houel voyage pittoresque
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VOYAGEPITTORES QUE
DES I S L E S
DE SICILE, DE MALTEET
DE LIPARI.
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VOYAGEPITTORESQUE
DES 1 S L E S
DE SICILE, DE MALTE
ETDE L 1 P A R I,Où l'on traite des Antiquités qui s'y trouvent encore;
des principaux Phénomènesque la Nature y offre; duCoAumedes
Habitans, & de
quelquesufages.Par JEAN HOUEL, JP~ Roi; de ~M~m~
J?~M~4~T~ Parme.
TOME SECOND.
A PARIS,DE L'IMPRIMERIE DE MONSIEUR.
M. DCC. LXXXIV.
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A
VOYAGEPITTORESQUED E S 1 S L E S
DE SICILE, DE MALTE
ET
D E LIPARL
CHAPITRE TREIZIEME.
Dqp~ M~y. j~m~ M~ 6'P~/zdu F~rc Afe~ne
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2 VOYAGE PITTORESQUEcomme moi, des Iiaifons d'amitié avec plufieurs d'entre eux, éprouvent une douleur plus vive,
que le temps n'effacera point, & qui leur laiffera toujours de iennbles regrets.Ce qui reAe de cette ville intércne trop les arts pour ne pas retracer à la mémoire tout ce
qu'elle renfermoit de digne d'être admire &je vais avec un plaiur mêle de douleur lui payer le
tribut que je lui dois.
Cette ville étant une des plus grandes & des mieux pourvues de la Sicile pour toutes les com-
modités de la vie, il ne me fut pas di~cilc de m'y loger on y trouvoit des auberges, ce qui
difpenfoit d'avoir recours à i'hoipitanté des couvens, comme cela m'eA arrivé trop fouvent dans
d'autres endroits de cette Ine.
J'avois déjà des amis dans cette ville ils étoient informés des motifs de mon voyage. Dom
Andrea Gallo un des hommes les plus in~ruits de Mefnne", me conduifit à l'extrémité fepten-trionale du détroitoù eft la tour du Fare ntuée fur la pointe de cette lue qui forme le Cap Pelore.
J'avoue que )'cus autant de furprife que de pïaifir, en voyant d'un mêmecoup d'œll une partiedela
Sicile le beau canal de Meuine, & cette partie de l'Italieque préfentent les côtesdela Calabre.
PLANCHE S OIXANTE-TREIZIEME.
E~M~ du Cap P~o~ l'on voit la Tour du Fare, le Canal de
M~ie JC côtes de la C alabre.
J'ai repréienté fur le devant de cette cAampe le terrain exactement tel qu'il étoit quand j'aide(!mé cette vue, afin d'offrir toujours des chofes vraiesà mes lecteurs. C'eA fur-tout quand on
leur fait connoître une chofe nouvelle qu'il faut redoubler de foin pour être exact. C'eA ce quet'ai fait. Le terrain étoit partagé comme on le voit ici en petites pyramides quarrées d'égales gran-
deurs, placées à des diftanceségales. Ce travail avoit été fait pour y planter de la vigne. Les cul-
tivateurs m'ont dit qu'ils préparoient ainfi la terre, afin que les eaux, en fe ranemblant dans les
endroits ou les angles fe touchent, communiquaffenttoujours un peu d'humidité au fol.
Au-delà de ce champ, derrièreles figures, on voit un des deux lacs A,A, appelésPentane. Plus
loin au point B cR la tour du Fare de Meffine. C eir la langue de terre qui formel'extrémitéfep-tentrionale du Canal de Meffineavec le Cap Pelore. Cette langue de terre ne le voit qu'en racourci.
De l'autre côté dela mer, au deffus de la lettre C, on apperçoit le fameux promontoirede Scylla D.
Le château de Scylla s'élève fur la roche. La ville du même nom occupe le penchant de cette
montagne, qui forme un
golphe. La ville defcend
jufques au bord de la mer.
Ce qu'on voit ici à gauche de cesmontagnes, qui s'élèvent derrière celles qui environnent Scylla,& qui s'étendent au nord ~u~qual'extrémité du tableau, c'eâ la pâme de la Calabre qui a été la
plus maltraitée par faffreuxtremblement de terre du 5 février 17 8~.La partie de ces côtes, à droite de Scylla, conduit à la ville de Regio, qui a été auffi victime
de ce même tremblement.
Ces espèces de cubes E, E, rangés irrégulièrement à la fuitelesuns des autres, le long du ri-
vage, font les maifonsdu village voifinde la tour du Fare de Menine, qui lui a donné fon nom.
La mer à gauchedece tableau, eft cette partie de la Méditerranée qu'on appelle mer de Thyrrhènc.Celle que l'on voit à droite du tableau, eft le canal ou détroit qu'on nommeauffi Fare de Meffineil fe termine à la mer Ionienne.
De ce point de vue on diningue les Caps & les places de ces villes qui ont été renverfées par le tremblementdu 5 févrieri 8 De ce nombre fontcellesde BagneraF, de SemineraG, de PaïmiH,de RofarnoI, Misera L, le Cap VaticanoM Tropea N, le Cap Zambrone 0, &.c.
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Toro~Dttzzarella. N ~f
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Fo/Tn~tM~ ~M Canal de Me~rï~.
J'ai obfervédecelieulesmontagnesdelaCalabre je lesai obfervçes bienmieux& de plusprès
en traverfantla mer; & en longeantle canaï, j'ai obfervéavecle mêmefoinles côtes de la Si-
ciïe. Hm'a paru qu'il n'y avoitni de l'un, ni de l'autre coté aucune productionvolcanique.Les portionsderochesquiformentle promontoiredeScyïïa&lesmontagnesdefesenvironsfont,en
grandepartie, de quartz, M&nc&coïoré.Vis-à-visd'elles,cellesdu Cap Peïoreleur font fe mbIa-
Nés, ou n'en diluèrentqu'autantque ces rochesdînèrententr'eïïes.Ce qui n'eâ pas ou quartz,
ou calcairedansces montagnes n'eAfouventqu'un fable mouvant, dontles lits destorrensfe
rempliffentaprèsles grandesalluvionsqui laventl'immenfeiuperncicde ces grandesmontagnesde
ï'un & de l'autrecôté du canal.
Le temps ne coûterien à la nature elle l'a prodiguépourféparer la Siciledu continent.Onne peut s'empêcher de croire, quandon regardele grandgolphequi s'étend au midi de ce ca-
nal, &.qui en faitl'embouchure,que ce golphene fe foit creuféfon proprelit entrel'haïie & la
Sicile, &.qu'il n'aitforméce canal. On fent, en contemplantces montagnes que les eauxdes
deux mers ont facilemententraînéles terres&.les fablesmouvans.
Ce travaildesflotsétoit encorefecondé par les pluies,qui creufoientdes ravins profondsdans
les flancsde ces montagnes,& qui s'amanantdansles anglesdes rochers &. emportantles fa-
bles qui fe trouvoiententreux, ou qui en fupportoientle poids,finiffoient par les entraînereux-
mêmesdansl'abymeque lesondescreufoientà leurs pieds.C'eftainfiaujourd'huique les torrens
détachentla montagneP, qui formel'extrémitéde la pointedela Calabre & lorfquelesflotsdes
deuxmersagitéespar desventsalternativementoppofés agiffanten fens contraire,attaquoientà-la-foist'ifthmeétroitqui uniffoitla Calabreà la Sicile la violencedes eaux auraété facilement
vict:oiieu{edes obftaclesque lui offroitun terrainde fablemouvantde troislieuesd'étendue &
auffitôtqu'ilfeferafaitlamoindrecommunicationentrelesdeux mers, ellesaurontacquisunedouble
force pour entraînerle reftede cesrivagesqui leur réMoientencore.
PLANCHE SOIXANTE-QUATORZE.
JP/~ du Canal de Meffinedansfa forme ~~) t!g. i. Culture des
co~M~/M bivalves appelées Carnes c/z~/ï~,
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granité,
la le canala douzemillesde large, en comptantde cettevilleà Regio & de là, en allant plusau midi, à l'extrémitéde la Calabre,il a quinzemilles.
Charybde
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distancesautant égalesqu'ils le peuvent; ces coquillestombentà plat furle fable ellesy relentdeuxà troisminutes
j'aivu &
j'ai
admiréavecbiendu plaifir
& biende la furprife
le travail
qu'ellesfont alors elles quittentcette po~ure qui femblefi naturelleà leur forme, ellesfe re-
lèvent, & fe mettentfur leur bifeau, ellesfe tiennentdroites,fe remuent,& s'enfoncentd'elles-mêmesdansle fable,fi vite qu'endeuxminutesellesdiiparoinentdes yeux, & quele fable paroîtauffiinhabitéqu'auparavant.Cette opérationfe fait à l'aided'une petite queue & de deux an-
tennes,dontellesouvrentle fable.Ce procédéefttout-à-faitcurieux.Les pêcheursnefément pas tout leur terrainà-Ia-fbis ils commencentà pêcher dansle lacau
moisde mars; & à mefurequ'ilsprennentde ces coquilles,ilsles fémentdansl'endroitqu'ilsont
préparé.Cette pêche& cet enfemencementduredepuismars~ufqu'enaoût.Lescoquillesaugmen-tent de groffeur & de qualité les pêcheurslesrecueillentdansle mêmeordrequ'ilslesont femées&ilslesvendentà
Meume.Au nord de ce lac il y ena un autre plus petit tous deux font formés par l'infiltrationdes
eaux de la mer, qui s'innnueau traversdesfables.Leursrivagesfontd'un aipeQ:charmant,&d'unefertilitéadmirable.Le récit n'en feroit pas croyable nuHe part je n'ai vu d'auffibellesvi-
gnes, quoiqu'ellesviennentau milieudes fables.Tout y eft plusbeauqu'ailleurs.Je n'aivu nulle
part des épis plus gros, plus fournisde grains. Nuls bordsne font plus abondansen cette herbe
qu'onappelleCrifie-marine.
PLANCHE SOIXANTE-QUINZIEME.
Bas-relief qui Je voit dans ~~0~~ Saint Jacques.
Ce bas-relief décoroit un farcophagede marbre. 11repréfentoit, félon l'usage des Anciens, des
figures emMématiquesqui faifoientallufionaux principaux évenemens, ou a quelquescirconfiances
remarquables de la vie de celui dont le corps étoit contenu dans ce monumenr.
