la décision d’hospitalisation sans consentement aux urgences : approche dimensionnelle ou...

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Pour citer cet article : Braitman A, et al. La décision d’hospitalisation sans consentement aux urgences : approche dimensionnelle ou catégorielle ? Encéphale (2013), http://dx.doi.org/10.1016/j.encep.2013.03.009 ARTICLE IN PRESS Modele + ENCEP-609; No. of Pages 8 L’Encéphale (2013) xxx, xxx—xxx Disponible en ligne sur www.sciencedirect.com journal homepage: www.em-consulte.com/produit/ENCEP PSYCHIATRIE LÉGALE La décision d’hospitalisation sans consentement aux urgences : approche dimensionnelle ou catégorielle ? Decision of emergency involuntary hospitalization: Categorical or dimensional approach? A. Braitman a , V. Dauriac-Le Masson b , F. Beghelli c,d , E. Gallois a , E. Guillibert e , C. Hoang f,g , A. Kahvedjian h , P. Lana a , M.-J. Guedj a,a Centre psychiatrique d’orientation et d’accueil (CPOA), centre hospitalier Sainte-Anne, 1, rue Cabanis, 75014 Paris, France b Département d’information médicale (DIM), centre hospitalier Sainte-Anne, 1, rue Cabanis, 75014 Paris, France c Secteur 75G13, centre hospitalier Sainte-Anne, 1, rue Cabanis, 75014 Paris, France d Service d’accueil des urgences, groupe hospitalier Paris—Saint-Joseph, 185, rue Raymond-Losserand, 75014 Paris, France e Service de psychologie clinique et psychiatrie de liaison, hôpital européen Georges-Pompidou, 20, rue Leblanc, 75908 Paris cedex 15, France f Secteur 75G18, centre hospitalier Sainte-Anne, 1, rue Cabanis, 75014 Paris, France g Service d’accueil des urgences, hôpital Ambroise-Paré, 9, avenue Charles-de-Gaulle, 92100 Boulogne-Billancourt, France h Service de psychiatrie, groupe hospitalier Broca-Cochin—Hôtel-Dieu, 27, rue du Faubourg-Saint-Jacques, 75679 Paris cedex 1, France Rec ¸u le 7 aoˆ ut 2012 ; accepté le 21 mars 2013 MOTS CLÉS Urgences psychiatriques ; Hospitalisation sans consentement ; Résumé Comme le signalait déjà la Haute Autorité de santé en 2005, la réalisation d’études en France sur les modalités de décision de l’hospitalisation sans consentement fait toujours défaut. Dans cette optique, nous présentons les résultats d’une enquête multicentrique transversale de conception naturalistique, portant sur 442 patients dont l’objectif est d’explorer aux urgences les critères de prise de décision de l’hospitalisation sans le consentement. Parmi les facteurs cliniques et sociodémographiques étudiés, le diagnostic catégoriel ne semble pas intervenir Auteur correspondant. Adresse e-mail : [email protected] (M.-J. Guedj). 0013-7006/$ see front matter © L’Encéphale, Paris, 2013. http://dx.doi.org/10.1016/j.encep.2013.03.009

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ARTICLE IN PRESSModele +ENCEP-609; No. of Pages 8

L’Encéphale (2013) xxx, xxx—xxx

Disponible en ligne sur www.sciencedirect.com

journal homepage: www.em-consul te .com/produi t /ENCEP

PSYCHIATRIE LÉGALE

La décision d’hospitalisation sansconsentement aux urgences : approchedimensionnelle ou catégorielle ?Decision of emergency involuntary hospitalization:Categorical or dimensional approach?

A. Braitmana, V. Dauriac-Le Massonb, F. Beghelli c,d, E. Galloisa,E. Guilliberte, C. Hoangf,g, A. Kahvedjianh, P. Lanaa,M.-J. Guedja,∗

a Centre psychiatrique d’orientation et d’accueil (CPOA), centre hospitalier Sainte-Anne, 1, rue Cabanis,75014 Paris, Franceb Département d’information médicale (DIM), centre hospitalier Sainte-Anne, 1, rue Cabanis, 75014 Paris,Francec Secteur 75G13, centre hospitalier Sainte-Anne, 1, rue Cabanis, 75014 Paris, Franced Service d’accueil des urgences, groupe hospitalier Paris—Saint-Joseph, 185, rue Raymond-Losserand,75014 Paris, Francee Service de psychologie clinique et psychiatrie de liaison, hôpital européen Georges-Pompidou, 20, rueLeblanc, 75908 Paris cedex 15, Francef Secteur 75G18, centre hospitalier Sainte-Anne, 1, rue Cabanis, 75014 Paris, Franceg Service d’accueil des urgences, hôpital Ambroise-Paré, 9, avenue Charles-de-Gaulle, 92100Boulogne-Billancourt, Franceh Service de psychiatrie, groupe hospitalier Broca-Cochin—Hôtel-Dieu, 27, rue du Faubourg-Saint-Jacques,75679 Paris cedex 1, France

Recu le 7 aout 2012 ; accepté le 21 mars 2013

MOTS CLÉS Résumé Comme le signalait déjà la Haute Autorité de santé en 2005, la réalisation d’études enFrance sur les modalités de décision de l’hospitalisation sans consentement fait toujours défaut.

