la thérapie familiale systémique, une éthique

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Planche - systémique... Mis à jour Vendredi, 11 Juillet 2014 16:09 La thérapie familiale systémique, une éthique relationnelle : questions et interventions en alcoologie Cécile Planche, psychologue clinicienne  ♦ Historique de la vision du symptôme : de l’individuel au systémique. ♦ Freud et la psychanalyse. ♦ Les cognitivo-comportementalistes (Eyzenck, Cottraux, Wolpe) ♦ Les humanistes (Carl Rogers ; analyse transactionnelle : Berne ; Gestalt : Perls ; Bioénergie : Reich). 1 / 20

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La thérapie familiale systémique, une éthique relationnelle :questions et interventions en alcoologie

Cécile Planche, psychologue clinicienne

 

♦ Historique de la vision du symptôme : de l’individuel au systémique.

♦ Freud et la psychanalyse.

♦ Les cognitivo-comportementalistes (Eyzenck, Cottraux, Wolpe)

♦ Les humanistes (Carl Rogers ; analyse transactionnelle : Berne ; Gestalt : Perls ;Bioénergie : Reich).

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♦ Les systémiciens (Ecole de Palo Alto : Bateson, Erickson, Haley, Watzlawick).

♦ Historique de la thérapie familiale

« La thérapie familiale apprivoisée » Claude Villeneuve, Angels Toharia Presses de l’Universitéde Montréal ERES Relations, 1997

♦ L’épistémologie systémique.

♦ Indications d’intervention systémique.

♦ Différentes approches selon les écoles  et différentes techniques.

♦ Approche familiale en alcoologie.

♦ Les étapes du cycle familial.

Un thérapeute hors du commun : Milton Erickson,

Jay Haley, EPI, Desclée de Brouwer, 1984.

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♦ Structure et dynamique familiale

Familles en thérapie, Salvador Minuchin,

Ed. Universitaires, 1983.

La guérison familiale, Salvador Minuchin, ESF, 1996.

Thérapie familiale structurale, principes de base, Barbara de Franck-lynch, ESF, 1986.

♦ Mythes familiaux et visions du monde

« Temps et mythe en psychothérapie familiale »  Maurizio Andolfi, ESF, 1990.

♦ Approche clinique systémique en alcoologie :

Processus pré-thérapeutique envers l’entourage, conjoint, parent, ami ou collègue.

Le processus thérapeutique avec la famille et le patient.

 

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La thérapie familiale : une éthique relationnelle

La thérapie familiale systémique a évolué de façon rapide au cours des soixante dernièresannées. C’est un mouvement qui a suscité beaucoup d’enthousiasme et qui a donné lieu à unfoisonnement d’écoles différentes. Elle a connu aussi beaucoup de réactions négatives. Ellepeut donner l’impression d’être un amalgame de notions et de techniques disparates, et il y aeu souvent confusion entre la conception systémique, les différentes approches, et lestechniques utilisées.

La pensée individualiste domine dans notre monde occidental. Elle met au premier plan laresponsabilité individuelle, et néglige de considérer l'interdépendance des problèmespsychologiques, héritière de la pensée psychanalytique qui s’intéresse au conflitintra-psychique. Mais l’approche systémique ne renie pas les apports psychanalytiques. Il y apeu de désaccords entre les psychanalystes et les thérapeutes familiaux. Les différencesportent sur le cadre de référence théorique et sur les pratiques .

Historique de la vision du symptôme : de l’individuel ausystémique

Le développement des sciences a naturellement influencé les pratiques thérapeutiques et enconséquence, la signification donnée à la maladie et au symptôme en psychopathologie aconsidérablement évolué. Au début du 20ème siècle, le symptôme est toujours la conséquenced’une cause organique. Le malade seul est l’objet du soin, car la maladie est en lui. Cetteconception médicale pèse encore en psychiatrie traditionnelle dans les maladies mentales. Ellea été utile car elle a permis, grâce aux progrès de la chimie, de fabriquer des médicamentsefficaces et d’améliorer le comportement du malade.

Freud a inventé la psychanalyse. Pour lui le Moi se construit dans la tension entre la pulsion(le ça) et l’interdit (le surmoi). Le symptôme apparaît comme un compromis entre la pulsion etson interdit ce qui fonde et révèle notre conflit intrapsychique. Nos névroses sont des conflitsinfantiles non résolus (on souffre des choses qui viennent de soi-même) et le symptôme actuelest l’aboutissement d’événements anciens. Toute recherche et explication s’oriente vers lacompréhension du passé, ce qui est la condition préalable à tout changement dans le présent.

