ischémie mésentérique : présentation clinique et réanimation

10
Le praticien en anesthésie-réanimation, 2005, 9, 1 23 MISE AU POINT Ischémie mésentérique : présentation clinique et réanimation Alain Leon (photo), Claire Lepousé, Thierry Floch L’ischémie mésentérique, décrite pour la première fois en 1847 par Vir- chow, est le plus souvent la conséquence d’une maladie athéro- mateuse généralisée, et dans sa forme aiguë une urgence vasculaire très souvent rapidement fatale. Le pronos- tic n’a guère évolué au cours du siè- cle dernier, et ceci en dépit de l’amélioration des connaissances phy- siopathologiques et étiologiques, et de l’évolution des moyens thérapeutiques. En effet, en fonction des séries publiées, la mortalité reste entre 60 et 80 %. L’absence de signes cliniques spécifiques et/ou le retard au diagnostic contribuent à cette situation. Il n’existe pas de moyen dia- gnostic fiable, et les techniques de monitorage du débit sanguin mésenté- rique et de la viabilité intestinale sont peu sensibles. Les symptômes et les signes sont uniquement suggestifs lorsque l’ischémie est devenue trans- murale et à ce stade irréversible. Cer- tains patients, souvent très âgés et aux antécédents médicaux multiples se présentent d’emblée avec un tableau évolué, voire dépassé. Le doute quant à l’issue et le fatalisme qui entoure trop souvent la prise en charge de ces patients, grève aussi le pronostic postopéra- toire immédiat. La stratégie thérapeutique a pour objectif principal la restauration du débit sanguin mésentérique et la prévention ou la limitation de la nécrose intestinale. Cependant, celle-ci est souvent difficile à mettre en œuvre dans un contexte qui doit être considéré comme une extrême urgence (1-3). L’ischémie mésentérique, concerne par définition, exclusi- vement l’intestin grêle. Cependant, dans certaines situa- tions : suites immédiates de chirurgie cardiaque et/ou vasculaire, suites d’état de choc hémorragique chez des sujets athéromateux, complication des états de choc cardio- géniques…, elle peut s’étendre dans sa forme aiguë au colon, voire à la totalité du tube digestif et devenir une ischémie intestinale aiguë (4). L’ischémie mésentérique aiguë (IMA) peut être d’origine occlusive et concerner la circulation artérielle ou veineuse mésentérique supérieure. Elle peut être secondaire à un bas débit cardiaque et tou- cher la microcirculation intestinale sans que l’on retrouve une occlusion des vaisseaux principaux. L’apparence clini- que, la stratégie thérapeutique et le pronostic sont condi- tionnés par l’étiologie. La mortalité est fortement liée à l’existence d’un infarctus mésentérique et les efforts à faire pour améliorer le pronostic doivent porter sur la rapidité du diagnostic (5). PRÉSENTATION CLINIQUE ET CONTEXTE ÉTIOLOGIQUE La plupart des signes cliniques et de la symptomatologie, décrits au cours de l’ischémie mésentérique sont retrou- vés au cours des grands syndromes abdominaux : périto- nite aiguë, syndrome occlusif, cholécystite aiguë, pancréatite aiguë hémorragique, hémo- péritoine ou poussée de sigmoïdite. La douleur est pratiquement constante ; contracture abdominale et silence abdominal sont présents, une fois sur deux de même que nausées et vomis- sements. La diarrhée, d’apparition brutale, quand elle existe est plus rare (2, 5). La description des événements cliniques per- met assez souvent d’orienter le contexte étiologique. En général, la brutalité de la symptomatologie caractérise l’ischémie mésentérique d’origine artérielle embolique ou thrombotique et la dégradation de la situation clinique est très rapide, alors que la symptomatologie de l’ischémie secondaire à un bas débit cardiaque ou de l’ischémie d’ori- gine veineuse est beaucoup plus insidieuse avec une dégradation de l’état clinique beaucoup plus progressive. L’embolie artérielle C’est la cause la plus fréquente d’IMA ; elle représente envi- ron 30 à 40 % des cas (6). L’origine de l’embolie est la plu- part du temps cardiaque. L’infarctus du myocarde, les troubles du rythme auriculaires, les cardiomyopathies, l’anévrysme myocardique, l’endocardite et les pathologies valvulaires sont des situations à risque pour le développe- ment de thrombus muraux qui peuvent se fragmenter et migrer secondairement. Environ un tiers des patients admis avec une IMA d’origine embolique ont des antécédents emboliques. L’embole est arrêté dans 15 % des cas à l’ori- gine de l’artère mésentérique supérieure, dans 50 % des cas Le retard au diagnostic d’ischémie mésentérique est la cause d’une mortalité importante.

Upload: thierry

Post on 30-Dec-2016

227 views

Category:

Documents


0 download

TRANSCRIPT

Page 1: Ischémie mésentérique : présentation clinique et réanimation

Le praticien en anesthésie-réanimation, 2005, 9, 1 23

M I S E A U P O I N T

Ischémie mésentérique : présentation clinique et réanimationAlain Leon (photo), Claire Lepousé, Thierry Floch

L’ischémie mésentérique, décritepour la première fois en 1847 par Vir-chow, est le plus souvent laconséquence d’une maladie athéro-mateuse généralisée, et dans sa formeaiguë une urgence vasculaire trèssouvent rapidement fatale. Le pronos-tic n’a guère évolué au cours du siè-cle dernier, et ceci en dépit del’amélioration des connaissances phy-

siopathologiques et étiologiques, et de l’évolution desmoyens thérapeutiques. En effet, en fonction des sériespubliées, la mortalité reste entre 60 et 80 %. L’absence designes cliniques spécifiques et/ou le retard au diagnosticcontribuent à cette situation. Il n’existe pas de moyen dia-gnostic fiable, et les techniques demonitorage du débit sanguin mésenté-rique et de la viabilité intestinale sontpeu sensibles. Les symptômes et lessignes sont uniquement suggestifslorsque l’ischémie est devenue trans-murale et à ce stade irréversible. Cer-tains patients, souvent très âgés et auxantécédents médicaux multiples se présentent d’embléeavec un tableau évolué, voire dépassé. Le doute quant àl’issue et le fatalisme qui entoure trop souvent la prise encharge de ces patients, grève aussi le pronostic postopéra-toire immédiat. La stratégie thérapeutique a pour objectifprincipal la restauration du débit sanguin mésentérique etla prévention ou la limitation de la nécrose intestinale.Cependant, celle-ci est souvent difficile à mettre en œuvredans un contexte qui doit être considéré comme uneextrême urgence (1-3).

L’ischémie mésentérique, concerne par définition, exclusi-vement l’intestin grêle. Cependant, dans certaines situa-tions : suites immédiates de chirurgie cardiaque et/ouvasculaire, suites d’état de choc hémorragique chez dessujets athéromateux, complication des états de choc cardio-géniques…, elle peut s’étendre dans sa forme aiguë aucolon, voire à la totalité du tube digestif et devenir uneischémie intestinale aiguë (4). L’ischémie mésentériqueaiguë (IMA) peut être d’origine occlusive et concerner lacirculation artérielle ou veineuse mésentérique supérieure.Elle peut être secondaire à un bas débit cardiaque et tou-cher la microcirculation intestinale sans que l’on retrouve

une occlusion des vaisseaux principaux. L’apparence clini-que, la stratégie thérapeutique et le pronostic sont condi-tionnés par l’étiologie. La mortalité est fortement liée àl’existence d’un infarctus mésentérique et les efforts à fairepour améliorer le pronostic doivent porter sur la rapidité dudiagnostic (5).

