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FINANCE MANAGEMENT - CFO MAGAZINE - N°07 - MAI 2007 1 EN PRATIQUE > SOMMAIRE N°07 MAI 2007 Dossier Fusions & Acquisitions Les fusions et acquisitions ont le vent en poupe. Pourtant, leur gestion reste un exercice très délicat, et aux résultats plus qu’incertains. Notre dossier décode les tendances caractérisant ces opérations et livre aux CFO les ingrédients pour les conduire avec succès.

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Fusions & Acquisitions

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FINANCE MANAGEMENT - CFO MAGAZINE - N°07 - MAI 2007

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EN PRATIQUE> SOMMAIREN°07 MAI 2007

Dossier

Fusions & Acquisitions

Les fusions et acquisitions ont le vent en poupe. Pourtant, leur gestion reste un exercice très délicat, et aux résultats plus

qu’incertains. Notre dossier décode les tendances caractérisant ces opérations et livre aux CFO les ingrédients pour les

conduire avec succès.

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Fusions et acquisitions: un art difficile

Les fusions et acquisitions ont le vent en poupe. Pourtant, leur gestion reste un exercice très délicat, et aux résultats plus qu’incertains. Avocat associé au département Corporate du cabinet Allen & Overy, Pierre-Olivier Mahieu analyse les tendances caractérisant ces opérations et nous livre ses ingrédients pour les conduire avec succès.

U ne étude de Right Management réalisée voici

quelques années et portant sur les leçons tirées

de fusions et acquisitions montre que l’intégra-

tion du personnel dans la nouvelle entité ne se

déroule sans problèmes que dans 30% des cas. Autre enseigne-

ment: 72% des gens ne comprennent rien ou presque à ce qui se

passe. Dans Fusionner paru aux éditions Village Mondial, Mark

Feldman et Michael Spratt, deux associés de la branche fusions

et acquisitions de PricewaterhouseCoopers (PwC), ajoutent que

plus de la moitié des cadres dirigeants des fi rmes rachetées par-

tent dans les trois ans…

Pire: si, sur le papier, une opération de fusion/acquisition a tou-

jours tout pour séduire, la noce n’amènerait pas les bénéfi ces

escomptés dans un cas sur deux. Une récente étude de DLA Pi-

per confi rme le tableau: seule une opération sur cinq réalisées

ces trois dernières années est jugée réussie. Alors que les fusions

ont pour but de créer de la valeur supplémentaire à l’addition

simple de deux sociétés (1+1=3), il arrive donc que le résultat

d’un regroupement n’obtienne pas le résultat attendu, c’est-à-

dire où 1+1 devient même inférieur à 2.

Et pourtant, les fusions et acquisitions continuent. Au premier tri-

mestre 2007, elles ont même atteint, au niveau mondial, un volu-

me historiquement élevé de 1.130 milliards de dollars, indiquent

les statistiques du cabinet Dealogic. Soit une hausse de 14% par

rapport aux trois premiers mois de l’an dernier, ce qui représente

un rythme annualisé de 8,8% rapporté au PIB mondial. Il s’agit là

d’un niveau proche du ratio record de 10,5% atteint juste avant

l’éclatement de la bulle technologique en l’an 2000.

LES FUSIONS ET ACQUISITIONS SONT VISIBLEMENT UN ART DIFFICILE, MAIS LE CONSTAT NE SEMBLE PAS FREINER LES ACTEURS SUR LE MARCHÉ…Pierre-Olivier Mahieu: « Il s’agit d’un marché relative-

ment cyclique. Quand l’économie tourne au ralenti, c’est

l’encéphalogramme plat, ou quasi. Et quand l’économie va bien,

les fusions et acquisitions redeviennent légion. Nous avons as-

sisté à une poussée presque fi évreuse à la fi n des années ’90 et

au début des années 2000, puis la situation s’est fortement cal-

mée. Aujourd’hui, il y a, à nouveau, énormément d’opérations. »

CETTE NOUVELLE VAGUE A-T-ELLE DES CARACTÉRISTI-QUES SPÉCIFIQUES?Pierre-Olivier Mahieu: « La Belgique vit un phénomène assez

nouveau pour elle, même s’il est déjà bien ancré dans d’autres

pays, à savoir le développement des fonds d’investisseurs spé-

cialisés, que l’on qualifi e habituellement fonds de Private Equity.

