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La France, ce si discret marchand d’armes L’industrie françai se de l’armement, ce sont cent soixan te-cinq mille emplois, quatre mille PME et 6,9 milliards d’euros de commandes émanant de pays étrangers en 2017. Si le poids économique du secteur est volontiers claironné par le gouvernement, obtenir des informations sur les exportations d’armes tricolores est une autre paire de manches. Lors de l’enquête qu’elle a menée pendant neuf mois, de juin 2017 à début 2018, la journaliste Anne Poiret s’est heurtée à une oppressante omerta. Son documentaire, Mon pays fabrique des armes, abonde en moments manifestes de gêne d’industriels et de politiques rechignant à faire le lien entre armes et guerre et met en lumière les silences et les invocations pavloviennes du secret défense. « Ayant déjà été éconduite par le constructeur de missiles MBDA lors d’un précédent film, je me doutais que je n’aurais pas accès aux usines, commente-t-elle. Mais je ne m’attendais pas à un tel degré d’obstruction. » Pendant le quinquennat Hollande, sous l’impulsion de Jean-Yves Le Drian, alors ministre de la Défense, la France s’est hissée du 5e au 3e rang du classement des plus gros exportateurs d’armes au monde. En 2015, Dassault vend ses vingt-quatre premiers avions Rafale à l’Egypte. Le régime autoritaire du maréchal al-Sissi devient alors le premier client de l’Hexagone. Cette année-là, le montant global des commandes passées à la France est multiplié par quatre, pour atteindre 17 milliards d’euros. « La stratégie est devenue extrêmement offensive, dans un silence complet. “L’équipe France”, la cellule de Jean-Yves Le Drian consacrée aux exportations, a fait le calcul que, sans ces ventes à l’étranger, le budget de la Défense serait déficitaire. Il fallait donc vendre le Rafale coûte que coûte », explique la réalisatrice. Sans s’embarrasser des dégâts collatéraux. En Egypte, elle a rencontré des activistes et des victimes du régime, qui questionnent sans détour les ventes d’armes et de technologies françaises à un Etat qui étrangle sa population à coups de disparitions forcées et de cybersurveillance. « Nous avons fourni des armes à l’Egypte sans aucun questionnement à long terme. A quoi cela nous engage-t-il ? Nous exportons du matériel de contrôle de la population en disant qu’il s’agit de combattre le terrorisme, mais, sous couvert de lutte antiterroriste, le régime égyptien cible en fait toute parole d’opposition. » Autre partenaire embarrassant, l’Arabie saoudite, à la tête d’une coalition en guerre contre les rebelles houthis au Yémen depuis mars 2015. Selon l’ONU, qui évoque la « pire crise humanitaire au monde », le bilan du conflit serait de plus de dix mille morts, dont au moins cinq mille civils. La France n’a pas cessé de livrer des armes à Riyad et à ses alliés, en dépit de ses engagements internationaux. Le Traité sur le commerce des armes [PDF] notamment, qui, entré en vigueur en 2014, astreint ses signataires à refuser les ventes si elles peuvent servir à commettre une violation grave du droit international humanitaire ou des droits de l’homme. Le reportage Yémen : les enfants et la guerre, dans lequel des enfants appellent l’Europe à stopper les ventes d’armes à l’Arabie saoudite a bouleversé les téléspectateurs. Ni l’ex-président François Hollande, ni l’actuelle ministre de la Défense Florence Parly n’ont accepté de répondre aux questions d’Anne Poiret. Mais lorsqu’il arrive à la ministre de s’exprimer sur les autorisations d’exportation à destination de l’Arabie saoudite, elle évoque une procédure « très encadrée », assurant d’une « vigilance particulière » de l’Etat, et brandit tel un bouclier le contrôle effectué par le Parlement, auquel le gouvernement remet chaque année un rapport. Le film déconstruit ce discours, en décryptant le fonctionnement de la commission interministérielle pour l’étude des exportations de matériel de guerre (CIEEMG), ses faiblesses et l’extrême opacité des débats qui ont lieu en son sein. Le récit du cas Donas est révélateur : un contrat de 3 milliards d’euros d’armement à destination de l’Arabie saoudite, validé début 2017 par la CIEEMG, auquel Jean-Marc Ayrault, alors ministre des Affaires étrangères, avait tenté de s’opposer. « Les gens du Quai d’Orsay ont fait bien attention à ce que son désaccord soit documenté, au cas où une enquête serait menée un jour, commente la réalisatrice. Si les débats ne sont pas publics, j’ai pu constater qu’il y en avait eu en interne. Mais maintenant que Jean-Yves Le Drian, qui fut un gros vendeur d’armes lorsqu’il était Tous droits de reproduction réservés URL : http://www.Telerama.fr/ PAYS : France TYPE : Web Grand Public 23 octobre 2018 - 08:17 > Version en ligne 3

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La France, ce si discret marchand d’armes

L’industrie françai se de l’armement, ce sont cent soixan te-cinq mille emplois, quatre mille PMEet 6,9 milliards d’euros de commandes émanant de pays étrangers en 2017. Si le poidséconomique du secteur est volontiers claironné par le gouvernement, obtenir des informations surles exportations d’armes tricolores est une autre paire de manches. Lors de l’enquête qu’elle amenée pendant neuf mois, de juin 2017 à début 2018, la journaliste Anne Poiret s’est heurtée àune oppressante omerta. Son documentaire, Mon pays fabrique des armes, abonde en momentsmanifestes de gêne d’industriels et de politiques rechignant à faire le lien entre armes et guerre etmet en lumière les silences et les invocations pavloviennes du secret défense. « Ayant déjà étééconduite par le constructeur de missiles MBDA lors d’un précédent film, je me doutais que jen’aurais pas accès aux usines, commente-t-elle. Mais je ne m’attendais pas à un tel degréd’obstruction. »Pendant le quinquennat Hollande, sous l’impulsion de Jean-Yves Le Drian, alors ministre de laDéfense, la France s’est hissée du 5e au 3e rang du classement des plus gros exportateurs d’armesau monde. En 2015, Dassault vend ses vingt-quatre premiers avions Rafale à l’Egypte. Le régimeautoritaire du maréchal al-Sissi devient alors le premier client de l’Hexagone. Cette année-là, lemontant global des commandes passées à la France est multiplié par quatre, pour atteindre 17milliards d’euros. « La stratégie est devenue extrêmement offensive, dans un silence complet.“L’équipe France”, la cellule de Jean-Yves Le Drian consacrée aux exportations, a fait le calculque, sans ces ventes à l’étranger, le budget de la Défense serait déficitaire. Il fallait donc vendre leRafale coûte que coûte », explique la réalisatrice. Sans s’embarrasser des dégâts collatéraux.En Egypte, elle a rencontré des activistes et des victimes du régime, qui questionnent sans détourles ventes d’armes et de technologies françaises à un Etat qui étrangle sa population à coups de disparitions forcées et de cybersurveillance. « Nous avons fourni des armes à l’Egypte sans aucunquestionnement à long terme. A quoi cela nous engage-t-il ? Nous exportons du matériel decontrôle de la population en disant qu’il s’agit de combattre le terrorisme, mais, sous couvert delutte antiterroriste, le régime égyptien cible en fait toute parole d’opposition. »Autre partenaire embarrassant, l’Arabie saoudite, à la tête d’une coalition en guerre contre lesrebelles houthis au Yémen depuis mars 2015. Selon l’ONU, qui évoque la « pire crisehumanitaire au monde », le bilan du conflit serait de plus de dix mille morts, dont au moins cinqmille civils. La France n’a pas cessé de livrer des armes à Riyad et à ses alliés, en dépit de sesengagements internationaux. Le Traité sur le commerce des armes [PDF] notamment, qui, entréen vigueur en 2014, astreint ses signataires à refuser les ventes si elles peuvent servir à commettreune violation grave du droit international humanitaire ou des droits de l’homme. Le reportage Yémen : les enfants et la guerre, dans lequel des enfants appellent l’Europe àstopper les ventes d’armes à l’Arabie saoudite a bouleversé les téléspectateurs. Ni l’ex-président François Hollande, ni l’actuelle ministre de la Défense Florence Parly n’ontaccepté de répondre aux questions d’Anne Poiret. Mais lorsqu’il arrive à la ministre de s’exprimersur les autorisations d’exportation à destination de l’Arabie saoudite, elle évoque une procédure «très encadrée », assurant d’une « vigilance particulière » de l’Etat, et brandit tel un bouclier lecontrôle effectué par le Parlement, auquel le gouvernement remet chaque année un rapport. Lefilm déconstruit ce discours, en décryptant le fonctionnement de la commission interministériellepour l’étude des exportations de matériel de guerre (CIEEMG), ses faiblesses et l’extrême opacitédes débats qui ont lieu en son sein.Le récit du cas Donas est révélateur : un contrat de 3 milliards d’euros d’armement à destinationde l’Arabie saoudite, validé début 2017 par la CIEEMG, auquel Jean-Marc Ayrault, alors ministredes Affaires étrangères, avait tenté de s’opposer. « Les gens du Quai d’Orsay ont fait bienattention à ce que son désaccord soit documenté, au cas où une enquête serait menée un jour,commente la réalisatrice. Si les débats ne sont pas publics, j’ai pu constater qu’il y en avait eu eninterne. Mais maintenant que Jean-Yves Le Drian, qui fut un gros vendeur d’armes lorsqu’il était