Ce bas-relief eft beau, & devenu précieuxaux yeux des connoiueurs on l'a dépofé dans la
petite Eglife de S. Jacques, près d'une porte latérale cette Eglife n'e~ pas éloignée de la Cathé-
drale on Fa mis dans ce lieu aUn que n'appartenant a perfonneen propre & fe trouvant àl'abri des révolutionsqui arriventaux particuliers il devînt en quelque forte une propriété publique,& qu'il fût en tout temps fous les yeux des amateurs.
On ne connoît ni fon origine, ni la moindre chofe de ce qui concernela vie du mort en l'hon-
neur duquel il a été érigé les figures qui le composentfont trop myRërieuies, & il y a trop d'opi-nions opposéesfur ce qu'ellesrepréfentent, pour que nous nous expofionsici à en dire quelquechofe,& à vouloir avoir un avis. Nous nous fommes contentés de le représentercopié très-exactement
chacun de nos lecteurs pourra t'examiner, & effayer de deviner cette énigme.
PLANCHE SOIXANTE- SEIZIEME.
Sarcophage orné de Bas-reliefs.
Ce farcophagefert aujourd'hui a recevoirl'eau d'une fontaine placéeà côte de la porte du théâtre derOpera, au lieuappelle P~Modella ~M~~o~. Cet ufagefi dIHërentde celuiauquel il étoit confacré
originairement ra feul préfervé'de la deihu8ion tans fon utilité, il eût été caffé taille, ou fcié
comme tant d'autres che~s-d'Œuvrequ'on a employés à din~rcnsouvrages.
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DE SICILE, DE MALTE, ET DE LIPARt. 7On ignoret'hi&oirede celui-ci,&le nom de la perfonneà qui on ï'avoitdeffiné.Il repréfente
une vendange elle eft affezconformea la manièredont on recueille& dont on ~buïcaujour-d'huile raifin.On y voit d'un côte& de l'autredeshommesmontantà des échelles pour atteindre
les grappes pendantesau hautdela treille d'autreshommesapportentde grandescorbeilles pleinesde raifins pour les versetdansla cuve, où de jeunes hommesnuds s'occupentà lesfouler.
Queveulentdireces groffestêtesde lion qu'onvoit de chaquecôté de ce farcophage? 11y a
beaucoupd'exemplesde ces fortesd'omemensdont nous ne connoiffons pas l'allégorie.Autour de ce farcophage,qui reçoitleseauxquifortentdedeuxmafcaronsmodernes, j'aiplacé
des femmeshâhiHeesà la manièredu peuplede Mefime elles caufenten attendantFin~nt de
puifer de l'eau.
O~n~Ko~ fur les ~K~M~Dans les intervallesde Icinr que me Iaitioientmes occupations, je fus conduit par mon ami Dom
Andrea Gallo dans les palais où la renommée annonçoit des objets curieux, foiten peinture, ïbit
en fculpture, foit fur-tout en antiquités.J'ai vu dans les Eglifes ainfi que dans les palais, de fort bons tableaux. Ils m'ont faitconnoître
que Meffine avoit eu des temps où les arts y avoient été cultivés avec foin &. avec goût. Hsy font
négligesaujourd'hui, quoiqu'il y ait du luxe.
Je n'y ai trouvé quepeu de morceaux antiques, encore pour la plupartn'étoient-ils que des mi-
sérables copies ou de mauvais originaux, dont la connoitiance n'ajouteroit rien ni à nos plaifirs,ni à la gloiredes auteursqui les ont produits, ni même a celledu
propriétaire qui
les recueuïeroit.
PLANCHE SOIXANTE DiX SEPTIEME.
La Bara ,~
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les
militaire. Le Clergé en habit fbmptucux marchoit en proceulon, portant des Croix, des Chanes,
des Bannières. Comme ï'ufage des femmes dans ce necïe étoit d'aller à cheval à la manière des
hommes on avoit placé -une Hatue de la Vierge fur un cheval gris de la plus belle efpèceconnue alors. Cette ftatue de carton étoit coiffée, parée, habillée magnifiquement, telle qu'il con-
venoic, difoit-on à une auiïi grande Dame de l'être, au moment ou elle faifoit fon entrée en
Paradis. Le Comte monté fur fon chameau, marchoit derrière eue fes Généraux, fes Officiers,fes foldats le fuivoient, pleins de la double ivreffe de la guerre & de la piété, & mêbient aux
cantiques chantés par les Pjétres, les fons écïatans des inftrumens militaires; tandis qu'au milieu
d'eux leurs captifs tramés en triomphe & couverts de honte, mêloientleurs géminemens aux cris
de joie & aux chants des vainqueurs.Je ne fais fi le Comte Roger reparut tous les ans à cette proceffion mais le Clergé en fit
une Fête annuelle. Tous I
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c
les bras croifés fur la poitrine elle regarde au ciel, & Jéfus-Chrut, quila tient ainfifur fa main,
l'élevé en lait, &.eft f~ppo~ela préfenter à Dieu fon père.
Des branches de fer obliquement difpofées & cachées, tiennent toutes ces figures folidement
attachées de forte que la Vierge même, dans cette fituation élevée & ifoléc, ne court aucun
danger mais le tournoyement qu'éprouventles enfans les IndUpo~en cruellement que les uns
s'endorment, que les autres vomiffent, & que plufieurs font pire encore; ce qui n'empêche pas
le peupled'être édifie, &.les pères &. mères d'offrir leurs enfans pour ce genre de fupp.Uce.C'eil
dans cet appareil qu'on fe rend à la Cathédrale, où on pofe la Vierge fur le maure-autel, d'où
elle donne fa bénédictionau peuple.Cette machine n'eft point pofée fur des roues mais fur des efpèces
de patins de fer tres-
larges qui gliffent fur le pavé & elle eft traînée par une multitude conudéraMe d'hommes
robufles. La foule du petit peuple la fuit en jetant en l'air leurs mouchoirs, leurs chapeaux leurs
bonnets, & en criant ~zv~f la Madonna &M~~Les habitans de Meffine fe font mis fous la protection de la Vierge depuis retablinement
du Chrunam~ne dans cette ville; c'eft elle qu'ifs implorent dans toutes leurs calamités & cette
ville en a éprouvé plufieurs fois d'affez grandes pour qu'on foit trop convaincu qu'elle n'a
pas toujours exaucéleurs vceux.Ils nelui en ont pas moinsété toujours très-dévoués ils cétebrent
fa fête avecune dévotionqui les enivre de joie. Ils s'y préparent d'avanceavec non moinsde zHe &
non moins d'apprêts, que les habitans de Palerme ne fe difpofent à celle de Sainte Rofalie. Les
décorations, la mufique, les parfums on y prodigue de quoi enchanter tous les fens.
On dëcore les rues par où la proceffiondoit paffer de pyramidesforméesde planches& de toiles
peintes& dorées, repréfentant des fontaines,des obélisques, des-colonnes, des arcs de triomphes.On voit des piéde&auxuirmontés de groupes de buRes d'écunbns d'emblèmes hifloriques
quelquefoison y fait des figurescoloffales.Les guirlandes de fleurs n'y manquent pas. Toutes ces
décorationsfont nobles, & font voir le penchant que ce peuple auroit pour les beaux arts, s'il
étoit encouragé à s'y livrer.
Les rues font tapinëes aux balcons des palais on faîne pendre des étoHes galonnées, & de
placeen placede grandes bannièresfont fufpendues en l'air tout au travers de la rue. Ces bannières
font tres-ornées on les retire au moment où la proceffion eft prcie à paffer car elles ne permet-troient pas à la Bara de pourfuivrefon chemin.
Le foir toutes les pyramides&. toutes les décorationsfont illuminées par une multitude innom- brable de lampions, qui éclairent les rues d'une manièretres-écïatante & très-agréable. Les Grands& res Dames s'y promenent à pied au milieu du peuple mais ils font précédésde coureurs tres-
riahement, tres-Mement vêtus, & portant des flambeaux. Les groupes différens qu'ils formentdans la foule, varient le fpec~acle& en augmentent la beauté.
Ces promenadesnocturnes ont un charme déMcicux,fur-tout dans un pays' où la températurede l'air eft ancz conflammentégale pour que l'on ne craigne point qu'elle foit troublée par des orages.
Cette fête dure pendant plufieursjours tous les ibirs on tire des feux d'artifices qui font an-noncés par des décharges~de bo!tcs & de canons.
Les boutiques qui font dans la rue des Marchands (ont décorées extérieurement & intérieure-ment. Le dehors peint, doré argenté, repréfenie de l'architecture: le dedansorné avec de richesétoffes, dont quelques-unes font attachéesen forme de rideaux relevés, faifant de beaux pïis.eAencore décoië de
glands, de
franges de
crépines, de
gazesde
couleur, de gaze d'or & d'argent. Lemilieude l'intérieur dela boutique eft marqué par un baldaquin, ou par une coupole foutenue par des colonnes d'une matièrefi brillante, qu'elleséMouin'entles yeux. Au deffousrepofeune Vierge,
TOME II.
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to VOYAGE PITTORESQUEun Saint, ou une Sainte c'eft celui ou celle pour qui le maître de la maifona le plusde dé-
votion.Des glaces, des girandoles, des Iuftres, diAribuésavec goût, augmentent encore l'éclat de la
boutique des fiâmes, des tableaux des vafes de pierres précieufes ou de métal, achèventd'em-
bellir la décoration &Llui donnent un caractère qui fait grand plaifir. Chacune de ces boutiquesa
l'air d'un ianduaire, ou aumoins de l'intérieur d'un palais elles font toutesd'un genretres-oppoie. II
y en a de très-magnifiquespar leur ncheue &. d'autres très-remarquablespar leur implicite mais
dans toutes il règne une propreté qui ajoute encoreà leur beauté.
A la place qu'on appelle des Ames du Purgatoire j'ai vu une petite cocagne (? neuf a dix
pieds de haut on y faifoit monter un polichinelleavec toute la balourdife la poitronerie &. la
bonne volonté d'un tel perfonnage. II y monte dix Ibis, & il en retombe auffi fouvent, avec un
jeu toujours grotefque
&
toujours naïf,
qui
amufe
beaucoup
les
fpeaateurs.
