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La littérature de jeunesse en classe de FLE aux Seychelles L’élaboration d’une séquence didactique pour l’enseignement de la compréhension en lecture et du lexique Mémoire Anifa Willise Henry Maitrise en didactique Maitre ès arts (M.A.) Québec, Canada © Anifa Willise Henry, 2017

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La littérature de jeunesse en classe de FLE aux Seychelles

L’élaboration d’une séquence didactique pour l’enseignement de la compréhension en lecture et du lexique

Mémoire

Anifa Willise Henry

Maitrise en didactique Maitre ès arts (M.A.)

Québec, Canada

© Anifa Willise Henry, 2017

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La littérature de jeunesse en classe de FLE aux Seychelles

L’élaboration d’une séquence didactique pour l’enseignement de

la compréhension en lecture et du lexique

Mémoire

Anifa Willise Henry

Sous la direction de :

Marie-Andrée LORD, directrice de recherche Marion SAUVAIRE, codirectrice de recherche

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iii

Résumé

Bien que le français soit l’une des trois langues nationales des Seychelles, elle demeure la

moins maitrisée1 et la moins pratiquée par la population. Dans les écoles secondaires, en

particulier, les pratiques d’enseignement du français ne sont pas toujours cohérentes par

rapport aux prescriptions ministérielles. En effet, nous avons constaté que malgré que la

lecture des textes littéraires soit inscrite au programme de français, elle n’est pas enseignée

dans les écoles. Pourtant, celle-ci pourrait contribuer à l’apprentissage du français des

jeunes Seychellois. Dans ce mémoire de maitrise, nous explorons les rôles de la littérature

de jeunesse dans les classes de français langue étrangère (FLE). Considérant le niveau des

élèves en français et de l’absence de ce genre littéraire au programme dans les écoles

secondaires, nous avons décidé de travailler à partir d’un album de jeunesse dans le but de

développer la compréhension en lecture et la compétence lexicale chez les élèves de la

première année du secondaire aux Seychelles. Loin d’être un simple livre avec des dessins,

l’album est de plus en plus utilisé avec des enfants plus âgés (Giasson, 2014). C’est donc

pour cette raison que nous pensons que ce genre littéraire pourrait susciter l’intérêt des

élèves pour la lecture en français. Nous avons choisi l’approche de l’enseignement explicite

pour élaborer une séquence d’enseignement, car il s’agit d’une méthode efficace qui met la

compréhension des élèves au premier plan (Gauthier, Bissonnette et Richard, 2013). À

travers la séquence, nous proposons aux enseignants différents types d’activités pour

articuler l’enseignement de la compréhension en lecture à l’enseignement du lexique.

1 Le présent document est écrit en orthographe rectifiée.

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iv

Abstract

Although French is one of the three national languages of the Seychelles, it remains the

least mastered and the least practised by the population. In secondary schools, in particular,

the teaching practices are not always consistent to the ministerial requirements. In fact, we

have noticed that even though the reading of literary texts is included in the French

program, it is not taught in schools. Yet, it could contribute to the learning of French by

Seychellois students. In this master’s thesis, we explore the roles of children’s literature in

the teaching of French as a foreign language. Considering the level of students’ competency

in French and the absence of the literary corpus in the secondary schools’ program, we have

decided to work from an album (picture book) with the aim of developing reading

comprehension and lexical competence of first year secondary school students of the

Seychelles. Far from being a simple book with pictures, the album is more and more used

with older children (Giasson, 2014). It is thus for that reason that we think that this literary

genre could arouse the reading interest of students. We have chosen the explicit teaching

approach to develop a teaching sequence as it is an effective teaching method that

prioritises students’ comprehension (Gauthier, Bissonnette & Richard, 2013). Through this

teaching sequence, we present to teachers different types of activities to articulate the

teaching of reading comprehension to the teaching of lexicon.

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v

Somer2

Menm si Franse i enn parmi sa trwa lalang nasyonal ki annan Sesel, i reste lalang ki ganny

mwen metrize e mwen pratike par lapopilasyon. Dan bann lekol segonder, an partikilye,

lansennyman ek laprantisaz Franse pa toultan reflekte sa ki ganny preskrir par Minister

Ledikasyon Sesel. Nou’n remarke ki menm si lektir literer i form parti progranm Franse, i

pa ganny ansennyen dan lekol. Pourtan, i kapab fasilit laprantisaz Franse par nou bann zenn

seselwa. Dan sa memwar, nou eksplor bann rol ki literatir zenes i kapab zwe dan laklas

Franse. Vi ki nou bann zelev, an arivan dan lekol segonder, zot pa touzour annan en tre o

nivo an Franse e vi ki dan lekol primer, zot pa’n aprann literatir, nou’n prefere swazir en

albonm ki’n ganny fer spesyalman pour bann zenn pour nou devlop sa de konpetans swivan

dan nou bann zelev premye lannen segonder : konpreansyon dan lektir ek konpetans

leksikal. Sa zanr literer i plis ki en liv avek zimaz e i pe ganny servi bokou plis avek bann

zelev pli aze (Giasson, 2014) e nou’n panse ki i ava kapab motiv nou bann zelev pour lir an

Franse. Nou’n swazir en metod apele « lansennyman eksplisit » ki favoriz konpreansyon

bann zelev avan tou (Gauthier, Bissonnette ek Richard, 2013) pour nou konstrir en sekans

didaktik. Atraver sa sekans, nou ofer nou bann ansenyan diferan kalite aktivite ki kapab

devlop konpetans dan lektir ek konpetans leksikal dan nou bann zelev.

2 Traduction du résumé en créole seychellois.

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vi

Table des matières

Résumé .............................................................................................................................................................. iii

Abstract .............................................................................................................................................................. iv

Somer .................................................................................................................................................................. v

Table des matières ............................................................................................................................................ vi

Liste des tableaux ........................................................................................................................................... viii

Remerciements ................................................................................................................................................. ix

INTRODUCTION ......................................................................................................................................... 1

1. LA PROBLÉMATIQUE ..................................................................................................................... 3

1.1. Le statut et les rôles du français aux Seychelles .............................................................. 3

1.2. Le contexte socio-institutionnel de l’enseignement du français aux Seychelles ........... 6

1.2.1. Les prescriptions ministérielles pour l’enseignement du français................................6

1.2.2. L’enseignement du français au secondaire.................................................................10

1.2.3. L’enseignement de la littérature.................................................................................141.3. Le champ de la recherche ................................................................................................ 16

1.4. La pertinence de la recherche ......................................................................................... 19

1.4.1. L’efficacité de la littérature de jeunesse pour l’apprentissage de la lecture..............19

1.4.2. Le lexique et la compréhension en lecture..................................................................22

1.4.3. L’enseignement explicite au service de la compréhension en lecture.........................221.5. L’objectif de la recherche ................................................................................................ 24

1.6. Les questions de recherche .............................................................................................. 24

2. LE CADRE THÉORIQUE ET CONCEPTUEL ......................................................................... 26

2.1. La littérature à l’école ..................................................................................................... 26

2.1.1. L’enseignement de la littérature de jeunesse..............................................................29

2.1.2. L’album de jeunesse en classe de FLE.......................................................................332.2. L’enseignement explicite ................................................................................................. 37

2.2.1. L’enseignement explicite de la compréhension en lecture..........................................42

2.2.2. L’enseignement de la compétence lexicale.................................................................472.3. L’articulation entre la lecture et le lexique pour faciliter la compréhension ............. 54

3. LE CADRE MÉTHODOLOGIQUE .............................................................................................. 59

3.1. La recherche de développement ..................................................................................... 59

3.1.1. La pertinence de la recherche de développement.......................................................60

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vii

3.1.2. Les étapes du développement d’objet de la recherche de développement..................603.2. La conception de la séquence didactique ....................................................................... 71

3.2.1. La transposition didactique........................................................................................71

3.2.2. La séquence didactique..............................................................................................72

3.2.3. Le choix du corpus de littérature................................................................................744. Séquence didactique autour de Machin truc chouette d’Hubert Ben Kemoun pour les élèves de la première année du secondaire des Seychelles ................................................................. 78

4.1. Les objectifs généraux de l’enseignement de l’album .................................................. 78

4.2. Justification de la progression de la séquence ............................................................... 80

4.3. Justification du choix des activités pédagogiques autour de l’album ......................... 82

4.4. Présentation de la séquence ............................................................................................. 83

CONCLUSION DE LA SÉQUENCE ...................................................................................................... 118

CONCLUSION ........................................................................................................................................... 119

BIBLIOGRAPHIE .................................................................................................................................... 121

Annexes ......................................................................................................................................................... 128

Annexe 1 : Habiletés et objectifs pour le cycle 4 ..................................................................... 128

Annexe 2 : Connaissances et objectifs pour le cycle 4 ............................................................ 129

Annexe 3 : Planification de la lecture ....................................................................................... 130

Annexe 4 : Exemple des stratégies pour trouver le sens des mots ......................................... 131

Annexe 5 : Connaissances et objectifs pour le cycle 3 (prérequis) ........................................ 132

Annexe 6 : Habiletés et objectifs pour le cycle 3 (prérequis) ................................................. 133

Annexe 7 : Groupes de mots ou expressions choisis par l’enseignant (séance 4) ................. 134

Annexe 8 : Phrases à trous (séance 4) ...................................................................................... 135

Annexe 9 : Fiche simplifiée (description des personnages, séance 6) .................................... 136

Annexe 10 : Savoirs à enseigner (personnage) ........................................................................ 137

Annexe 11 : Fiche critériée (séance 8) ...................................................................................... 138

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viii

Liste des tableaux

Tableau 1: Les objectifs de l’enseignement du français................................................................7Tableau 2 : Moyenne nationale en pourcentage (%) en français par niveau............................12Tableau 3 : La performance des élèves en GCE A Level French...............................................15Tableau 4 : Les étapes de l’enseignement explicite......................................................................40Tableau 5 : Les stratégies à privilégier selon le niveau des élèves..............................................44Tableau 6 : Les stratégies de compréhension en lecture.............................................................46Tableau 7 : Fiche de lecture (d’après Marion Sauvaire)................................................................62Tableau 8 : Les ouvrages scientifiques consultés.........................................................................64Tableau 9 : Les périodiques consultés..........................................................................................66Tableau 10 : Les actes de colloque................................................................................................67Tableau 11 : Les diverses sources consultées...............................................................................68Tableau 12 : Séance 1.....................................................................................................................83Tableau 13 : Séance 2.....................................................................................................................88Tableau 14 : Séance 3.....................................................................................................................93Tableau 15 : Séance 4.....................................................................................................................95Tableau 16 : Séance 5.....................................................................................................................99Tableau 17 : Séance 6...................................................................................................................103Tableau 18 : Séance 7...................................................................................................................108Tableau 19 : Séance 8...................................................................................................................113

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ix

Remerciements

La motivation, la détermination et le courage pour terminer ce mémoire de maitrise auraient

été impossibles sans la présence de Dieu dans ma vie. C’est à lui que revient mon plus

grand éloge.

Mes remerciements très distingués vont à ma directrice de recherche, Marie-Andrée Lord,

et à ma codirectrice de recherche, Marion Sauvaire, qui ont su m’accompagner tout au long

de mon parcours. Leurs conseils, leur charisme, leur disponibilité et leur expertise m’ont

poussée à un niveau que j’ignorais pouvoir atteindre.

Je remercie aussi Louis LeVasseur, mon premier directeur de recherche, qui m’a guidée au

tout début de mon parcours universitaire et qui a pris le temps de lire ma proposition de

recherche pour me diriger vers les experts de mon domaine de recherche.

J’en profite pour remercier d’autres professeurs que j’ai rencontrés durant mes études et qui

ont eu une influence sur moi en ce qui concerne mes choix méthodologiques, l’organisation

de mon projet, la pertinence de ma recherche, la qualité de mon travail, entre autres :

Monsieur Clermont Gauthier, Monsieur Érick Falardeau, Monsieur Denis Simard et

Monsieur Denis Jeffrey.

Mes remerciements vont également à tout le monde au huitième étage de la FSÉ qui m’a

aidée d’une façon ou d’une autre, avec des suggestions d’articles, de l’aide pour utiliser

l’imprimante, ou juste une petite conversation pour enrichir ma motivation.

Un remerciement spécial va à France Bilodeau qui a été un vrai soutien dans mes

recherches. Sa porte était toujours ouverte pour mes arrivées imprévues lorsque je

n’arrivais pas à retrouver un livre sur les étagères à la bibliothèque et pour la recherche

d’articles dans les bases de données. Merci, Madame Bilodeau, pour votre gentillesse et

votre intérêt pour ma recherche.

Je suis aussi très reconnaissante envers le PCBF (Programme Canadien de Bourse de la

Francophonie) qui a financé mes études et mon séjour au Canada. Cette maitrise a été

possible grâce à la générosité du gouvernement canadien pour les pays en voie de

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x

développement et je lui suis infiniment reconnaissante. Je voudrais par la même occasion

remercier Jeanne Gallagher, qui a été gestionnaire de PCBF. Elle se souciait de tous les

boursiers et envoyait régulièrement des petits mots d’encouragement.

Une personne qui m’a fait découvrir cette bourse mérite ma gratitude : Monsieur Lamine

Kanté, qui a été mon professeur de français aux Seychelles. Il est celui qui m’a poussée

vers l’enseignement de cette langue. Il est devenu ensuite un collègue de travail et mon

inspiration pour obtenir ma maitrise. Quand j’ai douté de mes capacités, vous avez vu en

moi les compétences pour atteindre le sommet, merci.

Ce retour au passé me fait penser à tous mes amis et collègues aux Seychelles qui ont

toujours cru en moi et qui m’ont aidée à atteindre mes objectifs. Je remercie mon amie,

Ronia, pour son aide avec les traductions. Je remercie aussi des membres du personnel du

ministère de l’Éducation des Seychelles qui m’ont aidée à obtenir des documents

importants et des statistiques relatives à ma recherche : Merida Delcy, Marie-Reine

Hoareau, Zita Bella Labiche, Keiren Madeleine, Hervé Young. Merci aussi aux nouveaux

amis rencontrés ici à Québec pour leur accueil, leur conseil et leur amitié. Je pense à toi,

Catherine, en particulier.

Finalement, je voudrais remercier ma famille : ma mère, ma tante, mon frère et ma filleule.

Votre absence était difficile à accepter parfois. De même, je suis infiniment reconnaissante

envers mon époux, Gary, qui n’a pas hésité à me suivre, lui qui déteste tant le froid et les

longs voyages en avion. Merci, mon amour, pour ton soutien, tes conseils, et d’être là à mes

côtés.

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1

INTRODUCTION

Notre intérêt pour la langue française et sa maitrise par les élèves seychellois explique notre

choix de poursuivre des études de maitrise en didactique du français. Dans le but de voir

évoluer les pratiques actuelles en enseignement du français aux Seychelles, nous avons

développé un intérêt pour le champ de la didactique du français. Nos lectures nous ont

permis de découvrir des méthodes pédagogiques efficaces et des outils didactiques qui

peuvent améliorer le développement des compétences langagières chez les élèves qui

apprennent le français langue étrangère (FLE) aux Seychelles.

Nous nous intéressons à la lecture du texte littéraire par les élèves de FLE, car des

recherches ont démontré que la littérature en classe de FLE peut aider à former des lecteurs

dans la langue qu’ils étudient (Anastassiadi, 2010; Benazout, 2010; Cuq et Gruca, 2005;

Piotrowska-Skrzypek, 2010) et à développer des compétences en lecture, en écriture et à

l’oral. L’approche communicative adoptée par le ministère de l’Éducation des Seychelles

pour l’enseignement du français dans les écoles se concentre essentiellement sur le

développement des compétences orales et l’usage pratique de la langue. Les compétences

en lecture et en écriture sont moins développées chez les élèves.

Actuellement, la lecture des textes littéraires est insérée dans le programme officiel de

français des Seychelles. Mais, pour des raisons multiples, cette activité ne fait pas partie de

l’enseignement et de l’apprentissage du français dans les écoles secondaires. Or, le CECRL

(Cadre européen commun de référence pour les langues) qui constitue la base de

l’élaboration des programmes, des examens, etc., et de ce que les élèves de FLE doivent

apprendre reconnait que « les études littéraires ont de nombreuses finalités éducatives,

intellectuelles, morales et affectives, linguistiques et culturelles et pas seulement

esthétiques » (Conseil de l’Europe, 2001, p. 47).

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2

Pour ce projet de maitrise, nous avons choisi de nous intéresser aux textes littéraires dans

l’enseignement de FLE, plus particulièrement à la littérature de jeunesse, car elle présente

des genres d’œuvres, notamment l’album, qui est adapté à un public débutant en lecture.

Nous adoptons l’approche de l’enseignement explicite, car c’est une méthode

d’enseignement dite efficace qui présente les contenus à enseigner du plus simple au plus

complexe, ce qui permet la vérification de la compréhension tout au long de la leçon et la

participation active de tous les élèves (Gauthier, Bissonnette et Richard, 2007). Au terme de

cette recherche, nous utilisons cette méthode d’enseignement pour élaborer une séquence

didactique portant sur un album de jeunesse et articulant l’enseignement de la

compréhension en lecture à l’enseignement du lexique.

Le travail qui suit est constitué de quatre sections. Dans la première section, nous

présentons la problématique de notre recherche. Le but est de contextualiser notre objet de

recherche afin de montrer la pertinence de la langue française au sein de la société

seychelloise et de souligner les problèmes liés à son enseignement dans les écoles de l’État.

La deuxième section constitue une recension des écrits sur les concepts et les idées clés de

notre recherche. Nous exposons l’état des recherches en didactique du français à propos de

l’enseignement de la littérature de jeunesse, de l’approche de l’enseignement explicite et de

l’enseignement de la compréhension en lecture et du lexique. Dans la troisième section,

nous décrivons les approches méthodologiques préconisées pour mener notre recherche et

nous justifions nos choix. Finalement, dans la quatrième section, nous présentons notre

séquence didactique. Dans cette section, nous présentons l’œuvre littéraire choisie, un

album de littérature de jeunesse intitulé Machin truc chouette et nous justifions les objectifs

retenus pour son enseignement. Enfin, la séquence élaborée est présentée en détail une

séance à la fois.

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3

1. LA PROBLÉMATIQUE

Dans ce premier chapitre, nous contextualisons notre objet de recherche. Pour ce faire, nous

traitons d’abord du statut du français au sein de la société seychelloise et des rôles que joue

cette langue dans les domaines politique, culturel et économique. Puisque l’apprentissage

du français se réalise essentiellement à l’école, nous décrivons et analysons ensuite le

programme de français du secondaire dans le but de dresser un bref portrait de

l’enseignement de cette langue à l’école publique3. Cette brève description du contexte

seychellois permettra de mieux comprendre les problèmes relatifs à l’enseignement du

français et les enjeux de cet enseignement.

1.1. Le statut et les rôles du français aux Seychelles

Depuis leur indépendance en 1976, les Seychelles4 possèdent trois langues nationales : le

créole, l’anglais et le français. Malgré leur statut égal dans la Constitution, les trois langues

occupent des rôles différents sur le plan social, culturel, administratif, politique et éducatif.

Le créole est la langue parlée par 97 % de la population et c’est la langue utilisée à

l’Assemblée Nationale5. L’anglais est la langue officielle maitrisée par 60 % de la

population et elle est utilisée dans le domaine administratif (Observatoire de la langue

française de l’OIF, 2010). Le français est plutôt une langue qui reflète la culture historique

du pays. Des données recueillies par Hoareau (2010) pour réaliser sa recherche doctorale

portant sur « les écarts entre les statuts constitutionnels des langues seychelloises (créole,

anglais et français) et leurs usages dans la pratique » (Hoareau, 2010, p. iv) décrivent

davantage les rôles divers qu’occupent les trois langues. Le créole est perçu comme « le

moyen de communication orale quotidien pour la quasi-totalité de la population » (p. 2).

L’anglais, la « langue officielle dominante de l’administration, de la justice, de la

communication écrite et de l’enseignement pour les cycles primaire, secondaire et

postsecondaire, remplit de nombreuses fonctions sociales » (p. 2). Le français est vu 3 Précisons que notre recherche ne porte que sur l’enseignement offert dans les écoles de l’État, car elles sont tenues de suivre les mêmes prescriptions ministérielles selon le niveau et le cycle d’études. Les écoles privées, quant à elles, ont des programmes différents. 4 Les Seychelles constituent une ancienne colonie de la France (1770-1811) et du Royaume-Uni (1911-1976). 5 Le parlement des Seychelles.

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4

comme « première langue coloniale, utilisée comme matière obligatoire dans les cycles

primaires et secondaires » et « il demeure toutefois, la langue la moins parlée » (p. 2).

Bien que le français partage le même statut que les deux autres langues, la pratique et la

perception de cette langue par la population semblent indiquer qu’il y a effectivement un

déséquilibre linguistique. Toujours en se référant aux données de Hoareau (2010), selon

une majorité d’individus interrogés, lorsque l’on parle ou écrit en français, il ne faut pas

faire d’erreurs. « Le français est la langue des grandes messes, de grandes dames, et ces

dernières se moquent de vous en cas d’erreur… si vous parlez le français, vous vous mettez

sur le même pied que les grands et il n’est pas permis de faire des fautes » (Hoareau, 2010,

p. 294). Cette représentation de la langue française a eu des répercussions dans le monde

scolaire, que ce soit pendant les périodes coloniales ou dans les classes de français après

l’indépendance, et ce, jusqu’à aujourd’hui.

Selon les témoins6, la difficulté de la langue française, qui s’ajoute à la peur de l’utiliser, a été renforcée par les institutions comme l’église et surtout l’école. Plus d’un tiers des témoins font ressortir combien ces institutions ont contribué à propager ce sentiment de culpabilité. Les enseignants religieux qui assuraient des cours de français et les autres enseignants francophones considéraient l’erreur comme inadmissible en période d’apprentissage (Hoareau, 2010, p. 299).

Malgré sa représentation défavorable et sa pratique presque inexistante par la population, le

français demeure une langue très importante sur le plan politique et économique du pays.

Les Seychelles sont membres de différentes organisations francophones, notamment

l’Organisation Internationale de la Francophonie (l’OIF), de la CONFEMEN (Conférence

des ministres de l’Éducation ayant le français en partage) et CONFEJES (Conférence de la

jeunesse et des sports). Les Seychelles entretiennent aussi des relations économiques avec

d’autres iles du sud-ouest de l’Océan Indien en tant que membres de la COI (Commission

de l’Océan Indien). « Ces pays partagent tous le français comme langue de communication,

bien que le statut et la reconnaissance officielle de cette langue varient d’un pays à l’autre »

6 Les personnes interrogées dans le cadre de cette recherche doctorale.

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5

(Hoareau, 2010, p. 7). Toutes ces affiliations politiques et économiques montrent que « les

Seychelles doivent conserver le français afin de garder le contact avec des pays où cette

langue exerce un pouvoir très fort, tant sur le plan de la coopération économique que sur le

plan culturel » (Hoareau, 2010, p. 7).

En octobre 2010, un Pacte Linguistique a été signé entre le Président de la République des

Seychelles, James Michel7, et le Secrétaire Général de la Francophonie, Abdou Diouf, avec

la collaboration de l’OIF. Le gouvernement veut « parvenir à un “trilinguisme équilibré”

entre les trois langues nationales (créole, anglais, français) et, pour l’atteindre, il convient

de fournir un effort particulier en faveur de la langue française, dont l’usage est moins

répandu que celui des deux autres » (OIF, 2010, paragr. 2). Le Pacte vise à attribuer au

français une place méritée dans tous les domaines de l’enseignement et à encourager la

population à utiliser cette langue au quotidien. Dans ce même but, l’Académie du Tourisme

des Seychelles8 a décidé qu’à partir de 2016 plusieurs disciplines scolaires seront

enseignées en français (Seychelles News Agency, 2014). Cette décision démontre

clairement l’importance de la langue française, car l’industrie du tourisme est « le premier

pilier de l’économie seychelloise » (Seychelles News Agency, 2014, paragr. 3) et la France

est le deuxième pays d’où provient le plus grand nombre de visiteurs.

Dans la vie politique, économique et culturelle du pays, le français semble occuper une

place très importante. Il est donc nécessaire pour plusieurs Seychellois d’avoir une assez

bonne maitrise de cette langue, particulièrement, les employés et les employeurs dans les

différents établissements touristiques du pays, les avocats, les ambassadeurs, les

enseignants, entre autres. Puisque l’école est l’institution qui exerce le mieux le rôle de

promouvoir la langue française, nous présentons, dans la section qui suit, des éléments

contextuels de l’enseignement du français.

7 Le président actuel de la République des Seychelles est Danny Faure (depuis le 16 octobre 2016). 8École qui assure la formation des élèves dans l’industrie du tourisme et accueille chaque année un grand nombre d’étudiants qui ont terminé leurs études au niveau du secondaire.

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6

1.2. Le contexte socio-institutionnel de l’enseignement du français aux Seychelles

Le français, comme discipline scolaire, a connu plusieurs évolutions dans le système

éducatif des Seychelles. Il était la langue d’enseignement avant que l’anglais ne lui prenne

sa place au début du 20e siècle. Dans les années 80, dans le but de revaloriser le français,

l’enseignement de l’histoire et de la géographie se faisait en français grâce à un accord de

coopération entre les Seychelles et la Guinée-Conakry. Mais ce projet n’a duré qu’une

année en raison du manque d’enseignants nationaux pour assurer sa continuation et des

grandes difficultés des élèves à suivre l’enseignement en français (Hoareau, 2010). Après

l’échec de ce projet et la reconnaissance du créole comme langue nationale, le français a été

enseigné à partir de la quatrième année du primaire après l’apprentissage du créole en

premier lieu et celui de l’anglais en deuxième lieu. Cependant, en 1997, le ministère de

l’Éducation s’est décidé à introduire le français et l’anglais dès la maternelle9 afin de

« permettre une immersion dans ces deux langues, à travers des activités ludiques »

(Chaudenson, 2007, p. 201). Nous constatons donc que le français a toujours fait partie des

programmes scolaires des Seychelles, mais que son enseignement et son apprentissage

demeurent problématiques.

1.2.1. Les prescriptions ministérielles pour l’enseignement du français

Depuis quelques années, le ministère de l’Éducation des Seychelles a mis en place plusieurs

réformes dans le but d’améliorer les compétences des élèves dans les trois langues

nationales. Il y a eu, entre autres, l’introduction du français et de l’anglais à partir de la

maternelle, l’introduction d’un nouveau curriculum national du français, l’adoption du

programme de DELF (Diplôme d’Études en Langue Française) scolaire dans les écoles

secondaires et la signature du Pacte linguistique avec l’OIF (référence : section 1.1). De

plus, tout récemment, en 2013, la Division for Curriculum Assessment and Teacher Support

du ministère de l’Éducation a publié un nouveau National Curriculum Framework. Ce

dernier est un ensemble d’objectifs pour les différents programmes scolaires dans les écoles

primaires et secondaires. En ce qui concerne les langues (l’anglais, le français et le créole),

9 La scolarisation en maternelle n’est pas obligatoire, mais elle est recommandée.

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7

on s’attend à ce que les élèves puissent les maitriser efficacement à l’oral et à l’écrit

(Division for Curriculum Assessment and Teacher Support, 2013, p. 18). Le ministère

cherche toujours à attribuer au français le statut égal qu’il partage avec les deux autres

langues dans la Constitution.

L’enseignement du français dans les écoles de l’État se fait à partir du document officiel du

ministère de l’éducation : Français Curriculum National.

Ce document présente la justification, les buts de l’enseignement du français, les objectifs généraux et terminaux pour chacun des cinq cycles10. Sont également décrites les stratégies d’enseignement/apprentissage ainsi que les modalités d’évaluation des élèves. Un tel document permettra aux enseignants de planifier leur travail, de préparer leurs leçons, de contrôler les apprentissages des apprenants et d’évaluer leur enseignement (Ministère de l’Éducation, 2001, p. 3).

Ce document préconise « une progression en spirale » (Ministère de l’Éducation, 2001,

p. 38) c’est-à-dire une approche selon laquelle « une habileté, une connaissance sont

présentées puis une autre, on revient sur les premières pour les reprendre et les compléter »

(Ministère de l’Éducation, 2001, p. 38).

Le Tableau 1 ci-dessous explique brièvement les différents objectifs de l’enseignement du

français pour chacun des cinq cycles scolaires.

Tableau 111: Les objectifs de l’enseignement du français

Cycles Objectifs principaux (l’oral et l’écrit)

1 • Reconnaitre les intonations de la langue.

10 Cycle 1 : maternelle à la deuxième année du primaire; Cycle 2 : troisième année et quatrième année du primaire; Cycle 3 : cinquième année et sixième année du primaire; Cycle 4 : première année et deuxième année du secondaire; Cycle 5 : troisième année àla cinquième année du secondaire11Ce tableau est une synthèse du Curriculum National du Français (2001).

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8

• Apprendre et utiliser les formules de politesse. • Connaitre le vocabulaire de base lié à son environnement immédiat et au

contexte scolaire. • Connaitre la construction des phrases de base et quelques articulateurs

temporels. • Découvrir l’importance des livres. • Raconter une histoire en 3 petites phrases à l’aide des images. • Donner des informations précises pour se présenter, exprimer ses sentiments,

etc.

2 • Prononcer correctement les sons propres au français. • Connaitre le nom des objets, les verbes d’action et les adjectifs. • Respecter la correspondance graphie-son (l’orthographe). • Identifier le présent, le passé et le futur. • Connaitre les différents types des phrases et les rédiger aussi. • Repérer le fonctionnement particulier du langage : arrangement phonétique,

graphique et sémantique. • Lire un texte court d’une dizaine de lignes et exprimer sa compréhension du

texte. • Découvrir l’utilité d’un dictionnaire. • Écrire un court récit en 5 phrases en respectant les règles grammaticales.

3 • Mémoriser et réciter des textes d’auteurs d’une quinzaine de vers (poèmes) ou de cinq lignes.

• Lire un texte court d’une page (silencieusement ou à deux). • Répondre à des questions portant sur le texte lu. • Utiliser le dictionnaire pour chercher la définition et vérifier l’orthographe d’un

mot. • Choisir un livre à la bibliothèque qui correspond à ses gouts ou à ses besoins. • Produire différents types de textes : une histoire en une page, un dialogue pour

une bande dessinée, une lettre amicale, un poème, etc. • Résumer en français une histoire simple entendue ou lue en créole.

4 • Utiliser les règles de base pour maitriser le fonctionnement de la langue (vocabulaire, orthographe, grammaire, conjugaison).

• À partir d’un document sonore, repérer les informations sur les personnages, les lieux et les moments de l’action.

• Lire une œuvre complète (conte, nouvelle, BD). • Montrer sa compréhension de la lecture de textes divers. • Produire différents types de textes (un récit, une courte biographie, etc.) • Traduire en français un court texte écrit en créole ou en anglais.

5 • Approfondir sa connaissance du fonctionnement de la langue. • Comparer la construction des phrases simples et complexes dans les trois

langues. • Lire une œuvre complète plus complexe (nouvelle, roman). • Manifester sa compréhension plus complète et plus fine de la lecture en

répondant aux questions portant sur le texte.

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9

• Utiliser un dictionnaire, un fichier ou un tableau de références. • Produire différents types de textes en respectant leurs caractéristiques (narratif,

prescriptif, informatif, poétique, argumentatif et descriptif) • Traduire en créole ou en anglais des textes courts de divers types écrits en

français. • Traduire en français un texte court écrit en créole ou en anglais.

Ces objectifs généraux présentés ci-dessus répondent aux buts de l’enseignement du

français aux Seychelles :

• Le développement de l’habileté à comprendre et à produire cette langue oralement et par écrit à différents niveaux de compétence;

• L’élargissement de la culture générale, le développement d’une compétence interculturelle et la promotion de la créativité;

• La stimulation du plaisir de communiquer dans des situations variées dans un contexte national, régional et international;

• Le développement de la capacité à comprendre le français à travers différents réseaux médiatiques;

• L’habitude d’une réflexion sur le langage et les langues, dans leurs caractéristiques, leur fonctionnement et leur diversité;

• L’insertion scolaire, sociale, professionnelle et l’acquisition d’un outil de formation pour la vie des jeunes citoyens seychellois (Ministère de l’Éducation, 2001, p. 5).

Par rapport aux buts présentés, nous constatons que le ministère de l’Éducation a un plan

clair et précis pour l’enseignement du français aux Seychelles. Cependant, selon notre

connaissance du milieu, ces buts-là ne reflètent pas toujours la réalité de l’enseignement et

de l’apprentissage du français dans les écoles. Dans le cadre de notre recherche, nous nous

concentrerons plus sur les cycles du secondaire au lieu de ceux du primaire. Au primaire, il

s’agit d’enseigner la base du français aux élèves, et ce qui nous intéresse le plus est le

développement des compétences langagières des élèves pour qu’ils puissent, soit entamer le

français au postsecondaire avec succès, soit entrer dans le monde du travail avec une bonne

maitrise de cette langue.

Page 20: La littérature de jeunesse en classe de FLE aux Seychelles ...€¦ · L’élaboration d’une séquence didactique pour l’enseignement de la compréhension en lecture et du lexique

10

1.2.2. L’enseignement du français au secondaire

Dans les écoles secondaires de l’État, les élèves de la première, de la deuxième et de la

troisième année bénéficient de cinq séances de quarante minutes de cours de français

chaque semaine. À partir de la quatrième jusqu’à la cinquième année du secondaire, une

séance de cours de français est enlevée et le nombre de cours d’anglais augmente. Nous ne

voulons pas faire une comparaison entre ces deux disciplines scolaires, mais il nous semble

qu’en attribuant plus d’heures de cours à une discipline, le ministère de l’Éducation

souligne que la discipline anglais mérite plus d’attention que la discipline français. De plus,

toutes les autres disciplines à l’école, notamment, la géographie, l’histoire, les

mathématiques et les sciences sont enseignées en anglais. Nous pouvons dire que la

politique linguistique du ministère de l’Éducation semble montrer aux élèves et aux parents

que le français n’est pas une discipline prioritaire. L’accent est mis sur la maitrise de

l’anglais, car il s’agit de la langue d’enseignement de toutes les autres disciplines et,

comme nous avons déjà mentionné, c’est également la langue dominante de

l’administration, de la justice, de la communication, entre autres.

