MICHEL CAMMARERI

L A R E L U I R E

P A S À P A S

dessain et tolra

Les deux premières éditions de LA RELIURE PAS À PAS ont été publiées par l'auteur, Michel Cammareri: la première en 1984 (ISBN 2-9500530-0-9), la deuxième, revue et augmentée, en 1987 (ISBN 2-9500530-1 -7).

@ 1990 Dessain et Tolra, Paris Dépôt légal: février 1990 Imprimé en Italie par la G.E.P., 26100 CREMONE

ISBN 2-249-27807-5

" Toute représentation ou reproduction, intégrale ou partielle, faite sans le consentement de l'auteur, ou de ses ayants-droit, ou ayants-cause, est illicite (loi du 11 mars 1957, alinéa 1er de l'article 40). Cette représentation ou reproduction, par quelque procédé que ce soit, constituerait une contrefaçon sanctionnée par les articles 425 et suivants du Code pénal. La loi du 11 mars .1957 n'autorise, aux termes des alinéas 2 et 3 de l'article 41, que les copies ou reproductions strictement réservées à l'usage privé du copiste et non destinées à une utilisation collective d'une part, et, d'autre part, que les analyses et les courtes citations dans un but d'exemple et d'illustration "

C'est à mon épouse Odette que je dois la création de ce livre. A nos enfants NICOLE, JOELLE, BRUNO.

PRÉFACE

Au xvie siècle, comme le rappelle l'auteur de ce bel ouvrage dont j'ai l'honneur de rédiger la préface, les lieurs de livres constituaient une corporation sous l'égide de l'Université; nous avons, en quelque sorte, renoué avec cette tradition en établissant, dans le cadre du Centre d'Éducation Permanente de l'Université de Nice — dont j'étais alors Président — le Centre de reliure fondé et dirigé par Monsieur Michel Cammareri.

Les liens entre la reliure et l'Université sont évidents et plus étroits qu'il ne le paraît d'abord.

L'universitaire et le relieur sont tous deux des «hommes du livre». Le relieur conserve et honore le livre, principal outil de l'universitaire; par son humble travail matériel il contribue non seulement à assumer la durée de l'écrit, mais aussi à répandre dans les esprits le respect du livre, médiateur de toute culture. Car le relieur honore le livre, en le transformant en objet d'art, orné, doré, coloré, parfumé même par de subtiles odeurs de cuir, ou en en faisant un solide outil de travail à la sobre reliure «janséniste».

«Saisis-toi du livre, c'est une arme» enseignait Karl Marx: la formule est forte et belle mais elle est très simpliste; et le relieur le sait bien. Saisissant mille fois le livre qu'il habille, le pressant, le caressant, il ennoblit, par son patient travail, non pas une arme, mais l'outil principal du transfert des connaissances, de la communication des intelligences et de la tradition de l'esprit.

Mais il y a plus; les maîtres de l'Université et les maîtres relieurs entretiennent avec le livre des rapports semblables; certes les premiers sont aux prises avec l'esprit de l'ouvrage et les seconds avec son corps (ne dit-on pas «le corps d'un livre»?); mais les uns et les autres exercent des maîtrises fondées sur la rigueur et la discipline, la finesse, la patience et la passion, l'attention et l'imagination, l'esprit de mesure et de créativité.

Ces qualités, je les ai discernées chez Monsieur Cammareri depuis près de vingt ans qu 'il m'honore de son amitié; et comme les universitaires s'efforcent de le faire, il s'est appliqué, dans son enseignement, à les entretenir, à les développer, à les transmettre; on les retrouve dans ce livre qui présente de façon vivante, attrayante et claire, le chemin que doivent emprunter les apprentis relieurs pour accéder à la maîtrise de leur art; fondée sur la grande expérience pédagogique et pratique de l'auteur, la démarche est sûre et aisée; et il ne s'agit pas seulement d'initier mais de transmettre toutes les subtiles techniques d'un art délicat.

