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Je t'aime, je te tue

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D u m ê m e a u t e u r

AUX MÊMES ÉDITIONS

Siam, 1982.

La Dérive des continents, 1984.

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Morgan Sportes

J e t ' a i m e ,

j e t e t u e

Éditions du Seuil

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COLLECTION ANIMÉE PAR

CLAUDE DUNETON, NICOLE VIMARD ET EDMOND BLANC

ILLUSTRATIONS (p . 38, 60 , 80 , 102. 122. 142) :

K h a r b i n e - T a p a b o r .

EN COUVERTURE A n g e l o D i M a r c o .

ISBN 2-02-008656-5

© FÉVRIER 1985. ÉDITIONS DU SEUIL

La loi du 11 mars 1957 interdit les copies ou reproductions destinées a une utilisation collective. Toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle faite par quelque procédé que ce soit, sans le consentement de l'auteur ou de ses ayants cause, est illicite et constitue une contrefaçon sanctionnée par les articles 425 et suivants du Code pénal

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Au pied de la lettre

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AVERTISSEMENT

Toute ironie mise à part : ces articles sont des montages. Quiconque se reconnaîtrait dans les personnages de ces

drames ne devrait s'en prendre qu'à ses fantasmes.

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Elles arrachent les yeux comme châtraient les Bacchantes. La curiosité sacrilège qui fait l'angoisse de l'homme depuis le fond des âges, c'est elle qui les anime quand elles désirent leurs victimes, quand elles traquent dans leurs blessures ce que Christine plus tard, devant le juge, devait appeler dans son innocence « le mystère de la vie ».

Jacques Lacan, Le Crime des sœurs Papin.

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Il y a une légende dorée des saints, je voudrais écrire la légende écarlate des assassins.

Au champ d'horreur du meurtre, trop d'entre eux restent des héros inconnus. Pour une poignée de Jack l'Éventreur, de Vampire de Düsseldorf et de Landru, combien finissent leurs jours à croupir au fond d'un cachot, ou guillotinés à la va-vite, quand, bien plus grave, ils n'échappent pas tout simplement à la justice, donc à la gloire, rongeant leur frein dans un anonymat étriqué.

Il y a des Atrides, des Macbeth, des Raskolnikov qui se perdent ! Chourineurs de bas quartier, sadiques de ban- lieue, égorgeurs de parking souterrain auxquels les médias ne consacrent en général qu'une humble place et que dédaignent nos cinéastes et autres écrivains sans imagina- tion, cloîtrés dans leurs minables vaudevilles petits-bour- geois, quand, en d'autres temps, Shakespeare, Euripide, Edgar Poe, Racine, haussaient par leur art le crime à la seule place qui lui convienne : la première !

C'est une apologie du meurtre que nous voulons faire ici en exposant, dans les détails les plus crus et sans épargner la moindre goutte d'hémoglobine, la geste de ces artistes obscurs du 22 long rifle et du couteau de cuisine.

Mais il ne s'agit pas de mélanger les torchons et les ser- viettes. Nous éliminons dès l'abord le crime crapuleux et le crime politique qui tentent de se justifier l'un par la cupi- dité, l'autre par je ne sais quelles idéologies délirantes.

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C'est l'assassinat à l'état pur, individuel et passionnel, sinon pulsionnel, auquel nous nous consacrerons.

En ces temps d'industrialisation du crime et de boucherie collective, je ne pense pas qu'il faille voir de notre part un réflexe poujadiste dans cette volonté de défendre le petit boucher de quartier, celui qui met la main à la pâte, qui ne dédaigne pas de s'ensanglanter les doigts : l'artisan, sinon l'artiste !

Il est significatif que les grands patrons des multinatio- nales du massacre aient toujours éprouvé à l'égard de leurs humbles concurrents une méfiance, sinon une haine, pro- fonde : se manifestant entre autres par le muselage de la presse de faits divers : en Union soviétique notamment.

Mais à l'ombre des paradis terrestres totalitaires et de leurs prosaïques chambres à gaz, rampent et se faufilent les silhouettes furtives des étrangleurs de la nuit, de ces dissidents trop humains : M. le Maudit et le cri de ses bienheureuses victimes hanteront toujours le cauchemar des Hitler et des Staline.

