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1193 - janvier 2018 SommaiRe : PRiX en fRance 3 iSSn : 2117-5047, eiSSn : 2493-2752 commission paritaire N°0418 I 83051 RéfleXion page 2 Retour sur le futur fRançoiS cHaTel pense qu’il est temps de rappeler l’originalité et l’actualité des analyses et propositions de Jacques Duboin, qui sont la raison d’être de ce journal. page 6 Non-violence et désobéissance civile BeRnaRd BlaVeTTe s’étonne que les grands mouvements sociaux n’utilisent ni la non-violence ni la désobéissance civile. Pour montrer ce que recouvrent ces armes, qui ont fait preuve d’efficacité au siècle dernier, il cite trois personnalités qui ont marqué les luttes non-violentes : H-D Thoreau, Gandhi et Martin Luther-King. TRiBUne deS lecTeURS page 9 Révolution culturelle ou déshumanisation eRneST BaRReaU rappelle la suite des décrets et des lois qui, au cours du XXéme siècle, ont bouleversé les conditions financières en privatisant la création monétaire, puis en mettant les gouvernements dans l’obligation d’emprunter sur les marchés financiers ce qui les condamnait à cette dette souveraine devenue impossible à rembourser, qui paralyse toute politique sociale. page 11 Silences RémY moURin a composé un poème en prose pour décrire les silences et la soumission. coURRieR pages 12-15 Entre autres réflexions envoyées par nos lecteurs, des commentaires sur l’émission Envoyé Spécial du 11 janvier et une bonne nouvelle : un projet de réforme de la création monétaire serait (enfin !) discuté… en Suisse. La Grande Relève menSUel de RéfleXion Socio-économiQUe VeRS la démocRaTie d’Une économie de PaRTage «Vous voulez les pauvres secourus, moi je veux la misère supprimée» V. Hugo.

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Page 1: La Grand eR lèv m e ns u e l d e r é f l ex ios c- é m q u ... · au siècle dernier, il cite trois personnalités qui ont marqué les luttes non-violentes : H-D Thoreau, Gandhi

n° 1193 - janvier 2018 sommaire :

prix en france 3 € issn : 2117-5047, eissn : 2493-2752 commission paritaire N°0418 I 83051

• réflexion

page 2 Retour sur le futur

françois cHatel pense qu’il est temps de rappeler l’originalité et l’actualité des analyses

et propositions de Jacques Duboin, qui sont la raison d’être de ce journal.

page 6 Non-violence et désobéissance civile

Bernard Blavette s’étonne que les grands mouvements sociaux n’utilisent ni la non-violence

ni la désobéissance civile. Pour montrer ce que recouvrent ces armes, qui ont fait preuve d’efficacité

au siècle dernier, il cite trois personnalités qui ont marqué les luttes non-violentes : H-D Thoreau,

Gandhi et Martin Luther-King.

• triBune des lecteurs

page 9 Révolution culturelle ou déshumanisation

ernest Barreau rappelle la suite des décrets et des lois qui, au cours du XXéme siècle,

ont bouleversé les conditions financières en privatisant la création monétaire, puis en mettant les

gouvernements dans l’obligation d’emprunter sur les marchés financiers ce qui les condamnait à cette

dette souveraine devenue impossible à rembourser, qui paralyse toute politique sociale.

page 11 Silences

r é m y mo u r i n a composé un poème en prose pour décrire les silences et la soumission.

• courrier

pages 12-15 Entre autres réflexions envoyées par nos lecteurs, des commentaires sur

l’émission Envoyé Spécial du 11 janvier et une bonne nouvelle : un projet de réforme de la création

monétaire serait (enfin !) discuté… en Suisse.

La Grande Relèvem e n s u e l d e r é f l e x i o n s o c i o - é c o n o m i q u e

v e r s l a d é m o c r a t i e d ’ u n e é c o n o m i e d e p a r t a g e

«Vous voulez les pauvres secourus, moi je veux la misère supprimée» v. Hugo.

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2 LA GRANDE RELEVE - n° 1193 janvier 2018

L’importance de l’œuvre de JacquesDuboin me semble nécessiter unerelecture périodique afin de renouer

avec sa démarche. Cette démarche, qui l’amené à développer toute l’originalité et laforce révolutionnaire de l’économie distributi-ve, reste d’actualité car les conditions politico-économiques actuelles ont une grande simili-tude avec celles du deuxième quart du 20èmesiècle. Il convient donc de se remémorer cer-tains de ses écrits pour suivre de nouveau lecheminement intellectuel de sa pensée, de sesanalyses et la conclusion à laquelle l’a conduitl’évolution des conditions économiques, desprogrès scientifiques et techniques. Son orientation politique fut assurément socia-liste. Mais il était adepte d’un véritable socia-lisme, pas de celui qui a subi un véritable dis-crédit en raison de l’adoption, par certains, depolitiques néolibérales. Et il resta lucide, exer-çant sa critique sur toutes les théories.

(Dans ce qui suit, en employant le mot «socialiste»je désigne un mouvement à volonté anticapitaliste)

étude des idées socialistes

D’avant le néolithique, en cheminant (voir lechapitre 3 de Demain ou le socialisme del’abondance) par l’Inde, l’Égypte et la Crêteanciennes, Sparte avec son législateurLycurgue, la Rome antique, les épîtres desapôtres, les monastères du mont Athos, lacommunauté des frères Moraves, disciples deJean Hus, les Quakers de Pennsylvanie, la pen-sée de Duboin chemina partout où le socialis-me a germé. S’il avait étudié, avec attention eten reconnaissant leur juste valeur, les travauxet les théories de Marx et Engels, il bénéficia del’évolution des connaissances acquises au20ème siècle dans le domaine de l’économiepolitique et des nouvelles conditions de pro-duction.Naviguant des utopies de Cabet, Campanellaet Thomas More, aux écrits de Robert Wallace,de Paine et de Thomas Spence, d’Ogilvie,Henry George et William Godwin, il poursuitses investigations en plusieuts étapes : les tra-vaux sur l’antagonisme entre capital et travaildu docteur Charles Hall, sur l’importance destravailleurs et la critique acerbe du libéralisme,sur les conditions de la paix entre les peuplesde Saint Simon et de ses “apôtres” Duveyrier,Auguste Thierry, Auguste Comte, qui parlentles premiers de «l’exploitation de l’homme par

l’homme». Puis il parcourt les écrits contestéset contrastés de Charles Fourier, défenseur del’association, critique du libéralisme maisrégisseur du capitalisme, ceux de Robert Owenet de ses disciples, John Gray et WilliamThompson, fervents partisans de l’éducationdes peuples et de la coopération pour amélio-rer les conditions sociales, ceux du contradic-toire Joseph Proudhon, connu par son célèbre«la propriété, c’est le vol !» et farouche oppo-sant à l’État, partisan de l’égalité économiqueet du crédit gratuit, sans oublier ceux deChesterton, Babeuf, Polanyi, Sismondi,Bellamy, Bertrand Russel, Louis Blanc,Auguste Blanqui, Victor Considérant,Constantin Pecqueur, Lucien Deslinières, pourparvenir aux travaux de F. Engels, Labriola etsurtout ceux de Karl Marx et Lénine, à proposdesquels, en critique lucide , il émet des com-mentaires. Ses sources d’inspirations sont donctrès diverses. Ses investigations, si elles accordent du crédità l’ensemble de l’œuvre de Marx, vont surtouts’appliquer à réaliser une synthèse de l’en-semble des écrits socialistes. Le fait de prendreen considération les théories de tel ou tel pen-seur et de s’inspirer de ses réflexions, ne signi-fie nullement l’existence d’une filiation totale,au point de se retrouver catalogué comme dis-ciple. Le souci de vouloir canaliser la pensée deJacques Duboin dans le seul sillage du marxis-me a donc de quoi surprendre. Marx lui-même ne s’est-il pas inspiré principa-lement des écrits de Ricardo, Hegel etFeuerbach, de ceux de Sismondi et Lassalle,sans oublier Gray, Babeuf, Proudhon, Comte,Owen, Bauer, etc… et de ses échanges avecEngels ? Chacun réalise la synthèse des pen-sées de ses inspirateurs en fonction de sonpropre vécu et de son éducation. Chacun est un «nous».

l’écHange, c’est pour la rareté

Sa conclusion vis-à-vis de l’ensemble des pen-seurs socialistes fut la suivante : en raison d’unrégime de rareté permanent, ils sont tous restésfidèles à l’échange, «et si certains d’entre euxsont allés jusqu’à la socialisation des moyensde production, ce n’était pas davantage pouren terminer avec l’échange, mais parce qu’ilsespéraient que la collectivité bénéficierait decette plus-value dont Marx avait établi lanature et mesuré l’importance… les mouve-