Actuellement, Monsieur Cammareri poursuit son activité d'enseignement dans le cadre du Centre de reliure manuelle qu'il a créé: un programme annuel de cinquante heures y est organisé les samedis matin, permettant à tous ceux qui le désirent de s'initier à l'art de la reliure.

Puisse cet ouvrage, qui recevra, j'en suis sur, un excellent accueil, apporter à tous ceux qui l'utiliseront les joies de la pratique d'un art ancien et toujours vivant et leur conférer la dignité de «Docteurs ès reliure».

Jean Touscoz Professeur de Droit International

Président honoraire de l'Université de Nice

Les livres, autrefois, étaient considérés comme des objets de luxe, puisqu'ils étaient reliés richement avant d'être manipulés par les lecteurs de l'époque.

Aujourd'hui, la plupart des ouvrages sont présentés par les éditeurs à l'état de brochures. Sous cette forme, il est assez difficile de les conserver en bon état. Rapidement les couvertures se froissent, se cornent, les dos se brisent et bientôt les bibliothèques ne sont plus garnies que d'ouvrages à l'aspect débraillé.

Les revues scientifiques et littéraires, les journaux illustrés, les publications professionnelles s'entassent généralement à plat dans le bas d'un meuble; cette disposition ne facilite pas leur classement et complique les recherches.

Vous qui êtes un ami des livres et qui souffrez de ce désordre, vous avez sûrement songé à les protéger avant de les classer.

Pourquoi ne pas pousser un peu plus cette idée en décidant de relier vous-même vos revues, vos brochures et vos partitions de musique.

Si vous êtes de ceux-là, je vous propose une technique assez simple à suivre, il vous suffira d'aller sans hâte et de procéder par étape. Vous allez vous distraire et en même temps protéger les livres que vous aimez et il vous sera agréable de les tenir dans vos mains après les avoir reliés vous-même et avoir ainsi des compagnons plus agréables, des amis plus intimes.

Ne pas laisser mourir cette connaissance qu'est la pratique de la reliure, transmettre la possibilité de relier soi-même, tels sont mes objectifs.

Vous trouverez dans les pages qui suivent une petite liste du matériel indispen- sable au débutant ainsi qu'une liste des fournitures.

Ce traité n'a pas la prétention d'égaler certains ouvrages spécialisés. Cependant l'amateur sera très heureux de pouvoir suivre pas à pas les différentes phases de la technique.

Mon unique souci est celui d'être clair dans les explications, c'est pourquoi j'ai voulu qu'elles soient accompagnées de photos, je devrais dire d'un film.

C'est par les encouragements du Professeur Jean Touscoz, Président honoraire de l'Université de Nice et Professeur de Droit international, que j'ai pu organiser des cours de reliure manuelle dans le cadre de la formation continue, au Centre d'Éducation Permanente de l'Université de Nice (C.E.P.U.N.). J'exprime ici au Professeur Jean Touscoz toute ma gratitude.

Plus de cent cinquante stagiaires ont pu être formés en sept années, par des stages de cinquante heures chaque année universitaire.

Quelques-uns ont ouvert leur atelier, d'autres font de la reliure pour eux-mêmes comme ils le souhaitaient.

Michel Cammareri

INTRODUCTION

APERÇU HISTORIQUE DE LA RELIURE

Il y a dans l'histoire de la civilisation trois grandes étapes: le langage, l'écriture, l'imprimerie.

On serait tenté de placer, tout de suite après l'écriture, la reliure, parce que dès que les hommes surent écrire, ils eurent le souci de rassembler et de conserver les objets maniables sur lesquels ils avaient fixé leur pensée.

Antiquité Les hiéroglyphes et les écrits coptes ont bravé le temps, fixés sur des feuilles de

palmier, puis sur des papyrus (fabriqués avec la moelle de cette plante); ils furent groupés et conservés.

Les anciens avaient leurs tablettes percées à un angle et reliées entre elles par une cordelette.

Ère chrétienne Dans les premiers siècles de notre ère, on écrivit sur les peaux de bêtes découpées

en rectangles, cousues et enroulées sur un rondin de bois. Puis les peaux furent pliées sur elles-mêmes à la manière de nos paravents. Un peu plus tard, on fendit tous les plis d'un côté et on assembla tous ceux de

l'autre par une couture. La forme moderne du livre était trouvée.

