fondations pour le developpement des … · esis : inventaire européen sur la société de...

101
Rapport No 25841 FONDATIONS POUR LE DEVELOPPEMENT DES TECHNOLOGIES DE LINFORMATION ET DE LA COMMUNICATION EN ALGERIE Avril 2003 Département global des Technologies de l’Information et de la Communication Vice-Présidence Secteur Privé et Infrastructure et Région Moyen-Orient et Afrique du Nord Banque mondiale Ce rapport fait l’objet d’une diffusion restreinte. Les destinataires ne peuvent l’utiliser que dans le cadre de leurs fonctions professionnelles. Son contenu ne peut pas être publié sans l’autorisation de l a Banque mondiale. Public Disclosure Authorized Public Disclosure Authorized Public Disclosure Authorized Public Disclosure Authorized Public Disclosure Authorized Public Disclosure Authorized Public Disclosure Authorized Public Disclosure Authorized

Upload: ngodang

Post on 15-Sep-2018

214 views

Category:

Documents


0 download

TRANSCRIPT

Rapport No 25841

FONDATIONS POUR LE DEVELOPPEMENT DES TECHNOLOGIES DE L’INFORMATION ET DE LA COMMUNICATION EN ALGERIE

Avril 2003 Département global des Technologies de l’Information et de la Communication Vice-Présidence Secteur Privé et Infrastructure et Région Moyen-Orient et Afrique du Nord Banque mondiale

Ce rapport fait l’objet d’une diffusion restreinte. Les destinataires ne peuvent l’utiliser que dans le cadre de leurs fonctions professionnelles. Son contenu ne peut pas être publié sans l’autorisation de la Banque mondiale.

Pub

lic D

iscl

osur

e A

utho

rized

Pub

lic D

iscl

osur

e A

utho

rized

Pub

lic D

iscl

osur

e A

utho

rized

Pub

lic D

iscl

osur

e A

utho

rized

Pub

lic D

iscl

osur

e A

utho

rized

Pub

lic D

iscl

osur

e A

utho

rized

Pub

lic D

iscl

osur

e A

utho

rized

Pub

lic D

iscl

osur

e A

utho

rized

ANNÉE FISCALE 2003

1er juillet – 30 juin

Cette note a été préparée par une équipe composée de : Paul Noumba, Rachele Gianfranchi-Hirschhofer (consultant), Mather Pfeiffenberger, Lucy Cueille (traductions), Yann Burtin, Isabelle Andress (CITPO), Anupama Dokeniya (Consultant). Des contributions extérieures ont été fournies par le cabinet Louis Lengrand & Associés (France). Nous tenons aussi à remercier le « Italian Consultant Trust Fund (General - National Account) » pour son soutien à la réalisation de ce travail. Gareth Locksley et Christine Quiang (CITPO) ont été les réviseurs au stade du concept de projet. MM Paul Moreno López (MNSED), Christian Schmidt (MNSIF) et Howard Williams (CITPO) ont révisé la note finale. D'importantes contributions ont été fournies par M. Michel Welmond (MNSHD) et Mme Cécile Fruman (MNC01). MM. Christian Delvoie et Ted Ahlers (Directeurs Pays) et Pierre Guislain (Chef Division Sectorielle CITPO) ont régulièrement orienté le travail de l’équipe. La Banque tient à adresser ses sincères remerciements à la contrepartie algérienne, pour son soutien et sa collaboration tout au long de cet exercice, à savoir : les Ministères de la Poste et des Technologies de l’Information et de la Communication, de l’Éducation nationale, de l’Enseignement supérieur et de la Recherche, de la Formation professionnelle, de la Santé publique, ainsi que de nombreuses autres institutions publiques et privées.

Vice-Président Jean-Louis Sarbib Directeur Secteur Mohsen Khalil Directeur Pays Christian Delvoie/Theodore Ahlers Chef Division Sectorielle Pierre Guislain Chef Équipe de Projet Paul Noumba

« All revolutions generate uncertainty, discontinuity, and opportunity. Today’s is no exception. How we respond, how we turn current opportunities into real benefits, will depend on how quickly we can enter the European Information Society ». Rapport Bangeman - 1994

ABRÉVIATIONS ET SIGLES AAI : Agence Algérienne d’Information AIG : American Insurance Group Algérie Poste : EPIC Algérie Poste Algérie Telecom : Algérie Telecom SPA ALBM : Algerian Business Machines ALE : Accord de libre Échange ANA : Agence Nationale des Autoroutes ANDI : Agence Nationale de Développement des Investissements ANDRU : Agence Nationale de Développement de la Recherche Universitaire ANDS : Agence Nationale de Docu mentation de la Santé ANF : Agence Nationale des Fréquences ANVREDET : Agence Nationale de Valorisation de la Recherche et du Développement Technologique APS : Algérie Presse Service APSI : Agence pour la Promotion, le Soutien et le Suivi des Investissements ARPT : Autorité de Régulation de la Poste et des Télécommunications ATM : Asynchronous Transfer Mode BADR : Banque de l’Agriculture et du Développement Rural CATEL : Les Câbleries des Télécommunications d’Algérie CCP : Comptes Chèques Postaux CDTA : Centre de Développement des Technologies Avancées CERIST : Centre de Recherche en Information Scientifique et Technique CETIC : Centre d’Expertise en Technologies de l’Information et des Communications CHU : Centre Hospitalier Universitaire CINDE : Costa Rica Investment and Development Board CNAT : Centre National d’Animation de l’Entreprise des Travaux CNEP : Caisse Nationale d'Épargne et de Prévention CPA : Crédit Populaire d’Algérie DA : Dinar algérien DOMSAT : Domestic Satellite Network DWDM : Dense Wavelength Division Multiplexing Technology DZ-PAC : Réseau public de données à commutation par paquet x.25 EDS : Electronic Data Systems Corporation EEPAD : Établissement d’Enseignement Professionnel à Distance EMISPHER : Euro-Mediterreanean Internet Satellite Platform for Health, Education and Research ENIE : Entreprise Nationale des Industries Électroniques ENIEM : Entreprise Nationale des Industries de l’Électroménager ENNA : Établissement National de la Navigation Aérienne ENSI : Entreprise Nationale de Systèmes Informatiques ENTC : Entreprise Nationale de Télécommunications ENTV : Entreprise Nationale de Télévision algérienne EPE : Entreprises publiques économiques EPIC : Entreprise publique à caractère industriel et commercial ERIAD-SETIF : Entreprise des Industries Alimentaires Céréalières et Dérivés de Sétif ERP : Enterprise Resource Planning (Progiciel de gestion intégrée) ESIS : Inventaire européen sur la société de l’information EUMEDIS : Sociét é de l’Information Euro-Méditerranéenne FBCF : Formation brute de capital fixe FINALEP : La Financière Algéro-Européenne FSI : Fournisseur de services Internet Gbits/s : Gigabits per second GECOS : General Computing Systems GEMED : Gesellschaft für medizinisches Datenmanagement GMPCS : Global Mobile Personal Communications Services GSM : Global System Mobile HP : Hewlett Packard IAP : International Advisory Panel

IBM : International Business Machines IDA : Irish Development Agency INI : Institut National d’Informatique INPI : Institut National de la Propriété Industrielle IP : Protocole Internet ITCR : Instituto Tecnológico de Costa Rica Kbits/s : Kilobits per second LP : Lignes principales Mbits/s, Mbps : Megabits per second MEGAPAC : Réseau privé de données à commutation par paquet x.25 opéré par Algérie Telecom MdF : Ministère des Finances MPT : Ministère de la Poste et des Télécommunications MPTIC : Ministère de la Poste et des Technologies de l’Information et de la Communication MSC : Multimedia Super Corridor NAFTA : Accord de libre échange nord-américain NMT : Nordic Mobile Telephone NEC : Nippon Electric Company, Ltd. NTT : Nippon Telegraph and Telephone Corporation OBA : Output-Based Aid (subventions ciblées) OCDE : Organisation de Coopération et de Développement économiques ONS : Office National des Statistiques ONDA : Office National des Droits d’Auteur ONUDI : Organisation des Nations Unies pour le Développement Industriel OTA : Orascom Telecom Algérie PABX : Central téléphonique privé PIB : Produit intérieur brut PME : Petites et moyennes entreprises PMI : Petites et moyennes industries PNUD : Programmes des Nations Unies pour le Développement POP: Point de Présence PROMEX : Office algérien de promotion du commerce extérieur PSTN : Réseau de téléphonie public commuté PTF : Productivité totale des facteurs PwC : PricewaterhouseCoopers SATIM : Société d’Automatisation des Transactions Interbancaires et de Monétique SII : Servicio de Impuestos Internos (Administration nationale des impôts du Chili) SNTF : Société Nationale des Transports Ferroviaires SOFINANCE : Société Financière d’Investissements, de Participation et de Placement SONATITE : Société Nationale des Travaux d’Infrastructures de Télécommunications SONATRACH : Société Nationale pour la Recherche, la Production, le Transport, la Transformation, et la

Commercialisation des Hydro carbures SONELGAZ : Société Nationale de l’Électricité et du Gaz SPA : Société par actions SSII : Société de services d’ingénierie informatique TDA : Télédiffusion d’Algérie TIC : Technologies de l’Information et de la Communication TI : Technologies de l’Information UE : Union européenne UFC : Université de la Formation Continue UIT : Union Internationale des Télécommunications UMTS : Universal Mobile Telecommunications System UPU : Union Postale Universelle USD : Dollar américain VSAT : Very Small Aperture Terminal WLL : Wireless Local Loop ZTE : Zhongxing Telecommunication Equipment Company

Table des matières

RESUME EXECUTIF................................................................................................................. I

1 TENDANCES INTERNATIONALES....................................................................................... I 2 ÉLÉMENTS DÉTERMINANTS POUR DEVELOPPER LES TIC .................................................III

2.1 Énoncer clairement une approche visionnaire du développement ..........................III 2.2 Exprimer une volonté politique forte et bâtir un consensus politique ....................IV 2.3 Développer et établir un cadre réglementaire moderne ...........................................IV 2.4 Développer des infrastructures d’information modernes avec la participation du secteur privé ........................................................................................................................IV 2.5 Remettre à jour le capital humain pour utiliser les infrastructures et services d’information ........................................................................................................................V

3 LA TRANSITION DE L’ALGÉRIE VERS UNE SOCIÉTÉ DE L’INFORMATION .........................V 3.1 Les atouts de l’Algérie pour une transformation réussie .........................................V

3.1.1 Une réforme des télécommunications solide ...........................................VI 3.1.2 Une demande potentielle (solvable) non satisfaite..................................VI 3.1.3 Un secteur privé émergent.......................................................................VIII 3.1.4 Une rente pétrolière considérable...........................................................VIII

3.2 Les principaux défis .............................................................................................. VIII 3.2.1 Absence d’une stratégie de développement claire ...............................VIII 3.2.2 Cadre réglementaire à renforcer et rationaliser.......................................IX 3.2.3 Tissu économique peu favorable................................................................IX 3.2.4 Formation inadaptée.....................................................................................X 3.2.5 Explosion de l’économie informelle et de la piraterie..............................X 3.2.6 Fuite des cerveaux........................................................................................XI 3.2.7 Accès aux TIC coûteux.................................................................................XI

4 PERSPECTIVES DE CROISSANCE........................................................................................XI 5 PROCHAINES ÉTAPES.......................................................................................................XI 6 PLAN D’ACTION ...........................................................................................................XIII

INTRODUCTION : OBJECTIFS DE LA NOTE...................................................................1

CHAPITRE 1 : ÉLÉMENTS POUR UNE VISION STRATÉGIQUE .................................3

1 DÉFINITION DES TECHNOLOGIES DE L’INFORMATION ET DE LA COMMUNICATION........3 2 EXPLORATION ET MISE EN EXPLOITATION DES NOUVELLES TECHNOLOGIES...................6 3 IMPLICATIONS DE LA RÉVOLUTION APPORTÉE PAR LES NOUVELLES TECHNOLOGIES .....8 4 PERSPECTIVES INTERNATIONALES ...................................................................................9 5 ÉLÉMENTS DÉTERMINANTS POUR DÉVELOPPER LES TIC................................................12

5.1 Énoncer une approche visionnaire du développement ............................................12 5.2 Exprimer une forte volonté politique et bâtir un consensus politique ....................13 5.3 Développer et établir un cadre réglementaire moderne ...........................................14

5.4 Développer une infrastructure d’information moderne avec la participation du secteur privé ........................................................................................................................15 5.5 Développer un capital humain mis à jour pour l’utilisation des infrastructures et services d’information .........................................................................................................15

CHAPITRE 2 : REVUE DU SECTEUR DES TIC ................................................................16

1 SITUATION DU SECTEUR AVANT LA RÉFORME D’AOÛT 2000.........................................16 2 LA RÉFORME DU SECTEUR DES POSTES ET TÉLÉCOMMUNICATIONS ...............................20 3 INITIATIVES POUR LA MISE EN PLACE D’UNE SOCIÉTÉ DE L’INFORMATION...................23 4 LES OPÉRATEURS ET FOURNISSEURS DE SERVICES DE TÉLÉCOMMUNICATIONS..............24

4.1 Algérie Telecom – un démarrage difficile ................................................................25 4.1.1 La téléphonie fixe .................................................................................................25 4.1.2 La téléphonie mobile ............................................................................................26 4.1.3 La transmission de données et les lignes louées ..................................................27 4.2 Orascom Telecom Algérie........................................................................................28

5 LES AUTRES OPÉRATEURS POTENTIELS............................................................................29 5.1 Télédiffusion d’Algérie ............................................................................................30 5.2 Algérie Poste............................................................................................................30

6 LES FOURNISSEURS DE SERVICES INTERNET....................................................................31 6.1 Le CERIST...............................................................................................................32 6.2 EEPAD-WANADOO ............................................................................................33 6.3 GECOS....................................................................................................................33 6.4 BMGI.......................................................................................................................34

7 LES DISTRIBUTEURS D’ORDINATEURS ET PRESTATAIRES DE SERVICES INFORMATIQUES 34 7.1 Les principales entreprises publiques ......................................................................35 7.2 Les principales entreprises privées ..........................................................................35

8 LES INTERVENANTS DANS LES MÉDIAS DE L’INFORMATION...........................................36 8.1 La presse écrite.........................................................................................................36 8.2 La télévision et la radio ............................................................................................37

CHAPITRE 3 : ATOUTS ET DÉFIS......................................................................................39

1 LES INITIATIVES DE DÉVELOPPEMENT DES TIC...............................................................39 1.1 Les TIC dans l’enseignement supérieur ..................................................................40 1.2 Les TIC dans l’enseignement primaire et secondaire ..............................................40 1.3 Les TIC dans la formation professionnelle ..............................................................42 1.4 Les TIC dans la recherche et le développement .......................................................42

2 LES ATOUTS DE L’ALGÉRIE POUR RÉUSSIR SA TRANSFORMATION..................................43 2.1 Demande potentielle (solvable) non satisfaite .........................................................43 2.3 Émergence d’un secteur TIC privé ..........................................................................44 2.4 Rente pétrolière........................................................................................................45

3 LES PRINCIPAUX DÉFIS.....................................................................................................46 3.1 Inexistence d’une stratégie de développement des TIC ...........................................46 3.2 Cadre réglementaire incomplet................................................................................46 3.3 Tissu économique peu favorable ..............................................................................47 3.4 Formation inadaptée dans le domaine des TIC........................................................49

3.4.1 L’offre ne satisfait pas la demande ............................................................49 3.4.2 Inadaptation des contenus de formation..................................................49 3.4.3 Cloisonnement des filières de formation en TIC .....................................50

3.5 Explosion de l’économie informelle et de la piraterie ..............................................50 3.6 Fuite des cerveaux ...................................................................................................50 3.7 Coûts de l’accès aux TIC .........................................................................................51

CHAPITRE 4 : OPTIONS DE DÉVELOPPEMENT DES TIC .........................................52

1 SOUTENIR LA COMPÉTITIVITÉ DE L’ÉCONOMIE...............................................................53 2 SOUTENIR LA DIVERSIFICATION DE L’ÉCONOMIE ...........................................................54 3 RÉSULTAT DE LA SIMULATION DU MARCHÉ DES TIC.....................................................58

CONCLUSIONS : DIRECTIVES POUR LE DÉVELOPPEMENT DES TIC .................61

RECOMMANDATION 1 : DÉFINIR UNE STRATÉGIE COHÉRENTE POUR LA SOCIÉTÉ DE L’INFORMATION ......................................................................................................................61

1.1 Donner une structure de gestion et une légitimité politique au programme de société de l’information en Algérie ......................................................................................61 1.2 Finaliser le programme de société de l’information .................................................61 1.3 Suivre les progrès technologiques internationaux et surveiller l’évolution nationale vers la société basée sur l’information .................................................................................62

RECOMMANDATION 2 : COMPLÉTER LE CADRE LÉGISLATIF ET RÉGLEMENTAIRE.........63 2.1 Accélérer la libéralisation du secteur des télécommunications ...............................63 2.2 Rendre l’ARPT complètement opérationnelle et assurer son indépendance...........63 2.3 Ouvrir Algérie Telecom au capital privé.................................................................63 2.4 Renforcer la législation en matière de propriété intellectuelle et juguler la piraterie...........................................................................................................63 2.5 Créer un mécanisme de certification de qualité pour les fournisseurs de services TI ....................................................................................63 2.6 Promulguer les réglementations sur le cryptage et la sécurité des transactions électroniques ........................................................................................................................64 2.7 Élargir à l’Internet les réglementations sur la protection des données personnelles et de la vie privée .................................................................................................................64

RECOMMANDATION 3 : PROMOUVOIR L’USAGE DES TIC DANS L’ADMINISTRATION PUBLIQUE, LES ENTREPRISES ET LA SOCIÉTÉ............................................................................64

3.1 Promouvoir l’utilisation des TIC par l’administration...........................................64 3.2 Éliminer les droits de douane et mettre en place des incitations fiscales pour les entreprises............................................................................................................................64 3.3 Multiplier les points d’accès à Internet sur tout le territoire..................................65 3.4 Favoriser les partenariats avec les sociétés étrangères ............................................65

RECOMMANDATION 4 : DIFFUSER LES TIC DANS LES SECTEURS DE L’ÉDUCATION ET DE LA RECHERCHE........................................................................................................................66

4.1 Concevoir et initier des programmes de formation spécifiques en TIC ...................66 4.2 Améliorer la connectivité des établissements scolaires et universitaires ................66 4.4 Créer des événements festifs nationaux...................................................................67

RÉFÉRENCES...........................................................................................................................68

BIBLIOGRAPHIE........................................................................................................................68 SITES INTERNET.......................................................................................................................69

Portails ................................................................................................................................69 Sites de fournisseurs de services Internet............................................................................69 Sites de ministères, d’institutions politiques et d’administrations .....................................70 Sites d’organismes publics...................................................................................................70 Sites d’entreprises................................................................................................................70 Sites de la presse ..................................................................................................................70 Sites d’ambassades...............................................................................................................70

RAPPORTS................................................................................................................................71

ANNEXE : L’ALGÉRIE PAR RAPPORT AUX PAYS VOISINS........................................72

1 MÉTHODOLOGIE..............................................................................................................72 2 PRINCIPAUX ENSEIGNEMENTS........................................................................................73

RESUME EXECUTIF

1 TENDANCES INTERNATIONALES

L’essor rapide des technologies de l’information et de la communication (TIC) au cours des dix dernières années a transformé les pays développés en sociétés de l’information. Les nouvelles technologies sont au centre du débat dans les pays en développement qui désirent eux aussi profiter des avantages qui en découlent. Le changement technologique d’aujourd’hui est sans précédent par son rythme et son envergure. Les nouvelles technologies de l’information et de la communication sont au cœur de ce changement, avec des avancées spectaculaires. En 1930, une minute d’appel téléphonique de New York à Londres coûtait l’équivalent de 300 dollars US d’aujourd’hui ; actuellement, le même appel ne coûte que quelques centimes. Le coût d’un mégabit de puissance de calcul est tombé de 7.600 dollars US en 1970 à 17 centimes en 1999, soit une baisse de 99,9 % durant cette période. Tout ceci constitue une véritable révolution dont les bénéfices étaient réservés jusqu’à récemment aux pays développés et industrialisés. Dans le passé, les erreurs de saisie forçaient les grandes entreprises à re-traiter environ le quart de leurs commandes. Le commerce électronique permet maintenant de vérifier que les commandes, les bordereaux de livraison et les factures aux clients concordent bien. C’est ainsi que General Electric a pu réduire substantiellement les erreurs et économiser 5 à 20 % des coûts initialement induits par les erreurs de traitement affectant la chaîne de commercialisation. Cisco Systems, le plus grand fournisseur mondial de routeurs pour le trafic Internet, a transféré 70 % de son « customer care » en ligne, éliminant ainsi 250.000 appels téléphoniques par mois et économisant plus de 500 millions de dollars US. Ce qui représente environ 17 % de ses coûts opérationnels. Un autre changement est lié à l’émergence de grappes industrielles d’entreprises, principalement petites et moyennes, regroupées autour d’un pôle de compétence dont les activités sont complémentaires. Les effets externes découlant de cette agglomération de compétences se traduisent par la disponibilité de l’information, la proximité de pôles de fournisseurs, de clients et d’employés qualifiés. C’est ainsi que de nombreuses grappes industrielles dans le domaine de la haute technologie sont apparues dans des pays industrialisés. Il existe également de grappes industrielles compétitives dans des pays en développement (Malaisie, Inde, Chine, Brésil, Costa Rica, etc.). Parallèlement à cette pénétration des nouvelles technologies dans tous les secteurs de l’économie, on remarque que le contenu d’information des activités et des produits industriels augmente. Par exemple, c’est environ la moitié de la valeur d’une nouvelle voiture qui réside dans son contenu d’information (conception, gestion des processus, commercialisation, ventes, etc.). Les technologies de l’information et de la communication sont maintenant omniprésentes dans l’entreprise. Elles affectent les méthodes de travail, les aménagements d’usines, la gestion des processus de contrôle de la qualité ainsi que les systèmes de contrôle de la production et de stockage. L’organisation interne des entreprises doit donc être revue et adaptée en fonction des nouvelles technologies. Les TIC permettent de séparer les fonctions et les processus de production de l’entreprise et de choisir des sites d’implantation en fonction des coûts, de l’efficacité et des besoins du marché. Par exemple, une entreprise peut concevoir un semi-conducteur aux États-Unis avec l’aide d’une filiale en Inde, acheter la tranche de silicium à une fonderie dans la province de Taiwan en Chine, assembler et tester la puce aux Philippines et utiliser une entreprise de logistique

II

indépendante pour expédier le produit en Allemagne et le commercialiser dans toute l’Europe. Pour les investisseurs utilisant les technologies nouvelles et recherchant des sites d’implantation compétitifs, les critères les plus importants sont : qualifications spécialisées, infrastructure moderne, institutions fortes, faibles coûts de transaction, fournisseurs locaux efficaces, présence de grappes industrielles et de prestataires de services de soutien. D’une manière générale, les technologies de l’information et de la communication jouent deux rôles dans le processus de croissance. Premièrement, elles contribuent largement à l’accumulation du capital. Deuxièmement, elles contribuent à la croissance de la productivité totale des facteurs (PTF)1. Cette contribution dépend des progrès technologiques dans la production des biens et des services liés aux TIC ainsi que des gains d’efficacité dans les secteurs utilisant les TIC 2. Dans quelle proportion exacte ces deux facteurs influencent la PTF reste toutefois à déterminer. Le secteur de production des TIC (fabrication et services) a contribué de manière considérable à la croissance de la productivité dans plusieurs pays de l’OCDE pendant la deuxième moitié des années 90. Il apparaît de plus que, dans la même période, certains services utilisant les TIC ont connu une croissance de la productivité au-dessus de la moyenne. Ceci montre que les nouvelles technologies commencent à produire des effets externes au-delà de leur propre secteur. Ce phénomène est également confirmé par des études réalisées au niveau des entreprises et des secteurs dans lesquels les technologies de l’information et de la communication sont très répandues tels que la vente de détail, le commerce, le transport et les services financiers. La transition vers une économie basée sur l’information peut se faire de plusieurs façons, ainsi que nous le montre l’expérience d’autres pays ayant réussi. C’est à chaque pays qu’il revient de définir une stratégie nationale qui corresponde à ses propres besoins. Néanmoins, on peut identifier deux approches générales. Pour la plupart des gouvernements, l’objectif est de promouvoir la diffusion massive des nouvelles technologies pour en maximiser les retombées économiques (effets externes), principalement sur les utilisateurs finaux. Pour d’autres gouvernements, le but est de promouvoir la constitution d’un pôle national de compétence dans le domaine des TIC qui soit capable de satisfaire à la fois la demande intérieure et l’exportation. Néanmoins, il est important de signaler qu’un pôle de fabrication des TIC n’est pas une condition sine qua non de la réussite, et ce, pour trois raisons. Premièrement, la proximité de fabricants d’équipement est souvent moins importante que celle de fabricants de logiciels et de prestataires de services. Ce sont ces derniers qui pourront aider les entreprises recherchant des compétences particulières et des conseils dans le domaine des TIC. Deuxièmement, en raison des coûts initiaux élevés et d’importantes économies d’échelle3, la fabrication des équipements liés aux TIC tend à être hautement concentrée. Seuls quelques pays ont les avantages comparatifs nécessaires pour réussir. La troisième raison, qui est aussi la plus importante, est que plusieurs pays ayant développé un secteur des TIC dynamique n’ont pas de secteur de fabrication des TIC significatif. L’Australie en est un bon exemple4. Les gouvernements ne devraient donc pas croire que le développement délibéré d’un pôle de fabrication TIC est la condition sine qua non à la construction d’une société basée sur l’information et au renforcement de la croissance économique. En 2002, on estimait le marché mondial des technologies de l’information et de la communication à environ 2,365 milliards €, dont 804,1 milliards € pour le marché américain, 283,8 milliards € pour celui du Japon et 641 milliards € pour l’Europe occidentale. Décomposé en ses différents segments

1 Dirk Pilat et Frank Lee, « Productivity Growth in ICT-producing and ICT-using Industries : A source of Growth

Differentials in the OECD ? », DSTI DOC (2001) 4, OCDE, juin 2001. 2 Dale Jorgenson, « Information Technology in the U.S. Economy », American Economic Review, Vol. 91,

No. 1, mars 2001. 3 Un exemple des coûts élevés pour créer une industrie TIC productive est le suivant : installer une nouvelle usine

de production de semi-conducteurs coûtait « seulement » environ 100 millions de dollars au début des années 80, mais jusqu’à 1,2 milliard de dollars US en 1999 (United States Council of Economic Advisors, 2001).

4 David Gruen et Glenn Stevens, « Australian Macroeconomic Performance and Policies in the 1990s”, dans The Australian Economy in the 1990s (Sydney: Reserve Bank of Australia, 2000).

III

(équipements, logiciels, services de technologie de l’information (TI) et services de télécommunications5), le marché de l’Union européenne montre la répartition suivante :

• équipement TIC : 150 milliards € (28 %), • produits logiciels : 65 milliards € (10 %), • services TI : 140 milliards € (22 %), • services de télécommunications : 275 milliards € (40 %).

Par habitant, ces segments de marché représentent respectivement : a) 678 € pour les services de télécommunications, b) 464 € pour l’équipement, c) 164 € pour les logiciels et d) 363 € pour les services TI. Autrement dit, les pays de l’Union européenne dépensent en moyenne : a) 2,95 % de leur PIB pour des services de télécommunications, b) 2,02 % pour l’acquisition d’équipements, c) 0,71 % pour les logiciels, et d) 1,58 % du PIB pour des services de technologie de l’information. Avec une moyenne d’environ 1.652 € par personne, chaque citoyen de l’Union européenne alloue approximativement 7,26 % de ses revenus à la consommation dans le domaine des TIC. Ce chiffre fournit un point de repère pour évaluer le statut de développement d’autres marchés des nouvelles technologies.

2 ÉLEMENTS DETERMINANTS POUR DEVELOPPER LES TIC

Devenir une société de l’information va bien au-delà de l’acquisition et de l’installation de nouvelles infrastructures. C’est un processus de transformation économique, sociale et culturelle. Pour permettre à la technologie de déployer tout son potentiel, il convient d’établir une stratégie à long terme visant à établir un cadre économique, social et réglementaire favorable. Sur la base de l’expérience internationale, les conditions préalables au développement d’une société de l’information sont déterminées par cinq critères fondamentaux : une approche visionnaire, des dirigeants forts pour une mise en oeuvre efficace et opportune du projet, un cadre réglementaire remis à jour qui ait un effet stabilisateur sur le monde de l’entreprise, des infrastructures d’information modernes mises en place avec une participation du secteur privé et enfin, un capital humain compétent capable d’utiliser les infrastructures d’information à leur pleine capacité.

2.1 Énoncer clairement une approche visionnaire du développement

L’expérience internationale montre que les pays ayant le mieux réussi leur transition sont également ceux qui ont établi une stratégie claire et adaptée à leur projet de développement. Dans le cas de l’Union européenne commenté ci-dessous, la vision était basée sur le besoin de renforcer la compétitivité de la Communauté européenne et d’atteindre une croissance économique durable qui entraîne la création d’emplois. Le Rapport Bangeman énonçait cette approche visionnaire. En Malaisie, le projet “Multimedia Super Corridor” est né de la vision du Premier ministre de transformer la Malaisie, d’un pays semi-industrialisé assemblant des produits électroniques bas de gamme, en une économie basée sur l’information qui pourrait faire face à la concurrence internationale. En Algérie, une approche visionnaire du développement des technologies de l’information et de la communication n’a pas encore été formalisée ni diffusée. La présente note suggère que la transition de l’Algérie vers une économie de l’information doit passer par la diversification de l’économie et par le renforcement de la compétitivité sur les marchés internationaux. Ceci implique l’émergence et le développement de nouvelles sources de croissance économique.

5 Les services de télécommunications sont définis comme les sociétés qui fournissent des services de

communications, y compris service vocal, enregistrement, et transmission de données, vidéo et facsimilé.

IV

2.2 Exprimer une volonté politique forte et bâtir un consensus politique

Une forte volonté politique doit exister au sein du pays pour traduire la vision d’avenir en un plan d’action, et pour assurer que les étapes du plan d’action soient effectivement mises en œuvre. Les approches de la Malaisie et de l’Union européenne montrent le rôle essentiel joué par les dirigeants politiques, non seulement pour fournir la vision, mais également pour donner aux agences d’exécution le pouvoir de mettre le projet en œuvre. Dans le cas de la Malaisie, le Premier ministre, Dr. Mahathir Mohamad a joué un rôle majeur dans le processus de mise en œuvre du programme de société de l’information. La MDC6 (Multimedia Development Corporation) a reçu les pleins pouvoirs et a été équipée pour mettre en œuvre le programme du Gouvernement. Elle rend compte de son travail directement auprès du Premier ministre, qui assure une étroite supervision de la mise en œuvre du programme. L’Algérie a besoin d’un personnage fort, bien connu dans les diverses industries, capable de diriger et de superviser la mise en œuvre en temps voulu du processus de réforme du secteur des TIC. Sinon, les ralentissements et les retards dans l’application des réformes diminueront la crédibilité des efforts du Gouvernement et mineront le soutien politique.

2.3 Développer et établir un cadre réglementaire moderne

Un solide cadre réglementaire favorisant une participation accrue du secteur privé est crucial au développement d’un secteur des TIC dynamique. Plus spécifiquement, le cadre réglementaire, ainsi que l’environnement commercial en général, devraient attirer les investisseurs privés nationaux et étrangers. La clarté et la prédictibilité des réglementations nationales sont donc vitales pour mitiger la perception du risque par les investisseurs et promouvoir une concurrence saine et loyale. En Algérie, le premier défi est de mettre en place un cadre réglementaire complet offrant aux investisseurs et consommateurs potentiels un climat de certitude et de prédictibilité. Le second défi est de développer des capacités internes qui feront respecter ces réglementations. Le troisième défi est d’améliorer l’environnement des affaires tout en accélérant la privatisation de l’économie. Parmi les toutes premières priorités que le Gouvernement devrait se donner, citons : a) une plus grande indépendance de l’ARPT, b) l’élargissement de son mandat pour couvrir les nouveaux domaines réglementaires de la société de l’information, et c) la protection efficace des droits de propriété intellectuelle pour juguler la piraterie.

2.4 Développer des infrastructures d’information modernes avec la participation du secteur privé

Dans le secteur des TIC, c’est l’investissement privé qui est la force motrice. Les environnements monopolistiques ou anticoncurrentiels constituent d’importants obstacles à la participation privée. La situation dans ce secteur est radicalement différente de celle d’autres secteurs infrastructurels tels que les transports, dans lesquels d’importants investissements publics sont encore vitaux. La première tâche des gouvernements est donc de sauvegarder la compétitivité du secteur et d’y assurer la stabilité des engagements politiques et réglementaires. Il ne sera pas nécessaire d’engager d’importants investissements publics, bien que le financement de certaines applications-phares ciblées pour des besoins de démonstration puisse être soutenu par le Gouvernement. De plus, le Gouvernement pourrait envisager des subventions ciblées pour promouvoir l’utilisation des nouvelles technologies dans les écoles, les administrations publiques et les petites

6 La Multimedia Development Corporation (MDC) a été établie pour superviser la mise en oeuvre du MSC

(“Multimedia Super Corridor”), l’un de ses projets les plus visibles. Les réunions des conseillers du MSC (IAP : International Advisory Panel) ont toujours été un évén ement-clé dans le pays, comptant avec la présence du Premier Ministre. Les membres de l’IAP comprennent des chefs d’entreprises TIC de haut niveau (Acer Group, Alcatel, BCE, Bloomberg, Centre for Strategic & International Studies, Cisco Systems, Compaq Computers, DHL, EDS, Ericsson, Fujitsu, Infosys, Intel, IBM, Lucent, Microsoft, Motorola, NEC, NTT, Nokia, Ohmae & Associates, Oracle, Reuters Group, Siemens, SAP, Sony, Sun Microsystems, et Dell Computers).

V

entreprises. Au total, l’impact fiscal des mesures prises deviendra positif au fur et à mesure que la consommation des TIC se développe. En Algérie, un travail important reste à faire pour inciter les investisseurs privés à investir dans la construction de l’infrastructure d’information. La présence d’entreprises privées internationales ayant des activités commerciales liées aux TIC est encore limitée. L’instabilité politique et l’agitation sociale de la dernière décennie ont contribué à rendre le pays moins attrayant de leur point de vue.

2.5 Remettre à jour le capital humain pour utiliser les infrastructures et services d’information

L’expérience internationale montre également que les pays dans lesquels la population a reçu un bon niveau d’éducation et a eu l’occasion d’utiliser les nouvelles technologies disposent d’un avantage comparatif indéniable. Leur transition vers une économie basée sur l’information7 en est facilitée. Une réforme en profondeur du système éducatif, la mise en place de programmes de recyclage à l’intention des enseignants ainsi que l’élaboration d’un plan de diffusion bien conçu—ciblant d’abord l’éducation supérieure puis, ensuite, les étudiants plus jeunes—devraient donc précéder tout effort de diffusion massive des TIC. Le nombre d’étudiants recevant chaque année une formation en informatique, en électronique et en télécommunications reste actuellement par trop insuffisant pour pouvoir soutenir l’émergence d’un secteur des TIC compétitif. L’État doit mettre en place, en coopération avec des associations professionnelles privées, des filières de formation orientées vers les nouvelles professions créées par la révolution technologique. Dans cette optique, on devrait encourager la création de partenariats entre les secteurs public et privé et adapter la réglementation en vigueur afin d’encourager une augmentation de la participation privée dans le système éducatif algérien. En Algérie, l’offre de compétences dans le domaine des technologies de l’information et de la communication est freinée par les faiblesses suivantes : contenu de la formation inadapté aux besoins du marché, cloisonnement excessif des filières de formation, installations et équipements de formation inadéquats par rapport aux besoins du marché (volume et qualité), et impact dévastateur de la fuite des cerveaux.

3 LA TRANSITION DE L’ALGERIE VERS UNE SOCIETE DE L’INFORMATION

L’Algérie considère que de doter son économie d’un secteur des TIC moderne et dynamique est un moyen privilégié de la rendre plus compétitive et diversifiée et moins axée sur l’industrie pétrolière. Cependant, en termes de développement de l’infrastructure d’information, le pays reste nettement en retard par rapport à ses voisins.

3.1 Les atouts de l’Algérie pour une transformation réussie

L’Algérie dispose d’atouts majeurs pour engager sa transition vers une société de l’information : a) une solide réforme des télécommunications commencée en l’an 2000, b) une demande potentielle et solvable non satisfaite, c) l’émergence d’un secteur des TIC privé, bien qu’encore fragmenté, et d) d’importants revenus pétroliers. 7 Il est à souligner que la forte croissance du secteur TIC dans le monde conduisit à la pénurie de cadres et de

techniciens, en même temps que l’offre de services augmentait. Par exemple, Motorola fut forcée d’annuler un projet de centre de développement de logiciels en Égypte à cause de l’incapacité du système d’éducation égyptien à fournir les ingénieurs et techniciens pour en assurer les activités. En effet, un tel centre exige une masse critique de 300 à 500 ingénieurs qualifiés pour être compétitif, ce que le marché égyptien n’était pas en mesure d’offrir.

VI

3.1.1 Une réforme des télécommunications solide Le secteur algérien des technologies de l’information et de la communication est en cours de réforme. Avec le soutien de la Banque mondiale, le Gouvernement s’est engagé en l’an 2000 dans une réforme du secteur des postes et télécommunications. En voici les principales réussites à ce jour : a) adoption d’une déclaration de politique des télécommunications pro-libérale en 2000, b) promulgation de la nouvelle Loi sur les Postes et Télécommunications (Loi 2000-03) du mois d’août 2000, c) établissement d’une entité réglementaire indépendante (ARPT) opérationnelle depuis mai 2001, d) transformation d’Algérie Telecom et d’Algérie Poste en entreprises commerciales, e) octroi à Orascom Telecom Algérie8 (OTA) en juillet 2001 de la seconde licence GSM pour 737 millions de dollars US. Mais, le programme d’octroi de licences engagé par le gouvernement est ambitieux et devrait être révisé en fonction des conditions caractérisant le marché internationa l des télécoms. De ce fait, le nombre d’abonnés au réseau fixe est passé de 1.600.000 en 1999 à 2.000.000 en décembre 2002. De même, le nombre d’abonnés au mobile a augmenté, en termes relatifs, atteignant les 400.000 en décembre 2002 contre 72.000 en 1999. Avec l’ouverture à la concurrence du marché Internet en 1999, plus de 75 licences de fournisseurs de services Internet ont été octroyées tandis que nombre total d’abonnés à Internet passait de 20.000 en 1999 à 60.000 en 2002.

Figure 1 : Grandes étapes de la réforme du secteur des télécoms en Algérie

Post and Telecom reform agenda

2000 2001 2002

Libera

lization

of

Intern

et

Law 20

00-03

Post &

Telec

om

enact

edSe

cond G

SM

license

award

ed

Algérie

Téléco

m

privatiz

ation

launche

d

1999

ARPT

- Regul

ator

estab

lished

Algérie

Téléc

om

&

Algérie

Poste

corpo

ratized

VSAT

& Ru

ral &

Long

distan

ce

licens

ing

launch

edThi

rd GSM

licens

ing

launch

ed

20042003

2003

Wireless

local

licensi

ng

launch

ed

2005

Évolution des abonnés au mobile en Algérie

0

50000

100000

150000

200000

250000

300000

350000

400000

Dec

-99

Feb-

00

Apr

-00

Jun-

00

Aug

-00

Oct

-00

Dec

-00

Feb-

01

Apr

-01

Jun-

01

Aug

-01

Oct

-01

Dec

-01

Feb-

02

Apr

-02

Jun-

02

Aug

-02

Oct

-02

Dec

-02

2ème GSM : octroi de la licence ; C-2ème GSM : début opérations comm.

