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FINANCE MANAGEMENT - CFO MAGAZINE - N°17 - MAI 2008 > EN PRATIQUE SOMMAIRE N°17 MAI 2008 Gestion de trésorerie: 10 conseils d’experts L’entreprise peut-elle se passer de compétences internes en matière de gestion de trésorerie? Les trésoriers interrogés plaident évidemment pour leur chapelle. Mais non sans nuances. Enquête autour de la fonction, de ses évolutions, de son positionnement et de sa valeur ajoutée. Comment gérer efcacement le cash? Comment appréhender les risques et se couvrir? Réponses dans notre dossier alliant conseils, témoignages et partage d’expériences. Dossier

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Gestion de trésorerie

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FINANCE MANAGEMENT - CFO MAGAZINE - N°17 - MAI 2008

>EN PRATIQUESOMMAIREN°17 MAI 2008

Gestion de trésorerie: 10 conseils d’expertsL’entreprise peut-elle se passer de compétences internes en matière de gestion de trésorerie? Les trésoriers interrogés

plaident évidemment pour leur chapelle. Mais non sans nuances. Enquête autour de la fonction, de ses évolutions, de son positionnement et de sa valeur ajoutée. Comment gérer effi cacement le cash? Comment appréhender les risques et

se couvrir? Réponses dans notre dossier alliant conseils, témoignages et partage d’expériences.

Dossier

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FINANCE MANAGEMENT - CFO MAGAZINE - N°17 - MAI 2008

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FISCALITÉ DOSSIER : GESTION DE TRÉSORERIE

TEXTE : CHRISTOPHE LO GIUDICE

L’entreprise peut-elle se passer de compétences internes en gestion de trésorerie? Président de l’ATEB, l’Association des Trésoriers d’entreprise, Olivier Brissaud plaide bien évidemment pour sa chapelle lorsqu’on lui pose cette question. Mais non sans nuances. Entretien autour de la fonction, de ses évolutions, de son positionnement et de sa valeur ajoutée.

« La fonction de trésorier se justifi e pleinement dès lors que l’en-

treprise se trouve confrontée à des risques importants en termes

de change, à des problèmes de taux d’intérêt – à l’actif ou au

passif – ou encore à des soucis de fi nancement », cadre Olivier

Brissaud, Managing Director chez Volkswagen Group Services

et président de l’Association des Trésoriers d’entreprise en Bel-

gique (ATEB). Cette association professionnelle est membre de

l’EACT, l’European Associations of Corporate Treasurers.

La mission traditionnelle du trésorier consiste à « veiller aux

ressources fi nancières » de l’entreprise de sorte que celles-ci

soient disponibles pour assurer son bon fonctionnement et

lui permettre de se développer. On parle ici de gestion des fl ux

et des soldes: détermination en valeur de la position bancaire,

équilibrages de comptes, gestion des fi nancements/place-

ments à court terme. Fondement du métier, la trésorerie d’ex-

ploitation – ou « cash management » – et la maîtrise des opé-

rations qu’elle implique conservent leurs lettres de noblesses.

DEUX VOLETS Mais le rôle du trésorier moderne ne s’arrête pas là. Il s’étend de

plus en plus à la gestion des risques: la gestion de la liquidité

– s’assurer que l’entreprise pourra bien faire face à ses engage-

ments –, la gestion des risques de change et de taux – consis-

tant à les détecter, à les évaluer et à les couvrir – et la gestion

des risques de contrepartie, directs ou indirects, sur ses parte-

naires fi nanciers, pays et clients. Dans un tel rôle, on attend de

lui qu’ils interviennent en amont des négociations commercia-

les, en se positionnant comme un consultant interne.

« Le trésorier est celui qui, par une connaissance approfondie de

l’activité et des objectifs de l’entreprise et de l’environnement dans

lequel elle évolue, évalue et quantifi e les risques fi nanciers qui y

Pour être effi cace, le trésorier a besoin d’un cadre dans lequel

travailler, des processus précis, transparents et fi ables. Ce

cadre se défi nit dans une « Treasury Policy ». Exemple: « Une

entreprise de grande distribution dispose en général d’énor-

mément de liquidités, illustre Olivier Brissaud. Il est donc

indispensable de déterminer ce que le trésorier a le droit d’en

faire, sur quels instruments, avec quelle latitude. Il s’agit d’une

politique qui doit être écrite et qui fi xe la direction, défi nit les

comportements désirés, garantit la cohérence des actions et

prévoit un contrôle. Elle doit être claire sur les activités qui sont

permises et celles qui ne le sont pas, les responsabilités et les

exigences de reporting. Elle sera approuvée par le CFO et par le

Board dans son ensemble. »

En matière d’endettement, le trésorier doit être couvert. Si

couverture de risques de change il y a, la stratégie générale

doit être validée. Si le trésorier est amené à chercher les pla-

cements les plus agressifs, il faudra déterminer jusqu’à quel

rating. « Contrairement au métier de comptable, relativement

bien balisé, celui de trésorier comporte une part de risques éle-

vée. Toute mauvaise gestion se verra directement dans le P&L.

En établissant une telle politique, le CFO se couvre également:

avec un cadre de travail déterminé, il peut dormir tranquille en

sachant avec quelles marges de risques il évolue. »

Des conseils pour établir votre « policy »?www.treasurers.org/bookshop/resources/handbook06/treaspolicy05.pdf

CONSEIL N°1: dotez-vous d’une « Treasury Policy »

Avez-vous besoin d’un trésorier?

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sont inhérents, propose aux dirigeants des stratégies de couverture

de ces risques, met en œuvre ces politiques et évalue leur effi cacité,

résume Olivier Brissaud. Il y a donc deux volets à son activité: l’une

plus conceptuelle et l’autre plus opérationnelle. » Vu sous cet angle,

disposer en interne de compétences en trésorerie apparaîtra à la

plupart des directeurs fi nanciers d’une nécessité évidente!