!I tente de mettre
le feu à de l'artifice & lorfqu'ily parvient, la petite bougie qu'il tient faitune explofionqui l'effraye
& qui le fait tomber, ce qui redouble encore les éclats de rire.
La Cathédrale e~ exceffivementilluminée par des lufires fufpendus à égale difiance les uns
au denus des autres, ainfi que ceux de la grande Eglife de Palerme à la fête de Sainte Rofalie.
L'intérieur de l'Eglife eft tapiffé d'étones cramoifiesgalonnées. Sur le maître-hôteleft un baldaquinimmenfe qui s'attache au fommet des voûtes. Les rideauxde ce baldaquin paroilïent faits d'étoffe
magnifique ils font ornés de franges, relevés avec des glands, & forment de très-beaux plis. On
ne néglige rien pour rendre ce lieu digne d'attention & d'admiration. Le concours de monde qu'ilattire eA prodigieux. C'eH un ipectacle fuperbe.
<
PLANCHE SOIXANTE-DIX-HUITIEME.
Figure de la jeune fille qui avoit ~MA'é l'ame de la Vierge mère
préflntée à Dieu le père par 7~C~r~ /byï fils dans la Procelion
de la Bara fig. I. r/t du Port de M~/ïC, 6g. 2.
Le lendemain de cette proce~ïion& les jours fuivans, la jeune fille qui a représentéla Viergeavec tant de pompe au haut de cette énorme machine va mendier par Mutes les maifonsde
Meffine elle y va vêtue encore de fon habillement de Vierge & l'auréole fur la tête. EIIevint dans mon auberge & entra dans ma chambre elle étoit accompagnée de fon père. EMe~fit
fans parler une fimple inclination de tête, & fe mit à chanter férieufementune efpècede cantique
que voici en ficilien & en françois.
Millegraziet'Indo Eterno Padre,
Che del' Ancillatua ti ncordaSe
A tia crucifigliochia la madre,
La tua cictafedelecufta racommandafte
Mi fia l'avocatada tua Me(Hnati fia racommandata.
Je te rends grâces, ô Père Eternel de
ce que tu as daignéte fouvenirde ta fervante,
pour larendremèrede ton filscrucifié.Ta cité
fidelleferecommandeà moi eUeveut queje
1 fois l'avocatede ta Me~Uneauprèsde toi.
Apres avoir chanté elle fit trois fois le figne de la croix en l'air avec deux doigts, précifé-
ment comme un Evêque qui donne la bencdi~ion.
Trouvant l'accoutrement de cette jeune 6He affez fingulier pour dédier d'en orner mon re-
cueil, je pris le parti de lui faire acheter d'une petite complaifance l'aumône qu'elle dédroit,
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& de fesélévations des difiances diverfes, donnent lieu avec d'autres roches encore aux cou-
rans de la mer, firedoutablesdans ce détroit.
Sion confidèreCharybdefeulementcommeun gouffre,c'eftun ~euoùl'eau tournoyé,&quidevientle
centrededinérensmouvemensqui feremarquentau pointE il s'appelleà Meffinele Garoffalo.Je regardele premier nom commeceluide la caufe & le fecond commecelui del'effet: fouvent on les confond.
En face de rentrée de ce port eff le palais du Viceroi F le mole ou quai s'étend jusqu'enG la partie de la villecontenue dans cet efpaceeft embellie par une longue fuite de palais, qui font
tous à-peu-presde la mêmearchite~ure ce~ ce qu'on appellela Palazzata, ou ~e Théâtre maritime.
Cette fuite de palais contigus, eft interrompue au rez-de-chauiïée par dix-neufarcs, qui fervent de
portes pour entrer dansla ville falongueur eAde 84.0toifes. Elle a été élevée en 1662, par Philibert
Emmanuel, Princede Savoie&.Vice-Roi de Sicile. Ce quai eftencore décoré de plufieursfontaines,ornéesde figures de marbre.La plus remarquable de ces fontaineseftcelle de Neptune H. Le Dieu y
c~ représentéle tridentà la main, réprimantla fureurd
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CHAPITRE QUATORZIEME.
F~~e/~ deM~ ~~p~c~p~ P~ce~de JE~c~
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VOYAGE PITTORESQUEi4faite cettebelle fuitede palais,qu'onappeloitla Palazzata & qui formoitun demi-cercleautour
de ton port a été renverfée,& n'eff pas une de ces beautésque l'on puifferéparer.Au pied dela fortereffedn Saïvator,n°. 3, prèsde l'entréedu port cRle fameuxgouffrede Charybde,~ont
la caufeeft inconnue &Lqui, peut-être n'a eu aucune part aux tremblemensqui-ontrenverfé
,plufieursfoiscette ville. On peut obferverdans cette eAampequ'elleeft entouréede montagnes,
&plus ~'untiers de la ville e&bâtifur deshauteurs.
Le fort de Meffinea été d'éprouver dansle coursde plufieursfièclesdesrévolutionsde toute
efpèce, &.de reflernxe au mêmelieuou ellea été Mtle originairement,tandisquela plupartdes
villesfe font un peu écartéesde rendroitoù leur fondateuren avoit poféles premières pierresou élevéles premièrescabanes.La ntuationde Menmea descharmes& des avantagesqui n'ont
pas permisqu'aprèslesravagesdelaguerre,&.ceuxdestremblemensde terre, feshabitanséchappésà ces
déiaAres,fongeanentà
quitter leurnte
primitifpour en chercherun autre.
Elle eA très-ancienne,ellea changédenom & de Souverains plufieursfois elles'eAappeHéetour-à-tour Zancle Mamertine,Meffena fbuventrenverfée par des tremblemensde terre, ellea dû être rebâtiede diverfesmanières.
Elle eAtoute pavéeavec de la lave, taillée par grandsmorceauxde deux piedsen quarréces morceauxfont partoutIrréguliers.La proximitédesvolcansdontcetteville eAenvironnéeau
nord&.au midiont fait préférer cette pierre.Elle en fortdure, & eUeréûfb au moinsautantau
Sottementque le grèsdont on faitufagedansla plupartdes villesde France.
PLANCHE QUATRE-VINGTIEME.
Place de la Cathédrale.
Cette placen'etoit pas régulière cependantelle formoitun eoup-d'œiïagréable.Elle n'etoic
pasla plus grande de Mciune, maiseHeétoit la plus belle la plusdécorée& la plus fré-
quentée.La figureequeUreA, que le tremblementde terre a épargné, e&en bronze & repréfente
CharlesII Roi d'Efpagne.Son piedeAa!eAde marbre elle eft au milieude la place en face
du palaisdes Etudes.
Vis-à-visde cette Aatueeft une très-bellefontainede marbre ornéede beaucoupde figures
~['honMïies&.d'animaux qui tontes jettoientde reau en grandeabondance,ce qui répandoiten été une fraîcheurdélicieufedans cette place, où beaucoupde monde aimoita fe raffembler.
Septrues y aboutiffoient.La Cathédraleen fait partie on ne la voit pointdanscette e&e,
parceque le ipeSateur e&fuppoféplacé devantelle.
De la Cathédrale.
En confidérantle vaiffeaude cette Eglifeà l'extérieur ou dansl'intérieur,3 n'offroitrien quiintéreffât ficen'eu:lemaîtreAutel ouvragede mofaïque,d'untravailtrès-riche,& bienexécutéen
jafpe, en
agathe en
ïapis, en marbres
finguliers,en
pâtesde verresde couleurs
différentes,dontles applicationsheureufesfontde fort bons effetsdanscette moiatque par leur variété.Mais
toutesces beautésne font qu'undiamantdansles cheveuxd'une femmelaide ELmai habillée.Elles font au centrede cetteEgIife,fansêtred'accordavecle rcAcde Fedutee.
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A.M~. 1~'VUEF,I)KME~~JNE. c.~
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DE SICILE, DE MALTE ET DE LIPARI. 15La vouuuredu chœure&ornée de grandesfiguresde mosaïqueen or & en couleur, fem-
blablesà cellesque j'ai décritesen parlantdes Cathédralesde Palenne & de CheMu, où desfigurescoïonafesrepréfententDieule père avecfesAnges.On trouvedanscellede Menmedes
figuresde Saintsfaitesdansle même goût, & placéesfur les chapelleslatéralesqui bordent'le
chœur..C'étoitla modedu onzièmetiède.
Du reKe, des poutreshideufestraverfentla nef de cette Egïife, &entre cHeson apperçoitles
chevrons& les tuilesdu toît. Cette nef eft formée-par descolonnesqui portentdes arcs & ces
colonnesfontfaitesavecles débrisdes temples payens échappésauxravagesquifirent perdreà cette
villele nom de Zancle ces morceauxmal anbrtis, & de groneurinégale fontun alfemblage
choquant,qu'unhommede goûtne fauroitapporter. Maisdansle tempsoù l'onélevacetédifice,on faifoitdes dépenfesénormesen moiaÏques,parce que cette espècede peintureparle aux yeuxdes
ignorans,&.
qu'onne &ntoit
pas le méritede la
régularitédansl'Architecture.
CetteCathédraleeAconfacréeà la Vierge commecelledeParis maisellea un titrede plus pour l'être.LesSiciliensfont perfuadésqueS.Paulvintlui-mêmeenSicile il y fit, difent-ils,deuxfermons
qui eurentun prodigieuxeffet.L'un traitoitde la Paffionde Jéfus-ChriA l'autrede la Virginitéde la Viergemère. Les Siciliens,& entr'autresles habitansde Meume, furentfi touchésde cedernierfermon&.de la grandeur du miracle,qu'ilsfe rangèrentincontinentfousta proteffiondelamèrede Dieu. C'eAce que nousapprendle bavantM. de Burigni,dans fon Difcoursfur réta-
bMementdela ReligionChrétienneen Sicile,tome1, page334. LaViergevivoitencore,ilsluien-
voyèrentdesdéputés elle daignaleur répondre par écrit &fa lettrea été confervée jufqu'ànos
jours dans le tabernaclede cette Cathédrale,où ellea été respectueusementdépofée& foigneu-fementgardée. Nous croyonsqu'elle n'a pas été perdue dans le dernier tremblementde terre,
puiiqu'eHea échappéà tous lesautres. La voicimot à mot, telle que M. de Burignil'a traduite& l'a tranfcritedansfon ouvrage.
