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UNIVERSITE PIERRE MENDÈS-FRANCE GRENOBLE II – Sciences sociales UFR ÉCONOMIE, STRATÉGIES, ENTREPRISE MASTER SCIENCES DU TERRITOIRE SPÉCIALITÉ PROFESSIONNELLE « Outils, Gestion et Dynamique du Développement Territorial » OGDDT PARCOURS « Conduite de Projet de Développement Territorial » CPDT Internet et Développement : Exemple de l’accès, de l’utilisation et de l’impact d’Internet sur les milieux populaires de Rosario, Argentine. Septembre 2006 Cindy DROGUE Enseignants encadrants : Jean-Christophe SIMON et Jean LAPEZE

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Page 1: Internet et Développement€¦ · a. Renforcer les capacités des citoyens pour décider et prendre contrôle de leur vie. 25 b. Un moyen d’atteindre les tant désirés « Objectifs

UNIVERSITE PIERRE MENDÈS-FRANCE GRENOBLE II – Sciences sociales UFR ÉCONOMIE, STRATÉGIES, ENTREPRISE

MASTER SCIENCES DU TERRITOIRE

SPÉCIALITÉ PROFESSIONNELLE « Outils, Gestion et Dynamique du Développement Territorial »

OGDDT

PARCOURS « Conduite de Projet de Développement Territorial »

CPDT

Internet et Développement : Exemple de l’accès, de l’utilisation et de l’impact d’Internet sur les milieux

populaires de Rosario, Argentine.

Septembre 2006 Cindy DROGUE Enseignants encadrants : Jean-Christophe SIMON et Jean LAPEZE

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UNIVERSITE PIERRE MENDÈS FRANCE GRENOBLE II – Sciences sociales UFR ÉCONOMIE, STRATÉGIES, ENTREPRISE

MASTER SCIENCES DU TERRITOIRE

SPÉCIALITÉ PROFESSIONNELLE « Outils, Gestion et Dynamique du Développement Territorial »

OGDDT

PARCOURS « Conduite de projet de Développement Territorial »

CPDT

Internet et Développement : Exemple de l’accès, de l’utilisation et de l’impact d’Internet sur les milieux

populaires de Rosario, Argentine.

Septembre 2006

Cindy DROGUE Enseignants encadrants : Jean-Christophe SIMON et Jean LAPÈZE

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AVERTISSEMENT

L’Université Pierre Mendès-France de Grenoble n’entend donner aucune approbation ni improbation aux opinions émises dans les mémoires des candidats au Master ; ces opinions doivent être considérées comme propres à leur auteur. Le mémoire est un essai d’application des méthodes et outils acquis au cours de la formation. Il ne saurait donc être considéré comme un travail achevé auquel l'Université conférerait un label de qualité qui l'engagerait. Ce travail est considéré à priori comme un document confidentiel qui ne saurait être diffusé qu’avec le double accord de son signataire et de l’entreprise concernée.

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A mon Binôme adoré parti bien trop tôt…

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« Faites que vos rêves dévorent votre vie, avant que votre vie ne dévore vos rêves.»

SAINT-EXUPERY

« Qui veut vivre en société à cette époque et en ce lieu sera nécessairement confronté à la société en réseaux.

Car nous sommes bel et bien entrés dans la Galaxie Internet. »

Manuel CASTELLS

« Se développer

sans Internet aujourd’hui serait comme s’industrialiser

sans électricité hier» Manuel CASTELLS

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REMERCIEMENTS

M es premières pensées sont adressées à toutes les personnes de l’équipe Nodo Tau.

J’apporte toute ma reconnaissance et mes remerciements à chacun d’entre eux et à l’ensemble de mon entourage argentin. A tous ces gens qui m’ont fait découvrir et aimer l’Argentine, qui m’ont donné l’envie d’y revenir et de m’y installer…

Ensuite je tiendrais à apporter ma reconnaissance et mes remerciements à M. Jean-

Christophe Simon et M. Jean Lapèze qui ont tous deux encadré mon travail, m’ont apporté conseils et orientations dans la construction de ma réflexion et qui aussi ont accepté que je soutienne ce mémoire par webcam.

Remercier également toutes les personnes rencontrées lors de mes enquêtes me tient à cœur.

Je leur suis très reconnaissante d’avoir coopéré et de m’avoir accordé de leur temps.

Comment ne pas saluer aussi et adresser mes plus profondes pensées aux personnes restées

en France. Très chers amis et famille, merci.

I doles, c’est comme cela que je m’amuse à les nommer. J’adresse donc, pour finir, ma plus

grande gratitude à Edward Bach et Françoise Coullet, sans qui rien n’aurait était possible…

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SOMMAIRE

AVERTISSEMENT ..................................................................................................................................... 3

INTRODUCTION GÉNÉRALE...................................................................................................................... 9

1ÈRE PARTIE: DÉVELOPPEMENT ET INTERNET : LE CAS ARGENTIN ......................................................... 13

I. LA REVOLUTION INFORMATIONNELLE........................................................................................................ 13 1. DES BOULEVERSEMENTS IRREVERSIBLES DANS L’ENSEMBLE DE LA SOCIETE 13 a. Un nouveau paradigme technologique organisé autour des NTIC 13 b. Des répercussions économiques, politiques, sociales et culturelles 14 2. L’HOMME AU CŒUR DU RESEAU 15 a. Le réseau : la nouvelle forme d’organisation de la société 15 b. L’information : un produit particulier qui s’enrichit une fois partagé 16 3. LA FRACTURE NUMERIQUE DANS LE MONDE ET EN ARGENTINE 17 a. Internet : le réseau mondial le plus mal distribué 17 c. 74 % des argentins "non-connectés" 20 II. MAIS AU FAIT C’EST QUOI INTERNET ?......................................................................................................... 20 1. UNE NAISSANCE INSOLITE : FECONDATION MILITAIRE ET DEVELOPPEMENT UNIVERSITAIRE 20 a. ARPANET : un projet du département américain de la défense… 20 b. …développé par le milieu universitaire 21 2. UN RESEAU PLANETAIRE INFORMATIQUE 21 a. Le réseau des réseaux 21 b. La toile comme utopie 22 3. L’INTERNET EST UN SUJET SOCIAL, PAS SEULEMENT TECHNIQUE OU COMMERCIAL 23 a.Un espace d’interaction entre les Hommes… 23 b. …générant de nouveaux processus sociaux 23 III. INTERNET ET DEVELOPPEMENT SOCIAL....................................................................................................... 24 1. INTERNET ET LUTTE CONTRE LA PAUVRETE 25 a. Renforcer les capacités des citoyens pour décider et prendre contrôle de leur vie. 25 b. Un moyen d’atteindre les tant désirés « Objectifs de Développement pour le Millénaire ». 25 2. IMPACTS SOCIAUX POSITIFS D’INTERNET : LES PREALABLES NECESSAIRES 27 a.Accès équitable 27 b. Usage avec sens 29 3. ACTIONS PUBLIQUES ET INITIATIVES ASSOCIATIVES ARGENTINES EN FAVEUR D’INTERNET 29 a. Des politiques publiques peu efficaces 29 b. Actions des Associations et des ONG argentines 30

2ÈME PARTIE : L’UTILISATION, L’ACCES ET L’IMPACT D’INTERNET SUR LES MILIEUX POPULAIRES DE ROSARIO ..................................................... 34

I. LA DEMARCHE METHODOLOGIQUE DE L’ETUDE .............................................................................................. 34 1. CONTEXTE ET JUSTIFICATION DU CHOIX D’ETUDE 34 2. OBJECTIFS 35 3. APPROCHE METHODOLOGIQUE 35

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a.Recherche documentaire 35 b.Travail de terrain 36 c.Traitement et Analyse des données 36 II. ROSARIO : PORTRAIT D’UNE VILLE EN MOUVEMENT ........................................................................................ 36 1. CONTEXTE HISTORIQUE ET GEOGRAPHIQUE 37 2. ASPECTS ÉCONOMIQUES 38 3. CONTEXTE INSTITUTIONNEL ET POLITIQUE 40 4. ASPECTS DEMOGRAPHIQUES ET SOCIAUX 42 III. L’IMAGE DES LIEUX DE NAVIGATION … ....................................................................................................... 44 1. LES CYBERCAFES ET LES TELECENTRES COMMUNAUTAIRES : LIEUX D’ACCES POUR LES PLUS PAUVRES 44 a.Que sont les cybercafés et les Télécentres Communautaires ? 44 b. Télécentres : Propositions d’améliorations 46 c. Cybercafés : des installations qui souvent détournent les lois 48 2. DES LIEUX CREATEURS DE LIEN SOCIAL 49 a.Des lieux d’échanges et de proximité 49 b.Des lieux catalyseurs 49 IV. A LA RENCONTRE DES NAVIGATEURS…......................................................................................................50 1. QUI SONT-ILS ? 50 a.Sexe et âge 50 b.Niveaux d’études et rémunération 50 2. POURQUOI UTILISENT-ILS INTERNET? 51 3. LEURS REPRESENTATIONS D’INTERNET 52

3ÉME PARTIE: PERSPECTIVES ET PROPOSITIONS D’ACTIONS .................................................................. 54

I. METTRE LES TIC AU SERVICE DU DEVELOPPEMENT INTEGRE DE LA VILLE DE ROSARIO........................................... 55 1. AU SERVICE D’UNE MEILLEURE GOUVERNANCE 55 2. AU SERVICE DE L’EGALITE ENTRE LES SEXES, LES AGES ET LES DIFFERENCES 57 3. AU SERVICE DE L’EDUCATION ET LA FORMATION 58 4. AU SERVICE DE LA SANTE 59 5. AU SERVICE DU TOURISME 59 6. AU SERVICE DU DEVELOPPEMENT ECONOMIQUE 60 II. QUELLE DEMARCHE ADOPTER? ................................................................................................................. 60 1. UNE DEMARCHE D’INTELLIGENCE TERRITORIALE 60 2. EFFECTUER UN DIAGNOSTIC 62

CONCLUSION ......................................................................................................................................... 64

BIBLIOGRAPHIE ..................................................................................................................................... 66

TABLE DES ILLUSTRATIONS .................................................................................................................. 68

ANNEXES............................................................................................................................................... 69

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INTRODUCTION GÉNÉRALE

Le stage qui a servi de base à l’élaboration du présent mémoire s’inscrit dans le cadre de la validation

du Master Sciences du Territoire, Spécialité « Outils, Gestion et Dynamique du Développement

Territorial », Parcours « Conduite de Projets de Développement Territorial » de l’Université Pierre

Mendès-France de Grenoble (Grenoble II). Il s’est déroulé du 2 mai au 30 septembre 2006 au sein de

l’ONG Nodo Tau1 à Rosario en Argentine sous la responsabilité conjointe de Carolina Fernandez et

Danilo Lujambio.

Nodo Tau est une Organisation Non Gouvernementale fondée par des professionnels de l'informatique

et des communications préoccupés par les possibilités qu’offrait l'apparition du Réseau Internet pour

les organisations sociales de la région de Rosario en Argentine.

Nodo Tau travaille donc afin de faciliter l'accès aux nouvelles technologies de l'information à des

groupes de base : organisations populaires, syndicats et associations qui à leur tour dynamisent la

communication et l'organisation entre tous les secteurs liés à la lutte contre la pauvreté et l'exclusion, à

la préservation de l’environnement et à la défense des droits humains et sociaux.

Nodo Tau essaie donc de donner un "bon sens" aux nouveaux changements technologiques et de les

mettre intelligemment au service d'une société égalitaire et démocratique.

Présentation de la structure

L’ONG est née en 1995 et a développé le premier serveur Internet communautaire2 de la région de

Rosario. Les efforts des premiers temps ont visé à faciliter l’accès à Internet à des organisations

sociales de la ville en diffusant le potentiel du réseau Internet, méconnu à cette époque, par bon

nombre de groupes et d’institutions. Ensuite, les activités de l’ONG se sont diversifiées d’année en

année : développement et hébergement de pages web d’organisations sociales, conseils en matière de

communication, formation aux nouvelles technologies, maintenance et réparations de postes

informatiques, ateliers thématiques sur des publics cibles (jeunes en situation de pauvreté par

exemple).

1 En francais "Nodo" signifie nœud. Et "Tau" est la dix-neuvième lettre de l’alphabet grec et la dernière de l’alphabet hébraïque. C’est le signe du mouvement franciscain qui a soutenu l’ONG à ses débuts. 2 Un serveur informatique est un ordinateur qui propose un/ou des services aux ordinateurs qui s'y connectent à travers un réseau informatique, les clients. Ce service peut consister à stocker des fichiers, des logiciels, transférer le courrier électronique, héberger un site Web, etc. En d’autres termes un serveur stocke des données et/ou des logiciels, qui seront exécutés depuis les ordinateurs clients n'importe où puisque reliés à un réseau. Les termes client et serveur viennent du fait qu'un client est demandeur d'un service et qu'un serveur rend ce service. Pour l’exemple du serveur web communautaire de Nodo Tau, c’est donc un ordinateur qui offre des services à d’autres ordinateurs, par le réseau Internet (Web), destinés à une communauté.

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Puis en 2001, Nodo Tau lance son programme enREDando toujours en action aujourd’hui.

enREDando est un programme destiné à démocratiser et faciliter l’accès aux Nouvelles Technologies

de l’Information et de la Communication aux personnes et organisations sociales et communautaires

travaillant pour la lutte contre l’exclusion et la pauvreté.

Le programme compte trois actions prioritaires :

- les Télécentres Communautaires d’Informatique (TCI) : Les Télécentres sont des espaces d’usage

communautaire de l’informatique et des services d’Internet créés dans le but de renforcer les projets de

chaque organisation et de favoriser l’inclusion numérique. Les premiers destinataires sont les

organisations qui ont une action reconnue au sein de leur communauté et une antériorité par rapport à

l’intervention de Nodo Tau et qui développent des activités liées à la lutte contre l’exclusion et la

pauvreté. L’action de Nodo Tau vise donc à renforcer ces activités et non à les remplacer ou les

entraver.

Ce projet du programme enREDando forme, avec une méthodologie adaptée, les coordinateurs des

Télécentres afin qu’ils enseignent au reste de la communauté, les savoirs et connaissances

indispensables à un bon usage de l’outil informatique et notamment d’Internet. Ceci dans l’objectif de

multiplier et d’échanger les expériences.

Par le biais de sa « Banque de machines usées », Nodo Tau recycle les machines données par des

entreprises et institutions et permet ainsi aux Télécentres de s’équiper en matériel.

- Le site régional des organisations communautaires: www.enredando.org.ar est un portail régional

qui rassemble toutes les activités et les informations développées par les organisations

communautaires de la région de Rosario. Parmi l’ensemble de son contenu, on peut y trouver une base

de données des organisations, un agenda des activités, une bibliothèque de documents, des sections

thématiques, des reportages et informations divers. Son contenu est actualisé de façon hebdomadaire.

- Formation et soutien aux organisations : le programme enREDando permet la réalisation de cours

et ateliers personnalisés selon les besoins de chaque organisation. Depuis le début du programme se

sont déroulés plus d’une vingtaine de cours intensifs d’une durée d’environ 20 heures permettant ainsi

de former et d’appliquer les outils informatiques et de communication aux propres nécessités des

organisations et de réfléchir par ailleurs à l’optimisation de ces derniers.

Nodo Tau appartient au réseau APC (Association for progressive Communication) qui est un réseau

global d’information et de communication informatisé, voué à servir les ONG et les citoyens activistes

qui travaillent pour la justice sociale, le développement durable et toutes les thématiques qui y sont

liées. Composé d’un consortium de 21 réseaux internationaux, APC promeut une communication

effective et efficace et des outils pour partager avec la société civile l’information liées aux nouvelles

technologies. Au travers de cette organisation globale, APC offre ses services à plus de 40 000 ONG,

activistes, éducateurs, politiques et leaders de communautés, dans 133 pays.

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Présentation du stage

Notre mission de stage au sein de l’ONG Nodo Tau a consisté, dans sa partie principale, à connaître,

comprendre et analyser l’utilisation, l’accès et l’impact d’Internet sur les secteurs populaires de

Rosario et de saisir la construction des systèmes de représentation autour de cet outil chez des

populations qui en sont à priori éloignées.

A l’intérieur de chaque territoire aujourd’hui, le succès d’Internet creuse l’écart entre ses utilisateurs et

les publics qui en sont plutôt isolés. Notre projet d’étude s’intéresse donc, de manière globale, aux

initiatives développées et aux pratiques en cours chez les populations qui auraient à priori un accès

réduit à Internet sur le territoire urbain de Rosario en Argentine.

Nous avons émis en hypothèse générale de départ qu’Internet peut rendre plus aisé l’accès à

l’information et faciliter ainsi la capacité d’action des populations et par ailleurs renforcer leurs

initiatives et liens et sociaux. Les sous hypothèses ont été les suivantes :

� le développement soutenable d'une localité est rendu possible grâce à l'identité, à l'auto-estime et à

la valorisation des ressources locales de ses habitants entre autres.

� les technologies de l’information et de la communication, Internet particulièrement, facilitent le

dialogue et la participation des citoyens.

� les organisations locales peuvent s'approprier des moyens d’informations et de communications et

les mettre au service de l'agenda local de développement.

Chacune de celles-ci sera plus amplement détaillée dans le corps du mémoire. Nous avons basé notre

travail de terrain sur des enquêtes qualitatives, auprès d’un échantillon de la population, sur les

pratiques et les attentes des habitants vis-à-vis d’Internet en essayant de comprendre les rapports et les

usages qu’ils entretiennent avec cet outil.

Ce mémoire tentera donc à la fois de présenter nos résultats et analyses liés à l’étude de terrain et de

proposer aussi quelques pistes de réflexions théoriques. Et à ce titre les lignes et paragraphes qui vont

suivre sont guidés par une idée générale : nous pensons qu’Internet est un puissant, fédérateur et

incontournable outil à mettre au service du développement dans les pays du Sud. Qu’aussi il est à

considérer comme une invention aussi magistrale et révolutionnaire que l’ont été en leur temps

l’écriture, l’imprimerie ou l’électricité par exemple. Et que pour l’instant encore 84%3 de la planète

reste à quai alors que paradoxalement le train va toujours plus vite et plus loin. C’est donc bien cela

qui est en jeu ici: tenter de comprendre, un peu mieux et très modestement, pourquoi, comment et dans

quelle mesure tout le monde doit et peut monter dans le « cybertrain ». L’Argentine et Rosario nous

servirons d’exemple.

3 http://www.internetworldstats.com

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La première partie visera à éclairer la question du lien entre développement et Internet, ce que cela

implique et engendre. Nous exposerons ensuite les résultats de notre étude de terrain afin de rendre

compte de l’utilisation, de l’accès et de l’impact d’Internet sur les milieux populaires du territoire

urbain de Rosario. Nous terminerons l’exposé en proposant quelques pistes de réflexion et

propositions d’actions afin de montrer de quelle manière les TIC peuvent être mise au service du

développement intégré de la ville de Rosario.

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1ÈRE PARTIE: DÉVELOPPEMENT ET INTERNET : LE CAS ARGENTIN

Accoler d’emblée les deux termes "Internet" et "Développement" peut paraître quelque peu

étonnant. Cependant, et c’est ce que nous allons tenter de démontrer ici, il nous semble que le potentiel

d’Internet en terme de développement soit particulièrement fort et que donc ce champ d’action soit

porteur de grands espoirs en ce début de XXI ème siècle. Depuis une vingtaine d’années maintenant, la

révolution informationnelle est le moteur d’une aventure fabuleuse qui remet en question les manières

de travailler, de vivre ensemble, de penser et de rêver.

Il nous est, en effet, donné de vivre ce que certains nomment "Révolution informationnelle" ou bien

encore "Ere de l’information". Cette période apporte une somme de changements radicaux et

profonds à l’ensemble des secteurs de la société, invente une nouvelle forme de fonctionnement : le

réseau, et aussi inévitablement exclus les plus faibles et vulnérables. Il conviendra donc de tour à tour

revenir sur ces items afin de les explorer, de les analyser et d’ouvrir donc des perspectives

d’éclaircissements.

I. La révolution informationnelle Selon Manuel Castells, elle est caractérisée par trois traits fondamentaux : information, réseau

et globalité. La nouvelle économie est donc tout d’abord informationnelle dans la mesure où la

productivité et la compétitivité des agents et unités économiques sont basées sur leur capacité à

générer, traiter et appliquer une information efficace basée sur la connaissance. Elle est aussi globale

parce que les activités clés de production, consommation et distribution sont organisées à l’échelle

planétaire. Enfin elle est en réseau parce que la concurrence s’exprime dans un réseau global

d’interaction entre réseaux d’affaires.

1. Des bouleversements irréversibles dans l’ensemble de la société

a. Un nouveau paradigme technologique4 organisé autour des NTIC

La société de l'information désigne une société dans laquelle l’information et les technologies

qui y sont associées, communément nommées NTIC, jouent un rôle central et moteur à la fois comme

facteurs de production et comme produits à part entière. Elle est en général placée dans la continuité

4 « La notion de paradigme technologique […] permet de penser l’essence de la transformation technologique en cours dans son interaction avec l’économie et la société. » CASTELLS Manuel, La société en réseaux. 1e tome, L’ère de l’information, Paris, Fayard, page 101.

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de la société industrielle et est considérée comme un événement historique au moins aussi capital que

cette dernière. Et d’ailleurs si l’on parle de révolution c’est bien que les bouleversements qu’elle

entraîne sont irréversibles, inondent toute la société et transforment les relations et les rapports sociaux

aussi bien dans la sphère de la production qu’en dehors. Il y a une rupture, un avant et un après.

Aujourd’hui dans cette nouvelle société, les technologies de l’information et de la communication sont

l’équivalent de ce qu’ont représenté les nouvelles sources d’énergie pour la révolution industrielle : la

machine à vapeur, l’électricité ou les carburants fossiles par exemple.

Les NTIC sont généralement définies comme l’ensemble des satellites, des câbles, des réseaux

on-line, des applications télématiques qui permettent de stocker, traiter et gérer des données tout en

facilitant la circulation des idées et le contact entre les hommes. Elles constituent selon Manuel

Castells « un ensemble convergent des technologies de la micro-électronique, de l’informatique

(machines et logiciels), des télécommunications/diffusion et de l’optoélectronique »5. C’est en raison

de cette interaction de l’informatique et de l’électronique que les applications des NTIC répondent aux

besoins des entreprises, de l’Etat, des ménages et des individus.

Les NTIC, et à fortiori les réseaux électroniques et Internet, ne peuvent être assimilés à des

technologies parmi d’autres car elles interviennent partout où les hommes manipulent et échangent des

signes (textes, images, sons, données). Autrement dit dans la quasi-totalité des activités humaines

depuis le monde du travail jusqu’à celui de la vie de la cité, en passant par la formation, la culture, la

santé... Elles concernent ainsi tous les hommes parce qu’en modifiant profondément leurs façons de

communiquer et d’échanger, elles bouleversent leurs manières de vivre ensemble, de s’organiser, de

produire.

b. Des répercussions économiques, politiques, sociales et culturelles

La nouvelle économie, née pendant le dernier quart du XX è siècle, revêt donc certains

changements et caractéristiques si profonds que ses répercussions éclaboussent et bouleversent

l’ensemble des secteurs de notre société. Les impacts sont profonds sur notre mode de vie et de travail,

notre organisation sociale et nos habitudes culturelles.

Cette nouvelle donne implique par exemple (nous ne pourrons ici faire le tour complet de la question

puisque l’exercice que nous effectuons nous invite à la synthèse) une nouvelle perspective dans les

relations sociales. Cette nouvelle société semble en effet faire émerger la personne davantage que dans

les modèles antérieurs. C'est-à-dire qu’aux nœuds du réseau informationnel, évoluent désormais,

simultanément, des acteurs diversifiés, communicants et potentiellement créateurs. Ce ne sont plus les

" usagers " de naguère, passifs utilisateurs de services pensés par d’autres, mais les

5 CASTELLS Manuel, La société en réseaux. 1e tome, L’ère de l’information, 2001, Paris, Fayard, page 54.

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producteurs/consommateurs de nouveaux outils interactifs décuplant le pouvoir et l’efficacité de

chacun.

Par ailleurs la répercussion en terme politique est très éloquente. Aujourd’hui les citoyens

peuvent s'organiser librement pour agir collectivement dans la société en fonction de leurs convictions

et de leurs intérêts. Le développement des interdépendances à l'échelle de la planète et celui des

nouveaux moyens de communication, à commencer par Internet, impose une nouvelle échelle et de

nouveaux modes d'organisation, plus vastes et moins hiérarchisés que par le passé. Les réseaux et les

alliances citoyennes, comme les forums sociaux mondiaux, sont des formes d'une communauté

mondiale en émergence.