La question n’est pourtant pas anodine, à l’heure où le mot «

externalisation » est sur toutes les lèvres. « Cette idée est pous-

sée par les grandes institutions bancaires, avec des visées commer-

ciales à peine voilées, commente-t-il. Bien entendu, confi er cette

gestion à un tiers sur base d’un cahier des charges, puis d’un ‘ser-

vice level agreement’ avec le partenaire sélectionné, est toujours

possible. Mais il faut bien se dire que, si la réalisation de certaines

opérations et leur suivi peuvent être externalisés, il est illusoire de

penser qu’on peut se débarrasser du problème. Il faudra de toute

façon conserver des compétences internes, ne fut-ce que pour la

qualifi cation des risques, la réalisation d’opérations que l’on sou-

haite confi dentielles ou encore le contrôle du processus. »

UN « FÉDÉRATEUR »Traduction: il s’agit d’évaluer avec soin si les frais fi xes pour

que les personnes qui restent soient opérationnelles – sources

d’informations de marché, système de trésorerie, ségrégation

des fonctions, etc. – ne diminue pas sensiblement l’avantage

que l’on peut attendre de la réduction envisagée de l’effectif,

pointe Olivier Brissaud. « Les processus internes sont en outre

un aspect qui ne peut être externalisé, si l’on se place dans une

optique de Working Capital Management: payer le plus tard

possible et recevoir les paiements le plus vite possible afi n de

bénéfi cier de positions de trésorerie nettes positives. Ce sont

des processus propres qui ne sont pas facilement reproducti-

bles: chaque entreprise est différente. »

La fonction possède différentes facettes. Contrairement

au comptable, au contrôleur de gestion ou au fi scaliste,

le trésorier intervient à la fois dans les processus interne

– comme interlocuteur des autres fonctions fi nanciè-

res ou des commerciaux, par exemple – mais aussi en

externe, dans les relations avec les banquiers et avec

les investisseurs. « En ce sens, ce doit être une personna-

lité ‘sortable’, insiste Olivier Brissaud. C’est sans doute la

seule fonction, avec le CFO bien entendu, qui met autant

son nez hors du département fi nancier. Il s’agit donc de

choisir son trésorier en veillant à ses compétences tech-

niques mais également à la dimension des soft skills. Le

trésorier contribue à l’image extérieure de l’entreprise! »

CONSEIL N°2: ne sous-estimez pas le relationnel

Olivier Brissaud: « Contrairement au métier de comptable, relati-vement bien balisé, celui de trésorier comporte une part de risques élevée. Toute mauvaise gestion se verra directement dans le P&L. »

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Autre valeur ajoutée d’un trésorier en interne: dans une optique

de vision à moyen terme, celui-ci négocie, traite avec les ban-

ques et joue un rôle déterminant dans la politique de relations

avec les partenaires fi nanciers et de communication sur l’acti-

vité de la société. « Le Cash Management peut à la fois s’inscrire

dans une relation durable avec un banquier et dans des relations

plus opportunistes pour certaines opérations spécifi ques comme

une introduction en bourse, le fi nancement d’une opération à

l’exportation ou encore l’émission obligataire sur une devise spé-

cifi que pour lesquelles un partenaire spécialisé est à trouver. »

On l’aura compris: s’occupant à la fois des fl ux d’argent à court

terme et de fi nancement à plus long terme, voire étendant sa

responsabilité à l’appréciation des risques client, la tritrisation

de créances, la gestion des risques sur matières premières ou

les opérations de capital, le trésorier apparaît comme un « fédé-

rateur » des métiers de la fi nance. Il doit ainsi être capable d’en-

tretenir des contacts multiples avec son CFO, la comptabilité, le

contrôle de gestion, les fi scalistes, le business, les partenaires

externes que sont les banques et, parfois, jusqu’aux agences de

rating et les investisseurs en actions et obligations.

Guère étonnant dès lors que le trésorier ait souvent une carrière en

S, passant de l’entreprise à la banque ou de la banque à l’entreprise.

Attention, avertit toutefois Olivier Brissaud: « Gare aux profi ls ayant

un goût du risque trop marqué, comme les personnes ayant évolué en

salle des marchés. A moins d’en faire un choix conscient. Elles connaî-

tront les clés des opérations de change mais risquent de s’ennuyer en

entreprise où la prise de risque doit être beaucoup plus mesurée. »

DIFFICILE À MANIPULER Retour à la question de départ: l’entreprise peut-elle se passer de

trésorier? « Le CFO qui n’en compte pas dans son équipe peut utili-

ser son comptable, le profi l qui est le plus proche des fl ux fi nanciers,

mais avec les limites propres à sa fonction. Il peut aussi parler à son

banquier, tout en étant conscient des enjeux en termes de confl it

d’intérêts. Il peut s’adresser aux consultants, notamment les Big

Four. Mais, dès lors qu’il se trouve confronté à une certaine com-

plexité, il court le risque de gaspiller son temps à passer de l’un à

l’autre. C’est alors que l’embauche d’un trésorier peut se justifi er. »

D’autant que ce type de profi l peut être considéré comme une

option crédible en termes de… succession. « Longtemps, le tré-

sorier s’est cantonné à une fonction très technique, conclut-il.

Aujourd’hui, les choses évoluent, notamment avec la tendance à

rechercher des profi ls moins effacés capables de résister aux pres-

sions internes suite aux scandales rencontrés aux Etats-Unis. A ce

titre, le trésorier et son image plus affi rmée, plus diffi cile à manipu-

ler, peuvent représenter une piste possible pour reprendre la fonc-

tion. Une belle évolution pour un profi l qui, jusque-là, avait pour

principale perspective de carrière de diriger une plus grande équipe

de trésoriers ou de prendre la responsabilité d’un centre de services

partagés en trésorerie… »

Contact: www.atebforum.com

FISCALITÉ DOSSIER : GESTION DE TRÉSORERIE

De quoi s’occupent le plus les trésoriers? Une enquête

menée en France par l’AFTE et Robert Half Internatio-

nal auprès de 900 trésoriers et fi nanciers d’entreprises

révèle une très grande diversité en la matière. « Il sem-

ble que l’optimisation des systèmes d’information tienne

une place importante dans leurs attributions, pointent les

auteurs. Quant à la gestion des placements et des fi nan-

cements, elle ne semble plus revêtir la même importance

qu’avant. Cette activité est passée au dernier rang des pré-

occupations des trésoriers. »

Leur champ d’action demeure assez large puisque 50%

des trésoriers sondés affi rment consacrer moins de la

moitié de leur temps au domaine strictement lié à la

trésorerie. « Le credit management, la comptabilité et la

communication fi nancière sont les principales fonctions

exercées par les trésoriers en marge de leur métier d’ori-

gine. » Autre constat: « La dématérialisation des fl ux est

incontestablement l’élément qui va le plus impacter le

métier dans les années qui viennent. » La centralisation

des opérations, l’évolution des technologies de l’infor-

mation, la concentration bancaire ou encore la signature

électronique étaient déjà à l’agenda par le passé et le res-

tent résolument aujourd’hui.

