l’acces des pesonnes soudes a la culture

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présente L’ACCES DES PERSONNES SOURDES A LA CULTURE ENQUÊTE 2013 * * * * avec la collaboration de Publication Mai 2014

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Page 1: L’ACCES DES PESONNES SOUDES A LA CULTURE

présente

L’ACCES DES PERSONNES SOURDES

A LA CULTURE

ENQUÊTE 2013

* * * *

avec la collaboration de

Publication Mai 2014

Page 2: L’ACCES DES PESONNES SOUDES A LA CULTURE

Etude sur l’accès des personnes sourdes à la culture

CRé – www.rayondecrits.fr

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L’ACCES DES PERSONNES SOURDES A LA CULTURE

REALISEE PAR CRE – COMPAGNIE RAYON D’ECRITS

ET 6 ETUDIANTS DE L’ESSEC

Alice DEAN, Auriane DE CURIERES DE CASTELNAU, Clément DE GUYON DE GEIS DE PAMPELONNE, François DEISS, Roxane DE MOULINS DE ROCHEFORT,

Adélaïde DE WAVRIN

De janvier à juin 2013 dans le cadre du PCE - Projet Conseil en Entreprise

ENCADRES PAR CRE

Sandrine CHERON et Colombe BARSACQ

avec le soutien d’Isabelle VOIZEUX, artiste associée de CRé et vice-présidente de Dialogue et Liberté des Sourds en Val d’Oise

RESULTATS DE L’ETUDE RETRAVAILLES

par Carla ADRA (étudiante en Anthropologie et Ethnologie) et Charlotte LORIN (étudiante en M1 d’interprétariat en Langue des Signes Française

à l’Université de Lille)

dans le cadre de stages au sein de CRé en décembre 2013 et janvier 2014

NOS REMERCIEMENTS CHALEUREUX A :

Françoise REY – Agnès KERECKI – Wolfgang DICK de l’ESSEC

Ainsi qu’à Alain MILLOT, Président de Dialogue et Liberté des Sourds en Val d’Oise - Olivier SCHETRIT - Yann CANTIN

Et merci à toutes les personnes sourdes qui ont bien voulu répondre ainsi qu’aux lieux culturels et institutions médico-sociales qui ont pris le temps de

participer à cette enquête.

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Etude sur l’accès des personnes sourdes à la culture

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SOMMAIRE

AVIS AU LECTEUR . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . P.4

LA LOI N°2005-12 DU 11 FEVRIER 2005

OBJECTIF PRINCIPAL

DOMAINES IMPACTES

UN OBJECTIF DURABLE POUR LA SOCIETE FRANÇAISE, UNE AFFLUENCE AMELIOREE POUR LES

ETABLISSEMENTS

LA LEGISLATION DES ERP, MISE EN APPLICATION DE LA LOI : VOTRE BATI ET VOS PRESTATIONS DOIVENT

ETRE ADAPTES A TOUS

QUATRE PRIORITES POUR LE COMITE INTERMINISTERIEL DU HANDICAP (CIH)

UN IMPERATIF

INTRODUCTION . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . P.8

ORIGINE DU MOT HANDICAP

VAUT-IL MIEUX PARLER DE PERSONNES MALENTENDANTES PLUTOT QUE SOURDES ?

UNE REVOLUTION CULTURELLE EN MARCHE : L’APPROCHE SOCIETALE

L’ETUDE « L’ACCES DES PERSONNES SOURDES A LA CULTURE » . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . P.16 OBJECTIFS ET AMBITIONS

RESULTATS

STRUCTURES ET ACCESSIBILITE

LE PUBLIC SOURD

LE PUBLIC SOURD ET LA CULTURE

ACTIVITES OU EVENEMENTS ORGANISES POUR LE PUBLIC SOURD

LES FREINS A LA VISITE DES LIEUX CULTURELS

DISPOSITIFS DE MISE EN ACCESSIBILITE

ADAPTER L’AMENAGEMENT ET L’EQUIPEMENT DES LIEUX

SENSIBILISER ET FORMER LES PERSONNELS A L’ACCUEIL DES PUBLICS SOURDS

RENDRE ACCESSIBLES LES CONTENUS ARTISTIQUES ET CULTURELS

METTRE EN PLACE UNE COMMUNICATION EXTERNE EN S’APPUYANT SUR DES RELAIS

INSTITUTIONNELS AU SEIN DES COLLECTIVITES TERRITORIALES ET DES ASSOCIATIONS

INTEGRER DES USAGERS OU UN COLLABORATEUR HANDICAPE

TARIFS ET INFORMATIONS DES DISPOSITIFS TECHNIQUES D’ACCESSIBILITE

CONCLUSION . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . P.32

SOURCES . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . P.36

ANNEXES . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . P.37

CRE

MISSION HANDI-CAPACITES / L’ESSEC

AFFICHE

CONTACTEZ-NOUS !

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AVIS AU LECTEUR

La notion de culture se réfère dans l’étude qui suit à tout ce qui est en rapport avec

l’artistique et le rôle social. Dans la vie, l’art joue un rôle primordial. Aujourd’hui, l’Homme

s’épanouit et grandit au contact des œuvres, livres, films, musiques, peintures etc. Mais si la

culture n’est pas accessible, elle ne peut être transmise. En effet, les œuvres sont, très

rarement, adaptées aux personnes sourdes.

Ainsi, comment la population sourde française peut-elle accéder au patrimoine commun

qu’est la culture française si les institutions culturelles elles-mêmes ne s’adaptent pas à elle?

Ce sont les questions qui se sont posées à nous et auxquelles nous avons chercher une réponse en rencontrant 100 personnes sourdes du département du Val d’Oise, parmi celles-ci 87 personnes ont répondu à notre questionnaire, qui a été produit sous forme écrite et également dans des entretiens en langue des signes. Une cinquantaine d’établissements recevant du public ont reçu le questionnaire 24 ont envoyé leur réponse. 90% des structures reconnaissent ne pas avoir connaissance des besoins et des demandes

des personnes sourdes en matière d’accès à la culture, celles-ci pourtant ont témoigné de

leur soif d’accès à la culture. Nous prenons donc en compte ce fossé qui existe espérant que

vous trouverez des réponses très concrètes et parfois simples à mettre en œuvre pour

favoriser un meilleur accès à la Culture pour tous.

Des organisations et des associations sont néanmoins sensibles à cette discrimination et

réfléchissent à l’évolution de leurs pratiques.

* * * * Les informations qui suivent dans notre AVIS AU LECTEUR sont disponibles dans l’ouvrage Handicap Culture ERP, employeurs, salariés - Les clés d’une culture de l’égalité - Editions La Scène Le handicap est parfois invisible et survient majoritairement après 16 ans, plus encore après

40 ans. Il n’est donc pas seulement question des personnes qui accèderaient pour la

première fois à la culture, mais bien de ceux qui sont vos spectateurs, vos visiteurs, vos

salariés, et qui auraient le goût de s’y maintenir quoi qu’il arrive.

Avant la loi du 11 février 2005, trois handicaps étaient reconnus : moteur, sensoriel, mental.

Désormais ils sont au nombre de 5 : leur ont été associés les maladies psychiques, les

situations de handicap invalidants ou invisibles.

La reconnaissance officielle de la LSF en tant que langue à part entière ne date que de 2005.

Certains chiffres couramment utilisés sont en outre anciens car issus de l’enquête

Handicaps, incapacités, dépendance (HID), réalisée par l’Institut National de Recherche et

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des Etudes Economiques (INSEE) et par la Direction de la Recherche, des Etudes er de

l’Evaluation et des Statistiques (DREES) entre 1998 et 2001. Selon l’AGEFIPH (l’Association

pour la Gestion, la Formation et l’Insertion des Personnes Handicapées), au cours de sa vie

active une personne sur deux sera confrontée à une situation de handicap, qu’elle soit

durable ou réversible, dont 12% seulement à la naissance.

Avant d’entrer dans le cœur des résultats de l’étude menée (p.36), nous vous invitons à

prendre connaissance des éléments de contexte suivants, afin de cerner la démarche et

l’objectif de la présente étude.

LA LOI N°2005-12 DU 11 FEVRIER 2005

OBJECTIF PRINCIPAL : « ( …) l’égalité des droits et des chances, la participation et la

citoyenneté des personnes handicapées ». C’est la principale Loi sur les droits des personnes

handicapées depuis celle du 30 juin 1975. Elle a pour objectif une meilleure insertion dans la

société française des personnes en situation de handicap, quel que soit le type de leur

handicap, en leur permettant l’accès aux mêmes droits que chaque citoyen, en rendant

accessibles tous les lieux de la vie publique. Il importe que la chaine des déplacements soit

respectée, incluant les transports, l’aménagement de la voirie, des espaces publics et des

bâtiments dans leur ensemble.

Votre Etablissement Recevant du Public (ERP) est donc directement concerné par cette loi

qui oblige votre bâti et vos prestations à être accessibles à toutes les personnes touchées

par un handicap. Ces règles concernent également les installations Ouvertes au Public (IOP) :

installations, espaces publics ou privés desservant les ERP (tribunes, gradins, jardins, loges

etc.).

DOMAINES IMPACTES PAR QUELQUES EXTRAITS :

Accessibilité du bâti et accès aux prestations : « Est considéré comme accessible aux

personnes handicapées tout bâtiment ou aménagement permettant, dans des conditions

normales de fonctionnement, à des personnes handicapées, avec la plus grande autonomie

possible de circuler, d’accéder aux locaux et équipements d’utiliser les équipements, de se

repérer, de communiquer et de bénéficier des prestations en vue desquelles cet

établissement ou cette installation a été conçu. Les conditions d’accès des personnes

handicapées doivent être les mêmes que celles des personnes valides ou, à défaut,

présenter une qualité d’usage équivalente. » (Art R 111-19-2)

Participation et citoyenneté : « (…) toute personne handicapée a droit à la solidarité de

l’ensemble de la collectivité territoriale, qui lui garantit en vertu de cette obligation, l‘accès

aux droits fondamentaux reconnu à tous les citoyens ainsi que le plein exercice de sa

citoyenneté. » (Art. L 114-21)

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Actions (tout ce qui suit s’applique dans le domaine de la formation et de l’accès à la

culture) : « (…) – des actions s’adressant directement aux personnes handicapées ; des

actions visant à informer, former, accompagner, soutenir les familles et les aidants ; des

actions visant à favoriser le développement des groupes d’entraides mutuelle ; des actions

de formation et de soutien professionnels ; des actions d’information et de sensibilisation du

public ; des actions permettant d’établir des liens concrets de citoyenneté ; (…) des actions

pédagogiques en milieu scolaire et professionnel ainsi que dans tous les lieux d’accueil

(…) » (Art . L 114-3)

UN OBJECTIF DURABLE POUR LA SOCIETE FRANÇAISE, UNE AFFLUENCE AMELIOREE

POUR LES ETABLISSEMENTS Pour votre établissement, l‘intégration d’aménagement améliorant l’accueil ; le confort, les

prestations pour tous ne peut qu’être profitable en termes d’affluence et de retombées tant

pécuniaire qu’en terme d’enrichissement des pratiques.