Le décalage qui est en train de se créer entre cette nouvelle société et celle qui l’a précédée est

la conséquence d’un changement de paradigme, d’un saut culturel. La pensée cartésienne linéaire,

séquentielle et proportionnelle appartient peut être au passé. Aujourd’hui la culture de la complexité,

partie intégrante du nouveau paradigme, se réfère davantage à la pensée systémique, au non-linéaire et

au multidimensionnel.

2. L’homme au cœur du réseau

a. Le réseau : la nouvelle forme d’organisation de la société

La société industrielle était caractérisée par la centralisation des moyens de production, la

distribution massive d’objets standardisés, la spécialisation des tâches et leur contrôle hiérarchique.

Son modèle quant à lui, emprunté à la géométrie ou à la mécanique, était la pyramide ou l’engrenage.

L’avènement du traitement électronique des informations, de la numérisation des données et du

développement des réseaux interactifs de communication implique la décentralisation des tâches, la

désynchronisation des activités et la dématérialisation des échanges. La nouvelle société s’organise en

réseaux plutôt qu’en pyramides de pouvoirs, en cellules interdépendantes plutôt qu’en engrenages

hiérarchiques, au sein d’un environnement global informationnel plutôt que par filières industrielles

linéaires.

Dans cette nouvelle économie, tout fonctionne en réseaux, y compris évidemment l’entreprise.

Celle-ci, sous le mode de développement industriel, était structurée de façon hiérarchique et verticale

et reposait sur la division technique et sociale du travail, selon les principes mis en avant par

l’ingénieur Taylor, qui permettait de contrôler étroitement le travail parcellisé effectué par chaque

ouvrier. Cette organisation du travail, en accroissant de façon exponentielle la productivité, permit la

production en grande quantité de biens standardisés rendus accessibles à la consommation de masse.

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Dans le mode de développement informationnel, l’univers des entreprises se décentralise et se

reconstitue sous forme d’unités autoprogrammées et autodirigées, reposant sur la participation, y

compris celle des travailleurs. Ces unités se coordonnent horizontalement dans un réseau permettant

toute la souplesse face à un marché de plus en plus fragmenté et aléatoire car le marché n’est plus

seulement régi par l’offre et la demande, mais dépend plus que jamais de centaines de milliers

d’expériences, d’intérêts et de décisions stratégiques à l’œuvre dans le « réseau des réseaux ». La mise

en réseaux des entreprises ne supprime cependant pas le pouvoir économique exercé par les grandes

firmes : « Ce qui importe dans ce modèle, c’est la désintégration verticale de la production le long

d’un réseau d’entreprises, processus qui remplace l’intégration verticale des départements au sein de

la même société. Le réseau permet une plus grande différenciation du travail et du capital composant

l’unité de production, et favorise probablement les motivations et la responsabilité, sans

nécessairement modifier le mode de concentration de la puissance industrielle et de l’innovation

technologique6. »

b. L’information : un produit particulier qui s’enrichit une fois partagé

Ainsi potentiellement, la nouvelle économie développe considérablement la place de l’homme

dans toutes les sphères de la société en renforçant la place des savoirs et des connaissances, alors

qu’au contraire la révolution industrielle a entraîné le primat des moyens matériels de production sur

les hommes. Contrairement à la révolution industrielle, les biens de la révolution informationnelle

valorisent et contiennent énormément d’informations. Leurs débouchés sont bien sûr toujours

dépendants du pouvoir d’achat des consommateurs, mais aussi de leur pouvoir d’utilisation, qui

nécessite beaucoup plus de formation. En effet dans cette nouvelle société un degré élevé de formation

et de développement de tous les hommes est nécessaire pour maîtriser les nouvelles technologies, et

les informations et les connaissances qu’elles véhiculent.

La nature même de l’information est riche d’enseignement. À la différence d’un produit

industriel, si on livre une information, on la possède encore et cela en même temps que le nouveau

détenteur : dès lors, il est possible de partager ses coûts de production. Cette possibilité est renforcée

par le fait que l’accumulation privée de l’information est contre-productive. C’est sa diffusion

publique qui est productive. L’information est un produit particulier qui ne peut s’enrichir que s’il

circule et qui dépérit s’il est maintenu en vase clos. Dès lors, la révolution informationnelle est

porteuse d’éléments non marchands, de partage, d’un dépassement du marché, ce qui ne veut pas dire

que certains n'en tirent pas de gros profit malgré tout, disproportionnés même, tout est là.

6 CASTELLS Manuel, La société en réseaux. 1e tome, L’ère de l’information, Paris, Fayard, 2001, chapitre 3.

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Cette société de l’information dont on dit aussi qu’elle est société de la connaissance et de

l’intelligence, se développe sur la base d’une nouvelle culture de l’information. Les échanges de

données et la communication électronique généralisée entre les hommes et les groupes, tant à l’échelle

planétaire qu’au niveau local, constituent désormais un facteur incontournable de développement

individuel et collectif.

Mais alors l’idée essentielle réside dans l’urgence de la lutte contre la montée de

« l’appropriation intellectuelle », qui se développe face au développement de cette logique de partage

et de démultiplication des connaissances. De fortes et fédératrices initiatives vont dans ce sens : le

mouvement autour du logiciel libre7 en est peut être la plus significative. Manuel Castells résume, de

manière brillante, le débat en jeu sur cette question en avançant que l’appropriation privée du logiciel

correspond à l’appropriation de l’écriture aux origines de l’humanité8.

3. La fracture numérique dans le monde et en Argentine

a. Internet : le réseau mondial le plus mal distribué

Nous avons vu combien les activités économiques, sociales, politiques et culturelles sont

aujourd’hui structurées par et autour des NTIC. Et au premier rang de ces nouveaux espaces de

communication et des nouvelles technologies associées à la société de l’information se place bien

évidemment Internet avec son essor prodigieux. Le nombre d’internautes à l’échelle mondiale est en

effet passé de 16 millions en décembre 1995 à plus 1,043 milliards en juin 20069. C’est pourquoi,

comme l’explique Manuel Castells, nous pensons que « le non accès à ces réseaux est devenu la

forme la plus dommageable d’exclusion dans notre économie et notre culture10 ». Et en dépit de

l’importance toute particulière que revêt la nécessité d’une diffusion égalitaire et équitable de cet outil

sur l’ensemble de la planète, il convient de noter qu’Internet est le réseau mondial le plus mal

distribué. Le fond du problème est évidemment la fracture sociale et non pas la fracture digitale elle-

même c'est-à-dire l’inégalité dans l’accès à Internet. Les différences statistiques entre les pays du Sud

et ceux du Nord concernant l'accès des usagers aux NTIC ne sont rien d'autre que le reflet de cette

fracture socio-économique. Il paraît important de rajouter qu’à lui seul l’accès n’est pas suffisant pour

7 Un logiciel libre est un logiciel dont toute personne qui en possède une copie a le droit d'utiliser, d'étudier, de modifier (principale et fondamentale différence d’avec l’open source, voir page 20) puisque le code source est ouvert et de redistribuer. Ce droit est souvent donné par une licence libre. Richard Stallman a formalisé la notion de logiciel libre dans la première moitié des années 1980 puis l'a popularisée avec le projet GNU et la Free Software Foundation (FSF). Le logiciel libre le plus connu est Linux (système d’exploitation). Les logiciels libres sont présentés comme la principale alternative aux « logiciels propriétaires », principalement ceux de Microsoft. 8 “Es como si, cuando se inventó la escritura, alguien se hubiese apropiado de ella”. CASTELLS Manuel, Software Libre, La Vanguardia, janvier 2005. 9 http://www.internetworldstats.com 10 CASTELLS Manuel, La galaxie Internet, Paris, Fayard, page 11.

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18

résoudre le problème, nous y reviendrons. Mais il s’agit d’une condition qu’il faut satisfaire s’il l’on

veut surmonter l’inégalité dans une société dont les fonctions et les groupes sociaux dominants

s’organisent de plus en plus autour d’Internet.

Le rôle central d’Internet dans toute activité sociale, économique et politique aujourd’hui

condamne ceux qui n’y ont pas accès et ceux qui sont incapables de s’en servir efficacement à la

marginalité. La différenciation entre connectés et non connectés ajoute donc un nouveau clivage

fondamental aux facteurs existants de l’inégalité et de l’exclusion sociale.

Les statistiques sur le nombre d'internautes s'obtiennent généralement au moyen de sondages,

visant à déterminer le nombre d'individus ayant un certain âge minimum, et ayant accédé à Internet au

cours des derniers mois. L'âge minimum et la durée varient selon les études, qui peuvent donc fournir

des résultats différents. D'autre part, les statistiques sur le nombre d'internautes diffèrent de celles sur

les accès Internet. En effet, un accès Internet dans un foyer peut être utilisé par plusieurs personnes,

de même que certaines personnes peuvent accéder à Internet sur leur lieu de travail, dans un cybercafé

ou ailleurs. Le site "Internet World Stats", sur lequel nous nous sommes appuyés, regroupe un

ensemble de statistiques sur l'usage d'Internet dans les différents pays du monde, obtenues de

différentes sources (Nielsen//NetRatings11, International Telecommunications Union, NIC (Network

Information Center) locaux…)

TABLEAU 1 : Répartition mondiale des internautes

Source : http://www.internetworldstats.com

La lecture du tableau 1 nous permet de noter que la diffusion d’Internet touche très

inégalement la planète. Ainsi en juin 2006, sur un total de 1,043 millions d’utilisateurs (16 % de la

population mondiale), la part de l’Amérique du Nord se monte à 22,20% alors qu’elle représente

seulement 5,10% de la population mondiale et celle de l’Europe à 28,50% ; l’Asie (Chine et Japon

compris) représente 35,60% des internautes ; l’Amérique Latine et les Caraïbes, 7,80%, l’Afrique

11 Un leader mondial dans l'Internet et les études de marché.

Régions Population % de la part

mondiale Utilisateurs d'Internet

% de la population

internaute (dans chaque zone

géographique)

% des utilisateurs mondiaux

Afrique 915, 210,928 14,10% 23, 649,000 2,60% 2,30%

Asie 3, 667, 774,066 56,40% 364, 270,713 9,90% 35,60%

Europe 807, 289,020 12,40% 291, 600,898 36,10% 28,50%

Moyen Orient 190, 084,161 2,90% 18, 203,500 9,60% 1,80%

Amérique du nord 331, 473,276 5,10% 227, 303,680 68,60% 22,20%

Amérique du sud et Caraïbes 553, 908,632 8,50% 79, 962,809 14,40% 7,80% Océanie/Australie

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19

2,30% et le Moyen-Orient 1,80%. Cette répartition, comme nous l’avons souligné, n’est aucunement

liée à la part respective de ces régions dans la population totale mondiale. (Voir graphique ci-dessous)

LA FRACTURE NUMERIQUE A L’INTERIEUR DES PAYS Malgré le peu de données démographiques sur les utilisateurs d’Internet, il est clair que ces derniers ne sont pas répartis uniformément dans la population. Dans la plupart des pays, les internautes appartiennent essentiellement : • Aux zones urbaines et à des régions précises : en Chine, les quinze provinces les moins connectées comptent seulement 4 millions d’utilisateurs d’Internet sur une population de 600 millions d’individus, alors que sur 27 millions d’habitants, les villes de Shan-ghai et Beijing comptent 5 millions d’internautes. En République dominicaine, 80 % des utilisateurs d’Internet vivent dans la capitale, Saint-Domingue. En Thaïlande, 90 % vivent dans les zones urbaines, qui rassemblent seulement 21 % de la population totale du pays. Sur les 1,4 millions de connexions à Internet que l’on dénombre en Inde, plus de 1,3 millions sont concentrés dans cinq villes ou Etats : Delhi, Karnataka, Maharashtra, Tamil Nadu et Mumbai. • Aux populations possédant un bon niveau d’instruction et de revenu : en Bulgarie, les 65 % les plus pauvres de la population représentent seulement 29 % des utilisateurs d’Internet. Au Chili, 89 % des internautes ont suivi des études supérieures, contre 65 % au Sri Lanka et 70 % en Chine. • A la jeunesse : dans tous les pays, la communauté des internautes comprend une forte proportion de jeunes. En Australie, les jeunes de 18 à 24 ans ont cinq fois plus de chances d’utiliser Internet que les personnes de plus de 55 ans. Au Chili, 74 % des utilisateurs ont moins de 35 ans ; en Chine, cette proportion est de 84 %. D’autres pays suivent le même schéma. • A la population masculine : les hommes représentent 86 % des internautes en Éthiopie, 83 % au Sénégal, 70 % en Chine, 67 % en France et 62 % en Amérique latine.

Sources : Rapport mondial sur le développement humain 200112.

GRAPHIQUE 1: Internautes et Population mondiale

14,10%

56,40%

12,40% 5,10% 8,50%

35,60%

28,50%

7,80%

2,90%

2,30% 22,20%1,80%

0%10%20%30%40%50%60%70%80%90%

100%

Afr

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Asi

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tral

ie

% de la part mondiale

% des utilisateurs mondiaux

Ainsi le monde, son économie, ses réseaux de communications se transforment avec Internet

et autour de lui en laissant de côté, pour l’instant, la très grande majorité de la population de la

planète : plus de 84 % en 2006.

12 Ce rapport du PNUD est intitulé “Mettre les nouvelles Technologies au service du développement humain »

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20

c. 74 % des argentins "non-connectés"

Le niveau de pénétration d’Internet est donc incomparablement plus bas dans le monde en

développement. Ainsi en Argentine, pays de notre étude, il n’y a encore que 10 millions de personnes

en ligne, soit seulement 26,40% de la population, contre 68,70 % aux Etats-Unis, 62,9% au Royaume-

Uni, 59 % en Allemagne et 43 % en France.

Toutefois en Argentine, Internet se développe très vite, le nombre d’utilisateurs a bondi de 4,1 millions

en 200213 à 10 millions en 2006 mais il semble que la manière dont l’outil se diffuse aggrave la

fracture numérique. Ainsi 73,5 %14 des internautes argentins vivent dans la région urbaine de Buenos

Aires, la capitale fédérale. La très grande majorité (63,6%) étaient âgés de moins de 30 ans, avaient

une formation universitaire (57 %), étaient de catégories socio professionnelles élevées (C1-C2

94,3%15) et étaient des hommes (54,4%) en 200316. Internet se diffuse donc rapidement en Argentine

mais son expansion est socialement et géographiquement limitée.

II. Mais au fait c’est quoi Internet ?

1. Une naissance insolite : fécondation militaire et développement universitaire

a. ARPANET : un projet du département américain de la défense…

L'histoire d'Internet commence aux Etats-Unis dans les années soixante avec la mise en place

de réseaux grande distance à communication de paquets. À la fin des années 50, dans le contexte de la

Guerre Froide, le département de la défense américain crée un organisme de recherche l'ARPA

(Advanced Research Project Agency) chargé d'étudier la construction d'un réseau de communication

capable de continuer à fonctionner malgré une attaque nucléaire massive de la part de l'URSS ou en

d’autres termes un réseau capable de garder ouvertes des voies de communication afin que les données

puissent arriver à destination quel que soit l'état de destruction du pays. En 1969, naît donc Arpanet

(Advanced Research Project Agency Network), l'ancêtre d'Internet. Ce réseau financé par le Pentagone

relie quatre universités américaines : Stanford, UCLA, Santa Barbara et Utah. Il fonctionne selon deux

principes essentiels : en cas de rupture d'une liaison, l'information emprunte automatiquement une

autre voie de communication pour atteindre son but ; les conventions de communication autorisent la

connexion entre des machines hétérogènes. Les premiers essais sont concluants : lorsqu'un des centres

13 Rapport « La Sociedad de la Información en la Argentina », Telefonica, 2003. 14 Etude “Accesos a Internet, Décembre 2005, INDEC 15 Rapport “ Estado de la Sociedad de la información en Argentina”, Programa Nacional para la SI, Secretaria de comunicaciones. 16 Rapport « La Sociedad de la Información en la Argentina », Telefonica, 2003

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21

(nœuds) était virtuellement détruit, les données empruntaient d'autres chemins et d'autres nœuds pour

atteindre les destinataires désignés. Si le projet a été un tel succès c’est selon Manuel Castells, que

« L’ARPA a recruté son personnel parmi les scientifiques des universités, leurs amis et les étudiants

de leurs amis.[…]. Comprenant fort bien comment fonctionne la recherche, elle a laissé la plus

grande liberté aux chercheurs sous contrat ou subventionnés, condition nécessaire pour amener des

esprits vraiment novateurs à s’engager dans un projet. »

b. …développé par le milieu universitaire

La culture d’Internet est de cette manière très ancrée dans la tradition universitaire bien que

fécondée dans l’armée. Très vite en effet le réseau Arpanet s'est étendu dans le domaine universitaire

et scientifique notamment par l'usage des conférences électroniques. La fin des années 80 marque un

tournant dans l'évolution du réseau. Arpanet perd son caractère militaire, il adopte le nom d'Internet

(Inter networking) et n'est plus financé par l'ARPA mais par un organisme scientifique civil, la

National Science Foundation (NSF). Un grand nombre d'universités est connecté au réseau de la NSF

qui restera l'épine dorsale d'Internet jusqu'en 1995. Durant cette période, le réseau est principalement

fréquenté par le monde de l'éducation.

C'est l'invention du Word Wide Web qui va contribuer à l'explosion du phénomène Internet en

démocratisant le réseau vieux de 25 ans grâce à sa simplicité d'utilisation et à l'introduction du

multimédia. Le Word Wide Web a été mis au point en 1990 dans le laboratoire du CERN (Centre

Européen de Recherche Nucléaire). Le Web permet à toutes les machines connectées au réseau

Internet de se présenter et d'accéder à des pages d'informations multimédias liées entre elles. Tout

d'abord utilisé par la communauté scientifique, le Web devient accessible au grand public grâce à des

logiciels de navigation diffusés gratuitement (Mosaïc en 1993 puis Netscape en 1994).

« Ce qui ressort de ce rappel des faits, c’est qu’Internet s’est développé dans un environnement sûr

(fonds publics et recherche désintéressée), mais qui n’a brimé ni la liberté de pensée ni l’innovation.

D’un côté les milieux d’affaires étaient incapables de s’offrir le long détour nécessaire pour tirer des

applications rentables d’un projet aussi audacieux. De l’autre quand l’armée fait passer la sécurité

avant tout, la créativité ne peut survivre et quand l’Etat ou les services publics suivent leur instinct

bureaucratique profond l’adaptation l’emporte sur l’innovation.17»

2. Un réseau planétaire informatique

a. Le réseau des réseaux

Internet est un réseau international d'ordinateurs communiquant entre eux grâce à des

protocoles d'échanges de données standard. Plus précisément, Internet est un réseau de réseaux : un

17 CASTELLS Manuel, La Galaxie Internet, Fayard, Paris, page 35-36.

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interréseau. Les différents ordinateurs branchés au réseau Internet peuvent communiquer ensemble de

façon transparente pour l'usager, indépendamment des types d'ordinateurs utilisés (Mac, PC, Unix ou

autres), mais en utilisant cependant les logiciels appropriés.

Internet, le réseau des réseaux, fonctionne selon plusieurs techniques, les protocoles.

� le protocole le plus utilisé, qui est le plus ancien, est le protocole TCP/ IP (transmission control

protocol/ Internet Protocol).

� mais d'autres protocoles tels IPX/SPX sont de plus en plus utilisés car s'adaptant aux nouvelles

fonctionnalités de communication nécessaires suivant les évolutions de l’Internet.

Les différents protocoles de communication ont pour fonction de générer une adresse unique

dénominative et localisante sous forme de numéros pour ainsi pouvoir faire communiquer entre eux

les ordinateurs. Internet est donc simplement un ensemble d'ordinateurs adressés grâce aux différents

protocoles de communication.

b. La toile comme utopie

La Toile (le World Wide Web en anglais) est guidée par un certain idéalisme de base. Celui

qu´on peut considérer comme l´inventeur de la Toile, le britannique Sir Tim Berners-Lee, inventeur du

premier navigateur, du protocole d´écriture HTTP et président du World Wide Web Consortium a en

effet abandonné tous ses droits afin de permettre la rapide diffusion du protocole http et de l´idée de

Toile en général. En outre, il a toujours insisté sur l´idée que la Toile devait être un système non

hiérarchisé où les liens se font directement par hypertexte et non par un nœud centralisant les

informations. La Toile quelque part permet la réalisation d´un vieux rêve de réorganisation de

l´information selon non plus des modèles linéaires mais par hypertexte.

Cependant la Toile est aussi déterminée par d´importants intérêts privés venant du fait que

l´informatique privée se développe extrêmement rapidement. La multiplication de sites commerciaux

en est un signe. Il faut bien voir que certaines entreprises ont quasiment tenté de dominer la Toile.

Microsoft non content de développer Windows qui domine largement le marché du PC avait

également tenté de monopoliser le marché des navigateurs en livrant d´office Internet Explorer

empêchant ainsi toute concurrence. Le navigateur Mozilla Firefox est un logiciel libre et une

alternative à Internet Explorer. Il est développé par une série de bénévoles et qui en outre travaille sur

le principe de l´open source18.

18 Le terme open source correspond à une licence de logiciel obéissant à une définition très précise établie par l'Open Source Initiative, dont voici les principaux critères nécessaires : un code source disponible et les travaux dérivés possibles. Le fait de disposer des sources d'un logiciel ne suffit pas à dire qu'il est open source. Dans tous les cas, on se référera à la licence d'utilisation du logiciel. Ce terme est à ne pas confondre avec celui de logiciel libre. ( voir page 16)

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3. L’Internet est un sujet social, pas seulement technique ou commercial

a. Un espace d’interaction entre les Hommes…

En reprenant les recommandations du projet Mistica19, il nous semble important de ne pas

considérer le réseau des réseaux seulement comme une plate-forme technologique mais comme un

nouvel espace d’interaction entre hommes.

Cet espace se transforme par la même interaction que les hommes sont en train de développer. Ainsi,

nous considérons que cette technologie doit être vue, analysée, étudiée et utilisée d’un point de vue

social, en essayant de comprendre les nouveaux types de relations qui s’établissent dans le cadre de cet

espace, les nouveaux processus sociaux qu’il génère, les transformations culturelles qu’il produit, les

nouvelles visions du monde qui se construisent et aussi, bien évidemment, les nouvelles relations

économiques qui s’établissent.

Considérer le réseau des réseaux uniquement d’un point de vue technique, c’est-à-dire des

machines interconnectées nous semble tout à fait réducteur et insuffisant. L’Internet est plus que cela

en effet, il doit être considéré comme le réseau des réseaux humains reliés les uns aux autres et où les

ordinateurs ne sont que la plate-forme technologique qui permet de médiatiser ces relations. Il est clair

que le fait qu’il se base sur une plate-forme technologique d’ordinateurs interreliés fait que ce réseau

de réseaux humains fonctionne avec des caractéristiques nouvelles et particulières. Les relations

passant par la plate-forme technologique, les communications se modifient sur la forme et le fond.

D’autre part, il semble important que l’Internet ne soit pas seulement considéré comme un outil pour

la réalisation de nouvelles formes d’échanges commerciaux –auxquels, aujourd’hui, le secteur privé

donne priorité, qu’il encourage et appuie mais aussi comme un moyen de promouvoir la dynamisation

des structures et relations économiques, politiques et sociales. Poussé par les forces du marché,

l’Internet reproduira et augmentera les différences sociales existantes. La société civile a un rôle

fondamental à jouer dans la définition des nouveaux types de relations et de constructions sociales qui

devraient se développer à partir de l’incorporation des technologies de l’information et de la

communication. Il ne s’agit pas seulement d’un sujet propre aux gouvernements et aux entreprises.

b. …générant de nouveaux processus sociaux

Pour l’heure il semble encore difficile d’imaginer et de mesurer concrètement les

conséquences culturelles et sociales qui résulteront du changement radical qu’Internet engendre en

19 Méthodologie et Impact Social des Technologies de l'Information et de la Comunication en Amérique a était un projet de deux ans coordonné par la Fondation réseaux et développement (FUNREDES) et a été amené à se développer selon deux axes : - le renforcement des acteurs de société relatifs au NTIC en Amérique latine et dans les Caraïbes - l'expérimentation d'une méthodologie articulée pour la communication au sein des communautés virtuelles

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terme de relations et processus sociaux. La question qui peut être intéressante de poser ici est la

suivante : l'usage de l'Internet accroît-il ou pas la sociabilité des individus ?

