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Dialogue http://journals.cambridge.org/DIA Additional services for Dialogue: Email alerts: Click here Subscriptions: Click here Commercial reprints: Click here Terms of use : Click here Hegel, naissance d'une philosophie. Une biographie intellectuelle Horst Althaus Traduit de l'allemand par Isabelle Kalinowski Paris, Éditions du Seuil, 1999, 607 p. Éric Guay Dialogue / Volume 39 / Issue 04 / September 2000, pp 832 835 DOI: 10.1017/S0012217300007915, Published online: 13 April 2010 Link to this article: http://journals.cambridge.org/ abstract_S0012217300007915 How to cite this article: Éric Guay (2000). Review of RolfPeter Horstmann, and Philippe Müller 'Les frontières de la raison. Recherche sur les objectifs et les motifs de l'idéalisme allemand' Dialogue, 39, pp 832835 doi:10.1017/S0012217300007915 Request Permissions : Click here Downloaded from http://journals.cambridge.org/DIA, IP address: 130.194.20.173 on 20 May 2013

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Hegel, naissance d'une philosophie. Une biographie intellectuelle Horst Althaus Traduit de l'allemand par Isabelle Kalinowski Paris, Éditions du Seuil, 1999, 607 p.

Éric Guay

Dialogue / Volume 39 / Issue 04 / September 2000, pp 832 ­ 835DOI: 10.1017/S0012217300007915, Published online: 13 April 2010

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How to cite this article:Éric Guay (2000). Review of Rolf­Peter Horstmann, and Philippe Müller 'Les frontières de la raison. Recherche sur les objectifs et les motifs de l'idéalisme allemand' Dialogue, 39, pp 832­835 doi:10.1017/S0012217300007915

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Cette conception du present comme effectivite concrete forme, selon Vaysse, lenoyau a partir duquel on doit comprendre la theorie hegelienne de l'historicite, del'histoire de l'esprit. S'il y a suppression du temps et de la temporalite dans ledeploiement du concept, dans l'advenir a soi du Savoir absolu, cela ne signifieaucunement «qu'il ne se passera plus rien» (p. 100): la philosophic hegelienne del'histoire n'est pas une pensee qui vise l'abolition de la contingence, mais elle tenteplutot de penser cette contingence, de l'amener au concept, c'est-a-dire de fairevoir ce qui, en elle, est rationnel et releve de ce que Hegel appelle l'eternite del'ldee. Elle n'est en rien une absolutisation «d'un quelconque present contingent))(p. 123), mais plutot une philosophic qui pense simultanement l'eternite et la con-tingence, qui vise a faire apparaitre ce qui dans le maintenant est effectif commepasse. Pour Vaysse, «il n'y a chez Hegel aucune devaluation du temps, mais unepensee du present effectif. Le concept ne se realise pas ailleurs que dans le presentet le temps est le concept qui est la, l'eternel n'etant rien d'autre que le presentcomme resultat du passe» (p. 116). Et, selon lui, c'est en ce sens que la philosophicde Hegel est bien une pensee du present, et non pas, comme plusieurs l'ont pre-tendu, une metaphysique de la presence.

Dans l'ensemble, cet ouvrage constitue un veritable tour de force dans la mesureou il reussit en quelques courts chapitres a elucider quelques-uns des textes les plusredoutables du corpus hegelien. Les analyses de certains passages de laPhenomenologie de l'esprit, de la Science de la logique, de X Encyclopedic et memede 1'Esthetique font, a chaque fois, apparaitre toute la complexite de la theoriehegelienne de l'histoire et permettent a l'auteur de defendre brillamment sa these.Malgre sa brievete, cet essai peut etre considere a juste titre comme une contribu-tion reelle aux recherches hegeliennes. Cela etant, il eut ete interessant que l'auteuretende son propos au volet politique de la philosophic de Hegel, notamment auxPrincipes de la philosophie du droit, car, comme il le mentionne lui-meme dans sonintroduction, cette «philosophie de l'histoire est en meme temps une pensee dupolitique et de l'Etat» (p. 7).

