journée thématique la tracheotomie en 2010 · fistule mature « permanente », en une semaine....
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Journée Thématique
LA TRACHEOTOMIE EN 2010LA TRACHEOTOMIE EN 2010 Jeudi 9 décembre 2010Jeudi 9 décembre 2010
Hôtel National des Invalides Hôtel National des Invalides -- ParisParis
En février 1995, nous organisions avec la Commission Médico-Technique et Socia-
le de l’ANTADIR un premier symposium sur la Trachéotomie particulièrement chez
l’insuffisant respiratoire chronique grave. Il montrait déjà la défervescence des indica-
tions de la trachéotomie de 22% (1252 patients) en 1984 à 11% (3581) en 1994 parallèle-
ment à l’apparition de la ventilation non-invasive (VNI), mais confirmait le besoin d’in-
formation de ce moyen de raccordement pour la ventilation mécanique (VM) dont l’effi-
cacité n’est plus à démontrer.
Quinze ans après, la trachéotomie ne représente plus que 4,1% (700 patients échel-
le basse ANTADIR) à 22,7% (236 patients échelle haute ALLP de Lyon) et 19% (552 pa-
tients ADEP Assistance Paris) des IRCG parallèlement au développement des indica-
tions de VNI. Toutefois le besoin demeure en indication plutôt dans les pathologies res-
trictives mais surtout en information, les pratiques s’oubliant vite.
Le 9 décembre 2010 dans le cadre somptueux des Invalides nous avons donc refait
le point avec des exposés plus concis le matin et des ateliers plus pratiques l’après-midi.
La majorité des auteurs étaient déjà présents en 1995 en dehors du Docteur Aissam Bag-
dach décédé en octobre 2010 à qui nous rendons un profond hommage. Il a été remplacé
par le docteur Pierre Bonnette que nous remercions de sa spontanéité.
Dr Jean-Marie BEDICAM
Centre Médical Edouard Rist - Paris
Flash Info www.antadir.com
Dans ce numéro :
Flash Info
FÉDÉRATION ANTADIR—66 BD ST MICHEL—PARIS 6 - 01 56 81 40 60
Année 2011 - Numéro 29
Mars 2011
I - Trachéotomie : histoire et physiopathologie 2
Canules et soins de trachéotomie 20 Accessoires de la trachéotomie patient ventilé et non ventilé 22
Aspiration endo-trachéale : méthode, hygiène et utilisation des consommables et décret
18
II - La trachéotomie chirurgicale 4
Ateliers :
VI - Particularités de la trachéotomie chez l’enfant dans les maladies neuromus-culaires et de l’enfant
13
III - La trachéotomie percutanée : Pour !! 6 IV - Choix, adaptation et surveillance à long terme de la canule de trachéotomie 7 V - La trachéotomie en 2010 : choix des indications et résultats des différentes Etudes 10
LA TRACHEOTOMIE EN 2010
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La Fédération ANTADIR, avec la partici-
pation de l’ADEP Assistance, a organisé le 9 Dé-
cembre 2010, une journée thématique intitulée
« La trachéotomie en 2010 ». Plus de 100 personnes
(techniciens, kinésithérapeutes, infirmières, mé-
decins...) ont assisté à sept conférences d’experts
et participé à différents ateliers organisés par le
groupe de travail des paramédicaux de l’Anta-
dir.
I : Trachéotomie : histoire et physiopathologie (Pr. Dominique ROBERT, Lyon).
Le Pr. D. Robert, pionnier dans la trachéoto-
mie, a tout d’abord rappelé les définitions des ter-
mes « trachéostomie » et « trachéotomie » qu’il ne
faut pas confondre. En effet, la trachéostomie se
définit comme « une
ouverture permanente,
la peau étant suturée à
la trachée avec ou sans
canule », alors que la
trachéotomie se définit
comme « une ouvertu-
re temporaire de la tra-
chée maintenue par un
tube. Elle se ferme au retrait du tube ».
La trachéotomie peut concerner aussi bien les en-
fants que les adultes. Elle peut être utilisée de fa-
çon transitoire ou pour une durée bien plus lon-
gue.
Le Pr. D. Robert a souligné que certains patients
pouvaient vivre plus de 50 ans avec une tra-
chéotomie.
L’utilisation de la trachéotomie répond de qua-
tre indications : 1- Pour maintenir la trachée ou-
verte en cas d’obstruction, 2- Pour pouvoir aspi-
rer en cas de déficit de la toux, 3- Pour protéger
des fausses routes, 4- Pour une ventilation mé-
canique « prolongée ».
Histoire de la trachéotomie : on peut dis-
tinguer deux périodes correspondant à deux
indications différentes de la trachéotomie. Sché-
matiquement, la première période correspond à
la trachéotomie en réponse à une obstruction
des voies aériennes supérieures (VAS), alors
que la seconde correspond davantage à la venti-
lation mécanique.
La première période remonte à l’Antiquité, lors-
qu’ Alexandre le Grand décrivit pour la premiè-
re fois la « bronchotomie de sauvetage », en 356
BC. La trachéotomie chirurgicale est apparue en
1718 et s’est développée vers 1850 pour le traite-
ment du croup (diphtérie) avec les professeurs
Bretonneau et Trousseau, faisant chuter la mor-
talité de 100% à 25%. En 1909, Chevalier Jackson
a décrit la procédure chirurgicale « réglée » de la
réalisation de la trachéotomie, réduisant ainsi la
mortalité de 25% à 1%.
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Dans la seconde période, la trachéotomie
fut utilisée lors du traitement de la poliomyélite
antérieure aiguë (à Copenhague) en 1952. Elle fut
d’abord utilisée lors d’une ventilation manuelle
puis avec des respirateurs, ce qui a fait chuter la
mortalité de 80% à 20%. La trachéotomie s’est im-
posée rapidement et a permis le développement
de la réanimation « moderne » à partir des années
50-60. Elle a ainsi permis le retour à domicile avec
une ventilation mécanique définitive de patients
insuffisants respiratoires chroniques (polio, autre
maladie neuro-musculaire, scoliose, BPCO).
Enfin, précisons que la trachéotomie a été le seul
traitement du syndrome d’apnées obstructives du
sommeil (SAOS) dans les années 70. En outre, l’in-
troduction de la technique de réalisation de la tra-
chéotomie par voie percutanée, depuis les années
70, a simplifié sa réalisation soit pour une canula-
tion classique soit pour une petite canule (4 mm).
Physiopathologie de la trachéotomie : Dans
sa définition, la physiopathologie de la trachéoto-
mie ne concerne pas les complications mais les
modifications de la physiologie liées à la présence
d’une trachéotomie dans ses modalités diverses,
qui se combinent soit aux anomalies liées au
contexte pathologique ayant justifié la trachéoto-
mie soit parfois aux variations anatomiques. Dans
la physiopathologie de la trachéotomie, il est né-
cessaire de distinguer les points de la mécanique
ventilatoire, des effets sur la paroi trachéale, de la
phonation, de la déglutition, de l’humidification,
de l’orifice et de l’esthétique.
La trachéotomie a trois effets distincts sur la
ventilation : 1- une augmentation des résistances
(diamètre interne et longueur) qui entraîne une
augmentation du travail en ventilation sponta-
née avec une majoration de la pression expira-
toire de pointe, 2- une diminution de l’espace
mort anatomique de 150 ml à 20 ml, ce qui dimi-
nue la ventilation minute et 3 – une altération
d’un des temps de la toux (fermeture de la glot-
te) qui va imposer les aspirations trachéales.
Concernant ses effets sur la paroi trachéale, la
trachéotomie peut entraîner une altération de la
fonction « escalator » des sécrétions de la mu-
queuse (altération de la fonction ciliaire), une
ischémie par la pression du ballonnet, une sté-
nose cicatricielle et une remontée progressive
vers le haut de l’orifice du fait des pressions po-
sitives liées à la ventilation mécanique qui tend
à repousser en haut la canule.
Au niveau de la phonation, la trachéotomie ne
touche pas les cordes vocales ni le larynx
(appareil phonatoire). Toutefois, elle peut sup-
primer totalement ou partiellement le flux expi-
ratoire au travers de l’appareil phonatoire. C’est
pourquoi, de nombreuses « stratégies » existent
pour autoriser la parole malgré la canule mais
toutes doivent établir un flux au dessus de la
trachéotomie.
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La fonction de déglutition n’est pas altérée
par la trachéotomie, ce qui peut être un argument
pour sa réalisation (vs intubation). Cependant, le
ballonnet peut comprimer l’œsophage et l’éléva-
tion du larynx nécessaire à la déglutition peut être
gênée (ce qui favorise les micro inhalations).
