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Juriste de formation et diplômé en psychologie, Sébastien Dathanétravaille depuis de nombreuses années sur le problème de la décision.Cadre dirigeant pendant quinze ans dans différentes structures(organisation professionnelle, start-up, association), il est aujourd’huiconsultant, formateur et conférencier. Il intervient dans de nombreusesécoles et universités et s’investit dans plusieurs structures en relation avecle monde des PME/TPE.Il peut être contacté à l’adresse : [email protected]

www.maxima.frSuivez-nous sur twitter@maximaediteurRejoignez-nous sur facebook.com/EditionsMaxima

8, rue Pasquier, 75008 Paris.Tél : + 33 1 44 39 74 00 – Fax : + 33 1 45 48 46 88© Maxima, Paris, 2015.EAN Epub : 978 2 81880 588 6

Tous droits de reproduction, de traduction et d’adaptation réservés pourtous pays.Dessins de l’intérieur : Treety – fotolia.com

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Sommaire

SommairePRÉALABLE(S)

Ces si mystérieuses décisions…Une brève incursion dans l’histoire de la décisionL’Homme, un décideur comme les autres ?

L’IMPORTANCE DU CONTEXTESans contexte, pas de décisionPercevoir, c’est déjà déciderAttention à l’attentionLes règles du je(u) socialVers une décision 2.0Faire face à la complexité

LE DÉCIDEURLa personnalité, facteur surestimé de la prise de décisionEst-il si libre, notre arbitre ?À la recherche du bon scénarioDes décisions sous influence(s)Naviguer sur un océan d’informationsPourquoi ne pas perdre est mieux que gagner ?Trop de choix tue le choixRaison et émotion, la nécessaire cohabitationL’intuition, puissant outil à destination des décideursL’esprit de corps du... corps et de l’espritDécider en mode Tribu

LA DÉCISIONLa phase clé de la préparationLa boucle action-réactionJ’ai décidé, et après ?Une mauvaise décision ?Mieux décider demain

RemerciementsOuvrages de référence

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Citations

« Quand l’idée vient à l’esprit d’une décision à prendre, redoutable etredoutée, les raisons aussitôt répondent aux raisons, et l’imaginationtravaille dans le corps, en mouvements contrariés qui font un beau

tumulte. »1

Émile Chartier dit ALAIN

« Les natures actives et couronnées de succès n’agissent pas selon l’axiome“connais-toi toi-même”, mais comme si elles voyaient se dessiner devantelles le commandement : “Veuille être toi-même et tu seras toi-même.” –La destinée semble toujours leur avoir laissé le choix ; tandis que lesinactifs et les contemplatifs réfléchissent, pour savoir comment ils ont fait

pour choisir une fois, le jour où ils sont entrés dans le monde. »2

Friedrich NIETZSCHE

1 Alain : Mars ou la guerre jugée. Les Passions et la Sagesse, Bibliothèque dela Pléiade, Gallimard, 1960.2 Friedrich NIETZSCHE : Humain, trop humain (1878-1879), Robert Laffont,coll. Bouquins, 1990.

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PRÉALABLE(S)

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1.Ces si mystérieuses décisions…

écider ! À la seule évocation de ce mot, une large palette d’émotionsremonte probablement à la surface. Une rapide plongée dans nos

souvenirs suffit à nous rappeler combien les moments marquants de notreexistence sont conditionnés par une décision originelle. Dans certains cas,ce furent un saut vers l’inconnu, un choix à contre-courant ou l’opposition àune figure d’autorité. Plus simplement, un court détour vers le joli petitvillage en contrebas de la route principale a pu se révéler une magnifiqueinspiration et a contribué à un complet changement de vie.Les décisions forment en quelque sorte des branches sur lesquelles nousbondissons au fur et à mesure de notre évolution personnelle. Certaines setiennent à quelques centimètres et s’attrapent sans le moindre effort ni lamoindre attention, quand d’autres obligent à plonger dans le vide et à vivrecet instant à la fois attirant et effrayant où plus rien ne sera comme avant.Qu’elles soient chevaleresques ou égoïstes, les décisions importantes ontcela de spécial qu’elles se figent dans notre mémoire et creusent desempreintes comme autant de reliefs qui façonnent ce que nous sommesaujourd’hui. Plus que le résultat de nos actions, décider (ou ne pas décider)est tout simplement l’acte qui nous définit en tant qu’individu. Décider,c’est adhérer, se conformer ou bien s’opposer, s’insurger, se révolter...C’est être ou ne pas...