Trésorier: un rôle diversifi é

« Il faut veiller autant que possible à marquer une séparation

nette entre ceux qui préparent les opérations et les réalisent

et ceux qui vont les contrôler, conseille Olivier Brissaud. Il

s’agit là d’une contrainte qui peut amener à élargir l’équipe,

mais elle permet de réduire les risques de fraude. C’est un

point de vue qui n’est d’ailleurs pas limité aux trésoriers

mais qui doit s’envisager pour toutes les fonctions exposées

directement à l’argent, comme les acheteurs par exemple. »

CONSEIL N°3: séparez la préparation des opérations de leur contrôle

« Si la réalisation de certaines opérations et leur suivi peuvent être externalisés, il est illusoire de penser qu’on peut se débarrasser du problème. »

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Au sein de RTL Group, François Masquelier peut se targuer d’une

fonction de trésorier très complète puisqu’elle comporte trois

volets: la gestion de la trésorerie groupe, tout ce qui est Corpo-

rate Finance et l’Enterprise Wide Risk Management. « La gestion

proactive des risques, non seulement fi nanciers mais aussi plus

largement tous ceux pouvant affecter l’activité, est une casquet-

te que j’ai reprise, confi e-t-il. Elle n’est pas classique de la fonction,

mais tend néanmoins à se répandre. Cette approche recouvre

l’identifi cation, l’analyse et, dans certains cas, la couverture de

risques aussi diversifi és que l’incendie, l’insatisfaction par rapport

au produit, l’altération de l’image de marque, la fraude, etc. »

Par ailleurs président de l’Association des trésoriers d’entre-

prise à Luxembourg (ATEL) et président honoraire de l’asso-

ciation européenne des trésoriers d’entreprises (EACT), Fran-

çois Masquelier qualifi e la fonction comme étant de plus en

plus technique, centrale et stratégique. Et la crise fi nancière

avec ses incertitudes quant à la santé fi nancière des ban-

ques ainsi que le resserrement des conditions du crédit vien-

nent encore renforcer la tendance. « La fonction de trésorier

est centrale en ce sens qu’elle interagit avec différents acteurs

tant internes – board, actionnaires, management, audit in-

terne, comptabilité, etc. – qu’externes – banquiers, agences

de rating, auditeurs externes, etc. C’est un métier de commu-

nicateur: le trésorier est descendu de sa tour d’ivoire et, avec

l’adoption des IFRS notamment, il est également amené à

mieux comprendre le business, à communiquer avec lui et à

essayer de mieux vendre son action et sa valeur ajoutée. »

Tout comme Olivier Brissaud, François Masquelier pointe

les atouts que le trésorier peut faire valoir pour accéder à la

fonction de CFO. « La fonction s’est diversifi ée et gère des fa-

cettes de plus en plus variées, à tel point que le CFO et le tré-

sorier se comprennent de mieux en mieux. Les trésoriers sont

experts dans des domaines au centre des préoccupations

actuelles des CFO: les liquidités, les moyens pour soutenir

l’expansion, les règles IAS, la forte volatilité des marchés, la

prise en compte des risques, etc. Ils jouent donc des rôles très

complémentaires. Parfois jusqu’au point de se confondre… »

Question: le CFO peut-il se passer de trésorier? « Le CFO intel-

ligent sait qu’il ne peut être au fait de tout: c’est aujourd’hui

un super généraliste et la gestion de trésorerie devient une ma-

tière très pointue, très technique. Comme la trésorerie reste un

des meilleurs indicateurs de santé fi nancière, il a tout intérêt à

pouvoir compter sur un trésorier repositionné dans l’échiquier,

proche de lui, à l’américaine. C’est d’autant plus vrai que, l’auto-

matisation aidant, le trésorier peut faire évoluer son rôle d’exé-

cution à un rôle beaucoup plus stratégique, axé sur des tâches

plus créatrices de valeur pour l’entreprise » (voir graphique).

FISCALITÉ DOSSIER : GESTION DE TRÉSORERIE

Types de rôles

Strategic

Analytical

Executional

« Le trésorier joue un rôle central »

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FISCALITÉ DOSSIER : GESTION DE TRÉSORERIE

TEXTE : CHRISTOPHE LO GIUDICE

La fonction de trésorier trouve de plus en plus à s’épanouir au sein de centres de coordination, démontrant par là même son caractère stratégique. C’est l’expérience dont témoigne Daniel Mirgaux, Group Treasurer chez Herstal Group Services, qui, au fi l des années, a par ailleurs vu son rôle se décaler de la gestion des fl ux monétaires pour se centrer davantage sur la gestion des risques et leur couverture. D’autant que l’organisation est aujourd’hui fort touchée par la dépréciation du dollar.

A vec un chiffre d’affaires de plus de 500 mil-

lions d’euros, la FN-Herstal fait partie des

grands du secteur de l’armement. Ce groupe

qui compte des fi liales en Europe, aux Etats-

Unis et au Japon emploie quelque 2.500 personnes dans le

monde, dont 1.307 à Herstal. Group Treasurer au sein du centre

de coordination FNCC, devenu Herstal Group Services, Daniel

Mirgaux connaît la maison comme sa poche. Il y est entré dès

la fi n de ses études, à HEC Liège, pour intégrer l’équipe fi nan-

cière. C’était il y a 28 ans. En un quart de siècle, il n’hésite pas à

qualifi er de révolution la façon dont la fonction trésorerie s’est

transformée au sein de l’entreprise.

« A l’époque, la fonction n’existait pas en tant que telle, dit-il.

S’occuper de la trésorerie, c’était recopier les extraits bancaires

dans des grands livres légaux, gérer l’argent qui se trouvait sur les

comptes en banque et tirer sur les lignes de fi nancement négo-

ciées avec les banques. » Par la suite, un programme informa-

tique sera mis en place pour faire évoluer les processus de ges-

tion de trésorerie et de suivi des fl ux. Lorsqu’il prend la fonction

de caissier principal, l’entreprise a en permanence quelque trois

millions d’euros en caisse, destinés aux paiements sociaux. Et

tout est à développer, ou presque. « Il y avait du temps à gagner

car les processus en place obligeaient à reprendre les écritures

manuscritement dans plusieurs livres différents. »

EN AMONT En 1985, la structure du groupe se stabilise. Avec plusieurs socié-

tés en Belgique, en Europe et aux Etats-Unis, la décision est prise

de créer un centre de coordination et d’y loger, aux côtés d’autres

fonctions, la gestion de la trésorerie. « Aujourd’hui, nous travaillons

encore et toujours à approfondir cette centralisation, explique Da-

niel Mirgaux. Le trésorier doit gérer l’argent en caisse et travailler sur

les mouvements passés en termes de reporting. Mais sa réelle plus-

value, il va la trouver dans la prévision et la prospective. »

Si ce volet demeure bien entendu essentiel, la fonction dé-

borde largement la simple gestion du cash pour s’intéresser

aux risques – fi nanciers et, plus largement, tous les risques

inhérents à l’activité –, et à leur couverture. Le suivi des lignes

de crédits est aussi essentiel pour éviter toute carence en la

matière. Sans oublier la gestion de la relation bancaire, très

délicate dans un contexte de durcissement de la part des ins-

titutions du secteur à l’égard des activités liées à l’armement.

