la gestion des processus pédagogiques gérard lassibille cnrs atelier agepa niamey 16-20 février...
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La gestion des processus pédagogiques
Gérard LassibilleCNRS
Atelier AGEPANiamey
16-20 Février 2009
Objectifs Lorsque l’on évoque les problèmes de gestion des ressources
humaines dans le secteur de l’éducation, on se réfère le plus souvent aux réformes visant à moderniser l’administration du système et
décentraliser la gestion des ressources aux modalités de gestion des personnels et à l’efficacité des procédures
d’allocation des enseignants aux écoles ou encore au développement des compétences des ressources humaines.
La gestion des processus pédagogiques et les tâches qu’accomplissent les enseignants et les directeurs sont généralement ignorées.
Or si le but ultime des réformes entreprises dans le secteur de l’éducation est d’accroître les niveaux d’apprentissage, le travail que font réellement les personnels des écoles ne peut être ignoré.
Cela suppose de définir les tâches clefs des métiers de l’enseignement et de disposer de systèmes d’informations qui permettent d’évaluer dans le détail la régularité avec laquelle ces tâches sont accomplies.
Les tâches des personnels des
écoles Les tâches que l’on attend des enseignants et des directeurs
d’école sont nombreuses. L’enseignant assure des tâches pédagogiques et de contrôle, comme:
La préparation des leçons Le suivi et l’évaluation des élèves Le contrôle de l’assistance des élèves Le suivi avec les parents et le directeur d’école, etc…
Le directeur a pour tâche ; D’assurer l’organisation administrative et pédagogique de l’école
(planifier et organiser la rentrée, affecter les enseignants dans les classes, tenir les registres de l’école, etc.)
De contrôler l’école d’un point de vue pédagogique et administratif (veiller à la présence des enseignants, contrôler les progrès scolaires des élèves, analyser les causes de leur échec, etc…)
D’entretenir des relations avec les communautés, et en particulier les parents.
Les tâches des personnels des écoles
Ces tâches ne sont pas indépendantes les unes des autres. Par exemple:
Un enseignant qui contrôle bien les absences des élèves, prépare consciencieusement ses leçons et évalue régulièrement ses élèves a probablement plus de chances qu’un autre de suivre de près les progrès scolaires de ceux-ci, ou encore d’avertir les parents des difficultés de leurs enfants.
Pour cette raison, on peut sans grand risque réduire l’ensemble des tâches variées à un sous ensemble de tâches élémentaires qui a priori caractérisent assez bien le travail de l’enseignant
Tâches essentielles du personnel des écoles
Enseignant: tenir le registre d’appel préparer la leçon du jour faire une planification
bimestrielle des leçons contrôler les acquis des
élèves avoir fait des compositions
lors du dernier bimestre aider les élèves en difficulté parler des difficultés
scolaires avec le directeur.
Directeur: tenir le registre matricule faire une récapitulation mensuelle
ou bimestrielle des absences des élèves
viser les registres d’appel des élèves
faire une récapitulation des résultats des élèves (non comprises annuelles)
recenser les absences des enseignant
communiquer les absences des enseignants au Chef ZAP/CISCO
faire le suivi des leçons avec les enseignants.
Ce qu’implique une bonne gestion des processus pédagogiques
Une bonne gestion est indissociable de la réalisation de l’ensemble des tâches considérées comme élémentaires ou essentielles. Autrement dit :
Un bon enseignant est un enseignant qui réalise toutes les tâches jugées indispensables.
Un bon directeur est un directeur qui réalise toutes les tâches jugées indispensables.
Une école bien gérée est une école dans laquelle tous les personnels (enseignants et directeur) exécutent toutes les tâches qu’il leur revient d’accomplir, et qui mettent en œuvre les procédures indispensables au contrôle et au suivi de celles-ci.
Les modes de gestion actuels
Deux types de données pour illustrer les conditions dans lesquels sont gérés les processus pédagogies:
Données collectées auprès d’enseignants et de directeurs dans 300 écoles primaires, au cours d’enquêtes impromptues effectuées à différents moments de l’année scolaire (comportements moyens sur l’année).
. Analyse des outils qu’ont rempli les enseignants et les directeurs
d’écoles au cours d’une année scolaire complète 20 écoles, soient 400 outils, non remplis, partiellement ou
totalement remplis par ces deux types d’acteurs.
Par outil, on entend par exemple: les registres d’appel tenus par les enseignants les cahiers journaux et les programmations bimestrielles
des leçons les récapitulatifs des absences des enseignants tenus par
les directeurs, ou encore les relevés de notes.
Les modes de gestion actuels
Beaucoup d’aspects du processus pédagogique sont mal gérés et des activités essentielles à l’apprentissage des élèves sont mal exécutées.