Afin de soutenir les efforts de la réforme, un Comité de Pilotage a été établi en mai 2001 pour rendre compte du développement de la société de l’information en Algérie. Ce comité est composé de représentants des secteurs public, privé et de l’éducation. Le processus de décision a marqué le pas en 2001-2002 suite à des questions de prérogatives entre ministères. Les recommandations exprimées par le Comité de Pilotage dans son rapport d’octobre 2001 ne furent jamais mises en œuvre. 3.1.2 Une demande potentielle (solvable) non satisfaite La demande de consommation des biens et services de TIC reste largement insatisfaite en Algérie. Dans le domaine des services téléphoniques, la longueur des listes d’attente (800.000 pour la téléphonie fixe et 500.000 pour la téléphonie mobile) montre l’ampleur de la situation. La télédensité reste faible en 2001 : 64 lignes fixes pour 1.000 personnes et moins de trois lignes mobiles pour 1.000 personnes. La Tunisie et

8 Depuis lors, OTA a investi 550 millions de dollars US (y compris le premier paiement du prix de la licence), et a

créé 1.000 emplois directs et 5.000 indirects).

1ère GSM C-2ème GSM

VII

l’Égypte, qui avaient une télédensité similaire au début des années 90, ont dépassé l’Algérie à la fin de la décennie. Les tarifs des services de télécommunications fournis par Algérie Telecom (l’opérateur public) sont généralement bas en ce qui concerne le raccordement, les coûts d’abonnement et les appels locaux, mais restent élevés pour l’international, ce qui implique un besoin urgent de rééquilibrer les tarifs.

Figure 2 : Performances du secteur des télécoms algérien par rapport aux pays voisins Télédensité des lignes fixes

0

2

4

6

8

10

12

1990

1991

1992

1993

1994

1995

1996

1997

1998

1999

2000

% P

opul

atio

n

Algérie

Tunisie

Maroc

Égypte

Profil opérationnel du secteur des télécoms algérien

0

500000

1000000

1500000

2000000

2500000

3000000

1990

1991

1992

1993

1994

1995

1996

1997

1998

1999

2000

2001

Liste d'attente

Capacité de raccordement

Abonnés raccordés

De même, l’explosion du nombre d’internautes en moins de trois ans (150.000 en 1999, 400.000 fin 2001, et probablement 1 million en fin 2002) procure une autre dimension de l’ampleur de la demande potentielle. On estime que le nombre d’internautes algériens est beaucoup plus élevé que le nombre d’abonnés à Internet. Ceci est dû à la popularité dont jouissent les cybercafés, en dépit de leurs tarifs assez élevés (de 50 à 100 dinars de l’heure). Ils permettent d’avoir accès à Internet pour moins cher, sans avoir besoin d’être propriétaire d’un ordinateur ou de payer un abonnement mensuel. L’efficacité des cybercafés à répandre l’accès à Internet est perçue, selon de nombreux observateurs, comme un élément important d’ouverture sur le monde extérieur, au même titre que le fut l’antenne parabolique pour la télévision il y a dix ans. Du côté des entreprises et des administrations publiques, la situation n’est pas meilleure. Malgré l’absence d’information détaillée sur l’équipement disponible en outils de communication modernes, les besoins sont probablement immenses. Pour preuve, très peu d’entreprises algériennes disposent de réseaux locaux informatiques et rares sont celles déjà reliées à Internet. Certes, quelques projets sont en cours de réalisation : amélioration de la gestion budgétaire, mise en place d’un système de compensation bancaire et de télécompensation. Mais dans l’ensemble, ni les ministères, ni leurs extensions territoriales, n’ont pas de procédures de gestion informatisée à leur disposition. La modernisation des administrations publiques nécessitera un important effort en termes d’informatisation et de mise en réseaux. Cela permettra de simplifier les procédures et donnera une meilleure visibilité aux décideurs et aux gestionnaires. Équiper les administrations de réseaux locaux, de réseaux à large bande et d’Intranets permettra d’offrir progressivement des services de gouvernement en ligne. En retour, le Gouvernement pourra réaliser de considérables économies de budget tout en améliorant la qualité des services dispensés au public. Cependant, on devrait éviter d’avoir systématiquement recours à des solutions clé en mains. Au contraire, il convient de concevoir une stratégie d’externalisation et ses lignes directrices devraient être définies dès que possible. Pour les entreprises algériennes, l’enjeu consiste à intégrer l’informatique et Internet dans leurs stratégies de développement tout en multipliant les efforts organisationnels pour devenir plus compétitives. Pour accélérer ces mutations, des dispositifs incitatifs pourraient être mis en place par les pouvoirs publics, à savoir : (i) faciliter la formation et le recyclage des personnels à travers des mécanismes de type « fonds à coûts partagés » ; (ii) élimination des tarifs douaniers sur les matériels et équipements informatiques importés par les entreprises pour moderniser leur système d’information et de communication.

VIII

3.1.3 Un secteur privé émergent Les dernières informations recueillies9 indiquent qu’une grappe industrielle est en train d’émerger en Algérie dans le domaine des techniques de l’information et de la communication. Son potentiel de croissance est important car il est alimenté par la libéralisation du marché et les efforts de revitalisation de l’économie. Les industriels interviewés en Algérie sont optimistes quant à la croissance du secteur. Il existe une demande croissante pour les équipements et services TIC, tels que les installations de réseaux, l’intégration de systèmes et le développement d’applications personnalisées, en particulier pour les systèmes basés sur l’Internet et les applications en réseau. La présence d’entreprises privées locales a augmenté au cours des trois dernières années mais demeure fragmentée. Ce sont principalement de petites et moyennes entreprises familiales qui ne peuvent pas soutenir la concurrence des grandes entreprises internationales ou des entreprises publiques. 3.1.4 Une rente pétrolière considérable Les revenus provenant de l’exploitation des importantes réserves d’hydrocarbures dont dispose l’Algérie pourraient faciliter la mise en œuvre du programme de développement de la société de l’information. C’est probablement dans cette optique que le Gouvernement a décidé de soutenir la réalisation du projet de parc technologique d’Alger (Cyberparc de Sidi Abdallah). Bien que le projet en soit encore au stade de l’esquisse, il importe de ne pas axer une stratégie de développement des TIC exclusivement sur la mobilisation des fonds publics. Il serait par exemple plus efficace qu’une fois le parc technologique aménagé, les autorités en délèguent totalement la gestion à un opérateur privé disposant de l’expérience et du savoir-faire requis en matière de développement de telles installations. Ceci pourrait se faire par le biais de contrats de gestion indexant la rémunération du gestionnaire à la réalisation de performances opérationnelles prédéfinies.

3.2 Les principaux défis

L’Algérie devra toutefois relever de nombreux défis avant qu’une véritable société de l’information puisse se matérialiser. Parmi les plus importants, notons : 3.2.1 Absence d’une stratégie de développement claire Le Comité de Pilotage sur la société de l’information établit clairement ce constat dans son rapport d’octobre 2001 : « …il n’existe pas actuellement de stratégie claire et cohérente en la matière. Certes, une multitude de projets sont menés dans différents secteurs depuis trois ans. Les ministères, les administrations, les organismes publics, les entreprises publiques, les sociétés privées, tous ont exprimé, d’une façon ou d’une autre, leur intention d’améliorer l’équipement informatique, de développer des réseaux, de généraliser l’accès à Internet. Mais il n’y a pour le moment aucun inventaire précis et concret de ce qui existe, de ce qui est en cours de développement et des buts à atteindre. Témoin les réseaux d’entreprise : combien y en a -t-il, quelles sont les populations concernées, quel est leur degré d’interconnexion avec des réseaux extérieurs ? » Ce manque d’information et de vision prospective comporte le risque de multiplier les redondances, ou au contraire, de promouvoir des projets isolés et non compatibles les uns avec les autres. L’absence de réflexion sur l’usage des nouvelles technologies entraînera immanquablement des déceptions dans beaucoup de catégories socioprofessionnelles. Le grand public devra probablement se contenter d’un accès ponctuel à l’Internet dans les cybercafés pour se détendre. Les entrepreneurs courent le risque de ne pas capter les bénéfices attendus après avoir consenti d’importants investissements pour moderniser leur outil informatique. Enfin, les décideurs politiques seront déçus du faible impact sur la croissance et la diversification de l’économie algérienne d’importants investissements publics.

9 ICF Consulting Group, Algeria ICT Cluster: Inventory and Assessment Report, février 2003.

IX

3.2.2 Cadre réglementaire à renforcer et rationaliser Jusqu’à présent, le cadre réglementaire pour un secteur des TIC privé et compétitif a été partiellement défini. Le nouveau cadre juridique et réglementaire s’appuie sur de nombreuses institutions nouvellement créées : 1) l’Autorité de Régulation de la Postes et des Télécommunications (ARPT), 2) l’Agence nationale pour la Gestion des Fréquences (ANF – sous la supervision du MPT), récemment établie pour gérer la bande de spectre10, et 3) la Commission nationale qui gère l’accès aux tours, pylônes, et autres infrastructures pour transmission radio (« points hauts ») accordé aux opérateurs de télécommunications et à l’armée11. Il serait souhaitable d’envisager une réduction du nombre des intervenants pour éviter les difficultés de coordination et des conflits de compétences susceptibles de gêner le bon développement du secteur. Il serait également bénéfique de renforcer l’indépendance de l’ARPT pour la mettre à l’abri des pressions politiques. Si l’Autorité jouit d’une large autonomie financière et de décision, tous les membres de son conseil d’administration sont nommés et peuvent être révoqués par décret du Président de la République. Il conviendrait de résoudre cette ambiguïté qui affaiblit l’un des acteurs centraux du nouvel environnement aménagé pour les technologies de l’information et de la communication.. Enfin, la Loi 2000-03 est imprécise dans de nombreux domaines touchant à la répartition des tâches et des compétences entre le Ministère et l’ARPT. Bien que l’environnement commercial existant soit porteur d’initiatives individuelles et capable de soutenir le développement d’un secteur des TIC dynamique, il est clair que l’Algérie devra passer en revue les législations et réglementations existantes dans le but de les rationaliser. Elle devrait promulguer les décrets nécessaires au développement rapide du secteur. Par exemple, les règlements relatifs à la protection du consommateur ou au respect de l’ordre public n’ont pas encore été transposés à l’Internet. Par ailleurs, des règlements spécifiques devront être adoptés12. En particulier, la question de la responsabilité des FSI, s’ils hébergent des sites ou des contenus illégaux, devra être clarifiée après une consultation ouverte avec le secteur privé. De même, le mode de gestion des noms de domaine national (le suffixe « .dz ») devrait être révisé par l’industrie avec l’aide du Gouvernement. D’après des FSI privés, les attributions se font « au compte-goutte ». Le CERIST exige notamment que le site soit hébergé en Algérie, ce qui incite les promoteurs algériens à enregistrer leurs sites sous des suffixes internationaux (.com, .net). L’efficacité et la transparence du processus d’attribution sont primodiales pour le développement de l’industrie et mettront fin au « cyber-squatting ».

3.2.3 Tissu économique peu favorable Plusieurs insuffisances caractérisent encore le tissu économique en Algérie. Une analyse récente (Banque mondiale, 2002 a, b) détaille en profondeur les principaux goulots d’étranglement freinant le monde de l’entreprise et le développement du secteur privé. La création d’une entreprise demeure un exercice difficile en Algérie, malgré la mise en place d’agences publiques chargées de faciliter le processus. Les entrepreneurs se plaignent régulièrement de lourdeurs bureaucratiques13 et de la difficulté à obtenir

10 L’ANF n’est pas encore opérationnelle. Le décret de sa création lui donne la responsabilité de gérer l’entièreté des

ressources du spectre, y compris les fréquences utilisées par les services de sécurité. Mais les responsabilités se chevauchent, puisque selon les décrets, L’ARPT gère aussi la bande de fréquence pour les applications commerciales, (mais n’a pas d’autorité sur les autres bandes de fréquence).

11 Commission interministérielle qui peut inclure des représentants des opérateurs, et assure la coordination de l’accès et de l’utilisation des tours, pylônes, et autres infrastructures pour transmission radio ( « points hauts »), qui sont considérés sites stratégiques de défense nationale.

12 Protection des données personnelles et de la vie privée, élargissement du concept de droits d’auteur, reconnaissance légale de la signature électronique, règlements commerciaux spécifiques pour toutes les parties impliquées dans des contrats sur Internet, ou mise en œuvre de procédures pénales à l’encontre des pratiques ou contenus illégaux.

13 En juin 2001, les statistiques publiées étaient significatives : 43.000 dossiers étaient en attente à l’APSI (future ANDI).

X

l’assistance nécessaire pour la réalisation de leur projet. Il est également difficile d’acquérir des biens fonciers. Aux dires de beaucoup, il est à peu près impossible d’obtenir un prêt bancaire pour créer une entreprise dans le secteur des TIC (conseils ou production en informatique, Internet, etc…), à moins de disposer de garanties solides et de biens personnels à hypothéquer14. Les possibilités de financement dans les secteurs de production de biens immatériels sont d’autant plus limitées qu’il n’existe qu’une seule société publique proposant des financements de type capital-risque (la Finalep), et qu’elle ne dispose ni des ressources nécessaires, ni d’une véritable compréhension du secteur. 3.2.4 Formation inadaptée Les carences se font particulièrement ressentir dans le domaine des télécommunications : la dérégulation du secteur engendre une forte demande en cadres. De même, le nombre de diplômés en informatique—qui fourniront les compétences techniques nécessaires à la mise en place de nouveaux schémas de fonctionnement dans les entreprises—est faible au regard des besoins suscités par les changements en cours. Enfin, la plupart des instituts de formation éprouvent des difficultés à recruter et à conserver enseignants et chercheurs. Chaque année, de nombreux enseignants et jeunes diplômés choisissent de partir à l’étranger pour y exercer des emplois plus valorisés et mieux rémunérés. De plus, il existe peu d’instituts de formation professionnelle dans le domaine des TIC en Algérie. L’enseignement supérieur se divise en trois filières—l’informatique, l’électronique et les télécom-munications—entre lesquelles il n’existe pas encore de passerelles. Les entreprises estiment que le niveau de formation est satisfaisant, même si les étudiants diplômés ne savent pas toujours appliquer la formation reçue aux situations pratiques des entreprises. Les ingénieurs informatiques maîtrisent habituellement les langages informatiques et les différents systèmes d’exploitation, mais leur culture n’est pas toujours en rapport avec les attentes et besoins des entreprises algériennes. 3.2.5 Explosion de l’économie informelle et de la piraterie L’économie « informelle » occupe une place prépondérante dans le fonctionnement de l’économie algérienne. Ce phénomène est particulièrement marqué dans le domaine des TIC. Des cartes contrefaites d’abonnement aux chaînes de télévision et bouquets satellites peuvent être achetées au vu et au su de tout le monde. De même, on peut se procurer les versions les plus récentes de logiciels ou progiciels pour 2 % du prix d’une version sous licence. Face à une telle différence de prix, les consommateurs n’hésitent pas. L’arsenal juridique existe, mais paraît presque impossible à appliquer face à l’ampleur du phénomène. L’Office national des Droits d’Auteur procède théoriquement à des contrôles dans les commerces et les entreprises, mais les poursuites judiciaires sont rarissimes. Les actions du Gouvernement dans ce domaine ne semblent pas toujours en harmonie avec ses déclarations d’intention. L’enjeu est pourtant de taille. Le marché du multimédia pourrait représenter près d’un milliard de dinars par an, et le manque à gagner pour l’État, sous forme de taxes non perçues, est considérable.

14 Les principaux problèmes freinant les performances du secteur financiers, tels que perçus par les entrepreneurs,

sont : a) les crédits ne sont pas alloués sur la base des retours attendus mais plutôt sur les antécédents et les garanties offertes, b) les nantissements exigés sont excessifs (2 ou 3 fois le montant du prêt), c) procédures encombrantes et processus de décision centralisés des institutions bancaires, cd) manque d’équipements et de systèmes informatisés dans les banques, e) le système de paiement très lent (jusqu’à trois semaines pour compenser un chèque entre banques à Alger, et f) les coûts du crédit trop élevés (environ 10 %) et le cycle d’approbation trop bureaucratique.

XI

3.2.6 Fuite des cerveaux Certains n’hésitent pas à évoquer un véritable « drame national ». Le problème de la fuite des cerveaux est particulièrement réel dans le domaine des TIC. Un pourcentage non négligeable de jeunes ingénieurs formés en informatique, en électronique ou en télécommunications n’hésitent pas à quitter l’Algérie à la première opportunité. C’est souvent à l’occasion d’un cycle de formation à l’étranger. Toutes les entreprises et tous les organismes rencontrés lors de cette étude, ont à déplorer plusieurs départs parmi leurs meilleurs éléments. Pour conserver leurs ingénieurs, les dirigeants doivent réajuster le niveau des salaires. Mais, de l’avis de tous, le meilleur moyen pour conserver un bon employé est de lui offrir des perspectives professionnelles intéressantes et valorisantes. 3.2.7 Accès aux TIC coûteux La « démocratisation » de l’accès aux TIC semble être l’un des principaux enjeux d’un développement réussi dans le secteur des TIC. Car, pour l’Algérien moyen, le coût d’accès aux nouvelles technologies est encore trop élevé. Un équipement informatique standard coûte près de cinq fois le salaire mensuel moyen15. Tout compris, l’accès domestique à Internet (équipement téléphonique et informatique, abonnement, coût des communications, etc.) revient à environ 150.000 dinars, d’après le Comité de Pilotage de la société de l’information. Le risque est grand, aujourd’hui, que le « fossé numérique» ne se creuse si on ne diminue pas les coûts associés aux TIC. La société de l’information « à deux vitesses » menace également le secteur privé, avec d’un côté, de grandes firmes équipées d’un Intranet, et de l’autre des PME-PMI isolées.

4 PERSPECTIVES DE CROISSANCE

L’impact sur la croissance algérienne de la diffusion et de l’utilisation efficace des TIC devrait être similaire à celui de la plupart des pays plus avancés, où il représente entre 4 et 8 % du PIB. En Algérie, les revenus du secteur des TIC représentent environ 0,9 % du PIB, impliquant une consommation moyenne annuelle d’environ 16 dollars US par habitant en 2001. Cette évaluation est évidemment très en dessous du potentiel qui se réaliserait si la transition à l’économie basée sur l’information se révélait un succès. Avec la libéralisation du secteur des télécommunications, les revenus du secteur pourraient atteindre 1,1 milliard de dollars US en 2003, soit 1,9 % du PIB ou une moyenne de 35 dollars US par habitant. Nos estimations pour 2007 sont : a) 2,75 milliards de dollars US pour la valeur du marché des TIC, b) une moyenne de dépenses par habitant de 35 dollars US, et c) 4,1 % du PIB. Cependant, la promotion de l’utilisation des TIC en Algérie ne devrait pas se limiter à une diffusion passive de l’infrastructure, mais devrait plutôt faire partie d’une stratégie visant à améliorer les procédures et l’efficacité des entreprises et des administrations. Pour ce faire, les autorités devraient mettre en œuvre des programmes encourageant l’intégration effective des TIC dans les processus de production et de gestion. La priorité devrait être donnée à des programmes visant à renforcer l’utilisation des TIC dans les entreprises et les institutions. La diffusion des nouvelles technologies dans les ménages ou auprès des consommateurs individuels pourrait suivre dans une seconde phase.

5 PROCHAINES ETAPES

Plusieurs déclarations d’intention ont été exprimées, ces deux dernières années, quant au développement d’un secteur des TIC dynamique en Algérie. Mais la capacité des gouvernants à mettre en œuvre les réformes en temps voulu et de manière efficace reste un problème. En formulant les recommandations qui suivent, nous avons essayé de tenir compte autant que possible de cette réalité. Nous avons apporté une attention particulière aux trois principaux points faibles de l’appareil de décision de l’État, à savoir : 15 Environ 50,000 DA pour un ordinateur sans les accessoires.

XII

• l’absence d’un leadership politique permanent en faveur des réformes ; • la présence et l’influence de groupes de pression extrêmement puissants ; • la faible capacité des institutions publiques à piloter et à mettre en œuvre efficacement des

réformes complexes. Le plan d’action qui suit offre un ensemble de recommandations qui pourraient être mises en oeuvre par le Gouvernement algérien. Ces recommandations comprennent des mesures de politique économique et sociale que l’on estime nécessaires pour démarrer la transition et la transformation en société de l’information. Elles visent également à représenter une plate-forme à partir de laquelle le Gouvernement peut articuler une stratégie plus détaillée. La première priorité est d’établir une stratégie de développement cohérente. Ceci implique de renforcer la légitimité politique du projet en lui donnant un statut de haute priorité nationale. Il sera nécessaire de définir un ensemble d’outils de suivi et d’évaluation. Il faudra également établir un observatoire indépendant. La deuxième priorité sera de compléter le cadre juridique et réglementaire en vue de développer des infrastructures d’information avec une participation accrue du secteur privé. Plusieurs réglementations devront être modifiées ou adoptées pour créer un environnement facilitant le développement du commerce électronique et des services de gouvernement en ligne, ainsi que pour attirer les multinationales impliquées dans les TIC. En parallèle, on devrait s’efforcer d’améliorer l’application de ces réglementations afin d’établir la confiance des consommateurs à l’égard des transactions électroniques. Il conviendra également de renforcer l’indépendance de l’ARPT pour clarifier davantage le cadre réglementaire et consolider la prédictibilité à l’intention des investisseurs potentiels. En particulier, la question de la responsabilité des FSI, lorsqu’ils hébergent des sites ou des contenus illégaux, devrait être éclaircie après un processus préalable de consultation ouverte avec le secteur privé. Enfin, le mode de gestion des noms de domaine nationaux (le suffixe « .dz ») devrait être amélioré afin d’assurer l’efficacité et la transparence du processus d’attribution. La troisième priorité sera d’encourager la diffusion et l’utilisation des TIC, et plus particulièrement la connectivité, au sein des administrations publiques, dans le monde l’entreprise et parmi le grand public. La réussite de cette étape sera conditionnée par la mise en œuvre opportune de la libéralisation du secteur des télécommunications. Parallèlement à la mise en place d’un cadre réglementaire favorable à la libéralisation du marché, des initiatives visant à encourager l’utilisation des TIC dans les entreprises (PME en particulier) et les administrations publiques sont la condition préalable à un changement progressif vers une société basée sur l’information. Il faudrait envisager d’offrir aux petites entreprises des incitations spécifiques pour qu’elles modernisent leurs systèmes de gestion et d’information, et pour qu’elles établissent des installations de communication modernes au moyen d’Intranets. De même, des applications de gouvernement en ligne devraient être développées aux niveaux local et central. Ceci implique de multiplier les points d’accès à Internet à travers le pays, de familiariser davantage la population à l’utilisation des TIC, et d’apporter un soutien aux programmes de connexion des ménages. La capacité des différentes administrations à offrir des informations d’ordre institutionnel ou pratique sur des sites Internet publics stimulera la création d’une stratégie de gouvernement en ligne. Enfin, l’usage des nouvelles technologies ne pourra se répandre qu’après un important effort de diffusion à tous les niveaux du système éducatif. Pour que les infrastructures de TIC soient utilisées de façon productive, il est nécessaire de mettre en place des programmes de formation des enseignants. Les enseignants, en particulier ceux des écoles primaires et secondaires, ont besoin d’être préparés à l’utilisation des nouvelles technologies et d’apprendre comment les intégrer dans leurs programmes éducatifs. Sans un effort préalable de formation à grande échelle, les programmes éducatifs visant à étendre les TIC risquent de ne pas être productifs. Toutefois, le programme de formation des enseignants n’éliminera pas les autres obstacles auxquels reste confronter le système éducatif algérien (conditions de travail difficiles et faibles salaires des enseignants).

XIII

Certes, la faible connectivité des établissements scolaires et universitaires est un réel obstacle au développement de la société de l’information. Pour y remédier, les autorités ont engagé un vaste programme de connectivité pour les écoles, les lycées et les universités. Toutefois, il est essentiel que ces importants investissements fassent partie d’une stratégie soutenable dans le long terme. Cette stratégie doit tenir compte des coûts de maintenance, de la rapide obsolescence des technologies modernes ainsi que de la nécessité de moderniser régulièrement les systèmes et de recycler le personnel. Dans cette perspective, plutôt que de s’engager par simples contrats d’achat, les Ministères de l’Éducation nationale et de la Formation professionnelle pourraient lancer des appels d’offres pour externaliser l’installation, la gestion, l’entretien et le renouvellement réguliers des ordinateurs et de l’accès Internet des écoles, des lycées, des universités et des centres de recherche. Cela contribuerait également à construire une passerelle entre les domaines de l’éducation et de la recherche et le monde de l’entreprise. La réforme du secteur de l’éducation conditionne la réussite de la diffusion des TIC en Algérie. Les efforts prévus pour intégrer les TIC dans cette réforme auront plusieurs bénéfices importants.

6 PLAN D’ACTION

Recommandations Actions Entités responsables Étapes Date visée Commen- taires

1- Donner une structure de gestion et une légitimité politique au programme SI

Gouvernement MPTIC

- Mettre en oeuvre les recommandations du Rapport d’octobre 2001 - Rétablir un Comité de Pilotage

Immédiat

2- Préparer le programme SI

Comité de Pilotage - Conduire des travaux de recherche complémentaires - Spécifier les indicateurs de suivi - Organiser les processus consultatifs - Valider le programme

Court terme

1– Définir une stratégie cohérente pour le programme de société de l’information (SI)

3- Suivre les tendances nationales et internationales

Créer un observatoire TIC au sein du MPTIC

- Suivre la mise en place du programme - Suivre et passer en revue les tendances internationales - Publier un rapport trimestriel

Immédiat

1- Renforcer l’índépendance de l’ARPT et étendre son mandat aux nouvelles réglementations concernant les infrastructures TIC

Gouvernement, Parlement - Amender les dispositions de nomination et de renvoi de la loi 2000-03

Court terme 2- Renforcer le cadre réglementaire et accélérer la libéralisation du marché des télécoms

2 – Promouvoir la concurrence basée sur l’infrastructure

Gouvernement, ARPT - Permettre aux entreprises publiques (Sonelgaz, TDA, Sonatrach, etc.) de revendre la largeur de bande inutilisée en éditant des réglementations spécifiques - Promouvoir l’accès Internet à travers la distribution par câble

Court terme

XIV

Recommandations Actions Entités responsables Étapes Date visée Commen- taires

3- Remettre à jour la législation sur la propriété intellectuelle et renforcer son application pour juguler la piraterie de logiciels

Gouvernement, Parlement - Amender la législation existante sur la propriété et promulguer des règlements d’application - Renforcer la capacité des entités réglementaires chargées de la propriété intellectuelle (ONDA, ARPT, INPI) - Renforcer la capacité de politique et désigner une équipe spéciale pour combattre la piraterie

Moyen terme

4- Créer un mécanisme de certification de qualité pour les prestataires de services TI

Gouvernement (MPTIC) et associations de fournisseurs TI et groupes d’utilisateurs

- Préparer une charte de qualité pour les professionnels TI - Établir un mécanisme de certification

Moyen terme

5- Promulguer une réglementation sur le cryptage, la sécurité et les données personnelles pour permettre les transactions électroniques (commerce et gouvernement en ligne)

Gouvernement, Parlement Consultations avec des acteurs-clé (société civile, professionnels)

- Préparer un projet de législation ou des réglementations sur les aspects principaux des transactions électroniques. - Organiser les processus consultatifs avec les professionnels et acteurs-clé concernés - Finaliser les avant-projets et les soumettre au Parlement

Moyen terme

3- Promouvoir l’utilisation des TIC dans l’administration publique, les entreprises et la société civile

1- Promouvoir l’utilisation des TIC dans l’administration publique

Gouvernement et chaque ministère. Coordination par le MPTIC

- Le Gouv. prépare un plan de modernisation de la gestion interne et du système d’information y compris déploiement de réseaux d’entreprise et Intranet - Diffuser l’usage du courrier électronique dans les agences du Gouv. - Cabinet valide un plan pluriannuel de modernisation du réseau de communication et du système d’information du gouvernement - Développer des applications pilotes de gouvernement en ligne - MPTIC assure la coordination générale et l’atteinte des cibles désignées

Moyen et long termes

XV

Recommandations Actions Entités responsables Étapes Date visée Commen- taires

2- Éliminer les droits de douane sur les TIC et mettre en oeuvre des incitations fiscales pour les petites entreprises

Gouvernement Ministère des Finances et MPTIC en consultation avec des professionnels et groupes d’utilisateurs

- 0 % droits de douanes sur logiciels, ordinateurs et équipement télécom pour les ménages et les écoles - Financement préférentiel pour les ménages qui acquièrent un ordinateur - Incitations fiscales ciblées aux PME pour faciliter la formation de personnel et l’accès aux services de consultation en TIC. - Eviter les subventions de capital direct

Moyen terme Une analyse extensive de l’impact fiscal devrait être préparée avant l’appro-bation de ces mesures.

3- Multiplier les points d’accès à Internet dans tout le pays

FSI - Le Gouvernement conçoit et met en oeuvre un schéma OBA pour soutenir le déploiement des points de présence Internet par les FSI dans les régions non économiquement viables - L’ARPT met en oeuvre le schéma OBA - L’ARPT propose et finance des tarifs Internet moins chers pour les ménages à travers le fonds pour l’accès universel

Moyen terme

4- Encourager les partenariats entre entreprises TIC algériennes et étrangères

Autorité du cyberparc de Sidi Abdallah

- Promouvoir les programmes de formation et d’échange - Réduire la bureaucratie pour la création de sociétés à risques communs - Améliorer les installations de transport international.

Moyen terme

4- Diffuser les TIC dans les secteurs de l’éducation et de la recherche

1- Concevoir et lancer des programmes spécifiques de formation en TIC

Firmes TIC, Ministères de l’Éducation, de la Formation Professionnelle, et MPTIC

- Moderniser et élargir le champ d’action des instituts de formation existants spécialisés en TIC - Adapter les curricula aux besoins du marché en termes de qualifications et volumes - Former les enseignants, particulièrement de primaire et de secondaire - Mettre des incitations en place pour encourager l’inclusion des TIC dans les curricula.

Court terme

XVI

Recommandations Actions Entités responsables Étapes Date visée Commen- taires

2- Améliorer la connectivité des écoles et des universités

Ministères de l'Éducation, de la Formation Professionnelle et de l’Éducation Supérieure

- Concevoir un schéma OBA aboutissant à des appels d’offres pour externaliser la mise en œuvre du programme - Externaliser l’informatisation et la connectivité auprès de sociétés privées et spécialisées dans ce domaine.

Moyen terme

3- Encourager la recherché et l’innovation TIC

Ministère de la Recherche, MPTIC et agences spécialisées (ANVREDET, ANDRU…) et Cyberparc de Sidi Abdallah

- Etablir des installations d’incubation à court terme pour aider les start-ups - Promouvoir les échanges entre les entreprises et les instituts de recherche (internats, associations) - Etablir un programme de dons pour de telles opérations

Court et moyen termes

4- Créer des évènements festifs à l’échelle du pays ayant pour thème l’Internet et la société de l’information

MPTIC - Organiser un évènement national annuel sur l’Internet (fête de l’Internet) - Organiser des concours de projets TIC innovants donnant droit à des bourses

Immédiat

5- Soutenir des centres multiservices TIC

Gouvernements locaux et communautés

- Favoriser le contact avec l’Internet - Fournir la formation de base à l’utilisation de logiciels - Fournir l’accès aux applications de gouvernement en ligne disponibles

Court et moyen termes

INTRODUCTION : OBJECTIFS DE LA NOTE

L’essor des technologies de l’information et de la communication est devenu, depuis une dizaine d’années, un enjeu majeur dans les pays en voie de développement pour accompagner, accélérer la modernisation de leur économie et tenter de combler les écarts qui se creusent avec les pays développés. Pays riche en Afrique grâce à ses ressources en hydrocarbures, pays jeune et peuplé, l’Algérie est particulièrement concernée par cette évolution. Conscientes de cet enjeu, et désireuses de permettre à leur pays de s’engager résolument sur la voie de la société de l’information, les autorités algériennes multiplient les initiatives relatives au développement de l’utilisation des technologies de l’information. Cette volonté apparaît d’autant plus nécessaire que le pays accuse un important retard par rapport aux pays voisins en ce qui concerne la diffusion et l’utilisation de la téléphonie fixe, de la téléphonie mobile et de l’Internet. A la demande des autorités algériennes, la Banque mondiale a engagé une réflexion sur les perspectives de transition de l’Algérie vers une économie de l’information. Ce travail s’est déroulé en quatre phases.

• A l’issue d’une première série d’entretiens avec les autorités en novembre 2000, une équipe de la Banque mondiale16 a suggéré une méthodologie pour l’organisation et l’animation de la réflexion autour du développement en Algérie d’une société de l’information. La méthodologie retenue était articulée sur trois axes : a) entretenir un dialogue permanent avec le Ministère des Postes et Télécommunications, b) identifier les priorités nationales et définir les initiatives envisagées à court et moyen terme, et c) établir un Comité de Pilotage pour développer des ateliers et conduire l’adoption d’un plan national pour le développement d’un secteur des technologies de l’information et de la communication. Une note préliminaire sur une stratégie de développement des TIC en Algérie17 approfondit cette discussion initiale. Cette note fut discutée avec les autorités au cours d’une mission organisée en octobre 2001 ; ses principales conclusions ont été validées.

• Parallèlement, le Comité de Pilotage constitué par le Gouvernement a rédigé un rapport sur l’état actuel de la situation et sur les perspectives de développement d’une société de l’information en Algérie. Ce rapport18 a été remis au Gouvernement en octobre 2001, mais n’a pas connu de véritable mise en œuvre.

• Enfin, le cabinet Louis Lengrand et Associés (LL&A)19 a réalisé pour le compte de la Banque mondiale une étude sur l’état de développement de l’offre des produits et services TIC en Algérie. Il s’agissait de cerner la structure de l’offre, d’identifier les acteurs-clé, d’appréhender l’environnement économique du secteur, d’évaluer le degré de compétence des différentes personnes employées dans le secteur ainsi que de mesurer la capacité du système éducatif à mettre les compétences désirées sur le marché. Le cabinet LL&A a également formulé des propositions de

16 Cf. aide-mémoire de la mission conduite en novembre 2000. Cette mission comprenait : Paul Noumba, Mohammad

Mustafa, et Yann Burtin. 17 Note rédigée par Anupama Dokenyia et Paul Noumba. 18 Rapport sur la société de l’information en Algérie, octobre 2001. 19 Dans ce but, deux consultants de LL&A se sont rendus à deux reprises en Algérie, du 22 au 27 février et du 8 au 13

mars 2002, afin d’interviewer les principaux acteurs publics et privés dans le domaine des TIC. Une soixantaine de personnes ont été rencontrées, appartenant à différentes strates de l’économie et de la société algérienne : représentants des ministères, d’organismes publics, de centres de recherche, d’établissements d’enseignement, entrepreneurs privés et publics, fournisseurs d’accès à Internet, représentants de sociétés étrangères, etc.

2

recommandations devant faciliter la mise en place d’une stratégie d’action globale et cohérente, et concluait son rapport en ces termes :

« Disposant d’une économie en transition et sur le point de s’ouvrir progressivement aux mécanismes de marché, avec une population jeune, curieuse d’être au courant de ce qui passe à l’extérieur et avide de consommer de nouveaux modes de communication, l’Algérie dispose d’atouts évidents pour réussir le passage à une société de l’information. Mais il reste encore à définir une stratégie globale et cohérente afin d’aménager un environnement économique favorisant l’initiative privée et de permettre au plus grand nombre d’Algériens l’accès aux outils modernes de communication 20». Une version antérieure de cette note consolide en un seul document les principaux enseignements accumulés tout au long de ce processus. Son objectif à court terme était d’alimenter les discussions qui ont eu lieu lors des assises du « Symposium International sur les TIC et la Société de l’Information d’Alger » qui s’est déroulé du 9 au 11 décembre 2002. Le second objectif était de contribuer à la vaste réflexion engagée par les autorités et les divers partenaires au développement pour diversifier l’économie algérienne et la rendre moins vulnérable aux fluctuations des cours du pétrole. La suite de la présente note est organisée en cinq chapitres. Le premier chapitre commence par définir ce que recouvre le terme « technologie de l’information et de la communication », et délimite les contours donnés au concept de « nouvelle économie » par opposition à celui de « société de l’information » utilisé par le Gouvernement algérien. Le second chapitre procède à une revue approfondie du secteur des TIC en Algérie. Il analyse la démarche de réforme du secteur des postes et télécommunications, ainsi que les initiatives engagées par le Gouvernement pour promouvoir une société de l’information. Le chapitre se termine par une analyse des forces et des faiblesses des acteurs-clé du secteur. Le troisième chapitre pose un regard sur les choix stratégiques qui s’offrent à l’Algérie dans la perspective de développer une société de l’information. Mais malgré la présence de nombreux atouts en faveur d’une transition rapide de l’Algérie vers une société de l’information, de nombreux obstacles et entraves devront être surmontés. Le quatrième chapitre examine les options qui s’offrent à l’Algérie pour le développement et la diffusion des TIC, ainsi que leurs implications pour l’économie algérienne. Les conclusions proposent un ensemble de directives et d’actions à entreprendre pour développer un secteur TIC. Elles sont centrées sur des mesures spécifiques qui permettraient à l’Algérie de canaliser plus efficacement les efforts individuels et les initiatives des secteurs public et privé. Une bibliographie est fournie à la fin du document. L’Annexe présente une étude de marché comparative.

20 Louis Lengrand et Associés : « Analysis of Strengths, Weaknesses, Opportunities and Threats on the IT Market in Algeria »,

Versailles, 19 avril 2002.

3

CHAPITRE 1 : ÉLÉMENTS POUR UNE VISION STRATÉGIQUE

En Algérie le secteur privé reste faible et les efforts pour réduire la dominance du secteur public dans l’économie n’ont pas encore porté leurs fruits. Quelles sont alors les perspectives de réussite de l’Algérie sur le marché international ? Saura-t-elle rendre son économie plus compétitive ? Le présent rapport suggère qu’une réforme réussie dans le secteur des télécommunications entraînerait la création d’un secteur TIC dynamique et catalyserait un processus général de transformation de l’économie. Comme il a été observé dans des pays qui ont déjà vécu cette transformation, grâce à la promotion d’une utilisation efficace des TIC, l’Algérie pourrait développer de nouvelles opportunités commerciales et améliorer la compétitivité de son économie. Le défi général que les autorités algériennes doivent surmonter découle de la globalisation des marchés et des économies nationales. En d’autres termes, reconnaissant que l’économie globale se transforme rapidement à travers l’émergence constante de nouvelles technologies qui modifient les relations entre les entreprises et les autres entités, puis influence l’organisation des gouvernements, des entreprises et des sociétés, le Gouvernement algérien n’a pas d’autre alternative que de préparer son économie et sa société aux transformations radicales induites par le passage à la nouvelle économie. Bien que les changements escomptés induisent des effets externes positifs dans les pays qui sont capables d’utiliser effectivement les technologies de l’information et de la communication, ceux-ci posent également la question de la survie des pays qui ne pourront pas s’y adapter. La suite de ce chapitre est organisée comme suit. La première section fournit une définition des technologies de l’information et de la communication et de l’envergure de leurs marchés. La section deux discute les bénéfices économiques découlant de l’utilisation efficace et généralisée des TIC. Ces bénéfices proviennent de : a) gains de productivité transmis aux activités économiques utilisant les TIC pour réorganiser leur processus, opérations commerciales et innover, b) coûts de transactions qui se trouvent en général réduits, ce qui conduit à des gains de productivité supplémentaires. La section trois est consacrée à une courte discussion sur l’expérience internationale pertinente, et la section quatre conclut en fournissant un résumé des leçons qui en découlent.

