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La réponse du lapereau à la phéromone mammaire. Régulations et impact potentiel de la domestication G. COUREAUD 1 , H. RÖDEL 2 , D. MONTIGNY 1 , C. KURZ 2 , B. SCHAAL 1 1 Centre Européen des Sciences du Goût, UMR 5170 CNRS/UB/INRA, 21000 Dijon, France 2 Département de Physiologie Animale, Université de Bayreuth, Allemagne Résumé. Les lapereaux nouveau-nés localisent et saisissent les tétines maternelles grâce à des signaux odorants émis par la lapine allaitante. La phéromone mammaire (PM) présente dans le lait de lapine constitue un tel signal: à la naissance, elle déclenche le comportement typique de recherche-saisie orale permettant la tétée chez plus de 90% des lapereaux. Cette forte réponse à la PM se maintient au moins jusqu’à J10, dans les heures qui précèdent la tétée quotidienne. Toutefois, des résultats récents révèlent que cette réponse est progressivement régulée par l’état de faim de l’animal, et qu’elle décroît entre la naissance et le sevrage, au fur et à mesure que la sensorialité du lapereau et sa relation avec la mère évolue. Par ailleurs, ces modulations semblent se développer différemment selon que les lapereaux sont élevés en animalerie ou en conditions semi-naturelles. Cet article propose une synthèse de ces différents résultats. Abstract. The behavioural response of young rabbits to the mammary pheromone : regulations and potential impact of domestication. Newborn rabbits localize and seize the maternal nipples in following odour cues emitted by lactating females. The mammary pheromone (MP) carried in rabbit milk is one of these cues: at birth, it releases the typical searching-oral grasping behaviour allowing to suck in more than 90% of pups. Then, the responsiveness remains high until day 10, before the daily sucking. However, recent results suggest that the responsiveness becomes progressively regulated between birth and weaning by two kinds of mechanisms: physiological factors associated with satiation, and factors associated to changes in the sensory capacities of pups and in the mother-young relationships. Moreover, these regulations appear to develop differently in laboratory housing conditions and in semi-natural conditions. Here, we propose a review of these different results. Introduction A la naissance, l’olfaction joue un rôle souvent déterminant dans la communication mère-jeunes, car les odeurs émises par le corps maternel influent sur le comportement que le nouveau-né exprime pour localiser les tétines et les prendre en bouche (Rosenblatt, 1983; Schaal, 2005). L’impact que ces odeurs ont sur le comportement du jeune résulte soit d’apprentissages précoces (in utero, le foetus est par exemple capable d’apprendre des odeurs nouvelles provenant de l’alimentation de la mère; cette capacité est partagée par le nouveau-né; Stickrod et al., 1982; Delaunay-El Allam et al., 2006), et/ou de mécanismes prédisposés, c’est-à-dire fonctionnels en absence d’apprentissage. La phéromone mammaire (PM) illustre, chez le lapin, l’existence d’un signal prédisposé intervenant dans la communication de la mère et du jeune. La PM, présente dans le lait de toute lapine, est en effet spontanément active à la naissance, en dehors de tout apprentissage prénatal apparent (Coureaud, 2001; Schaal et al., 2003). De façon forte et directe, elle déclenche quasi-instantanément le comportement d’approche et de tétée chez plus de 90% des nouveau- nés à qui elle est présentée (Coureaud et al., 2006a, 2007). Au contact de la mère, la PM est donc supposée intervenir dans le guidage du lapereau vers les tétines, et dans la prise de lait. Par ailleurs, de façon plus indirecte, elle promeut l’apprentissage rapide de nouvelles odeurs, initialement neutres, qui deviennent à leur tour capables de déclencher le comportement de tétée (Coureaud et al., 2006b). Ce résultat illustre (parmi d’autres) la plasticité cognitivo-cérébrale fonctionnelle chez cette espèce au cours de la période périnatale (Bilkó et al., 1994; Hudson, 1985; Coureaud et al., 2002). En résumé, l’efficacité du comportement de tétée du lapin nouveau-né dépend à la fois de la co-action et de l’interaction de mécanismes précablés (phéromonaux) et de processus plastiques dépendants de l’expérience (apprentissages). Cependant, si le comportement du jeune mammifère est régulé par des déterminants extérieurs tels que les odeurs maternelles, il peut également être contrôlé par des régulateurs internes, eux-mêmes susceptibles de moduler la réponse aux signaux extérieurs. Ainsi, chez le raton, la localisation et prise en bouche des tétines maternelles est gouvernée par des stimuli extéroceptifs durant les deux premières semaines de vie postnatale, avant de devenir contrainte par les mécanismes de la satiété (Hall et Rosenblatt, 1977; Blass, 1990). Cette régulation, par des processus internes, du comportement du nouveau-né répondant aux odeurs maternelles existe également chez l’Homme: alors qu’avant la tétée l’odeur du lait déclenche des mimiques faciales positives chez le bébé de 3 jours, les mimiques deviennent négatives après la prise de lait (Soussignan et al., 1999). Un autre type de régulation susceptible de modifier la réponse du jeune aux odeurs maternelles est liée à l’évolution de la relation mère-jeunes. Si la fonction de certaines odeurs est d’aider le nouveau-né dans son interaction avec la mère, au cours de la tétée, on peut 12èmes Journées de la Recherche Cunicole, 27-28 novembre 2007, Le Mans, France 3

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La réponse du lapereau à la phéromone mammaire.Régulations et impact potentiel de la domestication

G. COUREAUD1, H. RÖDEL2, D. MONTIGNY1, C. KURZ2, B. SCHAAL1

1Centre Européen des Sciences du Goût, UMR 5170 CNRS/UB/INRA, 21000 Dijon, France2 Département de Physiologie Animale, Université de Bayreuth, Allemagne

Résumé. Les lapereaux nouveau-nés localisent et saisissent les tétines maternelles grâce à des signaux odorants émis par la lapine allaitante. La phéromone mammaire (PM) présente dans le lait de lapine constitue un tel signal: à la naissance, elle déclenche le comportement typique de recherche-saisie orale permettant la tétée chez plus de 90% des lapereaux. Cette forte réponse à la PM se maintient au moins jusqu’à J10, dans les heures qui précèdent la tétée quotidienne. Toutefois, des résultats récents révèlent que cette réponse est progressivement régulée par l’état de faim de l’animal, et qu’elle décroît entre la naissance et le sevrage, au fur et à mesure que la sensorialité du lapereau et sa relation avec la mère évolue. Par ailleurs, ces modulations semblent se développer différemment selon que les lapereaux sont élevés en animalerie ou en conditions semi-naturelles. Cet article propose une synthèse de ces différents résultats. Abstract. The behavioural response of young rabbits to the mammary pheromone : regulations and potential impact of domestication. Newborn rabbits localize and seize the maternal nipples in following odour cues emitted by lactating females. The mammary pheromone (MP) carried in rabbit milk is one of these cues: at birth, it releases the typical searching-oral grasping behaviour allowing to suck in more than 90% of pups. Then, the responsiveness remains high until day 10, before the daily sucking. However, recent results suggest that the responsiveness becomes progressively regulated between birth and weaning by two kinds of mechanisms: physiological factors associated with satiation, and factors associated to changes in the sensory capacities of pups and in the mother-young relationships. Moreover, these regulations appear to develop differently in laboratory housing conditions and in semi-natural conditions. Here, we propose a review of these different results.

IntroductionA la naissance, l’olfaction joue un rôle souvent déterminant dans la communication mère-jeunes, car les odeurs émises par le corps maternel influent sur le comportement que le nouveau-né exprime pour localiser les tétines et les prendre en bouche (Rosenblatt, 1983; Schaal, 2005). L’impact que ces odeurs ont sur le comportement du jeune résulte soit d’apprentissages précoces (in utero, le foetus est par exemple capable d’apprendre des odeurs nouvelles provenant de l’alimentation de la mère; cette capacité est partagée par le nouveau-né; Stickrod et al., 1982; Delaunay-El Allam et al., 2006), et/ou de mécanismes prédisposés, c’est-à-dire fonctionnels en absence d’apprentissage. La phéromone mammaire (PM) illustre, chez le lapin, l’existence d’un signal prédisposé intervenant dans la communication de la mère et du jeune. La PM, présente dans le lait de toute lapine, est en effet spontanément active à la naissance, en dehors de tout apprentissage prénatal apparent (Coureaud, 2001; Schaal et al., 2003). De façon forte et directe, elle déclenche quasi-instantanément le comportement d’approche et de tétée chez plus de 90% des nouveau-nés à qui elle est présentée (Coureaud et al., 2006a, 2007). Au contact de la mère, la PM est donc supposée intervenir dans le guidage du lapereau vers les tétines, et dans la prise de lait. Par ailleurs, de façon plus indirecte, elle promeut l’apprentissage rapide de nouvelles odeurs, initialement neutres, qui deviennent à leur tour capables de déclencher le

comportement de tétée (Coureaud et al., 2006b). Ce résultat illustre (parmi d’autres) la plasticité cognitivo-cérébrale fonctionnelle chez cette espèce au cours de la période périnatale (Bilkó et al., 1994; Hudson, 1985; Coureaud et al., 2002). En résumé, l’efficacité du comportement de tétée du lapin nouveau-né dépend à la fois de la co-action et de l’interaction de mécanismes précablés (phéromonaux) et de processus plastiques dépendants de l’expérience (apprentissages).Cependant, si le comportement du jeune mammifère est régulé par des déterminants extérieurs tels que les odeurs maternelles, il peut également être contrôlé par des régulateurs internes, eux-mêmes susceptibles de moduler la réponse aux signaux extérieurs. Ainsi, chez le raton, la localisation et prise en bouche des tétines maternelles est gouvernée par des stimuli extéroceptifs durant les deux premières semaines de vie postnatale, avant de devenir contrainte par les mécanismes de la satiété (Hall et Rosenblatt, 1977; Blass, 1990). Cette régulation, par des processus internes, du comportement du nouveau-né répondant aux odeurs maternelles existe également chez l’Homme: alors qu’avant la tétée l’odeur du lait déclenche des mimiques faciales positives chez le bébé de 3 jours, les mimiques deviennent négatives après la prise de lait (Soussignan et al., 1999). Un autre type de régulation susceptible de modifier la réponse du jeune aux odeurs maternelles est liée à l’évolution de la relation mère-jeunes. Si la fonction de certaines odeurs est d’aider le nouveau-né dans son interaction avec la mère, au cours de la tétée, on peut

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faire l’hypothèse que ces signaux sont moins influents lorsque le jeune se rapproche du sevrage et que son alimentation n’est plus exclusivement lactée. Le fait que certaines odeurs maternelles n’agissent qu’au cours d’une période limitée du développement du jeune a, par exemple, été révélé chez les rongeurs (Leon et Moltz, 1972). Dans ce contexte, le lapin est très propice à l’étude de la régulation précoce du comportement exprimé par le jeune en réponse aux odeurs maternelles. La connaissance de la PM et de la réponse qu’elle engendre chez le nouveau-né, et le fait qu’une seule tétée par jour intervienne chez cette espèce, offrent en effet la possibilité de tester la réactivité du lapereau à cette odeur en fonction du stade prandial et de l’âge. La suite de cet article résume certains résultats obtenus récemment à ce sujet.