Retour vers le futur

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ments sociaux ont tous pour objet principalde lutter soit contre le profit, soit contre larente, …ce qui, en fait, revient à prendre ladéfense des salariés et des consommateurs enraison des spoliations dont ils sont victimesdès qu’ils effectuent les échanges indispen-sables à leur existence. C’est particulièrementexact en ce qui concerne les coopératives, lesyndicalisme et le fédéralisme… N’est-ce pasperfectionner l’échange, en le rendant pluséquitable, sans sortir du cadre du régime capi-taliste ? … Au moment où le progrès tech-nique fait disparaître les consommateurs sol-vables, il semble vain de limiter les réformes àl’amélioration de ceux qui le sont encore…Ainsi, les derniers clients seront obligés deprendre en charge le nombre toujours crois-sant de ceux qui n’ont plus de pouvoird’achat»1. Pour Jacques Duboin, le socialismen’a en fait consisté qu’à chercher à «répartir lepoids du travail et des richesses produites.Tant que la rareté des choses utiles n’a pas étévaincue, le socialisme n’a tendu qu’à réaliserl’équité dans les échanges  : il n’a pu être quele socialisme de la rareté». En réalité, les socia-listes, depuis toujours, ne cherchent qu’à corri-ger les méfaits du libéralisme économique ententant de faire intervenir la loi. Comment, ilest vrai, se concentrer sur une autre stratégiequand l’exagération de certains profits pro-voque l’indignation et quand les écarts deconditions deviennent scandaleux ? Dans unesociété où les inégalités sont une institution,c’est par la loi que l’opprimé espère améliorersa condition. Mais la loi n’est qu’un aménage-ment d’un système dont la structure généraledemeure intacte. Beaucoup, fidèles à KarlMarx, préconisent comme lui la socialisationdes moyens de production. C’est une solutionenvisageable dans toute société socialiste, maissurtout pas en y maintenant les échanges. Cesocialisme d’État, dont Marx est partisan, fonc-tionne aussi bien qu’un libéralisme écono-mique en période de rareté, mais périclite de lamême façon dès que l’abondance est atteinte.Le postulat de Marx sur l’avènement prochainde la dictature du prolétariat par la lutte desclasses s’engage aujourd’hui dans une voiesans issue, puisque ce régime des échanges, depar le progrès technique, aboutit à l’explosiondu chômage et à la réduction des pouvoirsd’achat. Dans les deux cas d’économie propreà la rareté, «les produits se distribuent par lecanal de l’échange, avec une formule de répar-tition qui est à chacun selon ses œuvres enrégime capitaliste, et à chacun selon sa fonc-tion dans le socialisme d’État»1.

ce n’est pas à la “lutte finale”qu’aspire Jacques duBoin

Les acquis sociaux obtenus entre 1930 et 1970ont tendance aujourd’hui à aveugler les parti-sans de la lutte des classes : ils semblent enconséquence persuadés qu’une continuité estpossible. Or, au cours de cette période, lesconditions politico-économiques n’étaient pasdu tout les mêmes qu’aujourd’hui. Les vic-toires de la gauche communiste pendant lesTrente Glorieuses ont bénéficié d’un contexteparticulier de croissance en raison de la rareténée de la guerre. Pendant cette période, etJacques Généreux2 l’explique bien, le pouvoirde pression des actionnaires s’est trouvé sin-gulièrement affaibli. Le chantage au licencie-ment pour soumettre les salariés ne fonction-nait pas car l’économie était presque toujoursau plein emploi. Le chantage à la délocalisa-tion du capital et le déplacement des capitauxétaient limités par la réglementation financièreet par la fermeture des frontières avec les payscommunistes. Enfin, les taux d’imposition trèsélevés sur les plus hauts revenus et les plus-values amputaient le profit net des capitalistes.Les actionnaires devaient dès lors se contenterd’un taux de rendement net (après impôt) rela-tivement faible, comparé aux standardsdemandés aujourd’hui. Ils se consolaient enconsidérant qu’un partage des fruits de lacroissance avec les ouvriers avait au moins lemérite de les protéger du grand péril commu-niste. Et puis les taux de croissance exception-nels de l’époque tempéraient aussi la tentationde contester le compromis social installé après-guerre  : la prospérité des entreprises assuraittout de même un rendement du capital consi-déré alors comme honorable… Ce régime de croissance forte (favorable auxcompromis sociaux) et de progrès partagé étaitpar ailleurs soutenu par la stabilité financièreinternationale et par l’exploitation intensived’une énergie pétrolière à bas prix dans dessociétés inconscientes de l’enjeu écologique,une compétition d’ailleurs limitée à seulementune vingtaine de pays riches. Marx parle d’une transition plus ou moinslongue jusqu’à l’avènement du socialisme, unepériode de lutte des classes devant aboutir à ladictature du prolétariat. Or dans un systèmebasé sur l’échange, il est vain d’espérer aboutirà cet objectif. Nous en sommes témoins aujour-d’hui. Les règles sont aux mains des capita-listes qui n’hésitent pas à modifier à leur avan-tage les lois de la protection des travailleurs, às’orienter vers des investissements financierset non industriels, à délocaliser les entreprisespour profiter des bas coûts salariaux, à créer

R É F L E x I O N

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… des cartels et monopoles falsifiant la concur-rence, à avoir recours aux licenciements, à laconcurrence de travailleurs mal payés, à larobotisation et bientôt à la numérisation, etmaintenant à individualiser les services parl’ubérisation. Le prolétariat tel que l’a connuMarx n’existe pratiquement plus. La lutte desclasses n’est donc plus d’actualité. Cette lutteinégale vouée à l’échec ne peut conduire qu’àune dictature oligarchique à laquelle le capita-lisme mène naturellement. Et Jacques Duboind’ajouter à l’encontre des luttes socialistes  :«Les revendications d’une classe en luttecontre une autre classe, comme par exempleles efforts accomplis par la classe ouvrièrepour améliorer sa situation, ne relèvent pasplus du socialisme que les efforts de produc-teurs cherchant à accaparer un marché pouren avoir tout le profit»1.

le socialisme d’état

Et même en admettant qu’une dictature duprolétariat s’installe sous la forme d’un socia-lisme d’État, forme transitoire annoncée parMarx, il est fort probable que les administra-teurs formeront insidieusement une nouvelleclasse dirigeante protégeant leur nouveaupouvoir sous des prétextes les plus divers. Enréalité, l’État n’est que l’institution qui assoit lepouvoir d’une classe ou d’un parti sur l’en-semble de la société au nom de l’intérêt géné-ral, de la justice et de la protection de la classelésée. «Les institutions centrales, c’est-à-direl’ensemble du système commercial, industrielet financier, [y] sont, en droit et en principe,soustraites au contrôle démocratique»3. Tantqu’il n’est pas l’équivalent d’une administra-tion exécutant les directives dictées par lepeuple, il ne sera qu’une mystification de plus.Même un État socialiste, remplaçant l’Étatcapitaliste, placera le peuple dans de nou-veaux harnais.Ne pouvant assurément pas sortir du systèmede l’échange, ce passage au communisme défi-ni par Marx4 apparaît donc bien difficile.Compte tenu de la longue période de transi-tion qu’il envisageait, il n’a pas trop osé se pro-noncer sur les caractéristiques de la sociétécommuniste ou socialiste future. Il a parlé dela suppression de l’État, remplacé par uneadministration sous contrôle démocratique,d’un système production/consommation pla-nifié et de l’abolition du salariat, mais sans endéfinir les détails. Il ne pouvait pas savoir au19ème siècle que les moyens de productionsallaient évoluer aussi rapidement au 20èmesiècle.

