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L’animal dans l’art occidental (Antiquité 20 ième siècle) Conférence SPDV Nature

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L’animal dans l’art occidental (Antiquité – 20ième siècle)

Conférence SPDV Nature

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Synthèse sur la conception de l’animal dans la philosophie

Dans la tradition philosophique, la question de l’animalité est toujours posée du point de vue de l’homme. Elle ne porte pas directement sur la nature de l’animal, mais sur le propre de l’homme, sur la différence entre les natures animale et humaine :

continuité essentielle dans la pensée antique

différence de nature radicale dans la pensée chrétienne

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L’art parle des « bêtes » d’une manière parfois plus directe et plus

authentique que la philosophie, mais il n’échappe pas pour autant à ce perspectivisme.

A de rares exceptions près (Dürer), l’art ne prend l’animal comme sujet à part entière qu’à partir du 19ième siècle. Cet art animalier se développe au 20ième siècle (Robert Hainard).

L’histoire de l’animal dans l’Art est donc avant tout l’histoire de nos représentations du monde, de nos centres d’intérêt pratique et de nos croyances religieuses.

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La figure de l’Animal dans l’Art, avant de renvoyer à l’animal réel, exprime notre monde commun.

Avant de présenter chronologiquement quelques œuvres classiques centrées sur l’animal, essayons de nous repérer dans ce monde des mythes, des symboles et des récits qui se cache derrière la figure de l’animal.

?

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Le pouvoir symbolique de l’animal dans l’Art

Avant le 19ième siècle, l’animal est le plus souvent appréhendé dans l’art comme un symbole ou un miroir déformant, qui signifie ou reflète :

notre propre image, physique (le corps humain avec ses différentes expressions et transformations) ou figurée (notre âme avec ses passions).

les dieux (dans le paganisme) ou un aspect du Dieu unique dans le christianisme (l’agneau sacrificiel).

le Diable, la Bête de l’apocalypse, le Mal.

Il existe donc une polysémie, une multiplicité de sens de la figure animale dans l’art. L’animal comme symbole peut exprimer :

le Dieu unique ou les dieux,

l’homme dans tous ses états,

le cosmos entier.

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L’antiquité : le symbole au plus près de l’animal Dans la mythologie antique, et à son retour à la Renaissance, la

valeur symbolique de chaque animal renvoie à l’animal réel, à ses capacités supposées ou à la connaissance qu’on en a :

Par exemple, dans la mythologie égyptienne, le dieu Anubis, qui préside à l’embaumement et protège les nécropoles, est figuré par un chacal ou un chien sauvage, sans doute par référence à leur comportement charognard.

Les symboles sont flottants : un même animal peut renvoyer à plusieurs dieux; un dieu peut revêtir plusieurs figures animales ou une figure hybride homme-animal.

La symbolique animale ne s’organise pas selon un axe du Bien et du Mal: cette opposition absolue du Bien et du Mal n’a d’ailleurs pas grand sens dans l’Antiquité.

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Dragon ou Licorne: l’axiologie chrétienne

Le christianisme classe tous les animaux selon leur proximité supposée avec le Bien et le Mal et construit une « axiologie » qui se reflète dans l’art :

Chaque animal devient une lettre d’un alphabet symbolique qui occupe une place unique entre le Bien et le Mal : le serpent, le Dragon pour le mal extrême ; la licorne comme expression de la pureté absolue.

La symbolique chrétienne tire sa force de l’opposition entre les symboles : les gargouilles, figures de la « Bête » entre animal et Diable, se tiennent à l’extérieur des cathédrales pour définir les limites de l’espace consacré de la Cathédrale, où les fidèles sont accueillis dans la « paix de Dieu »

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Loup ou Mouton: l’anthropocentrisme

L’axiologie chrétienne s’accompagne souvent ou résulte, d’un classement des animaux, selon leur proximité avec l’homme :

Le Mouton : l’animal « domestique », utile, proche, familier, celui qui abandonne en partie l’ordre naturel, pour rentrer dans l’ordre humain, et donc dans le plan universel voulu par Dieu.