Moyen Age Jusqu'au XIIe siècle, les moi nés firent eux-mêmes les reliures de leurs manuscrits.

Ils cousaient sur des nerfs de bœuf les feuillets de parchemin et des planchettes de bois formaient les couvertures. Les orfèvres recouvraient l'ouvrage de riches étoffes avec des motifs d'or ou d'argent.

Au XIIIe siècle, le papier de chiffon fut importé en Europe par les Arabes. Les manuscrits se multiplièrent et pour les recouvrir on employa le parchemin, le vélin, la peau de truie, les palimpsestes.

Les couvertures furent décorées et protégées par des coins de fer ou de cuivre; chacune portait en outre cinq cabochons de métal et des fermoirs ciselés les maintenaient serrées sur l'ouvrage.

Ainsi bardé de fer et de cuivre, le livre du Moyen Age ressemblait à son contemporain le seigneur féodal dans son armure riche et lourde.

Temps modernes La découverte de l'imprimerie (1436) donna un nouvel essor à l'art de la reliure.

Les ais de bois, qui servaient de couvertures, furent remplacés par des cartons. Les coins, cabochons et fermoirs de métal furent supprimés; aux nerfs de bœuf, sur lesquels étaient jusqu'alors cousus les cahiers, on substitua des cordelettes de chanvre plus souples et aussi solides. Pour la couvrure on commença d'employer le maroquin (cuir).

Renaissance Au xvie siècle, les «lieurs de livres» formèrent une corporation sous la tutelle de

l'Université. De véritables chefs-d'œuvre furent crées.

Époque révolutionnaire Aux approches de la Révolution française, les livres furent imprimés en grande

série et reliés hâtivement.

Époque romantique Cette époque a vu le goût des beaux livres renaître peu à peu. Les relieurs

apportèrent quelques perfectionnements à la technique. Les dos et les plats étaient abondamment décorés.

Époque contemporaine Depuis 1850, diverses machines ont été inventées ou adaptées à l'art du relieur :

étaux à endosser, cisailles, massicots, presses, machines à coudre, machines à parer le cuir. Les ateliers se spécialisent selon la production désirée: reliures industrielles, reliures de bibliothèque, reliures de luxe ou reliures d'art.

Les reliures industrielles ou commerciales sont celles qui revêtent les ouvrages venant directement des éditeurs. Leur exécution, par grandes séries, permet d'utiliser un outillage à rendement intensif et d'obtenir des prix de revient relativement bas.

Les reliures de bibliothèque sont faites à l'unité pour le compte des particuliers. Ce sont généralement des demi-reliures en basane ou en chagrin: leur exécution est assez simple.

Les reliures de luxe donnent au livre une vêture plus riche. Ce sont des demi- reliures à coins ou des reliures pleines avec des décorations variées. Les gardes peuvent être en soie. Ces reliures doivent être exécutées avec un soin minutieux.

Les reliures d'art modernes sont traitées suivant la technique et avec les matériaux des reliures de luxe. L'artiste doit s'inspirer du texte et de l'ornementation qui l'accompagne pour déterminer la forme de reliure. Ces pièces uniques sont souvent le fruit de la collaboration du riche et lettré bibliophile avec l'artiste relieur.

La décoration varie suivant le sujet du livre et les matériaux de couvrure. Les artistes s'efforcent par des combinaisons de matériaux, de couleurs, de créer

des formes nouvelles.

Le relieur, d'après Jost Amman.

LES LIVRES

L'imprimeur moderne dispose, avec ses papiers et ses encres, d'une foule de possibilités. On voit aussi que son métier s'est considérablement transformé depuis Gutenberg. Heureusement que la spécialisation est là pour partager les activités.

Le relieur peut ignorer le métier d'imprimeur, cependant il est bon qu'il sache ce qu'est une imposition.