La Vierge Marie, fillede Joachim, ties-humMeMère de Dieu Jéius Chri~ crucifié, dela tribu de Juda, de la race de David, falut & bénédictionde Dieu le Père tout-puMant à
tous les Meiïmiens.H en certainque par une grande foi vous nous avez envoyédes députésen conséquence
d'unedélibération publique & punquevousavouezquenotre FilseADieu&.hommeen mêmetemps, qu'il eA montéau ciel aprèsfa réfurrecHon,ce quevousavezapprispar la prédication
» deS. Paul Ap6tre, nousvous bénmbnsvouscevotreville, & nousvoulonsêtre toujoursvotre prote~rice.L'an 42 de notre Fils, mdicnon ï, le 3 juin, le 27 de la lune, à Jérusalem.«La
Viergeécrivitcette
lettre en hébreu; S.Paul la traduinten grec, c'étoitla languenaturelledes Siciliens.M. de Burigniobferveque S. Paul ne vint en Sicileque l'an 60, &. nonl'an 42 de Jé~us-
ChriK qu'onne compta par Indiaionque plufieursnecïesaprèsl'Alfomptionde la Vierge;& qu'onne data par lanailiancedeJéfus-Chrift que beaucoupplustard encore.Ces erreursfonttufoecter la véritéde la lettre. Mais les habitansde Meffine perfuadésqu'elle véritaHe ne penfent point que la Viergeait été obligéede fe conformer à la manièrede dater des Romains;ils pen-fent bien plutôtque les Romainsont adoptel'ufagede dater, introduit par la Vierge dans cettelettre c'eu ainn qu'i!sfe croyenttoujours protégés par la Vierge, quoiquede tempsen tempsleur villefoit renverfée par des tremblemensde terre. Il ne faut pas oublier que le JéfuiteMel-chior Inchofer a écritun volumein-folio pour prouver que cette lettrea véritablementété écrite par ia Vierge.
On célèbretoushs ans cet événement par ~e Fête foIemncHe,qu'on appellela Fêtede laOn porte en proccuiondansun oHembir de criM unebouclede cheveux, préfentdont
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fontaine
la Vierge accompagnafa lettre. Elle fit auffi préfent à ces députés de fon portrait I! e~ placéau denus du tabernacle. J'ai vu ce portrait & ces cheveux. Les feuls Chanoines de la Cathédrale
ont le droit de toucher & de porter fur leurs épaules la châffe ornée d'argent, dans laquelle on
pofe FoRenfoir qui contient les cheveux de la Vierge. Huit de ces Chanoines, la mitre fur le
front, portent cette châiïe le dais qm s'élève au deOu: eft porté par fix Sénateurs en robe.
~pres les cérémonieseccïéuaiuques on faifbit fur le port, devant cette fuite de palais fuperbes
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foienttousentièrementanéantis,mais parceque je dis ce qu'ilsétoientquand je lesai vus, & que
T'ignoreceuxquife font confervéstout entiers; que ceuxmêmequi ont le moinsfouffert ont
éprouvéquelquesaltérations,&.qu'ilsen éprouverontencorequandils redeviendront partie de lacouveUeviffequ'onrebâtira.
PLANCHE QUATRE-VINGT-CINQUIEME.
Quartier des ~~
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A~ V!.VUE1P,DEEMESSINE. D.r~B~
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Pêche du ~o~o~ Epée.
J'ai fait pïuueurs voyages à Meume, j'y vins une fois pendant.les mois de juin & de juillet,
temps où fe fait la pêche du poiffonEpée efpèce fingulière que
la nature a véritablement armée
d'une lame tranchante des deux côtes, & plus redoutable que celle dont nous nous fervons.
Les pêcheurs fe difpofbicnta partir. S'il eût été difficileà tout voyageur un peu curieux de ré-
Mer au defir devoir un tel fpedacïe, on peut préfumer qu'un peintre s'y abandonna avec tranfport.
Je m'embarquaipromptement pour me rendre auprès de la tour du Fare, où fe paffent ordinaire-
ment les plus belles fcenes de cette pêche.Le rivage du canal m'onroit dans cette navigation
les points de vue les plus agréables & les
plus variés. Les maifons de campagne, les monaOeres, les villages fe groupoient de la manière la
plus pittorefque avec les arbres, où fouvent fe mêloient les belles plantes d'aloès, dont les tiges
droites, de 25 à 3 o pieds de haut, terminées en pyramide par la difpofition de leurs branches,
préfentent un caractère, dont la différencefenfible avec les autres arbres, étoit d'une vërité qui met-
toit du piquant dans ces afpccts, & faifoit de belles oppofitions avec les maffes verdoyantes des
montagnes & les mânes arides de la roche nue, qui de loin fe confondoit avec les édifices. Les
vallons
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Mes
mourant jusqu'àce querevenantfur l'eau, fansforce & mêmefansvie il puuïeêtre enlevé
& embarqué elle le porte au grand bateau, & pendantcettecérémonie,la premièrechaloupeeCdéja occupéeà lancerle harponcontrequelqu'autrepoiffon.
Cette pêchenefe~attqu'encet endroitdu Fare, aux environsdes cotesde Scyua& de Ba-
gnara.Le poiffondu FareeAle plus~me. Elle n'eA pas anezconHderaMe pour être un o~etde commerce.On confomme prefquetous ceux qu'onpèchedans le pays le re~eeftfalé&
envoyéen préfentà Naples.Heft beaucoupplusemmequele thon je croisqu'ilferoitdifficiled'en
ttouver a acheter.Je ne.crois pas qu'on.faneaucunufagede fon épée,
Voyagede Scylla.
Le beau temps, 'la tranquiuitédela mer me déterminèrenta traverfer le détroit, & à fairete
voyagedesrivesde la tour du Fare à cellesde ScyHa,fur lescôtesde la Calabre.Je me rendisd'abordau châteaudu du Prince il eAbâtifur le rocher qui formele promontoiredecenom.Je
n'y trouvaique le concierge.H me reçut très-honnêtement,& me fit voirl'intérieur du château.
PiuHeursMes étoientrempliesde taMeaux.Ce qui me parut fingulier &. cfpctiJantHcn Imaginé,c'ett
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DE SICILE, DE MALTE, ET DE LIPARI. 21
F
Mes mariniersvinrent fur les trois heures du matin m'avertir que la mer étoit calme &.le temps
ferein. En effet il n'y avoit pas le plus petit nuage au ciel. J'embraffai mon cher
hôte, &
jeme rembarquai bientôt noue fûmes loin du rivage.
La mer étoit d'une tranquitiité perfide. A
peine avions-nousfait une demi-lieue, que les vents s'élèvent, & que les eaux roulent avec fu-
ieur. Notre chétive barque devint le jouet des vagues. Portes alternativement fur la cime ou dans
le fond des abymes noirs & liquides, que la profondeur des flots creufoit en élevant la fommité
des vagues, qui fe terminoient en un déluge d'écume blanche, fous laquelle il fembloit que nous
allions être engloutis; puis entraînés tout-à-coup hors de ces vallées mobiles, nous nous trouvions
furlefommetdiaphaned'une monugne vacillante dont nous appercevionspour un moment la terre,
que nous regrettions & plus loin encorecelle que nous décrions. Entre nous &. ces rivages
Souhaités,nous appercevions trois à quatre bandes noires qui fillonnoient la mer, c'étoient les
redoutablescourans qu'il falloittraverfer pour arriver en Sicile. A peine ces objets effrayansétoient-
ils entrevus, que nous étions précipités de nouveau entre les vagues, dont les fommités poufféesen fens contraire, venoient quelquefoisà fe courber, & à s'unir près de nous, où elles formoient
des berceaux tranfparens couronnés d'une crête d'écume. Nous euffions été engloutis fousleur
poids, fi elles eurent éclaté fur nos têtes, au lieude fe replier fur elles-mêmes & de fe reculer en
nous couvrant d'un nuage de poumere humide, que les vents difperfoient autour de nous, dont
nous énotis tout n-empM dnn
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doit fonexigenceaux pâmesles plusfubtilesde ce bitumequi formeles poudings,dontnous
avons parlé
ci-de~us que
ce bitumeen s'étendantfur la furfacedes eauxs'atténue,te combine,
fe voIatHife,& s évaporeavecles gïoMes aqueuxque l'air enlève dans l'atmosphère & que
donnantà la vapeur condenféeun peu plus de corps fes facesMes formentune espècede
criftalaérien, qui reçoitla lumière, qui la réHéchità rœll, & qui lui apportetous les points
lumineuxqui colorentles objets -& qui les rendentfendbles la vue.
.E/c~y~.
Parmi les dutérens objets que je vis à Menine, & qui me frappèrent le plus, je ne dois pasémettre le tableau le plus oppofé à nos moeurs c'étoit une cargaifon defclaves. Ce vaineau bar-
Larefque, qui auoicde Tunis en Morée, avoit été jette par la tempête dans les mers d'Agora enSicile, &.après la quarantaine, il s'étoit réfugié à Metfme, pour rétablir les dommagesque le vent
avoit fairs aux agrès. Je vis débarquer les efclaves il y avoit parmi eux dix-neuf femmes, dont
cinq étoient fort jeunes, &. dont trois étoient fort jolies.Leur habillement n'étoit pas propre à faire reffortirleurs charmes. La coquetterie ne Favoit
pas inventé. C'étoit une fimple cheminede laine blanche, qui les couvroit anez mal par deffus
on avoit jeté une étone de laine blanche d'une forme quarrée dont elles s'enveloppoientfans
art, de manière qu'on ne diffinguoit ni leur forme ni leur taille. Lorsqu'elless'anéyoient, les
jambes croifées ielon Fufage de tout l'Orient, elles paroiffoientn'être qu'un amas de draperies
qu'on avoit jetées~ansfoins.Une compagniede cette efpèceparoiiMt un tas de paquetsd'étone, d'où
il fortoit ça & là des têtes ou des pieds.Comme il faut toujours un peu de parure aux femmes, quelque miiëraHes qu'elles foient
elles avoient aux oreilles de grands anneaux d'argent de deux ou trois pouces de diamètre des
colliers garnis de beaucoup de rangées de perles qui lesrendoient très-amples, tomBoient en forme
de guirlandes fur leur poitrine elles portoient des bagues à tous les doigts de l'une & de fautre
main, & quelquefoiscinq ou fix au même doigt gronesou fines, la qualité du métal n'y fait rien.