Depuis 2005, le ministère de l’Éducation en partenariat avec l’Alliance Française12 des

Seychelles a introduit le DELF (Diplôme d’Études en Langue Française) scolaire pour

« permettre un renouvellement des pratiques pédagogiques et une nouvelle approche quant

à la mise en œuvre des programmes de français » (Seychelles Nation13, 2005, paragr. 5). Le

DELF Scolaire a été créé en 2002 et « il est constitué de quatre certifications qui, chacune,

attestent un niveau de compétences en français » (Seychelles Nation, 2005, paragr. 3). Ces

compétences sont la compréhension écrite, la compréhension orale, la production écrite et

la production orale. Les quatre certificats (niveaux) sont le DELF A1, DELF A2, DELF B1

et DELF B2. En 2005, seuls les certificats A2 et B1 étaient offerts aux élèves finissant le

secondaire, maintenant les élèves peuvent choisir parmi les quatre niveaux correspondant à

leurs habiletés orales et écrites en français. De plus, s’ils ont envie de poursuivre leurs

études ou s’ils veulent développer leurs compétences en français, ils peuvent s’inscrire pour

12L’association qui promeut la langue et la culture française et francophone.13Journal national des Seychelles.

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11

les examens du DALF (Diplôme Approfondi de Langue Française) qui sont offerts par

l’Alliance Française.

Le DELF est basé sur le Cadre Européen Commun de Référence pour les Langues

(CECRL) qui favorise une approche dite « actionnelle » pour l’enseignement et

l’apprentissage des langues étrangères. Cette approche « considère avant tout l’usager et

l’apprenant d’une langue comme des acteurs sociaux ayant à accomplir des tâches (qui ne

sont pas seulement langagières) dans des circonstances et un environnement donnés, à

l’intérieur d’un domaine d’action particulier » (Conseil de l’Europe, 2001, p. 15). Rosen

(2006), cité par Guimarães-Santos (2012), fait ressortir que « la perspective privilégiée dans

le CECRL – de type actionnel – soutient que l’apprentissage des langues est une

préparation pour une utilisation active de la langue pour communiquer » (p. 1). Il nous

semble qu’il s’agit d’une approche communicative et instrumentale qui met beaucoup plus

d’accent sur la maitrise de l’oral que de l’écrit par les élèves comme le constate également

Guimarães-Santos : « selon le CECR, le but de l’enseignement des langues étrangères est

de former des acteurs sociaux avec une maitrise pratique de la langue, domaine qui permet

à ses utilisateurs de participer d’une communication efficace dans différentes situations

d’interaction dans la vie quotidienne » (2012, p. 1).

Comme les élèves (avec l’aide de leurs enseignants) peuvent choisir le niveau d’épreuve

correspondant à leur niveau de compétence en français, il y a un plus haut taux de réussite

chez les élèves (car ceux-ci choisissent souvent un niveau dans lequel il est plus facile

d’obtenir un meilleur résultat).

Le tableau 2 ci-dessous présente la moyenne des résultats en français.

Page 22: La littérature de jeunesse en classe de FLE aux Seychelles ...€¦ · L’élaboration d’une séquence didactique pour l’enseignement de la compréhension en lecture et du lexique

12

Tableau 2 : Moyenne nationale en pourcentage (%) en français par niveau

DELF A1 DELF A2 DELF B1 DELF B2

2009 69.15 75.28 60.44 57.64

2010 68.08 70.02 60.64 54.34

2011 65.19 70.01 64.49 55.9

2012 73.07 71.59 60.86 53.96

2013 69.73 68.9 58.78 51.96

Source : Centre chargé du curriculum, de l’évaluation et du soutien pédagogique, Ministère de l’Éducation des Seychelles.

Nous pouvons constater que les élèves réussissent mieux aux épreuves de deux premiers

niveaux. De plus, ils sont plus nombreux à s’inscrire pour ces niveaux. Par exemple, en

2013, il y avait 133 élèves inscrits pour le DELF A1, 401 élèves inscrits pour le DELF A2,

343 élèves inscrits pour le DELF B1 et 63 élèves inscrits pour le DELF B214.

Selon le CECRL (Conseil de l’Europe, 2001), il y a six niveaux communs de référence : le

niveau introductif (A1), le niveau intermédiaire (A2), le niveau seuil (B1), le niveau avancé

(B2), le niveau autonome (C1) et le niveau maitrise (C2). Si la majorité des élèves

seychellois se qualifient pour les épreuves du DELF A1 et DELF A2, cela veut dire qu’ils

se situent majoritairement à des niveaux introductifs et intermédiaires. Le CECRL ne

propose pas directement des méthodes à utiliser en classe, il demeure la responsabilité du

ministère ou des enseignants de choisir les méthodes pédagogiques ou didactiques

appropriées afin de développer les compétences des élèves en français.

Pour le niveau B1, le CECRL indique la compétence ci-dessous :

Peut comprendre les points essentiels quand un langage clair et standard est utilisé et s’il s’agit de choses familières dans le travail, à l’école, dans les loisirs, etc. Peut se débrouiller dans la plupart des situations rencontrées en

14 Des résultats non publiés du ministère de l’Éducation.

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13

voyage dans une région où la langue cible est parlée. Peut produire un discours simple et cohérent sur des sujets familiers et dans ses domaines d’intérêt. Peut raconter un événement, une expérience ou un rêve, décrire un espoir ou un but et exposer brièvement des raisons ou explications pour un projet ou une idée (Conseil de l’Europe, 2001, p. 25).

En ce qui concerne la compétence en lecture pour le niveau B1, l’auto-évaluation de

l’apprenant selon le CECRL est la suivante :

Je peux comprendre des textes rédigés essentiellement dans une langue courante ou relative à mon travail. Je peux comprendre la description d’événements, l’expression de sentiments et de souhaits dans des lettres personnelles (Conseil de l’Europe, 2001, p. 26).

Cette compétence est différente de ce qui est attendu d’un apprenant du niveau A2 :

Je peux lire des textes courts très simples. Je peux trouver une information particulière prévisible dans des documents courants comme les publicités, les prospectus, les menus et les horaires et je peux comprendre des lettres personnelles courtes et simples (Conseil de l’Europe, 2001, p. 26).

Il nous semble que beaucoup d’élèves choisissent les niveaux A1 et A2, car l’importance

pour eux est de réussir les examens. Ils ne veulent pas tous entamer des épreuves de

DELF B1 ou B2, car ces épreuves exigent une compétence avancée en français. Cependant,

nous postulons que si dès le début du secondaire, les enseignants employaient des méthodes

didactiques beaucoup plus efficaces pour encourager les élèves et les aider à développer de

meilleures compétences en français, un plus grand nombre d’élèves pourraient atteindre le

niveau seuil (B1) ou le niveau avancé (B2). Il semble qu’on encourage les élèves à passer

les examens au lieu de développer de vraies compétences en français.

Nous sommes d’avis que certains enseignants ne possèdent pas les méthodes ou les outils

appropriés pour aider tous les élèves à atteindre les niveaux supérieurs du CECRL. Il nous

semble que certains enseignants n’arrivent pas à établir le lien entre le programme officiel

du français paru en 2001 et le programme du DELF adopté par le ministère en 2005. Par

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14

exemple, selon le programme officiel du français, dès le début de la première année du

secondaire, les enseignants doivent insérer dans leur cours la lecture des textes littéraires.

Mais, pour diverses raisons, telles que le manque de ressources et principalement le fait que

la lecture des textes littéraires n’est pas évaluée dans les épreuves du DELF, les enseignants

ne l’enseignent pas. Nous évoquons la lecture des textes littéraires, car c’est cet élément du

programme de français qui nous intéresse dans le cadre de notre recherche et nous y

reviendrons dans un prochain chapitre.

1.2.3. L’enseignement de la littérature15

La littérature fait partie du programme de français de l’école postsecondaire (School of

Advanced Level Studies) aux Seychelles. Les élèves sont obligés de suivre des séances de

littérature dans le cadre du cours de GCE (General Certificate of Education) A Level

French. Les futurs enseignants de français au secondaire, et parfois de l’anglais, doivent

impérativement s’inscrire à ce cours. Pendant deux ans, les élèves étudient un maximum de

huit œuvres littéraires. Pour l’année 2016-2017, les œuvres au programme sont les

classiques de la littérature française, notamment, Le Malade imaginaire de Molière, Les

Justes d’Albert Camus, Les Belles Images de Simone de Beauvoir, entre autres. Pour les

élèves qui arrivent directement des écoles secondaires de l’État, c’est la première fois qu’ils

découvrent la littérature francophone et, la plupart du temps, ils peinent à s’adapter au

contenu du cours.

Il y a de moins en moins d’élèves qui s’inscrivent au cours de français à cet établissement

qui demeure le principal centre d’examens GCE A Level de l’université de Cambridge aux

Seychelles16. À noter qu’en 2012 il y avait onze élèves inscrits au cours; en 2013, il y en

avait quinze; en 2014, on comptait douze élèves; en 2015, huit élèves se sont inscrits et en

2016, il n’y a que sept élèves inscrits.

15 Nous définissons la littérature comme un ensemble d’œuvres littéraires. Il s’agit de l’étude de ces œuvres avec les élèves. Nous développerons davantage ce concept dans le cadre théorique. 16 Il y a un centre au ministère de l’Éducation, et deux écoles privées ont leur propre centre.

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15

Le tableau 3 montre le déclin en ce qui concerne l’inscription des élèves au programme du

français au postsecondaire.

Tableau 3 : La performance des élèves en GCE A Level French17

A B C D E d e18 Nombre d’élèves inscrits

2009 4 1 8 15 16 2 4 50

2010 0 2 3 8 14 6 2 36

2011 0 4 7 6 1 0 0 18

2012 2 2 3 4 0 0 0 11

2013 1 3 6 2 2 0 1 15

Il nous parait que cette réduction par rapport au nombre d’élèves inscrits est liée à l’épreuve

de littérature attachée à ce cours. De plus, les résultats des élèves ne peuvent pas être

considérés comme étant satisfaisants. Nous pensons qu’il y a une rupture entre les cours de

français au secondaire et les cours de français au niveau postsecondaire. Il nous semble que

les élèves ne sont pas suffisamment préparés pour entamer le premier niveau de cours de

français enseigné à cette école. En effet, le GCE A Level de français requiert un assez haut

niveau de français de la part des élèves. Cette matière comporte quatre composantes :

l’expression orale, la compréhension des documents informatifs, la rédaction d’un essai sur

les thèmes courants de la société et la lecture et l’analyse des textes littéraires (Cambridge

International Examinations, 2016). Les élèves doivent développer des compétences

adéquates en ce qui concerne, particulièrement, la compréhension en lecture et

l’interprétation des textes littéraires.

Ainsi, dès le début du postsecondaire, les élèves qui ont décidé de poursuivre des études en

français rencontrent des obstacles par rapport à la découverte d’une composante de la 17Données non publiées de l’école postsecondaire (the School of Advanced Level Studies, Seychelles).18 Niveau AS (Advanced Subsidiary level) – niveau intermédiaire. Les lettres sont en minuscules pour établir la différence avec le niveau AL (Advanced Level) – niveau avancé. Les élèves obtiennent une note de niveau intermédiaire lorsque le résultat obtenu ne reflète pas le niveau avancé (A Level).

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16

discipline français qu’ils auraient dû découvrir au secondaire, voire au primaire. C’est

principalement pour ces raisons que nous voulons entamer une recherche sur

l’enseignement de la littérature au premier cycle du secondaire : nous voulons étudier

comment introduire cette composante de l’enseignement du français, et ce, en nous

appuyant sur les pratiques documentées par des chercheurs en didactique du français.

1.3. Le champ de la recherche

Lorsque nous parlons de la didactique du français, nous distinguons les deux principaux

domaines: la didactique du français langue maternelle19 et la didactique du français langue

étrangère (ou seconde). Puisque le français est la troisième langue apprise par la majorité

des élèves aux Seychelles, il est essentiellement considéré comme une langue étrangère.

Selon Cuq et Gruca (2002), « la langue étrangère n’est généralement pas la langue de

première socialisation, elle n’est pas la première dans l’ordre des appropriations

linguistiques, la proportion entre apprentissage et acquisition s’inverse dans son mode

d’appropriation par rapport à ce qui fonde la langue maternelle, et le critère d’appartenance

est lui aussi minoré » (p. 94). À l’opposé, nous parlons de langue maternelle lorsqu’il s’agit

de la première langue acquise par le locuteur. Cuq et Gruca (2002) définissent une langue

maternelle comme « une langue qui, acquise lors de sa première socialisation et

éventuellement renforcée par un apprentissage scolaire, définit prioritairement pour un

individu son appartenance à un groupe humain et à laquelle il se réfère plus ou moins

consciemment lors de tout apprentissage linguistique » (p. 93). Ainsi, pour la majorité des

élèves seychellois, le créole est la langue maternelle. Pour certains, c’est l’anglais qui

occupe cette place aussi. Mais, pour la plupart, le français demeure une langue étrangère.

L’enseignement du français aux Seychelles relève donc du champ de la didactique du

français langue étrangère.

19 Notons que plusieurs didacticiens critiquent l’expression langue maternelle et préfèrent celle de langue première (Simard, Dufays, Dolz et Garcia-Debanc (2010).

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17

Puisque le français est l’une des trois langues nationales, le gouvernement et le ministère de

l’Éducation exigent officiellement que la population arrive à maitriser cette langue. Selon

notre connaissance du milieu, l’enseignement du français, particulièrement dans les écoles

secondaires, ne correspond pas totalement aux visées du ministère de l’Éducation

(référence : section 1.2.1). Les pratiques dans les classes et l’application du programme

semblent ne pas favoriser une appropriation de cette langue par les élèves. Les élèves

apprennent le français avec le seul but de passer les examens. À la fin du cycle secondaire,

ils ne pratiquent guère cette langue, et cela va à l’encontre de la prescription du ministère

de l’Éducation qui vise une maitrise du français par tous les élèves. Pour ces raisons, entre

autres, nous nous intéressons au champ de la didactique du français afin de contribuer à

l’enseignement et à l’apprentissage du français aux Seychelles.

La didactique du français « inclut une réflexion sur les savoirs, leur transformation en

matière scolaire et leur appropriation par les apprenants » (Rosier, 2002, p. 7). Selon

Simard et coll. (2010, p. 12), « la didactique place au cœur de ses préoccupations les

savoirs à acquérir (aussi bien théoriques que pratiques) ».

La didactique est essentiellement une discipline scientifique qui étudie les phénomènes d’enseignement-apprentissage en visant d’abord la production de connaissances dans son champ d’investigation. C’est par les connaissances issues de ses recherches qu’elle peut parvenir à éclairer et à améliorer les pratiques scolaires (Simard et coll., 2010, p. 9).

Le domaine de la didactique s’intéresse au français comme une discipline scolaire en

focalisant sur l’enseignement de la langue, l’enseignement des compétences langagières et

l’enseignement de la littérature.

Dans le système éducatif des Seychelles, l’accent est mis principalement sur

l’enseignement de la langue et l’enseignement des compétences langagières,

particulièrement l’oral et l’écrit. En ce qui concerne la lecture, il s’agit de la lecture des

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18

documents dits authentiques20 qui figurent dans les manuels scolaires ou dans des cahiers

d’exercices utilisés dans les écoles. La lecture des textes littéraires, ou même d’extraits, ne

fait pas partie des pratiques d’enseignement et d’apprentissage dans les classes de français

aux Seychelles. Cela est dû au fait que la littérature n’est pas enseignée dans les classes de

français langue étrangère. Pourtant, plusieurs didacticiens de FLE soulignent l’importance

de la littérature dans l’enseignement et l’apprentissage de français langue étrangère. Cuq et

Gruca (2005, p. 420-421) affirment que la littérature est capable de former « des lecteurs

éclairés de textes produits dans la langue qu’ils sont en train de s’approprier ». Boza Araya

(2008) fait ressortir qu’« il s’avère nécessaire de mettre en place des stratégies

pédagogiques qui permettent [aux élèves] d’acquérir des connaissances, d’appliquer et de

développer des savoir-faire langagiers » (p. 16). Selon elle, « la littérature peut constituer

un outil pédagogique très utile, soit pour aborder la diversité culturelle en classe FLE ou

dans des cours de civilisation francophone, soit pour améliorer les compétences

communicatives » (Boza Araya, 2008, p. 16).

Ainsi, à travers la lecture de textes littéraires, les élèves sont mis en contact direct avec la

langue qu’ils essaient de s’approprier et cette approche est susceptible de faciliter

l’apprentissage de la langue. Dans le domaine du français langue première, Giasson (2005)

abonde dans le même sens lorsqu’elle évoque les rôles essentiels des textes littéraires à

l’école. Selon elle, la lecture des textes littéraires est « un moyen privilégié d’appropriation

de savoirs » (p. 9) et elle favorise « le développement cognitif et métacognitif » (p. 8) des

élèves. De plus, la lecture des textes littéraires aide à « l’acquisition du vocabulaire et des

connaissances » (Giasson, 2005, p. 8).

Le champ de la didactique du français nous permet d’identifier les savoirs essentiels à

enseigner aux élèves pour une meilleure appropriation de la langue. Des recherches en

didactique peuvent décrire comment faciliter l’apprentissage de cette langue par les élèves

et peuvent recommander des modes d’enseignement qui favorisent l’appropriation des

savoirs. Nous nous intéressons à l’enseignement de la littérature, particulièrement la

20 Par exemple l’horaire de bus, un prospectus, une recette de cuisine, bulletin météo, articles informatifs, etc.

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19

littérature de jeunesse. En nous référant aux recherches didactiques, nous espérons pouvoir

montrer qu’il existe des moyens de développer les compétences en lecture et la compétence

lexicale des élèves.

1.4. La pertinence de la recherche

Nous jugeons nécessaire d’introduire la lecture de textes littéraires dès la première année du

secondaire dans le but 1) de développer une culture littéraire chez les élèves; 2) de

développer la compréhension en lecture des élèves et 3) de développer la compétence

lexicale des élèves. Il ne s’agit pas simplement d’enseigner la littérature pour qu’un plus

grand nombre d’élèves s’inscrivent au cours de français au postsecondaire plus tard. Il

s’agit particulièrement d’enseigner aux élèves des stratégies de lecture pour qu’ils arrivent à

comprendre d’autres textes littéraires destinés à la jeunesse. En ayant une bonne

compréhension du texte, ils arriveraient aussi à mieux comprendre la langue et à la

maitriser.

1.4.1. L’efficacité de la littérature de jeunesse pour l’apprentissage de la lecture

Selon notre expérience et notre connaissance du milieu, la lecture de textes littéraires est

quasiment inexistante dans les classes de français au secondaire aux Seychelles. Comme

indiqué dans le tableau 1 (chapitre 1.2.1), la lecture d’une œuvre complète par les élèves

figure parmi les objectifs des cycles 4 et 5 du programme officiel du français. En réalité, il

s’agit d’une lecture dite « cursive21 » et individuelle. L’enseignant demande simplement

aux élèves d’emprunter un livre de leur choix à la bibliothèque de l’école. Il n’y a pas

d’activités d’apprentissage spécifiques sur le texte littéraire. Même si le programme officiel

de français présente cet objectif concernant la lecture de textes littéraires, le programme du

DELF que les élèves suivent au secondaire n’est pas axé sur l’enseignement de la

littérature. Or, à travers l’enseignement de la littérature, beaucoup plus d’élèves seraient

capables d’atteindre le niveau B1 ou B2 du CECRL. Selon le CECRL (Conseil de l’Europe, 21 « Désigne la lecture courante de tout un chacun, au gré de son rythme, selon ses désirs et sa disponibilité » (Bon, 2014, p. 76).

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20

2001), le niveau B2 est un niveau avancé en français et il correspond à l’« utilisateur

indépendant » qui est capable de comprendre des textes complexes et qui peut s’exprimer

avec aisance sur différents sujets.

Peut comprendre le contenu essentiel de sujets concrets ou abstraits dans un texte complexe, y compris une discussion technique dans sa spécialité. Peut communiquer avec un degré de spontanéité et d’aisance tel qu’une conversation avec un locuteur natif ne comportant de tension ni pour l’un ni pour l’autre. Peut s’exprimer de façon claire et détaillée sur une grande gamme de sujets, émettre un avis sur un sujet d’actualité et exposer les avantages et les inconvénients de différentes possibilités (Conseil de l’Europe, 2001, p. 25).

En atteignant ce niveau-là, les élèves seraient capables de mieux réussir dans les cours de

littérature au postsecondaire ou tout simplement avoir une maitrise de la langue plus solide.

L’enseignement de la littérature à l’école est une façon d’aider les élèves à découvrir la

langue, à éveiller leur imagination, à développer leur capacité d’interprétation et à acquérir

de nouvelles connaissances (Giasson, 2000; Perrin, 2010; Tauveron, 1999). À travers la

lecture et l’étude des textes littéraires, les élèves développent également une culture

littéraire (Perrin, 2010; Tsimbidy, 2008). Selon Tsimbidy, « une culture littéraire est une

culture active, évolutive, commune et partagée qui s’établit à partir de la fréquentation

régulière des œuvres et d’un réseau de références communes élaboré tout le long de la

scolarité par des discussions entre pairs » (2008, p. 15). Afin de bien développer cette

culture littéraire chez les élèves, il est aussi important de bien choisir les œuvres qui

susciteraient l’intérêt des élèves, surtout s’il s’agit des élèves de français langue étrangère.

Selon Anastassiadi (2010), le CECRL ne porte pas beaucoup d’attention à l’usage de la

littérature dans les classes de langues étrangères. L’auteure trouve que les textes littéraires

sont beaucoup plus présents dans les classes de FLM que dans celles de FLE. Selon

Anastassiadi, « tout comme le lecteur natif, le lecteur étranger lit pour construire un sens.

Par conséquent, il est important de lui proposer une véritable lecture qui lui permettra de

comprendre et de s’approprier ce qu’il lit à l’aide d’instruments donnés dans le texte »

(2010, p. 238). Elle propose « d’exploiter des ouvrages destinés à de jeunes lecteurs avec

un public débutant en FLE, indépendamment de son âge » (Anastassiadi, 2010, p. 242).

Page 31: La littérature de jeunesse en classe de FLE aux Seychelles ...€¦ · L’élaboration d’une séquence didactique pour l’enseignement de la compréhension en lecture et du lexique

21

Dans le cadre de notre recherche, nous favorisons l’enseignement de la littérature de

jeunesse puisque nous nous adressons aux élèves de la première année du secondaire en

français langue étrangère (FLE). La littérature de jeunesse peut aider les élèves à mieux

comprendre les textes qu’ils lisent et à développer des compétences en lecture,

particulièrement la compréhension de textes, et aussi à découvrir le lexique en langue

étrangère. Guérette (1995) citée dans Giasson (2005) explique que « la littérature d’enfance

et de jeunesse joue un rôle dans le développement intellectuel, affectif, social et culturel des

jeunes » (p. 4). « Plus l’élève lit, plus il développe ses habiletés en lecture, plus la tâche

devient facile et agréable et plus il a envie de lire » (Giasson, 2004, p. 9). C’est cette

attitude envers la lecture que nous voulons faire développer aux élèves de première année

du secondaire aux Seychelles. Tout comme la littérature générale, la littérature de jeunesse

se soumet aux contraintes de style et aux règles esthétiques. Poslaniec (1992) affirme que

« toutes les techniques littéraires identifiées par les chercheurs sont largement présentes

dans les livres destinés aux enfants; [que] rien ne permet d’établir une coupure entre la

littérature pour la jeunesse et la littérature générale » (p. 16). Nous voulons proposer des

textes littéraires, en commençant par l’album de jeunesse, à travers lesquels les élèves

pourront développer des savoirs et construire des connaissances nouvelles sur la langue.

Nous choisissons l’album, car nous nous adressons aux élèves de FLE de la première année

du secondaire. Ils n’ont pas d’habitude de lire en français, et commencer par l’album est

une façon de susciter leur intérêt et de les motiver à lire davantage. Selon Dolz, Noverraz et

Schneuwly, « l’album est un objet qui est beaucoup plus familier aux jeunes enfants. C’est

un bon support pour les apprentis lecteurs et il facilite l’interaction entre l’enseignant et les

élèves, et les élèves entre eux » (2001, p. 24). Pour Giasson, « dans l’intimité de la classe, il

peut s’agir d’un excellent moyen d’amadouer les élèves qui se sont éloignés de la lecture »

(2014, p. 156). C’est le cas de ces élèves qui ne lisent presque jamais en français. En

favorisant l’album de jeunesse, nous voulons faciliter la compréhension en lecture et

l’appropriation du lexique.

Page 32: La littérature de jeunesse en classe de FLE aux Seychelles ...€¦ · L’élaboration d’une séquence didactique pour l’enseignement de la compréhension en lecture et du lexique

22

1.4.2. Le lexique et la compréhension en lecture

Nous nous intéressons au lexique parce que nous pensons qu’en développant leur

compétence lexicale, les élèves seraient plus capables de maitriser et de s’approprier la

langue. Par compétence lexicale, nous entendons la capacité d’utiliser les connaissances sur

le lexique correctement22. Selon Cuq et Gruca (2002, p. 363), « l’entrée par le vocabulaire

est un penchant naturel à tout apprenant de langue étrangère ». De plus, David fait ressortir

que « la plupart des recherches menées dans différents pays montrent que l’étendue du

lexique est en relation étroite avec les performances en lecture – et bien sûr au-delà avec la

réussite scolaire en général » (2000, p. 37). Pour leur part, Blachowicz et Fisher (2000);

Nagy et Scott (2000), cités dans Giasson (2003), disent que « bon nombre d’études ont

montré que la connaissance du vocabulaire contenu dans un texte est reliée à la

compréhension de ce texte » (p. 337). Cependant, Giasson (2003) indique qu’il ne s’agit

pas d’enseigner le lexique en pensant que cela résoudra les difficultés de compréhension,

car comprendre un texte est bien plus complexe que connaitre le sens de tous les mots. Elle

souligne que « la relation entre la lecture et le vocabulaire n’est cependant pas univoque :

d’une part, le vocabulaire influe sur la compréhension en lecture et, d’autre part, la lecture

peut aider à enrichir le vocabulaire » (p. 338). De ce fait, nous soutenons qu’à travers la

littérature de jeunesse, il serait possible pour les élèves de s’approprier le lexique grâce à un

travail sur la compréhension du texte et vice versa.

1.4.3. L’enseignement explicite au service de la compréhension en lecture23

Selon le programme officiel de français (réf : 1.2.1, tableau 1), l’un des objectifs de

l’enseignement du français au cycle 4 est la capacité de « manifester sa compréhension de

la lecture de textes divers » (Ministère de l’Éducation, 2001, p. 30). Mais, comme nous

l’avons déjà souligné, cette compétence en lecture n’est pas enseignée dans les classes de

français. Pour Giasson (2003, p. 280) « la compréhension consiste, pour le lecteur, à

construire le sens du texte à partir à la fois de l’information explicite et implicite donnée par

22 Le concept de compétence lexicale sera défini davantage dans le cadre théorique et conceptuel. 23 Nous développerons davantage le concept de lecture, de la compréhension en lecture et la démarche de l’enseignement explicite dans le cadre théorique et conceptuel.

Page 33: La littérature de jeunesse en classe de FLE aux Seychelles ...€¦ · L’élaboration d’une séquence didactique pour l’enseignement de la compréhension en lecture et du lexique

23

l’auteur et de ses propres connaissances ». Pour ce faire, le lecteur a besoin des stratégies de

compréhension générales, notamment, la recherche des significations des mots inconnus, la

capacité de faire des inférences, l’identification des personnages, entre autres. Le lecteur a

donc besoin d’être formé afin de maitriser ces différentes stratégies qui pourraient faciliter

sa compréhension des textes qu’il lit.

Pour faciliter la compréhension en lecture des élèves, nous préconisons la méthode de

l’enseignement explicite. Cette méthode d’enseignement « fait référence à une démarche

d’apprentissage dirigée par l’enseignant qui procède du simple vers le complexe »

(Rosenshine et Stevens (1986) cités dans Gauthier, Bissonnette et Richard (2013, p. 26).

Rosenshine « a montré que l’enseignement explicite et systématique est une méthode

d’enseignement particulièrement appropriée pour l’apprentissage de la lecture, des

mathématiques, de la grammaire, de la langue maternelle, des sciences, de l’histoire et, en

partie, des langues étrangères » (cité dans Gauthier et coll., 2013, p. 31). Pour aider nos

élèves de français langue étrangère à accéder au niveau B1 du CERCL et à le dépasser

aussi, il faudrait un enseignement qui mette plus l’accent sur la compréhension.

Boyer (1993) affirme qu’un enseignement explicite est une méthode efficace lorsqu’il

s’agit de développer la compréhension en lecture des élèves. Selon lui, « l’habileté à

comprendre [doit] se refléter dans la capacité du lecteur à adapter sa lecture à une intention

de lecture et au type de texte soumis, ce qui [implique] qu’il puisse reconstruire le sens du

texte » (Boyer, 1993, p. 20). L’enseignement explicite de la compréhension en lecture « est

un enseignement, dont la principale préoccupation, est de rendre le plus visibles possible la

démarche et la structure sous-jacente à l’exercice d’une habileté » (Boyer, 1993, p. 27).

Gauthier et coll. (2013) partagent cette idée en écrivant que l’enseignement explicite

« renvoie aux comportements visibles de l’enseignant et des élèves, donc à ce qui n’est ni

caché ni implicite. Dans cette perspective, l’enseignement explicite est basé sur l’idée que

l’apprentissage est facilité si on évite les fausses interprétations, les “mal entendus”, le non-

dit, le caché, l’implicite » (p. 42). En d’autres mots, le but principal de l’enseignement

explicite est de faciliter l’acquisition des savoirs par les élèves. Puisque nous voulons aider

les élèves à mieux comprendre les textes qu’ils lisent, il est aussi important de choisir la

Page 34: La littérature de jeunesse en classe de FLE aux Seychelles ...€¦ · L’élaboration d’une séquence didactique pour l’enseignement de la compréhension en lecture et du lexique

24

méthode efficace qui favorisera cette compréhension. Ce type d’enseignement permet de

travailler en plusieurs étapes afin de faciliter la compréhension des élèves.

1.5. L’objectif de la recherche

Notre recherche est de nature théorique. Pour plusieurs raisons (que nous préciserons dans

le cadre méthodologique), nous ne comptons pas aller sur le terrain pour trouver des

réponses à nos questions. Nous basons notre recherche sur des données dans le domaine de

la didactique du français, particulièrement la didactique du français langue étrangère. Nous

nous intéressons principalement à l’enseignement de la littérature de jeunesse, car c’est une

voie que les autorités concernées des Seychelles n’ont pas encore prise pour l’enseignement

du français dans les écoles. De plus, la méthode de l’enseignement explicite semble être la

méthode appropriée pour aider les élèves à mieux comprendre les textes littéraires qu’ils

lisent dans le contexte seychellois.

Ainsi, l’objectif de notre recherche est de produire une séquence didactique articulant

l’étude du lexique et la lecture d’un album de littérature de jeunesse. Chaque séance de la

séquence suivra les étapes de la méthode de l’enseignement explicite. La séquence mettra

en œuvre nos découvertes en ce qui concerne l’enseignement explicite, l’efficacité de la

littérature de jeunesse à l’école et l’étude du lexique. Nous voulons montrer que

l’enseignement explicite est capable de favoriser la compréhension en lecture des élèves de

français langue étrangère. Nous proposons donc aux enseignants en particulier, une

séquence didactique qu’ils pourront utiliser avec leurs élèves de la première année du

secondaire.

1.6. Les questions de recherche

Pour atteindre notre objectif de recherche, nous avons formulé trois questions de

recherche :

Page 35: La littérature de jeunesse en classe de FLE aux Seychelles ...€¦ · L’élaboration d’une séquence didactique pour l’enseignement de la compréhension en lecture et du lexique

25

1. Quelles sont les stratégies de compréhension en lecture à enseigner aux élèves de FLE

de la première année du secondaire aux Seychelles dans le cadre de la lecture d’un

album de jeunesse?

2. Quelles sont les stratégies à privilégier pour développer la compétence lexicale chez ces

élèves?

3. Quelles sont les activités à privilégier pour articuler l’enseignement de la

compréhension en lecture et l’enseignement du lexique?

Nos questions de recherche impliquent une recension d’écrits sur les principaux concepts

de notre recherche, notamment, la littérature de jeunesse, l’enseignement de l’album de

jeunesse, la compréhension en lecture, la compétence lexicale et l’enseignement explicite.

Les savoirs recueillis sur ces concepts nous aideront à produire une séquence didactique

mettant en œuvre un album de littérature de jeunesse pour les élèves de FLE.

Page 36: La littérature de jeunesse en classe de FLE aux Seychelles ...€¦ · L’élaboration d’une séquence didactique pour l’enseignement de la compréhension en lecture et du lexique

26

2. LE CADRE THÉORIQUE ET CONCEPTUEL

Nous présentons l’état de la recherche en didactique du français en ce qui concerne

l’enseignement de la littérature, particulièrement l’enseignement de la littérature de

jeunesse, de la compréhension en lecture et du lexique. Nous cherchons à démontrer les

liens entre la compréhension en lecture et le lexique dans l’enseignement de français langue

étrangère. Notre but est de montrer comment, en nous appuyant sur différentes recherches,

nous pouvons utiliser l’approche de l’enseignement explicite pour enseigner efficacement

la compréhension en lecture et le lexique en travaillant à partir des textes de la littérature de

jeunesse, notamment, l’album de jeunesse.

2.1. La littérature à l’école

Notre intérêt pour l’enseignement du texte littéraire à l’école nous amène vers la notion de

littérature. Cette dernière s’avère assez problématique à définir. Tantôt, il s’agit d’un

concept, tantôt il s’agit d’un corpus à étudier (Gauvin Fiset, 2012). La littérature peut être

définie comme un « ensemble des productions langagières, surtout écrites, qui se

soumettent à des styles, des règles, des techniques, des genres et qui rassemblent

principalement les œuvres écrites d’une communauté, d’une époque, d’un domaine

exprimant des préoccupations esthétiques » (Legendre, 2005, p. 841). Cette définition de la

littérature rejoint la définition du texte littéraire par Turmel-John qui le définit comme

« tout texte relevant de la fiction, écrit avec un souci d’esthétique et reconnu comme tel par

une opinion commune » (cité dans Giasson, 2000, p. 3).