Sans compter la police, les juges, les matons et tant d'autres empêcheurs d'étrangler en rond, il existe un obstacle de taille à l'épanouissement du crime dans notre nation : les victimes elles-mêmes qui, la plupart du temps, se rebellent, griffent le violeur ou chourineur, lui décochent des coups de pied au bas-ventre, quand elles ne l'assom- ment pas tout bêtement, l'empêchant de mener à terme sa tâche.

A cet égard sans doute faudra-t-il éduquer les gens dès l'école, où l'on enseignera aux enfants à respecter le criminel qui, on s'en rendra peut-être compte un jour — plaise à Dieu que ce ne soit pas trop tard ! —, est aussi utile à nos sociétés qu'au système écologique la mante religieuse ou la scorpionne languedocienne, toutes deux conjointici- des ! On pourrait organiser par exemple, dans les prisons, des visites d'écoliers qui apporteraient des fleurs aux

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meurtriers. Tout un travail de réhabilitation est à entre- prendre. Le ministre de la Justice est le premier concerné en cette affaire.

Sans victime, pas de crime possible ! Quel serait alors le destin de l'assassin ? Faudrait-il qu'il se rabatte sur le vol à la tire ?

Quelle perte ! Comment ne pas comprendre que ce père ivrogne

égorgeant à coups de tesson de bouteille sa fille effarée répète sans le savoir le geste hiératique et sublime d'Abra- ham ou d'Agamemnon sacrifiant leur progéniture. Et ce garçon criblant de chevrotines la poitrine de son frère qui a levé sa petite amie n'est-il pas le digne descendant de notre ancêtre Caïn ? Cette épouse adultère réglant son compte à son homme d'affaires de mari de retour de voyage ne vaut-elle pas la sanguinaire Clytemnestre ?

Ces deux sœurs vivant pendant des décennies avec le corps momifié de leur mère trucidée, enfermées, comme dans l'ombre d'une pyramide, à l'intérieur de leur maison isolée ; ce sadique éventrant des jeunes filles comme la prêtresse aztèque ses victimes : ne nous ressourcent-ils pas au monde des archétypes, au fond des ténèbres de l'incons- cient humain ?

Alors, pourquoi punir le crime ? Et comment savoir si ce sang épargné ne va pas manquer à la prochaine renaissance du soleil ? S'il faut en croire la religion aztèque, le jour ne peut paraître sans qu'on lui sacrifie régulièrement de la chair fraîche.

C'est joyeux, c'est en chantant, comme les victimes propitiatoires de l'ancien Mexique, que nous devrions offrir à la lame du bourreau notre cou tendre et notre poitrine frémissante.

Le meurtre est une denrée rare : il faut le protéger. D'autant qu'à cet égard, si la courbe devait s'en affaisser dans notre pays, nous pourrions fort bien subir une dangereuse concurrence de la part de l'étranger.

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Un membre du parti communiste hurlait récemment : « Produisons français ! »

Je me permettrai d'affirmer catégoriquement : Tuons français !

C'est dans cet esprit nationaliste que nous avons choisi de consacrer cet ouvrage avant tout au crime de notre terroir. Cependant, pour ne pas être taxés de chauvinisme ou de racisme, nous avons exposé une affaire étrangère : une histoire belge !

Par souci pédagogique, nous avons refusé le « sensation- nalisme », nous consacrant avant tout à des crimes très simples, familiaux, « le mien », « le vôtre », ou à ceux du moins dont nous pourrions être les protagonistes actifs ou passifs : les meurtres trop extraordinaires ne peuvent que décourager le public, le convaincre de son impuissance à se hisser au niveau des assassins de génie...

Les préjugés que l'on sait régnant contre le crime, nous avons dû, la plupart du temps, brouiller les pistes, changer le nom des victimes et « coupables » dont nous avons retracé le cas. Lieux et professions sont aussi quelquefois maquillés.

Comme on coupe du vin du Languedoc avec du mascara, nous avons procédé à la synthèse de plusieurs faits divers, afin de leur donner plus de bouquet.