La bonne mise en oeuvre de l’accessibilité des lieux recevant du public participe pleinement

du développement durable de la société française et de l’amélioration des conditions de vies

de nos concitoyennes et concitoyens.

LA LEGISLATION DES ERP MISE EN APPLICATION DE LA LOI : VOTRE BATI ET VOS

PRESTATIONS DOIVENT ETRE ADAPTES A TOUS Au 1er janvier 2015, il importe de satisfaire les besoins d’usage dans le cadre des prestations

et services, de sensibilisation et d’informations des collaborateurs d’un ERP, qui doivent

prendre en compte tous les besoins spécifiques. En cas de non respect des dispositions

légales, les sanctions prévues par la loi de 2005 sont la fermeture de l’établissement ne

respectant pas le délai de mise en accessibilité : le remboursement des subventions

publiques ; une amende de 45 000€ pour les architectes, entrepreneurs et toute personnes

de l’exécution des travaux. Une interdiction d’exercer peut être prononcée. En cas de

récidive, la peine est portée à 6 mois d’emprisonnement et à 75 000€ d’amende.

4 PRIORITES POUR LE COMITE INTERMINISTERIEL DU HANDICAP (CIH) La 1ere réunion du CIH a eu lieu le 25 septembre 2013. La feuille de route gouvernementale

qui en est issue se donne pour objectif de définir la nouvelle dynamique : une politique du

handicap pour une société plus inclusive et une citoyenneté effective des personnes

handicapées.

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Les 4 sujets majeurs de la feuille gouvernementale sont :

1. LA JEUNESSE : accompagner les parents, mieux accueillir les enfants en crèche

ouvrir les portes de l’école et des études supérieures, utiliser le numérique,

faciliter les pratiques sportives, les pratiques culturelles et l’accès aux vacances.

2. L’EMPLOI

3. L’ACCESSIBILITE : faciliter la vie d’usager et de client, la vie citoyenne et l’accès à

la culture et au sport.

4. LA CONNAISSANCE DU HANDICAP

UN IMPERATIF Un impératif découle de la feuille de route gouvernementale : se donner les moyens de

réussir la mise en accessibilité. Le constat du retard accumulé depuis 2005 appelle à une

mobilisation inédite ! Ainsi une large concertation a été mise en place jusqu’en janvier 2014

avec l’ensemble des acteurs concernés.

Principaux points de cette concertation et issus du rapport « Réussir 2015 » :

Un constat mitigé sur la mise en accessibilité des ERP existants, des transports et de

la voirie ;

Des agendas d’accessibilités programmés pour permettre aux acteurs privés et

publics d’enjamber 2015 et de poursuivre l’élan.

Nécessité d’une impulsion nationale et territoriale forte.

Une adaptation des normes d’accessibilité pour mieux prendre en compte tous les

handicaps (moteurs, sensoriel, mental ou psychique), l’évolution des techniques et

les contraintes des opérateurs.

Engager une démarche concertée privilégiant la qualité d’usage et la conception

universelle.

A toutes les préconisations obligatoires ou recommandées peuvent s’ajouter d’autres

critères liés à la labélisation TOURISME & HANICAP. Pour les connaître vous pouvez vous

référer à la liste disponible sur le site http://www.tourisme-handicaps.org/

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INTRODUCTION Avouer son ignorance, sa maladresse potentielle, sa peur de mal faire et avant tout sans

doute, celle de ne pas savoir comment faire, peut, en bien des occasions, détendre une

situation et conduire à une relation franche décontractée, force de progrès. Car être en

situation de handicap ne veut pas dire l’être pour tout et partout. Face au handicap, nous

autre Français considérons la seule incapacité, et donc, ce qui semble ne plus être possible

de faire, quand les anglo-saxons eux, apprécient ce qui est encore possible... Un autre

regard ! Une démarche que nous devrions suivre.1

Origine du mot handicap Nous articulerons notre étude autour d’une appréhension du monde des sourds et de la

surdité comme étant basés sur une notion de différence et non comme s’il s’agissait d’un

handicap2.

Le mot handicap vient de la contraction de trois mots anglais hand in cap (la main dans le

chapeau).

Vers 1660, un chroniqueur découvrait à la Mitter Tavern de Londres, un système de troc

d’objets entre deux participants. Un arbitre, le « handicapper » déterminait la différence de

valeur des deux objets, puis déposait la somme compensant l’inégalité constatée dans un

chapeau. C’était donc un système d’échange ou l’on recherchait l’équité.

A partir du milieu du XVIIIe siècle, ce mot est appliqué à la compétition équestre. Lorsque

deux chevaux de mensurations différentes concouraient ensemble, le plus léger était lesté

d’un poids appelé « handicap » afin de maintenir l’égalité de chance entre les deux.

« L’inconvénient » associé donc à la différence de poids est ici aussi comme au XVIIe siècle,

un procédé contribuant à atteindre l’équité. Par la suite ce système fut étendu à différents

sports.

Finalement, le terme fut utilisé pour désigner toute action visant à rendre plus équitable une

confrontation. Cela conduira à employer l’expression « être handicapé » en parlant des

participants désavantagés au départ d’une course. 3

De là vient à partir de 1913, le sens figuré d’entrave, de gène, d’infériorité et par extension à

partir de 1964, celui d’infériorité momentanée.

Le sens médical apparaitra, lui, vers 1950 et se généralisera ensuite pour donner la définition

que la loi reconnaît aujourd’hui et qui est assez proche de celle du sens commun.

1

Handicap Culture ERP, employeurs, salariés - Les clés d’une culture de l’égalité - Editions La Scène 2

Vient du jeu irlandais Hand in cap soit Main dans le chapeau, faisant référence au tirage au sort d’un nom dans une

chapeau, le désigné aura un défi ou sera le premier à faire quelque chose. En course hippique, l’on cherche à donner sa chance au moins bon coursier : les autres partiront donc avec un handicap. 3

http://www Handicontent.fr

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Etude sur l’accès des personnes sourdes à la culture

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Au cours des dernières décennies, le vocabulaire utilisé pour désigner les personnes

handicapées a bien évolué. Si vers 1960, on désignait ces personnes comme étant « infirmes

ou invalides », et les autres comme « normales ou valides », on parle aujourd’hui de

« personnes handicapées » ou de « personnes en situation de handicap », et de

« personnes ordinaires ». Car le handicap est encore plus lourd quand l’environnement ne

prend pas en compte les besoins de la personne handicapée. Ainsi le Handicap est le

désavantage qui résulte de la différence entre ce que la société attend de l’individu et ce

qu’il est capable de faire, compte tenu de ses déficiences et des incapacités relatives. Pour

une incapacité donnée, le handicap est variable, d’une part en fonction des exigences

sociales, et d’autre part des aides qui peuvent être apportées dans chacun des milieux de

vie. » 4

Ainsi, nous envisagerons l’accès des personnes sourdes à la culture dans une dimension

anthropologique et non médicale.

A l’horizon 2015, tous les Établissements Recevant du Public (ERP) devraient être rendus

accessibles conformément à la Loi du 11 février 2005 sur l'égalité des droits et des chances,

la participation et la citoyenneté des personnes handicapées.

Le premier ministre Jean-Marc Ayrault a annoncé en mars 2014 le report de l'application de

la loi de 2005 sur le handicap qui prévoit que tous les établissements et transports publics

seront accessibles à tous au 1er janvier 2015. Un report pour quoi ? Pour qui ? L'accès libre

pour tous ne devrait pas attendre, mais après le départ de Madame Carlotti, nous ne savons

pas encore qui reprendra le travail mené pas à pas. 5

Aujourd’hui, il existe près de 5,5 millions de sourds en France, dont 800 000 sourds

profonds selon l’UNAPEDA6. D’après le Plan 2010-2012 en direction des personnes sourdes

et malentendantes7, le Ministère de la Famille et de la Solidarité estime à 6,6% la population

sourde ou malentendante au sein de la population française. Pourtant, l’Etude de la

Direction de la Recherche des Etudes, de l’Evaluation et des Statistiques estimait en 2007

cette même part à 8,7%.

119 000 personnes environ utilisent la LSF 8 en France

Les chiffres concernant la surdité sont difficiles à obtenir et étudier. Les études divergent

selon la définition accordée à la surdité et selon les sources. Ils ne disent pas comment les

sourds vivent cette surdité et n’expliquent pas qu’une partie de la population sourde ne

considère pas la surdité comme un handicap mais comme élément fondateur d’une

culture. Aussi est-il important de signaler que les termes et la façon dont il sont énoncés

4

Handicap Culture ERP , employeurs, salariés - Les clés d’une culture de l’égalité - Editions La Scène 5

https://www.change.org/fr/pétitions/accessibilié-la-liberté-d-aller-et-de-venir-ne-peut-pas-attendre-10-ans-de-plus 6

Union Nationale des Associations de Parents d’Enfants Déficients Auditifs

www.unapeda.asso.fr/article.php3?id_article=615 7

www.travail-emploi-sante.gouv.fr 8

www.webaccessibilité.fr

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Etude sur l’accès des personnes sourdes à la culture

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peuvent être perçus de manière choquante par les intéressés eux-mêmes ; dire qu’en France

X millions de personnes « souffrent de déficience auditive » est une façon de cloisonner ces

mêmes personnes dans une catégorie de personnes à plaindre et à assister, alors qu’ils se

sentent des citoyens à part entière avec leur propre langue, la Langue des Signes Française.

La difficulté est que le pays des sourds, lui, n’existe pas.

Vaut-il mieux parler de personnes malentendantes plutôt que

sourdes ? (Le handicap en entreprise : contrainte ou opportunité ? Guy TISSERAND, extraits)

« On entre là dans les limites de l’absurde, puisqu’un individu malentendant entend mal,

comme le terme l’indique, alors qu’une personne sourde n’entend pas du tout.