Le Loup, le Serpent : l’animal « sauvage », la « bête », qui refuse et s’oppose aux ordres humain et divin, et représente donc une sourde menace contre la société humaine et l’harmonie de la création.

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Le « Bestiaire » médiéval hiérarchise les animaux, en fonction de leur proximité avec l’homme et de leur utilité.

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Une axiologie dynamique

Pour la théologie chrétienne et l’art qui l’illustre, la position de l’animal sauvage est ambigüe :

Il occupe une place nécessaire dans la création divine, ce qui justifie qu’il ait sa place dans l’Arche et soit sauvé du déluge.

Mais il symbolise la part non maîtrisée et ouverte de la création divine, celle qui ouvre le « péché originel » (Serpent), comme sa résolution dans le jugement dernier (Bête de l’Apocalypse)

Pour cette raison, la place de chaque animal, même sauvage, entre le Bien et le Mal, n’est pas complètement figée : avant d’être finalement rejeté par la théologie chrétienne, l’Ours est admiré pour sa force et son courage.

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L’animal et l’homme comme clés d’interprétation :

Anthropomorphisme et Zoomorphisme

Anthropomorphisme : attribution de caractéristiques humaines, physiques ou comportementales à des animaux, des dieux, des phénomènes naturels…

Zoomorphisme : attribution de représentations ou de comportements animaux à l’homme, aux dieux, aux idoles, aux objets…

Appliqué à l’homme, le zoomorphisme devient un cas particulier de l’anthropomorphisme : l’homme et l’animal sont utilisés comme des symboles, des clés d’interprétation croisées

- l’animal renvoie à des comportements moraux chez l’homme : figure de cochon pour la gloutonnerie, le renard pour la ruse, le lion pour le courage et la fierté…

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La transformation effective :Dieu-Animal, Homme-Animal

L’art utilise donc l’animal pour ses qualités expressives afin de signifier tel dieu, tel attribut du Dieu unique, tel qualité ou défaut humain…

Mais l’art ne se limite pas au signe, au symbole, au second degré.

Il nous livre des récits et nous renvoie à des mythes fondateurs, dont l’animal est le héros.

Dans la nature continue de la mythologie grecque et latine, chaque

chose peut devenir toute chose, et tout peut passer en tout :

Les Dieux, et Jupiter lui-même, adoptent parfois volontairement l’apparence, ou la nature de l’animal, dans les Métamorphoses qui deviennent un thème récurrent dans l’art de l’Antiquité, et de sa reprise à la Renaissance.

L’homme peut être réduit malgré lui à la nature animale : ainsi le chasseur Actéon transformé en cerf pour avoir surpris la déesse Diane au bain ; ainsi les hommes d’Ulysse transformés en porcs par la magicienne Circé.

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Zeus lui-même se transforme en taureau pour séduire les nymphes

L’Enlèvement d’Europe – Le Titien – 1559-1562

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Mi Homme - Mi Bête

La métamorphose est un récit de transformation d’un moment à un autre, sans mélange : d’abord dieu ou homme, puis bête ou sous l’apparence de la bête.

Mais l’art nous présente aussi des créatures fantastiques, êtres hybrides, monstres, chimères, où plusieurs natures animale et humaine cohabitent ou fusionnent :

Minotaure (homme et taureau),

Centaure (homme et cheval),

Sirène (femme et poisson)

Gorgone (femme avec une chevelure constituée de serpents)

Pégase (cheval ailé)

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L’animal comme objet pictural indépendant

D’abord symbole renvoyant à l’homme ou aux Dieux, moment de la métamorphose, composant des chimères, la figure de l’animal dans l’art finit par s’émanciper, pour devenir un élément plastique à part entière :

Rendu de façon réaliste, comme élément décoratif secondaire du tableau, pour mettre en valeur la composition générale

Utilisé comme élément plastique indépendant (stylisé, simplifié, dans un processus allant jusqu’à l’abstraction)

Rendu de façon réaliste, pour lui-même, comme objet principal de la composition.

