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Université de la Méditerranée (Aix-Marseille II) Ecole de Journalisme et de Communication de Marseille Master Professionnel « Communication et contenus numériques » Spécialité Communication Mémoire de fin d’études L’arrivée de l’internaute producteur au sein de l’industrie musicale par Blandine Prigent Sous la direction de Dominique Liautard Année universitaire 2009-2010

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Université de la Méditerranée (Aix-Marseille II)Ecole de Journalisme et de Communication de Marseille

Master Professionnel « Communication et contenus numériques »Spécialité Communication

Mémoire de fin d’études

L’arrivée de l’internaute producteur ausein de l’industrie musicale

par

Blandine Prigent

Sous la direction deDominique Liautard

Année universitaire 2009-2010

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Remerciements

Je tiens à remercier les personnes qui m’ont aidée à mener à bien ce mémoire, à savoir Armelle

Béraudy, Guillaume Rostain et David Doro pour leur disponibilité et le temps qu’ils ont accordé à mes

entretiens, ainsi que Maxime et Thierry de Cara. Je remercie aussi Stefan de Live In Marseille pour

tous ses bons conseils et contacts dans le milieu musical et Alexandre Joux, professeur à l’EJCM, dont

les cours passionnants m’ont été utiles pour structurer ce travail.

Je remercie également Mme Liautard pour avoir accepté de diriger mon mémoire.

« L’art est un intensificateur de vie. (…) La grande œuvre donne un sentiment de joie et

la sensation d’accroître votre être. » Vassily Kandinsky

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Sommaire

Introduction

I. Fonctionnement de l’industrie musicale : anciens et nouveaux modèles

1. Fonctionnement « traditionnel » de l’industrie musicale

2. Les conséquences de l’arrivée d’internet et de la numérisation : les innovations et les nouveaux

modèles

II. Contexte et distanciation théorique : l’arrivée de l’internaute producteur à l’heure

de l’industrie de masse et du web 2.0

1. Industrie culturelle, culture de masse et société de consommation : la consommation de masse

2. L’arrivée internet et le web 2.0 ou web social

III. Vers une évolution et un rééquilibrage des rôles au sein de l’industrie musicale

1. Synthèse des entretiens

2. Analyse des résultats et réponse au problème

Conclusion

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Introduction

ans tous les cas, réjouissons-nous, la musique et la création ne se sont jamais aussi bien

portées. Les talents n’ont jamais trouvé autant d’opportunités de se faire entendre ». Même s’il

peut faire sourire, le constat d’Olivier Abécassis, directeur général adjoint de TF1, prend tout

son sens actuellement. L’intérêt pour la musique n’a en effet jamais été aussi fort : le nombre

d’artistes et de pages MySpace explosent et les nouvelles technologies (développement du haut débit,

streaming, téléchargement, web 2.0, blogs, podcasts…) ont facilité la diffusion des contenus et permis

aux internautes de pouvoir écouter de la musique et de découvrir des artistes bien plus simplement

qu’auparavant..

La musique irrigue, de plus, la quasi-totalité des cultures et des strates de la société et est considérée

comme « la plus fondamentale des activités de loisirs ». Selon une étude de Midemnet de 2010, elle

serait même le passe-temps numéro un dans le monde. 63% des personnes interrogées se déclarent

passionnées de musique. Source d’une véritable appétence, la musique est également le premier

contenu culturel à être téléchargé. Et c’est bien là que le bât blesse.

Tout au long de l’histoire, l’industrie musicale a évolué, faisant place à de nouveaux formats et de

nouveaux dispositifs présentant à chaque fois de nouvelles possibilités et de nouveaux enjeux. Le

magnétophone, la cassette, le vinyl ou encore le disque sont autant de technologies qui se sont

succédé au siècle dernier et qui ont poussé les majors à s’adapter. Alors que l’industrie semblait avoir

trouvé son rythme de croisière avec le CD, les années 2000 ont constitué un tournant majeur et une

nouvelle étape de cette évolution avec le développement -couplée au développement de l’accès haut

débit à internet- du format de compression audio MP3. Ce dernier permet de diviser par douze la

taille d’un fichier audio classique et donc d’atteindre un taux de compression important sans pour

autant altérer la qualité du son. Deuxième caractéristique, ce format – qui est de fait une technologie

très controversée- permet le téléchargement ou phénomène de peer-to-peer, à savoir l’échange et le

partage gratuit et rapide de fichiers musical de « pair à pair », d’un ordinateur vers un autre, et cela

en passant outre la rémunération des œuvres et le respect des droits d’auteurs.

L’arrivée de ce nouveau procédé a eu des conséquences très néfastes pour l’industrie musicale : le

téléchargement illégal a explosé sur des sites tels que Kazaa ou E-mule et les ventes de CD ont chuté

de 50 % en 5 ans. Le chiffre d'affaire du marché de la musique en France a baissé de 63,5% entre

2003 et 2009. Les ventes de singles ont dégringolé de 95% et les ventes d'albums de 60%.1 Les

revenus mondiaux de la musique enregistrée ont encore décliné de 7 % en 2009 a récemment indiqué

l’IFPI 2.

1 Source : www.chartsinfrance.net2 L‘International Federation of the Phonographic Industry (IFPI) est un organisme internationalchargé de faire respecter les droits d'auteur de l'industrie du disque dans le monde entier

D

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Les majors et labels se sont retrouvés en difficulté, diabolisant le peer-to-peer et tardant à réagir

avant de passer à l’offensive en décidant de composer avec internet et de proposer de nouvelles

façons de vendre de la musique.

Ainsi, les offres de musique légales se sont développées sur internet, via des sites comme I-Tunes,

Spotify, Virgin Media, ou encore le lancement pour mobile de MusicStation sur la plate-forme Android.

Le « pack de 20 titres » issu des majors étant aujourd'hui en effet obsolète et les usages et attentes

des utilisateurs ayant évolué vers une logique de « picorage » à l'unité, elles ont aussi proposé des

prix attractifs (0, 99 cts la chanson).

Des plate-forme d’écoute gratuite et légale comme Deezer ou Music Me ont aussi vu le jour, tout

comme des sites tels que Myspace, habituant peu à peu les internautes et le public à la notion de

gratuité. Celles-ci sont aussi peu rémunératrices pour les artistes (30 centimes pour l’artiste pour 20

clics sur une chanson).

Le gouvernement français s’est parallèlement saisi du dossier et a tenté de légiférer et d’encadrer ces

pratiques illégales grâce à la loi Hadopi. Malheureusement, celle-ci se révèle peu efficace aujourd’hui.

Il semblerait en effet, selon une étude de l'Université de Rennes, que le piratage ait même augmenté

après la promulgation de la loi Hadopi, la part des utilisateurs des réseaux P2P ayant baissé mais le

nombre d’ utilisateurs des techniques de piratage ignorées par Hadopi ayant au contraire augmenté.

La vente en ligne a progressé ces dernières années3. Bien qu’elle soit prometteuse, elle ne permet

toujours pas en France de compenser le déclin du CD. 85 % des ventes de musique enregistrée

proviennent encore du CD.

Ne vendant plus assez de disques, les maisons de disques se sont donc vues contraintes de diversifier

leurs activités pour obtenir des revenus supplémentaires, déplaçant ainsi leur cœur de métier. Editeur,

organisateur de concert, patron de salle, manager….De maisons de disques, elles semblent se

muer en « maisons de musique » ou maisons d’artistes. Elles mènent une stratégie de

diversification ou « stratégie 360 ° ».

Pour composer avec les nouveaux usages de consommation, et notamment ceux des jeunes, elles

proposent donc aujourd’hui de nombreux contenus et services sur mobiles : sonneries de téléphone,

logos / fonds d’écrans, vidéos…

3 “Digital sales grew strongly in many markets”, IFPI, rapport mars 2010

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Elles tirent aussi des gains de l’utilisation de leur morceaux pour des films, des séries TV, des jeux

vidéos (procédé appelé « synchronisation »), de partenariats avec des marques (« endorsement ») ou

encore de produits dérivés (merchandising, coffrets collector…)

Enfin, les artistes qui négligeaient auparavant les concerts au profit du CD ont dû revoir leur priorités.

Renouer avec son public est aujourd’hui une véritable nécessité et certaines stars comme Madonna

ont par exemple décidé de quitter leur major (Warner Music) pour rejoindre un organisateur de

concerts (Live Nation), estimant pouvoir réaliser de meilleurs bénéfices et améliorer son image.

Production de qualité accessible à tous, relations plus directes entre les musiciens et leurs publics

grâce à des sites web spécialisés … Le processus de numérisation transforme la filière industrielle et

plonge la création artistique dans un espace nouveau. Il semble donc que de façon générale, la

nouvelle donne soit dans la fidélisation et le rapprochement entre l’artiste et ses fans, les

frontières s’étant considérablement réduites.

Radiohead a par exemple misé sur le direct-to-consumer en mettant en ligne gratuitement son dernier

album « In Rainbows » sur internet. Prince a, quant à lui, distribué son CD « Planet Earth »

gratuitement avec le tabloïd britannique 'Mail on Sunday'. Janet Jackson, enfin, a incité ses fans à

s’impliquer dans la création de la pochette de son dernier album. Autant d’exemples qui montrent que

l’industrie musicale semble avoir à se réinventer, ou du moins à innover et à proposer de nouveaux

modèles.

Peut-on continuer à vendre de la musique, et comment ? Que devient le rôle des labels et maisons de

disque dans ce nouvel espace ? Ont-ils toujours leur place ?

Certains tentent d’y répondre, via notamment la création de labels communautaires, à l’image de

Sellaband ou de My Major Company en France. Dans la lignée du web 2.0, au sein duquel l’internaute

devient de plus en plus acteur et non consommateur (« consom’acteur »), ces sites proposent aux

internautes de miser sur des artistes qu’ils trouvent prometteurs et de les produire littéralement, en

les finançant.

Alors, qu’en est-il de ces nouveaux sites, comment fonctionnent-ils, qui sont-ils ? L’arrivée de la figure

de l’internaute producteur change-t-elle réellement les modes de fonctionnement de l’industrie

musicale « traditionnelle » ?

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I. Fonctionnement de l’industrie musicale : anciens et nouveaux

modèles

L’industrie musicale est un domaine qui a fortement évolué ces dernières années, principalement du

fait de la numérisation et de l’arrivée d’internet. Il convient de décrire son fonctionnement traditionnel

ainsi que les bouleversements qu’il a subis et les nouveaux modèles qui ont été créés.

1. Fonctionnement « traditionnel » de l’industrie musicale

1.1. Les artistes

Un musicien est une personne qui joue de la musique. Le compositeur écrit la musique (il peut

être les deux). Celui qui prête sa voix à la chanson est le chanteur ou l’interprète. Celui qui écrit

les paroles est l’auteur ou le parolier. En cumulant tout cela, il devient auteur-compositeur-

interprète

L’artiste ou le groupe crée des chansons qu’il regroupe dans un CD. Il peut décider de

s’autoproduire, en créant sa propre société d’édition et en supportant seul les frais de

fabrication et de promotion, signant éventuellement un contrat de distribution avec une société

qualifiée. Il peut aussi, cas le plus fréquent, s’allier à une maison de disque.

1.2. Le disque

1.2.1. L’évolution technique

L’enregistrement est une des techniques qui a connu le plus d’évolutions au cours de son histoire.

Il a vu le jour au XIX è siècle grâce à Thomas Edison qui inventa le phonographe. L’enregistrement

magnétique a ensuite été créé, puis le magnétophone, la cassette, le CD vinyle, le disque numérique

et le mini-CD. Le format MP3 (Mpeg-1 Audio Layer 3) apparut quant à lui en 1987. Il s’agit de la

« seconde révolution de l’industrie de la musique » : il permet de diviser par douze la taille d’un fichier

audio classique et donc d’atteindre un taux de compression important sans pour autant altérer la

qualité du son. La fin du XXème siècle marque donc le début de l’ère du numérique. L’industrie de la

musique est celle qui a connu le plus de changements et de bouleversements avec l’arrivée d’internet.

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1.2.2. Les trois étapes du disque

La réalisation d’un disque se résume en trois étapes :

� la production : Les labels financent la production et versent souvent à ce stade des avances

aux groupes sous contrat.

� l’édition phonographique

- la fabrication : il s’agit du pressage. Certaines entreprises disposent de leurs propres

installations de production, tandis que d’autres sous-traitent. Les majors utilisent leur réseau

mondial de pressage de CD pour réaliser des économies d’échelle.

- la distribution : il s’agit de la distribution commerciale d’un disque. Les distributeurs

achètent un produit manufacturé prêt à entrer dans le circuit de vente. Ils travaillent

généralement avec les gros détaillants qui achètent eux-mêmes aux grossistes les albums

pour lesquels il existe une demande. Les distributeurs prendront une marge sur le prix de gros.

Les distributeurs ont en général des répertoires de prédilection ou des spécialités précises.

Les points de vente peuvent être de différentes natures et de différentes tailles. Les

« méga » détaillants comme Best Buy et Wal-Mart sont souvent les moins chers, les prix

pratiqués étant souvent inférieurs aux prix facturés pour un CD, car ils acquièrent des quantités

énormes. Au centre se trouvent des disquaires comme HMV, dont les prix sont supérieurs aux

prix catalogue. Il existe également des disquaires indépendants, des sous-distributeurs

se chargeant souvent des petits comptes. Les petits disquaires indépendants subissent un

important déclin dû à l’essor des grands distributeurs de musique non spécialisés, au

développement d’Internet et à la baisse des ventes de disques depuis 1999.

L'espace alloué et le positionnement dans les rayonnages sont souvent essentiels au succès

dans un système de distribution sur supports exclusivement physiques.

A chacune de ces trois étapes correspondent des contrats et des engagements financiers spécifiques.

Les maisons de disques peuvent produire et éditer (pour certaines, distribuer) : les artistes

signent dans ce cas un contrat d’enregistrement dit « exclusif ». Elles peuvent aussi uniquement

éditer : le producteur réalisera donc la « bande mère » et signera un contrat dit « de licence » avec la

maison de disques qui prendra en charge la fabrication, la promotion et la distribution du CD.

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1.3. Description détaillée de la chaîne de production éditoriale

La réalisation d’un disque suit différentes étapes au sein de la « chaîne de création de valeur » :

production, fabrication mais aussi distribution, promotion et vente. Voici la description en détails de

cette chaîne de valeur.

Schéma récapitulant la chaîne de production traditionnelle

L’enregistrement : le service artistique

La matière première de tout album réside bien sûr dans les chansons. Cette étape de création est

l’apanage de l’artiste mais il peut être conseillé, si nécessaire, par le directeur artistique

Le directeur artistique budgétise la production de l'album incluant la rémunération du réalisateur,

des ingénieurs, des musiciens, la location des studios, les déplacements et hébergements...

Le réalisateur est le chef d’orchestre du projet, il est l’intermédiaire entre l’artiste, le directeur

artistique et l’arrangeur. Il est choisi en concertation avec le label et va faire en sorte de donner à

l’album la couleur voulue par l’artiste et la maison de disques. Il peut donner des conseils quant au

choix des musiciens, des studios, du matériel et autres éléments nécessaires à la réalisation du projet.

Il apporte en quelque sorte sa « touche personnelle ».

La maquette est une version non définitive d'un titre que l'on enregistre. Un tri est ensuite effectué

parmi les chansons et l’on choisit un nombre de titres pour l'album, généralement une dizaine

Lors de l’enregistrement en studio, l'ingénieur du son enregistre les différents éléments (voix, choeurs,

basse, guitare, batterie…) sur plusieurs "pistes » qui seront ensuite mixées et masterisées. La version

finale n'aura plus que 2 pistes : la piste gauche et la piste droite (pour convenir aux hauts parleurs et

casques audio)..

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Trouver un univers à l’artiste et le promouvoir : le service marketing

Le service marketing va ensuite mettre en place une stratégie autour de l’artiste afin de lui définir un

univers, un positionnement et de déterminer son public et les cibles que l’on veut toucher.