Imposition La disposition des pages est calculée pour qu'après pliage de la feuille, chacune

se trouve à sa place normale; les blancs sont réglés avec soin pour que les impressions se superposent exactement de part et d'autre de la feuille (Figures 1 et 2).

Les deux faces d'une feuille imposée en in-quarto.

Formats des livres La grandeur ou format du livre dépend des dimensions de la feuille d'impression

et du nombre de pages qu'elle renferme. Les feuilles sont, suivant leur taille, désignées par des noms divers: colombier,

raisin, couronne, etc. qui étaient autrefois des marques de fabrique; une colombe, une grappe, une couronne y étaient marquées en filigrane.

Plus tard, on donna au format de la feuille le nom du motif qu'on y voyait par transparence.

On trouvera dans le tableau qui suit les appellations les plus courantes avec leurs dimensions.

FORMAT DES PAPIERS, CARTONS, LIVRES

Lorsque la feuille n'est pas pliée, qu'elle reste à plat dans la constitution du livre, le format est dit in-plano la feuille pliée en deux in-folio la feuille pliée en quatre in-quarto viennent ensuite par pliage en deux du précédent in-octavo puis ................................... in-seize et ..................................... in-trente-deux par des pliages un peu spéciaux, on forme l'in-douze et l'in-dix-huit.

Chaque feuille ainsi pliée forme un cahier. Le format d'un volume est déterminé par l'indication du pliage suivi du nom de

la feuille d'impression. On dira par exemple un volume in-folio carré, in-octavo colombier

Exemple Prenons l'in-plano raisin 50 cm X65 cm

pliée en deux feuilles devient l'in-folio raisin 32,5 cm X50 cm pliée en quatre feuilles devient l'in-quarto raisin 25 cm X32,5 cm pliée en huit feuilles devient l'in-octavo raisin

ou in-huit raisin 1 6,25 cm X25 cm Lorsque l'ouvrage se présente dans le sens de la largeur, le format est dit à

l'italienne ou oblong. En raison de la multiplicité des formats, les éditeurs complètent ou remplacent

parfois les appellations habituelles par les dimensions de l'ouvrage en centimètres.

Brochage Les cahiers provenant du pliage des feuilles imprimées sont sommairement

cousus à la machine et la couverture est ensuite appliquée sur le dos enduit de colle forte.

La brochure est alors terminée.

Appréciation Le prix n'est pas toujours une indication suffisante pour juger la valeur matérielle

d'un volume. On peut cependant se faire une opinion de certains détails lorsqu'il s'agit d'ouvrages courants.

La couverture est faite pour retenir l'attention. Le poids du livre nous renseigne sur la qualité du papier. Les beaux papiers sont lourds parce qu'ils ont été fortement compressés à la fabrication. L'ouvrage forme un bloc compact qui se prête sans difficulté aux diverses opérations de la reliure.

Par contre, les papiers épais et spongieux semblables à du buvard sont relativement légers; ils avantagent le livre en lui donnant de l'épaisseur, mais sachez qu'ils font le désespoir du relieur. Au débrochage, les fonds des cahiers se déchirent. Sous la presse, l'ensemble s'écrase mais reprend ensuite son volume primitif.

Examinez maintenant l'impression. Voyez si les caractères sont lisibles, les titres en bonne place, l'ensemble harmonieusement composé. Par transparence, vous pouvez vérifier, dans quelques feuilles, la superposition des parties imprimées. Regardez si les premières lignes des pages qui se font face sont bien à la même hauteur, si les marges sont régulières et assez grandes.

Tenez compte aussi des gravures, de leur qualité. Si vous achetez un livre relié industriellement, il faut savoir faire la différence

entre l'indication «plein cuir» et «pleine peau». C'est la deuxième indication qui devra retenir votre attention.

Songez enfin qu'une édition trop vulgaire ne mérite pas d'être reliée. Le livre sortant de vos mains ne doit-il pas être une petite œuvre d'art où les finesses de l'esprit s'allieront au charme de la belle matière ouvrée.