« Un des enjeux pour nous consiste à ce que les grandes opéra-

tions de fi nancement et de couverture de risques soient réali-

sées avec des banquiers que nous choisissons. Nous guidons les

opérations, ce qui justifi e d’agir au niveau Corporate. »

Notre vraie plus-value réside dans la prospective

« Dans un groupe comme le nôtre, la centralisation des

fl ux et de la gestion des risques est très importante, souli-

gne Daniel Mirgaux. D’où l’intérêt d’avoir logé la fonction

de trésorerie au sein du Corporate qui est en ligne directe

avec le conseil d’administration. Cela permet de pren-

dre les bonnes décisions sur la façon de gérer les risques

de façon très directe et très saine. C’est aussi un choix ef-

fi cace au niveau de la rentabilisation des fonds propres

et de la diminution des coûts des fonds empruntés. »

CONSEIL N°4: centralisez

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S’il est un aspect du rôle qui a gagné en importance, c’est bien

celui des risques. « Nous nous positionnons à la fois par rapport

au conseil d’administration, aux CFO et en amont des offres de

prix et des commandes, indique Daniel Mirgaux. Il s’agit non seu-

lement d’appréhender les différents risques auxquels le groupe est

confronté – crédit, de change, de taux, liés aux matières premières,

à l’environnement, etc. –, de les couvrir, mais aussi de les expliquer

en interne. Nous sommes par ailleurs beaucoup plus actifs que par

le passé dans la prévision des fi nancements à mettre en place pour

aider la croissance de l’entreprise. »

RÉAGIR ET ANTICIPER Au sein du Groupe Herstal, la fonction de trésorier groupe dé-

pend en direct du CFO groupe qui, lui-même, rapporte à l’ad-

ministrateur délégué. Elle est chargée de relayer les vues du

conseil d’administration et de direction auprès des différentes

fi liales, au sein desquelles se retrouvent des fonctions de cash

managers. « Nous faisons descendre auprès d’eux la stratégie

groupe qu’ils sont amenés à décliner dans les fi liales et, de leur

côté, ils opèrent le reporting au niveau des risques pour nous

permettre de réagir et, autant que possible, d’anticiper. »

La valeur ajoutée que peut apporter un trésorier dépend natu-

rellement de son panel de compétences. Un panel particulière-

ment varié, aux yeux de Daniel Mirgaux. « Le trésorier doit avoir

de bonnes bases macroéconomiques pour pouvoir, par exemple,

bien comprendre les mécanismes de l’infl ation, de change, etc. A

un niveau microéconomique, il doit bien connaître le fonctionne-

ment et les rouages de son entreprise de sorte de pouvoir contri-

buer aux prévisions et décisions. » Sans négliger, bien entendu, de

solides connaissances tant en comptabilité qu’en fi scalité.

CURIEUX ET IMAGINATIF Plus original: Daniel Mirgaux le voit aussi comme une person-

nalité curieuse et imaginative. « Un trésorier ne peut avoir des

œillères: il doit regarder autour de lui, suivre les évolutions et

les techniques que le marché met à sa disposition. Voire même

construire avec les banques les instruments qui vont répondre

à ses propres besoins, plutôt que se cantonner aux offres très

stéréotypées qui sont proposées. Cela implique de bien com-

prendre les techniques fi nancières développées par les banques

et d’en évaluer tous les risques et les avantages. » Enfi n, c’est

quelqu’un capable de jouer l’interface entre les départements

internes et l’externe, orienté vers la résolution de problèmes

et la recherche de solutions adaptées.

Vaste programme! La valeur ajoutée que peut apporter le

trésorier dépend toutefois aussi du type de profi l qui pilote

les fi nances de l’entreprise. « Avec un directeur fi nancier qui

se centre sur les données passées et s’intéresse peu aux vérita-

bles enjeux, le rôle du trésorier se limitera à offrir une vue des

entrées et sorties au jour le jour, caricature-t-il. Par contre, avec

un CFO tourné vers la stratégie et l’anticipation, vous pouvez

travailler dans une réelle perspective d’alignement au profi t du

business, pour qui la valeur ajoutée du trésorier n’est pas né-

gligeable. Nous essayons de tirer une rentabilité maximale des

fonds confi és et, en situation de fi nancement par l’extérieur, de

le faire au coût le plus bas possible. »

Quels sont les défi s à l’agenda de Daniel Mirgaux aujourd’hui?

« Notre groupe génère beaucoup de cash aux Etats-Unis où il

compte surtout des sociétés commerciales et peu en Europe

où sont basées nos unités de production, conclut-il. L’enjeu

consiste à faire descendre du cash en Europe, grâce à la centra-

lisation de sa gestion et par la mise en place d’un cash pooling,

compliquée par le décalage horaire. » Autres chantiers impor-

tants: la pré imputation comptable qui doit encore être amé-

liorée, la mise en place d’un Treasury Policy – listant les opé-

rations pouvant être réalisées par le trésorier et l’esprit dans

lequel les réaliser – ou encore la bonne marche d’un comité

d’audit récent se concentrant sur la grande variété de fl ux à

l’œuvre entre les fi liales.

Daniel Mirgaux conseille également de se faire aider par

une Treasury Policy, remise à jour tous les ans et réguliè-

rement approuvée par le comité d’audit. « Ce cadre balisé

peut permettre d’ouvrir de petites positions de trading limi-

tées, clairement identifi ées, et ainsi de pouvoir tirer parti des

opportunités présentes sur les marchés. Cette stratégie per-

met de ne pas tout mélanger et de mener de front la sécuri-

sation du business et la prise de positions où l’on peut laisser

parler son cœur et son instinct à l’intérieur de limites stric-

tes. Bref, mêler l’utile à l’agréable sans tomber dans l’excès. »

CONSEIL N°5: Osez les risques… mesurés

Daniel Mirgaux: « Le trésorier doit suivre les évolutions des techniques que le marché met à sa disposition. Voire construire avec les banques les instruments qui vont répondre à ses besoins, plutôt que se cantonner aux offres stéréotypées. »

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FISCALITÉ DOSSIER : GESTION DE TRÉSORERIE

TEXTE : LAURENT CORTVRINDT

La somme de tous les avoirs et dettes à court terme d’une entreprise constitue ce que l’on appelle communément la trésorerie. Le contenu des comptes de banque et de caisse d’épargne en compose une partie importante. Gérer ces fi nances consistera, entre autres, à maintenir une liquidité suffi sante pour faire face aux échéances, tout en optimisant la rentabilité des fonds. Hélas, souvent, la trésorerie est négligée, faute d’intérêt, de temps ou de compréhension. Nous avons consulté plusieurs experts pour vous aider à gérer plus effi cacement vos capitaux.