Le chef de projet planifie les tâches pour préparer la sortie du disque et budgétise les différents

coûts (la séance photo, la création d'un logo, le tournage d'un clip, le showcase de l'artiste, le choix et

le coût des attachés de presse...)

L'artwork est l'ensemble des éléments visuels (photos, logos, typos, habillage) qui constitueront le

livret de l'album. Le chef de projet lance un appel d’offres aux agences pour le réaliser. Une fois

l'agence et le photographe choisis en concertation avec l'artiste, on réalise la séance photo. Tous les

éléments sont ensuite assemblés et retravaillés afin de créer la pochette du futur album.

Le tournage du clip

Il faut trouver un concept, un réalisateur et déterminer un budget.. Il faut généralement attendre que

le single ait un peu de succès ou de retour dans les médias pour en réaliser un.

Les attachés de presse ont la difficile tâche de faire découvrir l’artiste aux médias et de les

convaincre de parler d’eux ou encore d’inciter les programmateurs radios à inclure le single dans leur

“playlist”.

Il existe des attachés de presse spécialisés en radio, en TV ou en presse écrite.

La promotion Radio

Il faut prendre en compte le fait que radio a une ligne éditoriale précise selon la cible qu’elle vise et le

public qui l’écoute. Ceci définit le format des chansons qu'elle diffuse.

Des études de marché sont régulièrement menées auprès de panels d'auditeurs type, afin de tester la

popularité d’une chanson et de voir les réactions des auditeurs. Il existe des radios dites "musicales"

(NRJ, Fun, RTL2, Virgin, Scoop, Hitwest, etc) et des radios "généralistes" (RTL, Europe 1, France

Inter, etc.), ces dernières diffusant moins de musique et ayant donc des playlists plus restreintes,

donc des choix plus limités.

Exemple de positionnement

NRJ : Hit Only Top 40 / Fun Radio : Groove and Dance / France Bleu : Adulte

Le programmateur est le seul juge, il peut arbitrairement décider de faire entrer ou non le titre

dans sa playlist.

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Airplayradio et classement Yacast

L'Airplay est le classement des titres les plus diffusés en radio. Il est mesuré par Yacast, une société

privée, qui recense en direct les passages de titres en radio et qui établit les classements. Il constitue

un indicateur clé dans l'industrie du disque car il donne une idée de la notoriété d'un titre, qui aidera à

définir la suite des événements (investissements, clip, date de sortie, etc.).

La promotion TV

L'attaché de presse TV va à la rencontre du programmateur TV. Il n'existe aujourd'hui qu'un nombre

restreint de TV musicales diffusant des clips : les chaines du groupe M6 (M6, W9, M6 Music, Black,

Rock, Club), MCM, MTV (et les chaînes du groupe MTV), FunTV, Trace TV et quelques autres chaînes

indépendantes. Les programmateurs TV ont généralement tendance à attendre un minimum de

diffusion radio avant de rentrer un clip en playlist sur leur TV.

La promotion Internet

La promotion Internet peut être payante (achat d'espace, de bannières…) ou gratuite (blogs, buzz,

réseaux sociaux : Myspace, Facebook, Twitter…). Elle est généralement traitée en interne par le label,

bien que certaines agences se spécialisent de plus en plus dans ce créneau.

Le live / showcase

Le live est un autre moyen de faire connaître un artiste. Le label peut organiser un showcase ou mini-

concert donné par l'artiste à l'occasion de la sortie de son album. On y invite généralement médias et

journalistes. Hors de la période de sortie, les concerts sont aussi un bon moyen de faire connaître les

artistes, surtout pour les musiques de scène (rock, folk…)

L'achat d'espace publicitaire

L'achat d'espace publicitaire en radio, en TV ou en presse est le dernier maillon du plan marketing . Il

est nécessaire d’attendre d’avoir déjà une petite notoriété ou visibilité pour ce faire. Dans ce cas, le

label établit une stratégie d'achat d'espace dans les montants et les médias les plus adaptés. Le

directeur marketing garde un œil très attentif sur le taux marketing, qui indique le rapport entre les

investissements effectués sur un artiste et les recettes encaissées sur ce même artiste. Il permet de

calculer la rentabilité d'un projet et de mieux évaluer le risque d'un investissement supplémentaire.

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1.4. Précis sur quelques métiers incontournables

L’éditeur s’occupe avant tout de la promotion de l’œuvre et de la gestion des droits d’auteurs. Il gère

les droits d’un catalogue de chansons cédées pour différentes exploitations

Parmi les grandes maisons d’édition figurent EMI Music Publishing, Warner-Chappell Music et

Sony/ATV Music Publishing, bien qu’il existe des milliers d’autres éditeurs.

Le producteur En français, il est celui qui finance l'enregistrement et les tâches nécessaires à la

réalisation d'un disque. L’influence du terme anglais « producer » est de plus en plus présent : il

désigne plus le réalisateur artistique, qui va aider l'artiste à la production sonore du disque.

Les commerciaux négocient avec les magasins de disques : des petits détaillants aux hypermarchés

en passant par les magasins spécialisés. Ils rendent leurs artistes visibles dans les bacs et cherchent à

obtenir le meilleur prix à ses clients.

Le manager / agent artistique gère la carrière des artistes, négocie ses contrats, et peut le

conseiller dans ses différents choix professionnels (image, carrière, gestion de leur agenda, relations

média, promo, publicité…)

Le tourneur organise les tournées des artistes qu’il a sous contrat. Sa tâche est de préparer

matériellement et techniquement les tournées pour les proposer aux promoteurs locaux.

D’autres métiers sont aussi en liens : promoteurs de concerts, gestionnaires de salle de

spectacles, marchands de disques, créateurs de sites internet …

1.5. Les acteurs « traditionnels »

1.5.1. L’industrie culturelle

Définition : Au niveau économique, les industries culturelles sont l'ensemble des entreprises

produisant des biens ou services selon des méthodes industrielles. Cela comprend le livre, la

musique, le cinéma, la télévision, la radio ou encore les jeux vidéo et le tourisme de

masse. Plusieurs innovations techniques et technologiques ont mené à ce que ces industries puissent

reproduire et diffuser en masse leurs produits.

Aujourd’hui, il s’agit d’un des secteurs les plus dynamiques de l’économie et du commerce

international : certaines estimations situent la part des industries culturelles à sept points du PIB

mondial. La « culture » se vend bien et elle rapporte de plus en plus à ceux qui dominent le marché.

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Ces industries sont de plus en plus concentrées autour de quelques « majors » (musique, cinéma,

édition…), entreprises internationales occupant des positions de leaders dans leur secteur d'activité.

Le terme a été créé dans les années 1920 pour désigner les conglomérats de radiodiffusion et de

production cinématographique qui dominaient aux États-Unis.

Selon les auteurs du Marché des étoiles, culture populaire et mondialisation, (Grant et Wood) « 6 à 8

entreprises » seraient « propriétaires de 75% de la production d'informations et de loisirs ».

Les majors ou grands groupes de médias

On compte environ 8 grands groupes de médias dans le monde. Walt Disney Company (46,9 milliards

de dollars), Time Warner (37,8 milliards) et News Corporation (85 milliards) sont actuellement les trois

plus grands groupes mondiaux de médias.

� Walt Disney Company (États-Unis) est un entreprise présente dès ses débuts dans le

secteur du cinéma (Buena Vista Entertainment) ainsi que la télévision (Disney-ABC Television

Group), les parcs d'attractions (Walt Disney Parks and Resorts)

� Time Warner, (Etats-Unis) est né de la fusion entre une major historique (Time Warner) et

une entreprise du secteur des nouvelles technologies (AOL). Ils sont présents dans le cinéma

(Warner Bros Pictures, New Line Cinema), la télévision (CNN), la presse (Time Inc.), réseau et

logiciels (AOL)

� News Corporation (Australie, États-Unis) est un groupe issu du monde de la presse (The

Times, The Sun) présent aussi dans la télévision (Fox Broadcasting Company, BSkyB), le

cinéma (Twentieth Century Fox), l’édition (Harper & Collins).

Existent aussi :

� Bertelsmann (Allemagne) : édition (Random House), presse (RTL Group)

� Vivendi (France) : télécommunications (SFR, Neuf Cegetel), télévision (Groupe Canal Plus),

jeux vidéo (Blizzard Entertainment, Sierra Entertainment), édition musicale (Universal Music

Group)

� Viacom (États-Unis) : cinéma (Paramount Pictures Inc.), télévision (MTV Networks)

� Sony Corporation (Japon) : électronique, cinéma (Gaumont, Columbia, TriStar, Motion

Picture Group), télévision (Sony Pictures Television Group), jeux vidéo (Sony Computer

Entertainment), musique (Sony Music Entertainment, ex-Columbia)

� Pearson (Royaume-Uni) : édition (livres scolaires et parascolaires, Penguin Books), presse

(The Financial Times)

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Développement de la société de loisirs et appétence pour ces industries : De nombreux

facteurs contribuent au développement des industries culturelles et de loisirs aujourd’hui. Du côté de

la demande, la population a augmenté, de même que le temps de loisir disponible et les revenus des

ménages.

Du côté de l’offre, il se développe et se commercialise de nouveaux contenus, de nouvelles

technologies et de nouveaux formats, grâce à la numérisation et à l’arrivée d’internet par

exemple.

1.5.2. Les majors : les « big four »

Aujourd’hui, quatre majors (« the big four ») règnent sur le marché mondial du disque et se partagent

l’essentiel de ses revenus, à savoir 70 ou 72% de parts de marché. Ces quatre majors sont Universal

Music Group, Warner Music, EMI Recorded Music et Sony / BMG Entertainment. Elles intègrent les

fonctions de producteur et de distributeur de musique.

Universal Music Group est une division du groupe de média français Vivendi Universal.

Il est le numéro un mondial de la musique avec une part de

marché de 28.7%. Il a été créé en 1998 lorsque le groupe

Seagram a fusionné les activités de PolyGram et de MCA Music

Entertainment Group. Depuis 2000, le groupe appartient à

Vivendi dont le siège est à Paris.

Pionnier de la distribution numérique de musique, UMG propose le plus grand catalogue mondial sous

forme numérique et offre un large éventail de services innovants.

Sony / BMG Entertainment (21, 5 %)

Crée en 1987, Sony BMG a été renommé Sony Music en

octobre 2008 après le rachat des parts de Bertelsmann par

Sony. Le groupe possède de nombreux labels, parmi lesquels

Columbia Records ou EPIC Records. Son siège social se trouve à New York.

EMI Group (13,4%)

EMI Group a été créé en mars 1931 sous le nom de Electric and Musical

Industries, par la fusion de la filiale britannique de Columbia Records et de la

Gramophone Company/HMV. Pendant presque 50 ans, EMI a été la plus

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importante compagnie de disques du monde. Son siège social se trouve à Londres.

Warner Music Group (11,3%)

Warner Music Group (anciennement WEA Records) est un

groupe d'édition de disques qui appartient à un

consortium dirigé par Edgar Bronfman Jr. Son siège social

se trouve à New York.

1.5.3. L’impératif de rentabilité de ces grands groupes

Le marché du disque est donc un marché d’ « oligopoles à frange », c'est-à-dire que quelques grosses

entreprises possèdent la majorité des parts de marché. Autour d’elles gravite un grand nombre de

petites structures.

Une major est toujours un ensemble de sociétés filiales rattachées à une société-mère qui pilote cet

ensemble. L’une des particularités de ces majors est qu’elles sont régies par des logiques financières,

c'est-à-dire qu’elles appartiennent à de grands groupes exigeant des résultats financiers à

court terme. La rentabilité prime et ce système ne permet pas d’investir sur un artiste à long terme,

ni de privilégier le lancement ou la découverte d’artistes.

« Une major ne sait pas faire du développement, déclare Armelle Béraudy, ancienne chargée de

production chez Sony. Elle récupère des artistes déjà semi-pros la plupart du temps. Une major a ses

limites, elle travaille dans son intérêt, pour gagner de l’argent. Au niveau de la sélection des artistes,

le service artistique est censé être en charge des écoutes des maquettes mais c’est rare. Les artistes

sont parfois repérés lors de concerts mais cela relève souvent du hasard. En réalité, c’est très souvent

du « copinage » et de nombreux rendez-vous d’écoute sont fixés sur ce schéma. »

Une autre caractéristique des majors est qu’elle dispose, de fait, d’un pouvoir de levier vertical

avec une grosse influence dans le secteur de la promotion, de la diffusion, de la distribution et sur le

positionnement et la tarification des produits.

Elles transforment les productions artistiques en produits de consommation qu’elles doivent valoriser

et rendre rentables. Cela nécessite souvent d’importants investissements de départ. Ainsi, l’on peut

dire qu’une maison de disque est performante si un artiste sur dix dans lequel elle a investi lui

rapporte de l'argent. Elles financent les nouveaux artistes sur les profits réalisés par d’autres.

Les majors disposent souvent d’un réseau mondial de filiales en mesure de gérer les ventes, la

distribution et le marketing.

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1.5.4. Les labels indépendants

Ils ont vu le jour et se fortement développés aux Etats-Unis vers 1920. Ils étaient plus

particulièrement liés à la musique noire. La crise des années 30 les a fait plonger mais ils renaquirent

vers 1950, période où les majors régnaient sur la chaîne de création de valeur et verrouillaient le

système. Des radios « indépendantes », telle que Broadcast Music Incorporated (BMI) virent le jour,

diffusant des sons « nouveaux » et alternatifs. Elles rencontrèrent un succès grandissant, couplé à

l’arrivée du rock’n’roll grâce à des artistes noirs tels que Little Richard, Bo Diddley ou Chuck Berry. Le

mouvement hippie, la contre-culture et autres mouvements apparurent par la suite et des labels

indépendants importants comme Island Records et Virgin Records furent alors créés.

Les labels indépendants représentent aujourd’hui environ 28% du marché (Naîve Record, Pias…).

Ils sont très nombreux et jouent souvent le rôle d'intermédiaire entre les majors et les artistes

émergents.

Ils se sont régulièrement révélés être initiateurs de nouveaux styles de musique, se spécialisant sur

des « niches » mal suivies par les grands groupes. Ils ont donc un rôle de « dénicheur » ou de

« défricheur » de talents. Les grandes compagnies de disques s’appuient souvent sur ces petits

labels pour identifier et valoriser de nouveaux talents, soit en leur débauchant des artistes soit en les

rachetant.

Les petites entreprises ont de plus en plus de difficultés à faire vivre leur modèle économique. Elles

manquent de réseaux de distribution, étape souvent reprise par les grands labels. Peu de labels

indépendants génèrent un chiffre d’affaires conséquent et ils ont généralement un nombre de salariés

peu important.

Malgré leur plus grande flexibilité économique et leur proximité avec les artistes, ils ne peuvent

investir dans de vastes catalogues et sont par conséquent dans l’impossibilité de diversifier les risques,

même s’ils sont parfois aidés par de grandes compagnies de disques qui coopèrent avec eux et leur

permettent d’utiliser leurs moyens de distribution.

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2. Les conséquences de l’arrivée d’internet et de la numérisation : les

innovations et les nouveaux modèles

Le nombre d’internautes ne cesse d’augmenter pour atteindre bientôt 25 % de la population

mondiale, soit près d'1,5 milliard d'utilisateurs et 800 millions supplémentaires pourraient bien arriver

d'ici les quatre ans à venir selon Forrester4. L’arrivée et le développement d’Internet a fortement

bouleversé les pratiques et les habitudes des jeunes notamment (développement des réseaux sociaux,

web 2.0…). Il a aussi remis en cause certains modèles et offert de nouvelles possibilités et

technologies, comme le crowdfounding, qui se développe de plus en plus actuellement.