Technologie Les techniques de la reliure et du cartonnage comportent un certain nombre de

termes particuliers qu'il est indispensable de connaître. Ces termes sont relatifs au livre, à sa couverture, à l'outillage, aux fournitures et aux diverses opérations du travail; ils varient parfois d'un atelier à l'autre tout en gardant des ressemblances suffisantes pour rester compréhensibles. C'est ainsi qu'on dit indifféremment la couture ou la cousure d'un livre, un cousoir ou une couseuse, le polissage ou la polissure du cuir.

Loin d'être complète, la liste qui suit facilitera la compréhension des explications techniques du cartonnage et de la reliure.

On trouvera au début de chaque chapitre les termes désignant les diverses parties d'un livre cartonné ou relié.

Termes usuels Affranchir A l'aide d'une cisaille ou d'une pointe, sur une plaque de

zinc, couper franchement un côté d'un carton, d'une carte, d'un tissu ou tout autre support.

Ais Planchette de bois formant le plat d'un livre. Les ais peuvent être en carton ou en bois; ils sont indispensables pour la mise en presse des livres.

Basane Peau de mouton tannée, utilisée pour des reliures cou- rantes; sa fleur est fragile.

Battée Quelques cahiers d'un livre. Becquet Peut s'écrire aussi «bequet». Fragment de peau pour'cacher

les jointures intérieures (contreplats). Cahier Réunion de feuillets doubles emboîtés les uns dans les

autres et provenant du pliage de la feuille d'impression. Chagrin Peau de chèvre tannée, petits grains. Chair Côté intérieur de la peau. Chaînettes Points d'arrêt exécutés au cours de la couture d'un livre

dans les grecqures de tête et de queue. Passage du fil permettant la solidarité des cahiers.

Charnière Liaison du plat et du dos. Chasses Parties des cartons qui dépassent les tranches du livre. Pour

un livre moyen une chasse est égale à quatre millimètres. Coiffes Les deux extrémités du dos d'un volume relié. Elles couvrent

partiellement les tranchefiles dans les reliures en cuir. Coins Angles extérieurs des plats recouverts généralement de la

même matière que le dos. Collationner Vérifier l'ordre des cahiers, des pages, des hors-texte d'un

livre avant la couture. Corps d'ouvrage L'ensemble des cahiers cousus.

Couture Action de coudre les cahiers. Couvrure Application d'un revêtement sur les plats et le dos d'un

volume. Demi-reliure Lorsque la couvrure du dos s'arrête sur une partie des plats. Dos Partie visible du livre lorsque celui-ci est rangé dans une

bibliothèque. Côté où sont assemblés les cahiers par la couverture. Il est arrondi et parallèle à la gouttière.

Dos long Dos uni, sans relief, sans nerf, mais pouvant comporter une ornementation en mosaïque ou dorure.

Dos à nerfs Dos orné de bandes transversales en relief appelées nerfs. L'élasticité de la peau mouillée permet ces reliefs.

Dos classique Dos à cinq nerfs également espacés. Les entre-nerfs de tête et de queue sont un peu plus grands que les autres.

Dos moderne Dos à quatre nerfs obtenu par la suppression du nerf central du dos classique. L'entre-nerfs du milieu est ainsi double des autres.

Entre-nerfs Espace entre deux nerfs. Faux dos Carte fixée sur le dos; peut soutenir les faux nerfs. Faux titre Il précède le titre et il n'indique pas le nom de l'auteur ni

celui de l'éditeur. Fer Instrument utilisé pour la dorure. Fleur Côté extérieur de la peau, côté poil. Fleuron Fer à dorer qui forme à lui seul un motif. Fonds Plis des feuillets doubles d'un cahier. Lorsqu'ils sont déchi-

rés, on les répare avant de procéder à la couture. Frontispice Ce nom est souvent donné au titre et aussi à la gravure

placée à sa gauche. Grecqures Entailles pratiquées avec une scie, appelée grecque, dans le

dos du livre à relier pour y loger les ficelles de la couture. Gardes blanches Feuillets blancs ajoutés au commencement et à la fin du

livre pour isoler la reliure du texte. Gardes marbrées On dit aussi gardes de couleur. Papiers qui recouvrent les

plats intérieurs des couvertures et la première page des gardes blanches.