1. Modulation de la réponse à la phéromone mammaire par le stade prandialSi l’on savait (Coureaud, 2001; Schaal et al., 2003) que la réponse des nouveau-nés à la PM était forte dans les minutes qui précèdent la tétée (c’est-à-dire dans une période d’éveil sensoriel et comportemental élevé; Jilge, 1993), on ne savait en revanche pas si cette réponse évoluait chez l’animal ayant ingéré du lait. Afin de le déterminer, Montigny et al. (2006) ont présenté la PM à des lapereaux de 2, 5 et 10 jours (n = 473 lapereaux, de 95 portées) de 6h à 5 min avant la tétée quotidienne (contrôlée à heure fixe), et de 5 min à 12h après. Pour les tests réalisés post-tétée, il était vérifié par pesée individuelle que les lapereaux avaient ingéré plus de 10% de leur poids en lait. Le test comportemental permettait d’établir si la PM déclenchait le comportement oro-céphalique typiquement exprimé lors de la tétée. Dans ces conditions, les nouveau-nés de 2 jours répondaient très fortement à la PM (> 94%), et cela quelle que soit la période de la journée. En revanche, chez les lapereaux de 5 jours, la fréquence de répondants, toujours haute avant la tétée, chutait significativement 5 min après cette dernière (> 48%). A 10 jours, cette baisse de la réponse s’accentuait 5 min après la tétée (< 24%), alors que les lapereaux continuaient à répondre de façon soutenue avant l’entrée de la femelle dans le nid (> 63%; Figure 1). Ainsi, le contrôle par l’état de faim de la réponse à la PM semble se développer en deux temps. De la naissance à J2, la réponse parait quasi-automatique, dans la mesure où elle est indépendante de rétrocontrôles post-ingestifs. Cela est cohérent avec l’idée d’une haute valeur adaptative de cette odeur chez le tout jeune lapereau (Schaal et al., 2003; Fortun-Lamothe et al., 2007), liée au fait que les premières tétées sont cruciales car l’animal doit absolument obtenir du lait (Coureaud et al., 2000). Ensuite, entre J5 et J10, une modulation de la réponse par les facteurs prandiaux s’établit, modulation qui aboutit au maintien d’une réponse élevée du lapereau à la PM juste avant la tétée, c’est-à-dire dans la

période du nycthémère où cette réponse a effectivement une chance d’aboutir à la prise de lait.

Figure 1. Proportions de lapereaux de 2, 5 et 10 jours exprimant le comportement de tétée suite à la présentation de PM 5 min avant ou 5 min après la tétée quotidienne. Les lettres indiquent une différence significative (p<0.05) entre la proportion de répondants avant et après tétée, pour un jour donné. ( D’après Montigny et al.,2006).

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2. Evolution de l’émission de la phéromone mammaire avec la lactationSi la PM est un signal extrêmement réactogène pour le lapin nouveau-né, on peut se demander ce qu’il en est chez l’animal en âge de quitter le nid. Ce dernier devient en effet apte à accéder à l’aliment solide de façon quotidienne et répétée, et il est progressivement amené à s’éloigner de la mère pour poursuivre une vie autonome. On peut donc faire l’hypothèse que le fait de répondre à la PM par le comportement de tétée perd de son intérêt pour le lapin ayant moins, ou n’ayant plus, besoin de lait. En parallèle, on peut s’interroger sur la constance de l’émission de la PM par la lapine au cours de la période de lactation, alors qu’elle-même est amenée à sevrer sa portée, donc à interrompre son interaction multi-sensorielle avec ses jeunes. Là encore, on peut faire l’hypothèse que la production de PM par la femelle décroît au fur et à mesure que la lactation avance. Cette dernière hypothèse a fait l’objet d’une étude conduite auprès de 18 lapines dans leurs 2ème et 23ème

jours de lactation, et de 90 lapereaux de 2 jours d’âge (Coureaud et al., 2006a). Dans un premier temps, nous avons comparé la réponse des nouveau-nés à l’odeur du lait de femelle prélevé en début ou en fin de lactation. La PM étant un composé volatil présent dans l’odeur du lait, l’hypothèse était que si son émission par la lapine changeait au fil des jours, l’activité du lait en tant que déclencheur du comportement de tétée devait évoluer. Effectivement, le lait dans son entier s’est avéré très réactogène auprès des lapereaux nouveau-nés lorsqu’il provenait de femelles dans leur 2ème jour de lactation (> 80% de répondants). En revanche, il ne l’était quasiment plus lorsqu’il était prélevé au 23ème jour de lactation (< 7% de réponses).

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Dans un deuxième temps, nous avons évalué si cette chute de réponse à l’odeur du lait était simultanée à une chute d’émission de la PM par la lapine, donc à une diminution de cette dernière dans le lait. Par une approche couplant chromatographie et spectrométrie de masse, nous avons montré que le composé mono-moléculaire correspondant à la PM (2-méthyl-2-buténal; Coureaud, 2001; Schaal et al., 2003) était 4 fois moins présent dans le lait de J23 que dans celui de J2 (Figure 2). Ainsi, une corrélation existe entre la moindre présence de PM dans le lait à l’approche du terme de la lactation, et la faible réponse des nouveau-nés envers ce lait. Ce résultat conforte l’idée d’un rôle joué par la PM dans la prise de lait, vitale, des premiers jours de vie postnatale. Figure 2. Proportions de lapereaux de 2 jours exprimant le comportement de tétée suite à la présentation de lait de femelles prélevé dans leurs 2ème

ou 23ème jour de lactation, et concentration moyenne de PM dosée dans le lait de ces femelles (D’après Coureaud et al., 2006a).

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3. Evolution de la réponse à la phéromone mammaire en fonction de l’âge, en conditions d’élevage et en conditions semi-naturellesEn parallèle du changement intervenant chez la femelle quant à l’émission de PM en fonction de la lactation, la question se pose de savoir si une évolution avec l’âge du comportement exprimé envers la PM intervient du côté de l’animal receveur de ce signal, le lapereau.Cette question a été développée dans le cadre d’une étude (Coureaud et al., sous presse) durant laquelle la réponse des lapereaux à la PM (comportement de tétée) a été suivie de la naissance au sevrage (effectué entre J33 et J35). Les résultats (ici simplifiés) confirment que les lapereaux y répondent fortement (avant tétée) durant les 10 premiers jours de vie postnatale, moins lorsque leurs yeux s’ouvrent, puis de moins en moins jusqu’au sevrage (Figure 3). Ainsi, la réponse des lapereaux à la PM chute avec l’âge, alors que dans le même temps la production de cette odeur diminue chez la femelle allaitante. Cette évolution convergente de l’émission et de la réception

d’un signal initialement impliqué dans la communication entre la femelle et sa portée, pourrait contribuer à l’acquisition de l’autonomie des jeunes envers la mère, et au détachement de la mère à l’égard de ses jeunes. Figure 3. Proportions de lapereaux de 2, 10 et 22 jours élevés en conditions d’élevage (barres grises; n = 90, de 18 portées) ou en milieu semi-naturel (barres noires; n = 63, de 19 portées) répondant à la PM. Les lettres indiquent des différences statistiques (p < 0.05) entre les jours pour une condition donnée, et les * des différences entre les conditions pour un jour donné. D’après Coureaud et al. (sous presse).

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Par ailleurs, l’étude de Coureaud et al. (sous presse) a abordé la question de la réactivité à la PM de lapereaux nés et se développant en conditions semi-naturelles (au sein d’une population qui, à l’origine, était sauvage). Un suivi régulier de ces animaux vivant en enclos selon un rythme photopériodique saisonnier, et avec des habitats et interactions sociales proches de ceux observés en nature a été effectué. Les sites de l’enclos où les femelles construisent leurs nids et mettent bas ont pu être déterminé, donnant ainsi aux expérimentateurs la possibilité d’accéder aux lapereaux et de les extraire brièvement du nid afin de les tester. Cette étude a permis de révéler que la réponse des lapereaux "sauvages" est également très forte au cours de la première semaine de vie (> 80% de répondants). Ce résultat appuie une nouvelle fois l’idée d’un rôle déterminant joué par la PM dans la communication mère-jeunes chez Oryctolagus cuniculus. Cependant, cette étude révèle également que la réponse de ces lapereaux chute à J10, et qu’elle est quasiment nulle à J22 (Figure 3). Autrement dit, la réactivité des lapereaux sauvages envers la PM (en termes d’expression du comportement de tétée) semble s’éteindre plus vite qu’en conditions d’élevage. Parmi les différentes hypothèses susceptibles de supporter ce résultat, on peut suggérer que la domestication a conduit à la sélection d’animaux plus lourds, requérant une période d’allaitement plus longue qu’en nature (où la dispersion intervient parfois dès J20), et donc à une dépendance plus

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prolongée des jeunes à l’égard de la mère et des signaux qu’elle émet. Il se pourrait donc que les femelles domestiques, sélectionnées pour leur production laitière, émettent la PM à des niveaux réactogènes pour les lapereaux jusqu’à un âge plus avancé de ces derniers (comparativement aux femelles sauvages). On peut également penser que la richesse et la diversité sensorielles du milieu naturel, ainsi que les variations et contraintes écologiques (climat, prédation) auxquelles les animaux sont soumis dans ce milieu, conduisent les jeunes à développer plus précocement une réactivité à d’autres signaux sensoriels que la PM (et que les odeurs maternelles au sens large). En conditions naturelles, plus de signaux nouveaux seraient ainsi susceptibles de prendre le relais de la PM, et de prendre ce relais assez tôt au cours du développement des lapereaux.

ConclusionSoumis à l’absolue nécessité de téter au cours de la brève interaction quotidienne avec la mère, le lapereau nouveau-né semble trouver dans la phéromone mammaire un signal facilitant l’expression d’un comportement adapté à cette situation, c’est-à-dire facilitant son orientation vers la femelle, sa localisation et prise en bouche des tétines, et sa prise de lait. Cette fonction de signal optimisateur de la survie du nouveau-né est appuyée par les résultats des travaux décrits ici (voir aussi Fortun-Lamothe et al., 2007, présenté dans le cadre des JRC) qui soulignent l’aspect quasi-automatique de la réponse néonatale au signal phéromonal, avant la mise en place progressive de mécanismes régulateurs dépendant en partie de processus neuro-physiologiques internes. Du fait de son impact sur le déclenchement de comportements adaptatifs et sur l’apprentissage précoce et rapide d’informations nouvelles, la phéromone mammaire apparaît comme un signal clé efficacement perçue et traitée par le lapereau au sein de la mosaïque d’odeurs émises par le corps maternel.

RemerciementsNous remercions G. Perrier, J.P. Drouet et M. Jouanno (ENESAD, Dijon) ainsi que V. Saint-Giorgio, F. Costilhes et N. Malaty (Centre de Zootechnie, Dijon) pour leur soutien et leur aide dans la réalisation de ces expérimentations.

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La réactivité des lapereaux à la phéromone mammaire :un indicateur de viabilité ?

L. FORTUN-LAMOTHE1, G. COUREAUD2, D. LANGLOIS3, B. SCHAAL2

1 INRA, UMR 1289, TANDEM, BP 52627, F-31326 Castanet-Tolosan Cedex, France 2 Centre Européen des Sciences du Goût, UMR 5170 CNRS/UB/INRA, 15 rue Picardet, 21000 Dijon, France

3 INRA, Unité Flavic, 17 rue Sully, 21065 Dijon, France

Résumé. L’objectif de cette expérience était d’étudier le lien existant entre le poids et la réponse/non réponse des lapereaux à la phéromone mammaire, et leur ingestion de lait, leur survie et leur croissance. Pour cela, 293 nouveau-nés de 30 portées on été individuellement testés pour leur réactivité à la phéromone mammaire et leur ingestion de lait au lendemain de leur naissance (J1), et suivis pour leur mortalité et leur croissance jusqu’à J21. Environ 90% des lapereaux ont répondu à la phéromone à J1. Les lapereaux non réactifs à la phéromone ingéraient moins de lait et présentaient un taux de mortalité plus élevé que les lapereaux qui y répondaient (P<0,05). Cet impact est modulé par le poids des lapereaux, puisqu’il existait de façon significative chez les nouveau-nés de faible poids à J1 (< 48 g, dans notre étude). Par ailleurs, l’étude a confirmé l’impact positif du poids et de l’ingestion de lait à J1 sur la viabilité et la croissance des lapereaux au cours des 3 premières semaines de vie (P<0,001). Au final, la non réponse à la phéromone mammaire à J1, dans une situation de test comportemental ponctuel, semble être un critère parmi d’autres influant sur la viabilité du jeune lapin en conditions d’élevage, et apparaît potentiellement intéressante pour identifier et isoler les lapereaux à risques dans les populations de petits poids. Abstract. The responsiveness of young rabbits to the mammary pheromone : a predictor of survival? The present study aimed to explore the link existing between the responsiveness / unresponsiveness of rabbit pups to the mammary pheromone, the early weight of pups, and their milk intake, growth and survival. To that goal, 293 newborns from 30 litters were tested for their responsiveness to the mammary pheromone and for their milk intake on postnatal day 1, and their mortality and growth were checked until day 21. About 90% of the pups responded to the mammary pheromone on day 1. Pups who were unresponsive to the mammary pheromone were less successful in gaining milk and had a higher rate of mortality than the responsive pups during the three first postnatal week (P<0,05). This impact was modulated by the weight of pups: it appeared in the lightest newborns tested on day 1 (< 48 g, in our study). Moreover, the present study confirmed the positive impact of the day 1-pup weight and sucking success on the pup viability and growth during the three first postnatal weeks (P<0,001). To conclude, the non response to the mammary pheromone on day 1, in our single behavioural test, appears as one of several factors influencing the viability of young rabbits in breeding units, and should be used to identify and isolate newborns presenting high risk of mortality among the lightest pups.