D’après une étude menée par Attewell, Suazo-Garcia et Battle20 (2003) les adolescents qui

disposent d’un ordinateur à la maison passent moins de temps à faire du sport ou jouer dehors, que les

jeunes n’ayant pas d’ordinateur. Internet pourrait donc isoler les individus en venant se substituer à des

loisirs générateurs de liens sociaux. C’est d’ailleurs l’argument le plus souvent défendu par les

détracteurs d’Internet. De notre côté nous pensons, en prenant la pleine mesure de ce constat, que ceci

n’est toutefois pas plus alarmant et inquiétant que l’impact similaire que peuvent avoir la télévision ou

les jeux vidéos.

Et dans la mesure où l’on parvient à déjouer les pièges désocialisant du cyberespace, Internet

peut permettre, d’une part, d’entretenir un stock existant de capital social ou d'empêcher sa

dépréciation (notamment avec les personnes distantes géographiquement) et aussi aider à renouveler et

diversifier le capital social d’une personne (en rencontrant de nouvelles personnes, en participant à de

nouvelles communautés). Et d’ailleurs d’après Thierry Penard et Nicolas Poussing, chercheurs au

centre de recherche MARSOUIN21, la plupart des études menées sur le sujet, tendent à montrer

l’existence d’un impact positif de l’usage d’Internet sur le capital social et les pratiques de sociabilité.

Quoiqu’il en soit il parait évident qu’une nouvelle forme de sociabilité est en train de voir le jour.

III. Internet et développement social

Le potentiel d’Internet en matière de développement social et de lutte contre la pauvreté,

notamment, nous semble très grand et une chance à saisir pour corriger ou infléchir, tout au moins, les

schémas mis en place jusqu’à présent par les grandes organisations mondiales en matière de lutte

contre la pauvreté dans les pays en développement. (Banque mondiale, FMI par exemple).

Les Institutions Financières Internationales (IFI) ont en effet imposé des politiques, qui nous semblent,

contraires aux exigences d’un véritable développement en privilégiant le paiement de la dette et

l’ouverture aux capitaux au détriment des autres objectifs. Ces politiques se sont soldées par de graves

échecs : crises à répétition et montée des inégalités sociales. De plus, la politique des IFI et d’autres

organisations aussi comme le PNUD ou la coopération décentralisée, consiste le plus souvent, nous

semble t-il, à affirmer vouloir aider les pauvres et beaucoup moins à combattre les causes réelles de

cette pauvreté.

20 Attewell P, Suazo-Garcia B. et J. Battle, Computers and Young Children: Social Benefit or Social Problem, Social Forces. 2003. 21 M@RSOUIN, Môle Armoricain de Recherche sur la SOciété de l’information et des Usages d’INternet, rassemble différentes équipes de chercheurs de 11 laboratoires bretons.

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1. Internet et lutte contre la pauvreté

a. Renforcer les capacités des citoyens pour décider et prendre contrôle de leur vie.

La pauvreté n'est pas seulement un problème de revenus mais également un problème relatif

au contrôle des décisions qui affectent les personnes jour après jour, à l'accès à des droits, à la justice

et à l'égalité d'opportunités. Pour cette raison, combattre la pauvreté ne peut pas exclusivement nous

conduire à des programmes d'aide économique mais aussi à des stratégies qui fortifient les capacités

des citoyens pour décider et prendre contrôle de leur vie, c'est-à-dire renforcer leurs capacités

d’actions.

Nous plaçons ainsi le développement d'une communauté (locale, régionale, nationale ou

mondiale) comme la rencontre de l'ensemble des conditions qui permet aux personnes de vivre d'une

manière soutenable et digne, avec un contrôle sur leurs vies. Ceci implique la participation des

bénéficiaires comme sujets actifs dans le processus de leur développement propre, c'est-à-dire en

développant ce qu’eux-mêmes souhaitent, en renforçant leurs ressources propre et leurs savoirs. Cela

rejoint l’approche d’Amartya Sen62, où le développement est appréhendé comme « un processus

d’expansion des libertés réelles dont jouissent les individus22 »

Et dans une telle entreprise, le recours à Internet semble être porteur de grands espoirs.

L'information, diffusée de manière si facile par cet outil, est un facteur de grande importance,

puisqu'un meilleur accès à celle-ci contribuera à ce que les groupes moins favorisés de la société

obtiennent un plus grand contrôle sur leurs vies grâce à l'accroissement de leurs potentialités, c'est-à-

dire, de leur capital humain. Nous ne soutenons pas que la possibilité d'avoir accès à information soit

suffisante pour obtenir ce contrôle, mais il est une de ces conditions.

A ce titre, et étant donné que le but ultime d’un gouvernement (démocratique) est d’assurer et

d'augmenter la qualité de la vie de chacun de ses citoyens, la participation de tous au processus de

décisions qui les affectent devrait consister une priorité. Et personne ne pourra nier le fait que les

NTIC peuvent contribuer à établir les bases fortes de la participation des peuples à leur gouvernement.

Les outils de technologie de l'information et de la communication peuvent rendre les actions, de toute

personne, lisibles et visibles et ils permettent surtout de lier, connecter et unir chacune de ces actions.

b. Un moyen d’atteindre les tant désirés « Objectifs de Développement pour le Millénaire23 ».

Le Sommet Mondial de la Société de l’Information (SMSI) organisé par l’organisme onusien

IUT (Union Internationale des Télécommunications) et dont la première phase s’est tenue à Genève

fin 2003 et la seconde à Tunis en novembre 2005, a consacré le rôle des technologies de l’information

22 SEN Amartya, Un nouveau modèle économique, 2000, Odile Jacob. 23 Voir en annexe 2

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26

et de la communication comme un outil pour le développement. Dans sa Déclaration, le Sommet

s’exprime ainsi : « L'enjeu consiste pour nous à tirer parti des possibilités qu’offrent les technologies

de l'information et de la communication (TIC) en faveur des objectifs de développement énoncés dans

la Déclaration du Millénaire, à savoir éliminer l'extrême pauvreté et la faim, dispenser à tous un

enseignement primaire , favoriser l'égalité entre hommes et femmes et rendre les femmes autonomes,

lutter contre la mortalité infantile, améliorer la santé des mères, lutter contre le VIH/sida, le

paludisme et d'autres maladies, assurer un environnement durable et élaborer des partenariats

mondiaux pour parvenir à un développement propice à l'instauration d'un monde plus pacifique, plus

juste et plus prospère24. » .

Les travaux du SMSI ont conduit à l'élaboration de plusieurs documents officiels qui

structurent le processus, dans le respect explicite des principes de la Charte des Nations Unies et de la

Déclaration universelle des Droits de l'Homme, afin donc de réaliser les objectifs du Millénaire pour le

Développement :

- lors de la première phase à Genève, est né la Déclaration de principes25 intitulée Construire la société

de l'information : un défi mondial pour le nouveau millénaire et le Plan d'action à mettre en oeuvre

pour la deuxième phase. Ces textes fondateurs adoptés au cours du SMSI en décembre 2003 ont servi

de tremplin pour construire la seconde phase;

- lors de la seconde phase à Tunis en novembre 2005, l'Engagement de Tunis et l'Agenda de Tunis

pour la société de l'information, prenant en compte le Rapport du Groupe de Travail sur la

Gouvernance de l'Internet, formulent des pistes pour passer des principes à l'action jusqu'à l'échéance

2015 et introduisent le Forum sur la Gouvernance de l'Internet de 2006.

Ces quatre documents développent notamment les thèmes suivants : résolution des fractures et

inclusion numériques, aide au développement équitable, renforcement des capacités, égalité entre les

sexes, stratégies favorisant les enfants et les jeunes, éthique, gouvernance, diversité culturelle et

linguistique, partage des savoirs, éducation, liberté d'expression, médias, droits d'auteurs, protection

des données, respect de la vie privée, confiance et sécurité, recherche, infrastructures des TIC,

accessibilité équitable, coopération durable des multi parties prenantes.

La Société civile, partie prenante associée pour la première fois à un processus des Nations

Unies, a également produit deux documents résultant du SMSI : en 2003, la Déclaration de la société

civile intitulée Définir des sociétés de l'information centrées sur les besoins des êtres humains et, en

2005, la Déclaration de la société civile intitulée Bien plus aurait pu être réalisé, faisant le point sur

les thèmes et le suivi du SMSI. L’ensemble de ces documents constitue la base du travail à accomplir

pour la mise en oeuvre de ces objectifs à l'échéance 2015.

24 Déclaration de principes de Genève, SMSI, Mai 2004, article 2. 25 Voir annexe 1

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27

L’obstacle le plus évident à surmonter en la matière est le manque d’infrastructures. C’est

aussi le plus visible, car les statistiques existent et ce sont les données sur l’équipement, ce qu’on

appelle la « télédensité », qui permettent de mesurer la fracture numérique. En effet l’insuffisance

d’infrastructures, plus spécifiquement d’infrastructures de télécommunications, mais également en

amont l’absence d’énergie électrique, rend à l’avance inopérante toute politique d’utilisation massive

des TIC. À quoi bon une telle politique dans le cadre d’un programme national d’éducation par

exemple, si les quartiers défavorisés, les villes secondaires et à fortiori les villages ne sont pas

raccordés aux réseaux ? En effet, pour l’utilisateur de base, qui dit connexion à Internet suppose

obligatoirement l’accès à une ligne téléphonique, or la télédensité en Argentine par exemple est assez

faible et est de l’ordre de 21,1 lignes téléphoniques pour 100 habitants alors qu’elle est de 114, 65 aux

USA26.

Tableau 2 : Télédensité en Argentine et en France

Lignes téléphoniques pour 100 habitants

en Argentine

Lignes téléphoniques pour 100 habitants

en France

1998 19,7 *

2000 21,1 *

2002 38, 05 121,92

2004 58,11 129,76

Source: CNC: Comisión Nacional de Comunicaciones – Secretaría de Comunicaciones de la Nación. ITU: Internacional Telecomunicación Union

2. Impacts sociaux positifs d’Internet : les préalables nécessaires

a. Accès équitable

La notion d’accès équitable implique basiquement que toutes les personnes d’une

communauté aient la possibilité d’accéder aux bénéfices d’Internet. Or nous venons de voir que la

télédensité en Argentine reste faible ce qui sous entend donc que de nombreux territoires et personnes

sont encore tenus à l’écart des bénéfices que pourraient leur apporter cet outil.

Il semble intéressant de revenir brièvement sur l’histoire des télécommunications en Argentine afin de

mieux comprendre la situation actuelle.

26 Il est aussi courant d’entendre dire qu’il y a plus de téléphones dans la seule ville de Washington que dans l’ensemble des pays africains réunis.

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28

� 1946-1990: 44 ans d'Administration Étatique.

En 1946, durant le Gouvernement de Juan Domingo Perón, le service de l'UT (Unión

Telefónica del Río de la Plata) est nationalisé; l'État Argentin cesse ainsi de limiter son action en la

matière à l'ordonnance et au contrôle des entreprises téléphoniques et intervient directement à

l'approvisionnement et la vente des services. Seules les firmes CAT et CET appartenant à Ericsson

sont restées dans le domaine privé. Sur la base de l'UT est créée l'EMTA, l'Entreprise Mixte

Téléphonique Argentine. Et dès 1949, l’EMTA prend le nom de Téléphones de l'État (TU); et devient,

en 1956, ENTel (Entreprise Nationale de Télécommunications).

En 1990, après une période de 44 ans d'administration étatique, le Gouvernement de Carlos Saúl

Menem, dans le sens de sa politique générale, privatise la téléphonie basique et commence à

déréglementer le secteur. Cette ouverture totale et absolue du secteur des télécommunications fait écho

à l’Accord général sur le commerce des services adopté en 1997 à Genève à la suite des négociations

menées par l’OMC27.

� Dès 1990 : aux Mains Privées.

Ainsi en 1990, au moment de la privatisation de la téléphonie, Telecom Argentina (Société

France Telecom) prend à sa charge la zone Nord du pays et la zone le sud est gérée par la Compagnie

des téléphones de l'Argentine (Telefónica de Argentina). Ces entreprises réalisent des changements

importants dans le cadre d'un plan accéléré de modernisation du système téléphonique argentin.

Avant la privatisation, ENTel opérait à peu près 3.300.000 lignes ce qui correspondait à un peu plus de

90 % du parc téléphonique du pays (Ericsson avait 6 % et le reste était couvert par des coopératives

locales). A cette époque la télédensité s’élevait à 8,8 lignes pour 100 habitants. En juin 1990 est crée la

CNT (Commission Nationale de Télécommunications), actuellement CNC (Commission Nationale de

Communications), l’agence régulatrice des télécommunications et des services postaux. L’ouverture

du marché a donc permis globalement d’améliorer la situation.

Ce bref rappel des faits nous permet une double analyse. A la fois il semble, qu’en matière

d’infrastructures de télécommunications, le secteur privé doit rester le principal pourvoyeur de

capitaux. Cependant les financements publics sont nécessaires, la difficulté étant de trouver la bonne

mesure. A ce jeu les bailleurs de fonds (Banque Mondiale particulièrement) ont une double

responsabilité à assumer : encourager le secteur privé à investir et intervenir selon des conditions

commerciales et en dernier ressort, là où le marché ne peut à lui seul assurer le niveau

d’investissement nécessaire, intervenir avec des financements concessionnels.

27 L'une des principales résultantes de cet accord est que les mesures gouvernementales touchant le commerce des services financiers sont assujetties aux règles multilatérales de l'accord de l'OMC de façon permanente, plutôt que sur la base provisoire antérieure. De plus, 56 membres de l'OMC (70 pays) ont aboli des restrictions qui s'appliquent aux fournisseurs étrangers de services financiers. Les membres qui ne respectent pas leurs engagements seront assujettis aux règles de l'OMC sur le règlement des différends.

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29

b. Usage avec sens

Si l’accès équitable, comme nous venons de le voir, constitue un préalable nécessaire à

l’impact social positif d’Internet, l’usage avec sens l’est tout autant. Cette idée signifie qu’au-delà du

fait qu’il soit nécessaire que toutes les personnes aient un accès à la technologie, il aussi

incontournable qu’elles aient la possibilité d’en faire un usage stratégique afin que l’impact soit

porteur d’améliorations et de changements significatifs pour le développement humain.

Autrement dit, Internet ne pourra avoir un impact social positif que si des processus d’appropriation

sont offerts aux populations et organisations. C’est en devenant quelque chose de proche et de

pertinent qu’Internet pourra transformer les relations sociales, économiques et politiques existantes.

3. Actions publiques et initiatives associatives argentines en faveur d’Internet

a. Des politiques publiques peu efficaces

Durant les dernières dix années, il semble difficile de définir clairement qui, au niveau de

l'Etat argentin, assure substantiellement les définitions de politiques publiques en matière de TIC et de

Société de l'Information. Actuellement, diverses compétences à ce sujet se trouvent dans cinq secteurs

différents du gouvernement. En outre, et non nécessairement dans ces secteurs, on a détecté jusqu'à 46

programmes liés à la Société de I’Information, selon le relèvement effectué par l'Observatoire Latino-

américain et des Caraïbes de l'Impact Social des TIC en Action (OLISTICA).

Le manque de politique (ou la politique de ne pas avoir de politique) a entraîné des

redondances, et malgré tous les secteurs involucrés et programmes mis en œuvre, d’importantes

lacunes.

Formellement, la compétence principale en matière de politique publique liée à la Société de

l’Information revient actuellement au Secrétariat de Communications, dépendante du Ministère de

l'Économie, qui dispose du Programme National pour la Société de l'Information (PSI). Sa principale

déclaration objective est celui de "programmer, dévoiler et exécuter des initiatives, projets et

programmes visant à réduire la fracture numérique ». Sur le site Internet du dit programme

(www.psi.gov.ar) sont définis les projets qui ont été portés et menés à bien.

Nous nous sommes attachés à étudier plus précisément un projet du programme PSI: celui des

Centres Technologiques Communautaires. Le constat à l’origine du projet a été le suivant : puisqu'en

Argentine il existe un bas degré d'accessibilité aux TIC pour les secteurs de faibles ressources, il est

nécessaire de chercher une solution à ce manque. Les centres technologiques communautaires sont

donc des organismes qui concilieraient: lutte contre la pauvreté et appropriation sociale de la

technologie, développement et équité sociale.

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30

Les centres technologiques communautaires favoriseraient ainsi en principe l'inclusion sociale

et la participation communautaire, mais l'exécution hasardeuse du Projet CTC les ont transformé en

une proposition inconsistante et avec peu de possibilités de croissance. Par exemple le fait de ne pas

avoir effectué d'essais pilotes avant de lancer les 1300 centres en 1998, semble être un des facteurs

déterminants de l’échec du projet puisqu’en effet en 2001 40% d'entre eux avaient disparus28. Le

manque de formation et l'incapacité de considérer les centres technologiques communautaires comme

éléments constitutifs d'un réseau, seraient d’autres causes qui ont compromis le succès de ce projet.

Ainsi pour divers motifs ce programme n’a pas atteint, loin s’en faut, ses objectifs. Le maintien des

Centres est resté aux seules mains des coordinateurs, abandonnés par l’Etat. Ces derniers ont créé le

réseau national des CTC qui a pour but : l’échange d’expériences et la création d’un espace permettant

de continuer à oeuvrer selon les principes initiateurs du projet et malgré toutes les difficultés.

Le réseau s’est réuni le 17 juin 2006 à Mendoza et d’après les organisateurs l’événement a été

une réussite. Les autorités du Secrétariat des Communications, en charge du projet, n’y étaient pas

présentes. Les coordinateurs ont donc adressé une lettre au président Kirchner, en lui décrivant la

situation actuelle et en le sollicitant afin d’assurer une continuité dans les actions engagées29.

Par ailleurs le réseau a émis le souhait, lors de cette même rencontre, de s’organiser en tant

qu’association civile sans but lucratif. Ceci permettrait à la fois de disposer d’un outil permettant la

gestion de ressources et aussi de participer de manière plus efficace et active à la Société de

l’Information et de faciliter l’accès aux TIC aux secteurs les plus vulnérables de la société argentine.

b. Actions des Associations et des ONG argentines

Les organisations sociales, associations et ONG notamment, tentent donc d’investir un

créneau géré de manière plutôt inefficace par les politiques publiques.

Il n’existe cependant que peu d’organisations spécifiquement dédiées à promouvoir les Technologies

de l’Information en Argentine. Il nous a donc semblé intéressant de dresser un bref panorama de leurs

objectifs et leurs actions.

Dans un rapport compilé avant la 1e phase du SMSI30, les organisations non gouvernementales

et associations argentines liées à la Société de l'Information manifestent, d’une manière générale, leur

manque de moyens et de ressources et donc par exemple leur impossibilité d'assister aux forums

Internationaux (SMSI par exemple) ou intercontinentaux consacrés au sujet. Dans la majorité des cas

les membres travaillent ad honorem, et par conséquent, le manque de financement empêche non

seulement l'assistance personnelle aux grands rendez-vous et leurs réunions préparatoires mais aussi la

28 Chiffre donné par enREDando. 29 Voir la lettre en annexe 3 30 Irene SACCONE y Rodolfo R. RAPETTI, Situación de la Argentina sobre políticas públicas en TIC´s. Actividades de las OSC en relación a la Sociedad de la Información. En camino a Ginebra 2003.

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capacité de se lier entre eux et de produire des projets ou des avis solides.

TABLEAU 3 : ONG et Associations argentines intervenants sur la problématique NTIC

Nom de l’organisation Description : objectifs et actions

GRUPO REDES (http://www.centroredes.org.ar)

Le Centre REDES, Centre d'Études de Science, Développement et d’ Education Supérieure, possède une ligne d'investigation à propos du développement et de l'impact de la société de l'information, à partir de : � Développement conceptuel sur les sociétés de la

connaissance. � Évaluation et la recommandation de politiques pour la

société de l'information. � Études sur l'impact social des TIC � Définition d'indicateurs pertinents pour la mesure du

développement de la Société de l'Information. � Analyse de la diffusion des TIC dans la structure

économique.

LINKS

http://www.links.org.ar

Links est né en novembre 2002 comme un espace indépendant pour l'étude et la diffusion de la Société de l'Information. Sa vocation est celle-là de collaborer dans la création d'un réseau de coopération entre des organisations non gouvernementales, des institutions éducatives, des entreprises et des organismes nationaux et internationaux afin de promouvoir le développement social et économique en Amérique Latine. Parmi les buts de l'organisation les principaux sont : � L'étude et la promotion de la Société de l'Information. � Définitions d’actions face aux nouvelles opportunités. � Transfert de connaissances de la Société de

l'Information à la communauté.

ISOC-Ar, Internet Society Capítulo Argentino http://www.isoc.org.ar/

Internet Society (ISOC) est une organisation non gouvernementale, créée en janvier 1992. Elle travaille sur les questions relatives aux standards, à l'éducation et la politique d'Internet. Elle agit dans plus de 170 pays et a plus de 150 organisations locales dont ISOC-Ar. Son but principal est de nourrir et d'étendre le développement et la disponibilité d'Internet et de ses applications associées. Le but poursuivi est de permettre que des organisations, des professionnels et des individus du monde entier collaborent, coopèrent et innovent sur ses champs d’actions dans une forme plus effective. Ses buts spécifiques sont : � Faciliter le déroulement ouvert des standards, des

protocoles, de l'administration et de l'infrastructure technique pour Internet.

� Appuyer l'éducation à Internet, spécialement dans les pays en développement.

� Promouvoir la formation de professionnels et les opportunités d'association.

� Promouvoir une information de confiance à propos d'Internet.

� Produire des forums de discussion sur des sujets qui affectent l'évolution d'Internet dans les aspects techniques, commerciaux, sociaux, etc.

� Pourvoir une administration et une coordination pour des initiatives stratégiques d'une diffusion sur les champs humanitaires, éducatifs, sociaux, etc..

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32

ASOCIACIÓN ARGENTINA DE TELETRABAJO http://www.aat-ar.org

L'AAT est née en janvier 2001 est actuellement constituée par des sociétaires fondateurs et des sociétaires des sympathisants. Ils sont à peu près 1200 au total et sont répartis dans tout le pays. Les buts de l'Association sont : � Promouvoir les possibilités et les avantages du

télétravail et du e-travail. � Faire des recherches et promouvoir les TIC et toutes les

formes de télétravail, e-travail et téléformation. � Créer un réseau d'apprentissage participatif permettant

à ses membres de se former et d’acquérir de nouveaux savoirs.

� Appuyer la création de réseaux collaboratifs d’entrepreneurs.

LA VACA.ORG http://www.lavaca.org

lavaca.org est une page Web de journalisme indépendant. L’organisation est née en janvier 2002, en réponse à la crise que traversait le pays et comme la nécessité de diffuser des informations que les médias traditionnels n'incluaient pas dans leur agenda. Depuis lors, son activité a été organisée autour de 2 thématiques : 1. Une agence de presse, destinée au large public, mais

qui offre aussi un service aux journalistes professionnels et communautaires (ONG, organisations populaires, organismes de droits humains et civils).

2. Organisation de séminaires relatifs à la communication sociale, Contacts avec des professionnels, des étudiants et des organisations sociales.

COOPERATIVA DE TRABAJO EN TECNOLOGÍAS DE INFORMACIÓN Y COMUNICACIÓN (CTTIC)

http://www.cttic.com.ar/

CTTIC est une coopérative de travail composée de journalistes, de professionnels de la communication, d’ingénieurs, de techniciens et de développeurs. Elle développe des outils pour satisfaire les nécessités d'articulation de l'information et de la communication. Ainsi l’organisation propose : un programme radio, une revue sur l’open source et une newsletter.

NODO TAU http://www.tau.org.ar

Il ne nous semble pas nécessaire de revenir sur les actions de Nodo Tau qui ont été présentées en introduction.