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2.Une brève incursion

dans l’histoire de la décision

es dernières années, la prise de décision est devenue un thème à lamode, notamment chez les Anglo-Saxons. Pour autant, cette question a

toujours fait l’objet d’intenses recherches6.Accordons au Chinois Lao Tseu (-600 av. J.-C.) les premières réflexionssignificatives sur le processus de décision, particulièrement dans sonapproche du « non-agir ».Un siècle plus tard, le Grec Aristote s’affirme comme le théoricien modernede la décision en développant une vision empirique de la connaissanceainsi que le raisonnement déductif, encore très populaire de nos jours.Vers -300 av. J.-C., Alexandre le Grand utilise la symbolique du nœudgordien qu’il tranche avec son épée pour prouver la pertinence des coupsaudacieux pour la résolution de problèmes difficiles. En franchissant lefleuve Rubicon, Jules César (-49 av. J.-C.) nous confronte avec le risque dansla prise de décision et son fameux alea jacta est – le sort en est...

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« L

3.L’Homme,

un décideur comme les autres ?

a différence entre l’esprit de l’homme et celui des animauxsupérieurs, aussi grande soit-elle, est certainement une différence

de degré et non de nature. »7 Rédigée en 1871, cette célèbreformule de Charles Darwin provoque toujours d’intenses débats dans lesmilieux scientifiques. Elle pose la question préliminaire de savoir sil’Homme se positionne comme un décideur à part. Pour apporter uneréponse à cette intrigue chargée de polémiques, nous devons nousentendre sur la conception qu’implique l’acte de décider.

• Décider : une action utilitaristeou conditionnée par la morale ?

Au fond, décider relève t-il d’un processus de nature utilitariste ou faut-il yvoir la résultante d’une démarche morale ? Si la première approche estretenue, les décisions prennent naissance dans l’action et tous les êtresvivants sont concernés, tel un tournesol qui se tourne vers le soleil, unarbre qui pousse plus haut que son voisin pour absorber la photosynthèse,ou un serpent qui mord pour se défendre. La notion de vie suppose uneadaptation à un environnement donné, et des prises de décision. Enrevanche, considérer la dimension morale ou déontologique commeconstitutive de l’acte de décider exclut de facto la totalité des espècesvivantes à l’exception de l’Homme, seul représentant animal doté d’uneconscience suffisamment développée.L’approche de type morale se révèle séduisante. Après tout, comme lerappelle Blaise Pascal : « L’homme n’est qu’un roseau, le plus faible de la

nature ; mais c’est un roseau pensant. »8 Grâce à une capacité sans

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équivalent à acquérir de la connaissance (autrement appelée culture),l’Homme se serait affranchi de sa nature animale et des lois universellesqui en découlent, ce qui en ferait un décideur hors-norme. Là où lesanimaux seraient pilotés par des comportements innés, l’Homme partiraitd’une page blanche et se construirait depuis sa petite enfance par le biaisd’un long processus d’apprentissage. Là, enfin, où les animaux...

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L’IMPORTANCE DU CONTEXTE

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4.Sans contexte, pas de décision

Trois ans avant la naissance de Marc, Jacques, son futur père, se trouve aurestaurant avec ses amis rugbymans. De discussions enflammées entournées générales, il ne prête guère attention à Françoise, la jolie serveuseen charge de sa table ce soir-là. De son côté, elle a bien repéré ce grandgaillard qui ne pense qu’à revivre le match, forcément épique, auquel il vientde participer. Jacques poursuit la soirée jusqu’à la fermeture du bar. Dehors,en attendant son tramway, il retrouve Françoise et son visage vaguementfamilier. Seul avec elle, sur le banc, son charme lui paraît soudainementincroyable ; il décide d’engager la conversation. Est-elle devenue plusséduisante depuis son service ou Jacques a-t-il évolué en cours de soirée ? Lechangement de contexte ressort clairement comme le principal responsablede ces deux comportements sensiblement différents.

orsque vient le moment d’agir, décideur et environnement se partagentles rôles : au premier le soin d’actionner le levier de la décision, au

second celui d’influer sur leurs résultats. Avec son sens de la formuledéfinitive, le dialoguiste et metteur en scène Michel Audiard poussait leraisonnement encore plus loin : « Ce sont les événements qui décident, pas

les hommes. »15

• À la découvertede la prise de décision naturaliste Placer le contexte au cœur duprocessus de décision relève d’une démarche peu évidente ; elle estpourtant très sérieusement étudiée par certains courants de recherche,

comme l’approche du « naturalistic decision making »16 qui nous invite àrelativiser notre influence sur les délibérations prises et positionnel’écosystème comme un facteur-clé. Que l’on évoque le milieu ou sessynonymes, il s’agit d’aborder ce que l’Encyclopédie Universalis définit