IntroductionChez le lapin, la période néonatale est une période de forte mortalité. La survie des nouveaux nés dépend de leur aptitude à obtenir du lait dans un contexte de compétition intense au sein de la portée. Chez la majorité des lapines l’allaitement n’a lieu qu’une seule fois par jour pendant quelques minutes seulement (Zarrow et al., 1965). La localisation rapide de la mamelle est facilitée par l’émission d’une phéromone d’origine mammaire, dénommée phéromone mammaire (Coureaud, 2001; Schaal et al., 2003; Coureaud et al., 2006). Bien que la majorité des lapereaux (>90%) soient très réactifs à cette phéromone, une petite proportion d’animaux peut ne pas y répondre. Dans la présente étude, publiée en intégralité dans Coureaud et al. (2007), l’objectif était d’étudier l’influence de la réactivité précoce des lapereaux à la phéromone mammaire sur leur prise de lait et leur viabilité, et de déterminer si cette influence était modulée par leur poids.

1. Matériel et méthodes1.1 AnimauxNous avons utilisé 293 lapereaux provenant de trente portées contemporaines (issues de femelles INRA A1067 inséminées avec de la semence de mâle PS19, Grimaud Frères Sélection, France). Les portées ont été égalisées à 9 le jour de la naissance (J0) et les lapereaux ont été identifiés individuellement. Les femelles étaient alimentées à volonté avec un aliment d’origine commerciale (Rablo-Maternité; Groupe Coopératif Occitan, Castelnaudary, France). L’accès des femelles au nid était libre, sauf à J1, jour pendant lequel la réactivité à la phéromone mammaire et la prise de lait étaient évalués pour chaque lapereau (l’allaitement était alors contrôlé par fermeture des boites à nids). 1.2 Réactivité à la phéromone mammaireLa phéromone mammaire (2-méthyl-2-buténal) était utilisée en dilution dans l’eau à la concentration 10-6

g/ml. Cette concentration est connue pour être hautement réactogène pour les lapereaux âgés de 2-3

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jours (Coureaud et al., 2004). Le test comportemental effectué à J1 consistait à présenter une fois, pendant 10 secondes, le stimulus devant le nez des lapereaux avec une baguette de verre, selon une procédure standardisée et préalablement validée (Coureaud, 2001; Schaal et al., 2003, Coureaud et al., 2004, 2006). Les lapereaux étaient répartis en trois groupes, selon le comportement qu’ils exprimaient en présence de la baguette odorisée : 1) pas de réponse (0); 2) des mouvements céphaliques rapides et répétés, dits de recherche (R) en direction du stimulus; 3) des mouvements de recherche suivis d’une saisie orale (S) de la baguette.1.3 Ingestion de lait, croissance et viabilitéImmédiatement après le test comportemental, les lapereaux de la portée étaient pesés individuellement. La boite à nid était ensuite ouverte pour permettre l’allaitement. Une fois ce dernier terminé, les lapereaux étaient à nouveau pesés afin d’estimer le poids de lait qu’ils avaient individuellement ingéré. Les lapereaux ont été pesés une dernière fois à J21, afin d’estimer leur gain de poids au cours des trois premières semaines. La mortalité était contrôlée quotidiennement de J0 à J21. 1.4 Analyses statistiquesLes données ont été analysées à l’aide du logiciel SAS (SAS Version 6.12, SAS Institute Inc., Cary, USA). La réactivité à la phéromone et la mortalité des lapereaux ont été analysées avec le test de Fischer L’ingestion de lait a été analysée par analyse de variance en utilisant les effets portée (30 niveaux), la réceptivité à la phéromone mammaire (3 niveaux : 0, R, S), le poids des animaux (3 niveaux: légers, moyens, lourds), et l’interaction entre ces deux facteurs comme effets fixés. La croissance des lapereaux a été analysée en ajoutant l’ingestion de lait (3 niveaux : faible, moyenne, élevée) au modèle précédent.

2. Résultats2.1 Performances des femelles et des lapereauxLe poids moyen des femelles à la mise-bas était de 3508 ± 60 g, et la taille et le poids des portées étaient de 12,5 ± 0,4 et 635 ± 36 g, respectivement. Le pourcentage de lapereaux morts à la naissance était de 4 ± 1,6%. L’ingestion individuelle moyenne de lait à J1 était de 8,7 ± 0,3 g, mais 14% des lapereaux n’avaient pas ingéré de lait lors de ce relevé. La production laitière des femelles à J1 (estimée en sommant la prise de lait individuelle de chaque lapereau d’une même portée) était de 85 ± 4,4 g. On observe une forte variabilité de ce caractère (de 36 à 130 g). C’est la raison pour laquelle nous avons inclus l’effet portée comme effet fixé dans l’analyse de l’ingestion de lait. Cet effet est significatif et explique 37% (P<0,01) de la variabilité de l’ingestion de lait à J1.La mortalité entre J0 et J21 était de 6,8% (n=20/293).

La plupart des lapereaux (60%) sont morts durant la première semaine postnatale. Le gain de poids des lapereaux sur la même période était en moyenne de 275 ± 4 g. 2.2 Réponse à la phéromone mammaireA l’issue du test effectué à J1, 8,7% des lapereaux ne répondaient pas à la phéromone mammaire. Les autres lapereaux répondaient soit en exprimant le comportement de recherche seul (21,2% des nouveau-nés), soit, et de façon majoritaire, en exprimant le comportement de recherche suivi d’une saisie orale (70,1%). Le poids des lapereaux n’a pas d’influence significative sur la réactivité des lapereaux à la phéromone.2.3 Ingestion de laitLe poids des lapereaux et la réponse à la phéromone mammaire interagissaient de façon significative sur l’ingestion de lait à J1 (P<0,05). Ainsi, chez les lapereaux légers (< 48g) qui ne répondaient pas à la phéromone mammaire, l’ingestion de lait était plus faible que chez ceux qui y répondaient (comparaison entre lapereaux 0, R et S: P<0,01 dans tous les cas ; Figure 1A). Cependant, chez les lapereaux de poids moyen ou élevé (≥ 48 g) l’ingestion de lait était similaire quelle que soit la réactivité exprimée par les lapereaux envers la phéromone (Figure 1B et 1C). Figure 1: Quantité de lait ingérée à J1 par des lapereaux non répondants (0), ou répondants par des mouvements de recherche (R) ou de recherche+saisie orale (S) à la phéromone mammaire, en fonction de leur poids avant tétée: A) Lapereaux de poids < 48 g, B) lapereaux de poids [48-57] g, C) lapereaux de poids > 57 g. Adapté de Coureaud et al.(2007)

0

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Tableau 1: Croissance et mortalité des lapereaux entre 1 et 21 jours d’âge en fonction de leur réponse à la phéromone mammaire (A), de leur poids (B) et de leur ingestion de lait (C) à J1. Adapté de Coureaud et al. (2007). A Réponse à la phéromone

0 R SPr>f

Mortalité J1-J7 (%) 14.3a (4/28) 0b (0/61) 3.9b (8/204) <0.05Mortalité J8-J21 (%) 0 (0/24) 1.6 (1/61) 3.6 (7/196) NSMortalité J1-J21 (%) 14.3 (4/28) 1.6 (1/61) 7.4b (15/204) =0.06Gain de poids J1-J21 (g) 298±12 (24) 286±7 (60) 269±4 (189) NS

B Poids à J1 (g)<48g [48-57] g >57 g

Pr>f

Mortalité J1-J7 (%) 9.2a (9/98) 2.1ab (2/97) 1.0b (1/98) <0.05Mortalité J8-J21 (%) 8.5a (8/89) 0b (0/95) 0b (0/97) <0.001Mortalité J1-J21 (%) 17.3a (17/98) 2.1b (2/97) 1.0b (1/98) <0.001Gain de poids J1-J21 (g) 228±6a (81) 280±4b (95) 310±6c (97) <0.001

C Ingestion de lait à J1 (g)<7 g [7 – 11] g >11 g

Pr>f

Mortalité J1-J7 (%) 12.0a (11/92) 0b (0/86) 0b (0/95) <0.001Mortalité J8-J21 (%) 6.2a (5/81) 1.2b (1/86) 0b (0/95) <0.01Mortalité J1-J21 (%) 17.4a (16/92) 1.2b (1/86) 0b (0/95) <0.001Gain de poids J1-J21 (g) 254±7a (76) 273±7b (85) 291±6c (95) <0.001

a,b,c: les moyennes affectées d’une lettres différentes diffèrent à P<0,05.

De plus, le poids des lapereaux influençait aussi la prise lactée chez les animaux 0 et S. Ainsi, dans ces deux groupes, l’ingestion de lait était plus faible chez les lapereaux de petit poids que chez ceux de poids moyen et élevé (lapereaux 0: P<0,05; lapereaux S: P<0,001). 2.4. Viabilité des lapereaux Au cours de la première semaine postnatale, le taux de mortalité était plus élevé chez les lapereaux non répondants à la phéromone mammaire (14,3%) que chez ceux qui y étaient réactifs (0% et 3,9% pour les lapereaux R et S, respectivement; P> 0,05; Tableau 1A). Ce lien entre mortalité et non réponse à la phéromone mammaire disparaissait ensuite, au-delà de la première semaine d’âge. Par ailleurs, le poids des lapereaux et leur ingestion de lait à J1 avaient également une influence sur leur viabilité entre J1 et J21: la viabilité des lapereaux était plus faible chez les lapereaux de petits poids (< 48g; Tableau 1B) ainsi que chez ceux ayant ingéré une faible quantité de lait (< 7g; Tableau 1C).2.5. Croissance des lapereaux Le poids moyen des lapereaux (avant tétée) était de 52 ± 0,7 g à J1 et 328 ± 4,1 g à J21. Aucune relation ne semblait exister entre la réactivité à la phéromone mammaire à J1 et le gain de poids des lapereaux au cours des trois premières semaines postnatales (Tableau 1A). En revanche, le poids et l’ingestion de lait à J1 étaient corrélés à la croissance des lapereaux au cours des trois semaines qui suivaient la naissance (r=0,60, P<0,001 et r=0,25, P<0,001, respectivement; Tableaux 1B et 1C).