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Métamorphose

Métamorphose

Anthropomorphisme

Zoomorphisme

Demi Dieux Chimères

Zoomorphisme

Monstres Chimères

Animal

Dieu Homme Représentation

animale

L’art animalier

Animal comme motif pictural

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Petite histoire de l’animal dans l’art

Essayons maintenant de retrouver ces repères dans l’histoire de l’art : métamorphose, anthropomorphisme, zoomorphisme, animal comme figure plastique, animal pour lui-même…

Avec deux axes principaux : la pensée antique et le christianisme L’inspiration antique : - Pose une seule nature continue, entre l’animal, l’homme et les Dieux - Cette continuité permet des échanges effectifs entre l’animal, l’homme et les

Dieux (métamorphose, monstres, chimères…) - Cette inspiration revient à la Renaissance et persiste dans l’art classique et

académique

• L’inspiration chrétienne pose l’animal et l’homme comme deux natures distinctes :

- l’homme ne « passe jamais » dans l’animal - Mais l’homme et la représentation animale sont reliés symboliquement

(anthropomorphisme, zoomorphisme)

• Tout en respectant une tradition, l’artiste peut s’intéresser à l’animal pour lui-même et valoriser sa beauté comme élément pictural.

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Antiquité : l’art égyptien Cas typique d’un « zoomorphisme » où chaque dieu reçoit

plusieurs représentations animales, ou hybrides homme-animal

• Cette symbolique n’exclut pas un intérêt pour l’animal lui-même et une précision dans la représentation

L’animal ou l’hybride qui symbolise le Dieu est choisi pour la ressemblance de ses capacités et de son comportement avec les caractéristiques supposées du Dieu :

Bastet (2, 3) représenté par un Chat ou un hybride Humain-Félin symbolise la joie du foyer, la chaleur du soleil et la maternité

Seth (2): dieu de la confusion et du désordre. Représentation hybride, museau effilé et oreilles dressées, peut-être inspirée de l'oryctérope, un termitivore africain.

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Antiquité : l’art égyptien Une vaste mythologie qui met en scène les animaux présents à l’époque

dans la plaine du Nil : on n’y trouve pas d’éléphant, de rhinocéros ou de girafe.

Chaque animal donne lieu à de nombreuses variations avec des hybrides, et un procédé d’abstraction dans les hiéroglyphes (Seth 1, 2).

Le lien entre la représentation animale et les dieux est exclusivement symbolique

Car les dieux de l’Egypte (contrairement au Panthéon grec et latin) sont séparés radicalement des hommes et des animaux:

- les dieux meurent symboliquement (meurtre d’Osiris par Seth), renaissent sous d’autres formes, mais restent des dieux

- il n’y a pas de métamorphose des dieux en hommes ou en animaux, ou de « monstres », d’hybridation réelle entre les dieux et les humains

Pour s’y retrouver, Wikipédia fournit un index croisé :

- De la représentation animale au dieu associé

- Du dieu à ses différentes représentations animales

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Antiquité : l’art grec

Continuité de nature dans le Cosmos, entre l’animal, l’homme et les dieux qui permet tous les passages d’un degré à l’autre (« métamorphose ») et tous les mélanges (êtres hybrides, monstres, chimères)

Cet imaginaire va inspirer tout l’art occidental

• Exactitude dans la représentation de l’homme et de l’animal qui va être prise comme modèle à la Renaissance et dans le classicisme

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Antiquité : l’art grec Les Etres Hybrides :

Pégase (1): cheval ailé, monté par le héros grec Bellérophon dans son combat contre la Chimère.

Le thème de Pégase est repris à la Renaissance, à l’époque classique, et jusqu’au 20ième siècle

Méduse ou gorgo (1): divinité à visage humain et chevelure de serpent, dont le regard peut pétrifier tout mortel.

Comme celui de Pégase, le thème est repris à la Renaissance et à l’âge classique.