Aujourd’hui, une opération sur trois en Belgique prend la forme

d’un Leveraged Buy-Out – ou LBO. Par le passé, une fusion ou ac-

quisition concernait généralement deux sociétés opérationnel-

les d’un même secteur qui souhaitaient, d’une part, se séparer

d’un business qui n’était pas rentable ou sortant de leur cœur

d’activité et, de l’autre, compléter le puzzle de leur portefeuille

d’activités. Désormais, on voit de plus en plus de rachats d’en-

treprises par leur management, en conjonction avec un fonds

de Private Equity. »

QUELLES SONT LES PARTICULARITÉS DE CE TYPE D’OPÉRATION?Pierre-Olivier Mahieu: « L’objectif ultime des fonds de Private

Equity est de revendre leur participation à un tiers après quel-

ques années de présence dans l’actionnariat. Il peut s’agir d’un

autre fonds de Private Equity et, dans ce cas, le management,

qui bénéfi cie fi nancièrement du résultat de la vente des actions,

peut être incité à réinvestir une partie de cette plus-value dans

la nouvelle opération. Il peut aussi s’agir d’autres formes de sor-

tie: cession classique ou introduction en Bourse. Il arrive par

ailleurs que le fonds rachète une société, puis procède à d’autres

acquisitions complémentaires dans le même secteur, en vue de

constituer un groupe plus fort et dynamique – c’est la technique

du Buy & Build – avant de le céder ultérieurement. »

DOSSIER

TEXTE : CHRISTOPHE LO GIUDICE

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COMPARÉ À UNE FUSION/ACQUISITION CLASSIQUE, UN LBO REPRÉSENTE DONC UNE APPROCHE TRÈS DIF-FÉRENTE POUR LE MANAGEMENT.

Pierre-Olivier Mahieu: « En effet, le fait que les managers met-

tent eux-mêmes en jeu des sommes propres – qui représentent

pour eux un montant important, même si elles ne sont qu’une

fraction de l’investissement total du fonds – les responsabilise

dans le succès du développement de l’entreprise. Par contre, lors

d’une fusion classique, l’opportunité pour le management de

passer à une fonction dans un groupe d’envergure supérieure

comporte le risque que génère le dédoublement de fonction.

Exemple: lequel des deux CFO des entreprises fusionnées va-

t-il prendre la fonction dans la nouvelle entité? Il y aura forcé-

ment des frustrations chez l’un ou l’autre, voire les deux si l’on

juge opportun d’aller chercher sur le marché un profi l de plus

haut niveau pour cette fonction. Il faut par ailleurs constater

qu’il existe encore, en Belgique, beaucoup de méconnaissance

sur les possibilités qu’offrent les fonds de Private Equity. Nom-

bre d’entre eux sont en recherche de bonnes entreprises et se

trouvent confrontés à une pénurie de bons dossiers, alors qu’ils

ont énormément d’argent à investir. Or, il existe sur le marché de

très beaux joyaux qui ne sont pas connus et qui pourraient faire

l’objet d’une vente. De leurs côtés, les entreprises ignorent le po-

tentiel que peut offrir un fonds de Private Equity, par exemple

lorsque les actionnaires sont dormants et que le management

est en quête d’un nouveau dynamisme. »

AUTRE ÉVOLUTION CONSTATÉE: L’ACCROISSEMENT DE L’ENVERGURE DES OPÉRATIONS.Pierre-Olivier Mahieu: « On voit survenir de plus en plus de très

grosses opérations à l’échelle européenne, alors qu’elles res-

taient plutôt cantonnées aux Etats-Unis ou au Royaume-Uni

jusque-là. Le marché s’est libéralisé et s’est sophistiqué, avec de

très nettes consolidations – réalisées ou encore à venir – dans

différents secteurs, tels que la banque et les assurances, le phar-

ma, l’énergie, etc. Il y a aussi de plus en plus d’OPA hostiles. Mais

les plus petites structures ne sont pas en reste: comme l’écono-

mie va bien et que le crédit reste bon marché, une acquisition

représente une belle façon de croître et de passer à la vitesse

supérieure de façon plus rapide. »

L’OPÉRATION MENÉE PAR MITTAL SUR ARCELOR EST-ELLE L’ILLUSTRATION QUE LES CHASSEURS PEUVENT DÉSORMAIS AUSSI SE MUER EN PROIE?Pierre-Olivier Mahieu: « C’est le grand défi aujourd’hui, pour les

entreprises mais aussi pour nous, avocats. Les opérations purement

nationales tendent à stagner, voire à diminuer, tandis que les opé-

rations transfrontalières se multiplient. Et nous nous retrouvons

face à des opportunités sur la scène internationale dans des pays

dont nous n’avions pas l’habitude. La montée en puissance des

BRIC – Brésil, Russie, Inde, Chine – commence à se concrétiser. On

l’a vu pour l’Inde avec Mittal ou Tata et pour le Brésil avec InBev. Les

Russes se sont déjà manifestés dans l’énergie et l’acier. La prochaine

étape, ce sera la Chine où d’énormes capitaux sont disponibles,

avec cette particularité que les acteurs se caractérisent par une cer-

taine inexpérience et que le pays connaît toujours une importante

lourdeur bureaucratique. Tout ceci ne change pas fondamentale-

ment les règles du jeu, mais exige d’autres approches. »

COMMENT SE DÉROULE UN PROCESSUS DE FUSION/ACQUISITION?Pierre-Olivier Mahieu: « Longtemps, le processus a été conduit par

le seul acquéreur. Avec, pour résultat qu’au bout du compte, le ven-

deur se retrouvait parfois dépité en raison de différentes complica-

tions pouvant apparaître en cours de route et rendant l’opération,

au terme de la négociation, moins avantageuse qu’initialement

espéré. Ici également, une nouvelle tendance est à pointer, à savoir

la procédure de private action par laquelle le processus repose plus

dans les mains du vendeur conseillé par une banque d’affaires ou

Pierre-Olivier Mahieu interviendra sur le thème du Leveraged Buy-Out et des fonds de Private Equity

le 5 juin prochain à l’occasion d’un petit-déjeuner organisé par l’Union Wallonne des Entreprises.