3. DiscussionL’objectif de ce travail était d’étudier l’influence, et l’importance relative, de la réponse néonatale à la phéromone mammaire, du poids et de l’ingestion de lait à J1, sur la croissance et la viabilité des lapereaux. Environ 90% des lapereaux se sont avérés réactifs à la phéromone mammaire au cours de cette étude, un résultat similaire à ceux obtenus dans plusieurs études précédemment réalisées (Coureaud, 2001; Schaal et al., 2003; Coureaud et al., 2004, 2006). Dans nos conditions, la seule réactivité à la phéromone lors du test comportemental ne semble pas forcément corrélée à la survie, puisque 80% des lapereaux non répondants à J1 ont ingéré du lait et 85,7% d’entre eux ont survécu. En revanche, la combinaison de la réactivité à la phéromone mammaire à J1 et du poids du nouveau-né à cet âge influe sur la viabilité ultérieure du jeune. Ainsi, les lapereaux de petits poids non réactifs à la phéromone sont majoritairement ceux qui présentent des difficultés à ingérer du lait et donc à survivre. A l’inverse, répondre à la phéromone mammaire chez les lapereaux de petits poids confère clairement un avantage au lapereau, augmentant ses chances de parvenir à téter, et donc ses chances de survie, lors de la première semaine néonatale. Chez les lapereaux de poids moyen et élevé, ce lien n’est pas évident. Des facteurs autres que la réactivité à la phéromone mammaire sont donc aussi, bien sûr, susceptibles d’influer sur la survie des lapereaux. Des études précédentes ont par exemple souligné le rôle déterminant de la parité des femelles, de la qualité du nid ou de l’homogénéisation des portées (Coudert, 1982; Verga et al., 1986; Fortun-Lamothe, 1998;

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Canali et al., 1991; Hamilton et al., 1997; Coureaud et al., 2000a). Les résultats obtenus ici mettent également en évidence l’influence positive du poids des lapereaux à la naissance et de l’ingestion lactée sur la croissance et la viabilité. En cela, ils rejoignent les conclusions de précédentes études (McNitt and Moody, 1987; Coureaud et al., 2000b; Poigner et al., 2000; Perrier et al., 2003).

ConclusionLa réactivité des lapereaux à la phéromone mammaire, mesurée à J1, semble être un indicateur de viabilité, au moins chez les lapereaux de petit poids. Cette mesure pourrait éventuellement permettre d’identifier des lapereaux à risques, afin de les surveiller ou de les isoler pour augmenter leur chance de survie. Pour information, l’étude originale (Coureaud et al., 2007) souligne que cet effet de la non réponse à la phéromone mammaire observé à J1 ne l’est plus à J3, ce qui démontre la forte valeur adaptative de ce signal dans les tous premiers jours de vie. Par ailleurs, le poids des nouveau-nés et leur ingestion de lait apparaissent également comme des facteurs déterminants et influents à relativement long terme sur la viabilité et la croissance des jeunes lapereaux. .

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COUREAUD G., FORTUN-LAMOTHE L., LANGLOIS D., SCHAAL B. 2007. The reactivity of neonatal rabbits to the mammary pheromone as a probe for viability. Animal, 1, 1026-1032.

FORTUN-LAMOTHE L. 1998: Effects of pre-mating energy intake on reproductive performance of rabbit does. Anim. Sci., 66, 236-269.

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Plasticité de l’apprentissage des caractéristiques odorantesdu nid chez le lapereau nouveau-né.

J. SERRA1, L. MIRABITO2, G. FERREIRA1, F. LÉVY1, R. NOWAK1

1 Centre de recherches INRA, UMR 6175, PRC, 37380 Nouzilly, France.2 ITAVI, 28 rue du Rocher, 75008 Paris, France.

Résumé - Le lapereau est capable dès le 1er jour post-partum de discriminer les indices olfactifs de familiarité intrinsèques à son nid par rapport à un nid étranger construit par une autre lapine. L’hypothèse d’un apprentissage postnatal des caractéristiques odorantes du nid a très vite émergé. Afin d’éprouver ce postulat et de déterminer la dynamique de mise en place de cet apprentissage, des expériences d’adoption par transfert de lapereaux depuis le nid d’origine vers un nouveau nid ont ainsi été mises en œuvre. Les résultats montrent que des lapereaux de 2 jours parviennent à apprendre les indices olfactifs propres à leur nouveau nid d’adoption suivant une évolution graduelle culminant à 24h de mise en adoption. L’apprentissage du nid d’adoption s’accompagne d’un apparent oubli du nid d’origine. Ce dernier n’est pas un oubli total puisqu’un rappel du nid d’origine permet de réinstaurer la préférence pour ce dernier. Cette expérience illustre le caractère plastique des apprentissages olfactifs précoces chez le lapereau nouveau-né.

Abstract- Learning plasticity of nest olfactory cues in the newborn rabbit. Newborn rabbits are able to discriminate between the olfactory cues from their nest and those from a nest built by another doe. We hypothesized that this preferential response reflected postnatal learning processes. To test this and to determine the dynamic of learning, we transferred part of the litter to an alien nest. The results showed that postnatal learning of the new nest was possible on the 2nd day after birth with a maximum response 24h after the start of the adoption procedure. Learning the characteristics of the new nest induced a lack of interest for the original nest which is not a total amnesia since a recall of the original nest can reinstitute a preference for it. This experiment illustrates the plasticity of early olfactory learning in newborn rabbit.

Introduction

Isolé dans la rabouillère, le nid du lapin est une chémosphère olfactive complexe résultant d’une combinaison d’odeurs variées, provenant des poils déposés par la mère, des odeurs corporelles de la fratrie, des sécrétions utérines émises à la mise bas, et des pelotes fécales laissées par la mère à l’issue de l’allaitement (Hudson et Distel, 1982). Alors qu’Hudson et al. (2003) ont illustré les capacités d’orientation précoce de lapereaux d’un jour envers leur nid, Serra et Nowak (2005) ont démontré que des lapereaux du même âge manifestent une préférence olfactive pour les matériaux du nid familier lorsque ces derniers sont comparés aux matériaux d’un nid étranger, illustrant ainsi une détection rapide des indices de familiarité propres au nid. L’expérience utérine joue un rôle non négligeable dans l’établissement des préférences sensorielles néonatales : elle facilite la mise en place de références olfactives utiles lors des premières orientations postnatales, à savoir l’orientation vers le corps de la mère, la localisation de la tétine et l’absorption rapide de lait (Coureaud et al., 2002). En outre, Porter et Rieser (2005) ont souligné l’importance de la parturition chez le nouveau-né mammalien : des processus neurophysiologiques opérant naturellement durant la mise-bas préparent le nouveau-né à se familiariser aux odeurs de son environnement postnatal. La naissance par voie vaginale marque ainsi un tournant majeur dans la vie de l’animal, tournant représenté par un état d’alerte optimum et une réponse maximale aux stimulations externes (Lagergrantz et Slotkin, 1986). La période péri-partum est ainsi

décrite comme un processus favorisant des apprentissages rapides, alors que quelques jours plus tard, il semble que ces facultés suivent une cinétique plus lente (Porter et Etscorn, 1975). En conditions d’élevage, les procédures d’adoption sont courantes, dans le but d’homogénéiser les portées et d’assurer une productivité optimum. Le plus fréquemment, elles sont réalisées dans les jours qui suivent les naissances. Un tel changement de l’environnement postnatal modifie-t-il les préférences olfactives du lapereau transféré, lorsque celui-ci est placé en adoption le deuxième jour post-partum ? Le lapereau est-il capable de réorienter ses choix après transfert ?

L’objectif de ce travail est double : nous tenterons dans un premier temps de savoir si l'apprentissage des caractéristiques odorantes du nid peut se réaliser de manière postnatale, indépendamment de cette période-clef qu’est la parturition, puis dans un second temps, nous illustrerons la dynamique d’un tel apprentissage, en déterminant les mécanismes mnésiques mis en jeu.

1. Matériel et méthodes1.1 AnimauxLes lapereaux testés proviennent de femelles multipares de souche Hy+ de la station expérimentale cunicole de l’ITAVI (Rambouillet, Yvelines). Elles séjournent dans le secteur maternité de la station dans des cages individuelles (75x46x60 cm) équipées d’une boîte à nid avec cuvette en plastique (44x24x14 cm) et d’une porte coulissante permettant un contrôle de l’allaitement. Les cuvettes contenant des copeaux de bois sont installées 48 heures avant la parturition. Les femelles disposent d’eau et de

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nourriture ad libitum. La température ambiante est maintenue à 17°C et le régime nycthéméral est caractérisé par une alternance 12h/12h de lumière/obscurité au moment de la mise-bas.1.2. Procédure d’adoptionAfin de savoir si l'apprentissage des caractéristiques odorantes du nid peut se réaliser de manière postnatale et pour s’affranchir de facteurs prénatals, nous avons procédé à une adoption. Nous laissons donc 48 heures les lapereaux dans leur nid d’origine (NO), en contrôlant les tétées de façon à ce qu’elles interviennent une fois toutes les 24 heures, au 1er et 2e

jour post-partum. A l’issue du 2e jour, on transfère 6 lapereaux d’une même portée (d’un effectif minimal de 12 lapereaux) dans le nid d'une lapine étrangère ayant mis bas le même jour que la mère et possédant au moins 12 lapereaux, ce nid sera nommé nid d'adoption (NA). Ils resteront dans ce nouvel environnement soit pendant une durée de 1h, soit de 6h, de 18h ou de 24h, et ce, sans téter (la lapine étrangère n’a donc pas accès à son nid durant ces périodes). La durée maximum du jeûne imposé est donc de 24h. Après différents temps de présence dans le NA, on effectue les tests de choix entre les nids connus (nid d'origine (NO) et nid d'adoption (NA)) et un nid inconnu quelconque (nid étranger (NE)). Sur un lot de 6 lapereaux adoptés dans le NA, la distribution s’établit comme suit : 2 de ces lapereaux sont testés dans la comparaison NA vs NE, 2 autres dans la comparaison NO vs NE, et les 2 derniers dans la comparaison NA vs NO. 1.3. Tests de choix

Il s’agit de tester l’orientation précoce des lapereaux vers les différents nids (NO, NA, NE). Le dispositif de tests utilisé est une boîte en PVC (42x32x15 cm) séparée en deux par un panneau médian. A sa surface, une grille amovible peut être soulevée pour y placer à l’intérieur les stimuli. Une arène rectangulaire (42x32x9 cm) sans fond est mise en place sur le dessus de la boîte. Elle empêche le lapereau de s’échapper et délimite la zone de discrimination. Le lapereau testé est placé en son centre et sa durée de positionnement dans chacun des compartiments est chronométrée. On prélève et on dispose dans des boîtes de pétri (9,5x9,5 cm) un échantillon représentatif d’un nid (poils maternels, pelotes fécales, copeaux de bois et traces de sécrétions utérines). Tous les nids proviennent de lapines aux mêmes stades de lactation. Trois boîtes sont placées dans chaque compartiment du dispositif. Lorsque les matériaux sont remplacés à l’issue des tests, les boîtes de pétri sont nettoyées et séchées. A chaque passage, l’arène et la grille sont nettoyées et séchées. L’arène subit aussi une rotation de 180°C. La position latérale des stimuli est permutée, après que 4 tests aient été réalisés. La durée de chaque test est de 5 minutes consécutives. Chaque nouveau-né n’est utilisé que dans un seul test.

1.4. Analyses statistiquesLes temps passés au-dessus de chaque compartiment ont été analysés à l'aide du test de rang de Wilcoxon (logiciel STATVIEW, test non paramétrique portant sur des données dépendantes). Le seuil de signification est fixé à p<0,05.

2. Résultats2.1. Le lapereau âgé de 2 jours peut-il apprendre un nouveau nid (NA) ? (Figure 1)Un lapereau âgé de 2 jours ne manifeste pas de comportement différentiel entre le NA et un NE quelconque après 1 heure de mise en adoption. En revanche, les lapereaux manifestent une préférence pour le NA par rapport au NE dès 6 heures (P=0,005). Des résultats similaires sont retrouvés après 18 heures (P=0,017) et 24 heures (P=0,008) de présence dans le NA. Les lapereaux sont donc capables d’apprendre un nouveau nid dès 6 heures de mise en adoption. Leurs performances semblent tout à fait comparables à des lapereaux testés le lendemain de leur naissance (Serra & Nowak, 2005).Figure 1 : Durées moyennes d’orientation (médianes et interquartiles) de lapereaux adoptés en réponse à l’odeur du NA vs NE, à 1h, 6h, 18h, et 24h de mise en adoption.