Comment gérer efficacement vos capitaux

Assureur crédit, Atradius possède comme mission prin-

cipale d’indemniser les créances impayées de ses clients.

« Ceux-ci sont principalement des fournisseurs de biens et de

services et nous les couvrons, à hauteur de 90 %, contre les

défaillances de leurs propres clients », explique Christophe

Cherry, directeur commercial chez Atradius Belgium et

Luxembourg. Et pour nourrir la trésorerie d’une entreprise,

en effet, quoi de mieux que le paiement des clients? L’inter-

vention d’Atradius exerce donc un premier impact direct sur

la protection du cash de l’entreprise.

« Cette indemnisation de créance à payer s’opère après un

certain délai de carence de non payement. Concrètement,

cela signifi e que nos assurés ont la certitude d’obtenir le cash

dans leur trésorerie au plus tard six mois après l’échéance

d’une facture impayée. » Outre l’indemnisation, l’assu-

reur crédit peut également s’occuper de récupération de

créance, un second impact direct sur la trésorerie d’une en-

treprise. « Dès que l’un de nos assurés possède une créance

échue vis-à-vis d’un de ses clients, il peut nous soumettre le

dossier pour récupération. Il est donc possible, voire proba-

ble, que nous recouvrions tout ou une partie de cette créance

assez rapidement. Pour le solde que nous n’aurions pas pu

encaisser, l’indemnisation classique aura lieu après six mois

au maximum. »

Christophe Cherry: « Le chef d’entreprise doit s’inter-roger. Prend-il suffi samment conscience du facteur risque et doit-il opter pour l’assurance-crédit? Dans notre marché cible, nous estimons que seules 17% des entreprises éligibles ont conclu un contrat. »

CONSEIL N°6: récupérer du ‘cash’ pour alimenter votre trésorerie

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Par ailleurs, Atradius possède l’avantage majeur d’être pré-

sent dans le monde entier. Encaisser une créance impayée

en Asie ou aux États-Unis fait donc partie du travail quoti-

dien de ses collaborateurs… alors que ceux d’une entreprise

de plus ou moins grande taille se heurteront peut-être déjà

à la barrière de la langue. L’assurance-crédit constitue-t-

elle pour autant la solution idéale pour toute entreprise?

Positive ou négative, la réponse dépendra du secteur d’acti-

vité et de son niveau de risque. Le commerce de détail ne

connaît, par exemple, pas de créance commerciale.

PERLE RARE À TROUVER« Le chef d’entreprise doit également s’interroger. Prend-il

suffi samment conscience de ce facteur risque et doit-il opter

pour l’assurance-crédit? Dans notre marché cible, c’est-à-dire

les sociétés éligibles à l’assurance-crédit, nous estimons que

seules 17% d’entre elles ont conclu un contrat. » Un premier

tiers de la clientèle d’Atradius est directement lié au secteur

de la construction. Les entreprises actives dans l’exportation

(métal, chimie, manufacture) arrivant en seconde position.

Christophe Cherry explique ce pourcentage, fi nalement peu

élevé, par une série d’obstacles – psychologiques ou fi nan-

ciers – encore fort présents.

Atradius développe dès lors de nouveaux services, comme

par exemple un accord de collaboration avec Fortis Com-

mercial Finance, société de facturation. Atradius est ainsi

en mesure de proposer à ses assurés d’appuyer leur contrat

d’assurance crédit par un contrat de fi nancement à conclure

avec Fortis Commercial Finance. « Sur base des couvertures

de crédit que nous donnons et sachant que, in fi ne, le paie-

ment aura bien lieu endéans les six mois maximum, Fortis

fi nancera entre 80% et 85% du montant de la facture, dès

émission de la créance. »

Quant aux logiciels de gestion, Christophe Cherry estime

que le produit parfait est diffi cile à trouver. « A nos ser-

vices, nous aimerions d’ailleurs associer un logiciel de gestion

capable de coller au mieux aux services de l’assureur-crédit.

Idéalement, pour compte de l’assuré, ce logiciel gérerait son

contrat d’assurance-crédit, ses échéances de factures, ses rap-

pels, ses demandes de crédit… Mais, dans la pratique, tout cela

se révèle assez compliqué… L’une ou l’autre société semblent

se démarquer légèrement sur le marché mais nous n’avons

pas encore déniché la perle rare. Je ne crois d’ailleurs pas à

l’offre unique. Il faut faire une offre segmentée car les besoins

diffèrent d’une société à l’autre… ».

PricewaterhouseCoopers est considéré comme un des bu-

reaux les plus à la pointe en matière de conseil en trésore-

rie et en gestion des risques financiers. Director Advisory

pour ces matières, Olivier Cattoor explique que le premier

pas à franchir dans ce domaine consiste à déterminer le

scope des activités de trésorerie de l’entreprise. « La ma-

jorité des grandes entreprises, en Belgique ou à l’étranger,

possèdent une fonction de trésorerie autonome rapportant

au CFO. Cette équipe comprend, en moyenne, de deux à dix

personnes en fonction de la taille de l’entreprise. Toutefois,

un nombre important de sociétés de taille moyenne ne pos-

sède pas de fonction de trésorerie établie. Ces activités sont,

le cas échéant, souvent assumée par le CFO. Faiblesse de ce

système: le CFO a bien d’autres sujets à traiter et ne gère

donc la trésorerie que de manière réactive. »

Néanmoins, pour ces entreprises, le business case existe

pour créer une fonction de trésorier, quitte à ce que cette

fonction soit cumulée avec une autre fonction pour les

entreprises moins exposées aux risques fi nanciers. « Le tré-

sorier joue en effet un rôle très important: il gère essentielle-

ment les relations avec les banques, le risque de liquidité et

de change, il optimise le coût de fi nancement et le return sur

les liquidités disponibles. Les crises actuelles, liées à la globa-

lisation des marchés – subprime, faiblesse du dollar, envolées

CONSEIL N°7: « Le trésorier va de-voir se pencher sur la gestion des risques des matières premières et des énergies »

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Disposez-vous d’un bon outil pour vos

prévisions financières ?