Le psychanalyste écoute son patient et l’amène dans son cadre de référence et l’analyse dutransfert à déchiffrer la signification profonde du symptôme en reliant ses troubles présents àson histoire fantasmatique passée. Nos forces inconscientes nous dominent, leur élucidation

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progressive amène à la prise de conscience de notre conflit intrapsychique et à « la guérison desurcroît ». Cette approche est basée sur le principe de la causalité linéaire, car elle est soumiseau temps, et sur l’étude d’un phénomène isolé du contexte. A noter, que cette approche estutile en termes de prévention et de recherche.

Les cognitivo-comportementalistes (Eyzenck, Cottraux, Wolpe) s’intéressent à lapersistance d’un comportement passé vécu dans certaines circonstances. Il a eu valeur deprotection, mais le contexte ayant changé, il cesse d’être adapté. Cette approche est assezpragmatique et pédagogique. Elle est indiquée en particulier pour les phobies, certainesangoisses ou dépressions pas trop sévères. Elle utilise le plus souvent un programme en 12étapes.

Les humanistes (Carl Rogers ; analyse transactionnelle : Berne ; Gestalt : Perls ; Bioénergie :Reich) considèrent que la nature humaine est fondamentalement bonne. Ils conçoivent  lamaladie comme une gêne momentanée au processus de croissance de la personne. Tous (lamère de famille, le cadre d’entreprise, l’homme politique, l’adolescent…) peuvent s’adresser àla thérapie pour développer leur potentiel ou pour un mieux-être. Cependant, même si lathérapie se fait en groupe, pour répondre aux besoins fondamentaux de la personned’appartenir à un groupe et d’en être reconnue, elle reste centrée sur l’individu. Aujourd’hui auxEtats-Unis la psychologie positiviste et les « thérapies du bonheur » sont héritières de cettepensée humaniste.

Les systémiciens (Ecole de Palo Alto : Bateson, Erickson, Haley, Watzlawick) se détournentde la notion de pathologie individuelle.

Ils réinsèrent  l’individu dans son contexte, le considèrent  comme un système ouvert surd’autres systèmes, et le restituent dans la complexité de ses interactions psychologiques,familiales, sociales, culturelles et trans-générationnelles.

L’intérêt est porté sur comment cela se passe chez un individu au niveau de la communication(modélisation de la communication : PNL : Grinder et Bandler, Cayrol) et au niveau desinterrelations avec son entourage familial et social, et dans ses interactions culturelles ettransgénérationnelles.

Historique de la thérapie familiale

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« La thérapie familiale apprivoisée » Claude Villeneuve, Angels Toharia Presses de l’Universitéde Montréal ERES Relations, 1997.

La thérapie familiale naît dans les années 50. Elle se développe à l’école de Palo Alto enCalifornie. Un groupe de chercheurs d’origine scientifiques diverses, anthropologues,psychanalystes, ethnologues, biologistes, vivant aux 4 coins des USA se réunissent dans uncollège invisible pour échanger leurs idées, leurs pratiques, et mettre en commun leursobservations. Les travaux de ce groupe se sont orientés selon 3 grands axes de recherche :une théorie de la communication, une méthodologie du changement, et une pratiquethérapeutique. Leur référence commune, c’est la démarche systémique.

Grégory Bateson est anthropologue. Il étudie le rôle des paradoxes dans la communication. JayHaley est psychiatre, thérapeute des psychotiques, s’intéresse à la schizophrénie et à la notionde patient désigné, Don Jackson, développera le concept d’homéostasie. Milton Erikson,psychiatre et hypnothérapeute, mettra sur pied une forme de thérapie familiale fondée surl’intervention active du thérapeute, en mettant en relief les mécanismes d’influence entre lethérapeute et son patient. Plus tard, Paul Watzlawick va diffuser les recherches et lessystématiser et faire connaître les idées de Palo Alto.

L’épistémologie systémique

La théorie systémique est d’abord une nouvelle conception des problèmes humains. Elle se détourne de la notion de pathologie individuelle en insistant sur l’importance du contextedans le développement et l’entretien des problèmes. L’attention du systémicien ne va pas portersur un individu malade, différent des autres, mais sur la scène familiale où se déroule l’action,sur les règles de ce jeu, et de ce drame interactionnel. Il considère la famille comme uncontexte, et non comme un objet de soin.