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comme « (…) l’ensemble des conditions extérieures dans lequel sedéveloppe et vit un être vivant ». Ces conditions extérieures ont trait àl’espace-temps, aux paramètres matériels et humains, et à toutes lesforces cachées, plus ou moins incorporelles. Tous ces facteurs forment unécosystème dans lequel est plongé le décideur. Ils l’influencent sifortement qu’il peut être poussé à agir en dépit de ses intérêts, voire dubon sens le plus basique. L’interaction fonctionne dans les deuxdirections : le décideur influe en retour sur son environnement, jusqu’àle modifier par ses initiatives, même les plus insignifiantes, tellel’histoire-gag de cette peau de banane, négligemment jetée par lafenêtre d’un véhicule, qui rencontrera dans quelques minutes latrajectoire d’un malheureux cycliste.

Pendant une très longue partie de notre évolution, nos ancêtres bipèdesn’avaient d’autres choix que de se conformer aux défis permanentsproposés par leur biotope. Depuis, nous avons produit et produisonsencore tant d’efforts pour nous extraire des contraintesenvironnementales que nous pouvons jusqu’à en oublier leurs existenceset leurs rôles sur nos comportements. Décider sans tenir compte ducontexte revient à prendre la route de la plage sans consulter la météo quiprévoit orage et gros coups de vent, ou à se garer sous un...

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5.Percevoir, c’est déjà décider

Marc a tout juste 3 mois. Il joue dans son lit avec un fascinant objet plein decouleurs qui semble danser au-dessus de lui. Observons-le utiliser tous cessens pour interagir avec ce jouet ; l’ensemble de son corps participe : sesyeux, impossibles à détacher de ce mouvement ; ses bras, ses jambes et sabouche tentent de saisir la marionnette folle pour donner à son ressenti unedimension tactile. Le son de la cloche produit l’effet d’une symphoniefantastique sur ce petit cerveau en construction. Pour Marc, cette babiolereprésente la plus incroyable expérience polysensorielle du moment. Il ignoresimplement que cet objet, à l’apparence si réelle et attractive, sortdirectement de la fabrique de son esprit.Plus tard, après une mauvaise décision faisant suite à un jugement erroné,Marc comprendra les mots du psychologue anglais, Chris Frith : « maperception n’est pas le monde mais le modèle du monde créé par mon

cerveau. »23

a question de la perception constitue un point essentiel dans la prise dedécision mais difficile à aborder. Imaginez que près de 500 pages se

révèlent nécessaires pour introduire une psychologie des perceptions24

aux multiples références en chimie, électricité, biologie, neurosciences,etc. Le thème est complexe mais si incontournable que les cinq prochainschapitres y sont consacrés, sous différents angles. La façon de percevoirrésulte de sept millions d’années d’évolution, depuis les premiershominidés jusqu’à l’Homme moderne. Pour l’essentiel de la communautéscientifique, l’appareillage perceptif est resté, peu ou prou, bloqué austade de nos ancêtres cueilleurs-chasseurs. L’archaïsme de ce dispositif nel’empêche pas de figurer comme un acteur majeur dans le processus dedécision, à un point généralement sous-estimé. Devant une situation, ceque nous percevons – ou pas – peut conduire à des choix aux antipodes lesuns des autres.

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• Un système de perception extraordinaire, mais imparfait

Partons à la découverte de ce système de perception et de ses six capteurssensoriels. Une mission l’occupe à plein temps : transmettre lesinformations délivrées par l’environnement. La vision, l’ouïe, le goût...

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6.Attention à l’attention

Marc a 3 ans. Il s’amuse dans le jardin, sous l’œil maternel de Françoise. Sespremiers pas le poussent à partir à la conquête de ce nouveau monde. Toutdans l’environnement semble propice à la quiétude ce matin ; le labradordort sagement sur la terrasse et la grille est fermée. Soudain, un coup de ventfait voler le ballon jaune et rouge, jusqu’à présent immobile. Surpris, Marcdéplace son attention, alors concentrée sur sa peluche. Sans plus deréflexion, il décide d’aller à la rencontre de ce ballon fou, et dans son élan,marche sur la queue du chien endormi. Par un réflexe bien compréhensible, lelabrador sort de sa torpeur et se prépare immédiatement à se défendre enmordant le malheureux. « Ce petit bonhomme est plutôt familier », sesouvient l’animal qui abandonne aussitôt l’idée de commettre l’irréparable.Françoise assiste à la scène et se sent soulagée devant l’heureuxdénouement. Bien refroidie par cette fausse alerte, elle se promet de prêterplus d’attention, à l’avenir.

ercevoir se rapporte à ces activités naturelles qui s’effectuent sanseffort d’attention particulier ; rares sont les occasions de s’en soucier.