2.1. L’arrivée d’internet et le crowdfounding

Le « crowdfunding » est une approche permettant de financer des projets en faisant appel aux dons

d’un grand nombre de personnes, qui peuvent être des particuliers (internautes, réseaux de contact,

amis, etc.). Une fois cumulés, ces investissements permettront de réaliser des projets qui auraient

probablement eu des difficultés à recevoir un financement traditionnel de la part de banques ou

d’investisseurs... Grâce aux réseaux sociaux et aux communautés en ligne, il devient aujourd'hui facile

et peu coûteux de rejoindre un grand nombre de personnes potentiellement intéressées par l’idée de

soutenir des projets.

Le crowdfounding connaît de nombreuses applications aujourd’hui dans le domaine de la musique, du

cinéma (« touscoprod », « peopleforcinema »), du spectacle vivant (« my show must go on ») voire

même pour la BD ou le roman… Il est même possible de miser sur des joueurs de tennis et de

soutenir leur carrière (« Tennis angels ») !

2.2. Les nouveaux acteurs dans la chaîne de production et de distribution

Le développement de l’accès haut débit a modifié la chaîne de valeurs et le modèle économique

traditionnel de l’industrie musicale. De nouveaux modes de consommation de musique et de recettes

sont apparus, impliquant l’arrivée et l’émergence de nouveaux acteurs.

82% de la musique enregistrée se vend encore sur CD5. La vente directe de musique de l’artiste au

consommateur reste donc pour l’instant encore rare. Mais la diversité des nouvelles interfaces de

vente et d’écoute à la disposition des consommateurs est considérable : boutiques de musique en

ligne des majors, streaming (Deezer, Spotify, ILike, Music Me), Youtube, Myspace, boutiques de

musique en ligne d’acteurs tiers (par exemple, Apple, Napster), fournisseurs d’accès à internet et

portails de contenus (Neuf, Alice…), fournisseurs de contenus pour mobiles et même kiosques en dur

4 Groupe d’études, de statistiques et de prospective américain5 Chiffre annoncé début mai 2010 par le SNEP, Syndicat National de l'édition Phonographique

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(machines installées par exemple chez Starbucks qui permettent le téléchargement de musique par les

consommateurs).

Alors que les modèles traditionnels de distribution basés sur le CD faisaient intervenir un nombre

relativement limité d’acteurs, la distribution numérique mobilise une plus grande diversité de

prestataires et d’acteurs. Les majors et éditeurs conservent jusqu’à présent leurs rôles créatifs

dans la valorisation des enregistrements sonores. Le département artistique – bien que cette activité

passe de plus en plus par Internet – reste encore pour l’essentiel aux mains des labels.

Mais dans tous ces cas où la musique est vendue en ligne, la structure de vente de gros et de détail

traditionnelle perd son importance. Ils ne sont plus le dernier maillon jusqu’au consommateur,

les CD préenregistrés étant remplacés par les téléchargements et flux numériques.

La musique est maintenant vendue sous licence à différents groupements de disquaires en ligne et

fournisseurs de contenus pour mobiles, pour être distribuée ensuite sous format numérique aux

consommateurs. La mise en place d’une boutique en ligne nécessite par exemple la création et la

production de contenus, la numérisation de ces contenus, l’obtention des droits, la mise en place

technique, les systèmes de gestion des droits, la sécurisation des systèmes de paiement et des

réseaux de livraison.

Il faut donc compter avec de nouveaux intervenants de plus en plus actifs dans le secteur de la

musique : les vendeurs de matériel ou fabricants de lecteurs audio nomades (Apple, Dell, etc.), les

Fournisseurs d’Accès à Internet (FAI), les fournisseurs de logiciels et les solutions de gestion des

droits numériques (DRM : Microsoft, Real Networks), les sociétés de cartes de crédit (American

Express)….

2.3. Les nouveaux labels : les labels communautaires ou participatifs

2.3.1. Le principe : le pionnier Sellaband

Les frontières entre internautes et artistes se sont considérablement réduites avec internet. Il est

aujourd’hui possible d’écouter le MySpace d’un artiste ou sa chaîne Youtube, de lui laisser des

messages et de communiquer directement avec lui.

Pionnier en la matière, le site Sellaband est allé plus loin en 2006 en offrant la possibilité aux

internautes de soutenir un artiste en misant en ligne des parts sur ce dernier et donc en le finançant.

Ils deviennent ainsi producteurs ou co-producteurs et peuvent accéder à certains avantages

(invitations places de concerts etc…) ou s’impliquer dans le processus de valorisation mais aussi

espérer faire des bénéfices.

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Plus précisément, Sellaband propose à

l’internaute de devenir un « Believer » convaincu

par un artiste sur lequel il peut « miser » des

parts de 10 $. Il faut atteindre les 50.000 $ (donc 5.000 parts) pour pouvoir enregistrer son album en

studio.

L’originalité de ce site est que l’album est vendu sur SellaBand à la fois sur les pages des artistes et

des Believer. Si l’article est vendu sur la page d’un Believer, celui-ci touche une commission. Chaque

Believer détenant plusieurs parts peut décider du nombre d’exemplaires qu’il veut recevoir chez lui, et

du nombre qu’il laissera en vente sur le site.

Plusieurs labels communautaires ont depuis vu le jour dans le monde : My Major Company et

BuzzmyBand en France, Akamusic en Belgique… Tour d’horizon de ces nouveaux labels.

2.3.2. Focus sur deux labels français

Le pionner français : My Major Company , une « maison de disque nouvelle génération »

« Toi + moi + eux (…).. A deux, à mille, tout est réalisable » … Grégoire, toi + moi

Le concept

My Major Company a été le premier label

communautaire à voir le jour en France en

décembre 2007. Il se présente comme une

« maison de disque nouvelle génération » qui

relie les artistes, les internautes et professionnels

de la musique. Il aurait « tous les avantages

d'une maison de disques en termes de

professionnalisme, de réseau, de pouvoir commercial, budgétaire, promotionnel. »

Ses membres fondateurs (Anthony Marciano, Michaël Goldman (fils de Jean-Jacques), Sévan Barsikian

et Simon Istolainen) sont en effet issus du milieu de l’industrie musicale. Ils ont travaillé à la direction

artistique de BMG puis créé leur propre structure indépendante, Bamago, spécialisée dans le

songplugging (Noah, Amel Bent, Lâam...). Ils sont aussi à l’origine du buzz Max Boublil. L’équipe

compte aujourd’hui une quinzaine de salariés, bénéficiant du savoir-faire, du carnet d’adresses et du

réseau de ses membres fondateurs.

En théorie, il n’y a pas de sélection préalable, tout le monde peut s’inscrire sur le site. Il existe tout de

même la « Sélection du label » qui permet de mettre en avant sur le site les quelques artistes ayant

attiré plus particulièrement l'attention des Directeurs Artistiques du label. La « Sélection des

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producteurs » permet quant à elle de valoriser des artistes qui viennent de convaincre un grand

nombre d'internautes-producteurs (500 au minimum) ou qui ont connu une forte progression de leur

jauge dernièrement.

Le logo

Le logo se veut plutôt sobre. Le sigle My Major Company est écrit en lettre blanches (« My major »

en gras) sur un fond noir, signe d’élégance et de sérieux. Une « major company » est une maison de

disque en anglais, le « my » indique donc l’appropriation du concept par le public, par moi, par

n’importe qui. Le public devient acteur et se saisit du « pouvoir », représenté également par la

couronne trônant sur le M du Major. Elle symbolise aussi la richesse : le quidam peut faire fortune en

s’impliquant dans ce nouveau modèle. Enfin, le slogan « Music is your business », en vert, insiste sur

l’aspect financier (« business ») mais renforce encore une fois l’idée que les internautes ont un rôle à

jouer et que la « carte blanche » leur est donnée (« your »). La connotation anglophone et

internationale est également à souligner.

La rémunération

My Major Company propose une rémunération de 20% pour les artistes

(20 % des recettes nettes, «garantie de toucher entre 1€ et 1€50 par

CD vendu »), 30 % pour les internautes, 35 % pour le distributeur et 15

% pour My Major Company. Ces 15% servent à couvrir les coûts de

publicité et de communication ainsi que les frais de fonctionnement

(salaires, bureaux, infrastructure technique).

La part des recettes nettes qui est réservée aux internautes est

échelonnée par palier :

- Entre 0€ et 250 000€ de recettes nettes: 40%;

- Entre 250 000€ et 500 000€ de recettes nettes: 30%;

- Au-delà de 500 000€ de recettes nettes: 20%;

Dans leurs prévisions, « aux alentours de 30.000 ventes, l’on récupère sa mise, 60.000 on la double,

120.000, on la quadruple. »

Une part vaut 10 euros et il faut récolter minimum 100 000 euros pour voir son disque produit et sa

carrière lancée. Les 100 000€ sont intégralement consacrés à la production puis à la promotion de

l’album : location de studios et de matériel d'enregistrement, cachets des artistes, des musiciens, du

réalisateur, tournage du clip, recrutement d'un(e) ou plusieurs attaché(e)s de presse pour la

promotion, achat d'espaces publicitaires, etc.

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Il est à noter que les internautes peuvent enlever leurs parts ou les rediriger vers d’autres s’ils le

souhaitent tant que le montant n’est pas atteint. Il n’y a pas de limite dans le temps pour lever des

fonds. « Ce qui est rassurant pour un artiste, dans notre modèle, c'est que sa production est

indépendante du résultat de ses ventes », note Michael Goldman. Et les gains que nous pourrions

réaliser sur les revenus des ventes seront réinvestis dans le développement des artistes, en circuit

fermé ». Pour éviter la spéculation ou les trop grosses pertes, la mise maximale a récemment été

ramenée de 7 000 à 1 000 euros.

My Major Company a un contrat avec Warner Music France pour la distribution physique et digitale

des albums.

Le fonctionnement du site : description globale

Le site propose différents onglets : « home » = accueil, « artistes », « producteurs », « news », « en

savoir plus ».

Captures d’écran

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Sur la page d’accueil, un gros encart met en valeur les artistes récemment produits ou avec une

actualité « chaude ». Un player se déclenche automatiquement et fait entendre de la musique à

l’internaute. On trouve aussi l’encart « sélection du label », « artistes produits », « agenda »,

« dernières mises », des vidéos. L’espace de connexion personnel se trouve à droite (Boîte de

réception, ma page, mon compte, mes amis, commandes, paramètres, panier…)

Le site fonctionne sur un double espace : l’Espace public qui permet à n’importe qui de découvrir un

artiste, sa biographie, ses photos, d’écouter ses morceaux, vidéos, de connaître ses influences, ses

fans etc… On y trouve aussi le listing de ses producteurs, les artistes similaires, ses amis et parfois un

avis de My Major Company.

Il est possible de recommander un artiste mais aussi de lui écrire un message ou de laisser des

commentaires en bas de sa page (annonce, vidéos, remerciements…). Cette dernière pratique est très

développée sur le site, l’interactivité est très présente ainsi que le « buzz ».

L’espace producteur est réservé aux internautes ayant misé sur un artiste. Il permet de donner son

avis sur la pochette de l’album, les visuels à envoyer à la presse, le nombre et les versions de

chansons à inclure dans l’album, le scénario du clip, le ou les single(s) a présenter aux radios, etc….

La liste et les sollicitations peuvent varier selon l’artiste. L’internaute peut aussi en théorie proposer

des créations pour la pochette, des suggestions, ou même assurer la promotion de l’artiste au niveau

local ou sur le web, en concertation avec l’équipe de My Major Company.

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Si l'album de l’artiste est mis en vente, la rubrique "Tableau de bord" apparait. Elle permet de

consulter les chiffres des ventes de son album, le décompte des passages radio et TV pour chacun de

ses singles, le top IFOP pour la période en cours, des infos sur son actualité. Il est aussi possible

d’avoir accès en exclusivité à une partie de son agenda : entrée en studio, interviews ou reportages

TV et radio, interviews dans la presse, tournages de clips, séances photo….

Le lien entre artiste et public/ internaute est vraiment développé et encouragé. Pour l’artiste, cela

constitue une « grosse communauté de fans, sur laquelle s’appuyer pendant tout le processus de

production et de promotion de l’album. Cette communauté représente un soutien unique, un réservoir

d’idées qui peut permettre de dégager des tendances ».

My Major Company a bénéficié d’une grande exposition médiatique et d’un gros « buzz » car il était le

premier label communautaire à produire un artiste : Grégoire, qui a connu un fort succès. La jeune

Joyce Jonathan est en train de percer et de suivre le même chemin que Grégoire.

Focus sur Grégoire

Grégoire est le premier artiste à avoir été produit par My Major

Company. Il s’inscrit vers décembre 2007 sur le site et récolte en

cinq mois la somme de 70 000 euros, répartis sur 347 producteurs

(490 parts.)

Son premier album sort le 22 septembre 2008 ."Toi + Moi"

comporte 12 titres dont 4 singles ont été sortis (Toi+Moi, Rue des

Etoiles, Ta main et Nuages). Avec 800 000 exemplaires écoulés, il

devient disque de diamant et est l’artiste français qui a vendu le

plus d'albums en 2009.

Le chanteur a fait appel à ses producteurs non seulement pour la conception de son clip, mais aussi

pour le tournage. Une quarantaine d'entre eux y ont fait de la figuration en chantant sa chanson en

play-back.

My Major Company : un succès confirmé

A ce jour, My Major Company compte 70 000 producteurs et 8 573 artistes à produire. Il a lancé le 2

avril les soirées My Major Company by Showcase, en partenariat avec une célèbre salle parisienne. Le

succès de ce label est confirmé par les derniers chiffres annoncés dans un récent communiqué :

- La société est rentable en 2009 et comte aujourd’hui 18 collaborateurs

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- 1 000 000 d’albums ont été vendus depuis le lancement

- Plus de 2 millions d’euros ont été investis sur plus de 8 000 artistes par plus de 70 000 inscrits

- Joyce Jonathan est déjà disque d’or

- My Major Company France va se développer dans toute l’Europe. Paul René Albertini (ex PDG France

de Sony Music puis PDG Europe de Warner) et Stéphane Courbit ont rejoint l'aventure.

Aujourd’hui, 24 artistes ont été produits, les derniers artistes en date sont David Parienti le 30 janvier

2010, Juno le 26 février 2010, Licia Chery le 4 mars 2010.

Buzz My Band : « le label participatif et communautaire de production musicale »

La passion de la musique

Né en 2007, Buzz My band est un concurrent français

de My Major Company. « On en avait assez de voir les

Directeurs Artistiques des maisons de disque agir

comme des videurs de boîtes de nuit, raconte

Guillaume Rostain, l’un des fondateurs. Ils décidaient qui pouvait faire de la musique ou non. Un soir,

à un concert j’ai vu un artiste tendre son chapeau pour récolter de l’argent pour financer son prochain

album. Cela a fait tilt dans ma tête : pourquoi ne le fait-il pas en ligne ? On créerait un site un peu

comme myspace où chacun se présenterait de façon sécurisée, une structure où on aurait un retour

sur investissement mais aussi une vraie relation avec l’artiste. »

C’est bien ici que réside l’objectif de Buzz My band : « être un haut parleur pour les artistes et

leur permettre d’appréhender le milieu de l’industrie musicale. Mais aussi provoquer une prise de

conscience chez les gens et redonner de la valeur à la musique. En étant impliqué de cette façon, ils

n’ont plus de raison de pirater par exemple.

« On a tous été le premier à découvrir un artiste un jour, on est tous des découvreurs »

insiste Guillaume Rostain.

Ses quatre membres fondateurs (David Doro, Guillaume Rostain, Claudia Da Silva, Pierre de Baecque )

-le label compte aujourd’hui trois salariés- viennent du milieu de la télévision mais ont décidé de créer

le site par « passion pour la musique ». Buzz My Band insiste vraiment sur le coup de cœur. Il n’est

par exemple pas possible de retirer ou déplacer ses parts une fois que l’on a misé: « Nous voulions

que ce soit un vrai coup de coeur, un acte d’amour et pas uniquement de spéculation. », précise

David Doro. « Et l’artiste peut partir au bout d’un an s’il n’est pas satisfait, il n’est pas obligé de

rester ».