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Nid d’adoption

Nid étranger

Nid d’adoption

Nid étranger

2.2. L’apprentissage du nouveau nid (NA) induit-il l’oubli de l’ancien nid (NO)? (Figure 2)A l’issue d’une mise en adoption d’une heure, un lapereau âgé de 2 jours s’oriente préférentiellement vers le NO (P=0,008) lorsque celui-ci est comparé à un nid étranger. Après 6, 18 et 24 heures de mise en adoption, le NO n’est plus préféré. Parallèlement à l’apprentissage de l’odeur du nid d’adoption, on observe une perte d’intérêt pour le nid d’origine. Ceci suggère un oubli de l’ancien nid au profit de l’apprentissage d’un nouveau.

Figure 2 : Durées moyennes d’orientation (médianes et interquartiles) de lapereaux adoptés en réponse à l’odeur du NO vs NE, à 1h, 6h, 18h, et 24h de mise en adoption.

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Nid d’origine

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2.3. Dans une comparaison opposant deux nids connus (NA vs NO), le lapereau manifeste-t-il des préférences similaires? (Figure 3)Dans les tests présentant simultanément le NA au NO, les lapereaux explorent de façon équivalente les deux compartiments après une mise en adoption d’1 heure. On observe cependant une tendance à s’orienter vers le NA plutôt que le NO dès 6 heures (P= 0,074), mais également à 18 heures (P=0,059). Cette tendance évolue en une préférence significative pour le NA par rapport au NO après 24 heures de mise en adoption (P=0,005). Figure 3 : Durées moyennes d’orientation (médianes et interquartiles) de lapereaux adoptés en réponse à l’odeur du NA vs N0, à 1h, 6h, 18h, et 24h de mise en adoption.

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Nid d’adoption

Nid d’origine

Nid d’adoption

Nid d’origine

2.4. Oubli total ou partiel de l’ancien nid (NO)? (Figure 4) Cette question a nécessité la création d’une nouvelle procédure : à l’issue d’une mise en adoption pendant 24h (NA1), des lapereaux non testés jusqu’alors sont replacés pendant 1h soit de nouveau dans leur nid d’origine (NO) (groupe « réexposition au NO »), soit dans un nouveau nid d’adoption (NA2) (groupe témoin). Comme nous l’avons vu précédemment, 1h n’est pas une durée d’exposition suffisante pour permettre aux jeunes lapereaux de manifester une préférence pour un nouveau nid. Cette durée a donc été choisie afin que le NO intervienne comme un élément de rappel, susceptible de permettre une réinstauration de la préférence pour le NO. Le groupe témoin permettra de s’assurer qu’une heure dans ces conditions spécifiques ne soit effectivement pas suffisante pour permettre un nouvel apprentissage.Figure 4 : Durées moyennes d’orientation (médianes et interquartiles) de lapereaux adoptés pendant 24h dans le NA puis soit réexposés au NO pendant 1h, soit exposés à un nouveau nid d’adoption (NA2) pendant 1h.

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Nid d’origineNid étrangerNid d’adoption 2

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Nid d’origineNid étrangerNid d’adoption 2

Lorsque l’on donne à comparer aux lapereaux du groupe « réexposition au NO » leur NO par rapport à un NE, ces derniers se dirigent préférentiellement vers leur NO (P=0,014). A l’inverse, lorsque l’on s’intéresse au groupe témoin, les lapereaux ne préfèrent pas leur NA2 à un nid étranger quelconque. Il n’y aurait donc pas oubli total mais seulement partiel. Un rappel du nid préalablement connu rendrait de nouveau possible l’accès au souvenir.

3. DiscussionLes résultats montrent que des lapereaux âgés de 2 jours parviennent à discriminer les indices olfactifs propres à leur nouveau nid d’adoption suivant une évolution graduelle culminant à 24h de mise en adoption. Un apprentissage postnatal des caractéristiques odorantes du nid peut donc se réaliser en dehors de cet évènement majeur que représente la parturition.L’apprentissage du nid d’adoption s’accompagne d’un apparent « oubli » du nid d’origine puisque les lapereaux engagés dans la procédure de mise en adoption ne parviennent plus à discriminer leur nid d’origine d’un nid étranger dès 6h de mise en adoption. Les résultats de Nowak et Serra (2005), relatifs à l’ajout d’une odeur artificielle dans le nid, corroborent cette amnésie des acquisitions préexistantes, subséquente à l’apprentissage de nouvelles données olfactives dans un contexte similaire. En effet, les indices de familiarité intrinsèques au nid ne sont plus discriminés lorsque les lapereaux ont à apprendre une nouvelle odeur artificielle ajoutée au nid. La mémoire du lapereau a donc bien un caractère plastique puisque les événements les plus récents primeraient sur les acquisitions préexistantes.Afin d’affiner notre compréhension des mécanismes impliqués dans l’amnésie du NO et l’apprentissage du NA, une situation plus conflictuelle a été proposée aux lapereaux : la confrontation de 2 nids connus (nid d’origine vs nid d’adoption). Alors que le nid d’adoption était reconnu par rapport à un nid étranger dès 6 heures de mise en adoption, il faut attendre 24 heures pour qu’il soit clairement préféré par rapport au NO. Nous observons néanmoins des orientations tendancielles vers le nid d’adoption à 6 et 18 heures. Les lapereaux se dirigent donc de façon moins nette vers le nid d'adoption lorsque ce dernier est comparé au NO que lorsqu’il est comparé à un NE quelconque. L’explication résiderait dans l’apparition d’interférences olfactives : une communauté d’odeurs caractériserait le NO et le NA, de sorte que le choix entre ces deux nids ne soit pas aussi clair que celui entre le NA et un NE.En outre, l’ « oubli » du NO n’est pas un oubli total puisqu’un rappel de ce même nid réinstaure une préférence pour celui-ci. Le processus d’adoption peut donc être réversé. La plasticité mnésique du jeune lapereau est donc très développée.

12èmes Journées de la Recherche Cunicole, 27-28 novembre 2007, Le Mans, France13

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En élevage cunicole, la technique d’adoption est utilisée en routine. Même si d’un point de vue zootechnique elle ne semble pas poser de problème lorsqu’elle est réalisée à 2 jours post-partum, nous étions en droit de nous questionner sur les capacités d’intégration des lapereaux dans leur nouveau nid. Nos résultats montrent que l’intégration des adoptés se réalise en 24h maximum et n’entraîne pas de perturbation majeure pour l’animal, donnée importante pour les demandes croissantes en termes de bien-être animal dans les conditions d’élevage.

Dans le milieu naturel, quel peut être le rôle d’une telle plasticité ? Le nid constitue une ressource vitale de chaleur (fratrie) et d’alimentation (il est le seul point de rencontre avec la mère) ; sa discrimination est donc indispensable à la survie de l’animal qui, dans les conditions naturelles, pourrait être éloigné de son nid à diverses occasions sans toutefois quitter le terrier (accrochage à la tétine après la tétée, exploration). La plasticité mnésique permettrait donc à un lapereau de s’adapter aux qualités chimiques de son nid évoluant au cours du temps. En effet, la disparition des poils maternels (Hudson et al., 1996) et l’évolution des odeurs corporelles de la fratrie contribueraient à ces changements olfactifs. En outre, les apprentissages olfactifs précoces dans le nid participeraient à l’éducation alimentaire du jeune par l’apport de plantes dans le nid (Denenberg et al., 1963), et aux choix ultérieurs des matériaux du nid par les futures mères (Serra et al., 2007).

ConclusionL’étude de la dynamique de l’apprentissage des caractéristiques odorantes du nid dans un contexte d’adoption nous a permis de mettre en évidence qu’une telle performance était réalisable postnatalement, indépendamment de la parturition et d’autres facteurs prénatals. Elle a su illustrer une caractéristique inhérente à la mémoire du nouveau-né : son caractère plastique, et a facilité notre compréhension des mécanismes mis en jeu dans le fonctionnement mnésique d’un jeune mammifère.

RemerciementsNous remercions vivement Jessica Charlot pour son aide, Pascal Galliot et Christophe Souchet pour l’accueil réservé et pour leur disponibilité permanente. Cette thèse est financée par le ministère de la recherche.

RéférencesCOUREAUD, G., SCHAAL, B., HUDSON, R., ORGEUR, P.,

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HUDSON, R., DISTEL, H. 1982. The pattern of behaviour of rabbit pups in the nest. Behaviour, 79, 255-271.

HUDSON, R., SCHAAL, B., BILKO, A., ALTBACKER, V. 1996. Just three minutes a day: the behaviour of young rabbits viewed in the context of limited maternal care. 6th

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being born, Scientific American, 254, 92-102.NOWAK, R., SERRA, J. 2005. Apprentissages des

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PORTER, R.H., ETSCORN, F. 1975. A primacy effect for olfactory imprinting in spiny mice (Acomys cahirinus). Behavioural Biology, 15, 511-517.

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SERRA, J., NOWAK, R. 2005. Développement d’une préférence pour l’environnement postnatal chez le lapereau nouveau-né. 11èmes Journées de la Recherche Cunicole Française, Paris, 29-30/11/2005, 41-44. ITAVI Ed., Paris.

SERRA, J., MIRABITO, L., NOWAK, R. 2007. L’environnement olfactif postnatal du lapereau nouveau-né influence le choix ultérieur des matériaux du nid lors de la première mise-bas. 41e Colloque de la Société Française pour l’étude du Comportement Animal, Villetaneuse, 18-20/04/2007, 78.

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La diffusion d’actifs volatils en élevage cunicole.Présentation d'une nouvelle forme pharmaceutique de traitement.

S LACOSTE, H CLAVERES, L PEYROT

CEVA Santé Animale Z.I La Ballastière 33501 Libourne, France.

Résumé. Nous avons étudié un nouveau système de délivrance de principe actif via le système olfactif. Les principes actifs sont incorporées dans un gel aqueux qui se désagrège sous l'effet de l'air ambiant et libère ainsi ses composants. L'objet de cette étude était de mesurer la qualité de diffusion de ces gels dans différentes conditions de température et d'humidité. Les gels sont pesés en début d'étude et pendant 7 semaines pour évaluer l'impact des différents paramètres environnementaux (température, humidité relative, flux d’air) sur la libération des principes actifs. Nous montrons qu’en conditions moyennes d’élevage, la diffusion totale des composés du bloc est réalisée en 3 semaines. Lorsque la température est voisine de 25°C, la diffusion diminue lorsque l’humidité de l’air augmente. A des taux d’humidité relative élevés (>60%), la diffusion augmente lorsque la température augmente. Le bloc gel s'avère être un moyen de diffusion fiable et répétable pour des principes actifs volatils destinés à agir sur le système olfactif. Abstract. Nasal diffusion to rabbit : Analysis of the diffusion quality of a new device. We studied a new device for the delivery of actives for nasal application. Active ingredients are incorporated in aqueous gel which desegregates with air and then diffuses the actives. The subject of this study is to measure the quality of the diffusion of the gel placed in different conditions of temperature and humidity . The gels are weighed at the beginning of the study and during the diffusion study to evaluate the impact of the different environmental parameters on the delivery of the actives in the air. We demonstrated that when temperature is close to 25°C, more the air is wet more the diffusion is slow. When the temperature increased, then the diffusion duration increased also. A bloc gel is a reliable device to diffuse actives in the atmosphere for nasal application.