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à la Défense, est devenu ministre des Affaires étrangères, c’est silence radio. » Les inquiétudes,quant à elles, subsistent. Une source du Quai d’Orsay confie ainsi à Anne Poiret qu’existe dansl’appareil d’Etat « une crainte qu’on retrouve des armes françaises, ou tout élément de preuve surle site d’un crime de guerre ».Seize ONG ont appelé, début septembre, Emmanuel Macron à suspendre les transferts d’armes àRiyad.Car, depuis quelques mois, les expor tations françaises commencent à être questionnées. Le 8février 2018, Envoyé spécial diffuse le reportage Yémen : les enfants et la guerre (1) , dans lequeldes enfants yéménites appellent les puissances européennes à stopper les ventes d’armes àl’Arabie saoudite. Les téléspectateurs sont bouleversés. Le lendemain, Florence Parly, invitée dela matinale de France Inter, est interrogée par un auditeur sur l’utilisation d’armes tricolores auYémen.Plusieurs ONG, dont Amnesty, tentent de documenter l’utilisation d’armes françaises dans ceconflit, comme dans la répression de la population égyptienne. Seize d’entre elles ont appelé,début septembre, Emmanuel Macron à suspendre les transferts d’armes à Riyad. L’étaucommence à se resserrer sur le pouvoir. En avril, le député LREM Sébastien Nadot a réclamél’ouverture d’une commission d’enquête. Six mois plus tard, sa demande est toujours ensuspens… « La guerre au Yémen est un cas d’école. La démar che de Sébastien Nadot est aussi decréer le débat, estime Anne Poiret, et d’élargir la volonté de transparence à la question del’armement en général. » Mettre enfin le sujet sur la table. Ce que tente aussi d’imposer sondocumentaire, qui trouve au moment de sa diffusion un écho inattendu dans l’actualité. Suite àl’assassinat du journaliste saoudien Jamal Khashoggi, la chancelière allemande Angela Merkel aestimé le 21 octobre que les exportations d’armes à destination de l'Arabie saoudite « ne peuventpas avoir lieu dans les circonstances actuelles ». De l’autre côté de l’Atlantique, le premierministre canadien Justin Trudeau « n’exclut pas », quant à lui, d’annuler un contrat d’armementde 10 milliards d’euros à destination de Ryad. La France, elle, continue à se murer dans un silencede plus en plus gênant. Jusqu’à quand ? (1) Rediffusé ce mercredi 24 octobre à 20h30 sur LCP-Assemblée nationale.

Mon pays fabrique des armes, mardi 23 octobre à 20.55 sur France5.

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TÉLÉVISIONSÉLECTIONDÉCOUVRIR

L’ARMEMENT,UN BUSINESSSANGLANT« MADE IN FRANCE»MON PAYSFABRIQUEDESARMES.DOCUMENTAIRE/ FRANCE5 /MARDI23 OCTOBRE/ 20H50

Cette industrie-là ne connaît pas la crise.Plus de 165 000 salariés, une dizaine degrands groupes et plus de 4 000 PME : lemarché de l’armement a rarement étéaussi florissant dans l’Hexagone. Pour-tant, le grand public sait peu de chose dece fleuron industriel. C’est sur ce tabouqu’a choisi d’enquêter la journaliste AnnePoiret, lauréate du prix Albert-Londresen 2007 pour le film « Muttur, un crimecontre l’humanitaire ». Un défi de tailletant l’industrie française de l’armementest un secret bien gardé, protégé par lesecret-défense.

En dépit de l’omerta, Anne Poiret a réussià ouvrir quelques portes. Comme celle dusite de Dassault Aviation à Mérignac, oùsont fabriqués les fameux Rafale. Sou-rires gênés, interlocuteurs paniqués etmal à l’aise… aucun ne commentera ladestination de ces ventes d’armes. Seulun syndicaliste CGT de chez MBDA, dansle Cher, affronte le sujet : « Je fabriquedes missiles, je sais à quoi ils servent.Quand je vois les bombes qui tombent

sur les populations civiles… je dois vivreavec ça. »

C’est que ce secteur, dans une périodede chômage de masse, représente, pourcertains territoires, le premier employeur.C’est l’argument choc pour justifier quela France, qui a pourtant ratifié le traitésur le commerce des armes, n’hésite pasà en vendre à des pays comme l’Ara-bie saoudite, accusée de violer les droitshumains au Yémen. « Le risque, c’estque d’autres le fassent à notre place »,expliquait François Hollande. Son quin-quennat a vu les livraisons d’armementsaugmenter de près de 45 %.

« Lesarmes que nous vendons, étrange-ment, servent à faire la guerre », ironisela journaliste, qui s’est aussi intéresséeà l’autre bout de la chaîne : les victimesciviles au Yémen. L’autre grand intérêtde son enquête est de rappeler que cetteomerta est une spécificité bien française.« L’absence de débat en France sur lesujet pose question », concède un députéLaREM. Cedocumentaire peut contribuerà le créer.

[email protected]

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PAYS : France PAGE(S) : 69SURFACE : 40 %PERIODICITE : Hebdomadaire

RUBRIQUE : Télévision sélection déco…DIFFUSION : (163750)JOURNALISTE : Maud Vergnol

18 octobre 2018 - N°630

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TALWEG

-2018

La journaliste Anne Poiret a enquêté sur une industrie florissante aux secrets bien gardés.Les livraisons d’armements ont augmenté de près de 45% sous la présidence Hollande.

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PAYS : France PAGE(S) : 69SURFACE : 40 %PERIODICITE : Hebdomadaire

RUBRIQUE : Télévision sélection déco…DIFFUSION : (163750)JOURNALISTE : Maud Vergnol

18 octobre 2018 - N°630

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De Paris à Bourges,de Mérignac auCaire, en passantpar Cherbourg...enquête sur nosventes d'armes à despays comme l'Egypteou l'Arabie Saoudite.