Source: Cindy DROGUE, septembre 2006

L’Argentine présente de manière générale une société civile pauvre en ressource, dont les

associations et ONG involucrées aux NTIC en sont un exemple, mais avec un capital social aux très

grandes potentialités31. Et ce qu’il parait intéressant à retenir, dans ce débat, c’est que peut être en

réponse à son évolution socio-démographique magistralement désastreuse32, l’Argentine présente un

potentiel d’action solidaire particulièrement fort et porteur de valeurs éthiques profondes. Néanmoins

le capital social, aussi puissant soit-il, ne vas pas solutionner à lui seul les carences aigues de la

majorité des argentins. La responsabilité principale revient à l’Etat et aux politiques publiques qu’il

met en œuvre, il faut que celles-ci notamment en matière de NTIC soient montées, gérées et évaluées

31 Selon un rapport du PNUD Argentine “Indice de desarrollo de la sociedad civil argentina » édité en 2004, il existe 105 000 organisations de la société civile dans tous le pays, ce qui constitue un record en Amérique du Sud. Elles produisent plus de 2000 services et biens sociaux soit pas moins de 2,6% du PIB. 32Référence à la chute vertigineuse du niveau de vie après la crise économique de 2001 où 60% de la population est passée en dessous du seuil de pauvreté et où la classe moyenne a été quasiment anéantie.

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de manière efficace, efficiente et transparente. Et alors l’alliance et la combinaison de la force de la

société civile argentine à des politiques publiques rénovées peuvent ouvrir un cercle vertueux de

développement et d’équité sociale.

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2ÈME PARTIE : L’UTILISATION, L’ACCES ET L’IMPACT D’INTERNET SUR LES MILIEUX POPULAIRES DE ROSARIO

Nous espérons que le détour théorique et analytique que nous venons d’achever aura permis au

lecteur de disposer de quelques éléments de réflexion quant au rôle d’Internet en terme de

développement. Présenter, dans ce chapitre, une partie du travail que nous avons effectué durant le

stage et s’intéresser à l’analyse de l’utilisation, de l’accès et de l’impact d’Internet sur les milieux

populaires de Rosario, permettra de se rendre compte d’une réalité locale dans ce champ.

I. La démarche méthodologique de l’étude

1. Contexte et justification du choix d’étude

Le choix d’effectuer une étude sur l’utilisation, l’accès et l’impact d’Internet sur les milieux

populaires de Rosario est né d’une double volonté. Cela répondait d’une part aux besoins de l’ONG

Nodo Tau en terme de visibilité et d’évaluation de ses actions visant à l’inclusion sociale par

l’inclusion numérique et à la fois à notre volonté de nous impliquer et de nous former à ce champ du

développement. Nous avons convenu, conjointement avec nos tuteurs, qu’il paraissait intéressant de

dépasser le cadre d’actions de l’ONG et donc d’investir des lieux et auprès de publics pour lesquels

aucune étude n’avait était menée (cybercafés par exemple).

La recherche s’est déroulée dans quatre quartiers défavorisés de la ville de Rosario : Fisherton

Pobre (Nord Ouest), Nuevo Alberdi (Nord), Las Flores (Sud) et Luduena (Ouest) auprès de 10

structures (3 Télécentres33 et 7 Cybercafés) et 102 personnes. Ces quartiers, situés dans des endroits

différents, de Rosario sont souvent connus de l’extérieur comme étant des quartiers classés en zones

urbaines sensibles, c’est-à-dire que les registres de descriptions qui leur sont attachés font

essentiellement état de la situation socio-économique défavorable des habitants : fort taux de

désoccupation, population jeune importante, taux faible de scolarisation et de diplômés, habitat

précaire.

Ces quartiers nous semblaient donc intéressants dans la mesure où leurs caractéristiques socio-

démographiques laissaient supposer que les habitants étaient moins familiarisés avec l’outil Internet, et

un des quartiers disposait d’un Télécentre Communautaire Informatique.

33 Nous avons réellement mené des enquêtes seulement dans un Télécentre, celui situé dans le quartier de Fisherton Pobre. Nous avons jugé nécessaire d’en visiter d’autres afin de mieux comprendre les fonctionnements et dysfonctionnements généraux, de ce type de structures, d’une manière générale.

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2. Objectifs

L’objectif global de la mission de stage a donc constitué à faire une étude sur l’utilisation,

l’accès et les impacts d’Internet sur les milieux populaires de Rosario. Le premier objectif spécifique

visait donc à établir le profil des utilisateurs d’Internet vivant dans des quartiers populaires de Rosario

et d’analyser leurs pratiques et leurs usages.

Le second objectif spécifique visait à comprendre la construction des systèmes de représentation

autour d’Internet. Pour cela des entretiens individuels ont été menés au sein des cours de formation

organisés par Nodo Tau en relation avec le Centre de Jeunesse de Rosario.

L’ensemble du travail effectué a été compilé dans un rapport de synthèse qui sera rendu et présenté à

Nodo Tau.

Pour ce qui est des objectifs secondaires il s’agissait surtout :

� D’identifier les différents acteurs et structures des NTIC dans les 4 quartiers

� D’analyser les usages qu’ils font des nouvelles technologies

� D’identifier les budgets qu’ils consacrent potentiellement à ces outils

� De savoir si les usagers forment un ensemble homogène présentant les mêmes

caractéristiques susceptibles de constituer des facteurs d’exclusion

� D’appréhender les conséquences de l’appropriation de ces technologies par les populations

3. Approche méthodologique

a. Recherche documentaire

Elle a constituée la première étape de notre démarche. La recherche documentaire avait pour objectif

principal de collecter et synthétiser le plus d’informations possibles sur l’impact social des

technologies de l’information et de la communication. Nous avons mené ces recherches sur

l’Amérique du Sud en générale, l’Argentine en particulier mais aussi en France par exemple et avons

compilé un document de synthèse (base de données) sur le sujet.

En examinant la documentation disponible, nous avons constaté qu’un travail scientifique très

important et fourni a été effectué sur la thématique des NTIC en général mais que cependant les avis,

données et études spécifiquement consacrés à l’impact social de celles-ci sont encore peu nombreux.

Et puisque évidement, nous pensons que le savoir doit précéder l’action, il paraît déterminant que la

recherche en sciences sociales se saisisse plus massivement de la question qu’elle ne le fait pour

l’heure. Il semble en effet évident qu’une bonne recherche en matière de sciences sociales et la

multiplication de recherches empiriques fiables ont un rôle crucial à jouer dans l’amélioration des

choix politiques et stratégiques liés à la Société de l’information.

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b. Travail de terrain

Il a constitué la seconde phase de notre travail et s’est fait en deux étapes principales : la confection

des questionnaires et les entretiens. Ces phases ont été précédées par un recensement exhaustif de

toutes les structures d’accès publics à Internet dans les dits quartiers.

Certaines conditions ont toutefois ralenti notre démarche : la nécessité par exemple d’être introduite

les premiers temps, pour des questions de sécurité, par un membre ou une personne travaillant dans le

quartier (pas toujours disponible) nous a souvent retardé par rapport au calendrier que nous nous

étions fixé. Par ailleurs, une maîtrise aléatoire de la langue espagnole s’est révélée, au début aussi, un

obstacle à un travail plus efficace. Enfin le fait que notre étude ait été effectuée sans aucun soutien

économique, nous a parfois empêché d’accéder à des informations ou d’entreprendre des démarches

qui auraient amélioré nos résultats.

Nous avons confectionné quatre types de questionnaires34 :

� 1 pour les usagers des Télécentres

� 1 pour les usagers des cybercafés

� 1 pour les propriétaires des cybercafés

� 1 pour les participants aux formations organisées par Nodo Tau

Tous ont été conçus sur la base des objectifs du travail et des hypothèses de recherche formulées.

c. Traitement et Analyse des données

Enfin nous avons, avec les moyens disponibles, traité et analysé l’ensemble des matériaux

recueillis et tenter donc de dresser un panorama à la fois synthétique et complet de l’ensemble de notre

étude.

II. Rosario : portrait d’une ville en mouvement

En s’appuyant sur un outil enseigné au cours de l’année de Master nous présentons, dans ce

qui suit, les aspects historiques, géographiques, démographiques, sociaux, économiques et

institutionnels de la ville Rosario. L’exercice ne prétend aucunement être complet puisque notre

objectif ici n’est pas de faire un diagnostic intégral du territoire, simplement nous ne pouvions passer à

côté d’une rapide présentation. Donner quelques éléments permettant d’appréhender de manière

générale le territoire urbain de Rosario, dans ses différents aspects, s’avérait un détour nécessaire à

une vision globale du contexte de notre étude.

34 Voir en annexe 4

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1. Contexte historique et géographique

En 1852, l’ancienne cité de Rosario acquit le rang de ville. L’ouverture du port donna à

Rosario son caractère de centre d’activité économique et de passage obligé pour les marchandises

circulant depuis et vers l’intérieur du pays. L’essor du port a permis la construction du cordon

industriel du Grand Rosario d’une part et le développement d’importantes activités commerciales et

financières d’autre part. Ces deux caractéristiques ont marqué l’identité de la ville pendant de

nombreuses années.

Rosario, capitale du département du même nom, se situe à l’extrémité sud de la province de

Santa Fe, dans le cœur de la Pampa Húmeda, point central et intermédiaire des régions de l’Argentine.

180 km séparent la ville de celle de Santa Fe, capitale de la province et 284 km éloignent Rosario de la

capitale fédérale : Buenos Aires.

La ville est par ailleurs le centre de l’aire métropolitaine du Grand Rosario (El Gran Rosario35) d’une

surface de 17869 km² et longe la rive du fleuve Paraná dans ses limites orientales. La zone est, d’un

point de vue géologique, une plaine ondulée, l’altitude étant de 25 m environ.

35 Selon l’INDEC, el Gran Rosario est composé, du nord au sud, par les localités suivantes: Puerto General San Martín, San Lornzo, Fray Luis Beltrán, Capitán Bermúd, Granadero Baigorria, Rosario, Funes, Roldán, Pérez, Soldini, Villa Gobernador Gálvez. La conurbation avec ses 1 161 188 habitants (recensement de 2001) est la troisième plus importante du pays.

CARTE 2 : Département et ville de Rosario

CARTE 1 : Province de Santa Fe

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A la fin du 19 è siècle, l’expansion accélérée de l’activité agricole du sud de la province de

Santa Fe ainsi que l’accroissement des services liés à cette dernière, comme le chemin de fer,

favorisèrent le phénomène de concentration urbaine provoqué par une immigration massive

d’argentins et d’étrangers.

La décennie des années 40 produit un développement industriel accéléré, ce qui a fait perdurer

le processus migratoire depuis les provinces voisines et depuis celle de Santa Fe. La ville alors

principalement manufacturière se convertit peu à peu à l’activité agro-exportatrice avec un important

développement des deux branches industrielles : mécanique et alimentation. Cependant au milieu des

années 70 une grande crise affecta l’ensemble de la structure économique régionale. L’ajustement et la

reconversion économiques autour d’activités liées à la métallurgie, la sidérurgie, la chimie et au

papier, pour citer seulement les exemples les plus significatifs, plongèrent la région dans une situation

économique et sociale délicate et dans une capacité limitée à être compétitive sur le marché mondial.

Les changements dans la structure industrielle ont donc inévitablement été accompagnés d’une

profonde crise sociale, avec un taux de chômage particulièrement élevé (le plus important du pays) et

une augmentation prononcée de la marginalité. Tout ceci s’est traduit immanquablement par une

image négative de la ville.

D’un point de vue productif, la ville et sa région restèrent liées à un profil d’activités

industrielles. Les petites et moyennes entreprises manifestèrent des soucis d’insertion et de survie:

usines industrielles de bas niveau de productivité, technologies obsolètes, structures aux coûts fixes

élevés, entreprises familiales avec un bas niveau de professionnalisation, problèmes de gestion,

difficultés de financement, d’incorporation technologique et manque de stratégies d’insertion sur les

marchés internationaux furent les principaux traits négatifs du tissu patronal local.

Certaines entreprises réussirent cependant à évoluer à contre sens du cycle régional et à

surmonter donc les inconvénients au travers d’une orientation d’activités vers l’exportation profitant

notamment de quelques fenêtres de compétitivité. De cette manière, l’abondance de matière première

d’origine agricole dans la région permit à l’agro-industrie d’occuper une place significative dans le

panorama économique de Rosario.

2. Aspects économiques

Aujourd’hui Rosario génère 50% du total du PIB provincial et 5% du PIB national. La

principale industrie de la région est celle de l’alimentaire (21% de l’activité industrielle), viennent

ensuite l’industrie métal-mécanique et celle de machines et équipements. Quelques grandes entreprises

ou multinationales sont présentes sur la région comme General Motors, Dupont, Cargillou John Dhere

mais 63% des entreprises de la zone sont petites ou moyennes. Le complexe portuaire de la ville dédié

au commerce international de céréales, oléagineux et olives profite des richesses agricoles du sud de la

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province de Santa Fe pour développer ses activités. Le site enregistre par année quelques 6 772

millions $ d’exportations et 835 millions $ d’importations.

TABLEAU 4: Répartition de la population active par domaine d’activité économique

DOMAINE D’ACTIVITE % de la population occupée Agriculture, Elevage, Chasse, Sylviculture 1,39%

Pêche 0,30% Exploitation de mine et de carrière 0,15%

Industrie 15,29% Fourniture d’électricité, gaz et eau 0,81%

Construction 6,48% Commerce de gros et de détails,

Réparation de véhicules automobiles, de motocyclettes, d'effets personnels et d'effets domestiques.

22,02%

Hôtels et Restaurants 1,77% Transport, Stockage et Communication 6,83%

Activités financières 2,18% Activités immobilière et de location 5,96%

Administration Publique et de Défense, Plans de Sécurité Sociale d’Affiliation 6,61% Enseignement 9,27%

Services sociaux de Santé 8,73% Autres activités de services communautaires, sociaux et personnels 6,20%

Services domestiques 6,01% SOURCE : Cindy DROGUE d’après l’Annuaire statistiques 2006, Municipalité de Rosario

Tableau N° 5 : Population économiquement active36 de la région urbaine de Rosario (el Gran Rosario)(PEA)

Année Population Totale

PEA PEA en % 37

Taux d’activité

Taux d’emploi

Taux de chômage

Taux de Sous-

occupation 2000 1 270 056

496 156

39,07% 39,07%

31,82%

18,55%

12,55%

2003 1 335 685

578 541

43,31% 43,31%

35,55%

17,92%

*

SOURCE : Cindy DROGUE d’après l’Annuaire statistiques 2006, Municipalité de Rosario.

Aujourd’hui Rosario et sa zone d’influence ont initié un processus de profonde transformation.

Les idées motrices de la planification stratégique, de coopération public-privé et de repositionnement

régional à partir d’avantages compétitifs comme concepts innovateurs commencent à porter leurs

fruits. Positionner Rosario dans ce nouvel espace régional implique de la penser, pour le moins, dans

trois dimensions spatiales distinctes :

� La région métropolitaine

� La région Centre (Cordoba- Santa Fe- Entre Rios)

� La région MERCOSUR 36 La PEA prend en compte, selon l’INDEC, les personnes qui, dans la période de référence, ont été occupés ou désoccupés. Autrement dit la condition d’activité définie la situation des personnes selon qu’elles participent ou non à l’activité économique. 37 Pour comparaison la PEA nationale était de 42,10% en 2001.

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40

Dans chacun de ces espaces Rosario a un rôle à jouer. Chacune de ces échelles constitue un

champ propice pour son insertion, avec la mise en place de mécanismes de coopération, de

complémentarité fonctionnelle et de développement de stratégies conjointes d’intervention.

3. Contexte institutionnel et politique

Le pouvoir exécutif de la ville est exercé par un intendant, élu par le vote au suffrage universel

direct pour un mandat de quatre ans. Depuis 2003, l’intendant est Miguel Lifschitz du Parti Socialiste.

De lui dépendent les secrétariats en charge des différents secteurs:

� Secrétariat du Gouvernement

� Secrétariat des Finances et de l’Economie

� Secrétariat de la Santé

� Secrétariat des Oeuvres Publiques

� Secrétariat des Services Publics et de l’Environnement

� Secrétariat de la Planification

� Secrétariat de la Promotion Social

� Secrétariat de la Culture et de l’Education

� Secrétariat de la Promotion de l’Emploi et du Commerce Extérieur

� Secrétariat des Droits Humains (le premier du pays à l’échelle municipale)

Le conseil municipal détient le pouvoir législatif, réglemente et sanctionne les ordonnances

municipales. La moitié de son corps est renouvelée tous les deux ans. En 2003, parmi des centaines de

candidatures latino-américaines, la ville a reçu le Prix des Nations Unies pour le Développement et la

Gouvernance.

Depuis 1997 est mis en place un programme de décentralisation des activités, matérialisée en

six Centres Municipaux de Districts (CMD) : Centre, Nord, Sud, Ouest, Nord-est et Sud-ouest. Sur la

base de ces derniers, la municipalité a mis en place depuis 2003 le Budget Participatif. Cette initiative,

que nous trouvons particulièrement intéressante et innovante, permet de faire participer directement la

population à la définition des priorités et aux distributions des ressources existantes. Afin de

rassembler le plus de monde possible au processus de sont organisées, à partir des mois d’avril de

chaque année, des assemblées de quartier (1e ronde). Ces assemblées visent d’une part à connaître les

nécessités et problèmes de chaque quartier et d’autre part à élire les représentants des « voisins et

voisines » au Conseil Participatif de Quartier : les Conseillers et Conseillères. Cette élection s’effectue

au mois de mai de chaque année. C’est ensuite à ce Conseil, et sur la base du travail effectué en amont,

que revient la responsabilité de convertir les propositions faites en assemblées en projets

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41

budgétisables. Les Conseils s’organisent et se réunissent autour de trois commissions. Chacune de ces

commissions rassemblent les thèmes de travail des différents secrétariats de la municipalité :

� Commission de Projets Sociaux : Secrétariats de la Culture, de la Promotion Sociale, de la Santé

Publique et du Gouvernement.

� Commission de Projets Urbains : Secrétariats des Services Publics, des Œuvres Publiques et de la

Planification.

� Commission de Participation Citoyenne : thèmes liés à la participation, aux réformes politiques et

d’autres qui ne sont pas de la compétence de la municipalité.

Les Conseils établissent une liste de projets qui est ensuite soumise au vote de l’assemblée de

quartier (2e ronde, au mois de septembre) ce qui permet d’ordonner les priorités des projets. Durant la

dernière assemblée de quartier (3e ronde, au mois de décembre) sont exposés aux « voisins et

voisines » le bilan des projets de l’année écoulée et la présentation de ceux de l’année à venir.

L’ensemble des projets en cours et le montant alloué à chacun sont consultables sur le site Internet de

la municipalité.

Une des différences du processus de Budget Participatif de la ville de Rosario, par rapport à

d’autres expériences, réside dans sa définition de projets budgétisables. En résumé, le Budget

Participatif de Rosario s’exprime au travers de projets montés par les Conseillers et Conseillères, votés

par les « voisins et voisines » et exécutés par les distincts Secrétariats de la municipalité.

TABLEAU 6 : Données sociodémographiques par Districts

Indicateurs CENTRE NORD

NORD-OUEST

OUEST

SUD-OUEST

SUD

Population En %

228 567 25,13%

129 157 14,20%

155 805 17,13%

125 329 13,78%

117 110 12,88%

153 533 16,88%

Habitation 86 407 38 881 31 472 33 444 43 301 44 985 Densité hab/km² 11 221 3688 3530 3117 5800 8184 Taux de natalité pour mille hab 11,04 10,9 17,39 19,9 18,07 14,92 Taux de mortalité infantile pour mille hab

7,92 11,36 12,18 14,03 9,92 13,53

Population avec NBI38 en % 3,12% 11,6% 16,8% 24,4% 18,6% 13,7% SOURCE: Cindy DROGUE d’après l’Annuaire Statistiques 2006, Municipalité de Rosario.

38 NBI: Necesidades básicas insatisfechas ou Nécessités Basiques Insatisfaites est un indicateur composite utilisé en Amérique du Sud pour mesurer la pauvreté. Il mesure l’accès à un logement décent pour un foyer, l’accès à des services de base qui assure un niveau sanitaire satisfaisant, l’accès à une éducation de base et la capacité économique d’atteindre un niveau minimum de consommation.

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42

CARTE 3 : Ville de Rosario : le découpage en Districts

SOURCE : Site web de la municipalité de Rosario

4. Aspects démographiques et sociaux

Rosario était peuplée de 909 501 habitants en 2003 et la croissance naturelle nette est

quasiment nulle par rapport à 1991. Pour ce qui est de la structure par âge, nous l’avons découpé par

district et la présentons ci-dessous.

GRAPHIQUE 2 : Structure de la population par âge et par sexe

CENTRE NORD

12000 9000 6000 3000 0 3000 6000 9000 12000

0a4

10a14

20a24

30a34

40a44

50a54

60a64

70a74

80a84

90a94

100 y más

Varones

Mujeres

8 000 6 000 4 000 2 000 0 2 000 4 000 6 000 8 000

0 a 4

10a14

20a24

30a34

40a44

50a54

60a64

70a74

80a84

90a94

100 y más

Mujeres

Varones

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43

NORD-OUEST OUEST

10000 8000 6000 4000 2000 0 2000 4000 6000 8000 10000

0a4

10a14

20a24

30a34

40a44

50a54

60a64

70a74

80a84

90a94

100 y más

Mujeres

Varones

8 000 6 000 4 000 2 000 0 2 000 4 000 6 000 8 000

0a4

10a14

20a24

30a34

40a44

50a54

60a64

70a74

80a84

90a94

100 y más

Mujeres

Varones

SUD OUEST SUD

8 000 6 000 4 000 2 000 0 2 000 4 000 6 000 8 000

0a4

10a14

20a24

30a34

40a44

50a54

60a64

70a74

80a84

90a94

100 y más

Mujeres

Varones

8 000 6 000 4 000 2 000 0 2 000 4 000 6 000 8 000

0a4

10a14

20a24

30a34

40a44

50a54

60a64

70a74

80a84

90a94

100 y más

Mujeres

Varones

SOURCE : Annuaire statistique 2006, Municipalité de Rosario

La pyramide des âges permet la représentation graphique de la distribution par âge et sexe

d’une population. La lecture de chacune de celle-ci pour les districts de Rosario nous permet de

distinguer deux principaux phénomènes. Les cinq districts Nord, Nord Ouest, Ouest, Sud Ouest et Sud

présentent dans les grands traits les mêmes spécificités. La base de leur pyramide est large, cela

montre l’importance de la population jeune et dépendante de ces districts. Ce constat nous incite à

« promouvoir l’amélioration des services éducatifs et de santé, mais aussi à générer l’apparition

d’activités nouvelles et le développement des activités existantes, de telle sorte que cette tranche de la

population, une fois grandie, puisse trouver à s’employer39. ». Le district Centre présente la

particularité de présenter une population des 20-24 ans particulièrement importante, ceci s’explique

par le fait que l’ensemble des Universités de la ville est situé dans cette zone.

39 Jean LAPEZE, Programme et stratégies de développement local.

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44

71 % des habitants de Rosario sont natifs de la ville, 16 % sont originaires d’autres provinces

du pays et 9 % d’autres localités de la province, les autres sont des étrangers (péruviens, boliviens,

paraguayens, uruguayens, brésiliens, coréens et chinois). La majorité de la population est descendante

d’italiens et d’espagnols. De plus, depuis quelques années maintenant Rosario reçoit un important flux

de migration interne, principalement de la province de Chaco (Nord-Est du pays) et de l’ethnie

aborigène Toba, qui vivant dans l’extrême pauvreté dans leur région d’origine, cherche en ville un

destin meilleur.

Le culte catholique est le plus répandu, bien qu’il y ait d’autres confessions d’importance à

Rosario, comme le culte évangélique et le judaïsme. Toutes coexistent le plus pacifiquement qu’il soit.

Pour ce qui est de l’aspect socio-économique, la majorité de la population se situe dans la classe

médiane et 47,9 % de la population du Grand Rosario vit dans la pauvreté40. Les citadins ont par

ailleurs, le niveau d’alphabétisation le plus faible de toute la province de Santa Fe: 19 630 habitants du

département de Rosario sont inalphabètes, ce qui représente 32,09% de la catégorie de la province

entière41.

Cette présentation rapide des différents aspects de la ville de Rosario visait à donner au lecteur

quelques éléments généraux sur le contexte de notre étude. A présent, et en gardant à l’esprit ce qu’il

vient d’être exposer, il convient de partir à la rencontre des lieux de navigation et des navigateurs des

quartiers défavorisés de la ville de Rosario.

III. L’image des Lieux de navigation …

1. Les Cybercafés et les Télécentres communautaires : lieux d’accès pour les plus pauvres

a. Que sont les cybercafés et les Télécentres Communautaires ?