Pour citer cet article : Braitman A, et al. La décision d’hospitalisation sans consentement aux urgences : approchedimensionnelle ou catégorielle ? Encéphale (2013), http://dx.doi.org/10.1016/j.encep.2013.03.009

Urgencespsychiatriques ;Hospitalisation sansconsentement ;

Dans cette optique, nous présentons les résultats d’une enquête multicentrique transversale deconception naturalistique, portant sur 442 patients dont l’objectif est d’explorer aux urgencesles critères de prise de décision de l’hospitalisation sans le consentement. Parmi les facteurscliniques et sociodémographiques étudiés, le diagnostic catégoriel ne semble pas intervenir

∗ Auteur correspondant.Adresse e-mail : [email protected] (M.-J. Guedj).

0013-7006/$ — see front matter © L’Encéphale, Paris, 2013.http://dx.doi.org/10.1016/j.encep.2013.03.009

ARTICLE IN PRESSModele +ENCEP-609; No. of Pages 8

2 A. Braitman et al.

Loi du 5 juillet 2011 ;Processusdécisionnel ;Insight

dans la décision. En revanche, de faibles scores à l’Échelle d’Insight Q8 ou à l’Échelle Globalede Fonctionnement (EGF) prédisent le mieux la décision d’hospitalisation sans consentement.À la lumière de ces résultats, nous discutons des relations entre insight, capacité à consentiraux soins et modalité d’hospitalisation pour proposer l’évaluation de l’insight et du fonction-nement global comme critères opérationnels dans la prise de décision de l’hospitalisation sansle consentement.© L’Encéphale, Paris, 2013.

KEYWORDSEmergencies;Commitment ofmentally ill;Decision making;Insight;Mental competency

SummaryBackground. — In 2005, in its recommendations on the modalities of decision making for com-pulsory hospitalization, the French Health High Authority (HAS) had already stressed the needfor rapid implementation of studies and epidemiological analyses on the subject to compen-sate the lack of adequate data in France. The new French law of July 5, 2011, on the rightsand protection of persons under psychiatric care, establishes a judicial review of decisionsfor compulsory hospitalization. Therefore, healthcare professionals need to better define andcharacterize the criteria for such decisions, especially in their relation to psychopathology.The concept of capacity to consent to treatment includes the ability to understand (to receiveinformation about the disease), the ability to appreciate (to weigh the risks and benefits oftreatment), the ability to reason (determining the best choice rationally) and the ability tofreely express a decision. However, assessment tools of capacity to consent to treatment seemto fail to predict the modality of hospitalization.Objective. — This study examined the impact of clinical and contextual characteristics on thedecision in emergency services to admit patients to compulsory inpatient psychiatric units.Method. — Data was collected from 442 successive patients admitted to hospital for carefrom five psychiatric emergency facilities in Paris and covered sociodemographic information,previous hospitalizations, recent course of care, clinical diagnosis, Global Assessment of Func-tioning scale (GAF) and Insight measured by the Q8 Bourgeois questionnaire. Patients were alsoassessed based on criteria established by the HAS for the severity of mental disorders and thenecessity of emergency care.Results. — Multivariable logistic regression shows that diagnosis does not affect the decision ofhospitalization. Agitation, aggressiveness toward others, being married as well as being referredby a doctor or family are all factors that increase the risk of involuntary hospitalization. Last,low Q8 and GAF scores are strong predictors for compulsory admission.Conclusion. — Our study shows a dimensional rather than categorical assessment of patientsby clinicians. Assessment of insight is the main operational criterion used by clinicians in ourstudy. This supports using insight and GAF evaluation in clinical practice to clarify assessmentand decision-making in an emergency setting regarding compulsory hospitalization.© L’Encéphale, Paris, 2013.

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LsEddcpdslsspdémiologique européenne de Dressing et Salize en 2004,

ntroduction

n 2005, les conclusions des recommandations de l’HASoncernant les modalités de prise de décision en urgenceour une hospitalisation sans consentement soulignaient « laécessité d’engager rapidement la réalisation d’études et’analyses épidémiologiques sur le sujet afin de compen-er le manque de données exploitables » [1]. À ce jour,orce est de constater l’absence de nouvelles recherches enrance visant à mettre au point des procédures d’évaluatione critères de prise de décision de l’hospitalisation sans leonsentement. La nouvelle loi francaise du 5 juillet 2011,elative aux droits et àla protection des personnes faisant’objet de soins psychiatriques, instaure un contrôle judi-iaire des décisions d’hospitalisation sans consentement.l est donc d’autant plus nécessaire que les critères dees décisions soient mieux définis et explicités par les

Pour citer cet article : Braitman A, et al. La décision d’hosdimensionnelle ou catégorielle ? Encéphale (2013), http://dx.d

rofessionnels, notamment dans leur rapport avec la psy-hopathologie.