£B 20.55 France 5 Documentaire

Mon pays fabrique des armesI Documentaire d'Anne Poiret (France, 2018) 170 mn. Inédit.

C'est un pan peu commenté du bilan d e François Hollande : sous son mandat, la Franceest devenue le troisième exportateur d'armes au monde, derrière les Etats-Unis et la Rus-sie. Au nom de la préservation de l'emploi et de la souveraineté nationale, le nombre decommandes a explosé, sans pour autant provoquer de débat public. L'identité des deuxplus gros clients de la France, l'Egypte autoritaire et répressive du maréchal al-Sissi etl'Arabie Saoudite, accusée de crimes de guerre au Yémen, devrait pourtant interroger...

Cette solide enquête questionne l'intenable posture de la France, qui se voudrait dé-fenseur des droits de l'homme tout en fournissant armes et matériel de surveillance à despays qui les bafouent. Avec beaucoup d e pédagogie, elle rend intelligibles le processus devalidation des licences d'exportation et les manquements du gouvernement à ses engage-ments internationaux. Ce documentaire est aussi le récit teinté d'ironie de l'opacité ex-trême d'une industrie placée sous le sceau bien commode du secret défense. Elle donneà voir, dans une séquence hallucinante, le manque de contrôle des exportations par l'As-semblée, et, par là même, le défaut d'information des citoyens. Malgré Pomerta, les mul-tiples fins de non-recevoir qui ont entravé son enquête, Anne Poiret réussit un tour d'ho-rizon foisonnant de la question, grâce, notamment, à quelques témoignages anonymesde sources qui, au Quai d'Orsay ou dans l'industrie, ont accepté d e commenter le systèmede l'intérieur. Son film dérangeant sonne comme u n appel urgent à la prise de conscienced'une atteinte majeure au pouvoir démocratique. - Marie-Hélène SoenenSuivi d'un débat animé par Marina Carrère d'Encausse. Avec Jean-Pierre Maulny, directeur adjointde l'Iris et responsable des questions liées à l'industrie d'armement et aux ventes d'armes,-

Anthony Bellanger, journaliste et chroniqueur éditorialiste international à France Inter;Jean Guisnel, journaliste spécialiste des questions d'armement pour le magazineLe Point, et un quatrième invité non communiqué.

LIRE page 84.

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PAYS : France PAGE(S) : 117SURFACE : 50 %PERIODICITE : Hebdomadaire

DIFFUSION : 594049JOURNALISTE : Marie-Hélène Soenen

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LA FRANCE, CE MARCHANDDARMES TRÈS DISCRETLepays est devenu le troisième exportateur mondial d'armement. Une richeenquête sur cette filière où le secret défense prime sur la transparence.

EX3 L'industrie françaiseMon pays d e i ' a rm e men t, cefabrique

des armess o n t c e n t SOlxante-

Mardi 20.55 cinq mille emplois,France 5 quatre mille PME et

6,9 milliards d'eurosde commandes émanant de paysétrangers en 2017.Si le poids écono-mique du secteur est volontiers clai-ronné par le gouvernement, obtenirdes informations sur les exportationsd'armes tricolores est une autre pairede manches. Lors de l'enquête qu'ellea menée pendant neuf mois, dejuin 2017 à début 2018, la journalisteAnne Poiret s'est heurtée à une op-pressante omerta. Son documentaire,Mon pays fabrique desarmes, abondeen moments manifestes de gêne d'in-dustriels et de politiques rechignant àfaire le lien entre armes et guerre etmet en lumière les silences et les invo-cations pavloviennes du secret dé-fense. «Ayant déjà étééconduite par leconstructeur de missiles MBDA lorsd'un précédent film, je me doutais queje n'aurais pas accèsaux usines, com-mente-t-elle. Mais je ne m'attendaispas à un tel degré d'obstruction. »

Pendant le quinquennat Hollande,sousl'impulsion deJean-YvesLe Drian,alors ministre de la Défense, la Frances'esthissée du 5e au 3e rang du classe-ment des plus gros exportateursd'armes au monde. En 2015,Dassaultvend sesvingt-quatre premiers avionsRafale à l'Egypte. Le régime autori-taire du maréchal al-Sissidevient alorsle premier client de l'Hexagone. Cetteannée-là, le montant global des com-mandes passéesà la France est multi-plié par quatre, pour atteindre 17mil-liards d'euros. «Lastratégie est devenueextrêmement offensive,dans un silencecomplet. la cellule deJean-YvesLeDrian consacréeaux expor-tations, a fait le calcul que, sans cesventes à l'étranger, le budget de laDéfenseserait déficitaire. Il fallait doncvendre le Rafale coûte que coûte», ex-plique la réalisatrice. Sans s'embarras-ser des dégâts collatéraux. En Egypte,elle a rencontré des activistes et desvictimes du régime, qui questionnent

sans détour les ventes d'armes et detechnologies françaises à un Etat quiétrangle sa population à coups dedisparitions forcées et de cybersur-veillance. «Nous avons fourni desarmes à l'Egypte sansaucun question-nement à long terme. A quoi cela nousengage-t-il?Nousexportons du matérielde contrôle de la population en disantqu'il s'agit de combattre le terrorisme,mais, sous couvert de lutte antiterro-riste, le régime égyptien cible en faittoute parole d'opposition. »

Autre partenaire embarrassant,l'Arabie Saoudite, à la tête d'une coa-lition en guerre contre les rebelleshouthis au Yémen depuis mars 2015.Selon l'ONU, qui évoque la «pire crisehumanitaire au monde», le bilan duconflit serait de plus de dix millemorts, dont aumoins cinq mille civils.La France n'a pas cesséde livrer des

armes à Riyad et à sesalliés, en dépitde ses engagements internationaux.Le Traité sur le commerce des armesnotamment, qui, entré en vigueur en2014, astreint ses signataires à refuserles ventes si elles peuvent servir àcommettre une violation grave dudroit international humanitaire oudes droits de l'homme.

Ni l'ex-président François Hol-lande, ni l'actuelle ministre de la Dé-fense Florence Parly n'ont accepté derépondre aux questions d'Anne Poi-ret. Mais lorsqu'il arrive à la ministrede s'exprimer sur les autorisationsd'exportation à destination de l'Ara-bie Saoudite, elle évoque une procé-dure «très encadrée», assurant d'une«vigilance particulière» de l'Etat, etbrandit tel un bouclier le contrôle ef-fectué par le Parlement, auquel legouvernement remet chaque annéeun rapport. Le film déconstruit ce dis-cours, en décryptant le fonctionne-ment de la commission interministé-rielle pour l'étude des exportationsde matériel de guerre (CIEEMG), sesfaiblesses et l'extrême opacité des dé-bats qui ont lieu en son sein. Le récitdu cas Donas est révélateur: un

contrat de 3 milliards d'euros d'arme-ment à destination de l'Arabie Saou-dite, validé début 2017 par la CIEEMG,auquel Jean-Marc Ayrault, alors mi-nistre des Affaires étrangères, avaittenté de s'opposer. «Les gens du Quaid'Orsay ont fait bien attention à ce queson désaccord soit documenté, au casoù une enquête serait menée un jour,commente la réalisatrice. Si les débatsne sont pas publics, j'ai pu constaterqu'il y en avait eu en interne. Maismaintenant que Jean-Yves Le Drian,qui fut un gros vendeur d'armeslorsqu'il était à la Défense, est devenuministre des Affaires étrangères, c'estsilence radio. » Les inquiétudes, quantà elles, subsistent. Une source duQuai d'Orsay confie ainsi à Anne Poi-ret qu'existe dans l'appareil d'Etat«une crainte qu'on retrouve des armesfrançaises, ou tout élément de preuvesur le site d'un crime de guerre».

