification de cette action de Dieu et

développe ses implications. Ils tentent d’expliquer, dans la pratique, le

déroulement de ce processus et de quelle manière Dieu interagit avec les

auteurs bibliques. Une analyse superficielle pourrait mener à conclure que cette

notion implique un compromis par rapport à l’autorité biblique. Nos deux

auteurs défendent néanmoins que ce moyen imparfait de la révélation de Dieu

reste parole de Dieu, pleinement divine et pleinement humaine. Lorsque l’on

compare Calvin Stowe et Ellen White avec leurs contemporains, nous

percevons que ces premiers ont poussé la réflexion de l’inspiration sur l’aspect

essentiel de cette action de Dieu.

Conclusion

Comme nous venons de le constater, nos deux auteurs s’accordent à

dire que la Bible est le fruit de la coopération divine et humaine. C’est cette

notion de base que tous deux transmettent, sur le mode d’inspiration, dans

leurs textes. Stowe précise que le Saint-Esprit agit sur l’homme, principalement

sur ses capacités intellectuelles. Pourtant, dans son analogie de Jésus et

l’utilisation du mot «concevoir», nous pouvons conclure qu’il existe tout de

même la transmission de quelque chose qu’il ne précise pas. Il spécifie que cet

élément ne concerne pas des pensées ni des paroles, mais il n’apporte aucun

complément à ce sujet. Ellen White, restant sur la même idée de la coopération,

diverge de Stowe dans le sens où ce qui démarre la réflexion de l’auteur est, à

son avis, une pensée. Sa conception soulève plutôt le côté objectif de

l’inspiration par rapport à Stowe, mais tous deux se rejoignent pourtant sur la

notion de partenariat entre Dieu et l’homme dans la création de la Bible.

72

D. Conclusion

Après avoir étudié ces deux textes sur un plan littéraire et théologique, il

nous est important de mettre en évidence quelques découvertes importantes.

Au niveau littéraire d’abord, nous avons constaté que le manuscrit 24 utilisait

bon nombre des éléments présents dans le texte de Stowe. Non seulement

Ellen White empruntait la même structure mais, comme Neff l’a montré, plus de

la moitié de ses phrases étaient dominées par le support de Stowe. Il est vrai

que quelques éléments sont uniques à Ellen White, cependant, même ce

matériel s’insère de façon naturelle dans la structure de Stowe.

Sur le niveau théologique ensuite, nous avons analysé les deux textes

par rapport à trois aspects particuliers : l’inspiration du contenu, la focalisation

et le mode de l’inspiration. Nous l’avons constaté, dans ces trois points, Ellen

White reste très proche des idées présentées par Stowe, bien que les

contributions personnelles qu’elle a ajouté ont modulé quelque peu sa pensée

de celle de Stowe.

Ces résultats nous montrent qu’Ellen White suit de près Calvin Stowe au

niveau littéraire et théologique. Elle n’utilise pas le support littéraire, la structure

et le lexique pour présenter une notion différente de Stowe, mais elle emprunte

les principales idées de cet auteur.

Le texte d’Ellen White montre que, même si elle reprend en général la

notion de Stowe sur l’inspiration, elle y ajoute ses propres nuances. Ce

manuscrit 24 reste fortement influencé par le texte de Stowe, mais diverge

légèrement en certains points, notamment en ce qui concerne le mode de

l’inspiration. Cette proximité doit être soulevée par le fait que le raisonnement

de Calvin Stowe est très différent de la plupart des auteurs que nous avons

étudié dans notre première partie.

Cette étude comparative des deux textes en lien avec notre

problématique nous montre que le manuscrit d’Ellen White est postérieur et

dépend de l’écrit de Stowe. Il en dépend non seulement au niveau littéraire,

ainsi que d’autres chercheurs l’ont affirmé, mais aussi sur un plan théologique.

Malgré les nuances présentées par Ellen White, sa pensée théologique sur

l’inspiration biblique, comme elle nous est présentée dans le manuscrit 24,

73

notre recherche démontre clairement qu’elle a été influencée par Stowe en des

points très importants comme la focalisation et le mode de l’inspiration.

74

Conclusion Générale

L’objectif principal de notre mémoire était proposer une réévaluation de

la question de l’empreinte littéraire chez Ellen White en comparant le manuscrit

24 et le livre Origin and History de Calvin Stowe. Notre travail nous a permis de

constater la grande proximité entre ces deux documents.