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Antiquité : l’art grec La représentation « réaliste et tragique » de l’art grec

Laocoon et ses fils (1):

- Représente le combat de Laocoon et de ses fils contre les serpents envoyés par le Dieu Apollon

- Cette statue redécouverte à la Renaissance impressionne fortement par son réalisme et aura une forte influence sur Michel Ange…

- Elle traduit parfaitement le sens grec du tragique (le combat perdu d’avance des hommes contre le Destin, représenté par les serpents envoyés par un Dieu), le sens du détail réaliste et de la composition

- Elle définit un domaine proprement humain, intermédiaire entre l’animal (figuré par les serpents) et le divin (Apollon) et une dignité spécifiquement humaine : un combat sans espoir contre le destin.

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Antiquité : Rome

La reprise de la mythologie et de la symbolique grecques

L’art grec circule et est imité dans tout l’empire romain : c’est ce qui permet la redécouverte de la sculpture précédente « Laocoon et ses fils » à Rome, au début du 16ième siècle

•L’animal dans les mythes fondateurs de Rome La louve avec les jumeaux Rémus et Romulus

• Un courant « réaliste » qui décrit les animaux familiers

Les animaux sont aussi décrits pour eux-mêmes, sans aucune intention symbolique, et replacés dans la fonction qui leur est assignée par la société romaine : -Animaux domestiques utilisés dans l’agriculture : scènes « bucoliques », âne, coq, chien de berger -Animaux utilisés dans les sacrifices : bœuf -Oiseaux : colombes, (2) -Animaux de compagnie : chien de garde, chat -Animaux utilisés dans le « cirque » à Rome : félins…

• L’animal utilisé comme élément décoratif dans les mosaiques

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Le Moyen-âge

•L’animal est partout présent dans l’art du Moyen-âge :

-statuaire, gargouilles dans les cathédrales -tapisseries -fresques -manuscrits enluminés dont les « bestiaires » consacrés aux animaux •Dans le monde médiéval centré sur l’église, la représentation de l’animal renvoie le plus souvent à la symbolique chrétienne : le Bien, le Mal, Dieu, le Diable, la Création. • Dans sa lutte contre le Paganisme, la chrétienté s’approprie tous les animaux comme symbole : - elle leur attribue un sens positif ou négatif, en bousculant souvent la culture populaire -l’ours (1), célébré par les celtes, est réduit à la figure d’un animal balourd et devient un des symboles du Diable

-Dossier de Wikipédia sur la hiérarchie animale au Moyen-âge

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Le Moyen-âge : les bestiaires

Les bestiaires ou « livre des natures des animaux » ont un objectif moral : enseigner les valeurs chrétiennes

Ils adoptent un point de vue anthropomorphique, pour que les animaux, dotés de sentiments et de personnalités comparables à l’homme, puissent servir d’exemple

Lion

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Le bestiaire : un ordre théologique et anthropocentrique

Tous les êtres sont hiérarchisés, dans une échelle dont l’homme occupe le sommet : d’abord les bêtes sauvages en commençant par le lion, puis les animaux domestiques, puis les petites bêtes - fourmis, oiseaux, insectes. Très éloignés du « naturalisme », ils font cohabiter des animaux réels (le lion), des animaux imaginaires (licorne, sirène), et des représentations fantastiques d’animaux réels (ici la PANTHERE, à gauche !)

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Le Moyen-âge : l’animal dans les enluminures

Symbole moral dans le bestiaire, l’animal est utilisé comme élément pictural indépendant dans les manuscrits enluminés, aux côtés de symboles végétaux et géométriques Il occupe aussi les marges du manuscrit où il remplit souvent une fonction satirique, dans un monde inversé (« marginal ») où les lapins poursuivent les chiens…

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Le Moyen-âge : l’animal dans la vie courante

Symbole moral et élément pictural, l’animal est aussi représenté pour lui-même, comme dans la Rome Antique Il est mis en scène dans les différentes situations où il apparaît dans la vie médiévale : - animaux domestiques, basse-cour - chasse, animaux sauvages