Au demeurant, les meurtres que nous livrons ici à l'état brut sont aussi authentiques que le plus pur des rubis.

Sans doute ce petit livre ne représente-t-il qu'une goutte de sang minuscule vis-à-vis de l'immensité du problème qu'il aborde. Mais peut-être aura-t-il pour effet de faire déborder le vase de notre indifférence, de réveiller en nous l'assassin qui somnole, de convaincre la victime encore réticente et de mettre en valeur un peu plus cette maxime qui devrait être gravée au fronton de tous les monuments : Tuons-nous les uns les autres !

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De jeunes cendrillons rêvant d'être princesses et qu'on retrouve, un triste soir, égorgées dans un bas-fond, il en existe à profusion dans la vie, mais de moins en moins dans les romans et les films. Le drame psychologique petit- bourgeois déteste qu'on se teigne les doigts du « rouge prolétarien » de l'hémoglobine. Ci-après une histoire comme on en racontait dans les années trente, mais avec son petit parfum d'actualité :

Le cadavre du canal Saint-Martin

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intrusion inadmissible (au même titre que des impôts exagérés) du secteur public dans la vie privée des gens ; de l'État dans la société civile.

La défense de la démocratie passe par la défense des assassins : du crime civil contre le crime d'État.

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APPENDICE STATISTIQUE

Comme quoi il ne faut pas désespérer

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De récentes statistiques (1982) témoignent d'une bonne tenue du crime en Occident

En France, on a relevé 2 273 homicides volontaires (ou tentati- ves d'homicide) en 1982, soit plus de six par jour et, par rapport à la population globale, un taux de 0,04 pour mille.

Cependant, comparé avec celui de nos voisins, notre score n'est guère brillant.

Dans un échantillon de quatorze grandes puissances choisies par le ministère de l'Intérieur (tableau 1), nous n'occupons que la sixième place en valeur relative, derrière les Pays-Bas (0,11 pour mille), les États-Unis (0,10), le Danemark (0,06), le Canada (0,06), l'Allemagne (0,05), mais devant la Belgique, l'Italie, l'Angleterre, l'Autriche, Israël, le Japon, la Suède et l'Espagne.

Pour ce qui est des grandes capitales, notre place n'est pas non plus très fameuse (tableau 2).

Paris, avec 208 crimes en 1982, n'est qu'en sixième place en valeur relative (0,10 pour mille) derrière Los Angeles, Chicago, Amsterdam, New York, Stockholm, mais devant Francfort, Munich, Hambourg, Bruxelles, Londres, Tokyo et Copenha- gue.

Cependant, dans notre pays, les homicides et tentatives d'homi- cide tendent à progresser (tableau 3).

Pour les homidices non crapuleux, on a assisté à une hausse de 97,37 % de 1972 à 1982 (contre 48,68 % pour les crimes crapu- leux).

1 Aspects de la criminalité en France en 1982, Paris, la Documentation française, 1984.

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Tableau 1

Tableau 2

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Tableau 3

Pour ce qui est des homicides non liés au profit (voir schéma page suivante) — ceux donc qui nous intéressent particulière- ment —, on constate qu'ils constituent la majorité (82,67 % en 1982) des meurtres commis dans notre pays.

On les ventile de cette façon : 32,54 % sont dus à la vengeance ou divers différends, 12,95 % sont de type passionnel, 6,16 % sont dus à l'alcoolisme, 4,36 % sont dus à la démence, 2,21 % sont des crimes sexuels, 0,83 % ont un mobile racial ou politique,

40,93 % ont un mobile ignoré. Il est intéressant de noter les moyens utilisés par les crimi-

nels : 56,61 % des cas, l'arme à feu (35,23 % en 1981), 28,20 % des cas, l'arme blanche (17,23 % en 1981).

4,56 % des cas, la strangulation (2,74 % en 1981). 10,63 % des cas : divers (13,32 % en 1981). Le criminel a une certaine prédilection pour le 22 long rifle. Notons que, chaque année, un certain nombre de cadavres sont

découverts en état de décomposition avancée ou à l'état de sque- lette : 107 cadavres en 1982. La PJ n'a pu en identifier que 13 !