Todorov (1987) mentionne deux caractéristiques principales liées à la notion de littérature

que nous retrouvons dans les définitions du Dictionnaire actuel de l’éducation et de

Turmel-John. Premièrement, selon l’auteur « la littérature est une fiction » (Todorov, 1987,

p. 12), ce qui veut dire « que le texte littéraire ne se soumet pas à l’épreuve de vérité, qu’il

n’est ni vrai ni faux, mais précisément, fictionnel » (p. 13). De même, l’auteur reconnait la

limite de cette définition, car il n’est pas aussi simple de catégoriser un texte comme étant

littéraire ou une œuvre littéraire comme fictionnelle. « Tout ce qui est habituellement

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27

considéré comme littéraire n’est pas forcément fictionnel, inversement, toute fiction n’est

pas obligatoirement littérature » (Todorov, 1987, p. 14). Ainsi, il propose la deuxième

définition de la littérature en l’inscrivant « dans la perspective du beau » (p. 15). Le beau

fait référence à la valeur du texte littéraire.

La littérature apparait donc comme une production écrite qui relève de la fiction, adhérant à

des critères de l’esthétique. Rappelons que le terme « esthétique » a une origine grecque qui

signifie « façon de ressentir » (Aron et Viala, 2011, p. 38). En philosophie, il s’agit d’un

questionnement sur l’art. En d’autres mots, le côté esthétique de la littérature renvoie au

jugement que l’on porte sur le fond et la forme d’une œuvre littéraire (Aron et Viala, 2011;

Aron et coll., 2002). Ce sont les lecteurs qui attribuent de la valeur à une œuvre littéraire en

fonction de leur appréciation et de leur appropriation de l’œuvre lue. Selon Boutevin et

Richard-Principalli (2008), « une œuvre littéraire vise à donner une représentation

complexe du monde et de l’homme, se prête à des lectures plurielles qui permettent à

chacun de s’approprier l’œuvre de manière individuelle, s’inscrit dans un ensemble culturel

avec lequel s’entretiennent des liens étroits » (p. 164).

Dans cette même optique, Aron et Viala (2005) résument la pertinence de l’enseignement

de la littérature dans la citation ci-dessous :

La littérature constitue en effet un lieu où une langue se vit pleinement par ses locuteurs, un lieu où se forgent une identité culturelle et la conscience d’une appartenance historique. Elle est aussi le vecteur d’une expérience esthétique, de l’adhésion à des valeurs, en même temps que de la transmission d’un savoir-faire argumentatif et expressif. En elle, donc, se croisent toutes les formes et tous les usages de la langue (Aron et Viala, 2005, p. 3).

Ainsi, la littérature à l’école aide à développer la culture des élèves aussi bien que leur

compétence langagière. Enseigner la littérature est une occasion pour faire découvrir aux

élèves différents genres littéraires afin de leur faire vivre cette expérience esthétique. Aron

et Viala (2005) précisent que l’enseignement de la littérature est conçu « comme un facteur

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d’épanouissement personnel, comme un plaisir et comme un besoin pour la société tout

entière » (p. 3). Pour sa part, Giasson (2000) énumère les rôles des textes littéraires : le

plaisir de lire; la quête de sens; le développement affectif; le développement social; le

développement cognitif et métacognitif; l’acquisition du vocabulaire et des connaissances

et le développement des habiletés en lecture. Selon l’auteure, « la littérature peut servir non

seulement à informer sur la vie, mais à transformer la vie » (Giasson, 2000, p. 10).

En ce que concerne la didactique du français langue étrangère, Cuq et Gruca (2005)

considèrent le texte littéraire dans la classe de FLE « comme un véritable laboratoire de

langue et comme un espace privilégié où se déploie l’interculturalité » (p. 413). Le texte

littéraire est l’occasion pour les élèves de rentrer en contact avec la langue et de faire la

découverte d’une culture. C’est l’occasion pour l’élève de découvrir le plaisir de lire et de

se plonger dans un monde imaginaire qui s’avère essentiel pour leur développement

affectif, cognitif et métacognitif (Giasson, 2000). Perrin (2010) explicite ce propos en

précisant que la littérature à l’école aide à former premièrement « l’individu en l’aidant à

décrypter le monde qui l’entoure, à donner du sens à l’existence et à se mettre en capacité

d’apprendre » ; deuxièmement « le citoyen en développant une relation sensible et critique

aux événements passés ou en cours » ; et troisièmement « le lecteur en lui permettant

d’accéder aux textes qui requièrent une activité réflexive et créative » (p. 51).

Cependant, pour pouvoir réaliser les objectifs de l’enseignement de la littérature à l’école, il

convient de savoir quels textes choisir pour les élèves (Perrin, 2010). Anastassiadi (2010)

préconise l’usage des textes qui peuvent procurer du plaisir aux apprenants,

particulièrement les élèves de FLE, et qui peuvent faciliter des activités de compréhension

en lecture. Pour Anastassiadi, travailler à partir des textes adaptés au niveau des élèves

présente un « plaisir qui est double : d’une part, le plaisir de découvrir le texte et d’adhérer

à l’histoire et, d’autre part, le plaisir de s’interroger sur le texte, de réfléchir, de discuter

collectivement sur les effets qu’il produit sur chaque lecteur individuellement » (2010,

p. 243). Pour ces raisons, parmi tant d’autres, les œuvres de la littérature de jeunesse ont

fait leur entrer dans les classes de français à l’école.

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Dans les deux prochaines parties, nous définirons la littérature de jeunesse et l’album de

jeunesse (en tant que genre textuel) et nous présenterons les recherches qui démontrent

l’efficacité de la littérature de jeunesse pour l’enseignement de français langue étrangère en

particulier.

2.1.1. L’enseignement de la littérature de jeunesse

La littérature de jeunesse n’est pas une invention du XXe siècle, bien que l’appellation

« littérature de jeunesse » soit assez récente. Les livres qui s’adressent directement aux

enfants et aux jeunes ont fait leur apparition depuis le XVe siècle sous la forme de

« certains livres d’heures24 » (Perrin, 2010, p. 52) écrits en gros caractères que les mères

lisaient à leurs enfants. Ensuite, vers la fin du XVIIIe siècle, avec l’introduction d’une

édition destinée à un public plus jeune, il y a eu l’apparition d’une littérature véritablement

spécialisée (Perrin, 2010). Et le XIXe siècle a été marqué par « un essor considérable de

véritables éditions pour les jeunes dont certains textes sont aujourd’hui considérés comme

patrimoniaux » (Perrin, 2010, p. 52). Nous donnons comme exemple, Les Malheurs de

Sophie (1858) de la Comtesse de Ségur, Le tour du monde en quatre-vingts jours (1872) de

Jules Verne, Alice au pays des merveilles (1865) de Lewis Carroll, Oliver Twist (1837) de

Charles Dickens et Les Enfants du capitaine Grant (1868) de Jules Verne.

La littérature de jeunesse se situe parmi ce qu’Aron et Viala (2011) surnomment

« littérature qualifiée » afin de faire la distinction avec la « littérature générale » ou tout

simplement la « littérature ». La littérature qualifiée regroupe la « littérature populaire,

sentimentale, littérature d’enfance et de jeunesse, des femmes, francophone, etc. » (Aron et

Viala, 2011, p. 70). Selon Aron et Viala, cette appellation est nécessaire « pour désigner

l’usage qui s’est établi de désigner des secteurs de la littérature liés à un public déterminé

ou à une catégorie d’auteur(e)s » (2011, p. 70). En fait, dans le cadre de sa thèse doctorale

Turgeon (2013) propose de définir la littérature de jeunesse selon ses fonctions.

Conséquemment, nous découvrons que tout comme la littérature destinée aux adultes, la

24 « Livres de prières et de psaumes visant l’édification morale : seuls livres auxquels les femmes avaient accès » (Perrin, 2010, p. 52).

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littérature conçue pour les enfants et adolescents partage les mêmes fonctions : le plaisir, le

développement affectif, cognitif et social, l’expérience culturelle, etc. Ainsi, nous pouvons

définir la littérature de jeunesse comme « un ensemble de textes ayant une visée

esthétique » spécialement conçu pour les jeunes lecteurs ou les enfants et les adolescents.

C’est un ensemble d’œuvres qui aident les jeunes à vivre une expérience littéraire en

développant leur culture générale, leur appréciation et leur appropriation de la langue.

Comme la « littérature », la littérature de jeunesse peut aussi être considérée comme « l’art

verbal ». Poslaniec (1992) considère que « toutes les techniques littéraires identifiées par

les chercheurs sont largement présentes dans les livres destinés aux enfants; [et] rien ne

permet d’établir une coupure entre la littérature pour la jeunesse et la littérature générale »

(p. 16). Nous adhérons à la conception de Poslaniec qui est aussi celle défendue par le

programme officiel de l’école primaire en France en 2002 :

La littérature adressée à l’enfance ne s’est jamais située en dehors de la littérature que lisent les adultes. Elle se porte seulement vers des lecteurs qui n’ont pas les mêmes interrogations sur le sens du monde que leurs parents, qui n’ont pas non plus la même expérience de la langue. En quelque sorte, elle fait la courte échelle aux plus jeunes pour les introduire à l’univers infini des lectures à venir. À cet égard, elle constitue véritablement le domaine littéraire de l’écolier (Ministère de la Jeunesse, de l’Éducation nationale et de la Recherche, 2002, p. 5, cité dans Anastassiadi, 2010, p. 241).

Cette reconnaissance pour la littérature de jeunesse consolide son importance et son

efficacité en contexte scolaire. La littérature de jeunesse répond à une demande qui existe

depuis bien longtemps et son aspect pédagogique et didactique lui fait mériter sa place au

sein du domaine de la littérature. Présentons donc quelques fonctions importantes de

l’enseignement de la littérature de jeunesse à l’école.

Poslaniec (2004) considère la littérature de jeunesse comme « la seule qui s’adresse

directement aux enfants, la seule qui permette donc au plus grand nombre de faire la

découverte d’une lecture impliquée, ce qui est nécessaire au passage à l’acte de lecture

autonome » (p. 14). Il s’agit d’une lecture adaptée au niveau des élèves. Ce sont des textes

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qui correspondent le mieux aux jeunes lecteurs, « tant par la langue que par le contenu »

(Mercier et Tourron-Bertrand (2013, paragr. 2) et ils sont capables de susciter l’intérêt des

élèves pour la lecture. « Les jeunes lecteurs ayant besoin d’entendre parler d’eux-mêmes à

travers des œuvres écrites à leur intention dans la langue et la sensibilité d’aujourd’hui : la

littérature de jeunesse est un domaine qui peut favoriser le gout de lire » (Tauveron, 2000,

p. 1). La littérature de jeunesse sert à impliquer les jeunes dans l’activité de lecture et les

encourage à continuer à lire.

Selon Giasson (2000), « plus l’élève lit, plus il développe ses habiletés en lecture, plus la

tâche devient facile et agréable et plus il a envie de lire » (p. 9). Ainsi, en proposant aux

élèves de FLE des œuvres adaptées à leur niveau, il est possible de développer leurs

habiletés en lecture. Dans le cadre d’une recherche menée en Algérie auprès des

enseignants et des élèves de FLE afin d’obtenir leurs opinions sur les rôles des textes

littéraires et de découvrir la littérature qui leur conviendrait, des chercheurs ont découvert

que les textes littéraires présents dans les manuels sont « opaques et inaccessibles pour

leurs élèves. Ces derniers avouent qu’ils rencontrent des difficultés à lire et à comprendre

ces documents littéraires à cause des mots difficiles, des figures de style et des implicites

culturels » (Benazout, 2010, p. 26). À la lumière des constats de cette enquête, les

enseignants de français se sont tournés vers l’intégration de la littérature de jeunesse dans

l’enseignement et l’apprentissage du français au secondaire. En effet, l’auteure de cette

recherche trouve que « la littérature conçue pour l’enfance et la jeunesse prend en compte

l’âge, le besoin et l’intérêt des adolescents » (Benazout, 2010, p. 26). La littérature amène

donc les élèves à accéder graduellement aux œuvres plus complexes (Benazout, 2010). La

littérature de jeunesse dans la classe de FLE peut alors faciliter le développement de la

compétence en lecture des élèves.

De plus, la littérature de jeunesse est un objet valorisé par l’institution scolaire, en France

comme au Québec. Pour le ministère de l’Éducation du Québec, par exemple, « la

littérature de jeunesse est un moyen privilégié de sensibiliser aux valeurs sociales,

culturelles et politiques d’un pays » (Pouliot, 2005, p. 2) et, pour ces raisons, elle est

inscrite aux programmes scolaires, « ainsi qu’aux guides, répertoires et sites

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pédagogiques » (Pouliot, 2005, p. 2). Il est à noter que la littérature de jeunesse fait partie

des programmes scolaires au Québec depuis plusieurs années. L’un des objectifs principaux

de son enseignement vise à « conserver et à consolider la place et la survie du français en

terre d’Amérique, à développer et à nourrir un patrimoine national, sans négliger ce qui se

fait ailleurs » (Pouliot, 2005, p. 9). Dans le cas des Seychelles, la littérature de jeunesse

n’apparait pas dans le programme officiel du français, même si, le ministère de l’Éducation

reconnait l’importance de la « compréhension de la lecture de textes divers » (2001, p. 30).

Malgré qu’elle ne fasse pas partie des prescriptions ministérielles seychelloises, nous

considérons la littérature de jeunesse comme un outil essentiel qui pourrait aider les élèves

à développer leur compréhension en lecture.

Dans la même perspective, Anastassiadi (2007; 2010) considère la littérature de jeunesse

comme un objet exploitable en classe de FLE. Elle félicite l’école pour avoir fait de la

littérature de jeunesse « un outil privilégié pour enseigner les stratégies de lecture qui

permettent de comprendre un texte » (2007, p. 126). Selon Anastassiadi, « initier tôt les

enfants et les adolescents à la littérature signifie leur inculquer une attitude positive vis-à-

vis de la lecture et leur permettre d’accéder à la culture du livre » (2007, p. 126). Elle puise

aussi des exemples dans la didactique du français langue maternelle qui, selon elle, peuvent

être transposables en classe, tels que les débats interprétatifs25 et la mise en réseaux de

textes26, empruntés à Tauveron (1999). Selon Anastassiadi, « en FLM tout comme en FLE

il est démotivant de réserver les œuvres littéraires aux niveaux avancés » (2010, p. 242).

Les élèves débutants en lecture ont le droit de découvrir des textes adaptés à leur niveau et

à leur intérêt. La littérature de jeunesse à l’école aide donc les élèves à découvrir les œuvres

littéraires, à apprécier la littérature et à comprendre le texte.

La littérature de jeunesse regroupe plusieurs genres littéraires, notamment, le roman, le

théâtre, le conte, la bande dessinée, l’album. Le choix du genre à travailler avec les élèves

25 Aussi appelé le débat de lecture, le débat interprétatif est une activité qui permet aux jeunes lecteurs d’apporter un jugement critique au texte lu. C’est l’occasion de s’engager dans l’interprétation de l’œuvre et de discuter autour des questions et des problèmes relevant du texte (Sorin, 2006). 26 Il s’agit du regroupement ou de la mise en relation de textes littéraires partageant les mêmes caractéristiques, thèmes, personnages, auteurs, entre autres (Tauveron, 1999).

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en classe repose sur les objectifs d’apprentissage et le niveau des élèves ou tout simplement

sur la préférence de l’enseignant et des élèves pour ce genre. Nous ne comptons pas aborder

les différents genres de textes, mais il convient de justifier notre intérêt pour l’album de

jeunesse.

2.1.2. L’album de jeunesse en classe de FLE

L’album de jeunesse est le genre à privilégier avec les jeunes débutant en lecture,

notamment les élèves de FLE qui apprennent à maitriser la langue française. Dolz et coll.

(2001) remarquent qu’il s’agit d’« un bon support pour les apprentis lecteurs et [qu’] il

facilite l’interaction entre l’enseignant et les élèves, et les élèves entre eux » (p. 24).

Nous entendons par album de jeunesse tout ouvrage illustré dont les illustrations apportent au texte un éclairage différent. Contrairement à sa fonction dans l’imagier, l’illustration ne redit pas le texte, mais lui fait prendre une dimension signifiante à un niveau supérieur. Ce peut être une note d’humour, un clin d’œil au lecteur, un approfondissement du sens, voire un point de vue différent de celui du texte (Salerno, 2006, cité dans Piotrowska-Skrzypek, 2010, p. 3).

Il est à noter que certains albums sont totalement dépourvus de textes et que ce sont les

illustrations uniquement qui racontent l’histoire. Van der Linden (2007) aborde cette

caractéristique de l’album de jeunesse dans sa définition : « [ouvrage] dans [lequel] l’image

se trouve spatialement prépondérante par rapport au texte, qui peut d’ailleurs en être absent.

La narration se réalise de manière articulée entre texte et images » (2007, p. 24).

La lecture d’un album est généralement une lecture double : il s’agit de faire des liens entre

les textes et les illustrations. Selon Van der Linden (2007), la relation texte-image dans

l’album s’entretient de trois manières : rapport de redondance, rapport de collaboration et

rapport de disjonction. Dans le rapport de redondance, « le texte et l’image renvoient

chacun au même récit, ils se centrent sur des personnages, des actions et des événements

rigoureusement identiques. Les contenus narratifs se trouvent – totalement ou partiellement

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– superposés » (p. 120). Dans le rapport de collaboration, le texte et l’image portent chacun

son tour la narration. Il y a dans ce rapport une « interaction de deux messages différents

pour une réalisation commune du sens » (p. 121). En ce qui concerne le dernier rapport,

« textes et images suivent des voies narratives parallèles. Textes et images entrent en

contradiction » (p. 121). Dans ce rapport, il y a une disjonction entre le texte et l’image,

mais ce type de rapport invite le lecteur à s’interroger sur l’œuvre et cette contradiction

« laisse ouvert le champ des interprétations, sans que le lecteur ne soit orienté vers un sens

défini » (Van der Linden, 2007, p. 121). En enseignant le rapport texte-image dans l’album,

l’enseignant soutient davantage le travail permettant la compréhension des élèves.

L’album apparait donc comme un support intéressant et adapté au niveau des élèves du

primaire. Il sert à donner aux élèves une première expérience de la lecture des textes

littéraires et les encourage à lire davantage. Selon Escarpit (2008), « l’album sert de

véhicule à toutes les tendances littéraires, les plaçant ainsi à la portée du jeune lecteur. Mais

il les aborde de manière originale, à travers la relation particulière qu’il instaure entre texte

et image » (p. 306). Escarpit considère l’enfant comme un être capable d’apprécier la

littérature et pour lui l’enfant « n’est plus ou plus seulement un petit être à éduquer : il

occupe désormais une place de choix, est considéré comme un individu capable d’accéder à

des jeux et des plaisirs littéraires et artistiques. L’album parait alors un support privilégié

pour mener ces premières expériences esthétiques » (2008, p. 303). De plus, « l’album offre

aux jeunes l’occasion de connaitre les textes qui les touchent, les intéressent, frappent leur

curiosité naturelle, suscitent leur envie de savoir, nourrissent leur imagination, bref, des

textes passionnants, enrichis par les illustrations » (Piotrowska-Skrzypek, 2010, p. 4). À

l’origine, l’album était conçu principalement pour les enfants de français langue maternelle,

mais ses caractéristiques particulières ont sollicité sa présence en classe de FLE comme

« un outil didactique » offrant de multiples exploitations (Piotrowska-Skrzypek, 2010).

Dans la classe de FLE, que ce soit avec les élèves du primaire, mais aussi ceux du

secondaire, l’album est le support idéal pour les initier à la lecture. Piotrowska-Skrzypek

souligne que « la place de l’album dans la lecture débutante, et pas seulement dans la

lecture faite aux enfants constitue un excellent moyen de plonger dans le monde

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merveilleux de la littérature, d’y faire ses premiers pas de lecteur » (2010, p. 4). Ce genre

de textes constitue un objet d’apprentissage approprié pour favoriser la compréhension en

lecture en raison de ses caractéristiques (la longueur, l’articulation texte-image, le style du

texte, l’humour, entre autres). En travaillant avec l’album, nous cherchons à motiver les

élèves à vouloir lire et à mieux comprendre les textes qu’ils lisent. Lépine souligne qu’« en

tant qu’enseignant de français, si nous souhaitons former des amateurs éclairés de

littérature, notre objectif n’est pas seulement de faire lire les élèves, mais de les amener à

vouloir lire » (2011, p. 68). Et selon Anastassiadi, l’élève de FLE qui découvre la lecture

n’est pas motivé face à un texte « nu, sans illustrations » (2007, p. 126). La présence des

illustrations dans l’album apporte un soutien de compréhension, particulièrement aux

élèves les plus faibles. Lépine souligne qu’« un lecteur habile s’intéressera au texte, aux

images et aux relations qu’ils entretiennent en adoptant un regard critique tandis qu’un

lecteur en difficulté portera son attention davantage aux images pour soutenir sa

compréhension du texte » (2011, p. 69).

En classe de FLE, Piotrowska-Skrzypek (2010) propose de choisir l’album qui correspond

le mieux aux besoins des élèves, aux objectifs d’apprentissage de l’enseignant, au niveau

des élèves, etc. Bien que l’enseignant puisse être libre de décider comment aborder la

lecture d’un album avec ses élèves, plusieurs auteurs suggèrent de commencer par une

étude de la couverture, du titre, de la quatrième de couverture, en fait, tous les éléments qui

entourent l’album et que l’on nomme « paratexte » (Dolz, Noverraz et Schneuwly, 2001;

Piotrowska-Skrzypek, 2010; Van der Linden, 2007). Cette première découverte de l’album

encourage une interaction entre l’enseignant et les élèves, et entre les élèves. Cela crée une

anticipation de la lecture de l’album. Par la suite, la lecture de l’album peut se faire soit par

une lecture intégrale dépendant de la longueur de l’album, soit par une lecture des

différentes parties de l’album, dite « à dévoilement progressif ».

Cependant, Anastassiadi (2007) et Piotrowska-Skrzypek (2010) soulignent le danger

d’utiliser l’album pour des fins purement linguistiques, car cela peut nuire au plaisir que

procure la lecture d’un album pour les élèves. Lorsque l’album est utilisé uniquement pour

apprendre la langue et pour enseigner la grammaire, la lecture n’est plus une activité

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plaisante pour l’élève de FLE. Anastassiadi (2007) propose, entre autres, « d’orienter les

lectures, en proposant des pistes pour une lecture active; de travailler sur la compréhension

du texte; d’enseigner les mots qui parlent des textes (auteur, écrivain, illustrateur…) »

(p. 129). Dans ce sens, l’acquisition du vocabulaire et l’appropriation du lexique peuvent

constituer une piste pour une lecture active. En ce qui concerne l’enseignement de français

langue seconde, Lépine (2011) souligne que les particularités de l’album permettent

l’acquisition des nouveaux mots « par des exercices de lecture répétitive d’un même texte »

(p. 69). C’est donc le rôle de l’enseignant de savoir utiliser l’album d’une manière à aider

ses élèves à apprendre la langue sans les détourner du plaisir de lire.

Enfin, l’album offre à l’enseignant et aux élèves la possibilité de travailler différentes

stratégies de lecture afin d’assurer la compréhension de chaque élève. En effet, pour Lépine

les albums de jeunesse sont « un outil didactique utile pour l’enseignement explicite de

nombreuses stratégies de lecture en permettant à l’enseignant de modeler diverses façons

d’aborder une œuvre » (2011, p. 69). Il est important alors de souligner la valeur

pédagogique de l’album :

C’est aussi un auxiliaire précieux de pédagogie, en ce sens qu’il réunit les élèves au-delà des difficultés d’apprentissage, notamment de lecture. De plus, il peut servir de base pour de nombreuses activités transdisciplinaires. Sur le plan de la culture et de l’ouverture d’esprit des élèves, il apporte des connaissances, un nouveau regard sur la littérature, le livre et les savoirs (Sevestre-Loquet, 2006, cité dans Piotrowska-Skrzypek, 2010, p. 6).

À la lumière de notre synthèse sur l’album de jeunesse en classe de FLE, il convient, dans

le prochain chapitre, de proposer l’approche pédagogique que nous considérons pertinente

pour son enseignement efficace.

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2.2. L’enseignement explicite

Notre intérêt pour cette méthode d’enseignement est dû à notre objectif de proposer un

enseignement efficace de la compréhension en lecture et du lexique. Dans plusieurs

recherches et ouvrages sur la compréhension en lecture et l’acquisition du lexique, un

enseignement explicite des stratégies en lecture est proposé (Falardeau et Gagné, 2012;

Gauthier, Bissonnette et Richard, 2013; Giasson, 1990; Hollingsworth et Ybarra, 2012;

Lépine, 2011). Il convient de décrire cette approche pédagogique afin d’en découvrir les

avantages et les enjeux, surtout dans le domaine de la didactique de FLE.

L’enseignement explicite a fait son entrée avec le projet Follow Through27, une

expérimentation dans le domaine de l’éducation qui avait pour but de voir quelles pratiques

pédagogiques pourraient assurer la réussite des élèves, particulièrement, ceux provenant de

familles défavorisées (Appy, 2013a). Au terme de ce projet, le Direct Instruction, un

modèle d’enseignement conçu au début des années 1960 par Siegfried Engelmann, avait

obtenu les meilleurs résultats. Par la suite, Barak Rosenshine a travaillé sur les résultats de

Follow Through. En voulant « déterminer les éléments de l’efficacité en enseignement », il

modélise en 1986 « les caractéristiques d’une pratique efficace » (Appy, 2013a, paragr. 3)

devenant ainsi le père de l’enseignement explicite. Pendant plusieurs années, cette pratique

d’enseignement était plus connue dans les espaces anglophones que francophones, puis

dans les années 2000, les chercheurs canadiens, notamment Clermont Gauthier, Steve

Bissonnette et Mario Richard, ont apporté leurs connaissances et expertise de cette méthode

dans la francophonie.

Selon Rosenshine, pour qu’un enseignement soit efficace, il convient de favoriser un

enseignement qui procède étape par étape. L’enseignant doit bien expliciter l’objet

d’enseignement en différentes étapes et il est important de vérifier continuellement la

compréhension de chaque élève et d’encourager la participation active de tous (Rosenshine,

1986).

27 Il s’agissait d’une expérimentation longitudinale portant sur 70 000 élèves de 180 écoles, de 1967 à 1976. Au moins une vingtaine modèle pédagogique faisait partie de la recherche (Appy, 2013a, paragr. 2).

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This pattern is a systematic method for presenting material in small steps, pausing to check for student understanding, and eliciting active and successful participation from all students (Rosenshine, 1986, p. 60).

Ce type d’enseignement « renvoie aux comportements visibles de l’enseignant et des

élèves, donc à ce qui n’est ni caché ni implicite. Dans cette perspective, l’enseignement

explicite est basé sur l’idée que l’apprentissage est facilité si on évite les fausses

interprétations, les “mal entendus”, le non-dit, le caché, l’implicite » (Gauthier et coll.,

2013, p. 42). L’enseignement explicite « fait référence à une démarche d’apprentissage

dirigée par l’enseignant qui procède du simple vers le complexe et se déroule

habituellement en trois étapes : le modelage, la pratique dirigée et la pratique autonome »

(Rosenshine et Stevens, 1986, cité dans Gauthier et coll., 2013, p. 26).

Dans leur ouvrage sur l’enseignement explicite, Gauthier, Bissonnette et Richard précisent

que cette approche comporte trois grands moments d’apprentissage, notamment la

préparation de l’enseignement (P), l’interaction avec les élèves (I) et la consolidation des

apprentissages (C). Il s’agit en effet des principales stratégies de l’enseignement que les

auteurs surnomment « le modèle PIC » (Gauthier et coll., 2013). En ce qui concerne le

premier moment d’apprentissage, il s’agit de la mise en place de plusieurs stratégies

relatives « à la planification de la gestion des apprentissages et celles concernant la

planification de la gestion de la classe » (Gauthier et coll., 2013, p. 100). Cette phase

préparatoire est très importante, car elle permet à l’enseignant de préciser les objectifs

d’apprentissage, d’organiser le déroulement de la leçon, de déterminer les différentes

stratégies à utiliser, de préparer le matériel didactique, de déterminer la durée de chaque

étape de la leçon, etc. Sommairement, cette première étape permet à l’enseignant de prévoir

ce qu’il doit faire pour « construire des leçons bien ciblées » (Gauthier et coll., 2013,

p. 265) qui favorisent l’apprentissage de chaque élève.

Lors de la deuxième étape, c’est-à-dire la phase interactive, l’enseignant « met en œuvre

son plan d’action pour faire apprendre le contenu, les habiletés et les règles prévues dans le

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programme » (Gauthier et coll., 2013, p. 266), et en fonction des situations réelles de la

classe, l’enseignant peut apporter des modifications à sa préparation initiale. Cette phase

interactive est l’occasion pour l’enseignant de mettre en pratique plusieurs stratégies

d’enseignement afin de maximiser l’apprentissage des élèves et d’assurer un bon taux de

réussite. Quelques exemples des stratégies générales de gestion des apprentissages sont

l’usage d’un langage clair et précis, la vérification régulière de la compréhension et le

soutien à l’apprentissage. Au cours de cette étape, l’enseignant met aussi en place des

stratégies spécifiques « afin d’assurer un meilleur apprentissage des contenus et des

habiletés » (Gauthier et coll., 2013, p. 266). Ces stratégies spécifiques sont regroupées par

rapport aux trois moments clés de la leçon : l’ouverture de la leçon, le corps de la leçon et

la clôture de la leçon. En bref, l’ouverture de la leçon renvoie à la présentation de l’objectif

d’apprentissage et à l’activation des connaissances et des habiletés des élèves avant

d’apprendre le nouveau contenu. Le corps de la leçon correspond à la conduite de la leçon

pendant laquelle l’enseignant met en marche les trois étapes de la démarche de

l’enseignement explicite, notamment le modelage, la pratique guidée et la pratique

autonome (nous y reviendrons). À la fin, l’enseignant peut clôturer la leçon en revenant sur

les apprentissages des élèves, en annonçant la prochaine leçon et en s’assurant que les

élèves ont bien compris la leçon en leur donnant des devoirs (Gauthier et coll., 2013).

La dernière étape du modèle PIC, la phase de consolidation, renvoie à la mise en œuvre des

stratégies de vérification et d’évaluation des apprentissages des élèves. L’enseignant donne

des devoirs aux élèves, il fait des révisions chaque jour, chaque semaine, voire chaque

mois, pour s’assurer de la compréhension de chaque élève. Cette phase de révision est un

élément important dans l’enseignement explicite, car elle garantit la consolidation des

apprentissages avec les élèves.

La révision peut servir à rétablir et à élaborer les connaissances acquises; elle peut également renforcer et étendre les connexions au sein des structures cognitives et entre elles. La révision peut alors aider les élèves à développer des modèles de résolution (patterns) et à unifier leurs connaissances; enfin, la révision peut favoriser l’automatisation dans le domaine d’étude (Rosenshine, 2008, p. 242, cité dans Gauthier et coll., 2013, p. 214).

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Revenons aux trois étapes qui se déroulent au cours de la phase interactive (I) et qui

constituent la démarche de l’enseignement explicite : le modelage, la pratique guidée et la

pratique autonome. Ces trois étapes consistent à dire et à montrer aux élèves comment

exécuter une tâche et à les guider dans leur démarche d’apprentissage (Gauthier,

Bissonnette et Richard, 2007). Le tableau ci-dessous résume ces étapes clés de la démarche

de l’enseignement explicite.

Tableau 4 : Les étapes de l’enseignement explicite

ÉTAPE 1 MODELAGE

Lors de ses présentations et de ses démonstrations, l’enseignant(e) s’efforce de rendre explicite tout raisonnement qui est implicite en enseignant les quoi, pourquoi,

comment, quand et où faire.

ÉTAPE 2 PRATIQUE GUIDÉE (feed-back ou rétroaction)

L’enseignant(e) prend le temps de vérifier ce que les élèves ont compris de sa présentation ou de sa démonstration en leur donnant des tâches à réaliser, en équipe,

semblables à celles effectuées lors du modelage.

ÉTAPE 3 PRATIQUE AUTONOME

(rétroaction après 2 ou 3 problèmes ou questions) L’élève réinvestit seul ce qu’il a compris du modelage et appliqué en équipe, lors de la

pratique guidée, dans quelques problèmes ou questions.

Tableau extrait du livre intitulé Enseignement explicite et réussite des élèves : la gestion des apprentissages de Gauthier et coll. (2013, p. 181).

Dans notre description de cette démarche d’enseignement, nous avons favorisé l’ouvrage de

Gauthier et coll. (2013), car les auteurs ont fait une recension plutôt exhaustive des travaux

sur cette démarche et ils s’appuient abondamment sur Rosenshine. Rosenshine (1986)

souligne les six fonctions d’un enseignement efficace qui correspondent aux différentes

stratégies mentionnées par Gauthier et coll. (2013).

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In summarizing the studies on effective teaching, I have divided the results into six teaching functions: review, presentation of new material, guided practice, feedback and corrections, independent practice, and weekly and monthly reviews (Rosenshine, 1986, p. 64).

Il est à noter que l’approche de l’enseignement explicite a reçu quelques critiques

défavorables. Cette démarche d’enseignement est alors comparée à un enseignement

magistral d’une manière plutôt péjorative. Dans leur ouvrage, Gauthier et coll. (2013)

abordent cette association de l’enseignement explicite à l’enseignement magistral ou

l’enseignement traditionnel. L’enseignement magistral est axé « exclusivement sur la

transmission du contenu sous forme de monologue de l’enseignant » (Gauthier et coll.,

2013, p. 35). Cette forme d’enseignement ne donne pas nécessairement la parole aux

élèves ; c’est l’enseignant qui mène le déroulement complet de la leçon. Dans cette forme

d’enseignement, il y a peu d’interactions entre l’enseignant et les élèves et entre les élèves.