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FINANCE MANAGEMENT - CFO MAGAZINE - N°17 - MAI 2008

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des prix des matières premières… – ne font que renforcer le

besoin pour les entreprises de libérer les moyens permettant

de développer davantage cette fonction. »

Le trésorier est un gardien des risques essentiel au sein des

entreprises, pointe-t-il. « Il peut également jouer un rôle im-

portant dans la maîtrise des besoins en fonds de roulement,

ainsi que dans la gestion des autres risques auxquels une

société est exposée (risque opérationnel, risque d’assurance)

». Les trésoriers expérimentés sont d’ailleurs, selon Olivier

Cattoor, une ressource prisée sur le marché. « Ceux-ci pro-

viennent généralement de la maison. Ils connaissaient déjà

un penchant pour ce type d’activité mais, un beau jour, ils ont

plus clairement profi lé leurs carrières professionnelles. Sinon, il

peut aussi s’agir d’un banquier ou d’un ancien banquier qui a

souhaité passer du côté de l’entreprise. Car le trésorier doit être

très proche du business. C’est un métier de communication et

de contacts. »

EMERGENCE DE NOUVEAUX RISQUESSa position de leader sur le marché du conseil en trésorerie,

PricewaterhouseCoopers la doit à son investissement pré-

coce dans ce domaine. L’activité a été démarrée il y a une

dizaine d’années, au moment où le métier de trésorier se

développait. « Nous avons joué le rôle de promoteur de la

fonction de trésorier au sein de l’entreprise. Nous avons mis

en valeur l’importance de ce rôle auprès du CFO et du comité

de direction. » PwC couvre l’entièreté des services dont un

trésorier peut avoir besoin. Même au niveau le plus élevé.

Ceci concerne, par exemple, les treasury policies où il faudra

déterminer la stratégie de gestion des risques fi nanciers de

l’entreprise, les rôles et responsabilités entre le trésorier et

le CFO, et entre la trésorerie et les fi liales du groupe…

Olivier Cattoor attire également l’attention sur l’explosion

des prix des « commodities » (risque matières premières

et énergie) ces dernières années. « Le trésorier est bien pla-

cé pour couvrir également ce risque. Nous avons constaté

qu’un certain nombre d’entreprises de taille moyenne gè-

rent de manière active le risque de change et d’intérêt…

mais occultent totalement le risque matières premières.

Désormais, les niveaux de prix atteints par les matières pre-

mières (métaux et énergie) devraient inciter les entreprises

à gérer de manière plus active ce risque. »

Les trésoriers vont donc devoir identifi er et mesurer l’ex-

position aux risques « commodities » liés au business de

l’entreprise (achat d’énergie pour faire tourner les machines

et chauffer les locaux, matières premières pour fabriquer

les produits…). En discutant, entre autres, avec le respon-

sable des achats, le trésorier pourra identifi er les besoins

annuels en matières premières de l’entreprise, déterminer

dans quelle mesure les prix sont variables, et évaluer si les

fl uctuations de prix peuvent être répercutées dans les prix

de vente des produits de l’entreprise.

L’entreprise pourra alors décider si elle désire gérer de ma-

nière plus active ce risque avec des produits dérivés de

couverture ou en négociant des contrats à plus long terme

avec ses fournisseurs. Concrètement, déterminer la politi-

que de gestion du risque matières premières constitue une

première étape, qui devra être suivie par la mise en place

d’une structure organisationnelle et de processus de ges-

tion. Enfi n, si le volume de transaction se révèle important,

le trésorier peut se doter d’un outil de gestion approprié.

Les softwares de gestion souples dans ce domaine n’exis-

tent pas encore mais, eux aussi, devraient bientôt faire leur

apparition…

FISCALITÉ DOSSIER : GESTION DE TRÉSORERIE

« Le fonds de roulement est ainsi un instrument de ges-

tion indispensable, incontour-nable, qu’il s’agit de maîtriser

dans tous ses aspects. »

Olivier Cattoor: « Un certain nombre d’entreprises de taille moyenne gèrent de manière active le risque de change et d’intérêt… mais occultent totalement le risque matières premières. Les prix atteints par les matières premières devraient inciter à le gérer de manière plus active. »

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Marketing Corporate chez Dexia, Peter Anthierens estime que

le planning de trésorerie permet de posséder une vue claire sur

les excédents. Il restera alors à distinguer les moyens à investir

à court, moyen ou long terme. Le planning de trésorerie indi-

que également les risques de change et d’intérêt. Les actions

entreprises sur base de ces constats doivent avoir été formel-

lement fi xées dans la politique d’investissement. De la sorte,

pour chaque horizon d’investissement, il est souhaitable de

déterminer, entre autres, les items suivants: les objectifs d’in-

vestissement, la durée moyenne, le rendement minimal at-

tendu, les risques autorisés (garantie de capitaux, rapport fi xe,

risque de change), les produits désignés et le « rapportering ».

Ces informations permettront à votre banquier de proposer

des solutions à la mesure de votre entreprise.

Peter Anthierens préconise aussi de diversifi er les investisse-

ments. « La diversifi cation la plus importante concerne l’échéance

d’investissement, et non le type de produit. Investir, dans des

conditions normales, sur des durées importantes, rapporte en

effet d’avantage. C’est pourquoi il conviendra de partager la tota-

lité de vos excédants de trésorerie dans les quatre composantes

suivantes. »

1. Pour les horizons d’investissement inférieurs à trois mois.

« Il s’agit du capital de travail de votre entreprise. Nous re-

marquons des fl uctuations quotidiennes importantes. Par

conséquent, nous proposons, indépendamment de votre

profi l d’investissement concret, des produits très liquides et

avec un risque aussi réduit que possible »: investir en euros

ou en devises, très fl exibles en ce qui concerne la durée et

le montant minimum, un compte bancaire à haut rende-

ment qui combine une indemnisation plus haute à une

forte liquidité et le Money Market Funds (AAA).

2. Pour les horizons d’investissement allant de trois mois à

un an: il s’agit des fonds typiques créés pour le paiement

de dividendes, d’impôts ou de projets d’investissement

planifi és. Ceux-ci fl uctuent moins et peuvent également

être étendus. Par conséquent, un horizon d’investisse-

ment plus long, moins de liquidités et un profi l de risque

plus haut conviendront parfaitement. Selon votre profi l

d’investissement, le banquier proposera les produits sui-

vants: Money Market Funds AA, Floating Rate Notes et des

investissements structurés: rendement minimal rehaussé

avec une construction basée sur l’évolution des prix des

matières premières. Ces constructions peuvent être faites

sur mesures, avec différentes durées.

3. Pour les horizons d’investissement supérieurs à un an: il

s’agit souvent de fonds que la société a mis de côté pour

de futures reprises, rachats d’actions ou des projets en-

core indéfi nis. Il est important de gérer ces moyens sé-

parément et de leur prévoir un horizon d’investissement

plus long, autorisant un rendement supérieur. Selon votre

profi l d’investissement, Dexia propose les produits sui-

vants: des Sicav’s et des investissements structurés avec

un horizon de fi nancement supérieur à un an.