Pour bracelets elles portoient un cercle de la largeur du doigt, un peu plus ou un peu moins
orné. Ce cercle n'e~ ni fermé ni fbudé. On l'ouvre àvec force pour y paffer la main fon élas-
ticité fuffit pour le renerrer quand il eAau bras. t, le
Quelques-unes de ces efclavesavoient des espècesde bonnets qui leur enveloppoient la tête.
Cette vue humiliante pour l'humanité m'affligea beaucoup. Comment l'homme non content d'a-
voir fournis toutes les autres efpeces, & de les avoir fait fervir a fes befoinsainfi qu'a fes caprices,a-t-IÏ pu atiujettirjufqu'à fon iemblaHe? Mais l'examen de cette question, qui aboutiroità montrer
la férocité des uns & la baueue des autres, feroit encore plus humiliant pour l'humanité, que le
tableau qui m'arSIgeoit, & où pourtant je trouvois des charmes par fa fingularité. Je fis plufieursfois des tentatives pour denjner ce bizarre ancmblage elles ne le voulurent jamaispermettre elles
fe cachoient totalement la tête en fe ramaffant enfemble, & rendoient abiblument inintelligiblela
figure enveloppéefous ces draperies chiffonnées.
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CHAPITRE QUINZIEME.
Tremblementde terre de M~e. Ouragan prefque
auffi terrible. Bains d'Ali. Mines de Fiume di
Nifo. Arrivée a y~onnMf. *MonMMeyït~connu.
Vuegénéralede la jF~ du Théâtre de Taor-
mine.
JVLESSïNE, fondée entre les volcans de FEtna & le gouffre de Carybde, qui e~ ouvert
prefque ïbus fes murs &.d'ailleurs peu éloignéedes volcans de Lipari & de celui de Stromboli,p
qui jette perpétuellementdes flammes, a dû dans tous les temps être fujette à des tremblemens
de terre.
Mais ces événemensrares autrefoisfemblent avoir été plus rréquens dans ce fiècle que dans
aucun autre. En 160~ un tremblement renverfa le quart des villes de la Sicile Meffine ne fut
cm'ébranlée tous fes bâtimens Ibunnrent. On. en répara les défordres avec une économie très-
imprudente. Elle en
efuya un autre afrez violent en
17~2. La
pefle qui furvint en
174.3 ne
permit pas qu'on s'occupâta~ rétablir ce qui étoit renverfé. En i'y8o eHe éprouva des fecouffes
pendant plus de 6x mois & à en ~ugerpar les intervalles qui s'étoient écoulés entre les trem-
blemens antécédens elle ne devoit pas s'attendre à en fouffrir un nouveau fi promptement.Ces accidens font fi terribles & fi imprévus, qu'on doit rappeler tout ce qui les a précédés,
pour (avoir s'il n'y a pas dans les élémens quelques ngnes avant-coureurs de ces convuMons de
la terre, qui puliïcnt avertir les malheureux humains du danger qui les menace.
L'automne de 1~82 avoit été froid & pluvieux le thermomètre de Farenheit étoit defcendu
fouvent a 56 degrés. L'hiver qui le fuivit avoit été fec, & le thermomètre s'étoit toujours main'
tenu au deffus de 2~. On voyoit fouvent des tempêtes fe former à Foue~, ce qui eA extraordi-
naire dans cette faifon. Les pilotes du canal avoient obfervé que les marées n'arrivoient plus a
des époquesnxes, & ils affuroient que Fagitation des eaux dans le gouffre de Carybde étoit plusforte &. plus bruyante.
Le février l'air étoit pefant &. tranquille; le ciel couvert de nuages épais, & l'atmojfphereen-nammée. A midi & demi la terre commença à trembler avec un bruit effroyable. Les fecouffes
augmentèrent fuccetuvement, & devinrent enfinfi violentes dans tous les fens, qu'elles entr'ou-vrirent & qu'cHcsrenversèrent en deux ou trois minutes un(~ partie des édinces & des maifons.
Une longue nuée blanchâtre s'éleva du nord-oueA, fuivie d'une autre tres-obfcure qui couvriten un moment tout l'horizon & qui verfa fur la ville un déluge d'eau & de grêle, accompagnéde coups de tonnerre. Le peuple fuyoit & le précipitoit fur les places, dans la campagne & dansles navires qui fe trouvoient au port.
La terre trembla prefque perpétuellement depuis midi jufqu'à cinq heures que les fecouffescommencèrenta fe ralentir.L'horreur de ces momens eA atfreufe les cris des mourans les hur-
lemens de ceux qui font a moitié enfevelisfous les Mines reffroi de ceux qui peuvent fuir; leTOME IL H
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défeipoir des pères & des époux qui ont perdu leurs enfans & leurs femmes la défblation des
mères, la crainte du préfent, les terreurs de l'avenir, font un amas de calamités telles, que, peut-être, il n'y a pas pour tout un peuple de fituation plus effroyable. La famine qui fe mêle
Subitementà tant de malheurs, &qui devient bientôt le plus redoutable, achève d'ôter toute ef-
pérance. L'inmn~: de l'homme n'eft pas d'être timide. On vit dans ces momens affreuxdes exem-
ptes du plus grand courage des mères s'arrêter dans leur fuite & retourner chercher leurs en-
fans fous les voûtes écroulantes de leurs maifons. On vit dans ces premiers momens qu'il y a au
fond du cœur un infHnQmoral qui combat contre la terreur phyfique &. qui l'emporte quelque-fois. Mais cet innant pafle, quand la Mrre eut cefféde trembler, quand ces malheureux dépouillésde tout s'imaginèrent que le fol étoit un peu raffermi il retournèrent en foule au milieu des dé-
.combres 'iecourir leurs familles chercher des alimens, ramaffer quelquesdébrisde leurs fortunes,
quelqueslambeaux déchirés
qui punent leur fervir de vêtemens, de
draps
ou de tentes. Le dé-
fejpoir des plus malheureux le changea en rage, & dans ces momens où la nature troubloit tout
l'ordre focial confondoit tous les rangs, &. raviffoit au riche tous fes biens ils osèrent lui dif-
puter les dépouillesque la terre englouilfibit, & fe livrer à la rapine, au meurtre, au brigandage~urces ruines fumantes, où des Incendies s'allumoient de place en place.
A une heure après minuit la terre trembla avec violence, &cette fecoufferenverra la plupartdes maifons que les premières avoient épargnées. La plupartde ceux qui erroient entrecesmafures
par pitié, par befoin ou par avidité, perdirent la vie dans cette nouvelle cataHrophe.La tournée qui fuivit cette nuit déiaJt~reuiene fut pas moinstrine, par le manque abfolu de toute
chofe; enfinon mit un peu d'ordredanscette confunon, &.Ie furIendemain chacun eut du moins le
plus étroitnéce~ire.
H ne fut pas queflion de retourner dans cet amas de ruines la multitudes'établitdansla plainede Por:o 6'~vo., fous le bourg de Salleo. (Voyez Planche LXXIX, le lieu qui eAfur le devant
de cette gravure, &. qui s'étend ~u~qu'auxmurs de la ville). La Nobleffe les Magiftrats & la
Bourgeoise campèrent dans une autre plaine de l'autre côté du torrent de Porta di JL~/zo~ &
les Militaires à Terre-neuve, fur l'esplanadede la citadelle.
De fortes fecouffesqui fe firent fentir encore le 7 février&.le 28 mars, achevèrentde détruire
-ce qui fubti~oit. II n'y eut guère d'épargné que les quartiers bâtis fur les glacis de l'ancien châ-
teau de Mattagrifonc, & fur les collines volmies ou étoient les Mona~eres de filles. Celui de
Sainte Claire, proche la place du Gouvernement, n'a pas beaucoup fouffert.
On affure que toute la partie baffede la ville, conftruitefur pilotis ou fur la terre mouvante, a
cédé aux premièresfecouffes
il n'en rcAe pas
le moindreve~ige
les édinces bâtis fur le rocher &
fur le penchant des montagnes qui couvrent les derrières de la ville, font prefque tous Intacts.
Dans ce déMre épouvantableles magafins de blé n'ont pas été endommagés les fours publics&
les aqueducsont été confervés. C'eft ce qui porte à croire que fans l'extrême négligence avec laquelleon avoit bâti & réparé les maifons de MeUme, il y en auroit eu beaucoup moins de renverfées.
Les villages voifins avoient peu fouffert & ont donné les premiers fecours. Les galères de
Malte en ont fourni pendant quelques jours aux malades & aux pauvres avec une générofitéqu'onne peut trop louer. EUes amenèrent des Chirurgiens, & tout ce qui étoit nécenaire pour panfer les bleffés. On a rerufe on ne fait pourquoi, les fecours que le Roi de France a envoyés. Ona tiré du tréfor municipal de Meffine tout l'argent néceuaire pour fervir le peuple car tout ce
que le Roi de Naples a envoyé, a été pris &. abforbé par la garnifon.
Le peuplelogeautour de cette ville fous des baraquesde planches, de claies, ou de branchages,couvertes de chaume plus de dix mille ouvriers, mercenairesou journaliers ont été forcésd'aller
ailleurs chercher du travail &.du pain. On affure qu'il n'a péri que huit à neuf cens perfonnes
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par le tremblement. La mer pendant cette convulfion de la nature
avoit été foiblement agitée
dans le port. Les vaiffeaux n'y ont point été brifés, quoique la mer au large ait éprouvé une
grande commotion. L'extrême élévation de fes eaux a caufé Beaucoup de dommages au Phare,
& fur la cote de Sylla & de Bagnara.
Ce même tremblement de terre du 5 février a fait de plus grands maux à toute la Calabre,
où il a renverfé plus de trois cens quarante villes, bourgs ou villages, & où il a englouti ou écrafé
plus de cinquante mille habitans.
Ce tremblement n'a point été panager comme celui de Lisbonne, & comme tant d'autres. Du
< févrierau mois d'avril, dans l'efpace de foixante& quelques jours, on a compté plus de deux cens
fecouffes(i); & depuis ce temps, le fol ne s'eA point raffermi.Les dernières lettres parlent encore
de tremblemensconsidérables.