L’euphémisation des termes est souvent la traduction d’une certaine mauvaise conscience,

mais elle peut entrainer une imprécision sans pour autant faire progresser le respect de la

personne. Elle risque, par ailleurs, d’induire des comportements inappropriés, comme

l’utilisation de l’écrit, de la lecture labiale ou de la LSF avec des personnes malentendantes

qui de leur coté, utilisent les moyens de communication traditionnels (oralisation, écoute) et

non ces outils qu’emploient les personnes sourdes ou l’inverse.

Lors d’une intervention en entreprise, un manager me signale qu’un de ses collaborateurs

est malentendant. J’engage donc la conversation avec le collaborateur en question en lui

parlant distinctement et en lui demandant s’il comprend. A ce moment, le manager

m’interpelle. Il me demande pourquoi je parle à cette personne, alors qu’elle n’entend pas.

Je lui explique que si la personne est malentendante, je peux lui parler. Il me répond que la

personne n’entend pas, mais il me l’a présenté comme « une personne malentendante »

car on lui a dit que le terme sourd était prohibé. Cet exemple illustre les effets pervers

qu’une manière policée d’utiliser le langage de manière irréfléchie peut avoir comme

conséquences sur la relation interpersonnelle et sur les comportements. » 9

L’acharnement des entendants à vouloir réparer « l’oreille cassée » des sourds donne lieu en

1880, au Congrès de Milan : constitué en majorité de médecins entendants, il doit

déterminer de la langue des signes ou de l’oralisme, quelle méthode sera la plus adaptée à

l’éducation des sourds.

Parmi tant d’autres à priori… Trois raisons sont alors invoquées pour prononcer l’interdiction :

« La Langue des Signes Française n’est pas une vraie langue… »

« ELLE NE PERMET PAS DE PARLER DE DIEU ! »

« Les signes empêchent les sourds de bien respirer ce qui favorise la tuberculose. »

9 et

11 Le handicap en entreprise : contrainte ou opportunité ? Guy TISSERAND - Editions PEARSON

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Etude sur l’accès des personnes sourdes à la culture

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Une langue interdite pendant plus d’un siècle Il découle du Congrès de Milan l’interdiction de la Langue des Signes dans les pays

participants, à l’exception des Etats-Unis et de l’Angleterre. L’oralisme se diffuse en masse

dans les écoles et la Langue des Signes Française, considérée comme barrière à

l’apprentissage du français oral est totalement condamnée pendant plus de 100 ans !

La LSF a été proscrite, méprisée et marginalisée aux seules associations de personnes

sourdes. Dans les instituts destinés aux personnes sourdes, la Langues des Signes se pratique

en cachette et elle s’est considérablement appauvrie.

Mais les combats menés depuis pour la reconnaissance de la Langue des Signes

commencent à porter leurs fruits : la Loi N° 2005-102 du 11 février 2005 reconnait la LSF

comme une langue à part entière.

Une révolution culturelle en marche : l’approche sociétale C’est l’évolution vers l‘approche sociétale du handicap qui, depuis les années 1980 et plus

encore depuis la loi de 2005, a permis une diminution significative du taux de chômage des

personnes handicapées. On peut parler ici de véritable révolution culturelle : les personnes

handicapées sortent alors des milieux dits « spécialisés » pour s’intégrer progressivement

dans le milieu qualifié « d’ordinaire » L’effort d’adaptation devient réciproque et partagé ; il

n’est plus exclusivement à la charge de la personne handicapée voire de ses proches.

Sortant de la logique de la « déficience », on entre ici de plain-pied dans la réponse aux

besoins d’une minorité et dans le principe d’égalité des chances. 10

Ce n’est qu’en 1991, grâce à la loi Fabius sur la liberté du choix de communication (LSF ou

oral), que la LSF est de nouveau autorisée dans notre pays. Puis la Loi du 11 février 2005

reconnaît la LSF comme langue à part entière.

Une langue reconnue en 1991, mais un retard dans l’apprentissage

de la langue écrite française chez les personnes sourdes Après un siècle d’interdiction de la LSF, les sourds français ont accumulé un retard forcé

dans leur apprentissage de leur seconde langue le français écrit :

Selon le Rapport Gillot de 1998, 80 % des personnes sourdes sont illettrées11. La difficulté de

donner des chiffres est grande : Dominique Gillot12 le dit elle-même en répondant à la

question d’où viennent ces chiffres ?

11 Le Droit des sourds : 115 propositions, rapport au Premier Ministre, 1998, Dominique Gillot

12 Femme politique française, notamment Secrétaire d’Etat chargée des personnes âgées et des personnes handicapées

auprès du ministre de l’Emploi et de la Solidarité. Voir ses propositions de loi ou de résolutions sur www.senat.fr

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Etude sur l’accès des personnes sourdes à la culture

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12

« Ce ne sont pas des statistiques, ce ne sont pas des chiffres scientifiques. Dans mon rapport c’est

une compilation, une analyse d’une compilation d’informations recueillies à travers différentes

études, différents rapports, différents témoignages qui nous ont amenés à faire cette évaluation,

cette estimation. » 13

La lecture et l’écriture sont très difficiles à comprendre et appliquer lorsque l’on est sourd.

Pourquoi ? Tentez donc de prononcer de l’hindi (langue d’Inde) alors que vous n’en avez

jamais entendu. C’est impossible ! De même, essayez de lire une langue que vous ne

connaissez pas... vous n’y arriverez pas.

C’est le même phénomène pour le français chez une personne sourde. L’enfant sourd

expérimente le monde à travers ses yeux et non ses oreilles. C’est pourquoi la Langue des

Signes s’avère être la langue naturelle de l’enfant sourd puisque régie par les yeux et le

corps. Or il a été démontré que la maîtrise d’une première langue aide à l’apprentissage

d’une seconde langue. Ainsi, si la possibilité de maîtriser la Langue des Signes et de l’utiliser

dans l’apprentissage de tout autre savoir, est donnée à l’enfant, alors il lui sera possible

d’acquérir non seulement le français écrit mais aussi tout le reste. Cela est démontré dans

plusieurs écoles en France qui prodiguent leur enseignement en LSF (Toulouse/Poitiers…)

Pourtant, la nécessité d’un enseignement de la LSF et en LSF n’est pas encore ancrée dans

les esprits. La question centrale en terme d'accès à l'emploi pour les personnes sourdes

concerne l'aménagement et l'évolution de l'emploi, car beaucoup de violence est engendrée

dans ces situations par le manque d'adaptation.

Par ailleurs, la population sourde est jugée « handicapée ». Cependant, la population

entendante l’est tout autant : la surdité provoque pour deux personnes qui se rencontrent

et ne parlent pas la même langue un handicap partagé de communication. L’entendant est

aussi handicapé que le sourd lorsqu’ils se retrouvent face à face, ne sachant comment

communiquer.

La personne sourde n’a pas de retard mental, n’a pas de handicap psychologique. Elle ne

parle pas la même langue que celle d’un entendant ; c’est difficile, mais pas insurmontable…

C’est une question d’adaptation.

13

Emission l’œil et la main du 18/11/2013, Quelque chose me cloche, http://www.france5.fr/emissions/l-oeil-et-la-

main/diffusions/18-11-2013_147321

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Etude sur l’accès des personnes sourdes à la culture

CRé – www.rayondecrits.fr

13

Découvrons le témoignage de Yann Cantin14, doctorant en histoire à l'EHESS :

« Parlons par exemple d’une invention qui était censée révolutionner la

communication entre sourds et entendants, le téléphone. En principe, la paternité de cette

invention doit être attribuée à l’italien Antonio Meucci(1808- 1889) qui s’est vu devancer

par Alexander Graham Bell (1847-1922), son cadet de 39 ans, dans le dépôt du brevet

d’invention. Mais, c’est surtout l’intention première de Bell qui est surprenante. En effet, il

escomptait l’utiliser pour parler à distance à son épouse sourde Mabel Gardiner

Hubbard (1857-1923), dont le père sera le premier président de la compagnie téléphonique

Bell. En effet, d’une éducation orale, et surtout influencé par les principes éducatifs de son

père, Alexander Melville Bell (1819-1905), qui a lui-même également épousé une sourde,

Alexander Graham escompte utiliser la technologie afin de faciliter l’éducation orale et ainsi

discuter à distance avec sa femme, sans avoir recours aux gestes qu’il honnit.

Mais, l’application pratique semble être malaisée, et par conséquent, après quelques

réflexions dont je ne vais pas exposer ici, on assiste à une évolution fulgurante du

téléphone entre 1890 et 1920 où cette technologie devient rapidement

incontournable.

Mais, il y a toujours un grand mais…

Les sourds se sont trouvés en butte face à un grand mur, quand les administrations

adoptent de plus en plus cette technologie comme moyen principal de contact, de

rendez-vous ou d’échanges. Dès les années 1950, on assiste à une généralisation de

l’usage du téléphone, et de ses avatars : interphone, haut-parleurs, radios…

Le son devient le principal moyen de communication au cours du XXe siècle, alors que l’écrit

l’est au XIXe siècle. Face à cette généralisation du son, le sourd n’a plus aucun moyen de

garder prise sur son parcours, et ainsi de faire les démarches lui-même. De plus en plus, le

téléphone est exigé pour ces démarches. Par conséquent, le sourd est forcé d’avoir recours à

un tiers, le plus souvent un proche de famille, pour faire ces démarches, et là, la notion de la

vie privé disparaît pour les personnes sourdes, plus particulièrement quand il est question

des affaires médicales. Bref, à vouloir appeler un sourd à distance, Bell a entraîné un

mouvement inverse, et l’a exclu de la vie sociale, intention qu’il n’avait pas voulu.

Vouloir faire du Sourd, un être comme les

autres et donc, à ne pas vouloir reconnaître sa

spécificité, Bell a entraîné sa stigmatisation au

cours du XXe siècle, dont le fait extrême a été

la stérilisation des sourds issus de familles

sourdes, en Allemagne, durant le IIIe Reich,

mais également aux Etats-Unis, en Scandinavie,

de l’interdiction du mariage entre Sourds en

Finlande jusqu’aux années 1970…

D’autre part, l’idée de véhiculer le son à

14

Travaux de Yann Cantin - http://noetomalalie.hypotheses.org/author/noetomalalie

Granville Redmond et Charlie Chaplin 1

Page 14: L’ACCES DES PESONNES SOUDES A LA CULTURE

Etude sur l’accès des personnes sourdes à la culture

CRé – www.rayondecrits.fr

14

distance donne une certaine idée : faire du cinéma parlant.