nm

’hétérogénéité des contextes légaux et desonnées épidémiologiques

’analyse de la littérature nationale et internationale sur leujet se heurte à l’hétérogénéité considérable des données.n dépit de la tendance à l’harmonisation des recomman-ations et des pratiques en santé mentale en Europe etans le monde, les critères légaux de l’hospitalisation sansonsentement pour les personnes faisant l’objet de soinssychiatriques varient considérablement selon les pays. Onifférencie principalement le modèle médical, qui insisteur la nécessité de soins lorsque la maladie rend impossiblee consentement, et une approche plus centrée sur la pré-ervation des libertés civiles qui n’autorise l’hospitalisationans consentement que lorsqu’il existe un danger pour leatient ou pour autrui [2]. Pourtant, selon l’analyse épi-

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i ces deux principes différents, ni l’implication plus ouoins forte du système judiciaire ne sauraient expliquer

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ARTICLEENCEP-609; No. of Pages 8

La décision d’hospitalisation sans consentement aux urgenc

les disparités considérables entre les taux d’hospitalisationsans consentement. Ces taux varient dans un rapport de 1 à20 entre pays [3]. En France, 154 mesures d’hospitalisationsans consentement pour 100 000 habitants de plus de 20 ansont été dénombrées en 2009. Cette proportion varie dans unrapport de 1 à 7 au niveau départemental [4]. Entre autresfacteurs, les différentes traditions culturelles, l’attitudegénérale envers les malades mentaux, l’organisation, laqualité des systèmes de santé mentale et les différentesprocédures administratives doivent être considérées lorsde l’analyse complexe de ces variations. Malgré ces diffé-rences, la majorité des pays ont connu une même tendanceà l’augmentation des hospitalisations sans consentement ces20 dernières années. En Angleterre par exemple, la réduc-tion de 60 % du nombre de lits entre 1988 et 2008 a été suivied’une augmentation de 60 % du nombre d’hospitalisationssans consentement. Ainsi sans alternative ambulatoire pos-sible, la réduction inhérente des durées de séjour, alors quel’état de santé est à peine stabilisé, pourrait avoir favoriséles réadmissions induisant une augmentation des procé-dures [5]. Ce phénomène, communément appelé « revolvingdoors » (portes tournantes) dans la littérature, pourrait doncintervenir en grande partie dans l’hétérogénéité des résul-tats par le biais des taux de réadmission non comptabilisésdans les études internationales.

Caractéristiques des patients hospitalisés sansconsentement

Les résultats les plus stables des études épidémiologiquesinternationales concernent les caractéristiques cliniques etsociodémographiques des patients admis sans leur consen-tement. Elles apportent un reflet indirect des critèresd’hospitalisation. Il s’agit le plus souvent d’hommes jeunes,souffrant en majorité de troubles psychiatriques sévères,parmi lesquels la schizophrénie et les autres troubles psy-chotiques représentent 30 à 50 % des cas [6]. Le diagnosticde troubles liés à l’utilisation de substances psychoactivesreprésente 12 à 15 % des hospitalisations sans consentement,mais n’est généralement pas surreprésenté par rapport auxhospitalisations libres [7,8]. Van de Post et al. à Amsterdamrapportent un risque relatif de décision d’hospitalisationsans consentement quadruplé par le diagnostic de psy-chose ou d’épisode maniaque, par le fait de vivre chezses parents, d’être adressé par la police, ou par la pré-sence d’antécédents d’hospitalisations sans consentementdans les cinq dernières années [9]. Le statut involontaire à lapremière admission est aussi un facteur prédictif de futureshospitalisations sans consentement [10]. Concernant lestatut socioéconomique, les études sont discordantes. Cer-taines rapportent un statut socioéconomiquement faible,et le fait d’être sans logement [11], mais cette carac-téristique n’est pas retrouvée dans les études les plusrécentes [12—14]. En France, les patients hospitalisés sansleur consentement sont plus nombreux à vivre seuls ou àêtre célibataires que ceux qui sont hospitalisés librement(HL) (respectivement 39 % et 68 % contre 30 % et 64 %).

Pour citer cet article : Braitman A, et al. La décision d’hosdimensionnelle ou catégorielle ? Encéphale (2013), http://dx.d

Les patients hospitalisés sans consentement qui ne viventpas seuls habitent beaucoup plus fréquemment chez leursparents que les patients en hospitalisation libre (21 % contre11 %). Enfin, l’absence de résidence stable ou l’absence de

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PRESS3

ogement concerne 20 % des patients en hospitalisation libreais moins de 12 % des patients hospitalisés à la demande’un tiers (HDT) [8].