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Le fonctionnement du site

Le site se veut donc être une « plate-forme ouverte pour tous » et n’effectue pas de sélection

préalable. Il propose aussi toutefois une sélection des meilleurs artistes selon lui.(« onglet « comité de

sélection »). Le label sera bientôt distribué par Warner et organise aussi des dates comme

actuellement avec la tournée « Recycling tour ».

Sa principale originalité est de proposer deux formats : le format EP, allant jusqu’à 4 titres, ouvert à

tous (15 000 euros à récolter) et le format album (60 000 euros, après avoir rempli sa jauge sur un EP

et avoir convaincu le comité de conseillers artistiques par un projet artistique qui tient la route.)

Buzz My Band a récemment changé son nom, il s’appelait auparavant « No Major Musik ». Le site et

les pages ont globalement la même structure que My Major Company. Sur la page d’accueil on trouve

les onglets « accueil », « artistes », « producteurs », « vidéos », Buzz My Band » et « boutique ». Un

gros encart fait la promotion de la tournée de concerts, et l’on trouve les encarts « news », « activité

utilisateurs », « artistes produits », « partenaires », « concerts », « boutique », « comité de

sélection », un « music player », une publicité et la possibilité de s’identifier si l’on est inscrit.

La page artiste est à peu près la même que celle de My Major Company. Une petite jauge permet de

visualiser à quel stade sont financés les projets.

Buzz My Band donne le temps au projet de mûrir et aux artistes d’être prêts. Le label dispose de

nombreux partenariats ainsi que d’une batterie d’intervenants (réalisateurs, ingénieurs sons…) et

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d’un catalogue très large pour que l’artiste trouve celui qui lui correspond. BuzzMyBand laisse

également le label Roy utiliser sa plateforme pour récolter des sous (Mademoiselle K par exemple). Le

label n’a pas encore de gros succès grand public mais a produit jusqu’ici une vingtaine d’artistes. Il

vise véritablement à recréer du lien entre les artistes.

L’internaute a un accès direct à l’artiste via son espace producteur : il peut dialoguer et échanger avec

lui, avoir des mp3 inédits, des invitations à des concerts ou en backstage, recevoir des infos en avant

premières … Il s’agit d’une sorte de « fan club premium », selon David Doro.

Il propose de répartir les gains ainsi : 40% pour les artistes et 40% pour les internautes. Le modèle

économique est viable, le site se rémunère grâce à la publicité.

2.3.3. Les variantes

AKa Music : pas d’implication dans la chaîne éditoriale

Créé en mars 2008, le site propose deux types de production : le single à

15.000 € et l’album à 50.000€, l’internaute pouvant miser des parts de 5

euros. La répartition de la recette nette sera de 40% pour l’artiste, 40% pour

les producteurs et 20% pour Akamusic. Quelle que soit la somme misée,

l’internaute recevra un CD Collector signé. Chez Aka Music, l’internaute est

juste un actionnaire financier, il n’est pas impliqué dans la chaine éditoriale et dans le processus de

valorisation.

Produce My Live : produire un concert plutôt qu’un disque, en un temps limité

Le concept mise ici sur la production d’un concert à Paris et

non d’un single ou d’un album. A la suite de ce concert, un

CD et un DVD seront crées et mis en vente. La seconde

originalité est que l’artiste a une durée limitée pour être

produit, à savoir cinq mois pour récolter le montant, afin d’éviter qu’il n’attende éternellement. Si au

bout de ces cinq mois, il n’a pas récolté les fonds, l’équipe du site propose aux internautes d’autres

artistes sur lesquels déplacer leur mise. Enfin, lorsqu’on a misé sur un artiste, il est impossible de

déplacer de soi-même les sommes avant le temps limite fixé, afin d’éviter la volatilité et de protéger

les artistes. C’est l’un des rares sites à proposer cela.

Les parts sont de dix euros et il faut récolter 20 000 euros (production du concert, production du dvd

live et du cd live + remasterisation, répétitions, voyage, logement, nourriture….). Une part offre un

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titre exclusif de l’artiste, ainsi que le téléchargement live de l’artiste vidéo et audio s’il se produit, et un

pourcentage sur les revenus générés par cd et dvd. La rémunération est de 40 % pour l’artiste, 40%

pour l’internaute, 20% pour le site.

Il est à noter qu’il existe une véritable incitation à miser : les 50 premiers à mettre des parts sont

invités au concert, le 1er à investir 100 euros est invité au concert en backstage, le premier à investir

500 euros sera invité dans les studios de répétitions.

Slicethepie , un intermédiaire : l’artiste est libre de gérer la somme une fois récoltée

Slicethepie ne se considère pas comme un label mais comme un

intermédiaire.

Ici, une fois la barrière de production de 21.000 € franchie, l’argent est

livré directement aux musiciens qui sont libres de gérer à leur guise les

investissements. La seule condition est de ne pas mettre plus de 6 mois

à sortir l’album puis de le distribuer au minimum via le partenaire de

Slicethepie, TuneCore. Slicethepie jouera pendant ce temps bien sûr le rôle de conseiller (quel studio

choisir, quelle usine de pressage, etc.).. Il se sert des achats en pré-commande pour financer

l’enregistrement de l’album.

On ne demande pas aux fans de prendre des risques pour voir leur artiste produit, on leur demande

juste de voter et de pré-commander leur album - au pire, ils récupèrent leur argent si celui-ci n’aboutit

pas. Après, spécule qui en a envie.

Artistshare : la monétisation des privilèges de l’internaute producteur

Le concept d’Artistshare, c’est de monétiser les « privilèges » et

de les partager parmi le public selon une grille tarifaire établie.

Financer un artiste sur Artistshare pourra donc tout aussi bien

donner droit à un simple CD agrémenté de bonus vidéo qu’à un dîner en tête à tête avec l’artiste,

pour les plus grosses participations, ou à une composition dédicacée.

Il se focalise uniquement sur le registre jazz et ce n’est pas un hasard car Artistshare tente de

redonner de la valeur au CD en tant qu’objet de collection. Il exploite en quelque sorte la « fanitude ».

Mais le participant ne devient pas producteur du disque puisqu’il n’en perçoit pas les retombées. Son

implication est donc minimisée, on préfère le faire payer pour des sortes de « gadgets » de

collectionneur.

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All in my music, « place à la musique » : la possibilité d’être lancé par un single

Il est possible de miser des parts de 10 €, le crédit maximum étant de 1 000 €.

Tous les artistes s'inscrivent pour un album à 50 000 €, ils peuvent en plus

choisir l'"option single".

Si la direction artistique d'All In My Music considère que l’artiste possède un

tube parmi ses titres, elle lui propose l'enregistrement d'un single numérique

dès qu’il atteint 12 000 € euros. La réalisation du single ne stoppe pas les

mises qui continuent pour l'album.

Les internautes touchent 33% du revenu net des ventes et ont accès à des

avantages particuliers : informations sur l'actualité de l'artiste, places de

concert offertes pour les producteurs les plus importants, pseudo des co-

producteurs sur la pochette de l'album...Il peuvent aussi être sollicités pour donner leur avis.

Kisskissbankbank : une veille sur l’artiste

Le site effectue une sélection et propose des artistes déjà

soutenus par des sociétés de production. Lorsqu’un artiste

veut lancer un projet sur Kisskissbankbank, une période de

7 jours est imposée pour valider sa présence sur le site, afin de vérifier notamment l’historique, la

solidité et la crédibilité financière des producteurs ainsi que la conformité de leur proposition aux

conditions et à l’ « état d’esprit » du label. Des parts de 10€ donnent un accès exclusif à bon nombre

de privilèges : albums, places de concerts, inédits, backstages, aftershows, dédicaces, présence en

studios et aux répétitions, crédits dans les livrets, chansons sur mesure, reprises sur mesure,

featurings, dîners avec le management, rencontres avec les artistes, concerts à domicile, DJ sets à

domicile…

KisskissBankBank percevra une commission de 20% sur les montants investis dans les projets

d’artistes. Le site pense dans un avenir proche intervenir dans les domaines du « one man show »,

des spectacles et des films, des jeux vidéos…

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2.3.4. Recapitulatif

Site Financementdu site

Présélection desartistes

Part Privilèges pourl’investisseur

Barre deproduction

My MajorCompany 15 % des

revenusNon 10€ / part

Aperçu du processus de

création, avis sur les choix100.000€

SellabandPub + 30% des

revenusNon

10$ (7€) /

part

Aperçu du processus de

création, édition limitée du

CD

50.000$

(35.000€)

Buzz MyBandPublicité Non 0,80€ / part

Aperçu du processus de

création

15.000€ ou

60 000 €

Slicethepie 0,20£ (0,28€)

par morceau

vendu

Non5£ (7€) /

part

Aperçu du processus de

création, avis sur les choix

15.000£

(21.000 €)

Artistshare

Part sur les

ventes

Une

cinquanta

ine

d’artistes,

axés jazz

De 10

dollars à

des milliers,

selon forfait

choisi

Variable selon forfait Aucune

All in mymusic

Part sur les

ventes Non

Part de 10€

(crédit max

de 1 000 €)

Sollicitation possible de

l’artiste, infos régulières,

noms sur la pochette…

Option

single : 12 000

€ / album

50 000 €

Produce Mylive

20% site

Non 10 €

Aperçu processus création

selon somme misée/ Une

part =1 titre exclusif de

l’artiste,+ téléchargement

live de l’artiste vidéo et

audio

20 000 €

Kisskiss bankbank

20 % des

revenusOui 10 €

Accès exclusif + aperçu

processus création /

avantages, rencontres

artistes…

Cela dépend

des artistes

Aka music 20%

NonParts de 5

euros

CD Collector signé, pas

d’implication de

l’internaute

Single :15.000

€/Album :

50.000€

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30

Commentaire

On observe donc un engouement autour de la création de labels de ce type, une dizaine ayant été

fondée en quelques années. Le principe de base reste généralement le même mais l’on trouve des

variantes plus ou moins importantes. La rémunération change selon les sites, elles sont généralement

de 20 à 35% pour l'artiste, de 30 à 50% pour le label et de 30 à 35% pour les producteurs.

Les plafonds et mise à atteindre différent aussi, ainsi que le type de « biens » à produire (single,

albums, concerts).

L’internaute est plus ou moins sollicité selon les sites : il est parfois juste financeur, parfois

véritablement impliqué dans la chaîne éditoriale, en théorie du moins.

Certains sites semblent enfin plus protéger l’internaute, en interdisant par exemple les « démises » ou

en imposant un temps limité pour récolter les fonds.

Ces labels restent encore fragiles économiquement : nous n’avons pas évoqué Spidart, qui était un

autre label communautaire ayant fait faillite l’an dernier. Ces labels réussiront-ils tous à faire vivre leur

modèle et leur site ?

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31

2.3.5. Etude comparative

Artistes produits par une maison de

disques traditionnelle

Artistes produits par un label

communautaire

Sélection Major : Pas mal de copinage, sélection

au hasard dans un concert ou encore

récupération d’artistes déjà semi-pros

ou connus, ou à d’autres labels : pas de

travail de développement, filtrage et

sélection

Labels indépendants : travail de

recherche, de découverte de talents

via des concerts, des myspace.. coups

de cœur. Travail de développement

La plupart du temps pas de sélection pour

s’inscrire sur le site

Mais existence de précodés type « sélection

du label », My Major Company, ou « comité

de sélection », Buzz My Band )

Changement : le rapport avec le public est

plus direct

Financement La maison de disques produit

Pas de budget mais supérieurs à

100 000 euros souvent

Des internautes mises des parts et

deviennent donc producteurs et

actionnaires. Il faut composer avec un

nouvel acteur dans la répartition des gains

Le palier pour être produit varie selon les

sites, allant de 50 000 à 100 000 euros

Production Enregistrement album : service

artistique…

Les métiers et étapes sont les mêmes, il

faut aussi du professionnalisme, du réseau

et des contacts

Chaine de

valorisation/

de création

de valeur

Tout passe par la maison de disque.

Promo, relations presse etc .. : service

marketing

Différence majeure : l’internaute peut être

sollicité pour intervenir dans la chaîne de

création de valeur (donner son avis sur des

maquettes, visuels, sur le clip)… Il a droit à

des infos régulières (actu, chiffre des

ventes…) et a accès à certains privilèges

(invitations à des concerts, rencontres

artistes, noms sur la pochette …)

Distribution Numérique ou physique Numérique ou physique : les labels

communautaires s’allient parfois à une

major pour la distribution

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Analyse

Les similitudes

Le processus de création et les étapes restent les mêmes : production d’un CD, fabrication,

financement, promotion, puis tournées, concerts, passages TVS etc… Les acteurs semblent rester les

mêmes.

Les différences

Le rapport est plus direct entre les artistes et le public / les fans / consommateurs

Les internautes :

- sélectionnent / choisissent qui ils veulent financer

- ils peuvent retirer :

• des bénéfices : un internaute qui avait misé 6 000 euros en a gagné plus de 100 000 !

• des avantages : invitations, CDS, infos sur ventes et actus,…

• une implication dans la chaîne éditoriale : donner son avis sur pochettes, chansons,

clip, singles, faire de la promotion, poser des questions, suivre l’artiste et communiquer

directement avec lui, se prononcer sur ses idées etc..

Le problème retenu sous cette analyse

Le point majeur qui ressort de cette analyse est donc l’arrivée de l’internaute producteur au sein

de l’industrie musicale. Il devient actionnaire, conseiller, fan et peut intervenir dans la chaîne de

création de valeur.

Est-ce vraiment le cas, comment changent ces rapports, de quelle nature sont-ils,

qu’apportent-ils aux internautes producteurs et dans l’industrie musicale ?

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II.Contexte et distanciation théorique : l’arrivée de l’internaute

producteur à l’heure de l’industrie de masse et du web 2.0

1. Industrie culturelle, culture de masse et société de consommation : la

consommation de masse

L’arrivée de l’internaute producteur se fait dans un contexte bien particulier : celui de nos sociétés de

consommation et de loisirs, au sein desquelles les industries culturelles et majors ont un poids très

important. On observe une forte concentration autour d’un petit nombre de majors et la diffusion

s’effectue dans un contexte d’industrie de masse.

Parallèlement à cela, l’arrivée d’internet et la révolution numérique ont permis des innovations et

remis en cause certains schémas. L’internaute devient de plus en plus actif et se transforme en

« consommacteur ».

Il convient de resituer brièvement les différents courants de pensée autour des industries culturelles

et de la culture de masse, avant d’évoquer le concept de « pronétariat » développé par Joël de

Rosnay.

1.1 La société de consommation : Jean Baudrillard

Elle se développe véritablement à partir de 1945 et dans l'Europe d’ après-guerre et se répand à la

faveur de l'image très positive laissée par l'Amérique libératrice et victorieuse. Elle va de pair avec la

production de masse liée à la révolution industrielle, au système capitaliste et au développement de la

publicité.

Jean Baudrillard a fortement critiqué cette société de consommation dans l’ouvrage du même nom

paru en 1970. Il développe l’idée que la consommation structure nos relations sociales dans nos

sociétés occidentales. Elle ne cherche plus à satisfaire des besoins mais permet de se différencier, de

manipuler des signifiants sociaux. Le bonheur est mesuré par la possession d’objets et de signes, la

consommation est devenue illimitée et la dépense et le superflu occupent aujourd’hui une fonction

essentielle. Le loisir devient une prestation sociale obligatoire.

La société de consommation est en réalité devenue son propre mythe : « Si la société de

consommation ne produit plus de mythe, c’est qu’elle est elle-même son propre mythe. À un Diable

qui apportait l’Or et la Richesse (au prix de l’âme) s’est substituée l’Abondance pure et simple. Et au

pacte avec le Diable le contrat d’Abondance. », écrit-il. Edgar Morin dans Terre Patrie considère quant

à lui qu’ "on crée un consommateur pour le produit et non plus seulement un produit pour le

consommateur".