Grave erreur ! La source de nombreux choix hasardeux provient d’unemauvaise perception de l’environnement : « Je n’ai pas vu », « je n’ai pasfait attention », « je n’ai pas entendu », « je n’ai pas senti le coup venir »,etc. Qui ne s’est pas trouvé récemment à l’origine de ces explications,faisant suite à un choix inapproprié. Dans le processus de décision,l’attention jouit d’une place spécifique. Si elle intervient clairement enamont, son influence reste tout à fait significative dans le résultat final ; enfonction de l’attention portée sur tel aspect d’un problème, des solutionstrès différentes pourraient survenir. Avec une règle de base relativementsimple sur le papier : les décisions importantes exigent une attentionaccrue.

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• Les secrets cachésdes « maîtres de l’attention »

Tout serait plus facile sans l’archaïsme de notre système d’allocation deressources cognitives. Doté d’une faible capacité, il nous oblige àsélectionner avec soin les moments où nous devons faire preuve devigilance. Le cerveau arrive rapidement à un point de saturation lorsquenous lui demandons d’accorder de la concentration à plusieurs stimuli à lafois ou à une seule tâche pendant une durée conséquente. Pour la plupartd’entre nous, la gestion de l’attention fait partie de ces défis quotidiens,bien délicats à relever. Dès lors, nous observons avec une certainecuriosité, et disons-le, avec une légère jalousie, ces individus pourvusd’une excellente capacité de concentration. Tout leur semble plus facile etrésoudre une tâche un peu ardue s’apparente à une plaisante distraction. Àles voir évoluer avec une telle facilité devant des problèmes parfoiscomplexes, on comprend que la capacité d’attention figure comme unecomposante clé dans la mesure de l’intelligence générale.Illustrons le fonctionnement de ces maîtres de l’attention en suivant lestraces de Sherlock Holmes. Inventé par sir Conan Doyle, le célèbredétective privé...

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7.Les règles du je(u) social

Marc a 6 ans. Il joue dans un bac à sable avec tout l’équipement récemmentoffert par sa grand-mère. Absorbée par un roman, elle ne voit pass’approcher deux grands garçons de 8 ans qui, en un rien de temps,embarquent le matériel tout neuf. À peine remis de ses émotions, Marccomprend qu’il devra se renforcer physiquement à l’avenir pour éviter unetelle mésaventure.

Plusieurs années plus tard, Marc, devenu adulte, figure en bonne positiondans la « short list » pour prendre la place de son supérieur hiérarchique, enpartance pour une entreprise concurrente. Sur le papier, Marc connaît lamission et a produit d’excellentes impressions dans tous ses postesprécédents. Son concurrent est, certes, moins compétent, physiquement pluschétif aussi, il affiche néanmoins l’assurance des ambitieux assumés et unsens inné du réseautage. À l’occasion d’un apéritif dînatoire, il réussit le tourde force d’inviter le responsable des ressources humaines, pourtant rétif àfréquenter personnellement ses équipes. En bon rationnel, Marc juge lesbasses manœuvres de son concurrent comme un moyen grossier de gommerla faiblesse « technique » de sa candidature. Marc pourrait bien déchanter ;les règles du jeu social diffèrent du bac à sable : le plus « costaud » netriomphe pas toujours !

vec sept milliards d’habitants sur la planète et une urbanisationsupérieure à 50 %, la plupart des décisions produisent un effet direct ou

indirect au-delà de notre propre personne. De fait, nos vies sont tellementimbriquées avec celles d’autres individus, familiers ou non, que nos actessont moins jugés sur leur efficacité en matière de survie que sur leurcompatibilité avec les règles spécifiques du milieu social. Pour autant, vivreen société relève bien de ces aptitudes profondément ancrées dans l’ADNde notre espèce. Au fil de leur lente évolution, nos ancêtres se sontattachés à développer une vie sociale d’une extrême richesse, érigée tel un

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rempart contre l’inhospitalité de l’environnement sauvage.

• La prise de pouvoir du « verbal »sur le « corporel »

Pendant ces centaines de milliers d’années, la vie sociale s’appuyait sur uncertain nombre de prérequis, parfois oubliés aujourd’hui. Jadis, il était parexemple impossible de communiquer et d’établir des liens sociaux sans setrouver en présence physique des individus concernés. Les interactionsportaient moins sur le langage lui-même, comme les mots ou lesonomatopées, que sur sa dimension sensorielle. En d’autres termes, le «verbal » ne constituait qu’un étage de la communication tout autantconstruit sur le « paraverbal » (intonation et rythme de la parole) et le «non verbal », communiqué par le corps. Le rôle de ce dernier se révélaitdécisif : il contribuait à...