es recommandations internationales

a discussion sur les critères d’hospitalisation sans consente-ent comprend des études soutenant que, dans l’usage, les

aractéristiques des populations admises sans consentementont plutôt stables, indépendamment des facteurs structu-els complexes et des critères législatifs en vigueur dans lesifférents pays [15]. Cela suggère qu’en dehors des condi-ions définies par la loi et des contraintes imposées par leystème de soins, les cliniciens initiant les procédures danses différents pays s’appuient sur des critères intuitifs assezimilaires pour l’hospitalisation sans consentement [16]. Leiveau de formation du médecin et son degré de prise deisque [17] ou la disponibilité des lits en unité fermée [18]nterviendraient comme facteur confondant dans ce proces-us de décision. L’American Psychiatric Association a ainsiroposé un modèle comprenant les cinq critères suivants19] :

un diagnostic fiable d’un trouble mental sévère ; une détresse majeure du patient ; la disponibilité d’un traitement efficace ; l’incapacité à consentir aux soins ; le caractère raisonnable du traitement appliqué qui serait

accepté par une personne compétente à consentir.

a capacité à consentir aux soins

e plus difficile reste probablement de définir les modali-és cliniques de l’évaluation de la capacité à consentir auxoins, puisque la notion de consentement doit être ratta-hée au projet qu’elle englobe, à la qualité de l’informationournie au patient et n’a de sens que rapportée à la particu-arité du patient et de sa rencontre avec le médecin. Pourertains, l’évaluation de la capacité à consentir relèveraitonc plus d’un acte de jugement singulier du médecin dansne situation donnée [20]. Pourtant, l’absence de sémio-ogie du consentement laisse libre cours à de nombreusesnterprétations et participe probablement aux disparitéses taux d’hospitalisations à la demande d’un tiers. Dansa littérature anglo-saxonne, guidée par l’analyse de laurisprudence, une conception cognitiviste de la capacité

consentir aux soins a été définie. Basée sur l’analyse durocessus décisionnel du patient, elle comprend la capacité

comprendre (recevoir une information sur la maladie), laapacité à apprécier (peser les risques et bénéfices du trai-ement), la capacité à raisonner (détermination du meilleurhoix de manière rationnelle) et la capacité à exprimer saécision librement [21,22]. Enfin, la capacité à maintenir saécision dans le temps a été ajoutée à ces critères dans lesecommandations de l’HAS [1]. Suivant ce modèle, de nom-reux outils d’évaluation standardisée ont vu le jour [23,24].a plupart ont été concus pour être appliqués au modèle

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u consentement en médecine somatique ou au modèle duonsentement en recherche médicale, rendant en cela leurtilisation en soins psychiatriques discutable. Le MacArthurompetence Assessment Tool For Treatment (MacCAT-T) a

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QlcL363 patients effectivement hospitalisés (12 % de perdusde vue). Il existe une concordance entre les hypothèsesdiagnostiques d’urgence et le diagnostic principal portéen fin d’hospitalisation dans 69,2 % des cas. Le mode

1 Des résultats partiels et préliminaires de l’enquête présentéedans le présent article ont fait l’objet d’une communication oraleà la Société médico-psychologique le 23 mai 2011 dont le compte

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outefois été utilisé pour évaluer le consentement dans deombreuses études en milieu psychiatrique avec une bonneabilité inter-juges [25]. Utilisant le MacCAT-T, l’incapacité

consentir aux soins est plus souvent associée au dia-nostic de schizophrénie, à la présence d’un délire ou d’unexcitation maniaque. Mais, plus qu’aux diagnostics ou à’intensité des symptômes, elle est naturellement corréléeositivement aux déficits des fonctions cognitives [26—28].a capacité à consentir aux soins est aussi fortement cor-élée à l’insight [29,30]. En effet, l’insight comprend troisrincipales dimensions qui chevauchent en grande partie leoncept de consentement aux soins : la conscience de laaladie, la capacité d’attribuer les expériences mentales

nhabituelles à la pathologie, et l’adhésion aux traite-ents [31]. Les conclusions de ces études sur la capacité à

onsentir aux soins sont cependant limitées par un biais deélection majeur dû à un taux de non-inclusion de l’ordree 50 % des patients, en raison de l’incapacité des patients

consentir à l’étude ou à se prêter à l’évaluation cogni-ive standardisée du consentement [32]. Par ailleurs, danses études, la présence d’une incapacité à consentir auxoins n’est pas complètement en adéquation avec la moda-ité d’hospitalisation. En effet, jusqu’à 50 % des patients enospitalisation libre et seulement 60 % des patients en hos-italisation sans consentement présentent une incapacité àonsentir aux soins selon ces évaluations [32,33]. L’insightst, en revanche, un facteur prédictif plus spécifique dea modalité d’hospitalisation pour les patients souffrant dechizophrénie [34].

bjectif de l’étude

ans la présente enquête, notre objectif est donc de déter-iner quels sont les critères cliniques effectivement utilisésar les médecins dans la décision d’hospitalisation sansonsentement, en analysant l’impact des facteurs de confu-ion de type sociodémographique et situationnel (parcourse soin) sur cette association. Un tiers des hospitalisationsans consentement est initié dans les services d’urgences4]. Il est donc apparu particulièrement pertinent d’étudieres décisions médicales dans ce contexte.