Cependant, bien que pendant l’étape du modelage de l’enseignement explicite, l’enseignant

parle et les élèves écoutent attentivement, il ne s’agit pas d’un cours magistral.

L’enseignement explicite suit l’approche instructionniste par laquelle « le maitre fait

apprendre des contenus scolaires de manière systématique, structurée et explicite à ses

élèves » (Gauthier et coll., 2013, p. 33). En enseignement traditionnel ou magistral, « la

vérification de la compréhension a lieu après les exercices ou lors de la correction ; en

enseignement explicite elle a lieu dès le modelage et tout au long de la pratique guidée »

(Appy, 2013b, p. 2) à travers un questionnement orienté sur les démarches des élèves et pas

seulement sur les bonnes réponses. Certes, « les principes de l’enseignement explicite

impliquent une participation active de l’élève et n’excluent en rien une dimension réflexive

et collaborative » (Bianco, 2011, p. 2).

L’enseignement explicite est une démarche d’enseignement qui permet à l’enseignant de

vérifier continuellement l’apprentissage et la compréhension de ses élèves. Selon Gauthier

et coll. (2013), « le risque d’échec est moindre et les effets sur l’apprentissage sont positifs

pour une grande diversité d’apprenants, dans diverses matières et dans des contextes

culturels différents » (p. 32). Cette méthode d’enseignement est « particulièrement

appropriée pour l’apprentissage de la lecture, des mathématiques, de la grammaire, de la

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langue maternelle, des sciences, de l’histoire et, en partie, des langues étrangères »

(Gauthier et coll., 2013, p. 31). Dans le cadre de notre recherche, nous nous intéressons à

l’emploi de cette démarche dans le domaine de FLE pour l’enseignement de la

compréhension en lecture et du lexique.

2.2.1. L’enseignement explicite de la compréhension en lecture

Pour définir la lecture, nous adoptons la définition de Gaussel (2015) qui « caractérise

l’acte de lire comme la capacité à établir des relations entre les séquences de signes

graphiques d’un texte et les signes linguistiques propres à une langue naturelle (phonèmes,

mots, marques grammaticales) » (p. 2). Elle précise davantage en notant qu’il s’agit de « la

prise de connaissance du contenu d’un texte écrit » (p. 2). Pour Gaussel (2015), prendre

connaissance fait référence à la compréhension contextuelle du sens d’un texte écrit. Ainsi,

pour l’auteure, lorsque nous apprenons à lire, nous apprenons aussi à comprendre. Il faut

dire que plusieurs auteurs abondent dans le même sens dans leur définition de la lecture.

Giasson (2003) définit la lecture « comme un processus plus cognitif que visuel, comme un

processus actif et interactif, comme un processus de construction de sens et de

communication » (p. 6). Le lecteur arrive à construire du sens ou à comprendre le texte par

rapport au contexte et à ses propres connaissances (Giasson, 2003). Pour leur part, Aron et

coll. (2002) définissent la lecture comme une activité qui consiste au déchiffrage des signes

écrits, soit à haute voix ou silencieusement. Selon les auteurs, « cette activité postule

toujours une compréhension immédiate du texte, mais elle peut également impliquer une

compétence interprétative particulière, élaborée, voire créatrice » (Aron et coll., 2002,

p. 324).

Selon les définitions de la lecture, nous comprenons que la compétence à lire requiert

essentiellement la capacité à comprendre le texte. En d’autres termes, lire est aussi

comprendre. Mais la compréhension est plus large que la lecture. Comprendre, selon

Lafortune, Fréchette et Sorin (2010), « c’est attribuer de la signification à quelque chose par

l’entremise de la connaissance et non par la seule expérience ou l’émotion » (p. 18). De

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plus, la compréhension « permet de dégager non seulement les raisons d’un phénomène,

mais aussi les motifs des conduites d’une personne, de saisir le pourquoi et le comment des

choses et des événements ainsi que des comportements et des pensées des personnes »

(Lafortune, et coll., 2010, p. 18). En d’autres mots, le concept de la compréhension est une

habileté intellectuelle qui permet à l’individu d’utiliser ses propres connaissances afin de

donner du sens aux éléments qui l’entourent (le texte et le contexte). De ce fait, une lecture

n’est pas efficace si le lecteur n’arrive pas à comprendre le texte qu’il lit, d’où l’importance

de la compréhension en lecture.

À la lumière de ces définitions de la lecture et de la compréhension, nous dirions que la

compréhension en lecture est l’acte d’assimiler les informations obtenues de notre lecture.

À la suite de notre lecture et même au cours de notre lecture, nous arrivons à dégager le

sens des informations que nous lisons. « Comprendre un texte, c’est s’en faire une

représentation mentale cohérente en combinant les informations explicites et implicites

qu’il contient à ses propres connaissances. Cette représentation est dynamique et cyclique »

(Giasson, 2011, p. 236). La compréhension en lecture est une activité nécessaire qui

implique la participation active des élèves et qui aide au développement de leurs

connaissances. Comme toutes autres compétences, la compréhension en lecture mérite un

enseignement rigoureux et efficace afin d’assurer la réussite des élèves à l’école.

Plusieurs chercheurs et auteurs soutiennent l’approche de l’enseignement explicite comme

étant une méthode efficace pour l’enseignement de la compréhension en lecture (Bianco,

2011; Giasson, 1990; Serafini, 2008). Giasson (1990) souligne l’importance de guider les

élèves dans leur apprentissage de la lecture : leur donner « un soutien maximum au point de

départ » (p. 28) et les accompagner dans ce processus afin d’analyser leur progrès et de

réduire le soutien au fur et à mesure que les élèves développent de l’autonomie. Pour

Giasson, le modèle de l’enseignement explicite « vise à rendre les lecteurs autonomes en

développant chez eux non seulement des habiletés, mais également des stratégies qu’ils

pourront utiliser de façon flexible selon la situation » (1990, p. 28). Pour Serafini (2008),

un enseignement explicite de la compréhension en lecture est « un enseignement qui met

l’accent sur une stratégie, une pratique ou un aspect particulier du processus de lecture, qui

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fait prendre conscience de la matière enseignée et qui s’efforce de rendre clairs, pour les

élèves, les résultats que nous attendons d’eux » (2008, p. 3). Dans cette même optique,

Bianco (2011) propose un enseignement explicite de la lecture afin d’aider les élèves à

améliorer leurs habiletés de compréhension. Selon l’auteure, « la compréhension des textes

est une activité cognitive complexe qui requiert la maitrise du code linguistique, mais aussi

la mise en œuvre de processus cognitifs généraux, telle que l’activation de connaissances en

mémoire, la capacité à établir des inférences et à mobiliser des processus attentionnels »

(Bianco, 2011, p. 1). Ainsi, il s’agit d’une activité qui peut être assez difficile pour les

élèves les plus faibles et certains élèves de FLE.

Si l’on veut la réussite de tous les élèves, indépendamment de leur niveau, de leur origine,

entre autres, il faut une méthode qui prenne en compte les différences linguistiques et

sociales et qui propose une démarche efficace de l’enseignement. Selon Gauthier et coll.

(2013), même si « la pédagogie différenciée » est la méthode préconisée dans plusieurs

pays pour aborder l’hétérogénéité des élèves dans les classes, l’approche de l’enseignement

explicite est capable de prendre en considération les différences individuelles des élèves.

Les auteurs soulignent les lacunes de « la pédagogie différenciée » comme étant une

méthode dont la signification conceptuelle est ambiguë. De plus, « peu d’effets de la

pédagogie différenciée sur la réussite des élèves ont été démontrés empiriquement » (Jobin,

2007, dans Gauthier et coll., 2013, p. 84). Gauthier et coll. (2013) soutiennent le modèle de

« réponse à l’intervention » qui propose « d’intervenir d’abord avec une démarche générale

d’enseignement explicite, puis de différencier les interventions pour les élèves qui

éprouvent des difficultés » (p. 84). En effet, Rosenshine propose d’utiliser des stratégies

d’enseignement correspondant au niveau des élèves (Gauthier et coll., 2013).

Tableau 5 : Les stratégies à privilégier selon le niveau des élèves

ÉLÈVES LENTS ÉLÈVES RAPIDES Plus de révision Moins de révision Présentation moins longue Présentation plus longue Plus de pratique guidée Moins de pratique guidée Plus de pratique autonome Moins de pratique autonome

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Rosenshine, B. (2008). « Systematic Instruction », dans T.L. Good (dir.), 21st Century Education : A Reference Handbook, Newbury Park (CA), Sage Publications, p. 242 (Gauthier et coll., 2013, p. 86).

Un enseignement explicite de la compréhension en lecture implique donc un enseignement

des stratégies de lecture (Bianco, 2014; Falardeau et Gagné, 2012; Giasson, 2011). Une

stratégie est « une opération cognitive ou métacognitive complexe qui permet d’atteindre

un but déterminé à l’aide d’une suite d’actions réalisées de manière consciente ou non »

(Pressley et Harris, 2006, cités dans Falardeau et Gagné, 2012, p. 6).

Il convient de définir les concepts de cognition et de métacognition afin de mieux cerner le

processus de compréhension. Pour Giasson (1990), « la cognition fait référence au

fonctionnement de l’esprit humain et se caractérise par la compréhension, la mémorisation

et le traitement de l’information » (p. 152) et elle définit la métacognition « comme la

capacité de réfléchir sur son propre processus de pensée » (Giasson, 2003, p. 222). Ainsi, la

métacognition est essentielle pour le lecteur qui lit avec le but de comprendre, comme

l’expliquent Gauthier et coll.

La métacognition représente l’habileté à réfléchir sur sa propre pensée, à conscientiser, contrôler et superviser les différents processus utilisés dans le traitement de l’information afin d’en assurer le fonctionnement optimal. Une telle démarche permet à l’individu de prendre conscience de ce qu’il fait, de la façon dont il le fait, et des raisons pour lesquelles il le fait (Gauthier et coll., 2013, p. 53).

Pour Falardeau et Gagné (2012), « la métacognition est la clé de l’action stratégique, car

elle permet de contrôler le processus pour atteindre un objectif de lecture. C’est cette

conscience métacognitive qui permet au lecteur de porter un jugement, d’évaluer sa

performance et de se rendre compte que quelque chose fonctionne ou ne fonctionne pas »

(p. 7).

Ceci dit, l’enseignement des stratégies de lecture est incontournable pour la maitrise de la

compréhension en lecture. Selon Block et Lacina (2008), « l’enseignement des stratégies de

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compréhension aide les élèves à devenir des lecteurs qui sont actifs et en contrôle de leur

propre compréhension en lecture » (cités dans Giasson, 2011, p. 260).

Ci-dessous, nous présentons les stratégies de compréhension en lecture que propose Bianco

(2014).

Tableau 6 : Les stratégies de compréhension en lecture

Stratégies de lecture Descriptions

1. Stratégies de préparation à la lecture.

Visent la préparation d’une attitude de lecture active. Exemples : identifier les objectifs de lecture, explorer les différentes parties du texte, anticiper sur ce qu’on va lire, etc.

2. Stratégies d’interprétation des mots des phrases et des idées du texte.

Elles sont centrées sur le texte et visent la construction d’une base de texte cohérente. Exemples : la relecture, la compréhension des mots difficiles ou inconnus, faire des inférences, etc.

3. Stratégies pour aller au-delà du texte.

Elles connectent les informations lues aux connaissances générales et à l’expérience du lecteur. Permettent de comprendre l’implicite du texte. Exemples : (se) poser des questions (Qui? Quoi? Pourquoi? Comment?...), visualiser et imaginer, utiliser d’autres documents pour comprendre les idées obscures.

4. Stratégies d’organisation, de restructuration et de synthèse.

Organisent dans une structure cohérente l’ensemble des informations lues. Le retraitement des informations afin de consolider la compréhension et l’acquisition des informations essentielles. Exemples : activité de résumé, de synthèse, usage d’organisateurs graphiques et de guides de lecture.

Source : Propositions pour une programmation de l’enseignement de la compréhension en lecture. Conseil supérieur des programmes. www.education.gouv.fr/csp/ (Bianco, 2014, p. 12-13).

Selon Bianco, l’enseignement des stratégies de compréhension a « pour vocation de former

des lecteurs actifs capables d’autoévaluer et d’autoréguler leur compréhension » (2014,

p. 12). Ces stratégies guident les élèves dans leur processus de lecture et au fur et à mesure

que les élèves les maitrisent, ils deviennent autonomes et ils arrivent à mieux comprendre le

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texte qu’ils lisent. Suivant cette même idée, sur le site

http://www.strategieslectureecriture.com/, Falardeau propose plusieurs stratégies de lecture

qui ont pour but d’aider les enseignants à accompagner les élèves du secondaire dans leur

processus de compréhension en lecture, et les élèves peuvent aussi évaluer leur

compréhension à partir de grilles d’évaluation disponibles sur ce site. Nous retrouvons,

entre autres, des stratégies qui permettent à l’élève de planifier sa lecture, de comprendre le

texte, de l’interpréter et d’y réagir. Pour un enseignement efficace de la compréhension, les

stratégies de lecture méritent d’être explicitées par l’enseignant avant leur emploi par les

élèves. Ainsi, l’enseignement de ces stratégies suit la méthode de l’enseignement explicite

que nous avons décrite plus haut dans le texte. Falardeau et Gagné (2012) détaillent

davantage les étapes de l’enseignement explicite en proposant ces six étapes itératives de

l’enseignement de stratégies de lecture. Il consiste : 1) à définir la stratégie et préciser son

utilité; 2) à rendre le processus transparent par le modelage; 3) à guider les élèves (pratique

guidée); 4) à fournir aux élèves des occasions pour pratiquer seuls (pratique autonome); 5)

à faire de la rétroaction et du questionnement; 6) à amener les élèves à se rendre compte de

leur apprentissage (le réinvestissement).

Au final, « la caractéristique essentielle d’un enseignement explicite et structuré de la

compréhension consiste à rendre perceptibles par l’explicitation, les opérations mentales de

la compréhension, inaccessibles à l’observation directe. Il fait appel à la réflexion

consciente de l’élève en centrant son attention sur les difficultés qu’il est susceptible de

rencontrer lorsqu’il est confronté à des textes complexes » (Bianco, 2014, p. 13).

2.2.2. L’enseignement de la compétence lexicale

Par rapport au tableau 6 ci-dessus, nous pouvons constater que les stratégies de

compréhension en lecture impliquent également l’interprétation des mots du texte et la

compréhension des mots difficiles ou inconnus. Avant d’entrer dans les détails, il convient

d’établir les différences entre le vocabulaire et le lexique. Dans le cadre de notre recherche,

nous utiliserons, tantôt le terme lexique, tantôt le terme vocabulaire. Mais ces deux

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concepts sont loin d’être interchangeables. Selon Dubois et Lagane (2001, p. 11) lorsque

nous étudions « les mots et les relations qu’ils ont entre eux », nous étudions le lexique. Le

vocabulaire renvoie aux « mots employés par un individu […] pour exprimer ce qu’il a

besoin d’exprimer dans sa vie courante » (Picoche, 2011, p. 1). « On conviendra d’appeler

lexique l’ensemble des mots qu’une langue met à la disposition des locuteurs, et

vocabulaire l’ensemble des mots utilisés par un locuteur donné dans des circonstances

données » (Picoche, 1992, p. 45). Nous nous intéressons à l’enseignement du lexique

(l’ensemble des mots de la langue française) afin d’aider les élèves de FLE à accroitre leur

compétence lexicale et à comprendre le vocabulaire dans les textes qu’ils lisent.

Il convient de définir « compétence » avant de traiter de « compétence lexicale ». Pour

Dolz et Ollagnier (2002), la notion de compétence « fait partie de ces notions dont les

définitions ne se laissent saisir qu’au travers de l’évolution des courants éducatifs et de

recherche qui en font usage et auxquels il faut faire référence pour éclaircir les divers sens

attribués » (p. 7). Dans leur ouvrage L’énigme de la compétence en éducation, les auteurs

explorent cette notion et montrent à quel point elle est polysémique et continue à susciter

des débats. Cependant, d’autres auteurs apportent quelques définitions acceptables utiles à

notre recherche. Dans le Dictionnaire des termes de l’éducation, on définit les compétences

comme « un ensemble de dispositions, capacités, comportements potentiels (affectifs,

cognitifs et psychomoteurs) qui permettent à un individu d’exercer efficacement une

activité, une tâche, considérée généralement comme complexe » (Bon, 2004, p. 33). On

précise que les compétences comportent le savoir, le savoir-faire et le savoir-être (Bon,

2004). De même, dans le Dictionnaire de l’éducation « la compétence est considérée

comme un savoir (ou un mélange des savoirs) en acte, que n’apporte pas la seule éducation,

mais aussi l’expérience, et qui ne pourra se révéler ou être évalué que dans la pratique du

travail ou, du moins, dans des situations artificielles qui se rapprochent de la pratique du

travail » (van Zanten, 2008, p. 76).

Les définitions des différents dictionnaires spécialisés nous amènent à comprendre que la

compétence est une capacité à utiliser le savoir, le savoir-faire et le savoir-être pour

entreprendre une activité précise. Et la définition trouvée dans le Dictionnaire actuel de

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l’éducation de Legendre (2005) précise notre compréhension du concept : la « capacité à

mobiliser un ensemble intégré de connaissances, d’habiletés, et d’attitudes en vue

d’accomplir une opération, d’exécuter un mouvement, de pratiquer une activité, d’exercer

une fonction d’attentes fixées et de résultats désirés ou en vue de l’accès à des études

ultérieures » (Legendre, 2005, p. 248).

Nous proposons de définir la compétence lexicale comme la capacité à « mobiliser » des

connaissances sur le lexique, des habiletés lexicales et des attitudes lexicales afin

d’accomplir une tâche dans le domaine du lexique. Mais, ce concept qui occupe une partie

importante de notre recherche mérite de plus amples explications. Dans le cadre de sa thèse

doctorale, Tremblay (2009) propose sa propre définition de la compétence lexicale : « un

ensemble de connaissances (lexicales) et d’habiletés (lexicales) qui permettent d’utiliser

efficacement le lexique de la langue (unités lexicales et autres entités lexicales) en situation

de communication linguistique, que ce soit en production ou en réception, à l’oral ou à

l’écrit » (Tremblay, 2009, p. 121). Pour mieux saisir cette définition, il convient de définir

les connaissances lexicales, les habiletés lexicales et les unités lexicales.

Selon le Dictionnaire actuel de l’éducation, « la connaissance est ordinairement évaluée en

fonction de la vérité, tandis que les habiletés sont évaluées en fonction de la qualité

d’exécution. […] En effet, un très grand nombre d’habiletés peuvent être décrites selon la

façon dont on acquiert, organise, utilise et transmet la connaissance » (Legendre, 2005,

p. 275). Les connaissances lexicales sont donc les savoirs ou les vérités que possède un

individu en ce qui concerne les mots d’une langue. Il s’agit de la connaissance des mots, du

sens des mots selon le contexte, de leur fonctionnement, de l’étendue du vocabulaire, entre

autres (David, 2000). Selon Goigoux et Cèbe (2013), « plus le lecteur connait de mots,

mieux il comprend ce qu’il lit; mieux il comprend ce qu’il lit, plus il est capable

d’apprendre de nouveaux mots » (p. 1). Pour les auteurs, la connaissance des mots et de

leur sens est liée à la compréhension. « De la même manière que la connaissance

orthographique accélère leur reconnaissance, donc la vitesse de décodage, les

connaissances lexicales facilitent le processus de compréhension » (Goigoux et Cèbe, 2013,

p. 1). Dans le cas des habiletés lexicales, il s’agit de la capacité à mettre en pratique ses

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connaissances lexicales pour trouver, par exemple, le sens des mots selon le contexte ou

selon la composition des différents mots (la morphologie)28. Les habiletés lexicales

renvoient aux savoir-faire et à l’usage du lexique dans des situations orales

(communicatives) ou écrites.

En ce qui concerne les unités lexicales, Petit (2000) considère « comme unité lexicale toute

séquence qui, à quelque degré que ce soit, entretient une relation stable et récurrente avec

un élément du réel, nécessite un apprentissage et une mémorisation, c’est-à-dire ne présente

pas une signification intégralement accessible par une décomposition du signifiant »

(p. 55). Pour comprendre cette définition, prenons l’explication de Cusin-Berche (1999) qui

associe « unité lexicale » aux « mots » ; pas des mots isolés, mais des mots qui puisent leur

sens au sein d’une phrase. « Conçue isolément, elle (unité lexicale) n’est pas pertinente :

elle ne le devient que dans la phrase qui en fait surgir l’identité » (Cusin-Berche, 1999,

p. 12). Les unités lexicales sont donc « les séquences que l’on considère habituellement

comme relevant de la locution ou de l’expression figée » (Petit, 2000, p. 55). Les mots ou

groupes de mots tels que « grâce à », « parce que », « par exemple », « pouffer », « faire

l’innocent », « en un clin d’œil », entre autres sont tous des unités lexicales, car c’est leur

présence dans une phrase qui crée leur sens ou apporte de la signification à la phrase.

À l’aune de ces définitions, nous pouvons dire que la compétence lexicale est liée aux

connaissances et aux habiletés que possède l’individu concernant les mots d’une langue. Il

s’agit de la capacité à reconnaitre les mots d’une langue et leur sens, et à utiliser

efficacement ces connaissances à l’oral (en situation de communication) et à l’écrit. La

définition de Grossmann (2012) met au point les explications précédentes :

[la compétence lexicale] se fonde sur le fait que le locuteur/récepteur est capable lorsqu’il rencontre une unité lexicale, de lui faire correspondre une représentation, sous la forme d’images mentales, de scénarios ou de scripts et

28 Si un élève rencontre le mot « emprisonner » dans un texte, en ayant des connaissances sur la famille des mots, il retrouvera le mot « prison », et en généralisant sa connaissance sur le fonctionnement des préfixes et des suffixes, il pourra découper le mot : em — (dans/entre), — er (verbe) et prison. Ainsi, il comprendra qu’il s’agit de l’acte de mettre quelqu’un en prison.

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de les intégrer dans le modèle mental en cours d’élaboration. La compétence lexicale s’enrichit par conséquent de l’expérience des sujets, et de l’affinement progressif des catégories appelées les mots (Grosmann, 2012, p. 3).

Holec (1994) précise que la compétence lexicale ne doit pas être définie uniquement sur le

savoir, mais aussi en termes de savoir et de savoir-faire. « Ce que l’apprenant veut, doit

acquérir, c’est la capacité de comprendre, oralement, et/ou à l’écrit, d’utiliser dans ses

productions orales et/ou écrites, de traduire éventuellement, les mots qu’il va rencontrer où

il aura à assumer des rôles discursifs » (Holec, 1994, p. 1). Selon David (2000), « les

connaissances lexicales constituent l’une des composantes les plus importantes de

l’acquisition du langage, sur tous les versants : en compréhension comme en production, à

l’oral comme à l’écrit » (p. 31). Pour les élèves de FLE, il est donc important de recevoir un

enseignement efficace du lexique afin de les aider, d’une part, à comprendre les textes

qu’ils lisent, d’autre part, à développer leur compétence lexicale.

Un mot difficile ou inconnu dans une phrase peut parfois réduire la compréhension du

lecteur. Pour Fayol (2000), « la connaissance du vocabulaire constitue l’une des sources les

plus importantes de difficultés pour la compréhension en lecture » (p. 114). Mais parfois la

méconnaissance d’un mot dans une phrase ou dans un paragraphe ne joue aucun rôle dans

la compréhension du lecteur. Le lecteur peut comprendre le sens de la phrase grâce à

l’utilisation du contexte et cela lui permettra d’avoir une idée du sens du mot inconnu

(Giasson, 1990). De même, les élèves ont besoin d’un enseignement explicite du lexique

afin de savoir comment améliorer leur compréhension du texte lorsque le vocabulaire les

met au défi et lorsque le contexte n’est pas suffisant pour les aider à déchiffrer le sens du

mot.

Giasson (1990, 2011) propose trois interventions pédagogiques qui peuvent faciliter

l’acquisition du vocabulaire : 1) les lectures personnelles en classe ou en dehors de la

classe; 2) l’enseignement des stratégies pour découvrir le sens de mots difficiles ou

inconnus; 3) l’enseignement direct du vocabulaire. Premièrement, en ce qui concerne la

lecture, selon Giasson (2011), « il existe une corrélation positive entre la fréquence des

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lectures et l’augmentation du vocabulaire » (p. 316). Le contact avec les livres permet à

l’élève de découvrir et de connaitre de nouveaux mots. Cependant, cette méthode

d’acquisition du lexique n’est pas sans défaut. Fayol (2000) souligne que nous ne pouvons

pas attester la compétence lexicale des individus par rapport aux lectures personnelles. « La

relation entre la quantité de lectures et la réussite scolaire n’est toutefois pas aussi

systématique qu’on pourrait le penser : tous les “bons” élèves ne sont pas des lecteurs

assidus, et certains élèves faibles lisent beaucoup » (Fayol, 2000, p. 124). Ainsi, la lecture

mérite d’être accompagnée d’un enseignement stratégique afin de garantir un apprentissage

à long terme.

La deuxième intervention pédagogique que propose Giasson consiste en un enseignement

des stratégies de lecture afin d’aider les élèves à comprendre le sens de mots. Cette

méthode s’avère essentielle pour consolider la lecture. Le but de l’enseignement des

stratégies d’apprentissage du vocabulaire est de rendre les élèves plus autonomes et de les

préparer à faire face à différentes situations de lecture où ils rencontreront des mots

inconnus ou difficiles à comprendre (Giasson, 2011). Ces stratégies comportent

essentiellement trois volets : 1) l’usage des indices du contexte pour connaitre le sens des

mots; 2) l’analyse morphologique du mot (affixes et racines); 3) l’usage du dictionnaire ou

d’autres ouvrages de référence (Giasson, 2011). Comme le disent bien Camenish et Petit

(2014) « c’est tantôt le contexte, tantôt l’analyse morphologique, tantôt l’analyse

sémantique qui contribuent à comprendre le sens d’un mot » (p. 9).

Dans cette même optique, Falardeau formule des stratégies liées au lexique dans la grille

d’évaluation de la compétence à lire et à apprécier des textes variés.

1. Je me suis assuré de comprendre les mots difficiles (en analysant la

composition du mot, le contexte de la phrase, en trouvant un terme

équivalent, en utilisant le dictionnaire, etc.).

2. Je me suis assuré de comprendre les passages difficiles (en arrêtant ma

lecture quand je ne comprenais pas pour analyser les groupes de mots,

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53

chercher les référents des pronoms, vérifier le sens des marqueurs de

relation, revenir en arrière, résumer le contenu d’un paragraphe, etc.).

C’est le rôle de l’enseignant d’enseigner ces stratégies aux élèves d’une manière explicite

afin que ces derniers puissent les utiliser pendant la lecture. En maitrisant ces stratégies, les

élèves sont capables de comprendre et de déchiffrer le sens des mots dans un texte et, par la

suite, cela peut améliorer leur compréhension du texte.

La troisième intervention pédagogique que propose Giasson est l’enseignement des mots

nouveaux. Il s’agit d’une part, d’un enseignement direct où l’enseignant choisit quels mots

qu’il juge pertinents d’enseigner à sa classe (Giasson, 2011). Les mots peuvent être des

mots usuels que les élèves utilisent fréquemment dans des interactions, des mots qui font

partie du domaine scolaire et des mots liés à un domaine particulier (science, géographie,

informatique, etc.). D’autre part, on peut enseigner directement des mots choisis par les

élèves eux-mêmes (Giasson, 2011). Cependant, il ne s’agit pas d’enseigner des listes de

mots sans donner l’occasion aux élèves de s’en servir correctement en contexte. Giasson

propose à l’enseignant de donner aux élèves « de nombreuses occasions de lier les mots

nouveaux aux mots connus, d’en analyser la structure, d’en découvrir les différents sens et

de les utiliser activement dans des situations authentiques » (Giasson, 2011, p. 329). Pour

leur part, Camenish et Petit (2014) proposent l’apprentissage des mots nouveaux « en

contextes disciplinaires » (p. 3). L’objectif est d’aider les élèves à comprendre les mots et

les concepts des différentes disciplines scolaires comme les sciences, l’histoire, la

géographie, entre autres. L’enseignement vise « à la fois l’acquisition d’un vocabulaire

spécifique fortement lié à la compréhension des concepts et le développement de stratégies

cognitives que les élèves peuvent, à terme, transférer à d’autres domaines et à d’autres

mots » (Camenish et Petit, 2014, p. 3).

Par rapport à notre recherche, nous nous intéressons à l’enseignement du lexique lié à la

lecture d’un texte littéraire. Nous pensons que les textes littéraires peuvent présenter des

exemples de mots et d’expressions qui peuvent faire l’objet d’un enseignement spécifique

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du lexique. Serafini (2008) admet que « l’enseignement du vocabulaire en dehors du

contexte de la lecture s’est révélé peu efficace » (p. 72). Selon l’auteur « pour que les

lecteurs débutants enrichissent leur vocabulaire, nous devons les aider à prêter attention à la

langue et à chercher la signification des mots qu’ils ne connaissent pas ou ne comprennent

pas » (Serafini, 2008, p. 72). En bref, nous favorisons l’articulation de la lecture et de

l’étude du lexique.

2.3. L’articulation entre la lecture et le lexique pour faciliter la compréhension

Dans le cadre de notre recherche, nous nous intéressons à l’articulation de la lecture d’un

album de jeunesse à l’étude du lexique afin d’aider les élèves de FLE de la première année

du secondaire à mieux comprendre le texte. Nous sommes d’avis qu’une telle articulation

est favorable pour une bonne compréhension en lecture. D’une part, les élèves développent

des compétences en lecture, d’autre part, ils développent leur compétence lexicale. En effet,

plusieurs études recommandent une étude du lexique au sein de l’activité de lecture (Cuq et

Gruca, 2005; Fayol, 2000; Giasson, 1990, 2011; Serafini, 2008). Cependant, le mot

« articulation » dans notre texte est sujet à discussion. D’une façon très simple, nous

comprenons que l’articulation est une manière d’unir deux ou plusieurs éléments dans un

même contexte (d’enseignement). Mais plusieurs écrits (Bilodeau, 2009; Bon, 2004;

Chartrand et Boivin, 2005; Sabbah, 2006) qui abordent l’idée d’établir des liens entre les

différents contenus d’enseignement utilisent tantôt le terme d’articulation, tantôt le terme de

décloisonnement dans leurs explications et parfois même le terme d’intégration. Il nous a

semblé judicieux de définir ces différents termes et de produire notre propre définition du

concept d’articulation dans le cadre de cette recherche.

Dans le Dictionnaire actuel de l’éducation, l’intégration est définie comme l’« action

d’associer différents objets d’études, d’un même domaine ou de divers domaines, dans une

même planification d’enseignement-apprentissage » (Legendre, 2005, p. 784). Dans le

même ouvrage, le décloisonnement est décrit comme une « opération qui consiste à

éliminer les barrières traditionnelles qui fragmentent et divisent artificiellement et

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arbitrairement les contenus scolaires » (Legendre, 2005, p. 349). Cependant, il est précisé

dans l’ouvrage que l’élimination des barrières dans le décloisonnement ne signifie pas une

interaction entre les contenus scolaires (Legendre, 2005). Le décloisonnement est en fait un

« principe pédagogique qui recommande d’étudier les différentes composantes d’un savoir

autour d’un objectif commun » (Bon, 2004, p. 39). Les définitions de deux termes ne

reflètent pas complètement notre objectif de recherche, car elles n’abordent pas l’idée

d’établir des liens et de favoriser des interactions entre les différents contenus

d’enseignement.

En ce qui concerne le concept d’articulation, Chartrand (2005) précise qu’« il

s’agit d’établir des relations, des liens, des jonctions entre les activités grammaticales et les

pratiques discursives, sans toutefois intégrer tout le travail grammatical aux pratiques

discursives » (p. 23). Elle évoque la création des liens entre les activités qui développent les

habiletés discursives des élèves, telles que la lecture, l’écriture, l’oral, et des activités de

grammaire, et qui permettent de développer les compétences langagières des élèves

(Chartrand et Boivin, 2005). Cette définition de la notion fait écho à la définition de

Legendre (2005) : « modèle d’organisation et d’enchainement des éléments du discours oral

ou écrit » (p. 130). Chartrand et Boivin (2005) expliquent davantage la notion d’articulation

dans la définition ci-dessous :

Cette orientation institutionnelle visant à intégrer les activités de grammaire aux activités de lecture et d’écriture dans les classes de français fait partie du mouvement de recomposition de la discipline français qui tend vers une moins grande compartimentation de ses objets d’enseignement traditionnel que sont la lecture, l’écriture, la récitation, l’élocution, la grammaire, le vocabulaire, la littérature, etc. (Chartrand et Boivin, 2005, p. 1).

Elles font ressortir que l’articulation vise l’intégration des activités grammaticales aux

activités de lecture et d’écriture dans les classes de français. L’usage du terme « intégrer »

dans les définitions de Chartrand (2005), et de Chartrand et Boivin (2005) peut prêter à

confusion, car il s’agit aussi d’un terme utilisé dans le domaine de l’enseignement pour

définir le fait de « conjuguer deux ou plusieurs contenus interdépendants d’apprentissage,

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appartenant à la même discipline ou à des disciplines différentes, en vue de résoudre un

problème » (Legendre, 2005, p. 787). Cependant, l’usage du mot « intégrer » nous mène à

une meilleure compréhension du terme de l’articulation par rapport à notre objectif de

recherche. En effet, Chartrand et Boivin (2005) expliquent que plusieurs programmes

d’études en français dans différents pays ou régions francophones (France, Belgique,

Suisse, Québec) « prescrivent un enseignement grammatical intimement lié, voire intégré

aux activités qui visent le développement des habiletés discursives des élèves (lire, écrire,

parler, écouter) » (Chartrand et Boivin, 2005, p. 1). Pour elles, les termes décloisonnement,

intégration et articulation sont des mots importants à utiliser pour décrire cette façon

d’enseigner (Chartrand et Boivin, 2005). Or, dans un article paru en 2009, Bilodeau en

collaboration avec Chartrand utilise le terme décloisonnement comme étant le synonyme de

l’articulation. Pour Bilodeau, le décloisonnement est une « orientation didactique »

permettant « que le travail en grammaire (au sens large du terme), en lecture, en écriture et

en communication orale soit articulé dans un même projet, une même activité ou une même

séquence d’enseignement afin que les élèves perçoivent les relations entre ces

apprentissages et le développement de leurs capacités langagières » (Bilodeau, 2009, p. 79).