Une proximité au niveau de la structure, des paroles et expressions

utilisées, mais aussi dans les idées transmises par les deux auteurs. Ellen

White comme Calvin Stowe, défend une inspiration biblique qui agit sur

l’homme. Cet homme est rempli, par le Saint-Esprit, de pensées divines qui

l’amènent à réfléchir afin de comprendre, d’assimiler, de développer et

d’exprimer ce qu’il a reçu. Même si le Saint-Esprit est présent d’une façon

objective dans la transmission de ces pensées initiales, il reste présent de

manière subjective durant tout ce processus jusqu’à ce que le produit final soit

achevé. C’est cette coopération étroite, presque symbiotique, en ce que l’esprit

humain est pleinement rempli par le Saint-Esprit, qui permet que les paroles

écrites ou dites par des humains soit la parole de Dieu. Néanmoins, la Bible

n’est pas une représentation parfaite de la façon d’écrire de Dieu ni de la

pensée de Dieu. Elle reste imparfaite dans la transmission de la pensée divine

comme toute autre chose d’origine humaine.

A l’opposé de ce qu’affirme Neff et d’autres auteurs, les différences entre

la pensée d’Ellen White et de Calvin Stowe sur l’inspiration biblique sont

minimes. Nos deux auteurs sont très proches au niveau de la structure et du

lexique, mais également sur les principales notions sur ce thème. Ellen White

développe cependant quelques nuances par rapport à la pensée de Stowe. Par

exemple, elle spécifie l’élément déclencheur de la réflexion de l’auteur biblique,

comme des pensées divines objectivement communiquées, contrairement à

Stowe qui n’en fait pas mention. Or, ces nuances n’altèrent en rien le cœur du

concept de l’inspiration, partagé par ces deux auteurs.

C’est en comparaison avec leurs contemporains que la proximité entre

Calvin Stowe et Ellen White peut être valorisée. Les idées défendues par Stowe

et partagées par Ellen White, n’ont pas de parallèle dans le milieu protestant

américain ni dans l’Eglise adventiste de cette époque. Les propos de Calvin

75

Stowe apparaissent comme des innovations en contraste avec le contexte du

protestantisme du XIXe siècle. De la même façon, en développant la pensée de

Stowe et en spécifiant des pensées divines comme déclencheurs d’une

réflexion, Ellen White le rejoint, s’en distance et approfondit les principaux

concepts sur l’inspiration biblique de leur époque.

Nous avons pu constater qu’avec le manuscrit 24, Ellen White se

démarquent très clairement des positions défendues par l’Eglise adventiste de

son temps. Elle s’oppose de la même manière à l’inspiration verbale, notion

défendue par George Butler et au «thought inspiration». À notre connaissance,

elle était la seule à défendre cette notion de l’inspiration biblique parmi les

adventistes. Même si nous ne pouvons préciser de quelle manière Ellen White

a pu avoir accès à l’ouvrage de Stowe, tous ces indices nous montrent

qu’effectivement elle a repris l’ensemble de la pensée de Stowe dans la

rédaction du manuscrit 24.

Nous avons mis en lumière suffisamment d’éléments qui nous montrent

la proximité de ce manuscrit avec l’introduction du The Great Controversy : La

similitude de ces deux textes, la proximité des dates de rédaction, les idées

transmises, etc. Dans cette introduction que nous avons proposé, nous avons

présenté un texte qui note déjà une maturité de la pensée d’Ellen White,

maturité qui n’est pas visible dans le manuscrit 24. Un élément nous semble

être cohérent avec les différents styles qui ont été rédigés. A l’inverse de

l’ouvrage publié, le manuscrit 24 reste une partie du journal personnel d’Ellen

White de cette époque. Tous ces éléments nous mènent à penser de ce

manuscrit qu’il est une étape dans sa réflexion personnelle sur l’inspiration

biblique. Selon ces mêmes indices, nous devons percevoir l’introduction du The

Great Controversy comme un fruit plus mûr de cette même réflexion.

Au regard de notre travail, nous pouvons soulever les deux points

suivants : En premier lieu, le fait que dans la rédaction du manuscrit 24 Ellen

White s’approprie des idées de Calvin Stowe, ne doit mettre en cause ni sa

crédibilité personnelle ni son ministère. Ce manuscrit 24 appartenait à l’origine

à son journal personnel, il n’avait pas pour objectif d’être publié, mais était un

texte d’étude. Ensuite, ce manuscrit nous permet d’oser un nouveau regard sur

76

l’utilisation de ses sources dans le processus de rédaction. D’ailleurs, en

étudiant ces sources, Ellen White présente un processus à caractère très

ordinaire, dans lequel elle utilise aussi des documents «bruts» qui avaient

encore besoin d’être travaillés. Cette démarche nous permet d’avoir un regard

nouveau sur le ministère d’Ellen White et sur la rédaction de ses écrits.