Elle est secondairement une méthode thérapeutique basée sur cette conception. Elleimplique une restructuration des hypothèses concernant le changement, la pathologie, le cadrede référence et le processus thérapeutique, où les concepts traditionnels sont hors-champ ausujet de l’individu normal ou pas normal, sain ou malade.

Le systémicien travaille avec l’hypothèse que le symptôme ou le sujet qui le supporte ne sont

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pas la cause des difficultés, mais une tentative de solution pour réguler le problème conflictuellatent familial et maintenir un certain équilibre du groupe (homéostasie).

Les solutions tentées jusqu’à maintenant maintiennent et exacerbent les problèmes. Elles ontfait leurs preuves à un moment donné mais sont devenues inappropriées car la situation achangé. Quand les membres d’une famille sont pris au jeu sans fin, il faut mettre un pointd’arrêt à la solution inefficace. C’est pour cela que le thérapeute devient actif.

Le systémicien va explorer avec la famille la manière dont elle a construit sa réalité et sonproblème. Ensemble, ils vont tenter d’introduire de nouvelles règles relationnelles, chercher unlevier de petit changement vers un grand changement, afin de modifier le fonctionnement dusystème ce qui rendra le symptôme caduque et où on pourra se passer du patient-symptôme.

Indications d’intervention systémique

L’intervention systémique est particulièrement bien indiquée :

-    quand les éléments de la demande sont dispersés dans le groupe familial : un sujetprésente une demande, un autre présente un symptôme, plusieurs en souffrent. Le cadresystémique permet de répondre comme si toute la famille était présente, et facilite d’introduireles autres membres dans le traitement, au fur et à mesure de leur motivation et de leurcoopération.

-    quand le symptôme apparaît comme un élément organisateur et fédérateur du groupefamilial, il est plus efficace de faire le travail avec le système plutôt qu’avec lemalade-symptôme, (notamment quand il est absent de la séance), quand il y a interdépendanceet proximité excessive entre les membres de la famille, et que la transaction comportementaleet relationnelle montre ce qui ne peut être dit. Le symptôme fait partie intégrante des stratégies(le plus souvent inconscientes) interrelationnelles familiales et quand la famille est impliquéedans le développement de la dépendance, il est opportun de l’engager vers plus d’autonomie.

-    quand il est essentiel d’établir un climat de collaboration plutôt que de rivalité avec la famille

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(comme souvent dans toute maladie chronique d’ordre psychiatrique ou physique). Letraitement qui met à contribution la famille permet de réduire les conséquences psychologiques,sociales, économiques, et diminue le nombre des hospitalisations. Le systémicien considèreque la famille est un lieu où l’on peut se soigner, que ses membres ont un potentiel deressources et de compétences pour soutenir le patient désigné. Il ne s’intéresse pas tant à ceque l’un fait à l’autre, mais à ce qu’ils font ensemble et il valorise et active les capacitésd’entraide.  L’engagement de la famille dans le traitement amène des modifications à plusieursniveaux, intrapsychique, et interpersonnel, ce qui augmente les chances de voir survenir unchangement durable.

Selon les écoles, l’approche est différente :

Jay Haley et l’Ecole de Milan s’intéressent aux interactions de la communication verbale etcomportementale. L’approche est centrée sur le processus, les règles et les rôles etl’observation des alliances et des coalitions. (cf. les thérapies cognitivo -comportementalistes etl’analyse transactionnelle).

Minuchin (approche structurale) travaille sur la hiérarchie familiale et les frontières entre lesgénérations. Donc, il s’agit de restructurer la famille de manière à faire disparaître lessymptômes. Le changement dans la structure familiale est censé entraîner des changementschez l’individu.

Ruffiot (approche psychodynamique) met l’accent sur la dynamique familiale (mythe familial,valeurs et règles).

L’approche constructiviste donne toute la place à la subjectivité. Les opinions du thérapeutecomme celles de la famille, sont des constructions subjectives. Le but thérapeutique estd’arriver à une compréhension co-construite qui convienne aux différents membres du systèmethérapeutique. Les croyances et le sens ou la signification des problèmes et des situationsprésentés doivent être changés.