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8.Vers une décision 2.0

Marc se souvient très clairement des sorties familiales de son adolescence.Son père emmenait régulièrement tout son petit monde à la découverte d’unnouvel endroit à visiter. Dans les années 1970, il fallait être parfaitementorganisé lorsqu’on partait, avec toute la famille, dans une ville inconnue. Àl’époque, la technologie n’avait pas encore pénétré nos quotidiens ; lepremier téléphone portable à destination du grand public sortira des usinesde Motorala 12 ans plus tard. Pour cette raison, Jacques, le père de Marc,convenait avec chacun d’une heure et d’un lieu de rendez-vous facile àmémoriser quoi qu’il arrivât dans la journée.Nous sommes maintenant en 2015. Marc décide de se rendre avec Sandra, safemme, dans une jolie station balnéaire. Sandra se trouve au volant, à larecherche d’une hypothétique place de parking, quand une place se libèredans une rue qu’il faudrait prendre en sens interdit. Marc suggère dedescendre pour la garder, le temps que Sandra le rejoigne. Devant unesituation d’une rare banalité, aucun des deux n’envisage un plan B, commele prévoyait naturellement son père à l’époque. Après tout, chacun disposede son propre téléphone portable et notre couple s’estime relié par ce filnumérique, aussi discret qu’efficace. Tellement discret, ce compagnon, queMarc oublie de le prendre en sortant de la voiture, ainsi que ses papiers ! Dixminutes s’écoulent, bientôt vingt, Marc passe progressivement du statut decitoyen recommandable, à celui de sans-papier. Finalement, après quarante-cinq minutes, Sandra trouve le moyen de retrouver son chemin dans cetteville aux sens uniques tortueux. Marc en est quitte pour une belle frayeur etune réflexion à garder en mémoire : la technologie se révèle bien pratique... sinous savons nous en passer.

omme Marc, beaucoup s’interrogent sur la place prise par la technologiedans nos vies. Alors que pour nos lointains ancêtres, les considérations

de survie prenaient la forme de problématiques physiologiques

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(s’alimenter, se protéger), le stress du quotidien de nombreux habitants dela planète concerne plus le niveau de batterie du téléphone portable oul’accès à un réseau wifi. Plus généralement, cette saynète introductivemontre à quel point nous avons tendance à transférer différentes missionssur la technologie, comme nous aider à nous mouvoir dans unenvironnement inconnu.

• L’Homme et ses outils,une (très) longue histoire d’amour

Historiquement, notre espèce a toujours développé une fascination pourles outils de toutes sortes, considérés comme le prolongement du corps.Grâce à eux, l’Homme a pu gommer une faiblesse physique manifeste pourse défendre avec de plus en plus d’efficacité, puis attaquer, se loger,s’habiller, etc. La manière dont l’Homme a façonné, siècle après siècle, desbifaces de plus en plus spécifiques montre que, contrairement aux autresanimaux, il ne s’est jamais contenté de fabriquer un outil simplementfonctionnel : il a cherché, sans relâche, à l’améliorer...

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9.Faire face à la complexité

Marc vient de fêter ses 13 ans. Il se prépare à suivre un cours de Sciences dela Vie et de la Terre. La semaine précédente, l’enseignant avait annoncéqu’une dissection de souris serait au programme. Cette perspective ne plaîtguère à Marc. S’il aime passer du temps à monter et démonter sesmaquettes d’avion ; un rongeur, c’est une autre histoire. Mis à part le fait detravailler sur un être encore vivant quelques jours auparavant, notrecollégien s’inquiète de la procédure à adopter pour « remonter » le corps dece petit animal, une fois disséqué. Il imagine la tâche bien plus ardue quecelle de remplacer une aile d’un de ses avions de modélisme. Sans le savoir,Marc s’initie à la complexité. Elle irradie tout, de la vie microscopique du pluspetit des rongeurs, jusqu’au fonctionnement de l’univers, et elle rend difficilela compréhension de certaines situations.

Bien des années plus tard, Marc sera confronté directement aux effets decette complexité lorsqu’il sera sommé de trouver un autre travail et dedéménager de cette ville où il se sentait si bien ; conséquence inattendue,mais bien réelle, d’une réorganisation de sa société australienne en passed’intégrer un conglomérat japonais. De retour à la maison, un peu dépité, ilpeinera à expliquer à ses enfants comment un événement si éloigné de leurquotidien peut, à ce point, générer de tels bouleversements dans leurs vies.

ous terminons ici notre première longue étape sur l’importance ducontexte dans la prise de décision. Tout au long des escales

précédentes, nous avons pu mesurer les changements d’environnementauxquels l’Homme a dû faire face au cours de son évolution et leurinfluence sur sa façon de décider. Le monde d’aujourd’hui impose ceconstat sans appel : il est mû par une incroyable complexité, avec laquellenous devons composer au quotidien.