Dans le cadre de notre recherche, nous utilisons le terme articulation, mais nous ne

méprisons pas les termes décloisonnement et intégration. Nous pensons que les trois termes

sont liés et aident à mieux définir ce « modèle d’organisation » (Legendre, 2005) des

activités grammaticales et discursives. Alors que l’intégration fait référence à l’inclusion

des différents types d’activités dans les classes de français et que le décloisonnement vise à

supprimer les barrières qui existent entre les activités grammaticales et les activités de

lecture et d’écriture, l’articulation fournit une étape de plus en tissant des liens entre ces

différentes activités. Pour notre recherche de maitrise, nous adoptons la définition de

l’articulation de Chartrand (2005) :

Il s’agit d’établir des relations, des liens, des jonctions entre les activités grammaticales et les pratiques discursives, sans toutefois intégrer tout le travail grammatical aux pratiques discursives. L’enseignement-apprentissage de la grammaire n’est pas instrumentalisé. Autrement dit, il n’a pas seul objectif de fournir des aides momentanés à la résolution des problèmes de lecture ou

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d’écriture. Il est conçu comme une condition essentielle de développement des capacités discursives (Chartrand, 2005, p. 23).

En nous référant à notre objet de recherche, nous définissons donc l’articulation comme une

orientation didactique qui vise non seulement l’inclusion des activités grammaticales et des

activités discursives au sein d’une même séquence d’enseignement, mais aussi l’interaction

entre les activités de grammaire, par exemple le lexique, et les activités de lecture dans le

but de développer les compétences langagières des élèves.

Ainsi, une articulation entre la lecture d’un album de jeunesse et l’étude du lexique

comprend un enseignement des stratégies de lecture qui implique la compréhension du

texte dans son intégralité : le texte et le lexique. Il ne s’agit pas d’enseigner le lexique en

dehors de la lecture du texte : l’enseignement du lexique est articulé à l’enseignement de la

compréhension en lecture. En écrivant sur les lecteurs allophones, Giasson (2011) souligne

l’importance d’encourager la lecture chez ces élèves et de favoriser des livres illustrés ou

des albums en ce qui concerne l’enseignement du vocabulaire. Piotrowska-Skrzypek (2010)

propose de travailler différents domaines de la langue française, tel que le vocabulaire, lors

de l’exploitation d’un album de jeunesse. Afin d’enrichir la compréhension des élèves, il

est pertinent de travailler sur les éléments du texte, notamment le lexique.

De ce fait, une articulation entre la lecture et le lexique implique la mise en œuvre des

stratégies de lecture et des stratégies d’apprentissage du lexique pendant l’exploitation du

texte littéraire. Camenish et Petit (2014) soulignent que « les nouvelles perspectives de la

didactique du lexique se situent dans la combinaison des deux approches, avec un

apprentissage explicite et structuré de notions lexicales combiné avec des acquisitions de

vocabulaire au fil des projets de lecture et d’écriture et des apprentissages disciplinaires »

(p. 2). Pour les auteurs, l’enseignement du lexique dans le contexte de la lecture des textes

littéraires contribue à une meilleure compréhension (Camenish et Petit, 2014).

Page 68: La littérature de jeunesse en classe de FLE aux Seychelles ...€¦ · L’élaboration d’une séquence didactique pour l’enseignement de la compréhension en lecture et du lexique

58

Cette recension des écrits autour des concepts et des idées clés de notre recherche avait

pour objectif de nous permettre de faire état des avancées quant à l’enseignement de la

compréhension en lecture. Nous avons pu démontrer que la démarche de l’enseignement

explicite favorise une bonne compréhension en lecture chez les élèves et permet un

apprentissage durable des contenus. De plus, l’enseignement de stratégies de lecture permet

l’apprentissage et l’acquisition du lexique au fur et à mesure que les élèves développent des

compétences en lecture.

Page 69: La littérature de jeunesse en classe de FLE aux Seychelles ...€¦ · L’élaboration d’une séquence didactique pour l’enseignement de la compréhension en lecture et du lexique

59

3. LE CADRE MÉTHODOLOGIQUE

Ce chapitre décrit les démarches méthodologiques que nous avons suivies afin de répondre

à nos questions de recherche et d’atteindre notre objectif de recherche. Notre recherche

s’inscrit dans le cadre des recherches de développement, mais sans expérimentation ou

mise à l’essai. Nous produisons un matériel didactique, une séquence didactique, articulant

l’étude du lexique et la lecture d’un album de littérature de jeunesse selon la démarche de

l’enseignement explicite.

Dans ce chapitre, nous décrivons la recherche de développement et nous justifions sa

pertinence au sein du domaine de recherche en didactique. Deuxièmement, nous expliquons

pourquoi il n’est pas possible de faire une mise à l’essai de notre matériel didactique.

Finalement, nous justifions notre choix de produire une séquence didactique dans le cadre

de notre recherche.

3.1. La recherche de développement

Comme nous l’avons mentionné, notre recherche s’inspire de la recherche de

développement. Selon Thouin (2014), « la recherche de développement consiste à

concevoir, à mettre à l’essai et à améliorer une séquence didactique, un manuel scolaire, un

didacticiel, une méthode d’enseignement, un programme d’études, un test ou tout autre

matériel didactique au sens large du terme » (p. 74-75). Selon Van der Maren (2004), la

recherche de développement peut prendre trois formes : « le développement de concept, le

développement d’objet ou d’outil et le développement ou perfectionnement d’habiletés

personnelles en tant qu’outils professionnels » (p. 179). Dans le cadre de notre recherche,

nous nous intéressons au développement d’un dispositif didactique, à travers une séquence

d’enseignement.

Page 70: La littérature de jeunesse en classe de FLE aux Seychelles ...€¦ · L’élaboration d’une séquence didactique pour l’enseignement de la compréhension en lecture et du lexique

60

3.1.1. La pertinence de la recherche de développement

Nous choisissons de mener une recherche de développement, car elle s’inscrit bien dans

notre visée de recherche dans le domaine de la didactique du français langue étrangère.

Après une analyse de l’état de l’enseignement du français aux Seychelles, nous sommes

venues à la conclusion qu’il convenait de mettre l’accent davantage sur le développement

de la compétence en lecture et d’introduire un nouveau corpus (l’album de jeunesse) dans

l’enseignement du FLE. Les données recensées en ce qui concerne l’enseignement de la

compréhension en lecture nous ont fait découvrir une approche pédagogique

(l’enseignement explicite) qui a été peu documentée dans le domaine de FLE,

particulièrement dans le contexte seychellois.

Comme la recherche de développement permet au chercheur ou à l’enseignant de mettre au

point du matériel didactique qui relève d’un besoin ressenti et expérimenté par le chercheur

ou l’enseignant, et qu’il s’agit d’une démarche visant « la solution de problèmes formulés à

partir de la pratique quotidienne en utilisant diverses théories élaborées par la recherche »

(Van Der Maren, 2004, p. 179), nous jugeons pertinent de développer une séquence

didactique mettant en pratique la démarche de l’enseignement explicite dans

l’enseignement de la compréhension en lecture et du lexique aux élèves de la première

année du secondaire des Seychelles.

3.1.2. Les étapes du développement d’objet de la recherche de développement

Pour le développement d’un objet didactique dans le cadre d’une recherche de

développement, nous suivons quatre étapes (Van der Maren, 2003, 2004).

1. L’analyse de la demande (l’observation d’une lacune ou un besoin et des réponses aux

questions qui, quoi, avec qui, dans quel contexte, à propos de quoi, selon quelles

procédures, etc.);

Page 71: La littérature de jeunesse en classe de FLE aux Seychelles ...€¦ · L’élaboration d’une séquence didactique pour l’enseignement de la compréhension en lecture et du lexique

61

Pour notre recherche, nous avons commencé par une analyse de la situation de

l’enseignement du français dans les écoles de l’État aux Seychelles que nous avons

présentée dans le premier chapitre. Ensuite, nous avons recherché et analysé les

connaissances disponibles relatives à notre objectif de recherche dans le cadre d’une

recension d’écrits que nous avons présentée dans le cadre théorique et conceptuel.

2. La conception de l’objet (la phase théorique – revue de littérature, la préparation du

contenu);

Dans le cadre de cette deuxième étape de la recherche de développement, nous avons

emprunté, en partie, quelques techniques de la recherche documentaire. Selon Piolat

(2002), la recherche documentaire sollicite l’utilisation des « techniques qui permettent de

sélectionner l’information dans un fonds documentaire structuré, en fonction de critères et

d’objectifs » (p. 11). Grâce à une recherche documentaire, nous avons pu faire état de la

question en ce qui concerne les concepts et les idées clés de notre recherche. Nous avons

fait une recension d’écrits en ce qui concerne l’enseignement de la compréhension en

lecture et l’enseignement du lexique, particulièrement dans le domaine de FLE. Cette

recension d’écrits nous a permis d’identifier et d’étudier efficacement les documents dont

nous avions besoin pour la réalisation de notre recherche.

Dans le souci de collecter et d’étudier les informations concernant l’enseignement efficace

de la compréhension en lecture et du lexique, nous avons exploré des documents relevant

du domaine de la didactique du français. Notre but était d’obtenir le plus d’informations

possibles dans le domaine de la didactique du français langue étrangère, mais nous avons

aussi collecté des données du domaine de la didactique du français langue première. Il nous

a paru que peu de recherches avaient été effectuées dans le domaine de la didactique de

FLE en ce qui concerne la compréhension en lecture. En conséquence, cette situation nous

a poussée à explorer beaucoup plus de documents et à élargir nos recherches.

Page 72: La littérature de jeunesse en classe de FLE aux Seychelles ...€¦ · L’élaboration d’une séquence didactique pour l’enseignement de la compréhension en lecture et du lexique

62

Ainsi, notre corpus est constitué principalement d’ouvrages scientifiques, d’articles de

périodiques, d’actes de colloques et de thèses. Pour effectuer la recherche des documents

mentionnés, nous avons utilisé particulièrement les ressources mises à notre disposition par

l’Université Laval, notamment les catalogues de la bibliothèque et les bases de données

Cairn et Érudit. Nous avons aussi eu recours à quelques portails scientifiques ou

spécialisés, tels que le portail sur les stratégies en lecture, le portail sur l’enseignement

explicite et le portail sur l’enseignement de la littérature.

Les différents documents que nous avons consultés ont été recensés dans une fiche de

lecture. Cette dernière nous a permis d’organiser les données recueillies selon les concepts

et les idées clés de notre recherche. Le tableau 7 présente le modèle de fiche de lecture que

nous avons utilisé.

Tableau 7 : Fiche de lecture (d’après Marion Sauvaire29).

Auteur (s) :

Titre :

Année :

Éditeurs :

Revue :

Mots clés :

Thèse défendue/idée principale :

Lu le :

Notes de lecture :

………………………………………………………………………………………………

………………………………………………………………………………………………...

29 Professeure adjointe du département d’études sur l’enseignement et l’apprentissage, Faculté des sciences de l’éducation, Université Laval.

Page 73: La littérature de jeunesse en classe de FLE aux Seychelles ...€¦ · L’élaboration d’une séquence didactique pour l’enseignement de la compréhension en lecture et du lexique

63

Cette méthode d’organisation des données nous a permis de rassembler les idées clés

relevant de nos questions et de notre objectif de recherche, et de créer des notes de lecture

que nous avons utilisées lors de la rédaction de notre cadre théorique et conceptuel.

L’identification des mots clés et de l’idée principale de chaque document consulté facilitait

notre démarche en ce qui concerne la sélection et l’interprétation des données recueillies.

De plus, la fiche de lecture agissait comme une base de référence pour notre recherche.

Nous l’avons utilisée comme un répertoire des concepts de notre recherche qui nous a

aidées à repérer les ouvrages, les documents, les auteurs ou les revues qui font partie de

notre recherche.

En respectant le principe de la recherche documentaire, dans le cadre de cette deuxième

étape de notre recherche de développement, nous présentons les principaux documents que

nous avons consultés.

Les ouvrages scientifiques

Nous avons consulté et exploré plusieurs ouvrages scientifiques datant des années 90 à nos

jours. Il s’agit des dictionnaires spécialisés, des ouvrages didactiques, des œuvres abordant

un thème spécifique, entre autres. Pour rechercher ces ouvrages, nous avons retenu les idées

clés de notre recherche, notamment la lecture, la compréhension en lecture, la littérature de

jeunesse, l’album de jeunesse, la compétence lexicale et l’enseignement explicite. Nous

avons aussi choisi des ouvrages en rapport avec notre champ de recherche, la didactique du

français langue étrangère. Notons que les ouvrages de la Canadienne Jocelyne Giasson

dominent une grande partie notre liste des documents consultés. Ces écrits sur la lecture et

les rôles des textes littéraires nous ont beaucoup aidée dans la réalisation de notre

recherche. Bien que la majorité de ces ouvrages abordent le domaine de français langue

maternelle, certains documents explorent aussi l’apprentissage de la lecture et l’acquisition

du vocabulaire par les élèves allophones (Giasson, 1990, 2011). Nous avons consulté quatre

ouvrages de Giasson et plusieurs éditions de ces ouvrages. Nous avons aussi exploré deux

ouvrages de Poslaniec (1992, 2004) qui aborde les domaines de la lecture et de la littérature

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en France en particulier. Au total, nous avons consulté plus de vingt-quatre ouvrages

scientifiques. Le tableau ci-dessous résume les ouvrages scientifiques consultés.

Tableau 8 : Les ouvrages scientifiques consultés

Ouvrages Ressources utilisées pour la recherche

Domaine de recherche

Idées clés de la recherche

1. Giasson (2000, 2005, 2014). Les textes littéraires à l’école.

2. Giasson (1990). La compréhension en lecture. 3. Giasson (2003. La lecture : de la théorie à la

pratique. 4. Giasson (2011). La lecture : apprentissages et

difficultés. 5. Poslaniec (1992). De la lecture à la

littérature. 6. Poslaniec (2004). Donner le gout de lire. 7. Gauthier et coll. (2013). Enseignement

explicite et réussite des élèves : la gestion des apprentissages.

8. Fayol (2000). Maitriser la lecture. 9. Aron et coll. (2002). Le dictionnaire du

littéraire. 10. Van der Linden (2007). Lire l’album. 11. Cuq et Gruca (2005). Cours de didactique du

français langue étrangère et seconde. 12. Picoche (1992). Précis de lexicologie

française. 13. Legendre (2005). Dictionnaire actuel de

l’éducation. 14. Van Zanten (2008). Dictionnaire de

l’éducation. 15. Bon (2004). Dictionnaire des termes de

l’éducation. 16. Boutevin et Richard-Principalli (2008).

Dictionnaire de la littérature de jeunesse. 17. Chaudenson (2007). Français et créoles : du

partenariat à des didactiques adaptées. 18. Dolz et coll. (2001). S’exprimer en français :

séquences didactiques pour l’oral et pour l’écrit.

19. Garcia-Debanc et coll. (2013). Enseigner le lexique.

Les catalogues de la bibliothèque de l’Université Laval

La didactique du français;

L’enseignement de la littérature;

L’enseignement du lexique;

L’enseignement de la lecture.

La littérature de jeunesse;

La lecture et la compréhension en lecture;

L’enseignement explicite;

La lecture de l’album de jeunesse;

La recherche de développement.

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65

20. Rosier (2002). La didactique du français. 21. Tsimbidy (2008). Enseigner la littérature de

jeunesse. 22. Sabbah (2006). Travailler en séquence au

lycée en français. 23. Thouin (2014). Réaliser une recherche en

didactique. 24. Van der Maren (2004). Méthodes de

recherche pour l’éducation.

Les articles de périodiques

Nous aurions aimé pouvoir dire que nous avons suivi une démarche spécifique en ce qui

concerne la recherche de nos articles. Au contraire, au lieu d’effectuer nos recherches à

partir des périodiques spécifiques, nous avons utilisé principalement les bases de données,

Cairn et Érudit, pour rechercher des articles relatifs aux idées clés de notre recherche. Or,

en suivant ce mode de recherche, nous sommes tombée la plupart du temps sur deux

principaux périodiques : Québec français et Le français aujourd’hui. Les articles consultés

dans ces deux périodiques abordent les thèmes du lexique et de l’enseignement du français

en général. Ce sont des articles écrits entre 1994 et 2015. Pour notre recherche, nous avons

retenu trois articles de Québec français et quatre articles dans Le français aujourd’hui.

Nous avons pris plus de temps pour trouver des périodiques ou articles qui traitent de ce

sujet en FLE. De même, à travers le moteur de recherche Google, nous avons pu obtenir

quelques périodiques qui nous ont été utiles, notamment, Le langage et l’homme et

CADifleSLAVES30. Au total, nous avons consulté une dizaine de périodiques que nous

présentons dans le tableau ci-dessous.

30 La revue didactique de FLE dans les pays slaves.

Page 76: La littérature de jeunesse en classe de FLE aux Seychelles ...€¦ · L’élaboration d’une séquence didactique pour l’enseignement de la compréhension en lecture et du lexique

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Tableau 9 : Les périodiques consultés

Périodiques Numéros consultés Les articles retenus (pages dans la revue)

1. Québec français

Numéro 92 (1994)

Numéro 1593 (2009)

Numéro 163 (2011)

p. 28-33

p. 79-81

p. 68-69 2. Le français aujourd’hui

Numéro 131 (2000)

Numéro 133 (2001)

Numéro 149 (2005)

p. 31-40 et p 53-62

p. 68-69

p. 55-63 3. CADifleSLAVES

Volume 2, numéro 1 (2010) p. 3-10 4. Le langage et l’homme

Volume 43, numéro 1 (2008) p. 15-29 5. Educational leadership

Numéro 43 (1986) p. 60-69 6. Développements

Numéro 11 (2012) p. 25-35 7. Revue des sciences de

l’éducation Volume 24, numéro 3 (1998) p. 487-514 8. Linx

Numéro 40 (1999) p. 1-15 9. Dossiers de veille de

l’IFÉ Numéro 101 (2015) p. 1-28 10. Revue française de

pédagogie Numéro 149 (2004) p. 29-36

Les actes de colloque

Au cours de notre recherche documentaire, nous avons aussi découvert des écrits relatifs à

nos thèmes de recherche dans des actes de colloques publiés. Nous avons obtenu des

données utiles concernant l’enseignement de FLE à travers deux actes de colloques du

Département de Langue et Littérature françaises de l’Université d’Athènes. Nous

présentons dans le tableau suivant les actes de colloques que nous avons utilisés dans le

cadre de notre recherche.

Page 77: La littérature de jeunesse en classe de FLE aux Seychelles ...€¦ · L’élaboration d’une séquence didactique pour l’enseignement de la compréhension en lecture et du lexique

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Tableau 10 : Les actes de colloque

Titre de l’acte Auteurs et année

Texte retenu Ressource utilisée

Idées principales

1. Enseigner le français langue étrangère à l’école primaire : méthodes et pratiques.

Université d’Athènes. Acte de la journée d’étude du 21 octobre 2006.

Anastassiadi, Introduire la littérature de jeunesse dans une classe de FLE du primaire. (p. 123-136).

Moteur de recherche GOOGLE.

L’enseignement de FLE;

La littérature de jeunesse en classe de FLE.

2. La place de la littérature dans l’enseignement du FLE.

Université d’Athènes. Actes du colloque international des 4 et 5 juin 2009.

Anastassiadi, Littérature de jeunesse : une littérature à part entière exploitable en classe de FLE. (p. 235-248).

Moteur de recherche GOOGLE.

L’enseignement de FLE;

La littérature de jeunesse en classe de FLE;

L’album de jeunesse.

3. Le français : discipline singulière, plurielle ou transversale?

Falardeau, 2005. Actes du 9e colloque de l’AIRDF.

Chartrand et Boivin, Articulation des activités métalinguistiques aux activités discursives dans la classe de français au secondaire inférieur.

Moteur de recherche GOOGLE.

Le concept d’articulation;

L’enseignement du français.

4. Perspectives actuelles de l’enseignement du Français.

Ministère de l’Éducation nationale, Paris les 23, 24 et 25 octobre 2000.

Tauveron, Littérature de jeunesse ou nouvelle jeunesse pour la littérature et son enseignement.

Moteur de recherche GOOGLE.

La lecture;

La littérature de jeunesse.

L’enseignement de la littérature de jeunesse.

Page 78: La littérature de jeunesse en classe de FLE aux Seychelles ...€¦ · L’élaboration d’une séquence didactique pour l’enseignement de la compréhension en lecture et du lexique

68

Autres sources

Nous présentons dans le tableau ci-dessous les autres documents que nous avons explorés

et qui nous ont permis d’avancer dans notre recherche. Il s’agit, entre autres, des thèses de

doctorat, des portails que nous avons consultés en ligne et aussi des sites internet

spécifiques abordant les thèmes de notre recherche.

Tableau 11 : Les diverses sources consultées

Type de document

Auteur Titre Textes retenus (s’il y a lieu)

1. Site internet (le site de la pédagogie explicite)

Bernard et Françoise Appy.

www.formapex.com

• Appy, B. (2013a). Bref historique du courant de la Pédagogie Explicite.

• Appy, F. (2013b). Enseignement explicite et l’enseignement traditionnel.

• Bianco, M. (2011). Pourquoi un enseignement explicite de la compréhension des écrits.

• Gauthier, C., Bissonnette, S. et

Richard, M. (2007). L’enseignement explicite.

• Rosenshine, B. (2010).

Principes d’enseignement.

2. Portail pour l’enseignement du français.

S.O. http://www.enseignementdufrancais.fse.ulaval.ca/

Chartrand, S.-G. (2005). L’apport de la didactique aux capacités d’écriture des élèves.

3. Portail pour l’enseignement de la littérature.

S.O. http://www.portail-litterature.fse.ulaval.ca/

(Consultation des exemples de séquences didactiques).

4. Site en ligne sur l’enseignement des stratégies en

Érick Falardeau. Stratégies de lecture et d’écriture : recherche et

Les stratégies de lecture pour les élèves de la première année du secondaire.

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69

lecture. enseignement.

http://www.strategieslectureecriture.com/

5. Le programme de français des Seychelles.

Le ministère de l’Éducation des Seychelles (2001).

Le français Curriculum National.

6. Document PDF obtenu en ligne.

Conseil de l’Europe.

Cadre Européen Commun de référence pour les langues. https://www.coe.int/t/dg4/linguistic/Source/Framework_FR.pdf

7. Thèse de doctorat.

Hoareau, M.-R. (2010).

Langues en contact en milieu insulaire. Le trilinguisme seychellois : créole, anglais, français.

8. Thèse de doctorat.

Tremblay, O. (2009).

Une ontologie des savoirs lexicologiques pour l’élaboration d’un module de cours en didactique du lexique.

9. Thèse de doctorat.

Turgeon, E. (2013).

Développement et mise à l’essai d’un outil pour analyser des albums jeunesse afin d’élaborer un répertoire d’œuvres québécoises propices au travail interprétatif.

10. Mémoire de maitrise.

Gauvin-Fiset, L.-M. (2012).

Articuler l’enseignement de la langue à l’enseignement de la littérature au secondaire québécois : proposition d’un modèle d’articulation et pistes pour la classe.

3. La préparation technique et la construction du prototype (construction de la

séquence didactique par exemple, organisation des différentes étapes selon l’approche

de l’enseignement explicite);

4. La mise au point et la diffusion (la phase d’expérimentation de la séquence didactique

– une mise à l’essai au sein de la classe).

À la fin, nous avons développé notre séquence didactique. Mais, contrairement aux

prescriptions de Van Der Maren et d’autres théoriciens de la recherche de développement,

Page 80: La littérature de jeunesse en classe de FLE aux Seychelles ...€¦ · L’élaboration d’une séquence didactique pour l’enseignement de la compréhension en lecture et du lexique

70

nous n’effectuerons pas la dernière étape de la recherche, c’est-à-dire la mise au point et la

diffusion.

En tant que chercheur, il s’avère nécessaire d’étudier les limites de sa recherche. Dans notre

cas précis, nous constatons que le temps, les ressources et les moyens financiers font partie

des contraintes à surmonter. Il nous semble impossible de pouvoir mettre à l’essai notre

séquence didactique dans une classe de la première année du secondaire aux Seychelles à

l’intérieur de deux années d’études de maitrise. Par ailleurs, il s’agit d’introduire d’une part,

une toute nouvelle approche pédagogique (l’enseignement explicite) dans le contexte de

l’enseignement du français aux Seychelles. D’autre part, nous voulons développer des

compétences (compréhension en lecture et compétence lexicale) chez les élèves et

introduire l’enseignement de la littérature de jeunesse qui jusqu’à maintenant ne fait pas

partie du programme de français aux Seychelles. Ainsi, nous choisissons de nous

concentrer sur la justification théorique et l’élaboration didactique de la séquence.

Dans le cadre d’un mémoire de maitrise, nous pensons que le développement d’une

séquence didactique, sans expérimentation, est suffisant pour réaliser notre objectif de

recherche et de proposer une amélioration en ce qui concerne l’enseignement du français

aux Seychelles. De plus, à la fin de la présentation de chaque séance de notre séquence,

nous justifions et nous discutons de nos choix d’activités et de leur pertinence, et nous

explicitons les liens entre notre objectif de recherche et notre séquence. Nous espérons

aussi, dans le futur, pouvoir faire une recherche approfondie incluant une expérimentation

dans le cadre d’une recherche doctorale.

De ce fait, la séquence didactique est un aspect très important de notre recherche et dans la

prochaine partie, nous justifierons davantage pourquoi elle constitue le matériel didactique

à privilégier.

Page 81: La littérature de jeunesse en classe de FLE aux Seychelles ...€¦ · L’élaboration d’une séquence didactique pour l’enseignement de la compréhension en lecture et du lexique

71

3.2. La conception de la séquence didactique

La production d’un matériel didactique constitue une étape importante de la recherche de

développement. Mais, avant d’aborder la pertinence de la séquence didactique, il convient

d’expliciter le processus qui nous a permis de passer de la phase théorique de notre

recherche à la production de notre séquence didactique : la transposition didactique.

3.2.1. La transposition didactique

La transposition didactique est une notion introduite par le sociologue Michel Verret. Yves

Chevallard, didacticien des mathématiques, l’a formalisée dans le champ des didactiques

(Reuter, Cohen-Azria, Daunay, Delcambre et Lahanier-Reuter, 2013).

Un contenu de savoir ayant été désigné comme savoir à enseigner subit […] un ensemble de transformations adaptatives qui vont le rendre apte à prendre sa place parmi les objets d’enseignement. Le « travail » qui d’un objet de savoir à enseigner fait un objet d’enseignement est appelé la transposition didactique (Chevallard, 1985/1991, p. 39, cité dans Reuter et coll., 2013, p. 221).

Selon Philippe (2004), « la transposition didactique explicite la manière dont le savoir

savant doit être transformé, didactisé, afin de pouvoir être enseigné à des élèves, à des

personnes extérieures à la pratique de la discipline en question » (p. 32). La transposition

didactique est donc un processus qui permet de faire le passage du savoir savant au savoir à

enseigner.

La notion de transposition didactique nous semble pertinente dans nos démarches

méthodologiques, car elle nous invite à nous poser des questions sur les savoirs que nous

avons recueillis et à voir comment nous pouvons les transmettre efficacement aux élèves

comme objets d’enseignement. Selon Reuter et coll. (2013), « pour pouvoir être enseignés,

les savoirs doivent être rendus enseignables » (p. 221). Cela veut dire que nous devons être

capables de transformer les connaissances identifiées lors de notre recherche en objets

Page 82: La littérature de jeunesse en classe de FLE aux Seychelles ...€¦ · L’élaboration d’une séquence didactique pour l’enseignement de la compréhension en lecture et du lexique

72

d’enseignement que les élèves pourront comprendre et assimiler. Nous parlons ici de ce que

Chevallard a nommé la transposition didactique interne qui est liée à la création des objets

d’enseignement par les enseignants par rapport aux contenus des programmes (Perrenoud,

1998). La transposition didactique externe est la transformation directe des savoirs en

programmes scolaires.

Pour notre recherche, nous effectuons une transposition didactique interne qui nous permet

d’identifier les savoirs savants liés à l’enseignement de la compréhension en lecture, par

exemple. Ce processus nous aide à transposer des savoirs sur la lecture des textes littéraires,

sur la compréhension, sur le lexique, entre autres, en des objets réalisables en classe par les

élèves.

3.2.2. La séquence didactique

La séquence didactique est apparue dans les écoles (en France) vers la fin des années 90

comme une réponse aux problèmes liés à l’enseignement du français et de la littérature

(Inisan, Gaudin et Tourigny, 2001; Sabbah, 2006). Cette nouvelle façon d’organiser les

activités d’enseignement avait pour objectif de faire passer les enseignants de français d’un

enseignement dit traditionnel à un enseignement qui favorise l’articulation des différentes

activités en classe. Traditionnellement, l’enseignement du français consistait à juxtaposer

des activités de grammaire, de lecture, d’écriture, de vocabulaire et d’orthographe sans

l’établissement d’un lien précis entre elles (Inisan et coll., 2001). Alors que la séquence

didactique établissait une organisation claire et cohérente des activités dans la classe de

français : « des objectifs clairement définis, des compétences à faire acquérir précisément

ciblées, des évaluations à chaque étape du projet et une évaluation finale » (Inisan et coll.,

2001, p. 60).

Ainsi, de manière générale, la séquence est un modèle d’organisation des activités

d’enseignement. Elle « englobe un certain nombre de séances (cours) dans une structure

pensée et prévue à l’avance et elle se construit sur leur continuité » (Sabbah, 2006, p. 24).

Page 83: La littérature de jeunesse en classe de FLE aux Seychelles ...€¦ · L’élaboration d’une séquence didactique pour l’enseignement de la compréhension en lecture et du lexique

73

Cependant, bien que nous adhérions à cette définition de la séquence didactique dans le

cadre de notre recherche, il ne s’agit pas du seul modèle existant. Dolz, Noverraz et

Schneuwly (2001) ont proposé une conception restreinte de la séquence didactique, définie

comme « un ensemble d’activités scolaires organisées de manière systématique autour d’un

genre de texte oral ou écrit » (p. 6). Selon ces auteurs, la structure de base d’une séquence

didactique est composée d’une mise en situation où l’enseignant présente l’objectif de la

leçon, suivi par la production initiale (Dolz et coll., 2001). Cette étape exige une première

production orale ou écrite chez les élèves et elle permet à l’enseignant d’évaluer les

connaissances et les compétences des élèves. Ensuite, il y a plusieurs modules dans lesquels

l’enseignant prépare des activités pour aider les élèves à surmonter les problèmes apparus

pendant la production initiale (Dolz et coll., 2001). La séquence se termine par une

production finale « qui donne à l’élève la possibilité de mettre en pratique les notions et

outils élaborés séparément dans les modules » (Dolz et coll., 2001, p. 11). Cette dernière

étape permet aussi à l’enseignant de faire une évaluation sommative de la leçon (Dolz et

coll., 2001).

Même si nous travaillons autour d’un genre de texte (Dolz et coll., 2001), l’album de

jeunesse, notre séquence n’est pas orientée vers la production d’un texte de ce genre. C’est

pourquoi, pour notre recherche, nous privilégions la définition large de la séquence

didactique illustrée par Sabbah (2006). Elle précise que la séquence « regroupe, en français,

des activités de lecture et d’écriture, d’expression écrite et orale, de maitrise de la langue;

[elle] doit permettre aux élèves d’établir un lien entre les différentes activités » (Sabbah,

2006, p. 23). Cette explication fait écho à notre concept de l’articulation qui est au cœur de

notre objectif de recherche. La séquence, comme définie par Sabbah (2006), facilite la

planification des séances de cours en prenant en compte les prescriptions du programme

officiel du français, les objectifs d’apprentissage et les besoins des élèves. « Elle constitue

une manière de travailler organisée et cohérente, dans laquelle l’élève ne doit pas se sentir

perdu. Il doit au contraire y trouver un fil conducteur, une progression, et un sens, ces trois

éléments lui permettant de saisir rapidement et de manière claire certains enjeux de

l’enseignement du français » (Sabbah, 2006, p. 23). En tant que dispositif didactique, la

séquence nous permet de travailler sur la compétence lexicale et la compréhension en

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lecture autour d’un texte de la littérature de jeunesse. En procédant selon l’approche de

l’enseignement explicite, nous pouvons efficacement articuler l’enseignement de la langue

et de la littérature qui est à l’origine de l’introduction de la séquence didactique dans les

écoles. Ce mode d’organisation favorise bien l’articulation de la grammaire, de la lecture,

de l’écriture, du lexique, de l’oral, etc. autour d’un texte littéraire. Cela constitue notre

objectif en ce qui concerne l’enseignement de la littérature en FLE.

3.2.3. Le choix du corpus de littérature

Nous voulons construire notre séquence didactique autour d’un album de littérature de

jeunesse respectant les étapes de l’approche de l’enseignement explicite. L’œuvre choisie

s’intitule Machin, truc, chouette, elle est écrite par Hubert Ben Kemoun et illustrée par

Véronique Joffre. Nous aurions aimé sélectionner une œuvre de la littérature francophone

seychelloise, mais il nous semble qu’une telle catégorie de littérature n’existe pas ou du

moins nous n’avons trouvé aucun album. Nous avons voulu choisir un album qui

correspond bien aux besoins des élèves – la découverte de la culture, l’enrichissement de

leur imagination, la connaissance des nouveaux mots, le plaisir de lire – et à nos objectifs

d’apprentissages.