Cybercafés

Ils constituent le lieu d’accès public à Internet le plus répandu dans la ville de Rosario. Ce sont

des locaux de propriété privée, qui offrent au public l'accès aux technologies d'information et de

communication et de services annexes. Ils ont une fin lucrative, c'est pourquoi l'usager paye le prix

commercial du service prêté42. Ils offrent fréquemment des services complémentaires à la connexion.

40 INDEC: Enquête Permanente des foyers 41 Statistiques de la Province de Santa Fe, Condición de Alfabetismo según Censo Nacional de Población 2001 42 En règle générale 1 heure de connexion Internet = 1 peso argentin soit 0,25 €.

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45

Le mot « cybercafé » est en effet composé de « cyber » et de « café ». Il s’agit donc, normalement,

d’un commerce où en plus de la connexion à Internet, le client peut s’attendre au service d’une tasse

de café. Il faut reconnaître cependant que la réalité de terrain ne colle guère à la définition

précédemment exposée.

En matière de NTIC, ces lieux offrent des services basiques comme la messagerie

électronique, navigation sur Internet, jeux électroniques, appels longue distance, vidéoconférences,

gravure de données, scannage et impression. Du point de vue de la communication ces espaces

facilitent l'accès au réseau des réseaux, aux personnes qui pour des motifs économiques n'ont pas

d'ordinateur ou de connexion chez elle et qui sont donc exclues de cette « société en réseaux ».

On peut dire que dix ans en arrière il n'y avait pas de Cybercafé dans la ville de Rosario. Ces

commerces sont nés d'une manière rapide en centre ville mais sont encore très peu nombreux en

périphérie et notamment dans les quartiers défavorisés et pauvres. On ne peut pas donner de chiffres

exacts quant au nombre de cybercafés qui existent à Rosario puisqu'il n'y a pas de statistique fiable à

ce sujet. Aucun organisme compétent ne les a compté de manière systématique. En outre, les

statistiques, même si elle existaient, ne seraient que peu fiables puisque de nombreux cybercafés

agissent sans autorisation, et, de plus, les données auraient une validité limitée, puisque le nombre

varie mensuellement du fait de l'apparition et de la fermeture régulières d’affaires.

Il convient d’ajouter que pour que les cybercafés soient lucratifs, puisque tel est leur but, ils

sont, en général, situés dans des zones rentables où les gens ont une capacité de paiement jugée assez

élevée. C'est-à-dire que les quartiers urbains défavorisés ou aussi les zones rurales marginales en sont

généralement dépourvus ou peu fournis. De cette manière, l'intérêt social n’est évidemment que

secondaire voire absent dans les motivations d’installation de ce type de commerce.

Télécentres

De premier abord on pourrait penser que les « cybercafés » et les « Télécentres » sont

semblables puisque tous deux offrent, de manière apparemment identique, un accès Internet partagé

entre plusieurs personnes qui n'ont ainsi pas l'obligation de disposer individuellement des

infrastructures d'accès (PC, modem, lignes...). Cependant il y a de grandes différences qui nous

semblent important de noter et d’éclaircir.

Un TCI (Télécentre Communautaire Informatique) est en effet très différent d'un cybercafé,

c'est un lieu où les plus pauvres apprennent, de manière collective, l'usage des nouvelles technologies.

Ils cherchent et produisent des connaissances utiles pour améliorer la qualité de vie de leur

communauté, sont informés de leurs droits, entretiennent des relations avec d'autres communautés,

publient leurs opinions et relatent la vie de leur région, et essaient ainsi de surpasser l'exclusion digitale

à laquelle ils sont soumis. Tout est effectué dans une atmosphère de collaboration mutuelle et d'ample

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46

participation citoyenne. Les Télécentres sont donc une initiative qui permet potentiellement l'inclusion

digitale, qui collabore à l'inclusion sociale et à l’exercice de la citoyenneté.

Le Télécentre est intégré au tissu social de proximité et articule, par le biais des TIC, des

solutions à différents besoins du groupe social qui la compose. La formation qu’il offre à ses membres

vise l'appropriation et «l'empowerment ».

Quelles sont les activités d’un TCI ?

� Formation en informatique et Internet

� Ateliers par rapport à des sujets qui améliorent la qualité de vie du quartier

� Messagerie électronique et Navigation par Internet

� Recherche stratégique d'informations

� Appui envers les petites entreprises du quartier

� Production de nouvelles et d'informations locales

� Accès aux formalités et informations administratives

� Services Graphiques

� Autres services : cours de logiciel libre, de programmation…

Dans les Télécentres Communautaires sont formés des coordinateurs/trices, non seulement

dans les domaines techniques des TIC mais aussi aux les usages stratégiques de ces outils pour

l’inclusion sociale. Les locaux des Télécentres Communautaires sont des lieux de rencontre et

d'échange, des espaces d'apprentissage, de développement personnel, et de mobilisation pour tenter de

résoudre les problèmes et de répondre aux nécessités de la communauté.

b. Télécentres : Propositions d’améliorations

Le schéma décrit ci-dessus s’applique en principe et, comme souvent malheureusement, la

réalité est autre. Ainsi notre étude nous a permis de constater de profonds dysfonctionnements dans

tous les cas ou l’échec et l’arrêt du projet souvent. Ainsi les idées développées ci-dessous pourraient,

nous semble t-il, servir à une meilleure efficacité de ces structures et surtout à leur durabilité.

Une participation de la communauté

La majorité des Télécentres naissent d’une initiative et d’une volonté extérieure à la

communauté concernée elle-même. Or, la participation est l'élément déterminant pour le succès et la

durabilité de la structure. Promouvoir la participation de la communauté dans le montage du projet

implique un processus souvent lent. Cependant adopter une telle démarche est indispensable pour que

la communauté s'empare elle-même du projet et participe à son fonctionnement.

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47

Pour cette raison il n'est pas rare de constater, et c’est le cas pour les Télécentres où nous avons

enquêté, que le manque d’investissement de la communauté entraîne un échec et un abandon du projet.

Consolidation de la dimension sociale

Plus qu'un simple accès à Internet, les Télécentres offrent, en principe, une opportunité

d’appropriation des nouvelles technologies pour résoudre les problèmes spécifiques de la communauté

et pour contribuer à son développement humain en général. Le point de départ ne doit donc pas être

l'installation d'équipements et de connexions mais plutôt le diagnostic des problèmes spécifiques,

lesquels bien évidemment peuvent être très différents selon les cas, que la communauté souhaite

résoudre par le biais du Télécentre.

La meilleure manière d'ancrer les Télécentres dans une vision sociale est de les projeter et de les

installer de façon à ce qu'ils soient intégrés à d'autres espaces et d’autres activités qui fonctionnent

bien dans la communauté. Les plus fréquentes peuvent être : radio communautaire, bibliothèques,

maisons de la culture, organisations communautaires, écoles. ..

Gestion et utilisation des technologies appropriées

La gestion d'un Télécentre communautaire répond à la mission sociale de ses activités et

devrait utiliser les outils technologiques les plus appropriés. Ainsi aujourd'hui il est possible de monter

et d'opérer un Télécentre avec des équipements basiques, en utilisant des logiciels libres qui agissent

sur des systèmes ouverts comme GNU/Linux, à la place de systèmes et de programmes commerciaux

dominants et coûteux.

Formation permanente

Le talon d'Achille des Télécentres, comme de beaucoup d'autres expériences de

communication populaire et communautaire, se situe dans la formation d'opérateurs et de

coordinateurs capables de gérer de manière efficace et soutenable la structure. Sans cet effort de

formation les Télécentres communautaires sont voués à l’échec et meurent de l'inertie des

coordinateurs incapables d’aider les usagers à tirer profit des technologies mises à leur disposition.

Quand on parle de formation, on entend bien évidemment la formation technique mais aussi et surtout

peut être la formation stratégique qui va permettre au coordinateur de guider les usagers dans une

utilisation appropriée de la technologie.

Une rémunération des coordinateurs

Enfin, il nous semble important de réfléchir à l’élaboration de modèles générateurs de revenus

pour une pérennisation du poste de coordinateur. Cette activité demande du temps et des compétences

tout à fait spécifiques qu’il paraît indispensable de valoriser par une rémunération appropriée. Sans

quoi les coordinateurs se démotivent d’une part et surtout aussi cherchent ailleurs un moyen de

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subvenir à leurs besoins. Ces modèles générateurs de revenus peuvent et doivent êtres adaptés aux

différents contextes. Il n’y a pas de recettes miracles, simplement des moyens d’actions, des réseaux,

des ressources et des idées différentes selon chaque cas.

c. Cybercafés : des installations qui souvent détournent les lois

Le constat général, auquel nous avons abouti concernant les cybercafés où nous avons

enquêté, montre d’une part une transgression ou une occultation des obligations réglementaires liées

au droit d’installation de ce type de commerce et aux droits liés à la possession et l’utilisation des

licences de logiciels privés d’autre part

Pour ce qui est des droits d’installation, le commerce doit disposer, pour être en règle, d’une

autorisation délivrée par la municipalité. Or dans quasiment la moitié des cas, les gérants ou

propriétaires des cybercafés nous ont reçu avec méfiance, refusant parfois même de coopérer,

craignant que notre étude ait d’autres fins que celle annoncées (dénonciation par exemple). Cependant

le dialogue et l’explication du contexte et des buts de notre action ont la plupart du temps permis

l’échange et la coopération. Ce constat nous semble particulièrement intéressant dans le sens où la

transgression de la légalité montre, dans ce cas précis, à la fois que la demande sociale est

particulièrement forte et que les contraintes réglementaires sont peut être trop rigides.

Quant à la transgression des règles en termes de possession et d’utilisation des licences de

logiciels privés, elle a été constatée (par déduction ou affirmation des gérants) dans tous les cas. C'est-

à-dire que tous utilisent sur l’ensemble de leur parc de machines le système Windows, propriété de

Microsoft, sans avoir toutefois payé la licence correspondante. Les amendes en la matière sont très

lourdes, d’autant plus pour d’aussi petites structures. C’est pourquoi nous avons fait le choix de ne

délivrer aucune adresse et aucune indication permettant de localiser les différentes structures, afin de

respecter nos engagements moraux vis-à-vis des gérants rencontrés et leur éviter tout ennui possible43.

43 Ce choix s’est avéré plus nécessaire encore puisque nos multiples tentatives de prises de contact avec la municipalité ont abouti il y a peu et nous comptons leur soumettre ce document.

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2. Des lieux créateurs de lien social

a. Des lieux d’échanges et de proximité

Les personnes rencontrées fréquentent les cybercafés pour avoir accès aux outils techniques

mais aussi pour rencontrer du monde et créer du lien social. D’ailleurs 55 % déclarent venir

accompagnés c'est-à-dire que la démarche s’effectue, la plupart du temps, dans une recherche

conjointe d’échanges et de partages et pas, comme nous l’aurions pensé à priori pour les cybercafés,

de manière individuelle. Les structures sont généralement situées, entre 50 et 200 mètres du domicile

des personnes enquêtées (dans 84% des cas) ce qui fait d’elles un réel service de proximité. Les

personnes les fréquentent avec une grande régularité et pendant un temps conséquent : 70% déclarent

y aller plus de trois fois par semaine et se connecter plus d’une heure chaque fois (64%). Pour 77 %

des individus rencontrés ces structures sont leur unique lieu d’accès à Internet, pour les autres ils se

connectent également à la maison ou au travail mais jamais à l’école.

Ces structures sont donc dans chaque quartier des lieux de vie, de passage et de

rencontres44.Nous disions, en présentant ce qu’était un cybercafé, que sa vocation n’était pas de

caractère social mais commercial. L’ensemble de nos résultats montre toutefois que les cybercafés

dépassent généralement ce cadre commercial et, qu’en tant que commerce de proximité, jouent un

rôle social important dans le maintien du dynamisme du quartier. D’autant plus que ces établissements

ont, pour la plupart, des horaires nocturnes.

b. Des lieux catalyseurs

Dans la plupart des cas les cybercafés exercent également une autre activité annexe : vente de

boissons, confiseries, nourritures, tabac ou parfois vêtements aussi. Cette multi activité rend ces lieux

animés et aussi place ces commerces comme de réels et forts catalyseurs de dynamisme au sein du

quartier. L’installation de la majorité d’entre eux est toutefois récente, moins de 3 ans, ce qui rend

difficile une réflexion sur l’impact réel de ceux-ci sur le long terme.

Nonobstant, il nous semble particulièrement important d’intégrer ces établissements à une

réflexion générale de l’accès à Internet pour tous les citoyens de la ville de Rosario et de développer

une profonde articulation entre le gouvernement local, la société civile et le secteur privé. C’est grâce

à cet effort conjoint de tous les acteurs de la société que Rosario pourra offrir à ces concitoyens un

accès démocratisé à Internet et donc leur permettre d’être au cœur du changement que la ville semble

être en passe de réaliser. Et pour cela, connecter tous les territoires et les habitants de la ville parait

déterminant.

44 Citations de personnes enquêtées « C’est un lieu pour rencontrer du monde », « C’est un lieu où l’on rencontre de nouveaux amis », « Un lieu où je rejoins mes amis »

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50

A ce titre, la proposition, datée du 15 août 2006, d’Eduardo Mondino, défenseur du peuple de

la nation45, est particulièrement intéressante. Il a sollicité les instances judiciaires afin qu’elles obligent

l’Etat à respecter ses engagements par rapport au « Fond financeur du Service Universel de

téléphonie », une initiative endormie depuis 5 ans. Elle devait permettre d’acheminer les services de

téléphonie et d’Internet dans les zones considérées comme non rentables par les entreprises privées du

secteur. Ce fond devait être financé par 1% des bénéfices de toutes les entreprises de téléphonie fixe et

mobile. Mais jusqu’à aujourd’hui rien n’a été fait dans ce sens. Pourtant l’enjeu est d’une importance

toute particulière.

IV. A la rencontre des navigateurs…

1. Qui sont-ils ?

a. Sexe et âge

Les résultats de notre enquête font ressortir plusieurs traits significatifs de l’utilisateur

d’Internet dans les quartiers populaires de Rosario. Certains de nos résultats convergent avec les

caractéristiques, exposées en première partie, de l’internaute argentin. C'est-à-dire que par exemple en

très grande majorité les personnes rencontrées sont de sexe masculin (64%) et sont jeunes, plus de 90

% ont en effet moins de 30 ans. (Voir le détail dans le tableau ci-dessous).

TABLEAU 7 : Répartition par âge des personnes enquêtées

Age Pourcentage

Moins de 10 ans 11%

10 à 19 ans 61%

20 à 29 ans 19%

30 à 49 ans 7%

Plus de 50 ans 2%

Source: Cindy DROGUE, Résultats enquêtes, Août 2006

b. Niveaux d’études et rémunération

Pour ce qui est du niveau d’études et du niveau de rémunération de cette population, il est

évidemment normal que nos conclusions divergent des schémas généraux. Ainsi seulement 7% ont un

45 Le défenseur du peuple (Defensor del pueblo) est une institution de la nation argentine que agit en pleine indépendance et autonomie, sans recevoir d’instructions d’aucune autorité.

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niveau universitaire et 43% ont uniquement un niveau équivalent au primaire en France. Par ailleurs,

68 % déclarent ne toucher aucun revenu mensuel, ceci n’a rien d’étonnant dans la mesure où le

nombre de jeunes voire très jeunes personnes est très élevé et seulement 8% donc touchent 500 pesos

argentins ou plus mensuellement46 soit environ 140 euros.

TABLEAU 8 : Niveaux d’études des personnes enquêtées

Niveau d’étude Pourcentage

Primaria 43 %

Secundaria 50%

Universitaria 7%

Source: Cindy DROGUE, Résultats enquêtes, Août 2006

2. Pourquoi utilisent-ils Internet? Quand on regarde de plus près leurs pratiques d’usages, il est intéressant de noter que les trois

qui arrivent en tête sont le tchat, le mail et la recherche d’information.

GRAPHIQUE 3: Pratiques d’usages d’Internet chez les personnes enquêtées

0%

10%

20%

30%

40%

50%

60%

70%

80%

MailCha

t

Jeu

en ré

seau

Reche

rche d

'infor

mation

s

Reche

rche

d' e

mplo

i

Achat

s

Trava

il su

r PC

Source: Cindy DROGUE, Résultats enquêtes, Août 2006

Nous jugeons ces pratiques intéressantes et profondément révélatrices du fait que le besoin de

communication et d’information est à considérer comme essentiel dans le développement humain

aujourd’hui. Et d’ailleurs à la question de savoir si Internet a amélioré leurs conditions de vie, 48 %

des personnes interrogées répondent par l’affirmative47 et 10% ne se prononcent pas. Pour ceux qui

46 En septembre 2005 en Argentine, le salaire minimum était de 450 pesos et le salaire moyen lui s’élevait à 539 pesos. 47 Recueil de citations sur la question de savoir pourquoi Internet a amélioré les conditions de vie des personnes

enquêtées : « c’est important de nos jours », « cela me permet de communiquer avec tout le monde », « cela

m’aide dans mon travail », « j’ai pu trouvé ma copine », « c’est ma passion », « cela m’aide à m’informer »,

« pour connaître le monde », « cela m’aide dans mon travail scolaire », « cela m’aide dans beaucoup de

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disent qu’Internet n’a pas amélioré leur vie, ils invoquent par exemple : la désocialisation ou les

impacts sur la santé48.

3. Leurs représentations d’Internet Nous avons demandé aux personnes rencontrées de nous donner trois mots que leur évoquait

le mot Internet. La « carte de l’imaginaire liée à Internet » en propose les résultats ci-dessous.

« CARTE » 4 : L’IMAGINAIRE LIÉ À INTERNET : Pensées, Actions, Sentiments

SOURCE : Cindy DROGUE, Résultats Enquêtes, Août 2006

choses », « cela m’a appris de nombreuses choses », « je peux communiquer avec le monde entier », « je peux

m’informer sur les choses dont j’ai besoin », « cela m’occupe ». 47 « J’ai délaissé d’autres activités : sport, école », « cela m’a affaiblit la vue »

CONNEXION

RAPIDITÉ

JEUX

JOIE

AMITIÉ

PROGRÈS

MESSAGES

COMMUNICATION

MUSIQUE

CHAT

APPRENDRE

RÉSEAU

INFORMATION

ECONOMIQUE (Peu coûteux)

PLAISIR

TECHNOLOGIE

CURIOSITÉ

SE FORMER

CONNAITRE

SE DIVERTIR

S’AMUSER

FUTUR MOND

RELATION

CULTURE

INNOVATION

VICE

MONDE

2. ACTIVITÉS

1. PENSEES ABSTRAITES

4. RELATIONNEL/ SENTIMENTS 3. ACTIONS

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53

La lecture de cette « carte » est riche d’enseignement, nous semble-t-il. Nous avons ainsi

distingué quatre catégories d’après les termes cités, celles liées : à la pensée abstraite/ aux activités/

aux actions/ au relationnel et sentiments.

Cette catégorisation et l’ordre qu’elle suit semblent pouvoir démontrer qu’Internet ne peut être réduit à

un simple objet technologique, il semble évident, au travers de cette analyse, qu’il est à considérer

bien au-delà ; comme l’outil du 21e siècle qui permet d’agir concrètement et de relier tous les secteurs

involucrés au développement d’un territoire dans un but général de recherche de l’épanouissement

personnel. Et à ce titre nous maintenons plus que jamais qu’il doit être mis au service de tous les pays

en développement et de leurs localités.

Ecouter parler49 les personnes du groupe qui suivaient une formation à l’informatique et à Internet,

proposée par Nodo Tau, est peut être la plus belle preuve de ce que nous tentons de démontrer. Tous

disent la même chose : qu’il est, pour eux, très important de ne plus rester à quai et tous souhaitent

monter dans le « cybertrain »…

49 Recueil de citations : « Aujourd’hui tout le monde utilise Internet et cela sert à beaucoup de choses », « Avec le temps cela va faire partie de notre vie quotidienne », « cela me donnera la possibilité de communiquer et de connaître des choses qui sont importantes pour moi », « c’est important à notre époque », « cela m’a rapproché du monde et me donne de nombreuses informations »

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54

3ÉME PARTIE: PERSPECTIVES ET PROPOSITIONS D’ACTIONS

Nous souhaiterions achever notre travail en proposant au lecteur, dans cette dernière partie,

quelques pistes de réflexion et propositions d’actions afin de montrer de quelle manière les TIC

peuvent être mise au service du développement intégré de la ville de Rosario. Nous espérons, en effet,

être parvenue à démontrer l’importance toute particulière que revêt Internet dans le développement

aujourd’hui et nous voudrions montrer ici, à partir de nos résultats, comment il peut être intégré à

l’ensemble des secteurs liés au développement d’un territoire.

Nous voudrions, toutefois, ne pas tomber dans le piège de faire croire que les TIC peuvent constituer

la panacée pour Rosario. Elles ne peuvent être qu’à l’image de la volonté et de l’intelligence que les

acteurs sont en mesure de lui faire jouer et bien utilisées, elles peuvent servir de levier et de puissant

vecteur de changement dans de multiples secteurs pour l’atteinte d’objectifs fondamentaux. En somme

Internet ne crée rien mais peut potentiellement transformer de nombreuses choses.

Il nous semble important de rappeler quatre enjeux majeurs qui doivent qui guider, selon nous,

la réflexion et l’action en la matière :

� Résorption des zones blanches

Travailler afin de réduire la fracture numérique et connecter tous les territoires et leurs habitants est le

défi que doivent relever l’ensemble les acteurs et décideurs politiques du territoire de Rosario. A cet

effet, une action de lobbying des acteurs involucrés aux TIC, nous semble essentielle à engager pour

influencer les pouvoirs publics dans ce sens.

� Création et renforcement des dispositifs d’accès publics

Renforcer les dispositifs existants, d’après les recommandations énoncé dans la deuxième partie, et en

créer de nouveaux là où ils n’existent pas encore sont la condition sine qua non d’une appropriation

généralisée des TIC à l’échelle de la ville de Rosario.

� La formation

Former les populations à l’utilisation technique et stratégique des outils des nouvelles technologies est

un enjeu crucial. C’est ce que fait, par exemple, l’ONG Nodo Tau et l’expérience nous semble être une

démarche particulièrement intéressante à suivre et à généraliser. C'est-à-dire que l’ONG forme des

groupes de formateurs/formatrices à l’informatique et à Internet et ces personnes une fois formées

sont, à leur tour, chargées de dispenser la formation à un groupe50.

50 Cette action a été conduite dans le cadre du Budget Participatif du District Ouest. Ce dispositif a permis, l’an passé, à 800 personnes de se former à l’informatique et à Internet. L’action a été reconduite cette année est l’objectif est de former 1500 personnes. Il aurait été évidemment très pertinent d’inclure l’étude de cette action dans notre travail cependant elle n’a débuté qu’en septembre ce qui nous a rendu la tâche impossible.

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� Le partage des savoirs et l’émergence de projets collectifs

La mise en réseau, l’échange de bonnes pratiques et la mutualisation de connaissances sont des

pratiques vers lesquelles on doit tendre au maximum.

I. Mettre les TIC au service du développement intégré de la ville de Rosario

1. Au service d’une meilleure gouvernance51 OBJECTIF : Rendre la gestion de la cité transparente et efficace. L’administration électronique doit permettre d’une part les démarches administratives et de

participation des citoyens plus aisées et une information transparente et accessible des décisions

politiques d’autre part.

Tout d’abord donc, l’intégration des TIC et des applications en réseau dans les procédures

administratives forment ce qu’on appelle désormais l’administration électronique et les téléprocédures.

A la clé de cet effort se situent la modernisation du système administratif et l'amélioration du service

rendu aux administrés. L’administration électronique doit centraliser et coordonner les procédures des

différents bureaux et secrétariats. Par ailleurs, le recours au TIC dans la gestion de la cité amène à une

meilleure transparence et visibilité des actions engagées et donc à une meilleure participation des

citoyens dans le fonctionnement de l’action publique. Dans les deux cas l’enjeu est le même: mettre à

profit le dynamisme et la rapidité qu’offrent les Nouvelles Technologies de l’Information pour

redéfinir le lien entre le citoyen et l’administration locale.

Gobierno Digital L’action de la municipalité de Rosario est sur ce point intéressante. L’intendant Miguel

Lifschitz a présenté le 4 septembre dernier, lors d’une réunion publique, le projet « Gobierno Digital ».