clairvoyancede J. duBoin

En observateur lucide de son époque, JacquesDuboin est allé plus loin. Il a montré la voie àadopter car les conditions d’un changementradical y étaient déjà réunies. «Si le libéralismeéconomique a permis de construire cette méca-nique gigantesque, elle ne peut cependantfonctionner qu’à une double condition, àsavoir  : primo que tous ceux qui vivent ausein d’une société humaine puissent effectuerdes échanges et se procurer ainsi les res-sources financières indispensables à leur exis-tence ; secundo que les produits et les servicesne soient offerts qu’en quantité limitée, afinde conserver une valeur qui ne peut existersans un certain degré de rareté. Car, si lesproduits abondants ne s’échangent pas, c’estprécisément parce qu’ils sont sans valeur»1. Le progrès technique, l’utilisation desmachines automatisées, permettent une netteaugmentation de la production avec bienmoins de travail humain, donc en distribuantde moins en moins de salaires. Ils réduisentdonc le pouvoir d’achat global au point decontribuer à la réduction et même à la dispari-tion de la plus-value du producteur-vendeur,donc du profit capitaliste. C’est la “crise»”,disent-ils. C’est la fin du capitalisme disaientJacques Duboin et La Grande Relève. Mais nousconnaissons la dangerosité d’un prédateur àl’agonie.Le progrès technique produit l’abondance quis’avère l’ennemie n°1 du capitalisme. Cetteabondance, objectif suprême de toute sociétéhumaine, raison sensée de tout progrès, doit-elle donc être combattue ? Au nom de quoi, dequel ordre supérieur, de quelle volonté extra-humaine, faudrait-il refuser l’eldorado ?Jacques Duboin répond  : «Le socialisme nepeut se réaliser que dans une société sansclasse, ce qui implique que les échangesn’existent plus, et que production et distribu-tion sont devenues des fonctions sociales»1.De nombreux socialistes, observe-t-il, restentfidèles à la manière de voir de leurs prédéces-seurs qui vécurent au siècle dernier et dont lesdoctrines s’inspiraient des conditions géné-rales de leur époque, c’est-à-dire de la rareté.Quand l’abondance est potentiellement attein-te, et alors que les capitalistes, se sentantmenacés, font tout pour la museler, il faut pas-ser à une autre société, celle que Duboin appel-le le socialisme de l’abondance ou socialismedistributif géré par une économie distributive.Pour sortir du capitalisme, il expliquait qu’ils’agit de se débarrasser de l’échange pouradopter le partage. Ce qui caractérise toute soningéniosité, c’est cette idée révolutionnaire de

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poser les bases d’un véritable socialisme tour-nant définitivement le dos au capitalisme et ausocialisme de la rareté. Il a compris que désor-mais le travail humain dans la production nesera plus suffisant pour être pris comme leréférentiel qui mesure la valeur. L’ère del’abondance est celle du travail bénévole, quirend toute sa dignité à l’humain en tant qu’êtresocial. L’abolition du salariat est un des piliers del’économie distributive. Versé en échange d’untravail, tout salaire, même aménagé d’unefaçon ou d’une autre, même enrobé dans cer-taines stratégies politiques5, demeure uneagression. Car le salaire représente sansconteste une aliénation de la liberté. Il n’estqu’un mode d’oppression imposé par celui quidétient le pouvoir (capitaliste, État, etc…), unmoyen d’accaparement de la force de travailen échange du droit de vivre. Cette situationfait penser au harcèlement sexuel qui, en for-çant la soumission à l'aide de diversesmenaces, peut être considéré comme un viol.Le salariat, qui force le consentement au travailen utilisant un chantage, est donc aussi unviol.En économie distributive, ce n’est plus seule-ment la production de marchandises ou de ser-vices, et surtout pas le gain d’un salaire pourvivre qui sont recherchés par le travail, c’estune réponse, parmi d’autres, aux besoins d’ap-partenance, de reconnaissance et de réalisationde soi au sein du groupe social. C’est le grandretour du système don/contre-don réciproque,modernisé, qui se réalise cette fois entre l’indi-vidu et la société. Ce qu’a proposé JacquesDuboin c’est cet équilibre judicieux entre lelibéralisme et le collectivisme, donnant à l’in-dividu toute son autonomie (liberté de partici-pation à la vie sociale, liberté de consomma-tion, liberté d’entreprendre,…) et à la sociététoute son importance pour le bien-être de cha-cun et de tous (collectivisation de la produc-tion, de la distribution, de l’éducation…).Cette économie distributive est basée sur leservice social, auquel la GR a consacré tant deréflexions en suivant les connaissances socio-logiques actuelles, et sur une monnaie gagéesur la production dont elle assure la distribu-tion. La validité de cette monnaie, qui ne cir-cule pas, disparaît dès qu’elle est utilisée. Verséà échéance pour acheter produits et servicesdisponibles suivant la production réalisée7, unrevenu universel est distribué selon la formule«à chacun suivant ses besoins», et Duboinpensait qu’il deviendrait vite égalitaire6.

sacHons dire

non

Au lieu de subir l’agonie prédatrice du capita-lisme, qui ne fait qu’utiliser des thérapiesdésastreuses pour tenter de subsister, au lieude rester obnubilé par des théories dites socia-listes mais devenues caduques car conçuespour une autre société, celle de la rareté, aulieu de s’enferrer dans une transition qui portele risque de voir s’instaurer un nouveau totali-tarisme, il est grand temps pour la populationd’aspiration socialiste d’adopter une stratégieappropriée à la situation présente, actuelle,celle que voyait venir Duboin en lançant l’idéed’économie distributive.Le capitalisme s’étend aujourd’hui sur laquasi-totalité du globe. S’y opposer revient àdéclencher un mouvement révolutionnaire àeffet mondial. Il faut donc dire “non“. Un“non“ général et déterminé. La résistance au capitalisme ne consiste pas àchercher des aménagements politiques ou éco-logiques, mais à le refuser, à dire non, un nonglobal, universel et simultané. Les capitalistes s’entendent bien pour appli-quer une stratégie commune de dominationnéolibérale, pourquoi les nombreux opposantsne parviennent-ils pas se mettre d’accord surun refus commun ? Gandhi a bien réussi sans violence, mais avecdétermination, à dire non à l’envahisseuranglais et à le chasser.

françois cHatel

Références : 1. Jacques Duboin, Demain ou le socialisme de l’abon-dance, chapitre 3.2. Jacques Généreux, La déconnomie, éd. Seuil.3. Noam Chomsky, «Quel rôle pour l’État?», éd. écoso-ciété.4. Karl Marx, critique du programme de Gotha.5. Bernard Friot, Le salariat, c’est la classe révolution-naire en train de se construire, entretien avec CécileRousseau, L’Humanité, 14 août 2013.6. Jacques Duboin, Les yeux ouverts, pages 125-126.7. Marie-Louise Duboin, «Le revenu universel? Oui,on peut !», GR1184 (numéro spécial de mars 2017).

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Assez étrangement la non-violence activeet la désobéissance civile n’ont jamaisété utilisées sur une grande échelle

dans les luttes sociales en Europe. Elles ne sontmises en pratique que par de petits groupes demilitants (faucheurs de cultures OGM, oppo-sants à l’aéroport de Notre-Dame des Lan -des…) trop peu nombreux pour établir un rap-port de force favorable à l’échelle d’un pays oude l’Union Européenne. Les grands syndicatsprofessionnels n’ont à ce jour jamais utilisé unearme qui a pourtant largement fait la preuve deson efficacité au xxème siècle dans des luttesd’une vaste ampleur comme le combat pourl’indépendance de l’Inde ou pour les droitsciviques des Noirs aux États-Unis. Il sembledonc intéressant pour les mouvements sociaux

de tenter de définir ce que recouvrent réelle-ment la non-violence active et la désobéissancecivile, deux notions étroitement intriquées.Pour cela, j’ai sélectionné un certain nombre decitations et de “morceaux choisis” qui meparaissent particulièrement éclairants et quiémanent de trois personnalités ayant fortementmarqué les luttes non violentes  : Henry DavidThoreau, le mahatma Gandhi et le pasteurMartin Luther King. Lorsque cela m’a semblénécessaire j’ai assorti les citations de quelquescommentaires. Ce texte ne prétend évidemmentpas à l’exhaustivité, le lecteur désireux d’appro-fondir ce thème pourra se reporter à la petitebibliographie ci-dessous.

Bernard Blavette

Henry david tHoreau (1817-1862) : la désobéissance civile.

Henry David Thoreau, c’est le précurseur. Celui qui, s’inspirant de certains écrits de Tolstoï, a enquelque sorte théorisé et mis personnellement en pratique la désobéissance aux lois en vigueurqu’il estimait injustes. Farouche opposant à la guerre entre le Mexique et les États-Unis, il refuse-ra de payer ses impôts en signe de protestation, ce qui lui vaudra plusieurs mois de prison.On remarquera que pour Thoreau la résistance est surtout individuelle, il n’a pas réellement envi-sagé l’action collective organisée.

Des milliers de gens sont opposés en opinion à l’esclavage et à la guerre, mais ils nefont rien pour y mettre un terme et s’asseyent les mains dans les poches en déclarantqu’ils ignorent quoi faire.

Même voter pour la justice, ce n’est rien faire pour elle. C’est se contenter d’expri-mer un faible désir de la voir prévaloir. Le sage ne laissera pas la justice à la merci duhasard d’un vote.

Des lois injustes existent : nous satisferons-nous de leur obéir ou tâcherons-nous deles amender en leur obéissant jusqu’à ce que nous y ayons réussi ? Notre devoir n’est-il pas plutôt de les transgresser sur-le-chanp ?

Une fois que le sujet a refusé son allégeance et que le fonctionnaire a démissionné,la révolution est accomplie.