PRÉSENTATION CLINIQUE ET CONTEXTE ÉTIOLOGIQUE

La plupart des signes cliniques et de la symptomatologie,décrits au cours de l’ischémie mésentérique sont retrou-vés au cours des grands syndromes abdominaux : périto-nite aiguë, syndrome occlusif, cholécystite aiguë,

pancréatite aiguë hémorragique, hémo-péritoine ou poussée de sigmoïdite. Ladouleur est pratiquement constante ;contracture abdominale et silenceabdominal sont présents, une fois surdeux de même que nausées et vomis-sements. La diarrhée, d’apparitionbrutale, quand elle existe est plus

rare (2, 5). La description des événements cliniques per-met assez souvent d’orienter le contexte étiologique. Engénéral, la brutalité de la symptomatologie caractérisel’ischémie mésentérique d’origine artérielle embolique outhrombotique et la dégradation de la situation clinique esttrès rapide, alors que la symptomatologie de l’ischémiesecondaire à un bas débit cardiaque ou de l’ischémie d’ori-gine veineuse est beaucoup plus insidieuse avec unedégradation de l’état clinique beaucoup plus progressive.

L’embolie artérielleC’est la cause la plus fréquente d’IMA ; elle représente envi-ron 30 à 40 % des cas (6). L’origine de l’embolie est la plu-part du temps cardiaque. L’infarctus du myocarde, lestroubles du rythme auriculaires, les cardiomyopathies,l’anévrysme myocardique, l’endocardite et les pathologiesvalvulaires sont des situations à risque pour le développe-ment de thrombus muraux qui peuvent se fragmenter etmigrer secondairement. Environ un tiers des patients admisavec une IMA d’origine embolique ont des antécédentsemboliques. L’embole est arrêté dans 15 % des cas à l’ori-gine de l’artère mésentérique supérieure, dans 50 % des cas

Le retard au diagnostic d’ischémie mésentérique

est la cause d’une mortalitéimportante.

Page 2: Ischémie mésentérique : présentation clinique et réanimation

Le praticien en anesthésie-réanimation, 2005, 9, 124au niveau distal, au niveau de l’artère colique moyenne,branche principale de l’artère mésentérique supérieure.Dans ces cas le jéjunum, irrigué par l’artère pancréatico-duodénale inférieure, est préservé (7). Vingt pour cent despatients révèlent une embolie simultanément dans un ouplusieurs territoires. La thrombose partielle d’un anévrysmede l’aorte abdominale ou de l’artère mésentérique à l’ori-gine de l’embolie est plus rare. Une thrombose veineuse àl’origine d’une embolie paradoxale au travers d’un foramenovale réouvert dans un contexte d’embolie pulmonaireavec hypertension artérielle pulmonaire brutale est excep-tionnelle.La brutalité de la symptomatologie caractérise l’étiologieembolique de l’IMA, en raison de l’absence de circulationcollatérale au niveau de l’intestin grêle. L’intensité de la dou-leur, les nausées et vomissements associés à un syndromediarrhéique qui peut devenir rapidement sanglant, en impo-sent rapidement pour une laparotomie et une résectionintestinale. Classiquement l’intensité de la douleur abdomi-nale est sans commune mesure avec l’étendue des lésionsdécouvertes au cours de l’intervention. Dans certains cas, ilpeut s’agir d’une découverte opéra-toire. La constitution rapide d’un troi-sième secteur, les pertes digestivesexcessives conduisent rapidement versun état de choc au début hypovolémi-que, puis rapidement septique.L’hyperleucocytose témoigne au débutd’une hémoconcentration, une acidosemétabolique et une augmentation deslactates sont la conséquence de l’intensité du processusischémique et/ou d’une défaillance cardiocirculatoire avecinstallation d’une dette profonde en oxygène.

La thrombose artérielleCette étiologie représente 25 à 30 % des IMA. La thrombosesurvient la plupart du temps dans le contexte de la maladiepolyathéromateuse (carotides, coronaires et périphériques).Dans ce cas on retrouve régulièrement dans les heures oules jours qui ont précédé, des prodromes : douleur post-prandiale, nausées, et amaigrissement évocateurs d’uneischémie mésentérique chronique. L’obstruction de deuxdes trois troncs artériels est nécessaire pour entraîner uneIMA. Cependant, lorsque l’obstruction est complète aucunsigne ne permet de distinguer les deux étiologies, emboli-que et thrombotique, mais classiquement la longueurd’intestin ischémique est plus grande, le duodénum et lecolon pouvant être concernés par le processus. Un collapsusou un bas débit, peuvent être le facteur déclenchant. Lors-que l’intestin est infarci, le patient développe rapidement unétat de choc septique puis en l’absence d’un geste de sauve-tage et d’une résection intestinale suffisamment importante

une défaillance multiviscérale. En l’absence d’une prise encharge rapide et d’un geste de revascularisation souventcomplexe, la mortalité peut atteindre 70 à 100 % (8).

La thrombose veineuse mésentériqueElle est à l’origine d’une IMA dans 5 à 20 % des cas (9). Laplupart des patients ont des antécédents thromboembo-liques et un état d’hypercoagulabilité sous-jacent estretrouvé dans 80 % des cas : état pré-thrombotique (déficiten antithrombine, en protéine C ou S, facteur V de Leiden,mutation G20210A du gène de la prothrombine, hyperho-mocystéinémie, contraception orale, grossesse, cancers…),maladie hématologique (thrombocytose essentielle, hémo-globinurie nocturne paroxystique…), pathologie inflamma-toire (pancréatite, peritonite ou abcès intra-abdominal,pathologie inflammatoire du tube digestif, diverticulose…)hypertension portale (sclérose de varices œsophagiennes…),thrombose veineuse porte, antécédents de chirurgie abdo-minale récents (splénectomie…), traumatisme abdominal,blast… La douleur abdominale, dans la forme classique estle principal signe révélateur. Dans 80 % des cas, la phase

prodromique est plus longue et la dou-leur abdominale est associée à d’autressignes digestifs communs : nausées,vomissements, diarrhée. L’hyperten-sion veineuse distale et l’hyperhémie,qui résultent de l’obstruction veineusesont à l’origine d’un œdème de la paroiintestinale puis d’un infarcissementhémorragique responsable chez envi-

ron 15 % des patients d’une hémorragie digestive, mélénaou hémorragie occulte. Si le Doppler couleur trans-abdomi-nal affirme le thrombus dans les veines mésentériques, l’exa-men tomodensitométrique établit le diagnostic dans 90 %des cas. Dans les formes aiguës, le calibre de la veine mésen-térique supérieure est élargi et le thrombus est bien visibleen son centre. Celui-ci peut aussi être retrouvé au niveau dela veine porte ou de la veine splénique. Un épaississementconcentrique segmentaire, la persistance de produit decontraste au niveau de la paroi intestinale, des zones hétéro-gènes de faible densité liée à l’œdème et aux hémorragiessous-muqueuses sont des images souvent associées. Unepneumatose de la paroi intestinale, voire la présence de gazdans la veine porte sont des signes très tardifs et de mauvaispronostic (10).

L’ischémie mésentérique aiguë non occlusiveL’IMANO représente environ 20 % à 30 % des patients avecune IMA (11). Il est classiquement admis qu’elle résulted’une diminution du débit cardiaque et s’intègre dans untableau d’hypoperfusion splanchnique généralisée (12). S’ils’agit d’une des causes d’ischémie colique, elle est rarement

La tomodensitométrie abdominale fait le diagnostic des infarctus mésentérique

veineux.

Page 3: Ischémie mésentérique : présentation clinique et réanimation

Le praticien en anesthésie-réanimation, 2005, 9, 1 25la cause d’un infarctus mésentérique (13). L’état cardio-circulatoire sous-jacent : état de choc cardiogénique, infarc-tus du myocarde, insuffisance cardiaque, insuffisanceaortique, l’insuffisance rénale ou hépatique sont des condi-tions cliniques pré-disposantes bien connues en réanima-tion et/ou après chirurgie lourde. Certains médicaments :les digitaliques et en particulier les agents vasoactifs, notam-ment utilisés à dose excessive chez des sujets hypovolémi-ques, peuvent être des facteurs déclenchants et/ouaggravant. Dans la plupart des études, l’IMANO fait réfé-rence à une acidose intra-muqueuse, une hypoperfusion gas-tro-intestinale ou à une ischémie muqueuse. Elle estconsidérée de mauvais pronostic. En réalité, aucune étuden’a démontré clairement que l’IMANO n’était qu’un des élé-ments de l’expression de la sévérité du contexte danslequel elle apparaissait (14) ou bien, qu’elle était le facteurdéterminant de l’évolution du contexte vers un syndromede défaillance multiviscérale. Cependant les mécanismesphysiopathologiques qui conduisent au développementd’une IMANO sont de mieux en mieux connus.