La thérapie orientée vers la solution, dite brève,  (De Shazer, Insoo Kim Berg ScottMiller, Bill O’Halon) met l’accent sur les forces de la famille et sur la solution. Les problèmessont situationnels plutôt que contextuels. Les questions-clefs : non pas le pourquoi, mais

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comment faire pour améliorer ?  Quels sont les moments où il n’y a pas de problèmes etqu’est-ce qu’il se passe alors ? Le thérapeute ne se centre non pas sur les problèmes mais surles solutions, non pas sur les difficultés mais sur les compétences et les ressources. Il invite lafamille à se confier des tâches telles qu’ils les ont déjà réussies dans leur vie ou qu’ils peuventà nouveau réussir.

Différentes techniques au cours des conversations thérapeutiques  sont pratiquées parles thérapeutes, prescription du symptôme, recadrage paradoxal, questions circulaires,connotations positives, autoprescriptions de tâches, la question miracle,  interprétation destransferts latéraux et verticaux, etc... Elles seront utilisées au cours d’un même traitement, defaçon séquentielle et complémentaire, tout en gardant la théorie des systèmes comme cadre deréférence et comme théorie du changement.

Le clinicien va élaborer et construire son modèle thérapeutique en fonction de la famille àlaquelle il s’adresse, en fonction de l’éthique de cette famille, et en fonction de l’étude de sapropre famille d’origine et sa propre éthique. Le cadre systémique crée un espace de jeu et desymbolisation, où des processus relationnels peuvent se remettre en jeu, et où la famille pourrachoisir d’autres lectures du monde (le jeu étant le système naturel de symbolisation que nousavons à notre disposition)

Approche familiale en alcoologie

Chaque famille, comme chaque individu, est soumise au cours de son développement à uneéthique inconsciente pour assurer la continuité et la cohésion de la structure familiale dans unmouvement double et apparemment contradictoire : l’un vise à maintenir la stabilité, l’autre viseà s’adapter, c’est à dire à changer, or, tout changement est une perturbation. Pour les famillesalcooliques, le changement est une menace, un paradoxe, qui les met dans une impasse. Lanécessité de maintenir les liens familiaux évite la déstabilisation et la désintégration familiale,mais l’intolérance au lien, la difficulté de se désengager, et les conflits sous-jacents qui enrésultent favorisent l’apparition de symptômes tournés contre soi-même et contre la famille.Ainsi, les symptômes alimentaires, l’anorexie, la boulimie, les troubles psychosomatiques, lesviolences, les abus, l’alcoolisme, la toxicomanie sont des tentatives de différenciation etd’autonomisation ratées qui révèlent des conflits de loyautés entre les membres etparadoxalement renforcent les liens vis à vis de l’organisation familiale. L’alcoolisation de l’undes membres de la famille est une tentative malencontreuse pour éviter les conflits et ondiscutera du produit ou du sujet-symptôme à la place de la question insoluble. Il est importantde repérer la fonction de cette alcoolisation au sein de la famille. Ici, sont étudiées troisapproches : les étapes du cycle familial, la structure familiale, le mythe familial.

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Les étapes du cycle familial

Un thérapeute hors du commun : Milton Erickson,  Jay Haley, EPI, Desclée de Brouwer, 1984.

A un moment où la famille se trouve dans une situation inextricable, l’un de ses membresdéveloppe un symptôme dépressif, phobique, autre, comme pour assurer la continuité et lacohésion du groupe. Le traitement devra alors considérer ces troubles, ou cette crise, dans ladimension relationnelle et familiale. L’intervention consiste à aider la famille à passer à uneautre étape, à activer l’évolution des individus dans le système, tout en maintenant des liens.Cette approche permet de repérer quelle est la fonction du symptôme relative à l’étape difficileà franchir pour tel couple ou telle famille.

L’élément fondateur d’une famille, c’est le couple, soit deux personnes non liées par laconsanguinité et qui ont cependant un lien de parenté. Quelle que soit le genre de relation quiexiste quand les partenaires se courtisent, la nature de cette relation change radicalement lorsde la vie commune et après le mariage. Les conjoints doivent se mettre d’accord sur un certainnombre de points : sur les aspects pratiques de la vie en commun, sur leurs relations avec leursfamilles et leurs amis respectifs, sur leurs décisions. Les messages adressés l’un à l’autre sontchargés de signification affective selon ce qui a été appris dans leur famille d’origine.

Exemple : Si l’un prend l’initiative des dépenses, est-ce un comportement d’aide et d’implicationdans la gestion du budget, ou la preuve de l’incapacité de son conjoint, ou la marqued’une pression exigeante ? Est-ce dans la famille d’origine un rôle dévolu à l’épouse ou aumari ?