1 DEFINITION DES TECHNOLOGIES DE L’INFORMATION ET DE LA COMMUNICATION

Nous définissons les « Technologies de l’Information et de la Communication » (TIC) comme un terme générique recouvrant à la fois la technologie de l’information (équipements informatiques et logiciels) et les équipements et services de télécommunications. Le marché TIC fait référence à l’ensemble des industries d’équipement informatique (ordinateurs, équipement de communication, équipement de bureau, transmission de données et équipement de réseau), des logiciels, des technologies de l’information et des services de télécommunications. Nous n’incluons pas la radiodiffusion dans notre définition formelle des TIC malgré sa composante télécommunications, à savoir l’utilisation du spectre et de l’infrastructure de télécommunications pour délivrer des services de contenu21. De même, nous n’étendons pas la définition des TIC aux activités postales, mais discutons cependant dans la présente note le rôle important que pourrait jouer le secteur postal dans la promotion de l’utilisation des TIC et la réduction du fossé numérique en Algérie. En 2002, le marché mondial des TIC était estimé à environ 2,365 milliards €, dont 804,1 milliards € pour le marché américain, 283,8 milliards € pour celui du Japon et 641 milliards € pour le marché de l’Europe occidentale. 21 Cependant, les acteurs-clé des industries postale et de divertissement sont passés en revue dans le Chapitre 3 de la

présente note, en vue d’identifier des véhicules et processus permettant la diffusion rapide des TIC en Algérie.

4

Décomposé en ses différents segments (équipements, logiciels, services de TI et services de télécommunications22), le marché de l’Union européenne montre la répartition suivante :

• équipement TIC : 150 milliards € (28 %) • produits logiciels : 65 milliards € (10 %) • services TI : 140 milliards € (22 %) • services de télécommunications : 275 milliards € (40 %).

Le graphique suivant montre la croissance par segment du marché des TIC en Europe occidentale. Le segment de l’équipement demeure en récession. Les segments de TI et de services de télécommunications sont le principal moteur de croissance du secteur. En 2002, le taux moyen de croissance du secteur était d’environ 1,1 %, contre 4,1 % l’année précédente.

Figure 3 : La croissance du marché des TIC dans l’UE

Western European ICT market growth by segment, 2001-2003, in %

Source: EITO Update 2002 in cooperation with IDC Market value 2002: 641 billion Euro

-5,1

-6,8

-1,5

3,4

2,2

3,0

9,5

3,7

4,6

9,0

4,9

5,44,1

1,1

3,2

-10

-5

0

5

10

Total ICTequipment

Software products IT services Carrier services Total ICT

2001 2002 2003

En termes de chiffres par habitant, ces segments de marché représentent respectivement : a) 678 € pour les services de télécommunications, b) 464 € pour l’équipement TIC, c) 164 € pour les logiciels et d) 363 € pour les services de TI. Autrement dit, chaque citoyen de l’Union européenne alloue approximativement l’équivalent de : a) 2,42 % de son revenu annuel à la consommation des services de télécommunications, b) 2,03 % pour l’acquisition des équipements TIC, c) 0,55 % pour les logiciels, et d) 0,98 % du PIB pour la consultation des services d’information. Avec un revenu annuel moyen d’environ 1 652 €, chaque citoyen de l’Union européenne alloue approximativement 7,6 % de son revenu à la consommation de TIC. Ce chiffre fournit un repère pour comparer le statut de développement du marché des TIC. De plus, une étude faite sur des données de 1998 montre que le secteur des TIC dans l’Union européenne compte pour :

• 2 % des entreprises, soit 390 000 firmes, dont 340 000 dans le secteur des services, 22 Les services de télécommunications sont définis comme les sociétés qui fournissent des services de communications,

y compris service vocal, enregistrement et transmission de données, vidéo et facsimilé.

5

• 2,8 % du marché de l’emploi dans l’Union européenne, représentant 4,3 millions de personnes employées dont 2,7 millions dans les services (y compris 1 million dans les services de télécommunications),

• 4,1 % du PIB de l’Union européenne sont représentés par la valeur ajoutée dans le secteur des TIC. En Finlande et en Irlande, le taux est de 6,5 % et 6,4 % du PIB respectivement, tandis qu’il n’est que de 2,4 % en France.

Tableau 1 : Comparaison de la proportion du secteur des TIC dans l’économie totale aux États-

Unis, au Japon et dans l’UE

Secteur TIC total Économie totale

Part du secteur TIC dans

l’économie totale (%)

UE-15 É-U Japon UE-15 UE-15 Nombre d’entreprises (1000) 389 173 (a) 44 (a) 19370 2,0 Nombre de personnes employées (1000) 4300 4521 (a) 2060 (a) 152500 2,8

Valeur ajoutée au coût facteur (en milliards €) 315 512,8 (a) 182,9 (a) 7616,9 (b) 4,1

a) Données OCDE pour 1997. USA, Japon – nombre d’établissements au lieu d’entreprises, b) Produit Intérieur Brut. Source: Commission européenne, Commission Staff Working Paper: European Competitiveness Report 2000. Les chiffres de création d’emploi en 1998 en Europe montrent que les services de télécommunications représentent environ 24 % de l’emploi total dans le secteur des TIC, dont un peu plus de 63 % proviennent des services, et 37 % de la production manufacturière. La contribution du secteur à l’emploi total varie selon les pays, atteignant jusqu’à 3 % dans des économies plus avancées, comme indiqué dans le graphique ci-dessous.

Figure 4 : Emploi dans le secteur des TIC en tant que pourcentage du marché total de l’emploi en Europe (1998)

4.54.3

4.1 4.1

3.12.8 2.7 2.6 2.6 2.5 2.4 2.3

2 2

1.5

3.33.1

0

0.5

1

1.5

2

2.5

3

3.5

4

4.5

5

Pays

Ireland

e

Royaum

e-Uni

Finlan

de

Luxem

bourg

Autrich

e

Pays-B

as

Belgiq

ueFra

nce Italie

Allemagn

e

Danemark

Espagn

e

Portug

al

Etats-U

nis Japon

Source : Données Eurostat et OCDE dans Richard Deiss, Information Society Statistics, Commission européenne DG Société de l’information, 2001, p.3.

6

Avec l’adoption largement répandue d’Internet, l’usage de l’ordinateur est devenu omniprésent et a aidé à la transformation et à la rationalisation des processus de production des entreprises et des gouvernements.

2 EXPLORATION ET MISE EN EXPLOITATION DES NOUVELLES TECHNOLOGIES23

Le changement technologique d’aujourd’hui est sans précédent par son rythme et son envergure. Les technologies de l’information et de la communication (TIC) sont au cœur de ce changement, avec des avancées spectaculaires. En 1930, une minute d’appel téléphonique de New York à Londres coûtait l’équivalent de 300 dollars US d’aujourd’hui ; actuellement, le même appel ne coûte que quelques centimes. Le coût de 1 mégabit de puissance de processeur est tombé de 7 600 dollars US en 1970 à 0,17 dollar en 1999, soit une baisse de 99,9 % durant cette période. Le coût de transfert d’un fichier d’un trillion de bits est tombé de 150 000 dollars US à environ quelques centimes au cours de la même période. Tout ceci constitue une véritable révolution dont les bénéfices étaient réservés jusqu’à récemment aux pays développés et industrialisés. Dans le passé, les erreurs forçaient les grandes entreprises à re-traiter environ le quart de leurs commandes. Le commerce électronique permet maintenant de vérifier que les commandes sont cohérentes, et que les commandes reçues concordent avec les factures éditées et envoyées aux clients. C’est ainsi que General Electric a pu réduire substantiellement les erreurs de commande, et économiser 5 à 20 % des coûts initialement induits par les erreurs de traitement affectant la chaîne de commercialisation. Cisco Systems, le plus grand fournisseur mondial de routeurs pour le trafic Internet, a transféré 70 % de son « customer care » en ligne, éliminant ainsi 250.000 appels téléphoniques par mois et économisant plus de 500 millions de dollars US. Ce qui représente environ 17 % de ses coûts opérationnels. Aux États-Unis, la valeur moyenne des stocks représente environ 2,3 % des ventes annuelles (non agricoles) et 4,2 % des ventes de biens finaux. En effet, chaque stade de la chaîne de valeur se caractérise généralement par un niveau élevé de stocks, à savoir : 37 % au niveau de la fabrication, 25 % au niveau des grossistes, et 27 % au niveau des détaillants. L’utilisation efficace et généralisée des applications de commerce électronique peut contribuer à la réduction drastique des coûts de stockage. Un autre changement est lié à l’émergence de grappes industrielles constituant des plates-formes regroupant autour d’un pôle de compétence des entreprises, principalement petites et moyennes, dont les activités sont complémentaires. Les effets externes découlant de cette agglomération de compétences se traduisent par la disponibilité de l’information, la proximité de pôles de fournisseurs, des clients, et des employés qualifiés. C’est ainsi que de nombreuses grappes industrielles sont apparues dans le domaine de la haute technologie. Un certain nombre de ces grappes industrielles compétitives existent aussi bien dans les pays développés que dans les pays en développement (Malaisie, Inde, Chine, Brésil, Costa Rica, etc.). En dehors de l’augmentation massive de l’utilisation des TIC, le contenu d’information des activités industrielles s’accroît. Par exemple, environ la moitié de la valeur d’une nouvelle voiture réside dans son contenu d’information (conception, gestion des processus, commercialisation, ventes, etc.). Les TIC sont maintenant omniprésentes dans les entreprises et affectent les méthodes de travail, les aménagement des usines et les systèmes de contrôle de la production et de stockage. L’organisation interne des entreprises doit donc être revue et adaptée pour valoriser les gains de productivité induits par l’utilisation des TIC, laquelle facilite également la gestion des opérations à longue distance. A cet égard, les TIC permettent à l’entreprise de séparer les fonctions et processus, en les localisant, pratiquement sans considération de distance, là où les coûts, l’efficacité et les besoins du marché l’exigent.

23 La presénte section s’inspire de : ONUDI, Industrial Development Report for 2002/2003 : Competing through Innovation and

Learning , 2002.

7

Par exemple, une entreprise peut concevoir un semi-conducteur aux États-Unis avec l’aide d’une filiale en Inde, acheter la tranche de silicone à une fonderie dans la province de Taiwan en Chine, assembler et tester la puce aux Philippines et utiliser une entreprise indépendante de logistique pour expédier le produit en Allemagne et le commercialiser dans toute l’Europe. Les facteurs importants pour les investisseurs utilisant de nouvelles technologies et cherchant des localisations compétitives sont : qualifications spécialisées, infrastructure moderne, institutions fortes, faibles coûts de transaction, fournisseurs locaux efficaces, fournisseurs locaux en services de soutien.

Encadré 1 : Impact des TIC sur les coûts de transaction

L’utilisation des TIC peut avoir un impact positif sur les revenus d’affaires en réduisant les durées et coûts de transaction. Ceci est l’exemple suivi par Dell, aujourd’hui l’une des plus grandes entreprises d’informatique. Le site www.dell.com a été lancé en 1994. L’année suivante, Dell devint la première entreprise à enregistrer 1 million de dollars US pour ses ventes en ligne.

Aujourd’hui, Dell exploite l’un des plus importants sites de commerce électronique au monde. Le concept de base derrière ceci est la relation directe avec le client, qui permet à l’entreprise de mieux comprendre les besoins de ses clients et de fournir les solutions informatiques les plus adaptées. Ce modèle de commerce direct élimine les intermédiaires qui ajoutent des coûts financiers non nécessaires, et améliore la compréhension des attentes du consommateur. Le « modèle direct » permet à l’entreprise de personnaliser ses produits afin de satisfaire les préférences des clients, et de mieux s’adapter aux changements technologiques que ses compétiteurs.

Dell accroît de plus en plus ses gains liés à l’utilisation de l’Internet à travers la refonte de toute son organisation, y compris celle des passations de marchés, ou celle du service de gestion clientèle. Sur le site www.dell.com, les clients peuvent passer en revue, composer des systèmes et en vérifier les prix de la ligne entière des produits DELL. Ils peuvent en outre commander des systèmes en ligne, et suivre leur commande depuis la fabrication jusqu’à son expédition. Sur le site www.valuechain.dell.com, Dell partage des informations avec ses fournisseurs sur des sujets variés, y compris l’état des stocks et la qualité des produits. Dell utilise également l’Internet pour délivrer des services au client leaders dans l’industrie. Par exemple, environ 113.000 entreprises et clients institutionnels dans le monde utilisent les pages de www.Premier.dell.com pour faire commerce en ligne avec l’entreprise. L’impact des TIC est plus important dans les économies avancées, mais il est également significatif dans les activités courantes, à petite valeur ajoutée, qui prédominent dans les pays en développement. Les TIC ont aussi un impact considérable sur les performances de l’économie nationale, bien qu’il n’y ait pas de consensus quant à leurs effets précis24s. Les économies en développement ayant une forte croissance en consommation de TIC (Inde, Corée, Taiwan, Thaïlande, etc.) semblent bénéficier d’un PIB en nette croissance.

Encadré 2 : Utilisation innovante des TIC dans les pays en développement

Dans la zone rurale du Sud du Ghana, les stations d’essence passent leurs commandes par téléphone, une tâche qui obligeait antérieurement à voyager jusqu’à Accra. Au Zimbabwe, une entreprise a généré 15 millions de dollars US en faisant de la publicité sur Internet. Dans les montagnes de la République Démocratique du Peuple du Laos, les conducteurs de caravanes de yaks utilisent leurs téléphones cellulaires pour déterminer à l’avance le meilleur itinéraire pour apporter leurs produits au marché. Les pêcheurs des côtes de Kerala, en Inde, appellent depuis 7 km en haute mer pour déterminer quels sont les marchés payant le meilleur prix, et y débarquer directement leur pêche.

Source : Baxter, Perkin et Mulligan, (2001, Background Paper) dans ONUDI, Industrial Development Report 2002/2003: Competing Through Innovation and Learning, Vienne, 2002.

24 L’impact des TIC sur le développement provient de l’augmentation des gains de productivité et de la baisse des

coûts de transaction pour les entreprises et les gouvernements. Une part significative de l’impact économique provient également de l’émergence de nouvelles entreprises, ou d’entreprises qui n’auraient pas émergé sans l’utilisation omniprésente des TIC. L’impact de la croissance TIC pourrait donc être capté à travers des outils économiques plus ou moins standards. De même, l’impact des TIC sur la pauvreté est probablement mieux capté à travers des politiques de redistribution appropriées et efficacements mises en œuvre par les gouvernements.

8

Lorsqu’elles sont utilisées à bon escient, les TIC peuvent créer de nouvelles opportunités pour s’instruire, commercialiser, responsabiliser les personnes. C’est en partie pour explorer ces possibilités que beaucoup de gouvernements sont en train d’adopter des politiques facilitant le développement de l’utilisation des TIC. Une incertitude demeure toutefois quant à la capacité des pays sans base industrielle à sauter les étapes et à rattraper leur retard en devenant des sociétés de l’information. L’expérience acquise jusqu’à présent indique que, dans la plupart des cas, ce sont les pays ayant relativement amorcé leur industrialisation qui bénéficient le plus du développement des TIC. L’utilisation efficace des TIC exige en effet d’importants investissements pour créer les infrastructures ainsi que la capacité de construction qui font défaut dans la majorité des pays en développement. Une masse critique de diffusion des TIC, en termes de couverture, d’adaptations organisationnelles et d’apprentissage, est donc nécessaire pour maximiser les gains de productivité qui en découlent. Redéfinir les processus, développer une nouvelle culture du monde des affaires est également nécessaire. Il est à noter que les gains de productivité proviennent souvent, non pas des technologies elles-mêmes, mais des réorganisations décidées et mises en oeuvres. Dans les pays en développement, il faut tenir compte du fait que la mise en place d’une masse critique de diffusion des TIC et des qualifications nécessaires peut prendre un certain temps.

3 IMPLICATIONS DE LA REVOLUTION APPORTEE PAR LES NOUVELLES TECHNOLOGIES

Le monde développé est-il véritablement entré dans une nouvelle économie25 durant la dernière décennie ? Le terme “Nouvelle économie” correspond à une conjonction de facteurs et de transformations. D’abord, il s’agit de la diffusion de la communication numérique concrétisée par la croissance rapide d’Internet et qui a favorisé l’éclosion de nouvelles activités et d’innombrables innovations commerciales et technologiques. Le concept de “Nouvelle économie” ferait-il ainsi référence à une évolution macro-économique en partie induite par la diffusion massive d’Internet ? De 1992 au début de l’année 2001, l’économie américaine a connu une croissance ininterrompue accompagnée d’une baisse du chômage et d’une très faible inflation. Ce phénomène nouveau a incité les macro-économistes à parler de “nouvelle économie” au sens où les cycles conjoncturels d’activité, liés aux ajustements des marchés, semblaient avoir disparu pour laisser la place à une croissance continue. Le seul problème d’après Dang Nguyen (2001) était le caractère quasi spontané du phénomène. « Pourquoi ce phénomène a-t-il mis autant de temps pour se manifester alors que l’informatique26 existe depuis 40 ans » s’interroge-t-il ? Cette explication est plausible et confirme dans une certaine mesure le paradoxe évoqué par Solow (1987) et remis en cause par de nombreux articles publiés par la suite (Oliner et Sichel, 1995 ; Gordon, 2002). Bien qu’il n’existe pas de lien de causalité formelle entre la diffusion exponentielle d’Internet et l’accélération de la croissance aux États-Unis ou en Europe, on remarque que tant que la connectivité27 à l’Internet n’existait pas, la société d’information ne pouvait pas se mettre en place. Dès que cette possibilité fut acquise, les agents économiques ont modifié leurs plans et développé progressivement une « Économie du Net » qui a servi à stimuler la croissance donnant lieu à ce que le magazine Business Week appellera en 1996 la « nouvelle économie ». Les moyens d’échange d’information comme le téléphone et les réseaux de transmission de données qui ont précédé l’Internet avaient déjà permis aux pays industrialisés d’offrir des services universels de

25 La notion de “Nouvelle Économie”a été proposée par l’hebdomadaire Business Week en 1996. (Voir Michael Mandel,

« The triumph of the New Economy », Business Week, 30 décembre 1996.) 26 Par informatique, on comprend l’utilisation des outils et systèmes informatiques par les entreprises, et les

administrations pour mieux communiquer et échanger entre elles. 27 Commerce électronique, publicité sur Internet, vente d’information digitale, et recours massif aux TIC dans la

réorganisation du travail dans les entreprises, en particulier à travers les Intranets.

9

télécommunications. Mais le principal changement introduit par l’Internet a été de supprimer la tarification à l’usage et de permettre un coût d’accès nettement plus abordable. Donc, la caractéristique principale responsable du développement d’Internet est l’utilisation de l’information pour les échanges commerciaux et la production. Cette information est devenue accessible partout et à un coût négligeable. Une informatisation inégale et coûteuse expliquerait que la diffusion de l’informatique n’a pas conduit aux gains de productivité espérés. La globalisation des activités économiques a également eu un effet direct sur d’autres secteurs de la société. Gouvernements, politiciens, société civile, syndicats, même les processus législatifs, doivent maintenant prendre la mondialisation en compte. Ainsi, à mesure que les nouvelles technologies de l’information avancent et deviennent omniprésentes, les opérations économiques et les activités en général deviennent de plus en plus basées sur la connaissance et dirigées par l’information. Le champ d’action où s’exprime cette connaissance est devenu mondial, ou global. C’est cette communauté globale basée sur la connaissance, avec ses réseaux d’information et de communication toujours plus prédominants, les nouvelles technologies qu’ils exploitent et l’information qu’ils répandent, les interrelations entre cette information, les réseaux et les différents niveaux gouvernementaux et sociaux, ainsi que la société dans laquelle ces phénomènes prennent place, qu’on appelle « Société de l’Information28 ».

4 PERSPECTIVES INTERNATIONALES

Les TIC jouent deux rôles dans le processus de croissance. Premièrement, elles contribuent lourdement à l’accumulation de capital. Deuxièmement, elles contribuent à la croissance de la productivité totale des facteurs (PTF)29. La contribution des TIC à la croissance PTF dépend à la fois des progrès technologiques dans la production des biens et services TIC et des gains d’efficacité dans les secteurs utilisant les TIC30. La mesure dans laquelle ces deux aspects déterminent la croissance PTF est encore incertaine. Le secteur de production TIC (fabrication et services) a contribué de manière considérable à la croissance de la productivité dans plusieurs pays OCDE, ainsi qu’aux États-Unis entre 1995 et 2000. Il apparaît de plus que certains services utilisant les TIC ont connu un surcroît de croissance de leur productivité au-dessus de la moyenne dans la même période. Ceci pourrait indiquer que les TIC commencent à produire des effets de retombées au-delà du secteur TIC lui-même, ce que confirment également des études faites au niveau des entreprises et des études de secteurs utilisant massivement les TIC, tels que la vente au détail, le commerce, le transport et les services financiers. L’expérience des pays ayant réussi leur transition vers la nouvelle économie confirme qu’il n’existe pas d’itinéraire unique, et que chaque stratégie nationale doit correspondre aux besoins spécifiques du pays concerné. Toutefois, on peut remarquer deux approches générales à la mise en place d’une société de l’information. Pour la plupart des gouvernements, il s’agit de promouvoir une diffusion massive des TIC pour en maximiser les effets induits, principalement sur les utilisateurs finaux. Pour d’autres gouvernements cependant, il s’agit de promouvoir la constitution d’un pôle national de compétence dans le domaine des TIC capable de satisfaire à la fois la demande intérieure et l’exportation. L’approche de diffusion des TIC met l’accent sur les effets multiplicateurs31 qui découlent de l’utilisation efficace des TIC par l’ensemble des branches d’activité en maximisant les synergies inter-sectorielles. Cette

28 Commission des Communautés européennes, Direction générale des Relations extérieures, « The Information Society

and Development », 2001. 29 Dirk Pilat et Frank Lee, « Productivity Growth in ICT-producing and ICT-using Industries : A source of Growth

Differientials in the OECD ? », DSTI DOC (2001) 4, OCDE juin 2001. 30 Dale Jorgenson, « Information Technology in the U.S. Economy », American Economic Review, Vol. 91,

No. 1, mars 2001. 31 Ses effets se manifestent à travers des gains de productivité, la réduction de coûts de transaction, la création

d’activités nouvelles.

10

approche a été choisie par l’Afrique du Sud et la Malaisie. La promotion d’une industrie de production de TIC met l’accent sur l’établissement d’un secteur TIC commercialisant des biens et des services capables de diversifier les revenus d’exportation ou de satisfaire la demande nationale. Le Costa Rica, l’Inde, et le Brésil ont choisi cette approche. Les deux approches sont loin d’être exclusives, et une stratégie nationale peut chercher à maximiser un ou plusieurs objectifs en même temps. Il est à signaler que de disposer d’un pôle de fabrication TIC n’est pas forcément une condition préalable à une transition réussie vers une économie basée sur l’information, et ceci pour trois raisons. Premièrement, la proximité des producteurs d’équipement est souvent moins importante que celle des fabricants de logiciels et des fournisseurs de services qui sont utiles aux firmes ayant besoin de qualifications particulières et de conseils pour mettre en œuvres des stratégies TIC. Deuxièmement, à cause de coûts initiaux élevés et de larges économies d’échelles32, une grande part de la fabrication d’équipements TIC est hautement concentrée, et seuls quelques pays ont les avantages comparatifs nécessaires pour réussir. La troisième et la plus importante raison est que plusieurs pays ayant développé un secteur TIC dynamique (investissements, utilisation des services et croissance élevée de la productivité) n’ont PAS de grand secteur de fabrication TIC. L’Australie en est un bon exemple33. Les gouvernements devraient résister à l’idée que le développement délibéré d’un pôle de fabrication TIC est la voie obligée pour la construction d’une société basée sur l’information et le renforcement de la croissance économique. Dans le cas de la Malaisie, la constitution d’un pôle compétitif dans le domaine des TIC avait pour but d’accélérer un processus de transformation et de mondialisation de l’économie nationale. La mise en place du « Multimedia Super Corridor »34 résulte de cette stratégie.

Encadré 3 : Typologie de stratégies nationales de développement des TIC – Costa Rica, Brésil, Malaisie, Afrique du Sud

La stratégie TIC du Costa Rica visait un objectif central : permettre la diversification de l’économie nationale à travers le développement de nouvelles sources de croissance essentiellement basées sur l’exportation. La mise en place d’un important parc technologique disposant d’un environnement d’affaires et d’une infrastructure compétitive a permis au Costa Rica d’attirer les plus grandes entreprises de technologie. Aujourd’hui le pays abrite une grande usine de production de microprocesseurs Intel qui fournit au moins un tiers des microprocesseurs Intel utilisés à travers le monde. L’installation de cette usine a entraîné dans son sillage le développement d’une véritable grappe industrielle dans le domaine (Acer, Microsoft). Plus d’un millier de SSII sont à présent installées dans le pays. Elles emploient plus d’un millier de cadres. Les exportations provenant de ce nouveau secteur ont rapidement augmenté, passant de 25 millions USD en 1997 à 200 millions USD en 2001. Enfin, les produits et services TIC représentent à présent 38 % des exportations du Costa Rica.

Pour sa part, le Brésil a choisi de consolider le développement d’une industrie nationale TIC qui soit en mesure de mieux servir son marché intérieur. Cette stratégie a démarré vers la fin des années 70 par l’intermédiaire de programmes publics visant à doter le pays d’une véritable capacité de production en électronique et télécommunications, et a été consolidée depuis avec des mesures de libéralisation de l’économie qui ont permis d’exposer les firmes brésiliennes à la compétition internationale. En 1997, le secteur des TIC a produit plus de 1,2 million de PC, soit l’équivalent de 2,5 milliards de dollars US. Compaq, Hewlett Packard et Epson ont depuis externalisé une grande partie de leur production à des unités brésiliennes. Enfin, plus de 10.000 firmes employant environ 200.000 personnes ont été créées dans l’industrie des logiciels.

32 Un exemple des coûts élevés pour créer une industrie TIC productive est le suivant : installer une nouvelle usine de

production de semi-conducteurs coûtait « seulement » environ 100 millions de dollars au début des années 80, mais jusqu’à 1,2 milliard de dollars US en 1999. (United States Council of Economic Advisors, 2001).

33 David Gruen et Glenn Stevens, « Australian Macroeconomic Performance and Policies in the 1990s », dans The Australian Economy in the 1990s (Sydney: Banque de reserve australienne, 2000).

34 Kenichi Ohmae dans son ouvrage The Invisible continent – Four strategic Imperatives of the New Economy (New York, Harper Business, 2002) offre des commentaires sur ses interactions avec le Premier Ministre de Malaisie lors de la conception de ce projet.

11

La Malaisie a choisi d’orienter sa stratégie TIC pour accélérer la transformation de son économie dans l’optique de devenir un acteur-clé sur le marché mondial. Pour ce faire, les autorités ont mis l’accent sur la modernisation des infrastructures de communication en général et sur la réalisation d’une plate-forme technologique autour de laquelle des investisseurs nationaux et internationaux pourraient s’installer et se développer. C’est ainsi que le projet de Multimedia Super Corridor (MSC) a été conçu. Les infrastructures d’accueil équipant ce corridor ainsi que son aménagement devraient coûter environ 40 milliards de dollars US. Le Gouvernement a également mis en place des incitations fiscales pour les entreprises qui consentiraient à investir dans ce corridor. Les autorités espèrent que les effets induits découlant des activités du MSC bénéficieront à l’ensemble de l’économie, ce qui facilitera l’extension progressive du corridor jusqu’aux localités les plus reculées.

Enfin, l’approche de l’Afrique du Sud a consisté à situer les TIC au centre de la problématique de développement du pays. Pour cela, la stratégie TIC conçue de manière concertée avec l’ensemble des forces vives, visait quatre objectifs globaux : (i) faciliter la création d’un environnement favorable au développement durable d’un secteur TIC dynamique, (ii) accroître l’adoption et l’utilisation des TIC pour faciliter le développement socio-économique du pays, (iii) disposer d’une main d’œuvre compétente en matière de TIC, (iv) créer une culture TIC qui favorise l’innovation et la création d’entreprises.

Source : PNUD, Creating a Development Dynamic: Final Report of the Digital Opportunity Initiative, New York, 2001, pp. 19-31. Le début des années 90 marqua le début d’une période de croissance soutenue pour les États-Unis, alors que les pays de l’Union européenne expérimentaient une croissance faible, un chômage de plus en plus élevé (environ 11% de la population active), et ce malgré une maîtrise globale des dérives inflationnistes. L’Europe perdait des parts de marché au plan international et perdait également progressivement son leadership dans le domaine des télécommunications35. En 1993, la commission européenne élabore et publie un livre blanc sur la croissance et la compétitivité de l’Europe (Rapport Delors), puis plus tard le rapport Bangeman proposant l’adoption d’un programme communautaire pour soutenir le développement d’une société de l’information [voir encadré ci-dessous].

Encadré 4 : Le concept de Société de l’Information

Lors de sa réunion à Bruxelles en décembre 1993, le Conseil de l’Europe a demandé pour sa prochaine réunion à Corfou en juin 1994 la préparation d’un rapport par un groupe de personnalités sur les mesures spécifiques devant être prises en considération par la Communauté et les États membres pour les infrastructures dans le domaine de l’information. Sur la base de ce rapport, le Conseil adopterait un programme opérationnel définissant précisément procédures d’action et moyens nécessaires.

Les recommandations au Conseil de l’Europe sur « L’Europe et la société globale de l’Information », publié le 26 mai 1994 et plus connu sous le nom de « Rapport Bangeman » introduisaient l’idée d’une « nouvelle révolution industrielle… basée sur l’information, elle-même l’expression de la connaissance humaine ». Ces recommandations posent que l’Europe se trouve déjà participant à cette révolution, mais avec une approche qui est encore trop fragmentaire, ce qui pourrait réduire les bénéfices attendus. Le Groupe soulignait le fait que les progrès technologiques et l’évolution du marché signifient que l’Europe doit abandonner les politiques basées sur des principes appartenant à une époque antérieure à l’avènement de la révolution de l’information. L’élément clé pour l’émergence de nouveaux marchés était d’établir un environnement réglementaire solide permettant la libre concurrence, ce qui était considéré une pré condition pour mobiliser le capital privé nécessaire à l’innovation, à la croissance et au développement de ces marchés.

En conclusion, le Groupe recommandait :

L’accélération du processus entamé de libéralisation du secteur des télécommunications (ouverture à la concurrence des infrastructures et services encore sous monopole, suppression des encombrements politiques non commerciaux et des contraintes budgétaires imposées aux opérateurs de télécommunications, et établissement d’un calendrier clair de mise en œuvre et d’atteinte des objectifs) ;

L’établissement d’un ensemble minimum de réglementations nécessaires au niveau européen pour assurer

35 Les premiers commutateurs numériques furent développés en Europe dans les années 70, mais la fragmentation des

marchés nationaux et leur cloisonnement ne permettaient d’en faire des succès commerciaux mondiaux.

12

l’émergence rapide d’infrastructures et de services d’information européens efficaces (tels qu’attribution des licences, interconnexion et interopérabilité des réseaux, protection des droits de propriété intellectuelle, de la vie privée, protection électronique, juridique, sécurité, politique de concurrence, etc.).

En tant que priorité urgente, l’ajustement des tarifs internationaux, interurbains et des lignes louées pour les ramener aux niveaux des tarifs pratiqués dans les autres pays avancés.

Source : Commission des Communautés européennes, Recommandations au Conseil de l’Europe sur l’Europe et la Société globale de l’Information (Rapport Bangeman), 1994.

Après son adoption par le conseil, il est mis en place une initiative e-Europe, qui vise à amener chaque citoyen, chaque école, chaque entreprise et chaque gouvernement en ligne le plus vite possible. L’initiative se base sur le cadre des politiques communautaires d’intégration, et en particulier sur les principes guidant à l’établissement d’un marché commun européen des télécommunications. Elle se concentre également sur des actions prioritaires permettant de surmonter les obstacles qui freinent l’acceptation rapide des technologies de l’information en Europe36 Une comparaison entre l’Algérie et les pays voisins de la région est présentée dans l’Annexe. La comparaison illustre la situation actuelle liée au potentiel de développement d’un secteur TIC. L’Algérie se classe dernière de l’échantillon qui comprend la Jordanie, l’Égypte, la Tunisie, l’Algérie et le Maroc.

5 ÉLEMENTS DETERMINANTS POUR DEVELOPPER LES TIC

Devenir une société de l’information va bien au-delà de l’acquisition et de l’installation des infrastructures de l’information. C’est un processus de transformation économique, sociale et culturelle. Permettre à la technologie de déployer tout son potentiel est réalisable à travers une stratégie de long terme visant à établir un environnement économiquement et socialement favorable. Sur la base de l’expérience internationale, les conditions préalables au développement d’une société de l’information sont déterminées par cinq éléments fondamentaux : une approche visionnaire, des dirigeants forts pour une mise en oeuvre efficace et opportune du projet, un cadre réglementaire prédictible et favorable au développement de la participation privée dans la construction des infrastructures, et un capital humain compétent et compétitif pour utiliser à leur pleine capacité les infrastructures de l’information déployées.

5.1 Énoncer une approche visionnaire du développement

Après avoir conduit une évaluation complète de leur état de préparation, les pays envisageant une transformation vers une économie basée sur l’information, énoncent une vision d’avenir reflétée par la suite dans leur stratégie. L’expérience internationale montre que les pays ayant enregistré un succès dans ce

36 Dans un rapport publié en 2001, (« The Inforrmation Scoiety and Development »), la Commission des Communautés

européennes concluait que la société de l’information en Europe a vu un développement considérable. Pratiquement un tiers des ménages européens est connecté à l’Internet, et presque deux tiers des européens ont un téléphone cellulaire. Presque la moitié des travailleurs utilisent un ordinateur dans leur travail, et le commerce électronique entre les entreprises est en augmentation. Cependant, la Commission a souligné le besoin d’une réforme plus structurelle pour exploiter tout le potentiel de ces technologies pour des gains d’efficacité. Moderniser le secteur public devrait aller au-delà de l’introduction de nouvelles technologies et traiter les règlements, procédures et pratiques du travail pour maximixer leur impact. La conclusion qui s’impose est donc que : « les investissements engagés dans ces technologies ne montreront leur plein potentiel que si les institutions et les processus de la vieille économie sont adaptés en vue de la pleine utilisation de ces possibilités ».

13

domaine sont également ceux qui ont préparé une stratégie claire et adaptée à leur projet de développement ainsi qu’une feuille de route pour atteindre les objectifs clairement identifiés. Dans le cas de l’Union européenne commenté ci-dessus, la vision est basée sur le besoin de renforcer la compétitivité de la communauté européenne et d’atteindre une croissance économique durable qui entraîne la création d’emplois. Le Rapport Bangeman fournit cette approche visionnaire. En Malaisie, le projet Multimedia Super Corridor est né de la vision du premier ministre de transformer la Malaisie, d’un pays semi-industrialisé assemblant des produits électroniques bas de gamme, en une économie basée sur l’information qui pourrait faire face à la concurrence internationale. En Algérie, une approche visionnaire de développement TIC n’a pas encore été formalisée ni diffusée. Le besoin existe de construire une vision commune qui puisse être partagée par toutes les forces politiques.

5.2 Exprimer une forte volonté politique et bâtir un consensus politique

Une forte volonté politique est nécessaire à l’aboutissement de la vision en un plan d’action, et pour assurer que celui-ci soit efficacement mis en œuvre. Les approches de la Malaisie et de l’Union européenne montrent le rôle capital joué par les dirigeants politiques, non seulement pour définir une vision d’avenir, mais également pour donner aux agences d’exécution une feuille de route claire pour la mise en œuvre du projet. Dans le cas de la Malaisie, le Premier Ministre, Dr. Mahathir Mohamad a joué un rôle majeur dans le processus de mise en œuvre du programme de société de l’information. MDC37 (Multimedia Development Corporation) a reçu les pleins pouvoirs et a été équipé pour mettre en œuvre le programme du Gouvernement. Rendant compte directement au Premier Ministre, celle-ci assure également une étroite supervision de la mise en œuvre du programme.

Encadré 5 : Le “Multimedia Super Corridor” en Malaisie Dans son ouvrage The Invisible Continent : Four Strategic Imperatives of the New Economy (New York : Harper Business, 2000) Kenichi Ohmae écrit: “J’ai été personnellement impliqué dans le développement du concept original du “Multimedia Super Corridor” dès le premier jour. J’ai beaucoup réfléchi pour trouver comment un pays comme la Malaisie pourrait suivre le rythme du développement du continent invisible. Je suis arrivé à la conclusion que projeter l’économie nationale tout entière dans le vingt-et-unième siècle serait non seulement impossible, mais également imprudent, étant donné les complexités d’une société multiraciale à la culture dominante islamique. Mes recommandations au Dr. Mahathir, Premier Ministre de Malaisie, furent de tailler un espace assez large pour expérimenter avec le futur. Un ensemble de loi fut mis en place, gouvernant « Cyberjaya », une nouvelle cité entièrement intelligente dont le nom signifie « cyber communauté ». Une zone de quinze kilomètres de large et 50 km de long immédiatement au sud de Kuala Lumpur fut choisie pour abriter le “Multimedia Super Corridor”. Neuf applications-phares furent retenues pour démontrer comment les nouveaux continents sont différents des anciens. La cyber-loi (Communication Multimedia Act 1998) fut passée au Parlement, et le Gouvernement s’installa à Putra Jaya en juin 1999 ». Comme on peut l’observer ci-dessous, le projet MSC est aujourd’hui considéré comme un succès. En août 2001, on comptait 551 firmes avec le label « MSC », ce qui dépasse l’objectif qui consistait à attirer 500 entreprises à l’horizon 2003.

37 MDC : Multimedia Development Corporation a été établie pour superviser la mise en oeuvre du MSC (“Multimedia

Super Corridor”), l’un de ses projets les plus visibles. Les réunions des conseillers du MSC (IAP : International Advisory Panel) ont toujours été un événement-clé dans le pays, comptant avec la présence du Premier Ministre. Les membres de l’IAP comprennent des chefs d’entreprises TIC de haut niveau (Acer Group, Alcatel, BCE, Bloomberg, Centre for Strategic & International Studies, Cisco Systems, Compaq Computers, DHL, EDS, Ericsson, Fujitsu, Infosys, Intel, IBM, Lucent, Microsoft, Motorola, NEC, NTT, Nokia, Ohmae & Associates, Oracle, Reuters Group, Siemens, SAP, Sony, Sun Microsystems et Dell Computers).