De manière plus pratique, cette étude a pu nous fournir des pistes très

intéressantes sur la perception qu’Ellen White avait de son ministère. En raison

de son influence et de son importance pour l’Eglise adventiste, ses écrits sont

souvent utilisés d’une façon très littéraire et étroite. Dans ce manuscrit 24, elle

nous présente la fragilité des ouvrages humains. Cela doit d’avantage nous

faire respecter la Bible et le ministère d’Ellen White tout en restant lucides au

sujet de leurs «imperfections». Cette même imperfection de l’humain est aussi

présente dans la vie des croyants. Nous devons toujours être conscients que ni

nous ni nos frères ne sommes des véhicules parfaits de la volonté divine. Cette

pensée devrait nous rendre très humbles devant notre Dieu et devant les

personnes qui nous entourent.

Il est important finalement, de soulever quelques perspectives de

poursuite de ce travail de recherche. En premier, sur le thème de l’empreinte

littéraire, il serait nécessaire de procéder à des analyses comparatives des

autres sources d’Ellen White. Cela nous permettrait de poursuivre l’étude de

son processus de rédaction et, dans le même temps, d’approfondir notre

compréhension de son ministère au sein de l’Eglise adventiste. Deuxièmement,

alors que le manuscrit 24 ne peut plus être utilisé pour soutenir l’idée que la

théorie du «thought inspiration» a été défendue par Ellen White, il est

nécessaire de réévaluer l’œuvre d’Ellen White sur l’inspiration biblique. Un

nouveau regard sur les textes qui touchent à ce thème deviendrait alors

essentiel afin d’obtenir une idée plus claire et plus précis de sa compréhension

sur ce sujet. Par rapport à ce point, il serait encore fort utile de mettre en

évidence la proximité du manuscrit 24 et de l’introduction du The Great

Controversy. Il nous semblerait essentiel de procéder à une analyse

comparative entre ces deux textes, étude plus pointue encore que celle que

nous avons pu engager dans ce mémoire. Cette analyse pourrait être un bon

point de départ de cette réévaluation de la notion de l’inspiration biblique

77

présente dans l’ensemble des textes d’Ellen White. Par conséquent, cette

nouvelle recherche pourrait fournir de nouvelles pistes pour la compréhension

adventiste sur l’inspiration, non seulement biblique mais aussi en ce qui

concerne le ministère d’Ellen White.

78

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.

85

Table de Matières Remerciements ............................................................................................................................. 1

Introduction Générale ................................................................................................................... 2

I - La notion d’inspiration de la Bible dans le protestantisme anglophone du XIXᵉ siècle ............ 5

A. Introduction ...................................................................................................................... 6

B. Introduction à l’herméneutique orthodoxe de Genève .................................................... 8

C. L’approche du Séminaire de Princeton ........................................................................... 12

D. Charles Briggs .................................................................................................................. 17

E. Samuel Coleridge............................................................................................................. 19

F. Friedrich Schleiermacher ................................................................................................ 20

G. Conclusion ....................................................................................................................... 22

II – Contexte historique et littéraire des ouvrages de Calvin Stowe et d’Ellen White ................ 25

A. Introduction .................................................................................................................... 26

B. Contexte historique et littéraire du manuscrit 24 1885 ................................................. 27

La notion de l’inspiration biblique dans les œuvres d’Ellen White avant 1885 .................. 27

Le contexte historique du Manuscrit 24 ............................................................................. 31

Conclusion ........................................................................................................................... 38

C. Introduction à l’ouvrage de Calvin Stowe ....................................................................... 39

Aperçu générale du livre ..................................................................................................... 39

Résumé du premier chapitre............................................................................................... 40

D. Conclusion ....................................................................................................................... 44

III – Comparaison et analyse entre les œuvres de Calvin Stowe et Ellen White ......................... 45

A. Introduction .................................................................................................................... 46

B. Observation des textes .................................................................................................... 47

Objections to the Bible ........................................................................................................ 47

The common popular objection to the Bible at the present day – What the Bible is not,

what it is, and how to use it. ............................................................................................... 49

Cadre de comparaison entre les deux textes ...................................................................... 51

Les parallèles textuels ......................................................................................................... 56

Conclusion ........................................................................................................................... 62

C. Analyse de la pensée d'Ellen White et de Calvin Stowe ................................................. 62

L’inspiration du contenu ..................................................................................................... 63

La focalisation de l’inspiration ............................................................................................ 65

Mode d’inspiration .............................................................................................................. 67

86

Calvin Stowe et Ellen White face à leurs contemporains.................................................... 69

Conclusion ........................................................................................................................... 71

D. Conclusion ....................................................................................................................... 72

Conclusion Générale ................................................................................................................... 74

Bibliographie ............................................................................................................................... 78