L’implication des parents, trop d’aide ou trop de distance peut semer la discorde. L’art consisteà faire respecter son indépendance de couple tout en maintenant des liens affectifs avec lesparents.

Exemple : si Monsieur a un attachement très important avec sa mère, et s’il ne peut l’empêcherde se mêler des affaires du couple, l’épouse peut manifester un comportement ou un symptômepour orienter l’attention de son mari sur elle. Ou Monsieur lui-même développe un symptômecomme pour adopter une attitude pseudo-indépendante  vis à vis de sa femme.

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L’un peut ainsi « manipuler »  l’autre avec les armes de la faiblesse, de la force (violencephysique ou verbale) ou de la maladie pour maintenir la stabilité du couple avec des réponseset des solutions peu adaptées et peu satisfaisantes.

La venue d’un enfant donne un caractère définitif à la relation conjugale. La naissance del’enfant ravive les problèmes anciens et en soulève de nouveaux. L’enfant accentue l’autonomiedu couple par rapport aux familles d’origine, mais aussi renforce l’engagement dans le systèmetransgénérationnel. Quand le système conjugal est menacé, l’enfant renforce le systèmeparental, au détriment du système conjugal, et peut devenir l’enjeu de conflits.

Exemple : si la mère se laisse accaparer par la maternité, et si le père se sent exclu, car il netrouve pas chez sa femme de soutien affectif, il peut vivre à son insu un état dépressif, etdévelopper un comportement pathologique.

Arrive l’étape où l’enfant quitte la maison pour la crèche ou l’école. Il ne pourra s’adapter àun système de règles différentes que si le schéma du comportement familial ne s’y oppose pas.Pour les parents, il y a anticipation du moment où l’enfant quittera définitivement la maison etoù ils se retrouveront face à face. Et l’éducation qu’ils prodiguent à l’enfant est exposée auregard de tous. S’il y a des conflits, ils deviennent plus évidents, que ce soit au niveau del’enfant, des parents ou des grands-parents.

Exemple : si la grand-mère « s’allie » avec l’enfant contre la mère qu’elle « traite » donccomme la grande sœur de l’enfant, l’un ou l’autre parent (ou l’enfant) peut développer unsymptôme gênant pour tous.

L’adolescence impose un nouveau système de règles. L’ordre hiérarchique précédent estremis en question. Les parents se retrouvent devant des enfants devenus adultes du mêmesexe, et leur fonction parentale va devenir quasi inutile. C’est une étape très importante : pourl’adolescent qui doit se dégager de sa famille sans rupture et adopter de nouveauxcomportements affectifs avec ceux de son âge ; pour les parents qui doivent apprendre à secomporter différemment envers lui pour qu'il évolue à rejoindre le monde des adultes   et entreeux, car désinvestis des tâches éducatives, leur lien parental disparaît pour laisser toute la

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place au lien conjugal.

Exemple : quand les adolescents quittent définitivement la maison, une crise peut se produireau niveau conjugal et entraîner une séparation ou un divorce ou d’autres symptômes. Ouencore quand parents et adolescents restent très attachés, le jeune va être incapabled’aménager sa vie personnelle, affirmera une pseudo-indépendance. Certains adolescentsrestent des enfants pour protéger la relation parentale : toutes sortes de symptômes peuventapparaître dans une génération ou l’autre.

La retraite ouvre sur de nouvelles difficultés.

Exemple : une femme peut manifester un symptôme pour rendre utile son mari, alors qu’il peutse sentir mis au rencard. C’est une manière de protéger l’autre .

Devenir grands-parents peut provoquer de nouveaux conflits quand les rapports entre lesgénérations ont été trop étroits ou trop lâches. Chaque génération dépend de celle qui laprécède et de celle qui lui succède selon des mécanismes complexes que l’on comprend enobservant les ruptures qui se produisent.