Car, depuis quelques mois, lesexportations françaises commencentà être questionnées. Le 8 février 2018,Envoyé spécial diffuse le reportageYémen : les enfants et la guerre 1, danslequel des enfants yéménites appellentles puissances européennes à stopperles ventes d'armes à l'Arabie Saoudite.Les téléspectateurs sont bouleversés.Le lendemain, Florence Parly, invitéede la matinale de France Inter, estinterrogée par un auditeur sur l'utilisa-tion d'armes tricolores au Yémen.

Plusieurs ONG, dont Amnesty, ten-tent de documenter l'utilisationd'armes françaises dans ce conflit,comme dans la répression de la popu-lation égyptienne. Seize d'entre ellesont appelé, début septembre, Emma-nuel Macron à suspendre les transfertsd'armes à Riyad. L'étau commence à seresserrer sur le pouvoir. En avril, le dé-puté LREM Sébastien Nadot a réclamél'ouverture d'une commission d'en-quête. Six mois plus tard, sa demandeest toujours en suspens... «La guerreau Yémen est un cas d'école. La démar-che de Sébastien Nadot est aussi de créerle débat, estime Anne Poiret, et d'élar-gir la volonté de transparence à la ques-tion de l'armement en général. » Mettre

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PAYS : France PAGE(S) : 84-85SURFACE : 106 %PERIODICITE : Hebdomadaire

DIFFUSION : 594049JOURNALISTE : Marie-Hélène Soenen

17 octobre 2018 - N°3588

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Un hélicoptèrede combat.Les commandesd'armes émanantde pays étrangersrapportent prèsde sept milliardsd'euros à la France.

enfin le sujet sur la table. Ce que tentei d'imposer son documentaire,

t d'une indispensable prise dee collectivee qu'unn débatte collectiv qu'u déba

public fait cruellement défaut,Marie-Hélène SoenenRediffusé ce mercredi 24 octobre20h30 sur LCP-Assemblée nationale.

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PAYS : France PAGE(S) : 84-85SURFACE : 106 %PERIODICITE : Hebdomadaire

DIFFUSION : 594049JOURNALISTE : Marie-Hélène Soenen

17 octobre 2018 - N°3588

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• * * M o n pays fabriquedes armesINEDIT DOCUMENTAIRE.Le Monde en face explore

la fabrication et la vente d'armes françaises.

Pourvoyeur d'emplois, ce commerce participe

à asseoir la souveraineté de la France au plan

international, quitte à traiter avec des pays qui

risquent d'utiliser ces armes contre leur peuple.

Un éclairage documenté bienvenu sur un su-

jet rarement traité dans l'Hexagone. • A.L

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PAYS : France PAGE(S) : 57SURFACE : 11 %PERIODICITE : Hebdomadaire

DIFFUSION : 891929

15 octobre 2018 - N°1703

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Télé CartableV J

sélection pédagogiqueChaque semaine, notre professeure de français Virginie Desnoues @VirginieDesnouesélectionne des programmes pour compléter les cours des collégiens et lycéens.

docs pour icomprendre comment la géo-économiepeut entrer en conflit avec l'éthique

Si les programmes de terminale doivent

faire prendre conscience aux élèves de

la complexité du monde dans lequel

on vit, on ne saurait trop les inviter à croiser,

cette semaine, deux documentaires Le pre-

mier, diffusé sur LCP, parle d'une guerre mécon-

nue, une crise humanitaire ignorée: celle que

subit le Yémen, et dans laquelle l'Arabie Saou-

dite est partie prenante. Ce document rare

témoigne du quotidien traumatisant des

Yéménites à travers le regard de trois enfants :

Ahmed, Rima et Youssef, L'occasion pour eux

de lancer un appel à l'Europe pour mettre

fin à ce conflit qui a tué, à ce jour, près de

5 0 0 0 civils et engendré le déplacement de

3 millions de personnes.

Or, pour mener la guerre, l'Arabie Saoudite a

besoin d'armes et le second documentaire,

diffusé sur France 5, lève le voile sur les para-

doxes d'un monde où les intérêts économi-

ques peuvent avoir raison de considérations

plus humanistes. Car l'Arabie Saoudite est le

deuxième client de ia France en matière d'arme-

ment. Le malaise des différents intervenants

en dit iong sur le télescopage entre les béné-

fices d'un commerce florissant qui crée des

milliers d'emplois dans l'Hexagone et les crimes

que cette guerre génère... loin de nos regards.

Yémen: les enfants et la guerre sur LCP

(dimanche 0.30 et mercredi 20.30).

Mon pays fabrique des armes sur France 5

(mardi 20.55).

rare

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PAYS : France PAGE(S) : 16SURFACE : 65 %PERIODICITE : Hebdomadaire

DIFFUSION : 647638

15 octobre 2018 - N°1485

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CULTURE(S)

Documentaire

Ventesd'armesDans sa dernière enquête, la réalisatrice Anne Poiret metla France face à ses contradictions les plus criantes.

MICHAELPAURON

La poignée de main estvigoureuse, les applau-dissements nourris : larencontre entre le

ministre de la Défense,Jean-Yves Le Drian, et sonhomologue égyptien, sous l'oeilsatisfait du président AbdelFattah al-Sissi, en 2015,s'estconclue par une vente recordd'armement made in France :chasseurs Rafale, frégateFremm, corvettes Gowind etvéhicules blindés parcentaines. « François Hollande,et son gouvernement, plus quetout autre avant lui, a vendudesarmes », affirme AnnePoiret dans l'introduction desonnouveau documentaire,Monpaysfabrique desarmes.Et dequestionner : « À quiest-on prêt à vendre pourpréserver desemplois ? »

Dans cette enquête d'un peuplus d'une heure, la journa-liste, Prix Albert-Londres 2007,a voulu « ouvrir le débat surune industrie taboue, presqueentièrement couverte par lesecret-défense », ainsi qu'ellel'explique & Jeune Afrique.Même si la France fait « assezbien les choses ». En effet,Paris a signé destraités qui,théoriquement, l'empêchentdevendre desarmes aux payssusceptibles d'être accusésdecrimes deguerre. Certes, laCommission interministériellepour l'étude des exportationsde matériels deguerre(CIEEMG), qui réunitnotamment les ministères dela Défense, des Finances et desAffaires étrangères, étudietoutes les demandes des

entreprises françaisessouhaitant démarcher unclient (environ 6 000 par an),et rien ne peut se faire sanssonaval. Mais certaines décisionsposent néanmoins question.

Il y a notamment l'Égypte,connue pour réprimer dans lesangles manifestations, maisaussi et surtout l'ArabieSaoudite, en guerre au Yémenet accusée, justement, decrimes deguerre. « Pendantdes années, la France a vendudes armes àce pays, qui n'étaitpas en guerre. Mais qu'en est-ilaujourd'hui? » s'interroge laréalisatrice. À ce jour, aucunmatériel français n'a étéretrouvé sur les lieux d'uncrime (contrairement à dumatériel américain oubritannique). Mais des armesont bien été identifiées sur leterrain, notamment descanons Caesar, fabriqués àBourges par Nexter Systems.

« Chantage à l'emploi »Selon Romain Mielcarek,auteur deMarchands d'armes :enquêtesur un businessfrançais (Tallandier), l'indus-trie de l'armement en Francefait vivre 160 000 personnes.