Ainsi, comment synchroniser le son à l’image, ce qui est assez difficile. La solution

technologique s’est généralisée qu’au cours des années 1920 et là s’ouvre une nouvelle

période pour le cinéma, mais également pour la communauté sourde. Or, d’après un

chapitre d’un ouvrage, édité par CNRS Editions, le processus qui a conduit à l’introduction

du cinéma parlant, serait à l’origine, pour tenter de faire apprendre la parole aux enfants

sourds, à l’aide de la technologie. (…), l’arrivée du son au cinéma a entrainé l’exclusion de

nombreux comédiens sourds, d’Hollywood puisque leurs pantomimes sont devenus inutiles.

Il faut savoir que Charlie Chaplin s’est lié d’amitié avec un peintre sourd, Granville Redmond 15, plus connu pour ses œuvres impressionnistes car il a été le premier peintre américain à

l’adopter. Or, Granville est également comédien dans nombre de films de Charlot, et d’après

les historiens, Charlie Chaplin connaîtrait l’American Sign Language (ou je dirais le

Noétomalalien16

américain !)

Par conséquent, cette présence des comédiens sourds s’est fracassée face aux exigences

du cinéma parlant, comme nombre de comédiens peu doué dans le contrôle de la voix…

Ainsi, avec le cinéma parlant disparaît l’une des distractions accessible aux sourds. Le

cinéma muet met les sourds et les entendants sur le pied d’égalité, avec l’image des

comédiens bougeant, et des textes explicatifs qui s’y affichent. Or, avec le parlant, plus

rien n’est accessible… C’est seulement par les sous-titres que c’est possible.

MAIS, encore un mais…

C’est seulement avec les films étrangers, que l’on sous-titre volontiers, pas les films français,

ce qui de fait va entrainer un “divorce” entre la communauté sourde et le cinéma français qui

ne sous-titre pas ses films français (cela ne se fait seulement que depuis deux ans, voire cinq,

et encore pour certains rares films, au cinéma…).

Par la suite, tout au long du XXe siècle, les films deviennent tout simplement des

images mouvantes, avec des lèvres qui bougent, mais dont le contenu ne passe pas…

De là, on assiste à une double exclusion sociale et culturelle des sourds par la technologie

du son… alors qu’ils étaient à l’origine destinés à faire l’inverse…

Conclusion :

Par conséquent, voyant s’accentuer ce phénomène d’exclusion, les spécialistes de la

surdité se sont mis en tête d’ajouter d’autres technologies afin de faire entrer les

sourds dans la société : appareils auditifs, implants cochléaires, afin de permettre aux

sourds de pouvoir téléphoner et de pouvoir suivre les discussions à la télévision…

Or, qu’en est-ils concrètement ?

L’exclusion sociale des sourds reste toujours présente, mais, avec le retour de l’écrit, grâce

aux SMS et l’email, cette exclusion devient moins forte. Le minitel, (…) et l’Internet qui

accordent la priorité à l’écrit, apportent un contre-tendance, en encourageant l’écrit et

la lecture. Et là, on remarque que les sourds se sentent moins exclus, et reprennent cette

technologie à leur profit, avec les vidéos youtube noétomalaliées… Mais, ceci est une autre

histoire ! »

15

http://www.granvilleredmondgallery.com 16

Noétomalalie, signifie l’art d’exprimer par signes ce que l’on pense donc en LS

Page 15: L’ACCES DES PESONNES SOUDES A LA CULTURE

Etude sur l’accès des personnes sourdes à la culture

CRé – www.rayondecrits.fr

15

La LSF est une langue à part entière et loin d’être internationale ! La LSF est pratiquée par une partie de la population sourde, soit par 119 000 personnes en

France métropolitaine. Chaque pays possède sa propre Langue des Signes pouvant être

analysée au même titre que les langues vocales par la grammaire et la syntaxe.

Elles permettent d’exprimer les nuances comme toutes les autres langues.

Si aujourd’hui l’on peut considérer que la LSF est légitimement reconnue, il n’existe que 400

interprètes diplômés Français/LSF dont une vingtaine hors hexagone… contre 3 000

interprètes Suédois/Langue des Signes Suédoise ! Ceci démontre un retard considérable de

notre pays comparé à nos voisins scandinaves. En France les personnes sourdes peuvent

utiliser selon ce qui leur a été transmis la LSF (Langue des Signes Française), le LPC (Langage

parlé complété) ou l’oralisation, ou les trois.

Une étude pilote sur le département du val d’Oise pendant 6 mois Partant du constat au moment de la refonte du Schéma Départemental des personnes

Handicapées piloté par le Conseil Général du Val d’Oise, de la faible prise en compte de la

question de l’accès à la culture des personnes sourdes, et forte de son expérience de terrain,

via les spectacles et les stages qu’elle anime, CRé s’est interrogé sur la démarche de

sensibilisation qu’elle mène à chaque prise de contact avec les responsables institutionnels

et culturels. Car très peu de connaissance de cette réalité se perçoit chez les adultes actifs.

CRé s’est appuyée dans son analyse sur l’enquête d’accessibilité réalisée en 2010 sur le

département du Val d’Oise, piloté par le Théâtre du Cristal17 qui si elle apportait des

réponses en matière d’accès à la culture pour tous types de Handicap n’en avait aucune sur

la surdité. Pour nous conforter dans le constat d’absence de prise en compte de cette

spécificité, dans les médias et au sein des institutions, nous avons souhaité mettre en place

cette enquête. Il a été fait le constat dans le cadre de restitutions d’études au niveau du

territoire, que « s’il n’y a pas de plainte, il n’y a pas de prise en compte de ces besoins jugés

minoritaires. »

La notion de culture se réfère dans l’étude qui suit à tout ce qui est en rapport avec

l’artistique et le rôle social. Dans la vie, l’art joue un rôle primordial. Aujourd’hui, l’Homme

s’épanouit et grandit au contact des œuvres, livres, films, musiques, peintures etc. Mais si la

culture n’est pas accessible, elle ne peut être transmise. En effet, les œuvres sont, très

rarement, adaptées aux personnes sourdes.

Ainsi, comment la population sourde française peut-elle accéder au patrimoine commun

qu’est la culture française si les institutions culturelles elles-mêmes ne s’adaptent pas à elle?

90% des structures reconnaissent ne pas avoir connaissance des besoins et des demandes

des personnes sourdes en matière d’accès à la culture.

Des organisations et des associations sont néanmoins sensibles à cette discrimination.

17

http://www.artsenfolies.org/theatreducristal/index.php?option=com_content&view=category&layout=blog&id=40&Itemid=66

Page 16: L’ACCES DES PESONNES SOUDES A LA CULTURE

Etude sur l’accès des personnes sourdes à la culture

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16

Dans le cadre d’un Projet Conseil en Entreprise (PCE), six étudiants de l'École Supérieure des

Sciences Économiques et Commerciales (ESSEC) de Cergy (95), encadrés par la Compagnie

Rayon d’écrits ont mené cette étude intitulée :

« À l’ère de la communication, lutter contre un

handicap invisible : la surdité. »

OBJECTIFS :

Donner les clefs de compréhension pour un meilleur accès à la culture partagé entre

sourds et entendants ;

Face au manque de documents officiels, obtenir des chiffres de recensement, le

constat du retard de la France en la matière est préoccupant ;

Travailler sur des propositions d'actions concrètes sur l’accessibilité à la culture des

personnes sourdes en mobilisant différents interlocuteurs sensibilisés et en

sensibilisant les autres ;

Proposer un sujet d’actualité afin de bousculer une réalité stagnante à quelques mois

de la mise en application de la loi sur le Handicap en 2015.

AMBITIONS :

1. Proposer des actions efficaces en lien avec l’application de la Loi sur le Handicap en

2015, notamment en termes de créations bilingues de spectacles en français et en

Langue des Signes Française ;

2. Proposer des actions culturelles et des formations pour amateurs/professionnels

destinées à tous les publics locuteurs de la LSF ou non, sourds et malentendants ;

3. Mobiliser l’ensemble des acteurs culturels ;

4. Créer du «lien» ce qui manque cruellement aujourd’hui entre les structures.

L’intention est de mettre en lumière la réalité du non-accès d’un public qui se retrouve

aujourd’hui la plupart du temps oublié des programmations et d’analyser les attentes de ce

public afin de proposer des solutions innovantes permettant de mieux accéder à la culture.

Pour répondre à cette problématique, deux questionnaires ont donc été réalisés : l’un à

destination des personnes sourdes ou malentendantes, locutrices ou non de la LSF et l’autre

pour les lieux culturels du Val d’Oise.

Les interviews ont été analysées entre avril et juin 2013.

Page 17: L’ACCES DES PESONNES SOUDES A LA CULTURE

Etude sur l’accès des personnes sourdes à la culture

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17

Résultats

1. Structures et accessibilité Le questionnaire a été envoyé à une cinquantaine d’établissements du département du 95 :

24 d’entre eux ont répondu. 71% des structures se présentent comme culturelles et

programment des spectacles vivants et pièces de théâtre.

71%

14%

35%

7%

7%

14%

14%

Culturelle

Socio-culturelle

Municipale

Médico sociale

Agréée

Associative

Autre

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Etude sur l’accès des personnes sourdes à la culture

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18

Accessibilité des structures

77% des lieux se disent accessibles aux personnes en situation de handicap.

L’accessibilité est pourtant difficile à définir. Est-elle comprise de façon globale ou

simplement comme l’accessibilité du cadre bâti ?

Des moyens communicatifs doivent donc être déployés pour les personnes sourdes.

Les œuvres sont-elles compréhensibles pour tout le monde ? Pour les personnes sourdes (un

tiers des personnes en situation de handicap), cela nécessite une adaptation par divers

moyens à la communication : par exemple, la traduction de la langue française en LSF, le sur-

titrage… (cf. proposition concrètes : traduction LSF).

Quelles offres culturelles y sont proposées ?

On remarque que les activités les plus proposées appartiennent au domaine du théâtre et de

la musique. La danse et le cinéma suivent de près puisque proposés à plus de 40%.

Ceci correspond-il aux préférences culturelles des personnes sourdes ?

77%

23%

accessible

non-accessible

39%

21%

35%

78%

47%

61%

7%

26%

42%

25% 25%

0%

10%

20%

30%

40%

50%

60%

70%

80%

90%

Page 19: L’ACCES DES PESONNES SOUDES A LA CULTURE

Etude sur l’accès des personnes sourdes à la culture

CRé – www.rayondecrits.fr

19

35%

65%

2. Le public sourd

Sur 100 personnes sourdes et malentendantes résidentes du Val d’Oise, 87 ont répondu

totalement au questionnaire.