14

0

100

200

300

400

500

600

1997 1998 1999 2000 2001

Source : MSC Comm., septembre 2001

Nbre de sociétés ayant le label MSCNbre de sociétés de classe internationaleNbre de sociétés malaises MSC

Dans le cas de l’Union européenne, les chefs d’États sont régulièrement tenus informés, et prennent les décisions qui s’imposent ou donnent les orientations appropriées lors des conseils organisés deux fois par an. Ceci permet d’assurer la cohérence globale requise pour la mise en œuvre des programmes nationaux avec les programmes communautaires. L’Algérie a besoin d’un personnage catalyseur capable de diriger et de superviser la mise en œuvre opportune du processus de réforme TIC tout entier. Sans cela, les ralentissements et retards dans la mise en œuvre de la réforme diminueront la crédibilité des efforts du Gouvernement et mineront le soutien politique.

5.3 Développer et établir un cadre réglementaire moderne

Établir un solide cadre réglementaire favorisant la participation du secteur privé est crucial pour développer un secteur TIC dynamique. Plus spécifiquement, le cadre réglementaire, ainsi que l’environnement commercial général, devraient être attrayants pour les investisseurs privés nationaux et étrangers. Pour ce faire, la clarté et la prédictibilité des réglementations nationales sont vitales pour mitiger la perception du risque des investisseurs et promouvoir une concurrence saine et loyale. Pour développer les infrastructures d’information, il est conseillé aux gouvernements de renforcer l’indépendance des autorités nationales de régulation et de leur donner des pouvoirs conséquents. Ils doivent également accélérer la libéralisation du marché des télécommunications et maintenir un environnement d’affaires prévisible rendant possible la planification stratégique des investissements. En parallèle, de nouvelles réglementations sont nécessaires dans des domaines stratégiques comme la propriété intellectuelle, la vie privée, la sécurité des transactions, la protection électronique (cryptage) et la signature digitale, afin de maximiser les bénéfices amenés par une large utilisation des TIC. En Algérie, le premier défi serait de développer un cadre réglementaire complet couvrant tous les domaines ci-dessus mentionnés. Le second défi serait de développer des capacités internes pour appliquer efficacement ces réglementations. Parmi les priorités les plus importantes que le Gouvernement devrait considérer se trouve la protection efficace des droits de propriété intellectuelle. Bien entendu, les exigences de sauvegarde de la vie privée augmentent à mesure que l’utilisation des TIC se développe. Enfin, pour

15

développer la confiance chez les utilisateurs potentiels de services de commerce électronique, le Gouvernement aurait également à établir des réglementations fortes en matière de sécurité des transactions, confidentialité et intégrité.

5.4 Développer une infrastructure d’information moderne avec la participation du secteur privé

Dans ce secteur, l’investissement privé est la force motrice, et les environnements monopolistiques ou anticoncurrentiels sont de vrais obstacles. Le secteur des infrastructures de l’information est radicalement différent des infrastructures d’autres secteurs telles que les transports, dans lesquelles d’importants investissements publics sont encore vitaux. La première tâche du Gouvernement est donc de sauvegarder les forces de concurrence et d’assurer une stabilité des engagements politiques et réglementaires souscrits pour développer ces infrastructures. Il n’y aurait pas besoin d’énormes investissements gouvernementaux, bien que le financement de certaines applications-phares et ciblées pour des besoins de démonstration puissent être soutenues par le gouvernement. De plus, le Gouvernement pourrait également considérer des subventions publiques ciblées pour promouvoir l’utilisation des TIC par les écoles, les administrations publiques et les entreprises. Au total, l’impact fiscal des mesures de politique requises serait positive à mesure que la demande de consommation des TIC se développe. En Algérie, attirer les investisseurs privés pour construire l’infrastructure d’information reste un défi. Les entreprises privées internationales avec des activités commerciales liées aux TIC sont peu nombreuses, et limitées. L’instabilité politique et l’agitation sociale de la dernière décennie ont contribué à rendre le pays moins attirant.

5.5 Développer un capital humain mis à jour pour l’utilisation des infrastructures et services d’information

La revue de l’expérience internationale montre que les pays disposant de cadres formés et compétitifs disposent d’un avantage comparatif indéniable pour leur transition vers une économie basée sur l’information38. Néanmoins, la diffusion des TIC devrait être précédée par une réforme en profondeur du système éducatif, un recyclage des enseignants pour complémenter la formation des étudiants, et un plan de diffusion bien conçu ciblant d’abord l’éducation supérieure, et ensuite les étudiants plus jeunes. Actuellement, le nombre d’étudiants formés chaque année en informatique, électronique et télécommunications ne permet pas de stimuler l’émergence de la société de l’information. Une formation orientée vers les nouvelles professions créées par la révolution technologique devrait être mise en place par l’État en coopération avec les associations professionnelles privées. Dans cette optique, des partenariats public-privé doivent être encouragés, et la réglementation en vigueur devrait être adaptée pour faciliter l’augmentation de la participation privée dans le système éducatif en Algérie. En Algérie, la production de qualifications TIC est gênée par plusieurs faiblesses : contenu de formation TIC inadéquat par rapport aux besoins du marché, cloisonnement excessif des filières, installations de formations inadéquates par rapport aux besoins du marché (volume et qualité) et impact dévastateur de la fuite des cerveaux.

38 Il est à souligner que la forte croissance du secteur TIC dans le monde conduisit à la pénurie d’exécutifs et de

techniciens, en même temps que l’offre de services augmentait. Par exemple, Motorola fut forcée d’annuler un projet de centre de développement de logiciels en Egypte à cause de l’incapacité du système d’éducation égyptien à fournir les ingénieurs et techniciens pour en assurer les activités. En effet, un tel centre exige une masse critique de 300 à 500 ingénieurs qualifiés pour être compétitive, ce que le marché égyptien n’était pas en mesure d’offrir.

16

CHAPITRE 2 : REVUE DU SECTEUR DES TIC

Ce chapitre analyse l’état de préparation du secteur TIC algérien en vue de la transformation du pays en société de l’information. Il commence par une analyse rétrospective du secteur avant la réforme initiée en 2000 par le Gouvernement, puis commente les étapes franchies en vue de promouvoir le développement des TIC. La dernière section discute des activités des principaux acteurs sectoriels (Algérie Telecom, Orascom Telecom Algérie, Algérie Poste, etc.).

1 SITUATION DU SECTEUR AVANT LA REFORME D’AOUT 2000

De 1975 à 1981, le Gouvernement algérien a consenti d’importants investissements pour moderniser et étendre territorialement le réseau public des télécommunications. Comme il est indiqué dans le graphique ci-dessus, les investissements publics ayant été consentis dans le secteur des télécommunications ont régulièrement représenté entre 0,3 et 0,6 % du PIB du pays.

Figure 5 : Les investissement publics dans les télécommunications en Algérie

0

50

100

150

200

250

1975

1976

1977

1978

1979

1980

1981

1982

1983

1984

1985

1986

1987

1988

1989

1990

1991

1992

1993

1994

1995

1996

1997

Inve

stis

sem

ents

(m

illio

ns

US

D)

0.00%

0.20%

0.40%

0.60%

0.80%

1.00%

1.20%

Inve

st. T

éléc

om

./PIB

Invest. Télécom. (M USD) Invest.Télécom./PIB (%)

Source : Données UIT. World Telecom Indicators, 2002. A partir de 1980, l’effort d’investissement public se situera entre 0,20 et 0,40 %, ce qui ne permettra pas de faire face à l’effet boule de neige induit par les efforts de dé-saturation et de modernisation de l’infrastructure intervenus au cours de la décennie précédente. Au cours de cette période, les investissements publics dans les télécommunications ne représentent en moyenne que 0,70 à 1 % de la formation brute de capital fixe en Algérie, comme indiqué dans le graphique ci-dessous.

17

Figure 6 : Les investissements en télécommunications en tant que % de la FBCF

0.00%

0.50%

1.00%

1.50%

2.00%

2.50%

1975

1976

1977

1978

1979

1980

1981

1982

1983

1984

1985

1986

1987

1988

1989

1990

1991

1992

1993

1994

1995

1996

1997

1998

Inve

stis

sem

ent t

éléc

om. (

% F

BC

F)

Source : Données UIT.

En conséquence du ralentissement de l’effort de rattrapage, les listes d’attente pour le raccordement téléphonique s’allongent et atteindront sept ans au début de la décennie 90. La qualité du service s’est dégradée peu à peu, et les dérangements sont devenus de plus en plus fréquents. En effet, l’explosion de la demande non satisfaite s’explique par le ralentissement de l’effort d’investissement, mais aussi par de multiples inefficacités de gestion et d’opération caractérisant l’administration algérienne des postes et télécommunications. La demande satisfaite reste en dessous de la capacité de raccordements disponible.

Figure 7 : Carences opérationnelles du secteur des télécommunications en Algérie

0

500000

1000000

1500000

2000000

2500000

1975

1976

1977

1978

1979

1980

1981

1982

1983

1984

1985

1986

1987

1988

1989

1990

1991

1992

1993

1994

1995

1996

1997

1998

1999

Liste d'attenteCapacité de raccordement

Abonnés connectés

Source : Donnés UIT.

18

La demande insatisfaite est estimée en 2000 à 800.000 pour les lignes fixes et à 250.000 pour le GSM. La qualité de service et la productivité du personnel sont faibles (66 % seulement des lignes en panne sont remises en service dans les 48 heures en 1998 ; 98 lignes principales par employé en 2000). Par comparaison avec les autres pays de la région, les tarifs de télécommunications en Algérie sont généralement bas pour le raccordement, l’abonnement et les appels locaux. Les tarifs des appels internationaux sont cependant élevés, entre 0,72 USD la minute pour les appels en direction de l’Europe du Sud, et 2,13 USD la minute vers l’Asie, à l’exception des autres pays du Maghreb où l’appel s'élève à 0,20 USD la minute.

Tableau 2 : Principaux indicateurs39 de performance des télécommunications en Algérie

Le cadre juridique, réglementaire et institutionnel était inadéquat. La Constitution du 22 novembre 1976 stipulait que les Postes et les Télécommunications étaient des propriétés publiques. Le Ministère des Postes et Télécommunications était à la fois le régulateur et l'entité opérationnelle. Il avait le monopole des services de télécommunications et postaux (y compris les services financiers) et gérait ces services comme des départements du ministère. Il résultait de l’environnement institutionnel inadéquat que la densité téléphonique demeurait très faible à 57 lignes pour 1.000 personnes en 2000, ce taux étant resté largement statique au cours des dix dernières années (voir graphique ci-dessous). La Tunisie et l’Égypte, avec une densité téléphonique similaire au début des années 90, ont dépassé l’Algérie à la fin de la décade.

39 La qualité du service s’est grandement améliorée dans les pays tels que la Tunisie et l’Egypte depuis 1999. Les

données UIT ne sont pas encore disponibles pour ces deux pays. Dans le cas de la Tunisie, les chiffres mis à jour par le Ministère du Développement et de la Coopération internationale indiquent que les dérangements par 100 lignes ont baissé à 29.

Algérie et pays de comparaison, 2000

Algérie Égypte Grèce Maroc Portugal Espagne Tunisie Turquie Télécommunications Lignes principales (par 1000) 57 86 532 50 430 421 90 280 Lignes principales par empl. 98 100 289 98 234 415 129 254 Prix d’un appel local de 3 min. 1

0 0 0.1 0.1 0.1 0.1 0 0.1 Abonnement mensuel lignes d’entreprise (US$) 1 2.7 1.8 6.6 9.4 10.3 10.7 2.2 3.2 Coôt re raccordement lignes d’entreprise (US$) 1 46.5 288.2 27.4 94.1 65.9 157.6 67.2 20

Dérangements pour 100 lignes principales 2 12.0 6.9 10.0 24.8 10.5 1.5 43.0 55.4 Lignes principales, liste d’attente (années) 5.4 1.9 0.2 0.1 0.2 0 0.9 0.5

Sources : WDI, UIT Notes : 1. Les données pour la Tunisie et l’Espagne datent de 1999. 2. Les données pour l’Égypte, le Maroc et la Tunisie datent de 1999.

19

Figure 8 : Comparaison de la télédensité des lignes fixes en Algérie, en Tunisie, au Maroc et en Égypte

Télédensité des lignes fixes

0

2

4

6

8

10

12

1990 1991 1992 1993 1994 1995 1996 1997 1998 1999 2000

% P

opul

atio

n

AlgérieTunisieMarocÉgypte

Source : Données UIT.

Pour l’année 1998, nous avons analysé l’évolution de la télédensité (lignes fixes) pour un échantillon de pays méditerranéens comprenant l’Algérie, la Grèce, l’Espagne, l’Égypte, le Maroc, le Portugal et la Turquie. Pour cet échantillon, la loi de Jipp [1963] a été estimée :

91,0 ; 96,023,2 2

)52,7()88,4(=

+−=

−R

habPIB

LogLogd [éqn. 1]

avec – d : télédensité fixe pour 100 habitants et [PIB/hab] = revenu par habitant. Il apparaît que pour cet échantillon de pays, une évolution de 1 % du PIB par habitant entraînerait une amélioration de 0,96 % de la télédensité. Si l’évolution de la diffusion téléphonique en Algérie avait suivi la même tendance que dans les pays voisins (Tunisie, Égypte), sa télédensité aurait été de 8,6 % en 1998 au lieu des 5 % observés. Ce résultat confirme les indications données précédemment bien qu’il n’en explique pas clairement les causes. Dans un second temps, nous avons modifié le modèle de diffusion pour mettre en évidence l’importance d’autres variables explicatives dans le développement de la télédensité, à savoir : (a) investissements dans les télécommunications par habitant [InvTel/hab], (b) productivité de l’opérateur exprimée en nombre de lignes principales par employé [LP/empl].

( ) 98,0; 39,113,013,056,2 2

)23,3()07,1()34,0()05,4(=

+

+

+−=

−R

EmplLP

LogFBCFInvTel

LoghabPIB

LogdLog

[éqn. 2]

20

Le modèle [éqn.2], permet de montrer que la télédensité téléphonique des pays de l’échantillon est peu expliquée par l’évolution de leur PIB ou par les politiques volontaristes d’investissement public40 auxquelles ces pays ont eu recours. Par contre, l’amélioration progressive de la productivité des opérateurs semble être un facteur important. Dans ce cas, comme dans le précédent, la télédensité algérienne aurait atteint 7,14 % en 1998 au lieu des 5 % constatés. La faible performance du secteur observée en Algérie est probablement due à une structure organisationnelle inappropriée. Il semble donc que l’Algérie n’a pas suivi la tendance moyenne observée chez ses voisins. C’est ce constat qui a conduit les autorités à initier une réforme en profondeur du secteur à la fin de 1999.

2 LA REFORME DU SECTEUR DES POSTES ET TELECOMMUNICATIONS

Le Gouvernement algérien a opté pour une réforme en profondeur du secteur des postes et télécommunications afin de relever les défis du 21ème siècle et d’arrimer l’Algérie vers une société de l’information. Cette réforme est dictée par la nécessité d’assurer la compétitivité et la diversification de l’économie algérienne et de ses entreprises et de favoriser le développement d’un secteur des télécommunications concurrentiel et dynamique. Cette réforme prend lieu dans un contexte de globalisation croissante, de l’adhésion prochaine de l’Algérie à l’OMC et de la mise en œuvre de l’accord d’association avec l’Union européenne. La stratégie élaborée et adoptée par le Gouvernement algérien en juin 2000 vise donc à rattraper le retard important qu’accuse le pays en matière de services de télécommunications. Ses principaux objectifs sont:

• Accroître l'offre de services téléphoniques et faciliter l'accès aux services de télécommunications au plus grand nombre d'usagers, en particulier en zones rurales. Le Gouvernement algérien estime qu’il est essentiel que la demande téléphonique (affaires et résidentielle) pour ses services puisse être satisfaite dans des délais brefs. De plus, il faut que les prix de ses services soient compétitifs.

• Améliorer la qualité des services offerts et élargir la gamme des prestations. Le Gouvernement algérien estime que la qualité des services offerts doit être améliorée pour rendre le secteur des télécommunications performant du point de vue qualité d’ici cinq ans. Il faut ensuite étendre la gamme des services offerts pour répondre aux besoins d’une société et des entreprises de plus en plus branchées sur l’information.

• Assurer l’accès aux habitants des zones rurales et aux autres groupes défavorisés aux services de télécommunications et aux réseaux d’information. Le Gouvernement algérien estime que l’accès des zones rurales aux télécommunications et aux réseaux d’information est nécessaire au développement économique, social et culturel. Les télécommunications sont essentielles pour l’essor de l’agriculture, du tourisme et de l’éducation ainsi que l’amélioration des services de santé. Cet accès sera assuré par la définition des obligations des opérateurs de télécommunications publics et privés en matière d’aménagement du territoire et de service universel.

• Développer un réseau national de télécommunications fiable et connecté aux autoroutes de l'information. Le Gouvernement algérien estime que la réforme des télécommunications est essentielle pour la modernisation de l’administration ainsi que des autres institutions publiques, la mise à niveau des entreprises algériennes et l’essor du commerce électronique.

• Le Gouvernement algérien estime que la réforme des télécommunications rendra l’économie plus compétitive et moins dépendante des aléas du marché pétrolier. Elle permettra l’émergence de nouvelles activités économiques et la création de nouveaux emplois directs et indirects.

40 Les coefficients (estimateurs) ne sont pas significatifs pour ces deux variables.

21

Les grands axes du programme gouvernemental de réforme ont donc été articulés autour de :

• la reforme du cadre législatif et réglementaire du secteur des postes et télécommunications pour asseoir ses réformes sur une base solide, transparente et sûre ;

• la séparation de l’exploitation, la régulation et la politique sectorielle par la scission de l’actuel Ministère des Postes et des Télécommunications (MPT) en une entreprise des télécommunications, une entreprise publique a caractère industriel et commercial (EPIC) pour la gestion de l’opérateur postal, une autorité de régulation et un département ministériel chargé de la politique sectorielle des postes et télécommunications;

• la libéralisation des marchés des télécommunications et de la poste, leur ouverture à une concurrence croissante et la promotion de la participation et de l’investissement privé dans ces secteurs;

• l’ouverture du capital de l’opérateur historique à un investisseur stratégique dans un premier temps, puis une offre publique des actions à la bourse des valeurs ;

• la préservation et le développement du service universel sur l’ensemble du territoire selon des modalités qui restent à déterminer par le Gouvernement, notamment en matière de participation financière des opérateurs de ce service.

Le calendrier de libéralisation adopté dans cette optique est rappelé ci-dessous :

Tableau 3 : Calendrier de libéralisation des télécommunications adopté en 2000

Mesure Date de réalisation Commentaire

Libéralisation des services à valeur ajoutée Août 2000 Octroi d’une ou de deux licences VSAT Décembre 2001 Appel d’offres lancé, licences

devraient être octroyées en décembre 2002

Octroi d’une ou deux licences d’opérateurs de téléphonie rurale

Décembre 2002 Recrutement en cours des conseillers pour cette transaction

Octroi d’une ou de deux licences de téléphonie interurbaine et internationale

Décembre 2003 Recrutement en cours du conseiller financier pour ces transactions

Octroi de la troisième licence GSM Décembre 2003 Recrutement en cours des conseillers pour cette la transaction

Octroi d’une licence de boucle locale radio Décembre 2004 Recrutement en cours des conseillers financiers pour ces transactions

Ouverture totale du marché des télécommunications

Décembre 2004

Source : MPT (2000). La Loi 2000-2003 portant réglementation générale des postes et télécommunications a été adoptée au Parlement en août 2000, et promulguée peu après par le Président de la République. Elle consacre :

• la séparation des activités de la poste et des télécommunications ; • la constitution d’une société de droit privé, Algérie Telecom, pour l’exploitation du service public

des télécommunications préalablement géré par le Ministère ;

22

• la création d’un Établissement Public à caractère Industriel et Commercial (EPIC) pour l’exploitation du service public de la poste (Algérie Poste) ;

• la création d’une Autorité de Régulation des Postes et Télécommunications indépendante (ARPT) ; • l’ouverture du marché des télécommunications à la concurrence selon trois régimes de services :

régime de licences, régime des autorisations et régime de simples déclarations ; • la libéralisation progressive du marché postal.

Cette loi a été complétée par de nombreux textes d’application, notamment : (i) décret n°01-109 du 3 mai 2001 portant désignation des membres du conseil de l’ARPT ; (ii) décret n°01-123 du 9 mai 2001 relatif au régime d’exploitation applicable à chaque type de réseau, y compris radioélectriques et aux différents services de télécommunication ; (iii) décret n° 01-124 du 9 mai 2001 portant définition de la procédure applicable à l’adjudication par appel à la concurrence pour l’octroi des licences en matière de télécommunications ; (iv) décret n°01-417 du 20 décembre 2001 portant autorisation à titre de régularisation pour l’établissement et/ou l’exploitation de réseaux publics de télécommunications, y compris radioélectriques autres que GSM, et la fourniture de services de télécommunications par Algérie Telecom SA. D’autres textes importants sont en cours d’adoption, notamment en ce qui concerne la réglementation de l’interconnexion, la concurrence, le service universel, l’accès aux ressources rares (numérotation, fréquences, partage des infrastructures) et la résolution des conflits. Dans ce schéma, le Ministère conserve toujours deux de ses quatre missions, à savoir : la réglementation et la politique sectorielle. Dans le futur, ces deux rôles devraient être transférés à d’autres institutions et le Ministère transformé en une unité spéciale du Bureau du Président. Le Parlement devrait alors promulguer la réglementation. La politique sectorielle serait exécutée par l’unité spéciale. L’Autorité de Régulation de la Poste et des Télécommunications est constituée par la Loi 2000-2003 comme une autorité indépendante qui jouit d’une large autonomie financière41 et de décision. Son conseil est constitué de sept membres, tous nommés et révocables par décret du Président de la République. Les décisions de l’Autorité peuvent faire l’objet d’un appel auprès des tribunaux administratifs, mais cet appel n’est pas suspensif. Ses principales missions sont de :

• veiller à l’existence d’une concurrence effective et loyale sur les marchés postal et des télécommunications,

• veiller à fournir le partage des infrastructures de télécommunications, • planifier, gérer, assigner et contrôler l’utilisation des fréquences, • établir un plan national de numérotation, • approuver les offres de référence d’interconnexion, • octroyer les autorisations d’exploitation et agréer les équipements, • arbitrer les litiges entre opérateurs et utilisateurs.

Le plan de développement de l’ARPT prévoit un effectif de 167 personnes, réparties entre cinq directions et seize départements. En septembre 2002, l’ARPT n’était pas encore opérationnelle. Bien qu’ayant recruté ses principaux directeurs de service, l’Autorité n’avait pas encore pourvu à de nombreux postes. Le nouveau cadre juridique et réglementaire s’articule autour de nombreuses nouvelles institutions : (i) l’Autorité de Régulation des Postes et Télécommunications (ARPT) ; (ii) l’Agence Nationale des Fréquences (sous la tutelle du MPT) récemment constituée pour gérer le spectre de fréquences42 ; (iii) et la Commission

41 Afin d’assurer son indépendance, la loi prévoit qu’elle puisse s’autofinancer, par le biais de prestation de services

spécialisés à des tiers, d’un pourcentage sur la vente des licences d’exploitation et d’une redevance versée par les opérateurs. La ressource principale est constituée par la redevance sur l’assignation des fréquences. À titre d’exemple, les deux licences GSM représentent chacune 70 canaux. Chaque canal coûte dix millions de dinars. Au total, le produit de ces deux licences est de 1,4 milliard de dinars (soit 17 millions de dollars US).

42 L’ANF n’est pas encore opérationnelle. Le décret de sa création lui donne la responsabilité de gérer l’entièreté des ressources du spectre, y compris les fréquences utilisées par les services de sécurité. Mais les responsabilités se

23

nationale des points hauts43 qui gère l‘accès aux tours, pylônes et autres infrastructures de transmission radio par les opérateurs de télécommunications et les militaires. Une réduction du nombre d’intervenants pourrait s’avérer judicieuse pour éviter des problèmes de coordination, et probablement des conflits de compétence, et nuire au développement harmonieux du secteur. Il semble également souhaitable de renforcer l’indépendance de l’ARPT afin de la mettre à l’abri des pressions politiques. Ceci pourrait se faire par une modification des modalités de désignation et de révocation des membres de son conseil (limitation de mandats, irrévocabilité pendant la durée du mandat à l’exception de fautes graves prouvées, etc.). Enfin, une relecture de la loi 2000-03 a permis d’identifier de nombreux points imprécis en ce qui concerne la répartition des attributions et compétences entre le Ministère et l’ARPT.

Figure 9 : Carte sectorielle en 2002

Algérie - Secteur des Télécommunications – 03/2002

Ministère des Postes etTélécommunications

Public des Services de Télécommunications

VSA

Politique Sectorielle

Réglemen-tation

Opérations

International

LongueDistance

Local

Fourniturede services

Réseauxprivés

Servicesmobiles

Autorité de Régulationdes Postes et Télécommunications

Fournisseurs des services Internet

KiosquesMulti-

Services

Agence Nationaledes Fréquences

AlgérieTélécom

(AT)100% Gouv.

Mob

ilis-

100%

AT

Dje

zzy

-Ora

scom

Dja

web

-50%

AT

, 50

% A

P

Source : Banque mondiale, 2002.

3 INITIATIVES POUR LA MISE EN PLACE D’UNE SOCIETE DE L’INFORMATION

Un Comité de Pilotage chargé d’élaborer un état des lieux exhaustif sur le développement de la société de l’information en Algérie a été constitué le 9 mai 2001 par le gouvernement. Composé d’une trentaine de personnes, représentants des ministères, organismes publics, enseignants, et Fournisseurs de Services Internet (FSI), ce Comité de Pilotage a rédigé et remis au gouvernement un rapport sur les enjeux et les conditions préalables à l’édification d’une société de l’information en Algérie.

chevauchent, puisque selon les décrets, L’ARPT gère aussi la bande de fréquence pour les applications commerciales, (mais n’a pas d’autorité sur les autres bandes de fréquence).

43 Commission interministérielle qui peut inclure des représentants des opérateurs et qui assure la coordination de l’accès et de l’utilisation des tours, pylônes et autres infrastructures pour transmission radio ( « points hauts »), qui sont considérés sites stratégiques de défense nationale.

24

Achevé en octobre 2001, le rapport définit succinctement l’offre en matière de TIC. Il analyse les carences et les insuffisances réglementaires, bancaires, fiscales et économiques qui entravent aujourd’hui l’initiative privée comme publique et, partant, l’émergence d’une véritable société de l’information. Le Comité de Pilotage a également formulé une série de recommandations dont les principales sont les suivantes :

• promouvoir l’utilisation des TIC dans l’enseignement, • mettre en place le cadre réglementaire et les structures institutionnelles nécessaires à la diffusion et à

l’appropriation des TIC ; • adopter des mesures incitatives en vue du développement de la demande et de l’utilisation des

ordinateurs personnels et d’Internet. (Abolir les droits de douane et taxes sur les ordinateurs et produits multimédia),

• inciter Algérie Telecom à proposer des tarifs spéciaux pour les internautes ; • finaliser la restructuration du secteur financier et bancaire, avec notamment la création

d’instruments de prêt adaptés aux nouvelles technologies, • mettre en œuvre des programmes spécifiques pour aider les administrations et les services du

Gouvernement à devenir des utilisateurs modèles des TIC. En termes de méthode d’action, le rapport propose de poursuivre et d’affiner l’approche initiée par le Comité de Pilotage. Il recommande de constituer des groupes de travail44 formellement chargés d’étudier la situation actuelle et de présenter des propositions pour la préparation et la mise en œuvre du Programme pour une Société de l’Information. Ces propositions devraient être validées au cours d’une conférence nationale, associant tous les acteurs importants de la société civile, du secteur privé, du Gouvernement et des bailleurs de fonds. Le processus de décision a été ralenti en 2001 à cause de questions de prérogatives entre les ministères. Les recommandations présentées par le Comité de Pilotage ne furent pas adoptées et il n’y eut pas de suite à la création de groupes de travail. La lourdeur de la procédure, qui vise à élargir le débat à un maximum d’acteurs de la société algérienne, a contribué à ce ralentissement. L’incapacité à multiplier l’élan des réformes est un problème-clé dans les processus politiques algériens, et est déterminée par les rigidités des processus décisionnels. Cette question devrait être envisagée comme une précondition à l’adoption des TIC. A l’issue du remaniement ministériel intervenu en juin 2002, le Ministère des Postes et Télécommunications a été rebaptisé Ministère de la Poste et des Technologies de l’Information et de la Communication (MPTIC). Le nouveau ministère devrait donc rapidement commencer à définir la politique gouvernementale pour le secteur TIC et s’atteler à harmoniser et compléter la législation et les réglementations existantes.

4 LES OPERATEURS ET FOURNISSEURS DE SERVICES DE TELECOMMUNICATIONS

La présente section analyse l’offre TIC existante en Algérie. Les acteurs sectoriels exploitants de réseaux publics ou fournisseurs de services sont passés en revue de manière à faire ressortir leurs faiblesses et atouts en vue de développer une société de l’information.

44 Ces groupes de travail sont au nombre de huit : système éducatif et TIC, cadre législatif et réglementaire, santé

publique et TIC, industrie et services de TIC, fourniture de services en ligne, utilisation des TIC au niveau national, TIC et développement des activités des PME/PMI, infrastructures de connectivité.

25

4.1 Algérie Telecom – un démarrage difficile

Officiellement constituée en mars 2001, Algérie Telecom n’est toujours pas entièrement opérationnelle, en dépit de la désignation en avril 2002 de son Conseil d’administration et de son Directeur général45. Les retards observés dans la désignation de ses dirigeants, et par la suite dans le démarrage effectif de ses opérations, sont révélateurs des paradoxes et contradictions qu’affronte le Gouvernement algérien pour mettre en œuvre ses réformes structurelles. Ces infrastructures consistent en un réseau de téléphonie publique commuté (RTPC), deux réseaux de téléphonie mobile dont un numérique dans la norme GSM, un réseau public de transmission de données (DZ-PAC) et une plate-forme Internet dont la gestion est confiée à Djaweb, filiale commune d’Algérie Telecom et d’Algérie Poste. Par ailleurs, Algérie Telecom exploite pour le compte de tiers (Sonatrach, Banque d’Algérie, etc.) des liaisons de transmission à fibre optique et dispose en contrepartie du droit d’utiliser 50 % de cette capacité pour ses besoins propres.

4.1.1 La téléphonie fixe

Le réseau de téléphonie fixe couvre l’ensemble du territoire algérien. Il utilise une gamme étendue de technologies :

• un réseau général comprenant : (i) 10.700 km de câbles en fibre optique (récemment étendu à 14.000 km) ; (ii) 22.200 km de faisceaux hertziens numériques,

• un réseau de transmission par satellite composé de trois stations terriennes internationales (deux pour Intelsat et une pour Arabsat) et de 46 stations DOMSAT,

• un réseau rural composé de 136 stations mères permettant de raccorder 1.400 localités (46), • le taux de numérisation est d’environ 85 % pour les réseaux de transmission et 100 % pour la

commutation (voir encadré), • 1,88 million de lignes principales étaient en service au 31 décembre 2001 contre une capacité

installée de 2,8 millions, • 5.000 cabines publiques directement gérées par Algérie Telecom et 11.60047 exploitées par des

promoteurs privés sous l’appellation de « kiosques multiservices »48. A ces supports nationaux, s’ajoutent des supports internationaux permettant de relier l’Algérie au reste du monde, à savoir : les câbles terrestres à fibre optique avec le Maroc et la Libye (140 mégabits/seconde), la Tunisie (622 mégabits/seconde), ainsi qu’un câble sous-marin49 avec la France (565 mégabits/seconde). Récemment mis en exploitation, le nouveau câble sous-marin en fibre optique Alger-Palma50 a permis d’augmenter la capacité de transmission de 2,5 à 10 gigabits par seconde au niveau des pôles principaux d’Alger, d’Oran et de Constantine. Longtemps freiné en raison d’une conjoncture financière défavorable, l’effort d’investissement en matière de télécommunications est à nouveau à la hausse depuis 1995-96: moins de 6 milliards de dinars en 1996, 45 Également Président du Conseil d’administration. 46 Au cours de l’année 2001, le MPT a procédé pour le compte d’Algérie Telecom au lancement de l’appel d’offre pour

l’extension de 164 réseaux ruraux de radio WLL pour couvrir 2200 localités et desservir 120.000 abonnés. 47 Ce chiffre était de 1670 en 1996. 48 Ce qui représente à peu près 36.000 lignes principales au total. 49 Appartenant à un consortium de 60 opérateurs de télécommunications incluant Algérie Telecom, un câble SEA-ME-

WE2 connecte l’Europe à l’Asie du Sud-Est et a des points d’ancrage en Algérie, Egypte, et en Inde. Sa largeur de bande est de 2,560 Mbits/s.

50 ALPAL-2. Le câble sous-marin Alger-Palma de Majorque de 312 km connectant l’Algérie à l’Espagne utilise la toute dernière technologie (Dense Wave Division Multiplexing Technology). Sa largeur totale de bande est de 160 Gbits/s et sa construction a coûté 16,6 millions €, dont 50 % couverts par Algérie Telecom.

26

14 milliards de dinars en 1999 et 19 milliards en 2000. Grâce au déploiement de ces moyens financiers, le taux de croissance du réseau s’est maintenu à un niveau moyen d’environ 12 % par an.

Encadré 6 : La place des équipementiers étrangers

Le suédois Ericsson est l’opérateur dominant en matière de téléphonie. Grâce à son partenariat exclusif avec l’État algérien depuis le début des années 70, cette entreprise a fourni 95 % de l’équipement de téléphonie fixe installé par Algérie Telecom. Elle possède également une part de 35 % dans Sitel, une usine basée à Tlemcen qui fabrique le système commutatoire Axe. Le reste du capital de l’entreprise est détenu par des entreprises publiques (ENTC 20 %, Homelet 20 %, Sonatite 15 %, BCEA 10 %), et sa capacité de production est passée de 150.000 à 300.000 lignes principales en 2000, et pourrait facilement atteindre les 600.000 unités. Bien qu’Ericsson ait été pendant longtemps le seul fournisseur d’équipement, aujourd’hui d’autres entreprises essayent de s’introduire sur le marché. Ceci est le cas pour Alcatel, qui est cependant le fournisseur pour les réseaux publics de transmission de données DZPAC. Alcatel a aussi gagné 50 % de l’appel d’offres lancé par Orascom Telecom Algérie, le second opérateur GSM de réseau privé. L’entreprise allemande Siemens a gagné l’autre moitié de l’offre. La position dominante historique de Ericsson sur le marché algérien ne pose pas de risque à la compétitivité de l’environnement tant que le processus d’appel d’offres est conduit de manière juste et transparente.

Djaweb, fournisseur public de service Internet lancé au début 2002 par le MPT, a choisi la compagnie américaine Lucent pour sa plate-forme. Bull (France) est également présent sur le marché, principalement en tant que fournisseur d’ordinateurs et d’équipement de réseaux d’ordinateurs. L’entreprise a aussi livré 70 guichets automatiques à SATIM, un consortium établi par les banques publiques locales en vue d’installer et d’opérer un système bancaire électronique. D’autres compagnies explorant les opportunités de marché sont : les chinois Huawei et ZTE, le canadien Nortel, et l’américain Motorola. Jusqu’en décembre 2003, la téléphonie fixe restera sous l’exclusivité d’Algérie Telecom. L’opérateur public devra rapidement se mobiliser pour être en mesure de faire face au développement de la concurrence. En particulier, Algérie Telecom devra initier de nouvelles compétences en contrôle de gestion, analyse de marché, marketing, commercial, contrôle de la qualité, et placer la satisfaction du client au centre de ses priorités. Pour faciliter ce changement radical, il est envisagé d’ouvrir une partie du capital d’Algérie Telecom aux investisseurs étrangers. L’ouverture du capital représente un enjeu majeur pour la société, à la fois pour accroître ses capacités d’investissement, mais aussi pour bénéficier de savoir-faire technologique et de gestion.

4.1.2 La téléphonie mobile Les services de communications mobiles sont disponibles en Algérie depuis la mise en service en 1991 d’un réseau cellulaire analogique NMT. Un réseau GSM a été mis en service en 1997 et raccordait 106.000 abonnés en 2002. Les services de communication mobile sont en passe d’être commercialisés par une filiale à 100 % (Mobilis). Algérie Telecom appartient de plus au consortium Thuraya, qui fournit des communications GMPCS dans le monde entier. En moins d’un an d’opération, le service Thuraya opéré en Algérie par Algérie Telecom a connecté 4.000 clients. Par comparaison avec la banque de 66.000 clients du consortium dans le monde, la croissance du marché algérien semble avoir été formidable51. Dans la perspective de préparer l’opérateur à la libéralisation du marché, le MPT (agissant pour le compte d’Algérie Telecom) avait lancé un appel d’offres en 2001 pour l’acquisition de 500.000 lignes supplémentaires. Six entreprises y ont répondu : Motorola (États-Unis), Siemens (Allemagne), Alcatel (France), Ericsson (Suède), Huawei Technologies (Chine) et Zhongxing Télécom (Chine). En phase de pré-sélection, les deux sociétés chinoises ont été écartées pour « insuffisance de références »52. Alcatel a remis la

51 Tarifs de Thuraya : a) coût d’un appareil téléphonique : 82.000 DA, b) frais de mise en route : 25.000 DA, c)

abonnement mensuel : 1.000 DA, et d) coûts des communications de 40 DA/mn pour les appels nationaux à un autre client Thuraya, à 56 DA/mn pour un appel national au réseau fixe.

52 Ce qui a valu une protestation officielle de Huawei auprès de la Présidence de la République algérienne.

27

proposition financière la plus faible, 75 millions €, contre 121 millions € pour Motorola, 184 millions € pour Siemens et 193 millions € pour Ericsson53.

4.1.3 La transmission de données et les lignes louées

Algérie Telecom exploite un réseau public de transmission de données (DZPAC) de technologie X.25. Au 31 décembre 2001, ce réseau comptait 4.460 abonnés (1960 abonnés au 31 décembre 2000). Cependant, le nombre de demandes insatisfaites reste élevé et est estimé à 2.000-2.500. Selon la loi, la fourniture de services publics de transmission de données est ouverte à la concurrence, mais l’exclusivité d’Algérie Telecom sur la boucle locale la rend impossible. Pour développer des solutions de réseaux d’entreprise, et soutenir la modernisation des systèmes de communication des entreprises en Algérie, il faudrait accélérer l’ouverture de la boucle locale. Actuellement, les principaux FSI opèrent leurs réseaux d’infrastructure, mais la loi leur interdit de connecter les abonnés. Permettre la connexion des abonnés commerciaux par le biais de systèmes sans fil pourrait certainement soutenir le Programme de Société de l’Information envisagé par le Gouvernement algérien. Algérie Telecom fournit aussi une large gamme de lignes louées à des utilisateurs commerciaux et gouvernementaux. Selon la Loi 2000-03, la fourniture de lignes louées est ouverte à la concurrence, bien que seuls les opérateurs officiellement titulaires d’une licence puissent l’offrir. En 2002, seul Orascom Telecom Algérie avait le droit de vendre sa capacité inutilisée à des tiers. Les officiels considèrent actuellement des options juridiques pour promouvoir la fourniture de lignes louées par d’autres opérateurs tels que Sonelgaz et TDA. Services Internet (Djaweb) C’est au début de l’année 2002 qu’Algérie Telecom a mis en place sa propre plate-forme Internet. Auparavant, les principaux fournisseurs de service Internet devaient se connecter au réseau mondial grâce à des liaisons VSAT offrant un débit d’accès relativement limité. La plate-forme dispose d’une capacité de raccordements de 100.000 abonnés et permet la gestion d’environ 10.000 accès simultanés par RTC. Elle permet également des raccordements par le biais de liaisons spécialisées. Les 48 wilayas du pays sont desservis par des points de présence reliés par des liaisons de 8 Mbit/s aux trois nœuds régionaux de Constantine, Oran et Alger. La plate-forme Internet nationale est reliée via une liaison internationale de 34 Mbits/s.