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MON PAVSFABRIQUEDESARMES

Mon paysfabrique desarmes, d'AnnePoiret,le 23 octobre,sur France 5,à 20 h 55

La journaliste

tente de lever levoile sur une

industrie taboue.

Les enjeux sont donccolossaux, et un véritable« chantage à l'emploi » s'opère,poursuit Anne Poiret, commele montrent certainesséquences tournées dans lesterritoires (Bourges,Bordeaux...) où cette industrieest de loin le premieremployeur. La questionéthique est gênante, pour lesemployés comme pour lesélus. « On fait des avions, c'estde l'aéronautique. Après,l'utilisation future, ce n'est pasnotre partie »,se justifie unsalarié de Dassault Aviationdevant un Rafale enassemblage.

Pour tourner, les obstaclesont été nombreux. « On nepeut quasiment prendreaucune image des usines. Etles politiques n'assumentpas », raconte-t-elle. FrançoisHollande, désormais loin del'Élysée, arefusé d'accorder unentretien. Tout commel'exécutif actuel, qui n'a passouhaité s'exprimer. « Il n'y aqu'un scandale qui fera réagirles politiques », témoigne unesource au Quai d'Orsay. Ilarrivera peut-être le16octobre, avec la publicationd'un rapport d'AmnestyInternational sur les transfertsdevéhicules militairesfrançais vers l'Égypte... 113

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PAYS : France PAGE(S) : 87SURFACE : 94 %PERIODICITE : Hebdomadaire

DIFFUSION : 14355JOURNALISTE : Michaelpauron

14 octobre 2018 - N°3014

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Page 11: La France, ce si discret marchand d’armes · et 6,9 milliards d’euros de commandes émanant de pays étrangers en 2017. Si le poids économique du secteur est volontiers claironné

LEVERUNVOILE

Mon pays fabrique des armes ** wFSâNCE5 à 20h50 DOC. La France est le troi-sième exportateur mondial d'armement.

Pourtant, le grand public sait peu de chosesde ce fleuron industriel français, de ces

usines, de ces salariés, des régions produc-trices d'armes et des grandes instances del'Etat chargées de les vendre...

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PAYS : France PAGE(S) : 50SURFACE : 5 %PERIODICITE : Hebdomadaire

DIFFUSION : 230684

20 octobre 2018 - N°411

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Où finissent les armes fabriquées en France ?« Mon pays fabrique des armes », mardi 23 octobre à 20 h 55 sur France5.La France a été, l’andernier, le troisième exportateur d’armes au monde (avec une hausse des ventes de 27 % entre2013 et 2017 par rapport à 2008-2012, selon l’Institut international de recherche pour la paix deStockholm, NDLR ). Partant de ce constat, la journaliste Anne Poiret enquête sur ce commerce.Elle visite quelques usines françaises et questionne avec une naïveté feinte les acteurs de la filière.Elle met en évidence la contradiction dans laquelle nous sommes pris, collectivement. Si noustenons à conserver notre souveraineté, il est nécessaire pour la France d’avoir la capacité àconcevoir et produire ses armements. Mais cela n’est possible qu’en exportant, car le marchénational ne suffit pas à financer les investissements nécessaires pour concevoir des matériels deplus en plus sophistiqués. Aussi, beaucoup préfèrent ne pas trop savoir où finissent nos armes.Àlire aussiDans une deuxième partie, Anne Poiret nous le dit. Certaines sont vendues à l’Arabiesaoudite, un pays qui fait la guerre, actuellement, aux milices houthistes du Yémen voisin. Malgréses recherches, la journaliste ne parvient pas à savoir si des armes françaises servent dans ceconflit. Mais elle souligne l’opacité qui entoure ces marchés. Et elle pointe un risque. La Frances’est associée au Traité sur le commerce des armes, en vigueur depuis 2014, adopté parl’Organisation des Nations unies. Il interdit de vendre à des clients qui pourraient utiliser cesarmes pour attenter aux droits de l’homme.Potentiellement, la responsabilité de la France pourraitdonc être engagée devant la justice internationale si des armes françaises étaient utilisées pour descrimes de guerre, et cette perspective donne quelques sueurs froides au Quai d’Orsay, révèle lajournaliste.À lire aussi

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23 octobre 2018 - 04:26 > Version en ligne

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«Mon pays fabrique des armes» et ce n'estpas anodin

Le film commence comme un road trip. Une balade à travers ces régions aux spécialités bienfrançaises : les Rafale à Mérignac, près de Bordeaux ; les missiles de MBDA dans le Cher. Cesrégions échappent à la morosité industrielle ambiante, et pour cause. Ces dernières années, laFrance est devenue le troisième exportateur d’armes dans le monde. C’est à cette «performance»,peu discutée dans le débat public, que la journaliste Anne Poiret consacre un documentaire,diffusé mardi soir sur France5.Quête d’une autonomie stratégiqueSe hisser sur la troisième marche de ce podium n’est pas anodin. Il y a d’abord les implicationslocales, qu’illustre ce maire d’une petite commune du Cher, où le premier employeur s’appelleNexter et produit des munitions. Devant la caméra, l’édile refuse de dire ce qu’il pense des ventesd’armes à des dictatures. Puis se lance dans une comparaison si audacieuse qu’il éclate de rireavant la fin de son exposé. Les armes seraient des sortes de vaccins : comme on s’inocule unemaladie pour la combattre, on achèterait (et donc vendrait) des armes pour prévenir la guerre…A lire aussi Europe de la défense : la nouvelle ligne allemande inquiète la FranceCes exportations interrogent aussi le contrôle qui les entoure. Tout est secret, constate ledocumentaire. Le parlement reçoit certes un rapport, mais il n’est que parcellaire. Et tous lesparlementaires ne le consultent pas avec la même assiduité. Dans une séquence surréaliste,Jean-Charles Larsonneur, député LREM membre de la commission de la défense, avoue à lajournaliste qu’il le regarde «pour la première fois» et se trouve bien en peine de dire ce qui estvendu à l’Arabie Saoudite, gros client de la France. Hors caméra, mais toujours équipé d’unmicro, le même élu résume parfaitement le piège dans laquelle Paris s’est enfermé : «Si on n’aplus d’exportations, on n’a plus d’industrie de la défense, donc on perd notre souveraineté entermes d’outil militaire.»A lire aussi Quand la France vend des armes qui répriment les civilsLa quête de cette autonomie stratégique justifie donc de vendre à des Etats qui ne sont pas desdémocraties (par exemple l’Egypte), voire qui sont soupçonnés de crimes de guerre (commel’Arabie Saoudite au Yémen). La position française, répétée en boucle par la ministre desArmées, Florence Parly, reste constante : les ventes d’armes sont «extrêmement encadrées», «font

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l’objet d’une évaluation précise qui prend en compte […] la nature des matériels exportés, lerespect des droits de l’homme, la préservation de la paix et de la stabilité régionale». Cette ligne,qui n’était pas celle d’Emmanuel Macron au début de sa campagne, divise au sein même del’appareil d’Etat, comme le rappelle le film au terme de son exposé sans révélation mais exhaustifdes enjeux entourant ce «vice business».A lire aussi Macron, lui aussi, vend des canons au QatarMon pays fabrique des armes, un film d’Anne Poiret diffusé mardi à 20h50 sur France5.Pierre Alonso

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23 octobre 2018 - 04:15 > Version en ligne

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Des ventes d'armes, secrètes etdérangeantes