Note1 Martin Heidegger, Etre et temps, trad, franc. Francois Vezin, Paris, Gallimard,

1986, §82, p. 496.

MARTIN THIBODEAU Universite de Montreal

Hegel, naissance d'une philosophie. Une biographie intellectuelleHORST ALTHAUSTraduit de l'allemand par ISABELLE KALINOWSKI

Paris, Editions du Seuil, 1999, 607 p.

Pres de sept ans apres sa parution en langue allemande sous le titre Hegel und dieheroischen Jahre der Philosophie. Eine Biographie (textuellement: Hegel et lesannees heroi'ques de la philosophie. Une biographie) chez Carl Hanser Verlag(Munich), nous pouvons enfin prendre connaissance de cette traduction francaised'un commentateur fort connu en Allemagne. Le decalage entre le titre original etson passage dans l'univers francophone revele les deux orientations majeures de

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l'ouvrage; une premiere qui situe la philosophic hegelienne dans une epoque oufleurissent de veritables «heros de la philosophie», une autre, qui tend a degagerla nouveaute dans le mode de pensee hegelien. Car, en ce qui concerne l'appella-tion francaise du livre, c'est bien a l'idee d'un hegelianisme qui arrive a rayonnerpar-dela la vie de son instigateur que nous sommes convies. En effet, Naissanced'une philosophic ne couvre pas seulement les debuts philosophiques de Hegel,mais bien son integralite. Si chaque facon de nommer l'etude possede ses propresavantages, on peut dire qu'en ce qui concerne la trame du texte, le titre allemandl'emporte sur l'intitule francais. On touche, en s'inspirant d'un terme relatif a ladramaturgie — en l'occurrence r«heroisme» — a ce qui parait servir de charpentea l'ouvrage. Le livre ressemble a une piece de theatre relatant les differents actesqui ont ponctue la vie de Hegel. On y depeint d'abord l'etat des lieux ou se dressel'action; on decrit ensuite les personnages qui y prennent part pour finalementaborder les ecrits qui en resultent. L'analogie theatrale se manifeste aussi par latendance a faire ressortir les caracteristiques psychologiques de ceux qui ont tra-vaille a l'eclosion de l'idealisme allemand. C'est done en respectant les traits decaractere associes au «personnage Hegel», pour rester fidele a l'esprit du texte, quenous avons choisi de relater ce qui se passe tout au long des quarante-quatre chapitres de cette «biographie intellectuelle». Nous ferons egalement res-sortir un autre aspect important de l'ouvrage : le desir de savoir «si Ton peut com-prendre la posterite de la philosophic hegelienne sans revenir a Hegel lui-meme, ases origines» (p. 7).

Le livre s'ouvre precisement sur les origines de Hegel en nous presentantl'hypothese selon laquelle le lieu meme ou le penseur est ne, Stuttgart, a beaucoupa voir avec sa future facon de theoriser le monde. L'auteur decrit le «caracteresouabe» qui anime cette ville : «Ne rien precipiter est, en Souabe, un principe pre-mier. Les bonnes choses demandent du temps. [...] Ici, l'idee a besoin d'un longtemps de maturation» (p. 21). Lorsqu'on sait combien ce qui est «immediat»deviendra suspect aux yeux du vieil Hegel, il faut avouer que le rapprochementd'Althaus est ici assez ingenieux. C'est encore ces «manieres souabes» que l'auteurfait ressortir des annees de formation theologique du futur philosophe, au coursdesquelles, quittant la region ou il a vu le jour pour Tubingen, il se lie d'amitieavec Schelling. La difference de caractere entre les deux personnages illustre l'ecartentre deux Souabes prealablement formes a des endroits differents. Hegel est definicomme l'«oppose de Schelling» (p. 38), parce qu'il est definitivement moins fon-ceur, davantage de la nature des citadins, que ne Test celui qui avait etudie a l'ecolede Bebenhausen situee en banlieue. L'auteur decrit Hegel comme un eleve intelli-gent, mais dissipe, qui ne mit que trop tardivement le serieux necessaire a sesetudes en theologie. En raison de cette attitude badine, Hegel doit abandonnerl'espoir de devenir un jour theologien et se tourne vers une carriere de precepteurpour assurer ses frais de subsistance. A partir de ce moment, on nous amene aconstater que les tracasseries pecuniaires ne le lacheront jamais. Ses annees de pre-ceptorat nous sont decrites comme une occasion en or de parfaire sa culture per-sonnelle et de reflechir sur certains aspects de la realite. Mais a Berne comme aFrancfort le philosophe reste le meme, «un homme qui ecrit tout seul, en prive,sans songer a un public de lecteurs» (p. 133), contrairement a son ami Schellingqui commence deja a publier ses propres reflexions a cette epoque. Devenant parla suite Privatdozent a Iena sous l'influence de son copain qui y est deja professeur,