Les Prêtres fe font baraqués, ainfi que les Magiftrats le peuple & les foldats n'ofant fairele fervicedivin dans ï'Egïite ilsont dépofédansdes cabanesleur tabernacle & leur autel. Lefervice
s'y faitavec moins de pompe mais avec un concours prodigieux; la crainte a redoublé la ferveur.
On a célébré avec le plus de fbïemnité qu'on a pu la fête de Notre-Dame de la Lettre on
a promené les cheveux de la Vierge, & l'on a illuminé le fauxbourg qui fubfifte encore. La fête
de la Bara n'a pu être célébrée avec autant d'éclat, parce que la machine qui lepréfeniolt fi
bien ï'Anbnnptiona été écrafée par la chute du magafin où elle étoit gardée. La foule n'en montra
pas moins de zèle pour fa Patrone tutélaire.
Malgré cette extrême piété, la nature n'a point perdu fes penchans &. le malheur n'a point fait
des anges de ces dévots que la main du ciel a fi cruellement chadés.
Rendus égaux par le malheur, ces infortunés occupés chacun de foi feul comme dans tous
les grands périls, font devenus plus fauvages & n'ont cherché qu'à fatisfaire leurs befoins de
préférence, fans refpe~ pour autrui. Chacun avoit un droit égal à fouiller dans ces décombres, &.a s'emparer de ce qui lui convenoit pour confiruire fa baraque, ou pour allumer le feu dont il
avoit enenticHementbefoin dans cette faifon le plus fort étoit le plus riche. Aujourd'hui! encoreils vivent confondus&. fans fbciété tous les liens fe font relâchés ceux des pères fur les enfans,ceux des maris fur les femmes. Ne pouvant ni bâtir, ni commercer, ni fubmter de leur travail,leur vie eft afÏez fembïable à celle d'un troupeau. L'exigence animale eft ce qui les occupe le
plus. Le libertinagey règne avec moins de frein que dans les plus grandes villes. Puifqu'iI n'y a
plus ni murs, pi lits, ni rideaux, il a bien faï[u revenir aux moeursdu premier âge où ton s'en
paiïbit. Dans quelque fituation que foit t'homme, la voix de la nature e& égalementpuiffante.
(1) En voici la lifte fuivantl'ordre des époques auxquelleselles (ont arrivées./MM. ~c~. yb~. ~
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PLANCHE
Les ReligieufesSortirentde leur cloître, & chercherehtun afylehors de l'enceintedeleursmurs.
Les Dames de S. Paul, de S. Grégoire de Monte Vergine, &c. fe baraquërent dans le jardin deleur Couvent les autres, confufémentavec le peuple. Elles errent librement de jour & ~[enuit
avec la foule. L'ordre naturel a pris la place de l'ordre monacal &.l'on nous mande de Meumc
que plufieurs font enceintes.
Dans t'inténeur dela ville le plus grand dommagearrive à desédinces publicseftla chûte du dome
de ï'Eglife du Purgatoire, dont il ne ieAc que les murs, encore ont-ils beaucoupfouffert la moitié
du clocher de la Cathédraîe a été abattue.
Les magafins de Porto Franco, qui fe voient à la fuite du palais du Vice-Roi, ont été auffi
tres-déngurés.Le fort du Salvator eA en partie tombé du côté du Lazaret, parce que cette partie étoit bâtie
fur pilotis
celle du coté de la mer,
fondéefur la roche,
a réuHéaux fecouffesdes tremblemens
de terre fans en être endommagée.On m'a mandé auffi, qu'il y a eu quelquesmaifons d'ébranlées au village que j'ai repréfenté,
Planche LXXÏH, au midi de ia tour du Fare. Les fecouffesfe font fait fentir à Melazzo~où beau-
coup de maifons ont été fort ébranlées les murs ont été lézardés, les planchers de plufieursmaifons font tombés on a eu recours aux étais pour être tranquille à certain point fur la con-
fervation dés autres. Les habitans campent maintenant dansles places fur les quais, & le longdes rivages de la mer.
Dans ce premier tremblement du février qui fut le plus violent de tous, on éprouvoit une
odeur de foufre qui étoit fuffocante les ~ecounesétoient telles qu'on croyoit être dans un vainean
balotté par les flots la terre ~embïoit portée fur un fluide. Ce tremMement s'eit fait fentir dans
toute la Sicile mais il s'aitbibunbiten s'éloignant du Phare. Dans les jours iuivans ïe ciel fut né- buleux les montagnes de la Sicile & les côtes de la Calabre demeurerent couvertes d'une brume
lei-nblableà de la fumée. II s'éleva des vents violens qui fouffioient par raffales avec une impé-tuofité effrayante &. dont la direction ne varioit que du nord au nord-dl
PLANCHE QUATRE-VINGT-SIXIEME.
Renverfementde la F~M.
Cetteefi:ampe
a été compoféed'après
un deffin très exac~qu'on m'aenvoyé,
&.qui repréfentegéométraïement ce qui eO re~é fur pied de cette fuite de palais appeHéela Palazzata. La partie
de la vine qui a le plus fouffert dans ce tremblement de terre, eft celle qui étoit au bord de la
mer. Une grande partie de la Palazzata a été renversée mais ce qui en rené d'efpace en efpaceeft affez con
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VOYAGE PITTORESQUE&8A la Marinade~Aquiceïïi,dansles plainesde Mafcari, la mer s'étendità environune ïieue,
& entraînaaveceue les maganns,qui alorsétoient pleinsde tous lesfruits, nés dansles can-
tons voiimsde ce côtéde l'Etna, & ranembÏésfur ce rivageoù on les embarque.Au lieu appelléil RH?q/?o Mafcari la mer s'introduinidanslesterresà la diuanced'une
demi-lieue détruifitles maifons emportaun peut village,& engloutitcent vingtpetitsBateaux
chargésde vin &.d'efprit-de-vin.Je n'ai pas befoin de dire que les felouques&.la plupartdes
vaiffeauxqui fe trouvèrentdansla ~irecHonde cette effroyabletempête,échouèrentbriféscontre
les côtes,ou périrentfubmergéspar la hauteur des vagues.A la marinede Jaci la mer emportales maifonsavecles barquesdes pêcheursquife trouvè-
rent fur cette malheureufc plage '&à Trizza, elle entraînatout le village qui conMoitdansles
habitationsd'environtrois censhabitans. A Longnina,eHefubmergeales maubns&toutesles
batqueschargéesde blé qui fe trouvèrentdansle port.
A Catanc, elle renverfatoutle môle, & n'en laiffa pas le plusléger veftige elle detruintauffi pïuneursmaifons& tous les moulinsà Me eHeruina entièrementtoute la partie de la
villeoù habitoientles pêcheurs.Ce n'étoitque des petitesmaifonsmalbâtiesau bordde la mer:
maisce qui eu plusétonnant,c'eit que les vaguesfurentaffezviolentes pour démolirune partiedu palaisdu Princede Bitcari, bâti au cteuusdesmurs de Ja vIHe une partie du couventde
S. Françoisde Paule, & qu'elles pénétrèrentjusqu'aucentrede cette ville.Ellescausèrentquel-
que dommageà la Cathédrale & s'étendirent jufqu'au palaisdu Prince de Paterno.Les bar-
ques& les naviresquiétoientdansle port y périrenttous. Deuxgros bâtimens dont l'équipage
épouvantépar la furie extraordinairede la mer cherchoitun afyledansle port de Catane pé-rirentl'un & l'autreen voulanty entrer,
Ce vent terriblequi
s'étoitlevé le 6, durale lendemain& ïe furïendemamy & 8 janvier,faifantd'effroyablesravages, dansles endroitsmêmesoù il ne portoit pas les ondesde la mer.
Ce qui me femblefur-tout remarquable,c'en:qu'onm'auureque ce vent impétueuxne s~éïevoit
pas à une grandehauteur il frifoitla mer & le rivage.Les maifonsntuéesfur lesmontagnes&fur les collinesun peu élevées,ne reçurentaucundommage ellesvoyoientles éïémensfe con-
fondre les hommes,les animaux,les végétauxpérir ensemble,& ellesétoient paifibles.
PLANCHE QUATRE-VINGT-HUITIEME.Vue de la partie méridionale du Canal de M~Er! prife de la C~-
lahre. C~ voit le rivage de la ~~c~MM~/ï~M~ C~M/ïf.
Cc/b/ïf c~ ~ay~ ~t o/tfétér~ ~ar /'oM/ï ~M 7
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Départ de M~/2~. Bains ~f.Je partisde Meume, n'ayantpour efcorte, pourguide& pour domefliquequ'un feul Bourdo-
naro. Cettemanièrede voyager étoit plusnmpïe, pluscommode& plusprompteque cellequ'onm'avoit~aitemployerjusqu'à présent.J'étoisfamHiarifëavec les habitans je connoiffoisleur lan-
gue, leursufages & l'expériencem'avoitfortraSurécontreles prétendusdangersde cesvoyagesdansl'intérieurde Fine, dangersbeaucouptropexagérés.
Seul aveccet homme je quittaiMemne je pris marouteversle midi, afin de me rendreà
Taormine. Nous fuivionsfouventle rivage, nousne le quittionsque lorsqu'ildevenolttrop fi-
nueux nousgraviffionsde petitescollinesqui raccourciffoientnotre route. Nousfuivionstoujoursle pieddes hautesmontagnes,où l'on trouve fouventdes ravines pro-
fondescreuféesde tempsimmémorial par l'écoulementdes eaux.
Aprèsdouzemillesde marchenous arrivâmesà Ali, petitpays peu éloignéde la mer, quoiquefitué dansles montagnes.Là fe trouvele lit d'un vafietorrent, quelquefoisà fec; il eft remplide galets,qu'ontrouvetrès-bienrangésdans plufieursendroits ils fontamenés par les eauxquitombentfurles cimesde cesmontagnestres-élevées,& quiaprèslesavoir abreuvées& pénétréesà
une grande profondeur,feraffemblentdanscelit, ou, aprèslesorages,ellesformentuntorrenttrès-
fort& très-rapide.Ce torrententraînedansfesflotscouvertsd'écumeles arbres, les pierres, les
rochersqu'ildétache, & tout ce que le hazardou le malheurlut faitrencontrer.