Information et inscription: www.uwe.be/LBO.html.

Pierre-Olivier Mahieu: « Le fait que les managers met-tent en jeu des sommes propres – qui représentent pour eux un montant important, même si elles ne sont qu’une fraction de l’investissement total d’un fonds de Private Equity – les responsabilise dans le succès du développe-ment de l’entreprise. »

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un autre conseiller fi nancier. Le vendeur se voit ainsi remettre plu-

sieurs offres concurrentes, sur base d’une sélection de candidats,

avec plusieurs étapes de négociation menées en parallèle. Ce type

de procédure est plus lourd mais il aboutit à un résultat plus opti-

mal car il permet de mieux comparer des offres complètes et réel-

lement négociées. »

QUELLES SONT LES ÉTAPES D’UNE PROCÉDURE DE FU-SION/ACQUISITION?Pierre-Olivier Mahieu: « La première étape consiste en une phase

d’approche, de contact préalable, par divers moyens. Par exem-

ple, des concurrents parlent d’un possible rapprochement. Ou via

les banques d’affaire qui passent pas mal de temps à imaginer

des scénarios qu’elles proposent aux entreprises. Si l’approche se

concrétise, elle débouche sur une lettre d’intention ou sur une

convention d’exclusivité. Dans la tête de la plupart des interve-

nants, le deal est alors fait. Mais, juridiquement, ce n’est pas le

cas: s’ouvre alors une période de vérifi cation dans le cadre du

processus dit de due diligence. Les informations préparées par le

vendeur sont placées dans une data room à laquelle accède l’ac-

quéreur ainsi que ses conseillers juridiques, fi nanciers et fi scaux

mais aussi ses experts en GRH, des commerciaux, les assureurs, et

autres selon le secteur et l’activité de l’entreprise. Ce n’est qu’en-

suite qu’intervient la négociation de la convention défi nitive avec,

éventuellement, un mécanisme d’ajustement des prix sur base

des comptes au jour de la cession. Il y aura également mise en

place de garanties de passif, garanties qui, en général, ne sont uti-

lisées que de manière exceptionnelle, disons environ dans un dos-

sier sur dix. La signature de la convention peut être concomitante

avec l’acquisition des actions, sauf s’il se révèle nécessaire d’avoir

l’approbation des autorités de la concurrence, si l’accord de tiers

est requis – par exemple la banque pour certains engagements -,

si un actif immobilier dont l’acquéreur ne veut pas doit être cédé

auparavant, etc. »

QUEL EST LE RÔLE QUE LE CFO DOIT JOUER?Pierre-Olivier Mahieu: « Son rôle est fondamental. Il est rare-

ment à l’initiative du processus, en général lancé par l’action-

naire ou par les responsables du business. Mais la mise en

œuvre de l’opération repose sur le département fi nancier et

juridique. Il s’agit d’un rôle de gestion du projet, en collabo-

ration étroite avec plusieurs partenaires. Outre le fait d’être

impliqué dans la mécanique et la logistique, il a également

un rôle en amont. Plaçons-nous dans le cas d’une entreprise

que l’on vend. Pour organiser la cession et négocier la reprise,

un processus d’audit est mené sur les plans juridiques, fi nan-

ciers, fi scaux et des ressources humaines. Il convient donc que

l’information soit disponible. Le simple fait d’arriver dans une

entreprise et de voir que tout est bien tenu, que les interlo-

cuteurs savent où l’information se trouve, donne une bonne

impression. Par contre, si ces derniers tombent des nues et

ne savent pas répondre aux questions posées, c’est un signal

d’alarme important. Autrement dit, si, en temps normal, le

responsable fi nancier bricole un peu mais que tout fonction-

ne bien, c’est gérable. Cette approche ne tient plus dès lors

qu’on se place dans un processus de cession: que l’entreprise

soit rigoureusement tenue devient à ce moment essentiel.

Tout simplement parce que si, par exemple, le prix est fi xé sur

base d’un multiple de l’EBIDTA, toute erreur dans les comptes

se verra démultipliée. »

QUEL EST LA MISSION DU CFO DE L’ENTREPRISE QUI PROCÈDE À L’ACQUISITION OU À LA FUSION?Pierre-Olivier Mahieu: « Il est exactement l’inverse, à savoir

d’aller appréhender si la société que l’on souhaite acheter

est ‘up to standard’. Il joue également un rôle clé dans le

processus de valorisation et de négociation. Enfin, il peut

avoir à tempérer les ardeurs des commerciaux: on peut

comparer l’opération à l’achat d’une voiture d’occasion.