Sous un gouvernement qui emprisonne un seul être injustement, la juste place dujuste est aussi la prison.

(La désobéissance civile, éd. Fayard, Mille et une nuits)

Non-violence active et désobéissance civile

Bibliographie :Étienne de La Boétie, La servitude volontaire, éd. Arléa.Henry David Thoreau, La désobéissance civile, éd. Fayard, Mille et une nuits.Martin Luther King : Un homme et son rêve, éd. du Félin.Martin Luther King, Je fais un rêve, éd. Bayard.Suzanne Lassier, Gandhi et la non-violence, éd. du Seuil, Coll. Points.Jean-Marie Muller, Gandhi l’insurgé : L’épopée de la marche du sel, éd. Albin Michel.

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gandHi (1869-1948)la lutte pour l’indépendance de l’inde

Ce système de gouvernement est ouvertement basé sur l’exploitation sans merci de millionsinnombrables d’habitants de l’Inde. C’est pourquoi c’est un devoir pour ceux qui ont consciencedu mal terrifiant engendré par le gouvernement d’être déloyaux et de prêcher ouvertement ladéloyauté. (….) La loyauté envers un état corrompu est un péché, la déloyauté une vertu (…).La désobéissance aux lois d’un État mauvais est un devoir, obéir c’est participer au mal. (….).Un acte barbare ne l’est pas moins parce qu’il a la caution de la loi.

(Editorial pour le journal Young India, 1930)

La non violence doit avoir son origine dans l’esprit. La non violence du corps sans la coopé-ration de l’esprit est la non violence du faible et du lâche, et n’a donc aucun pouvoir (…).Unenation perd sa liberté à cause de sa propre faiblesse, immédiatement après avoir surmonté notrefaiblesse nous recouvrons notre liberté. Aucun peuple ne peut être assujetti sans sa coopérationvolontaire ou involontaire. Vous vous prêtez à une coopération involontaire quand, par peur dequelque mal physique vous vous soumettez à un tyran.

(Conférence donnée à Marseille devant des étudiants, 1931)

A Bombay, la police a été forcée de capituler devant une immense armée de manifestants.L’affaire commença par un cortège qui parcourait la ville pour protester contre l’échauffourée dessalines de Dharasana au cours de laquelle de nombreux volontaires de Ghandi furent blessés.Quand les manifestants approchèrent du quartier du port, centre européen des affaires, ils trou-vèrent un barrage solide de 500 agents de police qui leur en interdisait l’accès. Il était alors 3heures de l’après midi. Après une brève conversation avec le chef de la police, les leaders de lamanifestation donnèrent l’ordre à la foule qui suivait de s’asseoir par terre et de ne pas bouger.

Un espace fut laissé entre le cordon de la police et la foule où les leaders ne laissaient péné-trer personne pour éviter les possibilités de conflit.

Le bruit de l’incident se répandit dans la ville. D’autres manifestants accoururent de toutesparts et bientôt leur nombre atteignit un quart de million. Toutes les voies adjacentes étaient blo-quées par une masse inerte d’hindous accroupis sur le sol et toute circulation rendue impossible.Cette situation pleine de périls dura quatre longues heures. Enfin et de guerre lasse, le commis-saire en chef de la police informa les leaders qu’ils pourraient reformer leur cortège à conditionqu’ils promettent la tranquillité.

(Le Soir de Bruxelles, 25 mai 1930)

On ne peut évoquer le combat de Gandhi sans faire référence à sa fameuse «marche pour le sel».Début 1930, le gouverneur anglais de l’Inde impose une taxe sur le sel fortement préjudiciable à tousles éleveurs de bétail. Gandhi réplique en organisant une marche de plus de 400 kilomètres vers lamer où sera symboliquement extrait du sel alors que simultanément les salines seront occupées.Parti le 12 mars 1930 avec une centaine de compagnons Gandhi parvient à la côte le 6 avril avec plusd’un million de marcheurs. L’opération sera ponctuée de violences entre les manifestants et l’arméebritannique qui tente d’interrompre la manifestation. On déplorera de nombreux morts et blessés.

Le mouvement ouvrier peut toujours être victorieux s’il est parfaitement uni et décidé à tousles sacrifices quelle que soit la force des oppresseurs. Mais souvent ceux qui guident le mouve-ment ouvrier ne se rendent pas compte de la valeur du moyen, (la désobéissance, la non coopé-ration), qui est mis à leur disposition et que le capitalisme ne possèdera jamais. Si les travailleursarrivent à faire la démonstration, facile à comprendre, que le capital est absolument impuissantsans leur collaboration, ils ont gagné la partie. Il existe en toutes les langues un mot générale-ment très bref : no ou non. À la minute même où les travailleurs comprennent que le choix leurest offert de dire oui quand ils pensent oui et non quand ils pensent non, le travail devient lemaître et le capital, l’esclave.

(Conférence au Victoria-Hall de Genève, 10 décembre 1931)

Notre non violence est le plus rude des combats. Le chemin de la paix n’est pas celui de la fai-blesse. Nous sommes moins ennemis de la violence que de la faiblesse.

(Romain Rolland, admirateur de Gandhi)

Pour aller dans le sens de Romain Rolland n’oublions pas cette déclaration de Gandhi souventoccultée : «Si l’on me donne à choisir entre la lâcheté et la violence, je choisis la violence».

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le pasteur martin lutHer King (1929-1968)la lutte pour les droits civiques.

Le pasteur King définit ainsi la non-violence active :

«Ce n’est pas une méthode pour les lâches mais pour les forts ; elle implique qualité spiri-tuelle et courage personnel.

Elle ne cherche pas à humilier l’adversaire mais à gagner son amitié et sa compréhension.Convaincre et non vaincre. Le but est toujours la réconciliation.

Elle attaque les forces du mal plutôt que les personnes qui commettent le mal. De même, lavictoire sera celle de la justice non celle de telle ou telle personne.

Elle implique l’acceptation de la souffrance sans désir de vengeance. Le sacrifice de soi estla meilleure preuve d’une volonté de servir l’humanité.

Elle évite non seulement la violence extérieure du corps mais aussi la violence intérieure del’esprit.

Elle se fonde sur la conviction que l’Univers est à la recherche d’une harmonie morale quisera faite de justice et de liberté ».

(Article pour le journal Christian Century, 6 février 1957).

On nous demande souvent  «Comment pouvez-vous recommander de violer certaines loiset d’en respecter certaines autres ?». La réponse est qu’il existe deux catégories de lois : cellesqui sont justes et celles qui sont injustes. Toute loi qui élève la personne humaine est juste.Toute loi qui la dégrade est injuste. (….) En réalité, ce n’est pas nous qui créons la tension ennous lançant dans l’action directe non violente. Nous nous contentons de rendre visible unetension cachée qui existe déjà.

(Lettre de prison, 16 avril 1963).

Quand nous avons refusé de faire marche arrière malgré les ordres beuglés par Connor, lechef de la police de Birmingham, celui-ci a crié à ses hommes de faire fonctionner les lances àincendie. L’un des moments les plus fantastiques de l’histoire de Birmingham a été celui où cesNoirs, beaucoup d’entre eux à genoux, ont regardé immobiles et sans peur les hommes deConnor avec leurs lances, leurs matraques et leurs chiens, puis lentement se sont levés et sesont mis à avancer. Alors les gens de Connor se sont écartés comme hypnotisés pendant que lesNoirs passaient devant eux. J’ai vu là, j’ai ressenti là, pour la première fois, la fierté et la puis-sance de la non-violence. (…) Chaque fois que la non-violence est utilisée de manière à toucherla conscience angoissée d’une communauté ou d’une nation, l’opinion publique devient votrealliée et fait pression en votre faveur. C’est pourquoi la non-violence est une arme aussi puis-sante que juste. (…) Une autre des principales forces à l’œuvre quand on utilise l’arme de lanon-violence consiste en son étrange pouvoir de transformation, de transmutation, sur les indi-vidus qui se soumettent à cette discipline et se trouvent investis d’une mission dont l’enver-gure dépasse la leur propre. Ils deviennent pour la première fois «quelqu’un» et ils ont pour lapremière fois le courage d’être libres. (…) Il existe un mal pire que la violence, c’est la lâcheté.

(Interview pour The New York Review of Books, janvier 1965)

Aucun pays ne peut traverser plus grande tragédie que de plonger des millions decitoyens dans la conviction de n’avoir aucune part à leur propre société.

(Discours à Montgomery, 25 mars 1965).