Physiopathologie

Le tractus digestif est perfusé par troisbranches artérielles d’origine aorti-que : le tronc coeliaque, l’artèremésentérique supérieure et l’artèremésentérique inférieure. Les branchesde ces artères atteignent la sous-muqueuse intestinale après avoir péné-tré la paroi intestinale par la séreuse et elles constituent unplexus dense qui est à l’origine des artérioles qui donnentnaissance au très riche réseau capillaire que l’on retrouve ausommet des villosités intestinales. Au repos, 20 % du débitcardiaque est destiné au débit splanchnique. Le débit artérielmésentérique, de 500 ml/min au repos est, lui-même destinéau duodénum, à l’intestin grêle et au colon proximal ; il estaugmenté d’au moins 15 %, voire beaucoup plus au décoursdu repas. Le débit sanguin du tronc coeliaque est destiné aufoie, à l’estomac, au pancréas et à la première partie du duo-dénum ; celui de l’artère mésentérique inférieure au colondistal. La double vascularisation hépatique, par la veineporte et par l’artère hépatique, expliquerait la moindre sen-sibilité du foie à l’ischémie.L’IMANO peut être considérée comme l’expression d’uneréponse physiologique exagérée. L’objectif de la perfusionest d’assurer l’intégrité fonctionnelle et anatomique de cha-que viscère. L’apport d’oxygène au tube digestif et son utili-sation conditionnent son activité métabolique. En situationischémique ou dysoxique, à l’activité glycolytique aérobie sesubstitue une activité anaérobie. La réduction du débit san-guin et la vasoconstriction mésentérique seraient principale-ment à l’origine de l’ischémie ; le maintien ou la restauration

du débit sanguin préviendrait ou réduirait l’ischémie. La gra-vité de l’hypoperfusion et sa durée ont pour conséquencesles lésions ischémiques. Celles-ci ont tendance à s’aggraverau cours du processus de reperfusion. Au niveau intestinal,plusieurs facteurs sont cependant susceptibles de modifierles apports et les besoins en oxygène. Parmi les plus impor-tants on retiendra : le débit sanguin artériel, le taux d’hémo-globine et le contenu en oxygène du sang, la distribution deflux sanguin dans la paroi du tube digestif, les échangesd’oxygène à l’intérieur de la muqueuse, notamment entre labase et le sommet des villosités intestinales, l’adaptation dumétabolisme cellulaire au niveau de la muqueuse et la capa-cité cellulaire à utiliser l’oxygène.Lors d’une hypoperfusion, le débit sanguin à l’intérieur de laparoi intestinale varie considérablement entre la muqueuseet la séreuse. La muqueuse pourrait être protégée par la pro-duction de substances vasodilatatrices : NO, prostaglandineset la stimulation des récepteurs dopaminergiques de type D1localisés à l’entrée du réseau capillaire villositaire (15).Cependant, en dépit des processus apparents de maintiendu débit sanguin, les villosités intestinales constituent larégion du tube digestif la plus vulnérable à l’hypoperfusion,

en particulier au niveau de leur som-met.La régulation du débit sanguin auniveau de la paroi intestinale dépenddes effets conjugués des médiateursvasoconstricteurs et des médiateursvasodilatateurs. Classée parmi les subs-

tances vasoconstrictrices, l’endothéline-I, libérée en grandequantité au cours de l’état de choc hémorragique sévère etau cours des processus d’ischémie-reperfusion, stimuleaprès conversion deux types de récepteurs. Ces récepteurssont situés essentiellement au niveau des cellules myogéni-ques de la muqueuse et de la sous muqueuse : les récepteursETA, responsables d’une vasoconstriction et les récepteursETB, responsables d’une vasodilatation modérée. L’inhibi-tion de l’endothéline-I aggraverait l’hypoperfusion et l’isché-mie au cours des situations de bas débits (16). Lavasoconstriction qui caractérise la plupart des états de chocest aussi rapportée à l’extrême sensibilité de la circulationmésentérique aux médiateurs vasoconstricteurs de l’axerénine angiotensine (17). L’augmentation du débit sanguinrénal provoqué par l’utilisation du furosémide tend à dimi-nuer le débit mésentérique, à la fois par hémo-détournementet par activation du système rénine-angiotensine (18). Parailleurs, cette circulation est riche en récepteurs aux catécho-lamines : récepteurs

β2 et récepteurs dopaminergiques, dontla stimulation entraîne une vasodilatation, mais aussi récep-teurs

α1 dont la stimulation entraîne une vasoconstrictionpuissante. Le monoxyde d’azote, produit au niveau de lamuqueuse intestinale, agit chez le sujet normal comme une

Les villosités intestinales sont très sensibles à l’hypoperfusion.

Page 4: Ischémie mésentérique : présentation clinique et réanimation

Le praticien en anesthésie-réanimation, 2005, 9, 126substance vasodilatatrice. Produit en grande quantité, dansdes circonstances pathologiques, il agit comme les radicauxlibres de l’oxygène et compromet la production énergétiqued’origine mitochondriale. L’inhibition de la production deNO est bénéfique expérimentalement chez l’animal (19).Les prostaglandines, produites localement agissent commedes substances vasodilatatrices. Les AINS inhiberaient leureffet vasodilatateur, notamment au cours de l’état de choc.

La circulation mésentérique peut être considérée comme lepremier volume de réserve mobilisable au cours des états dechoc, en particulier hémorragiques et septiques. La vaso-constriction mésentérique intervient dès la phase compen-sée de l’état de choc hémorragique, bien avant les premierssignes d’instabilité hémodynamique. Les catécholamines,peuvent jouer le rôle de starter de la vasoconstriction mésen-térique. Les phénomènes ischémiques se développent trèstôt, une dizaine de minutes après une réduction de 50 % dudébit mésentérique de base (20).

Dans les situations de bas débit, localement ou au niveau sys-témique, une anomalie entre la demande métabolique etl’apport en oxygène a été décrite au niveau du tube digestifcomme au niveau des autres viscères. Les études par injec-tion de microsphères fluorescentes ont montré qu’au débutl’atteinte touchait uniquement les zones superficielles de lamuqueuse (15). Au cours du sepsis chez le rat, les études enmicroscopie in vivo ont affirmé l’existence d’anomalies dela vélocité érythrocytaire au niveau des capillaires des villo-sités intestinales. Par ailleurs, au cours de l’hémorragie et dusepsis, une hétérogénéité de l’atteinte a pu être démontrée,avec des villosités bien perfusées-désoxygénées et des villo-sités mal perfusées-désoxygénées, prouvant l’existenced’anomalies circulatoires et de shunts au cours de l’hypoper-fusion gastrointestinale. Il existe une répartition inégale deszones ischémiques au sein de territoires bien perfusés. Quel-ques érythrocytes restent longtemps dans les capillaires etsont complètement désaturés, alors que d’autres traversentrapidement le réseau capillaire au travers de shunts et nelibèrent pas d’oxygène (21, 22, 24).

La reperfusion fait partie intégrante du processus ischémi-que. Si elle n’intervient qu’après le traitement d’une occlu-sion aiguë, au cours de l’IMANO la reperfusion peut seproduire simultanément, par intermittence comme a poste-riori. Au cours de la phase ischémique, le défaut d’utilisationd’oxygène à pour conséquence la diminution de la forma-tion d’ATP, son hydrolyse et la diminution des réservesd’ATP. Ceci à pour conséquence le dysfonctionnement despompes membranaires et l’envahissement cellulaire d’eau etd’électrolytes à l’origine de la nécrose. L’effet barrière del’épithélium est compromis et l’augmentation de la perméa-bilité au niveau des jonctions inter-cellulaires à l’origine detranslocations bactériennes (25). La nécrose cellulaire initiela réponse inflammatoire et la libération de cytokines.