Quand on vous en parle, elle est toujours belle, puissante

et exempte de tout problème. Mais il faut pouvoir ana-

Pierre-Olivier Mahieu: « C’est le grand défi aujourd’hui, pour les entreprises mais aussi pour nous, avocats. Les opérations purement nationales tendent à stagner, voire à diminuer, tandis que les opérations transfrontalières se multiplient. Cela ne change pas fondamentalement les règles du jeu, mais exige d’autres approches. »

DOSSIER

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lyser ce qui se trouve sous le capot, gratter derrière le

vernis, s’assurer que l’attrait apparent ne cache pas des

difficultés. »

CES OPÉRATIONS SONT-ELLES COMPLEXES À GÉRER POUR UN CFO? Pierre-Olivier Mahieu: « Dans le cas d’une cession de sa pro-

pre entreprise, il s’agit souvent pour lui d’une première. Le

CFO n’est pas toujours directement associé à la négociation

de la cession mais, s’il l’est – que ce soit parce qu’il accom-

pagne les actionnaires vendeurs ou en tant que participant à

un management buy-out –, il est indispensable de se faire as-

sister par des gens qui connaissent bien le processus. Sinon,

on court à la catastrophe. Nous nous retrouvons parfois ainsi

face à des gens très agressifs sur des demandes parfaitement

normales et légitimes, ou qui ne pensent pas à exiger certai-

nes clauses parfaitement habituelles mais dont ils n’étaient

simplement pas au courant. Dans le cas d’une acquisition, si

vous avez déjà vécu le processus une première fois, il est rela-

tivement facile d’identifi er comment il doit fonctionner et de

sentir jusqu’où on peut aller. Paradoxalement, la diffi culté es-

sentielle peut venir de la petitesse de la taille de l’entreprise

ciblée. S’il s’agit d’une PME familiale, le côté émotionnel est

prépondérant et les vendeurs ne sont souvent pas assez au

courant de comment les choses doivent se passer. »

QUELS SONT, SELON VOUS, LES INDICATEURS DE SUC-CÈS D’UNE OPÉRATION DE FUSION/ACQUISITION?Pierre-Olivier Mahieu: « Une fusion ou une acquisition sont

tout sauf une science exacte. Mais disons qu’on peut en

identifi er quatre. D’abord, les ressources humaines. L’impact

sur elles est beaucoup plus rapide que sur la clientèle, par

exemple. Le fait d’assister tout d’un coup à une fuite de ta-

lents, et pas seulement en nombre mais aussi en qualité des

gens qui partent, est clairement un signal d’alerte. Que ce

soit d’ailleurs au sein de la société reprise ou chez l’acquéreur.

Deuxième indicateur: la matérialisation des synergies et des

avantages identifi és par les consultants avant l’opération. Il

s’agit de bien vérifi er que les économies d’échelle sont bien

réelles au plan purement opérationnel. Troisième indicateur:

la survenance de litiges par rapport à des problèmes du pas-

sé ou la réclamation des garanties. Ce sont des signes que

l’opération n’est pas aussi prometteuse qu’elle en avait l’air

au préalable. Mais, à plus long terme, le véritable indicateur

de succès tient à la qualité de l’intégration, tant des équipes

que de la culture d’entreprise. Si, après quelques années, on

parle toujours de l’ex-société A et de l’ex-société B, constitu-

tives de deux clans en interne, c’est mauvais signe. Par contre,

si quelques années après un changement de nom, un client

vous demande: quelle était déjà le nom de l’entreprise aupa-

ravant, vous êtes sur la bonne voie… »

La saine agressivité affi chée par la stratégie d’investisse-

ment des fonds de pension a fait de ceux-ci des acteurs

économiques de première importance. Conçus à l’origine

pour assurer une retraite dorée aux « petits vieux », ils in-

carnent aujourd’hui le nouveau modèle capitaliste: investir

dans des actifs pour une durée déterminée en visant un

rendement optimal, tout en s’accommodant de la pression

croissante en matière de responsabilité sociétale.

Nous sommes bien loin d’un quelconque projet indus-

triel commun, de la mise en œuvre de synergies éviden-

tes voire d’une logique de complémentarité des porte-

feuilles produits. Et c’est là que réside une bonne part de

l’intérêt de ce système: personne n’est à l’abri. Demain,

vous aussi, vous êtes en position de voir un fonds de pen-

sion prendre les commandes de l’entreprise qui vous oc-

cupe. Ou peut-être est-ce déjà le cas, et vous ne le savez

pas! Faut-il crier « au secours »?

Ces investisseurs sans foi ni loi vont régenter l’avenir de

votre entreprise. C’est la mort annoncée d’un projet vision-

naire à long terme. Il faudra vivre avec le froid silence d’un

actionnaire majoritaire lointain… et l’incertitude d’une déci-

sion d’investissement qui ne repose que sur des impératifs

de rentabilité immédiate. Oui mais… cet actionnaire si peu

visible, si peu identifi able, si peu qualifi é dans votre sphère

d’activités… c’est aussi un formidable espace libéré pour la

prise d’initiative et de décision en gestion quotidienne.