On remarquera la large continuité de pensée entre Gandhi et le pasteur King qui repose surtrois idées force  : la recherche de la non-violence permet à l’action de demeurer dans un cadreéthique, elle laisse la porte entr’ouverte pour une éventuelle réconciliation entre les parties enlutte et, surtout, elle permet aux défenseurs de la justice et de la liberté de ne pas en venir à utili-ser les méthodes mêmes de leurs oppresseurs. Pourtant, comme l’affirment Gandhi et King, ilexiste des cas extrêmes pour lesquels l’usage de la violence devient inévitable, ce fut notammentle cas de la lutte contre l’idéologie nazie. Mais tous les résistants de la dernière guerre le recon-naissent, ils ne se résolurent à la lutte armée qu’avec la plus extrême répugnance et cela amenaAlbert Camus à déclarer dans sa “Lettre à un ami allemand” : « Ce que je ne vous pardonnerai jamaisc’est de nous avoir obligés à vous ressembler ».

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T R I B U N E D E S L E C T E U R S

Le nouveau Président de la République a lancé unedouzaine de travaux. Que penser de cette politiqueen constatant le démantèlement progressif desacquis sociaux ?— En tant que citoyen luttant pourun monde meilleur, et politiquement cocufié commebon nombre de mes compatriotes depuis laLibération du 8 mai 1945, voici mon point de vue.

En premier lieu, une constatation  : mise à part lapériode de reconstruction dite “des TrenteGlorieuses”, le pouvoir d’achat des classes labo-rieuses, celles qui ont participé et participent à larichesse de la nation, n’a cessé d’être grignoté.Or il ne s’agit pas d’une fatalité. Le régime capitalis-te, qui est né dans “l’ère de la rareté” et lui était doncadapté, ne convient plus, ni économiquement, nisocialement, à “l’ère de l’abondance“, c’est-à-direquand il est techniquement possible de produiren’importe quoi. Tout système économique relève d’un concepthumain et est donc remplaçable par un autre, mieuxadapté à de nouvelles nécessités, à des composanteséconomiques qui évoluent. Les nouvelles tech-niques, celles de la révolution numérique, imposentun tel changement qui s’inscrit ainsi dans les faits.Quel obstacle l’empêche ?Pour comprendre, un rappel historique me semblenécessaire, car trop d’évènements sont passésinaperçus, ont été ignorés ou sont oubliés, alors queleurs conséquences sont très lourdes.Rappelons-nous qu’à la déclaration de guerre, en1914, le gouvernement, comprenant que la monnaie-or dont il disposait ne pourrait pas satisfaire les exi-gences financières du conflit, demanda à la Banquede France (BDF) de fabriquer des billets à l’échelledes besoins. Puis il lança “au nom de la patrie” unesouscription nationale demandant aux détenteursde louis et de lingots d’or de les déposer à la BDF etil décréta le cours forcé des billets. À ces derniers s’ajoute maintenant la monnaieimmatérielle bancaire qui n’a aucune attache métal-lique, aucun étalon de grandeur. L’or ayant perdu saqualité d’étalon monétaire circule depuis dans unmarché en circuit fermé. Ce transfert en 1914 de lacréation monétaire vers la bancassurance qui ouvredes crédits a ainsi fait passer un droit régalien à desorganismes privés… Et maintenant les gouverne-

ments doivent emprunter et payer des intérêts alorsqu’ils pourraient, et se devraient, de créer lessommes dont ils ont besoin.La finance a été modifiée par des décrets, rappelons-en les grandes dates : •en 1960, Michel Debré met fin à la distinction entrebanques de dépôt et banques d’investissement ;•la loi Pompidou-Giscard du 3 janvier 1973 modifiele statut de la Banque de France, son article 25 pré-voit que désormais «le Trésor public ne peut être pré-sentateur de ses propres effets à l’escompte de la Banquede France». La privatisation de la création monétaireest ainsi à l’origine de la dette publique !•en 1976, le gouvernement de Raymond Barre, sansdébat public, décide que l’État paiera des intérêtsau-delà du taux d’inflation. L’État se met au servicedes créanciers  ! L’endettement de l’État progressealors rapidement.•en 1986, la réforme Bérégovoy-Fabius du systèmefinancier met la France sous la coupe des marchésfinanciers mondiaux ;•le traité de Maastricht, signé le 7 février1992 etapprouvé à 51% par les Français lors du référendumdu 20 septembre 1992, entré en vigueur le 1ernovembre 1993, stipule, dans son article 104, qu’ilest interdit aux Banques centrales d’accorder desdécouverts ou tout autre type de crédit aux institu-tions ou organes de la Communauté Européenne ;•par l’article 3 de la loi du 4 août 1993 (sousBalladur et Mitterrand) il est interdit à la BDF deconsentir toute forme de concours à l’État, le Fondsde Stabilisation des Changes ne peut plus bénéficierd’avances de la BC et ses opérations sont désormaisfinancées par l’État ;•depuis la mise en place de l’euro (1/1/1999) lapolitique de change est décidée au niveau européendans le cadre défini par la BCE ;•en 2005, les Français refusent, par référendum, leprojet de Constitution européenne, dont l’essentielest quand même repris dans le traité de Lisbonnepar N. Sarkozy ;•élu en 2012 sous l’étiquette socialiste, grâce à sondiscours du Bourget dénonçant l’ennemi qu’est lafinance, F. Hollande démontre que la main invisibledes marchés (financiers) empêche toute applicationd’un projet vraiment socialiste. L’échec patent de sapolitique sociale pendant son quinquennat apporte

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Résistant pendant la dernière guerre, ERNEST BARREAU résiste depuis 1945 àl’indifférence générale envers la raison pour laquelle l’argent a pu mettre lemonde à son service. ayant compris que l’évolution des possibilités de productionne condamnait plus l’humanité à la lutte de tous contre tous pour “gagner sa vie”, voilà de nombreuses décennies qu’il milite pour l’économie distributive. Lesmesures annoncées par le nouveau Président l’ont incité à rédiger un long textepour expliquer autour de lui pourquoi il ne croit pas qu’il s’agisse du profondchangement nécessaire. En voici l’essentiel :

Révolution culturelle ou déshumanisation

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une nouvelle preuve que capitalisme et socialismesont incompatibles.

Ces rappels montrent qu’il ne faut pas être grandclerc pour comprendre que sans changement de cap,c’est-à-dire sans reprendre la maîtrise de la créationmonétaire, et quelles que soient ses bonnes inten-tions, le nouveau gouvernement, se heurtant auxmêmes causes, ne peut qu’aboutir aux mêmes effets.Si on ne change pas le déroulement d’une pièce dethéâtre, un changement d’acteurs ne modifie pas lapièce  ! Alors ne nous étonnons pas ni du fort tauxd’abstentions lors des présidentielles de mai dernier,ni du nombre de manifestations et des réclamationstous azimuts dont le point commun est de réclamerune politique de justice sociale assurant pour tous ledroit à la vie dans la dignité.Les échecs patents des gouvernements sur le plansocial sont la preuve que leur abdication en faveurd’organismes privés du droit régalien de battremonnaie leur enlève le pouvoir politique réel, celuiqui permet d’agir dans l’intérêt général.Dévoyée de sa fonction originelle, la monnaie estdevenue une marchandise bâtie sur du vent. Lesentreprises privées qui la créent, en n’agissant quedans leur propre intérêt, prêtent… des chiffres.Devenus leurs débiteurs, les gouvernements sontamenés, pour les rembourser et leur servir des inté-rêts, à faire payer les contribuables  ! Alors qu’évi-demment c’est au financement des services publicsque ces derniers estiment que leurs impôts sont des-tinés  ! La population s’endette …pour acquérir lesbiens qu’elle fabrique  ! Et vogue la galère, chargéed’une dette “souveraine”, anti-sociale, qui augmen-te si vite (intérêts composés) qu’elle est devenueirremboursable !Avec l’arrivée de nouveaux services, de néo-banquesfont florès, d’autant plus que leur développementest favorisé par la loi Macron sur la croissance, l’ac-tivité et l’égalité des chances (celles du renard dansle poulailler) qui est opérationnelle depuis février2017 ! Bonjour les dégâts ! Voilà le capitalisme danstous ses états : la déification de l’argent (Mammon)conduit à toutes sortes d’impasses, économiques,sociales, écologiques…  ! L’allègement des chargessociales et fiscales accordé aux entreprises retarderapeut-être le processus de déclin de ce système péri-mé, condamnable et condamné par les faits, mais iln’évitera pas sa chute.On prétend que c’est la crise qui engendre le chôma-ge. C’est faux, c‘est le chômage qui engendre la criseen réduisant ou supprimant le revenu de consom-mateurs : des entreprises ne peuvent vendre ce queles gens ne peuvent pas acheter !On affirme que la croissance ramènera l’emploi.C’est faux, une croissance qui enrichit l’entrepriselui permet de s’équiper pour avoir une productivitéplus performante, la foire d’empoigne de la compé-tition l’exige. Donc robotique, informatique, etc. sontutilisées pour réduire le personnel employé, alors lechômage croît en même temps que la production !