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LES HOMICIDES VOLONTAIRES

Géographie du crime

La région parisienne est à la tête du crime dans notre pays. En 1982, elle a totalisé 31,16% des homicides volontaires, devant Lyon + région ( 10,49 %), Marseille + région ( 10,37 %) et Lille + région (9,48 %

En lanterne rouge, Limoges et Clermont-Ferrand, avec respec- tivement 0,71 % et 0,77 %.

Les cartes ci-après donnent un tableau global de la criminalité par région :

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LA CRIMINALITÉ MOYENNE (selon le nombre de faits)

Par criminalité moyenne, on entend: cambriolages et vols assimilés, utilisation de fausse monnaie et faux moyens de paiement, faux documents d'identité, faux documents circulation des véhicules, faux en écritures publiques et privées, banqueroutes, délits de sociétés, délits d'agents d'affaires, délits d'officiers ministériels, fraudes fiscales, homicides non crapuleux, empoisonnements, infanticides, coups et blessures volontaires suivis de mort, coups et blessures volontaires suivis d'incapacité de plus de huit jours, mauvais traitements à enfants, prises d'otages non crapuleuses, séquestrations de personnes, menaces de mort, viols, attentats à la pudeur, excitation de mineurs à la débauche, homosexualité avec mineur, incendies contre biens publics, attentats par explosifs contre biens publics, violences à dépositaires de l'autorité, ports d'arme prohibés, infractions contre l'organisation étatique, incendies contre biens privés, attentats par explosifs contre biens privés.

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LA CRIMINALITÉ GLOBALE (selon l'indice de gravité)

Par criminalité globale, on entend : les faits de délinquance + la criminalité moyenne + la grande criminalité qui se définit comme suit : homicides crapuleux, vols à main armée, vols avec autres violences, rapts, prises d'otages crapuleuses, racket, proxénétisme par souteneur, trafic de stupéfiants, fabrication de fausse monnaie et faux moyens de paiement, règlements de comptes.

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LA CRIMINALITÉ GLOBALE (selon le nombre de faits)

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Bref aperçu sociologique de la criminalité

Certains auront vu sans doute une forme de racisme social dans le fait que nous avons choisi nos crimes avant tout en milieu populaire.

Aucune arrière-pensée là-dedans. Les statistiques sont formelles à cet égard : les bourgeois ne

savent plus tuer ! Qui aime bien châtie bien. Qui est incapable d'assassiner n'est

pas capable d'aimer. Stendhal ironisait déjà sur le manque d'énergie et la nullité

sentimentale des aristocrates et bourgeois de son époque. « Pour trouver l'amour à Paris, écrit-il, il faut descendre

jusqu'aux classes dans lesquelles l'absence d'éducation et de la vanité et la lutte avec les vrais besoins ont laissé plus d'éner- gie. »

Il ajoute par ailleurs : « Un Français qui connaissait bien son pays (Meilhan) dit : " En

France les grandes passions sont aussi rares que les grands hommes. " »

Au Français qui ne veut « s'émouvoir de rien » et à l'Anglais qui prétend « s'ennuyer de tout », Stendhal oppose la passion ita- lienne ou espagnole (surtout chez les hommes du XVI siècle). Passion qui s'enflamme d'un coup de foudre et s'achève, le plus souvent, à coups de poignard.

Citons ce beau tableau de mœurs tiré des Chroniques italien- nes :

LA DUCHESSE DE PALLIANO

PROTAGONISTES : Le cocu : duc de Palliano. La femme adultère : la duchesse de Palliano. L'amant : Marcel Capece. L'entremetteuse puis dénonciatrice des amants: Diane Brancaccio.

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Le duc torture depuis des heures Marcel Capece soumis à l'estrapade.

Capece avoue sa liaison avec la duchesse : « Le duc se jeta alors sur Marcel et le mordit à la joue... puis il lui

donna trois coups de poignard qui lui ôtèrent la vie... Diane Brancaccio (l'entremetteuse) était là, à trois pas, plus morte que vive, et qui, sans doute, se repentait mille et mille fois de ce qu'elle avait fait.