Les absences des élèves (20% d’absences) sont mal contrôlées
Seulement 13 jours par mois en moyenne par les enseignants
Ces absences ne sont pas davantage contrôlées par les directeurs 10% ne s’en préoccupent jamais le tiers des registres d’appels des enseignants sont visés par
les directeurs dans 80% des cas les absences ne font pas l’objet de
discussion avec les enseignants
Les modes de gestion actuels
En ce qui concerne les pratiques pédagogiques
20% des enseignants ne préparent pas la leçon du jour
Seulement 15% des enseignants font une préparation consciencieuse de leur leçon, à l’aide d’un cahier journal et en suivant une fiche de planification hebdomadaire des leçons
La plupart du temps les enseignants sont livrés à eux-mêmes et les directeurs ne contrôlent pas leur travail
Un tiers des directeurs ne discutent jamais de la programmation des leçons avec leurs enseignants
La moitié des directeurs ne vise pas cette programmation 70% ne parafent jamais le cahier journal de leurs enseignants
Les modes de gestion actuels
En ce qui concerne l’évaluation et le suivi des résultats scolaires
Le cahier de notes de classe, lorsqu’il existe, est souvent mal rempli
25% des enseignants ne rédigent pas de bulletins individuels de notes
Les informations transmises aux parents par les enseignants sont lapidaires et les jours d’absence sont mal notifiés
Les directeurs ne sont guère impliqués dans le suivi des performances des élèves (les ¾ ne discutent pas des résultats scolaires avec les enseignants; 20% parafent les cahiers de notes et les bulletins individuels de notes)
Les modes de gestion actuels
Le contrôle des absences des enseignants
Taux d’absence (au moins un jour de la semaine): 10%
Un contrôle strict (chaque jour, et avec une récapitulation mensuel) n’est pratiqué que par 8% des directeurs
Plus de 80% des directeurs ne communiquent pas les absences à leurs supérieurs hiérarchiques
Le taux d’exécution des tâches essentielles
Taux d’exécution des tâches essentielles– Madagascar 2007.
%
Enseignants
Les enseignants ont exécuté toutes les tâches 42,4
Tous les enseignants de l’école ont exécuté toutes les tâches 23,9
Directeur
Le directeur a exécuté toutes les tâches 63,4
Directeur et enseignants
Le directeur et les enseignants ont exécuté toutes les tâches 14,6
Sources : enquêtes AGEMAD-écoles 2006-07 ; écoles témoins seulement.
Conséquences au niveau des
performances des élèves Impact de la gestion des processus pédagogiques sur la progression
des élèves – Niveau CE ; Madagascar 2007 a
Probabilité
d’abandonner
Probabilité de redoubler (parmi ceux qui n’ont pas
abandonné)
Ecole mal gérée +16,3*** +9,1***
Sources : enquêtes AGEMAD-écoles 2006-07 et AGEMAD-post-tests 2006-07 ; écoles témoins seulement.. ***=impact significatif à 1% a/ Effets marginaux calculés au point moyen ; résultats dérivés de l’estimation de modèles logistiques qui font dépendre chaque événement des modalités de gestion de l’école.
Conséquences au niveau des performances des élèves
Impact de la gestion des processus pédagogiques sur les performances des élèves – Niveau CM1 ; Madagascar
2007
25% les
plus faibles Elèves
moyens 25% les
meilleurs Ecole mal gérée -0,18** -0,13** 0,01
Sources : enquêtes AGEMAD-écoles 2006-07 et AGEMAD-post-tests 2006-07 ; écoles témoins seulement.. **=impact significatif à 5% a/ Effets déduits de l’estimation de modèles de régression quantiles ; variable dépendante : scores centré réduit d’un élève de CM1 dans trois matières (math, français, malgache) ; variables de contrôle : sexe, âge, redoublement de la classe de CE, père alphabétisé, zone d’habitation
Le profil des acteurs à risque
Si les modalités de gestion des processus pédagogiques affectent les performances scolaires des élèves, quelles caractéristiques poussent certains acteurs à réaliser moins bien que d’autres les tâches élémentaires qu’il leur revient d’assurer et donc à compromettre les chances de progrès de leurs élèves?
Les éléments empiriques sont extraits des données de l’expérimentation AGEMAD et reposent sur le groupe des enseignants qui n’ont pas été exposés à des interventions.
Le profil des acteurs à risque Qu’est ce qui fait un bon enseignant?
Le statut, mais l’effet est faible: les fonctionnaires ont 5% de probabilité en plus d’être de bons enseignants par rapport aux contractuels.
La formation académique, avec un net avantage pour ceux qui ont au moins le baccalauréat
L’expérience est sans effet; autrement dit les bonnes habitudes ne se prennent pas avec l’âge et c’est dès l’entrée dans la carrière qu’il faut agir.
Ceux qui se consacrent entièrement à leur métier d’enseignant sont de meilleurs enseignants que les autres
Un enseignant dirigé par un bon directeur a plus de chance qu’un autre d’être lui-même un bon enseignant. Si l’on veut véritablement accroître les performances des élèves il est tout à fait crucial de doter les écoles de bons directeurs, c'est-à-dire de directeurs capables de suivre et d’encadrer le travail des enseignants et des élèves.
Le profil des acteurs à risque
Qu’est ce qui fait un bon directeur
Une école bien dirigée l’est plus souvent par un directeur qui a un statut de fonctionnaire.
Les écoles sont d’autant mieux gérées que les directeurs ont reçu une formation spécifique à la gestion.
Dans notre échantillon on estime que 15% des directeurs ont reçu une telle formation ; or d’après nos estimations, ceux-ci ont une probabilité de bien gérer leur école supérieure de 22 points de pourcentage.
En guise de conclusion On a peu l’habitude de considérer le travail des enseignants et des
directeurs lorsque l’on parle des problèmes de gestion des systèmes d’enseignement.
La nature de ce travail n’est même jamais pris en compte lorsque l’on cherche à expliquer les performances des élèves.
D’où la nécessité de dépasser les cadres d’analyse trop simples et de mettre en place des dispositifs d’informations permettant d’observer les tâches accomplies par les acteurs.
En faisant de la sorte, on peut identifier les mécanismes, les suivis ou les contrôlent susceptibles d’améliorer la gestion des processus pédagogiques et donner plus de chances de succès aux réformes.
En effet l’évidence montre que: les processus pédagogiques sont souvent mal gérés que l’on ne pourra accroître la performance des élèves sans améliorer
les contrôles et les suivis dans les écoles et dans les classes. qu’il serait important de mettre l’accent sur la formation des directeurs
à la gestion de l’école