L’accumulation de calcium intra-cellulaire provoque la trans-formation de la xanthine déshydrogénase en xanthine oxy-dase, qui est utilisée secondairement pour la production deradicaux libres (26). Au cours de la reperfusion, la restaura-tion de la volémie et la restauration de la pression de perfu-sion inonde d’oxygène les tissus ischémiques. L’oxygène estrapidement réduit en radicaux libres par la xanthine oxy-dase. Les radicaux libres, localement, oxydent le DNA, lesenzymes et les récepteurs membranaires. Ils rompent lastructure phospholipidique membranaire aggravantl’œdème interstitiel. D’autres enzymes, impliquées dans laréparation du DNA oxydé et jouant un rôle intermédiaireimportant dans les lésions induites par le processus d’isché-mie- reperfusion, comme la poly (ADP-ribose) synthétase,peuvent aussi participer à la déplétion énergétique intra-cel-lulaire (27). Il a été récemment démontré que leur inhibitionpouvait prévenir les lésions observées au cours du choc etau cours du processus d’ischémie-reperfusion (28). La diffu-sion des radicaux libres de l’oxygène dépasse la zone isché-mique. Leurs effets sont normalement limités par l’action denettoyeurs endogènes : glutathion, catalase, superoxyde dis-mutase. Cependant, en dépit d’une forte affinité pour lesradicaux libres, cet effet reste limité, en particulier au coursdes processus ischémiques prolongés. La reperfusion a aussipour conséquence la mise en circulation de radicaux libres,de NO synthase, de médiateurs, de cytokines et de polynu-cléaires activés. Ceux-ci pourraient être à l’origine de lésionsobservées à distance, notamment au niveau hépatique etpulmonaire, et responsable du tableau de défaillance multi-viscérale (29).

Diagnostic

Diverses techniques diagnostiques ont été proposées pourévaluer la perfusion splanchnique. Certaines d’entre elles,sophistiquées, nécessitent une infrastructure techniquecomplexe. Souvent coûteuses, elles demandent encore àêtre évaluées en clinique. Dans le contexte périopératoireou en réanimation, l’angiographie a peu de place. Son seulintérêt réside dans la possibilité d’administrer in situ un trai-tement susceptible de lever la vasoconstriction. L’endosco-pie reste peu utilisée compte tenu de la localisation,principalement à l’intestin grêle, de l’ischémie. Néanmoins,elle est sur le plan théorique très intéressante puisqu’ellepermet, outre les biopsies, l’injection de colorants permet-tant d’évaluer la vitalité (telle que la fluorescéine). Elle peutêtre couplée à des mesures de spectrophotométrie pourexplorer la valeur de la saturation en oxygène de l’hémoglo-bine et la concentration en hémoglobine, et aussi à desméthodes de mesures du flux sanguin par laser-Doppler.Comme pour la méthode de clairance de l’hydrogène, cesméthodes ne peuvent être utilisées que par intermittence et

Page 5: Ischémie mésentérique : présentation clinique et réanimation

Le praticien en anesthésie-réanimation, 2005, 9, 1 27la mise en place des électrodes rend ces techniques peu uti-lisables en clinique (30).La tonométrie gastro-intestinale, utilisable au lit du malade,est la seule technique diagnostique permettant de détecterprécocement une ischémie mésentérique (31, 32). Son prin-cipe est le suivant : l’hypoxie intra-cellulaire active la glyco-lyse anaérobie, la formation d’acide lactique et la libérationde protons résultant de l’hydrolyse de l’ATP. Ces protonssont tamponnés dans le milieu intra-cellulaire par le bicarbo-nate avec production de CO2. Celui-ci, au niveau du tubedigestif, diffuse aisément dans la lumière et il peut êtremesuré au niveau de la muqueuse gastrique, jéjunale ou sig-moïdienne à l’aide d’une sonde gastrique spéciale, munied’un ballonnet qui lui est perméable : le tonomètre. La PCO2

régionale peut être mesurée ex vivo, automatiquement et encontinu par un moniteur spécialisé : le Tonocap. En situa-tion normale, en l’absence d’ischémie, la PCO2 régionale estégale à la PCO2 artérielle. Au cours de l’ischémie gastrointes-tinale, la PCO2 régionale est supérieure à la PCO2 artérielleavec un seuil d’environ 0,8 Kpa (33). La technique est mal-heureusement difficile à mettre en œuvre et est sensible à denombreuses sources d’erreur. Elleimpose la neutralisation de l’aciditégastrique et dans le colon la produc-tion de CO2 par la flore locale peut êtreà l’origine de faux positifs. Cependant,la corrélation des résultats de la tono-métrie intestinale avec l’évaluation dela perfusion muqueuse est satisfaisantedans les modèles de choc hémorragi-que ou de choc septique chez l’animal. Ceci a été confirméchez l’homme en soins intensifs dans des situations d’état dechoc. Plus récemment, la tonométrie sublinguale a été pro-posée comme une technique alternative intéressante(34, 35).

L’ischémie coliqueL’ischémie colique fait suite à un processus non occlusif. Leplus souvent l’angiographie, quand elle est réalisée, serévèle normale (36). Elle concerne exclusivement le colongauche et le sigmoïde. Celle-ci est bien décrite dans les sui-tes post-opératoires de la chirurgie aortique, lorsque l’artèremésentérique est abandonnée (37). L’incidence est de 2 %après chirurgie réglée, d’environ 20 % lorsque la chirurgieest réalisée en urgence. Elle se développe la plupart dutemps dans un contexte d’état de choc péri-opératoire. Endehors de la chirurgie aortique, l’ischémie colique est rare-ment précédée par un état de choc comme elle est rare-ment consécutive à l’occlusion d’un gros vaisseau. Elleserait consécutive à l’occlusion artériolaire ou à une hypo-perfusion transitoire. Par ailleurs, la plupart des patientsayant présenté une ischémie colique présentent des anoma-

lies de l’hémostase et/ou des embolies d’origine cardiaqueou vasculaire (38, 39).

DIAGNOSTIC

L’ischémie mésentérique aiguë au stade initial est une mala-die strictement vasculaire. Elle précède de quelques heuresla nécrose intestinale, irréversible en 6 à 8 heures, dontl’infarctus constitue le stade ultime. L’IMA reste en théorieaccessible aux traitements ; malheureusement le diagnosticest rarement affirmé précocement.La plupart des signes cliniques sont non spécifiques, en par-ticulier les douleurs abdominales. Pratiquement constantesau cours des toutes premières heures, brutales, elles sontdisproportionnées par rapport à la pauvreté des signesphysiques (40). Prédominantes dans la zone péri-ombili-cale, ou généralisées elles s’estompent après deux ou troisheures. Une défense abdominale, l’apparition de contractu-res spontanées ou provoquées, évoquent l’infarctus mésen-térique. À ce stade, l’abdomen est souvent distendu,

quelquefois cyanosé et silencieux àl’auscultation. Le syndrome sub-occlu-sif peut être remplacé par un mélénaou une diarrhée sanglante. L’altérationde l’état général, faite de déshydrata-tion et d’agitation est brutale et évoluedans un contexte d’hypotension. Endépit d’une résection intestinale pré-coce, le pronostic est à ce moment

fatal.La plupart des tests biologiques pratiqués de façon quasisystématique sont extrêmement décevants. Une hyperleu-cocytose, une hémoconcentration, une hyperamylasémie etune acidose lactique sont classiques. Une augmentation duD-lactate traduirait précocement la souffrance de lamuqueuse intestinale (41). L’augmentation des isoenzymesCPKBB accompagne l’infarctus mésentérique (42). Des per-turbations de l’hémostase et en particulier la présence de d-dimères pourrait à aider la prise de décision chirurgicale(43). Une hypocholestérolémie, inférieure à 80 mg/dl et untaux de procalcitonine supérieur à 40 ng/l seraient de mau-vais pronostic (5).

L’intérêt de l’échographieL’intérêt de l’échographie pour le diagnostic de l’ischémiemésentérique aiguë est extrêmement limité. Théorique-ment, les ultrasons permettent de mettre en évidence unépaississement de la paroi intestinale ; mais la présence degaz et la dilatation des anses, rendent l’examen peu perfor-mant. Dans les formes les plus évoluées, celle-ci permet deretrouver la présence d’un épanchement intra-péritonéal, et

La tonométrie gastro-intestinale, est la seule technique

diagnostique permettant de détecter précocement

une ischémie mésentérique.