Il s’agit de l’histoire d’un étranger qui vient s’installer dans un nouveau pays. Il s’appelle

Massicholihaloi, mais personne de sa nouvelle communauté ne cherche à apprendre à

prononcer son prénom. Il répare une petite maison abandonnée et s’y installe. Il apprend la

langue afin de pouvoir mieux communiquer avec les autres, même si ces derniers se

moquent de son accent. Seul un enfant, Gaspard, ne se moque pas de lui, car il aime bien

être en compagnie de l’immigrant. Pour une faible somme d’argent, Massicholihaloi fait

tous les travaux que les habitants lui commandent. Même lorsqu’on le pousse à aller

défendre la patrie pendant la guerre, il y va courageusement. Il revient quelques mois plus

tard avec une main en moins. Malgré son handicap, il continue à travailler très dur et à

aider les membres de sa communauté. Cependant, lorsqu’il exprime son souhait de faire

venir toute sa famille dans son nouveau pays, les habitants l’obligent à partir. L’immigrant

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réalise qu’il n’a jamais fait partie de cette communauté et qu’on le considère toujours

comme un étranger même s’il a sacrifié une main pour le pays.

Machin truc chouette est un album qui fait partie de la sélection Livres ouverts qui est un

site de développement pédagogique sous la direction du ministère de l’Éducation et de

l’Enseignement supérieur de Québec. Ce site vise la valorisation de la lecture chez les

jeunes, non seulement en français langue maternelle, mais aussi en français langue seconde.

En effet, ce site présente aux enseignants de français langue seconde des pistes

d’exploration des œuvres. De plus, pour chaque œuvre choisie, il existe une échelle des

indices de difficulté générale et une échelle des indices de difficulté par rapport au français

langue seconde. Cette échelle permet aux enseignants de choisir des œuvres en fonction des

habiletés de lecture de leurs élèves en français31. Machin truc chouette est un album conçu

pour les élèves à partir de la quatrième année du primaire jusqu’à la deuxième année du

secondaire. Il a un niveau de difficulté général de 4 sur 11 et de 4.1 sur une échelle de 1.1 à

5.2 par rapport aux indices de difficulté en français langue seconde. Selon cette

catégorisation, nous pensons que cet album est idéal pour nos élèves de FLE de la première

année du secondaire.

Nous choisissons cet album, Machin truc chouette, car il est susceptible de susciter l’intérêt

des élèves pour la lecture du fait de sa longueur, des thèmes abordés, du niveau du texte, du

rapport entre le texte et les illustrations. C’est un album de vingt pages et sur chaque page,

il y a des illustrations qui explicitent le contenu. Les illustrations reflètent bien ce qui est dit

dans le texte et parfois elles apportent des informations supplémentaires aux lecteurs. Nous

pouvons dire qu’il y a tantôt un rapport de redondance, tantôt un rapport de collaboration

entre le texte et les images (Van der Linden, 2007). Les rapports entre le texte et les images

peuvent aider les élèves à mieux comprendre l’œuvre surtout si certains mots ou certaines

expressions leur causent des difficultés de compréhension. Ce texte présente aussi des

aspects positifs et négatifs de la société d’aujourd’hui et il invite les élèves à en discuter et à

réfléchir sur leurs propres rapports avec les autres individus. À travers des images précises

31 Livres ouverts : https://www.livresouverts.qc.ca/index.php?p=fls&ss=indices

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et humoristiques de l’illustrateur et des thèmes, tels que la xénophobie, l’immigration,

l’intégration, entre autres, que l’auteur évoque dans son texte, Machin truc chouette est un

album qui pourrait susciter l’intérêt des élèves.

Ainsi, le choix de notre texte repose en partie sur son aspect culturel. Nous voulons que les

élèves puissent faire le lien entre ce qui se passe entre les différents personnages de l’œuvre

et des situations semblables qu’ils ont vécues ou qu’ils connaissent afin de mieux

comprendre le texte. En tant que Seychelloise faisant partie d’un peuple multiethnique et

multiculturel, nous pensons qu’il est important pour les élèves de développer une culture de

tolérance et d’acceptation des différences. Massicholihaloi n’est pas bien accueilli par les

membres de sa communauté à cause de ses différences avec les autres : son accent, ses

récits, la couleur de sa peau, etc. Ce texte donne à l’enseignant et aux élèves l’occasion de

réfléchir sur leurs actions ou leurs attitudes envers des personnes étrangères ou appartenant

à d’autres communautés.

La littérature ouvre également l’esprit au multiculturel en montrant que nous éprouvons des sentiments et des émotions semblables, peu importe notre origine, et en mettant en relief ce que chaque groupe apporte de particulier; le récit littéraire est en ce sens plus puissant que le texte documentaire, car, en plus de donner accès aux faits, il amène le lecteur à s’identifier aux personnages et à partager intimement leur vie et leurs sentiments (Giasson, 2003, p. 279).

Donc, cet album est une bonne façon d’instruire les jeunes sur les valeurs d’une société

pluraliste. Il les invite à découvrir ce qui se passe dans d’autres sociétés et à développer un

esprit critique sur les relations humaines dans les différentes sociétés. Une telle lecture sert

à montrer aux élèves l’importance d’ouvrir son monde et son cœur aux autres. Pour ce

faire, les élèves doivent être capables d’interpréter le texte et de faire des inférences. Même

s’il est assez simple à lire, l’album présente quelques problèmes de compréhension et les

élèves doivent se mettre dans la peau des personnages afin d’améliorer leur compréhension

du texte. Par exemple, le titre de l’album (Machin truc chouette) qui renvoie au nom du

personnage principal constitue un problème de compréhension et les élèves doivent utiliser

les stratégies de compréhension en lecture pour l’interpréter correctement. En interprétant

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le titre et en faisant le lien avec le contenu du texte, il est possible de reconnaitre et de

comprendre les différents thèmes de l’album : la xénophobie, l’immigration, le racisme,

entre autres.

Il s’agit également d’un texte riche sur le plan linguistique. Il serait possible de développer

les compétences langagières, particulièrement la compétence lexicale des élèves. À travers

cette œuvre, nous voulons mettre en pratique l’un des objectifs de l’enseignement et de

l’apprentissage du français au cycle 4 : « distinguer, grâce au contexte, les différents sens

d’un mot, des homonymes, des mots de sens contraire, le sens propre et le sens figuré »

(Ministère de l’Éducation, 2001, p. 26). Ainsi, à l’aide de cet album nous choisissons de

travailler le lexique avec les élèves. Beaucoup de mots, tels que « torrent », « charabia »,

« baragouinait », « fredonnait », « futé », « granges », « tuiles », etc. ne font pas partie de la

réalité linguistique de ces élèves, car pour la plupart d’entre eux les cours de français

constituent leur unique contact avec la langue française. Cet album nous présente une

occasion de travailler le lexique avec les élèves afin de développer leur « capacité à

comprendre le français » (Ministère de l’Éducation, 2001, p. 5) et à l’utiliser dans leurs

pratiques langagières au quotidien.

À travers Machin truc chouette, nous voulons montrer, entre autres, aux élèves de la

première année du secondaire comment découvrir le sens de mots s’ils n’ont pas le

dictionnaire sous les yeux par exemple. Nous pensons que le texte et les illustrations

permettront aux élèves de découvrir de nouveaux mots qu’ils pourraient utiliser dans les

travaux à l’écrit ou à l’oral. Cet album qui n’est pas trop long avec des illustrations

détaillées pourrait développer le gout de lire chez les élèves. Les activités d’apprentissage

permettraient bien aux élèves de comprendre et d’apprécier l’œuvre dans son intégralité.

Dans le prochain chapitre, nous présentons notre séquence didactique.

Page 88: La littérature de jeunesse en classe de FLE aux Seychelles ...€¦ · L’élaboration d’une séquence didactique pour l’enseignement de la compréhension en lecture et du lexique

78

4. Séquence didactique autour de Machin truc chouette d’Hubert Ben

Kemoun pour les élèves de la première année du secondaire des

Seychelles

Dans ce chapitre, nous présentons notre séquence didactique. Elle s’inscrit dans le cadre de

l’enseignement du français langue étrangère dans les écoles secondaires de l’État aux

Seychelles. Rappelons que même si la lecture des textes littéraires fait partie du programme

officiel du ministère de l’Éducation des Seychelles, elle n’est pas une réalité de

l’enseignement et de l’apprentissage du français dans les écoles. Ainsi, nous proposons

cette séquence en vue de mettre en pratique les prescriptions ministérielles et de montrer

qu’il est possible d’intégrer la lecture des textes littéraires dans l’enseignement du français

langue étrangère. Tout d’abord, nous précisons les objectifs généraux pour l’enseignement

de cet album. Nous exposons les justifications pour la progression de la séquence et le

choix des activités pédagogiques. Enfin, nous présentons, sous forme de tableaux, les

différentes séances de notre séquence didactique. Pour chaque séance, nous justifions et

nous discutons des activités pédagogiques choisies.

4.1. Les objectifs généraux de l’enseignement de l’album

Le but principal de l’enseignement de cet album est cohérent avec les différentes

compétences formulées par le ministère de l’Éducation des Seychelles correspondant aux

quatre différents domaines (compréhension orale et écrite, production orale et écrite). À

travers ces quatre domaines, le ministère s’attend à ce que les élèves développent des

compétences en lecture (compréhension), en écriture et en communication orale. Dans le

cadre de notre séquence, nous voulons développer les compétences des élèves en

compréhension en lecture que nous retrouvons dans le Français curriculum national

(Ministère de l’Éducation, 2001) pour le cycle 4 à travers ces objectifs suivants (voir

Annexe 1) :

Page 89: La littérature de jeunesse en classe de FLE aux Seychelles ...€¦ · L’élaboration d’une séquence didactique pour l’enseignement de la compréhension en lecture et du lexique

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1. Aller à la découverte d’un ouvrage en utilisant des indices externes (couverture,

table des matières, illustrations);

2. Lire une œuvre complète (conte, nouvelle, BD);

3. Manifester sa compréhension de la lecture de textes divers.

Pour notre séquence, nous voulons articuler la lecture de l’album Machin truc chouette à

l’étude du lexique du texte avec le but d’aider les élèves à comprendre ce texte littéraire

intégralement. En nous référant aux objectifs présentés dans le Français curriculum

national (Ministère de l’Éducation, 2001), nous formulons les objectifs généraux suivants

relatifs à notre œuvre :

1. Manifester sa compréhension de la lecture d’un album de jeunesse en utilisant

des stratégies de compréhension en lecture.

2. Étudier le lexique de l’album en mettant en pratique des stratégies pour

trouver le sens des mots.

Nous avons formulé ces objectifs, car nous voulons aider les élèves à comprendre l’album

en se référant autant au texte qu’aux illustrations. Nous voulons que les élèves puissent

arriver à identifier les personnages et à comprendre les relations qui existent entre eux afin

qu’ils arrivent à comprendre l’essentiel du texte. Nous voulons aussi travailler le lexique

avec le but d’amener les élèves à utiliser des connaissances existantes sur la langue et à en

développer de nouvelles. À partir d’une œuvre littéraire, les élèves sont aptes à découvrir de

nouveaux mots et de nouvelles expressions, et nous voulons les aider à comprendre le sens

de ces mots selon le contexte. De plus, notre objectif concernant le lexique correspond aussi

aux objectifs figurant dans le Curriculum national du français (voir Annexe 2).

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80

4.2. Justification de la progression de la séquence

Notre séquence est composée de 8 séances de 80 minutes et nous prévoyons un effectif de

30 élèves dans notre classe32. Pour chaque séance, nous essayons d’articuler les activités de

compréhension à celles portant sur le lexique et nous suivons les étapes de l’approche de

l’enseignement explicite. En ce qui concerne les étapes, nous ne précisons pas la durée de

chacune, car nous voulons que l’enseignant puisse être libre et flexible dans la mise au

point de la séquence. De même, il doit être capable de bien gérer son temps et d’accorder le

temps nécessaire pour chaque étape. En effet, pour une séance de 80 minutes, il est

conseillé de prévoir au maximum 15 minutes pour l’ouverture de la leçon, environ 20

minutes pour la clôture de la leçon et aux alentours de 45 minutes pour le corps de la leçon.

Nous commençons notre première séance par une présentation générale de l’œuvre, de son

auteur et de son illustrateur. Pour les élèves, il s’agit de la première fois qu’ils abordent la

lecture des textes littéraires, donc nous jugeons important de leur enseigner comment

planifier leur lecture. Nous utilisons quelques stratégies élaborées par Falardeau (2015, en

ligne) concernant la planification de la lecture (voir Annexe 3). Il n’y a pas de lecture du

texte dans la première séance, nous travaillons sur les éléments qui entourent le texte (le

paratexte) comme la première et la quatrième de couvertures, les illustrations, le titre, etc.

Nous voulons que les élèves prennent du temps avant la lecture pour faire des hypothèses

sur le contenu du texte et pour se familiariser avec des notions de base en littérature. À la

fin de la séance, nous laissons le livre aux élèves pour qu’ils fassent une première lecture

individuelle (ou avec leurs parents) à la maison. Une première lecture à la maison est

l’occasion pour les élèves de mettre en pratique les stratégies apprises en classe, de vérifier

leurs prédictions sur le texte et de découvrir de nouveaux mots. De plus, puisque « l’école

reconnait que les parents sont les premiers à enseigner à leur enfant et qu’ils peuvent lui

donner un soutien non négligeable tout au long de sa scolarité » (Giasson, 2003, p. 70), une

première lecture à la maison sert à impliquer les parents dans le processus d’apprentissage

de leurs enfants.

32 Aux Seychelles, dans la plupart des écoles de l’État, le nombre moyen d’élèves par classe est de 30.

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Dès la deuxième séance, nous enseignons aux élèves les stratégies pour trouver le sens des

mots inconnus ou difficiles dans le texte pour qu’ils puissent utiliser ce savoir tout au long

de la séquence. Nous avons aussi une séance sur l’analyse des expressions ou groupes de

mots dans le texte que les élèves peuvent, par la suite, utiliser dans leurs travaux écrits ou à

l’oral. Pour les prochaines séances, nous travaillons à partir des différentes stratégies de

lecture en ce qui concerne, premièrement, l’identification du narrateur, deuxièmement,

l’identification et la description des personnages et, finalement, l’explication des principaux

thèmes du texte. Les activités préparées aideraient les élèves à mieux comprendre le texte, à

l’interpréter et à connaitre de nouveaux mots et de nouvelles expressions.

Nous terminons notre séquence avec une séance qui évalue la compréhension des élèves et

qui les amène à discuter sur le contenu de l’album. Dans cette séance, nous avons une

activité orale pour que les élèves puissent mettre en pratique les connaissances apprises

durant les différentes séances. L’enseignant anime un débat ou une discussion libre sur les

principaux thèmes de l’album à travers un débat interprétatif.

À la fin de chaque séance, nous présentons une justification et une discussion en ce qui

concerne le déroulement de la séance, les activités choisies, et nous établissons les liens

entre la séance et notre cadre théorique et conceptuel. Nous expliquons le but de notre leçon

et les raisons pour lesquelles nous l’avons choisie. Nous apportons une discussion théorique

par rapport aux choix des activités pédagogiques et nous expliquons les rôles de l’activité

choisie dans le développement de la compréhension en lecture et de la compétence lexicale

des élèves. Nous ne négligeons pas d’analyser les difficultés que peut poser le texte ou les

activités pour les élèves et nous proposons des solutions pour les surmonter afin que les

élèves puissent bien suivre la leçon et améliorer leur compréhension du texte.

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4.3. Justification du choix des activités pédagogiques autour de l’album

Pour notre séquence, nous avons choisi plusieurs activités écrites et orales pour aider les

élèves à bien comprendre l’œuvre et à découvrir de nouveaux mots et de nouvelles

expressions. Les activités planifiées n’abordent pas nécessairement le domaine de la

conjugaison, de l’orthographe ou de la syntaxe. Bien qu’il s’agisse d’éléments importants

de la grammaire, nous nous sommes concentrés sur notre objectif principal : comprendre un

texte littéraire et découvrir de nouveaux mots. Nous visons les élèves de FLE et nous

voulons les intéresser à la lecture de textes littéraires. Comme le dit bien Piotrowska-

Skrzypek (2010) et Anastassiadi (2007), il faut éviter d’utiliser l’album pour des fins

purement linguistiques, car cela peut nuire au plaisir que procure la lecture pour les jeunes.

C’est pour cela que nous privilégions des activités orales et que nous n’insistons pas sur la

correction des erreurs de grammaire dans les activités écrites.

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83

4.4. Présentation de la séquence

Tableau 12 : Séance 133

Objectif spécifique : Survoler le texte : étudier le paratexte et quelques images de l’album afin de faire des prédictions sur le contenu.

Matériel : Deux albums de jeunesse : La Belle et la bête de Jeanne-Marie Leprince de Beaumont et Machin truc chouette d’Hubert Ben Kemoun.

• Ouverture de la leçon Présenter le but de l’enseignement de l’album34 Dans le cadre de notre cours de français, vous allez faire la découverte d’un texte littéraire, l’album de jeunesse. Pendant quelques semaines, vous travaillerez sur un album et vous apprendrez plusieurs stratégies pour développer votre compréhension du texte et votre compétence lexicale. 35 Présenter l’objectif d’apprentissage Pour cette leçon, nous allons apprendre à survoler un texte littéraire. Nous allons étudier le titre et les éléments qui entourent le texte afin de prédire le contenu. Présenter les résultats attendus À la fin de cette activité, je m’attends à ce que vous soyez capables de survoler un album de jeunesse afin de vous faire une idée du contenu. Réactiver les connaissances Avez-vous déjà lu un album? Comment prédire le contenu d’un texte? • Corps de la leçon Modelage Quoi? Aujourd’hui, nous allons découvrir un texte littéraire, un album de jeunesse. Nous allons étudier le paratexte de cet album, c’est-à-dire les éléments qui l’entourent : le titre, les illustrations, la quatrième de couverture, etc. Pourquoi? Pourquoi est-il important d’étudier le paratexte d’un texte littéraire? (Expliquer aux élèves ce que sont le paratexte, la quatrième de couverture, etc.) Exemples de réponses attendues : - Pour comprendre le titre du livre. - Pour connaitre qui a écrit le livre. - Pour avoir des idées sur l’histoire. - Pour comprendre ce qui va se passer à travers les images. - Pour planifier sa lecture… 33 Les séances sont adaptées des exemples de leçons trouvés dans Annexe 2 de Gauthier et coll. (2013). 34 Uniquement pour cette séance, nous présentons le but de l’enseignement de l’album dans le cadre de cette séquence. 35 Nous mettons en italique les propos directs de l’enseignant.

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L’enseignant36 amène les élèves à comprendre qu’il s’agit principalement de « planifier sa lecture » afin de bien comprendre l’œuvre qu’ils vont lire. Quand? À chaque fois que vous abordez un nouveau livre ou n’importe quel document écrit. Comment? L’enseignant demande aux élèves d’être attentifs et de regarder tout ce qu’il fait. Il utilise un autre album pour le modelage (par exemple : La belle et la bête). À voix haute, l’enseignant dit tout ce qu’il fait. Je regarde la page de couverture. Il y a le titre : « La belle et la bête ». Je cherche les noms de l’auteur et de l’illustrateur. Ils sont sur la page de couverture, mais à la deuxième page de couverture on précise bien que l’auteur est Jeanne-Marie Leprince de Beaumont et que l’illustrateur est Anne Romby. L’image sur la page de couverture est celle d’une fille qui a l’air triste. Je pense que l’histoire sera basée sur cette fille. C’est peut-être elle « la belle ». Je vais à la première page de l’album; voilà la fille qui est assise à côté d’un chat et elle joue d’un instrument de musique. Elle semble être joyeuse ici. À la deuxième page, il y a plusieurs d’autres personnes. On dirait qu’il y a une fête… (L’enseignant continue à survoler le texte et à faire des prédictions à l’aide des images pour quelques minutes encore.) Je regarde maintenant la quatrième de couverture; il y a un paragraphe écrit. (L’enseignant lit le résumé.) « Fille cadette d’un marchand ruiné, La Belle est livrée à une bête affreuse, terrée dans son château au fond de la forêt. Les jours passent et la captive se sent de mieux en mieux chez cette créature si laide et si triste, mais tellement attentive et généreuse… Un conte sur la peur, la rencontre, le désir et l’amour. » Ce résumé me donne un aperçu de l’histoire. Je compte déjà trois personnages : La Belle, son père qui est un pauvre marchand et La Bête. On donne quelques indices sur La Bête et on nous dit que le récit peut être effrayant, mais il y aura aussi de l’amour. Je peux imaginer que La Bête cessera d’être effrayante pour la jeune fille et qu’ils tomberont amoureux. Mais comment?... Il faut lire pour savoir. L’enseignant demande aux élèves ce qu’il a fait quand il a survolé le texte. Réponses attendues : - Vous avez lu le titre et vous avez regardé l’image. - Vous avez regardé d’autres illustrations du texte pour essayer de deviner l’histoire. - Vous avez lu le résumé à l’arrière du texte pour mieux connaitre l’histoire. Ainsi, l’enseignant écrit au tableau les étapes à suivre pour planifier sa lecture et prédire le contenu du texte. Pratique guidée : activité sur le titre de l’album Les élèves se mettent en groupe de cinq et l’enseignant donne à chaque élève l’œuvre sur laquelle ils travailleront : Machin truc chouette. Pour s’assurer que les élèves ne lisent pas le résumé, l’enseignant couvre la quatrième de couverture d’un papier noir. Il leur demande d’essayer de faire une idée du titre : Machin truc chouette. De quoi s’agit-il? Les élèves parcourent l’album et ils peuvent constater que l’ensemble de mots « machin, truc, chouette » apparait assez souvent sous différentes formes. L’enseignant fait le tour des groupes pour répondre aux questions des élèves et pour les aider à interpréter le titre.

36 L’usage du masculin sert à alléger le texte.

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Pour cette activité de groupe, l’enseignant s’assure que les élèves comprennent que le titre renvoie au personnage Massicholihaloi qui apparait sur la page de couverture. Il soutient les élèves et il apporte des explications supplémentaires au besoin. Vers la fin, les élèves peuvent dévoiler la quatrième page de couverture pour lire le résumé. La phrase « on oublie souvent son nom » du résumé est un indice sur la raison pour laquelle on appelle l’étranger « Machin truc chouette »37. Avant de passer à la pratique autonome, l’enseignant s’assure que les élèves ont compris l’activité en leur posant des questions sur le titre à travers une discussion à l’oral. Pratique autonome : faire des prédictions sur le contenu Individuellement les élèves essaient de deviner le contenu grâce au résumé de la quatrième de couverture et en se posant des questions sur les illustrations. Ils s’autoévaluent en utilisant la grille d’évaluation (Annexe 3, stratégies 1.1.1, 1.1.3, 1.1.5 et 1.1.6). • Clôture de la leçon Objectivation : L’enseignant demande aux élèves d’expliquer la stratégie qu’ils ont apprise pendant la leçon. Pour s’assurer de leur compréhension, l’enseignant demande aux élèves d’essayer d’expliquer le titre, de dire qui est l’auteur et l’illustrateur. Quelques élèves donnent leur prédiction sur le contenu de cet album par rapport aux illustrations. À faire à la maison : Lecture intégrale de l’album.

Justification et discussion sur la séance

Lors de cette première séance, les élèves découvrent deux albums de jeunesse : La belle et

la bête de Jeanne-Marie Leprince de Beaumont et Machin truc chouette d’Hubert Ben

Kemoun. Puisqu’il s’agit d’une certaine façon d’un cours introductif à la littérature de

jeunesse, nous avons pensé qu’il était nécessaire de présenter au moins deux albums de

jeunesse différents aux élèves pour qu’ils puissent découvrir ce genre littéraire.

L’enseignant, s’il le veut, peut aussi apporter d’autres exemplaires d’albums pour que les

élèves puissent les explorer pendant leurs temps libres38. Mais notre séquence reste

focalisée sur l’album Machin, truc, chouette. L’usage d’une histoire très connue comme La

Belle et la bête a pour but d’aider les élèves à mieux comprendre les stratégies modelées

par l’enseignant. Le but n’étant pas de raconter l’histoire, mais de planifier la lecture, nous

avons choisi une histoire assez populaire pour que les élèves puissent saisir assez

facilement les stratégies de survol.

37 Pour cette activité, les élèves essaient seulement de comprendre le titre en se servant des indices relevant du paratexte. Dans la prochaine séance, ils apprendront à trouver le sens des mots, incluant ceux du titre. 38Il s’agit de temps libres en dehors du cours de français ou de cette séquence.

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Cette séance introduit les élèves à l’univers de la littérature de jeunesse et leur fait

découvrir les albums de jeunesse. Les élèves auront à travailler sur l’album, Machin truc

chouette pendant plusieurs semaines et l’enseignant doit motiver ses élèves pour que la

lecture de ce texte leur procure du plaisir. Dès le début, l’enseignant présente aux élèves les

objectifs généraux de l’enseignement de l’album qui sont l’utilisation des stratégies de

lecture pour développer la compréhension en lecture et le développement de la compétence

lexicale à partir des stratégies pour trouver le sens des mots. De cette façon, les élèves

comprendront que l’objectif spécifique de chaque séance concourt à l’atteinte des objectifs

généraux.

L’objectif spécifique de cette première séance vise la planification de la lecture par les

élèves. Bianco (2014), Falardeau et Gagné (2012), Giasson (2003) et Piotrowska-Skrzypek

(2010) affirment qu’il faut s’intéresser aux éléments qui entourent le texte et faire une étude

de la première et de la quatrième de couverture, des illustrations, du titre, entre autres avant

d’entamer la lecture de l’œuvre. Selon Giasson (2003), le lecteur efficace est celui qui

s’intéresse aux éléments du texte avant de plonger dans la lecture du texte. Il doit faire un

« survol » du texte pour repérer des indices qui l’aideront à organiser sa lecture et à prédire

le contenu du texte (Giasson, 2003, p. 227). La prédiction sert à activer les connaissances

des élèves (Falardeau et Gagné, 2012; Giasson, 2003) et à susciter l’intérêt des élèves pour

la lecture de l’œuvre. Selon Giasson (1990), le rôle de prédiction est « d’augmenter la

motivation et l’engagement du lecteur face au texte, améliorant par le fait même sa

compréhension » (p. 143). Rappelons que notre séquence s’adresse aux élèves qui

effectuent leur première classe de la lecture de textes littéraires. Il est d’autant plus

important de passer par cette étape de préparation à la lecture pour les motiver lorsqu’ils

entreprennent le processus de compréhension en lecture.

Les deux activités principales de la séance sont l’étude du titre de l’album lors de la

pratique guidée et la prédiction du contenu pendant la pratique autonome. Le titre de cet

album peut s’avérer compliqué pour les élèves de FLE, car « machin, truc, chouette » ne

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sont pas des mots usuels pour ces élèves. Dans le cadre de cet album, la compréhension du

titre peut aider significativement les élèves dans leur compréhension du texte et un travail

sur les mots du titre est cohérent avec notre objectif d’articuler la compétence en lecture à

l’étude du lexique. Pour obtenir une idée du titre, les élèves survolent l’album. C’est le

résumé à la quatrième de couverture qui les aide à comprendre que le titre fait référence au

personnage figurant sur l’album. De même, puisqu’il s’agit de la pratique guidée,

l’enseignant surveille attentivement le déroulement de la leçon et il guide les élèves en

répondant aux questions et en fournissant de l’aide à ceux qui ne comprennent pas

l’activité.

La pratique autonome est une continuation de l’activité précédente. Bien que pendant

l’étude du titre, les élèves ont pu faire des hypothèses sur le contenu du texte, l’objectif était

vraiment de comprendre le choix du titre39 par l’auteur en utilisant les stratégies de

planification de la lecture modelées par l’enseignant. L’étape de la pratique autonome est

l’occasion pour les élèves de prouver qu’ils ont compris la leçon en faisant la tâche seuls.

Gauthier et coll. (2013) précisent qu’il ne faut pas s’attendre à obtenir une performance

parfaite chez tous les élèves, car cela causera du retard pour l’enseignant dans la réalisation

de son programme et aussi pour d’autres élèves. De même, l’enseignant doit viser un taux

de performance de 95 % pour s’assurer de la compréhension de toute la classe et passer au

prochain objectif ou à la prochaine séance (Gauthier et coll., 2013). Pour cette activité, les

élèves utilisent la grille d’évaluation de Falardeau (Annexe 3, stratégies 1.1.1, 1.1.3, 1.1.5

et 1.1.6). D’une certaine manière, en faisant une auto-évaluation sur la planification de la

lecture, les élèves répondent aux questions sur le titre, le contenu du texte, les illustrations,

l’auteur, l’illustrateur, etc. Il s’agit d’une activité écrite qui est suivie par une discussion à

l’oral. Les questions possibles peuvent être : Qui a écrit ce texte? Il s’agit de quel genre de

texte? Quelles sont vos prédictions sur le contenu du texte grâce au titre? Quelles

informations obtenez-vous à partir des illustrations? … À son tour, l’enseignant analyse les

réponses des élèves et il évalue la compréhension des élèves par rapport au niveau de

réussite de la tâche par les élèves avant de procéder à la prochaine séance. 39 Notons que pendant la deuxième séance, les élèves pourront comprendre davantage le titre à travers l’activité sur le sens de mots.

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Tableau 13 : Séance 2

Objectif spécifique : Trouver le sens des mots difficiles afin de mieux comprendre le texte (première partie). Matériel : l’album Machin truc chouette, cahiers des élèves Travail préparatoire : une première lecture de l’album • Ouverture de la leçon Présenter l’objectif d’apprentissage Pour cette séance, nous allons identifier les mots difficiles de notre album et nous allons utiliser des stratégies spécifiques pour trouver le sens de ces mots. Présenter les résultats attendus À la fin, je m’attends à ce que vous soyez capables d’utiliser les stratégies apprises pour trouver le sens des mots difficiles que vous rencontrerez dans vos lectures afin de mieux comprendre le texte. Réactiver les connaissances Avez-vous lu l’album à la maison? Y avait-il des mots que vous n’avez pas compris? Que faites-vous lorsque vous rencontrez un mot difficile dans un texte? Exemples de réponses attendues : - Chercher la définition dans un dictionnaire. - Regarder les images. - Chercher le mot équivalent en anglais ou en créole. Et si vous n’avez pas de dictionnaire et vous ne connaissez pas la traduction du mot? • Corps de la leçon Modelage Quoi? Pour cette leçon, nous allons apprendre comment trouver le sens des mots difficiles dans un texte, principalement dans notre album « Machin truc chouette ». Pourquoi? Pour améliorer la compréhension d’un texte littéraire, il est aussi important de comprendre les différents mots inconnus ou difficiles qui s’y trouvent. Quand? Les stratégies que vous allez apprendre, vous devez les mettre en pratique à chaque fois que vous lisez un texte. Comment? Vous allez m’écouter attentivement et suivre dans votre album pendant que je vous montre les différentes stratégies pour trouver le sens des mots difficiles dans notre album. Je commence à la première page. « Il était arrivé un matin d’été. De quel pays? Personne ne savait… » Tout semble être clair et compréhensible ici. L’image du monsieur qui arrive avec son sac sur son épaule montre qu’il vient habiter dans une nouvelle région. On dirait qu’il porte une robe. Vient-il peut-être d’un pays arabe? Passons à la deuxième page. « Tout juillet, Machin-

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Chose-Truc avait… ». Ah! Qu’est-ce que c’est ce mot-là. Il ressemble un peu au titre. Est-ce le nom du monsieur? Non, car il s’appelle Massicholihaloi. Je me rappelle qu’à la première page on se moquait de son prénom comme « n’importe quoi ». Alors, il me semble qu’on lui a donné un autre nom, car son nom est trop difficile à prononcer peut-être. « Machin », « truc », « chose » sont des mots que l’on utilise quand on ne connait pas le nom exact des choses. Continuons notre lecture. « Passer son temps à retaper la cabane au bord du torrent. » Ici, il y a trois mots qui causent des difficultés : retaper, cabane et torrent. Comment trouver le sens de ces mots? Regardons les images de cette page. Nous voyons Massicholihaloi avec des outils sur une maison. Je pense qu’il est en train de construire sa maison. Si nous découpons le mot « retaper », nous obtenons « re » et « taper ». Vous avez appris au primaire que « re » est un préfixe que nous utilisons pour montrer que l’action commence encore. En ce qui concerne « taper », nous avons ce mot en créole. C’est l’action de frapper avec un outil par exemple. Et si nous regardons l’image maintenant, « retaper » veut dire construire ou réparer peut-être. Pour « cabane », en créole, il s’agit d’une maison pour les poules, alors je pense que cabane ici fait référence à une maison. Juste à côté, nous voyons bien de l’eau avec des poissons dedans. Alors « torrent » doit bien être une source d’eau ou rivière. Et lorsque nous continuons à lire, il y a cette phrase « il avait fait une vraie maison ». Ainsi, je comprends que « cabane » est une maison en mauvais état, mais avec une bonne réparation, elle peut devenir une vraie maison. L’enseignant parcourt encore deux autres pages et ensuite il demande aux élèves d’identifier les différentes stratégies pour trouver le sens des mots. Exemples de réponses attendues : - Regarder les images pour trouver des indices sur les définitions, - Revenir en arrière dans le texte pour trouver des indices. - Continuer sa lecture pour trouver des indices dans les prochaines phrases. - Découper les mots pour mieux les comprendre. - Trouver l’équivalent du mot en créole (langue maternelle). L’enseignant explique aux élèves qu’il existe plusieurs stratégies pour trouver le sens des mots difficiles dans un texte, mais pour cet album ils travailleront sur trois stratégies principales : 1. Trouver le sens des mots à partir des illustrations; 2. Trouver le sens des mots à partir du contexte; 3. Trouver le sens d’un mot en étudiant sa composition (analyse morphologique). Pratique guidée (lecture à haute voix des six autres pages) Ayant lu les quatre premières pages de l’album, l’enseignant demande maintenant à la classe de continuer la lecture à haute voix en désignant un élève à la fois (tous les élèves n’auront pas la chance de lire vu le nombre d’élèves). Le lecteur doit s’arrêter quand il rencontre un mot qu’il ne comprend pas. L’enseignant encourage d’autres élèves à lever la main si pendant la lecture il y a un mot difficile que le lecteur n’a pas dévoilé. Le but de l’activité est d’utiliser les trois stratégies pour trouver le sens des mots difficiles. Au cours de cette activité, l’enseignant aide les élèves à repérer des mots problématiques et il les encourage à utiliser les stratégies apprises pour trouver le sens. Il s’assure que tous les élèves participent activement en parcourant la classe et en portant son attention sur les élèves qui hésitent. L’enseignant donne des explications supplémentaires au besoin et il donne de la rétroaction formative et positive aux élèves. Pratique autonome La pratique autonome de cette activité se fera lors de la prochaine séance.