53 Cet appel d’offres vient d’être annulé par les autorités pour cause d’irrégularités diverses. Un nouvel appel d’offres a

été lancé par Algérie Telecom en octobre 2002 et gagné par Ericsson.

28

Figure 10 : La plate-forme Internet de Djaweb

Source : MPT, Rapport sur la Société de l‘Information en Algérie, 2001. Un numéro d’appel, le « 1515 » permet de se connecter directement à Djaweb sans recourir à un abonnement préalable (tarification spécifique). L’accès « anonyme »54 a d’ores et déjà rencontré un franc succès, et semble avoir abaissé la barrière du coût de l’Internet pour certains abonnés.

4.2 Orascom Telecom Algérie

En juillet 2001, une licence GSM a été attribuée a Orascom Telecom Algérie (OTA) pour un montant de 737 millions de dollars US payable en deux versements dont le premier est intervenu le 24 août 2001, tandis que le second est attendu en décembre 2003. La banque d’affaires, BNP-Paribas, a assisté le Gouvernement pour la préparation et l’organisation de la transaction. Entre le moment où les premières estimations avaient été faites et la date d’attribution, la chute brutale du marché des télécommunications et les difficultés croissantes d’opérateurs engagés dans de lourds investissements relatifs à l’acquisition des licences UMTS en Europe, ont rendu la proposition du Gouvernement algérien moins attrayante. En fin de compte, sur les trois opérateurs pré-sélectionnés (Orascom Telecom, Orange et le consortium Telefonica-Portugal Telecom-Moveis), seuls deux ont remis une offre. L’ouverture des plis a révélé une différence importante entre les deux offres : 737 millions de dollars US pour Orascom, contre 422 millions de dollars US pour Orange. La stratégie « pan-africaine » du groupe est aujourd’hui remise en cause (des filiales en Afrique sub-saharienne sont en vente), et ses difficultés financières grandissantes hypothèquent son développement y compris en Algérie. Ce qui compromet sa stratégie de devenir le plus important opérateur en Afrique du Nord et au Moyen-Orient. Orascom Telecom Algérie (OTA) a été constituée dans la foulée de l’appel d’offre. Le capital de la société a

54 Sans identifiant et sans mot de passe mais pouvant facilement s’interfacer avec l’annuaire des abonnés, selon les dires

mêmes des dirigeants de Djaweb.

Architecture du réseau Internet d’Algérie Telecom

144 Mbps

Internet

ATM 34 Mbps

ATM 34 Mbps ATM 34 Mbps

8 Mbps

8 Mbps

8 Mbps

8 Mbps

8 Mbps

8 Mbps

ALGER ORAN

Constantine

14 sites

14 sites

17 sites

29

été porté début 2002 de 382 à 412 millions de dollars US, et il serait prévu de l’augmenter de nouveau à 510 millions de dollars US au début 200355. La société-mère égyptienne (Orascom Telecom Holding) contrôle 53 % du capital d’OTA, 43 % sont détenus par un consortium (ORATEL)56 réunissant des investisseurs institutionnels sous régionaux et des investisseurs institutionnels algériens, enfin le groupe algérien Cevital (spécialisé dans l’agroalimentaire) contrôle les 3,4 % restants. Cevital envisagerait de porter sa participation à 10 %, ce qui lui permettrait de siéger au conseil d’administration de l’opérateur. Le cahier des charges imposé à Orascom Telecom Algérie est très volontariste. OTA souhaite atteindre 500.000 abonnés au terme de la première année d’exploitation et couvrir les 12 wilayas les plus peuplées (12 août 2002). Au terme de la quatrième année, OTA devrait couvrir la totalité des communes de plus de 2.000 habitants, les axes routiers majeurs, les aéroports, les ports et les zones économiques et touristiques. Au 30 novembre 2002, OTA avait raccordé environ 280.000 abonnés, et son service commercial était disponible dans 16 localités (Alger, Constantine, Oran, etc.), couvrant partiellement le territoire de wilayas importantes. Les difficultés financières aiguës que traverse la société-mère (Orascom Telecom Holding) et les remous autour de l’attribution de la licence durant l’été 2002 ne laissent pas bien augurer du futur57.

5 LES AUTRES OPERATEURS POTENTIELS

De nombreux projets visant à déployer des infrastructures de télécommunications sont en gestation. Ils émanent pour la plupart des grandes entreprises d’utilité publique. Celles-ci souhaitent consolider et développer les infrastructures mises en place pour leurs besoins propres pour pallier aux insuffisances qui caractérisent l’offre publique de télécommunications. En partenariat avec l’opérateur public, la Sonatrach (hydrocarbure), la Sonelgaz (électricité et gaz), TDA (Télédiffusion Algérienne), Air Algérie, ENNA (Entreprise Nationale de Navigation Aérienne), SNTF (Transport ferroviaire), et ANA (Agence Nationale des Autoroutes) ont déployé d’importantes artères de transmission en fibre optique ou en faisceaux hertziens. Au 31 décembre 2001, ces entreprises d’utilité publique totalisaient env iron 6.000 km de câbles en fibre optique. À ces grandes entreprises s’ajoutent trois ministères (Défense nationale, Santé et Formation professionnelle) dont les réseaux sont en restructuration.

55 Dans une entrevue récente publiée par IT Mag No. 1, (Alger, 29 octobre 2002), Lionel Coussi annonçait que AIT

(American Insurance Group) allait devenir actionnaire de OTA avec une contribution totale estimée à 40 millions de dollars US.

56 Oratel International Inc. est contrôlé par huit actionnaires : Orascom Telecom Holding (15,8 %), Naguib Onsi Sawiris (24,3 %), Jordan Mobile Telecom Services (24,3 %), Palestinian Commercial Services (18,2 %), Palestinian Pension Fund (6,1 %), La Luxembourgeoise General Mediterranean Holding (7,3 %), Sheikh A. R. El Jereissy (1,2 %), and Sheikh A. Sharbatly (2,7 %).

57 L’investissement total d’OTA en 2002 était estimé à 550 millions de dollars US, principalement en fonds propres. En 2003, la compagnie espère trouver des financements auprès des banques locales à la hauteur de ses besoins d’investissements, estimés à 1,3 milliard de dollars US, y compris le coût de la licence.

30

Encadré 7 : Le réseau de télécommunications de Sonatrach Avec 25 milliards de dollars de chiffre d’affaires et 130 000 employés, Sonatrach, le géant pétrolier algérien, première société africaine et 12ème au niveau mondial, n’avait pas le choix. Face aux insuffisances de l’opérateur public, la société a commencé à bâtir son réseau interne de télécommunications en 1990. Car les pannes, trop fréquentes et qui pouvaient interrompre le fonctionnement d’un pipe-line pendant deux semaine, coûtaient trop chers. Grâce à cet investissement, qui ne représente pas plus de 2 % du coût d’un gazoduc, la compagnie dispose aujourd’hui de câbles à fibre optique, de 50.000 lignes privées et de 7.000 adresses Internet. Elle est par ailleurs sur le point de mettre en place plusieurs Intranets, répartis selon les métiers (amont, aval, transport, associés…) et envisage de les relier entre eux. Un projet complexe, dont il s’agit de définir le périmètre exact en termes d’accessibilité, et qui devrait être achevé en 2004. Pour le moment, la société ne compte pas faire passer l’ensemble de son réseau en Extranet, mais y songe pour les entreprises qui appartiennent à son environnement direct (prestataires de services, banques, assurances, sociétés de transport…). En attendant, pour la maintenance de son réseau, elle fait de plus en plus appel à la sous-traitance.

5.1 Télédiffusion d’Algérie

TDA n’utilise que la moitié de la capacité de transmission dont elle dispose pour la diffusion de la chaîne nationale de télévision et des quatre stations radio. Elle loue une partie de sa capacité à un opérateur néerlandais, pour le compte de chaînes de télévision installées dans le Golfe persique. TDA souhaiterait utiliser la capacité résiduelle pour accueillir de nouveaux opérateurs. TDA est à l’affût de nouvelles initiatives dans le domaine de l’audiovisuel (chaînes privées, radios locales privées) et de la téléphonie. C’est dans cette optique que TDA a proposé de fournir des liaisons spécialisées (34 Mbps) à OTA et à certains fournisseurs de service Internet, ce qui a été refusé par le régulateur. Le réseau de TDA est composé de 7.200 km de faisceaux hertziens desservant le nord du pays tandis que 100 stations VSAT (dont 50 sont opérées par Algérie Telecom) permettent de desservir le reste du pays. Actuellement TDA dispose de trois points de présence (POPs) à Alger, Oran et Constantine58, qui lui permettent de fournir des liaisons radio spécialisées à 2 Mbps, et dispose d’une bande passante internationale pour écouler le trafic Internet de 8 Mps pour le trafic entrant et de 2 Mbps pour le trafic sortant.

5.2 Algérie Poste

Le réseau postal comprend 3.310 guichets dont 1.000 sont connectés à travers le réseau MEGAPAC 59. La poste algérienne est ainsi la seule institution financière du pays capable d’offrir des services de paiement en temps réel sur la quasi-totalité du territoire. Les services financiers postaux génèrent plus de la moitié des revenus postaux et représentent environ 75 % des activités des bureaux de poste. La poste gère également 5 millions de comptes CCP (compte chèque postal) et 3,2 millions de comptes d’épargne pour le compte de la Caisse nationale d’Épargne et de Prévoyance. Au niveau international, les principales mutations du secteur postal sont induites par une plus grande intégration des technologies de l’information et de la communication et une plus grande libéralisation du marché. Ces tendances ont transformé le service postal traditionnel aussi bien au niveau du courrier que des services financiers. L’Algérie est également touchée par ces transformations. Les principaux services de messagerie internationaux (DHL, Federal Express) et les compétiteurs locaux sont déjà en train de gagner des parts de marché là où l’opérateur historique offre un service de faible qualité, ou ne parvient pas à répondre à la demande.

58 Ces derniers devraient être de l’ordre d’une dizaine à très court terme. 59 Réseau de communication privé du MPTIC.

31

Le tableau ci-dessous illustre la croissance modeste des recettes postales en Algérie au cours des dix dernières années. Les perspectives de développement de l’activité postale passent donc par une amélioration substantielle de l’offre pour susciter une croissance de la demande.

Tableau 4 : Chiffre d'affaires postal , 1990-1999 1990 1991 1992 1993 1994 1995 1996 1997 1998 1999

Activités postales 377,2 420,2 941,9 1100 983 1152,5 1762,1 1622,8 1704,3 1668,6 Services financiers postaux 1097,1 1829,6 2122,7 2562,4 2882,5 3100,2 4571,4 5230,4 6369,4 7177,5

Source : MPT (2001). Le programme de relance 2001-2004 a ainsi assigné 83 millions de dollars US pour améliorer les infrastructures postales de manière à renforcer la compétitivité d’Algérie Poste. La nouvelle stratégie de l’entreprise publique Algérie Poste repose sur une meilleure utilisation des TIC pour améliorer la qualité des prestations offertes au public. Le potentiel de croissance des activités de courrier et colis peut être réalisé si des investissements significatifs sont consentis pour développer les infrastructures et la capacité opérationnelle. L’opérateur dispose de deux principaux atouts : la capillarité de son réseau de collecte qui lui permet de toucher toutes les populations y compris celles implantées dans les zones rurales, le portefeuille de sa clientèle utilisant les CCP. Algérie Poste pourrait ainsi devenir un des principaux vecteurs pour la diffusion des TIC 60, et notamment pour la dissémination des points d’accès à Internet61. Ceci contribuerait à résorber le fossé numérique, notamment vis-à-vis des communautés rurales, et permettrait à terme l’accès à de nombreux services gouvernementaux62.

6 LES FOURNISSEURS DE SERVICES INTERNET

Inexistant il y a dix ans, balbutiant et réservé à quelques centres de recherches il y a cinq ans, Internet est en passe de gagner sa place en Algérie. Certains n’hésitent pas à comparer l’impact d’Internet aujourd’hui au phénomène des antennes paraboliques à la fin des années 80, lorsque ces antennes sont entrées clandestinement dans tous les foyers algériens, contribuant à ouvrir la société algérienne sur le monde extérieur. En 1995, Président Zeroual décide de doter la Présidence de la République algérienne d’un site Internet, et le Gouvernement publie pour la première fois la loi de finances en ligne. Ces deux évènements ont contribué au développement de l’utilisation d’Internet. Avec une densité de 13 internautes pour 1000 habitants, l’Algérie accuse un important retard par rapport aux pays développés, mais aussi par rapport à des pays voisins comme le Maroc ou la Tunisie. On estime le nombre d’internautes63 légèrement des connexions se font par le biais des cybercafés dont le nombre est lui estimé entre 2.300 et 2.400 en mars 2002. Le nombre d’abonnés signalés par les FSI opérationnels est estimé à environ 60.000 abonnés. Le nombre de sites Internet a augmenté (environ 2.000 en mars 2002) et l’Algérie dispose maintenant d’environ dix portails.

60 Développement de plate-formes performantes en matière de logistique pour la livraison du courrier et des colis. 61 Opération « Internet pour tous », une adresse e-mail pour tous les citoyens. 62 Offre de services sécurisés de paiement électronique pouvant contribuer à limiter l’envergure de la masse monétaire

en circulation sous forme de billets de banque et juguler le développement du secteur informel. 63 Il s’agit du nombre d’utilisateurs d’Internet, et non du nombre d’abonnés à un FSI.

32

Au début de l’année 2002, la Commission d’agrément des FSI répertoriait 74 fournisseurs de services Internet, dont seuls une dizaine étaient opérationnels. Plusieurs opérateurs ont sous-estimé l’investissement et les compétences techniques nécessaires au démarrage d’une activité de FSI. D’autres se sont contentés de demander l’agrément pour ne pas manquer une opportunité. Enfin, une dernière catégorie se contente de proposer un service de cybercafés malgré leur statut de FSI64. Le marché s’annonce prometteur avec des perspectives évaluées à plus d’un million d’internautes fin 2002. L’infrastructure s’étoffe, avec la mise en service début 2002 d’une plate-forme IP lancée par Algérie Telecom. Algericom, un fournisseur privé basé à Oran projette également de monter son propre backbone national et annonce la mise en place d’une plate-forme en mesure d’accueillir 500.000 abonnés. De même, Télédiffusion d’Algérie a engagé le développement de son propre réseau d’accès à Internet en 2002. Toutes ces initiatives visent à capter une demande potentielle jugée importante, mais qui reste encore non satisfaite en raison du coût du matériel et des services de téléphonie, qui est élevé par rapport aux ressources des ménages algériens65. Encadré 8 : Djaweb, une concurrence déloyale ? Outre les difficultés de constitution d’Algérie Telecom, un autre sujet illustre les contradictions de l’État, face à la dérégulation du secteur des télécommunications. Trois ans après les premiers fournisseurs privés, le MPT lança au début janvier 2002, son propre service d’accès à Internet. Baptisé Djaweb, ce réseau fonctionne grâce à trois POP (Alger, Constantine, Oran) et permet l’accès à Internet depuis l’ensemble du territoire, avec 10.000 connexions simultanées possibles. La connexion se fait sans abonnement, grâce à un numéro simplifié à quatre chiffres, le 15-15. Djaweb a pour vocation de permettre l’accès au plus grand nombre, notamment dans les zones non couvertes par les fournisseurs privés. Mais le coût du service reste élevé : 2,04 dinars la minute, soit de 20 à 30 % plus cher que les autres. Le ministère a anticipé la hausse future du coût des communications téléphoniques locales. La connexion par le 15-15 suscite des protestations véhémentes, chez les FSI agréés, qui n’hésitent pas à parler de « concurrence déloyale » et réclament, eux aussi, l’obtention d’une numérotation simplifiée66. D’autres déclarent que « Djaweb n’apporte aucune valeur ajoutée en terme de services » et pensent que les consommateurs iront au moins cher. Arrivé tard sur le marché, Djaweb saura-t-il convaincre ? Les ambitions de ses promoteurs sont à peine voilées : faire de Djaweb l’équivalent pour Algérie Telecom de ce que Wanadoo est à France Telecom.

6.1 Le CERIST

Le Centre de Recherches sur l’Information scientifique et technique (CERIST) fut le premier organisme (et longtemps le seul FSI) habilité à proposer l’accès à Internet. Fondé en mars 1986, et placé sous la tutelle du ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche, le CERIST est un établissement public à caractère scientifique et technique. Son activité FSI a démarré en 1993 avec seulement huit lignes spécialisées de faibles débits. À ce jour, le CERIST reste le premier fournisseur d’accès avec 18.000 abonnés actifs. Son infrastructure comprend une liaison d’accès de 20 Mbits/s vers les USA, plus de 80 points d’accès répartis sur tout le territoire national, environ 2.000 lignes téléphoniques RTC et 40 lignes spécialisées (64 kbits/s) pour la connexion de ses abonnés. Compte tenu de son statut, la direction du CERIST s’interroge sur le devenir de son activité FSI, estimant qu’à présent elle devrait laisser au secteur privé le soin de poursuivre le développement de l’Internet, et se recentrer sur son métier principal. L’activité Internet pourrait donc être filialisée et éventuellement privatisée.

64 La commission d’agrément des FSI a volontairement élargi le champ d’application du décret, afin de ne pas « brider »

les initiatives individuelles. Les candidats se multiplient pour proposer l’accès au réseau, mais peu se préoccupent aujourd’hui de proposer une offre originale d’informations, de services, ou d’échanges commerciaux.

65 Environ 150 000 dinars tout compris pour accéder à Internet (1.870 dollars US, 2.130 €). 66 L’ARPT (le regulateur local) a récemment octroyé aux FSI concurrents des numéros abrégés similaires, assurant ainsi

l’égalité des conditions de jeu.

33

6.2 EEPAD-WANADOO

Née en 1992, l’EEPAD est jusqu’en 1995, un institut de formation continue et de formation par correspondance. Son promoteur, M. Nouar Harzallah, est un ancien haut-fonctionnaire du Ministère de la Formation professionnelle. À partir de 1995, l’EEPAD se lance dans l’utilisation des nouvelles technologies de l’information (vidéoconférence) pour ses prestations de formation. C’est ainsi qu’elle participe en 1996 et en 1997 aux premières expériences de télé-médecine conduites entre le CHU d’Alger et les hôpitaux Necker et Cochin à Paris. En 1998 l’entreprise obtient un agrément de FSI et installe son premier point de présence (POP) à Annaba. En mars 2001, l’EEPAD signe un contrat de franchise avec l’opérateur français Wanadoo, pour créer Wanadoo-Algérie. Le contrat de franchise est d’abord conclu pour dix-huit mois. Par la suite, les deux parties conviennent de constituer une filiale commune dont 25 % du capital est détenu par Wanadoo. Au niveau de la formation, l’EEPAD a lancé en 2001 une opération baptisée « 50.000 heures pour les écoles ». Sous la forme de bons d’accès gratuit à Internet distribués dans les écoles, cette opération a connu un grand succès67. L’entreprise veut mettre en œuvre une plate-forme d’éducation à distance et espère connecter de 100.000 à 200.000 abonnés. Elle espère aussi capitaliser sur le développement du commerce électronique, même si l’absence d’un cadre réglementaire adéquat ne permet pas encore les paiements en ligne. L’EEPAD emploie 73 personnes et réalise un chiffre d’affaires de 150 millions de dinars, dont les ressources proviennent à 60 % de ses abonnés Internet. Encadré 9 : EEPAD-Wanadoo, le plus grand FSI privé algérien Avec 18.000 abonnés et un tarif moyen de 30 dinars de l’heure, EEPAD-Wanadoo est actuellement le premier FSI algérien, à égalité avec le CERIST. Il est le seul aujourd’hui à pouvoir proposer un accès à presque tous les internautes du pays, avec sept plates-formes installées ou en cours d’installation dans tout le pays. Sa clientèle est constituée à 60 % d’entreprises (moitié privé, moitié public) et à 40 % de particuliers. Le PDG de l’EEPAD annonce 400.000 connexions par mois (dont 54 % en France) et un million de pages vues. La société interconnecte également 50 entreprises entre elles par le biais de lignes spécialisées. Elle mène par ailleurs deux projets avec deux banques (une banque privée, l’autre publique), pour connecter entre elles les agences sous la forme d’Intranets sécurisés. Parmi les autres innovations, la société a également lan cé une carte pré-payée, baptisée Cartanet, dont les tarifs commencent à 500 dinars. Trois formules sont possibles : standard, plus ou gold. Vendue dans les kiosques multiservices et les cyber-cafés, la carte permet de naviguer sur Internet, de disposer d’une adresse e-mail simple ou vocale et même de construire des pages personnelles.

6.3 GECOS

La société Gecos a été crée en 1994 pour commercialiser et installer les équipements informatiques. En 1997, elle est rejointe par son actuel président du directoire, Younes Grar, qui a quitté son poste de chercheur au Centre de Développement des Technologies Avancées (CDTA) où il était chargé du projet Internet. Profitant du vide juridique autour d’Internet, la société lance la commercialisation des abonnements Internet auprès de quelques opérateurs économiques privés. Une dizaine de quotidiens privés tentent l’aventure avec Gecos. La prestation est quasi-gratuite, l’objectif est de « changer les mentalités » et de se faire connaître. En septembre 1997, la société ouvre le premier cybercafé algérien à Alger. Le second cybercafé ouvrira un an plus tard. Ce sera un succès immédiat, malgré des tarifs élevés (250 dinars de l’heure et beaucoup de difficultés techniques).

67 Le déploiement à grande échelle de cette opération dépendra des conclusions des pourparlers engagés avec le

ministère de l’éducation.

34

La libéralisation d’Internet en 1998 permet à Gecos de devenir le premier FSI privé à obtenir un agrément. Mais, les velléités d’indépendance affichées de Younes Grar, ses prises de position tranchées et une audience certaine dans les médias provoquent des blocages. C’est le cas lorsque Gecos annonce son intention d’acquérir sa propre station d’émission réception. En mars 2000, le matériel est bloqué plusieurs semaines à l’aéroport. Le scénario se reproduit en novembre 2001, lorsque la société souhaite implanter une deuxième station VSAT pour la connexion avec le Canada. Grâce à ces investissements, Gecos est l’un des rares FSI disposant de ses propres infrastructures d’accès à l’international. Actuellement, Gecos déclare avoir 10.000 abonnés, dont 3.000 entreprises, et possède 200 cybercafés. La société assure la connexion Internet de 12 ministères. Elle est opérationnelle dans les quatre plus grandes villes du pays, couvre 14 wilayas, et s’étend régulièrement. Outre des services d’accès à Internet, la société propose également la conception de sites Internet et des services de formation. Le capital social de Gecos est de 25 millions de dinars dont 30 % contrôlés par les groupes Ababou Electronics et Gemed. En 2001, la société a réalisé un chiffre d’affaires de 80 millions de dinars, et un taux de rentabilité de l’ordre de 10 %.

6.4 BMGI

BMGI International fut l’un des pionniers d’Internet en Algérie. Sa stratégie consistait à développer des services de contenu et non pas à vendre des accès à Internet. Initialement un bureau d’études dans le domaine de l’informatique, BMGI s’est intéressé à l’Internet en 1995. Cette année-là, l’entreprise décroche un contrat de conception des sites de Holdmec68. Dans la foulée, elle enchaîne avec la conception des sites Internet de Saidal69. Elle obtient l’agrément de FSI en 1998. En 1999, BMGI crée un site Internet publiant les appels d’offres. Ce site est baptisé : www.business-dz.com. En 2000, l’activité portail est lancée70. Pour financer son activité, BMGI intensifie son offre de formation et propose les premières sessions de formation sur la conception et la maintenance de sites Internet (web master), ainsi que des séminaires d’apprentissage sur une utilisation efficace d’Internet par les cadres. Elle réalise un chiffre d’affaires de 12 millions de dinars, emploie une quinzaine de permanents et travaille également avec deux sociétés de services d’ingénierie informatique (SSII).

7 LES DISTRIBUTEURS D’ORDINATEURS ET PRESTATAIRES DE SERVICES INFORMATIQUES

Aucune statistique globale et officielle n’existe sur le parc informatique en Algérie. Le Rapport 2001 sur la société de l’information cite deux sources : la revue Arabies qui estimait en 2001 le stocks d’ordinateurs en Algérie à 600.000 et les services des douanes qui estimaient quant à eux que 300.000 ordinateurs étaient importés chaque année en Algérie. Cette absence de chiffres illustre la faible informatisation de l’économie algérienne. L’administration et les entreprises algériennes n’ont pas encore amorcé l’informatisation de leurs procédures et gestion. Plusieurs acteurs du secteur soulignent par ailleurs que l’utilisation de l’ordinateur est encore trop souvent réduite au traitement de texte. La quasi-inexistence des réseaux locaux dans les entreprises et dans les administrations montre par ailleurs que l’outil informatique n’est pas encore intégré comme un facteur de productivité et d’accélération du développement économique. L’absence d’une réflexion ou d’une politique nationale en matière d’informatisation de l’État, et les remaniements de celui-ci, expliqueraient probablement la situation actuelle. Diffuser l’utilisation du courrier électronique (e-mail) dans les administrations serait un premier pas vers une culture de partage de la connaissance, permettant d’améliorer leur efficacité.

68 Holding publique du secteur de l’industrie mécanique, qui regroupe 40 entreprises et emploie 36.000 personnes. 69 Holding des entreprises publiques dans le domaine de la pharmacie. 70 Mais toutes ces activités sont peu rentables, faute de ressources procurées par le web.

35

7.1 Les principales entreprises publiques

Depuis la dissolution du Commissariat national à l’informatique, en 1975, le secteur de l’informatique a été restructuré en plusieurs branches, sous la forme d’entreprises publiques. Les principales entreprises publiques restées actives dans ce secteur sont : ENIE (L’Entreprise Nationale de l’Industrie Électronique) : cette société est spécialisée dans la fabrication de produits électroniques grand public (téléviseurs, magnétoscopes, chaînes hi-fi, composants actifs et passifs). Elle possède conjointement avec l’ENSI, Alfatron, une filiale spécialisée dans l’assemblage de micro-ordinateurs et l’installation de réseaux d’entreprises. Alfatron est une société au capital social de 39 millions de dinars. Elle dispose d’une unité de fabrication à Oran qui peut fabriquer jusqu’à 50.000 ordinateurs par an. Elle emploie 50 personnes, dont 30 ingénieurs. Certifiée par Microsoft pour l’installation de réseaux informatiques et par Intel pour l’intégration des micro-processeurs dans les ordinateurs, elle a vu son chiffre d’affaires augmenter de 70 millions de dinars en 1986 à 350 millions de dinars en 2000. ENSI (Entreprise Nationale de Systèmes Informatiques) : l’ENSI est une entreprise publique à caractère économique, dotée d’un capital social de 92,5 millions de dinars. Elle a été transformée en société par actions en 1988 et fait partie des sociétés qui pourraient être privatisées. Elle est spécialisée en matière d’études et conseils en entreprises, de développement de logiciels, d’assemblage d’ordinateurs (voir ENIE), de conception et de maintenance des réseaux informatiques, de formation. L’ENSI commercialise également les accès à Internet par satellite. CETIC : créé en 1976, le Centre des Techniques de l’Information et de la Communication est devenue société par actions en 1983. Elle fait également partie des entreprises privatisables. Le capital social du CETIC est de 4,7 millions de dinars détenu à 100 % par l’État71. Le CETIC mène des activités de SSII, de conseil en organisation et d’audit. La société bénéficie d’un partenariat étroit avec Bull et est le sous traitant local du cabinet Pricewaterhouse Coopers (PwC). À terme, une prise de participation de PwC dans le capital du CETIC est envisagée. Le CETIC emploie 100 personnes en permanence et travaille également avec un réseau de 250 consultants indépendants. Son chiffre d’affaires pour l’année 2000 s’est élevé à 311 millions de dinars et le résultat d’exploitation a été de 21 millions de dinars.

7.2 Les principales entreprises privées

Bien qu’il n’existe pas de statistiques globales permettant une analyse de la structure du secteur privé dans le domaine de l’informatique, on assiste depuis quelques années à une prolifération de marques nouvelles et à la création de nombreuses petites société privées. Celles-ci se consacrent principalement à la distribution du matériel et de logiciels, et fournissent quelques prestations dans le domaine du conseil, de la maintenance et de la formation informatique. L’assemblage d’ordinateurs constitue également une activité en forte croissance. Comme pour de nombreuses initiatives de ce type en Algérie, les promoteurs ne mènent pas systématiquement d’étude de marché, estimant que l’offre existante ne satisfait pas la demande. King Line Computers appartient à cette catégorie. L’entreprise a une capacité de production de 300 machines par mois, et a établi un réseau de distribution bien organisé. D’une manière générale, la plupart des entreprises du secteur sont de simples représentants de fabricants étrangers. Les partenariats, notamment industriels, sont rares. Le marché de l’informatique donne le sentiment d’une certaine confusion : les incompatibilités entre matériels sont fréquentes. Dans le domaine des logiciels, la piraterie constitue le principal problème. Microsoft Algérie estime que près de 95 % des logiciels utilisés dans le pays sont piratés. Pour combattre ce phénomène, Microsoft souhaite développer un

71 La direction a proposé une ouverture progressive du capital aux salariés, aux cadres et aux consultants extérieurs,

sans succès pour le moment.

36

partenariat avec les autorités algériennes. Ce partenariat serait articulé autour de prestations d’assistance à l’informatisation et à la formation du personnel, ainsi que l’intensification des contrôles sur le respect de la législation en matière de propriété intellectuelle par les autorités. Dans cette perspective, Microsoft a aussi signé une convention avec le Ministère de la Formation professionnelle, et est en train d’en négocier une seconde avec le Ministère de l’Éducation nationale. Dans le prolongement de cette stratégie, Microsoft a soutenu la constitution d’une association des éditeurs et développeurs de logiciels pour mieux juguler le développement de la piraterie.

Encadré 10 : ALBM ou comment contourner les difficultés locales

Algerian Business Machines, créée en 1995, est une SARL algérienne au capital de 500 millions de dinars. Elle a pris la succession de l’ancien bureau IBM, qui avait quitté le pays au début des années 90 à cause de la situation d’insécurité. D’abord concessionnaire quasi-exclusif de la compagnie américaine, ALBM est devenue «business-partner» trois ans plus tard. Intervenant à la fois dans l’informatique et dans les télécommunications, la société a deux activités principales en plus de la vente de PC, logiciels et services (elle commercialise les applications de gestion IBM et s’est également lancée dans l’ERP) et réseaux de télécommunications (certification Cisco et installation de PABX). Ses clients sont à 80 % dans le secteur public : banques, assurances, industrie, administrations…), mais de plus en plus aussi elle travaille pour des sociétés internationales qui s’implantent dans le pays (Coca-Cola, Aventis…). Les clients du secteur privé algérien sont encore rares.

Pour contourner la législation algérienne qui ne permet pas aux entreprises de disposer de comptes en devises, ce qui complique donc leur capacité de répondre à des appels d’offre internationaux, ALBM a conçu un système unique dans le pays. Elle a constitué une société off-shore avec IBM Europe, qui répond aux appels d’offre à la place d’ALBM. Cette branche fournit l’essentiel du chiffre d’affaires, soit environ, 6,5 millions €, sous la forme de fournitures d’équipement. La branche algérienne, elle, réalise un chiffre d’affaires de 200 millions de dinars. Le capital d’ALBM est détenu à 48 % par son PDG, à 16 % par différents particuliers et à 36 % par les salariés. ALBM emploie 30 personnes, dont 20 pour le service au client. Au total, le secteur des services informatiques apparaît comme un marché émergent et peu structuré. En dehors des quelques sociétés publiques, constituées dans les années 70 après la dissolution du commissariat à l’informatique, la structure de ce marché se caractérise par quelques dizaines de petites entreprises. Ces sociétés ne sont pas encore spécialisées mais pourraient s’adapter facilement à la demande des clients. En conclusion, pour que l’Algérie puisse faire face à l’augmentation de la demande nationale d’infrastructure informatique qui résultera de la privatisation et restructuration du secteur, il faudrait consolider son industrie. Ceci peut être accompli à travers la privatisation des entités manufacturières existantes (ENIE, CETIC, SITEL, etc.), parallèlement à des efforts pour attirer les multinationales étrangères pour établir des usines locales et des bureaux dans le pays. Seule une combinaison de ces deux approches permettrait au pays d’éviter de coûteux imports massifs de produits TI dans le futur.

8 LES INTERVENANTS DANS LES MEDIAS DE L’INFORMATION

8.1 La presse écrite

Depuis la libération de la presse en 1990, de nouvelles publications sont apparues. Toutes les tendances et opinions sont aujourd’hui représentées. En 2002, on recensait 184 publications représentant un tirage quotidien estimé à 1.700.000 exemplaires. La liberté d’opinion exprimée, volontiers polémique vis-à-vis du Gouvernement, est d’ailleurs frappante

37

Encadré 11 : Les quotidiens, pionniers d’Internet Ils furent les premiers dans la société civile à investir dans Internet. Sous l’impulsion du président du directoire de Gecos, Younes Grar, les quotidiens n’ont pas tardé à saisir l’opportunité de l’outil : « sortir » leur édition malgré les aléas (grève panne de papier, censure)… et montrer leur savoir-faire au reste du monde. Le premier à se mettre en ligne fut El Watan , rapidement suivi par les autres titres importants. Aujourd’hui, les quotidiens sont très présents sur le net algérien. Une quinzaine de titres ont leur site, où l’on peut lire gratuitement l’édition du jour et accéder aux archives. Et les portails ont tous des liens avec l’ensemble des sites de la presse, ou font une sélection d’articles par thèmes. Dans leur sommaire, de plus en plus de titres développent à présent des pages spécialisées sur le multimédia. Les fournisseurs de services Internet y trouvent une tribune essentielle à leurs préoccupations ou à leurs revendications. Certains sujets, comme l’attribution de la seconde licence GSM, occupent une place importante et contribuent à animer les débats dans la population autour de la société de l’information. La presse francophone est dominée par quelques journaux quotidiens importants :

• El Moudjahid (la voix informée et autorisée du pouvoir), • El Watan (100.000 exemplaires, propriété collective de journalistes issus d’El Moudjahid), • Liberté (150.000 exemplaires, libéral et plutôt proche des milieux d’affaires), • Le Matin (90.000 exemplaires, quotidien d’Alger, la voix d’une partie de l’opposition), • Le Quotidien d’Oran (40.000 exemplaires, de qualité, a rapidement dépassé sa zone d’influence

pour devenir quotidien national), • La Tribune (réputé proche des réformateurs du FLN).

El Khabar est le premier quotidien de langue arabe. Il est tiré à 400.000 exemplaires, de ton indépendant et très lu. À ces titres s’ajoutent les dépêches produites par l’agence de presse publique l’APS et, depuis peu, celles d’une agence privée AAI. Si, depuis l’élection du Président Abdelaziz Bouteflika, aucun journaliste n’a été emprisonné, la loi sur la presse demeure restrictive pour la liberté d’expression des journalistes. Celle-ci prévoit des « délits de presse » passibles de peines de prison pour « écrits diffamatoires », « insultes » ou « outrages » envers le Chef de l’État, ou diffusion d’informations « fausses », « alarmistes » ou de nature « à porter atteinte à la sûreté de l’État »72.

8.2 La télévision et la radio

ENTV, entreprise d’État, est chargée de produire et de réaliser les programmes de la chaîne de télévision Canal Algérie dont 70 % sont en français et 30 % en langue arabe. Placée sous le monopole de l’État, cette chaîne est diffusée par Télédiffusion d’Algérie sur l’ensemble du territoire. Bien qu’il n’y ait pas de mesure scientifique de l’audience, il est évident que la télévision publique souffre de la concurrence des chaînes transmettant par satellites. 73 % des ménages disposent d’un téléviseur, et la plupart est également équipée d’une antenne parabolique permettant de capter des centaines de chaînes à travers des bouquets satellitaires européens et arabes73. Un marché semi-clandestin de vente de terminaux et de cartes pirates s’est mis en place depuis deux décennies et se développe rapidement. Au début de l’année 2002, l’achat d’une carte pirate coûtait 2 à 3.000 dinars, contre 40.000 dinars quatre ans plus tôt. Le rechargement mensuel de la carte coûte entre 130 et 150 dinars. La piraterie est endémique dans ce secteur et devrait être jugulée. Les recommandations finales suggèrent de moderniser la réglementation et de renforcer les ressources associées à son application.

72 Cette loi doit être révisée depuis trois ans, mais la discussion du nouveau texte est sans cesse repoussée. 73 Dans son édition du 20 novembre 2002, le quotidien Le Soir déclarait : « L’Algérie a importé durant les neufs

premiers mois de 2002 l’équivalent de 122 million de dollars US en équipement satellite TV, dont l’Allemagne a fourni 40 millions de dollars US, la France 17 millions, et les USA 33 millions de dollars ».

38

Comme la télévision, la radio est sous le monopole de l’État. Le pays compte quatre stations nationales dont une en Arabe, une en Français, une en Tamazight (la langue berbère) et une quatrième station, Bejaia, qui mélange toutes ces langues et diffuse de la musique sur un format plutôt orienté vers la jeunesse. La revue sectorielle conduite dans ce chapitre permet de situer la nature et l’ampleur des enjeux auxquels l’Algérie doit faire face pour réussir le développement d’un secteur TIC. L’offre des télécommunications est globalement insatisfaisante et la demande non satisfaite reste importante. La société et l’économie algériennes n’ont pas encore amorcé leur informatisation, ce qui risque de ralentir la transition vers une société de l’information.

39

CHAPITRE 3 : ATOUTS ET DÉFIS

L’Algérie bénéficie de nombreux atouts qui, bien valorisés, lui permettraient une transition rapide vers une économie de l’information. Cependant, l’histoire récente du pays montre que les difficultés à surmonter sont importantes. Le présent chapitre présente les initiatives engagées pour encourager l’utilisation des TIC, passe en revue les atouts dont dispose l’Algérie pour promouvoir un secteur TIC et souligne les différents obstacles que le pays devra surmonter pour réussir sa transformation en société de l’information.

1 LES INITIATIVES DE DEVELOPPEMENT DES TIC

Le Président de la République, M. Abdelaziz Bouteflika, cite souvent dans ses discours l’importance stratégique du secteur des TIC dans la politique de modernisation et de développement économique de l’Algérie. Le 31 décembre 2001, il a par exemple souligné « l’importance des enjeux de la bataille technologique » à laquelle l’Algérie doit faire face, ce qui implique de « reconstruire progressivement la société de l’information ». Plusieurs ministères sont particulièrement impliqués dans l’essor des TIC. Le Ministre de la Communication, M. Mohamed Abbou, a ainsi rappelé en janvier 2002 l’urgence de « généraliser l’utilisation des nouvelles technologies de l’information et de la communication dans divers domaines comme celui de l’administration publique ».