Page 6: Ischémie mésentérique : présentation clinique et réanimation

Le praticien en anesthésie-réanimation, 2005, 9, 128plus exceptionnellement la présence de bulles de gaz dansla veine porte dans les nécroses intestinales massives (44).L’examen Doppler a une très bonne spécificité (92 à 100 %)pour l’identification des occlusions ou des sténoses sévèresdes vaisseaux mésentériques, mais une sensibilité médiocre(70-89 %). Malheureusement, il est incapable de détecter unembole ou une IMANO (45).

L’abdomen sans préparationL’abdomen sans préparation, au moins initialement, est leplus souvent normal. Ensuite, on peut identifier une disten-sion d’une ou plusieurs anses intestinales et l’apparition deniveaux hydo-aériques qui peuvent signifier une occlusion.L’augmentation de l’espace inter-anses, témoigne de lapneumatisation généralisée et de l’épaississement de laparoi intestinale. Au stade de nécrose intestinale des signesde pneumatose, en rapport avec la dissection gazeuse de lasous-muqueuse, peuvent être retrouvés. Le pneumopéri-toine affirme la perforation d’une anse infarcie (46).

L’examen tomodensitométriqueL’examen tomodensitométrique abdominal classique est unexamen clé devant tout abdomen aigu. S’il permet d’écarterun grand nombre de diagnostics, normal il ne permet pasd’éliminer une ischémie intestinale aiguë. Réalisé en modespiralé avec injection de produit de contraste iodé, étudiéaux temps vasculaires et parenchymateux, il affirme le dia-gnostic, met en évidence des signes directs d’obstructionvasculaire et des signes de souffrance intestinale, signes quidiffèrent selon l’origine artérielle ou veineuse. Une ou plu-sieurs images d’emboles peuvent être visualisées, en parti-culier au niveau de l’artère mésentérique supérieure aucours de l’obstruction d’origine embolique ; et parfois desimages d’infarcissement au niveau splénique, rénal et/ouhépatique. Au cours de l’obstruction d’origine thromboti-que, une image de thrombus au niveau de l’artère mésenté-rique supérieure affirme le diagnostic, surtout lorsquel’artère apparaît calcifiée. L’examen TDM peut aussi per-mettre de reconnaître une prise de contraste précoce (60 s)en « cible » de la paroi intestinale, qui correspond à unrehaussement muqueux, circonférentiel, associé à un épais-sissement pariétal, oedémateux, témoin d’une atteinteischémique (47, 48). Les reconstructions tridimensionnellespeuvent donner une vision angiographique de l’atteinteproximale. La sensibilité du TDM pour le diagnostic d’obs-truction veineuse est selon les séries de 90 à 100 % (6, 49).Le thrombus est visualisé au centre de la lumière de la veinemésentérique. Une turgescence vasculaire et une augmen-tation de la densité de la paroi vasculaire veineuse, cir-conférentielle, sont très suggestive. Le développementd’une circulation collatérale dans le mésentère et dansl’espace rétro-péritonéal peut être observé après quelques

semaines d’évolution accompagnée par un épanchementintra-abdominal (50). En cas d’IMANO, il n’existe aucuneimage d’embole ou de thrombus, seuls sont retrouvés lessignes de souffrance digestive communs aux autres étiolo-gies. L’imagerie par résonance magnétique n’a pas montréd’intérêt supérieur à la TDM, excepté lorsqu’il existe unecontre-indication formelle à l’utilisation des produits decontraste iodés (51).

L’angioradiographie

L’angioradiographie a longtemps été l’examen de choixpour affirmer l’obstruction artérielle, préciser la topogra-phie des lésions vasculaires splanchniques et fournir desinformations en vue de l’option thérapeutique : embolecto-mie, revascularisation ou vasodilatation pharmacologique.Cependant, supplantée par l’examen TDM, elle ne fournitaucune information sur l’importance des lésions digestives(52).

L’endoscopie

L’endoscopie reste peu utilisée pour le diagnostic del’ischémie mésentérique aiguë, puisque qu’en dehors dessituations où elle est réalisée à partir d’une iléostomie, ellene permet pas de visualiser l’intestin grêle. Cependant, elleest indispensable au diagnostic de l’ischémie colique et laplupart des auteurs sont en faveur d’une indication systéma-tique dans les 48 heures qui suivent une chirurgie aortique,réalisée en urgence et en particulier lorsque la situationhémodynamique demeure instable (53). La sigmoïdoscopiepermet par ailleurs la mise en place et la vérification du bonpositionnement de la sonde de tonométrie.

RÉANIMATION — STRATÉGIE THÉRAPEUTIQUE

Les récentes séries cliniques publiées n’ont pu rendrecompte des progrès des connaissances physiopathologi-ques et des progrès thérapeutiques réalisés au cours des 15dernières années. La mortalité est supérieure à 70 % (59-93 %), liée au retard du diagnostic (54). Toute douleurabdominale, d’apparition brutale doit retenir l’attention etsa persistance au-delà de deux ou trois heures, tout particu-lièrement chez les patients à risques, doit faire déclencher,la mise en œuvre simultanée de la stratégie diagnostique etthérapeutique (figure 1).

Première étape

La première étape de la prise en charge d’une ischémiemésentérique aiguë consiste à stabiliser la situation hémo-dynamique. La constitution d’un troisième secteur liqui-dien, dans les anses intestinales, dans la cavité abdominale,

Page 7: Ischémie mésentérique : présentation clinique et réanimation

Le praticien en anesthésie-réanimation, 2005, 9, 1 29

voir dans la cavité pleurale justifie une expansion volémi-

que conduite sous contrôle hémodynamique par cathété-

risme de Swan Ganz ou sous échocardiographie. Chez les

patients hypotendus ou en état de choc hypovolémique, le

plus souvent, il existe une vasoconstriction splanchnique.

Les anomalies hydro-électrolytiques et acido-basiques doi-

vent être corrigées. Elles sont un préalable à l’administra-

tion, si cela est nécessaire d’anti-arythmiques. L’utilisation

d’une solution à base d’ethyl pyruvate pour le remplissage

vasculaire mériterait d’être évaluée, en raison de son effet

anti-inflammatoire, (55). Les traitements vasoconstricteurs

doivent être interrompus : digitaliques, norépinéphrine,

vasopressine… et l’optimisation de la volémie privilégiée.

Dans les formes évoluées d’ischémie mésentérique aiguë,

une antibitothérapie à large spectre (uréidopénicilline,

céhalosporine de troisième génération…), est recomman-

dée en raison du risque de translocation bactérienne et de

sepsis. Une sonde naso-gastrique est mise en place en raison

de l’ileus digestif.

Deuxième étape

La deuxième étape consiste à améliorer la perfusion splan-chnique et en particulier la perfusion muqueuse intestinale.Le recours aux catécholamines s’avère souvent indispensa-ble, mais seulement si l’expansion volémique a été optimi-sée, en particulier lorsqu’il s’agit de catécholaminesvasoconstrictrices : noradrénaline, dopamine, adrénaline…C’est dans cette situation que le monitorage hémodynami-que est indispensable et la tonométrie gastrointestinale utile(56). La dobutamine, inotrope positif et vasodilatateur, amé-liorerait l’oxygénation de la muqueuse intestinale, y comprislorsqu’elle est associée à la noradrénaline. Les effets del’association dobutamine-noradrénaline seraient supérieursaux effets de l’adrénaline seule (57). La dopexamine,connue pour ses propriétés vasodilatatrices splanchniquesspécifiques, peut être recommandée ; mais son utilisationdans les situations hémodynamiques précaires justifie desajustements des autres traitements (expansion volémiquesurtout, catécholamines…) jugées à partir des données ducathétérisme droit (58, 59, 60). La vasopressine est bienconnue pour ses propriétés vasoconstrictives et son intérêtpotentiel dans le traitement du choc septique (61). Sonassociation à la dobutamine préviendrait les effets délétèressur la circulation splanchnique (62). Les antagonistes del’endothéline, qui bloquent l’étape terminale de la vaso-constriction, pourraient être intéressants (63).