Au fond, la prise de participation d’un fonds de pension

dans votre capital n’est-il pas à la fois un gage de solidité

fi nancière pour votre entreprise ainsi qu’un formidable pari

sur ses performances futures? Il y a un impératif: dégager

de la valeur afi n de maintenir la confi ance de l’investis-

seur (et de son sympathique capital). Le défi est excitant!

Chouette! Mon nouveau patron est un fonds de pension…

Jean-Paul Erhard

Humeur

Help! Mon nouveau patron est un fonds de pension…

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La valeur, ce n’est pas qu’une question de prix…PricewaterhouseCoopers Consultant est le plus grand cabinet de conseils fi scaux en Belgique. Un poste d’observation privilégié pour décortiquer l’évolution du marché des fusions et acquisitions et ses nouvelles tendances. Rencontre avec Jan Muyldermans, Partner, et Hugues Lamon, Director, chez PwC.

L es acquisitions sont soumises à la loi de l’offre et de

la demande et à la motivation des acteurs. « Ces ac-

teurs ont des profi ls différents qui conditionnent leurs

approches respectives, souligne Jan Muyldermans.

On oppose les acteurs fi nanciers aux acteurs stratégiques, dont l’ac-

tivité est commerciale ou industrielle. Les fi nanciers: investisseurs

institutionnels, établissements de crédit, Business Angels ou encore

sociétés d’investissement en capital à risque, qu’il s’agisse de Venture

Capital ou de Private Equity. »

Fonds d’investissements belges ou étrangers, régionaux, fédéraux,

tout le monde est sur le pont. C’est peut-être là une des évolutions

des dernières années: la présence des grands acteurs internatio-

naux qui trouvent en Belgique un marché à ne pas négliger. Premier

LBO signifi catif, Ontex en 2002, une opération qui consacrait la re-

prise du marché après le ralentissement initié lors de l’éclatement

de la bulle internet au début des années 2000. Nouveau mouve-

ment d’accélération en 2003, selon Hugues Lamon: « Depuis, on

enregistre un maintien des acteurs stratégiques comme Umicore,

UCB ou Agfa, par exemple ». Et d’enchaîner avec Jan Muyldermans

sur « l’apparition d’un phénomène en croissance, celui des secundary

buy-out. Ce qui signifi e que nous sommes aujourd’hui occupés à tra-

vailler sur des cessions réalisées il y a trois ou quatre ans et dont les

actionnaires souhaitent aujourd’hui réaliser la vente. »

SUR LES CALENDRIERS En quinze ans, le marché a connu plusieurs cycles: une première pé-

riode de cinq ans a rendu les cessions fi nancières inabordables, sui-

vie des années 98-99 synonymes d’un tarissement du marché du

crédit, ce qui provoqua un recours aux acquisitions fi nancières hors

Bourse. Il a donc fallu attendre la correction des valeurs boursières,

amorcée depuis mars 2001. Les approches? Hugues Lamon voit des

cibles différentes pour les deux groupes d’investisseurs: pour les in-

vestisseurs stratégiques, les cibles se trouvent du côté des sociétés

commerciales ou industrielles présentant pour l’acquéreur un po-

tentiel de création de valeur (nouveaux marchés, R&D, know-how,

etc.). « Les critères de valorisation seront fonction des synergies, gui-

dées par les évaluations bilantaires, le cash-fl ow et, dans une moindre

mesure, la capacité d’endettement. Dans ce cas de fi gure, il est clair

qu’il s’agit d’un investissement à long terme. »

Autre approche pour les investisseurs fi nanciers, dont la sortie est

généralement située dans une fourchette de cinq à huit ans. « Les

cibles en Private Equity sont les marchés matures et pour le venture

capital des sociétés de niches à haut potentiel de croissance sur le

moyen terme. Les critères de valorisation diffèrent, la valeur étant

basée sur la capacité d’endettement (cash-fl ow stables et prévisibles)

dans la perspective d’un return sur investissement élevé. »

La pression se marque aussi sur les calendriers « là où il n’y a

pas si longtemps, tout se faisait un peu à tâtons, aujourd’hui les

choses ont bien changé: entre la réception d’un mémorandum

d’information et le terme fi xé pour répondre avec une offre indi-

cative, il n’est pas rare que nous disposions en tout et pour tout de

deux semaines. Aujourd’hui, tout est très organisé, très compétitif

car on a assisté à une grande professionnalisation du secteur. La

raison? La vente contrôlée, assez nouvelle en Europe continentale.

Son avantage: cette approche augmente considérablement la

transparence et nous intervenons pour les diagnostics fi nanciers,

fi scaux et les structures d’acquisition. »

MEILLEURE APPROCHEC’est aussi ce triple diagnostic qui permet de fi xer ce que

tout le monde attend, le « juste prix ». Dans la pratique, on

constate que l’acquisition d’une entreprise et son mode de

fi nancement sont intimement liés alors que, sur papier, ils

peuvent se concevoir de manière isolée. Pour l’acquéreur, la

vision stratégique consiste à anticiper sur le long terme en

envisageant le mode de rapatriement de ses revenus, la sor-

tie de l’investissement et le fi nancement de l’acquisition au

regard de la valeur de ses actions, sa capacité d’endettement

et la situation du marché du crédit.