Concernant ses effets sur l’humidification de l’air,
la trachéotomie court-circuite le nez, le pharynx et
le larynx, ce qui empêche l’humidification de l’air
inspiré. Dans l’immense majorité des cas, une hu-
midification artificielle s’impose soit par un humi-
dificateur chauffant, soit par un échangeur de
température et d’humidité.
Au niveau de l’orifice cutané, il se développe une
fistule mature « permanente », en une semaine.
Cette fistule peut être sténosante ou permettre le
développement de granulomes rendant difficile
les recanulations.
Enfin, l’aspect esthétique est très important à
considérer pour les utilisations au long cours. Une
approche spécifique du choix de la canule doit
être envisagée.
Conclusion : Par ses effets propres, la tra-
chéotomie a été puissamment efficace dans le trai-
tement des cas de diphtérie, polio ou du SAOS.
Même si, de nos jours, les indications de la tra-
chéotomie se sont réduites, elles nécessitent tou-
jours la compréhension de ses effets physiopatho-
logiques.
II : La trachéotomie chirurgicale
(Dr. Pierre BONNETTE, Hôpital Foch, Sures-nes).
De façon traditionnelle, la trachéotomie
chirurgicale se réalise au bloc opératoire, avec
un bistouri électrique, sous anesthésie générale
avec intubation ou ventilation au masque
(vérification des paramètres de fréquence car-
diaque, tension artérielle et saturation en oxygè-
ne). Elle peut aussi parfois se réaliser sous anes-
thésie locale.
Dans l’acte lui-même, la trachéotomie chirurgi-
cale nécessite une incision cutanée horizontale
sur l’isthme à 1 cm
du cricoïde, une
section du peaucier
et un écartement
des berges. Dans
certains cas, quel-
ques hémostases des veines jugulaires antérieu-
res peuvent apparaître. Ensuite, il s’agit de faire
une ouverture de la ligne blanche, un écarte-
ment des sous hyoïdiens et de libérer l’isthme
thyroïdien. Deux pinces de Kelly sont alors pla-
cées sur l’isthme, ce dernier est sectionné et les
deux tranches sont suturées. Concernant l’ou-
verture de la trachée, elle doit se faire loin du
cricoïde et de façon horizontale entre deux an-
neaux. Le Dr. P. Bonnette a insisté sur le fait
qu’une ouverture verticale ou en volet est à
proscrire ! Enfin, un fil de rappel est posé sur le
bord inférieur.
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Dans la technique chirurgicale traditionnel-
le, la canulation est faite avec la canule la plus
grosse, la sonde d’intubation est remontée, le chi-
rurgien vérifie le positionnement par le retour de
CO2, un ballonnet gonflé est placé pour quelques
jours, les angles de l’incision sont fermés (pour
éviter le passage d’air entre la trachée et la peau),
la canule est fixée par des fils et un cordon. Le
premier changement de canule se fait une semai-
ne après la trachéotomie. Il est alors important de
vérifier la présence éventuelle de caillots poussés
à la recanulation et s’aider, le cas échéant, d’un
guide.
Les complications possibles d’une trachéoto-
mie chirurgicale sont l’hémorragie veineuse ou
artérielle isthmique, la suppuration autour de la
canule, l’apparition d’un pneumomédiastin si la
peau a été trop refermée, une obstruction par du
mucus ou des caillots ou une sortie de la trachée.
A ce sujet, le Dr P. Bonnette a rappelé que la meil-
leure aide au bon positionnement ou reposition-
nement d’une canule était le repérage avec le
doigt. D’autres complications telles que les sténo-
ses et granulomes ou la fistule oesotrachéale sont
communes avec celles de la trachéotomie par voie
percutanée.
Fort de son expérience de chirurgien thoracique,
le Dr P. Bonnette a présenté sa technique person-
nelle de trachéotomie [1]. Il utilise toujours un
éclairage au casque, il repère et choisit l’entrée
idéale, réalise une résection cutanéo-graisseuse
circulaire du diamètre de la canule, un écartement
des sous hyoïdiens, une traction avec une pince
de Kelly sous l’isthme thyroïdien et enfin une
incision horizontale entre deux anneaux en sous
isthmique.
Certaines situations sont plus difficiles à gérer
par le chirurgien, notamment lorsque le patient
présente un cou large et court avec le cricoïde
près du manubrium. En plaçant le cou en exten-
sion, on peut tirer le larynx vers le haut et ne
pas ouvrir la trachée sous le cricoïde, mais plus
bas. De même, les patients présentant un goitre
(résection de l’isthme), les patients obèses ou
ceux présentant un TABC non latéralisé, c'est-à-
dire devant la trachée (lambeau entre lui et la
canule) ou enfin ceux présentant une trachée
calcifiée (souvent trachéotomie ancienne) néces-
sitent une attention particulière lors du geste
opératoire.
Conclusion : la trachéotomie chirurgicale
des malades de réanimation est un peu lourde
(transport et accès au bloc), réservée souvent
aux trachéotomies à problème (obèse, cou court,
goitre…). Au-delà du bloc opératoire, la tra-
chéotomie chirurgicale est réalisable en service
de réanimation. La trachéotomie chirurgicale
des insuffisants respiratoires chroniques est
mieux adaptée, sous anesthésie générale avec ou
sans intubation.
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III : La trachéotomie percutanée : Pour !!
(Pr. Erwan L’HER, Hôpital de la Cavale Blanche,
Brest).
Un brin provocateur, le Pr. E. L’Her a d’a-
bord interrogé l’assistance sur le sens d’une dis-
cussion relative au choix d’une trachéotomie chi-
rurgicale ou percutanée ? En effet, il est tout à fait
favorable au recours préférentiel aux trachéoto-
mies percutanées ! Il faut « arrêter les trachéoto-
mies larges et très visibles ; cela provoque trop de
suppurations et des orifices trop larges et inesthé-
tiques ».
D’un point de vue esthétique, la cicatrice est bien
moins visible 24 h après une décanulation suite à
une trachéotomie percutanée que suite à une tra-
chéotomie chirurgicale ; elle ne l’est quasiment
plus après trois semaines de décanulation. Se ba-
sant sur l’étude française de JC. Raphael et al. [2],
il a rappelé que la trachéotomie était une cause
d’altération de l’estime de soi, de l’état physique.
L’un des premiers arguments objectifs en faveur
de la trachéotomie percutanée est la technique elle
-même. En effet, il faut rappeler que la trachéoto-
mie chirurgicale (décrite en 1909 par Chevalier-
Jackson) peut se faire en « pastille », « en flap en U
de Björk » ou encore en « Incision en I » ; il n’y a
donc pas de standardisation à cette technique ! Au
contraire, la trachéotomie percutanée (développée
depuis environ 1995) est sécuritaire et repose sur
la technique de « Seldinger »: palpation puis
contrôle endoscopique, ponction trachéale et in-
sertion du guide métallique.
La trachéotomie
percutanée néces-
site un orifice de
faible calibre. Il y
a moins de celluli-
te de stomie, ce
qui limite le préjudice esthétique et les risques
de complications inflammatoires. Par ailleurs, le
contrôle endoscopique du geste permet une vi-
sualisation du bon positionnement (être parfai-
tement médian et assurer un bon passage de la
canule). Concernant le lieu préférentiel de réali-
sation de la trachéotomie percutanée, l’étude de
Upadhyay. A et al. [3] montre que la prévalence
des saignements ou des décanulations était
identique pour des trachéotomies percutanées
réalisées en unité de soins intensifs ou en bloc
opératoire. L’a priori selon lequel la réalisation
des trachéotomies au bloc opératoire limiterait
les risques est une « fausse idée reçue ».
D’un point de vue économique, l’étude de Van
Natta TL et al. [4] montre que le coût total de
réalisation d’une trachéotomie percutanée au lit
est de $904 alors que celui d’une trachéotomie
chirurgicale au bloc est de $2134. De plus, la ré-
alisation d’une trachéotomie percutanée au lit
permet de diminuer de façon significative les
risques induits par le transport au bloc opératoi-
re de patients parfois instables [5]
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L’étude de B. Hill et al. [6] montre que le
nombre de complications après la trachéotomie
est de 42% par voie chirurgicale alors qu’il est de
seulement 15% par voie percutanée. L’étude de
Holdgaard H et al. [7] indique que le nombre de
saignements mineurs pendant la trachéotomie et
le nombre d’infections post-opératoires sont très
largement diminués par la technique percutanée,
comparativement à la technique chirurgicale. Tou-
tefois, il existe des complications communes à
l’ensemble des techniques telles que la refermetu-
re rapide de la stomie, les difficultés de recanula-
tion, l’éversion des cartilages trachéaux et une lé-
sion du mur trachéal postérieur.