IntroductionLe traitement de masse des animaux d’élevage de petite taille (type lapin ou volaille) est souvent fastidieux. L’administration d’un principe actif ne peut généralement se faire que par l’eau de boisson ou la nourriture. C’est d’autant plus problématique si le mode d’administration du produit ou l’actif lui–même n’est pas diluable dans l’eau de boisson ou si les procédés de fabrication de l’aliment le rendent inactif. Les phéromones sont des principes actifs dont l’action se situe au niveau du système voméro-nasal de l’animal. Pour les distribuer, nous avons envisagé d’utiliser une nouvelle forme galénique qui se présente sous la forme d’un bloc gel diffusant dans l’air ambiant : le bloc gel en se désagrégeant libère dans l’atmosphère les principes actifs solubilisés. Afin que le traitement administré soit efficace, la régularité de diffusion est un paramètre important à connaître. C’est dans le but d’évaluer la qualité de diffusion de cette nouvelle forme galénique que nous avons réalisé cette étude.

1. Matériel et méthodesNous avons étudié la diffusion de blocs gel contenant des phéromones à une concentration de 2%. Les blocs gels sont constitués d’un support inerte dans lequel est incluse une solution contenant les principes actifs volatils.

Nous savons, par l’expérience acquise sur les diffuseurs d’odeurs à usage domestique, que les deux facteurs qui influencent le plus la qualité de diffusion de ces gels sont la température (T, °C) et le degré d’humidité relative (HR, %) du flux d’air environnant. Cette étude a été réalisée au laboratoire de Développement Galénique de Ceva Santé Animale (Libourne). Nous disposons de blocs de 160 g ± 8 de gel, qui ont été placés dans différentes conditions de température, d’hygrométrie et sous différents débits d’air :1/ une étude à température ambiante (TA), sans contrôle de température ni d’humidité : T entre 20 et 25°C et HR < 50% ;2/ une étude à température ambiante (TA), sans contrôle de température ni d’humidité : T entre 20 et 25°C et HR < 50% sous flux d’air contrôlé et mesuré à 0,8 m/s ;3/ une étude dans une étuve à température et humidité contrôlées : T à 25°C, HR à 60% ;4/ une étude dans une étuve à température et humidité contrôlées : T à 40°C et HR à 75%.Les blocs sont pesés au démarrage de l’étude puis chaque semaine pendant 7 semaines jusqu’au moment où la masse finale se stabilise

2. RésultatsLes résultats sont présentés dans les figures 1, 2, 3 et 4, ci-dessous. Les quantités cumulées indiquées en ordonnées sont représentatives de la quantité de produit diffusée dans l’environnement. Les figures 1,2 et 3 montrent une très bonne homogénéité dans la vitesse de diffusion entre les

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Figure 1 : Courbe de diffusion cumulée à TA en atmosphère non contrôlée.

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Figure 2 : Courbe de diffusion cumulée à TA en atmosphère non contrôlée à 0,8 m/s

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Figure 3 : Courbe de diffusion cumulée à 25°C et 60% HR.

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blocs, et ce, dans toutes les conditions de diffusion étudiées. L’écart type calculé pour chaque figure est inférieur à 1 dans tous les cas. Les blocs à TA (21 à 25°C) ont achevé leur diffusion en 20 jours.Les blocs à TA (21 à 25°C) sous flux d’air à 0.8 m/s diffusent aussi entièrement en 20 jours.Les blocs à T 25°C et HR à 60% diffusent entièrement en 42 jours. La perte de masse moyenne mesurée est de 97 %.La figure 2 montre que même sous un flux d’air important -voire extrême par rapport aux conditions d’élevage habituelle ou le flux d’air moyen est de 0,3 m/s - la durée nécessaire pour une diffusion totale n’est pas modifiée.

La comparaison des figures 1 et 3 montre que, à température ambiante, c’est le degré d’humidité qui modifie la vitesse de la diffusion.A ces températures, si le degré d’hygrométrie augmente, la vitesse de diffusion ralentit : 6 semaines au lieu de 3 semaines sont nécessaires pour la disparition totale du gel aqueux lorsque l’on passe d’environ 50% à 60% de HR.

La figure 4 montre que, de la même façon, à T 40° C et HR à 75%, l’ homogénéité de diffusion des blocs est très bonne . Dans ces conditions, les blocs diffusent totalement en 20 jours. La perte de masse moyenne dans ces conditions est de 88 %.

Figure 4. Courbe de diffusion à T 40°C HR à 75%

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bloc 20

3. DiscussionCes résultats nous amènent plusieurs commentaires :- Tous les blocs diffusent à la même vitesse lorsqu’ ils sont placés dans le même environnement. L’homogénéité des résultats obtenus nous autorise à retenir cette présentation bloc, jusqu’alors réservée à des usages domestiques, comme forme pharmaceutique acceptable pour des principes actifs ayant pour cible l’appareil olfactif de l’animal.- Entre 20 et 25 °C, le phénomène de diffusion augmente lorsque le taux d’humidité relatif de l’air diminue. On observe alors que le gel se dessèche, par un phénomène de migration de l’eau contenue dans le gel vers l’extérieur. - Quand l’air extérieur est chargé en humidité, un équilibre se crée entre l’humidité du bloc et l’humidité de l’air environnant, la diffusion est ralentie. Lorsque le niveau d’hygrométrie dépasse 60 % c’est la température qui influe fortement la diffusion: plus la température augmente, plus vite l’air environnant peut

se charger en humidité et absorber l’humidité du bloc ; en atmosphère très humide, la vitesse de diffusion augmente quand la température augmente.

Conclusion: Tous les blocs placés dans le même environnement diffusent à la même vitesse.Le phénomène de diffusion est essentiellement contrôlé par le degré d’humidité de l’air ambiant à température ambiante, puis par la température si l’air est saturé en humidité.Le bloc gel s’avère être un nouveau moyen de diffusion d’actifs dans l’environnement, reproductible et fiable.Nous le retenons comme nouvelle forme pharmaceutique pour des principes actifs ayant pour cible l’appareil olfactif de l’animal.Il est facile d’utilisation, et permet une libération régulière sur une période de 3 semaines en conditions d’élevage.

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Evolution de la composition chimique du lait d’une souchede lapines de laboratoire au cours d’une lactation.

S. BOUCHER1, K. MARTIN2, C. LE BOURHIS2, V. SIMONNEAU2, P.J. RIPOLL2

1 LABOVET CONSEIL (Réseau Cristal) - BP 539 - 85505 Les Herbiers cedex, France.2 BioProtein Technologies SA - Siège Social chez SLGP - 5 place Bellecour 69002 Lyon, France;

Résumé. Sept lapines de souche de lapins de laboratoire Charles River 052 NZW sont traites chaque matin, tout en allaitant leurs lapereaux, à partir du 4e et jusqu’au 28e jour de lactation à l’aide d’une trayeuse dont le principe se fonde sur la pompe à vide. L’analyse de la composition chimique du lait montre une variabilité des paramètres en fonction du stade de lactation. La composition en lipides, protéines ou matière sèche du lait, forte au démarrage de la lactation décroit jusqu’à la troisième semaine. On constate une augmentation de la concentration de ces éléments durant la 4e semaine. Le lactose, quantitativement peu important, a une teneur qui chute après le pic de lactation pour devenir presque nulle en fin de lactation sur certaines femelles. La teneur en matières minérales augmente constamment du début à la fin de la lactation. Ces données permettent d’avoir un référent pour l’étude des diarrhées d’origine non microbienne des lapereaux non sevrés mais également de comprendre comment mieux allaiter les lapereaux artificiellement en partant du lait de vache. Abstract. Evolution of the chemical composition of the milk of a stock of laboratory rabbits during lactation. Seven does of rabbit stock of laboratory Charles River 052 NZW were milked each morning, while nursing their young rabbits, starting from 4th and until the 28th day of lactation using a milking machine whose principle is based on the vacuum pump. The analysis of the chemical composition of milk shows a variability of the parameters according to the stage of lactation. The composition in lipids, proteins or dry matter of milk, strong with the starting of lactation, decrease until the third week. We note an increase in the concentration of these elements during the 4th week. The lactose, quantitatively not very important, has a content which falls after the peak of lactation to become very low at the end of the lactation on certain females. The content of mineral matters constantly increases beginning at the end of lactation. These data make it possible to have a referent for the study of the diarrhoeas of no microbial origin of the not weaned young rabbits but also to understand how to better nurse the young rabbits artificially on the basis of the cow's milk.

IntroductionAvant le sevrage des lapereaux le lait constitue leur seul aliment durant les dix sept premiers jours de vie. Il est suffisant pour permettre la croissance harmonieuse du lapin durant cette période (Fortun Lamothe et Gidenne, 2003). La composition du lait est donc primordiale et se trouve directement liée à l’état de santé du lapereau. En effet, l’ingestion d’un lait qui ne présenterait pas toutes les caractéristiques nutritionnelles ou sanitaires voulues entraînerait un retard de croissance et/ou augmenterait le risque de développer une affection. Il en va ainsi des lapereaux qui sont allaités artificiellement au biberon avec un lait d’une autre espèce (généralement du lait de vache ne contenant pas d’acide gras en C8 et C10) et développant par la suite une flore cæcale anormale (Lebas 2007, Boucher 2006). Mais c’est aussi le cas de lapereaux dont les mères ont une alimentation très déséquilibrée et qui produisent de ce fait un lait dont la composition peut ne pas être adaptée au lapereau qui le boit. Lors d’épisodes diarrhéiques chez les lapereaux non sevrés, pour lesquels toutes les causes pathologiques connues ont été éliminées, on suspecte la qualité du lait ingéré (qualité sanitaire ou composition chimique). Il nous a donc semblé intéressant d’étudier la

composition chimique du lait d’une souche de lapins de laboratoire. Cette étude nous permettra d’obtenir un référent de plus pour les pathologistes de terrain.

1. Matériel et Méthodes1.1. Animaux.Sept lapines albinos adultes primipares gestantes de souche NZW 052 Charles River sont traites une fois par jour, chaque matin à la même heure, du quatrième au vingt-huitième jour après la mise bas, et ce en laissant aussi les lapereaux téter. Nous n’avons pas analysé le colostrum. Ces femelles mangent ad libitum un aliment du commerce (2,4% MG, 16,9 % MAT, 10,5 MJ/Kg ED).1.2. Machine à traireLa machine utilisée est très semblable à celle qui est décrite par Lebas (1970). Son fonctionnement repose sur le principe de la pompe à vide. 1.3. Préparation des animauxCertaines lapines plus craintives peuvent éventuellement recevoir, juste avant la traite, une injection de chlorpromazine (LARGACTIL ND 0,1 ml/ femelle) afin de les tranquilliser. Une injection d’ocytocine avant la traite (OCYTOVEM ND 10 UI/ femelle) peut permettre également de libérer le lait

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plus facilement. Les lapines, séparées de leurs lapereaux depuis près de vingt-quatre heures par fermeture de la boîte à nid, sont installées dans un hamac, puis un gobelet trayeur est installé sur chaque trayon. Elles retrouveront leurs petits après une traite partielle. Des mesures antérieures à cette étude ont montré que chaque femelle peut produire à son pic de lactation près de 250 ml de lait par jour de lactation. Pour ce travail, on a prélevé une quantité de lait suffisante pour l’analyse (environ 50 à 100 ml), le reste est laissé aux lapereaux. Le lait est stocké à -20°C dans un sachet ou un pot stériles avant d’être analysé.1.4. AnalysesLes analyses sont réalisées en une fois par les automates du Laboratoire d’Analyses du Centre Ouest. On a mesuré les teneurs en matière azotée totale, matière grasse, matière sèche, lactose et matières minérales (cendres) pour le lait issu des sept lapines. Afin de limiter les coûts d’analyses, nous n’avons pas analysé l’intégralité des prélèvements chaque jour mais un seul échantillon de 3 à 4 prélèvements quotidiens choisis au hasard parmi les sept disponibles. Au total, nous avons réalisé 230 analyses pour les sept lapines. Des nuages de points représentant les valeurs obtenues permettent l’établissement d’une courbe de tendance pour chacun des cinq paramètres étudiés. Afin de rendre nos graphiques plus lisibles, nous représentons nos données ci-dessous en établissant pour chaque paramètre la moyenne des données de la semaine.