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1.2. lndustrie culturelle et culture de masse

1.2.1. Le concept d'industrie culturelle : Ecole de Francfort et Adorno

L’Ecole de Francfort est un groupe d’intellectuels créé en 1923 à l’université de Francfort. Le concept

d'industrie culturelle a été élaboré par Theodor Adorno et Marx Horkheimer en 1947. Il traduit

l'expression allemande « Kulturindustrie ».

Leurs théories sont fortement marquées par la barbarie nazie, l’autoritarisme ainsi que le marxisme

car ces intellectuels ont été contraints de quitter l’Allemagne nazie pour émigrer en Suisse puis aux

Etats Unis, cœur du capitalisme.

Pour eux, la modernité est marquée par l’omniprésence de la technique et la marchandisation des

rapports humains et des œuvres. Pour Walter Benjamin la copie d’œuvre et leur reproduction en série

altère l’aura de l’œuvre et dissout son expérience authentique.

La diffusion massive de la culture mettrait donc en péril la véritable création artistique car les

industries culturelles produisent en série des objets qui isolent les individus les uns des autres et les

soumettent à une culture standardisée. La standardisation des produits culturels entraine une

standardisation des individus.

Pour Adorno et Horkheimer, le phénomène ne concernerait pas seulement les pays totalitaires, mais

également les autres pays, à commencer par les sociétés libérales La « culture de masse » serait un

moyen privilégié d’assujettir l’humain, d’orienter la population vers la consommation et ses bienfaits

en le détournant de ses véritables conditions sociales et en étouffant le désir de transformation et

d’amélioration de la société qu’il porte en lui. L’industrie culturelle semble n’être qu’un loisir, un

divertissement innocent ou désintéressé par lequel on croit échapper à la domination mais c’est en

réalité là que l'individu est préparé et discipliné. Elle permettrait donc le renforcement de l’ordre

établi et la domination « par le haut » du pouvoir économique.

Il n’y a pas de différence de nature entre la propagande et l’industrie culturelle : la technique est la

même et les individus sont imprégnés jusque dans leur langage, dans leurs gestes ou même dans

leurs émotions par le pouvoir de l’industrie culturelle. Les consommateurs sont contraints de devenir

non des sujets mais des produits.

Les individus collaborent consciemment et inconsciemment à leur propre perte.

« Le pouvoir des industries culturelles provient de leur puissance technique et de leur capacité à

produire à la chaîne des programmes radiophoniques, des films ou des romans, reposant sur des

morales faciles à saisir et satisfaisantes pour l’esprit. Les médias de masse sont gérées comme des

industries, exercent une séduction car ils soulagent, détendent, font rêver et espérer. « (E. Maigret).

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Ces théories sont devenues l’apanage de la gauche nord américaine et se sont fortement développées

en France fin des années 60 / début des années 70, notamment lors de mai 68 et de la remise en

cause de la société de consommation.

Adorno et la musique populaire

Lui-même musicien et musicologue, Adorno a développé quelques théories sur ce sujet.

Il considère que la musique populaire moderne n'a plus rien de vraiment populaire et qu'il s'agit

uniquement de produits conçus par de grandes entreprises pour une consommation de masse. Ainsi,

pour lui les différences de goût et d'identité perçues dans la musique populaire ne

proviennent que de l'aliénation et l'invention d'une fausse individualité, dans une société où

toute vraie individualité est écrasée. Il y a un phénomène de prescription et de domination verticale.

2.2. La culture de masse

Le débat qui s’est instauré sur les industries culturelles se superpose au débat sur la notion de

culture de masse, qui lui est directement liée.

Définition

Pour Eric Macé, la culture de masse est l’ensemble des objets culturels et des pratiques qui leur sont

liées produits par les industries culturelles à destination d’un grand public hétérogène : la « masse ».

Elle est transmise et promue par les supports média dont elle est, de fait, dépendante. Sa diffusion

répond à des critères de production et de rendement. Elle vise le bien être, le plaisir et vit par le désir

de la société.

L'uniformisation de la culture

Dans ses essais, Alexis de Tocqueville avait annoncé que le développement des sociétés

démocratiques irait de pair avec une uniformisation croissante des comportements et des idées.

L'expansion de la télévision, l'avènement des classes moyennes et le développement d'une culture

homogénéisée sont trois éléments qui s'autorenforcent. Leo Bogart dans The Age of Television (1956)

démontre cet aspect inéluctable de l'évolution des sociétés vers une standardisation progressive des

goûts et des comportements de vie.

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Culture de masse et culture cultivée

Roland Barthes au début des années 60 rejoint la pensée de l’École de Francfort en opposant culture

de masse et culture cultivée. Il y aurait d’un côté une culture de la classe des “élites“ et de l’autre une

culture tirée “vers le bas“, phénomène propagandiste d’homogénéisation dont les moyens de diffusion

réduiraient la qualité de l’œuvre.

Edgar Morin dans L’Esprit du temps(1962) soutient que la culture de masse n’est pas une forme de

culture inférieure ou dégradée sur une échelle qui serait dominée par l’art et la littérature « savante ».

Pour lui, le«rouleau-compresseur» idéologique et l'impact des médias dominants réduisent fortement

les espaces de différence. La culture moyenne ainsi créée n'entraîne pas une absence totale de

création, mais une forme de vulgarisation et de lissage. En fait, la démocratisation du savoir qu'offre

le développement des moyens de diffusion de masse entraîne mécaniquement une standardisation de

la culture. Cette culture de masse a détruit les cultures autochtones .

Richard Hogghart critiquera la pensée de Morin et de l’école de Francfort dans son ouvrage la

culture du pauvre (1957). Selon lui, les produits de la culture de masse ne sont pas reçus passivement

et avalés tels que. Il défend l’idée qu’il existe une attitude active et que le « peuple » se réapproprie

les œuvres en les déformant, en les « réingurgitant » à sa manière.

Il existerait donc une « attention oblique », une « lecture pour soi », une certaine autonomie grâce à

laquelle chaque personne prendrait ce qu’elle veut et ce qui lui est utile. Cette théorie démontre aussi

que les milieux populaires sont dominés et conscients de cette domination.

La difficile notion de masse

Dans les débats des années 60, beaucoup d’auteurs soulignèrent aussi l’absence de définition claire de

la notion de masse, celle-ci renvoyant tantôt à l’ensemble de la population, tantôt à sa composante

populaire. Ce fut le cas en 1963, par Pierre Bourdieu et Jean-Claude Passeron dans un article intitulé

«Sociologues des mythologies et mythologies des sociologues».

Cette notion de «masse», reste toujours ambiguë, voire idéologique et se prête à plusieurs critiques :

d’une part elle semble toujours se définir par rapport à une autre culture supérieure, et d’autre part

elle ne tient pas compte de la diversité des publics et de la diversité de la réception. Or, depuis les

années 80, les travaux sur la réception ont montré toute la complexité de ce qui se joue entre l’œuvre

et son spectateur.

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Bourdieu et Passeron reprochent à l’école de Francfort de parler au nom des masses sans les avoir

étudiées par le bas pour voir leurs comportements.

Bourdieu lancera des modèles d’investigations des pratiques culturelles et développera une vraie

sociologie de la culture. Les termes du débat changèrent alors : la question de la culture ne se posera

plus désormais dans les mêmes termes car on distinguera désormais les processus de production,

diffusion et de réception ainsi que les processus d’appropriation de transformation.

Les industries culturelles

Plus récemment, les auteurs Gaetan Tremblay, Patrice Flichy ou encore Bernard Miège ont défendu

l’idée que les industries culturelles recherchent l’industrialisation et la rationalisation de leur

conception, entraînant une tendance à la concentration, véritable danger pour la créativité, le

pluralisme et la diversité..

1.2.3. Les spécificités du domaine musical

A- La musique est le lieu de sociabilité de la jeunesse par excellence. Elle suscite un fort

engouement chez les jeunes et les concerts constituent notamment le lieu et le cadre de sociabilité

privilégié de cette tranche d’âge.

B- Le retour de la sacralité dans nos sociétés (Joëlle Deniot)

A la base, les mots art, technique et ritualité sont liés. Etymologiquement ils proviennent d’un même

racine sanskrit, à savoir le mot « RTA »(prononcé « RAT ») donnant le latin « ars », « artus »,

« ritus ». Ce mot désigne une loi et un ordre religieux, juridique et matériel, une fondation à la fois de

type sacré (dicté par les dieux) et matériel, établi dans le cosmos.

Nos sociétés acceptent l’art, la technique mais évacuent le sacré, qui revient malgré tout sous d’autres

formes, constat se vérifiant fortement dans le domaine musical. On observe en effet un excès de

valorisation des œuvres (sacralité provisoire) mais aussi des phénomènes importants de starisation :

les artistes deviennent des demi-dieux, des icônes intouchables. Il suffit par exemple de songer aux

scènes de liesse lors du décès de certains stars (récemment Mickael Jackson). Le sacré est ce à quoi

on ne touche pas, une valeur absolue, et cette dimension est très présente dans le domaine de la

musique.

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C -La musique aujourd’hui : plaire et émouvoir (La naissance de l’individu dans l’art,

Todorov)

Pendant des siècles, la musique a été considérée comme une science des nombres, un art fondé par

excellence sur la justesse des proportions, reflet de l’harmonie des sphères et expérience mystique

menant à dieu. Aujourd’hui, la musique n’a plus pour finalité de refléter l’harmonie de la création mais

bien de plaire, d’émouvoir et de provoquer en nous des passions variées. « La voici sœur de la

rhétorique ».

D- Le paradigme de la réception : toute œuvre d’art contient à la fois une valeur de l’esprit et une

valeur marchande et est travaillée par des horizons d’attente : elle se situe entre un horizon d’attente

esthétique (on souhaite reconnaitre dans l’ouvre d’art une forme que l’on connaît déjà) et un horizon

d’attente poétique (envie d’être bouleversé, perturbé, goût pour la nouveauté, la surprise,

l’expérimentation). Toute œuvre est relation entre un sujet et un objet.

2. L’arrivée d’internet et l’émergence du web 2.0 / web social

2.1. Les 7 caractéristiques de l’internet selon Olivier Abécassis, directeur de WAT TV et

directeur général adjoint de TF1 :

En préface du livre musique 2.0, solutions pratiques pour nouveaux usages marketing, Olivier

Abécassis distingue 7 caractéristiques propres à internet selon lui :

� Abolition du temps : internet est un média « addictif » dont la consommation horaire n’est

pas prédictible.

� Abolition de l’espace : internet abolit les frontières physiques et est un média infini.

� Consommation on demand : la consommation de l’internaute est le fruit de son propre

cheminement, elle est unique.

� Approche participative et contributive : l’internaute peut contribuer au contenu et à sa

valorisation.

� Unité microscopique : internet agrège l’infiniment petit, c’est un regroupement infini de

contenus.

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� Extension du panel : le panel est la communauté : dans l’essor actuel du communautaire se

lit aussi la volonté collective des internautes de porter les nouvelles tendances et de les faire émerger,

plutôt que de se les faire imposer par les acteurs historiques et les modèles de mesure habituels.

� Concurrence accrue : le nombre de concurrents est multiplié à chaque développement

nouveau.

Il faut comprendre que « l’approche internet part du consommateur, l’internaute, et non du produit. »

2.2. Joël De Rosnay et la révolte du « pronétariat » : media de masse et

média des masses

Joël de Rosnay est un ancien chercheur et enseignant au Massachusetts Institute of Technology (MIT)

dans le domaine de la biologie et de l'informatique. Il s'intéresse particulièrement aux technologies

avancées et aux applications de la théorie des systèmes. Il est l’auteur de plusieurs ouvrages

scientifiques destinés à un large public.

2.2.1. Les quatre type de web selon Joël De Rosnay

Le web 1.0 ou le web vitrine était un internet descendant, permettant à l’internaute de consulter

des informations, du texte, des images sur des sites statiques » ou « vitrines ».

Le web 2.0 est une révolution qui permet aux internautes de créer eux-mêmes des contenus

numériques (« user generated contents ») : blogs, wikis, réseaux sociaux etc… Il offre la possibilité de

discuter, échanger, critiquer… Le maître mot de cette ère est l’interactivité, de sorte qu’apparaît le

consom’acteur.

Le web 3.0, ou sémantique ou intuitif permet de donner des réponses contextuelles en fonction

des recherches qu’on a faites au préalable. Il établit des interactions transversales entre les

webservices, pouvant ainsi proposer des offres correspondant à nos profils et attentes...

Le web 4.0, symbiotique ou pervasif désigne l’internet des objets. Pour résumer on peut dire que

bientôt « on n’ira pas sur internet, on sera dans internet », qui constituera un véritable écosystème

informationnel aux alentours de 2020-2025.

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Selon lui, « la société de l‘information » se substitue à la société industrielle hiérarchisée,

bureaucratisée, violente. Il appelle cette société industrielle « société de l’énergie ».

2.2.2. La révolte du pronétariat

Le concept de Joël de Rosnay, est plutôt simple. Selon lui, on assiste actuellement à une Révolution

aussi importante que celle du début de l’ère industrielle symbolisée par la machine à vapeur, la

mécanisation et l’automatisation intensive. Une nouvelle démocratie émergerait grâce à une nouvelle

lutte des classes opposant les infocapitalistes, détenteurs des contenus et des réseaux de distribution

et les pronétaires, nouveaux producteurs et acheteurs de biens et de services produits par eux-mêmes

en ligne sur les réseaux.

Le mot « pronétariat » est un néologisme provenant d’une contraction du mot grec « pro », (devant,

avant, mais aussi favorable à) et de l’anglais « net » (réseau), qui a conduit à l’appellation familière en

français d’Internet, le « Net ».

La véritable révolution provient du fait que les internautes sont à la base du processus de création de

contenus (via blogs, wiki etc…), ils peuvent produire des contenus numériques de qualité dans les

domaines de l’image, de la vidéo, du son, du texte, secteurs jusque là traditionnellement réservés aux

seuls producteurs de masse, propriétaires des « mass media ».

Cette production massive et collaborative par ce nouveau proNétariat change les règles du jeu du

modèle industriel traditionnel, fondé sur la propriété par quelques-uns du capital financier ou

productif. De « simples consommateurs », ils deviennent concepteurs, créateurs, distributeurs

d’informations à haute valeur ajoutée, ce qui leur confère de nouveaux pouvoirs.

Une nouvelle « lutte des classes » entre les grands pouvoirs politiques et industriels et ce qu’on peut

appeler « le peuple » ou la société civile est entamée. Des mass media, on passe aux « médias des

masses ».

Quelques citations

Internet change la règle du jeu. Face aux pouvoirs publics et privés apparaît un véritable contre-

pouvoir citoyen, Internet devenant le support par excellence des médias des masses.

De passifs, les consommateurs deviendraient alors acteurs (consommacteurs) et pourraient agir de

manière constructive en aidant les entreprises à développer des produits mieux adaptés à leurs

besoins.Or celles-ci communiquent toujours sur un mode pyramidal. Du haut de la pyramide,

quelques-uns (les chaînes de télévision, les radios, les éditeurs de journaux…) s’adressent à des

milliers ou des millions de personnes. C’est le processus top down, caractéristique de l’évolution de

ces cinquante dernières années. Ce fonctionnement pouvait convenir dans une société de

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l’énergie reposant sur la distribution de la rareté. Il n’est plus valable dans une société de

l’abondance où les citoyens ont non seulement accès à l’information, mais en sont eux-

mêmes producteurs. La régulation ne pourra plus s’effectuer du haut de la pyramide vers

le bas. Plus personne, en effet, n’acceptera que des technocrates décident seuls ou en

petit comité. Avec Internet, un troisième mode de communication apparaît : le TVT, « tous vers tous

» ou «de groupe à groupe» (en anglais many to many).

Cette montée en puissance des pronétaires inquiète évidemment les entreprises de structure

classique, avec leur hiérarchie rigide et leur système de commandement et de contrôle pyramidal(…).

On assiste ainsi à l’émergence d’une économie du peuple, par le peuple et pour le peuple.