En conclusion, le Pr. E. L’Her insiste sur le fait que
la trachéotomie percutanée peut être pratiquée en
réanimation, au lit du malade et de ce fait, un
transfert au bloc opératoire n’est pas obligatoire
par cette technique. Il n’est pas non plus impératif
que cette trachéotomie soit réalisée uniquement
par un chirurgien ; il faut privilégier en effet
« l’opérateur le plus expérimenté ». Les techni-
ques percutanées semblent équivalentes (voire
supérieures) à la trachéotomie chirurgicale. Toute-
fois, une technique par rapport à une autre ne
peut pas être proposée de façon formelle. Néan-
moins, il reste important de garder à l’esprit les
moindres complications, la simplicité et le bénéfi-
ce économique entraînés par la trachéotomie per-
cutanée !
IV : Choix, adaptation et surveillance à long terme de la canule de trachéotomie.
(Dr. Jean-Marie BEDICAM, Hôpital Edouard RIST – Paris).
La trachéotomie chez l’insuffisant respi-
ratoire chronique grave (IRCG) est un court cir-
cuit réalisé sur les voies aériennes au niveau de
la face antérieure du cou. Elle conserve l’activité
des cordes vocales, donc la voix, et doit permet-
tre la déglutition et la toux. Elle constitue un ex-
cellent moyen de raccordement pour la ventila-
tion mécanique. Elle est cependant le plus sou-
vent définitive.
L’efficacité d’une trachéotomie dépend de l’ac-
ceptation du traitement par le patient et son en-
tourage, de l’éducation, de la surveillance, de la
bonne collaboration entre médecins et interve-
nants, mais aussi de l’âge du patient, de son état
psychique, de ses conditions de vie et de sa pré-
paration à cette intervention invasive
(trachéotomie en urgence ou programmée).
Le patient trachéotomisé doit faire face à diffé-
rentes contraintes, notamment les difficultés
psychologiques liées à la peur du regard des au-
tres et à la crainte de ne pas savoir se prendre en
charge de façon autonome. Le patient doit aussi
respecter des mesures d’hygiène, savoir réaliser
les aspirations endo-trachéales, gérer les problè-
mes liés à la perte des moyens de filtration et
d’humidification naturels (dessèchement des
sécrétions), et d’éventuels problèmes de lieux de
vie en fonction de l’âge.
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La trachéotomie peut entrainer des problèmes
de déglutition notamment par la perturbation du
réflexe de fermeture glottique, le détournement
du flux aérien transglottique, l’affaiblissement de
la toux glottique, la baisse de la pression sous-
glottique, l’atrophie musculaire par non utilisa-
tion, la perte de la sensibilité du larynx et de l’hy-
popharynx, les troubles de la coordination dans
l’ouverture et fermeture glottique, la compression
oesophagienne par le ballonnet, la restriction de la
mobilité du larynx et le réflexe d’inhibition respi-
ratoire avec apnée plus ou moins bien supportée.
La canule de trachéotomie est un tube courbe avec
un angle d’environ 110 à 130° dont la partie infé-
rieure pénètre dans la trachée au travers de l’orifi-
ce de trachéotomie, l’autre partie est extérieure.
Elle peut disposer d’un ballonnet pour réalier l’é-
tanchéité entre la canule et la paroi interne de la
trachée ou pas pour permettre une ventilation
sans ou avec fuites. Concernant les ballonnets, le
Dr J.M. Bedicam précise que l’idéal est l’utilisation
d’un ballonnet à basse pression, bien cylindrique
qui ne laisse pas d’aspérité. Une chemise interne
(qui peut facilement être enlevée, nettoyée et re-
mise en place) peut être utilisée, de même qu’une
collerette mobile.
Au niveau des matériaux, la canule initialement
en latex (c’est le matériau le plus ancien pour les
canules à ballonnet mais très traumatisant et plus
utilisé), peut être en argent (non allergisante, avec
trois courbures et pas de limitation de durée d’uti-
lisation mais rigide et coûteuse), en acrylique
(moins coûteuse que l’argent, avec trois courbu-
res et un bon drainage car les parois sont lisses,
mais rigide et fragile), en PVC (souple avec
deux courbures, mais aussi rigide), en silicone
(non allergisant, très souple et facile à utiliser
mais ballonnet perméable à l’air), en polyuré-
thane (nouveau matériau transparent dont la
rigidité doit encore être appréciée).
Le praticien peut choisir selon différents types
de canules : rigides ou souples, avec ou sans
chemise interne, avec collerette fixe ou mobile,
avec ou sans ballonnet (standard ou basse pres-
sion < 25 mmHg). La calibration n’est pas nor-
malisée (courbes, longueurs, diamètre). Le choix
doit aussi être fait sur la présence d’un bouchon,
d’une valve de phonation ou d’un nez artificiel,
et sur la nécessité ou non d’un raccordement en
oxygène. L’aspect esthétique est un point très
important pour la qualité de vie du patient et
doit être pris en compte dans le choix de la ca-
nule.
Le choix de la canule doit ensuite optimiser la
phonation. Pour cela il faut rétablir un passage
d’air vers les voies aériennes supérieures, avec
un gradient de pression > 2 cm H20. Le ballon-
net doit être dégonflé. Sous ventilation mécani-
que (VM) on peut utiliser une valve unidirec-
tionnelle de phonation pendant l’expiration, ré-
glage d’une pression expiratoire positive et
maintenir une pression et d’un débit minimum
le plus longtemps possible sur les cordes voca-
les, plus facilement en mode pressionnel que
volumétrique.
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En ventilation spontanée (VS) avec une valve de phonation, la fenêtre laryngée (quand elle est
justifiée) permet à l’air expiré de passer plus facilement vers les cordes vocales et au patient de parler.
La présence de fuites trop importantes, une compliance insuffisante ou l’existence d’un syndrome
bulbaire ne permettent pas de retrouver une phonation.
Dans le choix d’une canule de trachéotomie, il faut aussi distinguer les cas particuliers tels que les pa-
tients sous VM permanente, l’existence d’un poumon unique, les laryngéctomisés, la nécessité d’une
canule spécifique (Montandon, tube en T de Montgoméry, prothèse silicone en Y ou de type stent),
ou avec possibilité d’aspiration au dessus du ballonnet pour prévenir les écoulements dans les voies
respiratoires des paralysies oropharyngées. Enfin une canule sur mesure pourra être nécessaire. Les
canules Hyperflex ™ par exemple à collerette réglable peuvent être choisies lorsqu’une canule stan-
dard ne convient pas à l’anatomie du patient (patients au « cou de taureau » et « sans cou », ou cy-
phoscoliose) ou ayant des complications trachéale telles que trachéomalacie ou sténose trachéale.
Cette canule permet de moduler la longueur du tube et sa texture (souple ou armé) et de s’adapter
parfaitement aux contours anatomiques de la trachée. Elle permet également de choisir la collerette,
le tube à courbure préformée ou rectiligne armée ; le type, l’emplacement et même le nombre de
ballonnets (distal pour la VM sans fuite et /ou proximal pour limiter les fuites au niveau de l’orifice
de trachéotomie).
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Le suivi au long cours est également primor-
dial. Il repose sur la gestion du retour à domicile,
l’éducation du patient, la fréquence, le rôle des
contrôles et l’entretien de la canule. Il faut notam-
ment veiller aux moyens de fixation, à la bonne
utilisation des compresses de trachéotomie, à une
réalisation correcte des soins locaux, respecter la
fréquence des changements et le renouvellement à
domicile. Les incidents et complications éventuel-
les sont de plus en plus rares et peuvent être pré-
venues par une surveillance endoscopique régu-
lière et au moindre signe d’appel. Il s’agit essen-
tiellement de la décanulation accidentelle avec
une fermeture partielle de l’orifice, de douleurs,
d’hémoptysies, l’apparition d’un granulome, l’
obstruction de la canule, intolérance au matériau,
colonisation par des bactéries, inflammation cuta-
née péri-orificielle, pathologie d’inhalation, voire
sténose trachéale.
Si toutes les conditions sont réunies le sevrage de
la trachéotomie peut s’envisager en différentes
étapes : d’abord sevrage partiel ou total de la VM
et en VS canule fermée par valve mobile ou bou-
chon (il n’est pas admissible de maintenir la canu-
le ouverte), puis modification de la canule qui de-
vient plus courte, (dite « laryngée ») arrivant à la
limite de l’orifice laryngé et éventuellement dimi-
nution du calibre tout en maintenant l’étanchéité
au niveau de l’orifice de trachéotomie. Ensuite au
cours d’une endoscopie bronchique, on adaptera
un « bouton de trachéotomie » , permettant de ré-
aliser un bilan complet (explorations fonctionnel-
les respiratoires, test de marche, SaO2 nocturne ou
mieux polygraphie ventilatoire…).