Sexe et âge

☐ 65% femmes

☐ 35% hommes

Types de surdité

1% 16%

59%

24%

0% 3%

24%

73%

0%

10%

20%

30%

40%

50%

60%

70%

80%

Page 20: L’ACCES DES PESONNES SOUDES A LA CULTURE

Etude sur l’accès des personnes sourdes à la culture

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20

Les personnes sourdes ayant répondu sont âgées de 31 à 60 ans, cette partie de la

population est composée à 65% de femmes et sourde profonde.

Cela est n’est qu’un infime reflet de la population sourde du département.

Au 1er janvier 2013, la population du Val d’Oise est estimée par l’INSEE18 à 1 187 836

habitants. Ce qui représente 10,10% de la région et 1,9% de la population française.

Environ 83 500 personnes sont sourdes dans le département, donc 2 505 sourdes profondes,

soit 3% de la population française selon le Baromètre National de l’Audition de 2003.19

Situation familiale

La plupart des personnes interrogées ont des enfants, sourds pour 20% d’entre eux.

Nous préciserons qu’il est estimé par l’UNAPEDA, à 1 enfant sourd sur 1000 naissances soit

près de 700 enfants sourds chaque année. Seulement 10% d’enfants sourds ont des parents

sourds eux-mêmes.

Modes d’expression

18

Institut national de la statistique et des études économiques collecte, produit, analyse et diffuse des informations sur

l'économie et la société françaises. http://www.insee.fr/fr/ppp/bases-de-donnees/recensement/populations-legales/pages2012/pdf/dep95.pdf 19

Informations recueillies auprès de l’Etude préalable à la création d’un service médicosocial spécialisé pour les déficientes

sensorielles dans le Val d’Oise réalisée en décembre 2004

83%

17% Avecenfants

Sansenfants 80%

20% enfantsentendants

enfants sourds

97%

29% 26%

0%

20%

40%

60%

80%

100%

120%

Page 21: L’ACCES DES PESONNES SOUDES A LA CULTURE

Etude sur l’accès des personnes sourdes à la culture

CRé – www.rayondecrits.fr

21

Ici, le total des pourcentages n’est pas de 100% - plusieurs réponses ont été admises : des

personnes pratiquant la LSF lisent aussi sur les lèvres par défaut, puisque les entendants ne

signent pas. Il en va de même chez les sourds oralistes.

Dans le département du Val d’Oise, la communication en LSF est massivement représentée.

Nous pouvons lier ce point au fait que la majorité des individus soient sourds profonds et

que malgré l’éducation oraliste préconisée en France durant toute la période d’interdiction

de la LSF ; nous observons un développement progressif de la LSF sur le territoire.

3. Le public sourd et la culture

En philosophie, la CULTURE désigne tout ce qui est contraire à la NATURE. En

sociologie, elle désigne ce qui est commun à un groupe d’individus et permet d’unir,

de souder une communauté. Ici, nous utiliserons le point de vue sociologique en

introduisant notre propos par l’essai de Yann Cantin Existe-t-il une communauté

sourde ? (24 janvier 2012) 20

« Qui sont ces personnes dont nous parlons et que nous avons rencontrées et font-elles

partie d’une communauté ? Existe-t-il une communauté sourde ? Cette

question, je me la suis souvent posée, car c’est justement le point central de ma thèse

portant sur la communauté sourde de la Belle Epoque.

Médicalement parlant, il n’existe pas de communauté sourde, puisqu’un handicap n’est pas

un fait culturel. Or, si l’on lit l’article de Jean-Louis Siran 21et des recherches de Yves

Delaporte, et même des écrits de Bernard Mottez, on peut douter du critère purement

médical. Ainsi, les recherches sociologiques et anthropologiques indiquent l’existence d’une

communauté sourde. Or, qu’est-ce qui fait sa spécificité ? Il semble bien que ce n’est pas le

fait de ne pas entendre, mais justement d’utiliser une langue totalement spécifique, voire

unique.

En effet, la langue des signes, dont il existe des milliers de spécificités locales et nationales,

chaque pays a la sienne, se repose sur le canal visio-gestuel, et non pas le canal audio-vocal.

Ainsi, cette spécificité fait toute la différence, et c’est ce qui constitue le point central de

l’existence d’une communauté. Je ne vais pas détailler sur la question linguistique ou

sociologique qui ne sont pas réellement mes domaines de compétence, mais sur le domaine

historique. Je vous recommande fortement la lecture de cet article : Andrea Benvenuto « De

quoi parlons-nous quand nous parlons de “sourds” ? », Le Télémaque1/2004 (n° 25), p. 73-

86.

Ainsi la principale question est : Depuis quand alors cette communauté existe ?

Pour tout répondre, on ne le sait pas faute de recherches approfondies. Il existe des

recherches faites par des bénévoles partout dans le monde entier. Mais, les recherches de

20

Gallica.Bnf.fr 21

http://www.cairn.info/revue-l-homme-2004-1-page-173.htm

Page 22: L’ACCES DES PESONNES SOUDES A LA CULTURE

Etude sur l’accès des personnes sourdes à la culture

CRé – www.rayondecrits.fr

22

niveau universitaire sont très rares et concernent principalement deux questions :

l’éducation des sourds-muets, et l’intervention de l’Etat sur la communauté sourde.

Que savons-nous donc sur la communauté dans le passé ? Avant les années 1970, on ne sait

quasiment rien. On connaît quelques noms, des actions associatives, des événements

fondateurs : la naissance de la Société Centrale des Sourds-Muets en 1836 et le Congrès de

Milan en 1880 entre autres… Mais, ce n’est que la partie visible de l’iceberg historique.

Car, qu’en est-il de la vie au quotidien ? Des familles ? De la transmission de la langue des

signes ? De l’emploi ? Et même des liens entre les personnalités sourdes ? De tout cela, il

semble bien qu’il y ait même une jungle amazonienne à défricher !

Or, l’un des plus grands écueils, quand on souhaite faire de l’histoire sociale, ou même

l’histoire d’une communauté, c’est de trouver des sources. Le plus simple serait d’aller

consulter les archives, de regarder les sources écrites. Mais, la communauté sourde a une

particularité que l’on peut dire unique dans les pays occidentaux : une transmission de la

mémoire qui n’est pas écrite.

Cette transmission non écrite, basée sur la langue des signes, que l’on peut dire

“transmission noétomalalienne” s’est faite au sein des associations, dans des lieux de

rencontres réguliers. »

Nous nous intéresserons à la “culture” qu’offrent les lieux qui se définissent comme centres

culturels : institutions et lieux qui proposent une programmation de spectacles, des

expositions, des conférences, mais aussi des animations socioculturelles à destination de la

population locale. Les visiteurs ont tous une approche et un rapport spécifique avec ces lieux

et ont différentes attentes.

Que représente la culture pour les personnes sourdes ?

71%

65%

47%

16% 13% 5% 4%

0%

10%

20%

30%

40%

50%

60%

70%

80%

Un loisir Un endroitpour faire

desdécouvertes

Un lieu derencontres

Un espacede

formation

Uneoccupation

Autre Rien

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Etude sur l’accès des personnes sourdes à la culture

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23

Si les dimensions de loisirs et de découvertes sont logiquement dominantes, il est

intéressant de noter que pour près de la moitié des personnes interrogées, les sorties

culturelles sont aussi lieux de rencontres, soit de socialisation et donc de recours à lutter

contre l’isolement.

Ainsi, nous pouvons constater que les structures culturelles ne se limitent pas à être

uniquement des lieux d’expositions, ou de découverte mais aussi des endroits qui

permettent de créer du lien entre les personnes et de partager entre générations et

groupes sociaux. Ceci correspond a la notion de culture pour les personnes sourdes (cf.

graphique “la notion de culture chez les personnes sourdes »).

Quels sont les centres d’intérêts culturels préférés ?

Ici, plusieurs réponses pouvaient également être données le résultat est dans l’ordre des

questions posées et dépasse 100%.

On remarque un très fort intérêt pour le spectacle vivant (théâtre, mime, cirque et danse).

La vue étant le sens essentiel chez les sourds, les spectacles qui investissent le corps, le

mouvement et renvoient des informations visuelles (couleurs, gestes, costumes) sont perçus

comme (très) intéressants pour la population sourde, qui s’exprime par le corps tout comme

la danse, le mime et le théâtre.

Le cinéma quant à lui intéresse massivement alors que les lieux sont rarement adaptés à un

public sourd, par manque de sous-titrages. Cependant, se développent ici et là des séances à

raison de deux fois par semaine, où le sous-titrage est assuré (Lille, Poitiers).

Les expositions attirent elles aussi un public important : la soif de découverte est grande.

60%

26% 32%

28%

61% 66%

55%

33%

45%

32%

45% 37%

0%

10%

20%

30%

40%

50%

60%

70%

Page 24: L’ACCES DES PESONNES SOUDES A LA CULTURE

Etude sur l’accès des personnes sourdes à la culture

CRé – www.rayondecrits.fr

24

À quelle fréquence les lieux culturels sont-ils visités ?

On peut se réjouir de la fréquentation élevée du public sourd dans les lieux culturels sachant

que 44% de la population y va tous les mois. Aucun ne déclare ne jamais y aller.

4. Et concrètement…

Activités ou évènements organisés pour le public sourd

Des structures dites accessibles, un peu moins de la moitié proposent, disent-elles des

activités adaptées au public sourd ou malentendant. Ces exemples doivent inciter les autres

lieux à développer une offre adéquate (cf. propositions concrètes). Les 55% restants devront

alors être accessibles d’ici 2015.

Cependant, la population sourde dénonce les différents obstacles rencontrés dans les

structures du département. Absence de traduction en LSF, manque de pictogramme clairs

dédiés à une meilleure compréhension de ce qui est mis en place. Absence de suivi au long

de l’année de modalités d’accueil adapté. Manque de compréhension en ce qui concerne la

différence entre sourds et malentendants.

45% 55%

oui

non

10%

44% 21%

13%

6%

10%

44% 21%

13%

6%

1x tous les 3 mois : 21%

1x/tous les mois : 44%

1x/an: 6%

1x/semaine: 10%

1x tous les 6 mois : 13%

Page 25: L’ACCES DES PESONNES SOUDES A LA CULTURE

Etude sur l’accès des personnes sourdes à la culture

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25

Quels sont les freins à la visite des lieux culturels ?