Encadré 12 : Le réseau Santé Algérie

Lancé en janvier 1999, le réseau Santé Algérie a d’abord été un simple site, avant de devenir un véritable Intranet à partir de janvier 2002. En cours de développement, il visait à connecter entre eux en 2002 les 13 Centres Hospitaliers Universitaires du pays (CHU), 15 établissements hospitaliers secondaires (sur 32) et 10 organismes spécialisés sous tutelle. Piloté par l’Agence nationale de documentation en santé (ANDS), Santé Algérie s’appuie sur une plate-forme réseau, une dizaine de serveurs (authentification et accès distant, messageries avec interface Internet, systèmes d’information et bases de données…), une liaison fibre optique avec un support de 34 Mbits/s et 512 liaisons RTC. Cet Intranet permettra de mettre en connexion les réseaux internes aux établissements hospitaliers. Il cherchera aussi à promouvoir toutes les fonctions de partage de l’information : connexion à des bases de données centrales et à des ressources documentaires, messagerie intra et inter-établissements, forums de discussion, élaboration et alimentation des portails Internet par établissements, formation des utilisateurs… Parmi les projets en cours ou en voie de l’être, trois directions sont prises : la télé-assistance (aide au diagnostic, aide à l’interprétation des explorations médicales, aide à la thérapeutique), la veille épidémiologique et le téléenseignement (projet de formation sur la transfusion sanguine). En matière de télé-médecine, une première expérience concluante a eu lieu entre le 17 et le 19 février 2002 entre l’Assistance publique des hôpitaux de Marseille et le CHU de Bab El Oued, avec notamment la transmission d’imagerie médicale. L’expérience devrait être renouvelée en avril, lors d’un congrès international sur les urgences, et en juin avec la diffusion en direct, dans un amphithéâtre, d’une opération de neurochirurgie. L’ANDS est par ailleurs le point focal en Algérie de l’initiative Eumedis en télé-médecine, baptisée Emispher. C’est un projet qui vise à établir, par le biais d’Internet, un réseau permanent d’établissements hospitaliers et de centres de santé primaire dans le bassin méditerranéen. Le Ministre de la Santé et de la Population utilise un autre moyen pour promouvoir l’usage de l’Internet dans son administration. Il envoie tous ses mémos et répond aux correspondances de ses collègues et de son personnel par e-mail, et participe directement à un forum de discussions sur le site www.Algériesanté.dz. Les Ministères de la Formation professionnelle, de l’Éducation nationale et de l’Enseignement supérieur et de la Recherche se sont engagés dans d’importants projets promouvant l’utilisation des TIC. Si l’importance

40

de ces initiatives n’est plus à démontrer, il reste que de nombreuses modalités pratiques pour une intégration efficace des TIC dans ces branches professionnelles n’ont pas été examinées.

1.1 Les TIC dans l’enseignement supérieur

La stratégie du Gouvernement pour améliorer la diffusion des TIC dans le système d’éducation supérieure es basée sur trois axes : moderniser l’administration de l’éducation supérieure, promouvoir l’utilisation des TIC comme soutien à la recherche, et faire des TIC un domaine de recherche indépendant. Il existe d’excellentes raisons pour les deux premières stratégies de diffusion TIC et leur développement à travers le secteur de l’éducation supérieure. Les efforts pour moderniser l’administration de l’éducation auront d’importants bénéfices. Il est prouvé qu’il s’agit là d’un moyen viable d’introduire la culture TIC dans le secteur à long terme, en plus d’une efficacité améliorée. De plus, la promotion de la connectivité et l’utilisation de l’informatique dans la recherche et l’apprentissage en éducation supérieure constituent une approche prometteuse. Ce niveau du système d’éducation est celui qui bénéficiera le plus de l’introduction des nouvelles technologies, en particulier parce qu’il fournira à terme relativement court l’opportunité d’exploiter et de contribuer à la recherche et l’apprentissage au niveau global. Encadré 13 : Les espoirs vers une université virtuelle Parmi les projets de société de l’information que pilote le Ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche, celui du télé-enseignement occupe une place déterminante. En raison de la taille du pays, de régions peu habitées et mal desservies en services publics, ce concept apparaît en effet stratégique pour mieux diffuser le savoir sur l’ensemble du territoire. Le projet d’université virtuelle est donc mené par l’Université de la Formation continue, une structure créée en 1990 et qui accueille près de 50 000 étudiants chaque année. Destinée aux jeunes qui n’ont pas dépassé le baccalauréat et qui souhaitent obtenir des diplômes de type bac + 3 par le biais de cours du soir, l’UFC pratique déjà l’enseignement à distance par voie postale depuis trois ans. Elle utilise déjà les TIC dans la diffusion de ses enseignements, par le biais de son site Internet. Elle est par ailleurs le point focal en Algérie du projet Avicenne de la Commission européenne, qui vise à connecter des établissements des deux côtés de la Méditerranée, pour des enseignements à distance par vidéoconférence et, bientôt, par Internet. Mais le projet n’a pas encore abouti en Algérie, en raison d’une infrastructure téléphonique insuffisante, d’un cadre juridique qui reste à définir, mais aussi d’un projet pédagogique qui n’est pas encore finalisé.

1.2 Les TIC dans l’enseignement primaire et secondaire

Les 17.000 écoles primaires, 6.000 collèges et 1.300 lycées algériens sont encore peu équipés en ordinateurs, et ne sont pas encore connectés à l’Internet. Pour la plupart d’entre eux, l’équipement informatique se limite à un, voire quelques ordinateurs qui servent à la gestion quotidienne des établissements. C’est la raison pour laquelle les autorités souhaitent accélérer l’introduction de l’informatique et d’Internet dans les écoles et les lycées. Mais cette introduction devrait aller de pair avec la formation des enseignants à l’utilisation de ces outils, et reposer sur le développement progressif d’outils pédagogiques spécifiques. « Tarbianet » vise à promouvoir les TIC dans le secteur de l’éducation à travers une triple action. Premièrement, il entraîne la modernisation de l’administration du secteur. Ensuite, il se focalise sur l’éducation à distance. Enfin, il cherche à diffuser les TIC à l’école. Cette dernière initiative consiste en trois étapes : 1) équiper les écoles avec des ordinateurs et un accès à Internet, 2) former les enseignants à l’utilisation des TIC pour des besoins pédagogiques, 3) développer le contenu éducatif.

41

Encadré 14 : Des enseignants à convaincre

Considérant la moyenne d’âge du corps enseignant (la moitié des enseignants sont âgés de plus de quarante ans), le Ministère de l’Éducation nationale s’attend à quelques difficultés pour faire admettre l’arrivée de l’ordinateur dans les établissements scolaires. Selon le secrétariat général, les professeurs recrutés il y a plus de vingt ans ont un bagage culturel plutôt faible et, pour la plupart, l’usage de l’informatique leur est totalement étranger. Un gros effort de formation devra donc être déployé, avec l’appui des sociétés chargées de la distribution des postes, et aussi celui des wilayas, qui sont prêtes pour certaines à s’y associer. La wilaya d’Alger, par exemple, a déjà commencé en 2000 à équiper une cinquantaine d’établissements scolaires et à former des « enseignants-relais », intéressés par l’informatique et susceptibles de sensibiliser leurs collègues. Autre initiative, celle de l’Éducation nationale qui prépare déjà ses futures troupes aux TIC : depuis 2000, les écoles normales supérieures, qui forment les professeurs de l’enseignement secondaire, doivent obligatoirement organiser un module de formation aux nouvelles technologies de l’information et de la communication Dans le cadre du programme de relance économique, un plan de financement de 3 milliards de dinars, étalé sur la période 2002-2004, devrait permettre de parvenir à l’équipement de tous les lycées du pays. Ce programme prévoit l’installation de 20 à 30 postes par établissements, cinq postes pour les bibliothèques. L’attribution de ces moyens ira en priorité aux établissements scolaires obtenant les meilleurs résultats au baccalauréat74. À cet effet, le ministère de l’éducation nationale a engagé en 2002, des négociations avec deux distributeurs locaux (Alfatron et King Line Computer) pour la fourniture des matériels, la formation des utilisateurs et la maintenance des systèmes qui seront ainsi installés. Dans le même ordre d’idée, le Ministère de l’Éducation a engagé le déploiement d’un réseau Intranet pour relier les services centraux du ministère aux 48 directions des wilayas. À charge ensuite, pour chacune des directions, d’établir la connexion avec les lycées. Il existe cependant trois obstacles fondamentaux, qui se recoupent dans une certaine mesure, à l’introduction des TIC dans le secteur de l’éducation primaire. En tout premier lieu, la création d’une base de capital humain plus réceptif aux TIC ne dépend pas de la présence ou de l’absence d’ordinateurs, mais d’abord de la qualité générale de l’instruction. Si l’enseignement est de faible qualité, il conviendrait d’envisager son amélioration. Il y a peu de preuves que l’introduction de l’ordinateur dans un environnement d’enseignement peu efficace puisse améliorer les résultats pédagogiques (mais il existe des preuves du contraire). Des étudiants mieux préparés constitueront une meilleure base de ressources humaines en phase avec une économie basée sur la connaissance, que des étudiants pauvrement préparés ayant eu l’occasion de voir des ordinateurs dans leurs écoles. Ensuite, utiliser le nombre des ordinateurs comme indicateur des progrès envers les TIC est trompeur et peut engendrer des investissements très élevés avec un fort risque de maigres retours. Des objectifs uniquement quantitatifs—tels que 20 ordinateurs par école pour l’ensemble du pays—éclipsent les questions-clés au sujet de leur utilisation et de leur maintenance. Les Algériens prévoient d’installer ces ordinateurs en premier lieu dans les meilleures écoles. Ces excellentes écoles ont-elles besoin d’une telle subvention ? D’un autre côté, ces écoles peuvent avoir le meilleur capital humain avec des enseignants qualifiés et motivés, ce qui augmenterait les possibilités de diffusion et d’utilisation efficace des TIC. Troisièmement, le coût de l’entretien des infrastructures et du dépassement des barrières institutionnelles est généralement sous-estimé dans le secteur de l’éducation. L’absence d’arrangements institutionnels appropriés, d’infrastructure et de capacité à fournir les soutiens techniques est une contrainte clé et coûteuse pour l’utilisation efficace de l’ordinateur et de l’accès Internet à l’école. L’expérience algérienne de « l'université virtuelle » est restée limitée en raison du manque d’infrastructure et d’un cadre réglementaire approprié. De tels problèmes ne seront pas faciles à résoudre dans les écoles primaires et secondaires. Enfin, le Ministère de l’Éducation a engagé des pourparlers avec la société Microsoft Algérie pour la fourniture des logiciels et des prestations de formation75. Dans ce programme, la formation des enseignants et des élèves consistera d’abord en une initiation au fonctionnement et à l’utilisation de l’ordinateur, puis,

74 Déjà, en 2001, une opération-pilote a permis d’équiper 150 d’entre eux. 75 Microsoft propose un forfait de 75 dollars par machine pour ces services.

42

dans un deuxième temps, en l’intégration de l’utilisation des outils informatiques dans la démarche pédagogique. Une fois que les lycées seront équipés, le ministère compte prolonger l’initiative dans les collèges, puis dans les écoles primaires. Ce plan d’équipement devra être achevé en 2010.

1.3 Les TIC dans la formation professionnelle

Avec 800 établissements, 937 spécialités enseignées et 4.200 stagiaires formés chaque année, le Ministère de la Formation professionnelle dispose d’un vaste réseau d’établissements sur l’ensemble du territoire algérien. Afin d’améliorer la coordination, la gestion et surtout l’échange des informations pédagogiques entre tous ses établissements, le ministère a engagé la mise en place d’un réseau Intranet. Baptisé « Intransitif », ce réseau comptera près de 1.000 points d’accès, avec un accès hiérarchisé et contrôlé. Les capacités de transmission (liaisons louées) et les accès IP seront loués auprès de Djaweb, filiale commune d’Algérie Poste et d’Algérie Telecom. L’Intranet permettra de véhiculer des programmes de formation, des informations statistiques ainsi que l’orientation des stagiaires assistée par ordinateur. Le Ministère a signé en juillet 2001 une convention de partenariat avec Microsoft Algérie pour l’acquisition de logiciels.

1.4 Les TIC dans la recherche et le développement

Dans le domaine des TIC, on compte une cinquantaine de laboratoires rattachés aux universités ou à d’autres établissements spécialisés. L’organisme le plus impliqué reste le CERIST. Il dispose de plusieurs laboratoires : intelligence artificielle, base de données relationnelles, systèmes d’information, recherche et développement en information scientifique et technique (IST), collecte, traitement et diffusion de l’Information Scientifique et Technologique, réseaux et serveurs d’information, service audiovisuel et multimédia. Il emploie 263 personnes, dont 87 chercheurs. Le Centre de Développement des Techniques Avancées (CDTA), fondé en 1988, est chargé d’effectuer des travaux de recherche scientifique, de développement technologique et de valorisation dans différents domaines. Les activités du CDTA ont permis de mettre au point plusieurs innovations technologiques76. Le CDTA emploie 245 personnes, dont une majorité de chercheurs. En ce qui concerne la valorisation des produits de la recherche, deux agences ont été mises en place par les autorités. L’Agence Nationale du Développement de la Recherche Universitaire (ANDRU) est un organisme public qui a pour mission d’élaborer, d’initier et d’évaluer les programmes de recherche annuels et pluriannuels. Elle doit également assurer la valorisation des résultats de la recherche. Elle est secondée dans sa mission par l’Agence Nationale de Valorisation de la Recherche et des Développements Technologiques (ANVREDET). Cette dernière met en œuvre la stratégie nationale du développement technologique et organise la mise en place d’observatoires et de réseaux de diffusion de la technologie. Concerné depuis longtemps par les questions TIC, le Ministre de l’Éducation Supérieure et de la Recherche a obtenu pour la période 2001-2004, dans le cadre du programme de relance économique, une enveloppe budgétaire substantielle pour la promotion des TIC dans le secteur. Cette enveloppe de 6,4 milliards de dinars se répartit entre six actions prioritaires :

• développement de la télé-médecine : 1,1 milliard de dinars, • réseau national pour la réalisation de logiciels : 0,5 milliard de dinars, • équipement des laboratoires pour produire des circuits intégrés : 0,25 milliard de dinars, • vulgarisation de l’enseignement à distance : 1,35 milliard de dinars, • installation de réseaux Intranet et achat de matériels informatiques : 2,4 milliards de dinars,

76 Développement d’un micro-ordinateur adapté à l’environnement algérien, système d’affichage télévisuel, réseaux

informatiques, robots planaire à quatre axes, système d’acquisition et de traitement d’images, système expert pour le diagnostic des maladies respiratoires…

43

• construction d’un centre de production de circuits intégrés : 2 milliards de dinars. La multiplication des initiatives montre l’intérêt que portent les autorités algériennes au développement de l’usage des TIC d’une manière générale, et d’Internet en particulier. Le secteur des TIC en Algérie est aujourd’hui animé par quelques milliers de personnes, privées et publiques. Par leur action de promotion, ou de « veille technologique » et les débats qu’ils animent dans les médias, ils participent à la diffusion auprès du grand public du concept de société de l’information. C’est ainsi que de nombreux colloques, séminaires, salons et conférences de presse se sont multipliés à Alger depuis trois ans77. Certains quotidiens, comme El Watan ou La Tribune publient quotidiennement une à deux pages sur le secteur du multimédia. L’agence de presse (APS) diffuse également de nombreuses dépêches sur le sujet. Outre ces actions de promotion, le CERIST a identifié au début de l’année 2001, plus d’une centaine de projets de type TIC. De nombreux secteurs économiques sont concernés : agriculture, transports, industrie, éducation et formation, santé, commerce, culture, tourisme. Mais, cet enthousiasme est relativement mal canalisé, ce qui ne permet pas de maximiser les synergies entre les différentes initiatives. Il est à espérer qu’une véritable dynamique pourra maintenant émerger avec la réorganisation du ministère des postes et télécommunications en ministère de la poste et des technologies de l’information et de la communication. L’on espère également que des programmes de coopération en partenariat avec des académies de l’OCDE aideront à promouvoir et à avancer l’agenda de recherche.

2 LES ATOUTS DE L’ALGERIE POUR REUSSIR SA TRANSFORMATION

Cette section analyse succinctement les principaux atouts dont dispose l’Algérie pour développer un secteur TIC plus robuste. Nous en avons retenu trois : a) une importante demande solvable de consommation TIC, b) l’émergence d’un secteur privé, encore très fragmenté, dans le domaine des TIC, c) la rente pétrolière. Il convient de préciser que pour la plupart, ces éléments favorables ne pourront devenir des atouts pour le développement des TIC qu’avec une volonté politique plus affirmée.

2.1 Demande potentielle (solvable) non satisfaite

Comme cela a été indiqué dans les précédents chapitres, la demande potentielle pour la consommation des biens et services TIC reste largement insatisfaite en Algérie. L’existence d’importantes listes d’attente en matière de services téléphoniques (700.000 exprimés pour le téléphone fixe et 500.000 pour la téléphonie mobile) montre l’ampleur de la situation. De même, l’explosion du nombre d’internautes en moins de trois années (150.000 en 1999, 400.000 fin 2001, et probablement 1.000.000 à fin 2002) montre une autre dimension de l’ampleur de la demande potentielle. Le succès des cybercafés, malgré une tarification de la connexion peu compétitive (entre 50 et 100 DA/heure) montre un réel intérêt de la population. L’Internet est perçu, selon de nombreux observateurs, comme un élément important d’ouverture sur le monde extérieur, au même titre que le fut l’arrivée de l’antenne parabolique TV une décennie plus tôt. Le public algérien réclame de nouveaux services et de nouvelles formes de médias. Cette évolution a bien été identifiée par Orascom Telecom Algérie lorsqu’il a testé son produit auprès de « focus groups ». Ceci a été également le cas de la carte pré-payée lancée par Eepad-Wanadoo, dont plus de 10.000 unités ont été vendues en quinze jours. Du côté des entreprises et des administrations, la situation n’est pas meilleure. Malgré l’absence d’information détaillées sur l’équipement des entreprises et des services administratifs en outils de communication moderne, les besoins sont probablement immenses. Pour preuve, très peu d’entreprises algériennes disposent de réseaux locaux informatiques et rares sont celles qui disposent déjà d’Intranet. Pour celles qui disposent d’une connexion Internet, celle-ci reste le privilège de quelques dirigeants et responsables. L’administration algérienne n’a pas encore commencé son informatisation. Certes, quelques

77 Le Cerist a ainsi identifié une soixantaine d’actions de promotion entre 1999 et 2000. Ces manifestations sont de plus

en plus relayées par la presse nationale.

44

projets sont en cours de réalisation : amélioration de la gestion budgétaire, mise en place d’un système de compensation bancaire et de télécompensation. Dans leur ensemble, les ministères et leurs extensions territoriales ne bénéficient pas encore de procédures de gestion informatisée, ni d’utilisation généralisée du courrier électronique. La modernisation des administrations publiques nécessitera l’informatisation et la mise en réseaux de leurs bureaux, ce qui simplifiera les procédures et donnera une meilleure visibilité aux décideurs et gestionnaires de l’administration publique. Équiper les administrations avec des réseaux locaux, des réseaux de large couverture et des Intranets permettra d’offrir progressivement des services de gouvernement en ligne, et le Gouvernement sera en mesure de faire de considérables économies sur son budget et d’améliorer la qualité de ses services. Cependant, il faudrait éviter d’avoir systématiquement recours à des solutions clé en mains. Au contraire, une stratégie d’externalisation devrait être conçue, dont le profil et les lignes directrices devraient être définies dès que possible. Un processus de modernisation du système administratif devrait reposer autant que possible sur l’externalisation de certaines fonctions à des fournisseurs de services nationaux et internationaux. Ceci entraînerait : a) l’externalisation du risque d’obsolescence technologique, b) la transformation des dépenses de capital en dépenses opérationnelles pour l’administration, c) le soutien au développement de fournisseurs compétitifs nationaux dans ce domaine, d) la mise au point d’un contenu local en arabe et en français. Pour les entreprises algériennes, l’enjeu consistera à intégrer l’informatique et Internet dans leurs stratégies de développement et d’amélioration de la compétitivité. Pour accélérer ces mutations, un certain nombre de dispositifs incitatifs pourraient être mis en œuvre par les pouvoirs publics, à savoir : (i) faciliter la formation et le recyclage des personnels à travers des mécanismes de type « fonds à coûts partagés » ; et (ii) éliminer les tarifs douaniers sur le matériel informatique et de télécommunications importé par les entreprises pour moderniser leur système d’information et de communication.

2.3 Émergence d’un secteur TIC privé

Les dernières informations recueillies78 indiquent qu’une importante grappe industrielle TIC est en train d’émerger en Algérie, avec un important potentiel de croissance alimenté par la libéralisation économique et les efforts de revitalisation. Les industriels interviewés en Algérie sont optimistes quant à la croissance du secteur TIC. Ils signalent un important marché en train de se développer dans le pays, avec des commandes pour la mise en œuvre de projets TIC de plus en plus larges, et une croissance projetée importante pour les cinq prochaines années. Il existe une demande croissante pour les équipements et services TIC tels que les installations de réseaux, intégration de systèmes et développement d’applications personnalisées, en particulier pour les systèmes basés sur l’Internet et les applications en réseau. Pour 2002, l’offre TIC traitée a été de 1,4 milliard79 de dollars US selon le Rapport ICF déjà mentionné. Les plus grands segments identifiés produisant des revenus sont : ordinateurs, équipements et services de télécommunications, électronique et ses composants. Les plus petits sont : progiciels, fourniture de service Internet, services TI intégrés. Le secteur privé est représenté par de petites entreprises locales et de grandes marques internationales, les premières se concentrant sur la fourniture de services Internet et TI, et les secondes impliquées principalement dans l’équipement et les services de télécommunications. Soustraire les revenus générés par les produits et appareils électroniques fournit une évaluation du marché TIC à environ 700 millions de dollars US en 2002, ce qui est cohérent avec l’évaluation de croissance des résultats de notre simulation de marché du Chapitre 4. Les entreprises privées travaillant dans le segment de l’équipement d’ordinateur sont divisés en deux groupes principaux : les grossistes important et distribuant les grandes marques internationales, et les

78 ICF Consulting Group, Algeria ICT Cluster : Inventory and Assessment Report, février 2003. 79 Ce chiffre est cité par ICF Consulting Group. Il diffère de celui de la simulation de marché du Chapitre 4 pour trois

raisons : a) la définition du secteur TIC adoptée par ICF inclut « électronique et composants », b) l’année de référence était 2002, c) les évaluations de marché sont basées sur une méthodologie différente.

45

assembleurs locaux d’ordinateurs « clones » Les revenus estimés pour ce segment représentent une moyenne de 200 millions de dollars US en 2002. Les grossistes comptent sur un large éventail de partenaires en distribution de détail, parmi lesquels beaucoup de petites entreprises. Les importateurs de systèmes et périphéraux de marque sont en majorité de petites entreprises familiales. Les fournisseurs de marques internationales comme IBM, Compaq, HP, Dell, NEC commercialisent entre 100 et 120.000 systèmes par an, pour une valeur au détail d’environ 60 à 70 millions de dollars US. Les clones assemblés localement représentent environ 70 % des ventes totales d’ordinateurs, qui se montent à 200.000 par an. Le nombre d’assembleurs privés locaux est estimé à 10-15, chacun détenant 5 à 10 % du marché80. La participation en équipements et services de télécommunications reste limitée aux multinationales et grandes entreprises publiques. Ceci résulte de la stratégie de substitution des importations du pays (ISI) adoptée dans les années 60 et 70. La ISI visait à créer une base industrielle nationale pour réduire la dépendance aux importations à haute valeur ajoutée produites par des pays plus développés. Économiquement, le résultat fut inefficace. L’industrie nationale finit par fournir le marché national à des coûts plus hauts que ceux des matériels importés de fournisseurs internationaux. Ces coûts furent assumés grâce aux ressources publiques. Aujourd’hui, les acteurs privés internationaux81 fournissent la majeure partie du marché local, à travers leurs propres bureaux ou bien des partenaires locaux. OTA se distingue comme le premier fournisseur de mobile du secteur privé. De plus, de plus petites entreprises privées telles que les FSI commencent à faire de petits investissements dans l’équipement de télécommunications, tels que les produits de mise en réseaux et communication par satellite de Cisco. L’électronique et ses composants représentent un segment de 200 millions de dollars US, où le secteur privé local est représenté par 25 fabricants/distributeurs dans le pays82. Les principaux producteurs de ce type d’équipement sont ENIE et ENIEM, deux entreprises publiques. Les segments plus petits de progiciels, FSI et services TI représentent une part mineure du secteur TIC, avec des revenus annuels estimés à 50 millions de dollars US. Ce sont les segments où le secteur privé local est le plus actif et où un certain nombre d’entreprises nationales développent leurs activités83. La présence d’entreprises privées locales a augmenté au cours des trois dernières années mais demeure fragmentée, avec de petites et moyennes entreprises familiales qui peuvent à peine soutenir la concurrence des grands acteurs internationaux ou des entreprises publiques. De ce fait, la croissance des entreprises privées locale demeure limitée aux petits segments générateurs de revenus du secteur TIC.

2.4 Rente pétrolière

Les revenus provenant de l’exploitation des importantes réserves en hydrocarbure dont dispose l’Algérie pourraient faciliter la mise en œuvre du programme de développement de la société de l’information. C’est probablement dans cette optique que le Gouvernement a décidé la réalisation du projet de parc technologique d’Alger (Cyberpark Sidi Abdallah). Bien que les contours de ce projet soient encore en cours de définition, il importe de ne pas baser une stratégie de développement des TIC exclusivement sur les pouvoirs publics. Il serait par exemple plus efficace qu’une fois le parc technologique aménagé par les autorités, sa gestion 80 Le principal acteur privé algérien de l’industrie d’assemblage est King Line Computers, d’autres plus petites sont

Microland et Perax. Pour les activités de vente en gros et de distribution, les acteurs principaux sont ALBM (IBM) et PC Compo (HP, Compaq).

81 Ericsson, Rohde & Schwarz, Siemens, Alcatel, Motorola, Nortel, Huawei, ZTE, Zander et Schlumberger. 82 Le total des biens standards du marché des logiciels en Algérie est estimé à 5 millions de dollars US annuellement,

Microsoft comptant pour 80 % de ce total, et Géni Soft pour 80 % des logiciels achetés par le Gouvernement. 83 Deux entreprises établies localement, Géni Soft et Technosoft, commercialisent des logiciels « biens standards » de

marque, et un petit nombre de start-ups et d’individuels privés avancent à grands pas dans le développement de logiciels. Pour les FSI, le Gouvernement a octroyé 67 licences privées depuis 1999, et il y a actuellement 10 à 15 FSI opérationnels. Pour les services TI, les estimations sont de 20 à 25 petites entreprises privées ainsi qu’un nombre de consultants indépendants. Néanmoins, quatre entreprises publiques en gèrent la majeure partie : CERIST, CETIC, CNAT et ENSI.

46

puisse être déléguée totalement à un opérateur économique privé disposant de l’expérience et du savoir-faire requis en matière de développement de telles structures. En d’autres termes, la rente pétrolière pourrait préfinancer des actifs spécifiques facilitant l’amorçage des investissements privés dans le domaine du développement des nouvelles technologies. Ceci pourrait se faire par le biais de contrats de gestion indexant la rémunération du gestionnaire aux performances réalisées. Cependant, on observe généralement que les pays qui sont dotés d’importantes ressources naturelles éprouvent des difficultés à développer un secteur économique productif. La disponibilité de revenus des hydrocarbures permet au secteur public d’engager d’importantes dépenses courantes indépendamment de la véritable économie productive. L’Algérie connaît le même paradoxe, la disponibilité des revenus hydrocarbures empêchant la mise en oeuvre de réformes critiques. En d’autres mots, si ses investissements ne sont pas productifs, le pays court le risque de dilapider ses ressources et d’appauvrir les générations futures.

3 LES PRINCIPAUX DEFIS

De nombreux obstacles devront toutefois être surmontés pour permettre la matérialisation d’une véritable société de l’information en Algérie. Parmi les plus importants identifiés dans le Rapport du Comité de Pilotage figurent :

3.1 Inexistence d’une stratégie de développement des TIC

Le constat est clairement établi dans le rapport du Comité de Pilotage sur la société de l’information : « …il n’existe pas actuellement de stratégie claire et cohérente en la matière. Certes, une multitude de projets sont menés dans différents secteurs depuis trois ans. Ministères, administrations, organismes publics, grandes entreprises publiques, sociétés privées, tous ont des intentions affirmées pour améliorer l’équipement informatique, développer les réseaux, généraliser l’accès à l’Internet. Mais il n’y a pas pour le moment d’inventaire précis et concret de ce qui existe, de ce qui est en cours de développement et de ce qui va l’être prochainement. Témoin les réseaux d’entreprise : combien y en a-t-il, quelles sont les populations concernées, quel est leur degré d’interconnexion avec des réseaux extérieurs ? » De même, aucune étude de marché n’a été entreprise pour connaître le profil des 500.000 internautes estimés : quel âge, quel profil socioculturel, quel usage d’Internet, quelles attentes de services ? Ce manque d’information et de vision prospective présente le risque de multiplier les redondances, ou au contraire de promouvoir des projets isolés et non compatibles les uns avec les autres. L’absence de réflexion sur l’usage des TIC entraînera immanquablement des frustrations dans toutes les catégories socioprofessionnelles. Le grand public se contentera probablement d’un accès ponctuel et récréatif à l’Internet dans les cybercafés s’il n’est pas en mesure de s’équiper progressivement à domicile. Les entrepreneurs courent le risque de ne pas capter les bénéfices attendus après avoir consenti d’importants investissements pour moderniser leur outil informatique. Enfin, les décideurs politiques risquent d’être déçus par le très faible impact sur la croissance et la diversification de l’économie algérienne de gros investissements publics dans le domaine des TIC .

3.2 Cadre réglementaire incomplet

Même si l’environnement d’affaires actuel est porteur d’initiatives individuelles et pourrait soutenir le développement d’un secteur TIC dynamique, il est cependant clair que l’Algérie a besoin de réviser et de rationaliser les législations ou réglementations existantes, et devrait promulguer rapidement les décrets nécessaires au rapide développement d’un tel secteur. Par exemple, les règles en matière de protection des consommateurs et de respect de l’ordre public peuvent être transposées à Internet sans une adaptation particulière. De même, la loi protégeant la propriété intellectuelle et établissant le droit d’auteur s’étend aux logiciels et aux programmes d’ordinateurs84. En

84 Comme dans les législations des pays développés, la reproduction ou l’adaptation d’un logiciel, sans autorisation de

son auteur, est permise pour une seule copie à des fins de sauvegarde.

47

revanche, dans la perspective de développer la société de l’information, des réglementations spécifiques devront être adoptées85. En particulier, la question de la responsabilité du fournisseur d’accès, lorsqu’il héberge des sites ou des propos contraires à la loi, devra être éclaircie en concertation entre l’État et le secteur privé. De même, la gestion actuelle des noms de domaine national (le suffixe « .dz ») présentent des insuffisances. Selon les FSI privés, les attributions se font « au compte-goutte ». Le CERIST exige notamment que le site soit hébergé en Algérie, ce qui incite les promoteurs algériens à enregistrer leurs sites sous des suffixes internationaux (.com, .net). Le Gouvernement devrait aider l’industrie à réviser le processus actuel de gestion des noms de domaine. Assurer l’efficacité et la transparence du processus d’allocation de ces noms est très important aux acteurs industriels (en particulier afin d’éviter le « cyber-squatting »), qui souhaitent aussi l’établissement d’une organisation indépendante non-gouvernementale qui pourrait se charger de cette mission. Le CERIST, étant l’un des FSI concurrents, ne peut donc plus être chargé de cette importante mission de « régulation du marché ».

3.3 Tissu économique peu favorable

Plusieurs insuffisances caractérisent encore le tissu économique en Algérie. Une analyse récente (Banque mondiale, 2002) détaille en profondeur les principaux goulots d’étranglement caractérisant par exemple l’environnement des affaires et le développement du secteur privé. Cette section reprend quelques uns des principaux problèmes soulignés dans cette note, qui sont de nature à influencer durablement le développement de la société d’information en Algérie. Si le secteur des PME-PMI représente aujourd’hui 75 % du PIB hors secteur des hydrocarbures, il est essentiellement constitué de micro-entreprises dont la majorité exerce dans le domaine de l’import-export et des services. Il s’agit pour la plupart des sociétés en nom propre ou de SARL dont le capital appartient aux membres d’une même famille. L’ouverture du capital à des investisseurs extérieurs ou aux salariés est encore relativement rare. L’essentiel des investissements se fait sur fonds propres, ce qui limite les capacités de développement des structures de production. La création d’une entreprise demeure un exercice difficile en Algérie, malgré la mise en place d’agences publiques chargées de faciliter le processus. Par exemple, l’Agence nationale pour le développement de l’investissement (ANDI) autorise notamment des avantages fiscaux durant les premières années de vie de l’entreprise86. Mais les entrepreneurs se plaignent régulièrement des lourdeurs bureaucratiques87 et des difficultés pour obtenir l’assistance nécessaire à la réalisation de leur projet, ainsi que des difficultés rencontrées pour l’acquisition de biens fonciers. L’accès à l’information commerciale est également cité comme un réel obstacle au développement des entreprises. Les entreprises algériennes éprouvent des difficultés pour : (i) obtenir des statistiques fiables sur la demande intérieure, (ii) obtenir des informations pertinentes sur les nouvelles technologies disponibles sur le marché international, (iii) identifier des opportunités d’exportation pouvant être valorisées, (iv) identifier des possibilités de partenariats et d’alliances avec des entreprises étrangères, et (v) obtenir une information pertinente sur le cadre réglementaire et législatif encadrant leurs activités. Une utilisation accrue et efficace des TIC par les acteurs industriels pourrait faciliter le flux de l’information et aider les entreprises à améliorer leur fonctionnement.

85 Protection des données personnelles et de la vie privée, élargissement du concept de droits d’auteur »,

« reconnaissance légale de la signature électronique, règlements commerciaux spécifiques pour toutes les parties impliquées dans des contrats sur Internet, ou mise en œuvre de procédures pénales à l’encontre des pratiques ou contenus illégaux.

86 Exonération de l’impôt sur le bénéfice pendant cinq ans, réduction des charges sociales, suppression de la TVA, exonération des taxes foncières, etc

87 En juin 2001, la publication de statistiques était significative : 43.000 dossiers étaient en attente à l’APSI (future ANDI).

48

Le secteur bancaire algérien figure également parmi les « freins » au développement économique et, plus spécifiquement, à l’essor d’une véritable économie de marché. Le marché bancaire reste dominé par les six établissements publics, malgré la libéralisation intervenue au cours des années 9088. Il n’existe pas de système de compensation interbancaire en temps réel à l’échelle du pays, ce qui ralentit fortement la fluidité des flux financiers89. Bien qu’elles disposent de réserves financières importantes, les banques algériennes prêtent essentiellement aux grandes entreprises nationales opérant dans le secteur industriel. En 1997, les prêts au secteur privé ne représentaient que 4 % du PIB, contre 51 % en Tunisie. Selon de nombreuses personnes rencontrées, la possibilité d’obtenir un prêt bancaire pour créer son entreprise dans le secteur des TIC (conseil ou production en informatique, Internet…) est quasi-nulle, à moins de disposer de garanties solides et de biens personnels à hypothéquer90. Les possibilités de financement, dans les secteurs de production de biens immatériels, sont d’autant plus limitées qu’il n’y a qu’une seule société publique proposant des financements de type capital-risque (la Finalep). Une autre société de financement, la Sofinance, est entrée en activité en 2001 mais cible essentiellement des secteurs « sûrs » comme l’immobilier ou la construction électrique. Enfin, la Bourse d’Alger ne constitue pas une source de financement91. Les pratiques des Algériens en matière de moyens de paiement ne facilitent pas la modernisation de l’activité bancaire92. Le chèque n’a jamais fonctionné, car les commerçants, confrontés à trop d’impayés, les refusent systématiquement. Quant à la monétique, elle se limite à quelques centaines de cartes de retrait. Encadré 15 : Les débuts timides de la carte bancaire Une centaine à la Poste, deux cent cinquante à la Khalifa Bank, d’autres encore chez Al Baraka, la BADR, le CPA… Les cartes de crédit font une timide apparition en Algérie. Pour le moment, sous la forme de simples cartes de retrait. Certains affirment même que la plupart des titulaires, s’en servent une fois par mois… pour retirer l’intégralité de leur salaire. Les deux établissements espèrent dans un deuxième temps, installer des terminaux de paiement chez les commerçants. Mais, faute de compensation entre établissements bancaires et parfois même en l’absence de réseaux informatiques entre les agences d’un même établissement bancaire, la monétique reste encore à l’état d’expérience pilote. Un établissement public spécialisé dans le domaine, la Société d’automatisation des transactions interbancaires et de monétique (SATIM) devait lancer un réseau monétique fin 2001, en association avec Visa International, mais le projet a été retardé. Il prévoit l’équipement de 500 commerçants en terminaux électroniques, la distribution de 50.000 cartes et la transmission en temps réel des transferts financiers de compte à compte et de banque à banque. Une dizaine de banques y seront associées. Algérie Poste a également l’intention d’installer des terminaux de paiement dans différents points de vente.

88 Les banques privées (Citibank, Paribas, Société Générale, Arab Banking Corporation, Nantexis) ne sont pas

suffisamment capitalisées pour jouer ce rôle. 89 Des éléments du projet en cours de banque centrale et de système de payement figurent dans le « Project Appraisal

Document » du World Bank Financial System Infrastructure Modernization Project en Algérie, 25 juin 2001, Rapport No. 22475-AL.

90 Les principaux problèmes freinant les performances du secteur financiers, tels que perçus par les entrepreneurs, sont : a) les crédits ne sont pas alloués sur la base des retours attendus mais plutôt sur les antécédents et les garanties offertes, b) les nantissements exigés sont excessifs (2 ou 3 fois le montant du prêt), c) procédures encombrantes et processus de décision centralisés des institutions bancaires, cd) manque d’équipements et de systèmes informatisés dans les banques, e) le système de paiement très lent (jusqu’à trois semaines pour compenser un chèque entre banques à Alger, f) les coûts du crédit trop élevés (environ 10 %) et le cycle d’approbation trop bureaucratique.

91 La Bourse algérienne ne tient qu’une seule session d’échange de quatre titres par semaine, avec un volume total moyen de transactions de moins de 0,5 million de dollars US. Trois de ces actions émanent d’entreprises étatiques (Eriad Setif (traitement de boissons et alimentation), Saidal (produits chimiques), Hôtel El Aurassi (hôtellerie) et un titre de crédit (obligations) de Sonatrach. Les bons du Trésor à long terme sont aussi échangés sur des marchés primaires et secondaires, à des taux d’intérêt à court terme compétitifs, principalement entre compagnies d’assurance. Le volume total des échanges est d’environ 350 millions de dollars US (équivalent à moins de 1 % du PIB), comparé à l’Égypte 28,741 millions de dollars US - (36,8 % du PIB) ; au Maroc 10,899 millions USD (39,1 % du PIB) ; à la Tunisie 2,828 millions USD (12,9 % du PIB) ; et à la Jordanie 4,943 millions USD (72,2 % du PIB).

92 Les billets et espèces en circulation représentent en moyenne 50 % de la masse monétaire.

49

3.4 Formation inadaptée dans le domaine des TIC

La formation dans le domaine des TIC se divise en trois filières : l’informatique, l’électronique et les télécommunications. Elle se caractérise par : (a) une inadaptation des contenus de formation par rapport aux besoins du marché, (b) un cloisonnement excessif des filières, (c) des capacités insuffisantes par rapport à la demande en personnels qualifiés. 3.4.1 L’offre ne satisfait pas la demande L’Algérie compte 14 établissements universitaires. Le plus prestigieux d’entre eux pour les filières technologiques est l’Université de sciences et de technologie Houari Boumedienne, dite université de « Bab Ezouar ». Elle enregistre chaque année, près de 6000 inscriptions dans la filière très prisée de l’informatique, mais seulement 300 vont jusqu’au diplôme d’ingénieur et 700 se contentent du cycle court de trois ans. Pour l’année 1999-2000, le nombre de diplômés pour l’ensemble du pays se répartit comme suit :

Dans le cadre d’un cycle long :

• informatique : 1.100 (26 établissements) ; • électronique : 900 (21 établissements) ; • télécommunications : 62 (2 établissements).