— Femme indigne d'être née d'une noble famille ! s'écria le duc, et cause unique de mon déshonneur... Il faut que je te donne la récompense de toutes tes trahisons.

En disant ces paroles, il la prit par les cheveux et lui scia le cou avec un couteau. Cette malheureuse répandit un déluge de sang et enfin tomba morte.

Le duc fit jeter les deux cadavres dans un cloaque voisin de la prison. »

Et voici comment mourut la duchesse, des mains du comte d'Aliffe, chargé par le duc de l'exécuter :

« Après la messe où elle avait reçu dévotement la sainte communion, et tandis que nous la confortions, le comte d'Aliffe, frère de madame la duchesse, entra dans la chambre avec une corde et une baguette de coudrier grosse comme le pouce et qui pouvait avoir une demi-aune de longueur. Il couvrit les yeux de la duchesse d'un mouchoir, et elle, d'un grand sang-froid, le faisait descendre davantage sur ses yeux, pour ne pas le voir. Le comte lui mit la corde au cou ; mais, comme elle n'allait pas bien, le comte la lui ôta et s'éloigna de quelques pas ; la duchesse, l'entendant marcher, s'ôta le mouchoir de dessus les yeux et dit :

— Eh bien donc ! que faisons-nous ? Le comte répondit : — La corde n'allait pas bien, je vais en prendre une autre pour

ne pas vous faire souffrir. Disant ces paroles, il sortit ; peu après il rentra dans la chambre

avec une autre corde, il lui arrangea de nouveau le mouchoir sur les yeux, il lui remit la corde au cou et, faisant pénétrer la baguette dans le nœud, il la fit tourner et l'étrangla. La chose se passa, de la part de la duchesse, absolument sur le ton d'une conversation ordinaire. »

Quels hommes ! Quelles femmes !

Sang chaud, brûlant, au moment de l 'amour, de la colère, de la vengeance et du crime ; mais sang-froid, maîtrise de soi, dignité quand il s'agit de recevoir le châtiment.

Sans doute la classe moyenne s'attirerait-elle aujourd'hui les

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mêmes foudres — et les mêmes lazzi — de la part de Stendhal, que jadis l'aristocratie décadente et la bourgeoisie louis-philipparde bedonnante.

Moyenne en tout, elle est — par définition — contre... les excès !

Après avoir difficilement digéré la révolution de mœurs des années soixante, elle vit maintenant, paisiblement et médiocre- ment, dans l'adultère et le concubinage.

Le vaudeville ne tourne plus au drame que dans le prolétariat ou le lumpen !

Du moins en grande partie. Encore une fois, c'est le « peuple » qui doit se salir les mains, les

tremper dans le sang : à lui seul désormais la tâche mystique de nous ressourcer — à travers la chronique des faits divers — au magma souterrain des grands mythes tragiques.

VIOLENCE ET CLASSE SOCIALE (taux de condamnation

pour 1 million, sexe masculin)

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Ce tableau est un véritable acte d'accusation contre les classes supérieures et moyennes (mis à part les petits commerçants).

Comment ! Parmi nos concitoyens qui ont eu la gloire d'être condamnés pour meurtre dans le superbe théâtre de la cour d'assises, on ne trouve que... 1,8 % de membres des professions libérales et de cadres moyens. Seulement 3,9 % de cadres moyens et 5,5 % de gros commerçants et d'industriels !

Et cependant, ceux qui mettent la main à la pâte et abattent le plus gros du travail, ce sont encore et toujours les manœuvres (43 %), les petits commerçants (31,7 %), les salariés agricoles (30,2 %), les ouvriers qualifiés (24,7 %) et les ouvriers spécialisés (19,9 %).

Drapé dans la toge dérisoire de son complet trois-pièces (sinon de son jean + tee-shirt), le petit bourgeois recule devant l'abîme ténébreux du crime.

L'industrie du meurtre risque aussi d'être un jour dans le rouge. A terme, ce sera la crise !

Il est plus que jamais temps de réagir. Assassins, encore un effort si vous voulez être républicains !