Enfin en toute objectivité on pourra décider du
retrait de la canule avec relais par une ventila-
tion non invasive en maintenant le bouton ou
du maintien de la canule de trachéotomie
V : La trachéotomie en 2010 : Choix des indica-
tions et résultats des différentes Etudes
(Pr. Jean Francois MUIR, Hôpital de Bois Guil-
laume, Rouen).
La trachéotomie est actuellement utilisée
essentiellement dans la prise en charge d’une
insuffisance respiratoire aigue (IRA) et dans le
traitement au long cours d’une insuffisance res-
piratoire chronique (IRC). Depuis que la ventila-
tion non invasive (VNI) est pratiquée, la tra-
chéotomie est généralement proposée en cas
d’échec de la VNI.
A : La trachéotomie dans la prise en charge
d’une IRA
Une étude réalisée par Esteban A et al. [8] mon-
tre qu’à travers différents pays, la ventilation
mécanique est délivrée, en unité de soins inten-
sifs, soit via un tube endotrachéal (75%), soit via
une trachéostomie (24%), soit via un masque
facial (1%) chez des patients en insuffisance res-
piratoire aigue (66%), en exacerbation de BPCO
(13%), dans le coma (10%) ou chez des patients
atteints de pathologies neuromusculaires (10%).
En théorie, la trachéotomie permet d’aug-
menter le confort du patient, d’augmenter sa
mobilité, de lui permettre de parler et de s’ali-
menter par la bouche, d’améliorer la mécanique
respiratoire (diminution des résistances des
voies aériennes et du travail respiratoire), de di-
minuer la fréquence des pneumopathies acquises
sous ventilation mécanique, d’accélérer le sevra-
ge et probablement d’augmenter l’efficacité des
aspirations. Ceci a été confirmé par différents
travaux de la littérature. En effet, des études ran-
domisées portant sur des patients polytraumati-
sés ont montré que la trachéotomie précoce
(entre 3 et 7 jours) permettait d’accélérer le se-
vrage et de diminuer de façon significative la du-
rée de la ventilation mécanique comparative-
ment à la trachéotomie tardive (> 7 jours) [9-11].
Ces trois mêmes études ont également montré
que les risques relatifs de pneumopathies acqui-
ses sous ventilation mécanique étaient de 56%,
78% et 49% avec la trachéotomie précoce alors
qu’ils étaient respectivement de 53%, 96% et 57%
avec la trachéotomie tardive.
La ventilation non invasive peut –elle être pro-
posée en alternative à la trachéotomie ?
A ce sujet, l’étude multicentrique randomi-
sée de Nava S et al. [12] a mis en évidence que la
VNI augmentait de façon significative la proba-
bilité de sevrage (88% vs 68%) et la survie des
patients à 60 jours (92% vs 72%), diminuait la
durée de séjour en unité de soins intensifs (10,2
jours vs 16,6) et les risques de pneumopathies
nosocomiales, comparativement à la ventilation
mécanique (1/25 vs 7/25) chez des patients
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BPCO exacerbés. Ces résultats ont été confirmés
l’année suivante par l’étude randomisée de Gi-
rault C et al. [13].
Alors, pour qui et quand faut-il envisager une tra-
chéotomie ? La conférence de consensus de la
SRLF, en 2001, a indiqué que la trachéotomie de-
vait être envisagée pour des patients avec trou-
bles de la déglutition, des patients comateux, ou
ceux présentant une obstruction des voies aé-
riennes supérieures, des critères de réintubation
difficile, ou des patients « insevrables » du respi-
rateur (> 30 jours). Il faut également prendre en
compte l’existence d’une IRC sous jacente.
Concernant l’aspect temporel, on peut probable-
ment se baser sur une approche anticipatoire
(mais pas de critères prédictifs de la durée de
ventilation invasive) ou sur la notion de ventila-
tion prolongée (> 30 jours). Toutefois, le Pr. J.F.
Muir a rappelé que l’on pouvait s’abstenir de la
trachéotomie dans le cas de certaines insuffisan-
ces respiratoires chroniques responsables d’une
insuffisance respiratoire aigue (fibrose pulmo-
naire évoluée, dilatation des bronches, maladie
neuro-musculaire rapidement progressive de
type SLA), ou chez des sujets âgés, ou immuno-
déprimés ou en cas de refus du patient ou de sa
famille, ou enfin dans le cadre d’un environne-
ment social déficient au sortir de l’hospitalisa-
tion (pas de structure d’accueil). Les données de
l’Observatoire de la Fédération ANTADIR
confirment la diminution du nombre de patients
trachéotomisés à domicile qui est passé de 1068 à
700 entre 1995 et 2009.
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B : La trachéotomie dans le traitement au
long cours d’une IRC
Différentes études ont montré que l’espéran-
ce de vie dans l’insuffisance respiratoire était amé-
liorée après une trachéotomie, quelle que soit la
pathologie chronique : cyphoscoliose, myopathie
de Duchenne, postpolio, séquelles de tuberculose,
sclérose latérale amyotrophique. [14-16]. L’étude
Française du Pr JF Muir portant sur plus de 250
patients [17] a confirmé ces bénéfices de la ventila-
tion à domicile par trachéotomie, notamment chez
les patients BPCO sévères. Concernant la VNI,
McEvoy et al. [18] ont montré en 2009 que la VNI
associée à l’oxygénothérapie était significative-
ment plus efficace sur la survie à 5 ans des pa-
tients BPCO stables et sévères, que l’oxygénothé-
rapie isolée. Toutefois, ces bénéfices sur la survie
semblaient avoir un prix sur la qualité de vie des
patients. Dans une étude randomisée, Bourke et
al. [19] ont montré que la VNI améliorait de façon
significative la survie et la qualité de vie des pa-
tients atteints d’une sclérose latérale amyotrophi-
que (SLA) sans dysfonction bulbaire. En revanche,
chez les patients présentant une SLA avec une
dysfonction bulbaire, la VNI améliore les troubles
du sommeil mais n’améliore pas la survie compa-
rativement aux soins conventionnels.
La décanulation doit être envisagée d’un point
de vue clinique pour un patient peu ou pas sé-
crétant, sans granulome endotrachéal et capable
de déglutir et de passer en ventilation sponta-
née. Il faut que l’étiologie soit peu évolutive et à
prédominance restrictive. Enfin, le patient doit
être volontaire et entouré ; des essais de canule
bouchée doivent être probants (Algorithme du
Dr. Jesus Gonzalez). L’étude de J.R. Bach et al.
[20] portant sur 62 essais de décanulation chez
des patients IRC neuromusculaires, a montré
que la valeur du débit expiratoire de pointe
(DEP) était un critère déterminant de la réussite
de la décanulation. Ainsi, les patients présentant
un DEP < 160 l/min ont eu un échec de décanu-
lation (n= 15), les patients présentant un DEP
=160 l/min ont eu soit un échec (n= 2) soit une
réussite (n= 2), alors que ceux présentant un
DEP > 160 L/min ont eu une décanulation réus-
sie (n= 43).
La trachéotomie en 2010 chez les insuffisants
respiratoires chroniques graves doit concerner
des patients insevrables de la ventilation endo-
trachéale, des patients parvenus à l’extrême de
la VNI (24h/24), des patients pour qui la VNI
est impossible, inefficace ou contre-indiquée,
des patients avec des troubles de la déglutition ;
elle doit également se décider en fonction de l’é-
tiologie sous-jacente et du contexte d’aval. En-
fin, le choix d’une VNI ou d’une trachéotomie
peut aussi être influencé par les systèmes de
remboursement !
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VI : Particularités de la trachéotomie
chez l’enfant dans les maladies neuro-
musculaires et de l’enfant.
(Pr. Brigitte Estournet, Hôpital Raymond Poinca-
ré, Garches).
On constate que la trachéotomie est de
moins en moins pratiquée de nos jours. En effet,
l’utilisation de la ventilation non invasive (VNI) et
l’efficacité des appareils d’aide à la toux ont réduit
les indications de la trachéotomie chez l’enfant
comme chez l’adulte.