Dans le cadre d’un cycle court :

• informatique : 8.800 (850 établissements) ; • électronique : 8.000 (720 établissements) ; • télécommunications : 75 (3 établissements).

Les carences semblent particulièrement flagrantes dans le domaine des télécommunications, si l’on songe au besoin de cadres locaux que devrait générer la dérégulation du secteur et l’introduction de la concurrence dans les segments de téléphonie fixe et mobile. De même, le nombre de diplômés en informatique est faible au regard des besoins suscités par les changements en cours. Enfin, la plupart des institutions de formation éprouvent des difficultés à recruter et à conserver des enseignants-chercheurs. Chaque année, de nombreux enseignants et jeunes diplômés choisissent de partir à l’étranger pour y exercer des emplois plus valorisés et mieux rémunérés. 3.4.2 Inadaptation des contenus de formation Disposant d’une capacité d’accueil limitée, les différents instituts d’enseignement supérieur pratiquent une sélection sévère à l’entrée. Par exemple, l’Institut National d’Informatique (INI) forme depuis trente ans des ingénieurs d’état en informatique, avec des promotions de 250 à 300 étudiants par an (15 à 20 % des étudiants entrant en première année ne vont pas jusqu’au diplôme). Les deux premières années sont constituées d’un tronc commun pendant lesquelles les étudiants apprennent l’ensemble des langages informatiques. Les deux années suivantes permettent de se spécialiser dans l’une des deux filières : systèmes d’information (plutôt orienté conception et développement d’applications) ou systèmes informatiques (plutôt orienté sur les systèmes d’exploitation et le matériel) 93. La cinquième année est consacrée au stage en entreprise permettant à l’étudiant de rédiger un mémoire de fin d’études sur un projet en entreprise. Par ailleurs, il n’existe pas actuellement en Algérie de filières de formation professionnelle dans le domaine des TIC. La formation initiale constitue l’essentiel de l’offre, et il existe peu d’instituts de formation sur le

93 L’Internet est conçu comme un outil de travail, et n’est accessible qu’aux étudiants qu’à partir de la quatrième année.

La priorité est donnée à la formation scientifique. La gestion représente 10 à 14 % du volume de formation.

50

modèle des « National Information Institute of Technology » de l’Inde ayant permis à ce pays de développer un pôle de compétence internationale dans le domaine du développement de logiciels. 3.4.3 Cloisonnement des filières de formation en TIC L’enseignement supérieur dans le domaine des TIC est organisé autour des trois filières : informatique, télécommunications et électronique. Les passerelles entre ces filières sont encore à construire, même si le niveau de formation est plutôt jugé satisfaisant par les entreprises. L’absence de liens institutionnels entre les établissements de formation et le monde de l’entreprise ne favorise guère la professionnalisation des enseignements. Les informaticiens maîtrisent en général les langages et les différents systèmes d’exploitation. Mais ils ont souvent une culture peu en rapport avec les attentes et les besoins des entreprises algériennes.

3.5 Explosion de l’économie informelle et de la piraterie

L’économie « informelle » occupe une place prépondérante dans le fonctionnement de l’économie algérienne. En raison d’un niveau de vie peu élevé et du fait que les biens manufacturés sont chers et en majorité importés, la population a une inclination naturelle à se procurer de nombreux produits sur les marchés parallèles alimentés par la contrebande et le piratage. Ce phénomène est particulièrement marqué dans le domaine des TIC. Les fausses cartes d’abonnement aux chaînes et bouquets satellites TV peuvent être achetées au vu et au su de tout le monde, parfois même dans les boutiques officiellement estampillées par les opérateurs de télévision étrangers. Accessibles pour moins de 4.000 dinars, ces cartes « pirates » permettent de capter absolument toutes les chaînes payantes, moyennant leur rechargement une fois par mois. Tous les produits multimédia sont la cible des pirates (disques laser, cd-rom, logiciels de jeu, cassettes vidéo, DVD). Les logiciels professionnels n’échappent pas à ce fléau. Les dernières versions des logiciels ou progiciels sont accessibles pour 2 % du prix de la version sous licence. Face à une telle différence d’offre, les particuliers et les entreprises n’hésitent pas. L’arsenal juridique existe, mais apparaît presque impossible à appliquer face à l’ampleur du phénomène. L’Office national des Droits d’Auteur procède théoriquement à des contrôles, dans les commerces et les entreprises, mais les poursuites judiciaires sont rarissimes. La motivation du Gouvernement ne semble pas être effective, malgré les déclarations d’intention. L’enjeu est pourtant de taille. Le marché du multimédia représenterait près de un milliard de dinars par an, et le manque à gagner pour l’État, sous forme de taxes non perçues, est considérable.

3.6 Fuite des cerveaux

Certains n’hésitent pas à évoquer un véritable « drame national ». La fuite des cerveaux est un problème particulièrement présent dans le domaine des TIC. Un pourcentage non négligeable des jeunes ingénieurs formés en informatique, en électronique ou en télécommunications n’hésitent pas à quitter l’Algérie à la première opportunité. C’est souvent à l’occasion d’un troisième cycle effectué à l’étranger, ou à l’issue d’un stage dans une entreprise du pays d’accueil. C’est aussi lors de séminaires de formation ou de colloques organisés en Algérie, par le biais de contacts avec des représentants de sociétés étrangères. Même les principaux centres de formation ont modifié leur mode de fonctionnement en préférant favoriser la formation à l’étranger de doctorants mariés à celle d’étudiants célibataires. Si l’expatriation en France est moins systématique, en raison d’une politique d’immigration très restrictive, l’Allemagne et surtout le Canada (en l’occurrence la province francophone du Québec) sont devenus des destinations de prédilection. Au Canada, la population algérienne est estimée entre 30 et 40.000, soit deux fois plus qu’il y a dix ans. Les pays du Golfe Persique restent également des lieux d’immigration importants. Toutes les entreprises, tous les organismes rencontrés lors de cette étude, ont à déplorer plusieurs départs parmi leurs meilleurs éléments. Pour conserver leurs ingénieurs, les dirigeants doivent adapter le niveau de salaires. Dans le public, un ingénieur débutant commence à 18.000, voire 20.000 dinars par mois. Mais, dans

51

les entreprises les plus importantes comme la Sonatrach, le salaire peut débuter à 30.000 dinars et grimper à 50.000 dinars en dix ans, en plus d’avantages divers (prêts à taux préférentiels pour l’achat d’un logement). D’autres, comme le CETIC, systématisent des formules incitatives permettant aux cadres d’atteindre en moyenne 40 à 50.000 dinars de revenus. Les FSI, comme l’EEPAD, ont ouvert leur capital aux salariés. Mais, de l’avis de tous, le meilleur moyen pour conserver un bon employé est de lui offrir des perspectives intéressantes et valorisantes.

3.7 Coûts de l’accès aux TIC

La « démocratisation » de l’accès aux TIC apparaît comme l’un des principaux enjeux pour réussir le développement du secteur TIC. Car, pour l’algérien moyen, le coût d’accès aux nouvelles technologies est encore inabordable. Un équipement informatique standard coûte près de cinq fois le salaire mensuel moyen94. Tout compris, l’accès domestique à Internet (équipement téléphonique et informatique, abonnement, coût des communications…) est estimé par le Comité de Pilotage de la société de l’information à 150.000 dinars. Le risque est grand, aujourd’hui, que le « fossé numérique » ne se creuse entre une classe aisée, urbaine, dotée d’un fort pouvoir d’achat et susceptible d’acquérir des technologies plus modernes (mobile, ordinateur domestique, accès Internet, carte de paiement…), et le reste de la population, cantonnée à un usage collectif et épisodique des TIC (kiosques multiservices, cybercafés, médiathèques). La société de l’information « à deux vitesses » risque également de devenir un souci pour le secteur privé, avec d’un côté, des grandes sociétés nationales ou privées équipées de leur Intranet et de l’autre des PME-PMI isolées.

94 Environ 50,000 DA pour un ordinateur sans les accessoires.

52

CHAPITRE 4 : OPTIONS DE DÉVELOPPEMENT DES TIC

Au cours des dernières années, l’Algérie a engagé un certain nombre de réformes socio-économiques lui permettant d’envisager l’accélération de sa transition vers une économie de l’information. Dans le domaine des TIC, les autorités ont conçu et mis en œuvre une politique de modernisation et de libéralisation du secteur des postes et télécommunications. En ce qui concerne le commerce extérieur, des mesures de libéralisation des importations ont été prises dès le début des années 90. Elles devraient être complétées au cours des prochaines années par l’entrée en vigueur de l’accord d’association avec l’Union européenne et par l’adhésion à l’Organisation Mondiale du Commerce. D’autres importantes mesures dites de modernisation socio-économique sont envisagées ou programmées par le Gouvernement. Cependant, malgré les réformes et les initiatives engagées pour accélérer la transition vers une économie de marché, force est de constater que le secteur public représente toujours plus de 50 % du PIB, et que les revenus des hydrocarbures représentent 95 % des revenus d’exportation et 75 % des recettes budgétaires de l’État. La question principale au cœur de la transition vers une économie de l’information est d’abord celle de la diversification de l’économie et du renforcement de sa compétitivité internationale. Promouvoir la compétitivité et la diversification de l’économie algérienne suppose l’émergence et le développement de nouvelles sources de croissance. L’enjeu est donc de susciter l’éclosion de nouvelles sources de revenus qui permettraient à l’État algérien de mieux faire face aux fluctuations des cours internationaux du pétrole. La création de nouvelles entreprises est également nécessaire pour générer de nouveaux emplois dans des secteurs jusqu'à maintenant insuffisamment exploités. La diffusion massive et l’utilisation effective des TIC ne devraient pas cibler uniquement une industrie TIC95, mais aussi l’amélioration des performances des secteurs traditionnels, en les rendant plus compétitifs sur les marchés internationaux et en améliorant leurs exportations. C’est là le principal paradigme autour duquel devrait se construire la stratégie de développement des TIC. La diffusion des TIC générera des besoins en services élargis et améliorés ainsi qu’en logiciels. Dans ces segments, nous pouvons déjà observer un degré de développement du secteur privé composé de petites et moyennes entreprises locales96. Le secteur est encore fragmenté, mais il croît. En propulsant la diffusion des TIC dans l’administration et dans les secteurs productifs de la société, l’État générera un élan suffisant pour la création de nouvelles entreprises et pour la consolidation des commerces de service existants. Encadré 16 : Les TIC dans la gestion du système de budget du Ministère des Finances Le Ministère des Finances algérien a entrepris un projet (24 millions de dollars US) de modernisation de son système de budget, avec l’assistance de la Banque mondiale. Une fois complété, ce projet représentera un atout majeur pour l’Algérie dans son processus de transformation en société basée sur l’information. Le projet vise à standardiser les procédures de budget et de comptabilité pour aligner la gestion des finances algériennes avec les pratiques de la communauté internationale. Il comporte deux composants : la modernisation dus système de budget, qui comprend la restructuration des procédures de dépenses, et la mise en œuvre de systèmes informatisés pour gérer ces processus. Ce qui implique qu’à moyen terme, le MdF devra s’élargir et s’intégrer avec d’autres ministères techniques, un processus qui améliorera grandement l’efficacité et la transparence des dépenses publiques du pays. Actuellement, le projet a mis en route son premier composant. Lorsqu’il atteindra sa troisième phase, le projet générera une vision définissante le cadre principal et les étapes successives pour l’informatisation du secteur public algérien. Un aspect vital en sera l’intégration du MdF avec d’autres ministères. Dans ce processus, le Comité de Pilotage et le MPTIC auront un rôle important à jouer en partageant leur expertise TIC et leur information sur le marché, pour optimiser l’interconnexion des différents secteurs de l’administration publique. Source : Service de la Banque mondiale.

95 La justification pour cette recommandation se trouve au Chapitre 1, « Perspectives internationales ». 96 Voir Chapitre 3 « Les atouts de l’Algérie pour réussir sa transformation ».

53

1 SOUTENIR LA COMPETITIVITE DE L’ECONOMIE

Le choix stratégique pour le développement des TIC doit se focaliser autour de leur diffusion et de leur utilisation effective, ce qui accélérera les mutations souhaitées tant dans le secteur public que dans le secteur privé. Cette conclusion, partagée également par le Comité de Pilotage, part du constat que l’économie algérienne bénéficierait d’avantage des transformations induites par une utilisation massive et efficace des TIC, que de l’émergence d’un pôle de production dans ce secteur. La transformation de l’économie et de la société proviendra des effets induits ou effets multiplicateurs97 découlant d’une utilisation effective des TIC. Promouvoir les TIC en Algérie ne devrait pas se limiter à une diffusion passive des ordinateurs ou d’Internet dans les entreprises et administrations. Une telle situation déboucherait simplement sur une importation massive d’équipements. Il s’agit plutôt de mettre en oeuvre des programmes favorisant l’intégration et l’appropriation des TIC par les firmes et les administrations algériennes de manière à ce que celles-ci améliorent leurs processus et leur capacité d’adaptation et deviennent plus efficaces. Il y a trois raisons principales désignant l’administration publique comme le meilleur canal de diffusion des TIC. Premièrement, le secteur public dispose des moyens institutionnels, financiers et humains d’entrer dans le processus d’intensification de l’utilisation des TIC à un coût relativement bas, puisqu’il est déjà équipé de nombreux ordinateurs dans les différents niveaux de ses gouvernements central et locaux. Cette infrastructure n’est pas encore en réseau, mais certaines institutions se sont quand même déjà engagées dans le processus d’intensification. Il faudrait maintenant concevoir un schéma pour y intégrer progressivement d’autres institutions. Ce schéma devrait explicitement inclure des cibles et résultats basés sur les performances, puisque les TIC permettent facilement les mesures d’impact et de résultats. Deuxièmement, les employés du secteur public sont le segment de la population qui peut compter sur un revenu stable. L’intensification de l’utilisation des TIC dans le secteur public exposera une large proportion de la population aux bénéfices de ces technologies, et très vite les familles des employés publics viendront d’elles-mêmes à l’utilisation des TIC. Avec leurs revenus modestes mais stables, les employés publics sont donc la population-cible de préférence. Troisièmement, l’introduction des principes et pratiques de gouvernement en ligne pourrait être le facteur catalysant d’un important changement culturel. L’administration en ligne permettrait une plus grande transparence dans les processus de décision et renforcerait l’efficacité du système administratif à travers une meilleure supervision de ses opérations. L’administration en ligne aiderait à bâtir les fondations d’un véritable changement culturel dans la perception de l’État par les citoyens et les entrepreneurs. Le Gouvernement algérien devrait ainsi lancer un éventail de projet-pilotes en vue non seulement de créer une conscience collective, mais aussi de donner un signal irréversible de bon gouvernement. Trois étapes pourraient caractériser cette mutation. La première serait de rendre disponibles en ligne les procédures et les formulaires administratifs dont ont besoin les citoyens et les entreprises dans l’exercice normal de leurs activités. La seconde pourrait être de permettre le dépôt électronique des requêtes et formulaires, même si le service final escompté pourrait encore nécessiter des évaluations complémentaires ou des compléments d’information avant la décision finale de l’administration. Enfin, la troisième étape permettrait la demande et la délivrance électroniques de certains services offerts par l’administration. Il va sans dire que l’impact social d’un tel programme restera limité tant que la connectivité des ménages et des entreprises restera insuffisante. Des efforts devraient donc être engagés en vue de promouvoir la connectivité des entreprises, des administrations et des ménages pour maximiser les retombées sociales de ce programme. 97 Ces effets se manifestent à travers des gains de productivité, la réduction des coûts de transaction et la création d’activités

nouvelles.

54

Dans le cas des services des impôts du Chili, l’utilisation des TIC a permis l’amélioration de la relation de service entre l’administration fiscale et les contribuables (personnes physiques ou morales). Le fait de permettre aux contribuables d’accéder en ligne à une information fiscale complète et fiable, puis le fait de leur avoir donné la possibilité d’effectuer des transactions fiscales électroniques s’est traduit de part et d’autre par une redistribution de gains de productivité. C’est cet effet multiplicateur qu’il convient de maximiser.

Encadré 17 : Exemple d’un projet réussi de gouvernance électronique : déclaration fiscale sur Internet au Chili

L’administration chilienne des taxes, le Servicio de Impuestos Internos (SII), a donné la priorité au développement d’un service en ligne de déclaration d’impôts, et est depuis devenue un modèle d’adoption et d’appropriation d’Internet au Chili. De même qu’il s’est imposé comme le leader incontesté du processus de modernisation du secteur public devenant ainsi qu’une référence pour d’autres institutions publiques. Cette année, plus de la moitié des informations déclarées par les employeurs et un quart des déclarations d’impôt sur le revenu du pays ont été effectuées en ligne.

Internet a permis au Gouvernement Chilien de rationaliser le processus de déclaration d’impôt, processus qui par le passé était réputé très bureaucratique. La rationalisation a surtout consisté à réduire substantiellement les risques de fraudes fiscales et d’erreurs par la fiabilisation des bases de données. Le coût de traitement a été significativement réduit dans la mesure où il y a moins de personnes impliquées dans l’évaluation des déclarations, et qu’il n’y a plus de transfert physique de documents fiscaux.

Le site Internet du SII assure deux fonctions clés : (i) permettre aux contribuables de communiquer avec l’administration fiscale dans le cadre de leur déclaration d’impôt, (ii) mettre toute l’information sur la réglementation fiscale à la portée des usagers de l’administration. Le système permet également aux utilisateurs de consulter les informations personnelles se rapportant à leurs revenus fiscaux telles que fournies à l’administration par des organismes tiers tels que les banques ou leur employeur et les autres entreprises. L’accès à cette information confidentielle est protégé par un code personnel, et permet au contribuable de vérifier la fiabilité des données contenues dans son dossier fiscal. En assurant une confidentialité totale à ces données fiscales, le SII souhaitait bâtir une relation de confiance avec ses usagers.

Selon une étude réalisée en 2000, quelques 860.000 personnes avaient accès à Internet. Il était estimé que 85 % de ce chiffre, soit quelques 734.000 sur les 2 millions de contribuables (individus ou entreprises) que compte le Chili avaient utilisé ce système. Le site Internet du SII est ainsi devenu l’un des sites les plus visités dans le pays. Les usagers institutionnels (employeurs, banques et autres entités) ont généré 57,5 % des 713,282 dossiers reçus en 2000, contre 4,2 % en 1998. Plus de 94,9 % des déclarations fiscales rendues par les entreprises étaient faites électroniquement en 2000 contre 40,5 % en 1998. Le niveau d’acceptation par les contribuables individuels a été un peu plus lent, avec seulement 25,7 % des déclarations rendues en ligne en 2000. Ceci représente une augmentation de 523 % par rapport à 1999. Ce dernier chiffre s’explique également par le fait que seule une faible proportion Chiliens déclarent leurs revenus ex post dans la mesure où dans la majorité des cas, les impôts sont retenus à la source.

Source : Liselott Kana et Fernando Barraza, « Taxing Time for E-government », Observateur OCDE , juin 2001.

2 SOUTENIR LA DIVERSIFICATION DE L’ECONOMIE

Le secteur des hydrocarbures compte pour 30 % du PIB de l’Algérie, plus de 95 % des revenus d’exportation, et 75 % des revenus fiscaux, mais ne contribue directement à la création d’emploi qu’à 3 %98. Pour réduire le chômage, la croissance devrait se baser sur la diversification des secteurs non-hydrocarbures, conduits par les industries et services à labeur intensif capables de faire concurrence sur les marchés ouverts. La diversification de l’économie sera d’autant plus difficile à réaliser que les entreprises algériennes n’y sont pas préparées (actionnariat inadéquat, et non adoption des pratiques modernes de gestion). Les entreprises algériennes ne disposent pas d’avantages concurrentiels spécifiques en dehors du domaine des hydrocarbures. Dans les secteurs traditionnels (textiles, cuir et peaux, industries mécaniques, agro-industries, etc.), elles éprouvent des

98 Banque mondiale, A Medium–Term Macroeconomic Strategy for Algeria, 2002.

55

difficultés importantes à affronter la concurrence internationale. Le tourisme présente certes des potentiels importants à valoriser, mais ceci n’a pas pu l’être compte tenu de la situation sécuritaire et de l’insuffisance des infrastructures d’accueil.

Encadré 18 : Comment les TIC ont transformé l’Irlande

Il y a juste une centaine d’années, l’Irlande souffrait l’un des plus durables et sévères cas de pauvreté chronique en Europe. Seuls 3,5 millions d’Irlandais vivent dans le pays alors que 70 millions d’Irlandais ont émigré partout dans le monde.

Dans les années 60 et 70, la stratégie de développement économique fut modifiée. Au lieu de laisser ses nationaux émigrés vers les pays où il y avait du travail, l’Agence irlandaise de Développement (IDA) essaya d’attirer des investisseurs étrangers en Irlande. IDA offrit des prêts et taxes préférentiels aux entreprises industrielles s’installant à Shannon et Dublin. Cela semblait être une stratégie raisonnable, mais cela ne fonctionna pas. Les entreprises américaines et japonaises préféraient installer leurs opérations européennes à Glasgow, Wales, où ailleurs sur le continent.

Puis dans les années 90, les irlandais changèrent de nouveau leur stratégie. Plutôt que de courtiser les entreprises manufacturières, ils ciblèrent le segment des services, reconnaissant l’énorme avantage concurrentiel dont ils disposaient, à savoir : une population travailleuse, intelligente et anglophone. En partie grâce à leur adhésion à l’Union européenne, ils supprimèrent les restrictions au commerce, à l’immigration, et développèrent les réseaux de télécommunications, mais sans imposer comment ces infrastructures devraient être utilisées. Les compagnies américaines d’assurance installèrent rapidement les opérations de traitement des réclamations, afin de profiter des créneaux horaires différents entre les USA et Dublin. Ce type de services devint si populaires que 2.500 firmes américaines transférèrent une partie de leurs opérations à Dublin. Elles créèrent 250.000 emplois. En même temps, il existe plus de 600 firmes irlandaises de logiciels, et cinquante à soixante nouvelles entreprises qui démarrent leurs activités chaque année.

Beaucoup pensent que ce remarquable changement est le résultat des exonérations d’impôts et autres incitations. En réalité, il a été atteint grâce à la remise à plat de la stratégie de développement de l’industrie irlandaise pour tirer parti du continent invisible. Les racines de la «re conception » remontent à 1982, lorsque le Gouvernement engagea Ira Magaziner pour recommander une politique qui prit forme dans les années suivantes lorsque le Gouvernement affina ses idées et les mit en oeuvre.

Tandis que l’Europe se constituait en une seule région avec une seule devise, l’Irlande devint un pôle électronique pour le nouvel « Euroland », identifiable par le Centre de services financiers de Dublin localisé dans un complexe re-développé, Dockland ; ceci n’est pas un centre de traitement bancaire comme à Londres, mais un centre d’opérations d’arrière-guichet.

La croissance de l’économie irlandaise passa d’abord à 6-7 % au milieu des années 90, jusqu’au chiffre sans précédent de 10,5 % en 1998. L’ Irlande a su rattraper 150 ans de retard de développement industriel pour sauter dans une économie de réseau. Pour mieux faire comprendre cette approche de pôle électronique, voici les étapes entreprises par l’agence IDA du gouvernement irlandais :

• Déploiement d’un backbone Internet à haut débit reliant l’île à plus de 24 villes européennes, les USA et l’Asie, et permettant de réduire les coûts de communications ;

• Développement d’un parc technologique national de 100 hectares et d’un campus sur le commerce électronique à City West, avec une infrastructure de télécommunications à haut débit ;

• Mise en place d’une fiscalité incitative pour les entreprises au taux de 12,5 % d’impôt sur les sociétés ;

• Introduction d’une législation pour assurer la validité de la signature électronique.

Adapté de Kenichi Ohmae (2000), pp. 119-121. En dépit de la libéralisation du commerce extérieur, les exportations algériennes en dehors du secteur des hydrocarbures ne représentent pas plus de 10 % de la valeur des importations, et seulement 4 % du total des exportations algériennes. La plupart des exports sont des produits de base (huile d’olive, poisson, sel, couscous, pâtes, jus de fruits, et quelques textiles). En général, le manque d’exposition aux exigences des marchés étrangers représente l’un des plus importants défis affrontés par les entreprises algériennes qui souhaitent se développer à l’exportation. En effet, seules 21 entreprises algériennes étaient certifiées ISO 9000 en décembre 2001. Par ailleurs,

56

le coût de la main d’œuvre en Algérie reste peu compétitif par rapport à d’autres pays en transition. Ce qui entrave encore davantage la compétitivité internationale des produits manufacturés en Algérie99.

Encadré 19 : Vision de développement des TIC au Costa Rica – Bâtir un consensus politique

Le Costa Rica exporte plus de logiciels par habitant que tout autre pays d’Amérique Latine. Deux récentes décisions de l’entreprise Intel ont contribué au développement de l’industrie nationale dans ce domaine. Premièrement, Intel décida d’investir dans un centre développement de logiciels pour ses besoins et pour contribuer à la conception de semi-conducteurs, dépassant les limites d’une ancienne usine d’assemblage et tests. Deuxièmement, à travers son fonds de capital-risque, Intel investit dans l’une des entreprises de logiciels les plus prometteuses du pays. La présence de centres de recherche, de formation internationalement reconnus a renforcé ces activités.

Comment le Costa Rica a-t-il atteint un tel succès? L’engagement de longue date du pays à développer son système éducatif fut un facteur critique. Mais les qualifications humaines, bien qu’importantes, devaient être consolidées par d’autres facteurs. Après la crise économique au début des années 80, il devint clair que le pays devait abandonner la substitution d’importation. Alors il misa sur la promotion des exportations (et augmenta son accès au marché américain) à travers deux systèmes d’incitations fiscales.

• Un système de zones de franche permit aux entreprises d’importer tous leurs équipements et ressources exonérés d’impôts, et sans impôts sur le revenu pendant huit ans. Ce système devint la clé pour attirer les multinationales de haute technologie.

• Pour aider les entreprises nationales à mieux s’orienter vers l’export, il leur fut donné un répit sur l’impôt sur le revenu, le droit d’importer des équipements et fournitures exonérés d’impôts, et une subvention égale à 10 % de la valeur de leurs exportations. Cette subvention devait compenser les exportateurs pour les carences des services publics tels que les ports, l’électricité et les télécommunications et pour les coûts élevés des services financiers offerts par les banques et les assurances.

Vision de développement des TIC Le nouveau modèle a été soutenu depuis le début par le Costa Rica Investment and Development Board (CINDE), une organisation privée à but non lucratif fondée en 1983 par des entrepreneurs, et était soutenue par le Gouvernement puis financée par des dons. Son but en général était de promouvoir le développement économique et d’attirer l’investissement étranger direct.

Au début des années 90, le CINDE réalisa que le pays allait perdant sa compétitivité dans les industries basées sur le travail non qualifié et que l’Accord américain de Libre Échange (NAFTA) allait donner au Mexique un meilleur accès au marché américain. Il décida alors de concentrer ses efforts pour attirer l’investissement seulement dans les secteurs pour lesquels le Costa Rica disposait d’avantages concurrentiels. Il choisit l’électronique et les activités dérivées, industries croissant rapidement et qui requéraient une main d’œuvre qualifiée. Pendant ce temps, Intel commençait à chercher un endroit pour une usine d’assemblages et tests de puces électroniques. Le CINDE fit campagne pour le Costa Rica, et en 1996 Intel décida d’y installer son usine.

Le Costa Rica bénéficiait d’une bonne stabilité politique et sociale , d’un bas niveau de corruption, d’un niveau relativement libéral de réglementations sur le commerce international et les flux de capitaux ; d’une force de travail relativement bien éduquée et techniquement qualifiée mais peu chère avec un niveau d’anglais acceptable ; d’un environnement « pro-affaires » avec une attitude favorable envers l’investissement direct étranger ; d’un bon ensemble d’incitations ; et d’une bonne localisation et logistique de transport.

• Les efforts grandissants du pays pour attirer l’investissement direct étranger donna de la crédibilité au fait qu’il possédait les ressources dont Intel avait besoin.

• Une agence de promotion de l’investissement étranger dynamique, efficace et expérimentée (CINDE), avec des relations au Gouvernement, arrangea des réunions fructueuses entre les dirigeants de Intel et les autorités publiques.

• Le Gouvernement comprit l’importance d’un investissement Intel dans le pays. Le Président rencontra les dirigeants d’Intel et encouragea le reste du Gouvernement à appuyer Intel.

Retombées de bénéfices L’investissement Intel eu un fort impact sur la capacité du Costa Rica à attirer d’autres investissements directs étrangers et sur la compétitivité générale des industries nécessitant des qualifications intensives. La réputation d’Intel pour sa rigoureuse sélection des sites industriels incita d’autres entreprises à investir dans le pays.

Intel a aussi contribué en formant sa propre force de travail et en soutenant les universités locales. L’Institut Technologique du Costa Rica (ITCR) a gagné le statut de « Intel Associate » et propose plusieurs nouveaux programmes de diplômes.

La présence d’Intel a aussi accru les opportunités d’affaire dans le domaine de l’ingénierie et d’autres domaines techniques. À l’ITCR, les inscriptions d’étudiants en ingénierie augmentèrent de 9,5 % en 1997 à 12,5 % en 2000.

99 Sur un total de six segments de fabrication analysés par une équipe de la Banque mondiale (A Medium–Term Macroeconomic

Strategy for Algeria, 2002), l’Algérie a le coût le plus élevé par unité de travail dans quatre segments (acier-machinerie, produits chimique-caoutchouc-plastiques, cuir et chaussures et bois-papier-meubles) et un coût moyen pour les deux autres segments (textiles-confection et alimentation-boisson-tabac).

57

Aujourd’hui le pays suit une stratégie qui semble jouir du fort soutien des promoteurs économiques : reconnaissance du besoin de libéraliser les télécommunications, d’améliorer l’infrastructure à travers la participation du secteur privé, d’augmenter la protection des droits de propriété intellectuelle et d’améliorer l’accès aux pays étrangers à travers les accords de libre échange avec des pays comme le Canada, le Chili et le Mexique. Certaines réformes se sont heurtées à des résistances et ont suscité des réactions de désaccord – toutes faisant partie d’une politique de débat dans une société pluraliste. Source : Rodríguez-Claire 2001, PNUD (2001b). Le secteur facilitera la création de nouvelles sources de croissance en dehors du secteur des hydrocarbures. Une diffusion des TIC accélérera la transformation de l’économie en permettant aux secteurs de fabrication et de services de mieux satisfaire la demande nationale et internationale. Un tel processus pourrait donner le coup d’envoi au secteur TIC. En effet, ce secteur représente généralement entre 4 et 8 % du PIB dans les pays les plus avancés où la transition vers une économie de l’information a été un succès. En Algérie, les revenus du secteur TIC représentèrent approximativement 478 millions de dollars US en 2000, soit l’équivalent de 0,8 % du PIB. Il s’agit là d’une grossière évaluation du marché, fournie pour illustrer le propos. Elle provient des hypothèses suivantes : • Les revenus des services de télécommunications en 2002 se montaient à environ 300 millions de dollars US

(principalement le chiffre d’affaires d’Algérie Telecom pour ses revenus de services de télécommunications) ; • Le segment des télécommunications et équipement TI, qui est relativement bien développé et diversifié100 en

Algérie, a généré un chiffre d’affaires estimé à 151 millions de dollars US. Pour obtenir ce chiffre, on a supposé que les télécommunications et l’équipement TIC représentaient environ 35 % du chiffre d’affaires généré par le secteur de fabrication d’appareils électroniques et de télécommunications, qui était de 32,327 millions de dinars ou 431 millions de dollars US en 2000. Cette estimation est très conservatrice et ne prend pas en compte la consommation d’équipement TIC.

• Le segment des logiciels est plus difficile à évaluer, en particulier à cause des proportions de la piraterie, qui affecte 95 % des logiciels installés en Algérie, selon les estimations. Néanmoins, plusieurs acteurs du secteur évaluent ce segment du marché à 20 millions de dollars US en 2000.

• Le segment du service d’information est évalué à travers les activités des FSI. En 2000, seuls quelques FSI étaient opérationnels (CERIST, GECOS, EEPAD et BMGI), et ont généré environ 5 millions de dollars US de chiffre d’affaires.

Ce chiffre diffère de celui cité au Chapitre III par le groupe ICF Consulting pour la raison suivante. Notre définition du marché TIC, qui est conforme à la définition de la Commission des Communautés européennes, diffère de celle adoptée par ICF (la définition standard OCDE) en ce qu’elle exclut les « appareils et produits électroniques », un segment qui représente plus de la moitié du secteur TIC total dans les projections d’ICF. Si l’on soustrait les revenus générés par les appareils électroniques, notre projection pour 2002 devient cohérente avec celle d’ICF. La distribution des revenus présentée ci-dessous indique clairement que le secteur TIC en Algérie en est au tout premier stage de son développement. L’équipement et les services de télécommunications représentent environ 95 % des revenus générés contre 75 % sur les marchés matures. L’un des objectifs du programme de société basée sur l’information devrait donc être de rééquilibrer la structure du marché TIC, en développant les services d’information et les produits logiciels.

100 CATEL produit des câbles de télécommunications (cuivre) et prévoit de lancer la production d’un câble de fibre optique.

ENTC fabrique des appareils téléphoniques PABX et fournit aussi des services de télécommunications et de maintenance à des clients commerciaux. Sonatite fournit des services d’installation et de maintenance et reçoit souvent des contrats d’Algérie Telecom pour installer de nouveaux commutateurs et systèmes de transmission publics. SITEL, société à risques communs avec Ericsson et d’autres entreprises publiques, assemble des commutateurs digitaux AXE 10 et a fourni 95 % des échanges installés en Algérie. En ce qui concerne les TI, de nombreuses entreprises locales assemblent des ordinateurs personnels (Alfatron, Kingline Computer, etc.).

58

• Télécommunications ou services de télécommunications 63 % • Télécommunications et équipement TI 32 % • Services d’information 1 % • Produits logiciels 4 %.

Une fois la libéralisation des télécommunications devenue effective, et avec une mise en œuvre réussie du programme de société basée sur l’information, le secteur TIC s’élargira rapidement. Pour évaluer son envergure, les suppositions suivantes ont été faites :

• Taux de croissance démographique déclinant de 2,8 % en 2000 à 2,4 % en 2007 ; • Taux de croissance des lignes fixes en baisse : de 7 % en 2002 à 2 % en 2007, reflétant l’effet de

substitution du service fixe pour le mobile ; • Trois opérateurs mobiles (Algérie Telecom, Orascom Telecom Algérie, et GSM) opérationnels durant la

période, permettant l’augmentation de la concurrence des prix et une formidable diffusion du service ; • Baisse progressive du taux de croissance mobile de 150 % en 2003 à 40 % en moyenne en 2007 ; • Revenu moyen par ligne fixe augmentant de 150 dollars US en 2001 à 197 dollars US en 2007, reflétant le

rééquilibrage des tarifs d’Algérie Telecom ; • Baisse du revenu moyen par abonné mobile de 360 dollars US en 2001 à 237 dollars US en 2007, due à

l’augmentation de la concurrence ; • Taux de croissance moyenne du PIB de 3 % par an durant la période ; • Revenus des services de télécommunications baissant de 63 % en 2000 à 59 % en 2007 et de 32 % à de

29 % pour les équipements TI et de télécommunications, tandis que les revenus des produits logiciels augmentent de 4 % à 8 % et ceux des services d’information de 1 % à 3 %.

3 RESULTAT DE LA SIMULATION DU MARCHE DES TIC

La télédensité mobile augmentera donc de 0,32 % en 2001 à 5,6 % en 2004 et à 13,6 % en 2007. De même, la télédensité fixe augmentera légèrement de 6 % en 2001 à 6,8 % en 2007. L’amélioration des services aux abonnés commerciaux (lignes louées et autres services commerciaux) sera le principal moteur de croissance des services de lignes fixes. Le nombre d’abonnés à la téléphonie fixe augmentera de 1,86 millions en 2001 à 2,41 millions en 2007. La base d’abonnés au mobile passera de 100.000 en 2001 à 4,8 millions en 2007.

59

Figure 11 : Évaluation du marché des télécommunications en Algérie

La distribution des revenus dans les différents segments du marché changera légèrement par comparaison avec les chiffres de 2000 discutés plus haut. Les services de télécommunications déclineront de 63 % à 58,7 % des revenus totaux. De même, le segment des équipements TI et de télécommunications baissera de 32 % à 30 %. Nous anticipons également une croissance significative des revenus des services d’information et de produits logiciels, qui représenteront respectivement 3,2 % et 8,8 % en 2007. De ce fait, les revenus du secteur TIC augmenteront de 505 millions de dollars US en 2001 à 2,745 millions de dollars US en 2007, dont 448 millions de dollars US de revenus de service fixe. Le poids du secteur TCI dans le PIB algérien101 augmentera de 0,9 % en 2001 à 4,1 % en 2007 (voir graphique ci-dessous). Les services de télécommunications resteront le principal moteur de croissance pendant la période et leur part dans le PIB atteindra 2,4 % en 2007 contre 0,6 % en 2001.

101 Croissance supposée de 3 % par an.

Source : Estimations des auteurs.

0

1000000

2000000

3000000

4000000

5000000

6000000

7000000

8000000

2001 2002 2003 2004 2005 2006 2007

Abes fixes_AT

s/tot Cell

Total

0.00%

5.00%

10.00%

15.00%

20.00%

25.00%

2001 2002 2003 2004 2005 2006 2007

Densite fixe

Densite Mob

Densite Totale

7

60

Figure 12 : Projection de revenus des télécommunications

Finalement, il est estimé que les Algériens consommeront davantage de produits et services TIC. En moyenne, les dépenses TIC par habitant augmenteront de 16 dollars US en 2001 à 78 dollars US en 2007.

Source : Estimations des auteurs

0.0

200.0

400.0

600.0

800.0

1000.0

1200.0

1400.0

1600.0

1800.0

2001 2002 2003 2004 2005 2006 2007

Rev Fixe

Rev_total

RevCell Tot

61

CONCLUSIONS : DIRECTIVES POUR LE DÉVELOPPEMENT

DES TIC

Au cours des deux dernières années, plusieurs déclarations d’intention ont été faites quant au développement d’un secteur TIC dynamique en Algérie, mais la capacité des gouvernants à mettre en œuvre les réformes en temps voulu et de manière efficace semble être un problème en l’Algérie. En formulant les recommandations qui suivent, nous avons essayé de tenir compte autant que possible de cette réalité. Nous avons notamment considéré, les trois principaux points faibles de l’appareil de décision de l’État, à savoir :

• l’absence d’un leadership politique permanent pro-réformateur ; • la présence et l’influence de groupes de pression extrêmement puissants ; • la faible capacité des institutions à piloter des réformes complexes et à les mettre en œuvre

efficacement. Ce chapitre de conclusion présente un ensemble de lignes directrices que le Gouvernement pourrait mettre en place dans le cadre de son agenda provisoire. Ces lignes directrices sont des mesures économiques et politiques considérées nécessaires pour initier le processus de transition et de transformation en une société de l'information. Elles résultent du diagnostic présenté dans les chapitres précédents et cherchent à représenter une plate-forme qui permette au Gouvernement d’articuler une stratégie plus détaillée. Applications-phares et pilotes ne sont pas explicitement revues ou discutées. Ceci devrait être fait par le Comité de Pilotage dans une seconde phase, après que des analyses complémentaires et un large consensus aient conduit à l’adoption d’une stratégie.