atériel et méthode

ette recherche, menée pendant une période d’un moisn 2009 sur cinq sites d’urgences psychiatriques pari-iens, a inclus tous les patients pour qui l’indication’hospitalisation libre ou à la demande d’un tiers a étéosée. Les praticiens exercant dans les différents sites ontecueilli à l’aide d’un questionnaire les données sociodémo-raphiques, les antécédents d’hospitalisation, le parcourse soins récent jusqu’à la consultation d’urgence. Poures diagnostics, le questionnaire comportait la possibilitée porter plusieurs hypothèses diagnostiques principales etomorbides codées selon la Classification internationale desaladies (CIM 10). Ont été aussi recueillis les critères de

évérité des troubles mentaux et de nécessité de soins

Pour citer cet article : Braitman A, et al. La décision d’hosdimensionnelle ou catégorielle ? Encéphale (2013), http://dx.d

mmédiats tels que proposés par l’HAS [1] : risque suici-aire, risque hétéro-agressif, prises d’alcool ou de toxiques,résence d’un délire ou d’hallucinations, de symptômes thy-iques ou d’une incurie selon une cotation « présence ou

rpcd

PRESSA. Braitman et al.

bsence ». À l’issue de la consultation, la sévérité du reten-issement des troubles a été évaluée par l’Échelle Globalee Fonctionnement (EGF) [35]. Enfin, l’insight a été exploréar le questionnaire Insight Q8 de Bourgeois et al. Ce ques-ionnaire d’Insight comprend huit questions ouvertes quie sont pas spécifiquement orientées sur les symptômessychotiques et qui sont donc applicables à toute patho-ogie [36]. Le choix de ces deux hétéroquestionnaires até déterminé par la volonté de ne pas modifier le coursaturel de l’entretien aux urgences afin d’éviter le biaise recueil du consentement du patient. De même, nous’avons pas utilisé d’outil standardisé pour la détermina-ion du diagnostic. Toutefois, à trois mois de distance dea décision d’hospitalisation sans consentement, un ques-ionnaire a été envoyé aux services receveurs afin deecueillir le diagnostic final et de vérifier sa concordancevec les hypothèses diagnostiques d’urgence. Le question-aire à trois mois comportait aussi la durée de séjour etes éventuelles modifications du mode d’hospitalisation deanière à estimer la cohérence des indications portées

ux urgences avec celles du service receveur. Les carac-éristiques des patients HL et HDT ont été comparées ennalyse bivariée par un test de Chi2 pour les variables qua-itatives et par un test t de Student pour les variablesuantitatives. Pour les analyses statistiques, nous avonsegroupé les codes CIM10 en diagnostic de « trouble psycho-ique chronique » (F20/F21/F22/F25), « trouble psychotiqueigu » (F30/F23), « dépression» (F32/F33) et enfin « troubleddictif » (F10/F19). Nous avons choisi de garder les diffé-entes hypothèses diagnostiques des patients quand ceux-ciénéficiaient de plusieurs hypothèses diagnostiques codées,u d’une hypothèse diagnostique et d’une comorbidité. Unenalyse de régression logistique multivariée a ensuite étééalisée en incluant dans le modèle les variables signifi-ativement associées à la décision d’hospitalisation sansonsentement en analyse bivariée et les facteurs pertinentsssus de la littérature. Les analyses ont été réalisées avec leogiciel STATA/SE 11.

ésultats1

alidité des hypothèses diagnostiques et desndications

uatre cent quarante-deux patients ont été inclus dans’étude parmi lesquels 30 patients sont sortis des urgencesontre avis médical ou par fugue (6,8 %) (Tableau 1).es données à trois mois ont pu être recueillies pour

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endu à donné lieu à une publication dans les Annales Médico-sychologiques, 169(10):664—7. Sans modification des tendances,es résultats préliminaires diffèrent du présent article car le modèlee régression statistique de l’analyse multivariée a été affiné.

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La décision d’hospitalisation sans consentement aux urgences 5

Tableau 1 Analyse bivariée selon le mode d’hospitalisation et prédicteurs de l’hospitalisation sous contrainte en analyse derégression logistique.

Analyse bivariée Analyse de régressionlogistique

HL (n = 240) HDT (n = 202) p OR IC 95 % p

Données sociodémographiquesSexe féminin, n (%) 116 (48,3) 95 (47,0) 0,79Âge années, m (sd) 41,1 (15,1) 39,9 (15,7) 0,44

ActivitéActif, n (%) 72 (36,6) 61 (36,3)Chômeur, n (%) 80 (40,6) 58 (34,5)Femme au foyer, n (%) 4 (2,0) 13 (7,7) 0,12Retraité, n (%) 22 (11,2) 20 (11,9)Étudiant, n (%) 19 (9,6) 16 (9,5)

Niveau d’étudesÉtudes primaires, n (%) 21 (13,4) 15 (10,0)Études secondaires, n (%) 57 (36,3) 66 (44,0) 0,34Études supérieures, n (%) 79 (50,3) 69 (46,0)