Tous ces faits ne devraient-ils pas déciller lesyeux des aveugles à la recherche d’un passé révolutant il est vrai, comme disait Joseph Pastor, «que lepoids des traditions des générations passées pèse lourde-ment sur celle des vivants».Pour résumer mon propos, je dirais que les observa-tions que j’ai rappelées démontrent, une fois de plus,la nécessité et l’urgence d’un changement de capéconomique qui soit en adéquation avec les réalitésde notre temps, avant qu’un point de non-retour soitatteint. Faire de l’argent un dieu… fait de l’hommeun loup pour l’homme, rendant violente la sociétéhumaine. Or les réformes datant de l’ère de la rareténe peuvent pas apporter le vrai changement d’èrequi s’impose, celui de l’abondance maîtrisée pourêtre équitablement, raisonnablement produite etpartagée. Je pense qu’alléger les cotisations socialeset fiscales des entreprises c’est aller dans une impas-se. Tant que la politique sera verrouillée pour causede non-rentabilité, le domaine social restera sacrifiésur l’autel du profit financier. Mais je n’ai pas la science infuse et si mon analyseest fausse, il ne faut pas hésiter à me le démontrer.Pour moi, l’économie des besoins qu’est le distribu-tisme (le trilogie “production-distribution-consom-mation”) répond en tout point aux impératifs de larévolution “numérique”. Pourquoi cette omerta à cesujet  ? Comme l’affirmait son génial inventeur, j’ainommé Jacques Duboin, «les faits sont plus fortsque les hommes : ils s’imposent» en bien ou en mal,le déchaînement meurtrier des phénomènes clima-tiques récents ne cesse de nous le rappeler !Le distributisme n’a pas pour vocation de distribueraux rejetés et exclus, présents et futurs, les miettesd’un festin exorbitant et d’un luxe immodéré, actuel-lement accaparé par quelques privilégiés, ni de sou-lager la misère matérielle devant des buffets pleins.Mais de supprimer cette misère matérielle. Parce que c’est possible  !! Serait-il impossible à ungouvernement d’aujourd’hui de faire à l’envers cequ’avait réussi celui de 1914 ? Reprendre la maîtri-se de la création monétaire est pourtant la conditionsine qua non pour qu’il se libère des contraintes et desaberrations qui l’obligent à quémander auprès deboites financières privées la monnaie qu’il pourraitet devrait lui-même créer, alors que cette contraintede remboursement de crédit et de paiement d’inté-rêts plombe l’économie réelle et crée un malaisesocial aussi indigne qu’inadmissible  ! Cette reprisede la création monétaire permettrait légitimementau gouvernement d’assurer à tous un revenu socialdans une monnaie de consommation qui ne seraitrien de plus qu’un pouvoir d’achat. D’un montantdécent, ce revenu permettrait enfin le partage destâches non exécutées par des robots et supprimeraitla guerre économique de tous contre tous. Le revenusocial des uns ne serait donc pas prélevé sur celuides autres. Cela permettrait de travailler moins maisen travaillant tous, peut-être bientôt seulement 20heures par semaine. On ne verrait plus des gensdémolis par leur travail (stress, suicides) et d’autres

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démolis par manque de travail  ! Sans problèmesfinanciers, il serait possible de mettre davantage depersonnel là il y en a tellement besoin : santé, vieilles-se, agriculture “propre”, etc. (l’augmentation du per-sonnel dans les maisons de retraite, par exemple,améliorerait les relations avec les résidents sans aug-menter les coûts de séjour). La finalité de l’économieserait enfin l’être humain, et non pas la pérennitéd’un système financier scandaleux. L’argent neserait enfin qu’un moyen mis au service de tous ! Ilserait possible de sortir du scandaleux gaspillageproductiviste (obsolescence programmée, publicitésdiverses, etc.) qui se fait au détriment de notre Terre,dont toute vie est tributaire, et des pays pauvres dontles matières premières sont achetées à bas prix parles pays riches ce qui provoque émigrations et vio-lences.

Je voudrais, pour conclure, prendre le TGV de l’es-poir. J’espère qu’une prise de conscience animéed’un élan politique courageux va laisser sur le quaid’une gare désaffectée le train de l’obscurantismeéconomique : il transporte des théories, des méthodeset des remèdes datant d’un passé révolu qui sontinadaptables aux problèmes économiques et sociauxactuels. À l’heure de la révolution numérique, tousles aiguillages conduisent au TGV de la concordedes peuples, assurée par une justice sociale consé-quente, vecteur de convivialité et de fraternité. Au pays des Droits de l’Homme (1789) et de laDéclaration Universelle des Droits de l’Homme(1948), il faut le courage politique de passer à leurapplication, le choix est entre révolution culturelleou déshumanisation, entre splendeur et décadence.

ernest Barreau

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un autre fidèle “distributiste”, RÉMY MOURIN, a composé pour les lecteurs de LaGrande Relève ce qu’il appelle un poème en prose. Le voici :

Faites silence mes frères singesUne main sur la bouche, Un doigt dans chaque oreille.Soyez heureux sans l’entendre Car la terre tourne en grinçant Du bruit des êtres qui souffrent.

Faites silence, jeunes apprentis, Ecoutez méthodes et consignes. Peut-être parlerez vous plus tard, Après le formatage social Qui vous ouvrira un horizon, Un avenir sous parenthèses ?

Faites silence, compagnons, Usez patiemment votre pierre. La main posée sur votre dosCaresse vos fières douleurs. Taillez, c’est pour la cathédrale.Puis un court instant, mais debout, Hurlez ces mots : “Gloire au travail” !Puis reprenez vos chers ciseaux Et tapez pour le père et ses fils. Le ciel, promis, vous le rendra !

Ouvriers, cernés de robots,Pour votre bien, ils avancent ? Plutôt, ils observent vos mains,En répétitions éprouvantes. Ils copient et n’ont qu’un butPour améliorer la cadence,Celui de prendre votre place. Seuls, dans leur mécanique, Ils méprisent vos angoisses Travailleurs, faites silence !

S i l e n c e sÇa et là, enfants voués à la peine,

Pour aider leurs familles pauvres, Et de force, parfois, tirés d’elles !Vous, jeunes africains agiles,Grimpez et cueillez en silence Les bogues de mes cacaoyers Ou bien : Vous, petites chinoises, Vos adroites mains font merveille En silence, dans la chaîne d’IPhone.

Soldats, sous vos morionsTous les casques se valent…Faites silence, l’œil de côtéDu pouvoir vous observe, admire,Si belle est votre haie d’honneur !Maintenant, claquez des talons Et puis courez en chantant.Là c’est permis et très fort,Où sont tombés vos pères N’êtes vous pas gladiateurs ?Plutôt, ils observent vos mainsAu service de la large finance,En répétitions éprouvantes.De bénis ou maudits “pétroleurs”.

Eh bien, confiant Confucius,Tu voulais faire des êtres sages,Aurais-tu fait des esclaves Que l’on appelle prolétaires, Parfois défenseurs, ou militaires ?

Des aveugles, des sourds, des muetsBeaucoup se sont si bien soumis !Faut-il en force prendre leurs mains ?Leur dire : arrachez vos bandeaux ?Arrachez les et puis criez ! CriezVotre soif de libre et vraie jouissance.Montrez alors votre réelle puissanceVous retrouverez joies et fierté méritée.Le bruyant Monde fera le silence,À son tour, pour enfin vous écouter !