Gouttière Tranche opposée au dos. Hors-texte Gravures, planches tirées à part et intercalées dans un

ouvrage. Jaspure Teinte semée en petits points à l'aide d'une grille et d'une

brosse sur les tranches rognées. Justification Terme typographique désignant la longueur de la ligne. Macule Feuille de papier quelconque sur laquelle on place les pièces

à encoller pour protéger la table.

Maroquin Peau de chèvre tannée, mise en couleur du côté de la fleur et employée pour la reliure de luxe (Maroc).

Mors Partie du cuir ou de la toile attenant au dos. C'est aussi la rainure pratiquée le long du dos à l'endossure et destinée au logement des cartons.

Mosaïque Reliure dont la couvrure est réalisée au moyen de plusieurs cuirs de couleurs différentes.

Nerfs Lanières ou ficelles sur lesquelles sont cousus les cahiers. Saillies au dos du livre correspondant à ces lanières ou à ces ficelles.

Onglets Bandes de papier simili-japon fin employées pour réparer les fonds des cahiers et monter les hors-texte.

Palimpseste Parchemin que l'on a gratté pour en enlever l'écriture afin de la remplacer par un nouveau texte.

Parchemin Peau de chèvre ou de mouton appelée aussi peau de Pergame (Italie), où il fut inventé. Utilisé aussi pour les' reliures de luxe.

Parure Opération qui a pour but d'amincir les peaux de couvrure sur toute la surface (côté chair) ou simplement sur les bords à remplier.

Plats Les deux surfaces planes des couvertures du livre. Pièce de titre Morceau de peau sciée ou autre servant de support pour

inscrire le titre, collée sur le dos ou le plat. Queue Bas des pages du livre et du dos. Recto Côté impair d'un feuillet. Reliure D'une manière générale, ce mot désigne toute enveloppe

qui a pour but de présenter le livre sous un aspect agréable et d'en assurer la conservation.

Reliure pleine On désigne ainsi les reliures dans lesquelles le dos et les plats sont totalement recouverts de la même matière. On dira: une reliure plein maroquin, une reliure pleine toile.

Reliure janséniste Reliure sans ornement, portant simplement le nom de l'auteur et le titre de l'ouvrage.

Remplier Retourner les bords du cuir, de la toile ou du papier de couvrure vers les tranches et sur les plats intérieurs des cartons.

Serpente Papier isolant et très fin que l'on place sur les photos pour éviter qu'elles maculent le texte.

Signature Chiffre placé en bas de la première page de chaque cahier permettant leur ordre.

Signet Ruban étroit collé au dos du livre vers la tête; il sert à marquer la page où s'est arrêté le lecteur.

Talon Partie repliée d'un feuillet ou d'un cahier qui en permet la couture.

Témoin Partie des cahiers laissée intacte par le relieur pour montrer qu'il a respecté l'intégrité des marges.

Templet Baguette de bois qui ferme la fente du cousoir lorsque celui- ci est prêt à fonctionner.

Tête Haut du dos et des pages du livre. Titre La page de titre porte le nom de l'auteur, le titre de l'ouvrage,

le nom du décorateur s'il y a lieu et'le nom de l'éditeur. Il est toujours sur le recto d'un feuillet.

Tranches Les trois côtés d'un livre. On dira : tranche de queue, de tête ou de gouttière.

Tranchefile Galon de soie que l'on place aux deux extrémités du dos pour les orner et les consolider (tranchefile mécanique, tranche- file manuelle).

Train Série de volumes sur lesquels le relieur fait successivement la même opération.

Tremper Enduire de colle à l'aide d'un pinceau ou autre les parties à coller.

Vélin Peau de veau parcheminée. Verso Côté pair d'un feuillet.