2. Résultats La teneur du lait en lipides, protéines ou matière sèche, assez forte la première semaine, décroit jusqu’à la troisième semaine pour augmenter de nouveau la quatrième semaine et ce jusqu’à la fin de la lactation. Figure 1 : Matière sèche (MS)

0

50

100

150

200

250

300

350

400

0 10 20 30

jour après MB

MS

CR

(g/K

g)Figure 2 : Matière Azotée Totale (MAT)

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60

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0 5 10 15 20 25 30

jour après MB

MA

T C

R (g

/Kg)

Figure 3 : Matières grasses (MG)

0

50

100

150

200

250

0 10 20 30

jour après MB

MG

CR

(g/K

g) R

ose

Goe

ttlie

b

La teneur en minéraux semble suivre une progression presque linéaire et augmente régulièrement du début à la fin de la lactation. Figure 4 : Cendres

0

5

10

15

20

25

30

0 5 10 15 20 25 30

jour après MB

cend

re C

R (g

/Kg)

En revanche, la teneur en lactose, quantitativement peu importante, après une augmentation durant les quinze premiers jours, chute rapidement et avoisine le 0g/Kg chez certaines lapines en fin de lactation.

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Figure 5 : Lactose

0

5

10

15

20

25

30

0 10 20 30

jour après M B

Lact

ose

CR

g/K

g

3. DiscussionLes femelles que nous avons traites étaient gestantes. On a remarqué que la production laitière chutait fortement vers le 24/25ème jour de lactation, la traite devenant difficile, voire impossible, sur certaines femelles. Cette chute est conforme aux descriptions faites par différents auteurs (Fortun Lamothe et Gidenne 2000, Lebas 1968, Maertens et al. 2006, Fernandez-Carmona J. et al. 2006). Nous avons arrêté les traites vers 27 à 28 jours selon les femelles. On sait que la taille de la portée influence la quantité de lait produite. Dans les conditions de notre étude, la traite stimule la glande mammaire et les femelles ainsi sollicitées produisent jusqu’à 250 ml au pic de lactation malgré un nombre de lapereaux allaités assez élevé (8 à 9). Mc Nit (1990) donne d’ailleurs une équation utilisable pour connaître la quantité de lait produit en g/j (= 37,47x – 1,56 N2 (R = 0,99, RSD 3,77), N = nombre de petits compris entre 5 et 11). Beaucoup d’études sur la lactation ont été faites avec des lapins de races pures (Californien, Fauve de Bourgogne, Néo Zélandais Blanc, Palomino, Satin ivoire ; Lukefahr et al. 1983, Maertens et al. 2006) et quelques unes en utilisant des souches issues de croisements de races (Californien x Néo Zélandais Blanc). Une étude a montré que les femelles Néo Zélandais Blanc ont une production laitière 30 % plus élevée que les femelles Californienne (Lukefahr et al. 1983). Le croisement de ces deux races pures produit des animaux bénéficiant d’un hétérosis et ayant une production laitière plus importante. On s’accorde à penser aujourd’hui que l’influence de la race en elle-même est faible mais que le degré de sélection (directe ou indirecte) est primordial (Maertens et al. 2006). Il semblait donc intéressant de mesurer la composition chimique du lait d’une souche de lapins de laboratoire, non sélectionnée sur le nombre de lapereaux sevrés (et donc non indirectement sélectionnée sur la production laitière). En ce qui concerne la composition, quelques études

montrent qu’il y a peu de variations entre les races comme le Néo Zélandais Blanc et le Hollandais, ou les souches commerciales (Maertens et al. 2006). Dans notre étude, la composition du lait varie au cours des semaines de lactation. D’abord assez concentrée en MS, MAT et MG, la teneur du lait en ces éléments décroît entre la 2e et la 3e semaine pour augmenter à nouveau en fin de lactation. Plus la femelle produit de lait, moins il est riche. A partir de la 4e semaine, la teneur en matière sèche augmente et le lait devient plus riche. Les proportions relatives de matières azotées et de matières grasses restent similaires, ce qui est conforme aux autres études publiées (Maertens et al., 2006, Lebas, 1971). La concentration en minéraux augmente tout au long de la lactation. Ce résultat est conforme à ceux de Lebas (1971). Peu d’études font une réelle mesure de la teneur en lactose et beaucoup l’estiment par différence avec les autres composants. On observe dans notre étude, avec un lait déjà naturellement pauvre en lactose, une chute importante de la teneur en ce sucre en fin de lactation. A cette date, le lapereau trouve une source d’hydrates de carbones dans son alimentation végétale et n’a plus besoin de lactose. Il faut noter que le faible effectif d’animaux utilisé (7 lapines) et le nombre important de facteurs pouvant influencer la composition du lait ne permettent pas d’établir d’équation prédictive fiable à partir de nos graphiques et seule une courbe de tendance est donnée à titre indicatif. Toutefois, il est possible de comparer ce lait de lapine très riche en matière azotée et en matière grasse et pauvre en lactose à celui de la vache. Cette comparaison permet de comprendre que lors d’allaitement artificiel, il est indispensable – si on part de lait de vache pour base – de supprimer une partie du lactose (ce qui est fait aujourd’hui dans certains laits du commerce) et de compléter la teneur en protéines et en graisses. De nombreuses « formules commerciales» répondant à ces exigences sont aujourd’hui disponibles. Un lait trop riche en sucre peut être à l’origine de diarrhées et d’indigestions (Boucher, 2005). Tableau 1 : Comparaison de lait de vache et du lait de lapineParamètre (g/Kg de

lait)

Vache (Jarrige, 1978)

Moyenne sur la

lactation complète

Lapine / vache

M. Sèche 129 261,37 2 fois plus richeLactose 48 19,43 2,5 fois moins richeM. Grasse 40 95,60 2,4 fois plus richeProtéine 33,5 125,06 3,7 fois plus richeCendres 7,5 23,25 3,1 fois plus riche

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ConclusionLa composition du lait de lapines d’une souche de lapins de laboratoire et son évolution au cours de la lactation est mesurée. Elle apporte quelques données complétant des études antérieures. Ainsi, elle confirme que la composition des laits de lapine et de vache étant très différentes, il est indispensable de choisir un lait de substitution pour des lapereaux nouveaux nés avec prudence et d’adapter la formule en fonction de l’âge du lapereau. Enfin, notre étude pourra servir de référence lors d’études de l’étiologie des diarrhées d’origines non microbiennes chez les lapereaux non sevrés.

RéférencesBOUCHER S. 2006. Maladies pédiatriques des lapereaux

avant sevrage. In : Troisième Congrès international sur les animaux sauvages et exotiques MNHN Paris. 30 mars - 2 avril 2006. Yaboumba éd. Paris

BOUCHER S. 2005. Mise bas de la lapine : gestion du part et de la naissance. Congrès AFVAC « Pédiatrie » Toulouse 2-4 déc. 2005 AFVAC éd. Paris.

FERNANDEZ-CARMONA J., BLAS E., CERVERA C., PASCUAL JJ. 2006. The measure of milk rabbit. World Rabbit Sci. 14 (sp) 58.

FORTUN-LAMOTHE L., GIDENNE T., 2000. The effects of size of suckled litter on intake behaviour, performance and health status of young and reproducing rabbits. Ann. Zootech. 49, 517 – 529.

FORTUN-LAMOTHE L., GIDENNE T., 2003. Besoins nutritionnels du lapereau et stratégies d'alimentation autour du sevrage, Prod. Anim., 16, 39-47.

LEBAS, F. 1971. Composition chimique du lait de lapine. Evolution au cours de la traite et en fonction du stade de lactation. Ann. Zootech., 20 (2) : 185-191.

LEBAS, F. 1970. Description d’une machine à traire les lapines. Ann. Zootech., 19: 223-228.

LEBAS, F. 1968. Mesure quantitative de la production laitière chez la lapine. Ann. Zootech., 17: 169-182.

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Effet de la surface disponible et de l'aménagement des cagessur les interactions mère-jeunes chez le lapin

O. GENESTE, P. GALLIOT, C. SOUCHET, L. MIRABITO

ITAVI 28 Rue du rocher 75 008 Paris, France

Résumé. Au cours de cette étude, l'effet sur les interactions mère-jeune de la surface disponible (3400 vs 4500 cm²) et de la présence ou non d'une plate-forme dans les cages a été évalué chez les lapines au cours de la troisième et de la cinquième semaine de lactation. La fréquence des allaitements et des sollicitations des mères (par 24h00) diminue entre la troisième et la cinquième semaine de lactation (P<0,05). Les deux facteurs étudiés ont eu peu d’influence sur ces comportements et seule l’augmentation de la surface disponible en troisième semaine a conduit a une réduction de la fréquence des allaitements (P<0,05). L’étude descriptive de la cinétique des allaitements et des sollicitations suggère plutôt des phénomènes de régulation entre ces deux comportements.Abstract – Effect of the sapce alowance and enrichment on the young-mother interactions in rabbit. This study was carried out to measure the effect on the young-mother interaction of the space allowance (3400 vs 4500 cm²) and the presence or not of a platform in rabbit does' cages. The frequencies of nursing and suckling-attempt (per 24h00) decrease between the third and the fifth week post partum (P<0,05). Increasing space allowance in the third week post partum lead to reduced nursing frequency (P<0,05) Otherwise, the space allowance and the enrichment have no major effect on the variables measured. The descriptive study of the kinetics of nursing and suckling attempt, which both follow a circadian rhythm, suggest a feed-back relation between the two behaviours.

IntroductionStauffacher (1992) a proposé de restructurer l'environnement des lapins afin de permettre notamment aux lapines allaitantes de se soustraire aux tentatives d'allaitement de leurs jeunes et d'améliorer ainsi leur bien-être. Dans le cadre d'un élevage en cage individuelle, cette évolution pourrait se traduire par une augmentation de la surface de la cage et la mise en place d'une plate-forme. Au cours d'une étude préliminaire (Mirabito et al., 2004), nous avions suggéré que cette stratégie n'était pas forcément pertinente et soulevé, de plus, la question de la nature des comportements observés et de l’inconfort éventuellement induit pour la femelle. Mais les effectifs observés étaient réduits et la définition des comportements pouvait être affinée. La présente étude vise donc à compléter ces premières observations en analysant l'effet de deux surfaces de cage et de la présence ou non d'une plate-forme sur les allaitements et les tentatives d'allaitement des jeunes.

1. Materiel et méthodes1.1. Conditions de logementQuatre modèles de cages ont été évalués au cours de cet essai correspondant à deux surfaces au sol disponibles en combinaison avec la présence ou non

d’une plate-forme. Le détail de la configuration des cages est rapporté au tableau 1.Les plates-formes étaient positionnées à 32 cm de hauteur. Du fait de la présence de la mangeoire (15 cm X 16,5 cm) en position antérieure de la cage, les dimensions de l’espace libre permettant l’accès à la plate-forme étaient de 17 X 19 cm dans les cages 38 PF et de 15 X 26 cm dans les cages 46 PF. Les animaux étaient soumis à un rythme d'éclairement de 16h00 (7h00-23h00). 1.2. Observations Le comportement des lapines a été enregistré en continu durant 48 heures au moyen de caméras vidéo sensibles au proche infra-rouge (SONY TRV night shot). Durant la période nocturne, des sources lumineuses complémentaires rouges de faible intensité étaient utilisées, les animaux étant soumis à ce régime lumineux depuis la naissance. Nous avons relevé toutes les sollicitations des mères par les jeunes et les réponses correspondantes ainsi que les allaitements et leur localisation. L’analyse portait sur 24 femelles (1 séquence de 48h00 par femelle), observées entre le 12e et le 18e

jour post mise bas et 21 femelles, observées le 26e et le 32e jour. Dans un souci de simplification, nous appellerons la période du 12e au 18e jour, troisième

Tableau 1: Caractéristiques dimensionnelles des différents types de logements évalués.