<p>Yves-Marie ROBIN.</p>Ce soir à la télé. Avions, blindés,missiles... Le savoir-faire de laFrance est reconnu dans le monde.Mais ses clients ne sont pas toujoursrecommandables.Attention, secret défense ! La Franceest, aujourd'hui, le troisièmeexportateur mondial d'armements.Pour les fabriquer, elle compte unedizaine de grands groupesspécialisés et plus de 4 000 PMEemployant 165 000 salariés.Cette industrie est florissante - aumême titre que le luxe et lagastronomie - mais elle estéminemment secrète. Elle se situe «dans l'angle mort du débat public» , explique Anne Poiret, auteur dureportageMon pays fabrique desarmes . Rien ne filtre ou presque.Dans ce road movie passionnant - deMérignac à Bourges, de Cherbourg àParis, du Caire à Genève - laréalisatrice lève le voile sur cesexportations massives, vers des payspas toujours recommandables.Notamment l'Arabie saoudite àl'origine de crimes de guerre auYémen, et encore l'Égypte accuséede répressions contre les adversairesdu maréchal Sissi.L'arrivée d'Emmanuel Macron àl'Élysée voilà dix-huit mois n'a rien

changé. L'omerta perdure sur toutesces ventes d'armes et leursdestinataires. Pourtant, le Quaid'Orsay ne cache pas sa crainte devoir, un jour, diffusées des photosd'armes françaises sur des scènes deguerre. Notamment au Yémen...

France 5 , 20 h 50.

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PAYS : France PAGE(S) : 0000SURFACE : 12 %PERIODICITE : Quotidien

RUBRIQUE : TélévisionDIFFUSION : 733078JOURNALISTE : <P>Yves-Marie R…

23 octobre 2018

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Mon pays fabrique des armes, undocumentaire diffusé ce soir sur France5

Un film sur l'armement tourné àBourgesFrance 5 diffuse ce soir, à 20 h 55,un documentaire inédit titré Monpays fabrique des armes, réalisé parAnne Poiret. Il a été tourné de Parisà Bourges, où l'industrie d'armementest très présente, de Mérignac auCaire, de Genève à Cherbourg.Il part du constat que la France est letroisième exportateur d'armement,derrière les États-Unis et la Russie,que le commerce en ce domaine estflorissant, notamment auMoyen-Orient, Arabie Saoudite etÉgypte.« Il m'est apparu que ce sujet est unpeu un angle mort du débat,souligne Anne Poiret, réalisatrice.On en parle beaucoup plus auYémen qu'en France, par exemple.Et je me suis rendu compte que j'enignorais beaucoup de choses et lasociété aussi. »Anne Poiret est journaliste etréalisatrice de documentaires. Sonfilm, Muttur : un crime contrel'humanitaire, lui a valu le prixAlbert-Londres 2007. Elle a sonactif, entre autres, Libye :l'impossible État-nation (2015) etSyrie, mission impossible (2017).Son intérêt pour le secteur etl'industrie d'armement, précise-t-elle,remonte à plus de dix ans etquelques projets de documentairesqu'elle n'a pas pu réaliser dans lepassé.Sa rencontre avec le producteur

Vincent Gazaigne, il y a cinq ans, a,semble-t-il, été décisive.Vincent Gazaigne a grandi àBourges où il a fait ses années decollège et de lycée. Il a, précisait-ilvendredi, le souvenir précis que« tout le monde, à Bourges, sait quel'industrie de défense estextrêmement importante mais on enparle peu. Quand Anne m'a parlé dece projet, le Rafale se vendait enfinà l'export et François Hollandevenait à Bourges à la fin de sonquinquennat Pour toutes ces raisons,c'était intéressant. »On ajoutera que l'affaire dujournaliste saoudien JamalKhashoggi, probablement tué enTurquie, et ses répercussions sur le« Davos du désert », mettentl'Arabie Saoudite sur le devant de lascène et ce documentaire au coeurde l'actualité. « C'est vrai, reconnaîtVincent Gazaigne, l'actualité nousrattrape ».Le producteur, dont le rôle estd'aider à la réalisation de cedocument qui a dépassé les 250. 000? de budget, a égalementaccompagné la réalisatrice danscertains de ses déplacements etrencontres, touchant dans certainscas de près à « ce grand écart quiexiste entre l'importance del'exportation et les grands discourssur les Droits de l'homme ». « Nousavons demandé des interviews à toutle monde pour avoir un panoramacomplet sur cette industrie. Nous

avons vraiment eu le souhait dedonner la parole à tout le monde. »Le résultat, c'est une trentaine dejours de tournage, une centained'heures enregistrées que les 70minutes présentées synthétisent. Leproducteur annonce que deshabitants du Cher sont présents dansle résultat final, à commencer parPierre-Étienne Goffinet, maired'Avord.« L'intérêt de la rencontre avec ceuxqui travaillent dans l'industried'armement, poursuit Anne Poiret,était de savoir que, certes, ilstravaillent pour la France, maiscomment le vivent-ils quand il s'agitd'export ? Et puis, essayer decomprendre toute la structure del'appareil. »« Les industriels soulignent qu'ilspréservent l'emploi, les bureauxd'étude, etc, pour que la France restesouveraine, poursuit la réalisatrice. Ils'agit d'essayer de créer un débat surces questions-là. Ce n'est pas à moide trancher, mais sommes-nousd'accord avec ça ? »Bertrand Philippe bertrand.philippe@centrefrance. com ■

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PAYS : France PAGE(S) : 5SURFACE : 20 %PERIODICITE : Quotidien

RUBRIQUE : BerryDIFFUSION : 32941

23 octobre 2018 - Edition Bourges

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Affaire Khashoggi: AngelaMerkelmetsescanonsdanslabalanceDepuis dimanche,l'Aflemagnemenacedecesserles exportationsd'armesversl'Arabie Saoudite,si Riyad neclarifie pas lescirconstancesde la mortdu journaliste.ParJOHANNA LUYSSENCorrespondanteàBerlin

Tant que l'affaire Khas-hoggi n'est pas éclair-cie,Berlin songeàsus-

pendre sesventes d'armes àl'Arabie Saoudite. «Je suisd'accord avectousceuxqui di-sentque lesexportations d'ar-mesnepeuventpas intervenirdansla situation où nous noustrouvons, mêmesi cesventessont d'ampleur limitée», aavertiAngela Merkel au siègede la CDU, dimanche soir.Cette déclaration intervientpeu detemps aprèsun com-

muniqué conjoint de Paris,Londres et Berlin estimantqu'il y a«un besoin urgent declarification» sur les circons-tancesde la mort «inaccepta-ble» de ce journaliste saou-dien au consulat de sonpaysen Turquie.

Sanctions. Le matinmême, dans les colonnesde la Welt am Sonntag, leprésident de la commissiondes affaires étrangères duBundestag, Norbert Rôtt-gen (CDU),affirmait, de ma-nière un peu plus musclée,que si Riyad ne prenait pasde mesures «à très courtterme», l'Allemagne mettraitfin à ses ventes d'armesàl'Arabie Saoudite-y compriscellesdéjà scellées.Ajoutantquele gouvernement fédéralpourrait égalementenvisager,en concertation avecl'UE etl'Otan, de nouvellessanctionscontre Riyad, telles que l'ex-pulsion de diplomates.Lundi matin, le ministrefédéral de l'Economie et del'Energie, Peter Altmaier

(CDU), renchérissait: «Nousn'allons pas approuverdavantaged'exportations d'ar-mespour le moment car noussouhaitons savoir ce qui s'est,passé,»Ajoutant, à l'attentionde ses homologues euro-péens: «Pour moi, il est trèsimportant deparvenir à uneposition commune au sein del'UE. Ce n'est que si les payseuropéensse mettentd'accordque nous pourrons avoir unimpact sur legouvernementàRiyad. Il n'y a aucun effetpositif si nous restons les seulsà arrêter les exportations.»L'Allemagnea autorisé, entrejanvier et fin septembre,416,4millions d'eurosd'expor-tations d'armes vers l'ArabieSaoudite. Cependant, Berlinest loin d'être le plus impor-tant vendeur de matériel deguerre à destination duroyaume. Selonles donnéesrecueillies à Stockholm parl'Institut de recherche indé-pendant consacréau contrôledes armes, Riyad a importéenviron 2 % de sesarmes de-puis l'Allemagne entre 2013

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PAYS : France PAGE(S) : 8SURFACE : 60 %PERIODICITE : Quotidien

DIFFUSION : 101616JOURNALISTE : Johanna Luyssen

23 octobre 2018 - N°11633

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et 2017.Sesplus gros pour-voyeurs sont les Etats-Unis (61%) et le Royaume-Uni (23%).Loin derrière maisen troisième position, laFrance,avecenviron 4%. Leseffets de cette annonce surles importations devraientdonc être assezlimités.