MATÉRIEL

Il y a trois possibilités pour acquérir le matériel nécessaire. — S'adresser à une maison spécialisée. — Se procurer d'abord le fût à rogner, puis fabriquer une presse en réunissant:

une vis d'établi, deux guides latéraux, deux plaques de fer pour les mors, puis le bois. Le petit outillage peut être acheté dans une quincaillerie et chez le coutelier. Faire fabriquer un cousoir par un tourneur sur bois.

— Associer ces deux possibilités.

Outillage Première urgence 1 presse, 1 fût à rogner, 2 ais.

1 scie à grecquer, 1 cousoir, 5 chevillettes. 1 paire de ciseaux, 1 marteau, 1 plaque de zinc. 1 pointe à couper, 1 plioir normal, 1 plioir effilé. 2 pinceaux (1 pour chaque colle). 1 réglet gradué en durai (30 cm). 1 ciseau à entailler (largeur de coupe 4 à 5 mm). 1 poinçon emmanché.

1 outil à lame rigide pour couper les cartons. 1 récipient rond pour préparer la colle de pâte. 1 compas à pointes. 1 équerre métallique plate (30 cm). 1 équerre à talon (1 6 cm). 1 rectangle de carton épais (15 cm X 5 cm) sur lequel on collera du papier de verre numéro moyen.

Deuxième urgence 1 réglet (50 cm). 2 compas à pointes, 1 pierre à parer. 1 couteau à parer, 1 lissette, 1 rape à bois. 1 gabarit d'angle, 1 pince à nerfs. 1 pierre à affûter (2 grains sur 2 faces). 1 tas en plomb pour piquer les cartons. 1 règle en acier, 1 couteau à élaguer. 1 frottoir en buis.

Matériel à ajouter pour un atelier à caractère commercial.

1 étau à endosser. 1 cisaille (gros modèle). 1 presse à percussion munie d'une dizaine d'ais. 1 massicot. 1 tas à battre. 1 pierre à parer grand modèle.

Fournitures Colles: 2 pots de colle forte (pot de 1 kg).

2 paquets de colle d'amidon (paquet de 500 g). Ruban glacé: 1 rouleau de 10 mm de large (10 m). Ficelle à grecquer: 3 pelotes no 8; 3 pelotes no 12. Fil de lin: 2 bobines n° 10; 2 bobines n° 14;

2 bobines n° 20; 2 bobines n° 30. Aiguilles: 1 paquet d'aiguilles pour reliure (bouts arrondis). Papier goudron: 5 feuilles (grand format). Signet: 1 pièce de 10 m (couleur au choix). Tranchefile: 2 m n° 1 ; 2 m n° 2;

2 m n° 3 (couleur au choix). Tranchefile chapiteau : 2 m n° 0

2 m no 1 (couleur au choix). Mousseline ou singalette: 1 rouleau. Toile ou Simili-cuir: 7 m (couleur et qualité au choix). Cuirs: 3 peaux de mouton; 1 peau de chèvre (grain de Cap). Papiers: 50 feuilles Ingres blanc; 50 feuilles Ingres crème.

25 feuilles Garde couleur (qualité et couleur au choix). 20 feuilles Papier de plat (qualité et couleur au choix).

Carte : 10 feuilles grand format (épaisseurs différentes). Carte de Lyon : 10 feuilles (format 21 cm X 30 cm). Carton: 5 feuilles épaisseur 3 mm (grand format)

5 feuilles épaisseur 2 mm (grand format) 5 feuilles épaisseur 1,5 mm (grand format)

Les quantités de ces fournitures peuvent être augmentées ou réduites.

tranche supérieure ou Tête

tranche inférieure ou queue 18

LE CARTONNAGE

LE BRADEL

Le Bradel est une reliure dont le cartonnage léger est relié au corps d'ouvrage par une mousseline collée.

Cette forme de reliure s'appelle aussi emboîtage, parce que le livre et sa couverture, préparés séparément, sont emboîtés, c'est-à-dire assemblés par collage (photo 1).

Cette reliure permet une ouverture très facile du livre. Sans prétendre rivaliser avec la véritable reliure, les cartonnages comme le

Bradel, présentent quelques particularités intéressantes. Leur exécution facile permet auxdébutants d'obtenir un bon résultat dès le premier essai. Le prix modeste des fournitures met ce genre de travail à la portée de tous.