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• Clôture de la leçon Objectivation : Un rappel des stratégies à utiliser pour trouver le sens des mots difficiles par les élèves.

Justification et discussion sur la séance

Dans cette deuxième séance, nous mettons en pratique les stratégies pour trouver le sens

des mots. En effet, trouver le sens des mots dans un texte constitue aussi une stratégie de

compréhension en lecture. Selon Bianco (2014), comprendre les mots difficiles ou inconnus

du texte fait partie des stratégies qui « visent la construction d’une base de texte cohérente »

(p. 12). Il s’agit de la deuxième catégorie ou étape par rapport au moment de lecture (après

la préparation à la lecture) des stratégies de lecture (Bianco, 2014; voir Tableau 6). Dans ce

sens, dans cette deuxième séance, nous passons à la deuxième étape en ce qui concerne les

stratégies de compréhension en lecture. Or, dans les ouvrages de Giasson (1990, 2003), le

travail sur le vocabulaire est présenté comme la deuxième étape dans le processus de

compréhension en lecture. Pour Giasson (2003), il est très important que les élèves

connaissent les stratégies pour trouver les sens des mots difficiles ou inconnus, car ils

continueront à rencontrer des mots dont ils ignoreront le sens ou des mots ayant de sens

multiple.

Puisque nous nous adressons aux élèves de FLE qui, peut-être, découvrent un texte

littéraire en français pour la première fois, nous avons choisi uniquement trois stratégies :

l’observation des illustrations, l’étude du contexte (voir Annexe 4) et l’analyse

morphologique du mot. En fait, Giasson (2003) favorise le contexte et la morphologie du

mot comme les « deux grandes catégories d’indices pour trouver le sens de mots » (p. 230).

Giasson (2003) présente quatre types d’indices du contexte pouvant être utiles : 1) les

indices syntaxiques – permettent de distinguer des mots à sens multiple (par exemple, le

mot « été » dans ces deux phrases : « C’est un matin d’été », « Il a été renvoyé ce matin ».

2) Les indices sémantiques – aident à comprendre le mot grâce au sens général de la phrase

(par exemple, pour le mot « fredonnait » de notre album : « les chansons que l’autre

fredonnait ». 3) Les définitions données dans le texte qui sont présentées par des

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expressions comme « qui est », « ou », « c’est-à-dire » ou des virgules ou des parenthèses

(par exemple : « Il devait être dingue, ou niais, ou bien mal renseigné40 ». 4) Les exemples

– apporter des informations supplémentaires pour expliciter (un exemple de notre album :

« l’étranger répondait un drôle de charabia. Personne ici ne pouvant le comprendre, alors,

notre langue, il s’est mis à apprendre ». Dans le cadre de notre séance, nous demandons aux

élèves de bien lire la phrase et d’essayer de comprendre l’idée générale évoquée malgré le

mot difficile qui s’y trouve. Pour vraiment comprendre le sens exact de ce mot, les élèves

peuvent relire les phrases qui viennent avant et après ce mot pour chercher des synonymes

ou des antonymes ou d’autres indices qui peuvent les aider à connaitre le sens du mot.

Beaucoup de fois, les images correspondant au texte apportent aussi des indices clairs aux

élèves. Par exemple, pour le mot « flocons » dans la phrase « Malgré le froid, la pluie et les

premiers flocons » (page 5 de l’album), en se servant d’un indice sémantique « le froid » et

aussi des illustrations41 de cette page, les élèves pourraient comprendre qu’il s’agit de la

neige.

Les élèves peuvent faire aussi une analyse morphologique du mot difficile qu’ils trouvent

dans le texte. À noter qu’il ne s’agit pas d’une gradation des stratégies, le choix des

stratégies à utiliser dépend du mot difficile repéré et de la façon efficace d’en trouver le

sens. Selon les objectifs d’apprentissage du primaire, particulièrement du cycle 3 (voir

Annexe 5 et 6), les élèves sont censés avoir appris, entre autres, à identifier des mots du

même champ lexical et à reconnaitre « des familles de mots par leur forme » (Ministère de

l’Éducation, 2001, p. 21). Pour cette raison, nous avons jugé que l’analyse morphologique

est un prérequis à notre séquence. Nous travaillons à partir d’un album qui est écrit d’une

façon simple et abordable pour les élèves de FLE. Ainsi, lors de cette séance, nous faisons

appel principalement aux connaissances des élèves en ce qui concerne les préfixes et les

suffixes, les synonymes et les transformations simples de différents mots. Par exemple, si

les élèves trouvent le mot « épongeant » dans la phrase « … et même en épongeant son

front… » (page 8 de l’album) difficile à comprendre à une première lecture, ils peuvent

découper le mot en deux : « éponge » et « ant ». Le suffixe — ant figure à la fin des verbes

40 Phrase de notre album. 41 Il s’agit de l’image d’un ciel éclairé par la lune et des boules blanches qui tombent du ciel.

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du participe présent et désigne aussi les adjectifs verbaux. Il s’agit d’une connaissance

acquise par les élèves au primaire. En ce qui concerne le mot « éponge », c’est un mot

utilisé régulièrement dans des situations de communication et il fait partie du lexique créole

avec une graphie différente (leponz). Ainsi, à partir d’une analyse morphologique, les

élèves arriveront à comprendre qu’il s’agit de l’acte d’essuyer (son front) à l’aide d’une

éponge.

D’une certaine façon, la langue maternelle de nos élèves, le créole, peut leur venir en aide

dans leur quête pour trouver le sens des mots difficiles. Le créole seychellois est une langue

dérivée de la langue française et la majorité des mots de cette langue possède un équivalent

francophone similaire sur les plans phonétique, sémantique et morphologique parfois. Par

exemple, des mots tels que « chemise », « nom », « cabane », « retaper », « étranger »,

« travail », « réparations », entre autres, sont tous des mots du lexique créole, mais avec une

orthographe plus ou moins différente42. Ainsi, la maitrise de leur langue maternelle peut

bien aider les élèves à mieux comprendre les mots et le sens des phrases dans ce texte. Il

suffit qu’ils arrivent à faire le lien entre les deux langues en puisant dans leurs propres

connaissances linguistiques et en se servant des illustrations de l’album. Selon Giasson,

« lorsque l’élève doit apprendre une langue seconde de même origine que sa langue

maternelle, il apprend plus vite que si la langue seconde était d’une origine différente »

(2011, p. 377). Puisque les langues de même origine possèdent des mots en commun, il

convient à l’enseignant d’attirer l’attention des élèves sur ces mots (Giasson, 2011).

42 « Semiz, non, kabann, retape, etranze, travay, reparasyon » sont les traductions en créole des mots mentionnés.

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Tableau 14 : Séance 3

Objectif spécifique : Trouver le sens des mots difficiles afin de mieux comprendre le texte (deuxième partie). Matériel : l’album Machin truc chouette, cahiers des élèves, dictionnaire (au besoin) Travail préparatoire : Les élèves peuvent relire le texte à la maison avant la séance et ils doivent se rappeler des stratégies pour trouver le sens des mots. • Ouverture de la leçon Présenter l’objectif d’apprentissage Nous allons continuer la lecture de notre album en identifiant et en cherchant le sens des mots difficiles. Présenter les résultats attendus À la fin, je m’attends à ce que vous soyez capables d’utiliser les stratégies apprises pour trouver le sens des mots difficiles que vous rencontrerez dans vos lectures afin de mieux comprendre le texte. Réactiver les connaissances Quelles sont les stratégies que vous avez apprises pour trouver le sens des mots difficiles? Expliquer les procédures à suivre pour trouver le sens d’un mot à partir du contexte, par exemple. • Corps de la leçon Modelage Puisqu’il s’agit d’une continuation de la séance précédente, pour cette séance, l’enseignant n’est pas obligé de faire le modelage, mais il peut demander à deux ou trois élèves de reformuler les stratégies apprises en donnant des exemples. L’enseignant peut vérifier à travers la présentation de l’élève et les commentaires des autres si les élèves comprennent bien comment trouver le sens des mots. Si l’enseignant trouve que les élèves ont suffisamment compris les stratégies, nous passerons à la pratique autonome. Mais si l’enseignant juge qu’il y a un manque de compréhension chez la majorité des élèves, il pourra faire du modelage à nouveau ou organiser une activité pour la pratique guidée. Pratique autonome Pour la pratique autonome, individuellement, les élèves ont à lire le reste du texte et à noter dans leur cahier les mots qu’ils jugent difficiles. En suivant les stratégies apprises, ils essaieront de trouver le sens de ces mots en notant dans leurs cahiers les différents mots difficiles ou inconnus et leurs significations. Vers la fin de l’activité, les élèves peuvent vérifier leur réponse dans le dictionnaire s’ils le veulent. L’enseignant ramassera les cahiers des élèves à la fin de l’activité. • Clôture de la leçon Objectivation : À tour de rôle, quelques élèves pourront nommer les mots qu’ils ont identifiés et donner le sens qu’ils ont attribué à ces mots. Ils pourront expliquer comment ils ont pu trouver le sens de ces mots (le contexte et/ou les illustrations et/ou l’analyse morphologique).

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Justification et discussion sur la séance

La troisième séance est aussi la deuxième partie de la séance précédente. Puisque nous nous

adressons aux élèves qui entreprennent ce type d’activité pour la première fois, nous avons

pensé qu’une séance de 80 minutes était insuffisante pour modeler les stratégies pour

trouver le sens des mots, pour la pratique guidée et la pratique autonome également. Ainsi,

lors de la deuxième séance, nous donnons aux élèves suffisamment de temps pour

comprendre les stratégies à partir du modelage et la lecture à haute voix dans le cadre de la

pratique guidée. Pendant la troisième séance, les élèves pratiquent seuls les stratégies pour

trouver le sens des mots. Mais avant que les élèves se lancent dans la pratique autonome,

l’enseignant doit s’assurer que tous les élèves ont bien compris le fonctionnement de

chaque stratégie. Selon Gauthier et coll. (2013, p. 205), « il ne sert à rien d’aller plus loin

tant que les élèves ne démontrent pas qu’ils savent faire correctement une tâche par eux-

mêmes ». Pour cette raison, nous avons décidé de modifier le déroulement du modelage

conçu par Gauthier et coll. (2013) en demandant à deux ou trois élèves de reformuler les

stratégies apprises à travers une courte présentation pour leurs pairs à la place de

l’enseignant43.

Cette activité peut être difficile pour les élèves de FLE, mais nous faisons confiance à leur

apprentissage de base du français au primaire. L’importance de cette activité est de voir si

les élèves se souviennent des trois stratégies apprises lors de la séance précédente. D’une

certaine manière, il s’agit de la réactivation des connaissances des élèves en ce qui

concerne les stratégies apprises lors de la séance précédente. Nous avons pensé qu’une telle

entreprise par les élèves donnera à l’enseignant un meilleur indicatif du niveau de

compréhension de ses élèves. De même, l’enseignant doit s’assurer de choisir un élève qu’il

juge du niveau moyen, un élève du niveau faible et un élève du niveau élevé pour la

présentation afin d’avoir une meilleure idée du niveau de compréhension des élèves. C’est à

la fin de leur présentation que l’enseignant pourra juger si la classe est prête pour entamer

la pratique autonome de l’activité de la séance. 43 Le modelage est un processus cognitif et les élèves de FLE ne possèdent pas vraiment les capacités d’expliciter leur pensée. Ainsi, nous préférons de demander aux élèves de reformuler les stratégies apprises au lieu de leur demander de modéliser les stratégies.

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Tableau 15 : Séance 4

Objectif spécifique : Reconnaitre et analyser les expressions ou les groupes de mots difficiles dans le texte. Matériel : l’album Machin truc chouette, cahier des élèves, fiche pour compléter les phrases Travail préparatoire : lecture de l’album et maitrise des stratégies pour trouver le sens des mots • Ouverture de la leçon Présenter l’objectif d’apprentissage Pendant cette leçon, nous allons découvrir plusieurs expressions présentes dans notre album et nous allons apprendre à les analyser afin d’améliorer notre compréhension de notre texte littéraire. Présenter les résultats attendus À la fin de cette activité, je m’attends à ce que vous soyez capables de comprendre l’utilité de ces expressions dans un texte et de voir comment les utiliser correctement à l’écrit ou à l’oral. Réactiver les connaissances Connaissez-vous des expressions en français? Avez-vous rencontré des expressions en lisant cet album? Pouvez-vous en nommer quelques-unes? (Il est très probable que les élèves n’aient pas vraiment reconnu d’expressions en lisant cet album.) • Corps de la leçon Modelage Quoi? Aujourd’hui, nous allons voir les différentes expressions (ou groupes de mots) qui se trouvent dans notre album et nous allons essayer de les analyser et de les comprendre. Pourquoi? Les expressions ou groupes de mots que nous pouvons aussi appeler les expressions figées sont souvent utilisés dans des textes littéraires pour décrire les personnages, les événements, les endroits, entre autres, afin de rendre le récit plus intéressant. Il est important de les reconnaitre et de les interpréter afin de mieux comprendre le texte que vous lisez. Quand? Pendant vos différentes lectures. Comment? Je vais vous présenter deux expressions repérées dans notre album. Ensuite, je vais vous montrer comment bien les comprendre. Par la suite, il faudra utiliser ces expressions ou groupes de mots dans une nouvelle phrase. Je commence. 1. « C’est vraiment n’importe quoi » : expression à la première page. Cette expression fait référence au nom de l’étranger que les habitants trouvent drôle, voire vilain comme prénom. « Personne chez nous n’oserait s’appeler ainsi. » Pour comprendre cette expression, j’ai utilisé le contexte (ce qui vient avant et après). C’est une stratégie apprise lors des séances précédentes. 2. « Par chez nous » : un peu plus loin dans notre texte, nous rencontrons cette expression. Si j’analyse les phrases qui précèdent cette expression, je constate qu’on mentionne « chez nous »,

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« ici », « dans le coin ». Ces mots font référence à cette communauté où est venu habiter l’étranger. Il me semble que « par chez nous » peut être remplacé par « dans notre village » ou « dans notre endroit ». Qui peut me dire les stratégies que j’ai utilisées pour comprendre ces groupes de mots? Réponses attendues : - Utilisation du contexte de la phrase. - Se rappeler des phrases précédentes ou des phrases suivantes dans le paragraphe. - Remplacer l’expression par un autre mot ou groupe de mots. L’enseignant explique aux élèves que comme les mots difficiles dans un texte, les groupes de mots ou les expressions peuvent être compris en analysant le contexte et en regardant les images. Parfois, il est aussi utile de remplacer ces mots par d’autres mots synonymes et de voir si le sens demeure semblable. Pratique guidée Les élèves travaillent en groupe de cinq pour analyser une liste d’expressions et groupe de mots fournis par l’enseignant (Annexe 7). Ils notent les réponses dans leur cahier et l’enseignant fait le tour des groupes pour vérifier leurs réponses. L’enseignant guide les élèves et les aide à bien interpréter ces groupes de mots. Il vérifie et clarifie leurs réponses et il donne des rétroactions positives pour les réponses et il s’assure de remédier les confusions possibles en apportant des informations supplémentaires au besoin. Lorsque la majorité des élèves ont compris, on peut passer à la pratique autonome. Pratique autonome : compléter les phrases avec les expressions ou groupes de mots Ayant compris le sens des expressions, individuellement les élèves complètent des phrases construites par l’enseignant avec les expressions repérées (voir Annexe 8). • Clôture de la leçon Objectivation : Les élèves échangent leur fiche d’activité entre eux pour la correction. Un rappel des principales stratégies utilisées pendant cette leçon.

Justification et discussion sur la séance

Le but de cette quatrième séance est de reconnaitre et d’analyser les expressions ou groupes

de mots rencontrés lors de la lecture de cet album. Pour les élèves de FLE de la première

année du secondaire, reconnaitre des expressions de la langue française dans un texte peut

être impossible, car elles ne font pas partie de leur vocabulaire quotidien. Mais si nous

voulons développer leur compréhension en lecture et leur compétence lexicale, il est

important d’attirer leur attention sur ces expressions ou groupes de mots. En fait, un travail

sur les expressions ou groupes de mots est une façon de développer la connaissance lexicale

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des élèves, qui en retour aide au développement de leur habileté lexicale (David, 2000;

Holec, 1994). Les élèves doivent être capables de comprendre et d’utiliser les mots ou les

expressions qu’ils rencontrent dans un texte par exemple, à l’oral ou à l’écrit et cela

contribuera au développement de leur compétence lexicale (Holec, 1994).

Dans le cadre de cette séance, nous avons repéré une dizaine d’expressions ou groupes de

mots dans notre album (voir Annexe 7) et l’enseignant présente deux autres expressions

lors du modelage. Il est important de noter que lors de cette séance, nous présentons

uniquement aux élèves une définition simple de l’expression et nous leur expliquons

l’importance d’utiliser les expressions à l’oral ou à l’écrit. Nous pensons que la présentation

des définitions détaillées et des explications complexes en ce qui concerne les expressions

ou les suites lexicales libres et les suites lexicales figées (Chartrand, 2011) à ce moment de

l’apprentissage causera une surcharge cognitive44 chez les élèves alors que le but de cette

séance est d’aider les élèves à reconnaitre et à comprendre les expressions ou groupes de

mots. De même, il est nécessaire de faire comprendre aux élèves que certaines expressions

sont propres à une langue et, dans ce cas-là, ne peuvent pas être modifiées (expressions

figées).

Dans cette séance, l’enseignant prépare deux activités : une activité de groupe où les élèves

mettent en pratique les stratégies pour analyser et comprendre les expressions repérées

(pratique guidée) et une activité individuelle pendant laquelle les élèves complètent des

phrases à l’aide des expressions qu’ils viennent d’apprendre (pratique autonome,

Annexe 8). Nous préconisons le travail de groupe lors de la pratique guidée,

particulièrement pour cette séance, car il permet aux élèves d’interagir et de s’entraider tout

en ayant la « supervision directe et étroite de l’enseignant » (Gauthier et coll., 2013,

p. 186). De plus, le travail de groupe assure que tous les élèves fassent la même activité en

même temps (Hollingsworth et Ybarra, 2009, p. 172, dans Gauthier et coll., 2013).

Puisqu’il s’agit d’un contenu nouveau (les expressions) pour les élèves, il est important

44 « C’est-à-dire qu’il ne reste plus d’espace disponible en mémoire pour retenir et mobiliser les connaissances nécessaires pour réaliser l’apprentissage » (Gauthier et coll., 2013, p. 297).

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qu’ils puissent obtenir de l’aide maximum des pairs et de l’enseignant avant de procéder à

la pratique autonome.

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Tableau 16 : Séance 5

Objectif spécifique : Repérer le narrateur et identifier les différents personnages à l’aide des indices du texte. Matériel : l’album Machin truc chouette, cahier des élèves, fiches blanches pour dessiner, des crayons ou des feutres, Travail préparatoire : relecture de l’album • Ouverture de la leçon Présenter l’objectif d’apprentissage Pendant cette séance, nous allons nous rappeler de nos lectures de cet album et nous allons identifier « qui raconte » et « de qui parle l’histoire ». Présenter les résultats attendus À la fin de la leçon, je m’attends à ce que vous soyez capables d’expliquer qui raconte l’histoire de notre album et de nommer les différents personnages qui font l’objet de notre histoire. Réactiver les connaissances Quand vous avez lu cet album, savez-vous qui racontait l’histoire? Quelles sont les différentes personnes que vous avez rencontrées dans cet album? • Corps de la leçon Modelage Quoi? Aujourd’hui nous allons apprendre à identifier le narrateur (celui qui raconte) et les personnages (les personnes qui font l’objet de notre histoire) dans l’album. Pourquoi? Afin de bien comprendre le texte, il est important de connaitre qui raconte l’histoire et qui sont les « acteurs » qui jouent dans cette histoire. En identifiant les personnages, nous pouvons comprendre les rôles qu’ils jouent et pourquoi ils agissent de telles ou telles façons. Quand? Lors de chaque lecture d’un nouveau texte. Comment? Premièrement il est important de connaitre la définition du narrateur et du personnage. (L’enseignant écrit les définitions au tableau que les élèves notent dans leur cahier). Le narrateur : Il est celui qui raconte l’histoire. Il peut parfois être l’un des personnages ou il peut être complètement absent de l’histoire. Si le narrateur est aussi l’un des personnages, il est le narrateur témoin : il connait autant que les autres personnages. Il lui arrive de faire des commentaires sur le personnage principal, par exemple. Le personnage : Chacune des personnes qui jouent un rôle dans une œuvre littéraire. Dans un texte on peut avoir un personnage principal, celui sur lequel l’histoire est centrée, et des personnages secondaires. Ces derniers renvoient aux autres personnes de l’histoire qui aident le personnage principal ou qui peuvent être ces ennemis.

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Maintenant, je vais commencer à lire le texte pour repérer le narrateur et au fur et à mesure nous pouvons découvrir des personnages. Écoutez attentivement. « Il était arrivé un matin d’été. De quel pays? Personne ne savait. Mais il venait de loin… Il disait qu’il s’appelait Massicholihaloi. » Voilà le nom d’une personne. Il s’agit de notre premier personnage. Est-ce le personnage principal? Grâce à l’image de la page de couverture, nous voyons un homme qui fait l’objet de notre histoire. « Un nom pareil, c’est vraiment n’importe quoi! Personne chez nous n’oserait s’appeler ainsi. » La personne qui raconte l’histoire a dit « personne chez nous » alors est-ce que cela veut dire que le narrateur est quelqu’un qui fait partie de l’histoire? Dans leur cahier, les élèves dessinent un tableau ayant deux colonnes : le narrateur et les personnages. À travers le modelage de l’enseignant, ils ont pu découvrir que le narrateur fait partie de l’histoire. Le premier personnage qu’ils notent dans la colonne pour les personnages est Massicholihaloi. Pratique guidée À deux, les élèves continuent à lire l’album et ils identifient d’autres personnages du texte. Comme activité sur le narrateur, l’enseignant demande aux élèves de relever des indices sur la présence du narrateur dans le texte. Il s’agit de noter les points de vue du narrateur sur le personnage principal et sur d’autres personnages et de comprendre le rôle qu’il joue. Les élèves se posent des questions sur le rôle du narrateur dans le texte et sur ses propos concernant le personnage principal : pourquoi le narrateur possède-t-il une opinion négative du personnage principal ? (« un nom pareil, c’est n’importe quoi »). Pourquoi il ne l’adresse pas par son prénom ? L’enseignant suit attentivement la progression des élèves. Il fait le tour des tables pour vérifier et clarifier les réponses des élèves. Pendant cette étape, l’enseignant s’assure de questionner les élèves sur les démarches utilisées afin d’évaluer leur compréhension de la tâche. Il peut aussi inviter quelques élèves à faire part de leurs réponses avec la classe. Pratique autonome Seuls, les élèves catégorisent les personnages : personnage principal et personnages secondaires (les alliés et les ennemis). Ensuite, sur une feuille blanche, ils peuvent dessiner et peindre les différents personnages repérés du texte. • Clôture de la leçon Objectivation : Un rappel du rôle du narrateur dans un texte. L’enseignant invite les élèves à participer à l’enseignement : il les amène à se rappeler des indices dans le texte qui permettent de comprendre que le narrateur de cette histoire a un point de vue négatif sur le personnage principal. Il le considère comme un étranger qui ne mérite pas d’être dans cette communauté. Ensuite, les élèves collent leur dessin dans le coin de lecture et ils présentent les différents personnages de l’histoire : Massicholihaloi (l’étranger), les habitants du village (dessins de plusieurs personnages), les enfants, notamment Gaston, la femme de l’étranger et ses enfants (personnages mentionnés seulement).

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Justification et discussion sur la séance

Nous abordons dans cette cinquième séance de notre séquence deux notions importantes

d’une œuvre littéraire : le narrateur et le personnage. Selon Piotrowska-Skrzypek (2010),

quand nous étudions le contenu de l’album, les questions « Qui? », « Pourquoi? »,

« Comment? », « Quand? », etc. peuvent être posées. Ce sont des questions qui aident à la

compréhension globale du texte et une façon d’y répondre est d’identifier qui raconte

l’histoire et qui sont les acteurs. La reconnaissance du narrateur et l’identification des

personnages figurent parmi les stratégies pour comprendre un texte littéraire que présente

Falardeau dans la grille d’évaluation de la compétence à lire et à apprécier des textes variés

(http://www.strategieslectureecriture.com/). Le narrateur joue un rôle important dans un

récit, car il « organise la narration, choisit un point de vue et sélectionne des informations »

(Tsimbidy, 2008, p. 195).

Dans notre album, le narrateur est aussi un personnage de l’histoire – il est le narrateur

témoin qui a observé les évènements et qui les raconte. En reconnaissant le narrateur et les

rôles qu’il joue, les élèves arrivent à mieux comprendre l’histoire, car il s’agit dans cet

album d’un narrateur qui a un point de vue plutôt péjoratif du personnage principal.

Cependant, ce narrateur qui n’est pas nommé et qui est aussi un membre du village peut

constituer une difficulté de compréhension pour les élèves. Il est important d’amener les

élèves à comprendre la raison pour laquelle le narrateur utilise le « nous » en se permettant

de représenter la communauté entière. En analysant le lexique utilisé par le narrateur dans

le texte, les élèves arrivent à comprendre et à connaitre la position du narrateur par rapport

au personnage principal. En effet, l’activité de la pratique guidée permet aux élèves de

repérer des indices ou des mots qui soulignent la présence du narrateur et ils arrivent aussi à

connaitre les points de vue du narrateur concernant les différents personnages. Pendant

cette étape, les élèves sont amenés à poser des questions sur le rôle du narrateur et sa

relation avec le personnage principal. Pourquoi le narrateur n’adopte-t-il pas une position

neutre en ce qui concerne l’immigrant ? Pourquoi le narrateur semble connaitre assez bien

l’étranger ? Comment se fait-il que le narrateur possède autant d’informations sur les

personnages de l’œuvre ? Des propos tels que : « un nom pareil, c’est vraiment n’importe

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quoi! », « il devait être dingue, ou niais, ou bien mal renseigné », « ce Machin-Truc-Bidule

était une vraie tête de mule! » dévoilent ce que pense le narrateur du personnage principal.

Il s’agit d’un récit à focalisation interne, car le narrateur adopte le point de vue d’un des

personnages de l’album et il se permet de critiquer et de donner ses opinions (Tsimbidy,

2008). Puisqu’il s’agit dans cette séance d’une tâche assez complexe, pendant la pratique

guidée, l’enseignant doit surveiller attentivement la progression des élèves afin de s’assurer

de leur compréhension. Il doit questionner les élèves et apporter des rétroactions tout au

long de la séance.

À partir de l’activité sur le narrateur, nous constatons qu’il y a trois groupes de personnages

dans l’histoire : les villageois (les adultes — représenter par le narrateur), les enfants

(représenter par Gaspard) et l’étranger (Massicholihaloi). Ainsi, concernant la notion de

personnage, nous demandons aux élèves dans cette séance uniquement d’identifier les

différents personnages et de les catégoriser en tant que personnage principal et personnages

secondaires. Pour Tsimbidy (2008), le personnage est « une construction textuelle et, dans

le cas de l’album, une représentation iconographique45 qui sert de “support à l’action”, c’est

encore pour le lecteur un support d’identification » (p. 217). Dans ce sens, un travail sur les

personnages peut bien aider les élèves à mieux comprendre le texte, car il les permet de

s’identifier aux personnages, d’essayer de comprendre leurs rôles dans le récit et les

rapports qu’ils entretiennent entre eux. Ce sont tous des éléments que nous abordons dans

la prochaine séance.

45 La représentation du personnage en image.

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Tableau 17 : Séance 6

Objectif spécifique : Chercher dans le texte et à travers les images les informations pour décrire les différents personnages. Matériel : l’album Machin truc chouette, fiche préparée pour noter des informations sur les personnages (Annexe 9) Travail préparatoire : lecture de l’album, se rappeler des différents personnages identifiés dans la séance précédente • Ouverture de la leçon Présenter l’objectif d’apprentissage Aujourd’hui, nous allons chercher les mots ou les phrases dans le texte qui décrivent les personnages. Nous allons aussi observer les images pour obtenir des informations sur ces personnages. Présenter les résultats attendus À la fin, je m’attends à ce que vous soyez capables de décrire les différents personnages du texte et d’expliquer les rôles qu’ils jouent dans cette histoire. Réactiver les connaissances Qui sont les personnages de notre album? Nommez-les. • Corps de la leçon Modelage Quoi? Pour cette leçon, nous allons parcourir l’album à la recherche des informations sur les différents personnages. Pourquoi? En cherchant ces informations, nous arriverons à décrire les personnages et à comprendre les rôles qu’ils jouent dans l’histoire. Quand? À chaque fois que vous lisez un récit littéraire, il est important de comprendre chaque personnage et de le décrire afin de comprendre l’histoire. Comment? Je vais vous démontrer la stratégie de cette séance. Voici une fiche contenant un tableau dans lequel vous devez noter toutes les informations requises sur le personnage choisi (Annexe 9). Écoutez attentivement. Le personnage que je choisis est Gaspard. Gaspard est un enfant de mon histoire. Nous le rencontrons à la huitième page de notre album. Dans le paragraphe de cette page, le narrateur raconte : « Souvent, le p’tit Gaspard allait lui tenir compagnie, il revenait disant qu’il aimait les chansons que l’autre fredonnait, et les histoires à rallonges venues de son pays. Mais le p’tit Gaspard n’est pas très très futé. » Dans ce paragraphe, il y a beaucoup d’informations sur Gaspard. Premièrement, j’apprends qu’il est petit, alors je note « petit » sur ma feuille sous la catégorie « portrait de mon personnage ». Dans l’image, je vois qu’il a des cheveux courts et noirs. En ce qui concerne les activités de Gaspard, il aime passer du temps avec l’étranger, car il aime bien ses histoires et ses chansons. Cependant, les adultes de la communauté pensent qu’il « n’est pas très très futé », c’est-à-dire ils pensent qu’il est plutôt bête. Il n’y a pas

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d’informations concernant ce que pensent les autres enfants de lui ici, mais selon l’image je peux noter que Gaspard est joyeux, surtout en compagnie de l’étranger. Comment est-ce que j’ai pu obtenir ces informations sur Gaspard? Réponses attendues : - En regardant les images; - En lisant le paragraphe où le personnage est décrit; - En analysant le contexte de la phrase ou du paragraphe; - En comprenant le sens des mots décrivant le personnage. L’enseignant explique aux élèves qu’ils peuvent trouver des informations sur les personnages grâce au texte et aux illustrations. Il indique qu’il faut aussi comprendre l’essentiel d’un paragraphe pour en retirer des informations (interprétation). Pratique guidée Les élèves forment des groupes de cinq et ils notent sur leur feuille les informations trouvées sur Gaspard par l’enseignant. Dans leur groupe, ils parcourent l’album à la recherche des autres informations sur Gaspard. L’enseignant surveille attentivement le déroulement de la leçon en consacrant quelques minutes pour vérifier les réponses dans les différents groupes. Il demande des explications sur les démarches utilisées par les élèves et il clarifie les confusions s’il y en a. L’enseignant s’assure de la compréhension de l’activité par tous les élèves et il vérifie le choix des mots pour décrire le personnage par les élèves. Par la suite, il peut inviter certains élèves à partager leur réponse avec les autres en classe. Pratique autonome Seuls maintenant, les élèves complètent la fiche sur le personnage principal : Massicholihaloi. À la fin, les élèves peuvent échanger leur fiche entre eux pour une correction générale en classe. • Clôture de la leçon Objectivation : Questionner les élèves sur les principales informations à retenir sur Gaspard et Massicholihaloi. - Que pensent les adultes de Gaspard ? - Pourquoi Gaspard aime-t-il passer du temps avec l’étranger ? - Comment les habitants se comportent-ils envers l’immigrant ?... À faire à la maison : compléter la fiche sur l’autre personnage : les habitants du village.

Justification et discussion sur la séance

Pour la sixième séance, nous poursuivons notre travail sur les personnages. Le but de la

séance est de chercher dans l’album les informations pour décrire les différents personnages

identifiés lors de la séance précédente. Les personnages sont créés traditionnellement en les

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nommant et en les caractérisant, d’une part, de manière explicite par leur portrait physique

et par leurs émotions, d’autre part, de manière implicite par ce qu’ils font et ce qu’ils disent

(Tsimbidy, 2008). Dans le cadre de notre album, nous avons un personnage principal,

Massicholihaloi, et deux personnages secondaires, les habitants du village (incluant le

narrateur) et Gaspard (qui représente aussi les enfants). Giasson (2003) présente plusieurs

activités pédagogiques centrées sur les personnages : chercher des informations sur les

personnages, établir les liens entre les personnages, faire la biographie des personnages,

mimer ou jouer l’histoire, entre autres. Vu le nombre des personnages et la longueur de

notre album, nous optons pour la recherche d’informations pour décrire les trois

personnages de notre album.

À partir du modelage de l’enseignant, les élèves arrivent à comprendre que le texte et les

illustrations leur fournissent beaucoup d’informations sur les différents personnages de

l’album. Dans un roman, cette activité peut s’avérer plus complexe pour les élèves de FLE,

car les caractéristiques des personnages et les relations entre eux ne sont pas toujours

présentées d’une manière explicite, mais dans le cadre de cet album, le rapport de

redondance (Van der Linden, 2007) qui existe entre le texte et l’image peut permettre aux

élèves de mieux repérer les informations nécessaires sur les personnages. Cependant, il y a

parfois, même si c’est rare, des endroits dans l’album où les élèves doivent être capables

d’interpréter ou faire des inférences afin d’obtenir plus d’informations sur les personnages.