Structure et dynamique familiale

Familles en thérapie, Salvador Minuchin, Ed. Universitaires, 1983

La guérison familiale, Salvador Minuchin, ESF, 1996

Thérapie familiale structurale, principes de base, Barbara de Franck-lynch, ESF, 1986

Les symptômes apparaissent quand il y a absence ou rigidité des frontières entre lesgénérations, absence ou rigidité de frontières dans la hiérarchie familiale et quand il y a une

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lutte pour le pouvoir. L’intervention consiste à définir les rôles de chacun dans la famille, sur leplan de l’organisation hiérarchique, à renforcer l’autorité parentale, et un autre partage dupouvoir au niveau conjugal, quant aux décisions concernant les relations intrafamiliales etsociales. Cette approche permet de repérer les modes de relations à l’intérieur de la famille etde l’aider à communiquer, c’est à dire à faire circuler l’information et la communication les unsavec les autres, à l’aide de questions circulaires : « vous êtes très proche avec votre petitdernier, qu’est-ce qu’en pense votre mari, les autres enfants… »

Quand une famille est fonctionnelle, on peut schématiser sa structure ainsi :

Père   Mère

----------------

G1  G2  F1

Cela indique qu’à l’intérieur de ce système les adultes détiennent les commandes et que leslimites sont clairement définies entre le système des adultes et le système des enfants. Chaquemembre de cette famille a une place déterminée et justifiée selon l’ordre des naissances. Laproximité affective et la distance émotionnelle indispensable s’équilibrent bien. La dynamiqueinteractionnelle de cette famille serait que les adultes prennent leurs décisions après s’êtremutuellement concertés, demandent leur avis aux enfants et en tiennent compte, selon leurâge. La communication est directe et souple entre les uns et les autres.

Quand une famille est dysfonctionnelle sur le plan structural, on peut observer plusieursschémas. La dynamique interactionnelle de ces familles peut favoriser des conduitesd’alcoolisation chez l’un de ses membres qui se retrouve à une place inappropriée pour son âgeou son stade de développement. Le développement affectif et l’autonomisation vont êtrefreinés. On peut retrouver une transmission de la pathologie et de la dépendance sur plusieursgénérations.

L’approche structurale comporte 3 axiomes : il est bon de délimiter la frontière

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intergénérationnelle, il est bon de délimiter la frontière sexuelle, il est bon de favoriserl’individuation par la différenciation : les parents doivent avoir plus de pouvoir que les enfants.

Exemples de structures familiales dysfonctionnelles dans la fiche ci-après.

Mythes familiaux et visions du monde

« Temps et mythe en psychothérapie familiale »  Maurizio Andolfi, ESF, 1990

Les symptômes apparaissent comme une tentative de préserver un sentiment d’appartenanceet d’identité liée à une vision du monde, une croyance, un mythe familial fondateur partagé partous, pour maintenir la continuité malgré le saut des générations. L’identité familiale esttransmise à travers les générations par un processus au cours duquel ses membres ont àrépondre à deux messages apparemment contradictoires : « sois conforme et sois différent ».Le milieu familial présente souvent  des modèles d’identification assez rigides. On retrouvedans les familles les plus rigides de manière plus aiguë le mythe du sacrifice, le mythe de lafatalité et d’un destin d’échec, de honte et de culpabilité, le mythe de l’objectivité (lesévénements collent aux pensées fantasmatiques), et le mythe de la conformité.

L’intervention consistera à reconnaître l’identité familiale, ses valeurs, ses modèles, puis àrenforcer le groupe familial sur le plan narcissique, ensuite à proposer d’autres modèles,d’autres lectures, et à développer une autre mythique relationnelle. Ce sera le dévouement,l’entraide, la responsabilité des actes, la subjectivité, l’ambivalence des désirs et dessentiments, etc…

Exemple : Dans certaines familles, les événements collent aux pensées fantasmatiques. Ils fontécran pour soutenir le mythe familial. Les désirs, les sentiments et les pensées sont refouléspour maintenir la cohésion du groupe. La différenciation et l’autonomisation font courir le risquede la déstabilisation et de la désintégration du groupe. Et l’angoisse du refoulé se manifestedans le symptôme.

Certaines familles « enchevêtrées » tendent à attirer leurs membres qui n’ont pas le droit de

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s’extérioriser, ni d’affirmer leurs personnalités et leurs différences, et ont des frontières maldéfinies dans la même génération et entre les générations. D’une génération à l’autre dansl’histoire d’une famille apparaissent des schémas répétitifs. Par fidélité ou loyauté au modèlefamilial, l’un des membres comme pour réaliser une dette, va perpétuer en écho le mythefondateur familial par des conduites mortifères, comme pour se créer un sentiment d’identité etd’appartenance : sois malade, je t’aimerai.