Equilibriste. Restequelesujet suscitede nombreusesréactions politiques outre-Rhin. Celafait desmois quelacoalition gouvernementalesouhaite mettre fin à cetypedecommerce. D'autant qu'ilfait l'objet de tensions tou-

jours plus grandes entreconservateurs et sociaux-dé-mocrates. En effet, depuismars, date dela constitutiondu nouveaugouvernement,lemontant des exportationsd'armesversl'Arabie Saoudites'élèveà254 millions d'euros.Or on peut lire dans l'accordde coalition signé au prin-temps,dansle chapitreconsa-cré aux ventes d'armes: «Dé-sonnais,nousn'approuveronsplus les exportations vers lespays impliquésdansla guerreau Yémen.»C'est le cas del'Arabie Saoudite.Ainsi, lors-quele Spiegel révélait en sep-

tembre quele gouvernementavait autorisé l'exportationd'armes à plusieurs pays im-pliqués dans laguerre auYé-men, l'opposition, desVertsàDie Linke, s'est indignée.Commesouventdepuisla for-mation decettecoalition gou-vernementale, leSPDs'estre-trouvé dans une positiond'équilibriste, tiraillé entreune basequi désapprouvecescontrats, etle désir depréser-ver les intérêts économiquesdu pays. Cestensions pour-raient donc enfin s'apaiser.Autre sujet d'âpres discus-sions depuis le début del'af-faire Khashoggi,lavenuepro-gramméedu PDGdeSiemens,Joe Kaeser,àun sommet surles investissements, estam-pillé «Davosdu désert»,orga-nisé cette semaineen ArabieSaoudite.Cesderniers jours,la classepolitique dans sonensemble,delacheffe duSPD,Andréa Nahles,au CDU Nor-bert Rôttgen,lui a déconseilléde s'y rendre. Finalement,lundi, le patron a annoncéboycotter l'événement.

LA FRANCESUR LE PODIUMLe docu Mon pays fabrique des armes, diffusémardi soir sur France 5, commence comme unroad-trip. Une balade àtravers ces régions auxspécialités bien françaises : les Rafale à Mérignac,près de Bordeaux ; les missiles dans le Cher.Ces dernières années, la France est devenuela troisième exportatrice d'armes dans le monde,Riyad étant son plus gros client. C'est à cette«performance» que la journaliste Anne Poiretconsacre son film. P.A1.

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PAYS : France PAGE(S) : 8SURFACE : 60 %PERIODICITE : Quotidien

DIFFUSION : 101616JOURNALISTE : Johanna Luyssen

23 octobre 2018 - N°11633

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PAYS : France PAGE(S) : 8SURFACE : 60 %PERIODICITE : Quotidien

DIFFUSION : 101616JOURNALISTE : Johanna Luyssen

23 octobre 2018 - N°11633

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QQRQU'EST-CE QU'ON REGARDE ?

L E H 5 3 E E H H T

Armes àdouble tranchant

Ooooo

2 0 : 5 0 C'est une enquête journa-

listique impossible, entre1 FRANCE5

dossiers classés secret-défense, re-fus systématiques d'interview et

épaisses palissades barbelées devant

les entreprises du secteur. L'arme-ment français brille dans ce docu-

mentaire édifiant par sa puissanteomerta. D'abord par réalisme écono-

mique, car ce secteur en plein essor

emploie 165 000 salariés. Grâce aux

mastodontes tricolores comme Das-sault Aviation, Thaïes, Safran ou,

moins connus, MBDA, plus grand ven-deur de missiles d'Europe, ou Nexter,

la France se classe au troisième rangdes principaux exportateurs mon-

diaux. Mais aussi par refus d'aborder

un débat moral : l'Arabie Saoudite mè-ne-t-elle la guerre au Yémen, en plein

désastre humanitaire, avec des fréga-

tes et des avions d'origine française ?Sourires gênés et malaises quand ce

documentaire s'interroge sur « cespays pas très recommandables », se-

lon les propres mots d'un députéLREM, avec qui la France fait affaire...

« Il n'y a qu'un scandale qui fera réagir

les politiques », pronostique un spé-

cialiste. BENOlr DARAGON

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PAYS : France PAGE(S) : 32SURFACE : 23 %PERIODICITE : Quotidien

DIFFUSION : 250095

23 octobre 2018 - N°23059

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Culture & SavoirsTÉLÉVISION

Marchandd’armes, un

métier juteuxLe documentaire pointe

une industrie florissante couvertepar le secret défense.

LE MONDE EN FACE.MON PAYS FABRIQUE DES ARMESDocumentaire, France 5, 20 h 50

En quelques années, la France s’esthissée au 3e rang mondial des paysexportateurs d’armement. Plus de

165000 salariés sont recensés dans ce sec-teur, composé d’une dizaine de grandsgroupes et de plus de 4000 PME. Un mondeassez fermé, secret, sur lequel s’est penchéela journaliste Anne Poiret, lauréate en 2007du prix Albert-Londres pour son film Mut-tur, un crime contre l’humanitaire, qui re-traçait l’assassinat, le 4 août 2006, de17militants de l’ONG Action contre la faimau Sri Lanka.Ici, c’est le secret défense qui dissimule

ce lourd dossier qui vient rarement dansle débat public. Et pourtant, comme ledéclarait lui-même le président FrançoisHollande devant les caméras, les contratssignés par la France « ces dernières annéesn’ont jamais été aussi élevés » . Des armesqui pour la plus grosse part prennent lechemin du Moyen-Orient. « C’est une in-dustrie qui n’a pas besoin que les médiasparlent d’elle », lâche un des témoins ren-contrés, une industrie qui en quelque sortese cache, comme le groupe MBDA, qui, surplus de 200 hectares, à La Chapelle-Saint-Ursin dans le département du Cher, aconstruit dans un bois ses bâtiments oùsont fabriqués tous types de missiles.