•Document de synthèse de la BNF sur la représentation de l’animal au Moyen-âge •Fiches de synthèse BNF : 1, 2, 3

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La Renaissance

•La découverte de la Perspective ouvre l’espace de la représentation : -Au Moyen-âge : le tableau forme un espace clos, avec des directions symboliques (le haut et la droite, l’or et le bleu pour le divin et le sacré, le bas ou la gauche, et les autres couleurs pour le monde terrestre et le Mal) - A la Renaissance : espace ouvert qui donne sur le grand « théâtre de la Nature »

•La redécouverte de l’Antiquité et de la symbolique antique La perspective, avec ses nouveaux codes représentatifs, va mettre en scène les mythes antiques, comme dans un théâtre : -la Métamorphose, - les Etres Hybrides Mi Homme-Mi Bête, -les aventures des Dieux grecs avec les humains

• La symbolique chrétienne cohabite avec un retour au paganisme -Par prudence ou simplement pour se faire comprendre, les œuvres s’inscrivent en apparence dans la tradition chrétienne : scènes bibliques, références au Jardin d’Eden, à l’Enfer. -Mais ces thèmes sont prétexte à la virtuosité du peintre •L’animal pour lui-même, à la marge ou sujet central de l’œuvre

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Paolo Uccello

•L’animal intervient comme élément plastique dans de vastes compositions : -Scènes de chasse -Batailles

•Un bestiaire fantastique : -Thème initial d’inspiration religieuse -Variation autour du thème qui donne une « série » de tableaux : Saint George et le Dragon : (2) (3)

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Jérôme Bosch

Triptyque « Le Jardin des Délices » •Thèmes traditionnels de la théologie chrétienne : le Jardin d’Eden, le Paradis, l’Enfer •Mais ces thèmes sont détournés pour exposer la symbolique alchimique : cornues, creuset, alambic… •L’animal occupe une place importante dans le monde de Bosch avec plusieurs significations :

-religieuse :l’animal du Bestiaire chrétien qui accompagne Adam et Eve dans le jardin d’Eden ;

-être hybride : animalité des démons dans le panneau « l’enfer »

-description précise, naturaliste des animaux à la « marge » du tableau (1)

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Léonard de Vinci

• Etudes animalières très précises -Traduit la passion de Vinci pour l’anatomie, animale ou humaine -Etudes « d’anatomie comparée » qui analyse le mouvement

•L’animal intervient aussi comme élément plastique dans les tableaux : Parfois central : « la Dame à l’hermine » (1)

•Un bestiaire fantastique chez Vinci Combat entre le dragon et le lion

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Albrecht Dürer

• Chez Dürer, l’animal est souvent représenté pour lui-même : -Un véritable art animalier avec une précision naturaliste : -oiseaux, mammifères, insectes, croqués sur le vif - études anatomiques

•L’animal intervient comme détail, avec une fonction symbolique : Le chien émacié dans la gravure « La mélancolie »

•Intérêt pour les animaux exotiques : dans les gravures : -Le Rhinocéros -Le Morse

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Mathias Grünewald

Thèmes traditionnels de la théologie chrétienne : L’agneau mystique dans le Retable d’Issenheim (2)

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Pieter Brueghel dit « l’Ancien »

•Thèmes traditionnels de la théologie chrétienne : l’Arche de Noé • Mais ces thèmes sont exploités pour mettre en scène : -de véritables études animalières

- un gout pour les animaux exotiques

- comme chez Jérôme Bosch, une représentation fantastique : la « chute des Anges Rebelles »

•L’animal occupe une place importante dans les scènes de la vie quotidienne Scènes de chasse

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La Tapisserie de la Dame à la Licorne

•Un résumé sur la représentation de l’animal à la Renaissance : La tapisserie réunit dans la même composition : -l’animal dans sa fonction symbolique (la Licorne, symbole de pureté) -l’animal, considéré de façon réaliste, pour lui-même (détails), -l’animal comme élément décoratif, voire comme symbole héraldique (le lion royal)