Allocations, n (%) 74 (35,6) 55 (31,8) 0,42Mode de vie

Vit avec quelqu’un, n (%) 39 (16,3) 45 (22,3)Vit seul, n (%) 136 (56,7) 97 (48,0) 0,26Vit chez ses parents, n (%) 46 (19,2) 44 (21,8)Autre, n (%) 19 (7,9) 16 (7,9)

Sans hébergement stable, n (%) 46 (19,2) 36 (17,8) 0,72Statut marital 0,02

Célibataire, n (%) 150 (63,8) 112 (58,6) 1Marié, pacsé concubinage, n (%) 36 (15,3) 49 (25,7) 0,02 2,71 [1,19—6,17]Veuf, divorcé, séparé, n (%) 49 (20,9) 30 (15,7) 2,48 [1,06—5,83]

Parcours de soinsAdressé par 0,04

Lui-même, n (%) 74 (30,9) 22 (10,9) 1Un médecin, n (%) 92 (38,5) 99 (49,0) < 0,001 3,66 [1,51—8,83]La famille, n (%) 67 (28,0) 68 (33,7) 2,29 [0,90—5,83]La police, n (%) 6 (2,5) 13 (6,4) 2,51 [0,52—12,01]

Contact dans le mois précédent avec unmédecin

Contact < 1 mois tout type de praticien, n (%) 188 (86,7) 133 (75,1) 0,003Contact < 1 mois psychiatre, n (%) 135 (60,0) 76 (42,7) 0,001

Durée des troubles en années, m (sd) 9,2 (8,6) 9,4 (10,6) 0,88Nombre d’hospitalisations antérieures, m (sd) 3,7 (6,5) 2,8 (5,4) 0,12Antécédents d’hospitalisation HDT ou HO, m(sd)

51 (21,7) 75 (38,7) < 0,001

Durée de passage aux urgences heures, m (sd) 6,5 (8,4) 8,5 (7,4) 0,01Sortie contre avis médical des urgences, n (%) 16 (6,7) 14 (6,9) 0,91

Hypothèses diagnostiquesDépression, n (%) 119 (49,6) 52 (25,7) < 0,001 1,82 [0,65—5,10] 0,26Troubles psychotiques chroniques, n (%) 74 (30,8) 94 (46,5) 0,001 1,66 [0,53—4,17] 0,33Troubles psychotiques aigus, n (%) 20 (8,3) 51 (25,3) 0,001 3,42 [0,85—13,7] 0,08Troubles lié à l’alcool ou substances, n (%) 52 (21,7) 42 (20,8) 0,82 3,34 [1,25—8,91] 0,02

Agitation aux urgences, n (%) 13 (5,4 71 (35,5) < 0,001 3,06 [1,10—8,55] 0,03

Critères HASRisque suicidaire, n (%) 141 (59,0) 85 (42,3) < 0,001 2,04 [0,86—4,83] 0,11Risque hétéro-agressif, n (%) 19 (7,9) 84 (41,6) < 0,001 4,24 [1,82—9,90] 0,001Prise de toxique d’alcool, n (%) 77 (32,1) 67 (33,2) 0,81 1,30 [0,52—3,24] 0,57Trouble thymique, n (%) 169 (70,4) 115 (56,9) 0,003 0,72 [0,32—1,65] 0,44Délires hallucination, n (%) 72 (30,0) 125 (61,9) < 0,001 1,78 [0,72—4,40] 0,21Incurie, n (%) 40 (16,7) 46 (22,9) 0,11 0,57 [0,26—1,24] 0,16

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6 A. Braitman et al.

Tableau 1 (Suite)

Analyse bivariée Analyse de régressionlogistique

HL (n = 240) HDT (n = 202) p OR IC 95 % p

EGF, m (sd) 42,8 (13,6) 31,0 (12,1) < 0,001 0,96 [0,94—0,99] 0,003

Insight Q8, m (sd) 6,4 (1,9) 2,4 (2,4) < 0,001 0,51 [1,10—8,55] < 0,001

m : moyenne ; sd : écart-type ; HL : hospitalisation libre : HDT : hospitalisation à la demande d’un tiers ; OR : odds ratio ; IC 95 % : intervalle

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de confiance à 95 %.

’hospitalisation a été transformé dans les 72 heures pour % des patients. Pour 11 % des patients l’hospitalisation auré moins de 48 heures.

aractéristiques sociodémographiques

es groupes hospitalisation libre et à la demande d’un tierse diffèrent pas en termes d’âge, de sexe, d’activité, deiveau socioéconomique, de niveau d’étude, de mode deie (en couple, seul, ou chez des parents). Alors que lesatients vivent majoritairement seuls dans les deux groupes,es patients HL sont plus souvent célibataires (63,8 % vs8,6 %), veufs ou divorcés (20,9 % vs 15,7 %), (p = 0,02).