« Ceci dit, le prix n’est pas une valeur absolue, comme le rap-

pelle Hugues Lamon dans son ouvrage. Le prix refl ète un in-

tervalle de valeurs dans lequel les parties peuvent négocier.

Et l’étroitesse de cet intervalle impose que les termes fi scaux

puissent être valorisés de façon objective. Le solde refl ète alors

DOSSIER

TEXTE : YVES-ETIENNE MASSART

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le facteur subjectif en matière d’acquisition, qui dépend, dans

une large mesure, du contexte dans lequel celle-ci se réalise. »

Hugues Lamon est diplômé de l’Ecole de commerce Solvay.

Il a aussi décroché une Maîtrise en gestion fi scale de l’ULB.

Analyste fi nancier, il est l’auteur d’un ouvrage reconnu dans

la profession. Son « Acquisitions, fi nancement et cessions

d’entreprises » publié chez Kluwer fait autorité dans la pro-

fession. Pour lui, le deal n’est pas qu’une question de prix: « Le

meilleur offrant est aussi celui qui offre la meilleure approche

par rapport au management, car les managers de la société

acquise sont très impliqués. A offre égale, vous remporterez le

deal si vous emportez l’adhésion des managers. C’est encore

plus important si le vendeur reste dans la société. »

BONNE RÉPUTATION Autres critères de succès évoqués par notre tandem: la qualité de

la préparation du dossier, le meilleur package fi nancier proposé

par les banques (et nombre de banques étrangères s’impliquent

fortement), le contrôle du processus (l’approche doit être extrê-

mement professionnelle pour tirer les fi celles) et le management,

notamment en lui proposant la meilleure participation dans l’ac-

quisition. Le fi l rouge: optimiser leur position fi scale et fi nancière.

Aujourd’hui, le marché semble enregistrer une compétition accrue

entre belges et étrangers car le marché belge réagit bien. Logique

quand on voit les chiffres: les étrangers n’ont pas la réputation de

regarder en dessous de 300 millions d’euros. En Private Equity, les

grands acteurs mondiaux n’étaient pas encore trop actifs en Eu-

rope continentale car ils préfèrent opérer dans leur zone géogra-

phique. Pour les Américains, cela reste le cas, mais pour les autres,

la tendance est à l’ouverture. « Les grands joueurs européens regar-

dent la Belgique. Elle a d’ailleurs très bonne réputation malgré sa

petite taille. Ne perdons pas de vue que 60% du PIB belge émane du

secteur des PME. Une catégorie d’entreprises où, par nature, peu de

personnes sont prêtes à la succession. »

Voilà qui permet d’aborder le thème de l’anticipation. Anticipa-

tion de la succession, mais également anticipation de la cession.

« Certaines préparations sont amorcées jusqu’à trois ans avant la

cession, mais il n’est pas rare, lorsque les marchés sont très porteurs,

de voir débouler certains qui veulent vendre trop vite et qui ne sont

pas prêts. Dit de manière crue, beaucoup de gens sentent l’oppor-

tunité de gain rapide! », ce qui aboutit à des ventes précipitées. En

l’absence de vendor due diligence, ce n’est jamais évident.

Le métier historique de PwC, c’est la fi nance due diligence et la

tax due diligence, étendues aujourd’hui aux aspects sociaux,

juridiques et opérationnels. Une équipe de vingt-cinq person-

nes en Tax & Legal, qui ne travaille qu’en fusions et acquisitions,

dont certaines personnes sont passées expertes dans la tactique

de négociation, l’élément clé au moment fi nal. « Nous, comme

d’autres, insistons sur la dimension conseil et y ajoutons donc la

structuration en regardant l’historique et le business plan, pour

s’assurer qu’il fait du sens. Nous avons une division d’advisory, qui

peut assister stratégiquement nos clients avant et pendant l’opé-

ration, mais de plus en plus aussi après l’acquisition, pour surveiller

l’intégration se déroule bien. C’est là une cause récurrente d’échec:

le manque de suivi. »

MIEUX VENDREPositionné à environ 70% du côté des acquéreurs, PwC fait aussi

bouger les choses du côté des vendeurs, qui se rendent compte

que se préparer à la vente quand les marchés ont de l’argent,

c’est surtout se préparer à mieux vendre. On l’a dit, les fonds

d’investissement sont en excédent de liquidités. Les taux d’inté-

rêts sont favorables. Il y a un marché des entreprises familiales

sur le second marché. On assiste à une tendance lourde en ces-

sion d’immobiliers, à un recentrage sur le cœur de métier, une

meilleure gouvernance qui apporte de la professionnalisation

et, de manière assez générale, une amélioration de la vision stra-

tégique. Soit, autant de moteurs d’un mouvement à la hausse

du marché à inscrire probablement dans la durée.