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La période « classique »: le 17ième siècle

•Siècle d’or de la célébration de l’Antique, avec ses variations mythologiques •Moins d’originalité qu’à la Renaissance : souvent une représentation conventionnelle du mythe -Animaux fabuleux : le cheval ailé Bellérophon Persée délivrant Andromède, de Rubens Persée monté sur Pégase, transperce la chimère, de Rubens

•Dans le classicisme, l’animal est souvent réduit à un élément de la composition du tableau, d’une nature morte … -Jan Fyt : Nature Morte avec Perroquet

• Mais les thèmes antiques sont parfois revisités, dans des interprétations surprenantes - Monstre La Méduse par Rubens (à noter l’étude réaliste des serpents et de la Salamandre)

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La période « classique »: les exceptions

• Persistance d’un intérêt pour l’animal en tant que tel : •Composition « théâtrale » centrée sur l’animal : -Jan Fyt : Concert d’oiseaux -Rubens : chasse au léopard et au lion Esquisse, étude précise d’animaux : • Rembrandt : études animalières

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Le 18ième siècle

• L’animal peut être rendu sur le vif, mais il reste en général un détail dans la composition du tableau : •Chez Chardin, natures mortes traitées comme des scènes de la vie courante où l’animal domestique (ici le chat) joue un rôle important •Le 18ième est le siècle du théâtre -On retrouve cette théâtralité dans la peinture, et dans la manière de « mettre en scène » l’animal, dans des récits tragiques, comiques ou moraux (illustration des fables de la Fontaine)

- Tous ces aspects sont présents dans l’œuvre de Jean-Baptiste Oudry

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Le 19ième siècle

Francisco de Goya Par ses dates et son art, il est intermédiaire entre le 18ième et le 19ième et annonce souvent le 20ième par sa modernité : -l’animal comme figure mythologique (le sabbat des sorcières avec le Diable représenté par un Bouc) - l’animal pour lui-même, et comme figure expressive : ici le chien comme expression de la solitude et de l’attente - la corrida -l’animal comme représentation des états de l’âme : l’étonnement, l’angoisse… • Dans la deuxième moitié du 19ième, l’animal perd progressivement sa fonction symbolique (religieuse, mythologique, expressive) et devient un sujet artistique autonome : -Considéré comme un centre d’intérêt en tant que tel (art animalier qui se développera au 19ième et 20ième siècle) -Considéré pour sa valeur picturale ou décorative : en ce sens, sa représentation va suivre tous les courants artistiques au 19ième et 20ième siècle (académisme, romantisme, impressionnisme, cubisme…)

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Le 19ième siècle

Académisme -L’animal est un élément pictural comme un autre - Les règles de la peinture académique exige un rendu « réaliste » ou réputé tel (le réalisme tient plus dans le « léché » de la peinture, que dans une observation précise)

-Jean-Léon Gérome Impressionnisme

Le terme ne désigne pas un courant homogène, mais une réaction face à l’académisme : il y a d’énormes différences de style et d’intention entre des peintres comme Manet, Degas, Monet, Van Gogh… Aucun de ces grands peintres n’a mis l’animal au premier plan, mais leurs œuvres cachent parfois de bonnes surprises.

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Le 19ième siècle : l’impressionisme

Degas -Peinture des courses de chevaux à Paris -Mais aussi observation des animaux domestiques à la campagne

Manet L’animal est un élément saisi sur le vif, dans une composition d’ensemble : clin d’œil du peintre à son prédécesseur Chardin : Olympia

Van Gogh

-Traitement naturaliste de l’animal dans la première période, en Hollande : Vache

Animal traité dans le style propre à Van Gogh : crabe

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Le 19ième siècle : l’impressionisme

Monet Dans la logique impressionniste, l’animal est traité comme les autres éléments picturaux du tableau, dans lequel il se perd : Le peintre met en scène la même recherche de matière et de lumière que dans le paysage. -Oies -Tête de chien