De manière évidente, l’accessibilité en LSF est une condition incontournable puisque la

population du Val d’Oise s’exprime majoritairement en LSF.

D’ailleurs, on note 85% de réponses favorables à la mise en place de sur-titrages, de visites

guidées et de conférences en LSF. (cf. propositions concrètes)

Cette étude met en lumière un très fort intérêt du public pour les pratiques culturelles

mais aussi les obstacles découlant d’un handicap invisible qui empêche la communication,

dans la mesure où la langue des signes n’est pas pratiquée par les personnels d’accueil

dans les structures. De cette étude, découlent des propositions pour adapter les lieux et la

programmation pour faciliter leur accès à la culture.

10% 8%

45%

27%

62%

0% 13%

10% Vous n'avez pas envie

Vous n'avez pas l'argent

Vous n'avez pas le temps

C'est trop loin

Pas accessible en LSF

Pas de boucle magnétique

Mauvais accueil

Autre

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Etude sur l’accès des personnes sourdes à la culture

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26

Propositions concrètes

90 % des lieux culturels n’étaient pas au courant des demandes et des souhaits de la

population sourde. On peut penser que très peu d’établissements étaient sensibilisés à ce

handicap. Maintenant, et grâce aux données de cette étude, nous pouvons affirmer que les

personnes sourdes veulent et doivent avoir un accès à la culture à part égale des

entendants, afin de pouvoir, non seulement apprendre mais aussi participer au

développement de la société civile d’une communauté au sens large, à laquelle tout le

monde contribue avec son propre point de vue.

83% des structures se disent intéressées par des outils concrets assurant une meilleure

accessibilité des personnes sourdes à la culture et on note également que plus de 77% d’avis

sont favorables à la création d’ateliers et de spectacles. Donc pour pouvoir mettre ces

activités en place, une dynamique de réseau est nécessaire à partir de laquelle les centres

culturels pourraient faire appel à différentes structures :

- CRé - Compagnie Rayon d’Ecrits

- DLS 95 - Dialogue et Liberté des Sourds en Val d’Oise

- Symbiose

- Remora

- Apui les Villageoises

- Bookbeo etc.

Les entretiens en face à face avec les responsables des lieux culturels et le public

interrogés ont mis en évidence quatre axes de progrès :

1. ADAPTER L’AMENAGEMENT ET L’EQUIPEMENT DES LIEUX

2. SENSIBILISER ET FORMER LES PERSONNELS A L’ACCUEIL DES PUBLICS SOURDS

3. RENDRE ACCESSIBLES LES CONTENUS ARTISTIQUES ET CULTURELS

4. METTRE EN PLACE UNE COMMUNICATION EXTERNE EN S’APPUYANT SUR DES

RELAIS INSTITUTIONNELS AU SEIN DES COLLECTIVITES TERRITORIALES ET DES

ASSOCIATIONS

Pour les tarifs et la mise en place de certains dispositifs, les informations sont en annexes.

Page 27: L’ACCES DES PESONNES SOUDES A LA CULTURE

Etude sur l’accès des personnes sourdes à la culture

CRé – www.rayondecrits.fr

27

1. ADAPTER L’AMENAGEMENT ET L’EQUIPEMENT DES LIEUX

METTRE EN PLACE UNE SIGNALETIQUE directionnelle sous forme de pictogrammes. Il

convient de compléter la signalétique de base pour les publics handicapés (boucle

audio) par des indications visuelles compréhensibles (fléchage, codes couleurs,

balisage au sol)

Doubler l’information sonore par de l’information visuelle (vidéos en LSF,

lecture labiale, écriture sur un carnet, sur-titrage…) avec un bon éclairage (voir plus

bas). Et se munir d’un système sonore d’alarme incendie couplé à un système de

flash lumineux dans tous les endroits où une personne sourde pourrait se trouver

seule (sanitaires, loges, coulisses…)

ÉTUDIER L’ACOUSTIQUE ET L’ISOLATION PHONIQUE dés la conception des bâtiments,

des travaux de réflexion ou des aménagements scénographiques. Ceci implique le

contrôle de la réverbération des sons, le contrôle de la transmission des sons, des

bruits de machines et des vibrations, la réduction de l’électricité statique (qui

interfère avec les prothèses auditives), le contrôle des fréquences de sons transmis.

L’installation de boucles magnétiques de comptoir d’accueil ou de tour de salle

constitue une aide précieuse pour les personnes malentendantes appareillées de

prothèses analogiques.

DEPLOYER L’INSTALLATION D’UNE BOUCLE MAGNETIQUE dans l’espace d’accueil, ou sur

la banque d’accueil elle-même. Elle permet de capter les sons d’un spectacle de

façon amplifiée, en changeant le mode de sélection sur les prothèses auditives des

personnes malentendantes. Elle est applicable aux lieux culturels et peut ne pas avoir

été conçue au départ de la fabrication du bâtiment...

PRENDRE EN COMPTE L’ECLAIRAGE pour les personnes sourdes. Cela facilite la

communication en permettant de lire sur les lèvres plus facilement pour certaines

personnes qui en sont capable et une bonne visibilité pour la LSF. Ceci se heurte

parfois aux contraintes techniques des spectacles (salles obscures) ou les expositions

(conservations des œuvres)

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Etude sur l’accès des personnes sourdes à la culture

CRé – www.rayondecrits.fr

28

2. SENSIBILISER ET FORMER LES PERSONNELS A L’ACCUEIL DES PUBLICS

SOURDS

METTRE EN PLACE UN REFERENT 22 pour l’accueil du public sourd.

PREVOIR LE RECOURS A DES INTERPRETES EN LSF, mais aussi des médiateurs et guides

sourds, dans le cadre d’actions de médiation culturelle et dans certains cas à des

codeurs LPC23,

PREVOIR DES ACTIONS DE SENSIBILISATION DE L’ENSEMBLE DES PERSONNELS au contact

des publics (médiateurs, agents d’accueil et sécurité, ouvreuse etc.) pour leur

permettre de mieux prendre en compte les besoins spécifiques et d’acquérir les

bases de la communication avec une personne sourde.

3. RENDRE ACCESSIBLES LES CONTENUS ARTISTIQUES ET CULTURELS

Les solutions doivent être adaptées aux différents types d’œuvres artistiques (théâtre

avec sur titrages, musique ou chanson, œuvre plastiques, etc.)

PROPOSER DES CAFES SIGNES 24 dans les lieux culturels pour favoriser les échanges,

les rencontres et la transmission des informations (coût estimatif de 2 000€ par rdv,

35 participants, 2 intervenants, 4h d’intervention + temps de préparation – conçue

par CRé – Compagnie Rayon d’écrits, à Cergy).

GENERALISER LE SOUS-TITRAGE TEXTUEL (sous réserves d’équipements techniques et

des choix artistiques).

PROPOSER UNE TRADUCTION EN LSF (vidéo)

DEPLOYER LE VISIOGUIDE qui est un appareil numérique portable qui diffuse des

séquences vidéo de commentaires d’expositions en langue des signes et d’un sous-

titrage. Le visio-guide peut être utilisé comme aide à la visite dans nombre de lieux

culturels (Château de Versailles, Le Carreau, Cergy : exposition R. Doisneau avec CRé).

LANCER DES VIDEOS PAR FLASHCODES. Ce dispositif permet, par un simple flash depuis

un smart phone de renvoyer à un contenu en ligne (traduction LSF). Son utilisation

22

Personne maîtrisant la LSF et sensibilisé à la question sourde. 23

Langage Parlé Complété : code manuel autour du visage complété de la lecture labiale, adapté aux phonèmes de la

langue française. 24

Lieux de rencontres entre sourds et entendants, locuteurs ou non de la LSF, afin d’échanger, partager, se rencontrer et

se découvrir.

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Etude sur l’accès des personnes sourdes à la culture

CRé – www.rayondecrits.fr

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semble extrêmement pertinente car 63% des sondés possèdent un smart phone (via

l’application Handitag). Ceci est développé par exemple par Bookbeo :

DEVELOPPER LA VISIO-INTERPRETATION qui repose sur le même principe que la

visioconférence, permettant de dialoguer et transmettre des documents à un

interlocuteur distant, par le biais d’un interprète traduisant en temps réel la

conversation.

4. METTRE EN PLACE UNE COMMUNICATION EXTERNE EN S’APPUYANT SUR

DES RELAIS INSTITUTIONNELS AU SEIN DES COLLECTIVITES TERRITORIALES ET

DES ASSOCIATIONS

UTILISER TOUS LES RELAIS LOCAUX (associations de personnes sourdes, centres de

ressources spécialisés, institutions d’accueil des secteurs sanitaires, et services d’aide

et de soins à domicile) et MDPH25 pour relayer l’information.

S’APPUYER SUR LA PRESSE SPECIALISEE : Déclic, Info-Fax des sourds, Websourd,

Sourds.net, Art pi !, Deaf-France etc.

COORDONNER TOUS LES VECTEURS DE COMMUNICATION traditionnels : pictogrammes

sur les affiches, relations presse, radios locales et WebTV, etc.

UTILISER DES FLYERS ET DOCUMENTATIONS ADAPTES en précisant l’accessibilité (sous-

titrage, LSF…), en recourant à des pictogrammes et en précisant systématiquement

un contact mail sur tous les supports.

CONCEVOIR UN SITE INTERNET PROPOSANT UNE ENTREE SPECIFIQUE PAR TYPE DE

HANDICAP pour un accès adapté aux informations. Beaucoup de personnes sourdes

rencontrent des difficultés de lecture, allant de la non maitrise à l’aptitude partielle.

La traduction des contenus par des vidéos en LSF est l’une des solutions à privilégier.

Le site Web sourd est un exemple en la matière : www.websourd.org.

25

MDPH : Maisons Départementales pour les Personnes Handicapées

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Etude sur l’accès des personnes sourdes à la culture

CRé – www.rayondecrits.fr

30

5. INTEGRER DES USAGERS OU UN COLLABORATEUR HANDICAPE

RENFORCER SES CHANCES DE REUSSITE : on sait que les premiers moments d’une

intégration déterminent souvent sa réussite dans la durée.

IL EST DONC ESSENTIEL DE PREPARER L’ARRIVEE DE LA PERSONNE en définissant ses

besoins de compensation et en les mettant en œuvre, autant que possible avant

l’arrivée.

LA COMPENSATION MISE EN ŒUVRE DOIT ETRE PERCUE, COMPRISE ET ACCEPTEE par le

collectif comme la réduction d’un désavantage, et non comme une faveur, c’est

pourquoi la question de la sensibilisation de l’équipe est importante.