Lorsque le diagnostic est porté par l’angioradiographie, laplupart des auteurs recommandent l’utilisation immédiateet sélective de papavérine, inhibitrice des phosphodiestéra-ses. Celle-ci est administrée à la dose de 30 à 60 mg/h parl’intermédiaire du cathéter d’angiographie laissé place, tou-jours sur une voie indépendante de la voie d’administrationd’héparine en raison du risque de précipitation (64, 65).Administrée ainsi, dans l’artère mésentérique supérieure,les effets secondaires sont exceptionnels, en raison d’uneffet de premier passage hépatique. L’administration doitcependant être interrompue devant l’apparition d’unehypotension ou de troubles du rythme et la position ducathéter doit être vérifiée. Son utilisation reste contre-indi-quée en cas d’hypovolémie sévère, d’état de choc oud’insuffisance hépatique sévère (66, 67). Son administrationest recommandée dans les cas d’ischémie mésentériqueaiguë d’origine embolique pour traiter ou prévenir la vaso-constriction périopératoire. Au cours de l’IMANO, la papa-vérine reste le seul recours thérapeutique à associer autraitement des circonstances de survenue. Dans les deuxcas, l’administration doit être poursuivie au-delà du traite-ment étiologique, la vasoconstriction persistant le plus sou-vent. Lorsque le diagnostic est porté par l’examen TDM, lalevée du vasospasme peut être quelquefois obtenue aprèsadministration de glucagon, par titration de 1 μg/kg/min à10 μg/kg/min, en fonction de la tolérance (68).

Figure 1. Ischémie mésentérique aiguë : prise en charge médico-chirurgicale précoce.

Ischémie Mésentérique Aiguë

Signes Péritonéaux Présents Signes Péritonéaux Absents

Tomodensitométrie abdominale

Investigation radiologiques et biologiques

Embolie - Thrombose artérielle Thrombose

VeineuseIMANO

Bilan

Héparine

Tonométrie

± Angiographie

Vasodilatateurs

AVK

Infarctus Ischémie

Laparotomie

Laparotomie

Embolectomie / Thromboendartériectomie

± Résection Intestinale

Second look

Stomies Anastomose

Vasodilatateurs – Anticoagulants – Prévention Reperfusion

Page 8: Ischémie mésentérique : présentation clinique et réanimation

Le praticien en anesthésie-réanimation, 2005, 9, 130Troisième étape

La troisième étape consiste à envisager très rapidement le

traitement étiologique et d’évaluer l’étendue des lésions, en

particulier des lésions nécrotiques.

Dans le cas de l’ischémie mésentérique aiguë d’origine

occlusive, la désoblitération artérielle est le traitement obli-

gatoire. La laparotomie médiane, permet d’évaluer la perfu-

sion et la viabilité intestinale. Dans l’obstruction d’origine

embolique, le jéjunum apparaît normal. Le reste du tube

digestif peut être touché. Si une embolie de l’artère mésen-

térique est suspectée, une artériotomie, après héparinisa-

tion par voie générale, est pratiquée de son origine jusqu’à

l’artère colique moyenne. La résection intestinale est réali-

sée après évaluation de la viabilité intestinale, pas avant 20

à 30 minutes après l’embolectomie et la reperfusion. La via-

bilité intestinale est évaluée sur sa coloration, l’activité

péristaltique et la persistance des pulsations artérielles.

L’examen anatomo-clinique per-opératoire est souvent mis

en défaut, et d’autres méthodes d’évaluation et pronostique

ont été proposées : administration IV de fluorescéine et

examen à la lampe de Wood, Doppler et PaO2 intestinale de

surface (69, 70). L’intestin nécrosé est réséqué ; la discus-

sion porte sur le danger ou non de réaliser une anastomose

termino-terminale au cours du premier temps opératoire ou

la réalisation d’une double stomie. La première option

impose à l’opérateur, dès la prise de décision d’envisager

dans les 12 à 36 heures une réintervention ; la deuxième

option a pour inconvénient de mettre en traction un intes-

tin déjà largement fragilisé mais l’avantage de mettre à la

vue l’intestin laissé en place. Un lavage péritonéal au sérum

physiologique, légèrement réchauffé, peut contribuer à la

levée du vasospasme. Dans l’obstruction d’origine thrombo-

tique, le jéjunum est le plus souvent concerné par le pro-

cessus ischémique, et après thrombo-endarteriectomie, le

traitement consiste en la mise en place d’un shunt ou bien

l’interposition d’un greffon aorto-viscéral synthétique ou

d’origine veineuse.

Dans le cas de l’IMANO, l’essentiel du traitement repose sur

l’efficacité du traitement du facteur précipitant et sur l’uti-

lisation des vasodilatateurs en particulier l’utilisation de la

papavérine. Bien qu’aucune étude randomisée ne vienne

conforter cette stratégie, il est licite de recommander une

attitude diagnostique et agressive qui consiste à administrer

la papaverine par voie intra-artérielle dans le cathéter laissé

en place au cours de l’angiographie si celle-ci a été réalisée.

La durée d’administration est fonction des données du

monitorage, et de l’évolution clinique et éventuellement

des données de l’angiographie. La persistance ou l’aggrava-

tion de la symptomatologie clinique constitue une indica-

tion opératoire.

Dans le cas de l’ischémie colique, le traitement de l’état dechoc, l’expansion volémique, l’antibiothérapie et la décom-pression sigmoïdienne sous endoscopie suffisent dans laplupart des cas au traitement. Lorsque l’intestin est gan-grené, la résection segmentaire doit être discutée en fonc-tion des signes de défaillance multiviscérale. La réalisationd’une colostomie de décharge n’a pas fait la preuve de sonefficacité. Un second look, est décidé de principe en raisondes données peropératoires ou est réalisé en raison del’aggravation clinique. Une cholécystectomie peut être asso-ciée en raison du risque élevé de cholécystite alithiasiquedans ce contexte (71).

En présence d’une thrombose veineuse mésentérique supé-rieure, contrairement aux idées reçues, le recours à la chi-rurgie est souvent inutile. La prise en charge d’unethrombose veineuse mésentérique peut être réalisée sansintervention chirurgicale. Seuls les patients présentant dessignes de péritonite doivent être opérés, pour évaluation etéventuellement résection intestinale. La thrombectomie,localisée à la veine mésentérique supérieure, reste excep-tionnelle. L’essentiel du traitement repose sur l’anti-coagu-lation. Dès que le diagnostic est posé, le traitementanticoagulant doit être débuté, par un bolus d’héparine de5 000 UI (50 UI/kg) relayé par une administration à débitcontinu (500 UI/kg/24 heure) dans le but d’obtenir un TCAà environ deux fois le témoin (10). En cas de thrombopénieà l’héparine, l’utilisation de la lépirudine doit être recom-mandée. Le relais par les anti-vitamines K sera effectué enl’absence d’ischémie et poursuivi 6 mois à un an (9). Si unelaparotomie a été réalisée, le diagnostic de spasme artérielmésentérique associé peut imposer un traitement vasodila-tateur par la papavérine.

Quatrième étape

La quatrième étape postopératoire consiste à prévenir et àprendre en charge les complications. Lorsque la situationhémodynamique est stabilisée, la réintroduction précoced’une alimentation entérale précoce est susceptible d’amé-liorer la perfusion mésentérique (72). Celle-ci ne peut êtreinitiée qu’en l’absence de développement d’un syndromedu compartiment abdominal, décrit à la phase de revascula-risation (73). Les principes de la prévention des lésionsinduites par la reperfusion reposent sur des données expé-rimentales encourageantes. L’administration de N-acetyl-cysteine ou de vitamine E réduirait la production locale deradicaux libres et favoriserait la libération de NO favorisantla vasodilatation (74, 75). Leur administration précoce amé-liorerait les critères hémodynamiques et les marqueursd’ischémie mésentérique (75-77). L’administration in situd’oxygène pur pourrait être intéressante mais cette voie n’afait l’objet d’aucune évaluation clinique (78).