Gauguin On peut pratiquement dire la même chose que pour Monet : l’animal chez Gauguin est un élément figuratif, un motif pictural qui est traité en larges aplats de couleurs, sans volume, comme les autres parties du tableau ( 1 ) Dans certaines œuvres, l’animal reprend une fonction symbolique, dans des scènes mystérieuses qui préfigurent le surréalisme. Chez Renoir et Klimt, l’animal occupe une place mineure Auguste Renoir : chameau Gustav Klimt

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Le 19ième siècle : les inclassables

Gustave Courbet Par sa touche au rendu précis et son intérêt pour les scènes de genre (l’enterrement à Ornans), Courbet se distingue résolument du courant impressionniste. Mais il partage avec eux un même refus de la peinture Académique et un même rejet de la part des peintres officiels (le « Salon »). Rendu réaliste de l’animal sauvage : Renard dans la neige Et des scènes de chasse Le Douanier Rousseau Autodidacte, peintre dit « Naïf », Henri Rousseau sera admiré par les peintres surréalistes et par Picasso. Il laisse une œuvre magnifique et inclassable dans lequel l’animal occupe une place non négligeable.

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Le 19ième siècle : l’art animalier

L’art s’est toujours préoccupé, de façon marginale, de l’animal pour lui-même (Dürer, Vinci, Rembrandt…) Mais le 19ième voit se développer un véritable « art animalier », qui devient très populaire : les sculptures de Barye sont reproduites dans de nombreux objets décoratifs. Cet art, qui ne rejette pas les préoccupations formelles, mais met l’animal et l’observation naturaliste en avant de la scène, se développera pendant tout le 20ième, parallèlement à l’art officiel. -Antoine Louis Barye

-Sculptures -Peintures

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Le 20ième siècle : Pablo Picasso

•L’œuvre de Picasso ne se réduit pas au cubisme et traverse tous les courants du 20ième siècle. •L’animal est souvent présent dans l’œuvre et suit toutes les évolutions plastiques et les transformations. •Quelques thèmes récurrents : •La corrida, auquel Picasso restera attaché •L’animal utilisé comme symbole : -le cheval blessé de Guernica symbole de la guerre, -la Colombe symbole universel de la paix - le symbole mythologique •Le croquis : les animaux en un trait •Le processus d’abstraction :la série des taureaux

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Le 20ième siècle : Marc Chagall

•Parmi les artistes non spécialisés dans la représentation de l’animal (art animalier), Chagall est le peintre qui fait la plus belle place à l’animal : - Les figures animales, présentes dans un grand nombre de tableaux, contribuent à leur côté chaleureux et leur force symbolique ;

-Pas un rendu réaliste, mais des interprétations qui partent de l’observation et montrent un intérêt pour les animaux domestiques, de ferme…

Œuvre complexe qui incorpore tous les courants du 20ième siècle, dont le cubisme, tout en gardant une grande spontanéité

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Le 20ième siècle : l’animal comme élément pictural

•En dehors de l’art animalier, seul Chagall et à un degré moindre Picasso, accordent une place non négligeable à l’animal. •Pour les autres grands peintres du 20ième : -l’animal est un élément pictural parmi d’autres, traité comme le reste de l’œuvre -on peut reconnaître Amedeo Modigliani dans ses chats anthropomorphes

- et Paul Klee, dans ses variations géométriques colorées zoomorphes

- Vassily Kandinsky dans ses variations cubistes autour de l’animal (et Franz Marc dans la même inspiration : chevaux) - Le surréalisme de René Magritte dans ses êtres hybrides Mi-homme Mi-Bête

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Le 20ième siècle : l’art animalier

•Un courant consacré à l’animal, qui laisse une large part à l’observation, sans abandonner une intention esthétique •Un Bref aperçu : •Sculpture : André Lasserre •Peinture et dessin sur le vif : Robert Hainard • Galerie d’art sur la peinture animalière •Synthèse Wikipédia sur l’art animalier