Ce projet est le fruit conjugué d’un long travail et de nombreuses personnes d’après les mots de

51 Le critère essentiel d'une bonne gouvernance est que les mécanismes de fonctionnement de l'institution soient organisés de façon à éviter que les intérêts des mandatés prennent le pas sur ceux de leurs mandants cela dans un esprit de démocratie. La gouvernance est un principe qui s’applique à toutes les organisations et institutions économiques et politiques. La gouvernance politique, celle à laquelle nous nous intéressons ici, renvoie aux interactions entre l'État et la société, c'est-à-dire aux systèmes de coalition d'acteurs publics et privés. Ces démarches de coordination d'acteurs différenciés ont pour but de rendre l'action publique plus efficace, plus transparente et la participation des citoyens plus évidente. C'est une théorie de la régulation sociale qui peut être déclinée à toutes les échelles de gouvernement. Ainsi on parle de gouvernance locale, de gouvernance urbaine, de gouvernance territoriale, de gouvernance européenne et de gouvernance mondiale.

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l’intendant. Dans un but général de rapprocher le citoyen de l’administration et d’offrir une

information plus lisible et accessible, le projet contient plusieurs actions :

� Mise en ligne de 20 % des formulaires administratifs municipaux et non municipaux qui se gèrent

actuellement manuellement dans les différentes composantes de l’administration locale et

différentes institutions. (soit environ 14 00 par mois). D’ici fin 2007, 50 % des formulaires

devraient être disponible en ligne.

� Mise en ligne de toutes les réglementations municipales : on peut trouver sur le site web de la

municipalité l’ensemble des ordonnances, décrets et résolutions. Le citoyen pourra également

consulter en ligne les achats et les appels d’offres effectués par les distinctes aires de la

municipalité.

� Carte interactive de la ville : avec des options pour de multiples recherches : rues, institutions,

hôpitaux, écoles, parcs, espaces culturels …

� Vote électronique : cette action devrait être mise en place début octobre d’après Mónica Bifarello

du Secrétariat Général et devrait permettre le vote du Budget Participatif en ligne.

PAGE WEB DE LA MUNIPALITE DE ROSARIO

D’après Monica Bifarello du Secrétariat Général de la Municipalité "Gobierno Digital n’est pas plus

que la promotion et l’incorporation graduelle et responsable des nouvelles technologies de

l’information et de la communication au service de quelques valeurs telles que la transparence dans

la gestion publique, l’efficacité et l’agilité. C'est-à-dire économiser du temps et distances et inclure et

faire participer le citoyen.»

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Les autorités de la ville ont également insisté sur le fait que ce projet devait être approprié par

l’ensemble de la population de la ville pour que son impact soit significatif. Il a été annoncé, à cet

effet, la mise en place d’un travail coopératif avec les Télécentres et cybercafés de la ville.

Le projet « Gobierno Digital » inclut en plus de ce qui vient d’être présenté, le projet « Munix ». C'est-

à-dire la migration, de l’ensemble du parc informatique de la municipalité, du système Windows vers

celui de Linux, le logiciel libre. Ce projet, d’après les personnes que nous avons rencontrées, est très

novateur à l’échelle municipale et quasiment unique au monde52.

2. Au service de l’égalité entre les sexes, les âges et les différences OBJECTIF: Rapprocher et intégrer les publics marginalisés Notre étude et l’ensemble des observations relèvent qu’aujourd’hui les femmes, les personnes

de plus de 50 ans et les personnes handicapées restent à la marge de la société de l’information.

Renforcer ou/et initier localement, par le biais des TIC, des actions d’intégration de ces publics et des

actions de sensibilisations à leurs problèmes spécifiques nous parait être essentiel dans le but de

construire et développer une société égalitaire, juste et équitable pour tous.

TIC et Genre D’après l’article 12 de la Déclaration de Principe de Genève du Sommet Mondial pour la

Société de l’Information53, les femmes et les jeunes filles doivent être explicitement inclues comme

bénéficiaires de la “Révolution de la société de l’information”, dans un but général de lutte contre les

inégalités. L’égalité d’opportunité doit garantir leur participation dans les espaces de formulation des

politiques sur les TIC et dans le processus de l’agenda qui y est lié afin de lutter contre la fracture

numérique de genre et promouvoir les TIC comme outil de développement pour tous.

Les TIC offrent aux femmes des opportunités d’expansion de leurs projets spécifiques et la possibilité

d’un changement social, politique et culturel. Ils leurs facilitent la possibilité d’accéder à l’information

et la communication avec le monde entier. Le travail en réseau est à ce niveau là très porteur.

52 La ville de Munich en Allemagne a visiblement engagé une action similaire. 53 « Nous affirmons que le développement des TIC offre des chances immenses aux femmes, qui devraient faire partie intégrante de la société de l'information et en être des acteurs clefs. Nous sommes résolus à faire en sorte que la société de l'information favorise l'autonomisation des femmes et leur participation pleine et entière, à égalité avec les hommes, dans toutes les sphères de la société, à tous les processus de prise de décision. Nous devrions favoriser l'égalité entre les hommes et les femmes et, à cette fin, utiliser les TIC comme outil. »

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TIC et Ages

La « fracture âge » est en règle générale peut prise en compte dans les politiques et les actions

TIC pourtant il nous semble essentiel d’impulser des démarches pour favoriser l’insertion des plus de

50 ans, notamment, dans la dynamique TIC.

Et des actions très simples peuvent être menées en la matière. Par exemple favoriser des

partenariats et des échanges entre ce type de public et les jeunes personnes peut donner de probants

résultats. Créer par exemple des ateliers d’initiation aux TIC au sein des écoles peut être une démarche

à adopter pour insérer les plus âgés dans la société de l’information et favoriser aussi la solidarité

intergénérationnelle. Développer également des méthodologies et des documents pédagogiques

spécifiques peut permettre un usage et une compréhension facilités des TIC pour ce type de public.

TIC et Handicap

Le défi est ici toujours le même. Permettre aux publics marginalisés du fait de leurs

différences et leurs spécificités d’intégrer et profiter pleinement des avantages offerts par les nouvelles

technologies pour améliorer leur quotidien. Le public handicapé est un des plus éloigné de ces

derniers. Pourtant les TIC peuvent par exemple faciliter leur insertion économique ou les insérer dans

une dynamique dont ils sont généralement exclus.

3. Au service de l’Education et la Formation OBJECTIF : Intégrer les TIC dans les systèmes éducatif et de formation Les TIC peuvent aider à améliorer la qualité et l’efficacité de l’éducation en favorisant l’accès

des élèves, étudiants, professeurs et éducateurs à la connaissance et à l’information actualisée. Les

outils liés aux nouvelles technologies peuvent aussi améliorer l’accès public aux sources d’information

offrant aux élèves de communautés marginales et vulnérables, par exemple, l’opportunité d’une

meilleure éducation. Et aussi n’oublions pas qu’un poste informatique connecté à Internet dans une

école dépourvue de bibliothèque ou de matériels didactiques est une fenêtre ouverte sur le monde de la

connaissance. A ce titre le double enjeu consiste comme toujours en matière de TIC à la formation, du

corps enseignant ici, pour un usage adéquat et pertinent de l’outil et bien évidemment un accès au

réseau et aux machines. Le gouvernement argentin par le biais de son Ministère de l’Education a lancé

en deux étapes (2004 et 2005) sa campagne « d’Alphabétisation Digitale » qui comprend un volet

équipement et un volet formation.

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En terme de formation professionnelle et continue, le rôle des TIC peut être encore une fois une source

de biens d’avancées et d’avantages. Des ateliers de formation peuvent être par exemple organisés

auprès d’un public de chômeurs pour leur faciliter un accès au monde du travail.

4. Au service de la santé OBJECTIF : Promotion et Amélioration de la santé Les TIC jouent un rôle de plus en plus important dans un secteur qui a souvent été pionnier

dans l’intégration des technologies. Les réseaux de santé doivent permettre d’optimiser les accès,

d’informer et de se sensibiliser le public, de former les professionnels, et notamment ceux qui sont

isolés dans les zones marginales.

Pour les médecins et les professionnels de la santé, les TIC peuvent trouver leur application au

quotidien dans leur relation avec les patients mais aussi avec les établissements et organismes de santé.

Les TIC permettent aussi d’envisager des actes médicaux à distance par la télémédecine.

5. Au service du Tourisme OBJECTIF : Promouvoir la culture locale et les ressources du territoire Certaines études montrent que de plus en plus de personnes qui partent en vacances préparent

leur voyage via Internet et réserve leur hôtel par exemple en ligne. A travers cette pratique on perçoit

le bouleversement de l’organisation de l’offre touristique que doit impulser un territoire.

Pour la municipalité de Rosario, l’enjeu du développement d’une politique e-tourisme est de rendre

visible et attractive l’offre touristique en proposant un mode d’accès aux informations mais aussi à la

réservation de séjour compatible avec l’évolution du comportement de la clientèle touristique.

Le développement de l'activité touristique d'un territoire repose sur l'implication de nombreux acteurs,

tant publics que privés. Sa promotion requiert une bonne organisation entre l'ensemble de ces acteurs.

Les TIC et Internet permettent de mettre en valeur à la fois le territoire et ses intérêts culturels et

touristiques. Ils offrent également de nouvelles perspectives de développement et de valorisation des

activités de tous les acteurs du secteur du tourisme (hôteliers, restaurateurs, guides touristiques,

musées, centres de loisirs…). De nombreuses initiatives peuvent être engagées par les acteurs du

tourisme du territoire : création de sites Web ou de portails, offre de services avancés tels que la

réservation en ligne de séjours, développement d'une signalétique interactive, etc.

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6. Au service du développement économique OBJECTIF : Former et faire bénéficier les petits producteurs et fabricants aux avantages des TIC 63% des entreprises de la ville de Rosario sont micros, petites ou moyennes. Les TIC peuvent

augmenter leur compétitivité, améliorer la connaissance de leurs marchés et de leurs débouchés et

faciliter la gestion et la communication de l’entreprise, générant ainsi plus d’emplois et une meilleure

participation dans l’économie locale.

L’action qu’il nous semble intéressante d’engager ici consisterait à créer un espace d’échange

d’informations et de formation qui contribuerait ainsi à améliorer la capacité de prise de décision des

producteurs agricoles, des petits entrepreneurs. Cet espace peut par exemple rassembler des

informations liées à la législation, au prix du marché, aux microcrédits, aux formations et aussi

permettre la commercialisation des produits par le e-commerce. De cette manière des associations ou

des groupements de producteurs de fleurs, de fruits et légumes, de produits de l’artisanat, de produits

culturels ou de toutes autres marchandises pourraient par exemple organiser, sur le réseau Internet, la

mise en débat de leurs offres avec leurs clients potentiels et ne confier à des tiers, les intermédiaires,

que la concrétisation des contrats et autres accords. Le marché auquel ils ont accès pourrait ainsi ne

plus se limiter à un espace géographique proche mais s’étendre progressivement à tous les acheteurs

d’un pays, d’une région, voire, des quatre coins du monde. Toutefois, une telle démarche doit résulter

d'une vraie réflexion et d’une volonté forte de changement pour l'entreprise

II. Quelle démarche adopter?

1. Une démarche d’intelligence territoriale Ainsi l’impact potentiellement positif des TIC dans les différents secteurs que nous venons de

présenter semblent pouvoir concourir à un développement intégré et équitable de la ville de Rosario. A

chaque fois et pour chaque secteur, le caractère individuel/ collectif de la démarche à adopter est

essentiel. Nous voulons dire que l’acteur va se servir individuellement de la technologie pour résoudre

un problème qui lui est posé mais sa démarche pour prendre de la valeur et de la signification doit

nécessairement être tournée sur l’échange et le partage avec la collectivité, la communauté. C’est en

créant, participant et s’engageant dans les différents réseaux collectifs auxquels il s’identifie que

chaque individu donne à son action individuelle une portée et une valeur collective et donc un sens.

La dichotomie individuel/collectif qui s’applique à l’action humaine renvoie à celle du

local/global quand celle-ci est territorialisée. Et nous ne pensons pas qu’Internet ou les TIC soient

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porteurs de déterritorialisation mais qu’au contraire elles ne font rien d‘autre que rendre visible, lier et

ancrer territorialement l’action à la fois individuelle et collective des différents acteurs locaux.

Dit d’une autre manière, c’est ce que les économistes nomment l’intelligence territoriale c'est-à-dire

« l’organisation innovante, mutualisée et en réseau, de l’ensemble des informations et connaissances

utiles au développement, à la compétitivité et à l’attractivité d’un territoire, collectivement et pour

chacun de ses acteurs54 ». Cette notion nous semble, à tord, uniquement utilisée pour le domaine

économique, et elle prend-elle également beaucoup de sens quand elle est appliquée au social. Il nous

semble, qu’en effet Internet et les TIC permettent de créer localement un processus social innovant où

chaque acteur peut exprimer ses perceptions, ses savoirs et ses problèmes et trouver des alliances

stratégiques au travers de différents réseaux, tout ceci ayant comme but final de peser sur le processus

de développement général du territoire.

Les modalités d’échange des informations sont au cœur de ces rapports initiateurs du changement pour

un territoire. C’est pourquoi nous proposons ici de mettre en place une plate forme d’observation

territoriale.

MISE EN PLACE D’UNE PLATE FORME D’OBSERVATION TERRITORIALE � Son but : Créer un outil prospectif d’observation des dynamiques économiques et sociales locales

capable de définir et d’évaluer, par l’observation, le recueil et le traitement d’informations, des

actions mises en œuvres dans différents domaines liés au développement.

� Sa forme : Un site portail unique d’informations en direction des décideurs, des acteurs

économiques (micros, petites et moyennes entreprises) et sociaux et des citoyens.

Il proposerait des actualités dans chaque domaine et un guide complet de sites classés et

d’informations par thématiques, un répertoire d’entreprises et d’organisations sociales de Rosario

liées au domaine et un espace veille et forum.

� Sa gestion : La gestion de la plateforme sera assurée par un coordinateur général et des animateurs

de chaque secteur. Chaque animateur gèrera et coordonnera le domaine qui lui revient. Quant au

coordinateur général il devra être capable d’allier des fonctions d’administrateur, du système

technique et humain, et de médiateur.

54 www.i-km.com/intelligence_territoriale.htm

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Cette action concrète nous semble intéressante, dans la mesure où elle offre la possibilité de

mutualiser des connaissances, en fédérant les actions des différents acteurs et secteurs liés au

développement du territoire de Rosario, sur un seul et même outil. Elle pourra servir ainsi de véritable

instrument de prospective territoriale et permettre à Rosario de donner un nouvel élan à la dynamique

qu’elle vient d’engager. Tout cela va d’ailleurs dans le sens de ce que disait l’intendant Lifchitz le 4

septembre dernier « les nouvelles technologies de l’information sont, sans aucun doute, le langage du

21e siècle et les sociétés, les cultures, les villes et les Etats qui ne s’adaptent pas avec rapidité à celles-

ci, resteront, de manière certaine, en retard, perdront le train du futur et du développement et

l’opportunité d’offrir de nouveaux et meilleurs services à leurs citoyens.»

2. Effectuer un diagnosTIC Finalement, il nous semble pertinent de proposer l’élaboration d’un diagnosTIC à l’échelle de la ville

de Rosario. En effet l’outil que nous venons de présenter et l’ensemble d’un travail de fond sur les

TIC, n’auront de réelle pertinence qu’à la seule condition qu’ils soient précédés par un travail de

diagnostic.

De manière synthétique, ce travail consistera à définir précisément :

� le taux de couverture du réseau Internet de chaque zone géographique de la ville

� les initiatives nationales, régionales ou internationales susceptibles d’impacter sur la couverture du

territoire

� le nombre, l’emplacement et le fonctionnement des accès publics à Internet

� les caractéristiques et pratiques d’usage des citoyens

� les acteurs liés à chaque domaine d’activité

� le niveau actuel d’appropriation et d’usages des TIC par les acteurs du territoire

� les actions que les acteurs mènent en faveur des TIC

� l’impact de ces actions

� les actions qui peuvent être menées par ailleurs

Se poser les bonnes questions

Sur la base des résultats du diagnostic territorial, il s’agira de définir les orientations et les priorités

pour le territoire:

� accroître la couverture?

� développer les services pour les citoyens?

� renforcer l’appropriation et l’usage des TIC par les entreprises du territoire?

� valoriser les ressources locales du territoire?

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La définition et la mise en oeuvre de la stratégie TIC du territoire

Sur la base des orientations et priorités retenues pour le territoire, il faudra:

� s’assurer de la mobilisation des acteurs concernés

� identifier et mobiliser le(s) porteur(s) de projet

� définir un plan d’actions réaliste

� mettre en place une structure de suivi et de pilotage de projet

� identifier et mobiliser les financements nécessaires

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CONCLUSION

C’est en achevant un travail que l’on s’aperçoit du chemin parcouru et surtout, peut être, de

celui qu’il reste à parcourir. En somme de ses qualités et de ses limites. Alors, il nous semble être

parvenue à démontrer le rôle incontournable qu’Internet joue, ou devrait jouer, dans le développement

social des pays du Sud aujourd’hui. Du fait des orientations prises au départ de notre travail, nous

n’avons pas pu faire cette démonstration de façon aussi claire pour ce qui est du développement

économique. Or là aussi les espoirs nous semblent grands. Engager donc une réflexion sur cette

thématique pourrait constituer une suite intéressante et compléter de manière pertinente notre présent

travail.

Nous tirons, d’une manière générale, une profonde et entière satisfaction de notre expérience de quatre

mois et demi de stage à Rosario au sein de l’ONG Nodo Tau. Etudier et travailler, pour la première

fois, sur la thématique « Internet et Développement » nous a beaucoup intéressé et souvent même

passionné. Cela nous a donné l’envie certaine de poursuivre dans cette voix de manière

professionnelle et universitaire à la fois. Peut-être regrettons-nous seulement d’avoir conduit ce travail

de manière individuelle et aussi de n’avoir pu accéder à une « vraie » bibliothèque.

Quoiqu’il en soit cette expérience nous a permis, entre autres, d’apprivoiser un langage qui, pour le

moins, ne nous était pas familier : serveur informatique, logiciel libre, http, code source…Le langage

des réseaux en quelque sorte, ceux dont Manuel Castells nous dit que « si ne nous en occupons pas,

eux s’occuperont de nous55 ».

D’ailleurs, pour l’heure la gouvernance d’Internet, c’est-à-dire la régulation du réseau au niveau

mondial, est au centre de grandes polémiques. Les Etats-Unis contrôlent les principales organisations

qui gèrent le Web, notamment la principale d’entres elles, l’ICANN56 (Internet Corporation for

Assigned Names and Numbers), une association de droit californien, liée de très prêt au gouvernement

américain, chargée, entre autres, de gérer les noms de domaine au niveau mondial. Cette situation est

presque unanimement critiquée par les autres Etats, pour qui cette toute puissance américaine est

inacceptable.

55 Manuel CASTELLS, La Galaxie Internet, page 341. 56 Crée en 1998 au terme de longues négociations menées par le vice-président américain Al Gore avec toutes les parties prenantes: chercheurs, industrie des télécoms, fabricants d'équipements, fournisseurs de contenus, administrations diverses, l'ICANN est une organisation internationale sans but lucratif dont le rôle premier est d'allouer l’espace des adresses de protocole Internet (IP), d’attribuer les identificateurs de protocole, de gérer le système de nom de domaine de premier niveau pour les codes génériques (generic Top Level Domain) et les codes nationaux (ccTLD), et d’assurer les fonctions de gestion du système de serveurs racines. Par le contrôle qu'elle exerce sur l'affectation des noms de domaines de premier niveau, l'ICANN dérive en pratique un droit de délégation sur la vente des noms de domaines à différentes organisations, comme VeriSign pour les domaines .com et .net ou l'AFNIC pour le domaine .fr.

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Cette situation nous apparaît, certes tout à fait critiquable et difficilement justifiable cependant c’est,

aujourd’hui peut être, la solution du moins pire. Que la gestion du réseau revienne à une organisation

onusienne, comme il l’a été parfois proposé, nous apparaît relativement dangereux. Cela voudrait dire

que la Chine, Cuba ou la Corée du Nord, par exemple, pourraient influencer la circulation de

l’information sur le réseau (de manière incomparable à ce que ne le font déjà les Etats-Unis). Ces

mêmes pays qui en leur sein censurent Internet et emprisonnent des internautes. Toutefois il demeure

difficilement justifiable que l’ICANN reste ad vitam aeternam sous la coupe d’un seul pays et

s’employer à trouver d’autres alternatives, comme va le faire le Forum sur la Gouvernance

d’Internet57, est de bon augure.

Selon nous, dans un tel défi, l’essentiel à retenir et à préserver est la liberté. Internet est né, s’est

développé et est devenu ce qu’il est, parce que technologiquement et institutionnellement les

personnes qui ont oeuvré à sa mise en place et à son développement ont toujours travaillé dans le sens

profond de la liberté. Internet est ancré au cœur de cette valeur.

Le combat pour la liberté est aussi celui que mènent les défenseurs du logiciel libre. Nous regrettons

de ne pas avoir pu davantage développer cette notion qui nous semble, pourtant, capitale dans l’impact

et le rôle que peut jouer Internet dans le développement des pays du Sud. Nous disons capitale parce

que les logiciels libres peuvent contribuer à donner aux pays du Sud, pour la première fois de leur

histoire, une indépendance technologique. Migrer vers le libre, c’est par exemple ce que font le Brésil

et le Vénézuela, s’est en effet se débarrasser en partie de la dépendance technologique envers les pays

industrialisés et en l’occurrence envers les multinationales des logiciels privés. C’est économiser aussi

des sommes tout à fait importantes qui sinon prendraient la direction de Redmond58, New York59 ou

Redwood60…

Migrer vers le libre c’est, de manière tout à fait historique, faire triompher l’échange, le partage et le

communautaire par rapport au monopole, au verrouillage et à l’appropriation privée de l’information.

Migrer vers le libre c’est donc faire un pied de nez à tous ceux qui pensent que la concurrence est plus

efficace que la coopération.

Bref, le libre c’est, peut être, un moyen de croire qu’un autre monde est possible…

57 L’IGF (Internet Governance Forum), tiendra sa première session du 30 Octobre au 2 Novembre 2006, à Athènes. Quelques centaines de délégués y représenteront les gouvernements de nombreux pays, les organisations internationales, le secteur privé et la société civile. Conformément à la structure de la réunion, définie lors de la préparation de Mai 2006 à Genève, ils débattront sur les quatre thèmes suivants: ouverture, sécurité, diversité et accès. 58 Pour Microsoft 59 Pour IBM 60 Pour Oracle

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TABLE DES ILLUSTRATIONS

LES TABLEAUX � Tableau 1 : Répartition mondiale d’internautes 18 � Tableau 2 : Télédensité en Argentine et en France 27 � Tableau 3 : ONG et Associations argentines intervenants sur la problématique NTIC 31 � Tableau 4 : Répartition de la population active par domaine d’activité économique 39 � Tableau 5 : Population économiquement active de la région urbaine de Rosario 39 � Tableau 6 : Données sociodémographiques par Districts 41 � Tableau 7 : Répartition par âge des personnes enquêtées 50 � Tableau 8 : Niveaux d’études des personnes enquêtées 50 LES GRAPHIQUES � Graphique 1 : Internautes et population mondiale 19 � Graphique 2 : Structure de la population par âge et par sexe 42 � Graphique 3 : Pratiques d’usages d’Internet chez les personnes enquêtées 51 LES CARTES � Carte 1 : Province de Santa Fe 37 � Carte 2 : Département et ville de Rosario 37 � Carte 3 : Districts de la ville de Rosario 42 � « Carte » 4 : Imaginaire lié à Internet : Pensées, Actions, Sentiments 52

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ANNEXES

� Annexe 1 : Déclaration de principe de Genève

� Annexe 2 : Objectifs du Millénaire

� Annexe 3 : Lettre des CTC adressée au président Kirchner

� Annexe 4 : Enquêtes

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ANNEXE 1 : DÉCLARATION DE PRINCIPES DE GENÈVE

A. Notre conception commune de la société de l'information

1 Nous, représentants des peuples du monde, réunis à Genève du 10 au 12 décembre 2003 pour la première phase du Sommet mondial sur la société de l'information, proclamons notre volonté et notre détermination communes d'édifier une société de l’information à dimension humaine, inclusive et privilégiant le développement, une société de l'information, dans laquelle chacun ait la possibilité de créer, d'obtenir, d'utiliser et de partager l'information et le savoir et dans laquelle les individus, les communautés et les peuples puissent ainsi mettre en œuvre toutes leurs potentialités en favorisant leur développement durable et en améliorant leur qualité de vie, conformément aux buts et aux principes de la Charte des Nations Unies ainsi qu'en respectant pleinement et en mettant en oeuvre la Déclaration universelle des droits de l'homme.