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Hegel en profite pour rediger quelques articles qui temoignent timidement d'unecertaine divergence avec les vues philosophiques de Schelling. La Phenomenologiede I'esprit, redigee a cette epoque, explicite la nature du disaccord entre les deuxhommes, qui, l'auteur ne manque pas de le souligner, n'est pas seulementphilosophique mais aussi psychologique. On nous rappelle que les canons ne tar-dent alors pas a grander dans la ville d'lena. Schelling evite la guerre en s'exilanten Baviere; Hegel se retrouve sans emploi lorsque l'universite est detruite. Auxdires d'Althaus, l'immobilisme du philosophe joue encore et toujours contre lui:«Nul doute qu'a Berne, a Francfort comme a Iena, ecrit-il, sa lenteur, sa difficultya se mettre en mouvement ont ete un continuel obstacle a sa carriere» (p. 172). LePrivatdozent dechu devient par la suite tour a tour journaliste a Bamberg, ou ilapprend l'importance de la comprehension des «faits divers» par la philosophie,et recteur du Lycee de Nuremberg. On associe ce brusque gout pour l'action quise manifeste chez notre adepte de l'inertie a la «naissance d'un homme nouveau»(p. 212). C'est sur l'emergence de cet homme, qui semble contredire son propretemperament passif, que se conclut la premiere moitie de l'ouvrage a peu pres.

Les chapitres suivants nous invitent a prendre conscience de l'aboutissementd'un «esprit souabe» qui a longuement muri ses connaissances avant de lesassumer publiquement. A Nuremberg, en accord avec un esprit d'engagement quine lui etait jusque-la pas coutumier, on nous rappelle que Hegel se marie a Marievon Tucher et s'adonne a la redaction de la Science de la logique «sans troublersa lune de miel». Le 27 Janvier 1814, alors que les deux premiers tomes de sondeuxieme ecrit canonique sont publies, on nous raconte que Hegel aurait bienaime prendre la releve de la chaire de philosophie vacante a Berlin en raison de lamort de Fichte. Pourtant, c'est a l'Universite de Heidelberg qu'il aboutit, ou,encore selon l'auteur, les choses s'amelioreront dorenavant pour lui. A present,Hegel est «ce qu'il n'avait pas ete a Nuremberg, une autorite pedagogique incon-testee, qui a le projet d'elever sa doctrine au rang de philosophie d'un pays et delui assurer une large diffusion)) (p. 250).

Apres avoir fait etat de la vie de famille des Hegel a Heidelberg et de la popu-larite que connait pour la premiere fois les cours du professeur, on aborde la clas-sification des savoirs a laquelle s'adonne son Encyclopedie des sciencesphilosophiques. L'auteur s'attaque par la suite a la question de l'acquisition del'ancienne chaire de Fichte a Berlin, conquise, selon lui, en raison d'un «ecrit surles etats du Wurtemberg» qui mit Hegel dans les bonnes graces de la capitale intel-lectuelle allemande. Pour le philosophe, c'est maintenant la consecration : «[...]incarnee en Hegel, la philosophie s'etait veritablement installee a Berlin» (p. 330).On poursuit consequemment le compte rendu detaille du travail philosophiqueaccompli dans cette ville : Philosophie du droit, Philosophie de I'histoire, Esthe-tique, Histoire de la philosophie, Philosophie de la religion. L'ouvrage nous relateaussi les voyages aux Pays-Bas, a Habsbourg et en France, que fait Hegel a cetteepoque, sans manquer de faire ressortir certains details interessants, et memecroustillants, a propos des humeurs du voyageur qui changent au gre des paysagesse succedant devant ses yeux.