Seul un représentant du syndicat CGT del’entreprise se montre disert : « Quand j’aiété embauché, je savais que l’on fabriquaitdesavions, un peu moins desmissiles. Parfoisj’y pense,quand je voisdescombats enAfgha-nistan ou ailleurs, avec desbombes qui tom-bent sur des populations civiles. D’unecertaine façon j’y participe. Jevis avec ça. »En revanche, ni François Hollande ni aucunde ses ministres « et surtout pas Jean-YvesLe Drian, son ministre de la Défense, neveulent aujourd’hui commenter », souligneAnne Poiret. Restent des images d’archives,comme au Salon de l’armement, qui setienttous les deux ans au Bourget, près de Paris,où des industriels n’aiment pas beaucoups’exprimer, ni être filmés. On ne sauraitêtre plus clair pour confirmer que les mar-chands d’armes préfèrent l’ombre à la lu-mière. La France a notamment ratifié letraité sur le commerce desarmes, qui interditd’en vendre à des pays susceptibles de s’enservir pour commettre de graves atteintesaux droits humains. Mais dans la réalité,qu’en est-il aujourd’hui ? « L’Élyséenes’ex-prime toujours pas. »

GÉRALD ROSSI

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PAYS : France PAGE(S) : 20SURFACE : 22 %PERIODICITE : Quotidien

RUBRIQUE : Culture et savoirsDIFFUSION : 40562JOURNALISTE : Gérald Rossi

23 octobre 2018 - N°22540

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Télé-radiole choix de La Croix

Où finissent les armes fabriquées en France ?Mon paysfabrique des armesÀ 20 h 55 sur France 5

La France a été, l’an dernier,le troisième exportateur d’armesau monde (avec une hausse desventes de 27 % entre 2013 et 2017par rapport à 2008-2012, se-lon l’Institut international derecherche pour la paix de Stoc-kholm , NDLR ). Partant de ceconstat, la journaliste Anne Poi-ret enquête sur ce commerce. Ellevisite quelques usines françaiseset questionne avec une naïvetéfeinte les acteurs de la filière. Ellemet en évidence la contradictiondans laquelle nous sommes pris,collectivement. Si nous tenons

à conserver notre souveraineté,il est nécessaire pour la Franced’avoir la capacité à concevoiret produire ses armements. Maiscela n’est possible qu’en expor-tant, car le marché national nesuffit pas à financer les investis-sements nécessaires pour conce-voir des matériels de plus en plussophistiqués. Aussi, beaucouppréfèrent ne pas trop savoir où fi-nissent nos armes.

Dans une deuxième partie,Anne Poiret nous le dit. Certainessont vendues à l’Arabie saou-dite, un pays qui fait la guerre,actuellement, aux milices hou-thistes du Yémen voisin. Mal-gré ses recherches, la journalistene parvient pas à savoir si desarmes françaises servent dans

ce conflit. Mais elle soulignel’opacité qui entoure ces mar-chés. Et elle pointe un risque. LaFrance s’est associée au Traitésur le commerce des armes, envigueur depuis 2014, adoptépar l’Organisation des Nationsunies. Il interdit de vendre à desclients qui pourraient utiliser cesarmes pour attenter aux droits del’homme.

Potentiellement, la responsa-bilité de la France pourrait doncêtre engagée devant la justice in-ternationale si des armes fran-çaises étaient utilisées pour descrimes de guerre, et cette pers-pective donne quelques sueursfroides au Quai d’Orsay, révèle lajournaliste.Alain Guillemoles

Une enquête de la journaliste Anne Poiret. Talweg-2018

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PAYS : France PAGE(S) : 16SURFACE : 27 %PERIODICITE : Quotidien

RUBRIQUE : Télé-radioDIFFUSION : 94673JOURNALISTE : Alain Guillemoles

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Page 23: La France, ce si discret marchand d’armes · et 6,9 milliards d’euros de commandes émanant de pays étrangers en 2017. Si le poids économique du secteur est volontiers claironné

télévisionUne «équipe France»si bien arméeLedocumentaire de la journaliste AnnePoiret s’interroge sur lesventes d’armes,«un angle mort du débat public »

FRANCE 5MARDI23 - 20H 55

DOCUMENTAIRE

Avions, blindés, missi-les… La France venddes armes, beaucoup,et depuis longtemps.

Dans ce pays qui fait aussi laguerre sansdiscontinuer ou pres-que depuis plusieurs décennies,le fait ne semble pas émouvoirautant que dans d’autres démo-craties. Est-ce le rôle de la Franced’exporter des armes dans lemonde entier, particulièrementau Moyen-Orient aujourd’hui àfeu et à sang ? « Oui, c’est notrerôle », tranchait François Hol-lande enavril 2017dans l’usine dumissilier MBDA, car sans cela «lerisque c’est que d’autres le fassentà notre place». Un « Circulez, rienà voir !» que le documentaire de lajournaliste Anne Poiret tente debousculer. Car, si la première af-firmation du film sediscute assu-rément –«Nous nesavons rien » –,la deuxième est une vérité surlaquelle il vaut de s’interroger : lesujet des ventes d’armes forme« un angle mort du débat public ».

Avec 17 milliards d’euros deprises de commandes en 2016,montant record historique, laprésidence de François Hollandea plus que toutes les autresvendu canons et munitions,rappelle le film. L’exécutif a agiau nom de la défense de la sou-veraineté nationale, en déclarantvouloir préserver des indus-tries de haute technologie etleurs précieux emplois – quelque170000 dans la filière.

Et pourtant aucun des respon-sables de l’époque n’a assumécette politique devant la camérad’Anne Poiret : ni le chef de l’Etatqui a scellé le contrat historiquedu Rafale et des frégates avec ledictateur égyptien Sissi en lui ac-cordant d’importantes garanties ;ni son ministre de la défense,Jean-Yves Le Drian, présenté parl’exécutif comme le chef perfor-mant de « l’équipe France», qui aengrangé desventes depuis l’Indejusqu’au Qatar ; ni le secrétaire gé-néral pour la défense et la sécuriténationale Louis Gautier, qui cha-peaute sous l’autorité de Mati-gnon les autorisations d’exporta-tion. Les parlementaires ne sont

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PAYS : France PAGE(S) : 20SURFACE : 34 %PERIODICITE : Quotidien

RUBRIQUE : TélévisionDIFFUSION : 275310JOURNALISTE : Nathalie Guibert

23 octobre 2018 - N°22948

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pas plus prolixes. Ni les indus-triels. Se heurtant partout ausecret-défense, le documentaireeffectue un périple à la porte desusines et des salons de l’arme-ment, où nul ne souhaite vanterla qualité de sesproduits.

Interpellation moraleDans les démocraties occidenta-les, la guerre au Yémen a depuis2015 relancé une forte interpella-tion morale : peut-on continuerde fournir en matériels militairesdes protagonistes, Arabie saou-dite en tête, accusés de commet-tre des crimes de guerre enversles populations civiles ? Sous lapression de députés européens,

d’ONG ou de leur opposition,les gouvernements d’Espagne, deSuèdeou des Pays-Basont récem-ment décidé de stopper desventes à Riyad. L’Allemagne, laFrance, le Royaume-Uni conti-nuent de fournir leur client sul-fureux en assurant redoublerde précautions. Le problèmeest que, pour être bien réelles,ces règles demeurent opaques.Et qu’elles ne sauraient évitertout emploi d’armes contraire audroit de la guerre.

En 2016, un débat a opposé leministère français des affairesétrangères àcelui de la défense ausujet de la coalition au Yémen.Il n’a pas dépassé les premiers

cercles de l’Etat. Faut-il attendreun scandale pour qu’évolue la po-sition française, s’interroge lefilm ? Un détour par l’attentat deKarachi – onze salariés français deDCN tués en 2002, une affaire enlien avec des commissions ver-sées lors de la vente de sous-ma-rins au Pakistan – permet de rap-peler que vendre des armes ne vajamais sans risques. Le film necomporte pas de révélations,mais il a le mérite de donner auxcitoyens les clés du débat. p

nathalie guibert

Mon pays fabrique desarmes,d’Anne Poiret (France, 2018,70 min).

Au salon professionnel Milipol, à Villepinte (Seine-Saint-Denis), en 2017. CHRISTOPHEARCHAMBAULT/AFP

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RUBRIQUE : TélévisionDIFFUSION : 275310JOURNALISTE : Nathalie Guibert

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