Le rapport de la conférence de consensus de
« the American College of Chest Physicians » [21]
stipule que les indications de la ventilation invasi-
ve concernent les patients ayant une indication de
VNI mais des problèmes tels qu’un encombre-
ment bronchique incontrôlable malgré l’utilisation
de moyens d’aide à la toux ou des troubles de la
déglutition avec des fausses routes chroniques et
des pneumonies à répétition ; les patients ayant
une insuffisance respiratoire symptomatique ne
tolérant pas ou n’étant pas améliorés par la VNI ;
les patients nécessitant une ventilation continue
(>20 heures) à cause d’une faiblesse extrême ou
d’une paralysie totale des muscles respiratoires ;
ou enfin les patients et soignants préférant la ven-
tilation invasive.
La trachéotomie peut être proposée même si la
VNI est efficace ; notamment quand la ventilation
est nécessaire la majorité du temps. On peut pro-
poser une ventilation buccale, mais il faut pouvoir
désencombrer le patient en urgence.
Le Pr. B. Estournet a analysé l’évolution des tra-
chéotomies réalisées dans son service en 30 ans.
Elle constate que le nombre annuel de trachéoto-
mies n’a pas changé (15 par an en 1973 ; 10 par
an en 1981, 14 par an en 1990 et 11 par an en
2002). De même, les pathologies concernées ont
peu changé entre 1973 et 2001, avec le même
nombre de patients atteints d’un syndrome de
détresse respiratoire aigue, tétraplégiques, pré-
sentant des maladies neuromusculaires, neuro-
logiques ou des patients dans le coma.
Quand la ventilation devient nécessaire, on es-
saie en première intention la ventilation non in-
vasive sauf si les troubles de la déglutition sont
importants, si l’encombrement trachéobronchi-
que domine le tableau clinique, s’il existe des
anomalies maxillo faciales empêchant une venti-
lation efficace, et/ou s’il existe des anomalies
pulmonaires obstructives avec oxygénodépen-
dance.
Les différents travaux de la littérature [22-24]
montrent que les principales causes sont les ma-
ladies chroniques nécessitant une assistance
ventilatoire (55% des cas) ou une obstruction
des voies respiratoires (45% des cas). Dans 70%
des cas, les patients ont moins de 3 ans ; voire
souvent moins de 1 an dans le cas d’une obs-
truction des voies respiratoires ou d’une ventila-
tion prolongée. La mortalité est de 10 à 30%
dans 0 à 4% des cas liée à la trachéotomie. Enfin,
la décanulation est réussie dans 30 à 70% des
cas, après 4 à 40 mois. Dans 25% des cas, les cau-
ses sont neurologiques (maladies neuromuscu-
laires et lésions du tronc cérébral),
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ou neuromusculaires avec des atteintes restricti-
ves telles que les pathologies sévères néonatales
ou précoces avec troubles de la déglutition, les
formes sévères du jeune enfant où le désencom-
brement est problématique, les formes progressi-
ves aboutissant à une dépendance respiratoire
majeure, les pathologies avec troubles de la déglu-
tition majeurs, telles les myasthénies congénitales
ou auto-immunes, ou encore l’insuffisance respi-
ratoire chronique telles les malformations costo-
vertébrales et les traitements orthopédiques
lourds. Chez le petit enfant où l’utilisation de la
VNI est difficile, certains traitements par plâtres et
halo justifient la mise en place préalable d’une tra-
chéotomie. De plus, l’arthrodèse vertébrale
peut être faite quelle que soit la capacité vitale
mais, dans la période post opératoire, une ventila-
tion invasive est nécessaire jusqu’au retour de la
capacité vitale antérieure : précisons que la tra-
chéotomie n’est pratiquement jamais faite si elle
n’a pas été programmée en préopératoire.
Concernant la technique de trachéotomie par voie
chirurgicale ou tanscutanée, il existe peu de don-
nées dans la littérature pour l’enfant. Par voie
chirurgicale sans résection du mur trachéal ; des
fils d’attente doivent être passés dans le mur tra-
chéal pour permettre une recanulation facile les
premiers jours. Chez l’adulte, la voie percutanée
paraît plus sure mais dépend de l’expérience des
équipes [25].
Les conditions de la réussite de la trachéotomie
sont basées sur un dialogue préalable avec la
famille et l’enfant, le bon choix d’une canule
adaptée à chaque patient (morphologie, âge, dé-
pendance, esthétique), un matériel complet réglé
en milieu hospitalier, l’éducation de la famille
avant le retour à domicile, un retour envisagé
seulement si l’enfant est stable et pas trop jeune.
Comment choisir la canule de trachéoto-
mie ? Le Pr. B. Estournet a expliqué que s’il exis-
te des fausses routes itératives, il faut utiliser
une canule non fenêtrée et à ballonnet. Toute-
fois, le ballonnet ne permet pas d’empêcher
complètement les fausses routes. C’est pour-
quoi, des canules sans ballonnet sont souvent
utilisées, associées à une gastrostomie, un traite-
ment antireflux et des patchs de Scopoderm.
Dans les autres cas, il est préférable d’utiliser
une canule sans ballonnet permettant les fuites,
associée à une valve de phonation ou une canule
fenêtrée. Il faut aussi garder à l’esprit que la ca-
nule idéale n’existe pas !
Elle devrait être : assez souple pour se mouler
sur la courbure trachéale, faite d’un matériau
causant le minimum de réaction tissulaire, être
disponible en plusieurs tailles et longueurs et
avoir un tube interne amovible pouvant être
nettoyé. En pratique, la position de la canule
dans la trachée doit être vérifiée en position as-
sise et couchée soit par radio ou fibroscopie. De
même, il faut régulièrement vérifier l’absence de
complication par fibroscopie : granulomes sus
stomie, intra-trachéaux ou lésions ulcèrantes au
bec de la canule ou sténose.
Page 15 FLASH INFO
Les recommandations de la conférence de
consensus précisent que si une ventilation invasi-
ve est nécessaire, il faut préférer un mode de ven-
tilation volumétrique en mode assisté contrôlé.
Les modes barométriques de type BPAP nécessi-
tent des évaluations complémentaires. De plus, il
est recommandé de fournir aux patients des
moyens de ventilation avec batteries pour favori-
ser leur mobilité. Enfin, une humidification par
réservoir d’eau chauffée doit être préférée aux fil-
tres.
Concernant le matériel, le Pr. B. Estournet rappel-
le qu’il s’est nettement amélioré. Toutefois, le pro-
blème d’un autre ventilateur sur le lieu de scolari-
té se pose encore pour l’enfant. De l’enfance à l’â-
ge adulte, chaque âge pose des problèmes diffé-
rents du fait des causes de la dépendance ventila-
toire mais surtout de l’environnement social.
Concernant les nourrissons, c’est la période à ris-
ques où la morbidité et la mortalité sont les plus
hautes. En effet, le risque de décanulation et de
débranchement du ventilateur est très élevé chez
les bébés peu paralysés (2%), ils sont souvent ins-
tables avec reflux gastro-oesophagien, vagotonie,
bronchospasmes (Syndromes myasthéniques
congénitaux) et une surveillance particulière à la
maison (SpO2) est nécessaire car les alarmes des
ventilateurs sont souvent insuffisantes.
Chez les jeunes enfants, la trachéotomie peut
avoir des répercussions sur le langage : une tra-
chéotomie précoce retarde l’acquisition de la pa-
role. Cependant, si les enfants ont une canule sans
ballonnet, un langage normal apparaît vers l’âge
de trois ans quand l’enfant peut coordonner les
mots avec l’insufflation du ventilateur. Dans le
cadre de l’utilisation d’une canule à ballonnet, il
faut proposer dès que possible une synthèse vo-
cale.
Chez le nourrisson, l’évolution est souvent fa-
vorable et permet une décanulation ultérieure.
Chez les enfants, les principales causes de tra-
chéotomie sont neurologiques. Ils sont souvent
stables et faciles à ventiler, les complications
sont rares (obstructive, granulation...) mais la
dépendance respiratoire en France gène souvent
la scolarité puisque peu d’assistants scolaires
sont spécifiquement formés pour les prendre en
charge. L’adolescence est l’âge le plus difficile
pour accepter la ventilation qui signe souvent
l’aggravation de la maladie et accroît le senti-
ment de dépendance.
De l’encombrement ou de la trachéotomie, qui
est la poule et qui est l’œuf ? A l’époque de la
VNI, de l’assistant à la toux et du percussionai-
re, seuls les patient totalement dépendants ou
chroniquement encombrés sont trachéotomisés !
La trachéotomie dans le cadre d’un encombre-
ment bronchique nécessite un interrogatoire cli-
nique soigneux. Le praticien doit déterminer si
l’encombrement existait avant la trachéotomie,
sa période de survenue (nuit, au fauteuil, après
une infection…) ainsi que le type de sécrétions
(claires, purulentes, bouchons etc...). Il faut aussi
réaliser un bilan complémentaire en fonction de
l’orientation diagnostique (radio du thorax, bi-
lan ORL, fibroscopie avec ou sans canule, bilan
digestif, bilan d’atopie) et étudier la canule.