On a découvertque dansles environsd'A!iil y a un fleuve ou un torrent fouterrainquicouleauffidecesmontagnesà la mer il n'eftqu'à troisou quatre piedsde profondeur.Seseaux
fontchaudes dans quelquesendroitsellesont une chaleurdetrentedegrés ellesfontminéraleselles proviennent,dit-on des montagnesde Dinamare,de Savoïa, de Limina qui toutesren-
ferment beaucoupde mines.L'endroitou ceseauxfontle plus abondanteseft une languede terre
&.de fable voifinede la mer, où il fuffitde creuferun piedou deux pour avoirun bain.
On y a faitdes bainsquiappartiennentau propriétairede cette languede terrerOn y a conf-
truitde petitesmaifons pour recevoirles malades,ce qui formeun petithameaufur lesbordsde
la mer.Les MédecinsSiciliensanurentque ceseauxfont bonnes pour guérir les rhumatismes,les dou-
leursde fciatique les maladiescutanées les vapeurshypocondriaques& toutescesfortes de
maladiesfur lesquellesla Médecinea eu fort peu d'empire)u(qu'àce jour.C'eRdans le moisde
feptembrequ'onvient prendreces bains, quoiqueles eauxne tariffent
dansaucuntempsde Fannée.
Mines de Fiume di ~/b.
Fiumedi Nifo ou le Fleuvede Nifo, couledansun lit beaucoupplusvafte qu'il ne le faut
pour l'état ordinairede fes eaux maisaprèsles pluies il devient un torrent auffiterriblequecelui d'AIi.
A l'entréede la valléeoù il coule, on a trouvédes mines précieufesdedifférensmétaux.Ona porédesgardesà Fentïéedesgrottesqui conduifentà cesmines on a dela peineà engager ces
gardesà vousy laiffer pénétrer maisavecde la perfévéranceon y parvient.J'enaivinté plufieurs.Quandla Sicileappartenoità l'Empereur,cesminesétoientexploitées par desAllemands.Quand
la Maifond'Autrichea été forcéed'abandonner cetteMe auxEfpagnols elle a fait détruiretoutesces grottes.QuandCharlesIII a été paifibleponeneur du trône, on les a rouvertes.
On ne connoîtde minesen Sicileque dansles montagnesqui font du dutric):de Nifo, telles
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VOYAGE PITTORESQUE30queSavoca,Limina,Novarra,FondacheilaRoccalumera &c. On aouvert beaucoupde grottesdans ces montagnes.La plupart ont été détruites.Celle qu'on appellede San Car/o., ou de
Saint Charles,eHune mine d'argentdes plus riches on y trouve desfilonsconndérables.H y en a d'autresde plomb d'autresde cuivre quelques-unesde plomb'& d'argent.Toutes
contiennentde l'antimoine de l'arfenic, des marcaffites& autresdemi-métauximparfaits.On
affurequ'il y a une mined'or qui a été exploitéeautrefois;maisonn'ena ridéequepartradition.On trouvedansles minesd'argentdu lapis-lazulitrès-médiocre.
Enfin on a rencontrédansles montagnesdu cinabrenaturel;maiscommeles filonsapparensn'ont d'épaiffeur que celle de la !ame d'un couteau,on ignores'ily en a beaucoup.Ces mines
étanttrès-malexploitéesaujourd'hui,onn'enretireni la quantitéde minerai,ni toutle profitqu'ellesdonneroientfi ellesétoientremifesen des mains plus habiles& plus actives.
Aprèsavoirvifitéces mines,je continuaima route vers Taormine en paffantpar Je Cap
S. Alexis.VoyezPlancheLXXXVIII.C'eAune rochequ'il fautgravirpour la redefcendreenfuite.Toute cette route, depuisAli jufqu'àTaormine m'a offertdes beautésminéralogiques&. fansnombre.Je n'entreprendrai pointde les détailler,ce feroitun travailqui exigeroitde profondesconnoiffancesen Hiftoire Naturelle mais je doisavertirles amateursde cette fcience,& ceux
qui la profefïent,que dans cescinq a fixlieuesde cheminée longdesbordsdela mer, ils trou-verontdes objetsinfinimentIntérenans,infinimentvariés& infinimentmultipliés des objetsquine fe rencontrentque dansce lieu.
Danstous les autresendroitsde la Sicileonvoit des merveillestoutesfaites ~aon les voitfe
fairecommed'eHes-mcmeslà on voits'opérer ïa lapidincation on voit ie formerlesmarbres&les autres pierrescalcaires.On voitauffiïa végétationminérale.Sileshommesvivoient pluslong-
temps,ils
pourroiehtaiderla naturedansce travail&
diriger famarche.
Voicicommentlanatureagit foit~xtériearement,foitintérieurementdanscesgrottes, on plutôtdansces cavernes profondes.
Les rochesdéja formées~e décomposent,fe diffolvent par racide de l'air misen action par les
vents, & par lèsdifférensdegrésde chaleurde l'atmofphcrc ces différensdegrésfontagir l'air en
plus ou en moins, felonque les circonllancesfont plus ou moinsfavorables.
La naturene s'impatiente pas, ellen'e& pointpreffée.Elle n'a pointd'époquesfixesoùelledoiveavoirachevételle outelle opération.
Lesvents, les pluies&~a chaleur aginentde concertà la furfacedes corps,foit qu'ilsfetrou-vent dansune pofitionverticaleouhorizontale,oufeulementinclinée.L'enet de l'airefide dégrader les roches les pluiesen lavantleur furface entraînentdans les partiesles plus baffestout ce
qu'ellesen peuventemporter & ellesle mêlentavecce qui déjày eft amanê.Si ce font degroffes pierres,les plus petitesremplinentlesintervallesqu'eUesïainententr'elles,fans égardà ladifférencedes couleurs& des denntésqui les caraSériient d'autres pluspetitesviennentenfuite,& remplinentles moindresintervalles.Lesfables, les poufueresque les eaux entraînentachèventenfin de comblerles petitsinterllicesqui-refloientvides à la En tout cet affemblageincohé-rentformeune feulemairecompaae&contigue.Cettemanecontinuetoujoursà s'accroîtrede par-ties hétérogènesqui toujoursfe fuperpofentou s'interpofent& s'agrègentavec elle à Faidederair qui lui-mêmefe combine& fe folidineavectoutesces diverfesmatières.On le démontreenen faifantl'analyfeoula décompofiaonpar des acides.
La mer qui bat au piedde ces rochersnouveauxquife formentdansfonfeinou furfes bords
y ajoutefes propresproductions.Les végétaux,quis'emprenënttoujoursde croître partoutouilstrouventà s'attacher,concourentauffià ï'accroinementdeleur mane, & le règneanimaln'eft pasexemptde lui fournir quelquetAo~e.C'eAce qui fait rencontrer dansles pierresmêmesdesêtres
qui
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qui ont été organifés& quiy ont été introduitsavantqu'ellesfuffentuncorpsdur parexemple,
fideseaux s'introduuentdans les cavités
petitesou
grandesde la mane dont nousavons
parlé,& qu'ellesfoientchargéesde partiesmétalliquesdansun état de dinblution jointesà des partiescalcairesou argileufes & à des fels tellementdiffous qu'itsn'en troublent point la tranfpa-rence voilàles agathes les quartzs les crinaux fi ellesont entraînéquelquesinfères, rep-tilesou végétaux,on trouveraces agathes, ces quartzs ces crinauxavecdes Incrustions ani-
mâtesou végétaïes.Ce qui fe fait aujourd'huià la furfacede la terre, dansdeuxmille ans, ou
dansdix mille, feraenc!avéà des profondeursconndérabfes& ceux quidécouvrirontces mânes,
s'ilsne connoiffent pas commentla naturetravaille,s'étonnerontde trouverà de telles profon-deurs, & dansdes corpsaufficompaties,de petitsanimaux,ou desdébrisde végétaux.
Maistandisque je méditoisfur la manièredont la nature pétritlestréfbrsqu'ellerenfermefous
nos pieds, mesyeuxétoientenchantésdu charmantSpectacleque m'oirroientunefoulede lauriers-
rofes, d'aloès, de grenadiers,demûrierschargésdefleurs.Ils bordoientde longuesroutescreuféesdansdesrochesde marbres Mïans des plus richescouleurs, & qui, polis par la marchedes
voyageurs jetoientun éclat furprenant,fur-tout quandla pluie les avoitnettoyés,& en avoit
écartéïa pouuierc.Hy a de ces rochesfi fingulièrementtaillées par la nature, qu'onles prendroit pour desreAes
d'édificesconftruits par la maindes hommes.Ces routesd'un fi beau marbrefont des chemins
affreux efcarpés dangereux creufés par le hafard,Se.quiont fi peu delargeur auborddes pré-
cipices,quefiles mulesauxquellesles voyageursfe confient pourgrimper fur ces rochesn'étoient
pas habituéesau pays, Se.habilesà marcher,fileur pas n'étoit pastres-i~r,ellesfe précipiteroientdansles abymesavec leur conducteur,quine peut mieuxfaireque de s'enremettreà elles pour
fonfalut.Aprèsavoir échappéà tant de périls, nous arivâmesa Taormine.Le premier objet qui nous
frappafur le cheminqui conduitau fauxbourgde cette ville, eft un édificeruiné qui s'élèvefur
la gauche.C'eftun ouvrageRomaindignequ'ony faffeattention.II eft ntué dansune métairie,ou l'on rencontred'autresmonumensqui méritentauffiqu'onen parle.
PLANCHE QUATRE-VINGT-NEUVIEME.
J{~/?~ d'un Edifice antique qui Ti~o~f qu'une partie d'un plus grandd'un Tbw~JM voifin.
Ce vaReédificeeft d'unetrès-belleconArucHon,& il me préfentoitdes effetstropagréables&
trop pittorefques, pourque je ne le dejfïinane pas.Je rai vu plufieursfois je ï'ai obfervécurieufement&avecd'autant plusde foin, queje cher-
chois, & que je n'ai jamais pu découvrir,ni en l'examinant,ni en examinantlesruinesquil'en-
vironnent, quelleavoitétéfa deflination &.à quel ufageil avoit pu fervir ni de quel autreédificeil a fait partie.