Espoir vain dis-tu , Philosophe Confucius ?Nous lirons encore tes écrits de sagesse.Mais sache, pourtant, que de l’inversionCertains de tes dits sages “singés“ préceptes,Si présents : “Ne rien entendre, voir et dire”Naîtront : Oui ! avec une énergie libératriceDemain, l’attendue libération de la ParoleEt la maîtrise de ce qui se nomme “Progrès”,Pour un triomphant devenir de l’HOMME.

rémy mourin

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LA ROBOTISATION, L’EMPLOI ET LES MÉDIAS…

J ’ ai regardé l’émissionEnvoyé Spécial de ce

jeudi 11/01/2018 (voir ci-dessous les deux liens quipermettent d’accéder demanière partielle à ce docu-ment, si c’est encore visi-ble). Il est nécessaire de remar-quer que dans les médias,les informations concernantles rapports entre robotisa-tion et suppression d’em-plois sont très rares, d’oùl’intérêt de cette émission.Pourtant, ce problème estprésent de longue date,quasiment depuis le débutde la “révolution indus-trielle”. Cette robotisation reprendson essor pour certainementne jamais plus s’arrêter, enraison du développement“infini“ de l ’ Intel l igenceArtificielle…Jacques Duboin, en sontemps, fut particulièrementvisionnaire sur ce sujet. Il atrès bien compris que pen-dant la “révolution indus-trielle“, la machine a sup-primé une multitude d’em-plois dans les pays occiden-taux (machines à t isser,machines ou t i ls numé -riques, moissonneuses-bat-teuses, etc…). Ensuite ,après les “Trente Glorieu -ses“ dans les pays dévelop-pés, beaucoup ont disparuen raison des seules délocal-isations en Chine et ailleurs(au Bengladesh pour le tex-tile), où le coût du travailétait très faible, les patronsconsidérant qu’un Chinoiscoûtait moins cher qu’unemachine. Cette évolutionmomentanée a permis à noséconomistes orthodoxes de

faire porter la faute du chô-mage, entre autres, sur lamondial isation… ce quin’est pas faux, mais insuf -fisant comme explication...Maintenant, et c’est relayédans la dite émission, faitexceptionnel mais qui étaitprévisible, des conflits soci-aux ont éclaté en Chine(une carte les situant y estmême proposée).

Le pouvoir, pris de peur, aeu l ’ incroyable idéed’inciter à la robotisationmassive car les machines nese révoltent pas (la Chineest un pays “magnifique“où le capi talisme peut fairece qu’il veut!)… Je dis incroyable car il y a1,3 milliard de personnes ànourrir qui, surtout, serontsusceptibles de devenir desconsommateurs compulsifs(com me chez nous) et on semet, aujourd’hui, à sup-primer des emplois !…Le processus de liquidationdu salariat est donc égale-ment en marche dans cepays et pourtant on étaitloin de penser que celapuisse arriver, eu égard à lamasse des salariés potentielset surtout pas chers(évidemment, chez nous ilse poursuit al lègrement,avec le numérique suriPhone, les emplois ditspartagés, AirBnB, Uber,etc…).250 mil l ions d’emploisseront supprimés dans lemonde d’ici 2025, c’est-à-dire demain !… Et encore,je pense que celui qui le ditdans l’émission et qui n’estcertainement pas un aven -turier, est loin de la vérité(d’autres parlent de 600millions) !...

La question importante à se

poser est : peut-on encoreparler de la théorie de ladestruction-créatrice (deSchumpeter ) qui af f irmeque toute destruction d’em-plois est concomitante à lacréation d’autres ? Cette théorie est chère à l’é-conomiste Nicholas Bou zouqui sévit à “C dans l’air“ etailleurs : il ne manque pasde la rappeler comme unelitanie (mais le “fond decommerce“ de ce monsieurn’est pas prêt de dis-paraître, car il a été formépour croire en ce qu’i laffirme)… Personnellementet en raison des informa-tions développées dans cetteémission et ai l leurs, par -t icu l ièrement dans LaGrande Relève, je ne le croispas… Mais il n’est pas leseul et un autre économistedisait, sur ce même plateauque : «…20% des emploisde demain n’étaient pasencore inventés».Mais lesquels ??D’une part , les “écono -mistes atterrés” et quelquescandidats à l’élection prési-dentielle de 2017, pensentavoir trouvé la réponse àcette question : l’économieverte. L’écologie est suscep-tible de créer des millionsd’emplois affirment-ils !…Peut-être, mais pour com -bien de temps ?... D’autre part , toujours lamême “rengaine“ : il fau-dra des emplois pour fabri-quer les robots! … Or 1) letaux de remplacement seratel que cet argument netiendra plus…et 2) lesemplois créés pour penser etfabri quer ces robots, nonseulement seront numéri -quement faibles mais, deplus, d’un niveau de quali-f ication tel que le plusgrand nombre ne pourra pas

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adresses internet :https://www.fra ncetvinfo.fr/replay-maga zine/france-2/envoye-special/video-en-chine-une-

armee-de-robots-pour-assurer-le-tri-postal_2553525.htmlhttps://www.francetvinfo.fr/replay-magazine/france-2/envoye-special/video-mon-banquier-est-

un-robot_2554607.html

C O U R R I E R

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y accéder. Les emplois supprimésseront des cadres (comme ence moment dans les paysoccidentaux), mais aussiune grande quantité d’em-plois faiblement quali f iéscor respondant à des person-nes qui ne retrouverontjamais leur place sur lemarché du travail (99% dessecrétaires et des emplois deservice pourraient être sup-primés d’ici 50 ans).Dans l ’émission “EnvoyéSpécial“ citée au début, lepatron d’une entreprise quiproduit des robots dit : « jeme f iche de ce que lesemplois vont devenir, l’im-portant c’est que mes robotssoient efficaces». Cette déc-laration pourrait êtrechoquante et bien qu’elle aitle mérite de la s incérité ,c’est la loi du système quitransparaît dans ces pa -roles. Les médias, les hom -mes politiques, les élites, lesresponsables d’entreprises,les économistes par leur dis-cours, entretiennent lacroyance que le monde dedemain va s’en sortir enpoursuivant la chimère de larecherche à tout prix duplein emploi. En Allemagne,on fait croire qu’i l estatteint, mais c’est un leurrequi permet d’asséner aupeuple français que notrepays ne prend jamais lesbonnes décisions (et quel ’on a bien fait de voterMacron). Pourtant, il suffitde lire «l’enfer du miracleallemand» dans Le MondeDiplo matique pour sepersua der du contraire…Il me semble que pour cer-tains la recherche du pleinemploi est une croyancebien ancrée ( la formationdans les Grandes Écoles ,ENA et Science Po, les for-mate), mais pour beaucoup,c’est la sauvegarde du sys-tème qui est en jeu (en par-t iculier les éco nomistesnéolibéraux), ce système qui

permet aux plus riches decontinuer à s’enrichir im -pudemment dans tous lespays développés et/ou endéveloppement. Au cours de cette émission,un intervenant dit quel ’augmentation incroyabledu chômage va créer destensions, du populisme etdes votes extrêmes…Certes!! Comment ne pasêtre en accord avec cetteprévision qui augure untriste avenir ?... De plus,c’est déjà le cas, aux États-Unis avec Trump, en Franceavec Le Pen, en Autricheavec Kurz, etc…Après la fin de l’émission,aussi argumentée fut-elle ,on perçoit, hélas, que lesexplications et les proposi-t ions étaient loin d’êtrefinalisées. Le système capi-taliste et l’économie finan-ciarisée ont un tel pouvoird’adaptation (ils absorbenten leur sein les meilleuresévolutions, par exemplejustement l’écologie) qu’ilest nécessaire de se poser lesbonnes questions afin, nonpas de les transformer maisde les rempla cer et ceciavant qu’il ne soit trop tard(il l’est peut-être !!).Si c’est en terme de trans-formation radicale du sys-tème économique qu’il fautréf léchir, alors l ’économiedistributive est une proposi-tion qui semble incontourn-able… Mais cette réflexion n’appa-raît jamais dans les médias,jamais nos élites ne l’abor-dent (les journalistes mêmeau Monde Diplomatique, leséconomistes mêmes atterrés,ou autres)!!!Un seul candidat à l’élec-tion présidentielle de 2017 aosé parler du revenu uni-versel. Même si le concept,dans ses propositions, man-quait de profondeur(surtout en terme de rup-ture entre emploi etrevenu), il fut stigmatisé et

décrédibilisé au sein de sonpropre parti.Pour terminer, est-il besoinde rappeler que seul leregretté Bernard Maris aparlé de Jacques Duboindans un de ses livres !Pourtant, le temps presse…

Claude Rajain

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M erci pour le débatentre lecteurs et la

rédaction de la GR.Intéressantes, ces diversesréfle xions venues de la baseainsi que les réponses de larédaction à la suite de cha-cune d’el les . Réponsesheureuses de par leurs pré-cisions et éclaircissementsde la pensée distributiste,replacés dans leur contexte. Aliénation de travail leurssalariés aux mains d’en-treprises capitalistes ayantinventé le marché du travailsalarié comme uniquesource de la valeuréconomique, faisant foi etloi . En conséquence, nefaut-il pas abattre ce typed’entreprises capital istes ,son marché du travail ,berceau de cette forme salar-iale impériale, aliénante ?Pour y arriver progressive-ment, concrètement plutôtqu’une baisse des salaires,cotisations sociales etpatronales au profit d’uneaugmentation régulière eten “silence” du taux desdividendes, n’y aurait-il paslieu d’inverser à nouveaucette politique néo-libéralediscriminante pour le grandnombre ? Assécher petit àpetit la concentration ducapital aux mains de pro-priétaires lucratifs, sourcedu véritable pouvoir poli-tique, chemin à redécouvriret à retrouver au plus viteavant qu’i l ne soit troptard…