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En présence de stase salivaire et de trou-
bles de la déglutition, l’encombrement est clair et
permanent, souvent sus canulaire. Le diagnostic
clinique repose sur les troubles de la déglutition et
la réalisation d’une fibroscopie via le trachéosto-
me sans canule. Le traitement se fait par Patch de
Scopoderm, par le choix de la bonne canule
(petite, souple et bien placée) ou discussion de la
possibilité d’une canule avec ballonnet.
L’encombrement respiratoire nécessitant une tra-
chéotomie peut être d’origine ORL : telles les in-
fections ORL hautes (sinusites), basses
(végétations adénoïdes hypertrophiques ou hy-
pertrophies amygdaliennes). Dans ce cadre, il faut
envisager un bilan ORL complet et traiter la cause.
Une autre cause possible est l’existence d’une in-
flammation trachéale, d’origine allergique
(recherche d’un terrain atopique, analyse de la
périodicité des encombrements et traitement par
antihistaminiques, corticoïdes inhalés ou salbuta-
mol) ou post-infectieux (fréquent après certaines
viroses, pouvant durer plusieurs semaines, amé-
lioré par les corticoïdes oraux). Les foyers de fi-
brose organisés avec dilatation des bronches sont,
de même, des sources d’infections chroniques (sur
atélectasies infectieuses non diagnostiquées, sur
compressions bronchiques par le rachis). La prise
en charge repose sur la prévention par le traite-
ment des atélectasies (Percussionaire, fibroscopie)
et des lordoses. Il faut aussi traiter la rétention pu-
rulente chronique par antibiotiques alternés, Per-
cussionnaire quotidien ou drainage et, enfin, dis-
cuter d’une chirurgie après évaluation pluridisci-
plinaire.
Le reflux gastro-oesophagien est aussi très fré-
quent et doit être évoqué devant des encombre-
ments nocturnes brutaux. Le bilan repose sur
une évaluation clinique avec une pHmétrie et
une fibroscopie. Le traitement est classique avec
Motilium, Prépulsid et Débridat ou Urécholine.
Dans le cas d’une majoration sous traitement, il
faut faire une manométrie oesophagienne pour
éliminer une achalasie et un méga œsophage.
Une mauvaise canule peut être une cause d’en-
combrement bronchique, notamment en raison
de sa forme, du matériau et des produits de net-
toyage ou décontamination de la canule. Il faut
vérifier la place de la canule par radio et/ou fi-
broscopie transcanulaire. Ne pas oublier de
choisir le modèle de canule le plus adapté, par-
mi les nombreux modèles proposés. Le Pr. B.
Estournet précise que l’encombrement bronchi-
que n’est pas une fatalité ; il faut en chercher la
cause. On peut le plus souvent améliorer la si-
tuation… mais pas toujours.
Quels impacts de la trachéotomie sur l’enfant,
ses parents ? Une étude [26], réalisée auprès de
26 parents dont 7 d’enfants décanulés, à Lon-
dres, a rapporté des effets négatifs sur tous les
aspects étudiés : sommeil, relations, vie sociale
et possibilité de travailler. Les auteurs insistent
sur la nécessité d’une meilleure préparation pré-
opératoire et d’un meilleur soutien pour de tel-
les familles.
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Les études sur la qualité de vie des parents d’enfants trachéotomisés montrent dans tous les
pays que les parents passent en moyenne 8 heures par jour à effectuer des soins. Leur responsabilité
est décrite comme stressante et parfois écrasante.
Ils recherchent la normalité mais rapportent un sentiment profond d’isolement et sont blessés par les
réactions qu’ils rencontrent dans leur environnement quotidien. Cependant, ils disent aussi
« ressentir des choses positives » [27;28]. Une étude prospective s’est intéressée à la qualité de vie
chez des patients Duchenne ventilés au long cours [2]. Au total, 52 patients, d’âge moyen 25 ans +/-5
dont 16 en VNI et 36 avec trachéotomie ont été inclus.
Les résultats montrent que la qualité de vie ne dépend pas du type de ventilation. Leur indice de qua-
lité de vie est aussi bon que celui des étudiants sans problèmes, du même âge. En revanche, leur plus
grand problème est en rapport avec leur vie sexuelle (70%) et leur état physique (40 %). Toutefois, ces
patients passent plus de la moitié de leur temps avec des pensées positives (92%).
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Références bibliographiques :
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L’aspiration endo-trachéale permet de libérer les voies respiratoires d’une personne trachéotomisée, lors d’un encombrement. Plus ou moins fréquentes par nycthémère, ces aspirations ne sont pas plani-fiées ; elles doivent toujours être effectuées rapide-ment, dans des conditions d’asepsie rigoureuse et de façon atraumatique. Au cours de cet atelier, trois points ont été abordés : le matériel (sondes, aspirateurs de mucosités), l’as-piration du patient et l’entretien du matériel.
Le matériel : Trois types de sondes, de longueur variant entre 30 et
50 cm, sont disponibles sur le marché : sondes extra sou-ples en latex, sondes souples ou rigides en silicone, PVC ou polyuréthane. Le choix d’une sonde est fonction de son diamètre (6 à 20 Ch) qui doit être adapté au diamètre in-terne de la canule. L’embout terminal peut être biseauté, avec un rebord arrondi ou avec un ou plusieurs œillets latéraux.
Selon la LPP, une personne trachéotomisée doit disposer à domicile d’un aspirateur sur secteur et d’un aspirateur sur batterie. Ce dernier sert de matériel de secours en cas de panne ; plus petit et maniable, il est pratique à empor-ter lors des déplacements. Un filtre anti reflux équipe certains aspirateurs, permet-tant d’éviter le passage d’eau dans la machine.
L’aspiration du patient : Tout d’abord, le patient doit être installé confortable-
ment, dans la mesure du possible en position demi assise de façon à dégager le cou. Le geste qui va être pratiqué doit lui être expliqué et dans le cas d’une assistance venti-latoire, il faut le prévenir que l’appareil va être débranché en fin d’inspiration ; en effet, il faut éviter de pratiquer l’aspiration au travers du raccord de ventilation, de façon à éviter tout risque infectieux.
Les étapes du geste d’aspiration sont décrites, en insis-tant tout particulièrement sur la longueur de la sonde à introduire ; elle doit être sensiblement équivalente à la longueur de la canule. Une sonde trop profondément in-troduite peut entraîner des lésions de la trachée et fait tousser le patient.
Lorsque l’on rencontre des difficultés pour introduire la sonde, il ne faut pas forcer ; cela signifie la présence d’un bouchon muqueux qui, en retirant la chemise interne, va être évacué.
Lorsque la canule ne possède pas de chemise interne et que le patient est en souffrance, il convient de faire un échange de canule. Dans tous les cas, il faut veiller à ne pas pousser le bouchon ; on peut instiller du sérum physiologique (environ 2 ml). Pour éviter la formation de bouchons, il faut fluidifier les sécrétions : il faut inci-ter le patient à beaucoup boire, humidifier la pièce et, sur prescription médicale, un humidificateur peut être placé sur le ventilateur ou mis à la disposition du pa-tient (nez artificiel, humidificateur ultrasonique).
La présence de sang dans les mucosités aspirées signifie, le plus souvent, un geste traumatique lors des aspira-tions précédentes mais nécessite une surveillance ac-crue voire, si saignement trop important, le recours à l’équipe médicale.
Dans le cas d’une aspiration non productive, il faut vérifier que l’aspirateur de mucosités est en état de fonctionnement, que le bouchon du bocal est bien fermé et qu’il n’y a pas de fuites au niveau du tuyau.
L’entretien du matériel : Après chaque aspiration, la sonde et le tuyau doivent
être largement rincés en faisant des aspirations d’eau. Si la prescription médicale indique une sonde par jour, la faire tremper dans une bouteille d’eau bouillie et re-froidie jusqu’à la prochaine utilisation. Il est précisé que la LPP ne stipule pas si l’on doit utiliser une sonde par aspiration ou une sonde par jour.
Tous les jours, le bocal des aspirations est vidé dans les toilettes puis lavé à l’eau savonneuse, rincé et séché. Dans le cas de bocaux à usage unique, il est interdit de les jeter dans une poubelle ordinaire ; un système de containers est mis en place au domicile du patient et ils sont collectés périodiquement par le prestataire de santé à domicile ou un sous-traitant.
Les tuyaux sont également nettoyés quotidiennement à l’eau tiède savonneuse. Avant de les remettre en place, il faut vérifier leur intégrité.