arcours de soins

es patients hospitalisés sans leur consentement sont plusréquemment adressés aux urgences par un médecin (49 %s 38,3 %) alors que les patients HL viennent plus sou-ent consulter d’eux-mêmes (30,8 % vs 10,9 %), (p < 0,001).ependant, en dehors de la consultation à l’origine du pas-age aux urgences, les patients HL ont eu plus fréquemmentn contact avec un médecin généraliste ou un psychiatreans le mois précédent (86,7 % vs 75,1 %, p = 0,003). Les deuxroupes sont similaires en termes de durée de la maladie,e nombre d’hospitalisations antérieures mais les patientsospitalisés sans leur consentement ont plus souvent unntécédent ou plus d’hospitalisation sous contrainte (38,7 %ontre 21,7 %, p < 0,001).

aractéristiques cliniques

es patients en hospitalisation libre ont plus souvent uneypothèse diagnostique de dépression (49,6 % versus 25,7 %,

< 0,001) et les patients hospitalisés sans leur consente-ent ont plus fréquemment les hypothèses diagnostiques de

roubles psychotiques aigus ou chroniques (25,3 % et 46,5 %ersus 8,3 % et 30,8 %, p = 0,001). L’existence d’un risqueuicidaire et de symptômes thymiques est plus fréquentee manière significative dans le groupe des indications’hospitalisation libre. A contrario, l’agitation aux urgencest l’existence d’un risque hétéro-agressif sont bien plus fré-uents dans le groupe des indications d’hospitalisation sans

Pour citer cet article : Braitman A, et al. La décision d’hosdimensionnelle ou catégorielle ? Encéphale (2013), http://dx.d

onsentement (35,5 % vs 5,4 % ; p < 0,001 et 41,6 % vs 7,9 % < 0,001). De même la présence d’un délire est presqueeux fois plus fréquente dans ce groupe (61,9 % vs 30 %,

< 0,001). La fréquence de l’incurie est similaire dans les

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eux groupes (p = 0,11). Enfin, les moyennes des scores’Insight Q8 et de fonctionnement global (EGF) sont signi-cativement inférieures dans le groupe des hospitalisations

la demande d’un tiers (respectivement 2,4 [±2,4] contre,4 [±1,9], p < 0,001 et 31 [±12,1] contre et 42,8 [±13,6]

< 0,001).

nalyse de régression logistique

n analyse de régression logistique multivariée, la moda-ité d’hospitalisation (libre ou à la demande d’un tiers)’est pas influencée par le diagnostic clinique, hormise diagnostic principal ou co-morbide de dépendance à’alcool ou à une substance. La présence d’une agitation ou’une hétéro agressivité augmente la probabilité de déci-ion d’hospitalisation sans consentement, de même que leait d’être marié ou le fait d’être adressé par un médecin.nfin, de faibles scores à l’Échelle d’Insight Q8 et à l’EGFrédisent fortement une hospitalisation sans consentement.

iscussion

ans notre enquête, contrairement à ce que laissentenser les données de la littérature, le diagnostic derouble psychotique aigu ou chronique ne semble pasntervenir directement dans le processus de décisione l’hospitalisation non consentie. Pour conforter cetteypothèse, l’analyse de régression logistique a aussi étéffectuée en prenant comme diagnostics ceux portés en fin’hospitalisation, sans modification de ce résultat. Le faitue les diagnostics de psychose, largement surreprésentéshez les patients pour qui une indication d’hospitalisationans consentement a été posée, n’apparaissent plus en ana-yse mutivariée au profit de l’insight et de la sévérité duetentissement des symptômes, semble indiquer une éva-uation dimensionnelle plutôt que catégorielle des patientsar les cliniciens aux urgences. Le diagnostic de dépendance

une substance, l’agitation aux urgences et la présence’une hétéro-agressivité augmentent la probabilité d’uneospitalisation sans consentement. Ces caractéristiques cli-iques partagent une dimension d’impulsivité probablementrise en compte dans l’évaluation de la capacité du patient

prendre, mais surtout à maintenir la décision de soins

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ans le temps. En effet, cette dimension de stabilitéu consentement est indispensable à prendre en comptefin d’éviter les risques de rupture de soins prématurée37]. L’évaluation de l’insight se révèle être un critère

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consentement d’une personne présentant des troubles men-

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La décision d’hospitalisation sans consentement aux urgenc

opérationnel important dans la prise de décision auxurgences de l’hospitalisation sans le consentement. Cettedimension est probablement plus facilement abordable etpertinente cliniquement dans le contexte de l’urgenceque les évaluations cognitives visant à mesurer les capa-cités à consentir aux soins. De manière intéressante, Korenet al. ont montré que, lorsqu’il est demandé aux patientsde déterminer leur confiance dans l’exactitude de leursréponses à des tests cognitifs, l’incapacité à consentir auxsoins est plus corrélée au déficit d’autoévaluation qu’audéficit cognitif en soi [38]. En effet, sur la base d’uneévaluation cognitive de la capacité à consentir aux soinsdu type du MacCAT-T, utilisant des vignettes cliniques quine concerneraient pas les troubles du patient, il est envi-sageable que certains sujets se montrent compétents surle plan cognitif à recevoir une information, à peser lesalternatives, à raisonner et à décider du meilleur choix.Ils pourraient même conseiller d’accepter les soins à untiers dans une telle situation mais resteraient incapables deprendre la même décision pour eux-mêmes du fait du déficitd’autoévaluation [39]. À la lumière de ce déficit métacog-nitif de l’autoévaluation, l’insight semble donc un conceptparticulièrement pertinent pour l’estimation de la capacitéà consentir aux soins.