D’autres familles « désengagées » tendent à expulser leurs membres, car elles ressententle monde extérieur comme la source majeure de gratification. Les enfants ne trouvent pas lemode de relation satisfaisant à l’intérieur de la famille, mais sont incapables d’en créer àl’extérieur. Le mythe du monde extérieur meilleur risque d’organiser les symptômes contre lesautres et vers l’extérieur de la famille : colère, abandon, vandalisme, terrorisme, délinquance,bagarres, violences, meurtres. Ces familles sont peu structurées.

Analyser le comportement familial, c’est saisir la vision du monde de la famille et l’identitéqu’elle se donne à elle-même, par rapport aux autres et à la société. Si un groupe ne peut pluscroire en ses valeurs et en ses modèles, il va devenir passif, et les aides extérieures deviennentextrêmement difficiles. Si l’on ne reconnaît pas son identité, la famille va se sentir critiquée, etva accentuer ses modes de défense, et risque d’être en danger. Si l’on brise le mythe familialen forçant la différenciation, la famille sera menacée dans son identité, et l’on provoqueral’implosion ou l’explosion, ou une crise, qui ne pourra donc pas être élaborée à ce moment tropprécoce. La famille ne restera pas, et répétera ce processus avec d’autres soignants à coupsd’hospitalisations, par exemple, jusqu’à revenir au fonctionnement précédent. Pour les familles« enchevêtrées », la thérapie permettra d’accéder à la différenciation tout en gardant des liensaffectifs. Les familles « désengagées » sont peu accessibles à la thérapie, mais attirentl’attention des institutions extérieures.

Approche clinique systémique en alcoologie :

Processus pré-thérapeutique envers l’entourage, conjoint, parent, ami ou collègue

Quand la première demande est initiée par un membre de l’entourage, il est d’abord important :

-  de valoriser la personne qui cherche à résoudre le problème, d’accueillir sa souffrance, detransformer l’angoisse en attention, de soutenir sa capacité de bienveillance et de fermeté,  àêtre responsable face à une situation éprouvante où elle est consciente des difficultés et

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cependant démunie, d’inviter à l’entraide familiale et à la solidarité sociale en sollicitant laresponsabilité de chacun et la responsabilité civile s’il y a lieu.

-  ensuite de donner quelques informations sur les processus d’alcoolisation, d’abstinence et deréalcoolisations.

Pour orienter la façon de penser sa relation avec le malade et sur la situation :

-   explorer la demande : qui se montre le plus préoccupé par la situation ?

Pour s’appuyer sur les souhaits d’engagement thérapeutique éventuel.

-   explorer la souffrance : qui souffre le plus de la situation ? la façon de penser sur lesrelations « à quel degré de relation de confiance êtes-vous ? qui est le plus proche sur le planaffectif ? en avez-vous parlé ? et comment ? lui avez-vous dit votre inquiétude ?

Pour amorcer une définition des relations, des fonctions et des rôles.

-   explorer le symptôme pour évaluer à quel point la situation est alarmante : qui pose le plusde problème à la famille ? quand le symptôme est apparu ? Comment il a évolué ? Commentest-il est régulateur et générateur de tensions, de conflits, quelles tension, quels conflits ?

-   évaluer les conséquences pour les uns et pour les autres

Pour explorer les motivations de changement éventuel de chacun.

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-   explorer les changements relationnels souhaités

Pour définir les objectifs.

Et pour faire saisir les niveaux différents d’intervention thérapeutique, complémentaires,ultérieurement (avec le médecin, la famille, puis éventuellement avec le malade seul) ce quiprépare les futurs cadres thérapeutiques (familial, conjugal, et individuel,

Pour proposer le traitement le plus adéquat.

Examiner comment la personne peut revenir avec la personne désignée malade.

Le processus thérapeutique avec la famille et le patient

Dans un premier temps le thérapeute redéfinit le problème à  partir des effets observés, àpartir des boucles répétitives dans lesquelles les institutions et les autres groupes se retrouventinclus dans des répétitions aliénantes, comment chacun contribue à bloquer le temps, àorganiser et maintenir le pouvoir, ou à se soumettre à une croyance commune.

Il pose des limites, et invite à soutenir des décisions d’entraide et de protection.

Puis, il est nécessaire de dissocier les problèmes d’alcool des problèmes relationnels pouramener à organiser la vie en fonction des conséquences de l’alcoolisation et non en fonction del’alcoolisation elle-même. Le thérapeute incite chaque membre de la famille à jouer un rôle actifet à participer à l’intervention à l’aide de questionnements circulaires :

-  d’évaluer les conséquences des alcoolisations pour chaque membre de la famille.