J. B., Jemelle, Belgique

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LA GRANDE RELEVE - n° 1193 janvier 2018 13

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A bonné depuis unedizaine d’années, je

trouve ce journal toujourspertinent dans ses réf le -xions…Je ne peux que partagerl’édito de décembre : il fautrester optimiste, alors quec’est difficile. Merci à toutel ’équipe de rédaction decontinuer à faire vivre cejournal. De notre côté, nous conti -nuons à tenter de fairebouger les choses, à faireconnaître les journauxcomme La Grande Relève etd’autres, à militer pour unautre monde. Le tout dansla convivia l i té . Sinon, àmon avis, le risque est tropgrand de se laisser aller ense disant «À quoi bon ?». Tous les jours, autour demoi, avec les collègues deboulot, les amis, la famille,

j’observe les débats et lesdiscussions : comment fairepour s’extirper de ce sys-tème ? Difficile quand on est prispar les f inances avec desenfants à nourrir et unloyer à payer. Mais les initiatives pren-nent de l’ampleur : Bure,Notre-Dame des Landes,etc, des lieux où bien desénergies se croisent, avec lesoutien de la populationlocale.Le cas de Bure est intéres-sant à plus d’un titre : lagestion du nucléaire biensûr, mais aussi la façon dontl’État, depuis des années,tente de faire accepter unprojet démentiel à unepopu lation laissée à l’écartavec toujours cette promessede l’emploi… heureusement,une partie de la population

réagit, des militants se sontinstal lés dans la forêtoccupée, mais aussi etsurtout dans les vi l lagesalentour, pour les redy-namiser, inventer de nou-vel les façons de vivre,d’échanger, etc… Tout ceci reste, bien sûr,une microgoutte d’eau dansle marécage de la mondiali-sation… mais que c’est bonpour le moral de voir toutça!!Le fest i-débat 2018 deSewen se déroulera les 1, 2et 3 juin sur le thème del ’( in)égalité homme/fem -me… vaste débat !Je ne peux m’empêcher deciter Serge Latouche :«Tout espoir n’est donc pasperdu et il convient de seréjouir sereinement du mir-acle d’être tout simplementen vie».

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LA GRANDE RELEVE - n° 1193 janvier 2018 15

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ET VOICI COMMENT RÉDIGER MON ADRESSE (merci d’écrire des majuscules) : M. Mme,ou Melle, prénom, nom : .....................................................

immeuble (éventuellement) : .....................................................N° et voie : ....................................................

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ta r i f s d ’ a B o n n e m e n t ( 11 numéros par an)france, régime intérieur pour la Poste. . . . . . . . . .23 euros.(soutien : + 14 euros par an, par exemplaire en plus, chaque mois)

DOM . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .26 euros.TOM . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .29 euros.

régime international, suivant les zones redéfinies par la Poste au premier janvier 2014 :Zone 1 (Bénélux, Espagne, R-U, Suisse, …) . . .29 euros.Zone 2 (autres pays européens) . . . . . . . . . . . . . .27 euros.Zone 3 (Canada, États-Unis,…) . . . . . . . . . . . . . .30 euros.Zone 4 (Afrique, Amérique du Sud,…) . . . . . . .30 euros.

r è g l e m e n t s :

En attendant, très bonneconti nuation.

J. I, Sewen.

RDLR : pensez à nousenvoyer à temps l’annoncedu fest i-débat de Sewenpour les lecteurs de La GRqui pourraient y participer.

***ILS Y VIENNENT !

N ous tenons à signalerdeux publict ions très

récentes qui font plaisir :• la revue Durable, une revuesuisse, publie un formidabledossier dans son numéro 60,hiver-printemps, dont l’édito-rial, intitulé «DES MONNAIESP O U R U N E P R O S P É R I T É S A N SCROISSANCE», commence ainsi:«La création monétaire estl’un des plus grands impensésdu mouvement écologiste et del’économie el le-même. Pour -tant, la façon dont l’argent estcréé et mis en circulation

aujourd’hui détruit les hu -mains et la Terre». Ce dossier expose trois propo-sit ions «pour contrôler lacréation monétaire dans uneoptique écomogique : rendrece privilège public en le confi-ant aux Banques Centralessous contrôle démocratique,donner aux banques centralesles moyens de f inancer lesinfrastructures nécessaires àla transit ion écologique etsociale, et, plus fondamentale-ment, coupler la créationmonétaire à la biocapacité dela Terre».Si ce n’est pas tout à fait l’é-

conomie distributive, c ’estvraiment très proche de ce quiest exprimé dans La GrandeRelève !• la revue Nexus ouvre undossier sur le même sujet dansson numéro 114 de janvier-février 2018. Sous le t i treSÉISME BANCAIRE et sous la

rubrique DÉ S O B É I S S A N C E/ -MONNAIE, la même nouvelleest annoncée en ces termes :«Une première en Europe etdans le monde ! La propositionprévoit que la ConfédérationHelvétique re pren ne son pou-voir de création monétaire .Une telle mesure permettrait àla seule Banque Centrale decréer des francs suisses»Et el le est suivie de cetteremarque pertinente : «lesbanques sont trop occupées àcrééer de l’argent et à joueravec. Si la question de la mon-naie n’avait pas été renduearti f ic ie l lement aussi com-plexe et opaque, tous lescitoyens le sauraient».Encore une revue qui ne citepas La Grande Relève et lesproposit ions des dis-tributistes , mais cel les dumouvement 100% monnaie,présentées par J-M Heim

A et D. W., S t Amarin.

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lectures pour approfondir :• JACQUES DUBOIN

Extraits choisis dans son œuvre (3 €).Aujourd’hui introuvables, plusieurs de ses livres ontété numérisés, et leur texte intégral estdisponible gratuitement sur notre site internet.

• ET SI ON CHANGEAIT ?Bande dessinée par J.VIGNES-ELIE (4 €).

• LES AFFRANCHIS DE L’AN 2000Un roman de M-L DUBOIN qui, à l’aide d’exemples, explique les mécanismes de l’économie distributive et montre ce qu’elle apporte à la société (13 euros).(il n’en reste que 3 exemplaires…)

• MAIS OÙ VA L’ARGENT ?l’étude, par M-L Duboin, de la façondont la monnaie est devenue cettemonnaie de dette qui empêche toutevéritable démocratie, suivie de propo-sitions pour évoluer (édition duSextant, 240 pages, 13 €).

• D’anciens numéros, et un résumé (4 pages, formatA4) de nos propositions, sont disponibles (2 €)• Épuisés sur papier, des textes et des livres sont télé-chargeables sur notre site internet.

Tous les prix indiqués incluent les frais d’envoi.

ce que nous proposons :

En résumé, nous affirmons qu’ilfaut rendre financièrement possible cequi est utile, souhaitable, matérielle-ment et écologiquement réalisable, et àcette fin, remplacer la monnaie actuellepar une monnaie qui ne circule pas doncqui ne puisse pas être “placée” pour“rapporter”. Une telle monnaie, émisepar une institution publique, est un pou-voir d’achat qui s’annule quand on l’uti-lise, mais laisse au consommateur laliberté de ses choix.

Créées et détruites au même ryth-me, masse monétaire et production sontalors deux flux permanents qui s’équili-brent. Ce sont les citoyens qui en défi-nissent l’intensité en décidant démocra-tiquement, à l’échelle appropriée, de cequi sera produit et dans quelles condi-tions, et de l’importance relative des partsà faire dans la masse monétaire pourfinancer la production, pour assurer lesservices publics (car impôts et taxesn’existent plus), et pour verser à chacunun revenu garanti qui permette à tous devivre libres et de recevoir leur partd’usufruit de notre héritage commun.

Ainsi les décisions prises n’ont plusde retombées financières personnelles,l’intérêt général prévaut enfin sur l’inté-rêt particulier et la démocratie peutdevenir réalité.

La Grande RelèveFondé en 1935 par Jacque s DUBOIN

Direc t ion e t mi se en page s : marie-Louise DuBoin

Rédaction : les abonnés qui le souhaitent, tous bénévoles.

Les manuscrits sont choisis par le comité de lecture et ne sont pas retournés.

Imprimé par la Scop Imprimerie de Ruffié(certifiée ISO 14001 et labélisée Imprim’Vert et Print Environnement,

impression avec encre végétale sur papiers recyclés ou PEFC, sans alcool

adresse postale : 88 Boulevard Carnot 7 8 11 0 L e V é s i n e t

adresse électronique : g r a n d e . r e l e v e . n e t @ w a n a d o o . f r

si te in ternet : ht tp ://www.economiedis t r ibut ive . f r

(Tari fs et bul let in d’abonnement sont au dos de cette page)

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