2 L'enjeu consiste pour nous à tirer parti des possibilités qu’offrent les technologies de l'information et de la communication (TIC) en faveur des objectifs de développement énoncés dans la Déclaration du Millénaire, à savoir éliminer l'extrême pauvreté et la faim, dispenser à tous un enseignement primaire , favoriser l'égalité entre hommes et femmes et rendre les femmes autonomes, lutter contre la mortalité infantile, améliorer la santé des mères, lutter contre le VIH/sida, le paludisme et d'autres maladies, assurer un environnement durable et élaborer des partenariats mondiaux pour parvenir à un développement propice à l'instauration d'un monde plus pacifique, plus juste et plus prospère. Nous renouvelons également notre engagement à parvenir à un développement durable et à atteindre les objectifs de développement définis dans la Déclaration de Johannesburg et son plan d'application et dans le consensus de Monterrey, ainsi que dans d'autres textes issus de sommets appropriés des Nations Unies.

3 Nous réaffirmons l'universalité, l'indivisibilité et l'interdépendance de tous les droits de l'homme et de toutes les libertés fondamentales, y compris le droit au développement consacré par la Déclaration de Vienne, ainsi que l’existence de liens étroits entre eux. Nous réaffirmons également que la démocratie, le développement durable et le respect des droits humains et des libertés fondamentales ainsi que la bonne gouvernance à tous les niveaux constituent des principes interdépendants qui se renforcent les uns les autres. Nous nous engageons par ailleurs à développer le respect de la primauté du droit dans les affaires internationales et nationales.

4 Nous réaffirmons qu’à titre de fondement essentiel de la société de l'information et comme l’énonce l'article 19 de la Déclaration universelle des droits de l'homme, tout individu a droit à la liberté d'opinion et d'expression, ce qui implique le droit de ne pas être inquiété pour ses opinions et celui de chercher, de recevoir et de répandre, sans considération de frontière, les informations et les idées par quelque moyen d'expression que ce soit. La communication est un processus social fondamental, un besoin essentiel de l'être humain et la base de toute organisation sociale. Elle est le pivot de la société de l'information. Toute personne, où que ce soit dans le monde, devrait avoir la possibilité de participer à la société de l'information et nul ne devrait être privé des avantages qu'elle offre.

5 Nous réaffirmons aussi notre attachement aux dispositions de l'article 29 de la Déclaration universelle des droits de l'homme, à savoir que l'individu a des devoirs envers la communauté dans laquelle seul le libre et plein développement de sa personnalité est possible, et que, dans l'exercice de ses droits et dans la jouissance de ses libertés, chacun n'est soumis qu'aux limitations établies par la loi exclusivement en vue d'assurer la reconnaissance et le respect des droits et libertés d'autrui et afin de satisfaire aux justes exigences de la morale, de l'ordre public et du bien-être général dans une société démocratique. Ces droits et libertés ne peuvent en aucun cas être exercés dans un esprit contraire aux buts et aux principes des Nations Unies. Ainsi, nous encouragerons une société de l'information dans laquelle la dignité humaine est respectée.

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6 Fidèles à l'esprit de la présente Déclaration, nous nous réengageons à défendre le principe de l'égalité souveraine de tous les Etats.

7 Nous reconnaissons que la science joue un rôle capital dans le développement de la société de l'information. Bon nombre des éléments constitutifs de la société de l'information sont la conséquence des progrès scientifiques et techniques rendus possibles par la mise en commun des résultats de la recherche.

8 Nous reconnaissons que l'éducation, le savoir, l'information et la communication sont à la base du progrès, de l'esprit d'entreprise et du bien-être de l'être humain. Par ailleurs, les TIC ont une incidence immense sur presque tous les aspects de notre vie. L'évolution rapide de ces technologies crée des occasions complètement nouvelles de parvenir à des niveaux de développement plus élevés. Leur capacité à réduire bon nombre d'obstacles classiques, notamment ceux que constituent le temps et la distance, permet pour la première fois dans l'histoire de faire bénéficier de leur potentiel des millions d'êtres humains dans toutes les régions du monde.

9 Nous sommes conscients que les TIC devraient être considérées comme un moyen et non comme une fin en soi. Dans des conditions favorables, elles peuvent être un puissant outil, accroissant la productivité, stimulant la croissance économique, favorisant la création d'emplois et l'employabilité et améliorant la qualité de vie de tous. Elles peuvent en outre favoriser le dialogue entre les personnes, les nations et les civilisations.

10 Nous sommes également tout à fait conscients que les bienfaits de la révolution des technologies de l'information sont aujourd'hui inégalement répartis entre les pays développés et les pays en développement, ainsi qu'au sein des sociétés. Nous sommes pleinement résolus à faire de cette fracture numérique une occasion numérique pour tous, particulièrement pour ceux qui risquent d'être laissés pour compte et d'être davantage marginalisés.

11 Nous sommes résolus à donner corps à notre conception commune de la société de l'information, pour nous-mêmes et pour les générations futures. Nous reconnaissons que les jeunes, population active de demain, sont à la pointe de la création et de l'utilisation des TIC. Il faut donc leur donner les moyens d'agir en tant qu'apprenants, développeurs, contributeurs, entrepreneurs et décideurs. Nous devons prêter tout particulièrement attention aux jeunes qui n'ont pas pu encore bénéficier pleinement des possibilités offertes par les TIC. Nous sommes également résolus à créer des conditions propices au développement d'applications et de services TIC tenant compte des droits des enfants ainsi que de leur protection et de leur bien-être.

12 Nous affirmons que le développement des TIC offre des chances immenses aux femmes, qui devraient faire partie intégrante de la société de l'information et en être des acteurs clefs. Nous sommes résolus à faire en sorte que la société de l'information favorise l'autonomisation des femmes et leur participation pleine et entière, à égalité avec les hommes, dans toutes les sphères de la société, à tous les processus de prise de décision. Nous devrions favoriser l'égalité entre les hommes et les femmes et, à cette fin, utiliser les TIC comme outil.

13 Dans l'édification de la société de l'information, nous devons prêter une attention particulière aux besoins spécifiques des catégories sociales marginalisées et vulnérables, y compris les migrants, les personnes déplacées et les réfugiés, les chômeurs et les personnes démunies, les minorités et les populations nomades. Nous devons également prêter attention aux besoins spécifiques des personnes âgées et des handicapés.

14 Nous sommes résolus à donner aux pauvres, tout particulièrement à ceux qui vivent dans des zones isolées ou rurales et dans des zones urbaines marginalisées, les moyens de devenir autonomes, d'accéder à l'information et d'utiliser les TIC comme outil dans les efforts qu'ils déploient pour s'arracher à la pauvreté.

15 Dans l'évolution de la société de l'information, une attention particulière doit être accordée à la situation spéciale des peuples autochtones, ainsi qu'à la préservation de leur héritage et de leur patrimoine culturel.

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16 Nous continuons d'accorder une attention particulière aux besoins spécifiques des populations des pays en développement, des pays à économie en transition, des pays les moins avancés, des petits Etats insulaires en développement, des pays en développement enclavés, des pays pauvres lourdement endettés, des pays et territoires sous occupation, des pays sortant de conflits et des pays et régions ayant des besoins particuliers, ainsi qu'aux situations qui font peser de graves menaces sur le développement, par exemple les catastrophes naturelles.

17 Nous reconnaissons que l'édification d'une société de l'information inclusive exige de nouvelles formes de solidarité, de partenariat et de coopération entre les gouvernements et les autres acteurs, c’est-à-dire le secteur privé, la société civile et les organisations internationales. Conscients que l'objectif ambitieux de la présente Déclaration - réduire la fracture numérique et garantir un développement harmonieux, juste et équitable pour tous - nécessitera un engagement ferme de la part de toutes les parties prenantes, nous lançons un appel à la solidarité numérique, aussi bien à l'échelle des nations qu'au niveau international.

18 Aucun élément de la présente Déclaration ne doit être interprété comme altérant, contredisant ou limitant les dispositions de la Charte des Nations Unies et de la Déclaration universelle des droits de l'homme, non plus que de tout autre instrument international ou législation nationale adopté pour promouvoir ces instruments, ni comme constituant une dérogation à ces instruments.

B. Une société de l'information pour tous: principes fondamentaux

19 Nous sommes résolus, dans notre entreprise, à faire en sorte que chacun puisse bénéficier des possibilités que peuvent offrir les TIC. Nous nous accordons à penser que, pour s'acquitter de cette tâche, toutes les parties prenantes devraient travailler ensemble pour améliorer l'accès à l'infrastructure et aux TIC, ainsi qu'à l'information et au savoir, pour renforcer les capacités, accroître la confiance et la sécurité dans l'utilisation des TIC, créer un environnement propice à tous les niveaux, développer et élargir les applications des TIC, favoriser et respecter la diversité culturelle, reconnaître le rôle des médias, prendre en compte les dimensions éthiques de la société de l'information et encourager la coopération internationale et régionale. Nous reconnaissons que tels sont les principes fondamentaux de l'édification d'une société de l'information inclusive.

1) Le rôle des gouvernements et de toutes les parties prenantes dans la promotion des TIC pour le développement

20 Les gouvernements, le secteur privé, la société civile, l'Organisation des Nations Unies, ainsi que d'autres organisations internationales sont investis d'une responsabilité et d'un rôle importants dans l'édification de la société de l'information et, selon le cas, dans les processus de prise de décision. L'édification d'une société de l'information à dimension humaine est une entreprise commune qui requiert une coopération et un partenariat entre toutes les parties prenantes.

2) L’infrastructure de l'information et de la communication, fondement essentiel d'une société de l'information inclusive

21 La connectivité a un rôle central à jouer dans l'édification de la société de l'information. Un accès universel, ubiquitaire, équitable et financièrement abordable aux infrastructures et aux services TIC constitue l'un des défis de la société de l'information et devrait être l'un des objectifs de tous ceux qui participent à son édification. La connectivité comprend également l'accès à l'énergie et aux services postaux, qui devrait être garanti dans le respect de la législation interne de chaque pays.

22 La mise en place d'infrastructures et d'applications de réseau d'information et de communication suffisamment développées, adaptées aux conditions régionales, nationales et locales, facilement accessibles et financièrement abordables, et qui utilisent davantage les atouts du large bande et d'autres technologies innovantes, lorsqu'elles existent, peut permettre d'accélérer le progrès social et économique des pays et de favoriser la prospérité de tous les citoyens, de toutes les communautés et de tous les peuples.

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23 Des politiques propres à créer, à tous les niveaux, des conditions favorables de stabilité, de prévisibilité et d'équité dans la concurrence devraient être établies et mises en oeuvre d'une manière susceptible, non seulement de mobiliser davantage d'investissements privés pour le développement des infrastructures TIC, mais encore de répondre aux obligations de service public dans les régions où les mécanismes traditionnels du marché ne fonctionnent pas. Dans les zones défavorisées, l'installation de points d'accès public aux TIC en des lieux tels que bureaux de poste, écoles, bibliothèques et archives peut être un moyen efficace d'assurer l'accès universel à l'infrastructure et aux services de la société de l'information.

3) L’accès à l'information et au savoir

24 La capacité de chacun d'accéder à l'information, aux idées et au savoir et d'y contribuer est essentielle dans une société de l'information inclusive.

25 Le partage et le renforcement du savoir mondial pour le développement peuvent être améliorés si l'on supprime les obstacles à l'accès équitable à l'information pour les activités économiques, sociales, politiques, sanitaires, culturelles, éducatives et scientifiques et si l'on facilite l'accès à l'information du domaine public, entre autres au moyen de technologies d'assistance conçues pour être universelles.

26 La croissance de la société de l'information passe par la création d'un domaine public riche, qui serait à l'origine de multiples avantages: formation du public, création d'emplois, innovation, débouchés économiques et progrès scientifiques. Les informations relevant du domaine public devraient être facilement accessibles de manière à étayer la société de l'information et devraient être protégées contre les utilisations abusives. Il faudrait renforcer les établissements publics tels que les bibliothèques, les archives, les musées, les collections culturelles et d'autres points d'accès communautaire, de manière à promouvoir la préservation des archives documentaires et un accès libre et équitable à l'information.

27 L'accès à l'information et au savoir peut être encouragé en sensibilisant davantage toutes les parties prenantes aux possibilités qu'offrent les différentes applications logicielles, notamment les logiciels propriétaires, les logiciels à code source ouvert et les logiciels gratuits, afin d'accroître la concurrence, l'accès des utilisateurs et l'éventail des choix et de permettre à tous les utilisateurs de développer les solutions qui répondent le mieux à leurs attentes. L'accès abordable aux logiciels devrait être considéré comme un élément important d'une société de l'information véritablement inclusive.

28 Nous nous efforçons de promouvoir un accès universel, avec égalité des chances, pour tous, aux connaissances scientifiques, ainsi que la création et la diffusion des informations scientifiques et techniques, y compris les initiatives entreprises en vue d’assurer un accès ouvert aux publications scientifiques.

4) Le renforcement des capacités

29 Chacun devrait avoir la possibilité d'acquérir les compétences et les connaissances nécessaires pour pouvoir jouer un rôle actif dans la société de l'information et l'économie du savoir, en comprendre le fonctionnement et en tirer pleinement parti. L'alphabétisation et l'enseignement primaire universel sont des facteurs essentiels pour édifier une société de l'information vraiment inclusive, une attention particulière étant accordée aux besoins spécifiques des jeunes filles et des femmes. Etant donné le large éventail de spécialistes des TIC et de l'information requis à tous les niveaux, il faut veiller en particulier à renforcer les capacités institutionnelles.

30 L'utilisation des TIC à tous les stades de l'enseignement, de la formation et du développement des ressources humaines devrait être encouragée, les besoins particuliers des handicapés et des catégories défavorisées ou vulnérables étant pris en compte.

31 La formation permanente et la formation des adultes, la reconversion, l'apprentissage tout au long de la vie, l'apprentissage à distance et d'autres services spéciaux, comme la télémédecine, peuvent apporter une contribution essentielle à l'employabilité et aider à tirer parti des nouvelles possibilités

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qu'offrent les TIC pour les emplois traditionnels, les emplois indépendants et les nouveaux métiers. La prise de conscience et la maîtrise des notions de base dans le domaine des TIC sont à cet égard essentielles.

32 Les créateurs, éditeurs et auteurs de contenus devraient, de même que les enseignants, les formateurs, les archivistes, les bibliothécaires et les apprenants contribuer activement à promouvoir la société de l'information, en particulier dans les pays les moins avancés.

33 Afin de parvenir à un développement durable de la société de l'information, il faudrait accroître les capacités nationales en matière de recherche-développement dans le secteur des TIC. En outre, un rôle essentiel revient aux partenariats, en particulier entre pays développés et pays en développement, y compris les pays à économie en transition, dans les domaines de la recherche-développement, du transfert de technologies, de la production et de l'utilisation des produits et services TIC pour favoriser le renforcement des capacités et la participation à la société de l'information à l'échelle mondiale. La fabrication de produits TIC ouvre de vastes perspectives de création de richesses.

34 La concrétisation des aspirations que nous partageons, en particulier pour que les pays en développement et les pays à économie en transition deviennent membres à part entière de la société de l'information et puissent véritablement s'intégrer dans l'économie du savoir, dépend largement du renforcement des capacités dans les domaines de l'enseignement, , du savoir-faire technologique et de l'accès à l'information, qui constituent des facteurs majeurs de développement et de compétitivité.

5) Etablir la confiance et la sécurité dans l'utilisation des TIC

35 Renforcer le climat de confiance, notamment grâce à la sécurité de l'information et à la sécurité des réseaux, aux procédures d’authentification et à la protection de la vie privée et du consommateur est un préalable au développement de la société de l'information et à l'établissement de la confiance parmi les utilisateurs des TIC. Une culture globale de la cybersécurité doit être encouragée, développée et mise en oeuvre en coopération avec tous les partenaires et tous les organismes internationaux compétents. Ces efforts devraient être soutenus par une coopération internationale renforcée. Dans cette culture mondiale de la cybersécurité, il importe d'accroître la sécurité et d'assurer la protection des données et de la vie privée, tout en améliorant l'accès et les échanges commerciaux. Cette culture mondiale de la cybersécurité doit en outre tenir compte du niveau de développement socio-économique des pays et respecter les aspects de la société de l'information qui sont orientées vers le développement.

36 Tout en reconnaissant les principes d'un accès universel et non discriminatoire aux TIC pour toutes les nations, nous soutenons les activités menées par les Nations Unies pour empêcher que les TIC puissent être utilisées à des fins qui sont incompatibles avec les objectifs du maintien de la stabilité et de la sécurité internationales et risquent de nuire à l'intégrité des infrastructures nationales, au détriment de la sécurité des Etats. Il est nécessaire d'éviter que les ressources et les technologies de l'information soient utilisées à des fins criminelles ou terroristes, tout en respectant les droits de l'homme.

37 Le pollupostage est un problème important et qui ne cesse de s’aggraver pour les utilisateurs, les réseaux et l'Internet dans son ensemble. Les questions du pollupostage et de la cybersécurité devraient être traitées aux niveaux national et international appropriés.

6) Créer un environnement propice

38 L'existence d'un environnement propice, aux niveaux national et international, est essentielle pour la société de l'information. Les TIC devraient être utilisées en tant qu'outil important de bonne gouvernance.

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39 La primauté du droit, associée à un cadre politique et réglementaire favorable, transparent, propice à la concurrence, technologiquement neutre, prévisible et reflétant la situation réelle des pays, est fondamentale dans l'édification d'une société de l'information à dimension humaine. Les pouvoirs publics devraient intervenir de façon adéquate pour remédier aux insuffisances du marché, maintenir une concurrence équitable, attirer les investissements, intensifier le développement des infrastructures et des applications TIC, optimiser les avantages économiques et sociaux et servir les priorités nationales.

40 Il est indispensable que les efforts nationaux de développement en matière de TIC soient étayés par un environnement international dynamique et propice, favorable aux investissements étrangers directs, au transfert de technologies et à la coopération internationale, particulièrement en ce qui concerne les finances, l'endettement et le commerce, ainsi que par une participation pleine et entière des pays en développement aux décisions qui sont prises au plan mondial. Améliorer la connectivité et la rendre financièrement accessible à l'échelle mondiale contribuerait pour beaucoup à accroître l'efficacité de ces efforts de développement.

41 Les TIC sont un puissant catalyseur de la croissance car elles permettent de réaliser des gains d'efficacité et de productivité, en particulier au niveau des petites et moyennes entreprises (PME). A cet égard, le développement de la société de l'information est important pour la croissance de l'ensemble de l'économie dans les pays développés comme dans les pays en développement. Il conviendrait d'encourager les gains de productivité et les innovations rendus possibles par les TIC dans tous les secteurs d’activité. Une répartition équitable des effets positifs contribue à l'élimination de la pauvreté et au développement social. Les politiques les plus bénéfiques seront vraisemblablement celles qui encouragent les investissements productifs et permettent aux entreprises, notamment aux PME, de procéder aux changements nécessaires pour pouvoir profiter des bienfaits offerts par les TIC.

42 Il importe de protéger la propriété intellectuelle pour encourager l'innovation et la créativité dans la société de l'information; de même, il importe de disséminer, diffuser et partager largement le savoir pour encourager l'innovation et la créativité. Faciliter la participation effective de tous à la protection de la propriété intellectuelle et au partage du savoir par la sensibilisation et le renforcement des capacités est un élément fondamental d'une société de l'information inclusive.

43 Le meilleur moyen de favoriser un développement durable dans la société de l'information est d'intégrer pleinement les efforts et les programmes en matière de TIC aux stratégies de développement nationales et régionales. Nous nous félicitons du Nouveau partenariat pour le développement de l'Afrique (NEPAD) et nous encourageons la communauté internationale à soutenir les mesures liées aux TIC prises dans le cadre de cette initiative ainsi que celles qui relèvent d'efforts analogues déployés dans d'autres régions. La répartition des fruits de la croissance alimentée par les TIC contribue à l'éradication de la pauvreté et au développement durable.

44 La normalisation est l'un des éléments constitutifs essentiels de la société de l'information. Il faudrait mettre l'accent tout particulièrement sur l'élaboration et l'adoption de normes internationales. L'élaboration et l'utilisation de normes ouvertes, compatibles, non discriminatoires et axées sur la demande qui tiennent compte des besoins des usagers et des consommateurs constituent un élément capital pour développer et diffuser les TIC et en rendre l'accès plus abordable, en particulier dans les pays en développement. Les normes internationales ont pour objet de créer des conditions permettant au consommateur d'avoir accès aux services, partout dans le monde, et quelle que soit la technologie utilisée.

45 Le spectre des fréquences radioélectriques devrait être géré dans l'intérêt public et conformément au principe de légalité, dans le strict respect des législations et réglementations nationales ainsi que des accords internationaux applicables.

46 Dans l'édification de la société de l'information, les Etats sont vivement encouragés à prendre des mesures pour éviter et s’abstenir de toute action unilatérale non conforme au droit international et

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à la Charte des Nations Unies qui pourrait faire obstacle à la pleine réalisation du développement économique et social des populations des pays concernés, ou nuirait à leur bien-être.

47 Considérant que les TIC modifient peu à peu nos habitudes de travail, il est fondamental de créer des conditions de travail sûres, fiables et salubres, qui soient adaptées à l'utilisation de ces technologies et respectent toutes les normes internationales applicables.

48 L'Internet est devenu une ressource publique mondiale et sa gouvernance devrait être un point essentiel de l’ordre du jour de la société de l'information. La gestion internationale de l'Internet devrait s'exercer de façon multilatérale, transparente et démocratique, avec la pleine participation des Etats, du secteur privé, de la société civile et des organisations internationales. Elle devrait assurer une répartition équitable des ressources, faciliter l'accès de tous et garantir le fonctionnement stable et sécurisé de l'Internet, dans le respect du multilinguisme.

49 La gestion de l'Internet recouvre aussi bien des questions techniques que des questions de politique publique et devrait associer toutes les parties prenantes et les organisations intergouvernementales ou internationales concernées. Il est reconnu à cet égard que:

a) le pouvoir de décision en ce qui concerne les questions de politique publique liées à l'Internet, est le droit souverain des Etats. Ceux-ci ont des droits et des responsabilités en ce qui concerne les questions de politique publique liées à l'Internet, qui ont une portée internationale;

b) le secteur privé a joué et devrait continuer de jouer un rôle important dans le développement de l'Internet, dans les domaines tant techniques qu'économiques;

c) la société civile a également joué un rôle important pour les questions liées à l'Internet, en particulier au niveau communautaire, et devrait continuer de jouer ce rôle;

d) les organisations intergouvernementales ont joué et devraient continuer de jouer un rôle de facilitateur dans la coordination des questions de politique publique liées à l'Internet;

e) les organisations internationales ont elles aussi joué et devraient continuer de jouer un rôle important dans l'élaboration des normes techniques et des politiques relatives à l'Internet.

50 Les problèmes internationaux liés à la gouvernance de l'Internet devraient être traités de manière coordonnée. Nous demandons au Secrétaire général des Nations Unies de créer un groupe de travail sur la gouvernance de l'Internet, dans le cadre d'un processus ouvert et inclusif prévoyant un mécanisme qui garantira la participation pleine et active des représentants des Etats, du secteur privé et de la société civile tant des pays développés que des pays en développement et qui fera intervenir les organisations intergouvernementales et internationales et forums intéressés pour, d'ici à 2005, étudier la gouvernance de l'Internet et éventuellement proposer des mesures à prendre.

7) Les applications des TIC et leur apport dans tous les domaines

51 L'utilisation et le déploiement des TIC devraient contribuer à faciliter notre vie quotidienne dans tous les domaines. Leurs applications peuvent se révéler très utiles dans de nombreux domaines: administration et services publics, santé et information sanitaire, enseignement et formation, emploi et création d'emplois, affaires, agriculture, transports, protection de l'environnement et gestion des ressources naturelles, prévention des catastrophes naturelles, culture, et favoriser l’élimination de la pauvreté et atteindre d'autres objectifs de développement reconnus. Les TIC devraient également contribuer à établir des structures durables de production et de consommation et à atténuer les obstacles traditionnels, donnant ainsi à tous la possibilité d'accéder aux marchés locaux et aux marchés mondiaux de façon plus équitable. Les applications devraient être conviviales, accessibles à tous, abordables, adaptées aux besoins locaux en termes de cultures et de langues, et faciliter le développement durable. A cet égard, il conviendrait que les collectivités locales assument un rôle majeur dans la prestation de services TIC, pour le bien des populations concernées.