Afin de faciliter l'apprentissage, le relieur prendra un livre ordinaire de taille moyenne, sans hors-texte.

Un livre d'étude conviendra bien pour cette première reliure (photo 2).

Apprêture à la couture

DÉBROCHAGE Démonter le livre en coupant les fils au centre de chaque cahier (photos 3 et 4).

Bien nettoyer le dos de chacun d'eux. REPLIURE

Si cela est nécessaire, replier les cahiers afin que les pages de gauche et de droite se trouvent à la même hauteur. RÉPARATIONS

Les cahiers, dont les fonds sont déchirés, nécessitent une réparation avec des bandes de papier simili-japon fin, que l'on appelle onglets.

On pourra utiliser, pour quelques onglets seulement par livre, du papier avion grand format.

Découper quelques onglets sur une plaque de zinc (photo 5). Les onglets sont trempés à la colle de pâte (amidon) sur une macule (photo 6). Poser, à cheval, ces onglets sur les fonds des cahiers abîmés (photo 7). Une autre technique consiste à poser l'onglet encollé sur une macule propre et

à poser dessus le fond du cahier abîmé (photo 8). A l'aide d'un plioir, frotter, en interposant une feuille de papier, pour obtenir une bonne adhérence et ainsi chasser les bulles d'air.

Fermer le cahier qui a reçu un onglet; le glisser dans un vieil almanach et serrer le tout en presse pendant quelques secondes (photo 9).

On pourra utiliser du Filmoplast; c'est un papier spécial adhésif mince transpa- rent, qui permet de réparer à sec et de façon invisible les fonds des cahiers, pages de livres, etc. LAMINAGE

Lorsque la réparation est terminée, il faut redonner une bonne forme aux cahiers en les compressant par battées renversées. Pour obtenir un bon laminage, l'ouvrage doit rester en presse au moins une nuit (photo 10).

Le laminoir est une machine qui comporte deux cylindres d'acier tournant en sens inverse et entre lesquels on fait passer les cahiers un à un afin de bien les écraser, les aplatir.

D'une manière plus simple, on peut laminer l'ensemble des cahiers d'un livre en les compressant entre deux ais dans une presse pendant un temps assez prolongé (photo 10).

GARDES BLANCHES Sortir le livre de la presse et s'assurer que les cahiers ne sont pas collés entre eux. Les gardes simples, formées chacune d'un feuillet double (in-folio), sont montées,

c'est-à-dire fixées par un onglet devant le premier cahier du livre et après le dernier cahier (photo 11).

Une belle reliure, bien faite, donne au livre plus de prix et le rend plus attachant, qu'il s'agisse d'un simple cartonnage ou d'un plein cuir somptueux posé dans son coffret tapissé de soie moirée.

La reliure ne peut se faire sans passion, mais elle demande aussi beaucoup de soin; cependant elle est accessible à tous, pourvu qu'on accepte de suivre une méthode expliquée clairement par un homme de métier.

Michel Cammareri vous guidera pas à pas. Il vous propose de commencer par le Bradel, de poursuivre avec la demi-reliure (toile ou cuir, dos à quatre ou cinq nerfs, avec coins), puis le plein cuir, sans oublier la confection des tranchefiles. Pourquoi ne pas vous initier également à la dorure?

Apprêture, cousure, endossure, finissure, tête, queue, gouttière, chasse et grecque, bientôt ce vocabulaire n'aura plus de secrets pour vous.

ISBN 2-249-27807-5

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La couverture reproduit celle du livre original conservé au sein des collections de la Bibliothèque nationale de France, notamment au titre du dépôt légal.

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La société FeniXX diffuse cette édition numérique en accord avec l’éditeur du livre original, qui dispose d’une licence exclusive confiée par la Sofia ‒ Société Française des Intérêts des Auteurs de l’Écrit ‒

dans le cadre de la loi n° 2012-287 du 1er mars 2012.