• De la complication à définir la complexité

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Complexité ? Ce terme est généralement confondu avec « compliqué » dontil partage uniquement la première syllabe. Le compliqué renvoie à tout cequi peut se monter et démonter, et ce quel que soit le nombre d’élémentsen jeu. Construire un Airbus A380 est compliqué ; imprimer un journal,aussi. Si une pièce se trouve défectueuse, la remplacer n’affecte en rien lecomportement de l’avion ou de la presse à imprimer. Avec la méthode, ons’accommode sans trop de tracas de situations compliquées.La complexité relève d’une autre typologie : elle « comporte des élémentsdivers qu’il est difficile de démêler », précise le Larousse, insinuant que leséléments eux-mêmes importent moins que les...

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LE DÉCIDEUR

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10.La personnalité, facteur surestimé

de la prise de décision

Marc croise Vincent, un de ses amis d’enfance. Il a eu un mal fou à lereconnaître, tant ce dernier semblait emprunté et, pour ainsi dire, éteint. Aucours de leur rencontre, ils discutent de tout et de rien et se remémorentl’époque où ils avaient tous les deux 7 ans. Ils formaient alors un duoinséparable. Marc se souvient particulièrement de cette belle journée d’étéoù les deux amis s’amusent près d’un chêne centenaire et se lancent le défide savoir qui arrivera le premier au sommet. Rapidement, Marc prendl’ascendant et atteint le haut de l’arbre, fier de sa réussite. Nettement moinsà l’aise, Vincent abandonne et redescend la tête basse. Derrière l’assurancede façade de Marc se cachait une appréhension peut-être plus forte encoreque celle de Vincent, mais celui-ci n’en a jamais rien su. Simplement, ce jour-là, seul Marc prend la décision d’aller au bout. Quels sont ses ressortsintérieurs ? Une figure familiale, adepte de la prise de risques ? La volontéd’impressionner son compère ? Une ambition naissante ? Peu importe, Marcaura grimpé jusqu’à la plus haute branche et seul ce résultat compte à cetinstant. La confiance aidant, il se dira plus tard qu’essayer au risque detomber vaudra toujours mieux que ne pas tenter l’expérience. Avec despriorités divergentes, les deux amis d’enfance vont progressivement seperdre de vue. Tout est parti de ce jour d’été ? La dynamique a peut-être étéalimentée par cette décision comme il est tout aussi probable que lespersonnalités naissantes ont joué un rôle dans cette première décision.

u moment de délibérer, la personnalité du décideur est souvent jugéedéterminante ; parfois à tort car les influences diverses qui affectent le

processus décisionnel sont largement ignorées. Selon le contexte, unindividu au comportement habituellement à risque peut soudainementagir avec d’infinies précautions, pendant qu’un pleutre patenté, entraînémalgré lui dans une catastrophe, se révèle d’un héroïsme extraordinaire.

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Ainsi sont assemblées nos personnalités : une tendance marquée s’associeavec son caractère opposé et l’ensemble forme un équipage paré àprovoquer de surprenantes décisions.

• Décision et personnalité : le paradoxede l’œuf et de la poule

Quiconque évoque la personnalité prend le risque d’affronter un conceptflottant avec une réalité à plusieurs visages. Il est assez rare de tomber surun individu doté d’une constitution claire et limpide. La plupart d’entrenous expriment différents aspects de notre tempérament selon lescirconstances, et cela influe sur nos décisions. Néanmoins, nous disposonsd’une base assez stable dans le temps qui rend nos comportementsgénéralement cohérents et relativement prédictibles.Si la personnalité influence sur la décision, le contraire se révèle tout aussiexact. Les décisions vont contribuer à façonner la personnalité, dès le plusjeune âge, comme dans le cas de la scène introductive avec Marc. On peutpenser que les choix...

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11Est-il si libre, notre arbitre ?

Marc vient d’avoir 17 ans et son baccalauréat scientifique avec mention. Ildoit décider de son orientation. Son diplôme et son cursus scolaire lui ouvrenttoutes les portes possibles, du commerce à l’ingénierie, en passant par lessciences humaines. Comme son père et son grand-père maternel, Marc estpourvu de la bosse des mathématiques, depuis sa plus tendre enfance. Deson propre avis, il y voit une part de génétique associée à l’influence de sonenvironnement familial à forte dominante scientifique. Partant de ceprésupposé, Marc se pose la question de sa future orientation ; décisionstratégique, surtout à un âge où une partie du cerveau n’est pas tout à faitoptimisée pour piloter les projets à long terme.