Il faut dire également que le climat fi scal belge est assez por-

teur, pour ne pas dire convaincant. « La déduction des intérêts

notionnels est un instrument fi scal belge très important dans les

processus d’acquisitions. » Et de penser à un exemple typique:

une transaction entre la Suisse et l’Italie pour un montant de

plusieurs milliards d’euros est sur le point de se dérouler via la

Belgique pour une question de déduction d’intérêts notionnels.

Si on y ajoute la déduction des royalties en matière d’Intellec-

tual Property à hauteur de 80%, la directive fusion, les nouvelles

exemptions de précompte mobilier et autres, « on peut dire que

PwC est un ambassadeur de la fi scalité belge! »

Hugues Lamon et Jan Muyldermans: « Nous avons une division d’advisory, qui peut assister stratégiquement nos clients avant et pendant l’opération, mais de plus en plus aussi après l’acquisition, pour surveiller que l’intégration se déroule bien. »

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Optimiser le prix pour le vendeur, minimiser ses risques!

Quel est le rôle du banquier dans un processus de fusion et acquisition? Comment se déroule son intervention et avec quelle valeur ajoutée? Réponses avec Pierre Walkiers, Managing Director chez ING Corporate Finance.

P ierre Walkiers est juriste de formation. Une for-

mation précieuse dans le cadre de ses activités.

« Notre activité de base à nous, c’est le conseil.

Nous sommes un peu structurés comme un ca-

binet d’avocats et tirons d’ailleurs notre rémunération de notre

conseil, à condition qu’il débouche sur un succès de l’opération.

Le client ne doit, au minimum, que couvrir nos frais: ‘no cure no

pay’, dit-on d’ailleurs chez nous. Notre mode de fonctionnement

est donc assez particulier au sein de la banque. »

Dans la plupart des cas, l’équipe de Pierre Walkiers est donc

rémunérée sur base du succès de l’opération, via un « suc-

cess fee » fixé par contrat avec le client et qui porte sur le

mode de rémunération de la banque d’affaires. Un mode de

fonctionnement qui tient à la nature de l’activité, le conseil

stratégique et financier et l’accompagnement du client tout

au long de la négociation. « Mais attention, nous ne nous

substituons pas aux avocats, dont le conseil est précieux dans

les dernières phases d’un processus d’acquisition », dit-il.

Pierre Walkiers insiste bien sur les balises de son interven-

tion par rapport au contexte de la banque: « Notre job n’est

en aucun cas lié au financement, par la banque, du projet

de l’acheteur. Il n’a d’ailleurs peut-être pas besoin de finan-

cement. Et, même s’il avait des besoins en cette matière, le

marché lui offre d’autres possibilités que de se tourner obliga-

toirement vers les institutions bancaires. Il nous arrive donc

très régulièrement de conseiller un client pour lequel ING

n’apportera pas de financement et le contraire arrive tout

aussi souvent. »

Sa plus-value dans un processus de fusion et acquisition:

la coordination générale du processus, un rôle de chef d’or-

chestre pour assembler les compétences de plusieurs ac-

teurs. Raison pour laquelle l’intervention démarre très en

amont. « Et là, on peut y voir une logique: notre réseau et

celui de la banque nous donnent une très grande proximité

avec le marché. Nous sommes très vite informés et nos clients

respectifs savent que nous les connaissons bien. On peut donc

s’asseoir très tôt aux côtés du client pour réfléchir avec lui aux

meilleures pistes stratégiques pour la survie ou le développe-

ment de son entreprise, qui ne passent pas nécessairement

par une F&A. »

EVALUER LA VALEURLa première question posée doit permettre de comprendre

comment la succession s’organise, se prépare, s’anticipe,

poursuit-il. « Comment se compose la famille, qui est intéressé,

comment fonctionne le secteur, vit-il ou non un phénomène de

concentration, etc.? » Autant de questions qui permettront de

valider ou pas la piste de la fusion et acquisition. « Très claire-

ment, nous préférons de loin être en amont pour accompagner.

La cession n’est qu’une possibilité et le processus est lent, sur-

tout dans les sociétés familiales où un, deux, parfois trois ans

sont nécessaires pour concrétiser une première idée. Cela nous

change un peu des processus bancaires où tout peut parfois aller

très vite. Mais c’est notre spécifi cité! Un travail qui exige donc

du métier et une certaine ancienneté pour ne pas dire une an-

cienneté certaine, notamment pour avoir en portefeuille un fl ux

permanent de dossiers pour générer de l’activité lorsque certains

dossiers prennent plus de temps pour arriver à maturité. »

Une fois le processus de cession arrêté, il s’agit alors de met-

tre en œuvre tout le processus, à commencer par les termes

et conditions de l’intervention de la banque d’affaires et les

termes du mandat qui lui est confié. Très rapidement, il s’agit

DOSSIER

TEXTE : YVES-ETIENNE MASSART

« Le tout est de disposer d’un business plan fi a-

ble pour construire ses hypothèses. L’ambition ne doit

pas faire perdre la raison. »

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FINANCE MANAGEMENT - CFO MAGAZINE - N°07 - MAI 2007

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ensuite de se mettre d’accord sur la valeur de l’entreprise qui

est à vendre: « La question tombe toujours très, très tôt et la

vraie bonne réponse est d’évaluer la manière dont le marché

peut évaluer cette valeur sur base d’approches de multiples:

en fonction du secteur, de marchés, de la diversification. »