Lot Effectif(Semaines 3/5)

Largeur descages (cm)

Longueur hors nid (cm)

espace nid(longueur X largeur)

Plate-forme (longueur * largeur)

Surface

totale (cm2)38 S 6/5 38 65 25 * 38 / 342038 PF 6/6 38 65 25 * 38 33 * 36 460846 S 6/4 46 73 25 * 46 / 450846 PF 6/6 46 73 25 * 46 40 * 44 6268S : sans aménagement - PF : Plate-forme

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semaine de lactation, et la période du 26e au 32e jour, cinquième semaine de lactation. 1.3 Répertoire comportementalNous avons considéré deux types d’interaction entre les femelles et les jeunes : les « allaitements » et les « sollicitations ».Les allaitements se caractérisaient par l’adoption de la posture propre à ce comportement par la femelle, le positionnement des jeunes sous la mère et la stabilité de cette relation durant quelques minutes. Les sollicitations consistaient en des tentatives par les jeune d’attraper les tétines des mères. Ces comportements pouvaient être répétés à intervalle bref et concernaient un ou plusieurs jeunes. Nous avons arbitrairement considéré ces comportements du point de vue de la lapine en regroupant en un seul événement l’ensemble des tentatives des jeunes durant une période donnée. Cette séquence débutait lorsqu’un ou plusieurs lapereaux tentaient d’agripper les mamelles et se terminait lorsque la dernière tentative observée était suivi d'un des comportements d'échappement des lapines et qu'aucune autre tentative n'était observée dans les trente secondes suivantes. Une sollicitation pouvait donc comporter plusieurs tentatives des lapereaux et plusieurs comportements de réponse.En réponse aux sollicitations, les femelles ont exprimé différents comportements d'échappement : les allers-retours, les rotations, le plaquage au sol, le refuge dans la boîte à nid et la montée sur la plate-forme.1.4. Analyses statistiquesLes analyses statistiques ont été réalisées au moyen du logiciel Statview®. Les variables considérées étaient le nombre d’allaitements par 24 heures et le nombre de sollicitations par 24 heures. Les effets de la surface

des cages et de leur aménagement ont été testés au moyen du test de Mann-Whitney. Les effets de la semaine de lactation ont été testés au moyen du test de Wilcoxon.

2. Résultats2.1 Les allaitementsTableau 2: Nombre d'allaitements (moyenne ± erreur standard) par jour d'une lapine dans chaque mode de logement En troisième semaine, le nombre d'allaitements par jour et par femelle était plus élevé dans les petites cages (P<0,05). Les femelles logées en cages avec plateforme allaitaient plus fréquemment leurs jeunes, indépendamment de la surface de la cage, mais les différences n’étaient pas significatives (P<0,20).Le nombre d'allaitements en cinquième semaine diminuait par rapport à celui observé en troisième semaine (1,1±0,07 vs 1,38 ±0,12 – P<0,01) et, à cet âge, il n'apparaissait plus aucun effet du mode de logement même si l’on pouvait noter la persistance d'un comportement particulier des femelles du lot 38 PF.Lorsque l’on considère les deux jours d’observation (48 heures par femelle), au cours de la troisième semaine, les lapines effectuent leurs allaitements la nuit, entre 23h00 et 6h00, à moins d'une heure et demi d'intervalle d'un jour à l'autre. Les allaitements diurnes ont été observés presque exclusivement chez les femelles du lot 38 PF et expliquent bien évidemment la fréquence d’allaitement par jour plus élevée dans ce lot. En cinquième semaine, la synchronisation des allaitements pour une lapine et entre lapines estencore plus marquée avec une concentration entre 23h00 et 1h00 à l'exception toujours des femelles du lot 38 PF (figure 1).

Tableau 2: Nombre d'allaitements (moyenne ± ETM) par jour d'une lapine dans chaque mode de logement Cages "38" "46" Ensemble

3ème semaineS 1,42 ± 0,49 1,00 ± 0,00 1,21 ± 0,40PF 1,83 ± 0,93 1,25 ± 0,42 1,54 ± 0,75

Ensemble 1,63 ± 0,74 a 1,13 ± 0,31 b 1,38 ± 0,125ème semaine

S 1,00 ± 0,00 1,00 ± 0,00 1,00 ± 0,00PF 1,33 ± 0,61 1,00 ± 0,00 1,17 ± 0,44

Ensemble 1,18 ± 0,46 1,00 ± 0,00 1,1 ± 0,07S : sans aménagement - PF : Plate-formea,b : les moyennes affectées d’une lettre différente diffèrent au seuil de 5% Tableau 3: Nombre de séquences de sollicitations par lapine et par jour (moyenne ±ETM)

Cages "38" "46" Ensemble3ème semaine

S 60,91 ± 46,24 48,84 ± 37,42 54,88 ± 40,60PF 35,02 ± 13,97 46,79 ± 29,14 40,90 ± 22,63

Ensemble 47,99 ± 35,26 47,81 ± 31,99 47,9 ± 6,7 5ème semaine

S 23,64 ± 15,22 34,00 ± 13,33 26,20 ± 11,38PF 27,41 ± 15,46 24,99 ± 6,50 28,24 ± 14,57

Ensemble 25,70 ± 14,70 28,60 ± 10,22 27,1 ± 2,7S : sans aménagement - PF : Plate-forme

12èmes Journées de la Recherche Cunicole, 27-28 novembre 2007, Le Mans, France24

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Figure 1: Heure d'allaitement de chaque lapine observée en a) troisième semaine et en b) cinquième semaine d'allaitement de lactation (observation de 48 heures)

0

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6

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0 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20 21 22 23 0

a) Heures

Nu

mér

os

des

lap

ines

38S 38P F 46S 46P F

0

2

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0 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20 21 22 23 0

b) HeuresN

umér

os

des

lap

ines

Chaque ligne représente une femelle(en ordonnée numéro arbitraire de femelle). Chaque point représente un comportement d'allaitement positionné par rapport à l'heure de la journée (en abcisse).

Figure 2: Nombre moyen de séquences de sollicitations par lapine et par heure en fonction du temps (en heure) précédent l'allaitement en a) troisième et b) cinquième semaine.

0

1

2

3

4

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7

8

123456789101112131415161718192021222324Nombre d'heure précédant l'allaitement

Nombre moyen par femelle de s équences de s ollicitation

38S38P F46S46P F

a

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123456789101112131415161718192021222324Nombre d'heure précédant l'allaitement

Nombre moyen par femelle de s équences de s ollicitation

38S38P F46S46P F

b

Nous avons calculé le nombre de sollicitations par heure et par femelle et pour chaque femelle défini l'heure du deuxième allaitement sur les 48 heures d'observation. Cette heure a été définie comme le t0 et nous avons recodé les heures GMT en heure par rapport à t0. Puis nous avons calculé la moyenne des femelles (nb de sollicitations/heure en ordonnée) à t0-1h00, t0-2h00, t0-3h00, etc (en abcisse).

12èmes Journées de la Recherche Cunicole, 27-28 novembre 2007, Le Mans, France25

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Figure 3: Proportion moyenne des comportements utilisés par chaque lapine pour mettre fin à une séquence de sollicitations en a) troisième semaine et en b) cinquième semaine

0

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Allaitementpartiel

Allaitement dela portée

Se couche ous'assoit

Déplacement Utilisation dunid

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38 S 38 PF 46 S 46 PF

a

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Allaitementpartiel

Allaitement dela portée

Se couche ous'assoit

Déplacement Utilisation dunid

Utilisation dela plate-forme

b

2.2. Les sollicitations Le nombre de sollicitations observées par 24 heures et par lapine était pratiquement divisé par deux entre la troisième et la cinquième semaine de lactation (47,9±6,7 vs 27,1±2,7 - P<0.01). Le nombre de séquences de sollicitations ne dépendait pas de la surface de la cage ou de son aménagement même si, en troisième semaine de lactation seulement, il apparaissait plus faible dans le lot 38 PF que dans le lot 38 S (P>0,3) (Figure 2). Si on s’intéresse à la cinétique des sollicitations sur une période de 24 heures, en considérant l’allaitement nocturne de chaque femelle comme le t0 et en calculant le nombre de sollicitations par heure, on constate que le niveau de cette variable tend à rester stable et à un faible niveau après l'allaitement et durant une grande partie de la journée. Puis, la fréquence augmente au fur et à mesure que l'on se rapproche de l'allaitement suivant, environ 6 heures avant en troisième semaine et une à deux heures avant en cinquième semaine.2.3 Les comportements « d'échappement »La plupart du temps, les lapines mettent fin aux sollicitations en s’asseyant ou en se couchant quel que soit le type de cage. La plate-forme est moins utilisée par les femelles du lot 38 PF que celles du lot 46 PF quel que soit l’âge des lapereaux. La zone de la cage où était présent jusqu’à 25 jours post mise bas le nid est beaucoup plus utilisée par les femelles au cours de la cinquième semaine dans les cages non équipées de plate-forme (Figure 3).

3. DiscussionDe façon générale, nous avons observé une évolution sensible de la fréquence des allaitements et des sollicitations entre la troisième et la cinquième semaine. Ce résultat est cohérent avec les observations précédemment réalisées en conditions d'élevage et naturelles (Jilge, 1993; González-Mariscal, 2007). Le rythme biologique de la lapine et des lapereaux évolue donc naturellement au cours de la lactation, quel que soit le mode de logement des animaux. En cinquième semaine, l’ensemble des données rapportées suggère des interactions mère-jeune beaucoup moins fréquentes (allaitement et

sollicitations) et concentrées sur une période courte. A ce stade de la lactation le mode de logement des animaux n’a aucune incidence sur l’expression de ces comportements. En troisième semaine de lactation, la surface de la cage a eu une incidence sur la fréquence des allaitements, plus élevée dans les petites cages. Si la plate-forme permet aux lapines de se soustraire aux sollicitations des lapereaux, cet aménagement n’a cependant pas eu d’incidence significative sur les fréquences observées. Cette utilisation de la plateforme par les femelles aurait pu conduire à une baisse des sollicitations (qui en valeur numérique est effectivement observée) mais nos données suggèrent que cette diminution pourrait aussi être mise en relation avec une augmentation de la fréquence des allaitements. Compte tenu des effectifs étudiés et de l’absence de résultats significatifs, il s’agit bien évidemment d’une simple hypothèse qu’il conviendra de confirmer. La description de la cinétique des sollicitations et des allaitements sur 24 heures suggère cependant un rôle régulateur de ces derniers qu’il convient peut-être de mettre en relation avec d’autres processus physiologiques.

ConclusionEn conclusion, cette étude semble montrer que les sollicitations des lapines par les jeunes durant la lactation ne sont pas fondamentalement modifiées par les conditions de logement des animaux. Un travail de recherche plus fondamentale resterait cependant à conduire, de notre point de vue, pour mieux comprendre la régulation de ces comportements et leur impact sur le bien-être des animaux.

RéférencesGONZÁLEZ-MARISCAL, G., 2007. Mother rabbits and their

offspring: Timing is everything. Dev. Psychobiol. 49: 71-76.

JILGE, B., 1993. The ontogeny of circadian rhythms in the rabbit. J. Biol. Rhythms. 8: 247–260.

MIRABITO, L., GALLIOT P., SOUCHET, C. 2004 Effet de la surface disponible et de l'aménagement des cages sur les performances zootechniques et le comportement des lapines et des jeunes Journée nationale de l’élevage du lapin de chair , 30 Novembre 2004, 40-52, ITAVI Ed. .

STAUFFACHER M 1992 Group housing and enrichment cages for breeding, fattening and laboratory rabbits. Animal Welfare, 1, 105-125

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