Par exemple, dans la phrase « Il est parti avec son fusil, un matin de septembre; pour

revenir, avec une main en moins, un soir de décembre » (page 12 de l’album), la capacité

d’inférer des élèves leur permettra de déduire qu’il y a eu un incident pendant la guerre où

l’étranger a perdu l’une de ses deux mains. Ainsi, même si nous ne demandons pas à

l’enseignant de consacrer toute une leçon sur la notion d’inférence, il importe de rappeler

aux élèves de bien porter attention aux indices du contexte du texte, aux phrases du

paragraphe et aux mots qui viennent avant ou après l’expression ou mots difficiles à

comprendre (voir séance 2) afin de mieux comprendre l’information présentée.

Dans cette séance, nous utilisons une fiche présentant les informations sur chacun des

personnages (Annexe 9) qui est une adaptation de celle trouvée dans l’ouvrage La lecture :

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de la théorie à la pratique de Giasson (2003) (voir Annexe 10). En utilisant cette fiche, les

élèves travaillent premièrement en groupe de cinq pour décrire le personnage Gaspard

(pratique guidée) et, ensuite, lorsque l’enseignant est convaincu que 95 % des élèves ont

compris la tâche, ils peuvent compléter seuls la fiche sur le personnage principal (pratique

autonome). Il s’agit d’une activité de l’écrit et nous nous attendons à ce que les élèves

puissent utiliser leur propre vocabulaire pour décrire les personnages. L’enseignant peut

corriger les erreurs de grammaire et d’orthographe, mais il reste que l’importance de

l’activité est la compréhension en lecture des élèves. Au fur et à mesure que les séances

s’enchainent, la compréhension des élèves se développe et ils sont capables de puiser dans

leurs connaissances lexicales pour trouver des mots pour mieux décrire les personnages.

Comme le dit bien Giasson (2003, p. 338), « la lecture peut aider à enrichir le

vocabulaire ». Par exemple, en ce qui concerne le personnage principal, il est possible

d’écrire que l’étranger était en colère et très désappointé par les comportements des

habitants à la fin quand ils l’ont obligé à partir. Les indices aidant les élèves à trouver ces

informations sont l’expression sur le visage du personnage (indice illustratif) et les points

d’exclamation (la ponctuation) utilisés dans le texte qui démontrent que l’étranger a dû

crier en s’exprimant (« Pas mon pays? Ma main gauche, je lui ai sacrifié! »)

Cette séance sur la description des personnages est l’occasion pour les élèves de se mettre

dans la peau des personnages et de comprendre leurs émotions à travers ce qu’ils disent et

ce qu’ils font. Même si l’activité en question ne demande pas aux élèves de donner leurs

opinions critiques sur les personnages, elle les amène quand même à réfléchir et à

s’identifier aux personnages ou à un personnage en particulier. Par exemple, en complétant

la fiche (Annexe 9) sur les émotions de Massicholihaloi, les élèves ne pourraient pas

s’empêcher de se mettre dans la peau de l’étranger pour comprendre ce qu’il ressent quand

les habitants lui commandent plusieurs travaux pour une petite somme d’argent et avec un

handicap physique ou lorsqu’ils refusent d’accepter la venue de la famille de l’immigrant.

Selon Giasson, « le récit littéraire est en ce sens plus puissant que le texte documentaire,

car, en plus de donner accès aux faits, il amène le lecteur à s’identifier aux personnages et à

partager intimement leur vie et leurs sentiments » (2003, p. 279). Cette séance est préalable

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à la prochaine qui amène les élèves à faire le lien entre le monde fictionnel et le monde réel

dans lequel ils vivent afin de comprendre les intentions de l’auteur.

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Tableau 18 : Séance 7

Objectif spécifique : Repérer et expliquer les principaux thèmes. Matériel : l’album Machin truc chouette, cahier des élèves, dictionnaire (au besoin) Travail préparatoire : relecture de l’album • Ouverture de la leçon Présenter l’objectif d’apprentissage Aujourd’hui, nous allons travailler sur les principaux thèmes de notre album. Présenter les résultats attendus À la fin, je m’attends à ce que vous soyez capables d’utiliser cette stratégie avec d’autres textes pour améliorer votre compréhension. Réactiver les connaissances Que comprenez-vous par « thèmes »? Pourquoi pensez-vous l’auteur a écrit cet album? • Corps de la leçon Modelage Quoi? Pour cette leçon je vais vous aider à identifier les principaux thèmes de notre album. Nous allons ensuite essayer d’expliquer les différents thèmes repérés. (Nous jugeons que la majorité des élèves ignoreront ce qu’est un thème, alors avant le modelage, l’enseignant fera un cours magistral sur « les thèmes » où il donnera des explications et des exemples)46. Pourquoi? Pourquoi est-il important d’identifier les principaux thèmes d’un texte littéraire? Réponses attendues : - Pour mieux comprendre l’histoire. - Pour connaitre les idées centrales de l’œuvre. - Pour connaitre l’intention de l’auteur. - Pour faire des liens entre le texte et le monde dans lequel nous vivons ou nos expériences

personnelles. Quand? Après la relecture d’un texte, lorsqu’on veut mieux comprendre le texte pour l’interpréter. Comment? Nous avons lu notre album plusieurs fois et nous connaissons assez bien l’essentiel du texte. Lorsque nous voulons repérer les principaux thèmes d’un récit, nous pouvons nous poser ces quelques questions : De quoi parle cette histoire? Quel message l’auteur veut-il faire passer à travers cette histoire? Qu’est-ce que j’ai appris à la fin de mes lectures? En répondant à la première question, je dirai que l’histoire parle d’un homme qui s’installe dans un nouveau pays. Il essaye de s’intégrer dans la communauté et de se faire accepter par tout le monde. C’est pour cela

46Un thème est un sujet abordé dans un texte littéraire. Pour le repérer, il faut comprendre l’ensemble du texte et déterminer l’intention de l’auteur. Un travail sur le champ lexical à l’aide du dictionnaire peut aider dans l’identification des thèmes.

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qu’il ne refuse jamais les nombreuses demandes de ses voisins. Selon ce petit résumé, une information ou un thème principal en ressort : l’intégration. Je peux utiliser le dictionnaire pour chercher la définition de l’intégration. C’est « l’action de faire entrer dans un ensemble et de s’adapter ». Je crois que ce thème résume bien cette histoire. Et pour mieux comprendre ce thème, je peux chercher d’autres mots ou phrases dans le texte qui renvoient à « l’intégration », par exemple : « il avait fait une vraie maison qui ressemblait à… », « notre langue, il s’est mis à apprendre », « il aurait pu nous ressembler ». Maintenant pouvez-vous repérer d’autres thèmes? Pratique guidée : proposition des thèmes par les élèves En plénière, l’enseignant aide les élèves à repérer d’autres thèmes. Il demande les élèves de se poser des questions sur l’intention de l’auteur, sur la morale de l’histoire, sur les idées qui ressortent après leurs lectures du texte, entre autres. Les élèves lèvent la main et l’enseignant note leurs réponses au tableau (les élèves n’utilisent pas l’album pendant cette activité). Les réponses attendues : - L’immigration - La xénophobie (les élèves ne connaitraient peut-être pas ce mot, mais selon leurs explications,

l’enseignant peut leur proposer ce thème) - Le racisme - L’exploitation - L’amitié (entre l’étranger et Gaspard) - La famille (l’immigrant a travaillé dur afin de faire venir toute sa famille) Si les élèves rencontrent des difficultés dans le repérage des thèmes, l’enseignant peut leur poser des questions spécifiques pour les aider. Par exemple : - Qu’avez-vous aimé le plus en lisant cette histoire ? - Qu’est-ce qui vous a rendu triste ou en colère ? - Comment décririez-vous la relation entre l’immigrant et les habitants ? - De quelle façon les habitants traitent-ils l’immigrant ? Pratique autonome Les élèves choisissent deux thèmes de la liste au tableau et ils cherchent dans l’album des mots ou des phrases qui font référence à ces thèmes. À l’aide du dictionnaire ou des stratégies pour trouver le sens des mots, ils essaient de définir les thèmes choisis. • Clôture de la leçon Objectivation : Rappel des principaux thèmes travaillés pendant la leçon. Quel message l’auteur a-t-il voulu faire passer à travers ces thèmes?

Justification et discussion sur la séance

Nous travaillons dans cette séance sur les principaux thèmes de l’album. Pour ce faire, les

élèves doivent être capables de repérer et d’expliquer les idées importantes ou les

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informations de l’ouvrage. Un travail sur les thèmes permet de comprendre l’implicite du

texte et d’aller au-delà du texte (Bianco, 2014, voir Tableau 6). Il implique une réactivation

des connaissances des élèves sur l’œuvre lue et il permet aussi aux élèves de développer

leur compétence lexicale, car ils auront à s’exprimer, ainsi mettre en pratique leurs

habiletés lexicales. Puisque le thème est « un concept abstrait qui exige un effort de la part

des lecteurs débutants comme des plus expérimentés » (Serafini, 2008, p. 41), il est

important que l’enseignant consacre quelques minutes avant le modelage pour bien le

définir à l’aide d’exemples simples. L’enseignant peut commencer par une définition

générale du terme thème et expliquer comment les thèmes aident à comprendre le sujet

abordé dans un texte littéraire. Pour illustrer ses propos, l’enseignant peut présenter aux

élèves une liste des mots qui renvoient au thème de l’amitié : amis, amicalement, amour,

passer des bons moments ensemble, camaraderie, affection, etc. Il fait comprendre aux

élèves qu’un travail sur le champ lexical peut aider à repérer les thèmes dans un texte

littéraire.

Serafini (2008) propose de s’appuyer sur les expériences banales des élèves et d’utiliser le

savoir qui en ressort pour expliquer les thèmes en littérature. Dans le cadre de notre séance,

l’enseignant peut demander aux élèves de chercher des mots ou des phrases qui renvoient

au thème de la famille par exemple. Les réponses données, par exemple la maison, le

mariage, les parents, les enfants, les liens familiaux, pourraient permettre de comprendre

que le thème tourne autour d’une même idée ou d’un sujet en particulier (Serafini, 2008). À

partir de cela, l’enseignant doit expliquer aux élèves qu’en littérature il faut être capable de

déduire ou de construire des thèmes (Serafini, 2008) en se posant des questions sur la

morale de l’histoire, sur l’intention de l’auteur, sur le lien entre l’intrigue et les

personnages, entre autres (Giasson, 2003).

Dans le cadre de cette séance, les thèmes repérés ne sont pas tous des mots connus par ces

élèves de FLE. Les mots tels que la xénophobie, l’exploitation ou même l’immigration ne

forment pas partis de vocabulaire courant des élèves. Pour cette raison, la pratique guidée

se déroule en plénière et l’enseignant guide les élèves dans la recherche des thèmes de

l’album. Il leur pose des questions spécifiques pour les aider à cerner les thèmes. Suivant

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l’exemple du modelage, les élèves répondent à ces questions : De quoi parle cette histoire ?

Quel message l’auteur veut-il faire passer à travers cette histoire ? Pourquoi les habitants

traitent-ils l’immigrant ainsi ? Pourquoi l’immigrant ne refuse jamais les tâches que les

habitants lui demandent de faire ? entre autres. Les réponses à ces questions amènent les

élèves à s’exprimer sur le contenu de l’album et sur les idées centrales du texte.

L’enseignant a le rôle d’interpréter les réponses des élèves et de proposer des thèmes précis

lorsque les élèves ne connaissent pas le vocabulaire qu’il faut utiliser. Par exemple, pour

dégager le thème de la xénophobie, l’enseignant peut demander aux élèves pourquoi les

habitants refusent que l’immigrant fasse venir sa famille dans son nouveau pays. Pour

répondre à cette question, les élèves peuvent évoquer le fait que les habitants ne veulent pas

que l’étranger fasse partie de leur communauté, qu’ils n’aiment pas sa culture (ses

chansons, ses habits, ses histoires) et qu’ils ne veulent pas voir leur village envahi pas des

étrangers. Les élèves justifient ces propos avec des exemples du texte : « un nom pareil,

c’est vraiment n’importe quoi », « à voir l’état de sa chemise et de ses chaussures », « non,

mais, Truc-Machin, tu dérailles ! ce n’est pas ton pays, tu ne seras jamais vraiment d’ici ! »

En fait, il s’agit d’une façon de faire découvrir de nouveaux mots aux élèves pendant le

processus de compréhension en lecture qui est le but de l’enseignement de cet album.

Pendant la phase d’objectivation de cette séance, l’enseignant pose une question aux

élèves : Quel message l’auteur a-t-il voulu faire passer à travers ces thèmes? Cette

question sert à annoncer la prochaine et dernière séance de la séquence. Notons que la

clôture d’une leçon est une étape brève, mais importante de la démarche de l’enseignement

explicite. Elle sert à se rappeler des apprentissages réalisés, à annoncer l’objectif de la

prochaine leçon ou séance et à donner des devoirs afin de poursuivre le processus de

compréhension et d’apprentissage (Gauthier et coll., 2013). Dans le cadre de cette séance,

la question que pose l’enseignant amène les élèves à réfléchir sur les thèmes repérés

pendant la séance. Ils auront un travail de réflexion à faire à la maison et pendant la

dernière séance, à travers le débat interprétatif l’enseignant reviendra sur cette question

avec les élèves. Pendant la discussion, les élèves pourraient dire pourquoi l’auteur a opté

pour des thèmes tels que la xénophobie, le racisme, l’intégration et l’immigration dans son

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œuvre. Ce sera une occasion pour les élèves de faire le lien entre l’album et les expériences

vécues ou connues dans le monde dans lequel ils vivent.

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Tableau 19 : Séance 8

Objectif spécifique : Produire un débat interprétatif sur l’album. Matériel : l’album Machin truc chouette Travail préparatoire : la lecture, la compréhension du texte, rappel des principaux thèmes • Ouverture de la leçon Présenter l’objectif d’apprentissage Il s’agit aujourd’hui de la dernière activité sur notre album. Nous allons débattre et discuter sur le contenu de notre album. Présenter les résultats attendus À la fin de cette séance, je m’attends à ce que vous soyez capables de vous exprimer sur les différentes interprétations possibles du texte. Réactiver les connaissances Qu’est-ce que vous avez appris à travers les différents thèmes de la séance précédente? Comment termine-t-elle cette histoire sur l’étranger qui vient immigrer dans ce village? Les habitants avaient-ils raison de faire partir Massicholihaloi? • Corps de la leçon Modelage Quoi? Pour cette leçon, nous allons produire un débat interprétatif sur l’album. Il s’agit d’un genre scolaire oral qui vous invite à discuter des différentes interprétations d’un texte littéraire. Pourquoi? Pour mieux comprendre un texte littéraire. Quand? Après la lecture de votre texte. C’est une façon de réagir au texte et de contempler plusieurs interprétations possibles de l’histoire. Comment? Je vous explique l’activité. Le modelage sera bref, car il s’agit vraiment d’une activité de groupe. Vous avez tous lu l’album « Machin truc chouette », et vous avez repéré les principaux thèmes. Pour ce débat, je vous propose trois questions qui relèvent des problèmes d’interprétation possibles et dans votre groupe, vous allez en discuter et donner vos opinions. Il n’y a pas des bonnes ou mauvaises réponses, mais vous devez être capables de justifier vos interprétations. Après votre travail en groupe, la classe entière participera au débat et chacun pourra s’exprimer. Voilà les trois questions : 1. Pourquoi les habitants appellent-ils l’étranger « Machin truc chouette »? 2. Pourquoi Massicholihaloi accepte-t-il d’aller à la guerre pour son pays d’accueil? 3. Comment se sent l’immigrant lorsque les habitants lui demandent de partir? Je modélise la première question. Selon moi, on l’appelle ainsi parce que son prénom est trop compliqué à prononcer. Les habitants ne sont pas habitués à un tel nom et ils ne veulent pas faire l’erreur en prononçant son vrai nom. Dans le livre, même le petit Gaspard ne dit pas son nom et

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lui, il aime bien l’étranger. Que pensez-vous de cela? Pensez-vous que les habitants ne prononcent pas le nom de l’étranger parce que c’est trop compliqué ou parce qu’ils ne veulent pas le connaitre ? Exemples de commentaires des élèves : - Non, je ne suis pas d’accord. S’ils prennent du temps, ils peuvent bien arriver à prononcer le

nom de l’étranger. C’est parce qu’ils n’aiment pas l’immigrant qu’ils l’appellent ainsi. - Peut-être, mais je crois qu’ils ne s’intéressent pas à lui personnellement, ainsi ils ne fournissent

pas l’effort pour apprendre son nom. Les élèves donnent leurs opinions et l’enseignant s’assure que les élèves ont compris l’activité avant de donner d’autres consignes. Pratique guidée Les élèves se mettent en groupe de cinq et ils discutent sur les deux premiers sujets proposés. Ils proposent des interprétations possibles par rapport aux sujets et ils peuvent les noter sur une feuille. L’enseignant leur donne suffisamment de temps pour discuter et il surveille attentivement le déroulement des discussions en clarifiant des doutes et en donnant des exemples au besoin. Ensuite, il anime et guide le débat interprétatif. Il est conseillé que l’enseignant gère l’animation du débat car il s’agit d’une activité assez complexe et en guidant le débat, l’enseignant arrive à mieux vérifier la compréhension des élèves, à donner des rétroactions aux élèves et à corriger les erreurs de compréhension. Pratique autonome Dans leur groupe respectif, les élèves réfléchissent sur la troisième question. Ensuite, l’enseignant dirige un débat sur le sujet. À chacun son tour, un élève présente son interprétation de la question et il justifie sa réponse. D’autres élèves disent s’ils sont en accord ou en désaccord et ils apportent leur justification par rapport au texte. Comme pour la pratique guidée, ici aussi la pratique autonome concerne uniquement la formulation des interprétations et des justifications par les élèves. • Clôture de la leçon Objectivation : À la fin de cette séquence, avec les élèves, l’enseignant fait un bilan des activités sur lesquelles ils ont travaillé pour comprendre l’album. Il fait remplir aux élèves une fiche critériée résumant les caractéristiques de l’album (voir Annexe 11). Les élèves peuvent dire ce qu’ils retiennent le plus, ils peuvent se rappeler des expressions et des mots qu’ils ont appris, entre autres.

Justification et discussion sur la séance

La dernière séance de notre séquence aborde la notion d’interprétation à travers la

production d’un débat interprétatif avec les élèves. Le concept d’interprétation n’est pas

l’élément central de l’objectif de notre mémoire, mais il joue quand même un rôle

important en ce qui concerne la compétence de compréhension en lecture. Pour Tauveron

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115

(1999), l’interprétation n’est pas une activité seconde et supérieure à la compréhension. En

fait, elle fait partie du processus de compréhension. Il s’agit d’une compréhension plus fine

du texte en éliminant les différents problèmes de lecture (nous en parlerons plus loin). Les

processus de compréhension et d’interprétation sont beaucoup plus visibles dans les textes

que Tauveron (1999) surnomme « réticents » et « proliférants ». Puisque nous travaillons à

partir d’un album qui présente très peu de réticence pour les lecteurs, nous n’avons pas

voulu consacrer des chapitres sur le concept d’interprétation. De même, dans le cadre de

cette dernière séance, en voulant bien évaluer la compréhension des élèves, nous sommes

d’avis que le débat interprétatif serait une bonne façon de clore la séance et de terminer la

séquence.

Le débat interprétatif est un genre scolaire qui permet aux élèves de discuter des différentes

interprétations possibles d’un texte littéraire. « Il s’agit d’un exercice de construction

collective du sens, grâce à l’ouverture d’un espace où les élèves sont appelés à exprimer

eux-mêmes des hypothèses sur la signification du texte, plutôt qu’à attendre que

l’enseignant le leur explique du haut de sa position d’autorité » (Citton, 2013, p. 57).

Également appelé « débat de lecture », le débat interprétatif permet aux « jeunes lecteurs de

mesurer leurs gouts et leurs compétences vis-à-vis des textes littéraires et de soumettre ces

textes à leur jugement critique » (Sorin, 2006, p. 79). Il peut se faire avec les élèves

« depuis les premiers degrés du parcours scolaire jusqu’aux bancs de l’université » (Citton,

2013, p. 57). Selon Sorin (2006), « le débat de lecture semble donc la voie royale pour

engager de façon collective les jeunes lecteurs dans l’interprétation de l’œuvre, l’important

étant moins de trouver un consensus au sujet des réponses qu’une certaine connivence

autour des questions, des problèmes, des enjeux soulevés » (p. 79). Il suffit d’une bonne

explication et d’un bon guidage de la part de l’enseignant, particulièrement avec nos élèves

de FLE. Le débat interprétatif se déroule habituellement en quatre phases (Citton, 2013) :

1. La lecture d’un même texte par les élèves (en classe ou à la maison).

2. La présentation du but du débat par l’enseignant et ses règles de déroulement.

3. La sollicitation des participants pour qu’ils expriment leur interprétation du texte. Les

participants doivent justifier leur propos avec des exemples ou des explications.

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116

L’enseignant est habituellement le facilitateur ou le modérateur, mais lors de notre

pratique guidée, un élève peut assumer ce rôle (dans chaque groupe) sous la

surveillance de l’enseignant.

4. À la fin, l’enseignant revient sur les principaux points en commun et les principaux

éléments de désaccord avec les élèves. L’importance est la neutralité et la présentation

des différentes interprétations et leurs justifications.

En ce qui concerne la deuxième phase de cet exercice où l’enseignant présente quelques

règles de base, c’est aussi l’occasion pour l’enseignant de présenter les trois problèmes de

lecture identifiés comme sujet du débat. Nous ne rentrons pas dans les détails par rapport

aux problèmes de lecture avec les élèves, mais nous leur expliquons qu’il s’agit des

questions que nous pouvons poser sur le contenu du texte et qui peuvent avoir plusieurs

réponses ou interprétations possibles. Cet album ne présente pas une grande gamme de

problèmes de lecture grâce au rapport de redondance entre texte et image et aux séances

précédentes où les élèves ont pu travailler sur plusieurs stratégies de lecture qui ont dû

améliorer leur compréhension du texte. De même, il y a plusieurs questions qui sont

soulevées à travers la lecture de cet album et qui méritent une discussion approfondie chez

les élèves afin d’améliorer leur compréhension du texte.

Les trois questions ou problèmes de lectures permettent aux élèves de discuter des idées

clés de cet album. La première question relève du titre de l’album et elle amène les élèves à

réfléchir et à discuter des raisons pour lesquelles les villageois ne cherchent pas à apprendre

le prénom de l’étranger. La connaissance et la compréhension des thèmes repérés pendant

la séance précédente peuvent aider les élèves à expliquer les comportements des habitants

envers l’immigrant. Le deuxième problème de lecture peut s’avérer plus compliqué pour les

élèves car le texte ne dévoile pas les réponses explicitement. De même, les thèmes

d’intégration et de l’immigration peuvent aider les élèves à faire le lien entre la décision de

l’immigrant de partir à la guerre pour son pays d’accueil et tout ce qu’il fait pour sa

communauté et l’envie de faire venir toute sa famille à la fin. En ce qui concerne la dernière

question, les illustrations et le texte fournissent aux élèves suffisamment d’indices pour

pouvoir bien y répondre et de participer à la discussion.

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Le débat interprétatif comme clôture de la séquence coïncide aussi avec notre objectif de

préparer plusieurs activités orales avec les élèves afin qu’ils arrivent à manifester leur

compréhension de la lecture d’un texte littéraire et de mettre en pratique leur compétence

lexicale. À travers le débat, les élèves sont amenés à discuter et à s’exprimer à l’oral, et

nous nous attendons à ce qu’ils puissent mettre en évidence les connaissances et les

habiletés lexicales apprises tout au long de la séquence. L’enseignant doit encourager la

participation de tous les élèves, même ceux qui craignent faire des fautes de grammaire en

s’exprimant. Pour cette dernière séance, la pratique autonome de l’enseignement explicite

de notre album se fait en plénière, avec l’enseignant comme modérateur du débat, mais les

élèves sont regroupés à cinq pour une bonne gestion de classe. Selon Rosenshine et Stevens

(1986) dans Gauthier et coll. (2013), il y a trois façons de réaliser la pratique autonome : 1)

individuellement, mais avec des instructions précises; 2) l’enseignant dirige la pratique en

posant des questions claires et directes et s’assure que tout le monde y répond comme il

faut; 3) le travail en groupe où les élèves s’entraident et coopèrent et passent à une épreuve

de compétition. Dans le cadre de notre séance, il s’agit d’une fusion de pratiques : les

élèves travaillent en groupe47 et l’enseignant dirige. Mais notre objectif est de s’assurer de

la compréhension de tous les élèves.

47 Le débat se fait avec la classe entière. Les élèves sont mis en groupe de cinq pour faciliter la gestion de classe.

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CONCLUSION DE LA SÉQUENCE

L’élaboration de cette séquence didactique nous a permis de réfléchir sur nos pratiques

d’enseignement et de proposer plusieurs activités pédagogiques pouvant stimuler la

compréhension en lecture des élèves tout en développant leur compétence lexicale. Dans le

cadre de ce mémoire, nous n’avons pas pu tester notre séquence au sein d’une classe de

FLE, mais nous avons présenté une justification et une discussion à la fin de chaque séance

afin d’apporter des informations supplémentaires et des explications sur chacune des

séances et de répondre aux questions qui peuvent surgir chez les lecteurs. Certes, nous

n’avons pas pu répondre à toutes les questions, mais notre discussion sert à expliciter

davantage chaque séance et à guider les lecteurs. Nous avons tenté de présenter aux

chercheurs et aux enseignants les justifications théoriques en ce qui concerne le

déroulement de chaque séance et le choix des activités élaborées pour les élèves.

L’élaboration de la séquence est une façon de montrer aux enseignants de FLE, et à ceux

des Seychelles en particulier, qu’il est possible d’intégrer la lecture des textes littéraires en

classe de français.

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CONCLUSION

Bien qu’il partage le statut de langue nationale avec le créole et l’anglais, le français ne

remplit pas les mêmes fonctions au sein de la société seychelloise. À l’école, même si le

programme indique clairement les objectifs de l’enseignement et de l’apprentissage du

français, dans les classes, la situation ne reflète pas entièrement les prescriptions

ministérielles. Nous avons constaté que face au programme de DELF (Diplôme d’Études en

Langue Française), les enseignants négligent certains aspects du programme officiel du

français, notamment la lecture des textes littéraires. Cette dernière ne fait pas partie des

objectifs de DELF. Ainsi, les enseignants ne trouvent aucune raison de l’insérer dans les

cours de français. Mais nos recherches dans le champ de la didactique du français nous ont

montré l’importance des textes littéraires en ce qui concerne l’acquisition de la langue, la

compréhension en lecture, l’appropriation et l’acquisition du lexique.

À travers ce mémoire nous avons essayé de combler certaines lacunes de l’enseignement et

de l’apprentissage du français aux Seychelles en explorant les avantages de travailler à

partir d’un corpus littéraire, l’album de jeunesse, pour le développement de la

compréhension en lecture et de la compétence lexicale. L’album contribue à susciter le gout

de lire chez les jeunes et peut être utilisé à des fins didactiques. Un enseignement efficace

peut favoriser la compréhension de tous les élèves, et l’approche de l’enseignement

explicite semble être la voie idéale pour aider les élèves dans l’apprentissage des contenus

d’enseignement. Selon Bianco (2011), Boyer (1993), Gauthier et coll. (2013) et Giasson

(1990, 2003, 2011), l’enseignement explicite constitue une méthode efficace pour

l’enseignement de la compréhension en lecture, des stratégies de lecture, du lexique, des

langues, entre autres. Nous espérons pouvoir introduire cette démarche au sein de nos

classes aux Seychelles ou du moins la présenter aux personnes concernées du ministère de

l’Éducation. Nous serons prêts à travailler avec les représentants du ministère afin de voir

avancer les pratiques d’enseignement du français et la mise en œuvre du programme de

français.

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L’enseignement et l’apprentissage du français écrit occupe une place importante dans les

prescriptions ministérielles comme en témoigne l’extrait du programme qui suit.

Comme pour les autres langues, l’apprentissage du français permet une sensibilisation aux phénomènes linguistiques. Il favorise la prise de conscience de l’univers du langage dans ses caractéristiques et sa diversité. Cet apprentissage développe d’une part, des capacités de discrimination, d’analyse et de synthèse de l’apprenant et d’autre part, favorise l’ouverture vers l’autre. Ainsi, l’enseignement et l’apprentissage du français contribuent au développement intellectuel, esthétique et affectif de l’enfant seychellois (Ministère de l’Éducation, 2001, p. 4).

À la suite de ce mémoire de maitrise, nous sommes convaincus que la littérature est le

contenu à introduire dans les classes de français aux Seychelles. Comme nous pouvons lire

dans la citation ci-dessus, la finalité de l’enseignement du français vise non seulement à

développer les compétences en langue, mais il contribue aussi au développement de la

sensibilité esthétique et affective des élèves. De ce fait, puisque nous n’avons pas pu mettre

en œuvre et diffuser notre séquence didactique, nous aimerions dans le futur pouvoir

effectuer une recherche de terrain et tester notre séquence au sein d’une classe de FLE. Par

la suite, il serait dans l’intérêt de tous (élèves, enseignants, chercheurs) de produire un

manuel présentant les résultats de notre recherche et montrant les procédures à suivre pour

l’enseignement et l’apprentissage des stratégies et des compétences en lecture.

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Tremblay, O. (2009). Une ontologie des savoirs lexicologiques pour l’élaboration d’un module de cours en didactique du lexique. Thèse de doctorat. Département de didactique de la Faculté des sciences de l’éducation, Université de Montréal. Tsimbidy, M. (2008). Enseigner la littérature de jeunesse. Toulouse : Presses Universitaires de Mirail. Turgeon, E. (2013). Développement et mise à l’essai d’un outil pour analyser des albums jeunesse afin d’élaborer un répertoire d’œuvres québécoises propices au travail interprétatif. Thèse de doctorat. Département de didactique de la Faculté des sciences de l’éducation, Université de Montréal. Van der Linden, S. (2007). Lire l’album. Le Puy-en-Velay : Atelier du poisson soluble. Van Der Maren, J.-M. (2004). Méthodes de recherche pour l’éducation (2e éd.). Montréal : Presses de l’Université de Montréal; Bruxelles : De Boeck. Van Der Maren, J.-M. (2003). Chapitre 5. La recherche de développement. Dans La recherche appliquée en pédagogie. Bruxelles : De Boeck Supérieur. Repéré à www.cairn. info/la-recherche-appliquee-en-pedagogie -- 9782804143084-page-107.htm Van Zanten, A. (2008). Dictionnaire de l’éducation. Paris : Presses universitaires de France.

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Annexes

Annexe 1 : Habiletés et objectifs pour le cycle 4

Source : Ministère de l’Éducation des Seychelles (2001, p. 30).

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Annexe 2 : Connaissances et objectifs pour le cycle 4

Ministère de l’Éducation des Seychelles (2001, p. 26).

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Annexe 3 : Planification de la lecture

Source : Falardeau, É. (2015). Stratégies de lecture et d’écriture : recherche et enseignement. Université Laval : CRIFPE. Site en ligne : http://www.strategieslectureecriture.com/

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Annexe 4 : Exemple des stratégies pour trouver le sens des mots

Source : http://dixmois.eklablog.com

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Annexe 5 : Connaissances et objectifs pour le cycle 3 (prérequis)

Ministère de l’Éducation des Seychelles (2001, p. 21).

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Annexe 6 : Habiletés et objectifs pour le cycle 3 (prérequis)

Ministère de l’Éducation des Seychelles (2001, p. 24).

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Annexe 7 : Groupes de mots ou expressions choisis par l’enseignant (séance 4)

Groupes de mots ou expressions page dans l’album

l’emportera d’un coup page 2

à quoi bon page 5

une vraie tête de mule page 5

(les histoires) à rallonges pages 6

un sacré travailleur page 8

(payait) d’un rien page 8

chassait le chagrin page 10

ne pouvait y couper page 11

sans un soupir, sans une pause page 13

vaille que vaille page 14

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Annexe 8 : Phrases à trous (séance 4)

Compléter les phrases suivantes en utilisant les expressions ci-dessous. À quoi bon – vaille que vaille – ne pouvait y couper – l’emportera d’un coup – une

vraie tête de mule – un sacré travailleur – un rien – chasser le chagrin – sans un soupir, sans une pause, à rallonges

1. Ce nid d’oiseau semble fragile, c’est sûr qu’un vent………………………………..

2. Pour………………………………… après la mort de son chien, Clara a adopté deux

autres chiens.

3. ……………………… les vacances d’été s’il pleut tous les jours?

4. Ah! mon perroquet n’est plus là! Georges est…………………………………… . Je lui

ai bien dit de fermer sa cage.

5. Qu’il travaille beaucoup mon oncle! Son jardin déborde des légumes. Il

est……………………………… .

6. Je me demande si les récits…………………………….. de Sophie sont vrais.

7. Même s’il n’avait plus de force, l’athlète a voulu…………………………….terminer la

course.

8. .........................................…. il travaille du matin au soir pour pouvoir acheter un

cheval.

9. Jeanne fait beaucoup pour sa patronne, mais elle lui paye d’……………................

10. L’hiver au Canada, c’est le froid tous les jours. On…………………………… .

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Annexe 9 : Fiche simplifiée (description des personnages, séance 6)

Je connais mon personnage

Histoire : Mon personnage:

Portrait de mon personnage (caractéristiques physiques, langue parlée, statut, etc.)

Ce que fait mon personnage (ses activités dans la communauté)

Ce que disent/pensent les adultes de mon personnage

Ce que disent/pensent les enfants (notamment Gaspard) de mon personnage

Les émotions de mon personnage

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Annexe 10 : Savoirs à enseigner (personnage)

Repéré de Giasson (2003). La lecture : de la théorie à la pratique, p. 292.

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Annexe 11 : Fiche critériée (séance 8)

Caractéristiques de l’album

Narrateur (présent ou absent)

Personnages Descriptions des personnages

Principaux thèmes

Fiche adaptée de Chartrand, S.-G., Émery-Bruneau, J. et Sénéchal, K. avec la coll. de Pascal Riverin (2015). Caractéristiques de 50 genres pour développer les compétences langagières en français. Québec : Didactica, c.é.f. Repéré à www.enseignementdufrancais.fse.ulaval.ca