CE N’EST PAS LA VISIBILITE DU HANDICAP QUI COMPTE mais la visibilité des

compensations mises en œuvres

LE FAIT DE SYSTEMATISER LA DEMARCHE DE SENSIBILISATION PERMET D’EVITER DE

STIGMATISER ceux qui la solliciteraient, et de la rendre plus naturelle dans la

structure.26

26

Le handicap en entreprise : contrainte ou opportunité ? Guy TISSERAND - Editions PEARSON

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Etude sur l’accès des personnes sourdes à la culture

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31

INFORMATIONS DES DISPOSITIFS TECHNIQUES D’ACCESSIBILITE

Flashcode vidéo (Bookbéo)

Permet par simple flash depuis un Smartphone de renvoyer à un contenu en ligne. Dans la

mesure où 63% des sourds disposent d’un Smartphone, flasher un QR code à côté d’une

œuvre renverrait directement à une explication vidéo en LSF.

Coût de la création d’un QR valable un an : 400 € environ

Coût de la création d’une QR code vidéo avec gestion autonome : environ 2000€ (Beobox).

Vélotypie (Société Système RISP à Caen)

Permet un sous-titrage en direct.

Coût de la prestation à distance via une ligne ADSL pour 1 h : 300 €

(de Cergy, Val d’Oise)

Coût de la prestation d’une conférence sur place pour 1 heure : 400 € TTC (à Cergy, frais

d’hébergement pour le transcripteur si la conférence a lieu après 20h).

Boucle magnétique (Société AVITSAM)

Permet par transmission magnétique de capter les sons d’un spectacle de façon amplifiée,

en choisissant la position T sur les prothèses auditives. Un amplificateur correspond à

chaque salle, selon la forme et la disposition.

Coût du double-amplificateur pour le théâtre de Grenoble : 2000 € environ + coût de la

pose.

Application iPad

Conçue par Signes de sens (Lille) : en LSF, sonorisée et sous-titrée, elle est dédiée aux

enfants et notamment utilisée au musée du Quai Branly à Paris : 75 000 €.

Visio guides

Conçue par CRé – Compagnie Rayon d’écrits (Cergy) : en LSF, sous-titrée, elle est dédiée aux

enfants et adultes pour accompagner l’exposition sur DOISNEAU : 2 500€ (coût pour 10

photos).

Vidéos en LSF pour présenter les expositions

Grand écran placé à l’entrée de chaque exposition présentant une synthèse des textes de

l’exposition en LSF, sonorisée et sous-titrée : 3 500 €.

Visites en LSF

Visites guidées en LSF et visites contées bilingues (Quai Branly).

Une visite par trimestre.

Facture globale des sociétés de conférenciers ; ainsi le coût ne peut être déterminé.

Visites en LPC

Visites en LPC avec un codeur qui se place à côté du conférencier lors de la visite. Une visite

par semestre. Coût de la prestation : 170€ de l’heure pour un codeur.

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Etude sur l’accès des personnes sourdes à la culture

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32

Conclusion

* * * * L’un des préalables à toute ouverture à la singularité est la confiance. Confiance dans la

structure à évoluer, innover, expérimenter, faire évoluer sa propre culture. Confiance du

porteur de projet, du recruteur encouragé et rassuré par sa hiérarchie. Confiance dans la

personne recrutée ou dans le public invité, dont la différence ne doit occulter ni les

motivations, ni les compétences, ni les droits à bénéficier d’un accès plein et entier à la

culture comme à tous les domaines (éducation, santé…) auquel aspire un citoyen à part

entière.

Malgré l’absence criante de moyens et d’actions que révèle cette étude, sur le territoire du

Val d’Oise en matière d’accès à la culture des personnes sourdes, en 2013, les responsables

de centres culturels ayant rempli le questionnaire pensent que leur équipe est sensible à la

problématique de l’accès des personnes sourdes à la culture.

La majorité des structures se disent intéressées par des outils concrets permettant une

meilleure accessibilité des personnes sourdes à la culture, cependant le manque de budget

est bien souvent une entrave. Il faut tout d’abord penser l’accessibilité de manière globale,

c’est à dire non seulement adapter le cadre bâti mais aussi les contenus, les informations et

ainsi procéder à une planification concrète de la mise en accessibilité. Un des points de

départ reste de sensibiliser les structures culturelles.

Mais le combat pour la reconnaissance à part entière de la Langue des Signes Française est

loin d’être terminé. En effet, dans cette étude nous parlons de l’accès à la culture par

rapport à l’offre proposée par les centres culturels. Or, la culture c’est aussi la base d’une

société, ce qui créé du lien, et très peu d’informations sont diffusées en LSF. Les personnes

sourdes subissent un manque d’accès au savoir de manière générale. Ceci est dans un

premier temps dû à un manque d’accès à la LSF chez les enfants sourds. Après cent ans

d’interdiction de la LSF dans notre pays, il est encore très difficile de la favoriser et la faire

reconnaitre aux yeux des politiques et de la population française. Ainsi, le nombre minime

de classes bilingues sur le territoire afflige l’évolution de ces enfants en terme d’éducation.

Seulement 5 à 10% des jeunes sourds ont accès à ces classes. La LSF se doit d’être enseignée

à sa population légitime et l’enseignement se doit d’être effectué dans leur langue.

Il existe une charte nationale du droit des enfants sourds27 qui rappelle les engagements de

la loi de 2005 et demande la mise en application d’un enseignement en langue des signes et

avec le français à l’écrit permettant le libre choix d’une éducation en LSF. Les établissements

qui accueillent les enfants sourds dépendent toujours du Ministère de la Santé et non de

l’Education Nationale, ce qui interroge sur la notion d’éducation ou de rééducation. Le

27

http://www.avaaz.org/fr/petition/Charte_LSF_pour_les_enfants_sourds

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Etude sur l’accès des personnes sourdes à la culture

CRé – www.rayondecrits.fr

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Gouvernement doit reconnaître que s’il y a un choix entre 2 types d’éducation et de

scolarisation, l’offre éducative doit correspondre à chacun des deux.

La volonté de soigner à tout prix la « déficience auditive » est un véritable frein à l’accès à la

culture : l’effort est consacré à la rééducation de l’ouïe et à l’oralité plus qu’à l’accès au

savoir alors que la culture sourde est riche de son histoire et de sa langue.

L’accès à la LSF est donc l’un des premiers défis… C’est ainsi que l’on évitera l’exclusion de

ces futurs adultes.

Enfin, lorsque nous nous parlons ici d’accessibilité à la culture, il va sans dire que nous

faisons référence à la culture entendante.

Il ne faut pourtant pas oublier que la culture « Pi-sourde » ou « typiquement-sourde » existe!

La création de l’International Visual Theater à Paris en 1976 en est l’exemple le plus

pertinent, où artistes sourds et public sourd se rencontrent et développent ensemble leur

culture. LANGUE ne va pas sans CULTURE. La LSF est la langue des sourds. Les sourds ont

donc leur propre culture.

SI L’ON NE PEUT CHANGER LE MONDE, ON PEUT PARTICIPER A AMELIORER SON

UNIVERS (extrait de Le handicap en entreprise : contrainte ou opportunité ? Guy TISSERAND) 28

« Chaque jour je mesure combien la connaissance est la clef du changement. Aujourd’hui, à

partir de mes expériences et des progrès réalisés, je suis persuadé que, malgré tout le travail

qu’il reste à accomplir et l’ouvrage qu’il faut sans cesse remettre sur le métier, la dynamique

est enclenchée. Elle va se poursuivre tant elle est porteuse de richesses, souvent

insoupçonnées, qui ne demandent qu’à être découvertes. Dans un monde sous pression, en

recherche permanente de repères, où l’individu, en quête de sens, s’interroge régulièrement

sur sa place et son rôle dans son environnement professionnel, les sujets du handicap, de la

diversité et de la singularité, formidables vecteurs d’innovation et de progrès social, peuvent

constituer une réponse efficace. Quelle personne, quelle structure et plus encore quelle

société peut aujourd’hui se priver d’une telle opportunité ? »

VERS UNE DISPARITION DES SITUATIONS DE HANDICAP : LA CONCEPTION

UNIVERSELLE (extrait de Handicap Culture ERP, employeurs, salariés - Les clés d’une culture de l’égalité) 29

« A l’initiative de la Délégation Interministérielle aux Personnes Handicapées une

définition commune à 14 ministères concernés a été donnée à l’accessibilité qui a fait

ensuite l’objet de déclinaisons : l’accessibilité permet l’autonomie et la participation des

personnes en situations de handicap, en réduisant voire en supprimant les discordances

entre leurs capacités, leurs besoins et leurs souhaits, d’une part, et les différentes

composantes physiques, organisationnelles et culturelles de leur environnement, d’autre

28

Le handicap en entreprise : contrainte ou opportunité ? Guy TISSERAND - Editions PEARSON 29

Handicap Culture ERP, employeurs, salariés - Les clés d’une culture de l’égalité - Editions La Scène

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Etude sur l’accès des personnes sourdes à la culture

CRé – www.rayondecrits.fr

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part. L’accessibilité requiert la mise en œuvre des éléments complémentaires, nécessaire à

toute personne en incapacité permanente ou temporaire pour se déplacer et accéder

librement et en sécurité au cadre de vie ainsi qu’à tous les lieux et services, produits et

activités. La société en s’inscrivant dans cette démarche d’accessibilité, fait progresser

également la qualité de vie de tous ses membres. »

La conception universelle est une intervention sur les environnements, les produits et les

services visant à ce que tous, y compris les générations suivantes, et sans égard à l’âge, aux

capacités et aux origines culturelles puissent participer à la vie de nos sociétés.30

Selon l’Organisation des Nations Unies (ONU), on entend par conception universelle…

« (…) la conception de produits, de programmes, et de services qui puissent être

utilisés par tous, dans toute la mesure du possible, sans nécessiter ni adaptions, ni

conception spéciale. Cela n’exclut pas les appareils et accessoires fonctionnels pour

des catégories particulières de personnes en situations de handicap, là où ils sont

nécessaires.