Page 9: Ischémie mésentérique : présentation clinique et réanimation

Le praticien en anesthésie-réanimation, 2005, 9, 1 31CONCLUSION

L’ischémie mésentérique dans sa forme aiguë est uneurgence absolue. La douleur abdominale brutale, si elle estpratiquement constante est loin d’être spécifique et c’est lecontexte, en particulier le terrain, qui doit faire évoquer lediagnostic. Le pronostic, péjoratif, dépend avant tout de laprécocité de la mise en œuvre de la stratégie diagnostiqueet thérapeutique. Le scanner, oriente le diagnostic étiologi-que, précise l’étendue et la gravité du processus ischémi-que. La réanimation a pour objectifs l’optimisation de lavolémie, le traitement du vasospasme, la restauration de laperfusion muqueuse intestinale et la prévention des lésionsde reperfusion. Au plan chirurgical, l’infarctus mésentéri-que, même limité, impose la résection intestinale. L’évolu-tion des différentes fonctions viscérales, plus que latonométrie gastro-intestinale continue ou l’oxymétrie endo-luminale, rend compte de l’évolution du processus ischémi-que et est susceptible de modifier l’orientation thérapeutiqueinitiale. La place des nouveaux vasodilatateurs et des traite-ments préventifs du syndrome d’ischémie-reperfusion dansla stratégie thérapeutique reste à évaluer.

RÉFÉRENCES1. Jrvinen O, Laurikka J, Salenius J.P, Tarkka M. Acute intestinal ischaemia.

A review of 214 cases. Ann. Chir. Gynaecol 1994;83:22-5.2. Ducerf C, Adeleine P. L’ischémie intestinale aiguë. Rapport AFC 1996. In :

Ducerf C, Laurian C, eds. Pathologie Vasculaire du Tube Digestif. Paris,Arnette Blackwell ; 1996, 41-70.

3. Sreenarasimhaiah J. Diagnosis and management of intestinal ischaemicdisorders. British Medical Journal 2003;326:1372-6.

4. Endean E, Barnes S, Kwolek C, et al. Surgical management of thromboticacute intestinal ischemia. Ann Surg 2001;233:801-8.

5. Merle C, Lepouse C, De Garine A, et al. Operated mesenteric infarctionassociated with early death (within 72 hours). J Cardiol Vasc Surg, 2004(in press).

6. Bradbury AW, Brittenden J, Mc Bride K, Ruckley CV. Mesenteric ischae-mia: a multidisciplinary approach. Br J Surg 1995;82:1446-9.

7. Boley SJ, Feinstein FR, Sammartano R, Brandt LJ, Sprayregen S. Newconcepts in the management of emboli of the superior mesenteric artery.Surgery 1981;153:561-9.

8. Sitges-Serra A, Mas X, Roqueta F, Figueras J, Sanz F. Mesenteric infarction:an analysis of 83 patients with pronostic studies in 44 undergoing a mas-sive small-bowel resection, B J Surg 1988;75:544-8.

9. Kumar S, Sarr MG, Kamath PS. Mesenteric venous thrombosis. N Engl JMed 2001;345:1683-8.

10. Boley SJ, Kaleya RN, Brandt LJ. Mesenteric venous thrombosis. Surg ClinNorth Am 1992;72:183-201.

11. Trompeter M, Brazda T, Remy CT, Vestring T, Reimer P. Non-occlusivemesenteric ischemia: etiology, diagnosis and interventionnal therapy. Eur.Radiol 2002;12:1279-87.

12. Jakob SM. Clinical Review: Splanchnic Ischaemia. Critical Care 2002;6:306-12.

13. Kolman JJ. Non-occlusive mesenteric ischaemia: a common disorder in gas-troenterology and intensive care. Best Practice & Research Clinical Gas-troenterology 2003;17:457-73.

14. Lobo SM, De Backer D, Sun Q, et al. Gut mucosal damage during endo-toxic shock is due to mechanisms other than gut ischemia. J Appl Physiol2003;95:2047-54.

15. Morini S, Yacoub W, Rastellini C. Intestinal microvascular patterns duringhemorrhagic shock. Digestive Diseases and Sciences 2000;45:710-22.

16. Webb DJ. Endothelin: from molecule to man. Brithish Journal of ClinicalPharmacology 1997;44:9-20.

17. Toung T, Reilly PM, Fush KC. Mesenteric vasoconstriction in response tohemorrhagic shock. Shock 2000;13:267-73.

18. Kolkmannn JJ, Groeneveld ABJ. Occlusive and non-occlusive gastrointesti-nal ischaemia: a clinical review with special emphasis on the diagnosticvalue of tonometry. Scan J Gastroenterol 1998;33:3-12.

19. Hua TC, Moochhala SM. Role of nitric oxide in hemorrhagic shock-indu-ced bacterial translocation. Journal of Surgical Research 2000;93:247-56.

20. Dubin A, Estenssoro E, Murias G. Effects of hemorrhage on gastrointestinaloxygenation. Intensive Care Medicine 2000;27:1931-6.

21. Nakajima Y, Radermacher P, Duranteau J. Microcirculation in intestinalvilli: a comparison between hemorrhagic and endotoxin shock. AmericanJournal of Respiratory & Critical Care Medicine 2001;164:1526-30.

22. Tugtekin IF, Radermacher P, Theisen M. Increased ileal-mucosal-arterialPCO2 gap is associated with impaired villus microcirculation in endotoxicpigs. Intensive Care Medicine 2001;27:757-66.

23. Ince C, Sinaasappel M. Microcirculatory oxygenation and shunting in sep-sis and shock. Critical Care Medicine, 1999;27:1369-77.

24. Temmesfeld-Wollbruck B, Szalay A, Mayer K. Abnormalities of gastricmucosal oxygenation in septic shock: partial responsiveness to dopexa-mine. Am J Respir Crit Care Med 1998;157:1586-92.

25. Wattanasirichaigon S, Menconi MJ, Delude RL. Effect of mesenteric ische-mia and reperfusion or hemorrhagic shockon intestinal mucosal permeabi-lity and ATP content in rats. Shock 1999;12:127-33.

26. Banda MA, Granger DN. Mechanism and protection from ischemic intesti-nal injury. Transplantation Proceedings 1996;28:2595-7.

27. Szabo C, Dawson VL. Role (ADP-ribose) synthetase in inflammation andischemia-reperfusion. Trends in Pharmacological Science 1998;19:287-98.

28. Mazzon E, Dugo L, De SA. Beneficial effects of GPI 6150, an inhibitor ofpoly (ADP-ribose) polymérase in a rat model of splanchnic artery occlusionand reperfusion. Shock 2002;17:222-7.

29. Nielsen VG, Tan S, Baird MS. Gastric intramucosal pH ans multiple organinjury: impact of ischemia-reperfusion and xanthine oxidase. Crit CareMed 1996;24:1339-44.

30. Mythen M, Faehnrich J. Monitoring gut perfusion. In: Rombeau JL, Takala J.(eds) Gut Dysfunction in Critical Illness. Springer, Berlin, 1996; 246-63.

31. Fiddian Green RG, McGough E, Pittenger G. Predictive value of intramuralpH and other risk factors for massive bleeding from stress ulcerations. Gas-troenterology 1983;85:613-20.

32. Kolkman JJ, Otte JA, Groeneveld ABJ. Gastrointestinal luminal PCO2 tono-metry: an update on physiology, methodology and clinical applications. BJ Anaesth 2000;84: 74-86.

33. Knichwitz G, Rotker J, Mollhoff. Continuous intramucosal PCO2 measure-ment allows the early detection of intestinal malperfusion. Crit Care Med1998;26:1550-7.

34. Marik PE. Sublingual capnography: a clinical validation study. Chest 2001;120:923-7.

35. Nakagawa Y, Weil MH, Tang W. Sublingual capnometry for diagnosis andquantitation of circulatory shock. Am J Resp Crit Care Med 1998;157:1838-43.

36. Mac Donald PH. Ischaemic colitis. Baillière’s Clinical Gastroenterology2002;16:5161.

37. Shiedler MG, Cutler BS, Fiddian-Green RG. Sigmoid intra-mural pH forprediction of ischemic colitis durng aortic surgery. Arch Surg 1987;122:881-6.