La montée des média des masses nous laisse entrevoir une opportunité d’équilibrer la

société plus efficacement en trouvant un compromis entre la régulation par le haut et la

corégulation par le bas.

2.3. Objection : Eric Klinenberg et la concentration des contenus par les groupes

d’infos traditionnels

L’idée d’Eric Klinenberg est de modérer l’enthousiasme débridé tendant à considérer Internet comme

un média de liberté absolue qui permettrait à chacun – à condition d’appartenir aux catégories aisées

du monde riche – de « recevoir de l’information sur mesure et de diffuser en retour, vers la planète

tout entière ».

Le discours convenu sur l’essor du journalisme participatif et web 2.0 cache pour lui un constat

important : celui que les grands groupes de communication s’installent aussi sur internet et

y amplifient leur voix et influence. Pour lui, les sites les plus populaires sont associés aux groupes

de médias les plus puissants. Un petit nombre de consommateurs dépendraient des mêmes sources

d’information diffusées certes avec une nouvelle technologie et un nouveau médium mais n’apportant

pas plus de diversité d’opinions. L’essentiel de leurs contenus se résumerait à la reprise ou à la

réécriture de dépêches d’agence ou de points de vue déjà publiés ailleurs.

Pour Eric Klinenberg, « l’idée selon laquelle les nouvelles technologies de l’information

auraient rendu caducs les risques de concentration constitue le mythe principal et le plus

dangereux de l’ère numérique. »

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PROBLEMATISATION THEORIQUE

Nos sociétés occidentales sont donc des sociétés de consommation marquées par la diffusion et la

production de masse des industries culturelles. Celles-ci concentrent le pouvoir entre leurs mains et

ont une structure pyramidale et un pouvoir vertical de sélection, de prescription et de diffusion. Ce

phénomène de concentration et de mécanisation de la production a aussi pour conséquence une

standardisation des produits et une certaine passivité des consommateurs. Pour certains, ils sont

« manipulés » et « aliénés » … Pour d’autres, il faut prendre en compte les mécanismes de réception

et d’appropriation. Le consommateur « n’avalerait » pas tels quels les produits culturels et se les

réapproprierait à sa manière. Il faut, en plus, considérer l’importance et la place majeure tenue par la

musique dans nos sociétés : elle est un de nos passe-temps favori, si ce n’est le passe-temps préféré,

lieu privilégié de sociabilité de la jeunesse et domaine empreint de sacré : les artistes sont aujourd’hui

semblables à des demi-Dieux. Ce que l’on écoute définit aussi symboliquement qui l’on est.

L’arrivée d’internet a en parallèle bouleversé certains modèles et offert de nouvelles possibilités. Pour

Joël De Rosnay, cette révolution numérique est la plus importante depuis la Révolution Industrielle

car elle redonnerait le pouvoir aux internautes –au peuple- de créer du contenu et donc de

contrebalancer les rapports de pouvoir détenus jusqu’ici par les « infocapitalistes ». Les « médias des

masses » succèderaient donc aux médias de masse et remettraient en cause le rapport de domination

établi jusque là. Ce retournement de situation constituerait la « révolte du pronétariat ».

D’autres tempèrent cet optimisme, à l’image d’Eric Klinenberg, qui considère que la mainmise des

grands groupes se transpose et se prolonge en réalité aussi sur le net, qui est loin d’être cet espace

d’infini liberté tant vanté.

Qu’en est-il alors dans l’industrie musicale ? Que penser de l’apparition de ces labels

communautaires ?

« Le public en a assez de se voir dicter ses choix en matière de musique et Buzz My Band lui offre la

possibilité de choisir lui-même ce qu’il veut écouter. Qui décide aujourd’hui de ce qui va plaire au plus

grand nombre ? Trois, quatre personnes dans des maisons de disque. Ne soyons pas dupes. Buzz My

Band offre la possibilité au plus grand nombre de choisir directement ce qui lui plait. », nous disait

Guillaume Rostain.

Les labels communautaires constituent-ils donc eux aussi une petite Révolution au sein

de l’industrie musicale ou est-ce une illusion? Y a-t-il une prise de pouvoir des internautes

et du consommateur remettant – au moins partiellement- en cause une organisation

jusque là verticale de l’industrie musicale, au sein de laquelle les majors régnaient et

imposaient leurs choix ? Ces labels changent-ils vraiment la donne et en quoi ? Que

devient la relation artiste/ fan ?

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III. Vers une évolution et un rééquilibrage des rôles au sein de

l’industrie musicale

Démarche / méthodologie choisie : Pour répondre à notre problématique, nous avons choisi de

réaliser des entretiens téléphoniques avec des dirigeants de labels communautaires ainsi qu’avec des

artistes produits par ce nouveau type de maison de disques. Enfin, nous avons soumis des

questionnaires à des internautes producteurs. (Interviews et questionnaires en annexes). Durant cette

partie, nous nous appuierons aussi sur plusieurs constats de Borey Sok dans son ouvrage Musique

2.0, solutions pratiques pour nouveaux usages marketing.

Nous avons axé notre réflexion sur différents points que nous cherchions à comprendre : comment les

internautes sont-ils réellement impliqués dans la chaîne de création de valeur ? Qu’est-ce qui les

intéresse ? Qu’est-ce qui intéresse les artistes ? Comment appréhendent-ils leur communauté ?

Qu’est-ce que cela change dans le rapport fan/ artiste ? Qu’apportent les labels communautaires ? Y

a-t-il des failles, des choses à améliorer ?

L’hypothèse de base que nous avions était que les internautes ont une petite influence mais

représentent peut-être plus un échantillon test qu’un vrai « contre-pouvoir. »

1. Synthèse des entretiens

1.1 Entretien avec deux dirigeants du label Buzz My Band : David Doro et Guillaume

Rostain

Nous avons eu un entretien avec David Doro, actuel Président de Buzz My Band et Guillaume Rostain,

membre fondateur du projet. Voici l’essentiel de cet entretien.

L’implication de l’internaute

Cela dépend de la volonté de l’artiste ; il n’y est pas obligé mais c’est quand même ce que

viennent chercher les artistes chez nous : une base de public qui peut juger leurs maquettes par

exemple… Nos artistes se reposent beaucoup sur la communauté, il y a une vraie écoute du

fan. Il peut avoir une réelle influence, ça dépend de la sollicitation de l’artiste.

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Les ventes des artistes dépendent de toute façon de leur façon d’appréhender leur

communauté. 100priz est un artiste rap qui sollicite beaucoup ses fans et il est une de nos bonnes

ventes, il a vendu autour de 10 000 singles. Il faut comprendre que quelqu’un qui mise sur soi

peut être un bon VRP.

Avantage du modèle

C’est de proposer des artistes qui n’auraient pas forcément une visibilité ou qui ne seraient

pas choisis par les Directeurs Artistiques des maisons de disque / labels. Nous proposons

une porte d’entrée à l’ensemble des artistes, on veut être en quelque sorte leurs « hauts-

parleurs ». Le public est au centre de tout, c’est lui qui décide de soutenir celui qu’il veut. Il choisit.

L’objectif est aussi de recréer du lien entre artiste et fan et de redonner de la valeur à la

musique. On place l’internaute au centre de la chaîne de création de valeur artistique. L’innovation est

là, proposer aux artistes de se faire produire directement par son public et de distribuer les revenus

de façon équitable.

Ce que ça a changé

Ca a été un électrochoc dans un système où tout le monde se plaignait en se regardant le nombril.

On s’est dit « il y a encore des choses et du business à faire dans cette industrie, ce n’est plus

uniquement un monde ouvert aux pirates. »

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1.2. Entretien avec deux artistes produits par My Major Company

Nous avons interviewé deux artistes produits par My Major Company : Thierry de Cara et Maxime.

Thierry de Cara (509 producteurs) : variété française

Il a été le second artiste après Grégoire à récolter la mise de

70 000 euros à l’époque, en 2 mois. Il a commencé le piano

classique à 4 ans puis joué dans un groupe de reprises au collège,

avant que le désir de composer ne se déclare à 14 ans. Il est

ensuite monté sur Paris et a signé un contrat avec une maison de

disque en 2002. Un single a été enregistré mais pas l’album, le

projet n’est pas allé jusqu’au bout. Après cette première

expérience, il a pris du temps pour remonter un répertoire, et faire

le tour des maisons de disque. Il a rencontré Sevan de My Major Company entre temps.

Voici ce qu’on peut lire sur sa page sur le site :

« Depuis mon plus jeune âge, je joue du piano et depuis maintenant 7 ans je vis par et pour ma

musique.

Dans ma jeune carrière l'aventure My Major Company est certainement le pari le plus osé

que j'ai fait.

Je crois que c'est une vraie occasion de changer les rapports entre professionnels et

amateurs de musique.

Internet a révolutionné l'accès à la musique, il fallait changer de modèle.

C'est ce que fait My Major Company, vous pouvez devenir producteur de mon premier album.

Ma musique pourra être directement jugée par les internautes,

C'est vous qui déciderez si mon album doit sortir,

Fini les intermédiaires, les maisons de disques à l'ancienne,

Aujourd'hui c'est entre vous et moi.

J'ai besoin de votre soutien

Place à la musique. »

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Maxime (792 producteurs) : pop française

Maxime a eu une première expérience dans la musique en 1996-97 :

elle faisait partie d’un girlsband, « The foxies, qui avait signé chez

Universal et enregistré un album. Après deux ans, le projet s’est

arrêté.

Elle a alors continué ses études (école de commerce, master media…)

et travaillé dans plusieurs entreprises, tout en continuant en parallèle à

écrire et composer, voulant que « la musique soit un plaisir, pas une

galère ». Maxime a été mise en ligne sur My Major Company en juin

2008 et a récolté la mise en 3 mois.

Voici la synthèse de ces entretiens :

La rencontre avec My Major Company

Pour nos deux artistes, la prise de contact avec My Major Company s’est faite grâce à des rencontres.

Thierry de Cara avait fait écouter son travail à Sevan lorsqu’il travaillait encore en maison de disque.

Maxime a quant à elle rencontré il y a 8 ans le compositeur Franck Authier, qui a aussi

réalisé l’album de Grégoire. My Major Company a eu le « coup de cœur » pour les chansons du

tandem.

Enregistrement

Thierry De Cara : L’enregistrement du CD s’est effectué à Londres, sur une de mes propositions que

My Major Company a validée. Ca s’est très bien passé.

Maxime : On formait un vrai tandem avec Franck, My Major Company nous a fait totalement

confiance, d’autant plus que Franck avait réalisé l’album de Grégoire et fait un super boulot. On faisait

écouter régulièrement nos productions à My Major Company mais on leur posait aussi des

questions. On était à la fois libres et suivis.

Implication internautes

T : On sollicite beaucoup les internautes, à chaque fois qu’on a une décision stratégique à

prendre en fait : single, scénario de clip, albums, photos, pochette….Il se dégage

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des grandes tendances en général, les avis sont assez unanimes… Une proposition de

pochette qui ne nous emballait pas a complètement déçu les internautes par exemple, ce

qui nous a conforté dans notre intuition…

En cas de désaccord, si l’on est vraiment persuadé d’avoir raison, la décision reste entre mes

mains et celle du label.

M. : Lors de l’enregistrement de l’album, je prenais des photos au fur et à mesure et je

rédigeais des petits articles que je mettais en ligne auprès de ses producteurs, des sortes

de reportages en temps réel sur l’avancée du projet.

Concernant le plan marketing pour la pochette, on a soumis 3 photos aux internautes, pour voir

laquelle était leur préférée.

Concernant la maquette du single, il y a eu deux versions, on a lancé un vote. On a aussi consulté des

pros, c’est important car nous ou les internautes n’avons pas toujours le recul nécessaire. C’est une

industrie, c’est du commerce avant tout et les pros savent aussi ce qui va marcher et ce qui est bon,

ils ont l’oreille …

Il faut trouver le compromis entre prendre en compte les avis des internautes et garder

ses convictions. Il faut les écouter, ils représentent un public mais il faut aussi consulter

les pros. Je crois qu’il faut distinguer deux choses : les étapes de réflexion, intimes et

cruciales, qui concernent par exemple l’image de l’artiste et l’étape du choix entre

plusieurs versions ou propositions : la première doit être faite par des pros. On sollicite les

internautes pour la seconde.

Relations avec les internautes-producteurs

T. : Ca dépend, il y a différents types de producteurs :

- ceux qui investissent juste pour l’argent et ne sont pas du tout actifs, qu’on ne voit

jamais

- ceux qui sont actifs, soit je leur parle régulièrement, soit je les vois au concert…

Ca frôle parfois la relation amicale mais je n’ai pas de relations personnelles. L’un

de mes producteurs a misé la somme de 7 000 euros, le maximum à l’époque: je ne le

connaissais pas mais aujourd’hui si, je lui parle sur internet, je le vois à des concerts…

La majorité ne fait pas ça pour gagner des sous, ils viennent parce qu’ils aiment la

musique. C’est un peu la même chose lorsqu’on achète une place de concert : on veut partager une

aventure. Là ils veulent aussi aider un artiste.

M. : Les relations sont bonnes, j’essaie de donner un maximum d’infos, d’être la plus transparente

possible… Le synopsis du clip sera mis en ligne ainsi que le clip, tel quel. C’est un choix trop

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stratégique et compliqué pour demander l’avis du public, même moi je ne suis pas une professionnelle

du clip. On peut perdre beaucoup de temps aussi.

J’aime utiliser une image que je trouve jolie, celle du mécénat. Ils mettent des sous un peu

comme s’ils arrosaient une graine pour voir si elle va pousser, je ne crois pas que ce soit pour

gagner de l’argent très sincèrement.

Au début, j’étais en contact avec plusieurs personnes, ça allait presque vers l’affectif mais il faut faire

attention au mélange réel-virtuel. Je pense qu’il faut donner de soi mais aussi savoir se

préserver. J’ai déjà rencontré une trentaine de producteurs lors d’un concert dans un restaurant l’an

dernier.

Beaucoup de producteurs restent aussi muets et ce sont toujours les mêmes qui laissent

des messages.

Ce qu’apporte My Major Company

T. : C’est une alternative à la crise du disque. Les maisons de disque sont de plus en plus

frileuses pour signer de nouveaux artistes. Comme My Major Company n’investit pas, ils se

permettent de signer des artistes en qui ils croient, c’est plus facile pour eux de prendre

des risques et de donner un élan à des projets qui sinon auraient certainement eu du mal

à voir le jour. C’est une vraie bouffée d’oxygène

M. : My Major Company apporte une autre façon de voir les choses. Le principe philosophique est

épatant et ce modèle de solidarité est très bon, c’est un échange, chacun donne.

Il permet de mettre en ligne des projets différents les uns des autres. Et solliciter les internautes

donne une idée de ce que cela peut donner, c’est un vrai plus car auparavant les maisons de

disque « balançaient » les pochettes comme ça, or ça pouvait ne pas plaire.

Enfin, l’équipe est super jeune et relaxe, il y a une bonne entente, ce n’est pas une grosse

maison de disque avec Pascal Nègre tout en haut et les Directeurs Artistiques qui font la

loi… C’est une équipe de gens qui aiment ce métier et bossent pour que ça fonctionne.

Points négatifs / améliorations possibles

T : Concernant les défauts, c’est encore tôt, on pourra faire un vrai bilan dans un an je pense.

Beaucoup d’artistes sortent leur album en ce moment, ils sont de plus en plus nombreux… Vont-ils

tous trouver leur compte ? 50 artistes produits par an ce sera difficile peut-être…

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Concernant la volatilité et la possibilité de déplacer ses parts (« démises »)

T. : Je pense que c’était la seule option pour inciter les gens à miser sur des paris un peu risqués ou

des projets différents, les investisseurs se disent comme ça que ce n’est pas définitif, sinon on irait

tous vers des choses consensuelles, dont on est certain qu’elles marcheront.

M. : c’est la loi du marché, une maison de disque recherche des projets qui fonctionnent. Si les gens

déplacent leurs parts c’est que peut-être ces projets ne sont pas matures. Ce n’est pas gênant.