A l'arriere plan de toute l'information livree, on nous prepare egalement a com-prendre la posterite de la philosophie hegelienne par une explicitation des reper-cussions pratiques de la dialectique speculative. L'on nous explique que cettefameuse dialectique, en voulant expnmer absolument la realite, en vient a assimiler

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toute chose a son contraire. Ainsi, nous dira l'auteur, «la philosophie hegeliennese compose au moins de deux philosophies [...] antagonistes mais dont l'unite estpreservee par le ciment de la "methode" et dont la synthese produit une troisiemephilosophie» (p. 545). Le periple bibliographiquement intellectuel auquel nousconvie Althaus s'acheve sur l'idee que les trois philosophies differentes deduites del'hegelianisme expriment l'origine des hegeliens «de gauche», «de droite», et «ducentre».

Pour conclure, nous aimerions dire que ce livre arrive bel et bien a nous convain-cre que l'hegelianisme gagne a etre scrute a la lumiere de revolution du tempera-ment de l'homme qui l'a elabore. L'illustre philosophe aimait d'ailleurs lui-memecomprendre les evenements a partir de leur contexte immediat afin de mieux faireressortir la richesse de leurs developpements ulterieurs. Le recueil est rafraichissantlorsqu'on le compare a certaines monographies sur Hegel moins portees a faire res-sortir la psychologie de cet auteur. Tres biographique, l'ouvrage se permet aussi cer-taines incursions interessantes dans les meandres hautement theoriques de laphilosophie hegelienne. Par contre, on ne peut que deplorer qu'Althaus n'ait pasdaigne inscrire les references des textes hegeliens qu'il cite. Cette lacune, qui appa-rait aussi dans la version originale allemande, ne facilite pas la tache des lecteursqui aimeraient retracer certains des extraits pour les approfondir a leur maniere...

ERIC GUAY Universite du Quebec a Trois-Rivieres

Hegel et l'idealisme allemandJEAN-LOUIS VIEILLARD-BARONCollection «Histoire de la philosophie))Paris, Librairie Philosophique J. Vrin, 1999, 386 p.

A l'aube d'un nouveau millenaire, Jean-Louis Vieillard-Baron poursuit son incur-sion philosophique dans les profondeurs enigmatiques de l'idealisme allemand.Apres son celebre Platon et l'idealisme allemand paru chez l'editeur parisienBeauchesne en 1979, le professeur de l'Universite de Poitiers persiste et signe avecla publication de Hegel et l'idealisme allemand. On nous y propose «une interpre-tation de l'idealisme allemand vu a partir de Hegel» (p. 7). Pour ce faire, le prospec-teur francais nous invite a cheminer a travers quatre problematiques bien definies,soit: imagination et speculation; Novalis et Holderlin : imagination poetique etspeculation philosophique; speculation et religion; l'esprit, la nature et l'histoire.En prime, l'auteur nous offre trois textes en annexe : deux traductions de Holderlin,Ce qui advient dans ce qui passe (Das Werden im Vergehen) et le poeme Offrandematinale au Redempteur (Morgenopfer an den Erloser); et un autre intituleSaint Martin en Allemagne. Ce sont les grands axes de meditation du volume que nousallons maintenant aborder, en montrant en quoi ceux-ci servent la visee de l'ouvrage.

La principale these soutenue dans les pages rassemblees sous le titre (imagina-tion et speculation)) est la suivante : «On ne saurait rien comprendre a l'idealismeallemand — c'est-a-dire surtout a Fichte, Schelling et Hegel — si Ton n'aban-donne pas d'emblee toute idee de contradiction entre la raison et l'imagination»(p. 49). Afin d'etayer ces propos, on aborde principalement Maitre Eckhart, Kant,Fichte, Schelling et Hegel. Une lecture attentive de cette section nous amene a