Auprèsde ce bâtiment, dont Fobjeteft inconnu,on voit un desbeauxtombeauxqui foientà Taormine.DorviIIe,& beaucoupd'autresAuteursavant& aprèslui, enont parle pour faireconnoîtrela magnificencequeles ancienshabitansdeTaorminedéployoient jufquedansces monu-
mensfunèbres.L'intérieurde ce tombeaudevoitêtre d'une granderichene la voûteen pleinceintreeAaffez bien confervée eue a de grandscompartimensde panneauxfaitsen Hue, avecdesmouluresfcuïptecs&ajufléesavec desornemensen arabefque,où Fonyoit encoredesendroits
TOME Il.
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VOYAGE PITTORESQUE3~dores. On en trouve peu maisce peu qu'on apperçoitaujourd'hui eA la preuve démonftrativequ'il
y en avoit autrefoisen grande quantité, & que Dorviïïe ne nous a pas trompés quand il nous a
dit qu'il en avoit vu de fon temps. J'en ai vu aufïi & je fuis convaincu qu'on en verroit beaucoup
plus, n l'on fe donnoit la peine de laver & de nettoyer les endroits les mieux confervés de la
fculpture ou même de ï'architedure intérieure.
Ce tombeau étoit fi grand, qu'il ferc aujourd'hui de logement à des vigneronsqui cultivent les
collines des environs. Ils n'ont point de cheminée dans ce iëpuïcre ils font du feu dans un an-
gle la fumée en s'élevant Se.en circulant pour trouver une inue, a noirci toute la voûte, & la
dorure eft cachée par la fuie. H faudroit commencer par enlever la croûte épaiffe & noire qu'ellea formée fi ï'on vouloit voir les ornemens & les dorures qui y font encore.
Les créneaux qu'on voit dans cette eAampeau devant de ce tableau ne font point partie de ce
tombeau e'eAun rené de je ne fais quelle fortificationqu'on avoit élevée dans quelques-unes desguerres inteflines de ce pays, pour défendre ce poAc pendant un peu de temps.
A quelques centaines de pas au deffusde ce tombeau on trouve la ville de Taormine. Je m'y
logeai dans un couvent de Capucins il étoit alfezbien fitué, pour que je punc jouir des beautés
antiques qui reftent encore dans ce lieu.
PLANCHE QUATRE-VINGT-DIXIEME.
Vue g~h~ la Ville
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CHAPITRE SEIZIEME.
Du Théâtre de Taormine.
E Théâtre, fituédansla portion la plusheureufequ'onait puchoifïr,eft, de touslesédificesde ce genre qu'ont éfevésles Grecs, celuiqui s'eAle mieuxconfervé.C'cHceluiqui nous faitconnoîtreavec le plus de certitudela véritableconfiruffionde ces bâtimens.Il nousconfirmece
que la traditionnousa tranfmisdu géniedesAnciens.Ce monumentbien repréfentépeut com-
pleter les connoitfancesque nousavonsdans
cet Art.Je ne dirai, en parlantde ce théâtre, quece quej'ai vu. Je relèverailes erreursde quelques
voyageursmodernes,afin que ceux qui comparerontleurs récitsaveclesmiens, connoiffent par mesremarquesque les différencesqui fe,trouvententre nos ouvrages,ne m'ont point échappe,&.ne font pas chez moi le fruit de l'erreur ou de la négligence.Ils verrontque mes anertionsfontréfléchiesque j'affirmemes deffins par mes écrits, & que je confirmemesécrits par mes
deffins.Les détailsdansïeiquels j'entrerai,pourrontfuffifammentexpliquer & faireconnoîtrelesformes
&les ufagesde toutesles partiesde cet édince.Je l'ai examinélong-temps& attentivement&en l'obfervant, j'y ai trouvé tant de beautésde détans, que je m'y fuisattaché particulièrement,&.que j'ai ienti qu'il fauoitau moinsune foisdansle coursde cet ouvrage, traiterà fondde la
conftrucnonde ces Théâtresfi célèbres qui ont ïaiué une fi granderéputation,puifquej'étoisaffezheureux pour en trouverun auffibien confervé-
Celui de Tindare dont j'ai parlé, &.ceuxdont je parleraidansla fuite, font trop détruits pour nousdonnerla connoiffancedesdétailsqui nousfont néceffaires.Maisen les comparanton verrade combiende variétésces fortesd'édificesétoientmiceptiMeschezlesAnciens.Leur compofitionétoittoujoursdi~ée par des circonXanceslocales qui fe combinoientavecles différensufagesaux-
quelsces édificesétoientdemnés..Le Théâtre de Taormineeft ~ituédansla partie la plus élevée de la ville & la plus
avancéedu côté de ï'Oricnt. Les rochersde ce lieu offroientune cavitéexpoféeen pleinmidi,dont la formeétoit demi circulaire & dont la grandeur étoit celle des théâtresde la plus
beHe proportion.Les Architectesn'ont pas manquéde s'en emparer ils n'ont eu qu'à rec-tifier l'irrégularitéde quelquesrochers, qui ne pouvoientpas convenirà i'éd~icequ'ifsvouloientconduire.
PLANCHE QUATRE-VINGT-ONZIEME.
~MC~c/MT-J~du T~Mf~ T~on~rnc, du Kr~M ~z ~cc~) ~C
des cheminsqui y conduifent.
L'étenduedu terrainA A,
furle devantde ce tableau
où Fonvoit des hommes& des ani-maux, e&un terrainaujourd'huilaBoure,& qui devoitêtre autrefoisun des plus beauxquartiers
de cetteville,commeonen peut jugerparl'cHampe précédente.Je n'y ai remarquequ'unmur B, B,pTOME ïï.
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VOYAGE PITTORESQUE34
qui eft en partie détruit. I! avoit été bâti pour foutenirles terres dans ce lieu qui e~ incliné, afin
qu'on pût y avoir des endroits unis propre à faire des jardins ou plutôt à confhruiredes maifonsvoltmcs du Théâtre.
C, C font des chemins qui conduifoientaux parties antérieures du Théâtre. D, D étoit une
terraffequi donnoit entrée au pénMe ou pollfceniumde ce Théâtre dont on voit les portes E, Eentre les bafes des piliers. Cette terraffeconduifoit auffiaux pavillons N, N qui font de chaquecôte, &.elleaboutiffoitàun efcalier F, pratiquédans la roche. Cet efcaliermenoit à un chemincou-vert G, par où l'on montoit aux parties fupérieuresH. Voyez le plan .dans la PlancheXCIV.
Le grand chemin 1 conduifoitaux parties fupérieuresde ce théâtre. On rencontroit un pont ài'endroit marqué L. H portoit d'un bout fur un rocher élevé, qui fubMe encore &.de l'autrefur le mur extérieurde la galerie extérieurede ce théâtre. Ce pont étoit defliné à conduire fur les
terraffes ou fur les toits des deux
galeriesqui
faifoientle tour de l'édifice.Voyez
les plans
& les
coupes, Planche XCVI. J'y ai marqué la place qu'occupoient ces ponts je dis ces ponts, car il
y en avoit un de chaque côté de ce théâtre je les ai reconnus d'après les indices certains quem'ont fourni les maffesrêvantes de roches, auxquelles on voit encore des adhérences de conf-trudion.
Ces ponts, dont rexi~ence feroit en vain niée par ceux qui n'ont pas observécomme moi les
particularités qui i'atte&ent, ces ponts étoient néceiïaires à la folidité de cet édifice en faifantt
Foince de piliers ou plutôt d'arc-boutantscontre cette portion circulairede mur qui a befoin defoutien pour réMer à la pouffée des voûtes des galeries. D'ailleurs le deffusdes galeries devoitêtre occupé, rien de plus propre pour y parvenir que ce moyen il ne dérange rien de la voiecirculaire des deux galeries, & il étaye l'édince fans le déparer.
II y avoit auffi dans l'épaineur du mur M un efcalier pratiqué pour monter de ce côté dansla partie ~périeure du pavillon N. H conduifoit auffi aux galeries comme escalierde dégagement.II y avoit une porte au rez-de-chaufféedans l'angle elle donnoit entrée dansun corridor pratiquédans répaineur des murs. Voyez le plan à la Planche XCIV. H conduifoità une efpèce d'entre-
fol, qui fe trouvoit dans l'intérieur de ce grand pavillon.Je n'ai point tracé entièrementce dernier corridordans les plans je n'ai fait que l'indiqueràla
lettre S parcequ'il occafionneroitune complicationembarranancc en interrompant fansnéeeuitélesmurs principauxqui font connoître la conm'ucMonde cet édifice j'ai penfé qu'il ~umtbitd'en parler.
Cette vue perspectivemontre l'intérieurde ce bâtiment, aufri-bienque le feroient plufieurscoupesgéométrales. On voit à gauche dans la galerie ou pénMe qui précède l'entrée du théâtre, un ef-caîier 0 il conduifoit à un autre
petit efcalierconflruit
dans répaineur du mur derrière les lettresP, P il fervoit à monter à la galerie fupérieure Q, Q. H y en avoit un femblableà pareilleplaceà l'autre bout de la galerie, à l'endroit R, difpofé de la même manière, & pour le même ufage.Ces efcaliersétoient plusutiles qu'apparens.Outre cette PlancheXCI, voyezle plan, Planche XCIV.Les entrées principalesde ce théâtre étoient en Y & Z, dans le mur P, R percé de trois ouver-vertures, par Iefquelles on arrivoit au théâtre en traverf~ncla galerie E. Ces entrées & ces
paffages étoient demnés à l'ufage des acteurs parce qu'ils répondoient Fendroit où fe repré-fentoient les fcènes mais Ior(qu'Hne s'aginoit pas de repréfentationsthéâtrales ces portes don-noient entrée dans l'orchefire, pour des afïemblées& des conférences, ou pour des objets de re.
ligion.L'endroit indiqué fous le numéro 11, eA celui qu'on appendt orcheftre ou arêne. C'étoit fa
partie baffe ou !e fol du théâtre. H avoitdix-fept toifesde largeur, fur environ quinzede profondeur.Toute la partie inclinée & circulaire ï $, où la roche eft aujourd'hui découverte dans fa tota-
lité, étoit le lieu où au