RECOMMANDATION 1 : DEFINIR UNE STRATEGIE COHERENTE POUR LA SOCIETE DE L’INFORMATION

1.1 Donner une structure de gestion et une légitimité politique au programme de société de l’information en Algérie

La nomination d’un ministre de la poste et des TIC dans le Gouvernement constitué en juillet 2002 a permis un début de clarification en ce qui concerne les attributions des ministères en matière de développement de la société d’information. Il importe de consolider cette orientation en confirmant le rôle clé du nouveau ministère avec la publication du décret l’organisant. Le projet doit être présenté par les plus hautes autorités comme une priorité nationale, et devrait bénéficier d’une attention particulière de leur part pour assurer une mise en œuvre cohérente à travers les secteurs et les politiques, ainsi que pour superviser la continuité de sa mise en œuvre. En plus des déclarations des ministères déjà engagés dans la promotion de l’utilisation des TIC dans leurs départements, il est important que le Gouvernement algérien conçoive une stratégie de communication institutionnelle sur les avantages des TIC en Algérie. Une action préliminaire à la définition de cette stratégie est de renforcer le Comité de Pilotage et de permettre la mise en œuvre des recommandations de son Rapport d’octobre 2000. Une structure de gestion légitime et crédible est vitale pour élaborer et mettre en œuvre le programme de société de l’information. La Direction sera responsable de la finalisation du projet, du suivi de sa mise en œuvre, et de rendre compte des progrès réalisés et des difficultés rencontrées.

1.2 Finaliser le programme de société de l’information

Le Comité de Pilotage pourrait organiser et superviser tous les travaux complémentaires pour transformer ses recommandations en un Programme. Il pourrait aussi organiser des consultations avec l’administration, les

62

entreprises et la société civile, identifier les priorités de chaque secteur, et évaluer les perspectives de développement pour chacun d’entre eux. Les besoins d’information et de formation de la population doivent être explorés et évalués. Aucune étude n’a été faite jusqu’à maintenant pour définir la perception et l’utilisation d’Internet par les Algériens. Le Comité de Pilotage pourrait commander ces études pour mieux comprendre ces besoins en termes d’accès, de services d’information, de contenu et de formation. Avec une meilleure connaissance du marché, le Comité de Pilotage pourrait ensuite organiser le processus de consultation pour valider le programme et son plan d’action. Le chef du Comité de Pilotage devrait être une personnalité connue, capable de rapidement cristalliser le consensus autour des principaux objectifs du programme.

1.3 Suivre les progrès technologiques internationaux et surveiller l’évolution nationale vers la société basée sur l’information

Le Ministère de la Poste et des Technologies de l’Information et de la Communication devrait développer une capacité d’observation de la technologie et de l’information, lui permettant d’analyser les expériences nationales intéressantes et d’évaluer celles qui pourraient être reproduites en Algérie. En même temps, le Comité de Pilotage devrait définir un ensemble d’indicateurs statistiques pour surveiller et évaluer la mise en œuvre des projets liés aux TIC. Par la suite, il pourrait élaborer une analyse quantitative de la relation entre l’augmentation de la diffusion et de l’utilisation des TIC et les progrès réalisés vers la transformation en une société basée sur l’information. Ces indicateurs pourraient être : a) développement de la demande d’accès et d’utilisation des TIC par les citoyens, entreprises et administrations, b) l’offre TIC, c) la dynamique de concurrence à travers l’évolution des prix, la qualité des services, et la variété des services disponibles, d) l’impact en termes de création d’emplois et d’activités nouvelles.

Encadré 20 : Initiatives régionales TIC dans le monde arabe

Les politiques TIC du Gouvernement des Émirats Arabes Unis visent à encourager les investisseurs à installer leurs entreprises dans l’Union et à soutenir le développement du commerce local. Un plan de développement des TIC a été élaboré et adopté par les dirigeants politiques. Il est une référence régionale en matière de développement TIC, avec des résultats concrets en termes de création de parcs technologiques, d’attraction d’entreprises leaders dans le secteur TIC, et de mise en œuvre d’initiatives de gouvernement en ligne et d’éducation à distance. L’avènement de Dubai Internet City et de Dubai Media City a attiré des acteurs de classe internationale dans leur domaine respectif (par exemple, Microsoft et Oracle).

L’Égypte a aussi défini un plan de développement des TIC. En septembre 1999, le Gouvernement annonça que le développement de l’industrie TIC était une priorité nationale. Ceci conduisit à la création d’un ministère séparé pour la communication et les technologies de l’information. Un plan national de développement des TIC sur trois ans fut ainsi préparé en étroite collaboration avec le secteur privé et les experts de l’industrie. Avec près de 80 % de ses logiciels exportés vers le monde arabe, l’Égypte émerge lentement comme pôle régional de développement de logiciels. Un plan de cinq ans pour promouvoir l’industrie du logiciel en Égypte vise à élargir le marché existant, estimé à 50 millions de dollars US, à un marché de 2 milliards de dollars de US.

La Jordanie s’est aussi embarquée dans un plan ambitieux pour la pleine utilisation du potentiel des TIC pour supporter le programme national de croissance économique. En 1999, le Roi Abdallah lança l’initiative REACH pour stimuler le secteur TIC du pays et maximiser sa capacité à faire concurrence sur les marchés locaux, régionaux et globaux. Cette initiative vise également la réalisation de l’accès universel à Internet dans les cinq ans.

Source : D’après Soumitra Dutta et al., The Arab World Competitivess Report 2002-2003, World Economic Forum, 2003, pp. 186-207.

63

RECOMMANDATION 2 : COMPLETER LE CADRE LEGISLATIF ET REGLEMENTAIRE

2.1 Accélérer la libéralisation du secteur des télécommunications

Démocratiser l’accès au téléphone, à l’Internet et à l’ordinateur est une nécessité impérieuse pour la transition de l’Algérie vers une société basée sur l’information. Le Gouvernement devrait donc accélérer la libéralisation du secteur des télécommunications et mettre en place le calendrier de libéralisation adopté en 2000 de manière opportune. Ce faisant, le Gouvernement devrait apporter une attention particulière à la promotion de la concurrence basée sur l’infrastructure et donc permettre à des fournisseurs alternatifs (Sonatrach, Sonelgaz, TDA, etc.) de vendre leur largeur de bande inutilisée.

2.2 Rendre l’ARPT complètement opérationnelle et assurer son indépendance

Rendre l’ARPT pleinement opérationnelle et renforcer son indépendance à travers la modification des procédures de nomination et de renvoi des membres de son conseil d’administration est une priorité pour accélérer la procédure de libéralisation. En effet, bien que l’ARPT jouisse d’une large autonomie financière et décisionnelle, tous les membres de son conseil d’administration sont nommés et passibles de renvoi exclusivement par décret du Président de la République. Cette ambiguïté affaiblit l’un des acteurs-clés du nouvel environnement TIC et devrait être rectifiée immédiatement.

2.3 Ouvrir Algérie Telecom au capital privé

Ouvrir Algérie Telecom au capital privé est prévu pour 2004. L’opérateur public devra cependant adapter ses capacités de gestion pour pouvoir affronter une concurrence féroce. AT aura aussi besoin de développer de nouvelles qualifications de contrôle de gestion, analyse de marché, commercialisation, contrôle de qualité, ainsi que de placer la satisfaction du client au centre de ses priorités. Pour faciliter ce changement radical, 20 à 30 % du capital d’Algérie Telecom devrait être ouvert à des investisseurs stratégiques. Cette ouverture de capital représente un enjeu majeur pour AT, à la fois pour augmenter sa capacité d’investissement et pour bénéficier de savoir-faire en technologie et gestion.

2.4 Renforcer la législation en matière de propriété intellectuelle et juguler la piraterie

Renforcer la législation et son application est une nécessité. Bien qu’une nouvelle loi sur les activités du secteur des postes et télécommunications ait été adoptée en août 2000, de nombreuses autres réglementations doivent encore être modifiées ou créées pour permettre le développement du commerce électronique ou du gouvernement électronique. Par exemple, le droit algérien actuel ne définit pas clairement le régime applicable à la propriété intellectuelle dans le cas de la création sur Internet. Mais même si cette loi jette les fondations nécessaires au développement des infrastructures d’information à travers une plus grande participation du secteur privé, la piraterie des logiciels et des créations artistiques est endémique et freine l’émergence d’un secteur privé TIC dans les logiciels, les services d’information et l’électronique grand public.

2.5 Créer un mécanisme de certification de qualité pour les fournisseurs de services TI

Des procédures de certification devraient être élaborées de manière à définir clairement un label de qualité pour les différents prestataires, revendeurs et installateurs de matériels. Il est donc important qu’émergent des organisations professionnelles capables de préparer des chartes de qualité et d’imposer des codes de bonne conduite pour l’industrie. Leur présence contribuerait à l’augmentation rapide de la demande. Actuellement, et depuis la dissolution du commissariat national à l’informatique, le secteur des technologies de l’information ne dispose pas d’un corpus de règles communes ou de standards spécifiant la qualité de leurs services.

64

2.6 Promulguer les réglementations sur le cryptage et la sécurité des tr ansactions électroniques

Le cadre réglementaire actuellement en vigueur dans le domaine des TIC ne couvre pas les questions relatives au paiement électronique, à la signature électronique et à la sécurité des transactions électroniques. Les internautes algériens ne bénéficient d’aucune protection juridique lorsqu’ils utilisent leurs cartes de crédit pour acheter en ligne. L’Algérie ne dispose pas non plus de normes en matière de sécurité des réseaux et des données. La signature électronique n’est pas encore légale, ce qui ne peut que freiner le développement du commerce électronique ou du gouvernement en ligne.

2.7 Élargir à l’Internet les réglementations sur la protection des données personnelles et de la vie privée

La réglementation en vigueur en ce qui concerne la protection des données personnelles et la vie privée des consommateurs ne prend pas en compte les échanges sur Internet. Il est dès maintenant indispensable de mettre cette législation à jour et d’élaborer des normes de certification de commerce électronique, qui permettront aux consommateurs d’avoir confiance dans les transactions en ligne (e-mail, groupe de discussions et de faire des achats en ligne).

RECOMMANDATION 3 : PROMOUVOIR L’USAGE DES TIC DANS L’ADMINISTRATION PUBLIQUE, LES ENTREPRISES ET LA SOCIETE

3.1 Promouvoir l’utilisation des TIC par l’administration

La création de systèmes Intrant dans l’administration publique permettra la rationalisation et l’informatisation des procédures administratives et aidera à reconnecter les gouvernements (central et locaux) aux citoyens. Actuellement, la plupart des institutions publiques algériennes n’ont pas d’Intranet ni de culture développée d’utilisation de l’e-mail ou du partage de la connaissance, ce qui contribue au manque de transparence et à la lenteur des décisions administratives. Intensifier l’utilisation des TIC dans l’administration publique est la meilleure option stratégique pour générer de l’externalisation et diffuser leur usage parmi la population. Le Gouvernement devrait encourager les ministères et les administrations décentralisées à offrir des informations pratiques en ligne. Le concept de gouvernement en ligne devrait devenir une priorité pour les autorités algériennes, parce qu’il peut canaliser les efforts engagés pour améliorer la performance des administrations et des organisations publiques. Les quelques administrations ayant un site Internet ont des problèmes d’interruption d’accès ou de mise à jour de leur site. Il n’est pas possible, jusqu’à maintenant, de télécharger des formulaires officiels, mais seulement des lois et décrets publiés dans le Journal Officiel.

3.2 Éliminer les droits de douane et mettre en place des incitations fiscales pour les entreprises

Éliminer les droits de douane sur les ordinateurs et les équipements de télécommunications est nécessaire pour diffuser les TIC parmi la population. Actuellement, les ordinateurs demeurent hors de portée économique de la plupart des ménages algériens, bien que le Gouvernement ait réduit les droits de douane. Pour assurer à chaque foyer l’accès et l’utilisation d’un ordinateur, le Gouvernement pourrait établir un programme spécifique, qui pourrait être élaboré en collaboration avec le secteur bancaire et les employeurs. Le Gouvernement devrait encourager les banques à offrir des crédits au consommateur à des taux préférentiels102 permettant l’acquisition d’un ordinateur aux ménages algériens103.

102 En 1998, le Gouvernement suédois a réformé le système d’impôts pour permettre aux employés d’acheter auprès de leurs

employeurs des ordinateurs exonérés d’impôts. En général l’employeur administre la formule, fournissant l’ordinateur à son employé qui le paiera en 36 mois. Les paiements sont déduits du salaire brut. Tous les employés peuvent participer, y

65

Les PME devraient bénéficier de mécanismes incitatifs pour soutenir le développement de systèmes de communication et de recherche et développement TIC104. Ces incitations fiscales devraient être ciblées (fonds à coûts partagés pour services de formation et consultation, contrats de recherche et développements octroyés sur une base de concurrence), ou basées sur le marché (réduction d’impôts, schémas individuels…). Actuellement, très peu d’entreprises, en particulier parmi les PME, disposent d’installations modernes d’information et de communication. Pour celles dont c’est le cas, la modernisation des systèmes d’information existants reste sous-développée. L’Algérie devrait aussi rechercher le soutien international (accord Euro-Mediterranéen) pour les initiatives visant à la promotion du commerce et de l’investissement entre les membres PME de la région méditerranéenne105.

3.3 Multiplier les points d’accès à Internet sur tout le territoire

L’accès à Internet en Algérie est limité et doit être élargi. La généralisation des points d’accès doit être une priorité, afin d’éviter le « fossé numérique ». Des incitations spécifiques pourraient être considérées pour canaliser les investissements privés dans cette direction. Actuellement, à cause de la couverture insuffisante et de la faible capacité du réseau public de télécommunications, l’accès à Internet reste difficile voire impossible en dehors des grandes villes. L’offre est fragmentée et les fournisseurs sont souvent limités à quelques communautés ou à une seule région. Grâce à la conception et à la mise en œuvre de schémas de subventions ciblées spécifiques, le Gouvernement pourrait accélérer le déploiement des points de présence (POP) Internet par les FSI dans les régions non économiquement viables. La multiplication des offres d’accès et d’abonnements devrait contribuer à une diffusion partielle de l’accès Internet en attendant que l’accès universel devienne une réalité. La mise en œuvre de numérotation non régionale (sous la forme de numéros abrégés comme le 15-15 de Djaweb) devrait être étendue à tous les FSI contrôlant les infrastructures régionales et nationales. De plus, l’ARPT pourrait considérer d’établir un tarif spécial Internet pour permettre des connexions moins chères durant les heures creuses. Ce tarif pourrait être subventionné par un fonds d’accès universel.

3.4 Favoriser les partenariats avec les sociétés étrangères

Les partenariats (association, acquisition de capital) entre sociétés étrangères et nationales sont rares. Ils présentent pourtant l’avantage de faciliter le transfert de technologie et de savoir-faire. De même, il convient de permettre aux sociétés algériennes de recourir plus aisément aux services de SSII étrangères, en réformant par exemple le mode de rémunération des consultants étrangers.

compris ceux qui n’ont pas besoin d’une machine. Les banques fournirent le capital initial, prenant avantage d’une garantie du Gouvernement. Le résultat fut que la Suède a connu la plus forte pénétration de l’ordinateur de toute l’Europe.

103 La Corée, par exemple, a lancé une formule de subvention des ordinateurs qui a permis à un million de ménages d’acheter leur ordinateur pour moins de 900 dollars US.

104 UK Online for business est le modèle le plus réussi de réseau de soutien au commerce. Le programme est un partenariat gouvernement–industrie qui soutient le commerce en faisant le meilleur usage des TIC. Aide et soutien sont fournis à travers une variété de points de contacts : a) un réseau de 400 conseillers dans plus de 100 centres de contact dans tout le pays, b) des portails Internet avec accès à des outils d’information et de planification de commerce électronique, c) des centre d’appels et des lignes d’aide, et d) un programme de partenariat pour aider à répandre les bonnes pratiques parmi les PME. Le réseau de soutien a été promotionné par une campagne de marketing dans les médias (TV, radio, presse commerciale). Jusqu’à maintenant, le projet a réussi à amener plus de 1 million de PME en ligne.

105 www.smexchange.org est une organisation ciblant le partage de l’information et la construction de capacité parmi les organisations intermédiaires d’Europe, du Moyen-Orient et d’Afrique du Nord.

66

RECOMMANDATION 4 : DIFFUSER LES TIC DANS LES SECTEURS DE L’EDUCATION ET DE LA RECHERCHE

4.1 Concevoir et initier des programmes de formation spécifiques en TIC

Des formations orientées vers les nouvelles professions créées par la révolution technologique devraient être mises en place par l’État en coopération avec les associations professionnelles privées. Dans cette optique, des partenariats public-privé devraient être encouragés et la réglementation en vigueur devrait être adaptée pour faciliter l’augmentation de la participation privée dans le système éducatif algérien. Actuellement, le nombre d’étudiants formés chaque année en informatique, électronique et télécommunications reste par trop inadapté pour pouvoir soutenir l’émergence d’une société de l’information. Une utilisation largement répandue des TIC dépendra de la diffusion efficace de la technologie à travers le système d’éducation. Celle-ci devrait être accompagnée par une plus grande sensibilité publique au sujet des bénéfices potentiels de la transition vers une société basée sur l’information. Elle devrait aussi être précédée par une réforme en profondeur du système d’éducation, un recyclage des enseignants et un plan de diffusion bien conçu ciblant premièrement l’éducation supérieure et ensuite les étudiants plus jeunes. Il est prouvé que l’adoption des TIC au niveau supérieur génère les plus importantes retombées à la fois pour les étudiants et dans le domaine global de la recherche et du développement. La promotion de la connectivité et de l’utilisation de l’informatique constitue des approches prometteuses pour moderniser le capital humain et soutenir le développement d’une base d’entreprises plus active. La formation des enseignants est vitale pour une utilisation productive de l’infrastructure TIC et devrait être établie en toute première priorité. Les enseignants, en particulier ceux des écoles primaires et secondaires, ne sont pas préparés à l’utilisation et à l’intégration des TIC dans leurs programmes d’éducation. À moins qu’un effort de formation à large échelle ne soit entrepris, le risque d’échec des programmes éducatifs Internet à l’école est grand. Cependant, la formation par elle-même ne peut pas solutionner toutes les contraintes à la participation des professeurs à la stratégie du Gouvernement. Des salaires plus bas que dans le reste de la région, un manque de services de soutien et les conditions de travail souvent difficiles des enseignants sont souvent des contre-indications auxquelles il faudrait remédier avant l’introduction des TIC.

4.2 Améliorer la connectivité des établissements scolaires et universitaires

Les autorités ont engagé un large programme de connectivité pour les écoles, les lycées et les universités dans le cadre de leur programme de relance économique. Certes, la faible connectivité des établissements scolaires et universitaires est un sérieux obstacle au développement de la société de l’information mais il importe que ces importants investissements fassent partie d’une stratégie durable de long terme. Cette dernière devrait tenir compte des coûts de maintenance et de la rapide obsolescence de la technologie. Plutôt que de s’engager par contrats d’achat, les Ministères de l’Éducation nationale et de la Formation professionnelle pourraient lancer des appels d’offres pour obtenir auprès de l’extérieur l’installation, la gestion, l’entretien et le renouvellement réguliers d’un réseau d’ordinateurs et d’un accès Internet dans les écoles, les lycées, les universités et les centres de recherche. Cela contribuerait à construire une passerelle entre les domaines de l’éducation, de la recherche et des affaires. Cette interrelation pourrait être encore renforcée par des mécanismes tels que : a) stages et la formation à l’école, b) co-financement de projets de recherche, c) création de plates-formes d’incubation. . 4.3 Encourager la recherche et l’innovation en TIC et les partenariats avec les universités étrangères La recherche et l’innovation pourraient être soutenues afin de permettre le développement d’un secteur de haute technologie pratiquement inexistant en Algérie. Il y a cependant un potentiel à exploiter dans les centres de recherches, en particulier dans la production de logiciels. Ce soutien peut être apporté de trois manières. La

67

première est la création de pépinières d’entreprises de recherche et d’innovation à l’intérieur d’un cyber-parc. La deuxième est d’encourager les entreprises à créer des programmes d’échanges et de stages d’été pour les étudiants et les techniciens. La troisième est d’établir un mécanisme de dons spécifiques pour de telles entreprises..

4.4 Créer des événements festifs nationaux

Une campagne de communication pourrait être habilement complétée par la création d’événements à la fois festifs et inter-actifs. Fête de l’Internet, concours des meilleurs sites Internet, concours du meilleur projet TIC pour les étudiants et élèves avec probablement la création du prix du Président de la République. De tels événements serviraient à sensibiliser le public aux bénéfices de la société de l’information.

68

RÉFÉRENCES

BIBLIOGRAPHIE

ACT et le Ministère de l’Entreprise publique de la République d’Irlande (1998). Rapport du comité consultatif sur les

télécommunications. Dublin. Accessible sur Internet à www.act.iol.ie Artus, Patrick (2001). La Nouvelle Économie : La Découverte. Paris: Collection Repères. Atrostic, B.K., John Gates et Ron Jarmin (2000). Measuring the Electronic Economy: Current Status and Next Steps.

Washington, DC: Bureau américain du recensement. Banque mondiale (2000). Telecommunications and Postal Sector Reform Project: Aide-mémoire, Washington, DC,

novembre. Banque mondiale (2001). Financial System Infrastructure Modernization Project: Project Appraisal Document, Washington,

DC Banque mondiale (2002a). A Medium–Term Macroeconomic Strategy for Algeria. Washington, DC. Banque mondiale (2002b). Information and Communication Technologies: A World Bank Group Strategy. Washington, DC. Banque mondiale (2002c). Enterprise and PSD Strategy Note (Internal Note). Washington, DC. Banque mondiale (2002d). World Development Indicators. Washington, DC. Booz Allen Hamilton (2002a). Facilitate the Deployment of Government Online in Indonesia - Final Report. Booz Allen Hamilton (2002b). Jamaica ICT Project - E-government Component Feasibility Study. Boyer, Robert (2002). La Croissance : Début du Siècle - De l'Octet au Gène. Paris: Bibliothèque Albin Michel Économie. Brousseau, E. et N. Currien (2001) Revue Économique, Économie de l'Internet, Numéro hors série. CNUCED (2001). Rapport sur le commerce électronique et le développement. Commission européenne (1994). White Paper: Recommendations to the European Council on Europe and the Global

Information Society (Rapport Bangeman). Commission européenne (1997). Green Paper: Convergence of the Telecom, Media and IT Sectors and the Implications for

Regulators. Commission européenne DG Relations extérieures (2001). The Information Society and Development. Deiss, Richard (2001). Information Society Statistics. Commission européenne DG Société de l’information. Dutta, Soumittra et al (2003). “Challenges to ICT Development in the Arab World” dans The Arab World

Competitiveness Report 2002-2003, World Economic Forum, pp. 186-207. Foray, Dominique (2000). L'Economie de la Connaissance : La Découverte. Paris : Collection Repères. Gruen, David et Glenn Stevens (2002). “Australian Macroeconomic Performance and Policies in the 1990s”, in

The Australian Economy in the 1990s. Sydney : Banque de réserve de l’Australie. Gordon, Robert J. (2002). Technology and Economic Performance in the American Economy; Londres : CEPR Discussion

Paper Series, No. 3213. ICF Consulting Group (2003). Algeria ICT Cluster: Inventory and Assessment Report. Fairfax, VA, États-Unis. ITAG et l’Institut Internet de Nouvelle Zélande (1999). The Knowledge Economy. Auckland. Accessible à

www.knowledge.gen.nz, www.moc.govt.nz/pbt/infotech/itag/publications.html, www.eynz.com IT Mag No. 1 (2002). Alger, du 29 octobre au 4 novembre. ITU (2002). World Telecommunication Indicators. Jorgenson, Dale (2001). “Information Technology in the U.S. Economy.” American Economic Review, Vol. 91, No. 1. Kana, Liselott et Fernando Barraza (2001). “Taxing Time for E-government.” OCDE Observer, juin. Katz, Raul Luciano (1988). The Information Society: An International Perspective. New York : Praeger. Litan, Robert E. et Alice Rivlin (2001). The Economic Payoff from the Internet Revolution. Washington, DC: Brookings

Institution Press. Louis Lengrand et Associés (2002). Analysis of Strengths, Weaknesses, Opportunities and Threats in the IT Market in

Algeria. Versailles, France. Mann, Catherine L. et al (2000). Global Electronic Commerce: A Policy Primer. Washington, DC : Institution for

International Economics.

69

Michael D.C et al (2002). Asia's Digital Dividends: How Asia-Pacific's Corporations Can Create Value from E-Business. Chichester: John Wiley & Sons Ltd.

Ministère du Commerce et de l'Industrie du Royaume-Uni (2001). Building the Knowledge Driven Economy. Nguyen, Dang (2001). L’entreprise numérique. Paris: Economica, Coll. NTIC. Nijkamp P. et al (2002). “ICT and Transport: Does Knowledge Underpin Policy?” Telecommunication Policy 26, pp.

31-52. OCDE (2000). Information Technology Outlook. OCDE (2001). Science, Technology and Industry Outlook. OCDE (2002). Information Technology Outlook: Highlights. Ohmae, Kenichi (2000). The Invisible Continent: Four Strategic Imperatives of the New Economy. New York : Harper

Business. Oliner, Stephen D. et Daniel E. Sichel (1994). Computers and Output Growth Revisited: How Big is the Puzzle?

Washington, DC : Brookings Papers on Economic Activity (2), pp. 273-334. Oliner, Stephen D and Daniel E. Sichel (2000). The Resurgence of growth in the Late 1990s: Is Information Technology the

Story? Washington, DC: Federal Reserve Board. ONUDI (2002). Industrial Development Report 2002/2003: Competing Through Innovation and Learning. Pilat, Dirk and Frank Lee (2001). “Productivity Growth in ICT-Producing and ICT-Using Industries: A Source of

Growth Differentials in the OECD?” Paris: OCDE, DSTI/DOC 4. Pohjola Matti (2002). “The New Economy: Facts, Impacts and Policies”, Information Economics and Policy 14, pp.

133-144 PNUD (2001a). Creating a Development Dynamic: Final Report of the Digital Opportunity Initiative. Accessible sur Internet

à http://www.opt-init.org/framework.html PNUD (2001b). Human Development Report: Making New Technologies Work for Human Development. Sachs J. et al (2002). The Global Information Technology Report 2001-2002: Readiness for the Networked World. World

Economic Forum. Sichel, Daniel E. (2001). Productivity in the Communications Sector: An Overview. Federal Reserve Board, Conference for

the Brookings Workshop on Communications Output and Productivity in the Services Sector. Washington, DC.

Le Soir (2002). Alger, 20 novembre. Solow, Robert M (1987). “We’d Better Watch Out,” New York Times Book Review, 12 juillet, p. 36. Turner, Colin (2000). The Information Economy. Londres : Kogan Press.

SITES INTERNET

Portails

- www.algeriacom.com - www.algeriainfo.com : portail de GECOS - www.allafrica.com - www.business.dz : site de BMGI - www.cirtaonline.com - www.edjazair.com - www.objectifAlgérie.com - www.wanadoo.dz : site de l’EEPAD

Sites de fournisseurs de services Internet - www.cerist.dz - www.djaweb.dz - www.gecos.net - www.wanadoo.dz

70

Sites de ministères, d’institutions politiques et d’administrations

- http://membres/lycos.fr/mfdgep : Direction de la Prévision - Ministère des Finances - www.ands.dz : Ministère de la Santé et de la Population - www.apn.dz : Assemblée Populaire Nationale - www.cg.gov.dz : Premier Ministre - www.douanes.dz : Customs site - www.meducation.edu.dz : Ministère de l’Éducation Nationale - www.mesr.edu.dz : Ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche - www.mir-algeria.org : Ministère de l’Industrie et de la Restructuration - www.ons.dz : Office National des Statistiques - www.pmepmi-dz.com : Ministère des PME-PMI - www.postelecom.dz : Ministère de la Poste et des Technologies de l’Information et de la Communication - www.promex.dz : Office de Promotion du Commerce Extérieur

Sites d’organismes publics

- www.ands.dz : Agence Nationale pour la Documentation en Santé - www.cdta.dz : Centre de Développement des Technologies Avancées (CDTA) - www.cerist.dz : CERIST - www.tda.dz : Télédiffusion d’Algérie

Sites d’entreprises

- www.cetic.dz : Centre des Technologies de l’Information et de la Communication - www.ensi.dz : Entreprise Nationale de Services Informatiques - www.khalifa.com : Khalifa Group - www.orascom.com : Orascom

Sites de la presse

- www.aai.dz : Agence algérienne d’information - www.algeria-interface.com : Site d’Informations en Ligne Franco-Algérien - www.aps.dz : Algerian Press Service - www.elwatan.com : Quotidien El Watan - www.entv.dz : Télévision Nationale - www.latribune.com : Quotidien La Tribune

Sites d’ambassades

- www.ambafrance.dz.org : site de l’Ambassade de France

71

RAPPORTS

- Rapport de l’Union Internationale des Télécommunications (UIT) sur les télécommunications en Afrique (février 2002, accessible à www.itu.int)

- Rapport Esis 2, de l’Observatoire européen de la société de l’information (accessible à www.esis-eu.org) - Rapport de l’Union européenne sur le Programme indicatif national algérien 2001-2004

72

ANNEXE : L’ALGÉRIE PAR RAPPORT AUX PAYS VOISINS

Le Chapitre 3 a permis d’identifier les insuffisances majeures auxquelles le pays devra remédier pour réussir sa transition. Cette analyse est ici complétée par une analyse comparative de l’Algérie par rapport à un échantillon de pays voisins. Le chapitre commence par une description de la méthodologie suivie. Il présente ensuite un commentaire des résultats obtenus et se termine par une évaluation de la situation actuelle dans le secteur algérien des TIC par rapport à d’autres pays choisis de la région. Cette évaluation peut servir de base à la détermination du potentiel de croissance du secteur en Algérie.

1 METHODOLOGIE

L’analyse comparative repose sur six variables de référence, à savoir :

• distribution des services de téléphonie fixe (nombre de lignes fixes par 100 habitants) • distribution des services de téléphonie mobile (nombre d’abonnés au mobile par 100 habitants) • distribution des ordinateurs personnels (nombre de PC par 100 habitants) • distribution des serveurs Internet (nombre d’hébergeurs Internet par 100 habitants) • pourcentage d’étudiants dans une tranche d’âge donnée inscrits à l’université ou suivant une formation

dans l’enseignement supérieur • taux d’alphabétisation de la population.

L’échantillon de pays comprend la Jordanie, l’Égypte, la Tunisie, l’Algérie et le Maroc. Les deux premières variables permettent de cerner la performance du secteur des TIC, notamment par rapport à capacité à satisfaire les besoins de connectivité de l’économie et de la société. Les deux variables suivantes représentent le commerce que la diffusion des TIC peut générer. Les deux dernières variables permettent de cerner l’état de préparation des ressources humaines aux mutations induites par l’Internet. Bien entendu, les variables retenues ici ne constituent pas des conditions suffisantes pour l’émergence ou le développement de la société de l’information. Elles permettent simplement de dégrossir le niveau de préparation de chacun des pays et de les comparer. Nous définissons ensuite un pays de référence par rapport auquel sont comparées les performances des pays de notre échantillon. Les performances des pays de référence ont été déterminées en deux temps. En effet, sur chacune des variables, nous identifions cinq pays ayant le même niveau de développement que l’Algérie et dont les PIB appartiennent au même quintile. Puis, nous choisissons le pays du quintile présentant la performance la meilleure. C’est cette valeur qui constitue la base de référence et est notée 100. La valeur relative de l’Algérie et des autres pays de l’échantillon est obtenue en valeur relative par rapport à la base de référence ou comparateur. L’analyse comparative permet donc de visualiser l’état de préparation des pays de la région pour basculer vers une société de l’information. Les performances du pays de référence sont paramétrés à hauteur de 50 % des performances réalisées par la moyenne des pays de l’OCDE. Le pays de référence est ensuite noté 100 sur chacune des variables. Les pays de l’échantillon obtiennent un score relatif calculé au prorata de l’effort qui les sépare de la performance réalisée par le pays de référence. Les données brutes sont reprises dans le tableau ci-dessous. Les graphiques représentent les scores relatifs qu’obtiennent les pays par rapport au pays de référence.

73

Tableau 5 : Valeurs de référence pour l’évaluation de l’état de préparation aux TIC

Algérie Égypte Jordanie Maroc Tunisie Valeur de Référence*

Pays de Référence

Lignes principales par 100 habitants 6,04 10,3 12,74 3,92 10,89 15,50 Iran Abonnés au mobile par 100 habitants 0,32 4,33 14,39 15,68 4,01 20,40 Paraguay Hébergeurs Internet par 10,000 habitants 0,21 0,28 4,20 0,81 0,20 6,80 Kazakhstan Ordinateurs personnels par 100 habitants 0,71 1,55 3,28 1,31 2,37 6,97 Iran Inscriptions enseignement supérieur 14,92 38,84 19,48 9,34 17 25,81 Kazakhstan Taux d’alphabétis./100 hab. (pop. > 15 ans) 66,7 55,3 89,7 48,9 71 93,50 Paraguay

* Parmi les pays appartenant au même quintile PIB que l’Algérie, celui ayant les meilleures performances sert de point de comparaison pour chaque indicateur. Sources : Pour les indicateurs TIC : UIT, World Telecommunications Indicators (mars 2002) ; Pour les indicateurs du PIB et du taux d’éducation : Banque mondiale, World Development Indicators (juillet 2002).

2 PRINCIPAUX ENSEIGNEMENTS

Les cinq pays, à l’exception de la Jordanie, montrent un retard significatif dans le développement de l’infrastructure d’information. Ceci, avec la diffusion limitée de l’ordinateur et de l’hébergement Internet, entrave le commerce potentiel lié à l’usage de l’Internet. L’Algérie se classe dernière dans notre échantillon, bien que la récente libéralisation du secteur des télécommunications aidera probablement le pays à rattraper ses voisins. Cependant, il faut aussi noter que cette analyse ne montre pas encore les effets de la récente libéralisation du secteur algérien des télécommunications et de l’introduction partielle de la concurrence dans le secteur mobile. La Jordanie106 représente le meilleur résultat de notre échantillon et est donc un modèle pour les autres pays. De même le Maroc montre une percée des mobiles, malgré une faible diffusion de l’Internet et du téléphone fixe. Le nombre de serveurs hosts restent par ailleurs très faible. La Tunisie et l’Égypte ont un excellent positionnement pour ce qui concerne les lignes fixes, mais traduisent un retard en ce qui concerne la diffusion du mobile et de l’Internet. La Tunisie et l’Égypte montrent toutes les deux un déséquilibre dans le développement de leurs télécommunications, avec une pénétration élevée de lignes fixes (respectivement 10,9 et 10,3 par 100 habitants) et une faible connectivité mobile (4,01 et 4,3 %). Le Maroc107 montre aussi un déséquilibre dans ses télécommunications, avec un fort taux de remplacement du fixe par le mobile (15,7 % de la population a un abonnement mobile, et seulement 3,9 % ont une ligne fixe). Le nombre d’hébergeurs Internet et d’ordinateurs est très bas pour tous les pays de l’échantillon, à l’exception de la Jordanie (4,2 hébergeurs pour 10.000 habitants et 3,28 ordinateurs pour 100 personnes). La Tunisie occupe la deuxième place avec 0,20 hébergeurs Internet et 2,37 ordinateurs. L’Algérie, comparée aux autres pays de l’échantillon, montre un retard significatif dans tous les indicateurs.

106 L’agenda TIC de la Jordanie est fort, soutenu par le Roi Abdallah, et se concentre sur le développement des ressources

humaines. Cependant, le coût de l’accès reste relativement élevé par rapport au revenu per capita. Le prix moyen d’un ordinateur reste inabordable pour la majorité de la population. La prolifération des cyber-cafés a contribué à améliorer l’état de préparation aux TIC du pays. La pénétration Internet est en augmentation (4% en 2001) grâce à plusieurs initiatives du gouvernement (accès dans les écoles et à travers les centres TI communautaires). Amman demeure le pivot régional du développement de portail (par exemple, Maktoob, Arabia online, et Al Bawaba), et le site préféré par l’industrie de contenu.

107 La faible infrastructure de télécommunications du Maroc freine sa croissance TIC. La télédensité fixe est en baisse depuis quelques années, probablement à cause du remplacement par le téléphone mobile. Il en résulte que la pénétration Internet reste aussi faible que 1.3% en 2001, et la pénétration de l’ordinateur est elle aussi très basse (1.3% en 2001). Cependant, le Maroc a le meilleur environnement réglementaire de la région, et est en avance en termes de libéralisation de secteur mobile.

74

Le véritable atout des pays considérés se trouve dans la jeunesse de leur population et dans le potentiel représenté par le niveau d’éducation de celle-ci. Les taux d’alphabétisation et d’inscription à des études universitaires sont relativement satisfaisants pour la plupart des pays, l’Égypte étant en première position pour les chiffres d’inscriptions en éducation supérieure (38,8 % de cette tranche d’âge), suivie par la Jordanie, la Tunisie et l’Algérie avec une moyenne de 17,2 %). En effet l’Égypte est le pays leader en termes de qualité de formation de son capital humain, le haut standing de ses universités et la qualité de son éducation scientifique étant renommés dans toute la région. Toutefois, des efforts significatifs sont encore à faire en ce qui concerne l’alphabétisation en Égypte ainsi qu’au Maroc. Une fois attaqué le problème du développement de l’infrastructure, et les programmes de formation mis à jour en conséquence, la qualité du capital humain permettra une utilisation plus efficace des TIC par les pays de l’échantillon. Cette analyse peut être utilisée comme une indication de la demande potentielle non satisfaite en infrastructure TIC, et comme une mesure ou indicateur de l’impact potentiel que ces infrastructures pourraient avoir. Les graphiques en diamant donnent une grossière indication du potentiellement fort effet multiplicateur, qui aura lieu en Algérie, ainsi que dans d’autres pays, une fois que l’infrastructure et l’utilisation des TIC auront été développées.

75

Figure 13 : Représentation graphique de l’état de préparation aux TIC des pays sélectionnés

Jordanie-200182

71

62

47

75

96

telephone lines

Mobile phones

Internet hosts

Personal Computers

Gross tertiary enrolment

Gross adult literacy

0

10

20

30

40

50

6070

80

90

100

Jordanie Reference

Tunisie-2001

70

20

3

3467

76

0

1020304050

60708090

100

telephone lines

Mobile phones

Internet hosts

Personal Computers

Gross tertiary enrolment

Gross adult literacy

Tunisie Reference

Algérie-2001

39

2

3

1058

71

01 02 03 04 05 06 07 08 09 0

100

telephone lines

Mobile phones

Internet hosts

Personal Computers

Gross tertiary enrolment

Gross adult literacy

Algerie Reference

Egypte-2001

66

21

4

22

150

59

0

10

20

30

40

50

60

70

80

90

100

telephone lines

Mobile phones

Internet hosts

Personal Computers

Gross tertiary enrolment

Gross adult literacy

Egypte Reference

Maroc-2001

2577

12

1936

52

0102030405060708090

100

telephone lines

Mobile phones

Internet hosts

Personal Computers

Gross tertiary enrolment

Gross adult literacy

Maroc Reference