Les 3 principes de la conception universelle :

- Elle ne repose pas uniquement sur la notion d’adaptation des lieux

physiques ;

- Elle vise à éliminer toutes les barrières qui peuvent limiter une personne dans

l’accomplissement des ses activités quotidiennes ;

- Elle repose sur le fait que tout citoyen doit pouvoir avoir accès à l’ensemble

des services offerts à la population, et ce, dans tous les domaines

d’activités. » 31

Un dernier mot

« Rien ne remplacera jamais le naturel, la simplicité et la volonté de communiquer

pleinement et sans retenue avec l’autre. Parlez librement et ne vous interdisez ni ne

regrettez d’user de mots comme «regarder », « voir », face à une personne déficiente

visuelle, « marcher » ou « courir » devant une personne en fauteuil roulant et donc

« écouter » ou « entendre » avec une personne ayant une déficience auditive. Evitez en

revanche d’utiliser des expressions comme « infirme », « souffrir d’un handicap », dites

plutôt « une personne en situation de handicap » et non « un handicapé ». Maintenant que

vous avez lu ceci, il vous reste à le mettre en pratique.

30

Fondation Design For All 31

Travaux de l’association québécoise APHRSP – Association des Personnes Handicapées de la Rive Sud-Ouest

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Etude sur l’accès des personnes sourdes à la culture

CRé – www.rayondecrits.fr

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Si votre lieu travaille à l’égalité d’accès, d’usage et de qualité, il ne pourra accueillir de public

bénéficiaire si tout autour rien n’est adapté, accessible… Entourez-vous, mobilisez,

coordonnez…

Et puis, toutes ces mesures, si elles ne sont pas possibles pour des raisons économique ou

logistiques, peuvent être satisfaites autrement, par un simple geste bien souvent. N’assistez

pas la personne, mettez tout en œuvre pour qu’elle soit la plus autonome possible. Le

handicap est une rencontre avec l’autre, sa fragilité, la solidarité. Il n’est pas question de

prendre en charge mais de « prendre en compte » (Pascal Parsat)

Citation extraite de l’ouvrage Handicap Culture ERP , employeurs, salariés - Les clés d’une culture de l’égalité - Editions La Scène

« Pensez à rester vous même, comme vous l’êtes, avec vos imperfections et vos points

forts. Utilisez le mot « SI ». Si cette personne pouvait assister au spectacle et non si elle

pouvait entendre, que pourrait elle en apprécier ?

Cela veut dire que vous ne vous positionnez plus comme un(e) assistant(e), mais comme un

partenaire. Ne passez pas au delà de la rencontre sans oser vraiment poser des questions. Il

n’y a pas de mauvaise question, et il n’y a aucune obligation pour la personne en face de

répondre, si la question de fait ne lui semble pas pertinente. Tout est question de bon sens.

Interrogez-vous sans jugement, ni projection, car souvent nous sommes en tant que

« personnes valides » dans la projection de nos peurs et de nos fantasmes, ce qui revient à

se dire que cette situation est terrible ou insupportable, au cas où nous serions touchés par

tel ou tel handicap. Alors que pour une personne qui vit cela au quotidien, elle ne se sent pas

autrement ! Pensez à la question qu’un enfant pourrait poser à un autre enfant « qu’est-ce

que ça fait de ne pas entendre ? ». L’enfant sourd répondrait certainement « je ne sais pas,

je suis né avec, et pour toi qu’est ce que ça fait d’entendre ? » dans toute circonstance, si je

n’entendais pas, si je ne voyais pas, si je ne marchais pas… que pourrais-je apprécier de cette

offre culturelle ? Le plus petit dénominateur commun, c’est l’envie d’être avec les autres et

de partager.

Si je pouvais faire en sorte de créer du lien et des passerelles, peut-être pourrais-je avoir le

soutien d’une personne elle même en situation de handicap pour vérifier avec elle, quelques

pistes de travail. Si quelque chose pouvait nous rapprocher, et si je pouvais faire moi-même

quelque chose qui permette à l’autre d’être plus autonome, comment pourrais-je œuvrer ?

C’est le premier pas vers un mieux vivre ensemble au cœur de ce qui se nomme l’Humanité.

C’est à dire vivre au cœur de la Cité – au sens de l’agora – et pas seulement vivre au sein de

la société dite de communication. Et ce, précisément au moment même où nous évitons le

contact dans les yeux, rivés sur nos prolongements technologiques -avec les réseaux sociaux,

les Smartphones, et autres webcams- mécaniques subtiles pour garder le contact tout en

évitant d’être ensemble dans un même espace. C’est ainsi que l’espace de la représentation

et du spectacle vivant est encore un de ces lieux ou l’on apprend à vivre et vibrer ensemble.

Ouvrons-nous aux autres, c’est un enjeu et une force pour notre avenir. »

Colombe Barsacq

Page 36: L’ACCES DES PESONNES SOUDES A LA CULTURE

Etude sur l’accès des personnes sourdes à la culture

CRé – www.rayondecrits.fr

36

Sources

* * * * agefiph.fr

annuaire-interpretes-lsf.org

bookbeo.com

clicanoo.re

developpement-durable-gouv.fr

eidcpep95.org

fnsf.org

insee.fr

legifrance.gouv.fr

rayondecrits.fr

sourds.waliceo.fr

unisda.org

unapeda.asso.fr

websourd.org

Emission l’Œil et la Main, France 5, Quelque chose me cloche, 18.11.13

Bibliographie et contacts

Etude préalable à la création d’un service médicosocial spécialisé pour les personnes déficientes

sensorielles dans le Val d’Oise (décembre 2004)

DALLE-NAZEBI S., Récits d'une violence ordinaire. Les sourds au travail, dans Développement

humain, handicap et changement social, Vol. 18, n°2 : L'expérience de la surdité, p.43-58, en

ligne : http://www.ripph.qc.ca/node/1042 (2009)

GILLOT D., Le Droit des sourds : 115 propositions, rapport au Premier Ministre (1998)

KOMPANY S. L’accessibilité des lieux de travail – Nouvelle règlementations pour les employeurs et

pour les travailleurs handicapés – Editions du puits fleuri (septembre 2012)

PARODE M., Les devenus sourds : un monde à part, Université Pierre Mendès France, Grenoble

(2008)

STRADELLA C., Accessibilité et Culture Sourde, La prise en compte de la Culture Sourde dans la

médiation des arts visuels envers les Sourds, et leur relation aux œuvres, Université de Cergy-

Pontoise (2012-2013)

TISSERAND G., Le handicap en entreprise : contrainte ou opportunité ? - Editions PEARSON

CENTRE RECHERCHE THEATRE HANDICAP, Handicap Culture ERP, employeurs, salariés - Les clés

d’une culture de l’égalité - Editions La Scène

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Etude sur l’accès des personnes sourdes à la culture

CRé – www.rayondecrits.fr

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Annexes

* * * * CRé – Compagnie Rayon d’écrits

Handi-Capacités

Affiche conçue pour l’étude (dernière de couverture)

CRé – Compagnie Rayon d’écrits est une association portée par Colombe Barsacq (directrice

de production des projets) et Michel Trillot (responsable artistique et metteur en scène),

fondée en 1997 dans le Val d’Oise. Compagnie professionnelle de spectacle vivant, elle crée

et produit des œuvres artistiques et évènements culturels pour tous publics, en Français et

LSF en travaillant notamment avec des artistes sourds.

Depuis sa création, CRé a produit une 15zaine de formes artistiques. En décembre 2009, elle

a produit Eaux vives et terres nues, le premier spectacle de chanson française entièrement

bilingue en France, avec Colombe au chant et Bachir Saïfi au chantsigne. Depuis 2012,

Isabelle Voizeux32 est artiste associée de CRé et participe à la réflexion de la compagnie sur

la mixité entre sourds et entendants et le bilinguisme ; elle a participé à la création des deux

spectacles au répertoire Elle a tant... et Au-delà du Silence ! et pilote le Café Noétomalalie,

évènement bimensuel itinérant sur la communauté d’agglomération de Cergy Pontoise.

CRé a le désir de faire connaître son travail sur la mixité des publics et l’accès à la culture

pour tous. Aller à la rencontre de nouveaux publics, amener le spectacle vivant là où il n’est

pas, aider à le transmettre et à créer des passerelles, c’est ce qui nous mobilise. Nous

invitons ainsi les différents publics à découvrir et à partager notre démarche de création et

notre réflexion sur la cohésion d’un public mixte mêlant sourds et entendants. Ainsi nous

repensons le processus de création et portons un regard nouveau sur les mondes des Arts et

du silence.

Découvrez l’équipe, les projets artistiques et les propositions de stages et formations sur

www.rayondecrits.fr

32

Artiste, comédienne sourde et présentatrice de l’émission l’Œil et la Main sur France 5.

Page 38: L’ACCES DES PESONNES SOUDES A LA CULTURE

Etude sur l’accès des personnes sourdes à la culture

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Nous remercions pour leur soutien :

Le Groupe ESSEC a fondé son développement sur l’humanisme, la responsabilité, la diversité,

l’innovation et l’excellence. Depuis 2008, il est engagé dans une nouvelle démarche

d’intégration du handicap et des personnes en situation de handicap à travers la Mission

Handi-Capacités de l'ESSEC, qui s'inscrit dans la démarche "Management & Society".

La Mission Handi-Capacités ESSEC s’engage pour :

• L’insertion des personnes handicapées en tant qu’étudiants en formation initiale,

participants en formation permanente, professeurs et collaborateurs ;

• L’accessibilité des campus et des activités qui s’y déroulent (locaux, cours, concours, sites

internet, événements etc.) ;

• La prise en compte des différentes formes de handicap au sein des programmes de

formation pour sensibiliser et responsabiliser les futurs cadres et dirigeants.

Pour plus d'informations

handicap.essec.edu

Page 39: L’ACCES DES PESONNES SOUDES A LA CULTURE

Etude sur l’accès des personnes sourdes à la culture

CRé – www.rayondecrits.fr

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Contact

VOUS SOUHAITEZ DES PRECISIONS, UNE MISE EN RESEAU

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Ecrivez-nous :

[email protected]

Ou appel/sms :

06 80 05 51 36

Nous pouvons vous joindre sur simple demande les questionnaires utilisés pour l’enquête

afin de les diffuser autour de vous et participer ensemble à questionner le territoire sur la

question de l’accès à la culture du public sourd ou malentendant.

* * * * www.rayondecrits.fr * * * *

Siège social : Maison des Touleuses - 20 place des Touleuses - 95000 Cergy

Correspondance : 11 rue de la Prairie - 95000 Cergy

N° Siret : 420 111 304 00028 - Code APE : 9001Z

Licence entrepreneur de spectacle : cat N°2 – 104 66 84

Agréments Jeunesse et Sports et Entreprise Solidaire

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L’affiche créée pour l’étude