4. Les excédants permanents: il s’agit des moyens qui n’ont pas

encore été couplés à un projet et à propos desquels l’horizon

d’investissement reste indéfi ni. A nouveau, il est conseillé de

gérer ces moyens séparément. Votre banque propose une

gestion des rendements discrétionnaire. Différentes straté-

gies sont envisageables, y compris une gestion durable.

Chez ING, ce qu’on appelle le cash management – la tâche

d’un trésorier au sens large du terme – est répartie sur quatre

grands thèmes: la gestion des fl ux (paiements, rentrées de

CONSEIL N°8: « Diversifi er les investissements »

CONSEIL N°9: « Le scan du fonds de roulement, un indice fi nancier et un instrument de gestion »

Peter Anthierens: « La diversifi cation la plus importante concerne l’échéance d’investissement, et non le type de produit. Investir, dans des conditions normales, sur des durées importantes, rap-porte en effet d’avantage. »

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FISCALITÉ DOSSIER : GESTION DE TRÉSORERIE

fonds…), des soldes (importance de l’aspect reporting et de

l’électronique bancaire…), des liquidités (placements, em-

prunts… à court et long terme) et des risques (taux d’intérêt,

commercial, devises…). Pour chaque thème, ING propose des

produits adaptés qui permettent de rencontrer les besoins

d’un client. « Vendre la totalité de nos produits à un client

n’a aucun sens, précise Daniel Delmeire, Senior PCM Sales

Manager. Nous devons nous adapter au cas par cas, grâce à

une approche qui permet de bien connaître la société. Dès lors,

ces différents thèmes qui concernent le trésorier sont abordés

au moyen de notre ‘working capital’, la gestion du fonds de

roulement. »

Pour réaliser un scan de ce fonds de roulement, ING va par-

courir les processus des achats, des ventes et des stocks des

trois dernières années pour les lier au bilan. « Nous obtien-

drons de la sorte une première vue sur la structure fi nancière

de la société. Ce scan – dont l’importance est capitale pour les

décideurs – sera ensuite approfondi ne prenant en compte les

trois dernières rotations clients, fournisseurs et stocks. L’équi-

libre ou les besoins de fi nancements apparaîtront automati-

quement. Grâce à un simulateur et des données théoriques,

nous pourrons alors comparer les chiffres à la moyenne du

secteur ou aux principaux concurrents. Il s’agit d’un indica-

teur très précieux pour l’évolution potentielle des ratios. »

Dans un premier temps, l’objectif d’ING consiste à fournir

des pistes de réfl exions à l’entreprise. Et si le processus de

calcul se révèle extrêmement rapide, la réfl exion, elle, doit

se faire sereinement. Le fonds de roulement est un indice

fi nancier essentiel, objectivement révélateur de la politique

fi nancière d’une entreprise et de son profi l de risque. Plus le

fonds de roulement se révèle excédentaire, plus l’entreprise

donne d’elle-même une image rassurante, sécurisante pour

les investisseurs, les clients et les fournisseurs potentiels.

Elle négociera ses crédits bancaires, ses conditions d’achat

et de vente en position forte.

Un indice fi nancier largement positif permet à une entre-

prise d’affronter avec des risques moindres des périodes de

vaches maigres et les fl uctuations du marché. « Le fonds de

roulement est ainsi un instrument de gestion indispensable,

incontournable, qu’il s’agit de maîtriser dans tous ses aspects,

explique Jos Van Lishout, Product Manager Deposits. Un

management attentif et rigoureux développera la solvabi-

lité et le potentiel de liquidité de l’entreprise, en déclenchant

simultanément une réduction des frais fi nanciers. La gestion

dynamique raccourcira la durée du cycle de conversion du

cash pour libérer de la trésorerie, ce qui reste la solution la

plus économique de fi nancer des projets stratégiques! »

Jos Van Lishout: « La gestion dynamique raccourcira la durée du cycle de conversion du cash pour libérer de la trésorerie, ce qui reste la solution la plus économique de fi nancer des projets stratégiques! »

Daniel Delmeire: « Grâce à un simulateur et des don-nées théoriques, nous pourrons comparer les chiffres à la moyenne du secteur ou aux principaux concurrents. Il s’agit d’un indicateur très précieux pour l’évolution potentielle des ratios. »

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Comment dénicher un bon trésorier interne?

P our un CFO désireux de s’adjoindre les servi-

ces d’un trésorier interne, il convient avant tout

de défi nir avec précision ce que l’on entend par

« gestion de trésorerie », conseille Marc Spaey,

Business Unit Specialist chez Manpower Professional. Véritable

fonction du management de l’entreprise, la gestion de trésorerie

est un métier à part entière, qui nécessite un savoir-faire de hau-

te volée. Quand on parle de trésorerie, il est dès lors important

de se rendre compte de toute l’étendue du domaine.

Le concept est en effet très large. Il commence avec des aspects

très basiques, comme le cash management journalier, et s’étend

à des réalités beaucoup plus complexes: la mise en place du cash

pooling international ou la gestion de risques du taux de change,

les fi nancements d’investissements ou de projets… « Une fois la

gestion de trésorerie défi nie, on pourra enfi n cerner le profi l de fonc-

tion adéquat pour le candidat trésorier interne », indique-t-il.

Les degrés de complexité de la trésorerie prendront, eux aussi, toute

leur importance. S’agit-il d’une PME ou d’une multinationale? La tré-

sorerie sera-t-elle centralisée nationalement ou décentralisée inter-

nationalement? Quels types d’activités l’entreprise exerce-t-elle? .

ELARGIR LE CHAMP Bien entendu, le bon trésorier interne maîtrise à la perfection son

domaine. Mais, au-delà de cette évidence, la « perle rare » ne doit

pas uniquement considérer la trésorerie comme un domaine d’ex-

pertise immuable. Il faut pouvoir aisément relier le business, les

spécifi cités et la vie économique de l’entreprise aux problèmes

auxquels celle-ci doit faire face. Il ne faut toutefois pas pour autant

chercher sont trésorier interne au sein du personnel de l’entreprise.

« Je crois que les trésoriers, comme d’autres profi ls spécialisés, sont

éminemment aptes à s’imprégner des particularités de l’entreprise

et du secteur pour lequel ils travaillent. Ils ne doivent pas, à tout

prix, avoir connu leur carrière au sein d’une même société pour en

tenir les comptes. Au contraire, en début de carrière, vivre plusieurs

expériences et différents modes de fonctionnement peut se révéler

enrichissant. Cela permet d’élargir son champ de compétences ».