38. Koutroubakis IE, Theodoroupoulou A. Role of acquired and hereditarythrombotic risk factors in colon ischemia of ambulatory surgery. Gastro-enterology 2001;121:561-5.

39. Collet T, Even C, Bouin M. Prevalence of electrocardiographic and echo-cardiographic abnormalities in amulatory ischemic colitis. Dig Dis Sci 2000;45:23-5.

40. Edwards MS, Cherr GS, Craven TE, et al. Acute occlusive mesenteric ische-mia: surgical management and outcome. Ann Vasc Surg 2003;17:72-9.

41. Kurland B, Brandt LJ, Delany HM. Diagnostic tests for intestinal ischemia.Surg Clin North Am 1992;72:85-105.

42. Fried M, Murthy U, Hassig S. Creatinine kinase isoenzymes in the diagnosisof intestinal infarction. Digestive Diesases and Sciences 1991;36:1589-93.

43. Acosta S, Nilsson T, Björck M. Preliminary study of D-Dimer as a possiblemarker of acute bowel ischaemia. Br J Surg 2001;88:385-8.

44. Klein HM, Lensing R, Klosterhalfen B. Diagnostic imaging of mesentericinfarction. Radiology 1995;197:79-82.

45. Rode A. Aspects radiologiques de l’ischémie artérielle mésentérique aiguë.Rapport AFC 1996. In : Ducerf C, Laurian C, eds. Pathologie Vasculaire duTube Digestif. Paris, Arnette Blacwell ; 1996, 29-34.

46. Moneta GL, Yeager RA, Dalman R, Antonovic R, Hall LD, Porter JM.Duplex ultrasound criteria for thr diagnosis of splanchnic artery stenosis orocclusion. J Vasc Surg 1991;14:511- 8.

47. Taourel P, Deneuville M, Pradel J, Regent D, Bruel J. Acute mesentericischemia: diagnosis with contrast-enhanced CT. Radiology 1996;199:632-6.

48. Lee R, Tung HKS, Tung PHM, Cheung SCW, Chan FL. CT in acute mesen-teric ischaemia. Clinical Radiology 2003;58:279-87.

49. Rhee RY, Gloviczki P. Mesenteric venous thrombosis. Surg Clin North Am1997;77:327-38.

50. Kumar S, Sarr MG, Kamath PS. Mesenteric venous thrombosis. N Engl JMed 2001; 345:1683-88.

Page 10: Ischémie mésentérique : présentation clinique et réanimation

Le praticien en anesthésie-réanimation, 2005, 9, 13251. Heiss SG, Li KC. Magnetic resonance angiography of mesenteric arteries. A

review. Invest Radiol 1998;33:670-81.52. Bakal CW, Sprayregren S, Wolf EL. Radiology in intestinal ischemia.

Angiographic diagnosis and management. Surg Clin North Am 1992;72:125-41.

53. Brandt LJ, Boley SJ. AGA technical review on intestinal ischemia. Gastro-enterology 2000;118:954-68.

54. Farkas JC. Colite ischémique après chirurgie de l’aorte abdominale. Rap-port AFC 1996. In : Ducerf C, Laurian C, eds. Pathologie Vasculaire duTube Digestif. Paris, Arnette Blacwell ; 1996, 195-206.

55. Fink MP. Ringer’s ethyl pyruvate solution: a novel resuscitation fluid fortreatment of hemorrhagic shock ans sepsis. J Trauma 2003;54:S141-3.

56. Vallet B, Nevière R, Chagnon JL. Gastrointestinal mucosal ischemia. In:Rombeau JL, Takala J, eds. Gut Dysfunction in Critical Illness. Berlin,Springer Verlag ; 1996, 233-245.

57. Levy B, Bollaert P, Charpentier C, et al. Comparison of norepinephrine anddobutamine to epinephrine for hemodynamics, lactate, metabolism, andgastric tonometric variables in septic shock. Intensive Care Med, 1997;23:282-7.

58. Hiltebrand LB, Krejci V, Sigurdsson GH. Effects of dopamine, dobutamine,and dopexamine on microcirculatory blood flow in the gastrointestinaltract during sepsis and anesthesia. Anesthesiology. 2004;100:1188-97.

59. Frojse R, Lehtipalo S, Bergstrand U, et al. Local metabolic effects of dopexa-mine on the intestine during mesenteric hypoperfusion. Shock 2004;21:241-7.

60. Bennett D, Boyd O. Oxygen delivery in surgical patients: doesn’t work, ordoes it? Crit Care Med 2000;28:3564-5.

61. Patel BM, Chittock DR, Russell JA, Walley KR Beneficial effects of short-term vasopressin infusion during severe septic shock. Anesthesiology2002;96:576-82.

62. Martikainen TJ, Uusaro A, Tenhunen JJ, Ruokonen E. Dobutaminecompensates deleterious hemodynamic and metabolic effects of vasopres-sin in the splanchnic region in endotoxin shock. Acta Anaesthesiol Scand2004;48:935-43.

63. Oktar BK, Gulpinar MA, Bozkurt A. Endothelin receptor blockers reduc I/R-induced intestinal mucosal injury: role of blood flow. Am J PhysiolGastrointest Liver Physiol 2002;282:G647-55.

64. Schneider TA, Longo WE, Ure T, Vernava AM. Mesenteric ischemia: acutearterial syndromes. Dis Colon Rectum 1994;37:1163-74.

65. Cappell MS. Intestinal (mesenteric) vasculopathy I. Acute superior mesen-teric arteriopathy and venopathy. Gastroenterol Clin North Am 1998;27:783-825.

66. Kaleya RN, Sammartano RJ, Boley SJ. Aggressive approach to acute mesen-teric ischemia. Surg Clin North Am 1992;72:157-182.

67. Brandt LJ, Boley SJ. Nonocclusive mesenteric ischemia. Annu Rev Med1991;42:107-17.

68. Lock G. Acute intestinal ischemia. Best Pract Res Clin Gastroenterol2001;15:83-98.

69. Kasmers A. Operative management of acute mesenteric ischemia. An Vas-cul Surg, 1998;12:187-97.

70. Horgan PG, Gorey TF. Operative assessment of intestinal viability. SurgClin North Am 1992;72:143-155.

71. Farkas JC, Calvo-Verjat N, Laurian C, et al. Acute colorectal ischemia afteraortic surgery: pathophysiology and pronostic criteria, Ann Vasc Surgery1988;6:111-8.

72. Revelly JP, Tappy L, Beger MM. Early metabolic and splanchnic responsesto enteral nutrition in postoperative cardiac surgery patients with circula-tory compromise. Intensive Care Med 1991;27:540-7.

73. Sullivan KM, Battey PM, Miller JS, McKinnon WM, Skardasis GM. Abdo-minal compartment syndrome after mesenteric revascularization. J VascSurg 2001;34:559-61.

74. Dickinson E, Tuncer R, Nadler E. NOX, a novel nitric oxide scavenger,reduces bacterial translocation in rats after endotoxin challenge. Am J Phy-siol 1999;277:1281-7.

75. Tamion F, Richard V, Bonmarchand G. Reduced synthesis of inflammatorycytokines by a free radical scavenger after hemorrhagic shock in rats. CritCare Med 2000;28:2522-7.

76. Rank N, Michel C, Haertel C. N-acetylcysteine increases liver blood flowand improves liver function in septic shock patients: results of a prospec-tive, randomized, double-blind study. Crit Care Med 2000;28:3799-807.

77. Cuzzocrea S, Mazzon E, Costantino G. Effects of N-acetylcysteine in a ratmodel of ischemia and reperfusion injury. Cardiovasc Res 2000;47:537-48.

78. Gross BD, Sacristan E, Peura RA. Supplemental systemic oxygen supportusing an intestinal intraluminal membrane oxygenator. Artificial Organs2000;24:864-9.

Tirés à part : A. LEON,Département d’Anesthésie Réanimation,

Hôpital Robert Debré,47, rue Cognacq Jay, 51092 Reims cedex.