Pour éventuellement prouver qu’elle vaut plus, la solution

est alors de réaliser un discounted cash flow (DCF): la mé-

thode des flux futurs de trésorerie est très largement admi-

se en matière d’évaluation d’actif et traduit financièrement

qu’un actif « vaut ce qu’il rapporte ». Pour faire simple: cette

méthode consiste à calculer, par actualisation, la valeur

actuelle nette des flux de trésorerie futurs attendus d’une

activité. Dans le cadre d’une transaction, le montant ainsi

déterminé correspond au prix qu’un acquéreur devrait ac-

cepter de payer pour un investissement donné, puisque cet

investissement lui permettra de couvrir le coût des capitaux

(dette et fonds propres) qu’il engage.

BONNE TENSIONUn des principaux attraits de cette méthode est de mettre

en lumière l’ensemble des hypothèses sous-jacentes à une

valorisation (croissance, rentabilité, investissements) et ce,

sur une longue période: les flux de trésorerie sont en effet

modélisés, puis projetés sur le long terme. Dans cette appro-

che, la valeur d’entreprise correspond donc à la somme de

ses cash flows disponibles prévisionnels actualisés au coût

moyen pondéré du capital engagé.

« Le tout est souvent de disposer d’un business plan fiable

pour construire ces hypothèses, précise Pierre Walkiers. L’am-

bition ne doit pas faire perdre la raison. » Les multiples sont

donc à manier avec beaucoup de prudence et davantage

pour valider une estimation. Les multiples boursiers sont

une chose, ceux de transaction une autre, notamment par-

ce qu’ils se basent sur des opérations comparables. Mais il

est parfois malaisé de valider leur pertinence car nombre de

deals échappent à une publication de prix.

« Reste que tout le marché vous le dira: une valeur n’est pas

un prix! Notre mission, c’est d’obtenir que le prix soit supé-

rieur à la valeur. Pour cela, un facteur-clé: la concurrence

entre acheteurs potentiels. Pour obtenir une bonne tension

entre eux, ils doivent être trois ou quatre, pas davantage.

Trop d’acheteurs en compétition pendant trop longtemps, ce

n’est pas nécessairement bon signe alors que, dans la phase

d’information, c’est normal. C’est pourquoi nous n’abordons

le prix et le contrat que le plus tard possible pour que ces

négociations capitales soient très resserrées dans le temps.

L’idéal: 24, 48, 72 heures maximum, quitte à travailler jour

et nuit. » Le meilleur prix sera toujours un paiement cash et

sans garantie, ce n’est pas un secret et tous les indicateurs

sont au vert: la période semble particulièrement bien choi-

sie aujourd’hui pour vendre.

Un processus idéal en 4 phasesPierre Walkiers considère qu’un processus idéal se découpe en 4 phases:

• Une première période d’environ sept semaines doit permettre le déroulement d’un round de préqualifi cation. Une période qui doit être

mise à profi t pour établir les objectifs, pour défi nir ses intentions par rapport au management, pour se mettre d’accord sur la structure

de la transaction, pour élaborer un accord de confi dentialité et établir le « blind profi le » de la société. Autres points à l’agenda de cette

première phase: le memorandum d’information, l’analyse fi nancière, discuter et compléter le business plan commercial, sélectionner les

différents consultants, convenir si nécessaire d’une « commission vendor due diligence », démarrer la constitution de la data room, passer

d’une liste exhaustive à une shortlist d’acheteurs potentiels, fi xer l’agenda des demandes de renseignements et de marques d’intérêt

ainsi que préparer les documents juridiques.

• La seconde période aura la même durée idéale, soit à nouveau environ sept semaines. C’est la première phase intensive, qualifi ée de fi rst

round. S’y échangent les accords de confi dentialité, le memorandum d’information, des propositions indicatives qu’il s’agit d’évaluer. C’est

aussi le moment de compléter la data room, les prévisions fi nancières, l’analyse fi nancière, de fi naliser certains drafts, dont notamment

la Vendor Due Diligence. Objectif fi nal: sélectionner les candidats les plus intéressés et intéressants.

• Troisième phase, le tempo s’accélère. Le second tour doit prendre cinq semaines et a pour objectif d’écrémer la liste des prétendants

sur base de leurs offres indicatives. C’est à ce moment-là que l’agenda fi nal est arrêté. L’accès à la data room est libéré, les informations

toujours plus pointues sont échangées avec les fi nalistes en fonction de leurs attentes, le management est présenté aux fi nalistes et

inversement.

• La quatrième phase est celle de la dernière ligne droite pour aboutir à des négociations et à la conclusion du deal. Une période intense qui

peut s’étaler sur un petit mois, mais dont les derniers jours seront au fi nish. Les offres fi nales sont réceptionnées, évaluées, les conventions

négociées. En fi n de processus, la communication doit se porter vers les autorités qui doivent donner leur accord et on peut même imagi-

ner une communication conjointe vers le marché.