La décision d’hospitalisation sans consentement sembleaussi reposer sur l’intensité du retentissement des symp-tômes. Dans notre enquête, les scores d’Insight et defonctionnement global sont tout deux liés à la décision demanière indépendante. Cela pourrait être expliqué par lefait que, plus le risque encouru par l’absence de soins estgrave (EGF bas), moins le clinicien aura tendance à lais-ser de place à l’incertitude en augmentant le seuil requisà la recevabilité du consentement, en d’autres termes entenant moins compte dans sa décision de l’insight, reflet dela capacité à consentir aux soins [40].

Les patients hospitalisés sans leur consentement sontmoins souvent célibataires, ils sont aussi plus fréquemmentadressés par un médecin. En analyse de régression logis-tique, le fait d’être adressé par la famille ou par un médecinaugmente le risque d’hospitalisation sans consentement.Bien qu’il soit peu probable que ces éléments interviennentdirectement dans la décision d’hospitalisation sans consen-tement, le fait d’être marié ou d’être adressé par unmédecin ou la famille pourrait faciliter l’accès aux soins parles urgences pour les patients qui les refusent. Ce résultat,qui témoigne d’un parcours de soins accompagné jusqu’auxurgences, conforte l’intérêt, sur les lieux d’urgence, d’untravail avec des familles pour favoriser l’accès aux soinsde leur proche en lien avec les équipes de soins de sec-teur et les médecins traitants. Parmi les patients hospitalisésen psychiatrie via les urgences, vivant le plus souvent seulavec un faible statut socioéconomique, le taux plus élevéde célibataires chez les patients HL pourrait aussi témoignerd’un isolement social plus marqué dans ce groupe. Outre lanotion de parcours de soins accompagné, une autre hypo-thèse est la carence de tiers signataire pour la demanded’hospitalisation puisque, au moment de notre enquête, laprocédure de soins psychiatrique en péril imminent sanstiers n’était pas encore en vigueur. Pour les patients les

Pour citer cet article : Braitman A, et al. La décision d’hosdimensionnelle ou catégorielle ? Encéphale (2013), http://dx.d

plus isolés et désocialisés, il est possible que, en dépit de laprésence de critères d’hospitalisation sans consentement,la décision d’hospitalisation soit reportée dans un certain

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ombre de cas sur une hospitalisation libre au risque d’uneupture de soins prématurée. En effet, il est envisageableue ces patients acceptent une hospitalisation sans véri-able consentement aux soins, mais seulement motivés pare besoin de rompre l’isolement. Dans cette hypothèse, laouvelle procédure de soins psychiatrique en péril imminentevrait effacer cette différence dans le futur.

La principale limite de notre étude est constituéear le fait que les cotations des symptômes, des scores’Insight et du fonctionnement global sont effectuées pare médecin qui a décidé de l’orientation, induisant un biais’autovalidation, le cotateur pouvant être enclin à justifieron indication en exacerbant certaines dimensions. En effet,ous décrivons plutôt le processus décisionnel et les critèresur lesquels l’indication a été posée, plus que la mesurebjective de ces dimensions chez les patients. De même,es facteurs confondants relatifs au médecin prenant la déci-ion d’hospitalisation (tels que son niveau d’expérience, sonegré de prise de risque) et ceux relatifs aux caractéris-iques de l’offre de soins d’aval des urgences (disponibilitées lits, présence d’une unité fermée ou d’une unité derise) ne sont pas ici étudiés.

onclusion

a présente enquête est la première à notre connais-ance à démontrer une approche dimensionnelle de laécision d’hospitalisation sans consentement reposant prin-ipalement sur l’évaluation de l’insight et de l’intensitéu retentissement des troubles et non sur un diagnosticatégoriel. La mesure du fonctionnement global, qui tientompte de l’existence d’un certain danger d’aggravation,’incurie, d’auto- ou d’hétéro-agression, et la mesure de’insight, reflet de la conscience de la maladie prérequis

une demande de soins du patient, sont bien en concor-ance avec l’esprit de la loi et la bientraitance du patient.ans une approche équilibrée du devoir d’assistance etu respect de l’autonomie de la personne, l’évaluation dees dimensions pourrait représenter un outil précieux poura pratique clinique mais aussi pour l’explicitation de cerocessus de décision complexe notamment dans les cer-ificats médicaux. D’autres travaux restent à mener pourbserver un éventuel impact de la nouvelle loi sur les déci-ions d’hospitalisation sans consentement. Dans de futuresnquêtes, il serait aussi pertinent d’étudier les critères deécision en urgence de soins à la demande du représentante l’état.

éclaration d’intérêts

es auteurs déclarent ne pas avoir de conflits d’intérêts enelation avec cet article.

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pitalisation sans consentement aux urgences : approcheoi.org/10.1016/j.encep.2013.03.009

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