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-  D’anticiper d’autres conduites possibles c’est à dire de rendre prévisibles les transactionscomportementales et verbales, quand il y a des alcoolisations et/ou quand il n’y a pasd’alcoolisations.

Les alcoolisations s’espacent, voire diminuent, voire disparaissent.

Dans un deuxième étape, Les périodes de sobriété sont des moments propices à l’expressiondes conflits, le conjoint pouvant se décharger et réagir spontanément. Le thérapeute invite lafamille à faire face à ses difficultés : on va définir les malentendus, les conflits relatifs auxdifférences de points de vue individuels, menaces et sources de conflits aux niveauxémotionnels, perceptif, cognitif, interactionnel, etc… Chacun va pouvoir exprimer un avisdifférent de l’autre, et le thérapeute va réintroduire les paradoxes comportementaux, verbaux etmythiques.

Lors de la troisième étape, le thérapeute invite à déployer les ressources personnelles etinterpersonnelles  pour proposer d’autres éléments fédérateurs et organisateur du groupe autreque l’alcool, c’est à dire une autre vision du monde, (entraide, plaisir d’être ensemble,communication émotionnelle, etc...) Ce qui instituera de nouvelles règles relationnelles (oul’inverse).

(Des réalcoolisations peuvent apparaître, comme des signes pour évaluer la validité deschangements amorcés.

A la quatrième étape, le thérapeute va connoter leur détermination, énoncer les risques

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physiques et sociaux, redonner un cadre dans lequel sont annoncées les propositionscontradictoires, et stimuler la capacité de la famille à trouver ses propres solutions.

La fin de la thérapie arrive quand la famille est capable de résoudre elle-même ses conflits.

Au décours des séances, le recadrage thérapeutique réintroduit le paradoxe dans le cadrefamilial, et non plus dans la communication. C’est à dire, permet d’accepter un mode defonctionnement qui autorise la coexistence des antinomies homéostasie et changement,individuation et cohésion familiale, vie et mort, (ceci dans la mesure où le cadre des systèmeshumains est nécessairement paradoxal). Les changements s’opèrent à partir des transfertslatéraux à l’intérieur du système thérapeutique (famille et thérapeute) et des transferts verticauxdes individus et du groupe envers le thérapeute, et les contre-transferts du thérapeute enversles individus et le groupe.

N.B. Quand les enfants ou adolescents sont impliqués et présents dans l’entretien, l’objectif estde soutenir les adultes et de décharger les enfants d’intervenir dans l’alcoolisme du parent et deson traitement pour éviter les règlements de comptes stériles et destructeurs.

La thérapie familiale : une éthique relationnelle

Cette approche contextuelle relève d’une éthique relationnelle :

Quand l’alcoolisation est devenue trop évidente ou trop gênante, la famille a tendance à secentrer sur celui qui est le responsable apparent du problème et pense que si l’alcoolisationdisparaît, la vie conjugale et familiale va s’améliorer. Et quand les conduites d’alcoolisation ausein d’un couple ou d’une famille perturbent le fonctionnement du groupe, simultanément lesproches réagissent de manière rigide et stéréotypée au fur et à mesure des changements decomportement du malade alcoolique. Il en sera de même au cours des processus d’abstinence.

L’intervention familiale permet idéalement :

-  de cesser les tentatives inefficaces de l’entourage à raisonner le malade, le culpabiliser, lui

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faire la morale, le fliquer, faire appel à sa volonté, ne rien dire pour éviter les conflits, ou fairepression pour qu’il se soigne, et de transformer ce contexte traumatique et angoissant en uncontexte bienveillant et non jugeant.

-  de prendre en compte tous les personnes concernées. Et de travailler sur les processussous-jacents aux symptômes et aux problèmes, sur la signification des phénomènesactuellement dans les histoires actuelles inter personnelles et transgénérationnelles etd’amener des modifications à un niveau intra-psychique et interpersonnel ce qui augmente leschances de voir survenir un changement durable.

-  de favoriser un équilibre entre confiance, tolérance, sollicitude, équité, et responsabilité, enrestituant la capacité à résoudre les conflits -qui sont naturels et non pathologiques- et detrouver un nouvel équilibre où l’alcoolisation est absente.

Tous les membres concernés ont besoin de ces éléments pour la survie ou la permanence deleur relation.

Je vous remercie.

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