Lorsque l’aspirateur de mucosités est muni d’un filtre anti reflux, il faut surveiller la saturation de façon à maintenir une bonne dépression et le changer selon le besoin. A l’issue de cet atelier, les participants ont souhaité un document spécifique sur le déroulement du geste d’aspi-ration.
AAATELIERTELIERTELIER « Aspiration endo-trachéale : méthode, hygiène et utilisation
des consommables » Michèle Paget, Reims, et Gilbert Dragar - Fouquières-les-Lens
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Décret
VII : Les aspirations endo-trachéales : concordance entre la législation et la réalité du terrain en 2010 (Michèle Paget, Reims, et Gilbert Dragar - Fouquières-lez-Lens)
Dans un premier temps, les intervenants ont rappelé le cadre juridique concernant la pratique des aspirations endo-
trachéales. Le décret n° 99-427 du 27 mai 1999 stipule en particulier que « les aspirations endo-trachéales ne peuvent être
pratiquées … que sur prescription médicale …. par des personnes ayant validé une formation spécifique définie par arrê-
té du ministre chargé de la santé. »
L’arrêté du 27 mai 1999 précise la durée de formation (5 jours dont 2 pour l’enseignement théorique et 3 pour l’enseigne-
ment clinique et pratique), le mode opératoire (les Instituts de Formation en Soins Infirmiers -IFSI) en collaboration avec
les directeurs des soins ont en charge la formation des personnes aux aspirations endo-trachéales) et qu’une attestation
doit être délivrée au candidat par l’IFSI. Toujours dans cet arrêté, l’article 4 concerne les membres des familles des per-
sonnes trachéotomisées qui peuvent également être formées aux aspirations endo-trachéales, dans le service où est prise
en charge la personne trachéotomisée ; « le chef de service évalue les connaissances théoriques et cliniques des intéressés
et leur délivre en conséquence une attestation. »
En novembre 1999, la circulaire DPS/PS 3 n° 99-642 conforte le rôle des IFSI dans la formation mais indique que ces insti-
tuts « pourront faire appel le cas échéant à des intervenants extérieurs ».
Après ce rapide rappel des textes législatifs, les intervenants ont présenté le constat sur le terrain. Certes, la très grande
majorité des personnes trachéotomisées effectuent elles-mêmes les aspirations (environ 80% des personnes ne présentant
aucune atteinte neuromusculaire des membres supérieurs) et des familles formées effectuent également les aspirations
endo-trachéales. Cependant, des personnes trachéotomisées ne sachant pas s’aspirer et dont les familles ne sont pas for-
mées ne sont pas exception.
Concernant l’attestation délivrée par le chef de service aux membres des familles ayant suivi une formation dans le servi-
ce, elle n’est que très rarement rédigée. De même, dans la plupart des cas, il n’y a pas de prescription médicale au domici-
le pour les intervenants extérieurs pratiquant des aspirations endo-trachéales.
Les intervenants ont également souligné que, compte tenu de la prise en charge de plus en plus fréquente de ces person-
nes par des organismes de maintien à domicile (SSIAD, ADMR, ADAP …), les besoins de formation des personnels sont
croissants et que les IFSI peuvent difficilement voire pas du tout répondre aux demandes.
Pour pallier ces insuffisances et eu égard aux prestations générales relatives à la trachéotomie et définies dans la LPP,
deux questions sont posées : comment optimiser l’application du décret (multiplication des formations, délivrance de
l’attestation de formation par le chef de service). Quelle est la position des SARD vis-à-vis du décret ?
De la discussion qui a suivi cette présentation, il convient de retenir que l’implication des SARD dans les programmes de
formation, élaborés par les IFSI, est disparate d’une région à une autre : certains sont sollicités pour assurer la formation
théorique au sein des IFSI, d’autres non.
Au domicile, les infirmiers prestataires de santé à domicile ne sont pas légalement habilités à faire la formation aux aspi-
rations, tant auprès des personnes trachéotomisées que de leur entourage. Pourtant, de part leur diplôme, ils en ont la
compétence et, d’après la LPP, « conseil, éducation, fourniture de matériel et formation à leur utilisation » font partie de
leurs missions : comment éduquer sans effectuer le geste ?
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Une canule de trachéotomie est un tube courbe, avec un angle d’environ 110° à 130° dont une partie pénètre dans la trachée au travers de l’orifice de trachéotomie, et dont l’autre partie est extérieure. Elle doit être choisie selon la morphologie du sujet, c'est-à-dire selon :
- Le diamètre et longueur de la trachée : une canule trop étroite risque d’induire des résistances et être source de gêne lors des aspirations endo-trachéales. Une canule trop large risque de léser les parois tra-chéales et le change de canule peut être rendu plus dif-ficile. - La courbure et forme de la trachée : en effet, la forme de la canule doit respecter les éventuelles déviations trachéales comme en cas de cyphoscoliose par exemple.
Une canule doit donc être non gênante, centrée dans la trachée, et son extrémité à distance de la carène. La prescription médicale doit préciser la référence complè-te du modèle choisi et indiquer ainsi : Longueur, courbure, diamètre interne, diamètre externe, matériau, présence ou non d’une fenêtre, type de fenêtre, présence ou non d’un ballonnet, type de ballonnet, type de collerette. De nombreuses courbures sont disponibles (dénommées Hautant, Krishaber, Portmann).
La longueur de la canule est calculée de la collerette à l’extrémité de la canule. Certaines canules sont de lon-gueur fixe et d’autres, grâce à leur collerette réglable, permettent d’atteindre la longueur interne souhaitée. Le diamètre interne est référencé par la mesure « ID » et le diamètre externe par la mesure « OD ». Attention aux équivalences : à ce jour en effet, il n’existe pas de nomenclature commune pour les fabricants. Une canule dite « 8 » n’aura pas les mêmes caractéristiques de dia-mètre interne, externe et de longueur selon le fabricant, d’où l’importance d’une prescription médicale précisant la référence exacte du modèle choisi. Historiquement réalisées en argent, les matériaux des canules ont évolué. L’acrylique, certes rigide, est moins coûteux que l’argent et ses parois lisses permettent un bon drainage des sécrétions. L’utilisation du PVC a permis de concevoir des canules moins rigides, sa souplesse améliorant le confort du patient. Le silicone est un matériau non allergisant mais les bal-lonnets se révèlent souvent poreux. De nouveaux maté-riaux sont à l’étude, comme le téflon par exemple. Le moyen de fixation de la canule est un élément impor-tant pour le patient. Chez l’enfant, on préférera le cor-don noué, assurant un maintien efficace. Chez l’adulte, de nombreux modèles en mousse ou tissu avec crochets ou Velcro permettent un maintien fiable tout en amélio-rant le confort. La canule dite « externe » est celle en contact avec la paroi trachéale. La canule dite « interne » se glisse à l’intérieur de l’externe et permet différentes fonctions selon les besoins du patient (canule interne à collerette plate, canule interne parlante, canule interne avec rac-cord de ventilation). Les canules sans ballonnet sont utilisées pour les tra-chéotomies sans ventilation ou avec ventilation dite « à fuite », c’est-à-dire tolérant le passage d’un petit pour-centage d’air entre le corps de la canule et la trachée vers les voies aériennes supérieures. Les paramètres et alarmes de ventilation sont ajustés et validés dans ces circonstances. Chez l’enfant, les canules à ballonnet sont à proscrire car le ballonnet risque de déformer la paroi trachéale, encore en cours de croissance.