Après avoir pesé le pour et le contre, pris différents avis, il se dit que ladécision la plus rationnelle consisterait à suivre des études d’ingénieur. Lechoix de la raison, mais pas seulement. En agissant de la sorte, il prend lamême direction que son père et son grand-père, tous les deux brillantsingénieurs. Marc poursuit l’héritage paternel et alimente les puissantesinfluences familiales, pourtant généralement sous-estimées.

ans la prise de décision, la question posée par le libre arbitre dépassele simple cadre philosophique. Nous en sommes rarement conscients

mais décider et procéder à des choix totalement libres relèvent le plussouvent d’une douce utopie. Le libre arbitre fait partie de ces conceptsinsaisissables pour lesquels les définitions nous sont d’une aide touterelative. Le Larousse, par exemple, définit le libre arbitre commel’aboutissement d’une « volonté non contrainte », évoquant l’idée d’unchoix, et surtout d’un choix fait en pleine conscience.

• Un concept exclusivement humain ?

Nous avons longtemps jugé cette inclinaison à choisir comme le propre de

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l’Homme, raison pour laquelle nous y sommes très attachés pour justifierde notre nature exceptionnelle. Pourtant, comme pour de nombreuxaspects, les frontières apparaissent floues et la différence entre le librearbitre « humain » et celui d’autres espèces vivantes est probablement del’ordre du degré, pour paraphraser la formule de Ch. Darwin. Peucontestent l’idée que certains animaux s’appuient sur une consciencerelativement développée et, par conséquent, d’un libre arbitre minimumquant à leurs décisions. Il suffit d’observer les organisations animales lesplus socialement complexes pour comprendre que les stratégies d’allianceou d’affrontement s’éloignent du seul déterminisme biologique. Chaqueanimal paraît relativement libre de trouver des alliés ou d’affronter desennemis, et même de changer de camp en fonction des circonstances.L’animal agit un peu...

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« À

12.À la recherche du bon scénario

Marc effectue un stage dans le cadre de sa première année d’ingénieur.Récemment, il a commis une erreur dans l’application d’une procédure quiaurait pu coûter cher à l’entreprise, comme le lui a fait remarquer Jean, sonmaître de stage. Les jours suivants, Marc a constaté un changement decomportement de son supérieur. Il est apparu moins souriant et plussoucieux. Pour Marc, une seule certitude : Jean lui fait payer sa bévue. Afinde finir son stage sur une bonne note, il se décide à redoubler d’efforts poureffacer cette mauvaise impression.Marc ignore que le changement de comportement de Jean est sans rapportavec son erreur, largement digérée depuis. Jean a appris son licenciement etil a voulu éviter de montrer son désarroi à ses collègues, et plus encore à sonstagiaire. Marc était loin d’imaginer un tel coup de tonnerre : il s’était arrêtésur l’explication la plus probable qui, en l’occurrence, se révélait fausse.

vendre : chaussures bébé, jamais portées. »55 Ce bloc de six mots,attribués (à tort) à Ernest Hemingway, démontre le pouvoir del’imaginaire dans la prise de décision. Six mots, que certains

qualifient de « roman le plus court du monde », pour déclencher uneavalanche de scénarios possibles, du plus rationnel au plus délirant. Leschaussures étaient-elles trop petites ? Pas assez jolies ? En double ?L’enfant décédé ? Handicapé ? Chez un de ces parents ? Enlevé par unextra-terrestre ? On voit agir là ce mécanisme associatif qui, d’une simplephrase, peut conduire à élaborer une histoire cohérente, à défaut d’êtreexacte, comme le fait Marc dans la scène de départ. Des scénarios commecelui-ci, nous en construisons en permanence pour comprendre le présent,réécrire le passé ou imaginer l’avenir. Loin d’être une lubie, modéliser lemonde comme une histoire relève d’un besoin physiologique irrépressiblepour lequel chaque événement, chaque action, chaque stimulus qui arriveà la conscience doit trouver une explication ou une attribution, si possible

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simple et évidente.

• Un effet, une cause (ou peut-être plusieurs) Cette Loi universelle sematérialise par le principe de causalité que l’on peut résumer ainsi : touteffet demeure nécessairement le résultat d’une (ou plusieurs) cause (s)et une même cause (ou groupe de causes) entraîne un même effet.Connu depuis longtemps, les psychologues appellent ce mode de penséeattribution causale, ou biais d’attribution. Son expérimentation la plusévocatrice prend la forme d’une vieille vidéo de 1944, bricolée par deux

psychologues, Fritz Heider et Marianne Simmel56.