Il y a en tous cas pleins de facteurs sur lesquels une maison de disques n’a pas la main,

une part de chance, de magie, des données volatiles et insaisissables. Irma a par exemple

récolté ses fonds en 2 jours , il y a eu un vrai engouement qui ne s’explique pas.

Agonie était sur le site à une période de très forte exposition de My Major Company dans les médias;

elle a récolté ses fonds très rapidement. Mais ça n’a pas fonctionné, car les radios n’étaient pas

prêtes...Aujourd’hui on est plus d’une vingtaine d’artistes à être produits chez My Major Company !

Le succès de Grégoire

M.: Grégoire, ça a été un « boulet de canon », c’était son histoire, son étoile …C’est un

garçon talentueux, touchant, sincère qui mérite son succès. Il fait des chansons pop

accessibles, bien écrites, bien ficelées et qu’on retient facilement, comme Jean-Jacques

Goldman à son époque. Il donne de lui, il a la pêche et il a vécu pas mal de choses aussi…Il ne faut

pas négliger le travail d’équipe, c’est ce que disent ses paroles d’ailleurs. Je pense que la clé du succès

est cette équation : ses chansons + lui (ça n’aurait pas marché s’il n’avait pas eu de

talent….) + le génie de Franck + le réseau et le professionnalisme de My Major Company

+ le bon moment , la primeur du concept (1er artiste produit sur internet…)

Conclusion

- La rencontre avec My Major Company s’est faite grâce à des contacts / du réseau…

- La récolte de la mise a été rapide (2-3 mois)

- Ils ont été libres mais suivis par le label lors de l’enregistrement de l’album et la production

- La sollicitation des internautes semble très importante pour eux mais elle reste à leur initiative

- Les relations développées avec les fans sont différentes selon l’artiste, ses attentes, son envie, son

caractère

- Il existe différents profils d’internautes, certains sont très impliqués (souvent les mêmes), d’autres

pas du tout (invisibles)

- Les artistes et les labels ont le dernier mot mais la communauté est une base donnant des

tendances générales

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- Les démises ne sont pas un problème, elles constituent un des leviers du système

- My Major Company est une opportunité pour des projets différents et nouveaux, le label est une

alternative œuvrant au renouveau musical

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1.3. Questionnaires à des internautes producteurs

Nous avons soumis un questionnaire à quatre internautes inscrits chez My Major Company. Voici dans

ce tableau la synthèse des questionnaires :

Questions 1 2 3 4

Sexe, âge etprofession

Homme, 38 ans,magasinier-vendeur enautomobile.

Homme, 36 anschômage

Homme, 21 ansparamédical

Femme, 30 ans,vendeuse enparapharmacie

Commentavez-vousconnu MyMajorCompany ?

Par les médias Par le grand journal Par un des artistesqui m’a envoyé unmail sur Facebooken me parlant deson projet

Par Gregoire

Dateinscription

Novembre 2009 Vers mars 2010 Début février 2010 Février 2010

Artistessoutenus

Je n'ai misé quesur une seulepersonne Karenbrunon (pasencore atteint les100 000 euros )

9 (liste consultable) 20 artistes au total Une quinzaine

Somme totalemisée

110 euros surcette artiste

5040 euros + de 500 euros 1500 euros

Attentesinitiales :qu’est ce quivousintéressait ?

Participer à laproduction demusique,connaître desartistes, gagner del'argent

Découvertes d’artisteset de voix quej'aimerais entendredans les radios, enalbum et en concert etsurtout j'ai vu que MyMajor Company offraitune aventureartistique et humaine

Découverte debonne musique,dialogue avec leschanteurs et sipossible gagnerde l'argent

Le principe depouvoir aider unartiste a réaliserson projet estvraiment super jetrouve

Commentavez-vous étéimpliqué,sollicité parles artistes ?

Pas encore Cela dépend desartistes en fait,presque tousdemandent notre avissur leurs nouveautés,leur vidéo, leur pub,leur bannière. Pour lesartistes déjà produitsce sont à la foisl'artiste et le label quinous sollicitent

Ca dépend del’artiste, ils nousdemandentsouvent notre avis

Ils nous demandentnos avis sur leursmorceaux sur lesite

Pensez-vousavoir del’influence/du poids surles choix del’artiste ?

J'ai de l'influencesur lesarrangementsmusicaux deDown In Chaos,mais aussi sur leschoix de titres àmettre dans les

Difficile de répondre,j'essaie en tout cas defaire partager mesgoûts et de défendreau mieux mes artistespréférés

Je pense avoir del'influence endonnant mon avissur certaineschoses déjà faitesou qui vont êtrefaites ( parexemple ce que

Oui, mais lamajorité l’emportebien sûr

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albums(classement)

l'on aimerait voirdans les vidéos oucertainsinstruments demusique utilisés )Je pensecontribuer auxidées que l'artistechoisit.

Commentqualifieriez-vous lesrelations quevous avezavec lesartistes ?

De très bonnesrelations,amicales et trèsproches

Je la qualifieraid'amicale et pourcertains un peu plus.Une forme d'amitiés'est installée jepense.

Je ne saurais pastrop définir marelation mais entout cas lorsquec’est possible jeparle à l’artiste surle forum de sapage

Différente enfonction desartistes, certainsdeviennent trésproches. Nousavons par exempleété reçus chezMayor ce weekend. D'autres sontplus éloignés.

Commentdécouvrez-vous lesartistes ? voscoups decœur ?

Par pub, auhasard, au feeling

En voyageant àtravers les pages, ensuivant les invitationsou parfois en suivantdes producteurs quiont les mêmes goûtsmusicaux que moi.

Tout simplementd'abord par letype de musiqueque j'aime le pluset ensuite enécoutant etregardant lesinformations del'artiste

Par bouche àoreille entreplusieursproducteurs, parsollicitation desartistes etproducteurs sur lespages

Combien detemps ypassez-vous,à quellerégularité?

Tous les jours,environ 5 heures

C'est devenu une vraiepassion pour moi, jevie l'aventure à fond,j’y passe au moins 6heures par jour

J' y viens 2 à 3fois par semainependant 1h àchaque fois

Plusieurs heurestous les jours

Y a-t-il desaméliorationsà apporter,des défautsau système ?

Je suis assez déçupar le fait quetous les artistesne soient pas missur un piedd'égalité et queles règleschangent assezsouvent.

Les démises ; le faitde pouvoir déplacerses parts selon sesenvies

Je pense que c'estun très bonprincipe , je suistrès satisfait

Très satisfaite

Qu’apporteMy MajorCompanyselon vous?

MMC apporte lerenouveau musicalet va fairechanger ce qu'onnous force àécouter sur lesondes. Ici, c'est lepeuple qui choisitet non lesquelques lobbiesspéculatifs desmaisons dedisques

My Major Companyapporte unedimension humainequi n'a pas d'égal, oncôtoie au jour le jourdes artistes et leurmonde, leurs doutes,leurs créations, leursnouveaux titres, leurspremiers concerts,vidéos…, MMC est unevraie aventurehumaine et artistique

Cela permet auxartistes de se faireconnaître et deconnaître le typede public qu'ilspourraienttoucher. Cela leurpermet aussi dedemander l'avisdes producteursqui, eux, peuventdialoguer avec lesartistes

Un échangeextraordinaire entreplusieursproducteurs etartistes, desrencontresinoubliables et lapossibilité degagner un petitpécule

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Conclusion

- Les internautes interviewés sont des jeunes (20- 35 ans)

- My Major Company dispose d’une grande force pour faire parler de soi dans les médias (3

internautes l’ont connu comme ça): visibilité importante

- Ils se sont inscrits assez récemment (cet hiver)

- Ils misent souvent sur plusieurs artistes (une dizaine) et des sommes relativement

importantes (de 500 à 5 000 euros)

- Ce qui les attire est de découvrir des artistes, de la musique, de pouvoir dialoguer avec eux,

de vivre une aventure et si possible, de gagner de l’argent (pas objectif premier)

- Ils découvrent des artistes au hasard, en suivant des gens ayant les mêmes goûts qu’eux ou

encore par la pub d’autres producteurs ou des artistes eux-mêmes…

- Ce qui nous frappe est de constater que ceux qui ont misé les sommes les plus

importantes sont ceux qui ne cherchent justement pas à faire du bénéfice : pour

eux, il s’agit véritablement de donner sa chance à un artiste, de l’aider, de lui donner un coup

de pouce, en dehors de toute envie de spéculer

- C’est une activité assez « addictive » apparemment car trois d’entre eux y passent plusieurs

heures par jour (constat partagé par Olivier Abécassis)

- La sollicitation dépend de l’artiste mais ils consultent très souvent leur public / Les relations

développées dépendent de la volonté des artistes mais elles peuvent parfois être de nature

amicales. L’artiste reste celui qui décide

- Les internautes semblent avoir de l’influence sur les choix des artistes. Leurs avis sont pris en

compte

- Ils semblent plutôt satisfaits du concept excepté les démises, le changement des règles et la

mise en avant de quelques artistes. My Major Company constitue une vraie aventure pour eux

et le facteur humain semble très important

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2. Analyse et réponse au problème

Rappel problématique : y a-t-il une prise de pouvoir des internautes et du consommateur

remettant – au moins partiellement- en cause une organisation jusque là verticale de

l’industrie musicale, au sein de laquelle les majors régnaient et imposaient leurs choix ?

Les labels communautaires ne renversent bien sûr pas totalement la balance en donnant le pouvoir

absolu aux internautes de tout décider et diriger. Cela n’aurait pas de sens car produire et lancer un

artiste est un véritable métier qui ne s’improvise pas. Ces nouveaux labels apportent toutefois des

changements au sein de l’industrie musicale.

2.1. Vers un rééquilibrage des rapports au sein de la chaîne de création de valeur

2.1.1. Des changements…..

Les labels communautaires bouleversent le fonctionnement de l’industrie musicale car ils remettent au

centre le rapport public/ artiste. « En développant des stratégies marketing sur les mass media, les

maisons de disque avaient un peu délaissé les fans ou du moins peu innové pour répondre à leurs

attentes. Or l’arrivée des nouvelles technologies permet désormais de personnaliser les messages en

termes de communication mais aussi de diversifier l’offre afin de satisfaire les demandes différentes »,

considère Borey Sok.

Voici ces changements :

� Visibilité / expression des artistes : les labels apportent indéniablement la possibilité à

une infinité d’artistes de s’exprimer, d’avoir une visibilité (comme sur MySpace) mais en plus

l’éventualité d’être produit : il s’agit d’un nouveau modèle dans l’industrie.

� Plébiscite / choix / sélection du public / prise de pouvoir économique : même si le

label tente d’influencer les internautes en proposant sa sélection, le public choisit sur qui il veut miser

et mettre des parts et n’est pas contraint. Cela renverse le rapport de domination et le filtre

auparavant possédé par les maisons de disque. L’internaute peut devenir producteur, actionnaire

et espérer faire des bénéfices. Economiquement, cela change la donne et lui confère du

pouvoir.

� Acteur de la chaîne de création de valeur : l’internaute est impliqué et sollicité et

son avis est pris en compte.

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� Changement dans la relation artiste/fan, relation de proximité : le rapport est

plus direct entre les fans / public et l’artiste, ils sont en contact, échangent, peuvent se rencontrer

voire devenir amis.

� Une relation personnalisée et qualitative : la possibilité de vivre une expérience

nouvelle et unique. Borey Sok résume ainsi cette idée :

« Internet est plus qu’une simple vitrine pour l’artiste mais il est devenu un moyen de créer une ou

plusieurs relations directes avec son public. Pour satisfaire les consommateurs, on peut améliorer

qualitativement leurs relations avec l’artiste, les nouvelles technologies permettant de créer

plus d’interactivité entre fans et artiste. L’expérience internet nous plonge progressivement dans le

monde d’un artiste et de façon plus légitime que par le biais des matraquages médiatiques habituels.

Cette approche devient plus personnelle voire intime, comme si l’on était celui qui a découvert

cet artiste et que ce n’était non pas la TV ou la radio qui nous l’avait fait connaitre. (« Nous sommes

tous de découvreurs, disait Guillaume Rostain »). Cela donne aux internuates la sensation

d’avoir du pouvoir et c’est aussi ce qui les attire.

Ainsi, l’artiste va faire partager une expérience musicale unique que l’internaute voudra revivre

et faire découvrir, en déclenchant le fameux « buzz ». En somme, plus un artiste offre d’émotions à

son public en exploitant tous les canaux de diffusion et de distribution, plus il améliore qualitativement

sa relation avec lui. En créant une proximité, l’artiste va permettre aux fans de transcender

leurs barrières financières car la valeur de cette relation ne pourra plus uniquement être fondée

sur une somme d’argent limitée, le fan sera prêt à dépenser plus pour rester en contact avec son

artiste favori. »

� Viralité ou le « buzz » : le fan/ producteur peut aussi se transformer en VRP-promoteur et

vanter les mérites des artistes dans son cercle (amis, connaissances, pages, réseau social réel et

virtuel…). Les artistes ont tout intérêt à solliciter leur communauté. « Exploiter la viralité d’internet et

le bouche à oreille ou « buzz » est le meilleur moyen de se faire connaitre » écrit Borey Sok.

« Contrairement à la radio ou la TV où le consommateur subit la promotion, ici il a le choix ou non de

participer et de promouvoir l’artiste qu’il apprécie. Quand un internaute participe volontairement à la

construction de la notoriété de l’artiste, il se sent plus proche du projet et est donc susceptible

d’acheter l’album. », poursuit-il.

L’internaute devient donc producteur-actionnaire, conseiller, fan-public, promoteur ….

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2.1.2. ….Faisant passer d’un modèle vertical à un modèle horizontal

Comme le résume Borey Sok, « la relation client-artiste peut être créatrice de valeur et de nouveaux

modèles ».

SCHEMA RECAPITULATIF

MODELE TRADITIONNEL : structure verticale

Maison de disque – label - major Choisit-sélectionne

Finance-produit Promeut-vend

Artiste

Public Reçoit, achète, consomme

NOUVEAU MODELE : LABEL COMMUNAUTAIRE : structure horizontale

Artiste Internaute producteur

(peut sélectionner, suit /conseille,

aide pour les choix stratégiques)

Public

(Sélectionne, produit /finance, promeut)Peut être les

deux

Label

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« Dans l’essor actuel du communautaire se lit aussi la volonté collective des internautes de porter les

nouvelles tendances et de les faire émerger, plutôt que de se les faire imposer par les acteurs

historiques et les modèles de mesure habituels », considère Olivier Abécassis.

Le rapport s’équilibre donc, passant d’un modèle vertical à un modèle horizontal. Les internautes

gagnent de l’influence, du pouvoir, mais le label conserve aussi un rôle clé. Il convient donc de

nuancer notre propos et de pointer quelques interrogations soulevées par ce système.

2.1.3. … Qui ne doivent pas pour autant faire illusion : évolution mais pas Révolution

Une place toujours clé du label

L’artiste reste bien sûr le maitre et décide des relations qu’il veut nouer avec son public ainsi que des

occasions où il sollicite ses internautes. Il a le dernier mot, ainsi que le label. Ce dernier garde une

place-clé dans le système : les étapes de production sont les mêmes et il reste essentiel d’être

entouré d’une équipe de professionnels qui a le recul et l’expérience nécessaires à la prise de

décisions stratégiques et qui possède, entre autres, une oreille affinée.

La consultation des internautes : une nouvelle forme d’études marketing gratuites ?

Certes, les internautes sont sollicités lors du processus de production mais ils interviennent dans

l’étape de choix final, entre plusieurs versions proposées. Il s’agit plutôt d’une consultation pour

observer des grandes tendances. On comprend bien le « plus » que représente sa communauté pour

un artiste : elle peut lui donner des avis concernant les différentes orientations qu’il choisit. « Cette

base de public » ou « fan-club premium » ne représente-t-elle pas tout simplement un « échantillon-

test » de consommateurs sur lesquels on effectue en réalité des études marketing gratuites, ne

nécessitant aucun budget ? C’est donc tout bénéfice pour le label et l’artiste.