AAATELIERTELIERTELIER « Canules et soins de trachéotomie »
Valérie GAËREL, Suresnes, Marie-Thérèse DANIEL, Paris, et Isabelle DUPIRE - Fouquières-les-Lens
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Les canules avec ballonnet sont utilisées chez les patients plus particulièrement difficiles à ventiler. Le ballonnet gonflé, remplissant la lumière trachéale, empêche ainsi toute fuite vers les voies aériennes supérieures et garantit ainsi le volume insufflé par le respirateur. Le ballonnet n’est en aucun cas une sécurité de maintien en place de la canule. Dans certains cas, il peut être pres-crit de le gonfler pendant les repas, afin de minimiser les risques d’inondation bronchique lors de trouble de la dé-glutition et de fausse route. Le ballonnet à basse pression permet une meilleure répar-tition des pressions sur les muqueuses trachéales mais la proéminence du ballonnet dégonflé peut gêner lors du change de la canule. Le ballonnet à haute pression peut altérer la circulation sanguine dans le tissu trachéal par sa forte pression sur les muqueuses mais la mise en place de la canule est facili-tée grâce au ballonnet collabé sur le corps de la canule, une fois dégonflé. Quel que soit le modèle de ballonnet, il est important de ne pas trop le gonfler. La quantité d’air injectée doit être nécessaire et suffisante. En effet, le ballonnet doit assurer une bonne étanchéité et ne pas être traumatisant pour les parois de la trachée. Une petite astuce : faire parler le patient lorsque l’on gon-fle progressivement le ballonnet. Dès qu’il ne peut plus émettre de sons, noter alors la quantité d’air injectée qui correspond ainsi à un gonflage suffisant et sans excès. Pour les patients ventilés sous respirateur, lors du gonfla-ge progressif du ballonnet, stopper le gonflage lorsque le volume courant expiré égale le volume courant insufflé. Tout patient trachéotomisé peut parler. Différents dispo-sitifs peuvent aider et faciliter la phonation. Quel que soit le système utilisé (doigt, valve parlante, bouchon,..) l’air suit la filière normale pour remonter par les voies aérien-nes supérieures et donc vers les cordes vocales. Bien en-tendu, dégonfler le ballonnet le cas échéant. En cas de dif-ficulté de phonation, la canule peut être fenêtrée (orifice unique ou perforations multiples) afin de favoriser le pas-sage de l’air vers les cordes vocales et améliorer ainsi l’élo-cution. En supprimant les rôles du nez (humidificateur- filtre- réchauffeur), les sécrétions d’un patient trachéotomisé peuvent devenir sèches ou collantes. Les dispositifs appe-lés « nez artificiels », mis en place sur prescription, résol-vent ces problèmes en récupérant l’humidité naturelle-ment expirée et en la restituant à l’inspiration suivante. Il existe des moyens simples de fluidifier les sécrétions et de minimiser les risques de bouchons muqueux. Par exem-ple : apports hydriques suffisants, hygrométrie correcte de la pièce, humidificateur d’ambiance, appareil d’humidifi-cation par aérosol.
Afin d’éviter au maximum tout risque d’infection, il est impératif de maintenir l’orifice de trachéotomie très propre. Le soin d’orifice (soin non stérile) doit être réali-sé tous les jours, voire plusieurs fois par jour si le pa-tient est très sécrétant, avec une compresse imbibée de sérum physiologique ou d’eau bouillie puis assécher soigneusement par tamponnement avec une compresse afin d’éviter la macération, source d’altération cutanée et d’infection. Nettoyer également la canule interne le cas échéant. Renouveler la compresse ou la compresse hypoallergéni-que placée autour de la canule. Il est important de sur-veiller l’état cutané du pourtour de l’orifice afin de si-gnaler toute anomalie au médecin. Selon l’état des ber-ges de l’orifice (irritation, inflammation..) et sur pres-cription, appliquer avec une compresse un produit anti-septique. La périodicité du changement de la canule, définie par le prescripteur, varie en fonction du patient, de sa pa-thologie, de l’abondance des secrétions et du type de canule. Une fréquence de changement minimum d’une fois par semaine est recommandée, sauf cas particulier. Si présence d’une canule interne, celle-ci doit être net-toyée aussi souvent que nécessaire et au minimum deux fois par jour. Il est primordial de préparer tout le maté-riel et de vérifier son intégrité avant le change afin que le soin soit rapide pour éviter le rétrécissement de l’ori-fice trachéal. S’il s’agit d’une canule à ballonnet, véri-fier le bon état de celui-ci en le gonflant à l’aide d’une seringue. Bien le dégonfler ensuite, mais pas trop pour éviter les arêtes vives qui gêneront au passage de l’orifice tra-chéal. Le mandrin (canule interne avec extrémité en forme d’olive) facilite le passage de la canule par l’orifice tra-chéal lors du change de canule et se retire immédiate-ment après la pose. Le change de canule est très souvent un moment appré-hendé par le patient et son entourage. Le changement de canule est un geste de soin qui doit, au regard de la loi, être réalisé par des personnes qualifiées. Néanmoins, d’après la loi également, ce geste peut être confié à des personnes de l’entourage qui ont été formées lors de l’hospitalisation du patient. Quelle que soit la nature du soin, il est primordial de se laver les mains avant et après chaque soin. Dans le contexte du domicile, il ne s’agit pas d’un geste stérile mais d’un geste propre. Sauf en pédiatrie où les diamètres des canules sont très petits, les canules se nettoient et se réutilisent, à condi-tion d’être en bon état bien sûr.
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Laisser tremper la canule dans un récipient d’eau addi-tionnée de savon liquide neutre au maximum 10 minutes. Nettoyer l’intérieur et l’extérieur de la canule à l’aide d’un écouvillon de diamètre adapté. Rincer abondamment à l’eau courante. Sécher avec une compresse et stocker la canule dans une boîte hermétique réservée à cet usage, elle-même nettoyée régulièrement. Il est important de ne jamais dissocier un jeu de canule. L’étiquette de l’emballage initial et la date d’ouverture de la canule sont conservées dans cette boîte. La durée d’uti-lisation d’une canule est à compter à partir de la première ouverture de son emballage. Le numéro de lot inscrit sur l’emballage est à conserver afin de pouvoir le fournir en cas de défectuosité. La durée d’utilisation maximum après ouverture dépend du type de canule : se référer aux noti-ces des fabricants.
Par ailleurs, les patients trachéotomisés nécessitent
souvent des traitements type aérosolthérapie, oxygéno-
thérapie. Les appareils de nébulisation (pneumatiques
ou ultrasoniques) sont soit installés aux côtés du pa-
tient non ventilé et reliés à lui via un masque adapté
sur l’orifice de trachéotomie, soit insérés directement au
circuit de ventilation afin de permettre l’inhalation des
médicaments prescrits (fluidifiants, broncho-
dilatateurs, anti-inflammatoires, antibiotiques, anti-
fongiques …). Les générateurs d’aérosol pneumatiques
conviennent à tous les traitements sauf recommanda-
tions des laboratoires. Les générateurs d’aérosol ultra-
soniques ne sont pas compatibles avec les suspensions.
De même, l’oxygène est distribué au patient par bran-
chement direct, soit sur la trachéotomie via un disposi-
tif (valve de phonation et nez artificiel avec site O2)
muni d’un raccord à oxygène ou positionnement d’un
masque sur l’orifice de trachéotomie, soit sur le circuit
de ventilation (raccord intégré au ventilateur ou à
adapter au circuit de ventilation, ce qui évite de décon-
necter les circuits de ventilation des patients ventilés 24
heures sur 24).
A noter que les installations d’oxygène (liquide ou
concentrateur) et d’aérosols sont cumulables aussi bien
en ventilation artificielle qu’en respiration spontanée.
En plus de ces accessoires, il existe des valves de phona-
tion permettant au patient non ventilé de communi-
quer, malgré sa trachéotomie. Cette possibilité est égale-
ment offerte aux patients ventilés, malgré une ventila-
tion continue limitée chez les patients atteints de BPCO
et nécessitant des volumes respiratoires plus stricts que
chez les patients présentant une maladie neuro-
musculaire et pour lesquels la ventilation avec fuites est
possible. Le constat montre cependant que les pneumo-
logues experts en ce domaine manquent, autant que les
orthophonistes, pour des séances de rééducation phona-
toire. Malgré tout, ces dispositifs variés permettent aux
patients trachéotomisés d’assurer leur traitement et
l’entretien de leur trachéotomie, tout en poursuivant
leur vie sociale dans les meilleures conditions possibles,
avec l’aide de leur prestataire de santé.
Les intervenantes rappellent tout d’abord la prise en
charge LPP allouée au patient porteur d’une trachéoto-
mie et permettant une prestation complète : éducation
technique, fourniture de matériels (consommables et
appareils assurant l’humidification, les aides aux traite-
ments et la phonation), les prestations générales
(livraison, astreintes …).
L’humidification est indispensable, voire prioritaire,
pour éviter l’obstruction des voies respiratoires ; les
accessoires dédiés à l’humidification sont multiples et
utilisables tant pour les patients ventilés (nez artificiel,
filtre) que pour les patients respirant spontanément
(humidificateur, nez artificiel). A noter qu’un mar-
queur de saturation manque sur ces dispositifs ; il per-
mettrait d’indiquer la durée d’utilisation en cas de prise
en charge par plusieurs personnes. Actuellement, les
intervenants notent sur le matériel la date du change-
ment, à l’aide d’un feutre.
AAATELIERTELIERTELIER « Accessoires de la trachéotomie :
patient ventilé et non ventilé » Dr Hélène Prigent - Garches,
Henriette Letellier - Caen, Françoise Jeanne - Toulouse et Séverine Hermier - Rouen
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