En Belgique, nous avons connu une période faste en matière

de développement des activités de trésorerie. Les centres de

coordination étaient, à l’époque, en pleine expansion. Or,

aujourd’hui, on constate qu’un nombre considérable de ces

centres ont, soit fermé leurs portes, soit réduit leurs niveaux

d’activité. « Pour l’instant, je dirais donc que ce type d’activité,

et certainement pour ce qui concerne les fonctions interna-

tionales, est un peu moins présent sur la Belgique qu’il n’y a

encore quelques années », explique Marc Spaey.

A côté des demandes en matière de gestion de trésorerie et

du cash-fl ow, Manpower Professional reçoit régulièrement des

demandes au niveau outsourcing et contracting. « Ces missions

font, peut-être, un peu moins partie des responsabilités quoti-

diennes d’un trésorier » Celles-ci concernent des projets plus

FISCALITÉ DOSSIER : GESTION DE TRÉSORERIE

TEXTE : LAURENT CORTVRINDT

La fonction de trésorier et ses attributions varient fortement selon l’organisation, son degré de centralisation, la taille de l’entreprise... Mais certains fi ls rouges n’en existent pas moins quant aux compétences à retrouver sur le CV d’un bon trésorier interne.

Marc Spaey: « Une fois la gestion de trésorerie défi nie, on pourra enfi n cerner le profi l de fonction adéquat pour le candidat trésorier interne. »

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spécifi ques en trésorerie: par exemple, la mise en place d’un

nouveau logiciel de gestion de trésorerie au niveau du groupe,

une entreprise qui souhaite redéfi nir la stratégie trésorerie et

mettre en place de nouveaux outils de gestion… Les périodes

d’intérim s’étendent de quelques mois à un an ou plus.

Selon Gabriel d’Ansembourg, Associate Director chez Robert

Half, qui dit trésorier dit fonction très spécialisée. « En effet,

ces personnes ont, très souvent, assez vite orienté leur carrière

vers la trésorerie, indique-t-il. On peut certainement déterminer

plusieurs origines pour trouver un bon trésorier. Mais le secteur

bancaire me semble toutefois occuper une place privilégiée car

nombre de trésoriers proviennent de ce domaine. Leur avantage

est certainement d’avoir été confrontés à divers types de gestion

de trésorerie. J’en veux par exemple pour preuve la complexité

des produits auxquels ils ont été confrontés dans leur banque.

Cela leur permet d’engranger un know-how bien utile. Pour un

CFO, cette source de candidats n’est pas négligeable. »

Une autre aptitude prend actuellement de l’importance dans le

chef des managers désireux d’engager un trésorier: les connais-

sances fi scales. Un trésorier n’est en effet jamais éloigné de la fi s-

calité. Et la tendance s’accentue, surtout en Belgique. « La structure

fi scale de notre pays est de plus en plus complexe. Nous connaissons

à présent des normes comptables internationales dans la plupart des

entreprises. Et ces normes mettent clairement en avant une intercon-

nexion entre la fi scalité et la trésorerie ». Une constatation renforcée

par certaines nouvelles recommandations, comme celle des inté-

rêts notionnels, qui poussent à créer des structures de trésoreries

présentant un avantage fi scal important

ACTIVER LE RÉSEAULe marché belge est essentiellement tourné vers l’international.

Et dans ce cadre, la vision de la trésorerie peut fortement varier

d’un groupe à l’autre. Il peut s’agir d’une simple fonction de cash

management comme d’une gestion active. Dans le premier cas,

les profi ls seront relativement élémentaires à trouver. « Mais si

l’on parle de grosses pointures de la trésorerie, le nombre limité de

centres décisionnels à Bruxelles va de pair avec leur relative faible

quantité », commente Gabriel d’Ansembourg. De plus, à l’instar

des marchés rares et spécialisés, comme c’est aussi le cas de la

fi scalité, force est de constater que la trésorerie ne semble pas

attirer une majorité de jeunes universitaires.

L’ensemble de ces éléments expliquent en grande partie pourquoi

dans de nombreuses sociétés, même de taille importante, on ne

trouve pas de trésorier en tant que tel. Même si le besoin s’en fait

davantage sentir de nos jours. Si elle n’est pas externalisée vers

une banque, cette trésorerie est alors généralement gérée par le

directeur fi nancier, à ses heures, et de façon plus limitée. Afi n de

recruter des candidats pour une fonction aussi spécialisée, les sé-

lections réactives débouchent souvent sur des résultats mitigés.

« L’idéal consiste à faire appel à un réseau étendu de consultants

qui approchera proactivement ce marché de niche. » Pour répondre

à des besoins ponctuels, les missions d’intérim en trésorerie se

sont développées. Mais elles restent principalement liées à des

implémentations de nouveaux systèmes de trésorerie, à des gros

projets d’investissement ou de fi nancement…

« Par défi nition, la gestion de trésorerie n’est pas forcément cyclique.

À l’inverse, par exemple, de la comptabilité qui clôture les comptes à

chaque fi n d’année. Ici, l’activité est essentiellement liée à de gros pro-

jets. Pour le moment, certains avantages fi scaux liés à la législation

sur les intérêts notionnels stimulent la création, sous nos latitudes, de

plusieurs centres de trésorerie de sociétés étrangères. Afi n de soutenir

le trésorier de la société qui vient s’implanter en Belgique, des missions

d’intérim manager sont à prendre. Et si le travail est bien mené, des

projets en gestion de trésorerie auront tôt fait de naître. L’intérim

management, dans ce secteur, possède plutôt le vent en poupe. »

FISCALITÉ DOSSIER : GESTION DE TRÉSORERIE

« Au-delà des exigences techniques et d’expérience, le

conseil que nous pourrions donner aux CFO afi n d’enga-

ger un bon trésorier tient, presque comme toujours dans

le recrutement, à une question de personnalité et de soft

skills », souligne Gabriel d’Ansembourg. Parmi ces soft

skills, certaines émergent actuellement. C’est le cas, no-

tamment, de la capacité à communiquer en interne. La

fonction de trésorerie se révèle en effet complexe voire

parfois fort technique. Le CFO doit néanmoins s’assurer

que le gestionnaire de trésorerie va parvenir à faire passer

de façon claire les messages essentiels à sa fonction, par-

ticulièrement auprès des non-adeptes de la trésorerie qui

font partie du team de management. « Car aujourd’hui,

le trésorier est davantage orienté business que par le pas-

sé. Il faut, par exemple, parvenir à faire comprendre à un

responsable de production ou de ventes toutes les impli-

cations de son secteur et de ses activités sur la trésorerie. »

CONSEIL N°10: visez les « soft skills »

Gabriel d’Ansembourg: « Afi n de soutenir le trésorier de la société qui vient s’implanter en Belgique, des mis-sions d’intérim manager sont à prendre. »