La difficulté de sortir du lot : « vendre du rêve » ?

Il faut souligner que la plupart des artistes inscrits sur le site peuvent attendre indéfiniment de

récolter la mise et ne jamais être produit, sans compter qu’il est possible la plupart du temps de

déplacer ou retirer ses parts quand on le souhaite, causant une volatilité des mises et fragilisant

quelque peu les artistes.

De plus, le nombre d’inscrits s’accroît considérablement, atteignant un total ahurissant de 9776

artistes, presque 10 000, sur My Major Company. Opportunité de se faire entendre, certes, mais

comment sortir du lot dans cette masse ? En donnant sa chance à tous, ne donne-t-on pas aussi sa

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chance à très peu? Sur My Major Company, il faut récolter la somme de 100 000 euros et la mise

maximale a été récemment ramenée à 1 000 euros : cela signifie qu’il faut convaincre 10 000

producteurs ! Comment faire ? « Il n’est pas évident de déclencher une contamination et du buzz sur

la toile », concède Borey Sok. On comprend alors l’avantage ou l’intérêt que peuvent revêtir les

différentes sélections faites par les labels : ils sont un indicateur, une aide. Un filtre sera toujours

nécessaire, l’offre étant quasiment infinie.

Un point important qui fait fonctionner ce modèle est également le « facteur rêve », aussi bien pour

les artistes rêvant d’être produits et de devenir « la nouvelle star » mais aussi dans une moindre

mesure chez les internautes rêvant de faire fortune. On sait pertinemment qu’il n’est pas possible de

tous les produire et même si l’artiste récolte les fonds, il reste encore tout à faire : se faire connaître

et aimer du grand public, c’est pourquoi il faut aussi choisir pertinemment son label, qui doit avoir du

réseau, des contacts et connaître parfaitement le fonctionnement de cette industrie. Aujourd’hui,

combien d’artistes ont percé et peuvent en vivre? Très peu. Seuls le pionnier Grégoire et la jeune

Joyce Jonathan semblent sortir du lot pour l’instant…

Le revers obligatoire de ce type de modèle : la consécration du consensuel et du grand

public ?

Prétextant lutter contre la standardisation des goûts et encourager le pluralisme,- et donc lutter en un

certain sens contre l’imposition des goûts de quelques-uns à la « masse » - ce modèle n’a-t-il pas

paradoxalement pour conséquence de pousser au règne du consensuel, en tous cas de ce qui plaît au

grand public -les mises maximales étant également de plus en plus limitées-? Grégoire, Joyce

Jonathan mais même Thierry De Cara ou encore Maxime proposent de la variété française ou de la

« pop » accessible et grand public. N’est-ce pas finalement la condition pour réunir les fonds et

convaincre un aussi grand nombre de personnes ?

Les labels communautaires ne récompenseraient donc pas le bon flair mais plutôt le plébiscite

populaire ou le fait d’avoir des goûts assez consensuels pour coller à l’ère du temps.

La disparition de la prise de risque et la part d’irrationnel inhérente à toute réussite

Le métier de producteur et le rôle d’une maison de disque ne sont-ils pas aussi de parier sur

quelqu’un et de prendre un risque ? Car il existe bien un facteur imprévisible, une part d’irrationnel

dans toute réussite et l’on ne sait pas toujours pourquoi cela marche ou non. C’est une équation

complexe, pas une science exacte.

Cette prise de risque se fait de plus en plus rare dans le contexte de crise actuellement traversée par

l’industrie du disque. Rappelons que les directeurs artistiques des maisons de disques s'appuient

désormais sur les plates-formes communautaires pour faire leurs choix.

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Les labels communautaires semblent donc offrir une solution ou une alternative à cette crise qui

verrouillait le système. Avec ce modèle, le pari est moins risqué, la communauté de producteurs

représentant un bassin de fans et de promoteurs potentiels ainsi qu’une base de public indiquant des

grandes tendances. « Avec la crise que cette industrie traverse, une partie de l’offre doit être

concentrée sur le cœur de cible : les fans. Ce sont eux qui assurent la durée de vie d’un artiste à long

terme», résume Borey Sok.

Ce sont toujours, en somme, les labels indépendants qui continuent pour la plupart leur travail de

défrichage et de dénichage des nouveaux talents et qui donneront, souvent, les tendances de demain.

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Conclusion

Avec l’apparition de l’internaute producteur, le public voit donc son rôle émerger et son implication

grandir dans l’industrie musicale. Les rapports et les rôles évoluent, se rééquilibrent, se

redéfinissent.

Ainsi, le rapport artiste/ fan change, se rapproche, se désacralisant aussi un peu.

Ce lien est de toute façon aujourd’hui essentiel à intégrer dans les nouvelles stratégies. « Le public

est la garantie de la durée d’un artiste sur le long terme et les agents doivent désormais prendre en

compte le rôle primordial qu’internet peut jouer dans la carrière d’un jeune talent et même d’un talent

confirmé », résumé Borey Sok.

Le producteur devient actionnaire et prend donc du pouvoir économique, il faudra compter avec lui

dans la répartition des gains.

C’est aussi lui qui sélectionne ceux qu’il veut produire ; il peut également intervenir dans la chaine de

création de valeur et être sollicité pour donner son avis. Il acquiert un pouvoir de décision qui le

valorise.

L’arrivée de la figure de l’internaute producteur a donc fortement bouleversé le paysage de l’industrie

musicale ces dernières années via la création de plus de cinq labels rien qu’en France.

Leur grande force est de proposer une alternative voire une solution à la crise de

l’industrie du disque. Grégoire a vendu plus de 800 000 exemplaires de son album et est devenu

disque de diamant, une véritable prouesse pour un secteur en plein déclin. L’idée de pouvoir encore

vendre de la musique refait surface et redonne espoir à une industrie au bord du gouffre.

Toutefois ces labels -et les artistes qu’ils produisent-, réussiront-ils à perdurer et à durer sur le long

terme ? Car la faiblesse de ces nouveaux modèles est inévitablement de « vendre un rêve », de faire

espérer à une multitude de producteurs mais surtout d’artistes qu’ils sortiront du lot, et pourquoi pas

qu’ils deviendront la nouvelle star.

De plus, l’industrie musicale reste une industrie de masse. L’effet « pervers » de ce modèle est

donc de consacrer des artistes grand public. Pour récolter la mise, ils doivent inévitablement plaire au

plus grand nombre et faire consensus. Les artistes indépendants, novateurs ou provenant de genres

« confidentiels » ne seront à priori pas plus valorisés et visibles grâce à ce genre de système. Les

labels indépendants « dénicheurs de talents » gardent donc encore toute leur importance aujourd’hui.

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Les labels communautaires prolongent donc ce qui se faisait jusqu’ici mais les internautes producteurs

prennent aujourd’hui en quelque sorte la place des Directeurs Artistiques des maisons de disque en

choisissant les artistes qui seront produits et « mis sur le marché ». Moins risqué, l’investissement est

porté par ses producteurs, qui deviennent aussi un bassin important de fans et de promoteurs

potentiels.

L’avantage majeur de ces labels communautaires est-il donc finalement d’offrir -à la fois

aux artistes et aux internautes- une « première expérience » (humaine, musicale…), sorte

d’immersion et de découverte à un univers encore méconnu ? Cette visibilité permet aux artistes en

herbe-et même aux plus confirmés- d’appréhender le contact et les relations avec son public et

l’ « aventure » constitue pour les internautes une formation initiale délivrant avec parcimonie les

arcanes d’une industrie jusque-là verrouillée par le haut.

En sous-main, c’est ici l’avenir de la musique qui se joue également. En tentant de redonner du poids

–notammment marchand- à la musique, c’est toute la question de sa valeur qui est posée : le disque

a-t-il encore un avenir ? Ou comme l’écrit Borey Sok, « les prochaines générations n’associeront très

certainement pas la musique au CD » ? Est-ce la musique ou l’accès à la musique qu’il faut faire payer

? Autant d’interrogations qui trouveront certainement des réponseS dans prochaines années et

décideront de l’avenir de ce secteur d’activités unique et passionnant que constitue la musique.

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Tables des matières

Introduction

I. Fonctionnement de l’industrie musicale : anciens et nouveaux modèles

1. Fonctionnement « traditionnel » de l’industrie musicale

1.1. Les acteurs

1.2. Le disque

1.2.1. Evolution des supports

1.2.2. Les 3 étapes du disque

1.3. La chaîne de création de valeur en détails

1.4. Précis sur métier

1.5. Les acteurs traditionnels

1.5.1. L’industrie culturelle

1.5.2. Les majors : les « big four »

1.5.3. L’impératif de rentabilité de ces grands groupes

1.5.4. Les labels indépendants

2. Les conséquences de l’arrivée d’internet et de l a numérisation : les innovations et les

nouveaux modèles

2.1. Le crowdfounding

2.2 Les nouveaux acteurs dans la chaîne de production et de distribution

2.3. Les nouveaux labels : les labels communautaires ou participatifs

2.3.1. Le principe : le pionnier Sellaband

2.3.2. Focus sur 2 labels communautaires français

- Le pionnier français : My Major company : une « maison de disque nouvelle génération »

- Buzz My band

2.3.3. Les variantes

2.3.4 Tableau récapitulatif

2.3.5. Etude comparative

Tableau

Analyse : similitudes et différences

Problème retenu sous cette analyse

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II Contexte et distanciation théorique : l’arrivée de l’internaute producteur à l’heure de

l’industrie de masse et du web 2.0

1. Industrie culturelle, culture de masse et société de consommation : la consommation demasse

1.1. La société de consommation : Jean Baudrillard

1.2. Industrie culturelle et culture de masse

1.2.1. L’industrie culturelle : l’école de Francfort

1.2.2. La culture de masse

1.2.3. Spécificités du domaine musical

2. L’arrivée internet et le web 2.0 ou web social

2.1. Les 7 caractéristiques d’internet selon Olivier Abécassis

2.2. Joël De Rosnay : media de masse vs média des masses

2.2.1. Les quatre type de web

2.2.2. Le pronétariat

2.3. Eric Klinenberg et la concentration sur internet des contenus par les groupes d’infos

traditionnels

Problématisation théorique

III. Vers une évolution et une rééquilibrage des rôles au sein de l’industrie musicale

Méthodologie et hypothèse préalable

1. Synthèse des entretiens

1. Dirigeants

2. Artistes

3. Internautes

2. Analyse des résultats et réponse au problème

2.1. Vers un rééquilibrage des rapports au sein de la chaîne de création de valeur

2.1.1. Des changements…..

2.1.2. ….Faisant passer d’un modèle vertical à un modèle horizontal

2.1.3. …Qui ne doivent pas pour autant faire illusion : évolution mais pas Révolution

Conclusion

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Bibliographie-webographie

Bibliographie

- Musique 2.0, solutions pratiques pour nouveaux usages marketing, Borey Sok et OlivierAbécassis

- La révolte du pronétariat, Joel de Rosnay- Contenus numériques haut débit : thèse de l’OCDE de 2005- La culture de masse en France, 1860- 1930, Dominique Kalifa- naissance de l’individu dans l’art, TzvetanTodorov- La culture au pluriel, Michel De Certeau- Chapitres de Les Mondes de l'art, d’Howard Becker

Webographie

Sites des labels communautaires :

- My Major Company : http://www.mymajorcompany.com/- Buzz My Band : http://www.buzzmyband.com/- All in my music : http://www.allinmymusic.com/- Produce My live : http://www.producemylive.fr/- Slicethepie : http://www.slicethepie.com/- Artishare : http://www.artistshare.com/home/default.aspx- Kisskissbankbank : http://www.kisskissbankbank.com/- Akamusic : http://fr.akamusic.com/- Sellaband : http://www.sellaband.com/

Site de l’Irma : http://www.irma.asso.fr/ / http://www.irma.asso.fr/Le-marche-du-disque-gagne-8-dehttp://crd.irma.asso.fr/article.php3?id_article=62

Site de l’IFPI : http://www.ifpi.org/IFPI digital music report 2010IFPI rapport janvier 2010Extraits du rapport IFPI 2008 sur la musique numérique

Site du Snep : http://www.disqueenfrance.com/fr/Bilan économique SNEP 2010

Site de chartsenfrance : http://www.chartsinfrance.net/Site de Midem et midemnet : http://www.midem.com/en/Homepage/ Etude mondial sur la musique, Midemnet, janvier 2010

Numérama : http://www.numerama.com/ / Dossier : http://www.numerama.com/magazine/d/8072-Les-labels-communautaires-dont-vous-etes-producteurs.html

Journal du Net : http://www.journaldunet.com/

Site de la tribune : http://www.latribune.fr/accueil/a-la-une.html

Wikipedia

Industries culturelles : http://fr.wikipedia.org/wiki/Industrie_culturelle

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Majors : http://fr.wikipedia.org/wiki/Liste_des_majors_du_disqueProducteur : http://fr.wikipedia.org/wiki/Producteur

Mémoire en ligne sur l’industrie musicale :http://www.centor.ulaval.ca/cda/IndustrieMusique/FutursModeles.aspx :

Articles

http://www.lexpress.fr/culture/musique/les-internautes-prennent-le-pouvoir_512374.htmlhttp://www.numerama.com/magazine/14690-pomplamoose-34signer-avec-une-major-non-merci34.html

http://www.numerama.com/magazine/14918-musique-numerique-l-ifpi-oublie-de-dire-que-les-pirates-sont-aussi-des-consommateurs.html

http://www2.culture.gouv.fr/culture/deps/2008/colloques06.html

http://www.somusic.fr/html/metiersmusic/metiersmusic.html

http://www.scienceshumaines.com/index.php?lg=fr&id_dossier_web=12&id_article=5726http://www.slideshare.net/louamax/les-industries-culturelleshttp://blog.lefigaro.fr/medias/2010/01/midem-10-000-euros-par-mois-po.htmlhttp://www.challenges.fr/magazine/enquete/0196.028378

http://mespetiteshistoires.ericlallier.fr/post/2009/03/22/Labels-communautaires-:-illusion-ou-revolution

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Annexes

Interviews artistes

1. Petite biographie rapide ? Parcours

2. Comment avez-vous entendu parler de My Major Company ?

3. Quand vous êtes-vous inscrit ?

4. Combien de temps avez-vous mis à récolter les sous ?

5. Comment s’est passé l’enregistrement ? Etiez-vous libre dans vos choix, y’a-t-il un suivi ?

6. Quel a été le rôle des internautes producteurs, comment les avez-vous impliqués/ sollicités ?

Description en détails

7. Avez-vous des relations proches avec certains d’entre eux, les connaissez-vous ?

8. Qu’est ce qui les attire selon vous ?

9. Qu’apporte selon vous My Major Company ?

10. Voyez-vous des inconvénients, des choses à améliorer ?

Interviews internautes producteurs

1- Comment avez-vous connu le site ?

2- Depuis quand êtes vous inscrit ?

3- Pourquoi vous-êtes vous inscrit, qu’est ce qui vous intéressait ?

4- Qui avez-vous produit/ sur combien de personnes avez-vous misé ?

5- Combien de sous avez-vous misé en tout (environ) ?

6 -Comment avez-vous été impliqué dans le processus de production/ sollicité?

(Description précise des sollicitations, à quelle occasion …)

7- Avez-vous l’impression d’avoir de l’influence ou un réel poids sur les choix et les décisions relatives

à l’artiste et sa production ? (développer si possible)

8 -Quelles relations entretenez-vous avec les artistes, comment la qualifieriez-vous ?

9-Comment découvrez / cherchez-vous les artistes ?

10- A quelle régularité venez-vous sur le site, combien de temps y consacrez-vous ?

11- Etes-vous satisfait ou avez-vous des choses à redire, des améliorations à apporter ?

12-Selon vous, qu’est ce que change et apporte My Major Company ?