Heider and Simmel – An experimental study of apparent behaviour, 1944https://www.youtube.com/watch?v=n9TWwG4SFWQ

Ce film nous entraîne dans une histoire où un méchant triangle poursuit uncercle, manifestement apeuré. Si ces formes évoluent bel et bien devantcet écran, elles le font de manière totalement aléatoire, appliquant uncomportement somme toute logique pour des objets sans âme niconscience. Pour autant, beaucoup d’entre nous se trouvent dansl’incapacité de ne pas attribuer des émotions à ces formes de nature inerte.Cette aptitude un peu incongrue figure en réalité comme un des plusimportants avantages sélectionnés par l’évolution pour faire face à unmilieu physique. L’attribution causale permet en effet de comprendrel’environnement et de lire les intentions des uns et des autres – humainsou pas. Une célèbre enseigne d’ameublement suédoise avait d’ailleursutilisé cette mécanique dans un film publicitaire racontant l’histoire d’unelampe abandonnée sur le trottoir.

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http://www.koreus.com/video/pub-ikea-lampe.html

L’habile mise en scène rend extrêmement difficile de ne pas ressentir de la

tristesse pour cet objet pourtant inerte57.Sans cette manie à systématiquement attribuer une cause à un effet,l’espèce humaine aurait disparu depuis longtemps. Combien de nosancêtres ont été sauvés en faisant le lien entre la plante qu’ils avaientingérée et la soudaine dégradation de leur état de santé ? Et combien denos aïeuls ont pu bénéficier de ce retour d’expérience par l’exceptionnellecapacité de transmission de l’espèce ? Pourtant, appliqué dans le monded’aujourd’hui, en partie invisible et immense, ce module d’attributioncausale s’exprime de manière biaisée puisqu’il nous est simplementimpossible...

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C

13.Des décisions sous influence(s)

Marc a 23 ans. Il vient d’être élu président du bureau des élèves de son écoleet doit constituer son équipe pour animer l’année universitaire à venir. Marcapprécie beaucoup Clarisse, et pas seulement pour son dynamisme et sabonne humeur. Elle souffre cependant d’une réputation individualiste. Marcvoudrait l’intégrer, et il se demande si ce choix est commandé par sessentiments naissants, ou si Clarisse présente toutes les garanties pouranimer une telle association. Il s’interroge sur la meilleure façon de prendrecette décision, sans être accusé d’avoir été influencé.

haque seconde, nous sommes sous l’influence de quelque chose :l’humeur du moment, la sonnerie du téléphone chez le voisin, le week-

end passé, la température de la pièce, la présence de notre supérieurhiérarchique, l’ordre de présentation des données... Ces quelquesexemples comptent parmi ces infinies petites et grandes variationsinternes ou externes qui vont jouer sur le processus de décision. Même lesmotivations sont source de confusion comme lorsque nous cédons à l’appâtd’une magnifique gourmandise tout en pensant à conserver notre ligne.Depuis fort longtemps, personne ne fait plus grand cas du mythe dudécideur rationnel, 100 % objectif quant à ses choix. Au début du XXesiècle, le spécialiste du comportement des foules, Gustave Le Bon, assuraitdéjà « qu’une des sources les plus fréquentes d’erreur est de prétendreexpliquer par la raison des actes dictés par des influences affectives ou

mystiques. »73 En clair, nous agirions avec une volonté malléable enfonction des circonstances. Parfois, seulement, nous pouvons faire fi desinfluences. Le reste du temps, nous nous comportons telles desmarionnettes sous la coupe de puissants aimants (les influences),incapables d’avancer dans le sens de notre projet initial.

• Le proche et le visible, facteurs d’emprises considérables sur le décideur

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Prenons un facteur externe tout à fait commun comme le climat. Desétudes ont démontré son influence sur la vente de certains types de

véhicules74. Au moment de se rendre chez le concessionnaire, si unmagnifique ciel bleu les accompagne sur le trajet, les acheteurs setourneraient plus naturellement vers les cabriolets. Le même trajet, sousdes conditions climatiques pluvieuses ou neigeuses, et voilà ces clientsplus attirés par les 4x4. Logique ? Sauf à considérer que ces achats portentsur plusieurs années et que le beau ou mauvais temps du jour del’acquisition n’augure en rien de sa permanence. Que cette études’appuie sur le climat s’avère anecdotique et il paraît assez facile de s’enprémunir avec un minimum de précautions. Cependant, à bien yregarder, les conditions météorologiques, et notamment la luminosité,jouent sur l’activité de certains neurotransmetteurs comme la sérotonineet, par voie de conséquence, sur le moral, lui-même acteur des décisions.

Le climat constitue un phénomène parmi d’autres sur un spectre plus large,englobant ce qui relève du proche et du visible. De fait, nous décidonsbeaucoup plus en fonction de la perception de l’environnement direct quesur des informations plus...

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LA DÉCISION