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8) La diversité et l’identité culturelles, la diversité linguistique et les contenus locaux

52 La diversité culturelle est le patrimoine commun de l'humanité. La société de l'information devrait être fondée sur le respect de l'identité culturelle, de la diversité culturelle et linguistique, des traditions et des religions ; elle devrait promouvoir ce respect et favoriser le dialogue entre les cultures et les civilisations. La promotion, l'affirmation et la préservation des différentes identités culturelles et des différentes langues, qui font l’objet de textes pertinents approuvés par les Nations Unies et notamment de la Déclaration universelle de l'UNESCO sur la diversité culturelle, enrichiront davantage la société de l'information.

53 Dans l'édification d'une société de l'information inclusive, il faudra accorder la priorité à la création, à la diffusion et à la préservation de contenus dans différentes langues et différents formats, une attention particulière étant prêtée à la diversité d'origine des oeuvres et à la nécessaire reconnaissance des droits des auteurs et des artistes. Il est essentiel de promouvoir la production/l'accessibilité de tous les contenus, éducatifs, scientifiques, culturels ou récréatifs, dans différentes langues et dans différents formats. L'élaboration de contenus locaux adaptés aux besoins nationaux ou régionaux encouragera le développement socio-économique et stimulera la participation de toutes les parties prenantes, en particulier les habitants des zones rurales, isolées ou marginalisées.

54 La préservation du patrimoine culturel constitue une composante fondamentale de l'identité et de la compréhension de soi qui relie une communauté à son passé. La société de l'information devrait mettre en valeur et préserver le patrimoine culturel pour les générations futures, par toutes les méthodes appropriées, y compris la numérisation.

9) Médias

55 Nous réaffirmons notre adhésion aux principes de la liberté de la presse et de la liberté de l'information, ainsi qu'à ceux de l'indépendance, du pluralisme et de la diversité des médias, qui sont essentiels à la société de l'information. La liberté de chercher, de recevoir, de répandre et d'utiliser des informations pour la création, l'accumulation et la diffusion du savoir est importante pour la société de l'information. Nous appelons les médias à faire preuve de sens des responsabilités dans l’utilisation et le traitement de l'information par les médias conformément aux normes éthiques et professionnelles les plus élevées. Les médias traditionnels, quelle que soit leur forme, jouent un rôle important dans la société de l'information et les TIC devraient y contribuer. Il convient d'encourager la diversité des modes de propriété des médias, conformément à la législation des pays et compte tenu des conventions internationales pertinentes. Nous réaffirmons la nécessité de réduire les disparités entre les médias sur le plan international en particulier en ce qui concerne l'infrastructure, les ressources techniques et le développement des compétences.

10) Les dimensions éthiques de la société de l'information

56 La société de l'information devrait respecter la paix et préserver les valeurs fondamentales que sont la liberté, l'égalité, la solidarité, la tolérance, le partage des responsabilités et le respect de la nature.

57 Nous reconnaissons l'importance de l'éthique pour la société de l'information, qui devrait favoriser la justice ainsi que la dignité et la valeur de la personne humaine. La famille devrait bénéficier de la protection la plus large possible pour être en mesure d'assumer son rôle déterminant dans la société.

58 L'utilisation des TIC et la création de contenus devrait respecter les droits de l'homme et les libertés fondamentales d'autrui, notamment la vie privée ainsi que la liberté d'opinion, de conscience et de religion, conformément aux instruments internationaux pertinents.

59 Tous les acteurs de la société de l'information devraient prendre les mesures appropriées, notamment préventives, déterminées par la loi, pour empêcher les utilisations abusives des TIC, par exemple les actes délictueux dictés par le racisme, la discrimination raciale et la xénophobie, ainsi que l'intolérance, la haine et la violence qui en résultent, de même que toutes les formes de maltraitance

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des enfants, en particulier la pédophilie et la pornographie infantile, ainsi que la traite et l'exploitation d'êtres humains.

11) La coopération internationale et régionale

60 Nous aspirons à utiliser pleinement les possibilités offertes par les TIC dans les efforts que nous déployons pour parvenir aux objectifs de développement qui ont été décidés à l'échelle internationale, notamment ceux de la Déclaration du Millénaire, et pour concrétiser les principes fondamentaux exposés dans la présente Déclaration. La société de l'information est par nature universelle, et les efforts des nations doivent être renforcés par une coopération internationale et régionale efficace entre les Etats, le secteur privé, la société civile et les autres parties prenantes, notamment les institutions financières internationales.

61 Pour édifier une société de l'information mondiale inclusive, nous rechercherons et appliquerons efficacement des approches et des mécanismes internationaux concrets, notamment en matière d’assistance financière et technique. Par conséquent, tout en reconnaissant à sa juste valeur la coopération en cours dans le domaine des TIC, au moyen de divers mécanismes, nous invitons toutes les parties prenantes à adhérer au "Pacte de solidarité numérique" énoncé dans le Plan d'action. Nous sommes convaincus que l'objectif arrêté au niveau mondial consiste à contribuer à réduire la fracture numérique, à promouvoir l'accès aux TIC, à créer des perspectives numériques et à tirer parti du potentiel qu'offrent les TIC pour le développement. Nous prenons bonne note de la volonté exprimée par certains de créer un "Fonds de solidarité numérique international" alimenté par des contributions volontaires et de celle exprimée par d'autres d'entreprendre des études concernant les mécanismes existants, ainsi que l'efficacité et la faisabilité d'un tel fonds.

62 L'intégration régionale contribue au développement de la société mondiale de l'information et rend indispensable une étroite coopération à l'intérieur des régions et entre régions. Le dialogue régional devrait contribuer au renforcement des capacités nationales et à l'harmonisation entre les stratégies nationales et les objectifs de la présente Déclaration de principes dans des conditions de compatibilité, tout en respectant les spécificités nationales et régionales. Dans ce contexte, nous nous félicitons des mesures prises en matière de TIC dans le cadre de ces initiatives et nous encourageons la communauté internationale à les appuyer.

63 Nous décidons d'aider les pays en développement, les pays les moins avancés et les pays à économie en transition, en utilisant toutes les sources de financement, en leur fournissant une assistance financière et technique et en créant des conditions propices à des transferts de technologie compatibles avec les objectifs de la présente Déclaration et du Plan d'action.

64 Les compétences fondamentales de l'Union internationale des télécommunications (UIT) dans le domaine des TIC - assistance pour réduire la fracture numérique, coopération internationale et régionale, gestion du spectre des fréquences radioélectriques, élaboration de normes et diffusion de l'information - sont déterminantes pour l'édification de la société de l'information.

C. Vers une société de l'information pour tous fondée sur les savoirs partagés

65 Nous nous engageons à renforcer la coopération afin de chercher des réponses communes aux problèmes qui se posent et aux défis associés à la mise en oeuvre du Plan d'action qui donnera corps à la conception d'une société de l'information inclusive reposant sur les principes essentiels énoncés dans la présente Déclaration.

66 Nous nous engageons en outre à évaluer et à suivre les progrès réalisés en vue de réduire la fracture numérique, en tenant compte des différents niveaux de développement, pour atteindre les objectifs de développement approuvés au plan international, en particulier ceux qui sont énoncés dans la Déclaration du Millénaire, ainsi qu’à évaluer l'efficacité des investissements et de la coopération internationale dans l'édification de la société de l'information.

67 Nous sommes fermement convaincus qu'ensemble, nous entrons dans une ère nouvelle qui offre des possibilités immenses, celle de la société de l'information et de la communication élargie

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entre les hommes. Dans cette société naissante, l'information et le savoir peuvent être produits, échangés, partagés et communiqués au moyen de tous les réseaux de la planète. Si nous prenons les mesures nécessaires, tous les habitants de la planète pourront bientôt édifier ensemble une nouvelle société de l'information fondée sur les savoirs partagés, sur une solidarité mondiale et sur une meilleure compréhension mutuelle entre les peuples et les nations. Nous ne doutons pas que ces mesures ouvrent la voie à l'édification d'une véritable société du savoir.

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ANNEXE 2 : LES OBJECTIFS DU MILLÉNAIRE (d’après le site du PNUD) • Objectif 1: Eliminer l'extrême pauvreté et la faim Cible 1 - Réduire de moitié, entre 1990 et 2015, la proportion de la population dont le revenu est inférieur à un dollar par jour Cible 2 - Réduire de moitié, entre 1990 et 2015, la proportion de la population qui souffre de la faim • Objectif 2: Assurer l'éducation primaire pour tous Cible 3- D'ici à 2015, donner à tous les enfants, garçons et filles, partout dans le monde, les moyens d'achever un cycle complet d'études primaires • Objectif 3: Promouvoir l'égalité et l'autonomisation de femmes Cible 4 - Éliminer les disparités entre les sexes dans les enseignements primaire et secondaire d'ici à 2005, si possible, et à tous les niveaux de l'enseignement en 2015, au plus tard • Objectif 4: Réduire la mortalité infantile Cible 5- Réduire de deux tiers, entre 1990 et 2015, le taux de mortalité des enfants de moins de 5 ans • Objectif 5: Améliorer la santé maternelle Cible 6- Réduire de trois quarts, entre 1990 et 2015, le taux de mortalité maternelle • Objectif 6: Combattre le VIH/sida, le paludisme et d'autres maladies Cible 7- D'ici à 2015, avoir stoppé la propagation du VIH/sida et avoir commencé à inverser la tendance actuelle Cible 8 - D'ici à 2015, avoir maîtriser le paludisme et d'autres grandes maladies, et avoir commencé à inverser la tendance actuelle • Objectif 7: Assurer un environnement durable Cible 9 - Intégrer les principes du développement durable dans les politiques nationales; inverser la tendance actuelle à la déperdition de ressources environnementales Cible 10 - Réduire de moitié, d'ici à 2015, le pourcentage de la population qui n'a pas accès de façon durable à un approvisionnement en eau potable Cible 11- Réussir à améliorer sensiblement, d'ici 2020, la vie d'au moins 100 millions d'habitants de taudis • Objectif 8: Mettre en place un partenariat mondial pour le développement Cible 12 - Poursuivre la mise en place d'un système commercial et financier multilatéral ouvert, fondé sur des règles, prévisibles et non discriminatoire. Cela suppose un engagement en faveur d'une bonne gouvernance, du développement et de la lutte contre la pauvreté, aux niveaux tant national qu'international Cible 13 - S'attaquer aux besoins particuliers des pays les moins avancés. La réalisation de cet objectif suppose l'admission en franchise et hors contingents de leurs exportations, l'application du programme

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renforcé d'allègement de la dette des pays pauvres très endettés, l'annulation des dettes bilatérales envers les créanciers officiels, et l'ocrtroi d'une aide publique au développement plus généreuse aux pays qui démontrent leur volonté de lutter contre la pauvreté Cible 14 - Répondre aux besoins particuliers des États enclavés et des petits États insulaires en développement Cible 15 - Traiter globalement le problème de la dette des pays en développement par des mesures d'ordre national et international propres à rendre leur endettement viable à long terme

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ANNEXE 3 : LETTRE DES CTC AU PRESIDENT KIRCHNER (Traduction) Mendoza, 17 juin 2006. A son excellence MONSIEUR le PRÉSIDENT de la NATION, DR. NESTOR

KIRCHNER. Dans la Ville de Mendoza, dans le 17è jour suivant le mois de juin de l'année 2006, les

signataires, Coordinateurs de Centres Technologiques Communautaires de différentes provinces du

Pays, convoqués par le RÉSEAU NATIONAL de CTC au 1º Rencontre Nationale de Coordinateurs de

Centres Technologiques Communautaires, présentent le présent document à Monsieur le Président afin

de lui porter à connaissance ce qui est décrit ensuite :

La situation actuelle des CTC, est d'abandon total par le PSI (Programme pour la Société de

l'Information) et autres organismes qui intègrent le Projet CTC. Si les CTC sont encore aujourd'hui en

fonctionnement c’est grâce au dévouement et sacrifices des Coordinateurs qui jour après jour mettent

toute leur énergie pour que ces Centres continuent à fonctionner et soient à la portée des secteurs les

plus marginalisés du pays et dans quelques cas des institutions hôtes qu'ils les soutiennent.

Les objectifs par lesquels a été créé le Projet CTC ne sont pas réalisés, surtout en ce qui concerne la

qualification permanente les Coordinateurs, la rénovation et le maintien des équipements, ce qui a

conduit à un retard en matière de hardware et de software et un manque de mise à jour des

connaissances des Coordinateurs. Il est de la responsabilité de l'État de veiller au bon fonctionnement

des Programmes qu’il élabore et de garantir leur continuité et efficacité dans le temps. Toutefois le

Projet CTC a été maintenu en vigueur exclusivement grâce à l'effort des Coordinateurs en charge. En

considérant que les CTC sont au service de la Communauté avec une grande charge horaire pour les

Coordinateurs, et qu'à l'origine le Programme ne prévoyait aucune aide économique à ces derniers,

nous sollicitions que l’on révise cette situation et que l’on garantisse une rémunération juste, un accord

au travail effectué et une reconnaissance pour les tâches réalisées. En dépit d'avoir une nomination et

d’être délégués par le Programme depuis son étape initiale, dans beaucoup de cas, les Coordinateurs

sont abusés politiquement et souffrent de la soustraction des équipements par quelques Responsables

des Institutions Hôtes.

Devant la situation décrite, nous sollicitons M. le Président de la nation, afin qu’il se charge de l'affaire

le plus rapidement possible dans le but de garantir la continuité, le bon fonctionnement et le

développement des Centres Technologiques Communautaires, et par conséquent qu’il permette que les

CTC continuent à offrir et à promouvoir l'utilisation des Nouvelles Technologies l'Information et la

Communication spécialement aux secteurs les plus défavorisés. Il sera alors possible de lutter

efficacement contre la fracture numérique.

D'autre part il nous semble nécessaire d’effectuer un recensement des CTC afin de déterminer ceux

qui sont en fonctionnement selon les objectifs originaux et de les fortifier dans leur gestion de base.

L'État doit garantir la connectivité à Internet à travers le haut débit dans tous les Centres

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Technologiques Communautaires, en utilisant les ressources qui sont actuellement assignées au

paiement de connexion, cette tâche est fondamentale pour la réalisation des objectifs du projet. Il est

nécessaire que le programme soit articulé au Ministère de l'Éducation par rapport au diplôme de

qualification délivré par les Centres Technologiques Communautaires. Il faut incorporer des liens sur

les Centres Technologiques Communautaires dans l'emplacement web www.argentina.gov.ar

Finalement, nous demandons que les CentresTechnologiques Communautaires fassent partie de la

Politique de l'État puisque ces derniers sont un outil pour le progrès des peuples, et ils ont été

constitués comme de réels référents en matière de connaissance et de développement local.

Source : www.enredando.org.ar

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ANNEXE 4: ENQUÊTES (Source: Cindy Drogue)

USUARIOS DE CIBERCAFÉ/TELECENTROS COMUNITARIOS INFORMÁTICOS

SEXO

� Mujer � Varón

EDAD

� Menos de 10 anos � 10 a 19 anos � 20 a 29 anos � 30 a 49 anos � Mejores de 50 anos

NIVEL DE ESTUDIOS

� Primera � Secundaria � Universitaria

ACTIVIDAD

� Alumno/ Estudiante � Trabajador

� Tipo………………………. Desempleado

ORIGEN GEOGRAFICO

� Barrio � Otro barrio � Argentino � Otra nacionalidad

FRECUENCIA DE USO Por semana

� 1 vez./semana � 2 vez/semana � 3 vez/semana � Mas de 3 vez/ semana

Tiempo de conexión

� ½ hora � 1 hora � Mas de 1 hora

LUGAR DE ACCESO � Telecentro � Casa � Escuela � Trabajo � Otro: …………………………………………………….

� ¿Conoce alguien de su ambiente cercano que posee una conexión Internet?

� Si � No

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PRACTICAS DE USO � ¿Para qué utiliza Internet?

� Mail � Chat � Juego en red � Búsqueda de información en Internet

� Noticias � Material de apoyo escolar � Información de interés personal (banda de música, receta, webblog…)

� Búsqueda de trabajo � Compras � Trabajo sobre PC (procesador de texto, planilla de calculo, fotos, lectora de CD ROM, imprimir…) � Otro………………………………………..

� ¿Dónde están las personas con las que comunica por correo electrónico o par chat? � En Rosario � En otra provincia � En América del Sur � En Estados Unidos � En Europea � En otros países

ANTIGÜEDAD DE USO � ¿Cuanto tiempo hace que usa Internet?

� Menos de 1 ano � Entre 1 o 2 anos � Mas de 2 anos

PRESUPUESTO Y INTERNET � ¿Cuál es su renta mensual?

� Ninguna � Entre 100 y 300 pesos � Entre 300 y 500 pesos � Entre 500 y 700 pesos � Mas de 700 pesos

� ¿Qué presupuesto mensual dedican a Internet?

� Menos de 10 pesos � Entre 10 y 30 pesos � Entre 30 y 50 pesos � Mas de 50 pesos

� ¿En su presupuesto mensual cuanto representa el presupuesto que dedican a Internet? …………………………………………………………………………………………………………………………………………………………… EL USO DEL CIBERCAFE

� ¿Que le motivó a usar el cibercafé? � Necesidad de comunicación � Necesidad de aprender la tecnología � Curiosidad � Necesidad de entretenimiento � Otros…………………………………………………………………………………………………………………………………………

� ¿Generalmente, viene aquí solo o acompañado? � Solo � Acompañado

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� A que distancia vive del cibercafé? � Entre 50 y 200 metros � Entre 200 Y 500 metros � Entre 500 metros y 1 km � Mas de 1 km

� ¿Qué prioriza al elegir un cibercafé?

� Rapidez de la conexión � Ubicación � Costos � Calidad de servicio y atención � Equipo y tecnología � Medio social

CAPACITACION � ¿Han participando en capacitación en informática?

� Si ¿En qué le sirvió?........................................................................................................................................................................... …………………………………………………………………………………………………………………………………………………. ………………………………………………………………………………………………………………………………………………….

□ No Quisiera recibir y porque?

...................................................................................................................................................................................................... ……………………………………………………………………………………………………………………………………………….. ………………………………………………………………………………………………………………………………………………..

VISON SOBRE INTERNET � ¿Cree usted que el uso de Internet mejoró su condición de vida?

� Si Porque:…………………………………………………………………………………………………………………………………………….

……………………………………………………………………………………………………………………………………………….. ………………………………………………………………………………………………………………………………………………..

� No

� Mencione tres palabras que para usted definen Internet: 1. ………………………………………………. 2. ………………………………………………. 3. ……………………………………………….

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PROPIETARIOS DE CYBERCAFÉ

CARACTERÍSTICAS DEL NEGOCIO

� Dirección del negocio: ………………………………………………………………………………………………………………

� Horario de apertura: ……………………………………………………………………………………………………………….

� Precio de la hora de conexión: …………………………………………………………………………………………………….

� Su local es: � Propio � Alquilado � Otro (préstamo, anticresis, etc.)

� Número de equipos: � 1 hasta 5 � 5 hasta 10 � 10 hasta 15 � 15 hasta 20 � Mas de 20

� ¿Cuántos años tienen los equipos? � No sabe � Menos de 1 año � Entre 1 a 2 años � Más de 2 años

� ¿Cuál es la capacidad (ancho de banda) de la conexión? � No sabe � 28 kbps � 56 kbps � 128 kbps � 256 kbps � 584 kbps � 1.2 Mbps � 2 Mbps � Otro

HISTORIA DEL NEGOCIO

� ¿Cuántos años funciona el sitio como cibercafé? � 1 ano � 2 ano � Mas de 3 ano

� ¿Con cuántas máquinas empezó? (anotar el número)

� ¿Qué lo motivó a instalar este tipo de negocio? � Novedad � Competencias con la profesión � Le pareció fácil y lucrativo

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ACTIVIDAD ECONOMICA

� ¿Es esta su única actividad económica? � Si � No

� ¿Es esta la actividad que reporta mayores ingresos? � Si � No � No aplicable

� ¿Tiene usted otro cibercafé? � Si � No

� ¿Este negocio es de fin múltiple? � No � Si

� ¿Cuál es la actividad que comparte con el cibercafé? � Cafetería o restaurante � Alimentos preelaborados � Víveres � Papelería e insumos � Celulares � Otra

SOFWARE Y HARDWARE

� Marca del Sistema Operativo utilizado : � No sabe � Microsoft � Linux � Otros

� ¿Tiene licencia para el servidor o para el computador destinado como servidor? � No sabe � Si � No

� ¿Cuánto paga por licencias? � No sabe � Menos de 100 por equipo � 400 por equipo � Otro � No aplicable

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PARTICIPANTES DE LA CAPACITACIÓN SEXO

� Mujer � Varón

EDAD

� Menos de 20 años � 20 a 29 años � 30 a 39 años � 40 a 49 años � Mejores de 50 años

NIVEL DE ESTUDIOS

� Primaria � Secundaria � Universitaria

ACTIVIDAD

� Alumno/ Estudiante � Trabajador

� Tipo………………………. � Desempleado

ANTES DE LA CAPACITACIÓN � ¿Tenía temores antes de participar en esta capacitación?

� No � Si, cuales ?

? Porque eligió esta capacitación ?

DESPUÉS DE LA CAPACITACIÓN � ¿Esta satisfecho con esta capacitación?

Si, Porque � No

Porque : � ¿Que es lo que le gusto más de esta capacitación? � ¿Tiene usted una computadora en su casa?

� No � Si

¿Con una conexión Internet? � No � Si

� ¿Conoce alguien de su ambiente cercano que posea una conexión Internet?

� Si No

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VISON SOBRE INTERNET � ¿Cree usted que el uso de Internet va a mejorar su condición de vida?

� Si � Porque:……………………………………………………………………………………………………………………………. ………………………………………………………………………………………………………………………

� No

� Mencione tres palabras que definen Internet para usted: 1. ………………………………………………. 2. ………………………………………………. 3. ……………………………………………….

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Cindy DROGUE "Internet et Développement : l’exemple de l’accès, de l’utilisation et de l’impact d’Internet sur les milieux populaires de Rosario, Argentine." Master 2 Sciences du Territoire, Spécialité « Outils, Gestion et Dynamisme du Développement Territorial », Parcours « Conduite de Projets de Développement Territorial », UMPF, Grenoble. Soutenu le 28 septembre 2006 à Rosario par vidéoconférence. 65 pages (sans les annexes). Résumé A l’heure où la révolution informationnelle apporte une somme de changements radicaux et profonds à l’ensemble des secteurs de la société, il semble pertinent de s’interroger sur la question du lien entre Internet et développement. Ce travail s’appuie sur une expérience de stage au sein de l’ONG Nodo Tau de Rosario en Argentine et entend démontrer le rôle incontournable qu’Internet joue, ou devrait jouer, en matière de développement social et de lutte contre la pauvreté dans les pays du Sud. Basé sur l’étude de l’accès, de l’utilisation et de l’impact d’Internet sur les milieux populaires de Rosario, ce rapport entend décrire une réalité locale et donner aussi quelques recommandations dans la perspective de mettre les TIC au service du développement intégré du territoire urbain de Rosario. En somme ce travail tente de démontrer comment Internet peut servir de levier et de puissant vecteur de changement dans de multiples secteurs pour l’atteinte d’objectifs fondamentaux et ouvrir un cercle vertueux de développement égalitaire et démocratique.

Resumido

Cuando la revolución de la información aporta una suma de cambios radicales y profundos al conjunto de los sectores de la sociedad, parece pertinente interrogarse sobre la cuestión del vínculo entre Internet y desarrollo. Este trabajo se apoya en prácticas realizadas en la ONG Nodo Tau de Rosario en Argentina e intenta demostrar el papel ineludible que Internet juega, o debería jugar, en materia de desarrollo social y en la lucha contra la pobreza en los países del Sur. Basado en el estudio del acceso, de la utilización y del impacto de Internet en los sectores populares de Rosario, este informe intenta describir una realidad local y también dar algunas líneas de acción para poner a las TICs al servicio del desarrollo integrado del territorio urbano de Rosario. En definitiva, este trabajo intenta demostrar como Internet puede servir de palanca y de vector poderoso en el alcance de objetivos fundamentales y abrir un círculo virtuoso de desarrollo igualitario y democrático. Mots-clefs : Internet, Développement social, Lutte contre la pauvreté, Réseaux, Société de l’Information, TIC.